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RECHERCHE / CANCER NEXUS 96 40 janvier-février 2015 Mirko Beljanski dans son laboratoire à Châtenay-Malabry en 1982.

recherche c a n c e r - beljanski.info · procès-verbal des objets et des documents saisis ne sera jamais remis aux ... associé du professeur Severo Ochoa, Prix Nobel de médecine

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Mirko Beljanski dans son laboratoire à Châtenay-Malabry en 1982.

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Traitement du cancer : quatre études récentes menées aux États-Unis ont

confirmé les résultats obtenus par Mirko Beljanski. Il est resté vingt-huit ans à l’Institut Pasteur, mais a été entravé, persécuté, et l’on a tout fait pour détruire ses années de recherches et les produits qu’il avait mis au point. Focus sur ses découvertes et un scandale à la française.

réhabiliter Beljanski ?

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l e 9 octobre 1996, à 6 heures du matin, une vaste opération poli-cière dont le nom de code est ISA 2 commence. Quatre-vingts

gendarmes et policiers, dont des membres du GIGN (Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale), sont mobilisés près du village de Saint-Prim (Isère). En quelques minutes, le lieu cible, le laboratoire du docteur en biochimie Mirko Beljanski, est investi. Dans les locaux, les dossiers, la cor-respondance, les cahiers d’expérience ainsi que le matériel – matières pre-mières, échantillons pour analyse, ordinateurs, etc. – sont emportés (aucun procès-verbal des objets et des documents saisis ne sera jamais remis aux intéressés). Comme une lettre anonyme dénonçait des caches secrètes, les murs sont auscultés et les caves sondées. Des scellés sont posés partout, seule une partie du laboratoire reste accessible. Au fur et à mesure de leur arrivée, les membres du personnel sont arrêtés et interrogés. Certains sont conduits au dépôt de Vienne pour être interrogés et quelques-uns mis en garde à vue.Mirko Beljanski, 73 ans, est arrêté, menotté et conduit à Paris pour être mis au dépôt. Le même jour et à la même heure, Monique Beljanski, qui se trouve dans la capitale, reçoit la visite de quatre policiers qui fouillent tout, sai-sissent des papiers, des documents, du matériel informatique et des gélules.

Harosur le savant

hérétique !

Mirko Beljanski est né le 27 mars 1923 à Turija (Yougoslavie) d’un père

mécanicien et d’une mère couturière. Il obtient une bourse de l’OMS pour poursuivre ses études, et choisit pour ce faire la France (il s’y installe en 1945 et obtiendra la nationalité française en 1966).En 1948, il entre à l’Institut Pasteur dans le service de chimie biologique du professeur Michel Macheboeuf. Il y prépare sa thèse de doctorat d’État : Étude de souches bactériennes résistantes à des antibiotiques ; comparaison avec des souches sensibles de même espèce. En 1951, il devient docteur ès sciences et est engagé comme biologiste et chercheur au CNRS pour travailler à l’Institut Pasteur. Au CNRS, il sera successivement : attaché, maître, directeur de recherche, puis directeur de recherche honoraire (à sa retraite en 1988).

Toujours en 1951, il épouse Monique, fille du professeur René Lucas. Elle passe un diplôme de technicienne de laboratoire pour travailler avec son mari.Août 1952, décès du professeur Macheboeuf, qui est remplacé par Jacques Monod, ce qui marquera le début des difficultés pour les époux Beljanski.De 1956 à 1958, Beljanski travaille à l’université de New York comme chercheur associé du professeur Severo Ochoa, Prix Nobel de médecine (1959) pour ses découvertes sur la synthèse des acides ribonucléique et désoxyribonucléique.En 1960, il reçoit avec Roger Monier le prix Charles-Léopold-Mayer de l’Académie des sciences de l’Institut de France pour leur travail sur le rôle de l’ARN dans le processus de synthèse des protéines.1971, Jacques Monod devient directeur de l’Institut Pasteur et le restera jusqu’à

Dates clés de la vie de Beljanski

Un matin d’octobre 1996, une opération

policière d’envergure nationale est lancée contre Mirko Beljanski…Le point d’orgue d’une carrière marquée par un véritable harcèlement institutionnel.

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Le soir, elle est conduite à Fontai-nebleau dans une petite maison de campagne, celle de ses parents. Une lettre anonyme affirmait qu’il s’y trouvait une unité de fabrication cachée dans la cave, mais « il n’y avait que des araignées », commente Monique Beljanski1, qui fut interro-gée toute la nuit, toute la journée du lendemain et gardée au dépôt de Créteil la nuit suivante.

Même les malades…Toujours ce 9 octobre, une soixan-taine de perquisitions et de saisies sont effectuées simultanément dans toute la France. La police fait irrup-tion au domicile de malades pour saisir livres, cassettes, documents, gélules… Certains patients sont in-terrogés au commissariat une bonne partie de la nuit, tel ce malade âgé de 75 ans, souffrant d’un cancer (dix-huit ans de recul pour ce pre-mier cas traité par Mirko Beljanski), et à qui l’on confisque ses gélules et qu’on relâche en pleine nuit. De même pour le président de l’asso-ciation CCS (Collectif cancer sida), Marc Crouzier, qui, bien que grave-ment malade du sida, sera détenu dix heures. Ce type d’expérience est déjà éprouvant pour des personnes en bonne santé, que dire pour des malades !Quant à Mirko Beljanski, après 48 heures de garde à vue, il est placé sous contrôle judiciaire, son pas-seport est confisqué, et il lui est interdit de parler de ses produits, de publier des articles scientifiques, de rencontrer des journalistes, d’as-sister à des colloques scientifiques, etc. On demande au couple Beljanski une caution de 350 000 francs. Mirko vend ses brevets à sa fille, avocate aux États-Unis, via Natural Source, pour payer sa caution. Il assura éga-lement ainsi la survivance de ses brevets.

