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Rapport de l'EFFAT Foyers de Covid-19 dans les abattoirs et les usines de transformation de la viande État des lieux et propositions d'action politique au niveau de l'UE 30 juin 2020

Rapport de l'EFFATdemande que la prochaine initiative de l'UE sur les salaires minimums équitables vise à promouvoir la négociation collective sectorielle et à garantir le respect

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Rapport de l'EFFAT

Foyers de Covid-19 dans les abattoirs et les usines detransformation de la viande

État des lieux et propositions d'action politique au niveau de l'UE

30 juin 2020

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Table des matières

Résumé ............................................................................................................................................3

1. Introduction et contexte.................................................................................................................4

2. Un bref aperçu des conditions de travail et d'emploi dans l'industrie européenne de la viande .....5

3. Pourquoi les entreprises du secteur de la viande sont devenues des pépinières pour le Covid-196

4. Rapports des pays (énumérés sur la base du nombre de travailleurs testés positifs au Covid-19)7

Allemagne .....................................................................................................................................7

Irlande.........................................................................................................................................11

Les Pays-Bas..............................................................................................................................12

Le Royaume-Uni .........................................................................................................................13

France.........................................................................................................................................14

Pologne.......................................................................................................................................15

Italie ............................................................................................................................................15

Norvège ......................................................................................................................................16

Espagne......................................................................................................................................16

Belgique ......................................................................................................................................18

Danemark ...................................................................................................................................19

Autriche.......................................................................................................................................19

Suède .........................................................................................................................................19

5. Propositions d'action de l'EFFAT au niveau de l'UE....................................................................20

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Résumé

Les conditions de travail abusives, les logements surpeuplés, les journées de travail allant jusqu'à 16heures, les bas salaires, les déductions salariales illégales et l'insécurité de l'emploi ne sont quequelques-unes des injustices auxquelles sont confrontés les travailleurs du secteur de la viande enEurope.

Le secteur dépend dans une large mesure des travailleurs migrants et transfrontaliers, tant à l'intérieurde l'UE que dans les pays tiers. Qu'ils soient employés par des pratiques de sous-traitance abusives,comme travailleurs intérimaires, travailleurs détachés ou forcés d'accepter un (faux) statutd'indépendant, les conditions de travail, de logement et d'emploi d'une grande partie des travailleursdu secteur de la viande sont tout simplement déplorables - à la fois cause et symptôme del'exploitation, du dumping social et de la concurrence déloyale dans toute l'Europe.

Ce rapport de l'EFFAT décrit la situation du secteur en ce qui concerne le Covid-19 dans divers paysd'Europe. Il donne également un aperçu des modalités de travail et des pratiques commercialessuivies par les entreprises du secteur de la viande pour réduire les coûts et échapper à laresponsabilité des employeurs. Pris ensemble, ces éléments brossent un tableau sombre d'unsecteur qui a besoin d'une réforme urgente et sérieuse.

Les travailleurs du secteur de la viande font preuve d'un dévouement étonnant à leur travail pendantla pandémie de Covid-19, s'exposant ainsi à un risque de contagion en raison de l'absence fréquentede mesures de protection sanitaire efficaces. Le moment est venu d'apporter des solutions à longterme pour améliorer leurs conditions de vie et mettre fin à toutes les formes d'exploitation de la main-d'œuvre dans le secteur de la viande.

L'EFFAT demande que des actions concrètes et urgentes, y compris des mesures contraignantes,soient adoptées tant au niveau national qu'au niveau européen. Des initiatives européennes sontspécifiquement nécessaires pour lutter contre le dumping social et pour mettre fin à la concurrencedéloyale qui a détruit des milliers d'emplois ces dernières années dans le secteur de la viande dansplusieurs États membres.

Le chapitre 5 du rapport offre aux décideurs politiques, en particulier aux institutions européennes,une explication détaillée des propositions d'action de l'EFFAT. Entre autres, l'EFFAT :

appelle la Commission européenne à proposer un instrument juridique ambitieux garantissant laresponsabilité conjointe et solidaire (chaîne) tout au long de la chaîne de sous-traitance. Cetteinitiative devrait également viser à renforcer les négociations collectives et à lutter contre ledumping salarial.

appelle la Commission européenne à soutenir l'adoption des mesures proposées par legouvernement allemand pour améliorer la situation dans le secteur de la viande.

demande la création d'un instrument européen juridiquement contraignant garantissant unlogement décent à tous les travailleurs transfrontaliers, saisonniers et migrants.

demande l'accélération de l'habilitation de l'Autorité européenne du travail (AET), notamment ence qui concerne les inspections conjointes et concertées et la lutte contre le travail non déclaré.

demande la reconnaissance immédiate par la Commission du Covid-19 comme maladieprofessionnelle.

demande que des mesures soient prises pour remédier au pouvoir de négociation excessif desdétaillants et pour atténuer les conséquences de la concurrence transfrontalière européenne etinternationale déloyale. À cet égard, l'EFFAT appelle les institutions européennes à veiller à ceque ses recommandations pour la stratégie "de la ferme à la table" soient respectées.

appelle les États membres à assurer la révision rapide du règlement 883/2004 et l'introductionurgente d'un numéro européen de sécurité sociale (ESSN) et d'un vérificateur de statutd'assurance.

appelle les États membres à assurer le respect de la directive révisée sur le détachement destravailleurs.

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appelle à une initiative européenne contraignante en matière de diligence raisonnable qui couvreégalement la sous-traitance et les chaînes d'approvisionnement.

appelle à améliorer le cadre juridique communautaire actuel régissant les filières de migrationrégulière de main-d'œuvre afin de garantir des droits uniformes au travail et l'égalité de traitement.

demande que la prochaine initiative de l'UE sur les salaires minimums équitables vise àpromouvoir la négociation collective sectorielle et à garantir le respect des droits des travailleurset des syndicats, y compris l'accès aux sites et le droit d'organisation et de négociation collective.

L'EFFAT encourage la prochaine présidence allemande du Conseil de l'UE à saisir l'occasion et àsoutenir ces propositions d'action.

1. Introduction et contexte

Des épidémies de Covid-19 dans les abattoirs et les entreprises de transformation de la viande seproduisent dans plusieurs pays d'Europe et du monde entier.

Les raisons pour lesquelles les usines de transformation de la viande sont devenues des vecteurs dela propagation du Covid-19 se trouvent dans les mauvaises conditions de travail, d'emploi et delogement qui affectent des milliers de travailleurs de la viande dans de nombreux pays d'Europe.

L'EFFAT et ses affiliés ont dénoncé la réalité du secteur auprès des institutions européennes et desgouvernements nationaux à de multiples reprises au cours des dernières années.

Bien que les travailleurs du secteur de la viande aient été considérés comme essentiels et n'aient pascessé leur activité pendant la pandémie, les faits montrent que les mesures de précaution visant àles protéger de l'infection par le virus ont souvent fait défaut ou ont été bafouées.

Il est maintenant temps d'adopter des mesures efficaces à long terme pour mettre fin à touteforme d'exploitation du travail existant dans le secteur de la viande et améliorer les normesde travail des travailleurs de ce secteur.

L'EFFAT demande que des actions concrètes et urgentes, y compris des mesurescontraignantes, soient adoptées tant au niveau national qu'au niveau européen. Des initiativesde l'UE sont spécifiquement nécessaires pour lutter contre le dumping social et mettre fin à laconcurrence déloyale qui a détruit des milliers d'emplois ces dernières années dans plusieursÉtats membres.

Nombre des facteurs qui aggravent les conditions critiques auxquelles sont confrontés les travailleursdu secteur de la viande sont liés à des domaines dans lesquels l'UE dispose de compétencesévidentes, notamment la mobilité de la main-d'œuvre, la prestation transfrontalière de services, lesmigrations, la santé et la sécurité, le commerce international, le droit des sociétés et le droit du travail.C'est une raison supplémentaire pour l'UE d'agir. L'approche doit être holistique et doit tenir comptede plusieurs facteurs, notamment des distorsions de concurrence qui affectent l'ensemble de lachaîne alimentaire.

Les données montrent également que dans les pays où les conventions collectives de travail sontrespectées et couvrent tous les employés du secteur, le nombre de travailleurs dont le test dedépistage de Covid-19 s'est révélé positif a été extrêmement limité. Ce n'est pas une coïncidence etmontre une fois de plus l'importance de systèmes de négociation collective qui fonctionnent bien pourgarantir des conditions de travail et d'emploi décentes, y compris la protection de la santé et de lasécurité.

À cet égard, il convient de rappeler que l'EFFAT et son partenaire social dans l'industrie alimentaireeuropéenne, FoodDrinkEurope, ont adopté des lignes directrices communes pour protéger la santéet la sécurité des travailleurs du secteur alimentaire lors de l'épidémie de Covid-19. Ces lignes

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directrices doivent être respectées et appliquées au niveau national dans l'ensemble du secteuralimentaire.1

Ce rapport a été élaboré grâce à la contribution des affiliés de l'EFFAT qui ont répondu à desquestionnaires et participé à des vidéoconférences. Le document vise à identifier les principalesraisons de la propagation du virus parmi les travailleurs de la viande sur la base des informationscommuniquées par les affiliés. Il décrit également la situation actuelle dans divers pays européens, ycompris le nombre de grappes Covid-19 qui se sont produites dans les usines de transformation dela viande au cours des dernières semaines, ainsi que les modalités de travail et les pratiquescommerciales qui caractérisent le secteur au niveau national. Le dernier chapitre identifie quelquespropositions préliminaires d'action au niveau de l'UE.

2. Un bref aperçu des conditions de travail et d'emploi dans l'industrieeuropéenne de la viande

L'industrie de la viande de l'Union européenne compte près d'un million de travailleurs2 et plus de 32000 entreprises, sa production représentant 1,53 % du PIB de l'UE-27.3

Le secteur en Europe se caractérise depuis des décennies par le dumping social ainsi que par uneconcurrence agressive entre les entreprises, tant au niveau national que transfrontalier, ce qui setraduit par une course vers le bas en matière de salaires et de conditions de travail. La pressionexercée par les détaillants a conduit à une politique de réduction des prix pendant des années. Laconcurrence de l'extérieur de l'UE est également importante.

