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Internationale de l’Éducation

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RAPPORT DE LA CONFÉRENCE INTERNATIONALE SUR L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET LA RECHERCHE, VANCOUVER, 10-12 SEPTEMBRE 2010

RAPPORT GÉNÉRAL

«Les Vandales sont à nos portes»: Défendre l’enseignement supérieur et la recherche en période de crise

Paul BENNETT, UCU, Royaume-Uni

Cette 7

ème Conférence mondiale de l’IE sur l’enseignement supérieur a rassemblé 110 délégués et 23 observateurs

de 49 syndicats membres venant de 33 pays. Lorsque nous nous étions rencontrés la dernière fois à Montréal, au Canada en 2002, nous devions relever le défi majeur que représentaient l’AGCS et la marchandisation du secteur de l’enseignement supérieur, ainsi que l’onde de choc provoquée par les attentats du 11 septembre. La marchandisation est effectivement devenue un phénomène mondial, mais de diverses manières, et pas le monolithe mû par l’AGCS que nous avions prédit à Montréal. En règle générale, les conférences de l’IE sur l’enseignement supérieur sont placées sous le signe d’un grand thème: «Universités: Partenaires clés du développement» à Dakar en 2003; «Le personnel de l’enseignement supérieur et de la recherche au XXIe siècle» à Melbourne en 2005; «La condition du personnel enseignant de l’enseignement supérieur - 10 ans après la recommandation de l’UNESCO de 1997» à Malaga en 2007. Autant de thèmes relativement ambitieux, affirmant la place des syndicats dans un système universitaire rationnel et ordonné. Le thème de la dernière conférence était, selon moi et sans hyperbole: «Les Vandales sont à nos portes: Défendre l’enseignement supérieur et la recherche en période de crise». Nous avons analysé dans quelle mesure la crise économique est réelle et dans quelle mesure elle est un prétexte pris par les hordes barbares au pouvoir pour ressortir de leurs placards leurs vieux préjugés et leurs propositions politiques manquées et nous les imposer à nous et aux autres travailleurs de la fonction publique. Nous n’avons pas provoqué cette crise. Des politiciens et des

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hommes d’affaires insouciants l’ont fait. L’enseignement supérieur et la recherche font partie de la solution: il ne faut pas être un keynésien pur sucre pour voir la logique d’investir dans l’enseignement supérieur et la recherche en période de récession, mais à plus long terme, les universités doivent apporter des solutions aux grands problèmes scientifiques, technologiques et sociaux – dont un grand nombre est apparemment insoluble – que doit résoudre la planète. C’est certainement plus sensé que la réduction aveugle des dépenses que de nombreux pays pratiquent ou les panacées discréditées qui consistent à restructurer l’enseignement supérieur pour en faire des centres de profit privés. La crise actuelle ne saurait masquer le changement de cap vertigineux vers une communauté plus mondialisée de l’enseignement supérieur et de la recherche, une arène dans laquelle les modèles de coopération et de collégialité s’opposent à la concurrence et au corporatisme et luttent pour l’hégémonie. Nous savons de quel côté nous nous situons et nous devons nous assurer que notre voix est entendue au milieu des luttes mondiales et nationales pour l’avenir de l’enseignement supérieur. Le Canada et notre syndicat hôte, l’Association canadienne des professeures et professeurs d’université (CAUT/ACPPU), se situent aux avant-postes de ce combat et, au fil des ans, nous avons apprécié l’expérience et le leadership que la CAUT/ACPPU a partagés avec nous. L’un des enseignements de cette conférence doit être que nous devons tous collaborer plus étroitement afin de relever les défis sans précédents auxquels nous, en tant que syndicalistes et universitaires, avons à faire face aujourd’hui. La séance d’ouverture de la conférence de Vancouver était présidée par Penni Stewart, la présidente de la CAUT/ACPPU (Canada), qui a souhaité la bienvenue aux délégués. Elle a évoqué la grave crise économique mondiale et les changements spectaculaires intervenus dans le paysage économique et politique depuis la 6