Parcours d’un combattantL’opération ISA 2, même si elle est un épisode déterminant dans la vie de Beljanski, parce qu’à sa suite le cher-cheur a déclaré une leucémie myé-loïde aiguë dont il décédera deux ans plus tard, n’a pas été le seul de ses obstacles. Elle a été précédée de

sa mort en 1976. François Gros lui succédera jusqu’en 1981.En 1972, Mirko Beljanski et Pierre Manigault publient leur découverte sur la transcriptase inverse de l’ADN.En 1975-1976, Beljanski met au point l’Oncotest, qu’il présente en 1979.En mars 1978, Monique Beljanski (alors aide-chimiste et bactériologiste au CNRS), écœurée par la façon dont son mari est traité (on lui interdit l’accès à divers services), a une altercation avec Michel Goldberg, conseiller scientifique de l’Institut Pasteur. Le lendemain, l’accès à l’Institut Pasteur lui est interdit et Mirko Beljanski est sommé de quitter son laboratoire à la fin du mois.De 1978 à sa retraite professionnelle en 1988, Mirko Beljanski travaille au sein de la faculté de pharmacie de Châtenay-Malabry, qu’il a rejointe avec

une équipe de quatre personnes, dont son épouse. On met à leur disposition deux grandes salles, mais aucun crédit, si ce n’est les 3 000 francs annuels alloués par le CNRS.En 1980, Beljanski met au point un anticancéreux, le PB-100, issu du pao pereira.À partir de la fin de 1986, Beljanski poursuit ses travaux comme directeur scientifique du Centre de recherche biologique (CERBIOL), et il est président du Centre d’innovations, de recherches et d’informations scientifiques (CIRIS) à Saint-Prim dans l’Isère, des laboratoires privés créés pour son activité.Mirko Beljanski décède le 27 octobre 1998. Il laisse une œuvre importante recensée dans 133 publications scientifiques, la plupart dans des revues à comité de lecture.

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décennies de freins et d’empêche-ments qui ont commencé en 1953, à l’Institut Pasteur, quand Jacques Monod devint le supérieur direct de Beljanski. Que ce soit avec Monod ou avec François Gros, qui lui succédera en 1976, et qui est tristement célèbre pour son rôle actif dans l’affaire du sang contaminé2, Beljanski a affronté des restrictions de toutes sortes (en collaborateurs, en espace, en équipe-ment, en budget, etc.), mais aussi des intimidations, du chantage, des cam-pagnes de dénigrement, des mises en accusation, et ainsi de suite. Freiner sa recherche ne suffisait pas, il fal-lait aussi étouffer ses résultats ; pire, les faire disparaître. Le 7 août 1997, dans la conclusion de son procès-ver-bal de synthèse3, l’officier de police judiciaire Kentzinger écrit : « Il serait souhaitable que les dossiers médicaux saisis ainsi que les documents relatifs à ces essais, les courriers des malades, les fichiers (adhérents-malades) soient détruits pour éviter une réitération des faits, mais surtout pour garantir le secret médical et ainsi respecter la confidentia-lité de ces renseignements. » Alors que, comme le fait remarquer Monique Beljanski4, la fonction de cet officier

de police est de veiller à la conserva-tion des preuves, lesquelles étaient constituées de documents fournis par les malades eux-mêmes, qui ne sont nullement tenus au secret médical. Plus tard, en février 2001 au tribunal

de Créteil, en conclusion d’un procès pour exercice illégal de la médecine, la condamnation consistera en 18 mois de prison avec sursis pour Mo-nique Beljanski, deux cent mille francs d’amende et la destruction des carnets scientifiques de Mirko Beljanski, ainsi que des témoignages des malades et des pièces du dossier d’autorisation de mise sur le marché (AMM) !Cependant, le 27 septembre 2002, le jugement du tribunal d’appel de Paris annule toutes les poursuites (fraude sur les produits, fraude fiscale, etc.) autres que l’exercice illégal de la méde-cine et de la pharmacie, mais la France sera condamnée. En effet, le 7 février 2002, la Cour européenne des droits de l’homme, dans un arrêt rendu à l’una-nimité et intitulé « Beljanski contre France », a condamné cette dernière pour ne pas avoir respecté un délai raisonnable qui aurait dû permettre à Mirko Beljanski de faire reconnaître la valeur scientifique de ses travaux.Comme le fait remarquer Monique Beljanski : « Ce qui est frappant dans l’œuvre de la justice française, c’est la volonté concertée non pas de faire jus-tice mais de faire disparaître l’œuvre de Mirko5. »

« Ce qui est frappant dans l’œuvre de la justice française, c’est la volonté concertée non pas de faire justice mais de faire disparaître l’œuvre de Mirko. »Monique Beljanski

Qu’a donc fait cet homme pour méri-ter un tel traitement ? Il a, en premier lieu, découvert la transcriptase in-verse de l’ADN chez la bactérie, autre-ment dit l’ARN6 peut transmettre de l’information à l’ADN. Mirko Beljanski et Pierre Manigault7 publient cette découverte en 19728 alors que Jacques Monod avait écrit deux ans aupara-vant dans Le Hasard et la Nécessité : « Il n’est ni observé, ni d’ailleurs concevable, que de “l’information” soit jamais trans-férée dans le sens inverse, c’est-à-dire de protéine à ADN. Cette notion repose sur un ensemble d’observations si complètes et si sûres, aujourd’hui, et ses conséquences en théorie de l’évolution notamment sont si importantes, qu’on doit la considérer comme l’un des principes fondamentaux de la biologie moderne. » Ce principe fondamental, Monod ne supportait pas qu’on le remît en cause. Il fit tant pour que la trouvaille de Beljanski soit occultée que c’est à des chercheurs

américains, principalement Howard Temin, que l’on attribue l’entière pa-ternité de cette découverte. Ce der-nier a, en effet, découvert quelques mois avant Beljanski la transcriptase inverse, mais chez les virus, un orga-nisme plus simple et surtout plus loin de l’homme que la bactérie. En 1975, Temin reçoit le prix Nobel de phy-siologie ou médecine pour sa décou-verte. Cependant, le 7 décembre 1989, il publie une note dans la revue Nature (volume 342, p. 624) pour déclarer que c’est Mirko Beljanski le véritable découvreur de la transcriptase in-verse. Il faut dire que, si la France ne voulait rien entendre des travaux du chercheur, ils recevaient à l’étranger un bel accueil, notamment aux États-Unis et au Japon…

