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RÉPUBLIQUE ALGÉRIENNE DÉMOCRATIQUE ET POPULAIRE
ـــــــــــــــــــــــــــعــــــلٌـــــــــم وزارة التــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــ و البــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــحث العــــــــــــــــــــلــــــمــــــــــــً العــــــــــــــــــــــــــــــاٌل
Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique –ـــــــــر بــــلــــقـــــــاٌــدجـــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــامعة أٌب بــكـــ
–تـــــــلمســـــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــان
Université Abou Bakr Belkaïd– Tlemcen –
Faculté des lettres et des langues
Département de français
Filière de français
Mémoire présenté en vue de l’obtention du diplôme de magister
Spécialité : didactique du FLE
Thème :
Analyse du manuel scolaire de français de 2ème
année secondaire.
? Quelle cohérence avec la méthodologie d’enseignement?
Réalisé par : BELLAT Ihcène
Sous la direction de : MAHIEDDINE Azzeddine
Membres du jury :
Pr. SARI MOHAMMED Latifa (Président)
Pr. MAHIEDDINE Azzeddine (Rapporteur)
Pr. FARI BOUANANI Gamal El Hak (Examinateur)
Pr. ALI-BENCHERIF Mohammed Zakaria (Examinateur)
Année universitaire : 2016-2017
REMERCIEMENTS
Je tiens à remercier particulièrement M. Mahieddine Azzedine, pour
m’avoir dirigé dans ce travail. Je le remercie pour sa disponibilité et ses
conseils. Je le remercie également pour sa patience et son aide précieuse,
sans lesquelles ce mémoire n’aurait pu aboutir.
Mes remerciements vont également à M. Ali Bencherif Mohammed
Zakaria, ainsi que mes enseignants de la post-graduation.
DEDICACES
A ma mère,
Ma tante Assia
A ma famille, ma belle famille
A mon mari
Aux papillons du mauvais temps
Je dédie mon travail.
TABLE DES MATIÈRES
LISTE DES TABLEAUX…………………………………………………………6
INTRODUCTION…………………………………………………………………7
1. CONTEXTE DE RECHERCHE………………………………………………11
1.1. Réforme méthodologique et nouvelles orientations……………………………11
1.2. Philosophie factuelle d’enseignement et rapport avec le manuel
scolaire…..…...16
1.3. Présentation du manuel scolaire de la deuxième année secondaire …..…………19
2. MÉTHODOLOGIE DE LA
RECHERCHE………….…………………………24
2.1. L’analyse du manuel scolaire de la
2ème
AS…………………………………...24
2.1.1. Grille d’analyse : Quelles dimensions collectives dans le manuel
scolaire?.........................................................................................................................2
4
…
2.1.2. Grille d’analyse : La tâche/action dans le manuel scolaire et autonomie chez
l’apprenant ……………………………………………………………………….…..25
2.1.3. Grille d’analyse : Les procédés d’aboutissement à la réalisation du
projet……………………………………………………………….…………………26
2.2. Recueil de données par entretien semi-directif
……………………………….27
2.2.1. Objectifs des entretiens………………………………………………………...27
2.2.2. Population d’enquête…………………………………………………………..28
2.2.3. Guide d’entretien ………………………………………………………..……28
2.2.4. Déroulement de l’enquête………………………………………………..…...30
2.2.5. Convention de transcription……………………………………………..……..30
3. APPROCHE ANALYTIQUE DU MANUEL SCOLAIRE……………..…3.1.
3.1.Pédagogie du projet : Quelle dimension collective dans le manuel scolaire ..…..32
Conclusion partielle……………………………………………………………….....40
3.2. La tâche/action dans le manuel scolaire …………………………………..…….41
Conclusion partielle …………………………………………………………………46
3.3. Les procédés d’aboutissement à la réalisation du projet …………….…………47
Conclusion partielle……………………………………………………………….…54
4. LE MANUEL SCOLAIRE DU POINT DE VUE DES ENSEIGNANTS……..55
4.1.Analyse des données des entretiens ……………………………………………..55
4.1.1. Profil des formatrices ………………………………………………………....55
4.1.2. Le recours au manuel scolaire de la 2AS en classe …………………………..56
4.1.3. La dimension collective et collaborative dans le manuel scolaire et sa relation
avec les projets……………………………………………………………………....58
Conclusion partielle…………………………………………………………………59
4.1.4. L’approche actionnelle et le manuel scolaire à travers les projets pédagogiques
et les consignes ………………………………………………………………………63
Conclusion partielle………………………………………………………………….63
4.2.Bilan et propositions didactiques………………………………………………66
Conclusion partielle…………………………………………………………………66
CONCLUSION……………………………….……………………………………71
BIBLIOGRAPHIE…………………………………………………………………75
ANNEXE AU MÉMOIRE…………………………………………………………79
RÉSUMÉ ET MOTS CLÉS …………………………………………...………….102
LISTE DES TABLEAUX
Tableau I :Conventions de transcription de l’oral à l’écrit……………………p26/27
Tableaux II : La dimension collective dans le manuel scolaire à travers les consignes
Projet01…………………………………………………………………………p29/30
Projet02…………………………………………………………………………p30/31
Projet03…………………………………………………………………………p31/32
Projet04 …………………………………………………………………………p33
Tableaux III : 2 Les procédés d’aboutissement à la réalisation du projet
Projet01……………………………………………………………………………p41
Projet02……………………………………………………………………………p42
Projet03……………………………………………………………………………p43
Projet04 ……………………………………….…………………………………...p43/44
INTRODUCTION
La réforme du système éducatif algérien, lancée en 2000, avait pour but d’apporter de
profonds changements et de promouvoir ce secteur stratégique afin qu’il réponde aux
exigences du développement économique, social et culturel du pays. Globalement,
l’entreprise a consisté en une refonte de la pédagogie et des champs disciplinaires, une
réorganisation générale du système éducatif ainsi que le perfectionnement de
l’encadrement pédagogique et administratif (Benbouzid, 2009). Les nouvelles
orientations ont donné lieu à une refonte des programmes dans les différentes matières
et à la conception de nouveaux manuels scolaires. Par ailleurs, le niveau
méthodologique a été marqué par l’adoption de l’approche par les compétences.
Sur ce vaste chantier, la question de l’enseignement/apprentissage des langues
étrangères était primordiale. Lors du discours d’installation de la Commission
nationale de réforme du système éducatif, le Président de la République avait déclaré :
« (…) la maitrise des langues étrangères est devenue incontournable. Apprendre aux
élèves, dès leur plus jeune âge, une ou deux autres langues de grande diffusion, c’est
les doter des atouts indispensables pour réussir dans le monde de demain » (2000)1.
Dans ce cadre, l’enseignement de la langue française a connu des changements
notables, avec l’adoption de nouveaux programmes, une nouvelle méthodologie et de
nouveaux manuels. Ces derniers occupent une place centrale dans le processus
d’innovation. En effet, bien que considéré comme un auxiliaire, le manuel scolaire
demeure le principal outil d’accompagnement de l’action pédagogique, avec ce qu’il
comporte comme supports et activités censés favoriser l’installation des compétences
communicatives chez les élèves.
Ainsi, la mise en œuvre de la réforme a été marquée par l’utilisation de nouveaux
manuels censés être conformes aux nouvelles orientations. Cette réforme a permis
d’apporter un certain renouveau quant au contenu de ces dispositifs d’apprentissage,
permettant ainsi d’inscrire l’enseignement/apprentissage du français dans une
1 Extrait de l’allocution du Président de la République, Abdelaziz Bouteflika, à l’occasion de l’installation de la commission nationale de la réforme du système éducatif. Palais des Nations, Alger, Samedi 13 mai 2000.
7
perspective actionnelle et pragmatique. Ainsi, les manuels scolaires doivent
également« répondre à de nouveaux besoins : développer auprès des élèves des
habitudes de travail, proposer des méthodes d’apprentissages, intégrer les
connaissances acquises à la vie de tous les jours… »(Gérard, Rogiers, 2003 :07).De ce
fait, le livre scolaire devient incontournable en termes d’installation de compétences, il
va permettre aux apprenants de promouvoir leur savoir-faire et leurs connaissances et
leur permettre de les investir dans la vie extra-scolaire. Ceci dit, les manuels scolaires
actuels devraient favoriser la mobilisation de compétences dans et en dehors de la
classe afin de permettre une optimisation des apprentissages.
Dans une optique actionnelle et active de l’apprentissage, Puren (2006) introduit les
deux notions « d’action » et de « tâche » pour faire valoir dans le premier cas toute
action relative à un agir social ou « d’usage » et dans le second un « agir
d’apprentissage » relatif à l’apprentissage scolaire (Puren, 2006:37). Pour que
l’enseignement du FLE soit efficient, il est primordial de tisser un lien entre
l’apprentissage pour des fins scolaires et l’apprentissage pour des fins d’usage social,
autrement dit, une réussite proprement dite ne relève pas seulement du contexte
scolaire de l’apprenant mais s’étend vers son entourage (familial, social…). Si cet
apprenant parvient à se servir de son apprentissage pour atteindre des objectifs sociaux
par exemple, on pourrait dire qu’il a réussi son apprentissage. Les nouveaux manuels
scolaires semblent offrir aux apprenants les outils nécessaires pour parvenir à la mise
en pratique de cette dichotomie d’usage/apprentissage de la langue par le biais des
Projets pédagogiques.
Nous ne pouvons évoquer le projet pédagogique sans mettre en relief la dimension
collective et d’une certaine mesure les tâches collaboratives qui devraient être
effectués par les apprenants. Ces projets sont censés permettre de transformer la classe
en une sorte de microsociété qui offre aux apprenants une implication dans leur
apprentissage mais également de l’autonomie, de l’action et de l’interaction au sein du
groupe. Ceci dit, nous nous interrogeons sur ce que cette réforme a réellement apporté
au niveau de la conception des manuels de français, notamment au niveau
méthodologique. En effet, dans quelle mesure les manuels sont-ils conformes aux
nouvelles orientations méthodologiques ? Correspondent-ils réellement à une approche
8
par compétences ? La question principale qui se pose ici est celle de l’adéquation entre
la conception des manuels et la méthodologie d’enseignement qu’ils sont censés
"refléter" et soutenir ; en l’occurrence l’approche par compétence et la démarche du
projet.
Notre recherche prendra comme cas d’étude le manuel scolaire de la deuxième année
secondaire. Il s’inscrit d’apparence dans ce nouveau flot méthodologique, mais est-ce
que cette réforme reste formelle ou bien touche-t-elle réellement à l’essence même du
manuel ? Il est évident que les nouvelles méthodologies d’enseignement appuient leur
philosophie sur la centration sur l’apprenant et sur l’agir, mais est-ce vraiment le cas
de notre corpus d’étude ?
Notre travail de recherche démarre d’un constat que nous avons fait en tant
qu’enseignant. Pour commencer, c’est le désintérêt que portent les apprenants vis-à-vis
du manuel scolaire. Le contenu de ce dernier ne sollicite que rarement l’apprenant et le
schéma des activités nous fait penser à l’approche communicative. Nous avons
également remarqué une carence concernant les activités de groupe ; mais ce qui nous
a semblé le plus pertinent, c’est la mise en pratique des projets pédagogiques qui ne
semblent pas pousser les apprenants à l’action, d’où le recours au copier-coller. La
seconde raison pour laquelle nous avons choisi ce thème, et qui est plus personnelle,
est le fait que cette thématique nous a permis d’investir nos recherches non seulement
dans le domaine de la didactique des langues étrangères mais aussi les domaines de la
sociologie et de la sociolinguistique.
Nous avons organisé notre travail en trois chapitres. Dans le premier, nous allons
présenter le manuel scolaire qui fait l’objet de notre étude. Cette présentation fera
également le point sur la nouvelle méthodologie d’enseignement et sa mise en œuvre
dans l'enseignement/apprentissage, nous porterons une attention particulière à la
philosophie d’enseignement et l’idéologie éducative algérienne qui a façonné
l’ouvrage scolaire et influencé la mise en place de la méthodologie scolaire. Dans le
second chapitre de notre mémoire, nous allons interroger le contenu méthodologique
du manuel scolaire dans ses rapports avec le paradigme actionnel de l’enseignement
des langues étrangères. L’analyse sera essentiellement qualitative. Nous analyserons
les tâches adressées aux apprenants, leur contexte mais aussi les compétences visées
9
pour voir s’il y a concordance avec le contenu des textes, des consignes et des
questions adressées aux apprenants. Nous allons également nous pencher sur le projet
pédagogique qui occupe une place centrale dans l’enseignement/apprentissage. Cette
analyse du projet pédagogique va nous permettre d’étudier les tâches assignées aux
apprenants et de voir si elles riment avec une perspective actionnelle. Cette analyse
mettra également l’accent sur la dimension collective et collaborative.
Le dernier chapitre de notre travail sera consacré à l’analyse de quelques entretiens
menés avec des enseignants du secondaire. Les résultats de ces entretiens seront mis en
regard avec nos analyses du manuel. Nous établirons un bilan final qui structurera
quelques propositions didactiques que nous avons jugé utiles.
10
1. CONTEXTE DE RECHERCHE
Le premier chapitre de notre travail sera consacré aux concepts méthodologiques mais
aussi idéologiques qui ont façonné de manière évidente la création de l’école
algérienne telle que nous la connaissons aujourd’hui. Nous porterons de ce fait une
attention particulière à la succession des méthodologies d’enseignement et à la
mutation conceptuelle que le système éducatif algérien a imposée.
Nous nous pencherons par la suite sur la question idéologique, valeurs et axiologie
véhiculées implicitement ou explicitement dans les programmes scolaires et par le
biais des manuels et leur impact sur l’apprentissage du FLE. Enfin, nous présenterons
dans ce premier chapitre notre objet d’étude, le manuel scolaire de la deuxième année
secondaire, afin de le situer initialement par rapport à la méthodologie d’enseignement
; nous mettrons en évidence de ce fait, les déclarations des concepteurs du manuel pour
cerner le profil épistémologique visé.
1.1. RÉFORME MÉTHODOLOGIQUE ET NOUVELLES ORIENTATIONS
Le secteur éducatif en Algérie a connu deux grandes réformes, celle de 1976 et celle
de 2003. Le début des années soixante-dix a été marqué par l’apparition d’une
innovation éducative rompant peu à peu avec les reliques de l’éducation colonialiste et
donc de la méthode traditionnelle. C’est Ahmed Taleb El Ibrahimi, avec l’instauration
d’un système éducatif radicalement arabisé, que l’école algérienne s’est complètement
métamorphosée ; l’enjeu identitaire ayant joué un rôle primordial. Cette première
génération de réforme s’est amplifiée avec la vogue du behaviorisme qui, à son tour, a
chaperonné l’approche par objectifs2 ; cette dernière a été adaptée comme
méthodologie d’enseignement en Algérie plus d’une vingtaine d’année. Il est à noter
que cette pédagogie a permis de donner une dimension plus rationnelle et technique au
domaine éducatif dans la mesure où elle a permis d’instaurer des fondements
2 Désormais APO
11
scientifiques à ce secteur, le liant ainsi à la psychologie et au comportement. Au
niveau de l’enseignement, ce qui a marqué la pédagogie par objectifs est le fait de
séquentialiser les apprentissages en termes d’objectif général, d’objectif opérationnel
et de sous objectifs qui doivent être atteints dans une période de temps limitée. Ceci
dit, c’est une pédagogie qui met davantage l’accent sur « ce que l’apprenant devrait
être capable de maitriser à l’issue de la formation » et non pas sur le contenu en tant
que tel (Ait Ameur Meziane ; 2014 :146).En effet, pour une atteinte optimale des
objectifs, les travaux de Bloom ont été adaptés pour dissiper toute confusion pouvant
entraver l’apprenant à les atteindre. L’APO s’est avérée carencée en matière
d’autonomie par rapport à l’apprenant faisant de lui d’abord le sujet d’une expérience
se limitant à des stimulus/réponse, ensuite, cette approche n’a pas rendu compte de son
rôle central dans l’apprentissage ; elle s’est limitée selon Pelpel (2002 :32) « dans un
opérationalisme comportemental, ce qui l’a énormément éloignée de l’acte
pédagogique et l’a transformée en un acte constitué de réflexes conditionnés faisant
abstraction de toute pensée créative chez l’apprenant ». Ces reproches, parmi tant
d’autres, vont échafauder cette remise en question de la conception de
l’enseignement/apprentissage.
En contexte algérien, le début des années 2000, correspond à la fin de la décennie
noire3. Cette période fut marquée par un réveil social brutal et à une intention de
s’ouvrir davantage sur l’extérieur. À cet effet, le gouvernement va procéder à une
révision du système éducatif, essayant de l’inscrire désormais dans une perspective
adaptée aux nécessités du siècle. L’émergence de la théorie constructiviste4 et
socioconstructiviste5 va permettre de donner de l’ampleur à la proportion cognitive et
3 Années 90 marquées par le terrorisme.
4Fondée par le psychologue suisse Jean Piaget, l’approche constructiviste met l’accent sur la construction du
sens par l’apprenant, donc l’interaction entre l’apprenant et l’objet, pour Piaget, l’apprentissage est la recherche
d’équilibre entre le sujet et son environnement. Pour qu’il ait apprentissage, il faut qu’ils s’opèrent deux
processus mentaux, assimilation et accommodation. Il inventa également le concept de conflit cognitif pour
désigner toute situation (problème) pouvant générer chez l’enfant un conflit.
5 Le modèle socio-constructiviste a été développé par Lev Vygotski psychologue russe en 1933, il ajoute au
modèle constructiviste la dimension sociale et culturelle d’où l’appellation de cette théorie. Contrairement à
l’approche précédente, la théorie socio-constructiviste met en évidence les interactions sociales entre l’individu
12
sociale dans l’apprentissage, ils vont permettre de mettre l’accent sur l’apprenant en
tant qu’élément actif responsable de son apprentissage ; les travaux de Piaget
introduisent les notions du conflit cognitif et du développement de l’intelligence
faisant référence à la construction du sens et l’appropriation du savoir de la part de
l’apprenant. Au cœur de cette pédagogie active, où la centration sur l’apprenant a pris
de l’ampleur, s’ajoute une proportion sociale par le biais de la théorie
socioconstructiviste jalonnée par Vygotski et approfondie par Bruner. La théorie socio-
constructiviste a généré un éclatement méthodologique en matière d’enseignement,
donnant naissance à une pratique d’enseignement métissée ou éclectique. La réforme
éducative en Algérie stipule dans les textes officiels son adoption de l’approche par
compétence dans l’enseignement/apprentissage de toutes disciplines confondues
comme le montre cet extrait des référentiels de programmes (2006 :45)
Orientations Pédagogiques pour l’Enseignement Scientifique et Technologique
Afin de préparer nos enfants à affronter ces difficultés et à participer à leur résolution,
l’approche interdisciplinaire s’impose face au cloisonnement des disciplines de plus en plus,
on considère que l’éducation n’a de valeur que dans la mesure où elle rencontre les besoins
des apprenants en les aidant à trouver des réponses à des problèmes de vie réelle qui les
concernent.
L’organisation en disciplines cloisonnées, centrées sur leurs propres objectifs contribue à
isoler l’école de la réalité sociale et économique et des mutations technologiques. Les
disciplines isolées ne peuvent nous donner une image complète de cette réalité et de cette
complexité. En effet, la présentation et l’organisation de l’enseignement en disciplines,
particulièrement au Primaire et au Moyen, risquent de conduire à une connaissance de type
« mosaïque », mal ou insuffisamment intégrée., d’où la place vitale de l’interdisciplinarité
dans l’élaboration des nouveaux programmes, comme conséquence de l'approche par
compétences adoptée pour l'élaboration des nouveaux programmes.
Il est question dans cet article d’abord d’une critique implicite de l’approche par objectifs,
pour les concepteurs du programme, cette pédagogie n’encourage pas un apprentissage
transversal et se limite uniquement à découper les savoirs enseignés sans prendre en compte
et son milieu, qui avant se limitaient aux interactions avec l’objet. Ce modèle devient incontournable dans
l’enseignement/apprentissage de nos jours
13
les véritables besoins des Apprenants. Ils abordent ensuite l’approche par compétence tout en
mettant l’accent sur son caractère interdisciplinaire qui permettra à l’apprenant d’investir des
connaissances multiples en vue de la réalisation d’un projet par exemple. L’approche par
compétence en didactique des langues et cultures :
[…] tend à développer une compétence langagière définie dans chaque séquence
d’apprentissage les quatre habilités linguistiques (C.E, C.O, E.O, et E.E). Si on veut qu’un
élève apprenne à interagir dans n’importe quelle situation de communication qui se présente à
lui, il faut que les contenus et les démarches ciblent le transfert des connaissances
(connaissances que l’apprenant a dans sa langue maternelle ou dans la langue d’enseignement)
et la mobilisation des ressources cognitives, linguistiques, sociolinguistiques, stratégiques et
pragmatiques dans la langue cible (Benhouhou, 2012 :75-76)
Dans l’enseignement du FLE, l’approche par compétences joue un rôle primordial
dans le développement de compétences de communication – la compréhension et
production orale et écrite – mais participe également dans l’investissement d’autres
compétences ; l’apprentissage d’une langue étrangère devient dès lors un processus
complexe dans lequel interviennent plusieurs éléments relatifs au milieu scolaire mais
aussi social. La langue maternelle, par exemple, ne serait plus considérée comme un
handicap pour apprendre une langue étrangère ; loin de là, elle constituera une sorte de
passerelle qui permettra à l’apprenant d’acquérir la langue cible. Nous remarquons
dans l’extrait du référentiel que les auteurs ont abordé l’expression « approche
interdisciplinaire » comme étant une conséquence de l’approche par compétences ;
ceci nous renvoie à ce que nous avons évoqué précédemment par les termes«
d’éclatement méthodologiques ».Les instructions officielles précisent que l’approche
empruntée dans l’enseignement est l’approche par compétences, et font également
référence à la pédagogie du projet qui est considérée de nos jours comme étant une
démarche qui s’inscrit dans la perspective actionnelle. En réalité, l’école algérienne, à
l’image d’autres institutions scolaires internationales, témoigne un fusionnement
méthodologique en d’autres termes un « éclectisme », nous ne parlons plus désormais
d’une seule méthodologie mais de plusieurs.
La refonte des programmes par le ministère de l’éducation nationale, a évidemment
pris en compte le remodelage et la restructuration des manuels scolaires. L’observation
14
des nouveaux livres scolaires du français au secondaire et des manuels utilisés avant la
réforme nous a permis d’établir le constat suivant : il y a autant de ressemblances que
de discordances au niveau de la forme et du contenu des deux générations de manuels.
Prenons le cas du manuel scolaire de la deuxième année secondaire (notre corpus
d’étude) qui à l’image du manuel qui a précédé la réforme semble au premier abord
fade au niveau des couleurs et des représentations graphiques ceci ditl’accent ne
semble pas particulièrement avoir été mis sur le côté esthétique du nouveau manuel.
Avant d’entamer une analyse plus exhaustive de notre objet de recherche, il semble
tout de même judicieux de rappeler que le renouveau méthodologique au niveau des
ouvrages scolaires ne devrait pas uniquement se canaliser sur les contenus vus que la
forme du manuel joue également un rôle non négligeable dans
l’enseignement/apprentissage d’une langue ; sur ce plan, Gérard (2003 :01) précise que
« L’évolution formelle est liée à des éléments sociologiques et techniques. L’élève
d’aujourd’hui, utilisateur principal du manuel scolaire, n’est plus le même qu’il y a quelques
années encore : il baigne dans une société de l’image dynamique et virtuelle. Plus question de
lui proposer un ouvrage statique, en noir et blanc, limité principalement à du texte. Il lui faut
de la couleur, des images, des entrées multiples, des hypertextes…»
On se basant sur la citation Gerard, il semblerait que le contraste à lequel le manuel
scolaire est confronté est le fait de vouloir appliquer une structure ayant un fond
théorique et méthodologique innovant à un contenu qui n’a pas semblé changé, ce
constat a évidemment été fait lors de l’observation de l’aspect stylistique des deux
manuels scolaires de la 2AS d’avant et d’après la réforme.
Notre objet d’étude, le manuel scolaire de la deuxième année secondaire, apriori, a
embrassé l’approche par compétences, et les concepteurs du manuel semblent l’avoir
mis en avant dans l’avant-propos de ce dernier. Nous allons démontrer dans le chapitre
analytique de notre travail les changements que le manuel scolaire de la deuxième
année secondaire a subi les améliorations et les paradoxes observés.
