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LIVRE BLANC 2020 RECHERCHES EN STRATÉGIE CLIENT 20 IDÉES À DÉCOUVRIR COORDONNÉ PAR FLORENCE JACOB, SYLVIE LLOSA, AÏDA MIMOUNI CHAABANE ET VALÉRIE RENAUDIN

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L I V R E B L A N C 2 0 2 0

R E C H E R C H E S E N S T R A T É G I E C L I E N T2 0 I D É E S À D É C O U V R I R

C O O R D O N N É P A R

F L O R E N C E J A C O B , S Y L V I E L L O S A ,

A Ï D A M I M O U N I C H A A B A N E E T V A L É R I E R E N A U D I N

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LE CCM EN BREF...

Le Center for Customer Management (C*CM) rassemble 13 académiques français d’horizons divers à la pointe du management de la relation client, désireux de favoriser les échanges entre les milieux académique et professionnel, et contribuer ainsi à la réflexion des responsables, consultants et expertsdu management des clients :

• Thierry Delecolle, ISC • Florence Jacob, Nantes Université – IAE • Eric Julienne, Université d’Evry-Val-d’Essonne, Paris-Saclay • Sylvie Llosa, Université d’Aix-Marseille - IAE • Aïda Mimouni Chaabane, Université de Cergy-Pontoise • Gilles N’Goala, Université de Montpellier • Lionel Nicod, Université d’Aix-Marseille • Virginie Pez, Université de Paris Panthéon- Assas • Isabelle Prim-Allaz, Université Lumière Lyon 2 • Valérie Renaudin, Université Paris-Dauphine • Françoise Simon, Université Haute Alsace • Eric Stevens, ESSCA • Pierre Volle, Université Paris-Dauphine

Des entreprises partenaires participent également aux réflexions du C*CM et le soutiennent financièr-ement. Elles nous apprennent autant que nous leur apprenons, et sans elles le C*CM n’aurait pas de sens.

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UN LIVRE BLANC SUR LES RECHERCHES EN MANAGEMENT DE LA RELATION CLIENT... BY C*CM !

Le management des clients est devenu en quelques années une priorité stratégique pour de nombreuses entreprises : acquisition de clients, intelligence client, amélioration de l’expérience client, programmes relationnels, management de communautés de clients, dématérialisation de la relation, etc. Pour étudier en profondeur ces questions stratégiques, le C*CM mobilise les nombreuses recherches publiées en Europe et aux États-Unis.

Après discussion avec des responsables et professionnels praticiens en entreprise, nous avons constaté que peu d’entre eux lisentla littérature académique sur les problématiques clients. Plusieurs raisons expliquent cet état de fait :

• La lecture d’un article de recherche demande trop de temps et d’effort. Plusieurs heures de lecturesont nécessaires pour comprendre l’article en profondeur, • Le vocabulaire est complexe et la forme peu attrayante, • Il faut en lire beaucoup pour en trouver un avec de « vraies » implications managériales • L’accès aux articles n’est pas aisé.

Et pourtant, nos partenaires reconnaissent que beaucoup d’outils et de grilles d’analyse qu’ilsutilisent proviennent de la recherche !

Riches de ce constat, nous avons décidé de leur faciliter la vie en éditant chaque année un livre blanc qui regroupe une vingtaine d’articles de recherche liés à la stratégie client qui pourraient les inté-resser. La première édition de livre blanc est parue en septembre 2018 et a rencontré un véritable succès.

Les articles qui composent ce livre blanc ont été choisis par les membres du C*CM dans des revues classées par le CNRS. Cette année, Grégoire Bothorel (Numberly), a participé à cette édition en proposant un article sur vingt. Les contributeurs ont synthétisé, contextualisé et illustré les articles sélectionnés, au travers de plusieurs rubriques qui rythment les fiches de présentation : la problématique client, ce que dit la recherche sur ce thème, le so what qui explique comment l’on peut en tirer parti dans les pratiques d’entreprises, et le regard des pros dans lequel nos entreprises partenaires livrent leur analyse.

Nous n’avons pas la prétention d’avoir choisi les « meilleurs » articles mais ceux qui sont susceptibles d’intéresser les professionnels, car ils débouchent sur des réponses concrètes, des recommandations pratiques. Nous sommes tous d’horizons différents, certains plus sensibles au digital, d’autres aux services, d’autres encore aux programmes de fidélité ou à l’expérience client… Cette diversité colore le livred’approches complémentaires.