Le secteur de la viande est une industrie fragmentée, avec une capacité excédentaire et donc sousla pression des coûts de clients plus puissants, qui ont accès aux produits importés et peuvent exercerune pression sur les coûts.4 Les marges sont normalement faibles et volatiles. Dans la plupart despays, les grands abattoirs détiennent la plus grande part de marché, ou sont en pleine croissance, etla concentration varie au stade de l'abattage.

Dans ce contexte, les employeurs adoptent des stratégies qui frappent les travailleurs de diversesmanières : augmentation de la vitesse des lignes ayant des implications en matière de santé et desécurité, promotion de la flexibilité du travail, baisse des salaires et des normes de travail et recoursaccru aux travailleurs précaires.

Les usines de transformation de la viande sont généralement à forte intensité de main-d'œuvre. Bienque les usines de transformation modernes aient apporté des améliorations ergonomiques au fil desans, les microtraumatismes répétés sont fréquents, tout comme les coupures, les glissades et leschutes. Les conditions de travail sont assez dures : froid, répétitivité et force physique. Il n'est doncpas surprenant que le taux de rotation de la main-d'œuvre soit élevé dans la plupart des payseuropéens. En raison de l'intensification du travail, un nombre croissant de travailleurs souffrentdésormais de nouvelles maladies professionnelles, telles que les troubles musculo-squelettiques(TMS), et de facteurs psychosociaux au travail (le plus courant étant le stress lié au travail).

En identifiant les éléments communs dans les cas d'exploitation que nos affiliés ont identifiés, lespoints suivants se dégagent :

1 Lignes directrices conjointes FoodDrinkEurope-EFFAT pour protéger la santé et la sécurité des travailleurs du secteur

alimentaire lors de l'épidémie de Covid-19, 9 avril 2020 | EN | ES | FR | DE | HR | NL .2 Eurostat : Statistiques annuelles sur les entreprises par classe de taille pour les agrégats d'activités spéciaux (NACERév. 2)3 Eurostat : Statistiques annuelles détaillées sur les entreprises pour l'industrie (NACE Rév. 2, B-E)4 Putting meat on the bones - Un rapport sur la structure et la dynamique de l'industrie européenne de la viande,EFFAT, 2011.

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La précarité de l'emploi, les bas salaires et les longues heures de travail sont souvent la norme pourde nombreux travailleurs du secteur de la viande.

Une grande partie du personnel employé dans le secteur européen de la viande est constituée detravailleurs transfrontaliers ou migrants, tant à l'intérieur de l'UE que dans les pays tiers. Un grandnombre de ceux qui sont employés dans les pays d'Europe occidentale viennent d'Europe centraleet orientale (PECO) dans le cadre de la libre circulation des travailleurs de l'UE. Les travailleurs desPECO sont généralement recrutés par des intermédiaires en matière de travail qui leur font payerdes frais de recrutement ainsi que les frais de voyage pour se rendre dans le pays de destination.Nombre de ces travailleurs sont ensuite employés par des agences de travail temporaire ou par despratiques de sous-traitance abusives permettant aux employeurs d'échapper à toute responsabilité.Dans certains pays, les sous-traitants fonctionnent comme de fausses coopératives, les travailleursétant parfois employés comme indépendants. Le détachement de travailleurs dans le cadre de laprestation de services est toujours une pratique récurrente, bien que limitée par rapport aux annéesprécédentes. Le recours à des sociétés-boîtes aux lettres pour éluder ou contourner lesrémunérations, les cotisations de sécurité sociale et les impôts applicables est également fréquent.

Les disparités salariales avec les travailleurs directement employés par les entreprises du secteur dela viande sont généralement pertinentes. Des déductions salariales pour le logement, le transport etles outils de travail sont souvent imposées aux travailleurs migrants et transfrontaliers. En raison dela faiblesse des salaires, les travailleurs partagent des logements surpeuplés qui sont parfois mêmedirectement liés à leur contrat de travail ou qui appartiennent à l'employeur, qu'il s'agisse du sous-traitant ou de l'agence de travail temporaire (de plus amples détails sur les différentes pratiquescommerciales et modalités de travail utilisées par les entreprises du secteur de la viande pour réduireles coûts et échapper aux responsabilités peuvent être trouvés dans le chapitre consacré au rapportpar pays).5

3. Pourquoi les entreprises du secteur de la viande sont devenues despépinières pour le Covid-19

L'UITA collabore actuellement avec le Dr Nabarro, professeur de santé publique à l'Imperial Collegede Londres et envoyé spécial sur le Covid-19 pour l'OMS. Selon les résultats préliminaires desrecherches, les éléments suivants ont été identifiés comme des facteurs ayant contribué à lapropagation du virus dans l'industrie de la viande :

Manque de distanciation sociale : Les travailleurs des abattoirs travaillent souvent au coude àcoude, à proximité les uns des autres, sur la chaîne de transformation. Il est possible d'échelonnerles quarts de travail et les pauses pour favoriser la distanciation sociale, mais toutes les entreprisesde viande ne sont pas prêtes à ralentir leur rythme de production pendant la pandémie. L'absence dedistanciation sociale a certainement contribué à la propagation du virus.

De mauvaises conditions de logement : Dans presque tous les pays européens, le secteur de laviande dépend fortement des travailleurs migrants et transfrontaliers. Les travailleurs vivent souventdans des appartements surpeuplés où plusieurs personnes vivent dans une seule pièce. Ils viventdans ces conditions inacceptables pour deux raisons principales : parce que le logement est souventdirectement lié à leur contrat de travail ou parce que leurs salaires sont trop bas et qu'ils essaient defaire des économies pour leur logement. Il est tout à fait évident que le respect de la distance socialedans ces logements est tout simplement impossible.

Absence d'inspections : Dans de nombreux pays, la fréquence des inspections du travail a diminuépendant la pandémie. Cela a entraîné une augmentation des infractions à la loi et des violations des

5 Pour un aperçu des conditions de travail et des relations de travail dans l'industrie porcine, avec un accent particuliersur l'Allemagne, la Belgique, le Danemark, l'Italie et la Pologne, voir également Meat-up-ffire, Piera Campanella etDavide Dazzi. Meat-up-ffire Up and Down the Meat Value Chain (Université d'Urbino Carlo Bo en tant que candidatprincipal). L'EFFAT a contribué activement au projet.

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mesures de précaution en matière de santé et de sécurité adoptées pour protéger les travailleurspendant cette période d'urgence.

Transport commun : De nombreux travailleurs se rendent sur leur lieu de travail par les transportspublics ou le covoiturage, souvent organisés directement par les employeurs. Il se peut que lesmesures visant à assurer la distanciation sociale pendant le transport n'aient pas été respectées.

Ventilation : La propagation de la maladie est 20 fois6 plus probable lorsque la ventilation estinsuffisante, comme c'est le casdans certains établissements de transformation de la viande,notamment les plus anciens.

EPI : un équipement de protection doit être fourni, approprié et porté. Cela n'a pas toujours été le cas.Une formation à l'utilisation des EPI devrait être dispensée.

Froid : Certaines parties des usines de transformation de la viande sont inévitablement très froides.Le virus se transmet plus facilement par temps froid.

La précarité de l'emploi et l'absence de protection sociale : Les conditions d'emploi de nombreuxtravailleurs du secteur de la viande sont extrêmement précaires. De plus, le niveau des indemnitésde maladie peut être très bas. Cela peut avoir déterminé le fait qu'en cas de symptômes de Covid-19, certains travailleurs n'ont pas signalé leur état de santé par crainte de perdre leur emploi ou parcequ'ils ne peuvent pas se permettre de vivre décemment avec des indemnités de maladie.

Il convient également de dire que dans de nombreux pays, des mesures de précaution ont étéadoptées pour préserver la santé et la sécurité des travailleurs pendant la pandémie. Ces mesuresont été adoptées au niveau gouvernemental ou par le biais de conventions collectives aux niveauxinterprofessionnel ou sectoriel.

Certaines de ces mesures comprennent, entre autres, la fourniture d'informations sur les risques duvirus, le contrôle de la température à l'entrée des installations, les pratiques d'hygiène,l'échelonnement des postes de travail pour assurer la distanciation sociale, l'utilisation d'équipementsde protection, la modification de la conception des postes de travail avec l'installation de Perspex oude Plexiglas, la modification de la disposition des espaces communs (cantine, vestiaires) pour assurerla distanciation sociale, des processus clairs pour gérer les maladies des employés, etc.

Lorsque ces mesures ont été adoptées et respectées, le niveau de contagion a été limité.

Bien entendu, ces mesures ont été insuffisantes dans les cas où les travailleurs vivent ensemble dansdes logements surpeuplés.

4. Rapports des pays (énumérés sur la base du nombre de travailleurstestés positifs au Covid-19)

Une mise en garde s'impose : le présent rapport rend compte d'une situation dynamique, sujette àdes changements permanents.

Allemagne

Jusqu'à présent, l'Allemagne est le pays européen où le plus grand nombre de travailleurs du secteurde la viande ont été testés positifs pour le Covid-19.

Vous trouverez ci-dessous certains des cas les plus pertinents :

La plus grande épidémie de Covid-19 a récemment été signalée dans une usine de Tönnies à Rheda-Wiedenbrueck (Rhénanie du Nord-Westphalie). L'abattoir, qui est considéré comme le plus grandd'Europe, emploie 7 000 personnes et plus de 1 550 personnes ont été testées positives pour le

6 Source : Consultation de l'UITA avec l'Imperial College, Londres

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Covid-19. L'usine a été fermée jeudi dernier, le 18 juin 2020. Tous les travailleurs qui ont été testéspositifs, ainsi que ceux qui travaillent à proximité et leurs proches, sont en quarantaine. Diversesunités de police ont même été déployées pour veiller au respect des mesures préventives. Le ministred'État de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, Armin Laschet, a annoncé que les habitants des districtsvoisins de Gütersloh et Warendorf devront faire face, au moins pendant une semaine, aux mêmesrestrictions de confinement qui étaient en vigueur dans toute l'Allemagne au début de la pandémieen mars 2020.