15
1.2 PHILOSOPHIE DE L’EDUCATION ET RAPPORT AVEC LE MANUEL
SCOLAIRE
Il est incontestable que chaque système éducatif est véhicule de valeurs, de philosophie
et d’idéologie. Ces derniers peuvent être formulés en termes de finalités explicitement
exprimées ou bien de manière plus subtile. Dans cette optique, nous suivrons les
propos d’Althusser (1970) en définissant l’école comme un « appareil idéologique
d’état »6. Selon lui « on apprend à l'École les « règles » du bon usage c'est-à-dire de
la convenance que doit observer, selon le poste qu'il est « destiné » à y occuper, tout
agent de la division du travail : règles de la morale, de la conscience civique et
professionnelle, ce qui veut dire, en clair, règles du respect de la division sociale-
technique du travail, et en définitive règles de l'ordre établi par la domination de
classe » (1970-11). Il est évident que la mission primaire de l’école est de transmettre
les connaissances, de former des êtres sociaux capables de lire, d’écrire, de compter et
d’analyser. Mais comme chaque institution étatique, l’école a pour but de modeler les
esprits des individus, de leur inculquer dès leur bas-âge les valeurs de modes de
pensées communes, les façonnant de manière à obtenir des citoyens qui peuvent
coexister et cohabiter harmonieusement. L’école algérienne n’en fait certainement pas
l’exception et on le constate dans les finalités instaurées par le ministère de l’éducation
nationale.
La planification linguistique, par exemple, s’inscrit dans une politique idéologique de
l’Etat Algérien. Nous notons que dans les années qui ont suivi l’indépendance un
changement de statut de la langue française s’est opéré, allant de langue seconde à
langue étrangère. Ce changement de statut a engendré une valorisation voire une
sacralisation de la langue arabe mais en contrepartie une rétrogradation de la langue
française au même titre que l’anglais, l’allemand ou l’espagnol. Ce redressement du
statut de la langue arabe découle d’un enjeu identitaire marquant toujours cette rupture
avec la langue du colonisateur. Les manuels scolaires de langue française au
6 Désormais AIE
16
secondaire témoignent du rapport de force qu’exerce la langue arabe dès la première
de couverture et le désir de l’état de rendre cela indélébile.
Les finalités de l’enseignement/apprentissage en Algérie s’accentuent autour de la
transmission de hautes valeurs telles que l’amour de la patrie, l’arabité, l’islamité et
l’amazighité comme nous pouvons le constater dans les extraits suivants du texte
portant Loi d'orientation sur l'éducation nationale (2008)7 :
« Affermir la conscience, à la fois individuelle et collective, de l’identité nationale, ciment de
la cohésion sociale, par la promotion des valeurs en rapport avec l’islamité, l’arabité et
l’amazighité » […] « former des générations imprégnées des principes de l’Islam, de ses
valeurs spirituelles, morales, culturelles et civilisationnelles » et « d’asseoir les bases de
l’instauration d’une société attachée à la paix et à la démocratie et ouverte sur l’universalité, le
progrès et la modernité, en aidant les élèves à s’approprier les valeurs partagées par la société
algérienne, fondées sur le savoir, le travail, la solidarité, le respect d’autrui et la tolérance et en
assurant la promotion de valeurs et d’attitudes positives en rapport, notamment, avec les
principes des droits de l’Homme, d’égalité et de justice sociale ».
Les trois finalités mettent en avant l’importance qu’accorde d’éducation nationale à la
langue arabe comme étant un pilier de l’identité nationale, dans cette mesure l’état
algérien a œuvré pour l’arabisation radicale du système éducatif algérien dans ce sens,
Taleb Ibrahimi (1997 : 184) affirme que
« L’arabisation a pris, surtout depuis l’accession à l’indépendance des pays de Maghreb, une
signification plus large dépassant l’aspect strictement technique […]. En élargissant cet aspect
à une arabisation-traduction générale qui permettent à la langue arabe de reprendre d’une
manière définitive sa place dans la société et à transposer tous les aspects de la vie quotidienne
communs et spécialisés de la langue étrangère (celle de l’ancien colonisateur) vers le retour à
l’authenticité, de récupération des attributs de l’identité arabe qui ne peut se réaliser que par la
restauration de la langue arabe, élémentaire pour se concilier avec soi-même »
La revendication de l’arabe langue nationale et marque de l’identité algérienne semble
évidemment justifiée et légitime et même avec cette question identitaire capitale l’état
7 Loi n° 08-04 du 23 janvier 2008 portant loi d'orientation sur l'éducation nationale (Journal officiel de la
République algérienne démocratique et populaire).
17
algérien s’est montré exigent quant à l’apprentissage des langues étrangères comme un
moyen d’ouverture sur l’autre.
Les manuels scolaires sont le miroir détourné d’une idéologie, ils reflètent par le biais
des supports qu’ils abordent voire même de leur forme des valeurs axiologiques
profondément ancrés dans les valeurs nationales comme nous le confirme cette citation
: « l’examen rapide des manuels scolaires permet de révéler, dans chaque État
maghrébin, une double expression idéologique : nationalisme dans son contenu
historique et politique, mais arabiste et islamique dans sa finalité philosophique ;
familiale et sociale dans son contenu civique, mais scientifique dans son objectif
pédagogique » (Moatassim, 1992 : 23). Ceci dit, les manuels scolaires algériens
semblent vouloir aborder et présenter un manuel idéalisé à l’apprenant où le savoir en
lui-même qu’il devrait transmettre est mis en abyme. La première fonction du livre
scolaire serait donc de mettre en évidence les valeurs et l’idéologie de l’Etat. De
manière plus concrète, les propos de Moatassim permettraient d’affirmer un constat
que nous avons fait en parcourant les textes de notre corpus d’étude brièvement : le
manuel scolaire de la deuxième année secondaire serait un puits de documents qui
divergent dans des thématiques très variées mais aucune d’elles ne semble converger
vers une culture étrangère et encore moins vers une culture francophone. Aucun
document ne touche à la culture française par exemple ; même les récits de voyages ne
permettent pas à l’apprenant d’embrasser d’autres horizons ou cultures vu qu’ils se
passent majoritairement en Algérie. D’ailleurs, Gérard soutient qu’un manuel devrait
être en corrélation avec les finalités de l’Etat sur un plan explicite et un autre implicite.
Selon lui, un manuel scolaire « doit être au clair avec les valeurs véhiculés dans les
textes de lecture, dans les situations proposées, dans les types d’exemples développés
ou dans les illustrations… » (2003 :65)
Les référentiels de programmes mettent l’accent sur l’interculturalisme, l’ouverture sur
l’autre et sa culture mais le constat que nous avons fait en parcourant les textes du
manuel scolaire de la deuxième AS nous permet de dire que le livre met davantage
l’accent sur la langue, la culture relative à la langue française est mis en toile de fond.
Nous développerons ce constat par la suite de manière plus détaillée.
18
1.3 PRÉSENTATION DU MANUEL SCOLAIRE DE LA 2ème
AS
Nous allons nous focaliser dans cette section sur la présentation du manuel scolaire de
la deuxième année secondaire, une présentation d’emblée formelle mais qui
consolidera peu à peu ce que nous avons évoqué dans les deux chapitres précédents.
Comme nous l’avons déjà mentionné, le manuel scolaire est un outil « qui sert
couramment de support à l’enseignement » (Cuq, 1987 : 161). Certes, notre corpus
d’étude ne fait pas exception, mais qu’en est-il de l’apprentissage ? Avant de
commencer la présentation du manuel scolaire de la deuxième année secondaire, il
serait judicieux d’examiner quelques passages de l’avant-propos adressé aux
utilisateurs du manuel.
« Ce manuel, destiné aux élèves de 2ème
AS pour toutes les filières n’est ni une méthode
d’apprentissage d’une langue, ni un programme. C’est un ensemble didactique ouvert où le
professeur et l’élève pourront puiser les matériaux nécessaires qui leur serviront à réaliser le
programme officiel » Ainsi le manuel dispensera les utilisateurs d’une recherche fastidieuse et
leur offrira un grand choix quand ils auront à adapter, en toute autonomie les
enseignements/apprentissages en fonction de la réalité : niveau, besoin, et motivations.
En somme, ce manuel sera une aide efficace à l’installation des compétences disciplinaires et
transversales […] Cet ensemble d’activités se déroule dans des séquences d’apprentissage
intégrés dans des projets didactiques dont la thématique vise les savoirs civilisationnels…».
(p04)
L’analyse de l’avant-propos du manuel permet de distinguer les orientations
méthodologiques dans le manuel scolaire de la deuxième année secondaire. Nous
remarquons que le livre scolaire est qualifié d’ensemble didactique, qui n’est ni
programme, ni méthode mais bien un recueil de supports qui serviront à aboutir à la
réalisation du programme. Ce type de manuel est considéré du type « ouvert » vu que
sa conception « revient à considérer l’ouvrage comme un support à compléter ou à
utiliser de façon différente selon des contextes spécifique» (Gérard &Roegiers
19
2003:99).Ce type de manuel favorise l’autonomie de l’apprenant, il permet également
aux concepteurs de s’accorder une certaine marge de liberté, appelant ainsi les
utilisateurs à réfléchir sur l’adéquation et l’adaptation des supports au public
d’apprenants. Le recours à l’expression « installer des compétences » nous permet de
situer notre corpus de données dans l’approche par compétences vu que c’est
l’approche proclamée officiellement par le ministère de l’éducation nationale, peu
après ils citent les projets didactiques ce qui va permettre de l’inscrire également dans
le cadre de la pédagogie du projet qui est considérée comme une pédagogie active qui
se base sur le paradigme de l’action; ce métissage méthodologique nous renvoie à ce
que nous avons qualifié d’éclectisme8.
L’aspect esthétique d’un manuel devrait à son tour s’adapter aux exigences du siècle,
comme nous l’avons mentionné précédemment. L’apprenant d’aujourd’hui n’est pas
celui d’hier, vu qu’il vit entouré de l’audiovisuel, des technologies de l’information et
de la communication etc. Pour susciter sa motivation, il faudrait que le manuel effleure
ses horizons et aspirations ; pour cela, l’aspect formel d’un manuel ne devrait pas être
mis à l’écart. En parlant des documents d’accompagnement, le référentiel des
programmes a insisté sur le fait qu’un manuel :
«[…] reste un outil indispensable pour la plupart des disciplines à caractère scolaire, Les
technologies de l’édition permettant de lui garantir une présentation à la fois attrayante et
hautement pédagogique, c’est donc à une nouvelle génération de manuels qu’il faut tendre.
Les manuels confirmeront leur rôle d’auxiliaire des apprentissages auxquels il faudra associer,
par-delà les effets de mode, des supports et/ ou des références graphiques, audiovisuelles et
électroniques, conformes à l’univers dans lequel évolue l’élève » (2006 :21)
En se référant à ces propos, les nouveaux manuels scolaires et donc notre corpus
d’étude s’inscrivent dans cette perspective moderne de l’apprentissage qui, en dehors
de l’aspect pratique et méthodologique, donne une grande importance à l’aspect visuel
et esthétique. Il est question dans cet extrait d’aborder des thématiques qui motivent
l’apprenant (sujets d’actualité), il est également question d’utilisation de supports
graphiques, audiovisuels et électroniques. Ceci demeure théorique dans le cas de notre
8 Le terme éclectisme vient selon Billard, d’un verbe grec qui signifie: «je choisis, je trie, je recueille» (1997: 7)
20
corpus d’étude, vu que l’apprenant et l’enseignant ne disposent d’aucun support audio
ou audiovisuel relatifs au manuel scolaire. Au niveau des illustrations et de la mise en
page, nous remarquons une continuité des schémas précédents dans la mesure où il y a
un manque d’illustration, de graphisme et de couleur.
Comme mentionné par les auteurs du manuel, il s’agit d’un livre scolaire destiné à
toutes les branches (scientifiques, littéraires et langues étrangères), et la question qui se
pose d’emblée : Est-ce que les besoins langagiers, communicatifs et linguistiques sont
les mêmes pour les trois filières ? En réalité ce qui diffère, c’est uniquement le
coefficient et la répartition horaire imposés par le ministère de l’éducation national :
trois heures pour les branches scientifiques, quatre heures pour les classes littéraires et
cinq heures pour la filière langues étrangères. Le référentiel des programmes souligne
le fait que « Chaque filière se différencie des autres filières par l’enseignement de
matières spécifiques et par les volumes – horaires et coefficients attribués aux
différentes matières. Les matières essentielles sont celles qui constituent l’épine
dorsale d’une filière et fondent sa spécificité par rapport aux autres filières. » (2006
:39). En se basant sur ces propos, la branche de langue étrangère par exemple ne
devrait pas avoir le même manuel scolaire que celui des sciences expérimentales.
Pourquoi en mathématiques, en physique ou en sciences naturelles nous retrouvons
deux manuels, l’un destiné à la filière littéraire et l’autre aux filières techniques ?
Certes, parce que les besoins des apprenants ne sont pas identiques ; et ceci devrait être
le cas pour les manuels de français. Ce constat nous mène encore une fois à la
problématique idéologique en Algérie. Nous étudions la langue française pour
communiquer mais pas pour s’ouvrir sur l’autre, nous étudions le français pour le
français mais pas pour sa culture, l’enjeu interculturel reste minime et ceci donne
l’impression que la langue a été dénudée de son essence. L’absence de cette dimension
culturelle finit, comme l’affirme Maurer, par « couper la langue de ses racines
linguistiques, par lui enlever une part importante de son épaisseur, de son passé ; or,
c’est précisément l’aptitude du français à se diffuser hors de ses frontières, à être un
véhicule international puissant, qui se retrouve par la même occultée, occultation qui
enlève aux élèves une motivation possible d’apprentissage » (1997, Cité par
Hammidou 2011 :26). Afin d’avoir un aperçu sur ce que nous engageons, nous allons
21
analyser brièvement la première et la quatrième de couverture de notre manuel. La
première et la quatrième de couverture sont de couleur bleue, au milieu on trouve une
image du port d’Alger peint en blanc, entouré de toitures rouges de constructions.
Dans une vision symbolique, les trois couleurs évoqueraient le drapeau français, la
langue française etc. Ce qui a attiré notre attention également, c’est l’entête du manuel
où il est inscrit en lettres arabes « République algérienne démocratique et populaire »
« ministère de l’éducation nationale » : Ceci peut renvoyer au fait que l’institution met
l’accent sur la langue officielle de l’enseignement qui est l’arabe. Nous remarquons
aussi que le titre inscrit est « français 2 » ce qui ferait penser le lecteur à une méthode
d’enseignement, où il est question d’une suite du précédent manuel, ceci n’est pas le
cas, nous voyons bien les concepteurs le nier dans l’avant-propos.
Le manuel qui nous intéresse fait partie de la première génération de manuels conçus
depuis le début de la réforme. Il se distingue des anciens manuels par l’émergence du
projet pédagogique comme unité structurante. En effet, il se compose de quatre projets
qui se subdivisent en séquences (trois séquences pour le premier, le deuxième et le
dernier projet et quatre pour le troisième). Chaque séquence comprend :
-Une évaluation diagnostique au début de chaque projet.
-Des textes de compréhension de l’écrit suivis de questions.
22
-Des activités complémentaires à l’expression de l’écrit qui ne figurent pas dans toutes
les séquences. Il s’agit de textes, suivis de questions et de consignes de rédaction, qui
servent généralement à consolider des acquis. -Une activité d’expression orale.
-Une activité d’expression écrite.
-Une partie dédié aux points de langue : le lexique, la syntaxe, la conjugaison etc.
-Une évaluation sommative à la fin de chaque projet accompagnée d’une fiche
d’autoévaluation.
-Enfin une rubrique « florilège» à la fin du manuel qui recueille des poèmes
francophones.
Dans ce chapitre, nous avons mis l’accent sur la question méthodologique dans le
domaine de l’éducation, nous avons notamment vu l’impact qu’une idéologie ou une
politique éducationnelle peut exercer sur la pratique d’enseignement de la langue de
manière générale et sur les manuels scolaires de manière spécifique. Nous essayerons
par la suite de focaliser notre attention de manière plus approfondie sur les dimensions
théoriques et méthodologiques qui a marqué la conception des manuels scolaires.
23
2. MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE
Cette section est consacrée à la présentation des fondements et outils
méthodologiques utilisés pour notre recherche. Etant donnée la problématique que
nous avons posée, il était nécessaire de recueillir deux types de données et d’utiliser
par conséquent plusieurs outils méthodologiques.
Dans un premier temps, nous avons procédé à l’analyse qualitative du manuel de
français de la deuxième année secondaire à partir d’une grille d’analyse que nous
avons conçue. Conformément à nos objectifs de recherche, cette analyse du manuel va
s’organiser autour de plusieurs axes qui seront précisés dans la grille.
Dans un second temps, afin de conforter cette analyse du manuel, nous
procèderons à un entretien semi-directif avec un groupe d’enseignants. Le guide
d’entretien que nous avons élaboré vise globalement à tirer des informations sur leur
usage du manuel ainsi que leur point de vue sur sa conception par rapport à la
méthodologie d’enseignement en vigueur.
2.1 APPROCHE ANALYTIQUE DU MANUELSCOLAIRE 9
Afin d’analyser le manuel de français du point de vue de son adéquation avec la
méthodologie d’enseignement, nous avons élaboré une grille d’analyse qui comporte
un certain nombre de critères, que nous avons regroupés en trois axes et que nous
explicitons ci-dessous sous forme de questions. A ces critères correspondent des
observables sur lesquels prendra appui notre analyse.
9 Concernant la grille d’analyse que nous avons établie, nous nous sommes inspiré en grande de l’article publié par MAHIEDDINE A. (2016).
24
2.1.1 QUELLE DIMENSION COLLECTIVE DANS LE MANUEL
SCOLAIRE ?
Dans cette section, notre objectif est de voir, notamment à travers le discours du
manuel, la place qu’y occupe le travail de groupe. Le travail collectif étant une
dimension importante de la pédagogie de projet. Nous analyserons notamment les
consignes des différentes activités afin de voir si elles orientent vers un travail de
groupe. Dans ce sens, nous avons jugé utile de répondre aux deux questions suivantes :
-Est-ce-que les projets pédagogiques incitent à un travail de groupe ?
Les projets pédagogiques permettent-ils aux apprenants une démarche collaborative ?
Est-ce qu’ils permettent selon leur formulation d’inscrire l’apprenant dans une
atmosphère qui appelle à mobiliser plusieurs apprenants pour accomplir une tâche ?
- y a-t-ilau niveau énonciatif du manuel des consignes qui orientent vers un
travail collectif et collaboratif ?
Est-ce que les activités proposées aux apprenants mettent en évidence la notion de
collaboration ? Et est-ce-que cela se fait sentir dans les activités d’expression ? y a-t-il
mention d’un travail de groupe ou cela doit-il être mis en exergue par l’enseignant ?
2.1.2 LA TACHE/ACTION DANS LE MANUEL SCOLAIRE ET
AUTONOMIE CHEZ L’APPRENANT
Dans cette partie du travail, nous allons nous appuyer sur les travaux menés par C.
PUREN (2006), notamment sur la distinction qu’il opère entre l’ « agir d’usage » et l’
« agir d’apprentissage ». Nous allons distinguer entre la tâche qui vise un contexte
scolaire et l’action qui vise un contexte social. Dans cette perspective, nous allons
mener une analyse du niveau énonciatif des projets pédagogiques afin de voir dans
quelle mesure l’enseignement/apprentissage du FLE prend en compte le lien ou la
continuité entre les contextes scolaire et extrascolaire. Pour cela nous allons essayer de
répondre à cet unique indicateur :
25
-Est-ce que les projets pédagogiques incitent les apprenants à un agir social ?
Dans ce chapitre nous allons mettre en lien l’agir d’usage et l’agir d’apprentissage. Il
serait impossible de les dissocier, cependant nous allons nous focaliser sur l’agir social
dans les projets pédagogiques, notion importante dans la nouvelle conception de la
didactique des langues-cultures. Y a-t-il une prise en compte de la dimension sociale
dans les projets pédagogiques ? Prépare-t-on l’élève à l’agir et l’insertion dans la
société ? Cette réflexion est étroitement liée à celle du profil d’apprenant que l’on
cherche à former dans le sens où, comme l’affirme Roegiers (2006 : 60) « C’est le
profil qui relie l’action de l’école aux besoins d’une société donnée, avec ses
caractéristiques sociales, culturelles et économiques ».
2.1.3. LES PROCEDES D’ABOUTISSEMENTS A LA REALISATION DU
PROJET
Dans cette dernière section, nous verrons si les activités et les textes qui figurent dans
notre corpus favorisent la réalisation des projets pédagogiques. Autrement dit, il
s’agira de voir si le projet constitue bien le cadre fédérateur. A cet effet, nous avons
prévu de répondre aux indicateurs suivants :
-Est-ce-que le discours du manuel réfère à des projets à réaliser ?
Vu que notre institution éducationnelle s’inscrit dans l’approche de la pédagogie du
projet, les manuels scolaires devraient véhiculer cette philosophie actionnelle de
l’enseignement. Dans cette perspective, nous essayerons de confirmer que le manuel
scolaire est organisé en termes de projets réalisables, et qu’il incite les apprenants à
l’usage de la langue.
- Y-a-t-il une relation entre les activités et les textes support proposés avec le
projet ?
Les textes de compréhension de l’écrit dans le manuel de la 2ème
AS devraient découler
de la thématique du projet. Est-ce vraiment le cas pour notre corpus d’étude ? Est-ce
26
que les textes peuvent constituer un fond documentaire exploitable par les apprenants
pour la réalisation de leur projet ?
-Y-a-t-il une pertinence entre les activités proposées et les projets ?
Les activités de langue s’inscrivent-elles dans la logique du projet et concourent-elles à
sa réalisation ? Les micro textes qui servent de support aux activités reflètent-ils la
thématique et l’esprit du projet, et permettent-ils une meilleure appréhension de ce
dernier ?
2.2 RECUEIL DE DONNEES PAR ENTRETIEN SEMI-DIRECTIF
2.2.1 OBJECTIFS DES ENTRETIENS
Nous avons choisi d’intégrer l’entretien semi-directif dans notre travail de recherche
afin d’appuyer et de compléter notre analyse du manuel. Ces entretiens semi-directifs
sont donc à but confirmatoire, montreront peut-être des avis divergents du notre.
Cependant, ils constitueront un étayage important qui apportera une vue plus globale et
moins subjective de notre corpus d’étude.
Nous avons choisi de nous entretenir avec quatre enseignantes de français. Ce
nombre nous parait suffisant vu qu’il s’agit d’un « corpus empirique » détaillé par
rapport à notre question de recherche et organisé avec des personnes qui sont censées
apporter un éclaircissement sur le sujet. Il est à noter que les entretiens que nous avons
menés s’inscrivent dans « l’échantillonnage par cas multiples » . Selon A. Pires (1997 :
65), l’échantillonnage par cas multiple s’articule autour « d'une étude exhaustive ou en
profondeur d'un groupe restreint plutôt que d'une vision globale d'un groupe
hétérogène. » Selon lui, le nombre d’échantillonnage ne devrait pas être forcément
important dans le recueil qualitatif de données. Il s’agit dans ce cas d’étudier une
« microsociété », non pas dans le but de « faire un inventaire détaillé » (Pires, 1997 :
7) mais de trouver une « adéquation entre la sorte d'échantillon et l'objet de la
recherche » (Bourdieu, Chamboredon et Passeron, 1973 : 59). Ceci dit, le but derrière
27
ces entretiens est d’étudier les avis d’une petite tranche d’enseignants afin d’apporter
un éclairage par rapport à notre problématique.
2.2.2. POPULATION D’ENQUETE
Les quatre entretiens que nous avons organisés, se sont déroulés avec quatre
enseignantes de français au cycle secondaire. Le choix de ces enseignantes revient au
fait que la majorité du corps enseignant de la langue française au secondaire est
constitué de femmes. Nous avons délibérément choisis d’effectuer ces entrevus avec
des enseignantes de quatre établissements différents.
Nous nous sommes entretenus en premier lieu avec l’enseignante 1 qui enseigne au
lycée Douid El-Arbi dans la commune de Beni Tamou, une région rurale de la wilaya
de Blida.Ensuite, nous avons vu l’enseignante 2 qui enseigne à l’école des cadets
située dans la région militaire de la wilaya. Nous nous sommes entretenus également
avec une troisième enseignante qui enseigne au lycée Ahmed Hammani situé à Oued
Elleug qui est également une zone rurale de la wilaya ; et enfin l’enseignante 4
enseigne dans la commune d’Ouled Yaïch au lycée Houari Mahfoud qui se situe au
centre de Blida. Ceci dit, nous avons délibérément choisi de nous entretenir avec des
enseignantes appartenant à des tranches d’âge différentes et une expérience différente
afin d’avoir un panorama d’opinions.
