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Robinson GRYSON Structure d’accueil : Gret Maître de stage : Barbara MATHEVON Tuteur de stage : Christophe LE PAGE Apport de la modélisation d’accompagnement dans la mise en œuvre d’une cogestion adaptative des ressources naturelles dans la Réserve de Biosphère de Mananara-Nord à Madagascar Rapport de stage Septembre 2019 Master 2 Man and Biosphere

Rapport de stage · 2020. 7. 17. · Maître de stage : Barbara MATHEVON Tuteur de stage : Christophe LE PAGE Apport de la modélisation d’accompagnement dans la mise en œuvre

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Robinson GRYSON

Structure d’accueil : Gret

Maître de stage : Barbara MATHEVON Tuteur de stage : Christophe LE PAGE

Apport de la modélisation d’accompagnement dans la mise en œuvre d’une cogestion adaptative des ressources naturelles dans la Réserve de Biosphère de Mananara-Nord à Madagascar

Rapport de stage Septembre 2019

Master 2 Man and

Biosphere

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Illustrations de la page de garde : Photo supérieure : atelier ARDI d’Ivontaka du 02/05/19. © Robinson Gryson Photo inférieure droite : plateau du jeu de rôles Fiarahamiasa durant une session de jeu à Menatany. © Robinson Gryson Photo inférieure gauche : Parc marin de la réserve de Biosphère de Mananara-Nord tel que vu depuis la plage de Menatany. © Robinson Gryson

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« La pirogue ne tient pas compte de la noblesse, tous ceux qui chavirent sont mouillés »

Proverbe malgache

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Remerciements En premier lieu, je tiens à remercier l’ensemble de l’équipe du Gret à Mananara : José LAIHARINIRINA responsable du Gret à Mananara pour son soutien et sa confiance lors de cette expérience, Giuliano RAMILAMANANA responsable des animateurs pour son apport indispensable de bonne humeur et de culture malgache, Mbola RASENDRAHARISOA assistante administrative pour m’avoir fait partager son point de vue particulier sur le monde et sa patience envers les imprimantes. Je remercie aussi l’ensemble des animateurs du Gret, Blaise, Platini, Hervé, Rochelin, Damax, pour m’avoir permis de mieux comprendre la vie des malgaches. Et merci aussi à Jonathan et Grimao, les deux gardiens du Gret pour leurs bonnes humeurs quotidiennes et leurs leçons de malgache. Je remercie tout particulièrement Edino SABOTSY qui a été mon interprète et mon chauffeur sur la Route Nationale 5 durant l’ensemble du stage et sans qui rien n’aurait pu être possible. Je souhaiterais aussi remercier ma maitre de stage, Barbara MATHEVON responsable Gestion des Ressources Naturelles au Gret, qui avec son planning chargé a quand même pu prendre le temps de me conseiller et de m’apporter son avis. J’adresse aussi un remerciement particulier à mon tuteur de stage, Christophe LE PAGE chercheur au CIRAD, qui a su m’aiguiller et me donner les informations dont j’avais besoin pour réaliser mes ateliers dans la brousse malgache. Merci aussi à Stéphane AULAGNIER, enseignant chercheur à l’INRA et Catherine CIBIEN, responsable scientifique du MAB France pour la formation qu’ils m’ont apporté lors de cette dernière année de master. Un grand merci à ma Marie TOZGE pour ses relectures et ses avis pertinents dans la rédaction de ce mémoire. Une pensée enfin à l’ensemble de l’équipe du Gret à Madagascar pour leur accueil et leur logistique irréprochable, sans laquelle l’étranger que j’étais aurait pu se perdre sur la route de Mananara …

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Glossaire des acronymes AP : Association de Pêcheur

APGL : Aire de pêche gérée localement : aire de pêche dont la gestion a été confiée à la

population

COBA : Communauté de Base : association villageoise crée pour gérer les forêts transférées au

fokontany par la loi GELOSE.

ComMod : Companion Modelling : autre nom donné à la modélisation d’accompagnement.

FKT : fokontany : plus petite entité administrative malgache, équivalent de la commune en

France.

GELOSE : Gestion Locale Sécurisée : loi malgache de 1996 qui permet le transfert de gestion de

forêt de l’état vers les populations locales.

GRET : Groupe de Recherche et d’Échange Technologique : ONG de développement française

fondée en 1976.

JdR : Jeu de Rôles : outil de modélisation dans la démarche de modélisation

d’accompagnement

MNP : Madagascar National Park : association gestionnaire des parcs nationaux malgaches.

MRHP : Ministère chargé des Ressources Halieutiques et de la Pêche

PAP-BA : Plan d’Aménagement Concerté des Pêcheries de la Baie d’Antongil

RBMN : Réserve de Biosphère de Mananara Nord : première Réserve de Biosphère de

Madagascar crée en 1990 et gérée aujourd’hui par MNP.

RNR : Ressources Naturelles Renouvelables

TFC : Temps Forts Collectifs : moment de la modélisation d’accompagnement qui réunit les

parties prenantes du projet.

TGRN : Transfert de Gestion des Ressources Naturelles

WCS : Wildlife Conservation Society : ONG de conservation américaine fondée en 1895.

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SOMMAIRE

I. INTRODUCTION ....................................................................................................................... 1

A. MADAGASCAR ET LA GESTION DES RESSOURCES NATURELLES .................................................................. 1 B. LE GRET A MADAGASCAR ................................................................................................................. 1 C. CONTEXTE ET OBJECTIFS DU PROJET .................................................................................................... 3

II. DEMARCHE METHODOLOGIQUE ............................................................................................. 4 A. PLANNING DES ATELIERS ................................................................................................................... 4 B. LA METHODE ARDI ......................................................................................................................... 5 C. DES DIAGNOSTICS AU JEU DE ROLES .................................................................................................... 5 D. D’UNE SESSION DE JEU A UN PLAN D’ACTION ........................................................................................ 6

III. LA METHODE ARDI POUR CONSTRUIRE UNE REPRESENTATION COMMUNE ............................ 6 A. DIAGNOSTIC DE MENATANY ............................................................................................................. 6 B. DIAGNOSTIC D’IVONTAKA ............................................................................................................... 11

IV. LES DIFFERENTES ETAPES DE LA CONCEPTION DU JEU DE RÔLES « FIARAHAMIASA » ............ 15 A. ETAPE 1 : POURQUOI UN JEU SUR LA PECHE ET LES RESSOURCES HALIEUTIQUES ........................................ 15 B. ETAPE 2 : CONCEPTION DU PLATEAU DE JEU ....................................................................................... 16 C. ETAPE 3 : LES PARTICIPANTS, LES MENAGES ET LEURS BESOINS .............................................................. 18 D. ETAPE 4 : LE RIZ, LES RESSOURCES HALIEUTIQUES ET LEURS DYNAMIQUES ............................................... 20 E. ETAPE 5 : DEFINITION D’AUTRES CARACTERISTIQUES DU JEU ................................................................. 23 F. ETAPE 6 : LES OBJECTIFS DU JEU FIARAHAMIASA ................................................................................. 26

V. SESSIONS DE JEU DANS LES DEUX FOKONTANY PILOTES ........................................................ 28 A. LE DEROULEMENT D’UNE SESSION DE JEU .......................................................................................... 28 B. SESSION A MENATANY ................................................................................................................... 29 C. SESSION A IVONTAKA ..................................................................................................................... 30

VI. DU JEU DE RÔLES AU PLAN D’ACTION .................................................................................... 30 A. DEBRIEFING DU JEU ....................................................................................................................... 30 B. UN DEBUT D’ATELIER EN PLENIERE… ................................................................................................. 31 C. … SUIVI PAR DES DISCUSSIONS EN SOUS-GROUPES… ............................................................................ 31 D. … POUR ELABORER UN PLAN D’ACTION ............................................................................................. 31

VII. DISCUSSION ...................................................................................................................... 33 A. ARDI : UNE METHODE ADAPTEE AU CONTEXTE ? ................................................................................ 33 B. LE JDR : UN MOYEN LUDIQUE POUR RASSEMBLER ? ............................................................................ 34 C. DE L’ACTION APRES LA REFLEXION .................................................................................................... 35

VIII. CONCLUSION ET PERSPECTIVES ......................................................................................... 36 IX. BIBLIOGRAPHIE ..................................................................................................................... 37 X. ANNEXES ............................................................................................................................... 38

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Table des figures, tableaux et cartes

CARTE 1 : LOCALISATION DES SITES D’INTERVENTIONS DU GRET A MADAGASCAR .......................... 2

CARTE 2 : ZONE D’INTERVENTION DU GRET DANS LA BAIE D’ANTONGIL (EN JAUNE, DU NORD AU

SUD : IVONTAKA ET MENATANY, ..................................................................................................... 3

FIGURE 1 : DIAGRAMME D’INTERACTIONS ACTEURS-RESSOURCES DE MENATANY ........................ 10

FIGURE 2 : DIAGRAMME D’INTERACTIONS ACTEURS-RESSOURCES D’IVONTAKA ............................ 14

FIGURE 3 : PLATEAU DU JEU FIARAHAMIASA ................................................................................. 16

TABLEAU 1 : VALEUR DES DIFFERENTES RESSOURCES PRESENTES DANS LE JEU FIARAHAMIASA .... 21

TABLEAU 2 : REPARATION DES RESSOURCES HALIEUTIQUES DANS LES DIFFERENTS PATCHS DU JEU

FIARAHAMIASA ............................................................................................................................. 22

FIGURE 4 : EXEMPLE DE LA FICHE REMISE AUX PARTICIPANTS DU JEU DE ROLES FIARAHAMIASA .. 25

TABLEAU 3 : FICHE DE PERFORMANCE DU JEU FIARAHAMIASA ..................................................... 26

TABLEAU 4 : PLAN D’ACTION REALISE A MENATANY ...................................................................... 32

TABLEAU 5 : PLAN D’ACTION REALISE A IVONTAKA ....................................................................... 32

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Table des annexes

ANNEXE 1 : LES DIFFERENTS ACTEURS DE LA METHODE ARDI DE MENATANY ....................................... 39

ANNEXE 2 : GRAPHIQUE SUR LA CAPACITE D’INFLUENCE DES ACTEURS SUR L’EVOLUTION DES

RESSOURCES DE MENATANY EN FONCTION DE L’IMPACT QUE CETTE EVOLUTION A SUR EUX .............. 40

ANNEXE 3 : LES DIFFERENTES RESSOURCES DE LA METHODE ARDI DE MENATANY ............................... 41

ANNEXE 4 : GRAPHIQUE REPRESENTANT LA VALEUR ECONOMIQUE DES RESSOURCES DE MENATANY EN

FONCTION DE LEURS DISPONIBILITES DANS LE FOKONTANY ................................................................. 42

ANNEXE 5 : CARTE DE MENATANY REALISEE PAR LES PARTICIPANTS DE L’ATELIER ARDI ....................... 43

ANNEXE 6 : SYNTHESE DES INFORMATIONS RECUEILLIES AUPRES DE LA POPULATION DE MENATANY . 44

ANNEXE 7 : LES DIFFERENTS ACTEURS DE LA METHODE ARDI D’IVONTAKA ........................................... 45

ANNEXE 8 : LES DIFFERENTES RESSOURCES DE LA METHODE ARDI D’IVONTAKA ................................... 46

ANNEXE 9 : GRAPHIQUE REPRESENTANT LA VALEUR ECONOMIQUE DES RESSOURCES D’IVONTAKA EN

FONCTION DE LEURS DISPONIBILITES DANS LE FOKONTANY ................................................................. 47

ANNEXE 10 : CARTE DE MENATANY REALISEE PAR LES PARTICIPANTS DE L’ATELIER ARDI ..................... 48

ANNEXE 11 : SYNTHESE DES INFORMATIONS RECUEILLIES AUPRES DE LA POPULATION D’IVONTAKA ... 49

ANNEXE 12 : GRAPHIQUE REPRESENTANT LES VOTES POUR LES ACTIONS DU PLAN D’ACTION DE

MENATANY .......................................................................................................................................... 50

ANNEXE 13 : GRAPHIQUE REPRESENTANT LES VOTES POUR LES ACTIONS DU PLAN D’ACTION

D’IVONTAKA ......................................................................................................................................... 51

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I. Introduction

a. Madagascar et la gestion des ressources naturelles

Située dans l’océan indien à près de 400 km des côtes africaines, Madagascar1 aussi appelé l’île-continent constitue la cinquième plus grande île du monde. Connue mondialement pour sa biodiversité et ses ressources exceptionnelles, l’île est pourtant soumise à de très fortes pressions anthropiques depuis les années 60. Et malgré les ressources dont elle dispose, la majorité de sa population vit en dessous du seuil de pauvreté en 2018 selon la Banque Mondiale.

La Baie d’Antongil (BA) dans le nord-est de Madagascar (régions Analanjirofo et SAVA) est

la plus grande baie du pays et recèle d’importants écosystèmes marins et côtiers productifs. Ces écosystèmes n’ont pas seulement une importance scientifique pour la biodiversité spécifique mais sont également très productifs au niveau de la pêche.

Malgré les potentialités agricoles et halieutiques importantes de cette zone, le niveau de vie, la sécurité alimentaire et nutritionnelle de plus de 100,000 ménages ruraux habitant autour de la Baie reste fragile. Une des principales causes de cette situation est la diminution des moyens de subsistance des pêcheurs traditionnels suite à la baisse continuelle des captures. Cette diminution touche plus particulièrement les ménages les plus vulnérables qui n’ont pas les moyens de développer d’autres sources de revenu que la pêche.

Pour pallier la dégradation des ressources naturelles du pays, le gouvernement malgache a

promulgué une loi en 1996. Cette loi, nommée loi GELOSE permet un transfert de gestion de forets étatiques vers les populations locales. Cette gestion est assurée par l’association COBA formé par des membres de la population au moment du transfert de gestion (Ramamonjisoa et al, 2012).

Plus de 20 ans ont passé depuis la promulgation de cette loi et depuis ce type de transferts

se multiplient et se diversifient. Au niveau de la baie d’Antongil, de nombreuses associations de conservation et de développement agissent au niveau des fokontany2 pour d’autres types de transfert de gestion, comme par exemple les Aires de Pêches Gérées Localement (APGL)3.

b. Le Gret à Madagascar

Structure d’accueil dans le cadre de ce stage, le Gret (Groupe de Recherche et d’Échange Technologique est une ONG internationale de développement, de droit français, qui agit du terrain au politique, pour lutter contre la pauvreté et les inégalités, fondée en 1976. Ses professionnels interviennent sur une palette de thématiques afin d’apporter des réponses durables et innovantes pour le développement solidaire.

