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1 FERTILISATION 1 D Qualité des composts de déchets verts Les déchets verts sont une source de matière organique qui intéresse les agrobiologistes n'ayant pas d'éleva- ge. De leur côté, les collectivités recherchent des moyens peu coûteux d'élimination des déchets à l'aube de l'interdiction de mise en décharge. Avant de découvrir dans votre prochain numéro des démarches de partenariat entre groupements d'agriculteurs et collectivités locales (Gers), voici les données utiles sur la valeur de ces composts. Composition du compost Eléments fertilisants Contrairement à ce que l'on pense souvent, les déchets verts se rappro- chent plus d'un fumier de bovin que d'une broussaille. Sur onze plate-for- mes françaises (parmi la cinquantaine existant en France en 96), la compo- sition en matière sèche est de 55 %, la teneur en matière organique (sur MS très variables (de 23 à 63 %), le pH de 7 à 8, le C/N proche de 15 (écart de 9 à 28), la teneur en N de 1,5 % sur sec (écart de 6 à 14 kg/t). On notera une teneur élevée en CaO, notable en K 2 0 et dans une moindre mesure en P 2 0s' Les fluctuations saisonnières (sur un même site) sont assez faibles puisque inférieures à 18 % de dispersion par rapport à la moyenne pour le taux de MO, l'azote et le CINo Rapport CIN Les composts des déchets verts sont compostés entre 3 et 6 mois, souvent pour des raisons de place. Les mélan- ges ayant des rapports C/N assez bas, cette durée de compostage semble suffire pour obtenir des C/N de l'or- dre de 15 (les essences riches en *D'après une synthèse de références réalisée par J. Wiart, ingénieur ADEME septembre/octobre 1998 Béatrice CAUWEL (GDAB)* tanins telles que les chênes, châtai- gniers ou pins sont peu abondantes dans les villes, contrairement aux produits de débroussaillage des forêts ou de scieries, qui nécessitent un compostage minimum de 12 à 18 mois). Les indésirables Deux types de polluants sont à crain- dre : les métaux lourds et les désher- bants (haies, gazons ...). La biblio- graphie est bien maigre sur le sujet. L'ADEME dans sa synthèse cite cinq analyses dont les valeurs sont reprises dans le tableau suivant en compa- raison avec la norme des déchets ménagers utilisables en bio (d'après le cahier des charges européen 2092/91 modifié). On constate que les variations de teneurs sur une même plate-forme au cours du temps, dépassent ces four- chettes inter-sites. Les teneurs sont parfois supérieures à la norme bio appliquée aux mélanges compostés de matières végétales. Des analyses sont donc nécessaires (Eco- cert reconnaît systématiquement des besoins en cette matière organique. Une analyse du produit est à réaliser avant épandage (sur budget de l'orga- nisme de certification). Pour les herbicides, aucune donnée n'est disponible en France. Une source américaine* fait mention de résidus de Pentachlor-phénol (désherbant des abords de maisons) et de Chlorcane (insecticide utilisé contre les termites). La rémanence des produits dans le sol étant évaluée à un maximum de 12 mois, les auteurs s'accordent à penser que leur décomposition sera encore plus rapide dans les composts. Sachant notre méconnaissance sur le devenir des métabolites, le débat reste ouvert. Peut-être serait-il utile de réa- liser les analyses sur la matière pre- mière (avant compostage). Valeur agronomique Maturité du compost La question de l'appréciation de la maturité du compost se pose ici com- me pour les autres types de compost. Les C/N de départ et d'arrivée sont des indicateurs. Le test au cresson semble des plus fiables. La valeur-"amendement" La mesure du KI en laboratoire n'étant pas fiable, il reste pour appré- cier la quantité d'humus produit par un amendement "l'indice de stabilité biologique" ou lES, et/ou les essais plein-champ de longue durée. Alter Agri n031

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1 FERTILISATION 1 D

Qualité des composts dedéchets verts

Les déchets verts sont une source dematière organique qui intéresse lesagrobiologistes n'ayant pas d'éleva-ge. De leur côté, les collectivitésrecherchent des moyens peu coûteuxd'élimination des déchets à l'aube del'interdiction de mise en décharge.Avant de découvrir dans votreprochain numéro des démarches departenariat entre groupementsd'agriculteurs et collectivités locales(Gers), voici les données utiles sur lavaleur de ces composts.