Un premier jeu d’articles a été présenté à nos partenaires qui ont commenté et sélectionné leurs préférés. Cette co-création du livre blanc a été un véritable plaisir pour tous.

Bonne lecture !

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LA PAROLE AUX PARTENAIRES DU CCMADEO

La deuxième édition du C*CM confirme tout le bien qu’on en pensait à l’issue de sa première version. La diversité des sujets, et la qualité bien sûr des intervenants font de cette journée, et du livre blanc qui en découle, un grand moment de stimulation intellectuelle et d’apprentissage.

Le choix des thèmes illustre bien nos problématiques actuelles au sein de Adeo qui remettent en cause les catégories bien établies. Pour faire simple, à l’origine, une entreprise vend des biens et des services à des clients en s’appuyant sur des collaborateurs. Le monde actuel est bien plus complexe : • Les clients deviennent des collaborateurs. Les clients participent activement à la vie de nos entre-prises en produisant du contenu, en collaborant à l’élaboration de la gamme à travers leur avis produit, en jouant un rôle de management avec leur retour qualitatif ultra précis sur le bon fonctionnement des magasins. Avoir un socle de clients impliqués dans la vie de nos entreprises devient essentiel. • Les collaborateurs deviennent des clients. Nous avons plus de 100 000 collaborateurs qui également consomment nos produits. Cette expérience de client collaborateur est précieuse, il s’agit là de notre premier cercle de clients ambassadeurs. Des projets novateurs au sein du groupe encouragent, par exemple, les avis client des collaborateurs sur toutes les enseignes du groupe. Quoi de mieux pour comprendre un client que de « vivre sa vie ». L’effet miroir est salutaire et formateur. • Et le manager dans ce panorama ? Le respect de la norme et des process perd son primat et le rôle du manager évolue vers celui de coach. Par exemple, de nombreux pays du groupe dotent tous lescollaborateurs de mobiles, mais certains, comme la Russie, sans donner de consignes claires sur leur utilisation. Regardons et tirons profit de la manière dont les collaborateurs vont se saisir de l’outil. Encourageons les initiatives plutôt que de les normer. Autre exemple : les collaborateurs répondent au client sur les réseaux sociaux : faut-il normer la réponse ? Doit-on, au contraire, laisser faire avec peut-être plus de fautes mais aussi plus d’authenticité et de proximité : un nouveau « CtoC » Collaborateur toClient – sans passer par le département com, ou l’autorisation du manager ? L’évolution des méthodes vers l’agilité et l’autonomie des équipes renforce cette tendance.

Ces évolutions sont connues depuis un certain temps, mais elles connaissent en ce moment une accélération très forte. Elles correspondent à une évolution sociétale puissante et très profonde. Elles changent assez radicalement les processus de création de valeurs et les points de contrôle.On passe d’une vision très partitionnée et descendante, ou chacun était dans son rôle. : le client achète, le collaborateur exécute, le manager décide. Cette vision s’évanouit au profit d’une entreprise vue comme un organisme vivant : ce qui fait son dynamisme et sa croissance c’est la multiplicité et la diversité des connexions, la richesse de son terreau… Attentif, le livre blanc du C*CM s’est fait l’écho de cestransformations.

MAISON DU CLIENT

Se nourrir et s’enrichir d’une réflexion ou occuper l’espace numérique ? Pour un universitaire ouun cabinet d’expert, la question est cruciale et la réponse vitale.

Au risque de surprendre, ce qui n’est ni dans ma nature, ni dans mon usage lorsque l’on m’accordegentiment un espace d’expression, ma prise de parole au sein de ce livre blanc est un « coup de gueule ». Marre de la dictature de l’audimat des réseaux sociaux et de l’effet buzz recherché. L’existence même d’un point de vue réfléchi et structuré, d’une pensée organisée, est remise en cause par l’immédiateté et le court-termisme imposés par la médiatisation de l’information via les « posts »et autres articles numériques, qui ne sont pas destinés à informer ou éduquer, mais à générer unediffusion large pour faire un bruit supplémentaire dans un brouhaha généralisé.