1 Officiellement République de Madagascar 2 Plus petite unité administrative malgache 3 En anglais LMMA : Locally Managed Marine Area

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Sa gouvernance se base sur deux entités, une Assemblée générale qui se réunit deux fois par an et un conseil d’administration, composé de représentants des salariés et de personnalités spécialistes des questions de développement. Ce conseil est dirigé par un président, élu pour un mandat renouvelable de trois ans. Étant une ONG de développement, le Gret travaille sur des expertises et des projets divers, regroupés en 7 thématiques qui constituent les pôles dans lesquels les salariés du Gret sont regroupés. Ces thématiques sont les suivantes : agriculture, citoyennetés, eau et assainissement, ressources naturelles et énergie, microfinances, santé et nutrition, et enfin villes. Le stage présenté ici s’inscrit dans la thématique ressources naturelles et énergie qui est la thématique la plus abordée par le Gret au niveau de la côte Nord-Est de Madagascar4. Aujourd’hui, le Gret se compose de 739 professionnels travaillants sur 191 projets et expertises avec un budget global de 31,7 millions d’euros et intervenant dans 25 pays dont la majorité fait partie des pays du Sud. Un de ces pays étant Madagascar où le présent stage a eu lieu.

Présent à Madagascar depuis 1988, le Gret contribue aux politiques de développement et favorise l’accès aux services essentiels grâce à son réseau pluridisciplinaire d’expertises et à son ancrage dans les territoires. Dirigé par Luc Arnaud durant la période du stage, le Gret intervient sur l’ensemble du territoire, notamment à Mananara dans la région d’Analandjirofo (Carte 1). Installé à Mananara depuis octobre 2012, le Gret s’y compose aujourd’hui, d’un responsable général, d’un responsable des techniciens, de cinq techniciens/animateurs de terrains, d’une assistante administrative, d’un assistant technique et de deux gardiens. Dans cette zone rurale, dont les principaux revenus proviennent de l’agriculture et de l’exploitation de ressources naturelles, le Gret intervient principalement pour réaliser de l’appui technique, que ce soit dans le cadre des cultures, comme cela a été le cas pour le précèdent projet Fihavotana ou bien dans le cadre de la pêche comme c’est actuellement le cas avec le projet PCD.

4 Pour plus de renseignements sur les activités du Gret : https://www.gret.org

Carte 1 : localisation des sites d’interventions du Gret à Madagascar, 2018. Source : https://www.gret.org

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c. Contexte et objectifs du projet

Le projet ‘Gestion durable de la Pêche Côtière à Madagascar (PCD)’ est un projet à l’échelle du territoire malgache dans son ensemble avec 6 zones d’intervention réparti sur l’ensemble du territoire de Madagascar. Il s’agit d’un projet financé à hauteur de 10 millions d’euros par la KFW, une institution de droit public allemande. Le projet est promu par Madagascar National Parks (MNP), l’association de droit privé malgache chargée des parcs nationaux du pays. Dans chacune des zones du projet, les actions sont menées par différentes ONGs comme c’est le cas de la zone où le présent stage s’est déroulé, la Réserve de Biosphère de Mananara-Nord géré par MNP et ou les actions sont menées conjointement entre le Gret et WCS. La ligne directrice du projet à Mananara consiste en l’instauration des conditions requises pour une pêche durable à travers les APGL qui contribue à la sécurité alimentaire et le bien-être des populations côtières le plus vulnérables. A court

terme, éradiquer les mauvaises pratiques de pêches constitue le premier défi auquel le projet fait face. Et à long terme, on s’attend à ce que les mesures de gestion permettent d’améliorer la productivité des écosystèmes et partant la performance de la pêche qui se répercuteront sur le bien-être des communautés de pêcheurs et sur la disponibilité en sources de protéines pour la population de la Baie d’Antongil. Les objectifs du projet s’axent autour de 6 résultats variés, le présent stage s’insérant au niveau du résultat 5 « une gestion intégrée et inclusive de la zone côtière sur 8 FKT pilotes est impulsée ».

Ce résultat 5 conduit conjointement par le Gret et WCS vise, sur 8 fokontany pilotes, à développer une approche territoriale de gestion intégrée de la zone côtière qui prenne en compte l’ensemble des facteurs de dégradation des milieux côtiers et des ressources halieutiques (érosion des bassins versants et dégradation des terres, défrichement…) et les solutions à mettre en œuvre en complément des mesures de gestion des APGL. Elle se base sur (i) un diagnostic participatif des problématiques socio-économiques et écologiques du terroir de la communauté comme levier vers des changements de pratiques, permettant de remobiliser l’ensemble de la communauté vis à vis des enjeux des APGL ; (ii) des ateliers de concertation aboutissant à l’élaboration d’un plan d’action stratégique de développement territorial co-construit par les parties prenantes qui capitalisera, à l’échelle du FKT, les expériences du TFT et du suivi de captures (CPUE) sur la détermination de stratégies économiques plus résilientes. Ces plans d’action pourront être assortis de règles collectives (dina) élaborées par les communautés en complément des dina APGL.

Carte 2 : zone d’intervention du Gret dans la Baie d’Antongil (en jaune, du Nord au Sud : Ivontaka et Menatany, 2018. Source : https://www.gret.org

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Le présent stage, inclut dans le résultat 5 du projet, a eu pour objectifs la réalisation de diagnostics participatifs et la mise en place d’ateliers de concertation dans deux des huit fokontany pilotes, Menatany et Ivontaka (Carte 2). Ces deux fokontany faisant parti des trois fokontany faisant face au Parc Marin de la Réserve de biosphère de Mananara-Nord. Pour atteindre ces objectifs, il a été décidé de mettre en place une méthodologie novatrice pour la Baie d’Antongil : la modélisation d’accompagnement.

II. Démarche méthodologique

a. Planning des ateliers

Les populations des fokontany pratiquent pour la majorité des activités agricoles et ces activités accaparent la majeure partie de leurs journées. Pour maximiser le nombre de participants aux ateliers il a donc été décidé de les réaliser un jour où les activités agricoles sont fady5. Ces ateliers ont par conséquent été réalisé les mardi et jeudi quand cela été possible. Pour rendre les ateliers plus attractifs, la décision a été prise de rendre visite aux fokonolona de Menatany et d’Ivontaka en amont et de détailler aux représentants de la population, l’ensemble de la démarche et de leur proposer les dates qui leurs convenaient pour réaliser les ateliers de diagnostics ARDI. En accord avec la population locale, il a été choisi de réaliser ces ateliers sur une journée complète chacun, cela permet d’éviter que d’un atelier sur l’autre, le nombre de participants différent. Une attention particulière a été donnée quant à la participation des femmes à tous les ateliers. Madagascar étant un pays patriarcal, l’opinion des femmes est souvent reléguée au second plan lors d’évènements regroupant les deux genres, il était donc essentiel que les femmes aient la même place que les hommes au sein des ateliers. Cela est d’autant plus important que la division des taches entre les genres dans les ménages est très marquée, les femmes ont donc une vision du fokontany différente de celle des hommes. Ces deux visions étant essentielles pour que les diagnostics soient les plus exhaustifs possibles.

Une fois les dates des diagnostics fixées dans les deux fokontany (16 avril 2019 pour Menatany et 2 mai 2019 pour Ivontaka), il a été convenu qu’un atelier basé sur un jeu de rôles serait réalisé en juin dans chacun des fokontany, avant l’ouverture officielle de la récolte de vanille. Les ateliers diagnostics et les ateliers jeu de rôles/plan d’action se sont déroulés dans le même ordre, c’est-à-dire à Menatany puis à Ivontaka. Ce choix est un choix purement pratique, les conditions météorologiques se dégradant fortement après la mi-avril dans la région d’Analanjirofo, il était plus pratique au vu de l’état de la route national 5 de commencer les ateliers par le fokontany le plus éloigné du bureau du Gret à Mananara.

5 A Madagascar et particulièrement dans les zones rurales du pays, existent de nombreux interdits ou fady, dérivés de croyances traditionnelles. Ces interdits sont souvent propres au fokontany mais peuvent aussi être commun à une commune, un district ou une région, comme c’est le cas pour les interdits liés au travail de la terre.

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b. La méthode ARDI

Faisant partie des différents outils à la disposition de la modélisation d’accompagnement, la méthode ARDI utilisée dans le cadre de ce stage s’est décomposée en quatre grandes étapes (Fauvelle, 2014). Pour commencer les ateliers il a été décidé de demander aux participants de citer l’ensemble des ressources naturelles présentes sur leurs territoires. Ces ressources pouvant être marine ou terrestre. Une fois l’ensemble des ressources citées, il a été demandé aux participants de positionner les ressources sur un graphique représentant la valeur économique d’une ressource en fonction de sa disponibilité dans le fokontany. Il leur a ensuite été demandé de citer l’ensemble des acteurs qui agissent sur leur territoire. Ces acteurs pouvant être soit direct, c’est-à-dire qu’ils agissent directement sur les ressources citées précédemment, soit indirect, c’est-à-dire qu’il agisse sur les acteurs directs. A Menatany il a été tenté de faire placer ces acteurs sur un graphique représentant la capacité d’action d’un acteur en fonction de l’impact que l’évolution des ressources a sur lui. Mais au vu de la faible diversité d’acteurs cités à Menatany et la difficulté rencontrée par les participants pour classer ces acteurs, il a été décidé de ne pas réitérer cet exercice à Ivontaka. Ces informations ont quand même été utilisés pour réaliser le diagnostic ARDI de Menatany. Après une pause d’une vingtaine de minute, les participants ont dû réaliser une cartographie de leur fokontany, cette carte a ensuite servi comme support visuel pour que les participants puissent réfléchir et citer les différentes dynamiques pouvant affecter leur territoire. Ces dynamiques pouvant être d’ordre environnemental, économique ou social. Pour finir, en se servant des informations précédemment, il a été demandé aux participants de définir les différentes interactions existantes entre les acteurs et les ressources. Ces interactions ont été définies par les participants à partir de mots simples ou des verbes. L’ensemble de ces interactions se regroupe en un diagramme qui est à la base de jeu de rôles qui a suivi ces diagnostics. Pour compléter ces diagnostics, des discussions informelles avec la population des deux fokontany ont été réalisés, cela en amont et en aval des ateliers6.Les résultats des diagnostics des deux fokontany sont consultables dans la partie III de ce mémoire.

c. Des diagnostics au jeu de rôles

Le mois qui a suivi le dernier diagnostic a été consacré à la rédaction des dits diagnostics et à leur utilisation dans le cadre de la réalisation d’un jeu de rôles pour la suite des ateliers. Un jeu de rôles est un outil de modélisation fréquemment utilisé dans le cadre de la modélisation d’accompagnement. Il est souvent construit à partir de dire d’acteurs ou bien co-construit avec ces derniers et il se compose dans la plupart des cas d’un plateau de jeu pouvant représenter une situation conflictuelle concrète, le territoire des acteurs et ses ressources ou

6 Ces discussions ont été menées par Edino Sabotsy, l’interprète attitré à ce stage. Elles ont ensuite été traduites en français et placées dans trois catégories : environnementales, économiques et sociales.

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bien encore une vision abstraite. Il se caractérise par les interactions qu’il crée entre les acteurs et le plateau et entre les acteurs eux-mêmes, ces interactions amenant à différentes évolutions de la situation de base représentée dans le jeu. Ces évolutions amenant à des discussions entre les participants. Les jeux de rôles peuvent être utilisé dans le cadre d’une mise en place de règles de gestion (Ducrot et Barban, 2008), de conflits d’usages ou bien comme outil pédagogique (Souchère et al., 2005). Le jeu de rôles « Fiarahamiasa7 » a été créé dans le but de permettre aux participants de réfléchir à la gestion des ressources naturelles et d’initier la mise en place d’un plan de gestion GIZC. Les différentes étapes de la conception de ce jeu et le déroulement d’une des différentes sessions sont consultables respectivement dans les parties de IV et V de ce mémoire.

d. D’une session de jeu à un plan d’action

Dans les deux fokontany où la méthode a été mise en place, les sessions de jeu de rôles ont été suivi par un atelier dédié à la mise en place d’un plan de gestion basé sur les activités de la population locale et les ressources du fokontany. Ces deux ateliers ont suivi un déroulement identique dont les différentes étapes sont consultables dans la partie VI de ce mémoire. III. LA METHODE ARDI POUR CONSTRUIRE UNE REPRESENTATION COMMUNE

a. Diagnostic de Menatany

Acteurs

Les résultats de l’atelier montrent que les acteurs influençant l’évolution des ressources de Menatany sont divisés en 2 catégories (voir Annexe 1)8. Tout d’abord les acteurs directs vivant sur le territoire du fokontany qui sont ceux qui ont un impact sur les ressources halieutiques, forestières et les cultures. Un point important soulevé durant l’atelier est la présence de pêcheurs d’autres fokontany, notamment Ivontaka et Sahasoa qui exploitent les ressources halieutiques avoisinant Menatany. La deuxième catégorie comprend les acteurs indirects regroupant principalement des acteurs économiques dont la majorité viennent de fokontany ou communes avoisinantes et les ONG. Il est à noter que MNP n’est pas considéré par les participants comme étant une ONG ou ayant le même type d’action et est donc à part. La démarche a montré que pour les participants, les pécheurs et agriculteurs n’ont que très peu d’influence sur l’évolution de leurs moyens de subsistance (voir Annexe 2). Au contraire, les exploitants forestiers et avec eux les COBA

7 « Travailler ensemble » en malgache 8 Dans les annexes 1 et 2, la distinction a été faite par les participants entre pêcheur, agriculteur et exploitant forestiers. Mais la frontière entre les trois est mince, les habitants du fokontany pouvant pratiquer simultanément ces trois activités.

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possèdent une forte influence sur l’évolution des ressources forestières, au travers de leur statut légal et de leur capacité à délivrer des permis de coupe et à appliquer des sanctions (Figure 2). Les participants ont cité MNP comme étant l’acteur ayant la plus forte influence sur l’évolution des ressources du fokontany. Il est à noter qu’aucun des participants n’a mentionné un niveau administratif plus élevé, comme la commune ou bien le district. Il ressort de l’atelier que pour les participants, la population du fokontany possède un faible pouvoir d’action sur l’évolution des ressources de Menatany.