Deuxième pavé dans la mareAlors que les recherches sur le can-cer étaient cloisonnées, chaque

chercheur restant dans sa spécialité, et se portaient sur les variations de séquençage de l’ADN, Beljanski prit une voie différente. Avec son équipe, il a d’abord rassemblé, pour les com-parer, une vaste gamme d’ADN de cellules saines et de cellules cancé-reuses provenant de plantes, d’ani-maux et d’humains. En analysant les ADN sains et les ADN cancéreux de cellules provenant de tissus de même catégorie (poumon sain/poumon cancéreux, etc.), il fit une consta-tation d’importance : tous les ADN cancéreux, quelle que soit leur pro-venance (humaine, animale ou végé-tale), sont, comme Beljanski l’a qua-lifié, « déstabilisés », car beaucoup des liaisons hydrogène qui main-tiennent entre elles les hélices de l’ADN sont rompues sur une certaine longueur. De ce fait, des portions de brins d’ADN simple se retrouvent à nu, exposées à toutes sortes de

Une vie de découvertes

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molécules, étrangères ou produites par l’organisme, qui accentuent la déstabilisation. Cette accentuation de la déstabilisation constitue la pre-mière étape de la cancérisation de la cellule ou peut mener à d’autres maladies. Il faut comprendre que Beljanski a découvert que la diffé-rence entre ADN sain et cancéreux ne réside pas nécessairement dans une mutation de la séquence de la chaîne des nucléotides (la structure primaire, qui forme les hélices de l’ADN), mais dans une déstabilisation des liaisons entre deux nucléotides se faisant face dans chacune des hélices (la structure secondaire).

Un test innovantBeljanski constate également qu’un ADN déstabilisé ne donne naissance qu’à des ADN déstabilisés, mais sur-tout qu’il se reproduit beaucoup plus vite. En effet, les agents désta-bilisants, en écartant les brins d’ADN, exposent des zones d’initiation nor-malement inactives, multipliant les occasions de réplication. C’est ainsi que Beljanski met au point un nou-veau test, l’Oncotest, qu’il présente en 19799 et qui est radicalement dif-férent du test en vigueur d’Ames. Jusqu’au début des années 70, le seul moyen dont on disposait pour éva-luer le potentiel cancérogène d’une substance consistait en des tests sur

les animaux (longs, coûteux et diffici-lement extrapolables à l’homme). En 1973, Bruce Ames, de l’université de Californie (Berkeley, États-Unis), met au point un test biologique fondé sur l’idée, dominante à l’époque, que les cancers provenaient d’une mutation génétique qui transforme un ADN normal en ADN tumoral. Cependant, Ames lui-même s’était rendu compte que 20 % des cancérogènes connus ne sont pas mutagènes. Le test de Beljanski, qui ne se fonde pas sur la mutagenèse des cancérogènes, mais sur la cancérogenèse elle-même, per-met de détecter tous les types de cancérogènes. Sur le plan pratique, ce test consiste à comparer la répli-cation in vitro de l’ADN de cellules saines et de cellules cancéreuses d’un organe de même type en présence de la substance à tester. Si le produit est cancérogène, la réplication de l’ADN cancéreux se fait cinq à dix fois plus rapidement que celle de l’ADN sain.Ce test, outre sa rapidité (deux à quatre heures contre une semaine environ pour le test d’Ames) et le peu de produits qu’il nécessite, est très sensible. Il peut déceler un centième de microgramme d’aflatoxine B1, un dangereux cancérogène capable de provoquer des cancers du foie, et pointe des substances (méthionine, actinomycine D ou bléomycine) qui sont identifiées comme cancéro-gènes par les tests sur l’animal, mais échappent à celui d’Ames. Il a égale-ment confirmé que les hormones sté-roïdes, qui ne donnent pas de réponse positive dans le test d’Ames, peuvent, quand elles sont présentes en quan-tités supérieures aux taux physiolo-giques, se comporter comme des can-cérogènes vis-à-vis de leurs organes cibles (sein ou ovaire, par exemple) ; il indique également si une mo-lécule est « neutre » (elle n’agit pas sur la réplication de l’ADN) ou toxique tout en étant non cancéro-gène (elle inhibe alors l’action de l’ADN polymérase10, ce qui stoppe la réplication). Ce test n’a pourtant pas retenu l’attention des labora-toires parce qu’il détecte trop de toxiques, ce qui est risqué pour les intérêts de trop nombreuses indus-tries, y compris pharmaceutiques.

Alors que les recherches sur le cancer étaient cloisonnées, chaque chercheur restant dans sa spécialité, et se portaient sur les variations de séquençage de l’ADN, Beljanski prit une voie différente.

1 molécule d’ADN

2 molécules d’ADN

identiques

Complexe enzymatique de réplication

nucléotides précurseursSchéma de réplication d’ADN

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Jamais deux sans troisBeljanski ne s’arrête pas là. Après avoir lu dans une revue scientifique un article dans lequel deux cher-cheurs rapportaient avoir trouvé des traces d’oligonucléotides (ARN très courts) sur les molécules d’ADN ve-nant d’achever leur réplication, le chercheur se dit que la présence de ces ARN-fragments est probablement utile à la réplication de l’ADN. C’est ainsi qu’il montre que le segment terminal de l’ARN-fragment est dé-terminant pour catalyser la dupli-cation d’ADN et qu’il met au point la fabrication, à partir de la bactérie Escherichia coli K-12 (non pathogène et hôte de l’intestin humain), de petits fragments d’ARN (sous le nom de RLB – pour Remonte leucocytes Beljanski – ou Real Build) capables d’amorcer la synthèse des globules blancs et des plaquettes tels qu’en produit un corps

en bonne santé11. Ce produit s’avé-ra très efficace pour restaurer les défenses des patients immunodépri-més ou pour rétablir la formulation sanguine des malades sous chimio-thérapie et radiothérapie. L’Institut Mérieux travailla quatre ans avec Beljanski sur les ARN-fragments RLB, mais la fusion entre l’Institut Mérieux et l’Institut Pasteur sonna le glas de cette collaboration, alors qu’un bref essai clinique avait déjà eu lieu12.