2.2.3 GUIDE D’ENTRETIEN
Les enseignants avec lesquels nous nous sommes entretenus devaient répondre à
plusieurs thèmes parmi lesquelles la problématique relative à la notion du groupe dans
le manuel scolaire, la notion de la tâche, l’usage de la langue et évidement à la
méthodologie véhiculée dans le manuel. Nous tenterons de connaitre les points de vue
de ces enseignants sur les projets pédagogiques et leur relation avec la nouvelle
approche actionnelle de l’enseignement du français. Pour mener à bien cet entretien
nous avons prévu quelques questions qui caractérisent les différentes dimensions du
28
manuel scolaire, ces entretiens appuieront notre analyse sur la dimension
méthodologique dans le livre scolaire. A partir d’une grille de questions adaptées aux
particularités du manuel scolaire de la 2ème
AS, nos entretiens visent plus
spécifiquement à connaitre l’opinion des enseignants sur les points suivants :
- Le recours au manuel scolaire de la 2AS dans la classe FLE
- La dimension collective et collaborative dans le manuel scolaire et sa
relation avec les projets pédagogiques
- La dimension actionnelle dans le manuel scolaire à travers les projets
pédagogiques et les consignes
Les questions que nous avons posées aux enseignantes figurent ci-dessous. Elles ne
sont pas organisées en fonction d’un ordre précis mais dépendent du contenu de la
conversation :
- Dans votre travail, le manuel est-il indispensable ? est-ce que vous vous
appuyez constamment sur cet outil ?
- Est-ce-que vous vous contentez des textes support et activités qui y figurent
? Si non pourquoi ?
- Les nouveaux manuels scolaires se caractérisent par l’émergence des projets
pédagogiques. Pensez-vous que les projets pédagogiques inscrivent
réellement les apprenants dans une logique collaborative ? (Incitent-ils les
apprenants à la collaboration ?). Pensez-vous qu’en pratique les apprenants
répartissent réellement les tâches pour réaliser les projets ?
- Le manuel vous aide-t-il à faire travailler les élèves par groupes lorsque
c’est nécessaire ?
- Pensez-vous que ces projets inscrivent les apprenants dans une logique
actionnelle ? (Les apprenants sont plus actifs ; l’enseignant est davantage
animateur)
29
-Le projet est-il vraiment le cadre intégrateur ? Autrement dit, est-il
vraiment le but autour duquel s’organise l’ensemble des activités ? Ces
activités/supports du manuel permettent-ils de guider l’élève vers la
réalisation de chaque projet ?
- Qu’est-ce que vous pensez des projets pédagogiques ?
- Pensez-vous que le contenu des projets pédagogiques inspire réellement les
apprenants ?
- Croyez-vous que les manuels scolaires permettent aux apprenants de
s’inscrire dans une dimension sociale, dans la mesure où la réalisation du
projet leur permettra d’investir leurs compétences en dehors de la classe ;
autrement dit, est-ce que ces projets prennent en compte l’agir social ?
- Puisque vous avez enseigné avec les deux manuels scolaires, lequel
préférez-vous et pourquoi ? (Pour ceux qui ont enseigné avec les deux
manuels)
- Pour conclure, qu’est-ce que vous pensez du manuel de manière générale ?
bien sûr en vous basant sur votre expérience ?
-
2.2.4. DEROULEMENT DE L’ENQUETE
Les entretiens que nous avons réalisés avec les quatre enseignantes se sont déroulés de
manière individuelle, dans des salles de classe des établissements. Nous avons dû
adresser une demande d’autorisation aux proviseurs afin de pouvoir accéder aux
établissements et nous entretenir avec les enseignantes. Avant d’entamer notre
entrevue nous avons consacré un peu de temps aux présentations, nous avons
également expliqué globalement aux formatrices le thème de notre entretien, et les
axes sur lesquels allaient s’articuler les questions. La durée des entretiens varie entre
10 et 20 minutes, nous détaillerons dans la partie analytique des entretiens, ces écarts
temporels, nous verrons également les différentes opinions d’enseignants.
2.2.5. CONVENTION DE TRANSCRIPTION
30
Après avoir réalisé les enregistrements, nous avons procédé à la transcription
orthographique des données audio. Nous avons opté pour une convention de
transcription assez simple, notre souci majeur était de nous focaliser sur le sens et le
contenu des dialogues et non pas sur la langue en tant que telle. Le tableau ci-dessous
présente les normes de transcriptions que nous avons utilisées.
Signe Signification
+, ++, +++, 5 sec, 9 sec 1sec, 2secs, 3 secs
Majuscule Ton appuyé, accentuation
[ Faux départ, rupture de l'énoncé ou mot
inachevé
Rire, soupir, Description d'aspect du comportement
verbal
Guillemets Discours rapporté
Chevauchement Énoncé qui se chevauche (chaque énoncé
est souligné)
Le ne de la négation souvent omis à l'oral Est restitué entre parenthèse
Euh, Hésitation plus au moins longue
Redondances Répétitions du même mot dans les
hésitations
Traduction De l’arabe au français. L’énoncé est mis entre parenthèses
(th-ث) (h-ح) (kh-خ) (dh-ذ) (r²-ر ) (dh-ظ)
Transcription de quelques phonèmes de (3-ع) Les autres phonèmes de l’arabe
l’arabe au français existent dans le système de la langue
cible
31
«Dis-moi et j’oublierai, montre-moi et je me souviendrai, implique-moi et je comprendrai. » Confucius
3. APPROCHE ANALYTIQUE DU MANUEL SCOLAIRE
Les manuels scolaires ne sont évidemment pas l’unique source d’activités et de textes
dont peut se servir l’apprenant durant son cursus scolaire ; notamment avec
l’avènement et l’intensification du recours aux technologies de l’information et de la
communication10
. Néanmoins, ils demeurent des guides pratiques, une source de
support toute prête, à la portée de l’élève. Ainsi, le manuel est supposé offrir une
multitude de textes et de thématiques visant à susciter leur intérêt et leur offrant une
compréhension plus vive, plus simple et surtout plus active de la langue.
Dans cette troisième partie de notre travail de recherche, nous allons nous pencher sur
les aspects méthodologiques de l’enseignement du français et voir comment ils se
reflètent dans le manuel scolaire de la 2ème
AS. Nous allons, dans cette optique, mettre
en œuvre une analyse qualitative du manuel.
3.1. PEDAGOGIE DU PROJET : QUELLE DIMENSION COLLECTIVE DANS
LE MANUEL SCOLAIRE ?
Les nouvelles méthodologies d’enseignement portent un intérêt majeur aux travaux
que les apprenants peuvent accomplir en groupe. Tel est l’objectif de la pédagogie du
projet, cette méthodologie d’enseignement/apprentissage qui a pour fondement
théorique le socioconstructivisme de Vygotsky. En effet, elle encourage le travail
collaboratif, la mise en interactivité des apprenants, de manière à susciter une
dynamique de co-apprentissage. Cette méthodologique d’enseignement trouve ses
origines dans les travaux du pédagogue américain John Dewey qui a proposé le
concept du « learning by doing ». Comme le souligne Perrichon (2008 : 85) « Les
conceptions fondamentales de Dewey reposent sur le caractère irremplaçable de
10 Désormais TIC
32
l’expérience. Son mot d’ordre «learning by doing», apprendre en faisant, contient en
germe les fondements d’une approche actionnelle de l’enseignement/apprentissage »
La mise en avant d’interactions apprenant/apprenant, apprenant/milieu social dans la
pédagogie sociale, renforce d’une part la socialisation des apprenants en leur offrant la
possibilité de côtoyer l’altérité, mais aussi d’aiguiser leur sens de la responsabilité et
de collaboration. C’est une méthodologie qui comporte en soi des enjeux individuels,
sociaux et
Educatifs. Dans ce sens, Chapperon affirme que « le projet relève de trois pôles en
interaction permanente : affectif, social et rationnel » (Ibid :103). Dans ce chapitre,
nous allons analyser la dimension collective et collaborative dans le livre de 2AS et
pour ce faire nous allons recourir à la grille d’analyse que nous avons détaillée
précédemment.
-Est-ce que les projets pédagogiques incitent à un travail de groupe ?
L’orientation vers le travail collectif devrait apparaitre d’emblée dans les titres de
projets. Les intitulés peuvent expliciter dès le début qu’il s’agit d’un projet à réaliser
au sein d’un groupe et non pas un projet individuel. L’importance des activités de
groupe au sein des projets pousse les enseignants à accorder une importance
particulière à la constitution des groupes, refusant qu’un apprenant fasse le travail
individuellement.
Les projets de notre manuel scolaire se présentent comme suit :
1- Concevoir et réaliser un dossier documentaire pour présenter les grandes
réalisations scientifiques et techniques de notre époque.
2- Mettre en scène un procès pour défendre les valeurs humanistes.
3- Présentez le lycée, le village, la ville ou le monde de vos rêves, pour faire
partager vos idées, vos aspirations.
4- Mettre en scène un spectacle pour émouvoir ou donner à réfléchir (classes de
lettres).
33
Le projet didactique est une tâche collaborative qui devrait dans sa normalité susciter
une grande motivation de la part des apprenants, il est apparent que le premier, le
second et le dernier projet ne font pas allusion à un travail de groupe, les destinataires
effectifs ne paraissent pas dans la formulation des intitulés des projets, l’énonciation
reste floue puisque les verbes sont à l’infinitif et cela devient presque impersonnel, on
n’a pas l’impression que la consigne du projet s’adresse à un groupe apprenants. Le
troisième projet par contre s’adresse directement aux apprenants par l’utilisation du
mode impératif à la troisième personne, pourquoi est-ce donc ce contraste ? Pourquoi
recourir à l’infinitif pour rédiger trois intitulés de projets didactiques et à l’impératif
dans un autre. Un changement léger en modes verbaux peut marquer une différence ;
dans le troisième projet par exemple, l’apprenant non seulement se sent ciblé mais
aussi motivé vu que le contenu du projet touche son univers personnel, son vécu, ses
rêves et lui permet une projection dans le futur. Ce recours à l’impératif à la troisième
personne peut référer à un groupe comme à un seul apprenant. Nous confirmerons ce
constat dans le chapitre suivant en comparant l’emploi des pronoms personnels dans
les consignes.
- y a-t-il au niveau énonciatif du manuel des consignes qui orientent vers un
travail collectif et collaboratif ?
La formulation de questions dans un manuel scolaire devrait être précise. Le public
ciblé doit également être mis en évidence. Nous avons évoqué avant le recours à
l’impératif dans la formulation du troisième projet cependant nous n’avons pas conclu
s’il s’adressait à un seul apprenant ou bien à un groupe, dans cette perspective nous
allons essayer d’analyser les consignes dans le manuel scolaire. Généralement les
consignes qui font référence à un travail de groupe sont dans les activités de
production que ce soit orales ou écrites, ceci dit nous dresserons un tableau qui
illustrera de manière exhaustive les consignes adressées aux apprenants dans les quatre
projets, nous dresserons un contraste entre les activités qui ciblent un seul élève et les
activités qui ciblent plusieurs et qui suscite une collaboration entre pairs.
34
Projet 1 : Concevoir et créer un dossier documentaire pour présenter les grandes
réalisations scientifiques et techniques de notre époque
Consignes ciblant un seul apprenant Consignes ciblant un groupe
d’apprenants
- Ecrivez un texte de quelques - Organiser un débat :
phrases où vous expliquerez La classe est divisée en deux
l’utilité d’internet dans la vie groupes un rapporteur désigné,
moderne. chacun des deux groupes doit
- Utilisez un dictionnaire pour prendre en charge un thème et doit
définir oralement, à l’intention de l’expliquer aux autres….
voscamarades, les notions Expliquez pourquoi certains
suivantes ; air, temps, climat, etc. apprécient la musique
- Etudiez le document suivant « classique » expliquez pourquoi
ensuite réalisez un dossier certains préfèrent la vie à la
documentaire sur l’un, deux, voire compagne etc.
trois satellites de l’ONU…
- Voici quelques sujets d’exposés
préparez la documentation et
élaborez
les grandes lignes d’un exposé oral
selon votre choix…
- Préparez un document destiné à
vos camarades pour leur rendre
compte des idées que vous avez
retenues à la suite de votre étude
du texte de A. Jacquard …
- Expliquez clairement et
brièvement ce que vous avez
compris à la lecture de ce texte.
- En vous aidant de votre cours de
35
sciences naturelles, rédigez un
texte qui soit à la fois informatif et
explicatif sur le thème de votre
choix
Comme l’atteste ce tableau, la quasi-totalité des consignes de production n’affichent
pas, au niveau énonciatif, une orientation vers un groupe d’apprenants. Seule une
activité mentionne clairement qu’il s’agit d’un travail de groupe. Concernant cette
activité, nous avons remarqué une incohérence : Le premier projet est consacré au
texte scientifique « explicatif » mais cet exercice se focalise sur l’argumentation ;
d’ailleurs il est mentionné clairement qu’il s’agit d’un débat. Ce choix d’activité nous
parait inapproprié vu qu’il peut créer des amalgames chez les apprenants entre le
discours explicatif et argumentatif.
Projet 2 : Mettre en scène un procès pour défendre les valeurs humanistes
Consignes ciblant un seul apprenant Consignes ciblant un groupe
d’apprenants
- 1/A la manière de l’Emir - A votre tour, à partir de l’étude de
Abdelkader, faites l’éloge d’une ces deux textes et de leurs
personne héroïque… contenus, simulez un débat en
2/ A votre tour, rédigez un classe sur le nucléaire
plaidoyer pour la protection et la
sauvegarde du patrimoine
national…
- Ecrivez une lettre pour dénoncer la
dérive scientifique, vous parlerez
par exemple de vos préoccupations
à propos du clonage humain…
- Résumez le texte
36
- En vous aidant du texte suivant,
composez un texte dans lequel
vous dénoncerez des dangers qui
représentent les OGM
Le texte argumentatif représente un support didactique très efficace pour nourrir
l’esprit critique des apprenants, et développer leurs compétences argumentatives.
Selon Plantin (1991) :
« L’argumentation fait partie de notre vie quotidienne. (…) chacun de nous, par ailleurs, à
divers moments, en diverses circonstances, est amené à argumenter, qu’il s’agisse de plaider
sa cause, de justifier sa conduite, de condamner ou de louer amis, adversaires, hommes publics
ou parents de peser le pour et le contre d’un choix ou d’une décision. Et il est la cible
d’arguments développés par d’autres dans les mêmes contextes, sur les mêmes sujets »
(Plantin, 1991 : 91)
Par ailleurs, le texte argumentatif est le type de support qui suscite la motivation et
l’implication des apprenants. Il permet de nourrir les dialogues, les débats et de créer
des situations qui impliquent la participation de plusieurs apprenants. Comme le projet
précédent, le projet associé à l’argumentatif manque d’activités dédiées à un groupe
d’apprenants.
L’activité qui figure dans la deuxième colonne « À votre tour, à partir de l’étude de
ces deux textes et de leurs contenus, simulez un débat en classe sur le nucléaire » reste
tout de même sous-entendue il y aucune allusion explicite au groupe mais l’expression
utilisée « simulation d’un débat » implique impérativement la participation d’autres
apprenants, voilà ce qui nous a permis de la classer dans cette colonne.
Projet 3 : Présentez le lycée, le village, la ville ou le monde de vos rêves pour faire
partager vos idées, vos aspirations
Consignes ciblant un seul apprenant Consignes ciblant un groupe
d’apprenants
- Racontez un voyage en respectant -Travail de groupe : En vous servant
37
l’ordre chronologique
- A votre tour, rédigez le récit d’un
voyage qui vous a marqué …
- Rédigez un petit texte sur votre région et
les changements qui y ont eu lieu ces dix
dernières années…
- En vous inspirant du texte « carnaval de
Venise » et en vous aidant du texte « de
Maghnia à el Kala » rédigez un texte
publicitaire qui invite les gens à visiter
Oran…
- Rédigez un récit d’anticipation …
- Faites la fiche de lecture de cette
nouvelle selon la fiche méthodologique
da page suivante
- Racontez votre lever ! …
- Faites le récit d’un moment qui vous a
comblé de joie : repas, fête, rencontre,
promenade…
- Racontez une séance de travail en
groupe ou une activité de votre choix
- Racontez le moment où vous pouvez
enfin vous consacrer à vos loisirs
référés, soit en famille ou avec des amis
- Dans vingt ans la vie aura peut-être
changé sur la terre. Imaginez des
situations ou des lieux qui n’existent pas
encore mais où vous aimeriez vivre plus
tard. Présentez-les à la classe
qu’une carte géographique, tracez
l’itinéraire qui correspond au
programme OMRA
- Cette nouvelle pourrait facilement
être adaptée sous forme de pièce de
théâtre. Faites cette adaptation et
interprétez-la
38
La première activité de groupe que nous avons classée dans la colonne de droite ne fait
pas partie des activités proposées en production écrite ou orale mais elle figure comme
activité dans « le texte supplémentaire ». Nous l’avons inscrite comme activité de
groupe vu la mention explicite « travail de groupe ». Il s’agit d’ailleurs de l’unique
activité dans le manuel scolaire qui mentionne explicitement « travail de groupe ». La
deuxième activité requière l’adaptation et le jeu d’une pièce théâtrale, ce type
d’activité nécessite impérativement un groupe d’apprenants, néanmoins une
exclamation découle du fait d’avoir proposé une réalisation d’une pièce de théâtre
avant même que le projet dédié au théâtre ne soit entamé !
Projet 4 : Mettre en scène un spectacle pour émouvoir et donner à réfléchir
(classes de lettres)
Consignes ciblant un seul apprenant Consignes ciblant un groupe
d’apprenants
- Adaptez ce texte à la scène. Complétez - Jouez la scène
avec des didascalies qui indiqueront le
décor, les jeux de scènes, les
accessoires. Précisez le ton de chaque
réplique. Cherchez-en l’intonation
- Choisissez parmi les sketchs une scène
et imaginez la suite que vous rédigerez
- A partir des expressions gestuelles
suivantes, écrivez un sketch que vous
jouerez en cherchant le ton juste
- Résumez un conte traditionnel sous la
forme d’une synopsis puis transposez-
le monde moderne ou dans un univers
futuriste. Choisissez un court extrait et
39
essayez de le scénariser
Les textes littéraires y compris le théâtre sont proposés exclusivement aux classes de
lettres et de langues étrangères. Comme nous le remarquons, les activités de groupes
restent rares dans le manuel scolaire. L’unique activité de groupe proposée dans ce
projet « jouez la scène » est présentée de manière floue vu que beaucoup de détails
sont manquants y compris la pièce en question qui aurait pu être proposée par les
auteurs du manuel. A l’image du texte argumentatif, le théâtre permet un apprentissage
ludique et vif de la langue puisqu’il met en action plusieurs compétences. Selon Kasmi
(2011 :117) :
« Pendant le cours de langue étrangère, l'apprenant reçoit un bagage linguistique censé lui
permettre de communiquer dans cette langue étrangère, mais il a rarement l'occasion de
mettre en pratique ses acquis en dehors des moments consacrés à l'expression orale. Nous
pouvons dire que le théâtre peut être source d'apports considérables dans un cours de langue
étrangère puisqu'il est basé sur l'échange des paroles en situations et non pas sur un savoir
passif de la langue. La compétence orale bénéficie particulièrement du travail effectué en
classe par les apprenants ; cela implique dans la majeure partie des cas un travail de
groupe.».
A l’image de cette citation nous pourrons affirmer que le texte théâtral mis à la portée
des apprenants offre un moyen incontournable dans la réalisation de tâches
collaboratives , cependant, la thématique n’est pas exploitée de manière à permettre
aux apprenants de bénéficier de ce privilège, on le voit dans le tableau il n’y a qu’une
seule activité dédiée au groupe, une activité qui demande beaucoup d’efforts de la part
de l’enseignant et des apprenants, et qui manque de détails cruciaux qui permettent son
aboutissement.
40
Conclusion partielle
Hormis l’effort personnel fourni par les enseignants pour simuler des situations de
communication qui favorisent les interactions en classe de FLE, le manuel scolaire ne
semble pas offrir un terrain facilitateur aux enseignants et apprenants. D’après notre
analyse consacrée aux consignes, nous avons pu constater que la panoplie d’activités
dédiée aux apprenants s’inscrit toujours dans la logique de « l’agir sur l’autre » au lieu
de « l’agir sur et avec l’autre » (Puren 2006). Nous avons également pu remarquer que
le recours à la deuxième personne du pluriel ne désigne nullement un groupe mais un
seul apprenant. En ce qui concerne la dimension collaborative, on remarque qu’elle est
totalement absente du discours du manuel ; aucune activité ne fait allusion à une
entraide ou une collaboration entre les apprenants pour réaliser une tâche. Dans le
cadre de l’approche par compétences, nous pouvons dire que la notion de
« compétence »11
n’est pas respectée vu que les consignes demandent aux apprenants
de réaliser des tâches dont les compétences ne sont pas encore installées comme nous
l’avons vu dans le deuxième et le troisième projet.
3.2 LA TACHE/ACTION DANS LE MANUEL SCOLAIRE ET AUTONOMIE
CHEZ L’APPRENANT
Mettre un apprenant au centre de son apprentissage, lui attribuer des tâches à
accomplir, relève d’un enseignement/apprentissage actifs. La notion de la tâche et de
l’action change constamment de sens avec la succession des méthodologies
d’enseignement. Selon Puren (2006) chaque méthodologie d’enseignement avait sa
perspective actionnelle. De la méthode traditionnelle « grammaire traduction » à la
« pédagogie du projet » et « l’approche actionnelle », les apprentissages favorisaient le
recours à l’agir, avec le changement de paradigmes qu’impose notre siècle la tâche en
milieu scolaire est devenue un incontournable pour un apprentissage efficace et surtout
productif à long terme. Vu que nous sommes dans une étude de la dimension
méthodologique dans le manuel scolaire, nous avons prévu de nous référer aux travaux
11 Vu l’ambiguïté du concept de compétence nous avons choisis de la définir comme étant « un point d’arrivée
marqué par un niveau de haute performance » Hassani.Z (2013 :16)
41
menés par Puren (2006). Ce chapitre va s’articuler autour de l’usage et de
l’apprentissage de la langue, deux dichotomies qui expriment une ambigüité quant à
leur application. Nous nous focaliserons également sur la notion de l’autonomie dans
le manuel scolaire, notion fondamentale dans les nouvelles méthodologies
d’enseignement/apprentissage.
Selon Puren (2006 :37), on distingue deux types d’agir en contexte scolaire, un agir
d’apprentissage auquel il attribue le terme de « tâche », et un agir d’usage à lequel il
attribue le terme « action ». Le premier renvoie à un agir scolaire dans la mesure où les
objectifs qui doivent être atteints relève d’une réussite dans le milieu de la classe, la
tâche est définie selon le CECRL comme étant « orientée vers une production ou un
résultat : «La tâche est un ensemble d’actions finalisées dans un certain domaine avec
un but défini et un produit particulier. » (CECRL :121) et le second renvoie à un usage
social de la langue, dans la mesure où le but qu’un apprenant doit atteindre est sa
réussite en dehors de la classe ou en milieu social, ceci dit nous appuyons le fait que la
classe constitue en soi une communauté qui représente quasiment les mêmes modalités
de fonctionnement que la société. Il est donc important que
l’enseignement/apprentissage mise sur la corrélation entre l’agir d’usage et l’agir
d’apprentissage, par exemple la communication en classe de langue ne devient pas une
fin en soi mais un moyen pour accomplir un acte social et pragmatique ; dans cette
optique nous définissons la perspective actionnelle comme étant « le passage du
paradigme de la communication au paradigme de l’action. On ne communique plus
seulement pour parler avec l’autre mais pour agir avec l’autre. » Bagnoli, Dotti (2010
:04)
Les manuels scolaires devraient mettre l’accent davantage sur l’agir d’usage, un agir
qui permettra aux apprenants de se servir de la langue comme un dispositif pour
atteindre des objectifs plus féconds que la communication en soi, « La communication
en langue étrangère se pense désormais en termes d’usage professionnel, ce qui
nécessite d’autres compétences. Travailler dans une langue étrangère demande une
adaptation à la culture de l’autre pour communiquer mais aussi pour aller au-delà,
42
réaliser des projets en commun et mener à bien l’action collective. Cette action
commune est ainsi au cœur de la perspective actionnelle… » Riquois ( 2010:139)
La pédagogie du projet est une méthodologie qui favorise par excellence l’usage de la
langue ou l’action, vu que les apprenants vont, par le biais de la langue, atteindre leur
objectif de départ qui est la réalisation du projet dans cette perspective Perrenoud
(1999) soutient qu’un apprentissage par projet est :
– est une entreprise collective gérée par le groupe-classe ;
– s’oriente vers une production concrète (au sens large) ;
– induit un ensemble de tâches dans lesquelles tous les élèves peuvent s’impliquer et jouer
un rôle actif, qui peut varier en fonction de leurs moyens et intérêts ;
– suscite l’apprentissage de savoirs et de savoir-faire de gestion de projet (décider,
planifier, coordonner, etc.) ;
– favorise en même temps des apprentissages identifiables (au moins après coup) figurant au
programme d’une ou plusieurs disciplines.