Ressources Le diagnostic montre que les ressources du fokontany sont regroupées en différentes

catégories, les plus importantes étant les cultures vivrières, les cultures de rentes et les ressources halieutiques (voir Annexe 3). Les habitants de Menatany estiment que les principales ressources économiques du fokontany que sont la vanille, le girofle, les poissons et le calmar sont très disponibles avec une plus forte disponibilité en girofle qu’en vanille. Il est aussi ressorti que le bois des forêt COBA était une ressource économique importante du fokontany alors que dans la loi GELOSE qui a instauré les COBA, la commercialisation du bois des forêts transférées est interdite (voir Annexe 4). Un point important à noter est que les participants considèrent que le riz est une ressource disponible dans le fokontany, ce qui contredit les informations données par les participants lors de la représentation graphique du fokontany (voir Annexe 5). De plus les informations récoltées de manière informelle montrent que l’autosuffisance maximum des ménages n’est que de 3 mois (voir Annexe 6). Le bétail est une ressource économique importante surtout dans le cas du zébu, mais sa disponibilité au niveau du fokontany est faible. La partie ressources de l’atelier montre que pour les participants, certaines ressources très disponibles n’ont aucun intérêt économique comme les déchets organiques et l’eau alors que l’absence de puit au niveau de fokontany amène les habitants à utiliser l’eau de la rivière comme eau potable, ce qui induit fréquemment des maladies diarrhéiques et entraine donc des dépenses importantes en soin.

Il ressort de ce diagnostic, la très forte dépendance économique de la population locale dans les cultures de rente que sont la vanille et le girofle. Cette dépendance est caractéristique des fokontany des régions Analandjirofo et SAVA. Ces deux principales ressources étant soumises régulièrement à des maladies et à des attaques d’insectes ravageurs, ce qui pousse les agriculteurs à récolter plus tôt ou à utiliser des pesticides chimiques, ce qui dans les deux cas entraîne une baisse de qualité des gousses récoltées et un prix de vente plus faible (Rakotondrabe, 2018).

Diagramme d’interaction acteurs – ressources (Figure 1)

Ø Plusieurs stratégies pour la vente de la vanille

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La récolte et la vente de vanille, activité économique principale pour la majorité des habitants de Menatany et qui a lieu durant les mois de juin et juillet (voir bulletin d’ouverture de la récolte) peut se faire selon plusieurs modalités. Un des problèmes des régions Analandjirofo et SAVA est le vol sur pied de vanille, les agriculteurs surveillent leurs plantations pendant cette période, ce qui réduit le temps alloué à d’autres activités comme la pêche durant les mois de juin et juillet. Les agriculteurs peuvent décider ou non de se regrouper en une coopérative. L’intérêt de la coopérative réside dans capacité de vendre la vanille à un prix légèrement supérieur au prix local, mais impose des contrainte de qualité aux agriculteurs. Ce regroupement permet surtout aux agriculteurs de vendre leur vanille en plus grande quantité et à des sociétés d’exports comme Premium Spice. Les agriculteurs qui choisissent de ne pas rentrer dans une coopérative peuvent toujours vendre leur vanille à prix locale auprès de collecteurs de passage. Il est à noter aussi que la vanille peut se vendre sous deux formes, soit verte, soit sèche. La vanille verte se vendant à un prix moindre que la vanille sèche. Un intérêt de la coopérative peut aussi être de permettre la préparation de la vanille pour passer de la forme verte à la forme sèche et qui demande du temps et du matériel. Le manque de liquidité d’une grande partie des ménages les oblige à vendre leur vanille verte pour obtenir une rentrée d’argent immédiate et pouvoir acheter la denrée alimentaire de base, le riz. Ø Les commerçants extérieurs et leurs liens avec Menatany

Le diagramme montre aussi l’importance que prennent les commerçants extérieurs dans la vie du fokontany. Les captures des pêcheurs et les produits des cultures de rente sont ainsi vendus aux commerçants de Sahasoa (le fokontany au sud de Menatany). Mais c’est en se penchant sur les achats que l’on voit à quelle point ces commerçants sont essentiels au fokonolona. C’est auprès d’eux que la population va acheter les produits de première nécessité comme des matériaux de construction ou des appareils électroménagers. Une des problématiques soulevés lors de discussions informelles avec la population est la très faible autosuffisance en riz du fokontany, ainsi les ménages ne sont autosuffisants en riz que pour un maximum de 3 mois, ils rentrent après dans une période de soudure où ils sont obligés d’acheter du riz importé (car moins cher) auprès des commerçants du fokontany, ces derniers se fournissant auprès des grossistes de Sahasoa. Ce problème d’autosuffisance en riz est principalement dû à un manque de terres cultivées et est encore accentué chez les nouveaux migrants qui ne possèdent pas de terres et sont donc obligées de pratiquer des activités de pêches pour pouvoir subvenir à leurs besoins (en moyenne 90% des captures sont revendus).

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Ces activités de pêches sont aussi pratiquées par le reste du fokontany durant la période de soudure car étant considérées comme un moyen rapide d’obtenir de l’argent. Ø La mer, une ressource commune pour plusieurs fokontany

La faible quantité de terre cultivées au niveau du fokontany oblige la population à pratiquer des activités de pêche pour subvenir à ses besoins. Cette situation est d’autant plus vraie pour les nouveaux migrants qui ne possèdent pas ou peu de terres et ont donc besoin des revenus liés aux ressources halieutiques. Certains ménages ne vont en mer que pendant la période de soudure tandis que d’autres y vont toute l’année. Les pêcheurs de Menatany peuvent aussi se regrouper en association. La pêche pratiquée à Menatany est considérée comme de la petite pêche (voir les différents types de pêches) car on ne trouve aucun bateau à moteur dans le fokontany. Les sorties en mer se font généralement deux fois par jour à 18h et à 3h du matin. Pendant la période de récolte de la vanille, le nombre de sorties peut diminuer. Ces sorties sont aussi conditionnées par les conditions météorologiques. Les principales ressources exploitées par les pêcheurs sont les poissons, les langoustes, les calmars et les concombres de mers dont en moyenne 90% sera revendu. Menatany est le fokontany se trouvant face au Parc marin de la réserve de biosphère de Mananara-Nord, la pêche étant interdit dans la zone tampon du parc marin, les pêcheurs sont obligés de parcourir de grande distance pour pouvoir accéder aux ressources. Ils peuvent donc aller jusqu’à Sahasoa pour pêcher et certains vont même dans des zones proches d’Imorona, soit une distance d’une dizaine de kilomètres.

Les pêcheurs de Sahasoa et de Ivontaka viennent aussi régulièrement pêcher dans les eaux de Menatany faisant de la mer un bien commun pour ces trois fokontany. Les pêcheurs de ces trois fokontany s’étant réuni en 2015 sous l’initiative de MNP mais ce type de réunion n’a pas été réitéré depuis. Ø Le bois COBA

La troisième activité de la population concerne l’exploitation forestière pour le bois d’œuvre. Cette exploitation se fait dans les forêts COBA, forêts dont la gestion a été transférée à la population au travers de la loi GELOSE. A Menatany, cette forêt est composée d’une seule zone à l’ouest du fokontany, après la zone d’exploitation de la vanille et du girofle. Cette forêt est gérée par le bureau COBA composé de d’habitants du fokontany et qui a à charge de délivrer des permis de coupe mais aussi de faire appliquer le dina9, rédigé lors du transfert de gestion de l’état au fokontany. Le prix du permis de coupe étant moins cher pour les personnes faisant parti du bureau COBA et ayant donc payé une cotisation annuelle. La loi GELOSE précise que l’exploitation du bois de ces forêts transférées ne peut être que pour un usage personnel et non à but économique. A Menatany, il est apparu que le bureau COBA n’était pas au courant de cet aspect, le bois de la forêt transférée était donc considéré comme

9 Ensemble de règles coutumières propres à un fokontany, un district ou une région

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une ressource économique importante pour le fokontany. Les personnes ayant acheté un permis de coupe peuvent soit exploiter le bois eux même soit employer un bûcheron. Le bureau COBA est censé appliquer le dina si un exploitant dépasse le nombre de coupes autorisé ou si quelqu’un exploite la forêt sans permis de coupe, mais dans les faits, le bureau COBA rencontre des difficultés à faire appliquer le dina, ils peuvent donc porter plainte au niveau des représentants forêts du district/ de la région pour qu’eux fassent appliquer la sanction. Ø MNP et les ONGs

Il ressort également de ce diagramme que MNP possède une place importante dans les activités du fokontany. En effet, il s’agit de l’entité qui fait le lien entre les ressources du fokontany. Ils ont à la fois un impact sur les activités de pêches au travers du parc marin, sur les pratiques agricoles car la présence du parc terrestre limite la surface de terres cultivées disponibles et enfin il coopère avec et surveille le bureau COBA pour éviter la surexploitation de la forêt gérée. Mais la perception de MNP par les habitants est peu favorable, les actions conversationnistes de MNP ne prenant que rarement en compte les aspects sociaux et économiques du fokontany. Concernant les ONGs, on peut voir que selon la perception des acteurs présents durant l’atelier, elles ont principalement des actions de formations auprès des groupes d’acteurs que sont les pécheurs pour WCS et les agriculteurs pour le GRET au travers du projet précédent, Fihavotana.

Figure 1 : diagramme d’interactions acteurs-ressources de Menatany. Les flèches traduisent une interaction entre acteur-ressources ou acteurs-acteurs. Les interactions sont caractérisées en quelques mots. L’ensemble des interactions a été caractérisée en deux entités, le fokontany et les intermédiaires commerciaux extérieurs. Les ressources ou acteurs ayant une bordure épaisse sont celles n’ayant pas été cités avant la création du diagramme.

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b. Diagnostic d’Ivontaka

Acteurs

Les résultats de l’atelier ARDI montrent que les acteurs influençant l’évolution des ressources de Menatany sont divisés en 2 catégories (voir Annexe 7)10.

Tout d’abord les acteurs directs vivant sur le territoire du fokontany qui sont ceux qui ont un impact sur les ressources halieutiques, forestières et les cultures. Comme lors de l’atelier réalisé à Menatany, les participants ont cité la présence dans la zone marine d’Ivontaka, de pêcheurs des fokontany avoisinants (Menatany et Sahasoa). Une autre différence par rapport aux résultats de l’arène d’acteurs de Menatany est l’absence d’une catégorie particulière d’acteurs pour l’exploitation des ressources forestières, les participants ayant cité le fokonolona comme exploitant, c’est-à-dire l’ensemble de la population du fokontany11.

La deuxième catégorie comprend les acteurs indirects regroupant principalement des acteurs économiques. Ces acteurs peuvent appartenir au fokonolona comme les commerçants du fokontany et les démarcheurs ou bien peuvent provenir d’autres fokontany comme les commerçants de Sahasoa. Dans les acteurs indirects on trouve aussi les ONGs ayant à un moment ou un autre agit au niveau du fokontany comme le Gret, WCS et Care. Il est à noter que comme pour Menatany, MNP n’est pas considéré par les participants comme étant une ONG ou ayant le même type d’action et est donc à part dans la représentation proposée.

Ressources

Comme durant l’atelier de Menatany, il ressort que les ressources d’Ivontaka sont regroupées en différentes catégories, les plus importantes étant les cultures vivrières, les cultures de rentes et les ressources halieutiques (voir Annexe 8). Il ressort aussi que les habitants d’Ivontaka estiment que les principales ressources économiques du fokontany que sont la vanille, le girofle, les poissons, les concombres de mer et le calmar sont très disponible avec une plus forte disponibilité en vanille qu’en girofle (voir Annexe 9). Les participants ont cité des ressources dont l’exploitation est interdite comme les tortues de mer, les chauves-souris et les lémuriens dans le parc terrestre de Mananara-Nord. Ces ressources ne sont pas ressorties durant l’atelier de Menatany. Cela est probablement dû à la présence de représentants de MNP durant cet atelier. Le bois d’œuvre reste comme à Menatany une ressource économique importante tout comme les autres matériaux de construction tel que le sable et les pierres. Au contraire de Menatany, les participants d’Ivontaka ne considère pas le riz comme une ressource disponible au niveau

10Durant l’atelier d’Ivontaka, il n’a pas été réalisé de graphique représentant le pouvoir d’action des différents acteurs. La diversité des acteurs citée a été considéré comme trop faible et trop proche de celle donnée à Menatany, un graphique aurait donc pris trop de temps pour un résultat peu concluant. 11Dans l’annexe 7, la distinction a été faite par les participants entre pêcheur et agriculteur Mais la frontière entre les deux est mince, les habitants pouvant pratiquer simultanément ces deux activités.

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du fokontany. Cela se traduit par une faible autosuffisance en riz de seulement 3 mois au maximum. Pourtant sur la carte réalisée par les participants au cours de l’atelier, on peut voir un plus grand nombre de culture de riz que sur la carte réalisée à Menatany et dont les participants considèrent le riz comme une ressource disponible (voir Annexe 10). Le bétail (zébus, porcs ou volailles) est une ressource économique importante mais en faible quantité au niveau du fokontany.

Lors de l’atelier un joaillier a cité des pierres précieuses comme ressources à valeur économique importante mais très faiblement disponibles au niveau du fokontany. Tout comme à Menatany, il ressort de ces deux figures, la très forte dépendance économique de la population locale dans les cultures de rente que sont la vanille et le girofle, dépendance est caractéristiques des fokontany des régions Analandjirofo et SAVA.

Diagramme d’interactions acteurs - ressources (Figure 2)

Ø La coopérative vanille, à la fois acheteur, vendeur et bon menteur

Comme à Menatany, la récolte et la vente de vanille est l’activité économique principale pour la majorité des habitants du fokontany et elle a lieu durant les mois de juin, juillet et août (en 2018, l’ouverture officielle de la récolte a eu lieu le 15 juillet). Les agriculteurs peuvent se regrouper en coopérative pour la vente de la vanille. Mais aujourd’hui à Ivontaka, de nombreux agriculteurs préfèrent vendre leur vanille aux démarcheurs de passage car si avant la coopérative achetait la vanille à un prix supérieur au prix local (aux alentours de 3% en plus), aujourd’hui elle achète au prix local, ce qui n’est pas attractif pour les agriculteurs. De plus, la coopérative exige une certaine qualité et n’achète généralement que les gousses de vanille les plus longues, beaucoup d’agriculteurs préfèrent donc vendre leur vanille de façon individuelle (voir annexe 11).