Anticancéreux non toxiquesDepuis longtemps, Beljanski traque les molécules anticancéreuses. En toute logique, il s’était dit que si des substances stimulent sélective-ment la réplication des ADN cancé-reux, il doit exister des molécules qui les inhibent et empêchent leur réplication… tout aussi sélectivement. Grâce à l’Oncotest, Beljanski trouve effectivement des anticancéreux dans deux plantes : Rauwolfia vomi-toria (une plante à fleurs d’Afrique) et pao pereira (un arbre d’Amazonie). En 1980, il met au point le PB-100 (actuellement Pao V FM), issu du pao pereira, dont une molécule (la flavopé-réirine) possède, en plus d’un pouvoir anticancéreux, un pouvoir antiviral sur les virus dont le génome est un ARN (le VIH, par exemple). Cette mo-lécule est également capable de fran-chir la barrière hémato-encéphalique pour agir uniquement sur les cellules cancéreuses. En 1994, François Mit-terrand, bien que déjà très affaibli par son cancer de la prostate, son opé-ration et ses traitements, commence à prendre du PB-100. Il pourra, avec les forces retrouvées, aller jusqu’au bout de son mandat, et même un peu au-delà. L’existence de cet illustre malade protégera un temps Beljanski de toute attaque.Bien que les travaux de Beljanski aient démontré l’absence de toxicité de ses produits, on lui rétorqua qu’un médi-cament non toxique ne pouvait être efficace. Dans cette ligne, en 1989, Claude Evin, ministre de la Solidarité et de la Santé, a écrit à propos des produits de Beljanski : « Il faut savoir que tout médicament efficace a des effets secondaires. Il n’y a absolument aucune exception à cette règle13. » Qu’il soit pos-sible de photographier et de filmer la flavopéréirine ou l’alstonine (extraite de Rauwolfia), naturellement fluores-centes, pénétrant dans le noyau et

En 1994, François Mitterrand, bien que déjà très affaibli par son cancer de la prostate, son opération et ses traitements, commence à prendre du PB-100. Il pourra, avec les forces retrouvées, aller jusqu’au bout de son mandat, et même un peu au-delà.

Mitterrand, le plus célèbre patient à avoir opté pour le traitement de Beljanski.

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les nucléoles des cellules cancéreuses alors qu’elles n’entrent pas dans les cellules saines14 n’infléchissait pas les certitudes de tout ce beau monde. Cette sélectivité a des explications biochimiques. L’une d’elles est que la flavopéréirine et l’alstonine sont des alcaloïdes qui possèdent un azote chargé positivement et un azote char-gé négativement, ce qui leur donne la capacité de reconnaître la majo-rité des cellules cancéreuses, dont la membrane est chargée négativement, alors que la membrane des cellules saines est très généralement chargée positivement.

Résister aux rayonsLe ginkgo biloba appartient à la plus ancienne famille d’arbres connue. Il serait apparu il y a plus de 270 millions d’années en Chine. Au Japon, il y avait des ginkgos biloba à Hiroshima et Nagasaki. Après avoir été détruits, ces arbres ont repoussé spontanément. Leurs racines avaient donc résisté aux rayons. Beljanski démontra que cer-taines des molécules du ginkgo biloba à feuilles dorées, différent des extraits traditionnels de ginkgo vert, étaient des régulateurs des enzymes cellu-laires et des initiateurs du processus naturel de réparation15, contrecarrant ainsi le dérèglement des enzymes in-duit par des situations de stress cellu-

laire, comme lors d’une radiothérapie. Grâce à un contrat avec l’armée, qui a demandé à Beljanski de ne pas publier sur le sujet (secret défense !), Mirko put également étudier l’effet des ra-diations et de la radioprotection, et il démontra que les ARN-fragments (Real Build) et un extrait du ginkgo biloba à feuilles dorées permettent de se prémunir en grande partie des effets nocifs des radiations (effet pré-ventif et curatif)… ⚗

Kim-Anh Lim

1. Beljanski Monique, Mirko Beljanski, Chronique d’une « fatwa » scientifique, Guy Trédaniel Éditeur, 2003, p. 206.2. Le 9 mai 1985, François Gros – qui n’est plus directeur de l’Institut Pasteur (depuis 1981), mais conseiller du Premier ministre Laurent Fabius – demande, lors d’une réunion interministérielle qu’il préside à Matignon, de retarder au Laboratoire national de la santé l’enregistrement du test de dépistage du VIH de l’entreprise pharmaceutique étasunienne Abott (histoire de permettre la finalisation du test Élisa, de Sanofi Diagnostics-Pasteur). Cet enregistrement sera accordé le 23 juillet 1985, soit sept mois après la demande du laboratoire étasunien (déposée le 8 janvier 1985). Sept mois durant lesquels les contaminations se poursuivront au rythme de cent à deux cents par mois selon les estimations de l’Institut national de veille sanitaire.3. Procès-verbal de synthèse numéro 470/96, en date du 7 août 1997, rédigé par l’officier de police judiciaire Kentzinger, chargé de la commission rogatoire nº 215/11/1994.4. Beljanski Monique, op. cit., p. 218.5. Idem, p. 216.6. L’ARN, l’acide ribonucléique, est une molécule présente chez pratiquement tous les êtres vivants, y compris certains virus. L’ARN est très proche chimiquement de l’ADN et il est d’ailleurs en général synthétisé dans les cellules à partir d’une matrice d’ADN dont il est une copie. Les cellules vivantes utilisent en particulier l’ARN comme un support intermédiaire des gènes pour synthétiser les protéines dont elles ont besoin.7. Pierre Manigault (1906-1996), biologiste français, fut chef de laboratoire, puis chef du service de microphotographie et d’oncologie végétale de l’Institut Pasteur (1948-1973) avant de travailler au laboratoire CNRS de physiologie cellulaire végétale de Gif-sur-Yvette (1976-1994).8. M. Beljanski, P. Manigault, « Genetic transformation of bacteria by RNA and loss of oncongenic power properties of Agrobacterium tumefaciens. Transforming RNA as template for DNA synthesis », Sixth Miles International Symposium on Molecular Biology. Éd. F. Beers and R.C. Tilghman. The Johns Hopkins University Press, Baltimore,