Nous allons dans ce propos analyser les projets proposés aux apprenants afin de voir
si leur achèvement aboutira à l’atteinte d’un objectif social. Cependant, il ne faut pas
oublier que selon Puren (2006 : 39), « la perspective actionnelle » est une « relation
entre action de référence et tâche de référence ».Il serait donc vain de vouloir
restreindre l’action à l’usage social uniquement tout en ignorant la dimension de
l’apprentissage, d’ailleurs le Cadre européen commun de référence pour les langues
souligne le fait qu’« Il y a « tâche » dans la mesure où l’action est le fait d’un (ou De
plusieurs) sujet(s) qui y mobilise(nt) stratégiquement les compétences dont il(s)
dispose(nt) en vue de parvenir à un résultat déterminé ». La perspective actionnelle
prend donc aussi en compte les ressources cognitives, affectives, volitives et
l’ensemble des capacités que possède et met en œuvre l’acteur social. » (2005: 15).
Ceci dit on remarque cette différenciation entre action et tâche, et la mise en relief sur
le caractère complémentaire des deux. Pour une étude optimale des projets
pédagogiques, nous avons prévu d’analyser l’action et la tâche dans le manuel scolaire.
Nous allons pour ce faire d’abord analyser les projets pédagogiques afin de dégager
quel type d’agir ils sollicitent ; par la suite nous analyserons les consignes relatives aux
43
activités de langue et de production afin de refléter les types de tâches auxquelles les
concepteurs du manuel ont fait recours.
-Analyse des projets pédagogiques et relation avec l’action
Hormis la dimension collective que nous avons tenté d’élucider dans le chapitre
précédent, le recours à l’action dans un projet pédagogique reste primordial. Un projet
est un processus d’autonomie à part entier qui permet aux apprenants d’accomplir des
tâches/actions dans une dynamique collaborative à l’image de l’action accomplie au
sein de la société.
-Est-ce-que les projets pédagogiques incitent les apprenants à un agir social ?
Préparer un projet scolaire relève d’une tâche ardue pour les apprenants, puisque
d’abord il s’agit d’un travail qu’ils doivent accomplir en groupe. Il s’agit également de
mobiliser des compétences d’organisation, de répartition des tâches, de savoir-faire et
de savoir-être. Il ne faut pas oublier qu’un projet est aussi une réalisation personnelle,
un effort qui nécessite de recourir à des compétences langagières pour faire des
recherches, pour collecter des données et les mettre au service de sa recherche etc.
Nous allons essayer de voir si les projets pédagogiques proposés par le manuel scolaire
génèrent une dynamique actionnelle ; pour ce faire nous allons procéder projet par
projet.
Projet 01 : Concevoir et réaliser un dossier documentaire pour présenter des grandes
réalisations scientifiques et techniques de notre époque.
L’intitulé du projet incite les apprenants à une collecte d’informations, à mobiliser des
compétences linguistiques et même transversales vu que les apprenants seront amenés
à utiliser l’ordinateur et Internet pour effectuer des recherches sur les dernières
avancées scientifiques. Cependant, le projet n’interpelle pas l’apprenant dans la
mesure où généralement ils procèdent à ce type de dessein par un copier-coller ; c’est
un travail qui ne possède pas une dimension sociale dans sa réalisation. Il s’agit d’un
projet qui ne suscite pas la motivation des apprenants, qui les pousse à une sorte d’agir
passif et à une réalisation classique d’exposé.
44
Projet 02 : Mettre en scène un procès pour défendre les valeurs humanistes
Comme nous l’avons déjà mentionné, l’argumentation est un moyen efficace pour
générer des interactions authentiques en classe. Ce type de projet nous donne
l’impression que nous demeurons dans une approche classique de projet vu que
l’intitulé écarte le recours à l’action. D’ailleurs l’expression « mettre en scène » est
ambiguë dans la mesure il y a confusion entre « réalisation d’un procès » ce qui peut
inclure des tâches comme la recherche documentaire, la rédaction, le respect des
normes de rédaction d’un procès judiciaire… ou bien « présentation d’un procès » ce
qui nous fait penser à un jeu de répétition dans lequel l’apprenant va se mettre dans la
peau d’un avocat afin de défendre une cause qui ne l’implique pas en préalable. Il est à
noter que même cette possibilité comprend des tâches que l’apprenant doit accomplir
mais nous demeurerons tout de même dans une logique communicative dans laquelle
nous mettons l’action sur le résultat final qui devrait être réalisé et non pas sur les
actions et les tâches qui sont mise en œuvre dans sa réalisation. Dans ce type de projet,
l’apprenant sera certes amené à mobiliser des compétences, à effectuer des tâches,
mais cela reste dans une sphère restreinte. Ce type de projet n’oriente pas
l’apprentissage de la langue vers une dimension sociale.
Projet 03 : Présentez le lycée, le village ou le monde de vos rêves, pour faire partager
vos idées, vos aspirations etc.
Ce projet semble propice pour faire appel à l’imaginaire et la créativité des apprenants
vu qu’il touche leur univers intérieur. Cependant, il constitue en soi une difficulté vu
que l’idéal de chaque apprenant est différent. Donc demander à un groupe
d’apprenants de se mettre d’accord sur le même prototype est illusoire ; le projet
conviendrait mieux comme travail individuel. La formulation de l’intitulé donne des
possibilités très distinctes d’exécution ; ce qui pourrait rendre la tâche plus difficile. Si
le projet se limitait seulement à la présentation du lycée, les apprenants seront amenés
à exécuter des « actions » très différentes comme par exemple une demande de
permission adressée au proviseur pour une visite entière de l’enceinte de
l’établissement ou une demande de la carte scolaire, des entretiens adressés aux
employés de l’établissement, des prises de photographies en guise d’illustration, une
45
demande pour consulter les archives…. Ce type de tâche renvoie à un agir d’usage de
la langue, les apprenants forgeront leur projet tout en réagissant avec l’autre, tout en
faisant de la communication un moyen pour atteindre une fin ; cela permet aussi de
rendre la classe une micro-société, où « la communication est au service de l’action et
non l’inverse » (Puren, 2006 :80).Mais comme nous l’observons le projet se limite à
une « présentation » et l’objectif du projet consiste à « partager ses idées, aspirations »
et par extension « agir sur l’autre ».
Projet 04: Mettre en scène un spectacle pour émouvoir ou donner à réfléchir :
La mise en scène d’une pièce théâtrale en classe est idéale pour copier une forme d’un
schéma social, vu qu’il s’agit d’une représentation simulé mais qui sort tout de même
du dessin purement communicatif, Selon Perrichon (2008 :185),
« Le jeu de rôle et la simulation globale, dans leurs fonctionnements et leurs
implications peuvent permettre une modélisation de l’agir d’usage en DLCE.
Ces deux types de tâches fonctionnent sur une mimésis du réel, une sorte de
répétition de la vie sociale en classe. À ce titre-là, elles font partie de l’agir
d’apprentissage. Elles permettent de développer la connaissance du monde
social dans lequel évolue et va évoluer l’apprenant (agir d’usage). Le lien entre
la répétition publique (mimésis) d’une pièce de théâtre par exemple dans le
cadre d’un projet pédagogique et le jour J de la représentation est assuré par
l’adéquation entre les enjeux de l’apprentissage de là LE et les enjeux sociaux
liés à l’utilisation de la langue »
Ceci dit ce projet pédagogique assure à la fois une atteinte d’objectifs d’apprentissage
et d’objectifs d’usage, il combine à la fois tâche et action, et favorise par excellence les
interactions à l’image d’une micro société.
Conclusion partielle
Comme il est d’usage, les projets pédagogiques privilégient un mode opératoire
collaboratif, actionnel et autonome.
46
Les projets que nous avons essayé d’expliciter ne marquent pas de manière ferme une
rupture avec les approches précédentes, loin de là, ils puisent leur essence dans une
logique communicative, cette dernière servait à développer « des compétences en
situation de classe, avec le maitre en position d’expert, meneur de jeu et évaluateur,
très peu de place était accordée à la réalisation de tâches « réelles » d’emploi de la
langue ( le jeu de rôle était leur parents pauvre ), à la collaboration au sein de la classe
les pairs étaient simulacre d’une collaboration très éloignée de l’usage social de la
langue) … » (Bono et Melo-Pfeifer, 2012: 63).Ces dires établissent des liens de
similitudes avec les projets dans les manuels de 2AS. Nous remarquons que les
manuels ne mettent pas en évidence les tâches qui devraient découler du projet ;a
contrario ils incrustent le projet pédagogique dans une tradition individualiste qui fait
de lui une fin en soi au lieu d’un processus d’apprentissage dans lequel l’agir d’usage
et d’apprentissage permettront l’aboutissement des objectifs de départ. Il semblerait
également que la logique qu’emprunte notre institution scolaire donne plus de valeur
au résultat plutôt qu’au travail fourni par les apprenants pour y parvenir. En d’autres
termes, une politique éducative qui valorise la réussite plus que l’effort fourni ; dans
cette optique, Perrichon met l’accent sur un phénomène qu’elle qualifie de « dérive
objectale » dans lequel il y a « un excès de centration sur le produit du projet » (2008
:105). D’ailleurs, elle cite sa propre expérience tout en mettant en avant l’importance
de l’agir au sein du projet pédagogique :
« La dérive objectale, elle consiste à seulement se fixer sur le projet en tant qu’objet, en tant
que fin en soi et non sur le processus. C’est l’erreur que j’ai commise lors de la mise en place
d’un projet « théâtre » au lycée de Zabok (Croatie). Toute mon attention, ma planification
était orientée vers le but à atteindre : la représentation publique de la pièce de théâtre crée par
les apprenants, qui constituaient l’objet même du projet. Je n’ai pas suffisamment pris
conscience de l’importance du processus, des étapes qui allaient nous permettre de mener à
bien le projet ce qui a plongé l’ensemble du groupe dans une profonde déception lorsque,
pour des raisons matérielles, la représentation en question n’a pas eu lieu » (2008 :105).
Il est vrai qu’en théorie, la pédagogie du projet représente un modèle unique qui joint
la tâche à l’action. Cependant, en contexte algérien, l’expérience sur le terrain affirme
le contraire, nous nous inscrivons dans une optique traditionnaliste de 47
l’enseignement/apprentissage. Nous ne manquerons pas d’ajouter qu’au début de
chaque projet de classe, le manuel scolaire de la deuxième année secondaire ne fait de
référence à aucune tâche à accomplir. Nous notons une absence totale de toute
consigne, de tâche assignée ou d’éclaircissements pouvant guider l’apprenant vers un
agir distinctif. Il est donc difficile de savoir quel est le profil visé, et surtout sur quel
type d’agir notre manuel scolaire met l’accent .La partie suivante éclaircira justement
ce questionnement.
3.3 LES PROCEDES D’ABOUTISSEMENTS Á LA REALISATION DU PROJET
Dans la logique de la pédagogie du projet, le manuel doit être organisé de manière à
permettre aux apprenants de mobiliser leurs compétences et leurs acquis pendant une
période d’apprentissage au service de la réalisation du projet. Il est systématique que
les textes et les activités qui y figurent doivent dériver de la même thématique pour
permettre aux apprenants d’avoir une aisance et un bagage dans leur mise en place de
ce projet. Dans ce chapitre, nous allons vérifier si le manuel scolaire permet aux
apprenants mais aussi à l’enseignant d’aboutir au projet, si les tâches et les activités
proposées constituent un support fiable à l’accomplissement de la tâche finale
proposée.
Analyse en fonction des indicateurs proposés
-Est-ce-que le discours du manuel réfère à des projets à réaliser ?
Le manuel scolaire, comme nous l’avons mentionné, s’articule autour de quatre
projets, qui s’articule à leur tour autour du la thématique « des savoirs civilisationnels
» comme le mentionnent les auteurs du manuel dans l’avant-propos. Chaque projet
didactique traite une thématique et une typologie particulière de texte (Le texte
explicatif, le texte argumentatif, le récit de voyage et récit d’anticipation et le théâtre).
Le projet pédagogique est découpé en séquences, cependant les séquences ne sont pas
des unités sous-jacentes du projet en d’autres termes en relation avec le projet ; les
séquences servent dans le manuel à organiser les apprentissages. Chaque projet est
annoncé au début d’une nouvelle unité didactique, où nous pouvons lire
48
l’intitulé du projet accompagné d’une image photographique symbolisant la
thématique traitée. Mise à part les premières pages du manuel où il est question de
sommaire, et la page qui avise du début d’une nouvelle unité didactique, il n’y a
aucune référence à un quelconque projet, nous avons l’impression que le projet n’a pas
une relation avec le reste de l’unité didactique, il semble « se dérouler en dehors du
manuel » (Mahieddine, 2016 : 04). Par ailleurs, aucune rubrique dans le manuel
scolaire ne s’intéresse aux étapes de la réalisation du projet, même les activités de
synthèse qui correspondent à l’expression écrite ou orale proposent des thématiques de
production détachées de la thématique principale du projet.
-Y-a-t-il une relation entre les activités et les textes supports proposés avec le
projet ?
Le manuel scolaire propose une mosaïque de textes et d’activités à l’intention des
apprenants, mais est-ce qu’ils s’inscrivent dans la thématique du projet ? Et est-ce
qu’ils permettent de constituer un fond documentaire utile qui servira les apprenants
dans la réalisation de leur tâche ? Pour répondre à cette question nous avons prévu de
dresser deux tableaux récapitulatifs illustrant d’une part la cohérence des textes
proposés avec les projets et d’autres part cette même cohérence avec les activités.
Le projet 1 Les textes proposés
- La société des abeilles
Concevoir et réaliser un dossier - Les relations dans un écosystème
documentaire pour présenter les grandes - La cellule animale
réalisations scientifiques et technique de - La science
notre époque - Une protection naturelle des
plantes cultivées, la lutte
biologique
- Manipulation du vivant
- Les séismes
- Le cyclone
49
Il est apparent que les textes n’ont aucun lien avec l’intitulé du projet. La plupart des
thématiques présentées découlent dans le domaine de la biologie ; aucun texte ne
semble s’intéresser aux nouvelles inventions du siècle. Les textes qui figurent dans le
tableau ne constituent pas un fond documentaire qui pourrait aider ou inspirer les
apprenants.
Le projet 2 Les textes proposés
- Plaidoyer pour l’action
Mettre en scène un procès pour défendre - La volonté de vivre
les valeurs humanistes - Parrainer un enfant du-bout-du-
monde
- Protéger le patrimoine
- Eloge de la vie bédouine
- Plaidoyer pour un tourisme
consensuel
- Dérive de la science
- Venise ou la kermesse frénétique
- La solution des petits réacteurs
- La peste et le choléra
- Le nucléaire, parade à l’effet de
serre ?
Les textes qui figurent ci-dessus divergent dans la thématique de l’argumentation, ils
fournissent aux apprenants les outils théoriques nécessaires pour distinguer les
différents types d’argumentations. Cependant aucun des textes ne représente un
modèle de procès-verbal. Mise à part le texte intitulé « parrainer un enfant du-bout-du-
monde » aucun texte ne plaide une cause humanitaire de manière concrète. D’ailleurs
la majorité des textes traitent de la thématique du nucléaire ou du tourisme. Nous
concluons donc que les textes ne concordent pas avec la thématique du projet.
50
Le projet 3 Les textes proposés
- Carnet de noyage de Niamey à
Présentez le lycée, le village ou la ville de Gao
vos rêves, pour faire partager vos idées, - De Djelfa à l’Aghouat
vos aspirations - Azzefoun, la mer et le reste
- Le départ pour l’exil
- Carnaval de venise
- Chronique de Maghnia à El Kala
«Oran »
- Spécial Omra
- Winston, le prodige
- Le cancre
- Galerie des célébrités
- Une journée ordinaire dans la vie
d’Ida et Léo en 2020
- De quoi sera fait demain ?
Le troisième projet est subdivisé en deux parties, une partie qui traite le récit du
voyage, et une autre le récit d’anticipation, comme nous pouvons le constater dans le
tableau. Contrairement aux deux projets précédents, les textes proposés semblent
corréler avec le projet, vu qu’ils présentent des thématiques qui peuvent inspirer la
rédaction des apprenants, les récits de voyage proposés leur permettront de voir de
nouveaux horizons, le récit d’anticipation servira à nourrir leur imaginaire. Le choix
des textes semble judicieux concorder avec l’intitulé du projet.
Le projet 4 Les textes proposés
51
- Monsieur Moi
Mettre en scène un spectacle pour - Soyez moderne que diable
émouvoir ou donner à réfléchir - Sketch
- Avoir ou ne pas avoir quelque
chose
- « divers »
- Agence de voyage
- BD sur l’obésité et l’humour
- Pinocchio le robot
Le contenu du projet devrait susciter les apprenants à organiser et présenter une pièce
théâtrale de leur choix. Les textes que nous avons représentent des fragments de la
littérature française avec Tardieu, Queneau, Ionesco etc. Ces textes semblent offrir un
repère documentaire aux apprenants pour comprendre le contenu du projet. De prime
abord le choix des support semble pertinent mais il semblerait que ce fond
documentaire manque d’outils pratiques et pragmatique pour mettre en scène une pièce
théâtrale ; des documents audio-visuels seraient plus favorables pour diriger le projet à
une dimension plus tangible vu qu’une mise en scène est une « orchestration de tous
les éléments d’une production théâtrale (jeu, costume, éclairage, son) »
http://www.theatreenaction.com/enversdudecor/miseenscene.html(2017).Puisque les
apprenants n’ont pas une connaissance préalable du théâtre, les textes que représente le
manuel sont insuffisants pour que les apprenants affinent leur projet. Les textes
présentés dans le manuel ne représentent qu’une pièce du puzzle de la mise en scène.
-Y-a-t-il une pertinence entre les activités proposées et les projets ?
Les activités qu’illustre le manuel ne reflètent pas la volonté des concepteurs de paver
la voie aux apprenants dans la réalisation de leur projet. Nous remarquons que les
activités s’axent majoritairement autours des savoirs linguistiques et « leur lien avec le
projet apparait au niveau du type discursive »(Mahieddine, 2016 : 05). Ceci dit,
chaque projet axe ses activités autours de savoir-faire susceptible d’aider l’apprenant à
réaliser tel ou tel type de texte. A ce niveau, nous avons pu constater une bonne
52
cohérence entre les activités et la typologie textuelle. Prenons l’exemple du premier
projet où il est question de textes explicatifs ; les points de langue proposés étaient : la
tournure présentative, l’emploi des mots génériques et des mots spécifiques, la
progression thématique, le vocabulaire du raisonnement, la cause et la conséquence, la
reformulation explicative, le conditionnel etc. Ces éléments à notre avis semblent
compatibles avec le niveau discursif des projets. Il semblerait du premier coup d’œil
que ces activités ne participent pas de manière directe dans la conception des projets ;
ils ne font aucune allusion à un travail de collaboration cependant ils pourront
constituer un étayage linguistique et langagier qui leur servira dans la rédaction de leur
projet.
Au niveau des activités, nous avons pu repérer plusieurs micro-textes qui servent de
support aux points de langue. Nous allons analyser ces petits textes pour voir s’il y a
concordance avec la thématique du projet.
Dans le premier projet, la majorité des micro-textes proposés, dans leurs majorités
abordent des textes où il est question de biologie, de géologie, de météorologie mais
aucun texte ne réfère à de nouvelles avancées scientifiques, au niveau d’activités nous
avons pu relever le terme laser ; arme nucléaire et CD-ROM qui étaient mentionnés de
manière brève et qui figuraient en dehors de leur contexte. Dans le deuxième projet par
contre nous trouvons des micro-textes qui parle de projectiles et de conquête spatiale
deux thématiques qui ne concordent pas avec le procès-verbal, et qui auraient fait des
textes support adéquats avec le premier projet, nous repérons également d’autres textes
où il s’agit de plaidoyer, ces textes vont avec la thématique de l’argumentation mais
aucun d’eux ne plaide une cause humaniste !
En ce qui concerne le troisième projet il est question dans le projet de présenter le
monde de ses rêves pour faire partager ses idées et ses aspirations ; les activités de
langue qui accompagnent le projet sont : la comparaison et la métaphore, la
subordonnée relative, la substitution lexicale, le vocabulaire de l’hypothèse, et le
vocabulaire de l’avenir. Ces points de langues semblent en adéquation avec la
typologie textuelle proposée par le biais du projet dans la mesure où il est question de
texte d’anticipation et de récit du voyage. Cependant, il est important de noter que les
53
micro-textes supports proposés dans les applications divergent dans des thématiques
très distinctes de la thématique du projet : le premier texte support s’intitule « la
stérilisation végétale, nouvelle arme biotechnologique » où il s’agit d’un texte
informatif ; le second texte proposé s’intitule « Suicide collectif dans l’espace, en
faillite. La société Iridium détruit ses 88 satellites » le titre est évidement révélateur du
contenu, il s’agit également d’un article de revue qui sert à donner des informations
aux lecteurs. Le dernier texte support s’intitule « L’image de synthèse » ; il s’agit dans
ce cas d’un texte explicatif qui aborde la thématique de la photographie. Cela dit, tous
les textes support proposés dans les activités n’entretiennent aucun rapport avec la
thématique du projet, et ne constituent en aucun cas un repère documentaire qui
pourrait inspirer les apprenants dans la réalisation du projet.
Dans le dernier projet pédagogique intitulé « Mettre en scène un spectacle pour
émouvoir ou donner à réfléchir », les points de langue présentés sont : la tournure
interrogative et exclamative, les indicateurs de temps et d’espace, le discours rapporté,
la caractérisation, distribution du temps par rapport à un moment énonciatif. Ces
éléments semblent concorder avec le théâtre vu que les apprenants seront amenés à
utiliser ces points dans la communication qu’elle soit écrite ou orale. Concernant les
micro-textes utilisés dans ce chapitre nous avons : Le W.E.B texte explicatif sur la
toile, scène de famille, extrait d’une pièce de théâtre parue dans une revue, Nantes :
chanson de Barbara, le corbeau et le renard : fable de Jean De La Fontaine, synopsis de
Pinocchio le robot qui est un petit récit d’anticipation sur Pinocchio en tant que robot
dans le futur, le temps des croisières un article du quotidien d’Oran, et en dernier :
l’espace, des pionniers à la croisière, dépêche de l’AFP Paru au quotidien d’Oran.
Comme nous le remarquons, il n’y a qu’un seul texte support qui concorde avec la
thématique du projet ; les autres textes sont hors contexte. En dépit du fait qu’ils
servent de support aux points de langue, les micro-textes n’entretiennent aucun lien
avec le projet.
58
Conclusion partielle
L’analyse des projets pédagogiques dans les manuels de 2ème
AS nous permet
d’affirmer que les projets ne sont pas réellement liés avec le reste du contenu du
manuel, ils ne figurent que comme des intitulés au début d’une nouvelle unité
didactique. Aucune allusion n’est faite tout au long des séquences à un quelconque
projet, aucun rappel ou clarification n’est disposée à l’intention des apprenants. Nous
avons pu voir par le biais de cette analyse que la majorité des textes de compréhension
ne correspondent pas avec les intitulés des projets hormis quelques exceptions
évidemment. Dans ce cas, les apprenants seront en manque d’inspiration et
d’information en construisant leur projet scolaire. Cette absence de prototype en
corrélation avec le contenu du projet donnera l’impression d’une moindre importance
accordée à la perspective actionnelle en classe. Les activités de production dans le
livre scolaire correspondent totalement à l’intention communicative avisée au début du
manuel ; les activités de production orale/écrite n’ont à leur tour aucun rapport avec les
intitulés des projets et ne semblent pas faciliter la tâche aux apprenants dans la
conception de ce dernier. Les activités de langue dans le livre sont souvent présentées
à l’intérieur de petits énoncés ou de micro-textes. Au niveau de la syntaxe et du
lexique, nous pourrons affirmer que leur contenu obéit à la typologie textuelle
proposée au début de chaque nouvelle unité, d’ailleurs ils constituent un repère
pratique pour les apprenants notamment en matière de production écrite, en ce qui
concerne les textes qui les exposent, ils n’ont pas de relation avec le projet, loin de là
nous irons à dire qu’elles sont contradictoires. Il est paradoxal de se trouver dans un
projet qui aborde des avancées scientifiques avec texte argumentatif et dans le projet
qui traite du procès-verbal, un texte sur les avancés scientifiques. Ainsi le manuel
scolaire semble renfermer un grand contraste, les exemples sont multiples ; cependant
il conviendrait de dire que le manuel scolaire de la 2AS, dans sa complexité, offre tout
de même un panorama textuel riche, les activités de langue sont très adaptées aux
besoins des apprenants, et les supports sont variés. Toutefois, une adaptation et une
modernisation effectives au niveau méthodologique feraient du manuel un support
didactique convoité par les enseignants et les apprenants.