ème Conférence de

Malaga en novembre 2007. Le secteur public est appelé à payer pour un désastre qui nous affecte tous et résulte de la cupidité du secteur privé. La nécessité de stratégies syndicales concrètes et d’une solidarité syndicale n’a jamais été plus grande. Jim Sinclair, président de la Fédération du travail de Colombie britannique, a choisi le thème de la «Solidarité pour défendre l’éducation», «les poumons de la démocratie». Il a décrit le passage, au cours des dix dernières années, de «droits d’inscription réduits et un salaire minimum élevé à des droits d’inscription élevés et un salaire minimum bas», avec davantage de travailleurs itinérants dans l’enseignement supérieur en Amérique du Nord que dans l’agriculture. Il a condamné l’obsession des gouvernements et de la société à réduire les impôts. Il a ainsi dénombré 57 réductions d’impôt en Colombie britannique en dix ans. Les syndicats doivent défendre l’idée que la société doit payer pour des services publics de qualité. Fred van Leeuwen, secrétaire général de l’Internationale de l’Éducation, s’est réjoui de la présence de la CONADU (Argentine) et du SNESup (France) et a remarqué que des syndicats du Brésil et du Pérou avaient également récemment adhéré à l’IE. Il a fait référence à la recommandation de l’UNESCO de 1997 et au fait que les affiliés doivent s’en servir pour demander des comptes à leurs gouvernements. Nous devons notamment combattre l’empiétement insidieux du marché sur l’éducation, qui constitue un défi direct pour la collégialité et les libertés académiques. Fred a évoqué sa participation au forum des grands chefs d’entreprise à Davos et les «flatteries» servies aux entreprises par les responsables des universités. L’éducation doit faire face aux défis énormes du développement durable et de la pénurie mondiale chronique d’enseignants qui menace la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement. Il a souligné le rôle de leader du secteur de l’enseignement supérieur au sein de l’IE. Pour conclure, il mentionne les attaques menées contre les libertés académiques d’enseignants et de chercheurs individuels et lance notamment un appel aux syndicats présents pour faire campagne en faveur du Dr Miguel Angel Beltran de Colombie et diffuser la pétition en ligne le concernant. 1

ère séance plénière: Une vue d’ici: L’état de la profession en 2010

Penni Stewart, présidente de la CAUT/ACPPU (Canada), a présidé la séance. Bill Ratteree de l’OIT a esquissé les défis professionnels auxquels nous devons aujourd’hui faire face, parmi lesquels figurent les effets de la