Composition du compostEléments fertilisants

Contrairement à ce que l'on pensesouvent, les déchets verts se rappro-chent plus d'un fumier de bovin qued'une broussaille. Sur onze plate-for-mes françaises (parmi la cinquantaineexistant en France en 96), la compo-sition en matière sèche est de 55 %,la teneur en matière organique (surMS très variables (de 23 à 63 %), lepH de 7 à 8, le C/N proche de 15(écart de 9 à 28), la teneur en N de1,5 % sur sec (écart de 6 à 14 kg/t).On notera une teneur élevée en CaO,notable en K20 et dans une moindremesure en P20s'Les fluctuations saisonnières (sur unmême site) sont assez faibles puisqueinférieures à 18 % de dispersion parrapport à la moyenne pour le taux deMO, l'azote et le CINo

Rapport CIN

Les composts des déchets verts sontcompostés entre 3 et 6 mois, souventpour des raisons de place. Les mélan-ges ayant des rapports C/N assez bas,cette durée de compostage semblesuffire pour obtenir des C/N de l'or-dre de 15 (les essences riches en

*D'après une synthèse de référencesréalisée par J. Wiart, ingénieur ADEME

septembre/octobre 1998

Béatrice CAUWEL (GDAB)*

tanins telles que les chênes, châtai-gniers ou pins sont peu abondantesdans les villes, contrairement auxproduits de débroussaillage des forêtsou de scieries, qui nécessitent uncompostage minimum de 12 à 18mois).

Les indésirables

Deux types de polluants sont à crain-dre : les métaux lourds et les désher-bants (haies, gazons ... ). La biblio-graphie est bien maigre sur le sujet.L'ADEME dans sa synthèse cite cinqanalyses dont les valeurs sont reprisesdans le tableau suivant en compa-raison avec la norme des déchetsménagers utilisables en bio (d'après lecahier des charges européen 2092/91modifié).

On constate que les variations deteneurs sur une même plate-forme aucours du temps, dépassent ces four-chettes inter-sites.

Les teneurs sont parfois supérieures àla norme bio appliquée aux mélangescompostés de matières végétales. Desanalyses sont donc nécessaires (Eco-cert reconnaît systématiquement desbesoins en cette matière organique.Une analyse du produit est à réaliseravant épandage (sur budget de l'orga-nisme de certification).

Pour les herbicides, aucune donnéen'est disponible en France. Une sourceaméricaine* fait mention de résidus dePentachlor-phénol (désherbant desabords de maisons) et de Chlorcane(insecticide utilisé contre les termites).

La rémanence des produits dans le solétant évaluée à un maximum de 12mois, les auteurs s'accordent à penserque leur décomposition sera encoreplus rapide dans les composts.

Sachant notre méconnaissance sur ledevenir des métabolites, le débat resteouvert. Peut-être serait-il utile de réa-liser les analyses sur la matière pre-mière (avant compostage).

Valeur agronomiqueMaturité du compostLa question de l'appréciation de lamaturité du compost se pose ici com-me pour les autres types de compost.Les C/N de départ et d'arrivée sontdes indicateurs. Le test au cressonsemble des plus fiables.

La valeur-"amendement"La mesure du KI en laboratoiren'étant pas fiable, il reste pour appré-cier la quantité d'humus produit parun amendement "l'indice de stabilitébiologique" ou lES, et/ou les essaisplein-champ de longue durée.

AlterAgri n031

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D 1FERTILISATION 1Teneur en éléments traces métalliques

AnalyseADEME sur cinq Normes européennescomposts de déchets verts cahier des charges bio 2092/91

Oj-U O~40-60 7015-55 2550-80 45100-200 2000,5-1 0,430-80 70

CadmiumCuivreNickelPloIllbZincMercureChrome

Les travaux de M. Linères* situe lecompost de déchets verts comme unproduit à très haute valeur isohumi-que (à titre indicatif, les IBS de quel-ques produits végétaux: pailles, 10 à30 % ; écorces de feuillus, 40 à 80% ; compost déchets verts, de 50 à 80% ; écorces de résineux, 70 à 100 %).

Des essais en plein-champ sontmenés sur maïs depuis 1992 par laChambre d'Agriculture du Maine-et-Loire et l'ADEME.

Cet essai montre que l'apport en azoteet matière organique de 20 t de com-post de déchets verts est équivalent à40 t de fumier de bovin. L'effet ferti-lisant est par contre moindre. En ren-dement-épis, cela se traduit au boutde quatre ans par une différence nonsignificative entre le terrain et lecompost de déchets verts, alors que lefumier permet de passer de 3,8 t/ha à5,6 t/ha. La première année d'apportl'efficience de l'azote du compost dedéchets verts est de 6 % contre 35 %pour le fumier de bovin, et en quatriè-me année d'apports réguliers cetteefficience est de 13 % pour lesdéchets verts pour 22 % pour lefumier de bovin.