4. LE MANUEL SCOLAIRE DU POINT DE VUE DES ENSEIGNANTS
Ce dernier chapitre de notre travail de recherche est dédié à l’analyse des entretiens
semi-directifs que nous avons organisés avec quatre enseignantes du secondaire. Nous
55
confronterons leurs points de vue avec l’analyse du manuel scolaire que nous avons
dressée auparavant. Dans cette optique, cette analyse sera organisée en deux chapitres.
Dans un premier temps nous mettrons au point une analyse des énoncés émis par les
enseignantes ; nous établirons de ce fait une comparaison entre les constats et les
conclusions auxquels nous sommes parvenus tout au long de notre travail, avec
l’expérience et le vécu de ces enseignantes. Ceci va nous permettre de faire le point sur
les pratiques des enseignantes et de la manière dont les enseignants font usage de leur
savoir-faire didactique. Dans un second temps, nous établirons un bilan final dans
lequel nous proposons quelques suggestions à propos du manuel scolaire, ces
suggestions seront évidemment en lien avec les résultats de notre analyse et les
opinions des enseignantes avec lesquelles nous avons parlé.
4.1 ANALYSE DES DONNEES DES ENTRETIENS
4.1.1 Profil des formatrices
Les entretiens se sont déroulés avec quatre enseignantes de la langue française au
secondaire, le profil universitaire des enseignantes varie, nous avons Amina
(enseignante01) qui est licenciée en traduction, Fatima Zohra (enseignante 02) qui un
Master en littératures francophones, Amel (enseignante 03) qui a une licence en
didactique du FLE et au final Nouria (enseignante 04) licenciée en licence classique de
français. Mise à part Mlle Amel les enseignantes n’avaient pas reçu une formation
universitaire dans la didactique du FLE. En dépit de leur formation académique, ces
enseignantes semblent avoir appris sur le terrain ou par le biais des formations et
réunions pédagogiques avec les inspecteurs. Nous évoquerons par la suite les raisons
qui nous ont poussées à aborder la question du cursus universitaire.
En fonction des échanges qui ont eu lieu avec les enseignantes du secondaire et les
réponses qui ont résulté, quatre grands thèmes principaux émergents de nos entretiens,
rappelons :
- Le recours au manuel scolaire de la 2ème
AS en classe de FLE
; 56
- La dimension collective et collaborative dans le manuel scolaire et sa
relation avec les projets pédagogiques ;
- L’approche actionnelle et le manuel scolaire à travers les projets
pédagogiques et les consignes
Nous allons procéder à l’analyse de nos entretiens par une approche thématique.
4.1.2 Lerecours au manuel scolaire de la 2as en classe du FLE
Nous avons cherché à voir, à travers cette question, si les enseignants recouraient
exclusivement au manuel scolaire de français de la deuxième année secondaire comme
étant un support incontournable dans l’enseignement/apprentissage dans la classe.
Nous voulions savoir si, selon eux, le livre scolaire était suffisant au niveau du contenu
des supports et des activités. Notre intérêt se portait également sur son accessibilité ;
est-il à la portée de tous les apprenants ?
L’enseignante 1 a affirmé qu’elle recourait très peu au manuel scolaire, elle a même
trouvé quelques difficultés pour répondre aux autres questions.
Enquêtrice : D'accord, donc nous allons parler un petit peu du manuel scolaire de la
deuxième année secondaire, donc, est ce que vous avez l'habitude de travailler avec ce
manuel en classe. Est-ce que vous pouvez nous dire comment [et
Enseignante 1 : Bon, pour commencer, moi, j'ai déjà enseigné ++, euh trois ans les
élèves de deuxième année, euh, malheureusement je n'ai pas eu beaucoup l'occasion
de TRAVAILLER avec ce manuel, justement parce que, euh, je travaille beaucoup plus
avec les manuels parascolaire, moi, je trouve que le manuel de deuxième année, le
manuel officiel ne correspond pas beaucoup euh aux objectifs visés, ne s'adapte pas
aussi au niveau des élèves ni aussi aux objectifs de la séquence et du projet.
En ce qui concerne l’enseignante 2 et 3 elles se mettent d’accord sur le fait que le
manuel scolaire n’est pas l’unique livre scolaire auquel elles y recourent.
Enquêtrice :Donc est-ce que vous avez l'habitude de travailler le manuel en classe ?
57
Enseignante 2 : Oui, pas forcément quand il, c'est-à-dire dans ma disponibilité de
faire des photos copies pour les élèves, je le fais sous mon propre compte et quand je
n'arrive pas et ben, là, j'utilise le manuel scolaire.
Elle ajoute par la suite :
Bon, les, parfois je euh, c'est-à-dire je peux utiliser les textes qui sont présents dans le
manuels scolaires, pour les activités qui sont en cohérence [en convergence avec les
supports présentés dans le livre, donc là je fais appel à monsieur Google bien sûr et
aux manuels, et aux ouvrages que j'ai à la maison
Nous répétons la même question à l’enseignante 03
Enquêtrice : Merci, donc on va commencer par une question d'ordre générale, euh,
est-ce que vous avez l'habitude de travailler avec le manuel scolaire de deuxième
année secondaire ?
Enseignante 3 : Généralement oui, j'en ai l'habitude de travailler AVEC LE MANUEL
SCOLAIRE, sinon+++ pas tous les textes,< sinon je ramène d'autres supports des
textes> tout dépend des projets.
Enquêtrice :Est-ce-que vous êtes obligée de travailler avec
Enseignante 03 : Non, non, des fois je ne l'utilise même pas.
Elle ajoute concernant les activités qui y figurent
Enseignante 03 : et ben concernant les activités j'essaie de travailler avec des
manuels PARASCOLAIRES qui n'ont rien à voir c'est-à-dire avec le manuel scolaire,
à mon avis les activités ne sont pas adaptées au niveau des élèves et parfois elles n'ont
pas une relation avec le PROJET LUI-MÊME
Tout au long de l’entrevue l’enseignante 04 paraissait réticente, elle ne s’est exprimée
librement qu’à la fin de l’enregistrement.
58
Enquêtrice :On va aujourd'hui parler du manuel scolaire surtout du manuel scolaire
de la deuxième année secondaire, donc avez-vous l'habitude de travailler avec ce
manuel scolaire en classe ?
Enseignante 04 : Oui, oui, oui, j'utilise le manuel scolaire de la deuxième année
puisqu'ils l'ont introduit, donc on travaille dessus, il est riche en supports, en activités
etc. Il est à la portée des élèves, donc on l'utilise en classe.
L’enseignante 04 ajoute néanmoins une réponse qui se contredit avec la précédente.
Enquêtrice : D'accord, est-ce que vous vous contentez seulement des textes et des
supports du manuel ou bien vous [en
Enseignante 04 : Oui, oui, on utilise les supports et les activités du manuel, plus
d'autres supports complémentaires et d'autres activités bien sûr
Enseignante 04 : Des fois le support est très long, des fois il est difficile à
comprendre, donc on fait appel à d'autres supports extrascolaires.
En ce qui concerne les activités elle affirme :
Enseignante 04 : Oui, oui, on utilise les supports et les activités du manuel, plus
d'autres supports complémentaires et d'autres activités bien sûr
Conclusion partielle
Les réponses des quatre enseignantes indiquent que le manuel scolaire de la deuxième
année secondaire n’est pas sollicité de manière régulière dans la classe. Les
enseignantes affirment recourir à d’autres supports parascolaires ou internet pour les
textes et les activités. Le manuel scolaire n’est donc pas utilisé de manière exclusive.
4.1.3 La dimension collective et collaborative dans le manuel scolaire et sa
relation avec les projets pédagogiques
Nous voulions par les questions relatives à ce paramètre savoir si, selon les
enseignants, le livre scolaire de la 2ème
AS sollicitait le travail de groupe ; nous
voulions également savoir si le projet pédagogique créé une atmosphère favorable pour
tisser une collaboration entre les pairs au sein d’un même groupe.
59
L’enseignante01 :
Enquêtrice : Alors toujours concernant le projet, est-ce-que les apprenants se
mobilisent réellement autour de ce projet quand il s'agit de la répartition des tâches ?
Donc, est-ce qu'ils répartissent vraiment les tâches ou il y a un seul apprenant qui fait
le travail et les autres inscrivent leurs noms dans le projet?
Enseignante 01 : Moi je dis que euh cela dépendra comment dire (soupir) de suivi de
l'enseignant, il faut que l'enseignant soit à jour avec euh, il faut pas se lancer dans les
autres activités et oublier leurs projets, il faut demander de temps en temps de, où est-
ce qu'ils en sont, ou, de ramener leurs documents, de voir ce qu'ils ont déjà fait, ce
qu'ils ont avancé,
Le soupir de l’enseignante 01 montre un mécontentement. Selon elle, c’est à
l’enseignant de faire l’effort de superviser le groupe et faire en sorte que le travail de
groupe réussisse. Toutefois, elle ne répond pas à la question de manière explicite.
Enseignante 02 :
Enquêtrice : Pensez-vous que ces projets inscrivent réellement les apprenants dans
une logique collaborative ? Pensez-vous qu'en pratique les apprenants se répartissent
réellement les tâches pour réaliser les projets ?
Enseignante 02 : Très bien, ce qui, [ enfin, ce que je suggère pour les textes et les
supports qui sont présents dans le manuel scolaire, scolaire pardon, ce que, ils sont,
c'est des textes, ils sont vraiment anciens ça date de mille neuf cent et quelques, on
aurait souhaité parfois, ces apprenants nous dépassent dans cette technologie, ils sont
parfois, c'est-à-dire, ils ont des connaissances que nous nous n'avons pas, donc la
mise à jour, elle est nécessaire et disponible ces derniers temps.
Enquêtrice : D’accord et ce que leur, les textes et les projets ça encourage les
apprenants à travailler ensemble, à travailler en groupe en théorie et en pratique ?
Enseignante 02 : Là, vous parlez des supports, des textes ou bien des activités ?
60
Enquêtrice : Des projets pédagogiques ?
Enseignante 02 : Ah, les projets pédagogiques, d'accord, alors les projets
pédagogiques, concernant le premier projet qui est sur les inventions technologiques
et scientifiques de notre époque donc, justement là, j’ai fait enfin, appel , les élèves
élaborent des projets ensemble donc ils font de la recherche mais la recherche sur le
net, ils consultent jamais les manuels scolaires ça encourage parce que je leur
consacre un moment pour présenter un projet donc c'est bien dans l'ensemble ça
encourage le travail en groupe
Nous remarquons que l’enseignante 02 avait une difficulté à répondre à la question. Il
est quand même utile de rappeler que cette enseignante avait des difficultés à répondre
à plusieurs questions relatives à la didactique de part sa formation littéraire à
l’université, mais aussi son manque de formation professionnelle. Nous notons
également qu’elle ne semblait pas à l’aise pour répondre librement aux questions ; cela
revient probablement au fait qu’elle exerce à l’école des cadets . Malgré une réponse
floue, nous remarquons que l’enseignante met l’accent sur le recours exclusif à
Internet de la part des apprenants, ajoutant que les projets encouragent le travail de
groupe. Cependant elle limite le travail de groupe à la présentation.
Enseignante 03 :
Enquêtrice : Les nouveaux manuels scolaires se caractérisent par l'émergence des
projets pédagogiques, pensez-vous que ces projets inscrivent réellement les
apprenants dans une logique collaborative ? Est-ce qu'ils incitent les apprenants à la
collaboration ?
Enseignante 03 : Euh, oui
Enquêtrice : Autrement dit, est-ce-que vous pensez qu'en pratique les apprenants
répartissent réellement les tâches, est-ce qu'ils travaillent réellement ensemble ?
Enseignante 03 : Et ben je dirai oui et non, dans la forme on a l'impression que les
élèves travaillent ensemble pour réaliser les projets, en réalité du moins+++ ce que
61
j'ai constaté, euh, il y a un ou deux qui font le travail et les autres, qui inscrivent juste
leurs noms sur la feuille, sur le projet qu'ils réalisent.
Enquêtrice : D'accord, le manuel vous aide-t-il à faire travailler les élèves par groupe
lorsque que c'est nécessaire
Enseignante 03 : Euh, et ben, oui et non, car lors de la présentation ++ il y a tout le
groupe qui passe mais les grandes tâches sont assignées aux bons élèves,
généralement, c'est ça, c'est comme ça que ça se passe et les autres font que de la
lecture alors (c'est-à-dire ils (ne) collaborent pas, ils …..
L’enseignante03 estime que les projets pédagogiques favorisent en apparence le travail
de groupe, mais attribuent la responsabilité aux apprenants contrairement aux propos
de l’enseignante01. Nous remarquons une autre fois que l’enseignante restreint le
travail de groupe à la présentation du projet ; nous ne parlons pas d’une collaboration
qui se fait au cours de ce dernier.
Enseignante 04 :
Enquêtrice :Les nouveaux manuels scolaires se caractérisent par l'émergence du
projet pédagogique donc est-ce-que vous pensez que ces projets inscrivent réellement
les apprenants dans une logique collaborative?
Enseignante04 : Théoriquement oui, mais dans la pratique, on voit que ça ne se fait
pas de la même manière, les élèves soit ils ne sont pas motivés vu leur niveau, ils n'ont
pas de bagages parce que l'élève au secondaire il est censé maitriser la conjugaison,
la grammaire euh tous les outils linguistiques or, c'est pas le cas et quand on leur
demande un travail consistant pareil, il est difficile à le réaliser, c'est très difficile
pour l'élève.
Enquêtrice : D'accord, donc il n'y a pas vraiment une collaboration au sein du
groupe,[il n' y a pas vraiment un groupe?
Enseignante04 : Ils veulent bien, l'intention y est, l'intention, oui, mais ils n'ont pas la
base qui leur permette de rédiger, de reformuler parce qu'ils font une recherche et
62
bien ce qu'on leur demande, on partage les tâches, ils font la recherche, mais qu'est ce
qu'ils font un ++ tirage et ils ramènent.
Les affirmations de l’enseignante04 mettent en évidence les lacunes que rencontrent
les apprenants dans la réalisation de leur projet. Cependant, il serait judicieux de
rappeler que ces apprenants sont amenés à réaliser des projets dans toutes les matières
qu’ils étudient. Ceci dit les élèves ne sont-ils pas en mesure de disposer des outils qui
leurs permettent de travailler en groupe ? Nous avons l’impression que le travail entre
les pairs, selon l’enseignante, se focalise essentiellement sur le résultat final qui est la
présentation et l’évaluation. Nous remarquons qu’elle met l’accent sur le caractère
passif des apprenants vis-à-vis du projet. Nous verrons par la suite la cause principale
selon nos quatre enseignantes, même si les lacunes langagières pourraient constituer
un obstacle paralysant pour les apprenants.
Conclusion partielle
Les avis des enseignantes sont unanimes sur le fait que les projets pédagogiques
incitent dans la forme à la collaboration entre les apprenants mais en pratique nous
constatons qu’ils ont beaucoup de difficultés à travailler en groupe. Pour
l’enseignante01, la tâche principale revient à l’enseignant d’organiser les groupes et de
superviser les projets ; nous rappelons que l’enseignante 02 avait une difficulté à
répondre à la question ; néanmoins elle lie intimement le projet pédagogique avec la
présentation de ce dernier ne mettant pas l’accent ainsi sur le travail qui se fait pendant
le projet. Par ailleurs, l’enseignante 02 restreint le projet à la présentation finale. Pour
l’enseignante04, les projets pédagogiques se limitent également à l’exposé. Elle ajoute
que apprenants n’arrivent pas à collaborer parce qu’ils n’ont pas d’outils langagiers
nécessaires. L’enseignante 03 rejoint l’enseignante 02 sur le fait que le manuel ne
mentionne aucune tâche et que c’est à l’enseignant d’organiser le groupe et de
superviser son travail : « En fait, l'effort revient [au] à l'enseignant, celui qui répartit
les tâches, c'est-à-dire les tâches du groupe, repartit les groupes, assigne à chaque
élève une tâche etc. Les élèves ne font aucune (tâche), le manuel je veux dire que le
manuel ne guide pas vraiment les élèves à partager les tâches etc. » ; tout comme le
précise l’enseignante 02 : « Non, non jamais, jamais, il y a pas, c'est-à-dire dans les
63
consignes, on n'incite pas les élèves à travailler ensemble, c'est l'enseignant qui le fait
en classe ».Dans les quatre projets qui figurent dans le manuel scolaire de la 2AS, nous
ne trouvons aucune mention de tâches attribuées à un groupe d’apprenants, nous
remarquons également une mention quasi-totale au groupe dans les activités.
Il ne faut tout de même pas oublier que le projet pédagogique est un procédé complexe
qui nécessite la mise en œuvre de plusieurs compétences de la part de l’apprenant. Il
n’est point aisé pour les élèves de réaliser une quelconque tâche quand l’outil
linguistique, qui à notre avis semble le grand handicap, est manquant.
L’approche actionnelle et le manuel scolaire à travers les projets pédagogiques et
les consignes
Le manuel scolaire de la 2ème
AS s’inscrit dans un flot méthodologique actif. Nous
voulions par le biais des questions relatives à l’actionnel, savoir si les activités et les
projets permettent aux apprenants un type d’agir qui sort de la conception classique.
Nous voulions également savoir si les activités du manuel, projets y compris,
permettent aux apprenants d’accomplir des tâches dans et en dehors de la classe.
Enquêtrice : Pensez-vous donc ces projets vont leur permettent d'utiliser par exemple
la langue en dehors du milieu scolaire pour réaliser leurs projets.
Enseignante01 : Je dirai que CERTAINS PROJETS, pas tous les projets, certains
projets vont solliciter en effet que la langue française, je donnerai même un exemple,
pour les élèves de première année, ils ont le projet de l'interview, donc moi dans ce
projet je leur demande de se déplacer, d'organiser des entretiens avec euh [ ,
généralement je leur propose le thème des métiers, je leur demande d'aller voir euh
une personne qui exerce un métier qui intéresse les élèves et de leur poser des
questions, forcément ça va se faire dans la langue française sinon, ils le feront dans la
langue euh, dans le dialecte algérien mais plus tard ils vont faire la traduction …
64
Enquêtrice : D'accord et pour la deuxième année?
Enseignante01 : Pour les élèves de deuxième année euh (soupir) non, franchement
non, c'est beaucoup plus basé sur les recherches, le résumé, la contraction des
informations etc. Je ne pense pas que ça leur euh, je ne pense pas qu'ils utiliseront la
langue en dehors de lieu scolaire
La réponse de l’enseignante01 laisse entendre la déception. Pour elle, le livre scolaire
de la 2AS ne permet pas aux apprenants d’utiliser leur savoir-faire de manière
concrète.
Enquêtrice : Action et collaboration, est ce qu’il y a mention dans la manuel scolaire
d'action et collaboration voilà, activité de groupe
Enseignante02 : Par exemple dans les consignes proposées pour la production
écrites, c'est-à-dire, on n'a jamais demandé à un élève de sortir sur terrain, de faire
une enquête, sur je ne sais pas, qal (disons) je m'excuse pour le (rire)
La réponse ironique de l’enseignante02 laisse entendre une insatisfaction ; cela sous-
entend que le livre scolaire est déficient en action.
Enquêtrice : D'accord, une autre question, pensez-vous que ces projets inscrivent les
apprenants dans une logique actionnelle?
Enseignante 03 : Ce qu'il devrait arriver, mais tout dépend de la nature du projet, par
exemple dans le projet [intitulé 1 du livre de 2AS intitulé Réaliser un dossier
documentaire pour présenter les grandes réalisations scientifiques et techniques de
notre époque généralement dans ce projet les élèves ne font que du copier-coller
d'internet, ils ne [sont pas, font aucun effort supplémentaire,
Elle ajoute :
Enseignante 03 : ils ramènent d'internet des exposés, ils ne font même pas un résumé
Enquêtrice : D’accord
65
Enseignante 03 : Tout dépend du projet, dans le livre du 2AS, il y a le projet du
théâtre par exemple, ce projet, vraiment, il pousse les élèves à l'action, il y a aussi un
autre exemple si je me rappelle dans le livre de 1AS, les élèves ont été amenés +++
les élèves ont été amenés à interroger des gens dans euh ++ leurs métiers à réaliser
des interviews, à enregistrer des interviews, ils sont tellement motivés qu'ils se sentent
concernés :: ils se sentent aussi concernés ils se sentent aussi comme des futurs
journalistes.
L’enseignante03 rejoint l’enseignante01 sur le fait que les projets du manuel scolaire
ne permettent aux apprenants de se focaliser sur un agir d’usage (en dehors de la
classe).Elles citent toutes les deux le premier projet comme un exemple. Cependant
l’enseignante03 met l’accent sur le projet du théâtre qui représente selon elle un projet
qui pousse les apprenants à l’action.
Enquêtrice : D'accord, pensez-vous aussi que les projets inscrivent les apprenants
dans une logique actionnelle mise à part la collaboration, est ce que ça leur incite à
l'action
Enseignante04 : Je vous dis que l'intention y est, ils veulent bien mais ils ne savent
pas, on les aide il y a l'assistance ta3 l'enseignant etc. On voit que l'élève fournit des
efforts surtout, un petit groupe d'élèves qui aiment la langue, qui aiment travailler, qui
aiment avoir de bonnes notes etc. Ils font des efforts mais ce n'est pas suffisant pour
réaliser un projet.
On pose la question autrement
Enquêtrice : Une dernière question concernant les projets pédagogiques, croyez-vous
que les manuels scolaires permettent aux apprenants de s'inscrire dans une dimension
sociale dans la mesure où la réalisation de ces projets leur permettra d'investir leur
compétences en dehors de la classe? Autrement dit, est ce que ces sujets détiennent
selon vous une dimension sociale?
66
Enseignante04 : Oui, bien sûr, le sujet est bien choisi, il concerne la vie sociale de
l'apprenant en relation avec sa vie sociale, notre société, donc c'est un thème ou un
problème posé sur euh sa vie familiale, sociale etc.
Selon la réponse de l’enseignante04 on pourra déduire que la question était floue.
Conclusion partielle :
La notion du projet pédagogique reste pour les enseignantes interrogées floue, Ceci
peut renvoyer au manque d’encadrement académique. L’enseignante04, étant même
enseignante formatrice, avoue ne pas connaitre l’approche actionnelle ou la pédagogie
du projet. L’enseignante 01 et 02 avouent également qu’elles ne connaissent que
l’approche par compétences et que même cette dernière reste floue dans sa mise en
pratique sur le terrain. Seule l’enseignante03 semble avoir des connaissances sur les
nouvelles méthodologies d’enseignement vu qu’elle a reçu une formation universitaire
spécialisée en FLE.
Les avis des enseignantes ont été mitigés sur l’actionnel dans le manuel scolaire,
cependant les quatre enseignantes se sont entendues sur le fait que les projets qui
figurent dans le manuel scolaire de la deuxième année ne sollicitent pas
majoritairement de l’action en dehors de la classe. Ceci dit, les projets pédagogiques
dans notre corpus d’étude favorisent essentiellement l’agir d’apprentissage. D’ailleurs,
nous remarquons que l’enseignante 01 et 03 ont cité l’interview comme étant un projet
type qui favorise le jumelage de l’agir d’usage et d’apprentissage.
67
4.2. BILAN ET PROPOSITIONS DIDACTIQUES
Dans ce chapitre, nous proposons un cadre d’analyse alternatif entre les résultats de
notre analyse du manuel de français de la deuxième année secondaire et les données
recueillies de nos entretiens semi-directifs. Tout au long de notre analyse sur notre
corpus d’étude, nous avons évoqué l’aspect méthodologique sans pour autant
restreindre notre étude à une méthodologie particulière. Nous avons voulu démontrer
que le manuel scolaire se marque par une emprunte éclectique qui n’est tout de même
pas mise en avant dans les instructions officielles. Etant donné que l’éclectisme
méthodologique s’oriente vers une dimension actionnelle, nous avons ainsi tenté de
mettre en relief la pédagogie du projet comme étant un prototype de cette perspective.
Nous avons tenté, malgré un manque d’informations manifeste de la part des quatre
enseignantes, de savoir si elles recouraient uniquement au manuel scolaire pour les
supports et les activités. Les enseignantes ont répondu unanimement que les supports
et les activités du manuel de 2ème
AS étaient toutes au-dessus du niveau des
apprenants. Elles ont également mis l’accent sur le caractère non motivant des
supports, un caractère qui selon eux ciblent particulièrement des branches techniques
de part leurs penchant vers les thématiques scientifiques ; ce qui peut constituer selon
eux, un facteur démotivant pour les filières littéraires. Le début de chaque livre devrait
constituer « une attache » pour le lecteur, tel est évidement le cas des manuels
scolaires, nous avons remarqué tout au long des entretiens que les critiques des
enseignantes s’orientent systématiquement vers le premier projet ; ce qui, selon nous,
pourrait diminuer l’intérêt des apprenants pour le reste du livre.