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privatisation, les emplois de courte durée et temporaires et l’impact sur les libertés académiques et la qualité, sans oublier l’affaiblissement de l’évaluation et les régimes de FPC. Toutefois, selon elle, on observe dans les enquêtes des signes d’une satisfaction professionnelle accrue! Les syndicats du secteur doivent utiliser la recommandation de l’UNESCO de 1997 (comme l’ont fait l’Australie et le Danemark), car elle contient plusieurs dispositions fondamentales que les syndicats doivent invoquer, en particulier dans le cadre de la procédure de recours. Mark Thompson, un membre de longue date du CEART, a insisté sur le fait qu’à la différence de la recommandation conjointe UNESCO/OIT de 1966, la recommandation de 1997 relève de la seule responsabilité formelle de l’UNESCO et que, par conséquent, elle dispose de nettement moins de ressources. L’IE est un partenaire précieux dans ce travail et ses rapports fournissent des données qui font autorité, mais l’IE doit fournir davantage de preuves. Les grands problèmes sont, notamment, la multiplicité des prestataires, en particulier dans le secteur privé, et l’emploi atypique. Lily Eskelsen, vice-présidente de la NEA, a évoqué le «virus Ebola de la réforme» pour parler de l’attaque en règle contre l’enseignement public. Le Président Obama a clairement désigné l’éducation et l’enseignement supérieur comme une partie de la solution à la crise. Toutefois, le système répercute les coûts sur les étudiants, induit la précarisation des enseignants et impose des classements rudes des professeurs d’université en fonction de mesures de résultats ou de génération de revenus, le tout accompagné du système simpliste de la carotte et du bâton. La NEA lutte pied à pied contre ces tendances et suit de près leurs effets sur l’éducation. Ilze Trapenciere, LIZDA (Lettonie), a souligné l’abîme qui sépare le langage de la recommandation de 1997 et les coupes sauvages actuelles. Toutefois, même dans ce contexte, il y a eu des réussites, notamment dans les domaines de l’autonomie des universités, des libertés académiques et de la promotion de la femme, bien que les représentants syndicaux soient désormais exclus des conseils des universités, une exclusion qui s’inscrit dans une attaque plus générale contre les syndicats. Carlos Alberto De Feo, CONADU (Argentine), a expliqué que plusieurs États d’Amérique latine sont passés de régimes néolibéraux sévères liés à la répression militaire à des modèles plus populistes. Le nombre d’universités dans la région a connu une croissance spectaculaire, passant de 75 en 1950 à 3 000 aujourd’hui, avec des ratios public-privé très variables. Les syndicats membres de l’IE dans la région se sont récemment réunis à Buenos Aires et commencent à mettre en place un réseau afin de soutenir et d’encourager davantage de syndicats à les rejoindre dans un avenir proche. En Argentine, on recense 140 000 enseignants pour 1 million d’étudiants dans les universités publiques, mais de nombreux enseignants travaillent à temps partiel et moins de 20 % d’entre eux sont syndiqués. 2

ème séance plénière: Bilan des activités de l’IE depuis la 6

ème Conférence internationale sur l’enseignement

supérieur et la recherche – Mise à jour et critiques Ingrid Stage, DM (Danemark), a évoqué l’expérience danoise de la recommandation de 1997 et la difficulté d’obtenir un résultat, à moins qu’il n’y ait des preuves tangibles de la violation de la recommandation. Ingrid a présidé la deuxième séance plénière, au cours de laquelle Harold Tor, coordinateur de l’IE, a résumé le travail réalisé par l’IE en collaboration avec ses affiliés du secteur sur les sujets définis lors de la 6

ème conférence à Malaga.

Les délégués ont identifié les batailles à livrer au niveau national afin de protéger les retraites et d’autres conditions de travail et de résister aux menaces pesant sur les libertés académiques ainsi qu’à l’application de critères économiques et commerciaux dans la vie académique. Monique Fouilhoux, secrétaire générale adjointe de l’IE, s’est réjouie de la manière dont les affiliés ont réagi aux attaques portées contre notre secteur et nos syndicats. Elle a mentionné le rapport de la task-force adopté par le Congrès mondial de l’IE à Porto Alegre en 2004 et a insisté sur le rapport complémentaire (Annexe II des documents de la conférence), préparé par les membres de la task-force en vue de sa présentation à la conférence. Elle espère que les nouvelles actions identifiées à l’annexe II seront acceptées et classées dans l’ordre des priorités en tenant compte de nos ressources limitées, pour être transmises au Bureau exécutif et au Congrès mondial du Cap en juillet 2011.

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La crise économique mondiale a des effets extrêmement variables, certaines régions étant relativement épargnées, voire même en bonne santé, tandis que dans d’autres, le mantra de la «crise» masque l’imposition de dispositions néolibérales sous le prétexte qu’elles constituent des réponses objectives, sans analyse critique de la causalité. Les délégués ont plaidé pour une analyse et un travail d’enquête plus ciblés sur l’enseignement supérieur, suivis par une campagne particulière. Ils ont souligné la nécessité de soutenir le travail syndical de manière ciblée dans l’enseignement supérieur en développant des infrastructures et en réalisant des investissements, notamment dans les pays à revenu moyen et faible, et ont fait remarquer que l’enseignement supérieur joue un rôle d’investissement anticyclique. Les participants sont préoccupés par le fait que les conséquences sociales de la crise entraînent un recul xénophobe, qui revêt diverses formes selon les pays. L’IE doit lutter pour l’équité et pour faire de l’éducation un bien public. 3