1972, p. 81-97.9. M. Beljanski, « Oncotest: a DNA assay system for the screening of carcinogenic substances ». IRCS Medical Science, 1979, 7, p. 476.10. L’ADN polymérase est un ensemble d’enzymes qui participe à la réplication de l’ADN, c’est-à-dire à la copie des chromosomes. L’ADN polymérase intervient pour produire deux molécules identiques à la molécule de départ, mais elle ne peut qu’ajouter des nucléotides (molécules qui constituent la base de l’ADN) en complémentarité de ceux déjà existants. Elle est incapable de créer à elle seule un brin d’ADN.11. M. Beljanski, M. Plawecki, P. Bourgarel, M. S. Beljanski, « Nouvelles substances (R.L.B.) actives dans la leucopoïese et la formation des plaquettes », Bull. Acad. Nat. Med., 1978, 162, volume n° 6, p. 475-781, et M. Beljanski, « Overview: BLRs as Inducers of In Vivo Leucocyte and Platelet Genesis ». Deutsche Zeitschrift für Onkologie, 24, 2, 1992, p. 41-46.12. D. Donadio, R. Lorho, J. E. Causse, T. Nawrocki, M. Beljanski, « RNA Fragments (RLB) and Tolerance of CytostaticTreatments in Hematology: A Preliminary Study about Two Non-Hodgkin Malignant Lymphoma Cases ». Deutsche Zeitschrift für Onkologie, 23, 2, 1991, p. 33-35.13. Beljanski Monique, Mirko Beljanski, Chronique d’une « fatwa » scientifique, Guy Trédaniel Éditeur, Annexe n° 21, page 260.14. Toute modification de liaison chimique induit une modification du spectre d’absorption de la lumière visible ou ultraviolette. Le docteur en biochimie qu’est Beljanski sait cela. S’appliquant à mettre en évidence ce point, il constate que l’ADN d’une cellule déstabilisée a une absorption de l’ultraviolet plus élevée de 30 % que celle de l’ADN d’une cellule saine. Cette hyperchromaticité permet de suivre l’évolution des cellules cancéreuses ou de distinguer les cellules cancéreuses des cellules saines.15. J. E. Causse, T. Nawrocki, M. Beljanski, « Human Skin Fibrosis RNase Search for a Biological Inhibitor-Regulator ». Deutsche Zeitschrift für Onkologie, 26, 5, 1994, p. 137-139.

Bien que les travaux de Beljanski aient démontré l’absence de toxicité de ses produits, on lui rétorqua qu’un médicament non toxique ne pouvait être efficace.

N o t e s

Ginkgo biloba à feuilles dorées.

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en mai 2014, une étude, la quatrième publication de la collaboration scientifique

entre le centre médical de l’université du Kansas (University of Kansas Medical Center, États-Unis) et la Fondation Beljanski – qui, pour toutes les expériences dont nous allons parler ici, fournit les gélules manufacturées par Natural Source LTd. (il existe de nombreuses contrefaçons) – confirme les recherches de Mirko Beljanski et les approfondit1.

Cellules humaines Cette étude porte sur l’efficacité de l’extrait de Rauwolfia vomitoria (sans réserpine2) in vitro et in vivo sur les cellules cancéreuses du pancréas, « l’une des malignités les plus létales, avec des possibilités de traitement très limitées ». Elle met en lumière l’efficacité sélective de l’extrait de Rauwolfia vomitoria employé seul ou en synergie avec la gemcitabine, la chimiothérapie privilégiée du cancer du pancréas, et l’innocuité de cet extrait sur les cellules saines.« La gemcitabine, en tant qu’agent unique, reste le traitement de première ligne du cancer du pancréas métastatique, lit-on dans le rapport d’étude. La gemcitabine est efficace à des stades précoces de la maladie. Toutefois, elle a peu d’impact sur la survie globale moyenne pour les patients ayant une maladie localement avancée ou métastatique. »Pour cette étude, quatre groupes de souris auxquelles on avait greffé des cellules humaines du pancréas résistantes à la gemcitabine ont été traités respectivement avec une solution saline – pour le groupe de contrôle –, la gemcitabine seule, l’extrait de Rauwolfia seul et l’association gemcitabine et extrait de Rauwolfia. Le résultat est sans appel : à l’autopsie, la gemcitabine seule n’a abouti à aucune réduction du poids des tumeurs. Le Rauwolfia seul, avec une dose

quotidienne de 20 mg/kg, a entraîné une diminution du poids de la tumeur de 53 %, et de 46 % avec une dose quotidienne de 50 mg/kg ; l’association Rauwolfia (utilisé avec les 2 dosages) et gemcitabine a diminué le poids de la tumeur de 56 %.

Pas de métastases Plus intéressant encore, chez deux souris (sur huit) du groupe ayant reçu 50 mg/kg de Rauwolfia associé à la gemcitabine, les tumeurs ont complètement régressé. Cela n’a été observé dans aucun des trois autres groupes.De plus, 12 % des souris du groupe de contrôle (traité avec une solution saline) et du groupe ayant reçu 20 mg/kg de Rauwolfia n’ont pas développé de métastases, alors que toutes les souris du groupe traité avec la gemcitabine en ont développé. Avec une dose de 50 mg/kg de Rauwolfia utilisé seul ou en combinaison avec la gemcitabine, le pourcentage de souris sans métastases a augmenté de 40 %. De plus, chez l’ensemble des souris, aucune toxicité associée aux traitements n’a été observée sur des organes comme le rein, le foie et la rate, que ce soit avec Rauwolfia vomitoria utilisé seul ou en combinaison avec la gemcitabine.

Des résultats toujours positifsUn an auparavant, une autre équipe s’était également penchée sur le cancer du pancréas, mais avec l’extrait de pao pereira in vitro et in vivo3. Les résultats ont montré que l’extrait de pao pereira supprime la résistance des cellules cancéreuses au traitement par gemcitabine et permet d’administrer cette dernière à doses inférieures, donc moins toxiques (la même chose a été constatée avec l’extrait de Rauwolfia sur

la recherche continueet confirme

les résultatsSi la France néglige

les découvertes de Mirko Beljanski, les États-Unis se font un plaisir de vérifier l’efficacité et l’innocuité des substances qu’a mises au point le chercheur.

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le cancer du pancréas). Pao pereira a réduit jusqu’à 72 % la croissance tumorale. Tout cela conforte une précédente recherche de 2012 mettant en évidence l’efficacité et l’innocuité des extraits de pao pereira et Rauwolfia vomitoria in vitro sur les cellules de cancers du pancréas et de l’ovaire4. Il résultait que ces deux extraits végétaux inhibaient les cellules cancéreuses, même chimiorésistantes.