Au début du mois de mai, à la suite de l'apparition d'un foyer dans une usine de transformation de laviande dans la ville de Coesfeld, près de la ville de Münster, dans l'ouest de l'Allemagne, le Land deRhénanie-du-Nord-Westphalie a été le premier à activer un "mécanisme d'urgence" et à retarder lerelâchement des restrictions de fermeture dans le district administratif de Coesfeld jusqu'au 18 mai2020. La hausse localisée des cas est survenue après qu'un test effectué sur 200 employés de l'usinede transformation de viande Westfleisch a révélé que 151 d'entre eux étaient positifs au Covid-19.L'usine a alors été fermée.

Ailleurs, 109 travailleurs ont été testés positifs dans une usine de Bad Bramstedt, dans le district deSegeberg. Plus de 200 travailleurs roumains ont été testés positifs au Covid-19 dans un abattoir deBirkenfeld, dans la région du Bade-Wurtemberg. Et une usine du Schleswig-Holstein a été ferméeaprès que 128 employés aient été testés positifs.

Ce ne sont là que quelques-uns des cas les plus pertinents. D'autres foyers de Covid-19 ont étésignalés dans d'autres abattoirs et installations de l'industrie de la viande.

Selon l'organisation NGG, membre de l'EFFAT, les conditions de travail, de logement et d'emploidifficiles d'une grande partie des travailleurs de la viande ont contribué à la propagation du virus dansles usines de transformation de la viande. L'une des principales raisons pour lesquelles lesconditions de travail sont si mauvaises est le système de sous-traitance qui, pendant près devingt ans, a été une cause majeure de dumping social dans le secteur en Allemagne maisaussi dans toute l'Europe. Le système de sous-traitance développé en Allemagne a entraîné desmilliers de pertes d'emplois dans d'autres pays de l'UE, les pays voisins tels que le Danemark, laFrance, les Pays-Bas et la Belgique étant particulièrement touchés.

En Allemagne, environ 110 000 personnes sont actuellement employées dans le secteur de la viande,dont environ 30 000 par des sous-traitants. Les travailleurs employés par les entreprises de sous-traitance sont principalement des travailleurs migrants et transfrontaliers provenant des paysd'Europe centrale et orientale (PECO). Dans les grandes entreprises du secteur de la viande (parexemple Danish Crown, Tonnies, Westfleisch, Vion), le nombre de travailleurs employés par cettepratique commerciale représente environ 80 à 90 % de la main-d'œuvre totale.

Les activités principales des entreprises de viande (réception, abattage, désossage, entreposagefrigorifique, prédécoupe, découpe fine, emballage et distribution) sont généralement effectuées pardes sous-traitants. Les travailleurs employés par les sous-traitants exercent leur activité dans lesinstallations des entreprises et, bien que les entreprises de viande prétendent n'avoir aucuneresponsabilité à l'égard de ces travailleurs, les faits montrent qu'ils ont une influence majeure sur lesconditions de travail et d'emploi qui s'appliquent. Les ordres directs sont souvent donnés par lescontremaîtres de l'entreprise contractante aux travailleurs sous-traitants.

Le recours à des entreprises de sous-traitance permet aux entreprises de viande de réduire leurscoûts et d'éviter toute responsabilité en cas de violation des droits des travailleurs, de fraude etd'évitement des niveaux de rémunération, des cotisations de sécurité sociale et des impôts sur lessociétés. Le système est le principal moteur de la course continue vers le bas en termes de salaireset de conditions de travail

Comment le système de sous-traitance a fonctionné en Allemagne jusqu'en 2015

De 2004 à 2015, la majorité des sous-traitants étaient des entreprises basées en Europe centrale etorientale (PECO). Les travailleurs étaient généralement détachés dans le cadre de la libre prestationde services au sein de l'UE (article 56 du TFUE). Il convient de noter que jusqu'en 2015, la loi

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allemande sur les travailleurs détachés ne s'appliquait pas au secteur de la viande. Ainsi, lestravailleurs étaient principalement employés selon les conditions du pays d'origine, ce qui permettaità leurs employeurs et, bien sûr, aux principaux entrepreneurs allemands, de réaliser des économiesconsidérables. Le secteur de la viande a été le plus grand bénéficiaire de travailleurs détachés aprèsla construction.

À l'époque, les bas salaires et les conditions de travail abusives allaient de pair avec les pratiquesdes chefs de gangs et l'absence de couverture sociale (y compris les allocations de chômage, demaladie et de retraite). Les entreprises de transformation de la viande sous-traitaient le travail à diverssous-traitants qui, via un réseau de boîtes aux lettres, sous-traitaient le travail à d'autres entrepriseset signaient avec les travailleurs des contrats qui duraient rarement plus de six mois. Pour plusd'informations sur le fonctionnement du système jusqu'en 2015, voir le cas de Danish Crown dans lerapport 2016 de la CES sur les sociétés boîtes aux lettres.

Le système tel qu'il fonctionne aujourd'hui

Aujourd'hui, on compte encore en Allemagne environ 5 000 travailleurs du secteur de la viande quisont détachés d'entreprises basées dans les pays d'Europe centrale et orientale. Le recours à desentreprises de boîtes aux lettres est toujours d'actualité, mais il est moins pertinent qu'auparavant.

La grande majorité des travailleurs sous-traitants ont aujourd'hui un contrat de travail allemand etsont employés par un sous-traitant allemand. Leurs relations de travail doivent donc être régies parle droit allemand (par exemple, temps de travail, dispositions en matière de santé et de sécurité,rémunération).

La plupart des changements ont eu lieu en 2015 lorsque, grâce également à la pression de la NGG,un salaire minimum légal a été introduit en Allemagne (actuellement 9,35 euros par heure).

Dans le même temps, plusieurs entreprises du secteur de la viande, dont Danish Crown, Tonnies,Vion et Westfleisch, ont signé en 2015 une déclaration volontaire (Freiwillige Selbstverpflichtung) parlaquelle elles s'engagent à ne plus faire appel à des entreprises établies dans d'autres pays pourdétacher des travailleurs en Allemagne.

En 2017, la loi GSA Fleisch a été adoptée (Gesetz zum Schutz der Arbeitnehmerrechte in derFleischwirtschaft). Cette loi a introduit de nouvelles restrictions, telles que l'interdiction d'imposer desdéductions salariales pour les outils de travail.

Malgré cette évolution, les conditions de travail des travailleurs du secteur allemand de la vianderestent extrêmement critiques. Aucune amélioration réelle n'a été apportée. Et la raison en est quele système de sous-traitance - la principale cause de violation des droits des travailleurs et dedumping social - est toujours d'application.

Les travailleurs employés par des sous-traitants travaillent généralement entre 48 et 65 heures parsemaine, tandis que les travailleurs du secteur de la viande directement employés par des entreprisestravaillent normalement environ 40 heures par semaine et au maximum 48 heures. Pour lestravailleurs sous-traitants, la journée de travail peut aller jusqu'à 16 heures, six jours par semaine.

Les disparités salariales avec les travailleurs directement employés par les entreprises du secteur dela viande sont également pertinentes. Les travailleurs sous-traitants gagnent en moyenne 40 à 50 %de moins que les travailleurs employés directement par les entreprises de viande. Cette faiblerémunération est la conséquence des heures supplémentaires non rémunérées dues au fait que lesheures ne sont pas enregistrées fidèlement (l'enregistrement manuscrit des heures est courant) etdes déductions salariales illégales sur le salaire net des travailleurs pour le matériel de travail - c'est-à-dire couteau, tablier, gants. Étant donné que ces déductions s'appliquent sur un salaire minimum,ces travailleurs vivent dans la pauvreté.

Les conditions de logement sont également très mauvaises. Les travailleurs employés par des sous-traitants vivent souvent dans des appartements surpeuplés avec des salles de bain communes etavec même jusqu'à cinq ou six personnes dans un seul dortoir. Le logement est fourni directementou indirectement par le sous-traitant. En d'autres termes, l'employeur est également le propriétaire,

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ce qui rend les travailleurs doublement dépendants de leur employeur, qui déduit le loyer (entre 200et 350 euros par mois) directement du salaire de l'employé.

Les contrats de travail sont temporaires et la précarité de l'emploi est extrêmement élevée. Ceséléments sont susceptibles d'avoir influencé de nombreux travailleurs sous-traitants qui, lorsqu'ilséprouvent des symptômes, n'ont pas déclaré leur maladie de peur de perdre leur emploi.

Le rôle joué par les intermédiaires du travail situés dans les pays de départ reste égalementpréoccupant.

La grande majorité des travailleurs employés par des sous-traitants arrivent en Allemagne dans lecadre de la libre circulation des travailleurs. Une agence de recrutement ou d'autres typesd'intermédiaires du travail recrutent ces travailleurs dans les PECO et leur facturent généralementdes frais de recrutement et les frais de voyage vers le pays de destination. Une fois arrivés enAllemagne, ils sont employés par un sous-traitant allemand qui, la plupart du temps, ne possèdequ'un bureau en Allemagne avec un nombre limité d'employés. Des liens étroits existent entrel'intermédiaire dans le pays de départ et le sous-traitant établi en Allemagne.

L'absence d'inspections adéquates pendant la période du Covid-19 a contribué à la propagation duvirus. Il convient toutefois de souligner que les inspections dans le secteur allemand de la viande nefonctionnent pas non plus correctement dans des circonstances normales. Les autorités fédérales etlocales ne contrôlent pas suffisamment les entreprises. Et il y a un manque de coordination entre lesinspections du travail et les différents organismes de contrôle. Par exemple, l'application du salaireminimum est contrôlée par une agence, les normes de santé et de sécurité par les autoritésgouvernementales locales, les normes d'hébergement par une autre agence gouvernementale. Unautre problème est le fait que les sanctions ne sont pas efficaces et n'ont pas d'effet dissuasif sur lesviolations de la législation applicable.