ème séance plénière: Réponse à la régionalisation/mondialisation

Manuel Dos Santos, FENPROF (Portugal), a présidé la troisième séance plénière. Dominique Lassarre, UNSA-éducation (France), a exposé les grandes lignes du développement du processus de Bologne, qui a conduit à la création de l’Espace européen de l’enseignement supérieur cette année. Elle a concentré son exposé sur le rôle de l’IE en tant que membre consultatif depuis 2005 et évoqué les possibilités qui s’ouvrent à l’IE grâce aux références positives contenues dans le communiqué ministériel de mars 2010. Il convient de différencier les politiques qui découlent de «Bologne» et les tendances mondiales ou régionales plus générales que les gouvernements nationaux pourraient associer avec Bologne. Elle a conclu en mentionnant que d’autres régions ont tendance à élaborer des cadres du type de celui de Bologne. David Robinson, CAUT/ACPPU (Canada), a présenté les grandes tendances concernant les accords internationaux sur les droits d’auteur et les droits de propriété intellectuelle, en particulier la reconnaissance croissante des idées et de leurs manifestations physiques, jusqu’à l’accord ADPIC de l’OMC en 1994 et les défis posés aux droits d’auteur à l’ère du numérique. L’accord commercial anti-contrefaçon ou ACAC, qui est en cours d’élaboration, a été rendu plus acceptable sous la pression des milieux universitaires et des syndicats. En tant qu’utilisateurs et détenteurs de matériel protégé par les droits d’auteur, les universitaires sont particulièrement bien placés pour agir. Antonio Tinio, ACT (Philippines), a décrit les effets de la marchandisation aux Philippines. Ce pays a dans une large mesure privatisé son système d’enseignement supérieur, lequel a été défini comme un bien privé par la Banque mondiale. Le système d’enseignement supérieur est considéré par le gouvernement comme étant au service des entreprises et des industries exportatrices. Les syndicats de la fonction publique se sont opposés à ces politiques et leurs actions ont été muselées par une législation répressive et des attaques extrajudiciaires violentes. Le président a précisé que ces politiques pourraient être appliquées à l’avenir par d’autres pays également. La discussion a suggéré que depuis 2001, le processus de Bologne est de plus en plus guidé par la concurrence, ce qui est contraire à l’esprit d’origine. Certaines institutions américaines sont néanmoins attirées par le modèle de Bologne et pensent qu’il protège le rôle des universitaires. Les exposés sur Bologne et sur les Philippines sont emblématiques des avenirs très variés qui attendent les universités et leur personnel et de la nature des combats à mener. Les participants espèrent que d’autres régions tireront les leçons de Bologne et que les principes de base pourront être protégés. 4

ème séance plénière: Coopération au développement et renforcement des capacités des syndicats

Bernard Berube, FPPC/CSQ (Canada), a présidé la séance. Monique Fouilhoux a déclaré que c’est la première fois qu’une séance de la conférence est consacrée à ce thème et qu’il est important qu’elle se recentre afin de répondre aux besoins des syndicats des pays en développement en matière d’équité et de viabilité, tout en reconnaissant qu’il s’agit d’un travail de longue haleine. Parallèlement, il convient de soutenir des structures démocratiques et des services efficaces pour les membres. Tous les membres, y compris les femmes et les jeunes, doivent s’engager. Nous