Mais la coopérative possède aussi des avantages pour ses membres. Elle permet la vente de vanille à des sociétés d’export. Elle prête aussi de l’argent et du matériel à ses membres en période de soudure, faisant ainsi office de bon menteur. Enfin, le vol sur pied de vanille, problématique importante pour les agriculteurs de la région d’Analandjirofo est peu présente au niveau d’Ivontaka, tout comme le vol de volailles. Ø Les commerçants extérieurs et leurs liens avec Ivontaka

Le diagramme montre aussi l’importance que prennent les commerçants extérieurs dans la vie du fokontany. Les captures des pêcheurs et les produits des cultures de rente sont ainsi vendus à des démarcheurs qui vont ensuite les vendre dans d’autres fokontany. Mais c’est en se penchant sur les achats que l’on voit à quelle point ces commerçants sont essentiels au fokonolona. C’est auprès d’eux que la population va acheter les produits de première nécessité comme des matériaux de construction ou des appareils électroménagers. Tout comme à Menatany, une des problématiques soulevées lors de discussions informelles avec la population est la très faible autosuffisance en riz du fokontany, ainsi les ménages ne sont autosuffisants en riz que pour un maximum de 3 mois, ils rentrent après dans une période

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de soudure où ils sont obligés d’acheter du riz importé (car moins cher) auprès des commerçants du fokontany, ces derniers se fournissant auprès des grossistes de Sahasoa. Ce problème d’autosuffisance en riz est principalement dû à un manque de terres cultivées et est encore accentué chez les nouveaux migrants qui ne possèdent pas de terres et sont donc obligées de pratiquer des activités de pêches pour pouvoir subvenir à leurs besoins (en moyenne 90% des captures sont revendus). Ce manque de terre est aussi en partie dû à la cession par l’ancien président du fokontany en 2000 d’une zone cultivée de plusieurs hectares à MNP. Ø La mer, une ressource commune pour plusieurs fokontany

La faible quantité de terre cultivés au niveau du fokontany oblige la population à pratiquer des activités de pêche pour subvenir à ses besoins. Cette situation est d’autant plus vraie pour les nouveaux migrants qui ne possèdent pas ou peu de terres et ont donc besoin des revenus liés aux ressources halieutiques. Certains ménages ne vont en mer que pendant la période de soudure tandis que d’autres y vont toute l’année et les pêcheurs d’Ivontaka qui le veulent peuvent se regrouper en association. La pêche pratiquée à Menatany est considérée comme de la petite pêche (voir les différents types de pêches) car on ne trouve aucun bateau à moteur dans le fokontany. Les sorties en mer se font généralement deux fois par jour à 18h et à 3h du matin. Pendant la période de récolte de la vanille, le nombre de sorties peux diminuer. Ces sorties sont aussi conditionnées par les conditions météorologiques. Le fokontany ne possédant pas de système de conservation des denrées périssables comme un réfrigérateur, les conditions météorologiques impactent directement la disponibilité des ressources pour la population.

A la différence de Menatany, Ivontaka se situe plus au nord Parc marin de la réserve de biosphère de Mananara-Nord. Cela veut dire que les pêcheurs d’Ivontaka peuvent exploiter les ressources halieutiques proches du fokontany. Cela ne les empêche pas de parcourir de grande distance pour pratiquer leurs activités de pêche. Ils peuvent donc aller jusqu’à Sahasoa pour pêcher et certains vont même dans des zones proches d’Imorona, soit une distance d’une dizaine de kilomètres. Les pêcheurs de Sahasoa et de Menatany viennent aussi régulièrement pêcher dans les eaux de d’Ivontaka faisant de la mer un bien commun pour ces trois fokontany. Les pêcheurs de ces trois fokontany s’étant réuni en 2015 sous l’initiative de MNP mais ce type de réunion n’a pas été réitéré depuis. Ø Le bois COBA pour le fokonolona

Ivontaka est un fokontany qui tout comme Menatany a fait l’objet d’un TGRN, ainsi dans la partie nord du territoire on trouve deux patchs forestiers gérés par un bureau COBA. Ce dernier ayant pour mission de délivrer des permis de coupe et de faire appliquer le dina en cas de transgression des règles. Le bureau COBA a été aidé par MNP dans le cadre de formations à la gestion forestière.

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Contrairement à Menatany, ici les participants n’ont pas fait de distinction particulière pour désigner les personnes exploitants les ressources forestières. Ils ont désigné l’ensemble du fokonolona comme exploitant forestier. Ø MNP : un acteur central mais peu apprécié

Tout comme à Menatany, MNP est un acteur central dans la gestion des ressources du fokontany, mais les relations entre ces derniers et la population locale ne sont pas positives. En effet, la population perçoit MNP comme un acteur répressif, qui les empêchent d’accéder à des ressources qu’ils estiment nécessaire. Dans le fokontany, MNP est aussi la structure responsable de la création de la coopérative vanille et des réunions entre pêcheurs des fokontany proches du Parc marin de la Réserve de biosphère de Mananara-Nord. Cette divergence entre l’importance de MNP et la perception de ses actions par la population locale se cristallise avec l’accaparation en 2000 (suite à l’accord de l’ancien président du fokontany) par MNP dans le cadre de l’examen périodique de la réserve, d’une surface importante (supérieur à 20 ha selon les participants) de terres cultivées. Cette accaparation a été suivi d’une expropriation des exploitants sans mise en place de solution de remplacement par MNP, la situation qui en a découlé constitue le principal facteur de mécontentement de la population locale. Situation qui continue encore aujourd’hui. .

Figure 2 : diagramme d’interactions acteurs-ressources d’Ivontaka. Les flèches traduisent une interaction entre acteur-ressources ou acteurs-acteurs. Les interactions sont caractérisées en quelques mots. L’ensemble des interactions a été caractérisée en deux entités, le fokontany et les intermédiaires commerciaux extérieurs. Les ressources ou acteurs ayant une bordure épaisse sont celles n’ayant pas été citées avant la création du diagramme.

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IV. LES DIFFERENTES ETAPES DE LA CONCEPTION DU JEU DE RÔLES « FIARAHAMIASA »

a. Etape 1 : pourquoi un jeu sur la pêche et les ressources halieutiques

Un jeu sur la pêche

Il est apparu des diagnostics ARDI que principalement, trois types d’activités s’exercent dans les fokontany d’Ivontaka et de Menatany : agriculteur, pêcheur et exploitant forestier. Les frontières entre ces trois activités sont floues, les membres de la population peuvent exercer l’un ou l’autre de ces professions, ou bien en exercer plusieurs. Dans certains cas, ces activités peuvent même être toutes pratiquées par une personne dans une même journée. Pour rendre le jeu le plus compréhensible, fluide et pertinent possible pour les participants et dans le but d’atteindre l’objectif du R5, il a donc été nécessaire de réaliser des choix.

La pêche a été choisie et avec elle la gestion des ressources halieutiques pour plusieurs raisons. Tout d’abord le projet dans lequel s’inscrit le R5 se nomme « Pêche Côtière Durable ». Il était donc logique que le jeu parle de la pêche et des ressources marines. Ensuite il est ressorti des diagnostics que contrairement aux activités agricoles et forestières, les activités de pêches étaient pratiquées par l’ensemble de la population, où elle possède même une certaine connotation négative. En effet, dans les deux fokontany où la démarche a été mise en place, la pêche est considérée comme une activité pauvre, que les nouveaux migrants pratiques parce qu’ils ne possèdent pas de terre pour cultiver. Ce point de vue est assez paradoxal car la faible gestion financière des familles et le manque de surface de rizière oblige en période de soudure même les ménages les plus aisés à pratiquer une activité qu’ils considèrent comme « pauvre ». Il y avait donc un intérêt à mettre au cœur du jeu, la pêche et la gestion de ressources qui sont considérées par certains comme « inépuisables ». Les ressources halieutiques

Il a aussi fallu faire un choix en ce qui concerne les ressources halieutiques présentes dans le jeu. En effet des différences sont ressorties entre les deux fokontany concernant les ressources présentes ainsi que leur statut. Tout d’abord, plus de ressources sont ressorties à Ivontaka qu’à Menatany. A Menatany, les participants ont cités 5 ressources différentes contre 7 pour les participants d’Ivontaka. Il a donc été choisi de n’utiliser dans le jeu, uniquement les ressources communes aux deux fokontany. Ces ressources étant les poissons, langoustes, calmars, poulpes. Le concombre de mer n’a pas été choisi car les techniques de pêches utilisées pour sa capture différaient fortement de celles utilisées pour le reste des ressources. Cet état de fait aurait pu intriguer les participants et les détourner du jeu. Ensuite un des problèmes rencontrés fut celui du cas du poulpe. A Menatany, le poulpe est considéré comme une ressource dont l’exploitation est interdite tandis qu’à Ivontaka, le poulpe ne possède pas de statut particulier et est donc exploité par les pêcheurs. Il a donc été choisi

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de ne pas inclure le poulpe dans les ressources présentes dans le jeu et ce même s’il possède une valeur économique importante pour le fokonolona d’Ivontaka.

Ces choix ont conduit à la présence dans le jeu de trois types de ressources halieutiques : les poissons, les langoustes et les calmars. Les poissons ont ensuite été divisés en deux catégories, les poissons côtiers (petits) et les poissons du large (grands). Cette distinction n’est pas apparue aux cours des diagnostics mais a été choisie pour montrer aux participants la présence de ressources qu’ils n’exploitent pas en temps normal par manque de moyens et ce que cette exploitation pourrait leur apporter.

b. Etape 2 : conception du plateau de jeu

La zone marine

Après avoir fait le choix d’axer le jeu sur la gestion des ressources halieutiques, il était logique que le plateau soit composé en majeur partie d’une zone marine. Dans le plateau final, cette section compose 80% de la zone de jeu et est divisé en quatre zones de pêche (Figure 3).

La première zone de pêche qui fut créé est la zone centrale nommée Toerana Arovana (ou aire protégée en français). Les fokontany de Menatany et d’Ivontaka sont deux des trois fokontany bordant le parc marin de la réserve de Biosphère de Mananara-Nord. Ce parc est un enjeu majeur pour les populations des deux fokontany. En effet sa présence à proximité de la côte a un impact direct sur les zones de pêches disponibles pour les pêcheurs. L’exploitation des ressources étant interdite dans la zone tampon du parc marin (dont la limite se termine à 1km de la plage de Menatany), les pêcheurs sont obligés de la contourner et donc parcourir de plus grandes distances pour pratiquer leurs activités. Ces restrictions entraînent

Figure 3 : Plateau du jeu Fiarahamiasa sur lequel apparait le fokontany avec ses ménages ainsi que les 4 patchs exploitables (Nord, Sud, Aire protégée, Grand Large).

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de fortes tensions entre les populations locales et les gestionnaires de ce parc, MNP (Madagascar National Parks). Il était donc primordial d’inclure cet enjeu dans le JdR, mais la zone n’a pas été nommée Parc marin pour que le jeu puisse s’adapter à d’autres situations et que les participants puissent projeter leurs contextes personnels sur le plateau de jeu. Contexte qui dans la baie d’Antongil se rapporterait plus souvent aux Aires de Pêche Gérées Localement (APGL ou LMMA en anglais). Les deux autres aires à avoir été créées furent celles nommées Avaratra et Atsimo, respectivement Nord et Sud. Ces zones correspondent aux deux principales directions que les pêcheurs choisissent de prendre pour pratiquer leurs activités. Les pêcheurs des deux fokontany ne possèdent pas de moteurs ni de bateaux adaptés pour de la pêche au large. Ces deux limitations restreignent donc les pêcheurs à pratiquer des activités de petites pêches (défini selon la législation malgache) au niveau des zones côtières. Ces deux zones représentent donc les zones d’activités quotidiennes des pêcheurs de Menatany et d’Ivontaka mais celles de la majorité des pêcheurs de la baie d’Antongil. Enfin la dernière zone créée est celle nommer Ivelan’ny Titôzana et qui représente la zone de haute mer que l’on pourrait aussi appeler grand large. Le choix d’inclure cette zone vient du fait qu’elle n’est peu ou pas exploitée par les populations locales à l’heure actuelle. En effet comme dit précédemment, aucun des pêcheurs des fokontany dans laquelle la démarche a été mise en place ne possède de moteur ou de bateau adapté pour la haute mer. Inclure cette zone ainsi que des moyens pour y accéder permet de faire réfléchir les participants sur des changements ou des actions à mettre en place pour que cette activité virtuelle puisse être transposée au monde réel.

La zone terrestre

Après avoir défini la partie marine et les différentes aires pêches qui la compose, il a fallu définir une zone qui correspondrait à l’aire de vie des participants. Il a donc été choisi de représenter un fokontany dans lequel se trouveraient les ménages pour permettre aux participants de situer le jeu dans un espace qui leur est familier. Comme vu à l’étape 2, le choix a été fait d’axer le jeu sur la pêche, il fallait donc justifier ce choix sur le plateau, pour que les participants ne puissent pas remettre en cause cet état de fait. Lors des diagnostics ARDI, il est ressorti que dans les deux fokontany, la surface de rizière était insuffisante pour que les ménages soient autosuffisants en riz. C’est d’ailleurs ce fait qui entraîne même les ménages les plus aisés à pratiquer la pêche dont 90% de captures sont vendus pour pouvoir acheter du riz au commerçants (le riz étant majoritairement importé du Pakistan, le prix du riz malgache étant trop élevé pour une grande partie des ménages). C’est pour cela qu’il a été choisi de représenter un fokontany sans aucune terres cultivées, rendant ainsi la pêche comme la seule activité génératrice de revenus et donc le seul moyen pour les participants d’obtenir l’argent nécessaire à l’achat de riz. Ce choix a d’ailleurs été explicité oralement aux participants lors de sessions de jeu, le jeu ne démarrant que lorsque les participants avaient tous compris le choix qui avait été fait.

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c. Etape 3 : les participants, les ménages et leurs besoins

Comment s’organise une session de jeu ?