Le manque de distanciation sociale et d'EPI approprié, les températures froides, le manqued'inspections et de ventilation adéquate ont peut-être été quelques-unes des principales causesfacilitant la propagation du virus parmi les travailleurs de la viande.

Toutefois, ce n'est pas non plus une coïncidence si la grande majorité des personnes dont le tests'est révélé positif pour le Covid-19 sont des travailleurs employés par des sous-traitants provenantprincipalement des PECO. Le fait de vivre dans des logements surpeuplés a certainement joué unrôle important dans la propagation du virus parmi ces travailleurs vulnérables.

La pression du NGG a persuadé le gouvernement fédéral de proposer des solutions à longterme

NGG a réitéré certaines demandes claires pour mettre fin aux abus et à l'exploitation dans le secteurde la viande :

1. Les pratiques de sous-traitance pour les activités principales du secteur (par exemple, l'abattage,le désossage, la découpe, la transformation et l'emballage) doivent être interdites.

2. Le logement des travailleurs sous-traitants doit être décent et doit répondre à des règles et desnormes claires et nationales. Un prix limite pour le logement des travailleurs doit être fixé.

3. Une convention collective sectorielle couvrant tous les travailleurs de l'industrie de la viande (ycompris ceux employés par les sous-traitants) devrait être négociée et elle devrait fixer un salaireminimum plus élevé pour tous les travailleurs du secteur de la viande.

4. Les procureurs spéciaux devraient s'occuper de la violation des mesures de santé et de sécurité.

De plus, le 14 mai 2020, NGG a écrit au ministre fédéral du travail et des affaires sociales pourdemander que tous les travailleurs de l'industrie de l'abattage et de la transformation de la viandesoient immédiatement testés pour le Covid-19. NGG a également demandé que le SRAS-CoV-2 soitreconnu comme une maladie professionnelle.

Grâce à la pression exercée par le NGG et à l'attention des médias sur les foyers de Covid-19 dansles usines de viande, le gouvernement allemand s'est engagé à trouver des solutions à long terme

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pour améliorer la situation dans le secteur de la viande. Vous trouverez ci-dessous un résumé desprincipales propositions faites :

Renforcement des inspections du travail et amélioration de la coordination entre les autorités etagences nationales et locales chargées des différents types d'inspections (par exemple,logement, rémunération, temps de travail)

Interdiction des sous-traitants dans le secteur de la viande à partir de 2021

Financement permanent du projet Faire Mobilität de la DGB (information et conseil juridique pourles travailleurs migrants et transfrontaliers)

Enregistrement numérique des heures de travail

Des sanctions plus sévères

Ces propositions devront maintenant être discutées et, avec un peu de chance, adoptées auBundestag. Cela prendra plusieurs semaines. L'importante épidémie qui a récemment touché l'usineTönnies à Rheda-Wiedenbrueck montre une fois de plus que le secteur allemand de la viande doitêtre complètement réformé. Les travailleurs du secteur de la viande ne peuvent plus attendre. Lelobbying des entreprises du secteur de la viande est assez agressif et il existe un risque certain queces mesures ne soient pas adoptées ou qu'elles soient édulcorées au point d'être totalementinefficaces. Il sera extrêmement important que les institutions de l'UE et en particulier laCommission plaident en faveur de l'adoption des propositions du NGG. Il n'y a pas de tempsà perdre. Le système de sous-traitance abusif du secteur allemand de la viande a détruit desmilliers d'emplois dans d'autres pays de l'UE ; il est donc dans l'intérêt de tous les Étatsmembres et de la Commission que ces mesures soient rapidement adoptées et mises enœuvre.

Irlande

Le secteur de la transformation de la viande est un secteur très important de l'économie irlandaise etsoutient des milliers d'emplois directs et indirects. Le secteur a été classé comme essentiel par legouvernement et la transformation de la viande s'est poursuivie pendant la crise.

En Irlande, il y a environ 15 000 travailleurs du secteur de la viande et 49 usines de transformationde la viande. À ce jour, 20 groupes ont été identifiés dans 19 usines, avec 1056 cas confirmés deCovid-19. Dans certaines des usines touchées, jusqu'à 25 % des employés ont été infectés. Lesusines n'ont pas été fermées.

Grâce à Covid-19, la fréquence des inspections est plus faible. De plus, beaucoup de ces usines ontété construites dans les années 60, les gens travaillent très près les uns des autres, le système deventilation est mauvais et la pollution sonore crée également un problème car les gens doivent secrier dessus pour communiquer. Les conditions de travail sont mauvaises.

Il y a un manque de personnel travaillant dans le secteur parce que les salaires et les conditions detravail sont trop bas. Le secteur dépend dans une large mesure des travailleurs migrants, enparticulier du Brésil et de l'Afrique du Sud. Il y a également de nombreux travailleurs transfrontalierset migrants venant des PECO.

Pour faire face aux pénuries de main-d'œuvre, le gouvernement délivre chaque année des permis detravail aux ressortissants de pays tiers pour qu'ils soient employés dans l'industrie. En 2019, legouvernement a délivré un total de 917 permis de travail. De janvier à avril 2020, 800 permis de travailont déjà été délivrés.

Les travailleurs ne gagnent que le salaire minimum ou un peu plus. Certains travailleurs travaillent àla pièce (ils sont payés sur la base des kilos qu'ils traitent) et peuvent gagner un peu plus.

Comme les salaires sont trop bas, les travailleurs économisent les coûts de toutes les manièrespossibles. Le covoiturage est courant. En outre, le logement de certains travailleurs est lié à leurcontrat de travail. Ils reçoivent leur salaire et doivent ensuite payer leur logement. Le logement estgénéralement très rudimentaire et les chambres sont partagées.

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Une grande partie des travailleurs sont employés par des agences de travail temporaire. La sous-traitance est également une pratique courante.

Au début du mois de mars 2020, les syndicats ont fait part de leurs inquiétudes aux employeurs etaux représentants du public concernant le potentiel de propagation du Covid-19 dans les installationsde transformation de la viande.

Le 3 avril 2020, l'affilié irlandais de l'EFFAT, le SIPTU, a écrit au ministre de l'agriculture, del'alimentation et de la marine (Michael Creed) pour souligner l'importance de la santé et de la sécuritédes travailleurs dans le secteur de la transformation de la viande avant la tenue d'une commissionspéciale de l'UE sur l'agriculture.

En avril 2020, les syndicats ont demandé que des tests de température soient obligatoirementeffectués dans les installations de transformation de la viande. Le 28 avril 2020, le SIPTU a écrit àl'Autorité de santé et de sécurité pour demander des inspections dans les installations detransformation de la viande. Les syndicats du secteur ont également travaillé en étroite collaborationavec le Migrant Rights Centre of Ireland (MRCI) pour mettre en évidence la vulnérabilité accrue destravailleurs migrants.

Tout au long du mois d'avril 2020, le SIPTU a cherché à dialoguer avec le gouvernement et lesreprésentants de l'industrie de la transformation de la viande pour mettre en avant leurspréoccupations mais, dans l'ensemble, leurs demandes ont été ignorées.

La lenteur de la réponse du gouvernement et de certaines autorités statutaires aux préoccupationsdes syndicats du secteur a contribué au nombre élevé de cas. Des tests de température à l'entréedes installations de production sont désormais effectués dans de nombreuses entreprises, mais pasencore partout.

Des lignes directrices spécifiques pour le secteur de la viande sur la manière de protéger lestravailleurs pendant l'épidémie de Covid-19 ont également été publiées le 18 mai. Ces lignesdirectrices sont assez complètes et visent à garantir le respect de processus clairs à l'entrée desinstallations de l'entreprise. Les lignes directrices fournissent également des recommandations sur lamanière d'assurer la distanciation sociale le long de la chaîne de production, dans les cantines, lesbureaux, les vestiaires et les toilettes. Des recommandations sur la manière de gérer l'échelonnementdes postes de travail sont également fournies.

En juin 2020, le Comité du gouvernement irlandais (Oireachtas) sur le Covid-19 a finalement entaméune coopération beaucoup plus étroite avec les syndicats et a demandé au SIPTU, aux employeursde l'industrie de la viande et au Migrant Rights Centre of Ireland de lui soumettre des propositionsrelatives à l'industrie de la transformation de la viande. Le SIPTU/ICTU a présenté sa soumission lasemaine dernière.

Les violations des droits des travailleurs sont plus fréquentes dans l'industrie de la viande rouge - carelle est mal organisée. La situation est légèrement meilleure dans l'industrie du porc et de la volaille,où le niveau de syndicalisation est plus élevé. Le SIPTU va essayer d'augmenter le nombred'adhérents et de négocier une convention collective qui améliore les salaires, assure une pension etdes indemnités de maladie à tous les travailleurs du secteur de la viande en Irlande, mais le manqued'engagement des employeurs entrave toute tentative de renforcement du dialogue social. L'accèsau site pour les syndicats est également extrêmement difficile. L'employeur n'a pas l'obligation denégocier collectivement, même si les niveaux d'adhésion au syndicat sont élevés.

L'absence d'un système actif de dialogue entre les parties prenantes dans le secteur de latransformation de la viande est une faiblesse évidente à laquelle il faut remédier. Un système denégociation collective aurait permis d'éviter le nombre élevé de cas dans le secteur.

Les Pays-Bas

Suite à la pression des autorités allemandes, les tests Covid-19 ont été effectués dans un abattoir deVion situé dans la ville néerlandaise de Groenlo, près de la frontière allemande. La majorité destravailleurs employés à Groenlo vivent en Allemagne.

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L'abattoir a été fermé le 20 mai 2020 après que 45 personnes aient été testées positives pour leCovid-19. À la suite d'une nouvelle série de tests, plus de 20 % des employés ont été testés positifspour le coronavirus, soit 147 sur 657. L'usine a été temporairement fermée et tous les employés ontété mis en quarantaine à domicile.