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devons refuser la «realpolitik», qui accorde un soutien financier en fonction de l’intérêt du donateur plutôt que des besoins réels des pays concernés. Pedro Gonzalez Lopez, FECCOO (Espagne), a évoqué les liens historiques entre l’Espagne et l’Amérique latine ou l’Afrique du Nord. La FECCOO a collaboré avec l’IE et ses affiliés ainsi qu’avec d’autres syndicats de ces régions, en insistant sur le Chili et le Maroc et a participé à un projet social au Mali. L’expérience tirée de ces projets est actuellement diffusée. Il est essentiel que les partenaires travaillent sur un pied d’égalité et que la coopération se fonde sur le partage d’idées. Une coopération avec les pays du Bassin méditerranéen a été mise en place. Ces projets peuvent contribuer à faire entendre la voix des syndicats dans les débats politiques à l’intérieur de ces pays et permettent de créer des réseaux syndicaux de soutien dans ces régions. Mohammed Derouiche, SNESup (Maroc), s’est réjoui du soutien apporté par l’IE au renforcement des capacités en Afrique du Nord. Il a parlé d’une conférence sur l’enseignement supérieur qui a rassemblé des syndicats de l’enseignement supérieur du Maghreb et a permis de créer une association forte de 65 000 membres. Il a aussi insisté sur la taille de la région du Maghreb et de l’Afrique et sur les défis à relever. Ainsi, le Maroc restructure actuellement son enseignement supérieur dans le respect du processus de Bologne. Il est urgent de renforcer les capacités syndicales et de mener des actions conjointes afin de permettre aux syndicats de la région de lutter plus efficacement contre les actions des organisations internationales et des entreprises. La mise en place d’une coopération syndicale Nord/Sud et Sud/Sud est la clé d’une réponse durable et humaine aux défis mondiaux que nous devons relever. Au cours de la discussion, l’importance d’élaborer des stratégies communes avec d’autres travailleurs, comme le personnel administratif des universités a été soulignée. Les dirigeants syndicaux sont menacés partout de manière différente et l’éducation est désormais la cible d’une commercialisation rampante. Les syndicats doivent exploiter pleinement l’Internet et les réseaux sociaux afin d’attirer la jeune génération. La qualité du travail de développement repose sur des partenariats. Une mesure concrète que pourraient prendre les syndicats des pays industrialisés consisterait à parrainer des délégués des pays en développement afin qu’ils puissent assister aux conférences sur l’enseignement supérieur et au Congrès mondial de l’IE. De manière générale, il convient de réaliser davantage d’actions de développement dans le secteur de l’enseignement supérieur. Le succès des structures régionales d’enseignement supérieur en Europe pourrait avoir valeur d’exemple pour d’autres régions. 5

ème séance plénière: Équité et inclusivité

Cette séance était également un événement en soi dans la mesure où elle était consacrée à ce sujet fondamental. La séance a été présidée par Alan Whitaker, UCU (Royaume-Uni), qui a insisté sur le caractère fondamental de l’équité pour les valeurs et le travail des syndicats. Penni Stewart, CAUT/ACPPU (Canada), a retracé le travail syndical sur l’égalité des genres depuis vingt ans et sr l’inclusion d’autres groupes visés par l’équité en matière d’emploi dans le corps étudiant et dans le corps enseignant. Cet historique a fait apparaître un nombre bien plus élevé de questions et de revendications et requiert une analyse croisée plus complexe. Le débat dépasse désormais largement l’accès des groupes sous-représentés. Toutefois, le handicap et l’appartenance à un groupe indigène sont toujours des problèmes insuffisamment reconnus. Les membres de groupes marginalisés sont toujours plus exposés à des situations défavorables (comme la précarisation) ou au harcèlement. Les gouvernements prennent la crise économique comme prétexte pour réduire les budgets des programmes d’appui et de promotion de l’équité. Cependant, l’inaction des gouvernements et l’ignorance volontaire de la législation ont été dénoncées par les syndicats par le biais d’audits, de politiques d’action positive et de promotion d’un langage valorisant l’équité. Bien que l’écart salarial entre les hommes et les femmes se soit réduit, il demeure profond pour les groupes raciaux marginalisés. Le problème de classe devient trop souvent invisible dans le débat sur l’inclusivité. Karin Amossa, Lararforbundet (Suède), est revenue sur son expérience personnelle de la discrimination entre les femmes et les hommes, qui a commencé à l’université et lui a fait connaître l’exploitation. L’égalité des genres emporte à la fois des obligations et des droits. Le modèle suédois compte une proportion élevée de femmes qui