Le besoin de se montrer à tout prix, que cela soit à titre individuel ou professionnel, est en fait un besoin d’autopromotion par le volume, par la capacité d’occuper un espace le plus vaste possible, le plus rapidement possible. Peu importe la qualité, la performance, voire la paternité des affirmations partagées, ce qui semblent compter dans cette économie numérisée, c’est le taux d’indexation par les moteurs de recherche et le positionnement dans un référencement de moins en moins naturel

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et de plus en plus monétisé. Le contenu, la réflexion ne sont pas recherchés… il n’y a pas de conversation,pas d’échange de point de vue ou d’empathie, juste du bruit.

Aujourd’hui, les sollicitations et les messages sont tellement nombreux que nous ne sommes plus enmesure de nous concentrer sur aucun d’eux, ni de construire notre propre raisonnement… Nous consom-mons des « bribes » d’information selon des modes d’administration et des techniques de diffusion faitesuniquement pour générer un « like » sans même avoir pris le temps de lire et de digérer le messagedans son intégralité. Je veux exister, je dois donc « être » sur les réseaux sociaux jusqu’à saturation... La réflexion n’existe plus, noyée et étouffée dans un trop-plein de bruit.

Face à ce constat cruel, s’affirment des lieux de résistance, des agoras où le dialogue, l’écoute sont des mots qui font sens et où le temps est accordé au temps. Le C*CM fait partie de ces exceptions. Au sein du C*CM, universitaires et entreprises se donnent l’opportunité d’échanger sur le fond, de construire des raisonnements et de dégager des recommandations. Ces travaux nous nourrissent et nous enrichissent, ils nous ouvrent sur l’extérieur et notamment sur l’international, ils ont pour vertu de nous ouvrir les yeux sur d’autres pratiques en matière de relation client et d’autres savoir-faire. Alors oui, nous assu-mons, nous pensons qu’il est de notre devoir d’alerter et de faire différemment. C’est en cela que les travaux du C*CM et de ses universitaires ont tout leurs sens. Prenons le temps de formuler « la bonne question », prenons le temps d’élaborer « le bon plan d’analyse », et prenons le temps de réaliser « le bon terrain », de façon à en tirer les « bonnes conclusions ». Cette recherche d’une construction collective, cette manière de faire société est une belle façon de répondre à l’injonction de l’urgence et du bruit médiatique promus par les réseaux sociaux. Cette année encore, les échanges ont été riches et variés, et la matière qu’il nous est donné de partager avec vous, je n’en doute pas, vous nourrira et vousfera grandir. Bonne lecture.

NUMBERLY (1000MERCIS GROUP)

Au moment d’écrire ces quelques lignes introductives, la deuxième édition de ce livre blanc duCenter for Customer Management est déjà un succès. Pourtant, après un lancement particulièrementréussi, réaliser une deuxième édition est un exercice parfois délicat.

Les présentations de la dernière édition de ce Livre Blanc dans nos différents bureaux, de Paris jusqu’à Montréal, ont donné lieu à des réactions enthousiastes et à des échanges particulièrement riches. Les chercheurs, d’abord, ont exprimé un intérêt appuyé pour la richesse des implications managéri-ales des articles présentés. Les professionnels du marketing, ensuite, ont été séduits par l’actualité des thématiques de recherche et la robustesse des approches scientifiques. Ces deux perceptions combinées nous confirment que ce livre blanc a très rapidement rempli les objectifs de notre groupe de réflexion : créer une fertilisation croisée entre le monde académique et le monde de l’entreprise. Au-delà de ce dialogue, ce travail suscite des étonnements très sains pour la discipline du marketing ;il est parfois surprenant par rapport à des idées reçues et il bouscule un certain nombre de pratiques quotidiennes. Les articles présentés dans cette nouvelle édition ont été à nouveau sélectionnés avecsoin pour leur qualité et leur intérêt thématique. En voici quelques morceaux choisis :

• Dans quelle mesure les perceptions des managers de la satisfaction de leurs clientscorrespondent-elles à leur satisfaction réelle ? • Comment le volume de données génère-t-il, grâce à l’insight, davantage d’innovation en entreprise ? • Pourquoi interagir oralement ou écrire un feedback a des implications bien différentes face àl’essor des Bots conversationnels ? • Pourquoi, au-delà des canaux, des devices et des outils CRM, le succès de stratégies clients est-ilconditionné par le fait de commencer par l’humain ? • Comment les écosystèmes se structurent-ils dans la Data Battle ?