Une fois la majorité du plateau de jeu créé, il a fallu définir le nombre de participants qui participeraient au jeu. Il est apparu très tôt dans la conception du jeu que les participants ne joueraient pas de manière individuelle dans le jeu. La principale raison étant que le JdR devait servir à initier une dynamique coopérative entre les participants. Il était donc intéressant de faire en sorte que les participants puissent interagir entre eux au cours du jeu. C’est à ce moment qu’a émergé le concept de ménage. Ainsi chacun des participants feraient parti d’un ménage, que ce soit un ménage d’une personne, de deux ou de trois personnes. Cela se traduit par plusieurs manières d’envisager une session de jeu.

D’un côté une partie de jeu peut être réalisée avec un mélange de participants seuls, de binômes et de trinômes. Chacun des participants joue ainsi le rôle d’un membre du ménage. On peut nommer ce type de session comme étant réalisé en groupes hétérogènes. L’avantage de ce type de session vient de la meilleure implication des participants de par le fait qu’ils incarnent les personnages virtuels. En petit groupe ce type de session permet aussi de faire participer activement l’ensemble des personnes présentes. Mais bien qu’elle soit adaptée pour les petits groupes, si le nombre de personnes présentes dépasse le nombre de joueur alors une partie ne pourra pas participer au jeu, ce qui peut entraîner un sentiment d’exclusion, d’ennui et donc un manque d’intérêt pour ce qui suit le JdR. Le deuxième désavantage tient au besoin que les participants doivent savoir lire et écrire pour pouvoir apprécier pleinement l’expérience, ce qui dans les fokontany de la région d’Analanjirofo n’est pas toujours le cas.

Pour pallier ces désavantages, il est alors possible de réaliser une session de type groupe homogène. Dans ce type de session, les participants sont regroupés en groupe homogène dont le nombre dépend du nombre de personnes présentes à l’atelier. Lors de ces sessions, les participants n’incarnent pas directement les personnages virtuels. C’est le groupe dans lequel ils se trouvent qui incarne le ménage. Chacun des groupes désignent un représentant qui viendra autour du plateau de jeu pour restituer les décisions du groupe. Cela permet tout d’abord de faire participer l’ensemble des participants, ce qui pallie au premier désavantage de la méthode en groupe hétérogène, et cela rend aussi plus simple le fait d’avoir au moins une personne par groupe qui soit en mesure de lire et d’écrire sur la feuille de jeu qui leur est fournie. Pour finir cela permet aussi de réduire le nombre de personnes autour du plateau de jeu lors des déplacements en mer et des ventes de captures et achats de riz, ce qui ces moments plus simples et plus fluides. Combien de ménages ?

Après avoir défini que des ménages seraient présent sur le plateau de jeu, il restait encore à définir le nombre de ces ménages ainsi que le nombre de personnes à nourrir par ménages. Au final, le choix s’est fait de réaliser deux types de configuration possible selon le nombre de participants, soit 8 ménages, soit 6 ménages. Ces deux configurations ont été testées respectivement à Menatany et à Ivontaka.

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Dans le cas de la configuration 8 ménages on trouve deux ménages d’une personne, quatre ménages de deux personnes et deux ménages de 3 personnes. Soit un total de 16 personnes à nourrir par tour de jeu. Cette configuration est la plus adaptée pour des sessions de type groupes hétérogènes car elle permet de faire participer tous les participants si leur nombre ne dépasse pas 16 personnes tout en permettant que la session ne soit ni trop courte ni trop longue. L’autre configuration est celle à 6 ménages dans laquelle on trouve, 2 ménages d’une personne, deux ménages de deux personnes et deux ménages de trois personnes. Soit un total de 12 personnes à nourrir par tour de jeu. Cette configuration est la plus adaptée pour des sessions de types groupes homogènes car elle permet d’avoir des groupes de taille plus conséquente que celle à 8 ménages. Cela permet d’avoir plus d’échanges intra et inter groupes car un nombre réduit de groupes leur permet de plus facilement discuter entre eux. Cela permet aussi de réunir au sein d’un même groupe, plus de personnes ayant des affinités différentes, ce qui rend les échanges plus constructifs.

Ces deux configurations permettent à l’animateur d’être plus flexible quant au nombre de personnes nécessaires pour que la session soit pertinente et d’être ainsi préparé en cas d’imprévu, comme cela peut être fréquemment le cas lors d’ateliers dans les fokontany malgaches. Des possibilités de captures différentes selon les ménages

La pêche utilisée dans le jeu correspond à une pêche en mer avec utilisation de bateau. Cette activité est représentée physiquement dans le jeu avec la présence en début de session d’un bateau (représenté par un pion) par ménage. A chaque tour, ce bateau sera déplacé au niveau des patchs que les participants auront choisis d’exploiter pendant le tour. Un bateau ne pouvant aller que dans un seul patch au cours d’un tour de jeu. A l’aide de ce bateau les participants pourront capturer les ressources présentes dans les différents patchs du jeu. Mais tous les ménages ne commencent pas avec le même bateau. Car avec la présence dans le jeu de ménages dont le nombre de membre varie d’un à trois, donner une même capacité de capture à tous les ménages aurait entrainé très rapidement l’apparition d’inégalité marquées. Les ménages d’une seule personne auraient été ainsi fortement avantagés. Il a donc été décidé que ces ménages-là commenceraient avec un bateau ne pouvant transporter que deux unités de ressources (les participants peuvent choisir à leur guise le type et le nombre de ressources qu’ils veulent prélever) contre trois unités pour les bateaux des ménages de deux et trois personnes. Cette situation de début de jeu peut aussi évoluer grâce à l’achat de bateau ou bien l’amélioration d’un bateau existant pour augmenter sa capacité de capture, les prix étant fixés respectivement à 20 000 et 10 000 Ariary. Les bateaux pouvant être prêtés, loués ou vendus entre les participants selon des modalités laissées à leur charge. Leur permettant ainsi de prendre une certaine autonomie par rapport au cadre du jeu et permettre des échanges entre les groupes ou entre les personnes représentant les membres des ménages.

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d. Etape 4 : le riz, les ressources halieutiques et leurs dynamiques

Le riz et son prix

Une fois décidé des ménages et du nombre de participants, il a fallu décider de l’objectif que ces participants auraient à atteindre. Dans une région où l’autosuffisance en riz n’est que de quelques mois au maximum, le choix de l’alimentation est apparu comme évident. Ainsi il a été décidé qu’à chaque tour, chacun des membres de ménages devait être nourri au moyen d’un sac de riz. Comme dit précédemment, le fokontany représenté sur le plateau de jeu ne possède pas de terres cultivables. Les participants devaient donc pouvoir acheter ce riz quelque part. C’est là qu’entre en jeu un des acteurs cités lors des diagnostics ARDI, le commerçant. C’est en achetant le riz au commerçant grâce à l’argent récolté suite aux activités de pêches que les participants pouvaient remplir leur objectif. Pour des raisons de commodité, il a été choisi que le rôle du commerçant serait tenu par l’animateur du jeu. Mais il n’est pas à exclure que ce rôle puisse être tenu par un des participants. Cela pourrait même permettre l’apparition de nouvelles mécaniques comme la favorisation ou bien encore la corruption. Il a fallu ensuite décider quelle valeur avait ce sac de riz. Les valeurs des autres ressources ayant été défini en lien avec celle des sacs de riz, le choix a été fait de lui donner une valeur simple mathématiquement et qui puisse parler aux participants. Ces derniers n’ayant pour certains que de faibles notions en mathématiques et peu d’outils de calcul, la valeur d’un sac de riz a été fixée à 10 000 Ariary (environ 2,5€). Cette valeur ne reflète pas un prix réel mais permet de simplifier grandement le reste des opérations. Ainsi dans le cas d’une configuration à 8 ménages il faut 160 000 Ariary par tour pour nourrir tous les membres des ménages contre 120 000 Ariary par tour dans le cas d’une configuration à 6 ménages.

Le jeu ayant une dimension économique, il a été choisi de créer des billets factices à l’apparence très simple mais reprenant les couleurs des billets originaux pour que les participants ne soient pas perdus et associent rapidement les billets à leurs valeurs (rouge pour 5000, vert pour 10 000 et bleu pour 20 000). La valeur des ressources halieutiques

Comme dit précédemment, les ressources halieutiques présentes dans le jeu sont les poissons côtiers (petits), les poissons du large (grands), les calmars et les langoustes. Ces ressources ayant un but économique dans le jeu, il était nécessaire de leurs donner une valeur marchande. Pour cela la valeur d’une unité de ressources est corrélée avec le prix d’achat d’un sac de riz.

Selon les diagnostics ARDI, la ressource la plus abondante était les poissons côtiers, il a donc été décidé que leur valeur serait la plus faible, à 5000 Ariary l’unité. Ensuite par ordre croissant viennent les langoustes à 10 000 Ariary l’unité, les calmars étant une ressource très importante économiquement pour la population, leur valeur a donc été fixé à 15 000 Ariary l’unité. Les poissons du large n’étant pas une ressource normalement exploitable par la population locale, son prix a été fixé à 30 000 Ariary pour qu’elle possède un attrait important dans le jeu. Son obtention nécessitant de la coopération de la part des participants, ce prix élevé permettait de penser que la coopération serait un mode d’action privilégié par les participants (Tableau 1).

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Les valeurs utilisées pour le jeu ne reflétaient pas la réalité mais permettait de faciliter les échanges lors des phases de vente et d’achats de ressources. La répartition des ressources halieutiques

Après avoir défini une valeur pour chacune des ressources présentes sur le plateau, il a fallu décider de leurs répartitions dans les différents patchs présents dans le jeu. Cette répartition diffère selon le type de configuration choisi, soit 8 ménages, soit 6 ménages. Dans le cas d’un jeu avec 8 ménages, il fallait que la valeur des ressources dans les patchs les plus accessibles (soit les patchs Nord et Sud) soit au moins équivalente aux besoins des ménages, soit 160 000 Ariary de ressources. Mais comme l’une des particularités du jeu vient de la manière dont il se déroule, mettre juste assez de ressources pour satisfaire tous les participants aurait probablement conduit à de très fortes inégalités dès le premier tour de jeu. En effet durant les deux premiers tours de jeu, les participants ou les groupes ne peuvent pas se parler entre eux et donc se coordonner pour choisir dans quel patch chaque ménage va aller. Avec des ressources limitées cela entraînerait une trop forte compétition dès le début du jeu et une diminution rapide des stocks halieutiques. Il a donc été décidé de mettre plus de ressources que nécessaire. Il a aussi été choisi de ne pas placer les ressources de manière homogène entre les patchs, cela permet de rendre certains patchs plus attractifs que d’autres et ainsi oblige les participants à bien réfléchir quant à leur choix de patch à exploiter. Un patch plus riche étant plus attractif mais pouvant aussi donner plus facilement lieu à de la compétition entre participants. Enfin il a été choisi de repartir dans le patch aire protégée des ressources à forte valeurs pour refléter l’intérêt économique et écologique de la zone dans le système. Ainsi, dans un jeu à 8 ménages, on trouve dans le patch Nord, 9 poissons côtiers et 5 calmars, dans le patch Sud, P poissons côtiers, 2 calmars et 5 langoustes, dans l’aire protégée, 4 poissons

Tableau 1 : valeur des différentes ressources présentes dans le jeu Fiarahamiasa. Les pictogrammes utilisés pour représenter les ressources halieutiques sont les mêmes que ceux qui ont été utilisés durant les sessions de jeu à Ivontaka et Menatany.

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côtiers et 5 calmars et dans le grand large on trouve 8 grands poissons (Tableau 2). En début de jeu on a ainsi sur le plateau pour 580 000 Ariary de ressources, dont 240 000 ne sont pas accessibles avant le troisième tour de jeu. Les participants ne pouvant accéder au large qu’à partir du troisième tour, la ressource à la plus forte valeur, les poissons du large, n’est pas accessible dès le début du jeu.

Dans une configuration à 6 ménages ces ressources diminuent, on trouve dans le patch Nord, 7 poissons côtiers et 4 calmars, dans la zone Sud, 7 poissons côtiers, 1 calmar et 4 langoustes, dans l’aire protégée, 3 poissons côtiers et 4 calmars et dans la Grand large on trouve 6 gros poissons. Soit un total de 440 000 Ariary de ressources mais dont seulement 260 000 sont disponibles en début de jeu.

La dynamique des ressources halieutiques

Une fois avoir défini les emplacements et les quantités des différentes ressources, il a fallu définir de quelle manière elles allaient évoluer au cours du jeu. Il a tout d’abord été défini que si les différentes ressources n’étaient pas complètement exploitées durant un tour de jeu alors au début du tour suivant elles retrouveraient les quantités initiales définies précédemment.

Il a fallu ensuite définir que si l’une des ressources d’un patch était complètement exploitée au cours d’un tour de jeu alors au début du tour suivant, la régénération en serait impactée. Cela se traduit par une diminution d’une unité de cette ressource. Pour exemple si au premier tour, les neufs poissons côtiers du patch Nord sont exploités alors au début du deuxième tour il n’y aura que 8 poissons côtiers dans le patch Nord. Ce choix a été réalisé pour que les participants réalisent les conséquences de la surexploitation des ressources. Le stock revient à l’état initial si au cours du tour suivant la ressource n’est pas totalement exploitée. Pour revenir à l’exemple précèdent, si les 8 poissons côtiers présent au deuxième tour ne sont pas tous capturés alors

Tableau 2 : réparation des ressources halieutiques dans les différents patchs du jeu Fiarahamiasa selon deux configurations différentes, la configuration à 6 ménages et celle à 8 ménages. La valeur économique totale des ressources est aussi indiquée dans la dernière colonne du tableau.

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au début du troisième tour, la régénération s’effectuera normalement et le stock reprendra son état initial de 9 poissons côtiers pour le patch Nord. Ensuite est venu la question de l’aire protégée, sa présence étant capitale car reflétant des problématiques réelles des populations locales. Il a été défini que toute exploitation de l’aire protégée résulterait en une diminution de la régénération de toutes les ressources des patchs côtiers, à savoir les patchs Nord, Sud et Aire protégée. Cette diminution représente une baisse d’une unité de ressources comme dans le cas d’une surexploitation.

Il a d’ailleurs été décidé que ces deux impacts (surexploitation et exploitation de l’aire protégée) seraient cumulables au cours d’un même tour de jeu. Ce choix permet d’appuyer une fois de plus auprès des participants, les conséquences de leurs actions sur les ressources naturelles renouvelables.

e. Etape 5 : définition d’autres caractéristiques du jeu

Caractéristiques temporelles : les tours de jeu ?