Au cours de la même semaine, un autre abattoir de porcs de Vion à Apeldoorn a été fermé pendantune journée après qu'il ait été découvert que la distance sociale n'était pas respectée dans 17fourgons transportant des employés (pour la plupart étrangers) sur le site.

Quelques semaines auparavant, dans un autre abattoir de Vion, à Scherpenzeel, qui traite desvolailles, 28 employés avaient contracté le virus.

L'usine de transformation de viande de Van Rooi à Helmond, dans le Brabant septentrional, aégalement fermé à la fin du mois de mai en raison du Covid-19, après que 21 des 130 travailleursd'un essai aléatoire aient été testés positifs au Covid-19. L'usine emploie environ 1700 travailleurs.

Environ 80 % des travailleurs de l'industrie néerlandaise de la viande sont originaires des PECO etsont employés par des agences d'intérim. Ils perçoivent le salaire minimum et beaucoup dépendentégalement de leur employeur pour leur logement, qui est souvent surpeuplé, ce qui rend impossibletoute distanciation sociale.

Les agences de travail temporaire sont principalement basées aux Pays-Bas. Cela signifie que lestravailleurs ont un contrat de travail avec une agence de travail temporaire néerlandaise. Lesdispositions légales néerlandaises et les conventions collectives néerlandaises dans le secteur desagences de travail temporaire sont applicables à ces travailleurs étrangers (pour la plupart). Ledétachement de travailleurs (intérimaires) par des agences de travail temporaire basées dansd'autres États membres est moins fréquent que le recrutement de travailleurs étrangers (égalementavec l'aide d'agences de placement étrangères) et leur embauche par une agence de travailtemporaire néerlandaise.

Les organisations néerlandaises membres de l'EFFAT ont exigé que chaque travailleur employé dansle secteur de la viande soit testé pour le Covid-19.

Le gouvernement a mis en place un groupe de travail spécial avec les partenaires sociaux. La FNVdemande un logement décent pour les travailleurs migrants et transfrontaliers. Une autre demandeclé est que les entreprises emploient directement des travailleurs et n'abusent pas des agences detravail temporaire qui emploient des travailleurs avec des contrats flexibles.7

Les agences de travail temporaire organisent souvent aussi le transport et le logement.

De nombreux travailleurs migrants et transfrontaliers vivent ensemble en grands groupes. Ils peuventvivre dans des appartements, mais aussi dans des bungalows ou des caravanes. Ces conditions ontbien sûr contribué à la propagation du virus.

Le Royaume-Uni

Au Royaume-Uni, on a récemment constaté une augmentation des cas confirmés de Covid-19 dansle secteur de la viande, ce qui a entraîné la fermeture de deux sites.

Le 18 juin 2020, l'usine de transformation de poulet des 2 Sisters à Anglesey a déclaré qu'ellefermerait ses portes pendant une quinzaine de jours après que les autorités sanitaires locales aientconfirmé qu'il y avait 58 cas de coronavirus parmi le personnel du site, sur un effectif de 560personnes.

7 L'article 5 de la directive 2008/104/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative au travailintérimaire établit le principe de l'égalité de traitement pour les travailleurs intérimaires. Les conditions essentiellesd'emploi et de travail sont - pour la durée de la mission dans l'entreprise utilisatrice - égales à celles d'un travailleuremployé directement par cette entreprise pour occuper le même poste. Toutefois, en raison d'une combinaison deproblèmes de conformité et de contournement des pratiques commerciales, l'égalité de traitement pour les travailleursintérimaires n'est souvent pas respectée.

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Deux autres usines de transformation des aliments - l'usine de viande Kober dans le Yorkshire quifournit du bacon à Asda et Rowan Foods à Wrexham qui fabrique des aliments pour les supermarchésdu Royaume-Uni - ont également fermé leurs portes en raison des épidémies. Les tests effectués àl'usine de Kober ont révélé 165 cas positifs ; tous ceux qui ont été testés positifs ont été placés enauto-isolement pendant 14 jours et les autorités sanitaires tentent de retrouver les personnes aveclesquelles ils ont été en contact. Selon les patrons de Kober, l'usine a partiellement rouvert la semainedu 22 juin 2020, seuls les employés testés et déclarés aptes à reprendre le travail

Les employeurs ont été lents à réagir à la situation émergente et peu enclins à adopter des lignesdirectrices en matière de distanciation sociale, en particulier dans les zones de transformation. Unitethe Union a fortement plaidé pour que les employeurs adoptent des mesures de sécurité strictesaprès qu'un nombre important de travailleurs aient quitté l'usine de Moy Park en Irlande du Nord le 25mars 2020, ne reprenant le travail qu'après avoir reçu l'assurance que des mesures de sécurité plusstrictes seraient prises. Quatre travailleurs de l'industrie alimentaire sont morts après avoir contractéun coronavirus le mois dernier - un à Moy Park en Irlande du Nord et trois autres dans une usine detransformation de viande à Barnsley.

Les représentants syndicaux des usines de transformation de la viande au Royaume-Uni signalentque la plupart des lignes de production ne sont pas couvertes par la distanciation sociale. Lesévaluations des risques, si elles ont été faites, n'ont guère bénéficié de l'apport des syndicats.

Sous la pression des syndicats, certains employeurs ont modifié les horaires de travail et adaptél'aménagement des espaces communs (vestiaires, cantine, etc.). Toutefois, dans les zones detransformation de la viande, la distance sociale de 2 mètres n'est toujours pas respectée, legouvernement n'ayant publié que des lignes directrices - qui ne sont pas juridiquementcontraignantes.

Il y a eu une augmentation considérable des niveaux de production (jusqu'à 40 %) pour répondre àla demande accrue afin de suivre l'achat public en panique, de sorte que les employeurs ne sont pasprêts à ralentir les lignes de production pour permettre une distanciation sociale entre les opérateurs.

Les usines de transformation de la viande emploient principalement des travailleurs migrants quivivent dans des logements pauvres et exigus où plusieurs occupants travaillent et vivent ensemble.Comme la plupart de ces travailleurs sont mal payés, il est difficile de posséder une voiture et laplupart d'entre eux dépendent du covoiturage ou des transports publics surchargés. La plupart destravailleurs migrants et transfrontaliers ne comprennent pas l'anglais et les informations sur lesrisques de la pandémie n'ont pas été fournies dans une langue qu'ils pouvaient comprendre.

Les travailleurs ont trop peur pour aller travailler, mais ils sont obligés de le faire parce qu'ils sont malpayés et ne peuvent pas se permettre de rester à la maison. Les indemnités de maladie sont tropfaibles, 95 livres par semaine ne suffisent pas pour vivre, pour payer le loyer/électricité. Une enquêtemenée par les membres du GMB a révélé que plus de 65 % des travailleurs ne pouvaient pas sepermettre de s'absenter du travail. C'est pourquoi GMB a écrit au secrétaire d'État à l'alimentation età la boisson pour demander la tenue d'un sommet industriel avec les détaillants des supermarchésafin d'établir des normes industrielles minimales telles que le paiement intégral des absences duesau Covid-19.

France

Trois grappes Covid-19 ont été confirmées dans des abattoirs en France.

Le 18 mai 2020, l'autorité sanitaire régionale du Val de Loire a confirmé que 54 travailleurs avaientété testés positifs à l'abattoir Tradival, propriété de la coopérative agricole Groupe Sicarev. Environ500 travailleurs sont employés dans l'usine. L'usine a été fermée par les autorités locales.

Un deuxième pôle Covid-19 a été confirmé en Bretagne Nord, où 115 travailleurs de l'abattoirKermené en Côtes-d'Armor ont été testés positifs pour le virus. Plus de 2800 travailleurs sontemployés dans l'usine.

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9 membres du personnel (sur 700) ont également été testés positifs dans un abattoir appartenant augroupe de volailles LDC à Arrivé.

Tous les membres du personnel qui ont été testés positifs se sont isolés.

Comme dans d'autres pays, la grande majorité des travailleurs employés dans le secteur sont destravailleurs migrants et transfrontaliers. Ils viennent principalement des PECO, mais aussi d'Afrique.Les pratiques de sous-traitance ainsi que le détachement de travailleurs sont largement utilisés.

Pologne

Certains travailleurs sont tombés malades et d'autres ont été mis en quarantaine dans une usine detransformation de la volaille appartenant à Danish Crown à Czyzew en Pologne. Certaines des lignesont été temporairement fermées. À Starachowice, dans le sud-est de la Pologne, plus de 100travailleurs sont tombés malades ou ont été mis en quarantaine dans une usine de Smithfield. L'usinea été temporairement fermée, mais au 1er juin 2020, elle avait rouvert certaines lignes et certainsdépartements. La main-d'œuvre est composée d'un grand nombre de travailleurs migrants originairesd'Ukraine.

Un processus de transformation et de modernisation de l'industrie a été lancé peu après l'adhésiondu pays à l'Union européenne en 2004, notamment en raison de l'afflux massif de capitaux étrangersdans l'industrie de la viande et de la capacité à exporter vers les marchés de l'UE.

Compte tenu de sa position centrale en Europe et de ses coûts de main-d'œuvre relativement faibles,la Pologne est devenue dans le même temps un importateur important de porcs vivants et de viandefraîche/congelée et un acteur important sur le marché de l'abattage des porcs et de la transformationde la viande porcine. Les lois sur l'environnement et la qualité de la viande étant moins strictes quedans d'autres pays de l'UE, les groupes multinationaux étaient en outre intéressés par la relocalisationde leurs installations en Pologne.

En fin de compte, le pays a contribué à remodeler en particulier l'industrie porcine de l'UE en exportantmassivement à la fois de la main-d'œuvre et des entreprises vers d'autres marchés de l'UE. D'autrepart, en raison de la position stratégique du pays, les entreprises du secteur de la viande basées enPologne pouvaient à leur tour bénéficier de la main-d'œuvre bon marché des pays d'Europe de l'Est.Il semble que dans la plupart des usines, les employés non formés ou peu formés travaillent jusqu'àdix-quatorze heures, et que les heures supplémentaires ne sont souvent pas rémunérées, surtoutdans les régions du pays où le chômage est élevé.