Bref, nous sommes particulièrement fiers de cette édition qui promet des échanges féconds entreprofessionnels du marketing et chercheurs au service de pratiques d’entreprises efficaces, pertinentes et riches de sens, en phase avec les enseignements les plus récents en Marketing Science. Nous espérons ainsi que la lecture de ce livre blanc sera pour vous intéressante, surprenante et utile. Excellente lecture !

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SOMMAIRE

Les managers voient-ils la vie de leurs clients en rose ? .................................................................................... p. 8

Métriques d'efficacité perceptuelles et profitabilité client : y-a-t-il vraiment un lien ? ................................... p. 10

Ne ciblez plus votre programme de rétention sur les clients à fort risque de départ, mais sur les clients

sensIbles à votre programme de rétention ! ...............................................;.......;............................................... p. 12

Comment les Big Data Analytics permettent l'innovation de service ........................................................... p. 14

Comment faire face au déluge de données, ou comment jeter l'eau du bain sans jeter le bébé ?... p. 16

Entre Robocop et Terminator, quels impacts des robots sur l'expérience de service ? .......................... p. 18

Co-designer ses services avec les clients, est-ce efficace ? ................................................................... p. 20

Le personnel en contact idéal ? À la fois créatif et attentif aux détails ? ......................................... p. 22

Renforcer le lien personnel à la marque : la parole de vos clients les engage plus que leurs posts ! . p. 24

Incitations des clients à laisser un avis sur Internet : le point de vue des lecteurs ......................... p. 26

Simple manque de bol ? L'influence d'une conversation avec un client ayant vécu une expérience

contrastée .............................................................................................................................................................. p. 28

À quoi sert de phygitaliser son magasin ? ................................................................................................... p. 30

Faut-il favoriser l'usage du mobile en magasin ? .................................................................................... p. 32

"Telle éducation, tels fruits"*... Ou pourquoi et comment former ses clients .................................... p. 34

Gérer la pression des clients qui arrivent en tête de la queue .................................................... p. 36

Mais quelle route va-t-il prendre et pourquoi? (comment configurer mes canaux d'intéraction ?) .p. 38

Faut-il encourager la fragmentation des parcours d'achats digitaux entre plusieurs canaux/devices . p. 40

Comment réussir la mise en place de mon CRM ? ........................................................................... p. 42

Les réductions de prix pour conquérir les nouveaux clients : la fausse bonne idée ? ....... p. 44

En passe de devenir programmatique, la TV au coeur des enjeux de la data .................... p. 46

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LES MANAGERS VOIENT-ILS LA VIE DE LEURS CLIENTS EN ROSE?

Le choix de Pierre Volle du C*CM G. Tomas M. Hult, Forrest V. Morgenson, Neil A. Morgan, Sunil Mithas et Claes Fornell (2017), Do managers know what their customers

think and why?, Journal of the Academy of Marketing Science, 45, 37-54.

Stéphane est responsable de la relation client pour une chaîne d’environ 200 hôtels en France. Il gère l’ensemble des canaux et des dispositifs qui permettent d’interagir avec les clients au quotidien : chatbot et application mobile, centre de contacts, site web, page Facebook et compte Twitter. Comme pour de nombreux autres managers en charge de la relation client, la satisfaction et la fidélisation des hôtesont pour lui des objectifs stratégiques. Fort de son expérience de huit ans dans le secteur de l’hôtellerie, Stéphane est déjà un manager chevronné. Pour autant, comprend-il bien pourquoi ses clients sont plus ou moins fidèles ? L’étude menée par Hult et ses collègues montre que Stéphane voit probablement ses clients avec des lunettes roses – qu’il surestime leur satisfaction – et qu’il ne sait pas exactement pourquoi ses clients sont fidèles ou non.

LE PROBLÈME

Les managers en charge de la relation avec les clients sont exposés à un risque important : celui de voir leurs clients avec des lunettes roses. En conséquence, les entreprises seront moins encouragées à prendreles décisions qui s’imposent pour fidéliser leurs clients. Comment sensibiliser les managers à ce risque ?

LA QUESTION POSÉE PAR L’ARTICLE ?

Les managers savent-ils véritablement pourquoi leurs clients sont fidèles ?