Après avoir défini l’ensemble des acteurs et des ressources présentes sur le plateau de jeu, il fallut définir les données temporelles du jeu, à savoir de combien de tours se compose le jeu et que représente réellement ces tours. Pour le nombre de tours, il a été choisi de réaliser 4 tours de jeu d’une durée de 20 à 30 minutes chacun. Les deux premiers tours se font sans que les participants ou groupes puissent communiquer entre eux pour pouvoir choisir les patchs et les ressources à exploiter. Durant les deux derniers les participants peuvent coopérer pour pêcher que ce soit pour exploiter les zones côtières ou pour aller au large si au moins deux ménages se regroupent. Les ménages qui coopèrent peuvent ainsi aller dans le patch Grand Large et prélever deux ressources par tour. La durée des tours a été définie pour permettre à une session d’une durée de 2 à 3h en prenant en compte le temps nécessaire à l’explication du jeu et de ses règles ainsi que celui nécessaire au débriefing du jeu. Cette durée a été considérée comme étant idéale pour une attention maximale de la part des participants. Concernant la signification réelle d’un tour de jeu, il a été décidé que chaque tour représenterait une durée de quelques mois. Cette durée correspond au temps nécessaire au renouvellement des stocks halieutiques dans la baie d’Antongil.

Que faire en cas de compétition pour les ressources ?

Comme dit précédemment, les ressources présentes sur le plateau de jeu sont limitées. Ces ressources limitées et l’hétérogénéité de leur distribution et de leurs valeurs économiques dans les différents sont les deux facteurs qui ont été choisi pour amener les participants à entrer en compétition pour l’obtention des ressources. Cette compétition a été définie pour être particulièrement présente durant les deux premiers tours au cours desquelles les participants ou groupes ne peuvent pas se parler durant le choix des patchs et des ressources à exploiter.

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Dans les faits, si certains participants se retrouvent en compétition pour une ou plusieurs ressources alors un pile ou face est effectué, le gagnant de ce pile ou face remportant la ressource. Le choix du pile ou face a été fait pour introduire une notion de hasard au jeu. Cela permet aussi de faire en sorte que les participants ne puissent pas contester le résultat de cette compétition. Pour des raisons de commodités, le lancer de la pièce est effectué par l’animateur du jeu de rôles.

Que se passe-t-il si un participant exploite l’aire protégée ?

Il a déjà été défini que l’exploitation de l’aire protégée avait un impact sur l’ensemble des patchs côtiers. Mais est ce que le ménage qui exploite ce patch obtient réellement les ressources ? Cela dépend, s’il se fait attraper ou non. En effet dans la réalité, les aires marines protégées sont souvent surveillées soit par les gestionnaires de l’aire comme c’est le cas pour le Parc Marin de la Réserve de biosphère de Mananara-Nord géré par MNP, soit par la population locale. Pour introduire cette mécanique dans le jeu, il a été décidé que si un ménage exploitait l’aire protégée alors un pile ou face était réalisé. Si le ménage gagne le pile ou face alors il peut ramener ses captures pour les vendre. S’il perd ce pile ou face alors ses captures sont entièrement prises et il rentre au fokontany sans aucune ressource.

Ce choix a été fait pour que le jeu puisse se rapprocher de la réalité et ainsi impliquer plus les participants et appuyer les conséquences de leurs choix. Par commodité, le lancer de pièce est réalisé par l’animateur du jeu.

Une fiche pour les participants

Le jeu étant relativement complexe et demandant aux participants d’effectuer des choix quant aux patchs et aux ressources qu’ils souhaitent exploiter, une fiche a été créé sur laquelle les participants pourraient noter leurs choix et qui regrouperait les informations concernant le ménage qu’ils représentent (nom du ménage, nombre de membres, capacité du bateau) (Figure 4). Sur cette fiche les participants peuvent noter pour chaque tours les ressources et les patchs exploitées, les ressources réellement acquises si ces dernières ne sont pas les mêmes en cas de compétition. Ils peuvent aussi indiquer s'ils ont fait l’achat d’un nouveau bateau ou amélioré leur bateau existant. Ils peuvent aussi y indiquer s’ils ont dû effectuer un emprunt pour acheter du riz ainsi que le montant de cet emprunt. Enfin ils peuvent indiquer sur la fiche, l’argent qui leur reste en fin de tour. Cette fiche a été créée d’une part pour que les participants puissent avoir un support sur lequel noter leurs actions, ce qui permet d’éviter toute tentation de triche lorsque vient le temps de prélever les ressources. Elle permet aussi d’obtenir des données que les participants peuvent comparer entre eux. Ces données peuvent aussi être utilisées pour comparer plusieurs sessions entre elles pour une analyse plus poussée du jeu après un grand nombre de partie.

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Cette fiche a été réalisée dans deux langues, le français et le malgache. La réalisation de cette fiche en malgache permet de réduire le temps d’explication nécessaire pour que les participants comprennent plus facilement son intérêt et comment la remplir.

Un tableau pour l’animateur

Tout comme les participants, l’animateur du jeu à lui aussi une fiche à remplir (Tableau 3). Elle se présente sous la forme d’un tableau, affiché à la vue des participants. A l’intérieur, l’animateur note ce qu’il s’est passé durant le tour de jeu, les différentes informations étant regroupées en trois catégories, ressources, satisfaction et mode d’action. L’animateur note tout d’abord les changements survenus aux niveaux des ressources et pour les différents patchs. Il note aussi la biomasse totale des ressources ce qui représente les quantités de ressources restantes en début et en fin de tour. Il demande ensuite aux participants s'ils ont eu ou non à effectuer un emprunt pour pouvoir acheter du riz, le nombre et le nom des ménages ayant dû faire un emprunt ensuite inscrit dans la catégorie insatisfait, les ménages n’ayant pas eu à effectuer d’emprunt sont marqué comme étant satisfait. L'animateur note ensuite dans le tableau de performances si les participants ont effectué les actions suivantes : entraide, chacun pour soi, communication, achats et location de bateau, emprunt, application des règles de l’aire protégée.

Ce tableau de performance permet à l’animateur et aux participants de garder une trace des actions effectuées et de leurs conséquences tout au long du jeu. Ce tableau sert aussi de support à l’animateur pour le débriefing du jeu, le passage du jeu vers la réalité et la mise en place du plan d’actions communautaire

Figure 4 : exemple de la fiche remise aux participants du jeu de rôles Fiarahamiasa. Sur cette fiche se trouvent toutes les informations que les participants doivent remplir au cours du jeu. Les ménages sont nommés au moyen d’une lettre, dans ce cas la lettre A. Version française.

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f. Etape 6 : les objectifs du jeu Fiarahamiasa

Les différentes étapes de la conception du jeu vues précédemment ont été réalisées dans le but d’atteindre différents objectifs.

Objectif 1 : les participants comprennent l’importance d’une aire protégée dans un socio-écosystème

Comme vues lors l’étape 3.1, les fokontany dans lesquels la démarche a été mise en place font parties des fokontany avoisinants le Parc Marin de la Réserve de biosphère de Mananara-Nord. Les aires protégées étant des enjeux majeurs de la gestion des ressources naturelles, il était nécessaire qu’une meilleure compréhension de leur importance fasse partie des objectifs du jeu de rôles. Mais pour ne pas limiter la pertinence du jeu aux seules fokontany de la Réserve de biosphère, le Parc Marin n’est pas représenté comme tel dans le jeu. Ainsi ce premier objectif peut être adapté à d’autres types d’aires protégées marines, comme les Aires de Pêches Gérées Localement ou APGL qui représentent la majorité des aires protégées de la Baie d’Antongil. Cette flexibilité permet au jeu de pouvoir être adapté à différents contextes, que ce soit pour réfléchir aux règles de gestion d’aire existantes ou bien initier des discussions sur la pertinence et l’intérêt qu’aurait la création d’une de ces aires protégées au niveau d’un fokontany.

Objectif 2 : les participants comprennent l’importance de la coopération pour la gestion des communs

Ce deuxième objectif répond à un problème récurrent dans la baie d’Antongil, dans un certain nombre de fokontany, les populations locales ne considèrent pas que les ressources marines soient limitées. Pour beaucoup aussi, ils ne considèrent pas que leurs activités de

Tableau 3 : fiche de performance du jeu Fiarahamiasa. Tableau repli par l’animateur du jeu en cours de partie pour permettre de garder une trace du déroulement du jeu et facilité la transition du jeu vers la réalité. Version française.

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pêches puissent avoir des conséquences pour d’autres pêcheurs. En effet, ils ne considèrent pas la mer comme un commun. Ce jeu de rôles a donc pour deuxième objectif de tout d’abord leur faire prendre conscience que les ressources qu’ils exploitent sont limitées, ce qui se traduit dans le jeu par des stocks finis et dont la régénération dépend des actions des participants. Ensuite, le jeu de rôles à été conçu pour que les participants se rendent compte que sans coopération, les pêcheurs peuvent entrer en compétition pour les ressources et donc induire des phénomènes de surexploitation. Pour finir, la possibilité de coopérer dans le jeu a été conçu pour permettre aux participants de se rendre compte que la diversification des activités de pêches permet de réduire les pressions sur les zones côtières, laissant ainsi le temps aux ressources de se régénérer.

Objectif 3 : initier la mise en place d’un plan d’action communautaire

Le jeu Fiarahamiasa a été conçu comme étant un moyen de réflexion sur la gestion des ressources naturelles renouvelables. Au niveau d’un fokontany, ce jeu sert de passerelle entre le diagnostic communautaire réalisé en amont et le plan d’action réalisé en aval. L’un des objectifs du jeu est donc de permettre d’initier une dynamique de groupe, cette dynamique se retrouve durant les moments de réflexion et d’échanges durant les différents tours de jeu, que ce soit entre les membres d’un ménage ou entre les ménages.

Cette dynamique, associée aux actions réalisées pendant la partie permet aux participants de débuter un processus de réflexion quant aux actions concrètes qu’ils souhaitent réaliser au niveau du fokontany. Ce processus de réflexion permet d’initier de manière détourner la mise en place du plan d’action communautaire, ce qui était à la base, le dernier objectif pour lequel le jeu de rôles Fiarahamiasa avait été conçu.

Objectif bonus : montrer l’importance de la coopération pour la résistance des ménages aux catastrophes

Initialement, Fiarahamiasa ne possédait que trois objectifs. Le dernier objectif n’est apparu qu’après la première session de jeu dans le fokontany de Menatany. En effet il a été décidé qu’introduire un aléa cyclone au cours du jeu permettrait de faire ressortir auprès des participants, l’intérêt de certaines pratiques. De plus, la région d’Analanjirofo étant soumise aux cyclones tous les 2 ou 3 ans, cet aléa reflète un phénomène concret pour les participants. Ces épisodes cycloniques pouvant être d’une très grande intensité et modifier profondément le fonctionnement des fokontany, comme cela a été le cas à Menatany où au début des années 2000, un cyclone a modifié l’embouchure du fleuve à partir de laquelle les pêcheurs partaient en mer. Cette catastrophe a ainsi changé le mode de fonctionnement des pêcheurs et rendu les sorties en mer plus difficiles, de par la présence de rocher au niveau de la nouvelle embouchure. Ce cyclone intervenant au niveau du troisième tour, il avait pour objectif de montrer que la coopération entre les ménages leur permettait de mieux résister d’un point de vue économique aux catastrophes naturelles.

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Une fois l’ensemble des points précédents définies, le jeu était prêt à être utilisé lors d’ateliers dans les fokontany de Menatany et d’Ivontaka. V. SESSIONS DE JEU DANS LES DEUX FOKONTANY PILOTES

a. Le déroulement d’une session de jeu

Présentation du jeu

Pour commencer la session, l’animateur prend le temps nécessaire pour bien expliquer aux participants, le jeu, son but ainsi que ses règles. C’est à ce moment qu’il réunit les participants en sous-groupes ou qu’il attribue aux participants un ménage. Après cette attribution, l’animateur donne aux participants leurs fiches de jeu, en s’assurant bien qu’au moins une personne dans chaque ménage sache lire et écrire. Il prend ensuite le temps d’expliquer aux personnes présentes les informations présentes sur la fiche et comment la remplir. C’est aussi à ce moment-là qu’il distribue aux participants les bateaux qu’ils placeront sur les patchs. Une fois que tous les participants ont bien compris toutes les composantes du jeu et que l’animateur a répondu à toutes les questions qui lui auront été posé, la partie peut commencer.

Les deux premiers tours de jeu

Pour débuter le jeu, les participants doivent d’abord choisir les patchs et les ressources qu’ils souhaitent exploiter. Durant ces deux premiers tours, les participants ou groupes ne peuvent pas discuter entre eux pour se concerter sur les ressources à exploiter. Une fois ce choix fait, les participants ou les représentants des groupes viennent autour du plateau de jeu et déplacent le bateau qui leur a été donné. Ensuite l’animateur distribue aux participants les ressources qu’ils ont choisies et tire à pile ou face s’il y a eu compétition pour les ressources ou si quelqu’un est allé exploiter l’aire protégée. Après la distribution des ressources, l’animateur endosse le rôle de commerçant et achète les ressources des participants pour le prix défini précédemment. Ces prix étant affiché à la vue des participants durant la session de jeu. Une fois que ces transactions effectuées, les participants achètent les sacs de riz qui leur sont nécessaire. S'ils n’ont pas les fonds nécessaires, ils doivent alors emprunter la somme qui leur manque, que ce soit auprès du commerçant ou bien auprès des autres joueurs. Pour terminer le tour, l’animateur demande aux participants s'ils souhaitent conserver l’argent qu’ils leur restent ou bien s’ils souhaitent acheter un autre bateau ou améliorer le leur. Une fois que les participants ont fait leur choix, le tour de jeu est terminé.

L’animateur remplit alors le tableau de performances et restore les stocks de ressources halieutiques, en ajustant les valeurs selon ce qu’il s’est passé durant le tour. Le tour suivant peut alors commencer et se déroule selon le même schéma.

Un aléa imprévu : le cyclone

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A la fin du tour deux, l’animateur annonce aux participants qu’un cyclone a eu lieu. Ce cyclone impacte fortement les ressources halieutiques en divisant par deux l’ensemble des ressources côtières. Cette division est basée sur les stocks initiaux détaillés précédemment. Le choix de cet aléa à ce moment-là du jeu permet de voir si les stratégies en amonts des ménages leur permettent de supporter cet aléa et si la coopération entre les groupes qui ne peut être mise en place qu’à partir du troisième tour permet de supporter cet aléa.