Italie

À ce jour, trois foyers sont apparus dans des installations de transformation de la viande en Italie. Le29 juin 2020, douze travailleurs ont été testés positifs pour le Covid-19 à l'abattoir Ghinzelli deViadana (Mantoue). L'usine a été temporairement fermée et les porcs ont été transférés dans uneautre usine du même groupe à Castelverde (Crémone). Les 300 travailleurs ont été testés pour leCovid-19, le nombre total de cas confirmés restant à établir. Chacun des douze travailleurs infectésest employé par une coopérative de travailleurs agissant en tant que sous-traitant.

Cet incident fait suite à l'épidémie qui s'était déjà déclarée à l'usine de viande Gardani (également àMantoue), où douze travailleurs avaient également été testés positifs au Covid-19. Dans ce caségalement, les travailleurs testés positifs étaient des travailleurs sous-traitants.

Un cas supplémentaire a également été signalé le 30 juin 2020, celui de deux travailleurs dont le testde dépistage à l'abattoir Martelli de Dosolo (Mantoue) s'est révélé positif. Les 250 travailleurs seronttous soumis au test Covid-19.

En mars 2020, un accord trilatéral entre le gouvernement, les syndicats et les organisationspatronales a été conclu. Le décret a imposé des mesures de précaution claires. Les affiliés del'EFFAT ont depuis lors conclu plusieurs accords (dont certains ont été téléchargés dans la pageCovid-19 de l'EFFAT) au niveau national pour mettre enœuvre au niveau des entreprises les mesuresde précaution adoptées le 13 mars.

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En Italie comme dans d'autres pays, le secteur de la viande repose largement sur des pratiquesabusives de sous-traitance. Le modèle d'entreprise dominant du secteur italien de la viande est basésur le recours à de petites coopératives de travailleurs auxquelles est sous-traité l'ensemble du cycleéconomique (abattage, désossage, découpe, transformation et conditionnement) à l'exception desemplois de gestion et d'administration. Cela permet aux principaux entrepreneurs de réaliser deséconomies considérables. Alors que les employés directement employés par les entreprises deviande continuent de bénéficier de la convention collective pour le secteur alimentaire, les sous-traitants appliquent les conventions collectives pour les secteurs de la logistique et des services(Multiservizi), qui prévoient des salaires et des normes de travail moins élevés. Cela détermine unesituation de négociation collective et de dumping salarial et une augmentation de la flexibilité du tempsde travail. Le statut juridique de ces coopératives leur permet d'imposer des baisses de salaires etdes licenciements faciles. Comme en Espagne, ce sont des coopératives fictives. Les travailleurs nesont même pas informés des réunions des coopératives ou des décisions prises en leur nom. Lespratiques illégales sont très répandues en ce qui concerne le temps de travail, la santé et la sécurité,les impôts et les cotisations de sécurité sociale. Cette chaîne de sous-traitance emploie presqueentièrement des travailleurs migrants originaires de pays tiers (comme l'Albanie, le Ghana, la Côted'Ivoire, la Chine) dans des conditions précaires

Norvège

Il y a eu deux groupes de Covid-19 dans les usines de viande norvégiennes. Dans les deux cas, lesopérations ont été fermées pendant quelques jours avant de reprendre. Dans l'une des usines, lestravailleurs infectés étaient des travailleurs intérimaires.

Quelques entreprises qui ne fabriquent que des produits destinés au secteur de l'hôtellerie et de larestauration ont été fermées pendant quelques semaines, mais sont maintenant de nouveau enactivité.

En raison de la fermeture des frontières, le secteur a dû faire face à des pénuries de main-d'œuvre.Le secteur de la viande est très dépendant des travailleurs des pays de l'UE. Nombre de cestravailleurs voyagent normalement entre la Norvège et leur propre pays de manière régulière. Ils sontgénéralement employés par des agences de travail temporaire. Certains travailleurs ont choisi derester en Norvège au lieu de retourner dans leur pays de résidence en mars.

Les autorités ont décidé d'autoriser les travailleurs frontaliers des pays de l'UE à venir en Norvègepour travailler dans le secteur de la viande. Ils pouvaient travailler immédiatement sans 14 jours dequarantaine, mais ils devaient rester isolés avec les autres employés sur le site et devaient vivreisolés en dehors du travail pendant 14 jours à leur arrivée.

Des mesures de précaution ont été prises au niveau de l'usine, notamment l'échelonnement deséquipes, l'éloignement social, la modification de la disposition des cafétérias et autres espacescommuns, l'utilisation d'équipements de protection si l'éloignement social ne pouvait pas êtrerespecté, des congés de maladie en cas de symptômes de Covid-19, la traduction des informationspertinentes dans les langues du personnel.

Espagne

Chez Litera Meat (Groupe Pini) à Binéfar, en Aragon, des rapports contradictoires ont été publiés surle nombre de travailleurs qui ont été infectés par le virus. Les premiers tests sérologiques se sontrévélés positifs pour environ 200 travailleurs, mais les tests ultérieurs effectués par la direction ontréduit le nombre de tests positifs de 200 à 11. Dans l'ensemble, la situation a été maîtrisée dans lesabattoirs espagnols. À ce jour, seuls trois groupes de foyers de Covid-19 sont apparus dans desabattoirs et des entreprises de conditionnement de la viande. Là encore, comme dans d'autres pays,les raisons de la contagion peuvent être multiples, notamment le transport commun et les mauvaisesconditions de logement des travailleurs migrants et transfrontaliers. En Espagne également, lestravailleurs du secteur de la viande n'ont pas d'autre choix que de partager leur logement pouréconomiser des frais en raison de leurs faibles salaires.

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Des mesures visant à protéger la santé des travailleurs pendant l'épidémie de Covid-19 ont étéadoptées et mises en œuvre par le gouvernement espagnol.

En outre, la Fédération des employeurs de l'industrie alimentaire (FIAB), ainsi que les syndicatsCC.OO Industria et FICA-UGT affiliés à l'EFFAT ont adopté des recommandations communes pourtraiter le Covid-19 au niveau des entreprises.

Ces mesures et recommandations établissent diverses mesures, notamment l'échelonnement deséquipes à l'entrée et à la sortie des installations, la vérification de la température à l'arrivée dansl'entreprise, une distance de 2 mètres entre les postes de travail, des barrières physiques entre lestravailleurs lorsque la séparation de 2 mètres ne peut être respectée, le lavage des mains et d'autresmesures d'hygiène, la fourniture de masques et/ou d'écrans faciaux par les entreprises et lerenforcement du nettoyage tout au long de la journée dans les espaces communs (toilettes, vestiaires,salles de bain, escaliers, mains courantes, salles de réunion, etc.)

Grâce au respect de ces mesures, l'impact de Covbic-19 dans le secteur de la viande a été limité.

L'Espagne, avec quelque 100 000 travailleurs et près de 3 700 entreprises en activité, est le deuxièmeproducteur de viande de l'Union européenne en nombre de tonnes produites (14,6 % du total), et letroisième en valeur de sa production (11,3 % du total). Le secteur espagnol de la viande estégalement une industrie en expansion qui a connu une croissance significative au cours de la dernièredécennie : de 2008 à 2017, au plus fort de la crise économique, la valeur de la production de l'industriea augmenté de 33,4 %, près de 10 000 emplois ont été créés et le nombre d'heures travaillées aaugmenté de 13 %.

Tout comme l'Allemagne, l'Irlande, la France, l'Italie et d'autres pays, le secteur de la viande secaractérise par des pratiques de sous-traitance.

En Espagne, les entreprises externalisent une partie des activités principales de l'industrie(principalement les activités d'abattage et de découpe). Il existe un entrepreneur principal qui conclutdes accords de services commerciaux pour externaliser des activités à un nombre variabled'entreprises, qui agissent comme sous-traitants pour l'entrepreneur principal. La plupart de cesactivités d'externalisation ne nécessitent pas de chaînes de sous-traitance à plusieurs niveaux, ni laparticipation d'entreprises situées en dehors de l'Espagne, ni le transfert temporaire de travailleursd'autres pays de l'UE. En fait, la grande majorité des entreprises qui utilisent ce modèle sont détenuespar des Espagnols et opèrent à partir du territoire.

Les entreprises qui agissent comme sous-traitants dans l'industrie de la viande sont aujourd'huiprincipalement des entreprises multiservices. Ces entreprises sont parfois créées par des agencesde travail temporaire afin d'éviter aux employeurs l'obligation de garantir l'égalité de traitementconformément à la directive sur les travailleurs intérimaires.

Le système de sous-traitance contribue à rendre l'emploi dans le secteur de la viande encore plusprécaire, en permettant à l'employeur d'éluder et de contourner ses responsabilités concernant lesconditions de travail, les niveaux de rémunération, les cotisations de sécurité sociale et les impôts.

Les travailleurs employés par le biais de la sous-traitance sont normalement couverts par laconvention collective de l'entreprise multiservices. Bien qu'ils exercent leur activité quotidienne dansdes usines de viande et qu'ils soient employés dans des activités d'abattage et de transformation,ces travailleurs ne sont pas couverts par les deux conventions collectives nationales qui régissent lesecteur espagnol de la viande : la convention collective de l'industrie de l'abattage de la volaille et dulapin et la convention collective nationale de l'industrie de la viande, qui sert d'accord de référenceau secteur en raison du nombre d'entreprises et de travailleurs qu'elle couvre.8 Le dumping de lanégociation collective qui découle de ces pratiques abusives de sous-traitance est à l'origine de

8 Résolution du 19 mars 2019 de la Direction générale de l'emploi, par laquelle est enregistrée et publiée la Conventioncollective de l'État pour l'industrie de la viande, BOE, n° 86, du 10 avril 2019 ; Résolution du 25 janvier 2018 de la Directiongénérale de l'emploi, par laquelle est enregistrée et publiée la Convention collective de l'industrie de l'abattage desvolailles, BOE, n°. 39, du 13 février 2018.