Pour l’homme et la femmePlusieurs études ont été menées par des universités étasuniennes sur le cancer de la prostate. La dernière en date5, en 2013, montre que l’extrait de pao pereira est non seulement efficace sur les cellules cancéreuses de la prostate qui sont devenues, avec le temps et les traitements, résistantes aux anti-hormones, mais qu’il agit sur un centre de contrôle régulant la survie, la prolifération et l’invasion cellulaire.Tout comme le cancer du pancréas, le cancer de l’ovaire est souvent diagnostiqué tardivement, et il est difficile à traiter. Les chercheurs du Kansas University Medical Center (États-Unis) ont étudié le pouvoir anticancéreux de l’extrait de Rauwolfia vomitoria sur ce cancer. Leur étude a été publiée en novembre

20136. Elle fait état de l’efficacité du Rauwolfia vomitoria seul et en combinaison avec le carboplatine, une molécule très toxique employée pour traiter le cancer des ovaires. Utilisé en synergie, il diminue de 87 à 90 % la taille des tumeurs chez l’animal. Le pao pereira est également efficace contre ce cancer7. In vivo, utilisé seul, il diminue la croissance tumorale de 79 % et le volume de l’ascite (accumulation de liquide dans l’abdomen) de 55 %. Quand il est associé à une chimiothérapie, l’inhibition de la tumeur atteint 97 % et l’ascite disparaît complètement. D’autres études du même ordre, qui confirment notamment la synergie que Beljanski a trouvée, dès 19868, entre ses extraits et les chimiothérapies classiques, sont disponibles en ligne9.

Que vive l’immunité ! Le centre de traitement du cancer de Chicago (Cancer Treatment Centers of America - CTCA) a réalisé un essai clinique avec les ARN-fragments Beljanski (Real Build®) sur des patients cancéreux sous chimiothérapie. Grâce à ces ARN-fragments, ces malades ont recouvert leur immunité et sont parvenus à supporter des protocoles thérapeutiques lourds10. Le CTCA a testé deux types de

fragments d’ARN : les fragments d’ARN d’Escherichia coli K-12 méthode Beljanski, et ceux obtenus à partir de levure. Les fragments à base de levure ne conduisent à aucune augmentation du nombre de plaquettes, contrairement au Real Build, qui entraîne en quelques heures une hausse spectaculaire du nombre de plaquettes et de globules blancs après la baisse induite par la chimiothérapie.

Un grand gaspillageAu vu de ces résultats, outre le préjudice pour les malades dont le nombre ne cesse de croître, on comprend que la politique française en matière de médicaments mériterait un sérieux coup de balai, notamment parce que, comme le souligne Monique Beljanski, « trop de passerelles ont été jetées entre le monde de l’argent (industrie pharmaceutique), le monde politique et le monde scientifique11 ». Comprenons-nous bien, il ne s’agit pas ici de faire l’apologie des produits Beljanski, mais de mettre en lumière un scandale – car c’en est un – scientifique. Or, il est impossible de le faire sans parler du scientifique, de ses travaux et de ce qui en a résulté. Les détracteurs de Beljanski passent sous silence ses années de recherches,

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Récolte du pao pereira en Amazonie.

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ses distinctions, ses découvertes, affirment qu’il n’a rien publié, que ses travaux n’ont pas été validés (en avançant la fameuse étude de l’ANRS, l’Agence nationale de recherche sur le sida12) ou que ses produits sont interdits en France (ce qui est faux). Si des expertises financières ont été lancées, c’est parce qu’il ne se trouvait pas de malade pour se plaindre de ces produits. Certes, il y a exercice illégal de la médecine et de la pharmacie, mais comment dire non à des médecins qui ont eu vent des résultats de Beljanski et lui ont demandé de ses gélules ? De plus, Beljanski n’avait rien d’un charlatan. Le docteur en biochimie qu’il était, travaillant sur les tissus cancéreux depuis des décennies, savait ce qu’il faisait. Bref, comme le déplore la veuve de Mirko Beljanski, qui fut aussi sa collaboratrice la plus proche, la France a payé par le truchement du CNRS les salaires des deux chercheurs pendant des années, mais ils ont dû s’exiler aux États-Unis pour pouvoir développer leur travail. « Je trouve ça ubuesque et vraiment triste et dommage », regrette-t-elle dans une interview13.

Quel avenir ?Nous avons voulu savoir si un quelconque organisme de santé ou de recherche français s’intéressait aux études faites aux États-Unis sur les extraits de Beljanski. Les réponses et les silences n’augurent rien de

bon. Parmi les silencieux, on trouve l’Institut Pasteur ou l’Oncopole de Toulouse. Quant aux réponses, le CNRS nous a dit que, pour ce sujet très médical, nous devions nous orienter vers d’autres organismes plus axés « recherche médicale ». Quant à l’Institut national du cancer, il nous a, entre autres choses, expliqué qu’un certain nombre de chimiothérapies anti-cancéreuses sont issues d’extraits de plante et qu’une plante ait éventuellement une activité anti-cancéreuse et soit utilisée en chimiothérapie n’est pas une nouveauté. De plus, « afin de ne pas donner de faux espoirs aux patients et à leurs familles, l’Institut national du cancer est toujours prudent face à des annonces faites par des chercheurs ou des industriels alors que nous sommes encore à des phases très précoces du développement de ces nouveaux traitements ». De toute évidence, l’autorité anonyme auteur de ce message, transmis par Florence Priolet, la responsable presse, ne connaît pas les travaux de Beljanski, sinon parlerait-elle de « phase très précoce du développement ». Bref, mieux vaut que les malades ne comptent que sur eux-mêmes, et pour ceux et celles qui n’ont pas les moyens financiers, la famille et les amis cotiseront de bon cœur si on le leur propose ; qui 10, 20 ou 50 euros par mois. Une belle application de financement participatif. ⚗

Kim-Anh Lim

Nous avons voulu savoir si un quelconque organisme de santé ou de recherche français s’intéressait aux études faites aux États-Unis sur les extraits de Beljanski. Les réponses et les silences n’augurent rien de bon.