Nous avons évoqué avec les enseignantes les projets didactiques. Nous avons constaté
que ces projets, pour les enseignantes interrogées, sont détachés de leur contexte
didactique dans la mesure où elles ne savent pas que les projets de classe s’inscrivent
dans le cadre d’une pédagogie active. Nous avons remarqué que les PES12
ne
connaissent pas les modalités de la réalisation des projets, les objectifs effectifs, etc.
Les quatre enseignantes ne connaissent que l’approche par compétences ; elles ont
conscience que désormais c’est l’apprenant qui est au centre de son apprentissage ;
12 Professeur d’enseignement secondaire
68
néanmoins elles ignorent comment la mettre en pratique. Notre corpus d’étude ne
mentionne le projet qu’au début de chaque unité didactique, et les textes et supports
qui devraient y correspondre n’ont pas une relation avec les intitulés ; ce constat a été
établi également par les enseignantes.
En parlant de la pédagogie du projet et des nouvelles méthodologies d’enseignement,
nous nous retrouvons par extension dans le travail de collaboration, vu que les
nouvelles approches préconisent le travail de groupe comme une situation
interactionnelle semblable à une micro société. En ce qui concerne cette dimension, les
enseignantes ainsi que nous-mêmes, avons conclus que le livre de la 2AS ne sollicite
explicitement ni par le biais du projet ni par les activités le travail entre pairs. Les
consignes ne s’adressent jamais à un groupe d’apprenants. Nous avons également
évoqué dans nos entretiens la dimension actionnelle dans le manuel scolaire en la
reliant intimement à l’usage social de la langue, comme étant un moyen crucial dans
l’apprentissage actif d’une langue.
Nous avons affirmé précédemment que les projets destinés aux apprenants ne
combinent pas l’agir d’usage et d’apprentissage et ne permettent pas à l’élève
d’exploiter son savoir-faire en dehors de la classe. Ceci dit, l’action dans le manuel
scolaire demeure dans son acception classique un agir relié essentiellement à
l’apprentissage. Un autre constat que nous avons établi, et auquel les enseignantes
interrogées ont également adhéré, est la non concordance des supports avec la
thématique du projet. Nous avons rappelé précédemment le cursus des enseignantes
pour appuyer le fait que les enseignantes du secondaires n’ont pas reçu une formation
académique spécialisée dans l’enseignement du FLE mis à part l’enseignante 03. En
outre, nous notons le manque d’encadrement professionnel, qui reste, selon les
enseignantes interrogées, théorique et abstrait. En conséquence, nous avons eu des
difficultés à étaler la dimension méthodologique avec les enseignantes ; nous avons
pour cela préféré interroger les enseignantes en fonction de leur expérience sur le
terrain ; nous leur avons demandé leur avis sur l’action dans le manuel et exactement
l’agir social dans ce dernier et elles se sont entendues sur le fait qu’il soit quasi absent
dans les projets.
69
En fonction de notre analyse et des entretiens réalisés avec les enseignants nous
proposons :
-Un manuel scolaire destiné pour les branches littéraires et un autre pour les branches
scientifiques, nous suggérons que les livres soient riches en supports variés à caractère
littéraire et technique
- Un manuel accompagné de supports audio ou audio-visuel pour favoriser la
compréhension, la communication et le recours à l’expression. Autrement dit,
introduire les TIC comme auxiliaire aux livres scolaires.
- Une amélioration au niveau de la mise en page et des supports visuels, afin de
susciter l’intérêt et la motivation des apprenants.
- Une mise en avant de la méthodologie ciblée au début du manuel ou par le biais de
documents d’accompagnement avec les procédés d’application.
- Des textes et supports plus pertinents par rapport aux projets.
- Des projets pédagogiques qui ciblent l’univers des apprenants qui leur permettent de
projeter leur savoir-faire en groupe.
- D’introduire des activités et des applications qui ciblent explicitement un groupe
d’apprenants et qui suscitent de ce fait leur collaboration.
- D’introduire des supports et des activités qui soient en meilleure adéquation avec le
niveau général des élèves et qui favorisent l’installation de nouvelles compétences tout
en tenant compte des lacunes des apprenants.
- D’insister sur l’agir d’usage ou social en permettant à l’apprenant d’exploiter ses
acquis en dehors de la classe
70
CONCLUSION
A l’ère de la mondialisation, l’enjeu de joindre enseignement, modernité et efficience
relève d’une tâche ardue pour les spécialistes du domaine. La quête de performance
demeure une priorité dans le domaine de la didactique des langues et cultures, dans la
mesure où il y a expansion des savoirs relatifs à l’enseignement/apprentissage, une
expansion dans les domaines socio-économique, scientifique etc. Le défi est d’abord
de convenir avec les exigences du siècle, et surtout agir dans une logique qui permettra
aux citoyens de demain de s’adapter, de produire et de cohabiter. Un autre défi pour
les spécialistes réside dans le fait de devoir pallier aux nécessités des apprenants
d’aujourd’hui qui s’affirment de plus en plus exigeants vis-à-vis de leur apprentissage.
Ces apprenants expriment un urgent besoin d’étudier dans un milieu similaire à leur
environnement social : un milieu dynamique, actif, ouvert sur l’autre et surtout entouré
de l’audio-visuel et du virtuel. Dans ce sens, le recours aux technologies de
l’information et de la communication en contexte de classe a semblé offrir une
excellente alternative de support aux apprenants, leur offrant une motivation et intérêt
réel. En matière de supports, le manuel scolaire demeure incontournable et
irremplaçable pour l’enseignant et pour l’apprenant. En Algérie, le livre scolaire
représente un support inévitable dans l’enseignement/apprentissage. D’abord, nous ne
trouvons pas une diversité au niveau des manuels scolaires. Il y a un manuel unique
pour chaque matière. Ensuite, nous constatons une réticence par rapport au recours aux
manuels parascolaires surtout quand il s’agit du français. Ces éléments font du manuel
la première vocation dans l’enseignement/apprentissage. Il ne faut pas oublier que le
manuel scolaire pourrait constituer un document qui abrégera les efforts des
enseignants et offrira des supports qui devraient combler les besoins et les espérances
des apprenants. En théorie, le livre scolaire constitue un support facilitateur de
l’apprentissage ; son contenu doit être formulé en termes de finalité institutionnalisée
et d’objectifs visant à le rendre plus accessible, et surtout plus utile.
Dans notre travail de recherche intitulé « analyse du manuel scolaire de la deuxième
année secondaire, quel rapport avec la nouvelle méthodologie d’enseignement ? »,
71
notre questionnement central était orienté vers le lien qu’entretient le manuel avec les
nouvelles méthodologies d’enseignement, notamment la pédagogie du projet et la
perspective actionnelle. Nous nous sommes interrogés dans cette perspective sur la
réalité de la refonte des manuels. Etait-elle superficielle ou bien effective au niveau
des contenus ? Pour répondre à la problématique, nous avons d’abord voulu démontrer
l’impact de l’idéologie et de la politique linguistique dans la conception des manuels
scolaires vu que l’emprunte idéologique dominera un aspect important de ces derniers
et ira même à imposer un schéma récurent dans la conception. Nous avons par ce fait
voulu démontrer que si on veut qu’il ait vraiment un changement au niveau des
manuels, il faudrait qu’il s’opère avant un changement de paradigmes politiques et
idéologiques. Dans cette première partie de notre travail de recherche nous avons
évoqué la question de l’identité et de l’altérité, et la carence à toute forme
d’hybridation culturelle dans notre corpus d’étude. Nous nous sommes penchés
également sur la question des méthodologies d’enseignement et leur influence sur
l’enseignement/apprentissage de manière directe et la conception des manuels scolaire
de manière indirecte. Par la suite, nous avons établi une présentation du manuel
scolaire de la deuxième année secondaire à la lumière de ce que nous avons évoqué
auparavant, cette présentation avait pour but de mettre en exergue la question de la
méthodologie et de l’idéologie dans le manuel scolaire. Dans la troisième partie de
notre mémoire, nous avons travaillé l’analyse du manuel scolaire d’un point de vue
méthodologique. Nous avons pris comme cas de figure l’approche actionnelle et la
pédagogie du projet. Nous avons voulu mettre en évidence la perspective actionnelle
dans la démarche du projet. Il est incontestable qu’en évoquant les nouvelles
méthodologies d’enseignement, nous pensons directement à « l’agir avec l’autre »
autrement dit la dimension collective. Nous avons analysé le discours, les consignes du
manuel scolaire afin de déceler un discours qui incite au travail de groupe ; cependant
ce type d’énoncé était totalement absent du manuel scolaire. Nous avons ainsi conclu
que l’enseignement demeure dans la logique « d’agir sur l’autre » uniquement, en
faisant de toute alternative permettant la collaboration entre les pairs inexistants. Nous
avons accordé une importance particulière aux projets pédagogiques comme étant un
leitmotiv de cette logique de collaboration en classe, mais notre analyse des projets a
72
relevé une autre fois cette déficience dans la mesure où les projets destinés aux
apprenants n’inscrivent pas l’apprenant dans une démarche collective, allant de la
formulation impersonnelle des projets au contenu de ces derniers ; nous avons
l’impression qu’il s’agit de consignes d’exposé. Nous avons conclu que le meilleur
projet qui serait en mesure d’amener les apprenants à coopérer était bel et bien le
théâtre vu que les apprenants se mobiliseront obligatoirement autours de la mise en
scène de la pièce. Nous avons également vu dans la partie analytique du manuel
scolaire la dimension actionnelle dans le manuel scolaire. Nous avons tout de même
insisté sur le fait que chaque méthodologie d’enseignement détenait sa perspective
actionnelle ; de ce fait, nous avons voulu enlever tout amalgame sur la question
méthodologique en Algérie. Même si les directives officielles inscrivent
l’enseignement/apprentissage dans l’approche par compétences. Ceci dit, notre analyse
de la dimension actionnelle dans le manuel scolaire a relevé au niveau des projets
pédagogiques la continuité du schéma communicatif dans la mesure où les projets
n’appellent pas l’apprenant à l’action (contexte social) mais l’inscrivent toujours dans
les tâches communicatives habituelles comme la présentation. Le dernier point dans
notre analyse du manuel scolaire de la 2ème
AS s’est intéressé aux procédés qui
permettent la finalisation du projet par les apprenants ; l’étude des consignes nous a
permis d’affirmer que les activités et les micro-textes support du manuel
n’entretiennent aucun rapport avec l’essence du projet. Nous avons donc conclu que
les projets ne représentent qu’un titre séparé de son contexte, qui figure au début de
chaque unité didactique. Dans la partie intitulée, le manuel du point de vue des
enseignants, nous avons confronté notre analyse à l’expérience et vécu des enseignants
et nous avons pu constater une certaine adéquation avec nos propos. Cependant, nous
avons pu déceler une confusion en matière de méthodologie chez les enseignantes avec
lesquelles nous nous sommes entretenus. Les enseignantes ne savaient pas quel était
réellement l’apport des nouvelles méthodologies sur le livre scolaire. La pédagogie du
projet leur semble étrangère même si les projets doivent être travaillés en classe.
Bien que nous mettions un terme à notre étude sur le manuel scolaire de la deuxième
année secondaire, cette recherche aurait pu exploiter d’autres éléments du manuel ;
notre corpus d’étude aurait pu être abordé sous un angle différent. Il aurait été
73
intéressant d’analyser La corrélation du manuel scolaire avec les normes de
conception. Les travaux de Gérard et Roegiers portent justement sur l’élaboration des
manuels scolaires, nous aurions à étudier la conformité du livre scolaire avec les
conventions relatives aux concepts, à la conception, et l’évaluation. La question
centrale se rapporterait donc au « comment ?». Nous aurions pu également nous
centrer sur la question de l’interculturel dans les supports du manuels scolaires, les
travaux de M. Abdallah-Pretceille, par exemple, constituent un éclairage intéressant
dans cette optique. Ceci dit, nous aurions à approfondir davantage la question de
l’identité et de l’hétérogénéité culturelle. Mais nous aimerions tout de même
poursuivre ce travail en étudiant une multitude de supports et en adoptant une
démarche comparative avec les nouveaux manuels scolaires qui seront mis à
disposition du grand public à partir de la prochaine rentrée scolaire. Nous avons
l’ambition de poursuivre et d’enrichir ce que nous avons déjà entamé et ainsi achever
ce que nous n’avons pas pu mener à terme
74
BIBLIOGRAPHIE
OUVRAGES
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77
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Saint Etienne.
78
ANNEXE AU MEMOIRE
Transcription des entretiens semi-directifs :
Entretien n°1 avec l'enseignante Amina
Bonjour Amina, merci de m'accorder un petit peu de votre temps pour faire cet
entretien
Bonjour, il n y a pas de quoi, vous êtes la bienvenue.
Merci, donc vous êtes enseignante au secondaire depuis combien de temps.
Euh, j'ai enseigné les élèves de deuxième année, [ah oui, au secondaire, c'est ma
quatrième année. Je fais ma quatrième année scolaire.
D'accord, donc vous n'avez pas déjà travaillé avec les anciens manuels scolaires de
l'ancien programme
Non, non.
D'accord, donc on va parler un petit peu du manuel scolaire de la deuxième année
secondaire, donc, est ce que vous avez l'habitude de travailler avec ce manuel en
classe. Est-ce que vous pouvez nous dire comment [et
Bon, pour commencer, moi, j'ai déjà enseigné ++, euh trois ans les élèves de
deuxième année, euh, malheureusement je n'ai pas eu beaucoup l'occasion de
TRAVAILLER avec ce manuel, justement parce que, euh, je travaille beaucoup plus
avec les manuels parascolaire, moi, je trouve que le manuel de deuxième année, le
manuel officiel ne correspond pas beaucoup euh aux objectifs visés, ne s'adapte pas
aussi au niveau des élèves ni aussi aux objectifs de la séquence et du projet.
Voilà,
D'accord
donc, je ne travaille pas beaucoup avec le manuel. Quoi que, j'ai déjà emprunté
quelques textes mais, on ne peut pas emprunter la méthode ou bien, euh, on ne PEUT
compter sur le livre pour faire toute une fiche.
D'accord, euh donc Amina, vous n'avez pas l'habitude de travailler avec le manuel
mais, est-ce-que vous avez l'habitude de travailler sur les projets pédagogiques
Oui, oui, bien sûr.
79
Qui s'inscrivent au début de chaque unité
Bien sûr, on est obligé de le faire, oui , dans le programme ça s'impose et puis c'est
une activité que je pense importante pour les élèves.
D'accord, est-ce que vous pensez que ces projets inscrivent réellement les
apprenants dans une logique actionnelle ? Est-ce que ça leur poussent vraiment à
l'action?
Oui, bien sûr, parce que, euh, le projet déjà, c'est une activité qui permet aux
élèves de travailler en groupe, de euh faire des recherches, de (5 sec) on va dire de
préparer des coordinations entre les coéquipiers, de se rassembler, de se concerter, etc.
donc, c'est, forcément il y a de l'action bien sûr et AUSSI dans la présentation des
projets, il y a de l'action. Les élèves vont devoir présenter et expliquer le contenu de
leurs projets et parler, s'exprimer etc. donc bien sûr ça a une dimension actionnelle
bien sûr.
D'accord, donc, est-ce-que vous pensez que les projets inscrits dans les manuels
permettent vraiment aux apprenants de se projeter, est-ce-que ça leur inspirent
réellement?
Ça les inspire euh (soupir), bon, avec les élèves d'aujourd'hui, vous savez il est
difficile d'attirer leur attention, il est difficile de trouver des thèmes qui les inspirent,
qui sollicitent leurs intérêts donc ++ on fait avec ce qu'on a, ça les intéresse ou pas,
c'est, les thèmes abordés dans les projets sont imposés donc, ça les intéresse ou pas, on
est obligé de faire avec les moyens de bord, avec ce qu'on a.
D'accord, mais par rapport à eux, est-ce-que vous pensez que c'est motivant ou
c'est juste par obligation qu'ils font cela.
Je pense (soupir) PAR OBLIGATION, oui, surtout en ce qui concerne le premier
projet, le projet qui parle des grandes réalisations scientifiques et techniques de notre
époque. Euh, si on parle par exemple des élèves, les élèves scientifiques de classes
scientifiques ça peut les intéresser mais pour les élèves de classes littéraires, ils sont
complètement à côté de la plaque, ça les intéresse pas, ils sont beaucoup plus penchés
vers les sujets euh ++ littéraires voilà.
D'accord,
80
( 5sec), Alors toujours concernant le projet, est-ce-que les apprenants se
mobilisent réellement autour de ce projet quand il s'agit de la répartition des tâches?
Donc, est-ce qu'ils répartissent vraiment les tâches ou li y a un seul apprenant qui fait
le travail et les autres inscrivent leurs noms dans le projet?
Moi je dis que euh cela dépendra comment dire (soupir) de suivi de l'enseignant,
il faut que l'enseignant soit à jour avec euh, il ( ne) faut pas se lancer dans les autres
activités et oublier leurs projets, il faut demander de temps en temps de, où est-ce qu'ils
en sont, ou, de ramener leurs documents, de voir ce qu'ils ont déjà fait, ce qu'ils ont
avancé,
D'accord.
s'ils se partagent vraiment les tâches etc. Il faut toujours contrôler et puis c'est
quelque chose qu'on pourra vérifier par la suite dans la présentation des projets.
D'accord, est-ce que cette présentation a comme même une dimension sociale? Est-
ce que les projets pédagogiques détiennent comme même une certaine dimension
sociale [dans
Je pense que oui, parce que cela poussera les élèves à euh ++++ à se sociabiliser
plus avec ses camarades, avec, puis si on leur demande de travailler en groupe
forcément, il va falloir qu'ils se rencontrent en dehors de l'établissement, ils vont faire
des rencontres peut être avec les familles des autres élèves, ils vont aussi développer
leur compétence d'expression, de ++, voilà ils vont se familiariser beaucoup plus avec
le travail en groupe donc, je pense que oui, c'est il y a une dimension sociale.
Pensez-vous donc ces projets vont leur permettent d'utiliser par exemple la langue
en dehors du milieu scolaire pour réaliser leurs projets. Je dirai que CERTAINS
PROJETS, pas tous les projets, certains projets vont solliciter en effet que la langue
française, je donnerai même un exemple, pour les élèves de première année, ils ont le
projet de l'interview, donc moi dans ce projet je leur demande de se déplacer,
d'organiser des entretiens avec euh [ , généralement je leur propose le thème des
métiers, je leur demande d'aller voir euh une personne qui exerce un métier qui
81
intéresse les élèves et de leur poser des questions, forcément ça va se faire dans la
langue française sinon, ils le feront dans la langue euh, dans le dialecte algérien mais
plus tard ils vont faire la traduction, dans les deux cas ils vont devoir
Oui,
euh utiliser la langue que ce soit à l'écrit ou à l'oral.
D'accord et pour la deuxième année?
Pour les élèves de deuxième année euh (soupir) non, franchement non, c'est beaucoup
plus basé sur les recherches, le résumé, la contraction des informations etc. Je ne pense
pas que ça leur euh, je ne pense pas qu'ils utiliseront la langue en dehors de
lieu scolaire
De l'établissement. D'accord, donc mise à part le projet pédagogique et didactique,
est-ce-que vous avez remarqué dans le manuel un discours faisant appel par exemple à
une culture étrangère, à la culture française?
Voilà, comme j'avais déjà cité auparavant, je n'ai pas eu++ beaucoup exploré le
manuel scolaire de deuxième année je juge que les textes sont trop difficiles par
rapport à leur niveau, donc, mais [avec les textes avec lesquels j'ai déjà travaillé, je
dirai que non, ils ne font pas appel à la culture euh à une culture étrangère quelconque.
D'accord, à votre avis pourquoi cette absence d'allusion à une culture étrangère?
Euh, selon le, la législation scolaire, selon la formation que j'ai faite, selon le profil
visé par la politique algérienne, je pense que +on vise à ce que l'élève soit d'abord
imprégné de la culture de son pays, de l'identité de son pays avant de découvrir celle
des autres, celle des autres horizons.
D'accord, donc pour vous, c'est plus politique qu'autre chose.
Oui, oui, exactement.
D'accord, alors pour vos apprenants par exemple, est ce qu'ils ont toujours cette
représentation de la langue française comme étant langue du colonisateur euh ?
Oui, oui beaucoup, moi je rencontre beaucoup ce problème surtout au début de
l'année ,quand je vois qu'il y a un obstacle entre moi et mes élèves, je leur demande la
raison, c'est ce qui me répètent à chaque fois, ça se répète à chaque année, donc, c'est
par rapport à la langue du colonisateur, ils trouvent que euh ++ qu'ils n'ont pas à
82
apprendre la langue de l'ennemi, carrément, ils me le disent carrément je reprends le
terme des élèves , ils me disent « C'est la langue de l'ennemi ».
D'accord, et vous faites comment pour gérer ces représentations?
J'essaie de +( soupir ) de les motiver en leur disant que toutes les langues qu'on
peut apprendre sont utiles, que justement si vous considérez la France (rire) comme un
ennemi donc il faut apprendre leur langue comme le prophète Mohammed que le salut
soit sur lui, nous a déjà recommandé de, d'apprendre la langue de, de nos ennemis,
donc j'essaie de les motiver au maximum,
D'accord
je leur dit aussi que c'est une langue qui va [à laquelle ils vont faire face dans le
monde professionnel, dans leurs études et surtout pour les élèves de classes
scientifiques, ceux qui vont faire médecine ou pharmacie etc.
Ils en auront besoin
Voilà, ils en auront besoin, ils vont étudier beaucoup de modules dans la langue
française.
Et bien pour finir, est-ce que vous pouvez nos parler enfin subjectivement du
manuel scolaire, qu’est ce que vous ne pensez toujours en vous basant sur votre
expérience d'enseignante?
Oui, euh , + alors , ce que je pense du manuel déjà le fait que je ne travaille pas
avec, ça en dit long sur ( rire ironique ), mon idée sur le manuel, euh, mais pour être
honnête il y a quelques textes avec lesquels on peut travailler qui sont intéressants,
euh, mais comme j'avais déjà dit auparavant la majorité des textes ne correspondent
pas aux objectifs et à la thématique des projets, je vous donne un exemple, vous avez
pour le premier projet euh
La réalisation
Voilà, les grandes réalisations techniques et scientifiques de notre époque, ensuite
pour commencer, on vous propose dans le livre un texte qui parle de la société des
abeilles, euh, on parle de [ comme le titre l'indique la société des abeilles, euh, on ne
voit pas le rapport avec l'intitulé du projet, vous avez aussi les relations dans un
83
écosystème, c'est , ça parle de la nature de l'écosystème etc. donc on ne peut pas se
contredire avec les élèves, quand on leur demande de faire des recherches sur les
réalisations scientifiques et techniques, par la suite il faut trouver des textes qui
correspond
Qui correspondent,
Voilà, c'est pour ça que je ne travaille pas beaucoup avec ce livre, et vous avez
aussi les exercices, euh +++ qui ne correspondent pas aussi aux activités de points de
langue proposés dans le programme.
Donc, ce n'est pas la même chose.
Oui, parfois, ça n'a rien à voir carrément, même les exercices, je trouve, les++ ils
sont difficiles, je dirai carrément qu'ils sont difficiles par rapport au niveau de nos
élèves surtout pour les classes littéraires.
D'accord, donc, pour un manuel qui est destiné à toutes les filières, est-ce-que vous
trouvez ça correcte ? Un manuel pour toutes les filières ?
Non, je (ne) trouve pas ça correcte, justement, euh, ça n'aide ni les apprenants, ni
l'enseignant aussi, l'enseignant va devoir trouver des textes qui s'adaptent au niveau de
ses élèves et on sait très bien que toutes les classes n'ont pas forcément le même
niveau, donc il va devoir chercher au lieu de, un texte, il va chercher deux, trois et c'est
pour lui une grosse perte de temps, pour les élèves aussi, c'est +++on ne peut pas
proposer le même texte, j'irai même plus loin ++ je dirai que le programme ne doit pas
être le même pour les élèves de classes scientifiques que pour les élèves littéraires .
Donc si le programme et les projets sont les mêmes donc les textes forcément vont être
euh (9 sec). Voilà, moi je pense que tout doit être révisé y compris le programme.
D'accord
On ne peut pas proposer le même programme, si on le fait, il faudra trouver des
textes qui s'adaptent à toutes les filières.
Merci, beaucoup Amina,
Je t'en prie
merci pour le temps que vous m'avez accordé.
Il n'y a pas de quoi, merci à vous aussi, je vous souhaite bon courage et bonne
continuation
Au revoir
Au revoir
Entretien n° 2 avec l'enseignante Fatima Zohra
Bonjour Fatima Zohra
Bonjour Ihcene
Merci pour le temps que vous m'accordiez pour effectuer cet entretien
Je t'ne prie
D'abord on va parler, un petit peu de vous, vous enseignez au secondaire depuis
combien de temps?
Depuis disant 2012 j'étais au primaire
D'accord
vous enseignez au primaire
vous avez enseignez au primaire,
depuis 92 à peu près, oui ,
d'accord
alors, on va parlez des manuels scolaires, du manuel scolaire de la deuxième
année secondaire.