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obtiennent de bons résultats à l’école et à l’université. Le fossé entre les genres s’élargit et touche l’enseignement supérieur et le marché du travail. Les hommes posent des choix d’étude et d’emploi traditionnels. Les femmes sont majoritaires dans l’enseignement et l’éducation – 65 % des diplômés sont des femmes et 35 % seulement sont des hommes. Les hommes représentent 50 % des étudiants de troisième cycle, sont fortement représentés dans la recherche et les technologies, mais sont majoritaires dans le corps professoral (20 % seuls sont des femmes). (Il ressort de la discussion que ces pourcentages se retrouvent dans d’autres régions.) Les peuples autochtones ou d’autres facteurs défavorables doivent être étudiés dans les syndicats et leurs propres structures doivent comprendre des membres autochtones, mais il faut également que ces questions soient abordées dans la société au sens large. Dans la pratique, les syndicats peuvent introduire des éléments obligatoires dans les revendications qu’ils adressent aux employeurs et fixer des objectifs d’inclusivité. Au cours de la discussion, les questions des identités multiples et de la montée de la xénophobie ont été mis en lumière. Les femmes sont défavorisées en termes d’accès à la titularisation, qui est à la base d’une promotion à des postes supérieurs. S’il est certain qu’il faut que les femmes soient formées à des fonctions de leadership, des postes doivent véritablement leur être ouverts, tant dans les universités que dans les syndicats. Nous devons reconnaître que, globalement, les questions qui se posent sont celles de la pauvreté et du refus de l’accès à une éducation de base. La privatisation de l’éducation est un autre obstacle majeur à l’équité. Le projet du GEW/SULF/UCU mentionné dans les documents, sur la question de l’équilibre entre la vie professionnelle et privée est une illustration de la manière dont des stratégies syndicales internationales peuvent être élaborées. Il a toutefois été souligné que ce ne sont pas les structures elles-mêmes qui vont apporter le changement. Les syndicats doivent s’occuper du phénomène social du travail non rémunéré, qui est essentiellement effectué par des femmes. 6

ème séance plénière: Classements et responsabilité

Sous la présidence de Marie Blais, FNEEQ-CSN (Québec), cette séance s’est intéressée aux classements et à la responsabilité. Sandra Schroeder, AFT (États-Unis), constate qu’en raison des réductions des dépenses publiques, on observe une tendance inverse à davantage de mesures. Celles-ci s’accompagnent d’une pression pour classer l’enseignement supérieur comme un bien privé et le rapprocher de la formation en le fragmentant en unités tournées vers le profit. Pourtant, nous disposons d’un outil essentiel: la responsabilité. Les mesures relatives à la responsabilité peuvent soutenir la qualité et l’inclusivité. Toutefois, la pression exercée pour ramener la responsabilité au niveau de l’enseignant individuel, qui se produit aux niveaux primaire et secondaire dans certains pays, est un indicateur des tendances futures. La responsabilité professionnelle doit correspondre aux responsabilités des pouvoirs publics, des prestataires et des étudiants. Nous devons défendre vigoureusement une mesure qualitative et nous accommoder d’une mesure quantitative prise de manière adéquate. Mike Jennings, IFUT (Irlande), a souligné que l’évaluation est souvent invasive et destructrice et peut conduire à un accent disproportionné sur ce qui est mesurable. Une augmentation énorme de l’internationalisation de l’enseignement supérieur accroît la demande de classements, mais ne lève pas les doutes qui y sont associés. Les institutions apprennent à «jouer le jeu des classements», qui faussent les structures et les politiques du système. L’OCDE consacre 9,3 millions d’euros au projet AHELO, qui repose sur l’acceptation du principe du classement. Le projet est financé et soutenu par plusieurs gouvernements, mais se caractérise par un manque chronique de transparence. L’IE devrait demander un débat sur l’opportunité du projet AHELO et soulever la question de son véritable objectif. Bert Vandenkendelaere, de l’European Students Union, ESU, (Belgique), s’est inquiété du fait que les coûts d’un système issu du projet AHELO puissent être répercutés sur les étudiants. Par ailleurs, même si ce projet peut générer de nouvelles informations, il pourrait ajouter de la confusion dans un domaine déjà encombré et saper le rôle des structures existantes de contrôle de la qualité. Il a observé que, de façon peu surprenante, les classements tendent à favoriser les établissements plus riches et plus prestigieux. La discussion s’est centrée sur la nécessité d’affiner les mesures et de les rendre plus transparentes. Les classements qui tiennent compte, parmi leurs critères, du montant des droits d’inscription, adoptent manifestement une