L’ÉTUDE DES CHERCHEURS

La recherche repose sur le modèle ACSI (American Customer Satisfaction Index), développé dans les années 1990, essentiellement aux USA. De très nombreuses études et recherches scientifiques montrentla robustesse de ce modèle qui permet de modéliser, d’une part, les déterminants de la satisfaction et, d’autre part, l’impact d’une amélioration de la satisfaction.Le modèle ACSI montre que le principal déterminant de la satisfaction des clients est la valeur perçue de l’offre (perception de la valeur qui résulted’un écart entre la qualité perçue de l’offre et les attentes du client). Le modèle montre également qu’uneamélioration de la satisfaction diminue les réclamations et augmente la fidélité des clients.

L’étude de Hult et de ses collègues consiste à estimer le modèle ACSI auprès de deux échantillons : un échantillon de 70 000 clients et un échantillonde 1 068 managers en charge d’équipes en relation directe avec les clients. Les coefficients du modèle sont ensuite comparés entre les deux échantillons. La démarche suivie par les chercheurs consiste à déterminer si les coefficients du modèle sont égaux entreles deux échantillons. Dans le cas où ces coefficients sont égaux, on peut conclure que les managersont une bonne compréhension de leurs clients. Si les coefficients diffèrent entre l’échantillon des clients et

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celui des managers, on peut conclure que les croyances des managers s’écartent de la réalité des clients. Après avoir estimé le modèle ACSI sur les deux échantillons, les chercheurs montrent que les coefficients desmanagers ne sont pas les mêmes que ceux des clients. Plus précisément, les managers surestiment lasatisfaction et la fidélité de leurs clients. Ils sous-estiment également l’impact de la qualité sur la satisfaction etl’impact de la satisfaction sur les réclamations et sur la fidélité.

En conclusion : les croyances des managers s’écartent de la réalité des clients. L’expérience des clients est moins satisfaisante que ne le pensent les managers. Par ailleurs, la satisfaction est encore plusessentielle qu’ils ne le pensent pour fidéliser les clients.

SO WHAT ? L’ANALYSE DU C*CM

L’optimisme des managers – en particulier, le fait qu’ils surestiment la satisfaction de leurs clients –peut constituer un obstacle lorsqu’il s’agit de mettre en place des programmes d’amélioration de la satis-faction. Il est indispensable de partager le résultat des études de satisfaction avec les managers en charge de la relation client, de les rassurer sur la robustesse des dispositifs de feedback, afin que leurs perceptionss’accordent avec celles des clients. Cela devrait conduire les entreprises à faire plus d’efforts pour satisfaire les clients, notamment en étant plus ambitieux sur la qualité des propositions de valeur.

LE REGARD DES PARTENAIRES

Il est essentiel de prendre conscience que les clients sont sans doute moins satisfaits et fidèles que ne le pensent les collaborateurs. L’existence de « biais cognitifs » dans la tête des managers peut s’expliquer de multiples façons, notamment en raison du système de récompense mis en place dans les entreprises, ou être porteur de bonnes nouvelles, en tant que manager, facilite la motivation des équipes. Pour sensibiliser l’interne et corriger en partie ces biais – condition nécessaire pour que les entreprises soient encore plus actives en matière de qualité des propositions de valeur, de satisfaction et de fidélisation – il est indispensable de développer des indicateurs de performance simples et robustes. Il est également important de ne pas s’appuyer sur des performances moyennes, qui conduisent à des programmes moyens, mais de regarder attentivement les clients qui évaluent très négativement ou très positivementl’entreprise. Si la satisfaction est unindicateur de performance essentiel, il faut intégrer d’autres indicateurs de pilotage, comme l’attachement, car beaucoup de relations ne reposent pas fondamentalementsur le ressort de la satisfaction, mais plutôt sur une relation affective. Le fait que les collaborateurs prennent parfois la place des clients est également un très bon moyende les sensibiliser à la qualité de servicerendu par l’entreprise.

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MÉTRIQUES D’EFFICACITÉ PERCEPTUELLES ET PROFITABILITÉ CLIENT : Y-A-T-IL VRAIMENT UN LIEN ?

Le choix d’Aïda Mimouni Chaabane du C*CM J. Andrew Petersen, V. Kumar, Yolanda Polo et F. Javier Sese (2018), Unlocking the power of marketing : understanding the links between

customer mindset metrics, behavior, and profitability,Journal of the Academy of Marketing Science, 46, 1, 813-836.