1. Jun Yu, Qi Chen, « Antitumor Activities of Rauwolfia vomitoria Extract and Potentiation of Gemcitabine Effects Against Pancreatic Cancer », University of Kansas Medical Center, Kansas City, KS, USA, avril 2014.2. La réserpine, présente dans le rhizome et la racine de Rauwolfia, est à faible dose un hypotenseur et, à plus forte dose, un apaisant utilisé en psychiatrie pour les cas de manie, de névrose, d’anxiété et d’obsession.3. Jun Yu, Jeanne Drisko, Qi Chen, « Inhibition of pancreatic cancer and potentiation of gemcitabine effects by the extract of Pao Pereira », Oncology Reports Journal (doi : 10.3892/or.2013.2461), mai 2013.4. Jun Yu, Jeanne Drisko, Qi Chen. « Anti-cancer activity of extracts from Rauwolfia vomitoria and Pao Pereira », International Research Congress on Integrative Medicine and Health 2012, Portland, Oregon, USA. 15-18 mai 2012.5. Cunjie Chang, Wei Zhao, Bingxian Xie, Yongming Deng, Tao Han, Yangyan Cui, Yundong Dai, Zhen Zhang, Jimin Gao, Hongqian Guo, and Jun Yan, « Pao pereira Extract Suppresses Castration-Resistant Prostate Cancer Cell Growth, Survival and Invasion Through Inhibition of NFkB Signaling », Integrative Cancer Therapies 2013, Vol XX(X) 1–10.6. Jun Yu, Yan Ma, Jeanne Drisko, Qi Chen, « Antitumor Activities of Rauwolfia Vomitoria Extract and Potentiation of Carboplatin Effects Against Ovarian Cancer », Current Therapeutic Research, volume 75, p. 8-14, décembre 2013.7. Jun Yu, Qi Chen, « The plant extract of Pao pereira potentiates carboplatin effects against ovarian cancer », Department of Pharmacology, Toxicology and Therapeutics, KU Integrative Medicine, University of Kansas Medical Center, Kansas City, KS, USA, août 2013.

8. M. Beljanski, M. S. Beljanski, « Three Alkaloids as Selective Destroyers of Cancer Cells in Mice. Synergy with Classic Anticancer Drugs », Oncology, 43, 1986, p. 198-203.9. « La recherche continue », sur beljanski.org.10. Robert D. Levin, MaryAnn Daehler, James F. Grutsch, John L. Hall, Digant Gupta and Christopher G Lis, « Dose escalation study of an anti-throbocytopenic agent in patients with chemotherapy induced thrombocytopenia », BMC Cancer, 2010.11. Beljanski Monique, Mirko Beljanski, Chronique d’une « fatwa » scientifique, Guy Trédaniel Éditeur, p. 68 et 69.12. En 1993, Jean-Paul Lévy, directeur de l’ANRS (Agence nationale de recherche sur le sida), demande que soient effectuées des recherches sur les propriétés antivirales du PB-100. Les recherches sont placées sous la responsabilité de plusieurs professeurs de l’Inserm de Marseille. Plusieurs laboratoires publics implantés à Strasbourg et à Paris sont également mobilisés. Le rapport, non signé (!), est remis le 16 juin 1994 et le résultat est catastrophique : non seulement le PB- 100 est totalement inefficace sur le VIH, mais il est toxique et sa sélectivité faible. Le produit avait été manipulé par les prétendus experts de l’ANRS, et leur rapport tellement bâclé que des malades portèrent plainte contre l’ANRS pour faux, usage de faux et trafic d’influence ! Une contre-expertise réalisée avec le même lot de produit au service de virologie de l’armée américaine à Washington (Walter Reed Army Institute of Research) montre que le PB-100 inhibe in vitro des souches de VIH sensibles ou fortement résistantes à l’AZT.13. Interview de Monique Beljanski sur Égalité et Réconciliation, 5 septembre 2014.

Interview

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M onique Beljanski, scientifique elle-même, fut la fille du professeur René Lucas1 et l’épouse de Mirko Beljanski, dont elle a été la

plus proche collaboratrice. Aujourd’hui, à plus de 80 ans, elle continue à répondre inlassablement à toutes les sollicitations relatives aux travaux de son mari, avec précision, sans éluder une question et, loin de toute polémique, sans chercher à convaincre qui que ce soit.

InterviewMonique Beljanski :

Monique Beljanski en 2014.

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« L’industrie pharmaceutique trouve plus lucratif de ne s’occuper que de ses propres molécules »

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Nexus : Est-ce que les études étasu-niennes de ces dernières années ont suscité des réactions ou un intérêt de la part de laboratoires ou d’orga-nismes de santé français ?Monique Beljanski : Sylvie, ma fille, qui vit aux États-Unis, a été invitée dans plusieurs manifestations pro-fessionnelles à New York, en Califor-nie et ailleurs, mais rien n’est venu de la France. D’ailleurs, nous ne sol-licitons personne non plus. Les seuls contacts que nous avons en France viennent de médecins ou de naturo-pathes qui s’intéressent aux travaux de Mirko.

Est-ce que l’Oncotest est utilisé dans d’autres laboratoires que le vôtre, et quelles sont ses limites ?Les limites de l’Oncotest sont celles de tous les tests in vitro. Cela dit, il n’est jamais arrivé qu’une substance révélée comme anticancéreuse avec l’Oncotest ne le soit pas in vivo. Le brevet étant désormais périmé, il est publié et accessible sur Internet2. Au début, nous avions pensé que ce test pouvait intéresser les laboratoires qui s’en serviraient comme gage de qualité et d’innocuité de leurs pro-duits, mais on nous a ri au nez !

À l’heure actuelle, je pense qu’ils ne souhaitent toujours pas utiliser ce test, et c’est bien regrettable.

Y a-t-il des recherches en cours ?Absolument ! À ce jour, elles portent essentiellement sur le glioblastome. C’est le cancer du cerveau le plus fré-quent chez l’enfant, et le plus agres-sif. Comme vous le savez peut-être, Mirko Beljanski a montré que son extrait de pao pereira, outre son pou-voir anticancéreux et antiviral, était capable de franchir la barrière hé-mato-encéphalique pour agir contre les cellules cancéreuses, en synergie avec les traitements classiques. Pour l’instant, je ne peux vous en dire plus.

Justement, les dernières études pu-bliées visaient le pouvoir antican-céreux des produits Beljanski, mais qu’en est-il de leur pouvoir antivi-ral ? À l’époque, vous avanciez que vos extraits étaient efficaces sur le VIH, mais aussi sur l’herpès ou la grippe.Effectivement, à l’époque de l’affaire du sang contaminé, nous avions fait état du pouvoir antiviral du PB-100 (actuellement Pao V FM). Et cela avait été confirmé sur de nombreux malades atteints du VIH ou de l’hé-patite C. Mais l’industrie pharma-ceutique trouve plus lucratif de ne s’occuper que de ses propres molé-cules. Les trithérapies sont un net progrès par rapport à ce qu’était l’AZT, mais il y a encore des effets se-condaires. L’association avec le Pao V FM permet encore un net progrès. Nos moyens étant très limités, nous consacrons l’essentiel de nos efforts au cancer et aux maladies dégéné-ratives. Il n’y a donc pas d’autres études en cours.