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différences importantes en termes de salaires, de temps de travail et de couverture sociale entre lestravailleurs employés par les sous-traitants et les travailleurs directement employés par l'entreprisede viande.

Il y a quelques mois encore, la grande majorité des entreprises de sous-traitance fonctionnaient sousla forme de coopératives de travail associé (cooperativas de trabajo asociado). Environ 25 000travailleurs étaient employés dans le secteur par l'intermédiaire de ces coopératives. Grâce à lamobilisation des affiliés de l'EFFAT, une grande partie de ces travailleurs ont été directementemployés par des entreprises de viande et sont maintenant couverts par la convention collectivesectorielle applicable. Les membres de la coopérative opèrent sous un régime de sécurité socialepour travailleurs indépendants. Ils ne sont rémunérés que lorsqu'ils travaillent effectivement. Parconséquent, leur inactivité - volontaire ou forcée - n'implique aucun coût économique pour lacoopérative et, bien entendu, pour l'entreprise de viande.

Bien que le nombre de travailleurs employés par le biais de fausses coopératives ait sensiblementdiminué, la régularisation des faux indépendants n'a pas toujours été rendue efficace en les absorbantdans la main-d'œuvre des entrepreneurs principaux, comme cela aurait pu être souhaitable, maisplutôt par le biais de différents types de sous-traitance (sociétés multiservices, sociétéscommerciales, etc.) comme décrit ci-dessus.L'impossibilité d'obliger légalement les coopératives de travail associé (ou d'autres pratiques de sous-traitance qui ont commencé à apparaître dans le secteur, telles que les entreprises multiservices) àappliquer la convention collective sectorielle en vigueur, est un problème majeur en Espagne commedans d'autres pays qui provoque un dumping social et une concurrence déloyale.

Belgique

En Belgique, une grave épidémie s'est déclarée avec 70 personnes infectées sur 330 travailleursdans une usine de viande du groupe de Lovenfosse. L'usine n'a pas été fermée. Deux travailleurs ontperdu la vie.

L'un des principaux problèmes auxquels les syndicats belges sont actuellement confrontés est celuides conditions de logement des travailleurs détachés et sous-traitants. De plus, le transport estsouvent organisé par l'employeur. Les affiliés belges de l'EFFAT ont demandé aux autoritésnationales de s'attaquer à ces problèmes et d'augmenter le nombre d'inspections. Une réunion avecl'Inspection sociale belge aura lieu cette semaine, avec une attention particulière pour les conditionsde logement des travailleurs détachés.

Le détachement de travailleurs est encore largement utilisé dans le secteur belge de la viande. Ledétachement de travailleurs suscite l'intérêt des entreprises belges, car il leur permet d'éviter pendantun certain temps le coûteux régime de cotisation à l'assurance nationale. Une autre pratiquerépandue pour réduire les coûts est la sous-traitance de tâches à des entreprises enregistrées etopérant dans les secteurs de la logistique ou du commerce alimentaire : cela leur permet de profiterdes salaires plus bas prévus par les conventions collectives applicables.

Il est également important de souligner que les travailleurs de la viande employés par des sous-traitants - qu'ils soient détachés ou non - devraient gagner au moins le salaire minimum convenu auniveau sectoriel pour le secteur belge de la viande. Les conventions collectives sont contraignantespour tous les employeurs et employés du secteur dans leur champ d'application.

Pendant la pandémie, les partenaires sociaux se sont mis d'accord sur des instructions claires àmettre en œuvre au niveau de l'entreprise. Les directives sectorielles ont accordé une attentionparticulière au travail effectué par les sous-traitants et les travailleurs détachés. Des affichesinformatives en différentes langues (arabe, roumain, bulgare, polonais) devaient être fournies pourinformer les travailleurs sur le risque de la pandémie et les mesures de précaution à observer.

En Belgique, le Covid-19 a été reconnu comme une maladie professionnelle dans des secteursessentiels (dont l'industrie alimentaire). Toutefois, cette reconnaissance est limitée par des conditionsclaires. Elle ne s'appliquait que pendant la période comprise entre le 13 mars et le 17 mai 2020 etuniquement lorsqu'il était impossible de maintenir une distance sociale d'au moins 1,5 mètre. Les

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syndicats souhaitent que la reconnaissance du Covid-19 soit étendue et s'opposent fermement àl'obligation de démontrer l'impossibilité de maintenir une distance sociale de 1,5 mètre. La distancesociale devrait toujours être maintenue car c'est la manière la plus efficace de se protéger contre lerisque de contagion.

En 2013, les autorités belges, poussées par les syndicats, ont tenté d'augmenter la pressioninternationale sur le gouvernement allemand afin de protéger l'industrie de la viande du pays. En2013, une plainte officielle a été déposée devant la Commission européenne par le ministre desaffaires économiques de l'époque, Johan Vande Lanotte, et la ministre de l'emploi, Monica DeConnick.

En 2012, les entreprises du secteur de la viande ont signé un protocole avec le gouvernement fédéralpour lutter contre le dumping social et les abus dans le secteur. Un système de responsabilitésolidaire tout au long de la chaîne de sous-traitance s'applique. En raison de cette législation, lesconditions de travail dans le secteur belge de la viande ne sont pas comparables à celles des autrespays voisins.

Danemark

Seuls 5 cas de Covid-19 ont été détectés jusqu'à présent dans l'industrie danoise de la viande.

Paradoxalement, le nombre de jours de congé de maladie a diminué par rapport à la même périodede l'année dernière. Cela peut peut-être s'expliquer par l'attention accrue portée aux mesures deprécaution en matière de santé et de sécurité.

Au Danemark, tous les travailleurs du secteur de la viande sont couverts par des conventionscollectives et le taux de syndicalisation est très élevé.

La distanciation sociale a été respectée pendant la pandémie. Lorsque cela n'a pas été possible, desbarrières de plexiglas ont été mises en place. Les abattoirs respectent les règles nationales enmatière de distanciation sociale, de renforcement des équipements de protection individuelle,d'échelonnement des équipes et d'aménagement des postes de travail.

Les abattoirs de porcs au Danemark se caractérisent par un processus d'abattage technologiquementavancé, ce qui signifie des niveaux de productivité plus élevés et le besoin de moins d'employés parrapport aux concurrents internationaux. Les abattoirs sont encore largement contrôlés par descoopératives d'agriculteurs qui remontent à plusieurs siècles et exercent un contrôle considérable surle secteur. Le Danemark a connu un déclin de la main-d'œuvre employée dans le secteur au coursdes deux dernières décennies, notamment en raison du dumping social agressif qui caractérise lesecteur allemand de la viande.

Seuls 25 % de la main-d'œuvre totale sont des travailleurs migrants, mais ils sont embauchésdirectement par l'entreprise. Il n'y a pas de sous-traitance et les travailleurs vivent dans leur proprelogement.

Autriche

Aucun cas de Covid-19 n'a été détecté à ce jour dans le secteur de la viande en Autriche. Toutes lesentreprises syndiquées ayant des représentants du comité d'entreprise dans le secteur ont appliquédes mesures de santé et de sécurité relatives au Covid-19 pour protéger les travailleurs dans lesabattoirs et les usines de conditionnement de la viande.

Le problème se pose dans les entreprises non syndiquées où il est difficile d'évaluer si les mesuressont mises enœuvre et respectées correctement. La distanciation sociale est en tout cas un problèmeet les comités d'entreprise ainsi que les employeurs dans les entreprises sont concernés.

Suède

Le secteur de la viande n'a pas été touché jusqu'à présent, pas en tant qu'industrie spécifique. Desmesures de précaution ont été prises dans toutes les installations de production pour assurer ladistanciation sociale et minimiser le risque de contagion. Les mesures de précaution ont étérespectées.

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Les règles de respect des normes d'hygiène dans l'industrie alimentaire étaient déjà extrêmementstrictes avant la pandémie de Covid-19.

5. Propositions d'action de l'EFFAT au niveau de l'UE

Il est clair que les problèmes qui touchent le secteur de la viande sont loin d'être uniquementnationaux. L'épidémie de Covid-19 doit être un signal d'alarme, un appel aux institutions européennespour qu'elles mettent fin à l'exploitation de la main-d'œuvre et aux problèmes structurels qui ontaffecté le secteur pendant des décennies.

Comme souligné dans l'introduction de ce rapport, nous avons besoin d'une approche globale quienglobe différents angles. Les conditions de travail et d'emploi abusives dans le secteur sont laconséquence de plusieurs facteurs, dont les suivants :

l'abus de pratiques de sous-traitance et d'autres pratiques commerciales pour échapper à laresponsabilité de l'employeur. La sous-traitance est actuellement l'un des principaux facteursde dumping dans les négociations collectives, de baisse des salaires et de dégradation desconditions de travail et de logement ;

la discrimination et l'absence d'égalité de rémunération et de traitement pour un même emploisur un même lieu de travail ;

des retenues illégales sur les salaires pour les outils de travail ;

la violation des responsabilités des employeurs en ce qui concerne la libre circulation destravailleurs dans l'UE et le cadre juridique de l'UE couvrant la migration de la main-d'œuvre enprovenance de pays tiers ;

l'absence de conditions de logement décentes pour les travailleurs transfrontaliers et migrants,et/ou le fait que le logement soit couplé à des contrats de travail ;

le contournement des règles dans le cadre du détachement de travailleurs ;

l'absence de protection en matière de santé et de sécurité et de couverture sociale adéquate ;

l'utilisation de sociétés de boîtes aux lettres ;

l'intermédiation en matière de travail illégal et les pratiques de gangstérisme ;

l'utilisation de fausses coopératives et, par conséquent, la négociation collective et le dumpingsalarial ;

les travailleurs étant contraints de travailler comme indépendants.

ainsi que des problèmes structurels affectant la chaîne alimentaire, tels que

des pratiques commerciales déloyales et un pouvoir de négociation excessif de la part desdétaillants ;

une concurrence agressive au niveau de l'UE et au niveau international

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Les preuves montrent que tous ces problèmes ont contribué directement ou indirectement à lapropagation du virus dans le secteur de la viande.