D'accord
Donc est-ce que vous avez l'habitude de travailler le manuel en classe?
Oui, pas forcément quand il, c'est-à-dire dans ma disponibilité de faire des photos
copies pour les élèves, je le fais sous mon propre compte et quand je n'arrive pas et
ben, là, j'utilise le manuel scolaire.
Est-ce que vous vous contentez généralement des textes, des activités qui figurent
sinon pourquoi ?
85
Bon, les, parfois je euh, c'est-à-dire je peux utiliser les textes qui sont présents
dans le manuels scolaires, pour les activités qui sont en cohérence [en convergence
avec les supports présentés dans le livre, donc là je fais appel à monsieur google
bien sûr et aux manuels, et aux ouvrages que j'ai à la maison
D'accord. alors, les nouveaux manuels scolaires se caractérisent par l'émergence
des projets pédagogiques,
Hem, hem (oui, oui)
Pensez-vous que ces projets inscrivent réellement les apprenants dans une logique
collaborative? Pensez-vous qu'en pratique les apprenants se répartissent réellement
les tâches pour réaliser les projets?
Très bien, ce qui, [ enfin, ce que je suggère pour les textes et les supports qui sont
présents dans le manuel scolaire, scolaire pardon, ce que, ils sont, c'est des textes,
ils sont vraiment anciens ça date de mille neuf cent et quelques, on aurait souhaité
parfois, ces apprenants nous dépassent dans cette technologie, ils sont parfois,
c'est-à-dire, ils ont des connaissances que nous nous n'avons pas, donc la mise à
jour, elle est nécessaire et disponible ces derniers temps.
D'accord et ce que leur, les textes et les projets ça encourage les apprenants à
travailler ensemble, à travailler en groupe en théorie et en pratique?
Là, vous parlez des supports, des textes ou bien des activités?
Des projets pédagogiques?
Ah, les projets pédagogiques, d'accord, alors les projets pédagogiques, concernant
le premier projet qui est sur les inventions technologiques et scientifiques de notre
époque donc, justement là, j’ai fait enfin, appel , les élèves élaborent des projets
ensemble donc ils font de la recherche mais la recherche sur le net, ils consultent
jamais les manuels scolaires ça encourage parce que je leur consacre un moment
pour présenter un projet donc c'est bien dans l'ensemble ça encourage le travail en
groupe
D'accord
Techniquement, tous les apprenants participent ou bien il y a quelqu'un qui fait le
travail et les autres inscrivent seulement leurs noms?
Non, c'est-à-dire [à propos des classes que j'ai, c'est tout le monde qui travaille
D'accord.
Je vous assure.
Oui, donc de manière générale qu'est-ce que vous pensez des projets
pédagogiques?
Très bien, alors les projets pédagogiques, la progression, la science, c'est bien euh
il y a aussi l'argumentation, c'est bien parce qu'on fait appel à un citoyen du monde
et un citoyen du monde doit argumenter, doit convaincre, doit persuader à tout
moment, pour le reportage touristique aussi, c'est bien, ça fait partie de la culture,
est ce qu'on peut aller vers la culture de l'autre, pour le dernier projet qui est la
nouvelle d'anticipation au contraire ça développe l'imaginaire de l'enfant et on
parle de l'anticipation.
D'accord, une dernière question concernant les projets, croyez-vous que les
manuels scolaires permettent aux apprenants de s'inscrire dans la dimension
sociale dans la mesure où la réalisation du projet leur permettra d'investir leurs
compétences en dehors de la classe, autrement dit, est-ce-que ces projets
détiennent selon vous une dimension sociale?
Dimension sociale, non, non, je vois pas une dimension sociale par les projets au
contraire ça fait partie de l'enrichissement personnel mais social non, à mon avis,
c'est une opinion.
D'accord
Selon vous, ce sont des recherches qui se font sur internet
Sur internet beaucoup plus, oui, donc les élèves ne font des interviews, c'est-à-dire,
ils consultent même pas des livres, toujours le Net, donc procéder par copié collé
Copié collé exactement oui
D'accord, alors, pensez-vous, concernant les activités du manuel, qui l'incite les
apprenants à l'action et à la collaboration également dans la classe et en dehors de
la classe?
Action et collaboration?
Action et collaboration, est ce qu’il y a mention dans la manuel scolaire d'action et
collaboration voilà , activité de groupe ?
Non, non jamais, jamais, il y a pas, c'est-à-dire dans les consignes, on n'incite pas
les élèves à travailler ensemble, c'est l'enseignant qui le fait en classe
D'accord
Par exemple dans les consignes proposées pour la production écrites, c'est-à-dire,
on n'a jamais demandé à un élève de sortir sur terrain, de faire une enquête, sur je
ne sais pas, qal (disons) je m'excuse pour le (rire)
C'est pas grave
Alors, d'aller questionner des gens, c'est-à-dire chercher les avis sur tel ou tel
sujet, sur un sujet à débattre, non.
Donc ++ c'est reste
Ça reste au niveau de la classe
Alors, maintenant, parlons culture dans le manuel scolaire, est-ce que vous avez
par exemple remarque une allusion à la culture française, une culture étrangère,
francophone dans le manuel à travers les textes?
Bon culture française non francophone oui par exemple De Niamy à Gao , là on
parle du Mali, euh par exemple dans l'argumentation il y a un texte qui parle de
Viennes, c'est tout, euh, les autres, ce sont des textes propres à nous l'Algérie euh
sinon, quand il s'agit des textes scientifiques c'est d'ordre générale.
À votre avis pourquoi cette absence d'allusion à la culture française dans le
manuel ?
Ça touche beaucoup plus l'idéologie et aussi l'Histoire, on a (rire) un héritage
historique entre nous et la France donc les Algériens même, c'est-à-dire les petits
Algériens qu'on a à l'école, ils ont toujours euh dans leur esprit qu'il s'agit du
colonialisme, du colon, donc, c'est la culture du colon on ne doit pas aller vers le
colon, on ne doit pas connaitre leur culture, chose qui n'est pas euh par rapport à
l'anglais, à l'anglais, d'ailleurs les élèves chantent en anglais, ils refusent de chanter
en français.
D'accord et vous faites comment pour gérer ces représentations en classe?
+++ Alors là je fais toujours appel à notre religion à l'Islam, aux citations de
Prophète Mohammed sala lahou 3alaihi wasalem (paix et salut sur lui), bon je cite,
man ta3alama loughata qawmin amina charahoum (celui qui apprend la langue
d'un peuple se protègera de leur mal) ça en premier lieu et en second lieu je cite
toujours Kateb Yacine le français est un butin de guerre, on a fait la guerre avec la
France et on l'aura c'est-à-dire on s'est approprié cette langue, elle est devenue la
nôtre, comme le dit Kamel Daoud le français est un bien vacant (rire), on a pris ce
bien vacant (rire)
D'accord, et bien pour conclure, qu'est-ce que vous pensez du manuel scolaire en
vous basant sur votre propre expérience, concernant les textes, les supports, euh
,les activités, les projets, d'une manière générale vous en pensez quoi ?
Bien alors, le texte, à mon avis, c'est à mettre à jour, chercher de nouveaux textes,
d'activités qui sont en relation avec les supports proposés dans le texte.
Par exemple, excusez-vous, est ce que les projets correspondent à la thématique de
Oui il y a une correspondance, oui
Dans le premier par exemple?
Oui, dans le premier, oui, si, ça converge toujours avec la thématique proposée,
mais je souhaiterais que ça soit traité de la même façon que, c'est-à-dire dans le
manuel d'anglais, alors dans le manuel d'anglais, on trouve toutes LES
ACTIVITÉS donc Le prof NE SE FATIGUE PAS, il y a le support et les activités
et ça travaille.
D'accord mise à par les textes euh
Bon, j'ai dit tout à l'heure que les supports convergent avec l'objectif, moi je
parlais de l'objectif de la séquence.
D'accord
Si par exemple, je prends la première séquence du projet présenter un phénomène,
un fait une notion, là oui, je suis tout à fait d'accord la même chose pour la
deuxième séquence, la troisième séquence mais, si on cite la thématique du projet,
elle-même, il y a aucune convergence, c'est-à-dire si la thématique ou bien
l'intitulé du projet est à droite et les textes proposés sont à gauche.
D'accord, merci beaucoup bien Fatima Zohra,
Je t'en prie
pour votre collaboration pour le temps que vous m'avez accordé
Merci, merci, welcome.
Entretien n°3 avec l’enseignante Amel
Bonjour !
Bonjour!
D'abord je vous remercie pour le temps que vous m'accordez pour m'entretenir
avec vous au sujet du manuel scolaire de la deuxième A S.
Je vous en prie ++ je suis à votre disposition.
Merci, donc on va commencer par une question d'ordre générale, euh, est-ce
que vous avez l'habitude de travailler avec le manuel scolaire de deuxième
année secondaire ?
Généralement oui, j'en ai l'habitude de travailler AVEC LE MANUEL
SCOLAIRE, sinon+++ pas tous les textes,< sinon je ramène d'autres supports
des textes> tout dépend des projets.
D'accord,+++ euh, est-ce que le manuel est indispensable pour vous. Est-ce que
vous pouvez vous en passer ou bien il est indispensable.
Je vous ai dit, euh ça dépend les projets des fois je m'en passe
Est-ce-que vous êtes obligée de travailler avec
Non, non, dès fois je ne l'utilise même pas.
D'accord, euh, est-ce que vous vous contentez des textes supports et des
activités qui figurent sinon pourquoi?
Concernant les activités?
Les activités?
Les activités et les textes supports?
et ben concernant les activités j'essaie de travailler avec des manuels
PARASCOLAIRES qui n'ont rien à voir c'est-à-dire avec le manuel scolaire, à
mon avis les activités ne sont pas adaptées au niveau des élèves et parfois elles
n'ont pas une relation avec le PROJET LUI-MÊME
D'accord et les textes ?
ET LES TEXTES AUSSI oui.
D'accord, les nouveaux manuels scolaires se caractérisent par l'émergence des
projets pédagogiques, pensez-vous que ces projets inscrivent réellement les
apprenants dans une logique collaborative ? Est-ce qu'ils insistent les apprenants
à la collaboration ?
Euh, oui
Autrement dit, est-ce-que vous pensez qu'en pratique les apprenants répartissent
réellement les tâches, est-ce qu'ils travaillent réellement ensemble ?
Et ben je dirai oui et non, dans la forme on a l'impression que les élèves
travaillent ensemble pour réaliser les projets, en réalité du moins+++ ce que j'ai
constaté, euh, il y a un ou deux qui font le travail et les autres, qui inscrivent
juste leurs noms sur la feuille, sur le projet qu'ils réalisent.
D'accord
Je crois que c'est dû au fait que les élèves ne sont pas vraiment motivés par le
contenu du projet et ceux qui font le travail, c'est les bons élèves généralement,
alors qu'ils soient motivés ou non ils font le travail, ils cherchent la note, avoir
une bonne note etc.
D'accord, le manuel vous aide-t-il à faire travailler les élèves par groupe
lorsque que c'est nécessaire
Euh, et ben, oui et non, car lors de la présentation ++ il y a tout le groupe qui
passe mais les grandes tâches sont assignées aux bons élèves, généralement,
c'est ça, c'est comme ça que ça se passe et les autres font que de la lecture alors
(c'est-à-dire ils (ne) collaborent pas, ils …..
D’accord, mais par rapport à cette question, est ce que les tâches sont
mentionnées par exemple dans le manuel scolaire, est-ce que le manuel autant
que tel autant que livre scolaire vous aide à faire travailler les élèves par groupe
? Donc est-ce qu'ils mentionnent les tâches ?
Non, non ils (ne) mentionnent rien il (n') y a rien il n'y a pas de tâches
mentionnées dans le manuel scolaire.
D'accord
En fait, l'effort revient [au ] à l'enseignant, celui qui répartit les tâches, c'est-à-
dire les tâches du groupe, repartit les groupes , assigne à chaque élève une tache
etc. Les élèves ne font aucune (tâche), le manuel je veux dire que le
manuel ne guide pas vraiment les élèves à partager les tâches etc.
D'accord, une autre question, pensez-vous que ces projets inscrivent les
apprenants dans une logique actionnelle ?
Vous pouvez répéter la question s'il vous plait
Euh, est-ce que les projets poussent les apprenants, les élèves à l'action dans la
mesure où les élèves deviennent plus actifs bon ils ont des tâches donc chacun
accomplit une tâche, accomplit une action, d'accord et le prof qui est comme
même, devient comme même plus animateur en distanciation avec son
apprenant.
Ce qu'il devrait arriver, mais tout dépend de la nature du projet, par exemple
dans le projet [intitulé 1 du livre de 2AS intitulé Réaliser une dossier
documentaire pour présenter les grandes réalisations scientifiques et
techniques de notre époque généralement dans ce projet les élèves ne font que
du copier-coller d'internet, ils ne [sont pas, font aucun effort supplémentaire,
Oui
ils ramènent d'internet des exposés, ils ne font même pas un résumé
D'accord
Tout dépend du projet, dans le livre du 2AS, il y a le projet du théâtre par
exemple, ce projet, vraiment, il pousse les élèves à l'action, il y a aussi un autre
exemple si je me rappelle dans le livre de 1AS, les élèves ont été amenés +++
92
les élèves ont été amenés à interroger des gens dans euh ++ leurs métiers à
réaliser des interviews, à enregistrer des interviews, ils sont tellement motivés
qu'ils se sentent concernés :: ils se sentent aussi concernés ils se sentent aussi
comme des futurs journalistes.
D'accord
Ça les motive vraiment
D'accord
Et le projet du théâtre est vraiment adapté au manuel et à leur niveau, euh, je
veux dire aux besoins des élèves.
D'accord, une autre question,
Oui !
le projet est-il vraiment le cadre encarteur, autrement dit, est-il vraiment le but
autour duquel s'organise ensemble des activités, euh, les activités, les textes
supports du manuel permettent-ils de guider l'élève vers la réalisation de chaque
projet ?
Euh non, non, j'ai constaté, du moins , j'ai constaté que les activités et les textes
n'ont presque aucune relation avec le projet par exemple dans le premier projet
intitulé les grandes réalisations scientifiques et techniques, on propose aux
élèves des supports comme LA SOCIÉTÉ DES ABEILLES, euh [le séisme,
LES SÉISMES ,LES RELATIONS DANS UN ÉCOSYSTÈMES, donc des
supports qui n'ont rien à voir avec le projet, avec l'intitulé du projet, ou est la
relation, il n’y a pas de relation entre les deux alors les élèves ne sont pas
motivés.
D'accord
Et ça ( ne ) les aide pas à cheminer vers la réalisation du projet.
Euh , pensez-vous que les projets pédagogiques inspirent réellement les
apprenants?
Et ben comme je l'ai dit tout à l'heure, c' (n') est pas motivant du tout, les élèves
ne sont pas motivés ne sont pas inspirés
Est-ce que, c'est par rapport à tous les projets, au bien à quelqu'un ?
Pas tous les projets mais presque tous les projets je parle de la totalité, en
général, excepté le théâtre par exemple, le projet du théâtre qui est vraiment un
projet adapté motivant, il motive vraiment les élèves,
D'accord
ça les aide à travailler
croyez-vous que les manuels permettent aux apprenants de s'inscrire dans une
dimension sociale dans la mesure où la réalisation du projet leur permettra
d'investir leurs compétences en dehors de la classe, autrement dit, est ce que ces
projets prennent en compte l’agir social ?
Euh++, comme je l'ai dit tout à l'heure, pour dire que tous les projets poussent
les élèves à un agir social, c'est faux, on ne peut pas dire ça sur le terrain on
peut dire que les élèves cherchent la facilité
D'accord
Ceci me rappelle un documentaire que j'ai vu en France ou en Belgique, je ne
me rappelle pas, on demande aux élèves de créer des publicités, après avoir
réalisé ces publicités, les élèves sont amenés à les afficher, afficher leurs
pancartes etc dans la rue et distribuent aussi des dépliants à des gens tout en
présentant la publicité, vraiment c'est le …..
Donc c'était en dehors de la classe
En dehors de la classe
Ça à mon avis représente vraiment un projet qui s'investit dans et en dehors de
la classe, les élèves [sont devenus, ils deviennent autonomes responsables, etc.
Motivés aussi
pour conclure qu'est-ce que vous pensez du manuel de manière générale ? Bien
sûr en se basant sur votre expérience
Beaucoup de chose à dire, bon, je ne suis pas expérimentée c'est à dire dans le
domaine de la recherche etc. Je suis juste une enseignante mais je peux dire à
mon avis il y a beaucoup de choses à revoir dans le manuel scolaire
D'accord
Concernant le travail du groupe, l'oral
Oui
Voila
Donc à votre avis il faudrait revoir le manuel scolaire
Revoir
C'est les spécialistes qui font ça
Oui
Je vous remercie pour le temps que vous m'avez accordé
Je vous en prie
Merci
Je vous en prie, au revoir
Entretien n° 4 avec l'enseignante Nouria
Bonjour madame MOUSSAOUI, merci pour le temps que vous m'accordiez pour
réaliser cet entretien, donc je vais d'abord parler de votre expérience
professionnelle, ça fait combien d'années que vous enseignez?
J'enseigne depuis 92 [1992
D'accord
Ça fait combien? Ça fait plus de vingt ans, ça fait vingt-cinq !
Vingt-quatre-ans
Vingt-quatre, vingt-cinq-ans, voilà, d'expérience en classe avec les élèves.
D'accord, vous avez enseigné avec l'ancien et le nouveau programme
Voilà.
Vous avez vu un peu les réformes.
Hi, exactement, en effet oui
On va aujourd'hui parler du manuel scolaire surtout du manuel scolaire de la
deuxième année secondaire, donc avez-vous l'habitude de travailler avec ce manuel
scolaire en classe?
Oui, oui, oui, j'utilise le manuel scolaire de la deuxième année puisqu'ils l'ont
introduit, donc on travaille dessus, il est riche en support, en activités etc. il est à la
portée des élèves, donc on l'utilise en classe.
D'accord, est-ce que vous vous contentez seulement des textes et des supports du
manuel ou bien vous [en
Oui, oui, on utilise les supports et les activités du manuel, plus d'autres supports
complémentaires et d'autres activités bien sûr
D'accord, alors
Dès fois le support est très long, dès fois il est difficile à comprendre, donc on fait
appel à d'autres supports extrascolaires.
Les nouveaux manuels scolaires se caractérisent par l'émergence du projet
pédagogique donc est-ce-que vous pensez que ces projets inscrivent réellement les
apprenants dans une logique collaborative ?
Théoriquement oui, mais dans la pratique, on va que ça ne se fait pas de la même
manière, les élèves soit ils ne sont pas motivés vu leur niveau, ils n'ont pas de
bagages parce que l'élève au secondaire il est censé maitriser la conjugaison, la
grammaire euh tous les outils linguistiques or, c'est (ne) pas le cas et quand on leur
demande un travail consistant pareil, il est difficile à le réaliser, c'est très difficile
pour l'élève.
D'accord, donc il n'y a pas vraiment une collaboration au sein du groupe,[il n' y a
pas vraiment un groupe?
Ils veulent bien, l'intention y est, l'intention, oui, mais ils n'ont pas la base qui leur
permette de rédiger, de reformuler parce qu'ils font une recherche et bien ce qu'on
leur demande, on partage les tâches, ils font la recherche, mais qu'est ce qu'ils font
un ++ tirage et ils ramènent.
Un copié collé.
Voilà donc ils n'arrivent pas à reformuler parce qu'ils ne savent pas construire
correctement une phrase.
D'accord, pensez-vous aussi que les projets inscrivent les apprenants dans une
logique actionnelle mais à part la collaboration, est ce que ça leur incite à l'action
Je vous dis que l'intention y est, ils veulent bien mais ils ne savent pas, on les aide
il y a l'assistance ta3 l'enseignant etc. On voit que l'élève fournit des efforts surtout,
un petit groupe d'élèves qui aiment la langue, qui aiment travailler, qui aiment
96
avoir de bonnes notes etc. Ils font des efforts mais ce n'est pas suffisant pour
réaliser un projet.
Oui d'accord, par rapport à la formulation de ces projets dans le manuel, les
intitulés
Les sujets?
Voilà, est ce que ça incite à faire vraiment un travail de groupe?
Ils SONT, ils sont d'actualité, les thèmes abordés dans les projets sont d'actualité,
ça concerne l'environnement, ça concerne les réalisations scientifiques, ça
concerne tout ce qui peut toucher à la ++vie actuelle ++ d'apprenants
D'accord, donc ça leur permette de se projeter
Oui, oui, de se mettre en situation.
Une dernière question concernant les projets pédagogiques, croyez-vous que les
manuels scolaires permettent aux apprenants de s'inscrire dans une
dimension sociale dans la mesure où la réalisation de ces projets leur permettra
d'investir leur compétences en dehors de la classe ? Autrement dit, est ce que ces
sujets détiennent selon vous une dimension sociale ?
Oui, bien sûr, le sujet est bien choisi, il concerne la vie sociale de l'apprenant en
relation avec sa vie sociale, notre société, donc c'est un thème ou un problème posé
sur euh sa vie familiale, sociale etc.
D'accord
Ça le touche directement.
Vous pouvez me donner un exemple ?
Il se met dans la situation et il peut [ je sais , il peut le travailler s'il a son bagage,
s'il a une base en langue française
D'accord
Parce qu'on voit que les élèves dès fois ils s'expriment, ils nous donnent la réponse
juste, ils nous donnent des informations très pertinentes en arabe mais il ne sait pas
+ les transposer vers [
Donc ils n'ont pas l'outil nécessaire
Voilà, c'est tout, l'outil linguistique.
Un exemple, je ne sais pas, quand on a parlé de la pollution de l'environnement, on
me donne plusieurs causes très riches, les élèves connaissent les causes,
connaissent les propositions, connaissent les conséquences, les solutions proposées
mais, ce qu'il leur manque euh, c'est comment les formuler en langue française,
c'est ça leur problème.
Donc puisque vous avez enseigné avec les deux manuels scolaires, selon vous
lequel vous préférez et pourquoi ?
Euh, ouf, l'élève, l'ancien élève, ce n'est pas le nouveau = élève donc maintenant
c'est l'internet, les portables etc. On ne peut pas appliquer le contenu de l'ancien sur
des élèves de maintenant.
D'accord
C'est autre chose
Oui, avant ça donne à réfléchir, ça demander à [etc. Maintenant il coche, il relie, il
complète, ce n'est pas les mêmes activités du tout, du tout.
D'accord et concernant les textes par exemple, les anciens?
Oui, c'était riche aussi, dès fois je prends des textes de l'ancien manuel ça m'est
arrivé et ben souvent de prendre pour des activités, pour des évaluations etc. ils
sont très très bien adaptés
Une question concernant les activités, est ce que ça incite les apprenants à l'action
et à la collaboration dans la classe mis à part les sujets, est-ce que les activités
incitent les apprenants?
Oui, oui je crois qu'il y a une grande participation, il suffit de savoir véhiculer le
contenu de l'activité, dès fois ils comprennent mais une fois euh que le prof euh
leur montre ce qui faut, explique la consigne, ils se retrouvent, tu vois que c'est dès
élèves intelligents, des élèves prêts à s'investir.
D'accord, mais est-ce-que le manuel le mentionne par exemple, travail de groupe,
est-ce qu'il y a l'expression travail de groupe?
C'est l'œuvre de l'enseignant
Ça revient toujours à l'enseignant
se décider est-ce que tel autre l'activité demande un travail individuelou tel autre
travail demande un travail de groupe
donc ce n'est pas mentionné
Non, non c'est ( ne) pas mentionné, je ne vois pas,
D'accord
C'est très rarement
Parlons une petit peu de la culture de l'autre, est ce que vous avez remarqué dans le
manuel, un discours faisant appel à une culture étrangère, francophone, française
ce qu'on reproche aux supports de manuels secondaire, c'est que ces
manuels, es textes, les supports proposés travaillent la langue mais pas la culture
de l'élève dans la langue française, parce qu'on AIMERAIT BIEN que les supports
choisis auraient été riches en passage qui font appel à la culture française par
exemple l'emploi de terme je ne sais pas relatif à la culture, à la tradition etc. Pour
permettre de débattre en classe en qui consiste cette culture ou bien ce terme etc. il
y a pas ce n'est jamais mentionné le mot tour Effel, wela, (ou) au bien, je ne sais
pas noël au bien, vous voyez.