Cet aléa existant réellement sur la côte est de Madagascar, son inclusion dans le jeu permet aux participants d’ancrer un peu plus le jeu dans un contexte réaliste, ce qui permet d’initier les réflexions sur des problématiques territoriales.

Les deux derniers tours de jeu

Les deux derniers tours de jeux se déroulent selon le même schéma que les deux premiers à une exception près. En effet lors des deux premiers tours les participants ne pouvaient pas coopérer pour choisir les patchs et les ressources à exploiter. Ce n’est plus le cas durant les deux derniers tours. Les participants peuvent ainsi se concerter quant aux choix qu’ils vont effectuer, cela dans un but d’éviter les phénomènes de compétition et donc de permettre à tous les ménages d’obtenir les ressources dont ils ont besoin. Durant ces deux tours, les participants peuvent aussi choisir de coopérer pour aller dans le patch Grand Large. Cette coopération se fait quand deux ménages choisissent de partir en mer ensemble, dans ce cas leur bateau qu’ils utilisent peut transporter deux unités de ressources. Le but de cette coopération est de permettre d’une part que tous les participants puissent obtenir les ressources nécessaires mais aussi de faire prendre conscience aux participants que la diversification des types de pêches utilisés permet de réduire les pressions sur les zones côtières. Le jeu se termine à la fin du quatrième tour.

b. Session à Menatany

Le dernier atelier de Menatany s’est tenu le 11 juin 2019, un jour fady, en présence de 43 membres du fokonolona. Il a été divisé en deux parties. Une première partie dans la matinée portant sur le jeu de rôles et une deuxième partie dans l’après sur l’élaboration du plan d’action GIZC. La session de jeu s’est déroulée selon le modèle des groupes hétérogènes avec 8 ménages décrit précédemment, soit 16 personnes qui participaient au jeu. Cela a été choisi pour permettre aux femmes présentes de participer plus activement au jeu mais aussi parce que la configuration du lieu de l’atelier faciliter la présence d’un grand nombre de participants autour du plateau de jeu. Dans l’ensemble, la session de jeu qui a duré deux heures s’est bien passé. Les participants ont apprécié le côté ludique du jeu et les moments d’échanges que ce dernier a permis de créer. Mais cette première session a aussi permis de mettre en lumière certaines lacunes de la démarche.

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En effet lors de cette session, une trop faible emphase a été mise sur l’explication du jeu aux participants, ce qui a perturbé le bon déroulement des différents tours. Ensuite lors de cet atelier, des représentants de MNP et de WCS étaient présent durant la session de jeu, ce qui l’aveu des participants et des représentants de MNP a perturbé la session. En effet un seul des participants est allé exploiter le patch Aire Protégée, ce qui n’a pas permis au jeu de remplir son premier objectif à Menatany.

Cette session a aussi permis de concevoir l’aléa cyclone qui a été utilisé le lendemain pour l’atelier d’Ivontaka.

c. Session à Ivontaka

Le deuxième atelier d’Ivontaka s’est tenu le 12 juin 2019, en présence de 31 membres du fokonolona. Ce faible nombre de participants s’explique par le fait que l’atelier s’est déroulée un jour non fady. Comme à Menatany, l’atelier a été divisé en deux parties, un partie jeu de rôles et une partie plan d’action. A l’inverse de Menatany, la session de jeu s’est déroulé selon le modèle des groupes hétérogènes avec 6 ménages, soit 5 participants par groupes. Ce choix a été fait car le nombre de participants et la petite taille du lieu de l’atelier se prêtait plus à ce type de session. Il est à noter l’absence de femme à cet atelier comme lors du précèdent atelier à Ivontaka. Cette deuxième session de jeu, d’une durée de deux heures a permis de corriger les erreurs mentionnées précédemment et d’introduire l’aléa cyclone. Ces différentes corrections ont permis une à la partie de jeu de gagner en fluidité et les participants ont été plus impliqué dans la session de jeu grâce l’aléa cyclone. Contrairement à Menatany, les participants se sont intéressés à la dynamique des ressources du jeu, un temps d’une dizaine de minutes a donc été pris pour leur expliquer comment les ressources pouvaient évoluer sur le plateau de jeu. L’ensemble des personnes présente a pu participer au jeu grâce à la méthode des groupes homogènes.

Selon les retours des participants, le jeu de rôles est un outil utile pour discuter de la pêche et de la gestion des ressources naturelles. L’ensemble des participants s’est déclaré satisfait du jeu et du temps passé à partager autour de leurs activités quotidiennes. Pourtant, malgré l’absence de représentants de MNP lors de cet atelier, un seul groupe est allé exploiter le patch Aire Protégée. Le jeu n’a donc pas pu remplir son premier objectif dans les deux fokontany où il a été utilisé. VI. DU JEU DE RÔLES AU PLAN D’ACTION

a. Débriefing du jeu

Dans les deux fokontany, après que les quatre tours de jeu soient passés, la session s’est terminé. L’animateur s’est ensuite servi du tableau de performance remplit au préalable pour débuter le débriefing du jeu. Cette partie du jeu s’est présentée sous la forme d’un échange entre l’animateur et les participants. Le premier a résumé les différentes actions mises en place durant le jeu et leurs conséquences, et les seconds ont ensuite transposé ces actions sur le monde réel. Cela a permis de réfléchir à des exemples d’actions concrètes à mettre en place

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dans le fokontany ou bien à des principes fondamentaux dans la gestion intégrée des zones côtières. Le but de ce débriefing était triple, tout d’abord rappeler aux participants que leurs actions ont eu des conséquences dans le jeu, ensuite de les faire travailler pour commencer à définir des principes ou des actions de gestions des ressources naturelles renouvelables et enfin ce débriefing avait pour but d’initier la mise en place du plan communautaire qui était le deuxième objectif du R5 du projet PCD.

b. Un début d’atelier en plénière…

Pour commencer l’atelier plan d’action, il a été demandé à l’ensemble des participants de citer les actions qu’ils souhaiteraient voir réaliser dans leurs fokontany (le QUELLES ACTIONS ?). Ces actions pouvant être liées aux ressources marines, terrestres ou bien être d’ordre sociale, économique… Débuter l’atelier en plénière a permis de brasser rapidement le plus d’actions possibles. Cette liste d’action a ensuite pu être rallongé ou raccourci durant l’atelier selon les suggestions des participants.

c. … suivi par des discussions en sous-groupes…

A la suite de cette première étape, les participants ont été regroupé en sous-groupes, ces sous-groupes ont été formé soit à ce moment, soit étaient ceux formés par les participants durant la session de jeu. Au sein de chaque groupe, un secrétaire a été désigné et son rôle a été de prendre en note les réflexions de son groupe et de servir de porte-parole au moment de la restitution de ces réflexions. Une fois les groupes formés, il leur a été demandé de classer les actions listées précédemment selon un ordre de priorité. Les choix des différents groupes ont été comptabilisés pour donner l’ordre définitif (voir annexe 12 et 13). Ensuite chacune des groupes s’est vu attribuer une action, certaines des actions ont été traités par deux groupes quand le nombre d’actions listées étaient inférieur au nombre de groupes présent.

Chacun des groupes s’est ensuite attelé à détailler l’action qui lui a été attribué. Ils ont tout d’abord travaillé à définir les raisons derrière la mise en place de cette action (le POURQUOI ?). Ils ont ensuite détaillé les différents moyens ou étapes à mettre en œuvre pour que cette action se concrétise (le COMMENT) pour ensuite terminer par définir le ou les objectifs qu’ils souhaitaient attendre avec cette action (le POUR QUELS OBJECTIFS ?).

d. … pour élaborer un plan d’action

Une fois que chacun des groupes a pu déterminer ces différents points, le secrétaire de chaque groupe a explicité leurs réflexions au reste des participants qui ont pu valider ces idées et en ajouter d’autres si besoin. Quand tous les groupes ont pu s’exprimer, il a été demandé si des volontaires voulaient bien suivre ces actions sur le long terme et servir de personne ressources dans le cadre d’un suivi pour la suite du projet. Une fois que chaque action a trouvé son volontaire, les ateliers se sont terminés (Tableaux 4 et 5).

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Tableau 4 : plan d’action réalisé à Menatany le 11/06/2019 en présence de 43 membres du fokonolona. Les actions affichées sont classées par ordre de priorité.

Tableau 5 : plan d’action réalisé à Ivontaka le 12/06/2019 en présence de 31 membres du fokonolona. Les actions affichées sont classées par ordre de priorité.

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VII. DISCUSSION

a. ARDI : une méthode adaptée au contexte ?

Dans l’ensemble, la méthode ARDI utilisée est une méthode adaptée à la réalisation d’un atelier de diagnostic, elle possède donc des avantages mais elle possède aussi certaines limites qui ont été clairement délimité dans les fokontany. La méthode ARDI comme outil de diagnostic dans le cadre d’un atelier possède plusieurs avantages. Tout d’abord elle ne demande pas de connaissances scientifiques particulières de la part de l’animateur et peut donc être animée par une personne locale formée au préalable. Ensuite elle est relativement flexible et peut donc être améliorée d’un atelier sur l’autre. Son utilisation permet la production de connaissances pour l’animateur mais aussi pour les participants, les retours des ateliers ont montré qu’au moins la moitié des participants a considéré avoir appris quelque chose en sortant de l’atelier. Pour finir, utiliser cette méthode dans différents sites permet une comparaison facile des acteurs et des ressources présents dans deux territoires différents.

Mais la méthode n’est pas exempte de défauts. Au cours des sessions dans la brousse malgache, deux principaux points sont apparus comme étant à améliorer. Tout d’abord, bien qu’elle soit adaptée pour obtenir une liste plus ou moins exhaustives des acteurs et des ressources présentent dans un territoire à un moment donné, elle ne permet pas en elle-même de définir les contextes sociaux et économiques d’un territoire. Le diagramme d’interaction permet d’obtenir une certaine vision des relations entre les différentes parties prenantes du territoire mais il ne donne pas d’indications précises quant aux jeux de pouvoir existants entre ces parties prenantes. Ensuite la méthode n’est pas adaptée à tous les contextes, ainsi durant les ateliers, les participants ont eu des problèmes avec la partie dynamique de la méthode et cela pour deux

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raisons. La première raison est toute simple, le mot dynamique n’existe pas en malgache12 ce qui a nécessité de définir aux participants ce qu’était la dynamique. Ensuite les populations des de Menatany et d’Ivontaka vivent dans le présent et ne se projette que rarement dans le futur. Au cours de l’atelier, cette caractéristique s’est traduite par la quasi inaptitude des participants à exprimer d’eux même des évolutions possibles pour leur territoire, ce qui a rendu la partie dynamique de la méthode difficilement exploitable.

Pour pallier ces deux principaux défauts de la méthode, des discussions informelles ont été réalisées portant sur une grande variété de sujet comme les problèmes sociaux, d’éducation de santé ou bien encore les problèmes d’autosuffisance alimentaire. L’ensemble des informations récoltées par ce biais ont ensuite été utilisées pour la partie dynamique de la méthode ARDI.

Au final, si d’autres ateliers de diagnostics devaient être réalisés dans la région d’Analanjirofo, ce n’est pas la méthode ARDI qui devrait être utilisée mais la méthode ARPI, pour Acteurs, Ressources, Problématiques, Interactions.

b. Le JdR : un moyen ludique pour rassembler ?

Il y a peu de critiques à faire sur le jeu de rôles en tant qu’outil pour la modélisation d’accompagnement (Etienne, 2010). Son utilisation a permis aux participants des deux fokontany de réfléchir sur leurs activités de pêche et d’initier des dynamiques collectives qui ont abouti en la construction de plans d’actions. Mais bien que le jeu en tant qu’outil soit difficilement critiquable, le jeu « Fiarahamiasa » en lui-même et son animation peuvent encore être améliorer.

Concernant le jeu en lui-même, l’utilisation de l’aléa cyclone doit être implémentée de base dans le jeu. Le test réalisé à Ivontaka à bien montrer que cela permettait d’impliquer encore plus les participants et augmenter les chances de voir apparaitre de la coopération entre les joueurs. Une autre idée d’amélioration pourrait être le développement du rôle du commerçant. En effet dans les deux sessions de jeu, ce rôle était tenu par l’animateur pour faciliter le déroulement du jeu. Mais il pourrait quand même être intéressant que ce rôle soit tenu par un participant, cela pourrait permettre l’apparition de phénomènes de corruption ou de favorisation qui sont des contraintes réelles des populations rurales malgache.

Pour finir sur le jeu en lui-même, il est impératif de changer le matériau dans lequel ont été réalisé les ressources halieutiques. Ce dernier étant du papier, couplé aux vents de la région d’Analanjirofo et à l’impossibilité de réaliser les sessions dans des lieu protégées complètement du vent par faute d’électricité ont conduits les ressources à être balayé du plateau. Ce qui casse le rythme du jeu et donc la concentration des participants. Pour résoudre ce problème, reconstruire le jeu à l’aide de matériaux plus lourds serait une bonne solution.

12 Le mot dynamique existe en malgache mais uniquement sous forme d’adjectif (ex : il est dynamique) et pas sous forme de nom commun (ex : la dynamique du territoire).

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Concernant l’animation du jeu, un point ressort fortement des deux sessions de test, la présence d’agents étrangers au territoire (le Gret dans ce cas-là) freine les participants dans leur prise de décision. Comme dit précédemment, dans les deux fokontany, un seul ménage est allé exploiter le patch Aire protégée, ce qui n’a pas permis au jeu de remplir son premier objectif qui était la prise de conscience par les participants de l’importance d’une aire protégée dans un socio-écosystème. Cette non exploitation a été attribuée à l’animation du jeu par des vahiny13. Pour pallier ce problème, former en amont une personne locale aux principes et à l’animation du jeu puit la laisser gérer les sessions dans les fokontany serait une bonne solution. Cela serait en plus en accord avec l’esprit de transmission de la démarche ComMod.

c. De l’action après la réflexion

Le jeu de rôles a rempli son objectif dans la mise en place de plans d’actions mais est ce que la mise en place d’un plan d’action communautaire est vraiment le meilleur moyen d’amener des changements dans les fokontany et de tendre vers une meilleure gestion des ressources de la zone côtière ?