L'EFFAT souhaite donc souligner la nécessité d'une nouvelle vision durable à long terme pour lesecteur de la viande. Pour y parvenir, une combinaison de différentes mesures devrait être prise auniveau de l'UE à court et moyen terme.

Vous trouverez ci-dessous quelques propositions préliminaires de l'EFFAT :

- L'EFFAT appelle la Commission européenne à proposer un instrument ambitieux etjuridiquement contraignant garantissant la responsabilité conjointe et solidaire tout au longde la chaîne de sous-traitance et prévoyant des sanctions, des arriérés de paiement et descompensations en cas de non-respect de la législation du travail applicable - y compris les plancherssalariaux ou les salaires minimums légaux, le contournement et les évasions des cotisations desécurité sociale et des impôts, ou la violation des droits d'organisation et de négociation collective.9

L'initiative devrait également viser à lutter contre le dumping des négociations collectives etle dumping salarial qui est récurrent dans le secteur de la viande. Les États membresdevraient être tenus de veiller à ce que tous les travailleurs employés sur le même lieu detravail et participant à la même activité ou au même cycle de production bénéficient desmêmes conditions de travail et soient couverts par la même convention collective. Laconvention collective applicable doit se rapporter à l'activité exercée par les travailleurs etdoit toujours être la plus favorable. Si une convention collective sectorielle s'applique, elledoit relever des secteurs de l'alimentation/viande ou des sous-branches applicables. Il doitêtre interdit aux employeurs d'appliquer d'autres conventions collectives sectorielles qui nefont pas strictement référence aux tâches effectuées par les travailleurs dans l'établissementde l'entreprise.

Le besoin d'un instrument juridique ambitieux sur la sous-traitance devient de plus en plus urgent.Dans plusieurs processus législatifs, l'EFFAT, la CES et d'autres FSE ont fait pression pour quedes règles strictes et ambitieuses en matière de responsabilité soient introduites pour les chaînesde sous-traitance (en particulier pour la responsabilité conjointe et solidaire dans toute la chaîne desous-traitance), mais les résultats finaux n'ont pas introduit de dispositions efficaces ou adéquates.Les mesures régissant la responsabilité de la sous-traitance au niveau européen ne réglemententactuellement que des situations spécifiques (par exemple, les marchés publics, le détachement detravailleurs, la directive sur les travailleurs saisonniers, la directive sur les sanctions à l'encontredes employeurs). Dans la plupart des cas, elles ne sont qu'une option pour les États membres ouse limitent à une étape de la chaîne de sous-traitance. En outre, une exception de diligenceraisonnable est parfois insérée mais définie au niveau national, et non au niveau européen. Il estmaintenant temps d'assurer la cohérence entre tous ces instruments législatifs en présentant uneinitiative ambitieuse et globale sur la sous-traitance qui vise également à lutter contre le dumpingsalarial et le dumping des négociations collectives.

- L'EFFAT appelle la Commission européenne à soutenir et à encourager l'adoption des mesuresproposées par le gouvernement allemand pour améliorer la situation dans le secteur de laviande. Le système allemand de sous-traitance a contribué à la destruction de milliers d'emploisdans d'autres États membres au cours des dernières années. En outre, afin de rester compétitifspar rapport au secteur allemand de la viande, d'autres pays ont adopté des pratiques commercialessimilaires, au grand détriment des travailleurs. La prochaine présidence allemande devraitégalement contribuer à répondre à la nécessité d'une action au niveau de l'UE.

- L'EFFAT demande la création d'un instrument européen juridiquement contraignantgarantissant un logement décent à tous les travailleurs transfrontaliers, saisonniers et

9 Le 19 juin 2020, le Parlement européen a adopté la Résolution sur la protection européenne des travailleurstransfrontaliers et saisonniers dans le contexte de la crise COVID-19. Par cette résolution, le Parlement européen invitela Commission à proposer des solutions à long terme pour faire face aux pratiques abusives de sous-traitance et protégerles travailleurs saisonniers et transfrontaliers employés tout au long de la chaîne de sous-traitance etd'approvisionnement https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/TA-9-2020-0176_EN.html

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migrants. Il convient de fixer une limite de prix pour le logement des travailleurs. Les conditions delogement devraient garantir un niveau de vie décent selon des critères clairs. La taille du logementdoit garantir la distanciation sociale. Des dispositions concernant le logement sont incluses dans lecadre juridique régissant le détachement de travailleurs ou l'emploi de travailleurs saisonniersressortissants de pays tiers. Mais la fourniture d'un logement décent fait actuellement défaut dansle cadre juridique européen applicable aux travailleurs transfrontaliers, saisonniers et migrants sedéplaçant en Europe dans le cadre de la libre circulation des travailleurs dans l'UE.

- Il y a un besoin criant d'accélérer l'autonomisation de l'Autorité européenne du travail (AET),en particulier en ce qui concerne les inspections conjointes et concertées et la lutte contre le travailnon déclaré. L'ELA aurait pu jouer un rôle crucial pendant cette pandémie en contrôlant laconformité de la législation européenne sur la mobilité du travail, la coordination de la sécuritésociale et la fourniture de services. Il est maintenant grand temps de s'assurer que l'ELA fonctionneà plein régime et à pleine capacité.

- Le Covid-19 devrait être immédiatement reconnu par la Commission comme une maladieprofessionnelle. Les travailleurs du secteur de la viande font partie de ces millions de travailleursqui ont continué à travailler dur pour maintenir le fonctionnement de la société. Ils ont besoin de lareconnaissance officielle du Covid-19 comme maladie professionnelle. Les gouvernements doiventêtre tenus de signaler et d'enregistrer les cas liés au travail. Des régimes d'indemnisation doiventêtre mis en place pour couvrir les victimes de maladies professionnelles liées au Covid-19 et leursfamilles, comme le souligne la lettre de la CES/FSE envoyée à la Commission le 27 avril 2020.

- Le commissaire à l'emploi et aux droits sociaux, Nicolas Schmit, a annoncé une mise à jour trèsattendue du cadre stratégique de l'UE pour la santé et la sécurité au travail. L'EFFAT se félicitede cette initiative et encourage la Commission à veiller à ce que les mesures de protection et deprécaution visant à prévenir le risque de contagion soient respectées sur tous les lieux de travail enEurope. Le commissaire Schmit a également annoncé une éventuelle initiative sur les conditionsde travail dans le secteur de la viande. L'EFFAT soutient pleinement cette ambition et estimpatiente de discuter avec la Commission des éléments possibles d'une telle proposition. L'EFFATinvite également la Commission à promouvoir davantage les lignes directrices conjointes EFFAT-FoodDrinkEurope pour protéger la santé et la sécurité des travailleurs du secteur alimentaire lorsde l'épidémie de Covid-19

- Les solutions à long terme ne peuvent être efficaces que si elles visent à remédier aux déséquilibreset aux distorsions de concurrence qui affectent la chaîne de valeur de la viande. Il estparticulièrement important de s'attaquer au pouvoir de négociation excessif des détaillants etd'atténuer les conséquences de la concurrence transfrontalière européenne et internationaledéloyale. Les demandes de l'EFFAT en matière d'étiquetage des aliments et de consommationalimentaire responsable devraient également être prises en compte par la Commissioneuropéenne. À cet égard, l'EFFAT appelle les institutions européennes à veiller à ce que lesdemandes de l'EFFAT concernant la stratégie "de la ferme à la table" soient satisfaites. (Voir lesdemandes de l'EFFAT sur la stratégie "de la ferme à la table" | EN | FR | DE).

- L'EFFAT appelle les États membres à assurer la révision rapide du règlement 883/2004 sur lacoordination de la sécurité sociale. La pandémie de Covid-19 a mis en évidence toutes les lacunesde ce règlement. La crise actuelle démontre aussi clairement qu'il existe un besoin urgent au niveaueuropéen pour le fonctionnement optimal de l'échange électronique d'informations sur lasécurité sociale (EESSI) et l'introduction urgente d'un numéro européen de sécurité sociale(ESSN) et d'un vérificateur du statut d'assurance.

- La directive révisée sur le détachement des travailleurs devrait être transposée rapidement danstous les États membres. Les États membres et la Commission devraient veiller au respect et àl'application de la directive. Les affiliés de l'EFFAT ont également signalé des problèmes importantsliés au transport (commun) et au logement des travailleurs détachés.

- L'initiative annoncée par l'UE en matière de diligence raisonnable devrait être contraignante etambitieuse. Cette pandémie montre qu'il est nécessaire d'introduire des mesures obligatoires pour

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garantir le plein respect et l'application des droits de l'homme, y compris les droits des travailleurset des syndicats, dans les activités des entreprises ainsi que tout au long de leurs chaînes de sous-traitance et d'approvisionnement et de leurs systèmes de franchise, au niveau national ettransfrontalier.

- Des mesures efficaces visant à rendre superflu le recours aux sociétés "boîtes aux lettres"devraient être envisagées, telles que la responsabilité directe dans les relations de travail même sielles impliquent des intermédiaires, l'introduction du principe du siège réel dans le droit européendes sociétés et la transparence financière sous la forme de rapports publics pays par pays.

- Le cadre juridique actuel de l'UE régissant les canaux de migration régulière (regroupementfamilial, résidence de longue durée, travailleurs saisonniers, directive sur le permis unique)devrait être amélioré pour garantir des droits uniformes au travail, l'égalité de traitement, uneprotection accrue sur le marché du travail et des mesures d'application adéquates de l'acquiscommunautaire. L'UE devrait poursuivre l'amélioration des conditions de travail et de vie de tousles travailleurs et des membres de leur famille, quel que soit leur statut migratoire.

- La prochaine initiative de l'UE sur les salaires minimums équitables devrait viser àpromouvoir la négociation collective sectorielle et à garantir le respect des droits destravailleurs et des syndicats, y compris l'accès au site et le droit d'organisation et denégociation collective.