Pour le compost de fumier, une aug-mentation très nette de l'efficiencedes apports est constatée lorsque lesapports sont réguliers sur de nom-breuses années (travaux des Pays-Bascités par l'ITCF*). La poursuite deces essais pendant quatre ans confir-mera peut-être cette amlioration del'efficience des composts de déchetsverts épandus régulièrement.

Ces essais en plein-champ montrentun maintien du taux de matière orga-nique et de la CEC sur quatre ans parrapport au témoin zéro alors que lateneur en matière organique dutémoin ammonitrate baisse de 1,5 à1,3 % et la CEC de 39 à 33 MEQ/kg.

A noter que des analyses BRDA réa-lisées au bout de 4 ans mettent par

contre en évidence sur les parcellesrecevant du déchet vert une augmen-tation de l'humus stable et un main-tien des matières organiques fugitivesà leur niveau très bas. Ceci expliquele faible effet fertilisant de l'apport.Le fumier provoque une augmenta-tion plus faible de l'humus stablemais plus élevée des matières organi-ques fugitives, ce qui explique l'effetplus direct sur les rendements cesquatre premières années.

Rappel réglementaire

•Le cahier des charges européen prévoitdes normes pour les composts dedéchets ménagers triés et compostés,dans un. système de collecte fermé etcontrôlé, accepté par l'état-membre. Cesystème n'existe pas encore en Francedonc ce type de compost ne peut êtreutilisé.

Le. compost de déchets verts est doncconsidéré comme un mélangecompostéde matières végétales. Son utilisationest soumise à l'approbation de l'organis-me de. contrôle. Bcocert'reconnait systé-matiquement les besoins de cette matiè-re organique et applique les normes desdéchets ménagers. Une analyse est àréaliser avant l'épandage (sur budget del'organisme de certification). A. QualitéFrance, un dossier comprenant la com-position et des analyses est à SOumettreparle fabricant du compost.

potentielles" contre la matière pre-mière et la prise en charge par la col-lectivité des coûts de transport, debroyage et de retournement.

L'ADEME fait des propositions four amener la filière du compostagemunicipaà sa maturité

Le colloque national sur le compostage des déchets organiques municipaux, organisé parl'ADEME à Amiens les 28 et 29 avril 1998, a rassemblé plus de 400 personnes. Il a per-mis de faire le point sur les enjeux que représente cette fi 1ière et sur les perspectives deson développement. La grande diversité des opérations présentées a illustré les possi-bilités et les voies d'adaptation du compostage aux contextes locaux, au profit d'unegestion de proximité. Cette souplesse alliée à l'importance des gisements de déchetsconcernés, constitue l'un des intérêts majeurs de ce mode de traitement et de valorisation.

En conclusion, Pierre Radanne, président de l'ADEME; a annoncé une poursuite del'action de l'Agence afin d'amener la filière à maturité d'ici 2002. Il a proposé septaxes de travail: faire progresser les textes réglementaires et aboutir à un accord d'ob-jectifs de qualité nationaux; promouvoir une démarche de qualité au niveau des opéra-tions ; porter la filière dans le cadre de la révision des plans départementaux: accom-pagner le développement d'opérations nouvelles et exemplaires; évaluer les opérationset diffuser les retours d'expériences; organiser localement des clubs rassemblant tousles acteurs concernés; faire le point des avancées tous les deux ans.

Contact: Nicolas Noyon et Denis Maraud, Tél. 0241204120

ConclusionLes déchets verts sont une sourceappréciable d'humus indispensablepour les systèmes de productionsvégétales. La qualité des matièrespremières étant variables, des analy-ses à la source devraient permettred'éliminer les quelques lots pollués.

Ce travail d'objectivation des risquesde pollution est à faire pour toutes lessources de matières organiques utilesen bio. Vaste programme pour lacommission sol-MO de l'ITAB ?

Rendez-vous dans votre prochainnuméro d'Alter Agri : dans le Gers eten Lot-et-Garonne, où des agrobio-logistes troquent une aire de compos-tage et des "surfaces d'épandage

Références- Jacques Wiart, 1994., Qualité, matu-rité et efficacité agronomique descomposts de déchets verts : synthèsede références. ADEME, Angers

- Hegberg B-A, )91)1, Setting stan-dards for yard waste compost.Biocycle, Febmary 91, 58-61.- Linerès et al, 1993, Caractérisation

" de la sta~iité biologique des apportsorganiques par l'analyse de terre.COMIFERp. 159-168.

- Chambre. d'Agriculture du Maine-et-Loire. ADEME, 1995. 4e année d'essaisagronomiques de plein-champ d'uncompost de. déchets verts.

• Engrais de ferme, ITCF,35 p.

septembre/octobre 7998