Pour répondre à cette question, il faut d’abord se pencher sur ce qu’à bien pu apporter la modélisation d’accompagnement aux participants et pas uniquement le résultat final obtenu. La démarche ComMod, en plus d’avoir permis la production de connaissances pour les participants, leur a aussi permis de prendre une certaine indépendance quant au futur qu’ils souhaitent amener dans leurs territoires. L’intérêt des ateliers n’a pas tant été la création des plans d’actions mais les étapes et les démarches qui ont amené à leurs réalisations. Les participants ont ainsi pu expérimenter les différentes étapes dans la conception d’un plan d’action et c’est cet aspect-là qui devrait être mis en lumière, c’est cet apprentissage qui pourra leur permettre de réitérer la démarche pour aborder d’autres problématiques s’ils le souhaitent. Ce début de prise de pouvoir sur l’évolution de leur fokontany est la vraie réussite des ateliers.

Mais les plans d’actions réalisés ne sont pas oubliés. Certaines des actions listées pourront être réalisées directement par la population mais d’autres nécessiteront des moyens supplémentaires autant financier que matériels. C’est pour cela que ces actions feront l’objet de plaidoyers par le Gret auprès de la région d’Analanjirofo dans le but d’obtenir ces moyens. Si ces plaidoyers sont reçus positivement, cela permettra d’appuyer l’intérêt de ce type de démarche auprès des populations locales. Car des ateliers ont déjà été réalisés par d’autres organismes dans ces fokontany mais ont rarement abouti sur des actions concrètes. Pour que les choses évoluent dans cette zone rurale, il est donc temps de mettre l’action avant la réflexion.

13 Étranger en malgache

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VIII. Conclusion et perspectives

Aujourd’hui, une partie de la population rurale de la Baie d’Antongil vit sous le seuil de

pauvreté, malgré la richesse écologique et économique de la zone. Pour combler ce manque, la quasi-totalité des habitants des fokontany de la Baie pratique des activités de pêches. Mais le manque de matériel de pêche adapté ainsi que la faible collaboration entre les membres d’un même fokontany entre le plus souvent une surexploitation des ressources de la zone côtière. C’est dans ce cadre-là qu’est intervenu le projet « Gestion durable de la pêche côtière à Madagascar » mené dans le district de Mananara-Nord par le Gret en collaboration avec WCS. Le projet suit la ligne directrice du gouvernement malgache qui depuis plusieurs années permet le transfert de gestion de ressources vers les communautés locales comme les COBA pour les forêts et les APGL pour les zone marines. Ces transferts permettent de sensibiliser les populations locales à la gestion des ressources naturelles renouvelables.

La modélisation d’accompagnement utilisée dans ce stage a permis de remplir les objectifs fixés par le projet PCD de réaliser des diagnostics communautaires et es plans d’actions GIZC. Mais la vraie force de la méthode ne provient pas de ses résultats mais de la démarche sous-jacente. Cette démarche mettant l’humain au centre de la question de la gestion des ressources a permis à la population locale de participer activement à l’élaboration du futur de son fokontany. Le jeu de rôles Fiarahamiasa créé spécifiquement pour le projet a démontré l’importance de la collaboration dans le cadre de la gestion des ressources entre autres, ce qui ne comptait pas parmi les objectifs à atteindre mais qui reste une des plus grandes réussites de l’utilisation de la modélisation d’accompagnement dans la Baie d’Antongil.

Cependant, la mise en place de la démarche ne s’est pas faite sans heurts. La méthode ARDI utilisée n’était peut-être pas la solution parfaite dans le cadre des diagnostics communautaires mais comme le reste de la démarche, son intérêt réside dans sa flexibilité et son adaptabilité. Le jeu de rôles et son animation peuvent encore être améliorés pour rendre son utilisation encore plus pertinente pour la population locale. Et aujourd’hui si la démarche devait continuer à Madagascar, une emphase devrait être mise sur la participation des femmes lors des ateliers collectifs, car malgré de nombreux efforts les résultats se sont avérés décevants de ce point de vue-là.

Bien que cet objectif du projet se soit concrétisé, rien n’est encore fini. Maintenant que la méthodologie a été testée dans deux fokontany, il serait possible de la reproduire dans d’autres fokontany de la Baie d’Antongil. Le jeu ayant été conçu pour s’adapter à plusieurs types de situations, il est donc envisageable de l’appliquer à d’autres types de contextes (sociaux, environnementaux, économiques, etc.) comme ceux du sud de Madagascar où le Gret intervient déjà depuis plusieurs années. Maintenant que la réflexion a été réalisée en amont, place à l’action.

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IX. Bibliographie

Littérature :

• Collectif ComMod., 2005. La modélisation comme outil d’accompagnement. Natures, Sciences,

Sociétés, 13 : 165-168

• Ducrot R., Barban V., 2008. From revindication to proposition : Capacity building in negociation about water management in perirurban areas. The ter’aguas approach in Sao Paulo, Brazil. In : IWRA, 13e congrès mondial de l’eau, Montpellier, France, 14.

• Étienne M., 2010. La modélisation d’accompagnement : une démarche participative en appui

au développement durable. Éditions Quae.

• Fauvelle E., 2014. Analyse comparée des moteurs de changement et des enjeux d’adaptation d’un socio-écosystème de forêt tropicale. Initiation d’une démarche de modélisation d’accompagnement dans la région Est du Cameroun. Mémoire de Master d’École d’Ingénieur, Institut des Régions Chaudes de Montpellier SupAgro, 176p.

• Rakotondrabe M., 2018. Conservation et valorisation durable des ressources forestières dans un contexte de vulnérabilité sociale dans la Réserve de Biosphère de Mananara-Nord. Thèse de doctorat, Université d’Antananarivo, 251p.

• Ramamonjisoa B., Rakoto Ramiarantsoa H., Casse T, « La Loi Gelose et le transfert de gestion des Ressources Naturelles à Madagascar », Les Cahiers d’Outre-Mer, 257 | 2012, 5-10.

• Souchère V., Cerdan O., Dubreuil N., Le Bisonnais Y., King C., 2005. Modelling the impact of agri-

environnemental scenarios on runoff in a cultivated catchment (Normandy, France). Catena, 61 (2-3) : 229-240.

Webographie :

• Site de la banque mondiale : https://www.banquemondiale.org/fr/country/madagascar,

(consulté le 15 juillet 2019)

• Site du Gret : https://www.gret.org, (consulté le 14 juillet 2019)

• Site ComMod : https://www.commod.org, (consulté le 14 juillet 2019)

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X. Annexes

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ANNEXE 1 : Les différents Acteurs de la méthode ARDI de Menatany

Atelier réalisé à Menatany le 16/04/19 en présence de 22 membres du fokonolona : en orange les acteurs directs, en jaune les acteurs indirects et le mélange des deux couleurs représente des acteurs pouvant être direct et indirect. Les acteurs ont été classés en trois entités : Intermédiaires extérieurs, le fokontany et les ONGs.

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ANNEXE 2 : graphique sur la capacité d’influence des acteurs sur l’évolution des ressources de Menatany en fonction de l’impact que cette évolution a sur eux

Réalisé le 16/04/19, ce type de graphique n’a pas été repris à Ivontaka car les acteurs cités étaient trop similaires et l’exercice trop abstrait pour les participants.

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ANNEXE 3 : les différentes Ressources de la méthode ARDI de Menatany

Atelier réalisé à Menatany le 16/04/19 en présence de 22 membres du fokonolona : en bleu les ressources halieutiques et en vert les ressources terrestres. Les ressources écrites en rouge sont celles que les participants ont désignées comme interdites à l’exploitation.

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ANNEXE 4 : graphique représentant la valeur économique des ressources de Menatany en fonction de leurs disponibilités dans le fokontany

Réalisé le 16/04/19. La première ressource à avoir été placée est la vanille, la place des autres ressources a ensuite été déterminé par rapport à celle de la vanille. Pour simplifier la démarche, les ressources halieutiques et terrestres ont été traités différemment

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ANNEXE 5 : carte de Menatany réalisée par les participants de l’atelier ARDI

La carte ci-dessus est une représentation numérique de la carte réalisée sur papier par les participants de l’atelier ARDI de Menatany du 16/04/19.

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ANNEXE 6 : synthèse des informations recueillies auprès de la population de Menatany

Les informations ont été recueillies lors de discussions informelles menées par Edino Sabotsy en amont et en aval de l’atelier ARDI du 16/04/19. Ces informations ont été regroupées en trois catégories : environnementales, économiques et sociales.

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ANNEXE 7 : Les différents Acteurs de la méthode ARDI d’Ivontaka

Atelier réalisé à Ivontaka le 02/05/19 en présence de 54 membres du fokonolona : en orange les acteurs directs, en jaune les acteurs indirects et le mélange des deux couleurs représente des acteurs pouvant être direct et indirect. Les acteurs ont été classés en trois entités : Intermédiaires extérieurs, le fokontany et les ONGs.

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ANNEXE 8 : les différentes Ressources de la méthode ARDI d’Ivontaka

Atelier réalisé à Ivontaka le 02/05/19 en présence de 54 membres du fokonolona : en bleu les ressources halieutiques et en vert les ressources terrestres. Les ressources écrites en rouge sont celles que les participants ont désignées comme interdites à l’exploitation.

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ANNEXE 9 : graphique représentant la valeur économique des ressources d’Ivontaka en fonction de leurs disponibilités dans le fokontany

Réalisé le 02/05/19. La première ressource à avoir été placée est la vanille, la place des autres ressources a ensuite été déterminé par rapport à celle de la vanille. Pour simplifier la démarche, les ressources halieutiques et terrestres ont été traités différemment

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ANNEXE 10 : carte de Menatany réalisée par les participants de l’atelier ARDI

La carte ci-dessus est une représentation numérique de la carte réalisée sur papier par les participants de l’atelier ARDI d’Ivontaka du 02/05/19.

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ANNEXE 11 : synthèse des informations recueillies auprès de la population d’Ivontaka

Les informations ont été recueillies lors de discussions informelles menées par Edino Sabotsy en amont et en aval de l’atelier ARDI du 02/05/19. Ces informations ont été regroupées en trois catégories : environnementales, économiques et sociales.

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ANNEXE 12 : graphique représentant les votes pour les actions du plan d’action de Menatany

Résultats du vote pour le classement des actions ressorties lors de l’atelier plan d’action de Menatany, le 11/06/19. Les 43 participants étaient réunis en 6 groupes et chacun des groupes classaient les actions selon l’ordre de priorité qui leur convenaient. Les 6 classements ont été comptabilisé pour donner l’ordre de priorité présent dans le tableau 4.

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ANNEXE 13 : graphique représentant les votes pour les actions du plan d’action d’Ivontaka

Résultats du vote pour le classement des actions ressorties lors de l’atelier plan d’action d’Ivontaka, le 12/06/19. Les 31 participants étaient réunis en 6 groupes et chacun des groupes classaient les actions selon l’ordre de priorité qui leur convenaient. Les 6 classements ont été comptabilisé pour donner l’ordre de priorité présent dans le tableau 5.

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Résumé :

Située dans l’océan indien à près de 400 km des côtes africaines, Madagascar, aussi appelé l’île-continent constitue la cinquième plus grande île du monde. Connue mondialement pour sa biodiversité et ses ressources exceptionnelles, l’île est pourtant soumise à de très fortes pressions anthropiques depuis les années 60. Et malgré les ressources dont elle dispose, la majorité de sa population vit en dessous du seuil de pauvreté en 2018. Cette situation oblige les populations locales à exploiter fortement les ressources présentes sur leurs territoires, en particulier les ressources halieutiques. Le projet Pêche Côtière Durable (PCD) appliqué par le Gret depuis 2018 dans la Baie d’Antongil dans le Nord-Est du pays a pour objectif de redonner aux habitants le contrôle sur la gestion de leurs ressources afin de réduire les pressions exercées. Dans ce cadre-là, la modélisation d’accompagnement ou démarche ComMod ainsi que les outils qui l’accompagne tel que la méthode ARDI ou bien les jeux de rôles permettent d’initier les discussions sur la gestion des ressources ou lors de situation de conflits. L’application de cette démarche au niveau de deux fokontany de la Réserve de Biosphère de Mananara-Nord a permis la réalisation de diagnostics territoriaux, ces derniers ont ensuite été à la base de jeu de rôles Fiarahamiasa qui fut utilisé en aval pour permettre d’initier des discussions auprès des populations locales concernant leur territoire et a abouti en la réalisation de plans d’actions communautaires dans les deux fokontany.

L’utilisation de la modélisation d’accompagnement dans ce type de milieu a permis d’apporter une certaine fraicheur aux échanges entre les ONGs travaillant dans la zone, les gestionnaires de la Réserve de Biosphère et les populations locales. Le jeu de rôles leur a permis de sortir de leur zone de confort et de réfléchir ensemble à l’avenir de leur territoire. Mots-clés : jeu de rôles, Madagascar, modélisation d’accompagnement, populations locales, Réserve de Biosphère. Abstract :

Located in the Indian Ocean nearly 400 km from the African coast, Madagascar, also called the island continent is the fifth largest island in the world. Known globally for its biodiversity and its exceptional resources, the island is nevertheless subject to very strong anthropic pressures since the 1960s. And despite the resources available to it, the majority of its population lives below the poverty line in 2018. This situation forces the local populations to make considerable use of the resources present on their territories, in particular the fishery resources. The Pêche Cotière Durable project (PCD) implemented by GRET since 2018 in the Antongil Bay in the north-east of the country aims to give residents control over the management of their resources in order to reduce pressure. In this context, the Companion Modelling approach as well as the tools that accompany it such as the ARDI method or the role plays can initiate discussions on the management of resources or during conflict situations. The application of this approach at the level of two fokontany of the Mananara-North Biosphere Reserve has enabled the realization of territorial diagnoses, these were then at the base of Fiarahamiasa role-playing game which was used downstream to initiate discussions with local populations regarding their territory and resulted in the implementation of community action plans in both fokontany.

The use of companion modelling in this type of environment has brought a certain freshness to the exchanges between the NGOs working in the area, the managers of the Biosphere Reserve and the local populations. The role play allowed them to leave their comfort zone and reflect together on the future of their territory. Keywords : role play, Madagascar, Companion Modelling, local populations, Biosphere Reserve.