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approche hautement politique. Un vrai débat mettrait en évidence les erreurs dans la logique et les aspects pratiques des systèmes proposés, mais la première question à poser est celle de savoir si la mesure traite effectivement d’un problème réel ou si les classements font partie d’une menace insidieuse contre notre vie intellectuelle. Le coût pur et simple des indicateurs de performance et la perte de contrôle des universités en raison de la réduction des fonds publics doivent être comparés à la responsabilité et à la transparence des systèmes existants. Le maintien des classements ne peut être envisagé que dans le cadre de la marchandisation de l’enseignement supérieur. Les syndicats devraient envisager la définition de leurs propres indicateurs. 7

ème et 8

ème séances plénières:

Les participants ont débattu, accru et soutenu les points d’actions mentionnés dans le complément au paquet politique de 2004 (Annexe II des documents de la conférence). Ces points d’actions seront joints en annexe au présent rapport lorsqu’il sera transmis au Bureau exécutif le mois prochain et au Congrès mondial du Cap en juillet 2011. Il s’agit d’un programme ambitieux qui nécessitera l’engagement de ressources de l’IE, mais qui requerra aussi des syndicats représentés à la conférence de collaborer entre eux dans leurs pays respectifs ainsi qu’avec l’IE afin de le traduire dans les faits.

-------------------------------------------------------------- Réflexions personnelles C’était ma dernière conférence de l’IE sur l’enseignement supérieur et la recherche, puisque j’espère prendre ma retraite avant que la prochaine ait lieu. J’ai assisté aux sept conférences qui ont été organisées et j’ai eu le privilège d’être le rapporteur de toutes sauf une (la première, pour laquelle j’ai coécrit le rapport avec le collègue du GEW qui l’a présenté à la conférence). La fonction de rapporteur a été créée afin de traduire le fait que les conférences ne font pas partie de la structure politique formelle de l’IE. Toutefois, nous avons toujours (mais de manière responsable!) été jusqu’au bout de ce qui était possible au sein de l’IE, à tous égards, et cette conférence est devenue l’enceinte dans laquelle la stratégie mondiale des syndicats de l’enseignement supérieur et de la recherche est développée. C’est la preuve de la grande force et du sens d’appartenance à une communauté mondiale des membres de l’IE du secteur de l’enseignement supérieur et de la recherche, lui-même le reflet du caractère international de l’ensemble du secteur, et la conférence n’a fait que croître et se renforcer au cours des douze dernières années. Cette montée en puissance et cette confiance en soi se reflètent dans la qualité de nos débats et dans le fait que nos rapports contiennent désormais des recommandations détaillées d’action, qui démentent notre statut officiel dénué du pouvoir de formuler des résolutions. Au départ, il existait un certain malaise institutionnel au sein de l’IE par rapport au fait que la réunion des syndicats de l’enseignement supérieur puisse déterminer la politique. Nous en tant que groupe et l’IE en tant qu’organisation avons mûri et il est désormais largement admis que les membres représentant l’enseignement supérieur peuvent travailler au sein de la structure de l’IE de manière à répondre à leurs propres besoins, tout en contribuant au rôle et à l’autorité de l’IE en tant que voix de la communauté éducative dans son ensemble. Les conférences de l’IE sur l’enseignement supérieur et la recherche trouvent leur origine dans l’accord conclu entre l’IE et les syndicats de l’ICUTO (la Conférence internationale des organisations de professeurs d’université) à Melbourne en février 1998, qui a conduit à la dissolution de l’ICUTO et à la décision de ses organisations membres de collaborer au sein de l’IE. C’est le même processus qui a vu la création de ces conférences internationales sur l’enseignement supérieur et la recherche en remplacement du comité mondial du secteur de l’enseignement supérieur et de la recherche, institué par l’IE lors de sa naissance en 1993. Bien que ce comité, où Graham McCullough et moi siégions, ait généré une quantité phénoménale de travail et d’idées, il a été reconnu que sa représentativité était trop restreinte pour le rôle qu’il jouait, puisqu’il ne comportait que dix membres désignés. La conférence s’est rapidement profilée comme une voix représentative et faisant autorité dans le secteur. Au cours de