À votre avis pourquoi,
Je ne sais pas ça c'est [ce sont les concepteurs du manuel, qui ont décidé de cela
mais on aurait aimé que le choix porterait sur des textes qui contiennent euh des
aspects de euh
De la culture
De la culture française
Parce que le élève est toujours étranger quand il y a la présence de ces aspects,
permet à l'élève de voyager et de comprendre qu'est-ce qu'il y a là-bas, ça si on
travaille la culture, les supports proposés travaillent la langue et non pas la culture
et maintenant, enfin la génération actuelle n'a plus les moyens pour voyager etc.
comme avant, il y avait les auberges qui accueillaient les jeunes il y avait le travail
euh d'été pour les élèves ça leur permettait de voyager, de voir, etc. de se cultiver,
ce n'est pas le cas maintenant, ils n'ont pas [quand est-ce qu'ils vont connaitre cette
culture française et les textes ne le travaillent pas malheureusement
Donc, puisque vous enseignez le français vous avez sûrement des difficultés avec
quelques apprenants qui vous disent que c'est la langue du colonisateur, c'est la
langue de l'ennemi etc.
Voilà voilà
Vous faites comment pour gérer cette
Mais il faut pas
Je leur dis, une langue, c'est je répète le proverbe arabe qui dit man ta3alama
loughata qawmin amina charahoum( celui qui apprend la langue d'un peuple se
protègera de leur mal) ( rire ), C'est très bien d'apprendre une langue, on ne voit pas
le pays, on ne voit pas le peuple, je vois la langue elle-même, c'est une très belle
langue, le français, elle est très riche, d'ailleurs il faut, i faut, euh, mettre en
évidence cette richesse, c'est la façon de travailler quand on explique un mot, il faut
trouver tous les synonymes qui puissent exister, pour moi pour montrer à tel point
elle est riche cette langue.
D'accord
je ne sais pas ça dépend de l'enseignant pour faire aimer la langue mise à part son
Histoire, les conditions de [je ne sais pas, je pense, c'est travailler la langue pour la
langue.
Pour conclure madame, qu'es-ce que vous pensez du manuel d'une manière
générale, bien sûr votre avis subjectif en se basant sur votre expérience etc.?
J'ai [je les trouve bien, les textes sont très bien adaptés seulement, il fallait
compléter avec d'autres supports où, on trouve les aspects socioculturels
Donc selon vous ce qui manque c'est [
C'est ça, c'est ça, l'aspect socioculturel n'y est pas dans les supports joints, sinon
pour le thème, ils sont d'actualité
D'accord
Motivants, intéressants pour les élèves, ils n'ont pas de problème pour comprendre
le sujet. La compréhension du sujet est très importante, ils comprennent très bien
parce que ça les touche de prêt mais le travail de la culture de l'élève ne se fait pas
à travers
D'accord
À travers les supports proposés
Une dernière question s'il vous plait par rapport aux textes. Est ce que les textes
correspondent à la thématique du projet selon vous?
Pas de problème.
Non, non, justement, projet, je vous donne un exemple projet 1. Le projet 1ça parle
des grandes réalisations scientifiques et le premier, le texte de la première
séquence, ça parle de la société des abeilles, ça n'a rien à voir avec l'intitulé du
projet.
D'accord
Bon le texte est intéressant, moi je travaille très bien, il est intéressant mais
D'accord donc, on ne peut pas dire que c'est le cas pour tous les projets
Les autres, attendez que je me rappelle
Je vous montre le manuel
Hi hihi ,[ autre chose on a un seul manuel pour les trois filières
Justement j'allais vous poser la question (rire)
Voilà
Est-ce que c'est correct?
j'ai des problèmes, moi, j'ai, il m'est arrivé d'avoir en deuxième année, une classe
lettre et une classe science, je ne fais pas le même choix pour les deux classes.
D'accord
Parce que manipulation du vivant, du vivant ne concerne pas du tout les classes de
langues, il me faut, il m'est arrivé quand j'aborde ce texte de faire un cours de
science sur la cellule pour montrer en quoi consiste, euh,
D'accord
la modification génétique, euh, ça, c'est (ne) pas adapté donc un seul manuel pour
les trois filières, c'est (ne) pas correcte. Il fallait choisir, faire un choix de textes
littéraires très riche en images, en métaphores, etc. pour les classes lettres et
langues et d'autres textes plus scientifiques pour les classes de sciences
d'accord
pour pouvoir faciliter la compréhension. Le littéraire n'a pas les mêmes capacités
qu'un élève scientifique pour accéder à un texte scientifique.
++++Alors concernant les supports choisis pour les projets par exemple sont plus
au moins loin du contenu du projet, par exemple, j'ai donné un exemple
Oui, oui, vous avez déjà donné un exemple
Et le projet 2, il y a des supports très difficiles à comprendre, ils ne sont pas
accessibles
Merci beaucoup, madame, je vous remercie pour votre collaboration et pour le
temps que vous m'avez accordé.
Pas de quoi, pas du tout
Merci
Je vous souhaite bon courage
Résumé
L’action et l’autonomie sont au cœur des conceptions actuelles de l’enseignement/apprentissage.
En effet, les nouvelles méthodologies d’enseignement s’accordent toutes sur l’importance et la
responsabilité qui doivent être accordées à l’apprenant dans la construction de son savoir. Les
manuels scolaires devraient à leur tour refléter cette évolution méthodologique et constituer ainsi
un appui pour l’enseignant et l’apprenant. Est-ce vraiment le cas pour les manuels destinés à
l’enseignement du français en Algérie ? Telle est la problématique centrale de cette recherche
qui prend comme cas d’étude le manuel scolaire de la deuxième année secondaire.
Mots clés : manuel scolaire, action, autonomie, méthodologie, approche par compétences,
pédagogie du projet, approche actionnelle.
Abstract
Action and autonomy are at the essence of current conception of teaching/learning process.
Nowadays educationalist agree that the learner is the most important element because H/S
learner-centred. Textbooks should in turn reflect this methodological evolution and provide
support to learners. our central problem is to find the level of adequacy between the new
teaching methodologies and the french textbook of second year secondary.
Key words : textbook, action-oriented approach, autonomy, competency-based approach,
project pedagogy, didactic projet.
ملخص
هدف هذه الدراسة الى الربط بٌن منهجٌات التعلٌم و الكتاب المدرسً فً الطور الثانوي تم اختٌار الكتاب تسً للسنة الثانٌة ثانوي من اجل دراسة موافقته مع المدرسً السنة الثانٌة ثانوي تم اختٌار الكتاب المدر
احدث المنهجٌات لتعلٌم المدرسً ن مقاربة بالكفاءات , و لمقاربة بالمشارٌع و انتهاج الطرٌقة العملٌة فً التعلم وا لدراسة
الكلمات المفاتيح مشروع بٌداغوجً –مقاربة بالكفاءات –فعل –منهجٌة التعلٌم –الكتاب المدرسً
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Analyse du manuel scolaire de la deuxième année secondaire : Quelle cohérence avec la méthodologie d’enseignement ?
Résumé du mémoire :
Introduction générale et problématique
La maitrise des langues étrangères dans le monde d’aujourd’hui est devenue un
atout incontournable, une nécessité dans le monde des études et du travail. Pour
convenir aux exigences de la globalisation, le système éducatif algérien a procédé à une
réforme générale des programmes visant l’adaptation et l’homogénéisation des citoyens
de demain. Cette transition conceptuelle a dû opérer par une transition méthodologique
qui a bouleversé la vision traditionnaliste de l’enseignement/apprentissage et a touché à
différentes facette de ces derniers.
Les nouvelles méthodologies empruntées par le ministère de l’éducation nationale
soit l’approche par compétence et la pédagogie du projet ont permis aux concepteurs de
programmes de revoir le fond théorique et technique de la pratique d’enseignement. Les
manuels scolaires ont été évidement ciblé par la refonte des programmes vu qu’ils
constituent un support incontournable dans la classe et même en dehors de la classe et
vont participer de manière directe ou indirect dans le développement des compétences et
de l’agir vu que l’enseignement/apprentissage s’inscrit désormais dans une perspective
actionnelle.
La question de recherche découle d’observations et de constat que nous avons fait
en tant qu’enseignant, nous avons remarqué que les apprenants en classe de FLE évitent
de travailler avec le manuel du français, nous avons aussi remarqué qu’ils ne sont pas
captivé par le contenu de ce dernier et qu’ils se plaignent de la difficulté des supports, à
partir de ces remarques nous avons décidé de prendre comme cas d’étude le manuel
scolaire de la deuxième année secondaire afin de voir s’il y a eu innovation effective au
niveau du contenu et afin de répondre au pourquoi du désintérêt vis-à-vis du corpus,
notre objectif principal est d’étudier le niveau d’adaptation de notre corpus d’étude avec
les nouvelles approches d’enseignement/apprentissage. Pour ce faire nous avons décidé
en premier lieu d’étudier le rapport qu’entretient le manuel scolaire avec la philosophie
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et l’idéologie de l’état, et l’impact que peut avoir ces dernières dans la mise en place
méthodologique des manuels scolaires.
Afin de dresser une analyse du livre scolaire, nous avons dédié un chapitre à la
méthodologie de la recherche, dans cette séquence nous avons opté une démarche
d’analyse qualitative dans laquelle nous avons interrogé le contenu du manuel scolaire et
l’avons affronté aux méthodologies d’enseignement adoptées, nous avons également
choisis la méthode de l’entretien semi-directif pour appuyer notre analyse. Dans le
troisième chapitre nous avons procédé à l’analyse du manuel scolaire et sa corrélation
avec le paradigme actionnel qui implique tâche/action, travail de pairs, collaboration etc.
dans le quatrième chapitre nous nous sommes penché sur les entretiens que nous avons
fait avec des enseignants du secondaire, nous les avons mis en parallèle avec les résultats
de notre analyse afin de confirmer ou d’infirmer notre question de départ.
Résumé linéaire du mémoire
Le mémoire s’organise en quatre chapitres.
Chapitre I : Contexte de la recherche
Il est question dans ce chapitre d’aborder les réformes éducatives qui ont été entrepris
par le système éducatif algérien de l’indépendance jusqu’à nos jours. L’institution
éducative algérienne a connu deux grande réformes majeures et chacune d’elle a été en
rupture avec la précédente, comme l’était l’approche par objectifs par rapport à la
méthode traditionnelle et l’approche par compétences/pédagogie du projet par rapport à
l’approche par objectifs, il est à noter que l’adoption d’une nouvelle méthodologie
d’enseignement en Algérie a été la conséquence d’une mutation politique, sociale ou
idéologique comme le cas de l’arabisation du système administratif, juridique et éducatif
de 1976 ou encore la stabilité qu’a retrouvé l’Algérie après la décennie noire et son
réouverture sur le monde au début des années 2000. Cette innovation pédagogique a
rééquilibré les pratiques d’enseignement, et a renversé la représentation unilatérale
d’enseignement/apprentissage.
La mise en place de cette pédagogie active devait tout de même être en corrélation avec
la philosophie éducative de l’état qui a influencé d’une grande part le façonnage des
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manuels scolaires de manière générale et celui du français d’une manière particulière
dans la mesure où l’enjeu identitaire a tamisé l’aspect culturel et documentaire et
historique de la langue française, dans cette optique le manuel du français est devenu
véhicule de la langue en elle-même, du savoir documentaire mais en aucun cas de la
culture de l’autre, ceci dit nous avons essayé de démontrer qu’une idéologie peut avoir
un impact sur le contenu des livres scolaires. Nous avons à la fin du chapitre présenté
notre corpus d’étude et l’avons ainsi mis en parallèle avec ce que nous avons évoqué
précédemment. Sur le plan méthodologique l’analyse de l’avant-propos a permis de
l’inscrire dans une démarche actionnelle vu que les concepteurs parlent de pédagogie du
projet et de d’installation de compétences, cette expression justement va nous renvoyer
au fait que le livre de la 2AS est un manuel unique destiné à toutes les filières.
Contrairement aux manuels précédents, le manuel de la 2AS se caractérise par le recours
aux activités de l’oral, et aux activités d’évaluation (autoévaluation, et évaluation
sommative). Dans le chapitre suivant nous tracerons le fondement théorique de notre
travail d’analyse.
Chapitre II : Méthodologie de la recherche
Nous avons établi en premier lieu les bases méthodologiques qui jalonneraient notre
travail de recherche et nous avons opté pour ce faire à une grille d’analyse dans laquelle
nous avons interrogé les grands points suivants :
- Quelle dimension collective dans le manuel scolaire ?
- La tâche/action dans le manuel scolaire et autonomie chez l’apprenant.
- Les procédés d’aboutissement à la réalisation du projet.
Dans chacun des points nous avons dressé une série d’indicatif afin de simplifier et de
clarifier davantage nos questions principales de départ.
Nous avons également choisi d’associer à nos résultats d’analyse la technique de
l’entretien semi-directif, nous avons privilégié de faire une étude qualitative et pour ce
faire nous nous sommes entretenu avec quatre enseignantes du secondaire ayant une
tranche d’âge différente, une expérience distincte et aussi un lieu de travail diffèrent. Les
grandes lignes qui ont été abordé sont :
-Le recours au manuel scolaire de la 2AS en classe.
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-La dimension collective et collaborative dans le manuel scolaire et sa relation avec les
projets pédagogiques.
-La dimension actionnelle dans le manuel scolaire à travers les projets et les consignes.
Les enquêtes se sont déroulées dans des salles de classe, de manière individuelle, suite
à une demande adressée aux proviseurs des établissements. Une explication brève de la
thématique et des grands axes auxquels nous allions approcher a dû précéder le début de
nos entrevues.
Les transcriptions ont été faites de l’oral à l’écrit après maintes écoutes, en prenant soin
de retranscrire fidèlement les propos des enseignantes. Nous avons également opté une
convention de transcription simplifiée vu que notre but principal est de se centrer sur le
contenu.
Chapitre 3 : Approche analytique du manuel scolaire
Nous nous sommes engagé dans ce chapitre à mettre en exergue la grille d’analyse
précédemment établie.
L’approche par projet choisie par les concepteurs du manuel implique une sorte
d’agir dans le milieu d’apprentissage et même en dehors, ce type d’apprentissage
« learning by doing » ou l’apprentissage par l’action est supposé mettre l’apprenant en
interaction directe avec ses pairs et le milieu qui l’entoure (scolaire ou extrascolaire),
cette démarche actionnelle est normalement mise en avant dans les projet pédagogiques
dans la mesure où elle sollicite la collaboration entre les apprenants pour accomplir une
tâche/action précise, dans cette perspective nous nous somme interrogé sur l’efficacité du
discours du manuel à formuler des consignes ou des instruction s’adressant à un groupe
d’apprenants qui les appellent à collaborer et s’entraider en sachant que chaque
apprenants a des compétences particulières.
Puisque cette démarche du projet fait partie de l’approche actionnelle nous nous sommes
penché sur la dichotomie tâche/action ou agir d’usage/agir d’apprentissage inventée par
Puren C (2006), et pour ce faire, nous nous sommes interrogé sur le type d’usage
privilégié par le manuel scolaire, s’il serait en mesure de favoriser l’usage de la langue en
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dehors du milieu scolaire ou limite-t-il l’apprentissage à la classe uniquement, autrement
dit, les projets permettront-ils l’insertion de l’apprenant dans le milieu social ? Nous
avons donc essayé de répondre à la question : Quelle dimension collective dans le
manuel scolaire ?
Vu que le projet pédagogique est un dessein complexe il devrait être pavé et préparé par
le discours du manuel, les consignes, et les supports et activités proposés devraient
introduire l’apprenant peu à peu dans la logique du projet et découler dans la même
thématique. Selon Perrenoud (1999) le projet est considéré comme :
-Une entreprise collective gérée par le groupe de classes ;
-S’oriente vers une production concrète au (sens large) ;
-Induit un ensemble de tâches dans lesquelles tous les élèves peuvent s’impliquer et jouer un
rôle actif, qui peut varier en fonction de leur moyens et intérêts
-Suscite l’apprentissage de savoirs et de savoir-faire, de gestion de projet (décider, planifier,
coordonner…)
-Favorise en même temps des apprentissages identifiables (au moins après coup) figurant au
programme d’une ou plusieurs disciplines
Nous nous sommes intéressé dans cette section aux intitulés des projets pédagogiques, à
l’énonciation et nous avons vu que la formulation de trois projet sur quatre était
impersonnelle avec le recours à l’infinitif nous avions comme suit :
Concevoir et réaliser un dossier documentaire, mettre en scène un procès, présentez le
lycée, le village, la ville….pour faire partager vos idées, mettre en scène un spectacle
pour émouvoir ou donner à réfléchir.
Vu comme cela nous avions l’impression que les projets ne sont que des intitulés qui
figurent au début de chaque unité didactique. On s’est interrogé justement sur le choix
de l’infinitif dans la formulation de trois intitulés de projet et le recours à l’impératif
dans un seul intitulé. Nous avons constaté que le choix de l’infinitif ne ciblait pas les
apprenants.
Par la suite nous avons interrogé le niveau énonciatif du manuel entre consignes et
orientations, et nous avons conclu que le manuel ne s’adresse que très rarement à un
groupe d’apprenant, les activités de groupe sont quasi absentes, le discours du manuel ne
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cible qu’un seul apprenant. Même dans les activités de l’oral ou de la rédaction où il est
préconisé de travailler en groupe, on remarque que le manuel ne fait presque aucune
allusion à un travail de groupe hormis quelques petites exceptions
La deuxième question centrale à laquelle nous avons dû répondre est la notion de
tâche et action dans le manuel scolaire, où nous nous sommes penché sur les travaux de
Puren C dans cette mesure nous nous sommes demandé si notre corpus d’étude serait
favorable aux activités qui se font en dehors de la classe comme les projets pédagogiques
par exemple, nous avons donc questionné le contenu de ces projets pour savoir quel type
d’agir elle ciblait. Selon Puren C (2006 :38) « « Action sociale » sera définie ici comme
« action collective à finalité collective » celle qui se réalise en équipe, dans une
entreprise, mais aussi des parents élevant leurs enfants, de joueurs de football sur le
terrain, une ONG lors d’une mission humanitaire … » ceci dit la notion de l’action selon
la perspective actionnelle s’étend pour aller en dehors du milieu scolaire contrairement à
la tâche et le projet pédagogique serait donc le parfait dispositif qui incarne cette
démarche.
Dans cette mesure nous avons questionné le contenu des projets et nous avons trouvé
quelques projets poussaient les apprenants vers un apprentissage passif au lieu de les
pousser vers l’action comme l’est le cas des trois projets concevoir et réaliser un dossier
documentaire pour présenter les grandes réalisations scientifiques et techniques de notre
époque , le second projet intitulé mettre en scène un procès pour défendre les valeurs
humanistes et le projet intitulé présentez le lycée, le village, la ville de vos rêves pour
faire partager vos idées, vos aspiration, il est généralement question dans ces projets de
procéder par une recherche sur internet et un copier-coller, ou d’une rédaction écrite et
après lu pendant la présentation. Le projet qui selon nous était propice à la concrétisation
de l’agir d’usage en classe était celui du théâtre et qui est uniquement destiné aux classes
littéraires.
En dernier lieu nous avons analysé les procédés d’aboutissement à la réalisation du
projet. Puisque l’enseignement/apprentissage en Algérie suit l’approche par compétence,
il serait donc primordial que le livre scolaire respecte le développement et la construction
des compétences et surtout l’enchainement sur lequel elle se base, dans cette perspective
nous avons analysé le discours du manuel scolaire et l’enchainement de ses séquences
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pour voir s’ils constituent un étayage pour l’apprenant dans l’accomplissement de sa
tâche.
Nous avons premièrement vérifié le lien entre les séquences des projets et les projets
en question et nous avons conclu que la majorité des séquences étaient séparées de leur
contexte et que les activités et supports ne découlaient pas dans la thématique du projet
nous avons trouvé des textes traiter du domaine biologiques et géologique dans un projet
où il était question de grandes réalisations scientifiques, mais nous avons aussi trouvé un
projet qui concordait avec ses séquences, ceci dit les résultats de notre analyse ont été
mitigés. Nous avons à la fin vérifié la pertinence entre les activités proposées et les
projets et nous avons trouvé qu’ils ne sont pas vraiment lié, nous avons donc conclu que
les projets n’apparaissent que comme des titres au début de chaque nouvelle unité. Les
activités d’expression écrite ou orale n’entretiennent aucun lien avec l’essence du projet,
nous avons eu l’impression pendant notre recherche que beaucoup de paradoxes
caractérisaient ces activités de part leur contradiction avec la thématique du projet mais
aussi l’approche par compétences.
Chapitre VI : Le manuel scolaire du point de vu des enseignants
Cette partie va nous permettre de faire une analogie entre les résultats de notre
analyse et les entretiens que nous avons effectués avec les enseignants. Nous avons vu en
premier lieu le recours au manuel scolaire de la deuxième année en classe du FLE, et à
l’unanimité, les enseignantes ont déclaré qu’elles n’utilisaient pas le manuel scolaire de
manière exclusive, notamment pour les activités et les textes pour leur non adéquation
avec le niveau des apprenants. En second lieu nous avons abordé la question de la
dimension collective et collaborative dans le manuel scolaire et sa relation avec les
projets pédagogiques, par le biais de cette question nous avons voulu savoir si le projet
pédagogique favorisait réellement le travail de groupe, et les enseignantes se sont mises
d’accord que les projets favoriseraient le travail de groupe dans leur apparence, nous
avons aussi remarqué que selon les enseignantes le travail de groupe équivaut à la
présentation finale de groupe.
Nous avons eu pendant les entretiens une difficulté à aborder les concepts relatifs à
la didactique et pour cette raison que nous avons jugé utile d’aborder le profil des
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formatrices. En dernier lieu nous avons vu l’approche actionnelle à travers les projets
pédagogique où les enseignantes se sont mises d’accord sur le point que les projets
pédagogiques ne favorisent pas dans leur majorité l’usage de la langue en dehors de la
classe.
Conclusion :
Le défi auquel est confronté le système éducatif algérien est d’une importance
cruciale et d’une urgente nécessité, les réformes qu’a mis en place le ministère
l’éducation nationale ont apporté un changement radical à l’enseignement/apprentissage
en Algérie, et se sont adaptés aux besoins de notre époque mais surtout aux besoins des
apprenants qui se montrent de plus en plus emportés et influencé par la vague de
modernité et d’avancement technologique, ce développement n’a pas été sans
conséquence sur les méthodologies et sur les pratiques d’enseignement.
En contexte algérien l’adoption d’une pédagogie active s’est effectuée pour s’adapter
aux orientations de l’UNESCO et afin de donner une dimension universelle au profil
d’apprenant d’aujourd’hui pour qu’il puisse s’épanouir dans son milieu scolaire, social et
professionnel ; pour que ses qualifications soient ainsi conformes aux normes
internationales. Les manuels scolaires ont été métamorphosés avec la nouvelle refonte
des programmes, un changement qui a embrassé la forme et le contenu de ces derniers.
Tout au long de notre travail de recherche nous avons essayé de répondre à la
problématique relative au renouveau qui a touché le manuel scolaire, nous nous sommes
interrogé sur l’adéquation du nouveau manuel scolaire avec les nouvelles méthodologies
d’enseignement, et pour répondre à notre problématique nous avons en premier lieu
essayé de dévoiler que la mise en place méthodologique du manuel du français été
entravée par les principes idéologiques de l’état , pour qu’il ait un changement effectif de
l’enseignement en Algérie, il faut qu’il ait un changement de paradigmes. On ne peut
nier que l’enseignement d’une langue ne peut se faire en dehors de sa culture.
Nous nous sommes penché par la suite sur l’aspect technique du manuel où nous
avons accordé une attention particulière au projet pédagogique de part l’importance qu’il
accorde au travail de collaboration entre les pairs, et le recours à l’action et surtout le
principe de « l’agir avec l’autre ». Les résultats de notre analyse ont été confrontés aux
entretiens que nous avons élaborés avec les enseignantes du secondaire, où nous avons
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été entravés par le manque d’informations relatives à la didactique et la pédagogie, les
entretiens ont été relativement adéquats avec les conclusions de notre recherche mais
nous n’avons pas pu le confirmer de manière évidente. La difficulté que nous avons
rencontré pendant nos entretiens est d’ordre théorique, les enseignantes ont tous avoué le
manque de formations pédagogiques, et la déficience des formations à transmettre les
nouveautés dans le domaine de l’enseignement. Tout au long de nos entretiens nous
avons constaté voire affirmé que les enseignantes ne connaissaient pas l’approche
actionnelle, ni la démarche du projet, selon eux le projet est synonyme d’exposé.
La nouvelle perspective par le projet va permettre de donner un nouveau souffle à
l’enseignement/apprentissage de manière générale et au manuel de manière spécifique.
Les pédagogie active de toutes manières que ce soit l’approche par compétence ou par
projet ont permis de redresser le statut de l’apprenant et de moderniser l’institution
éducative.
L’initiative que le ministère de l’éducation nationale a entrepris s’est avéré innovatrice et
bénéficiaire pour le secteur éducatif, social et culturel mais pour qu’un changement soit
efficient il faut entreprendre une série de réformes, une révision globale des contenus des
programmes et une volonté de concourir vers une amélioration qualitative de
l’enseignement en Algérie.