Comment trouver en France les médecins qui emploient les produits Beljanski ? Dans un premier temps, nous propo-sons aux patients de recommander une formation à leur médecin réfé-rent si celui-ci ne connaît pas notre approche. Des formations en ligne sont d’ailleurs dispensées à de plus en plus de professionnels de santé. Autrement, les patients peuvent en-voyer un e-mail à Natural Source In-ternational. Nous ne diffusons pas de liste, mais quand une demande nous

Dans un premier temps, nous proposons aux patients de recommander une formation à leur médecin référent si celui-ci ne connaît pas notre approche.

Mirko Beljanski avec Monique Beljanski en 1982. ©

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est faite, nous pouvons indiquer un médecin formé et exerçant dans la région du demandeur.

Compte tenu de vos résultats théra-peutiques, j’imagine que vos ventes sont en constante augmentation. Est-il envisageable qu’une produc-tion plus importante puisse conduire à une diminution des prix ? La crise aidant, de plus en plus de malades n’ont pas les moyens de s’offrir ce traitement.Les produits Beljanski, manufacturés aux États-Unis, ne sont pas chers en valeur absolue, mais ils le sont par rapport à tous les produits qui béné-ficient des subventions d’État. La fa-brication de ces produits, complexe, requiert de nombreuses interven-tions : achat de matières premières, transport, extractions, contrôles qualité, conditionnement, etc. Aux-quelles s’ajoutent tous les coûts in-hérents à la vie normale d’une entre-prise. Les marges de Natural Source International sont bien inférieures aux standards de l’industrie phar-maceutique. La recherche continue aussi, et nécessite des fonds.

Y a-t-il un point que vous auriez aimé aborder ?Oui, il y a aussi une découverte de Mirko dont on parle peu parce qu’elle n’a pas trait à la maladie, mais touche l’évolution : la synthèse de no-vo3 d’un ADN. Normalement, toutes les duplications d’ADN ou d’ARN que l’on fait en laboratoire sont comme des photocopies. On a une matrice ADN ou ARN, que l’enzyme duplique.En 1959, Severo Ochoa4 a reçu le prix Nobel de physiologie ou méde-cine pour avoir synthétisé de l’ARN de novo, sans matrice. Or, Mirko a trouvé que dans des conditions diffé-rentes l’enzyme pouvait synthétiser de novo un ADN. Ainsi, la polymérase – l’enzyme qui est capable d’enchaîner des nucléotides en polymère d’ADN ou d’ARN – prend les éléments, telles des

briques initiales, et construit d’elle-même ARN ou ADN, selon le milieu. Du point de vue de l’évolution, c’est très important. On dit toujours qu’il y a eu un monde ARN qui a précédé un monde ADN, parce qu’on n’avait jamais trouvé de conditions de syn-thèse d’ADN. Or, c’est ce que Mirko a trouvé… et publié5, mais curieu-sement cela ne semble intéresser personne !Et il y a un autre point, la contrefa-çon. Certaines personnes profitent de la bonne réputation de nos pro-duits pour distribuer des produits de bien moindre qualité. De plus, ils n’investissent pas dans la recherche. Ils trompent leur monde en usur-pant le nom Beljanski®, et parfois même en reprenant à leur compte les confirmations scientifiques faites aux États-Unis. Or, celles-ci ont toutes été réalisées avec les produits de Natural Source Ltd. à New York. Tout cela me choque profondément. ⚗

Propos recueillispar Kim-Anh Lim

Certaines personnes profitent de la bonne réputation de nos produits pour distribuer des produits de bien moindre qualité.

. Liste des publications de Mirko Beljanski : www.beljanski.com. Entretien avec Monique Beljanski : http://beljanski.org/francais/. Monique Beljanski, Mirko Beljanski, Chronique d’une « fatwa » scientifique, dossier des découvertes interdites, Guy Trédaniel Éditeur, 2003.. Monique et Mirko Beljanski, La Santé confisquée, Guy Trédaniel Éditeur, 1989.. Chervet Sophie, Enquête sur un survivant illégal, l’affaire Gérard Weidlich, Guy Trédaniel Éditeur, 2002.. Monique et Mirko Beljanski, Christian Marcowith, Hervé Janecek, Cancer : l’approche Beljanski, Guy Trédaniel Éditeur, 2011.. Monique Beljanski, Beljanski et la cancérogenèse. Dogmes, mensonges et nouvelles pistes, éditions de Broca, 2012.

1. Le physicien français René Lucas (1898-1990) fut directeur de l’École supérieure de physique et de chimie industrielles de la ville de Paris (1947-1968), professeur titulaire de chaire de physique générale à la faculté des sciences de l’université de Paris (1956-1968) et membre de l’Académie des sciences.2. M. Beljanski, « Oncotest: a DNA assay system for the screening of carcinogenic substances ». IRCS Medical Science, 1979, 7, p. 476.L. Le Goff, M. Beljanski, « Cancer/anti-cancer dual action drugs in crown-gall tumors ». IRCS Medical Science, 1979, 7, p. 475.M. Beljanski, « Oncotest : dépistage des potentiels cancérogènes et spécifiquement anti-cancéreux. Conceptions et perspectives nouvelles en

cancérologie ». Environnement et nouvelle médecine. n° 2, 1982, p. 18-23.3. De novo est une locution latine signifiant « rafraîchi », « renouvelé », « recommençant ». En biologie, de novo signifie nouvellement synthétisé. Par exemple, une protéine (ou une autre molécule) nouvellement synthétisée. De novo se rapporte aussi à la création de molécules complexes à partir de molécules simples de manière spontanée.4. Severo Ochoa de Albornoz (1905-1993) était un scientifique espagnol, Prix Nobel de physiologie ou médecine en 1959, avec son élève Arthur Kornberg, pour leurs recherches sur la synthèse de l’ARN.5. M. Beljanski, « De Novo Synthesis of DNA – Like Molecules by Polynucleotide Phosphorylase In Vitro ». J. Mol. Evol. 1996, 42:493-499.

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