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Internationale de l’Éducation

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cette période, nous avons bénéficié de l’intérêt accru de nos membres pour les questions internationales, en raison à la fois d’une solidarité internationale et d’une reconnaissance de l’importance croissante des tendances mondiales et des politiques internationales pour les développements nationaux et institutionnels. Les syndicats du secteur ont analysé très efficacement les défis posés au système de l’enseignement supérieur et ont élaboré des stratégies pour y répondre. Nous avons été moins bons pour examiner collectivement nos propres méthodes de travail et les faire évoluer afin de relever les nouveaux défis avec des ressources limitées. Nous approchons d’une période de grands changements et nous devrons nous pencher plus sérieusement sur la manière dont nous travaillons. La génération des baby boomers prend sa retraite alors que de nouveaux défis considérables apparaissent. L’IE dans son ensemble subira des pressions pour qu’elle se renouvelle. Dans le secteur de l’enseignement supérieur et de la recherche, nous sommes bien placés pour jouer un rôle de leader dans ces processus de renouvellement en raison de la grande expérience de coopération que nous partageons. Je pense, en particulier, que les syndicats du secteur doivent trouver des solutions pour utiliser leurs ressources plus efficacement et coopérer plus étroitement les uns avec les autres et avec l’IE dans la poursuite d’objectifs communs démocratiquement convenus. Ce processus devra débuter par une réflexion collective sur de nouvelles méthodes de travail. L’un des changements que nous devrons mettre en place consistera à revoir la manière dont les comptes rendus de ces conférences sont établis. Personnellement, je pense qu’il est temps que la conférence adopte aussi complètement que possible une procédure reposant sur l’adoption de rapports et de motions démocratiquement approuvés. Cela dépendra de l’accord de l’IE, mais aussi de la volonté active des syndicats représentés de faire fonctionner le système et de travailler sur cette base à l’avenir. À défaut, vous devrez peut-être faire appel à un volontaire afin qu’il serve de rapporteur la prochaine fois! Quoi qu’il en soit, je suis convaincu que cette conférence se développera encore et encore et sera reconnue comme la voix autorisée du secteur de l’enseignement supérieur au sein de l’IE. J’aimerais conclure en remerciant chaleureusement le personnel de l’IE qui a soutenu notre travail sur l’enseignement supérieur au cours des ans, et ma gratitude va tout particulièrement à Monique Fouilhoux pour son talent exceptionnel de meneuse et l’énorme travail qu’elle a abattu en tant que responsable officielle de l’enseignement supérieur. Je vous remercie.