Valérie C., responsable marketing au sein d’un grand groupe international, appréhende le prochain comité de direction de son entreprise. Elle souhaite négocier la hausse du budget alloué à son équipe pour mettre en place des mesures régulières et fiables des perceptions de ses clients (e.g., satisfaction, qualité). Elle imagine déjà les réticences du directeur financier qui préfèrera des mesures plus hard telles que le ROI. Elle imagine aussi l’opportunisme de son collègue Hervé qui recommandera d’investir le budget dans l’amélioration du site et la mesure des taux de clics et de transformation par campagne. Si seulement elle pou-vait mettre la main sur une étude qui démontre le lien entre les mesures perceptuelles et le profit par client…

LE PROBLÈME

Avec le développement du digital et du marketing analytique s’est développée l’idée que le marketing « doit rendre des comptes » (marketing accountability). De fait, pour justifier la rentabilité des investissements opérés, les responsables marketing privilégient, de plus en plus, des données et des métriques comportementales (e.g., volume, panier moyen, clic) au détriment des métriques perceptuelles (e.g., qualité perçue, intention de fidélité). Or, une telle approche appauvrit les modèles explicatifs de la rentabilité et ne permet pas de comprendre les raisons de réussite ou d’échec des campagnes marketing.

LA QUESTION POSÉE PAR L’ARTICLE ?

Comment (processus) et jusqu’à quel point (magnitude) les perceptions des clients en termes dequalité, de satisfaction et d’intention de fidélité se traduisent-elles en profitabilité client ?

L’ÉTUDE DES CHERCHEURS

Les chercheurs ont utilisé des données individuelles et mensuelles (e.g., coûts marketing, nombre de contacts initiés par le client, satisfaction, qualité perçue) issues de contextes B2B (i.e., une entreprise detype high-tech, 1650 clients de 2007 à 2012) et B2C (i.e., une entreprise de télécommunications, 5000 clients de 2007 à 2103). Ces données ont permis d'expliquer le revenu moyen et la marge brute par client. Les résultats mettent en évidence 3 mécanismes explicatifs de l’effet des métriques perceptuelles (i.e., qualité,satisfaction et intention de fidélité) :

• Effet comportemental : des perceptions positives augmentent le comportement des clients car les consommateurs agissent généralement conformément à leurs croyances et opinions. • Effet d’efficacité marketing : des perceptions positives augmentent l’effet direct des efforts marketing de l’entreprise sur le comportement du client car les consommateurs accordent plus d’attentionaux stimuli en provenance d’entreprises pour lesquelles ils ont une opinion favorable.

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• Effet d’efficience marketing : des perceptions positives augmentent l’effet direct des efforts marketing de l’entreprise sur le profit par client car les consommateurs qui ont une opinion favorablede l’entreprise nécessitent moins de ressources et mettent moins de temps à traiter et à répondre àl’information fournie par l’entreprise.

Les résultats montrent par ailleurs que la satisfaction a l’effet le plus important sur l’efficacité desactions marketing alors que l’intention de fidélité a l’impact le plus important sur leur efficience.

SO WHAT ? L’ANALYSE DU C*CM

Le lien perceptions-profitabilité est bien réel, ce qui est rassurant dans un contexte de marketing accountability. En expliquant l’origine de ce lien (i.e., les trois mécanismes), cette recherche permet de savoir sur quel levier agir afin d’augmenter le profit par client. Le modèle proposé dans cette recherche peut-être facilement adapté aux spécificités de chaque entreprise et servir de critère de sélection et de segmentation clients (i.e., identifier les clients à forte profitabilité). En conclusion, il faut continuer à mesurer les perceptions des clients et tracker leur évolution dans le temps car cela permet de connaitreles sources du profit et d’optimiser l’allocation des ressources de l’entreprise.

LE REGARD DES PARTENAIRES

Il existe une réelle pression dans les entreprises pour mesurer, voire privilégier, les mesures diteshard comme le ROI. Si la mesure des effets directs (investissements -> profit) est primordiale, il est nécessaire de la compléter par une compréhension fine de l’origine de ces effets. Cet article confirme l’importancedes mesures perceptuelles ou soft et montre qu’elles jouent le rôle de signaux faibles déterminants pourévaluer le succès des investissements réalisés.

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NE CIBLEZ PLUS VOTRE PROGRAMME DE RÉTENTION SUR LES CLIENTS À FORT RISQUE DE DÉPART, MAIS SUR LES CLIENTS SENSIBLES À VOTRE

PROGRAMME DE RÉTENTION !

Le choix d’Eric julienne du C*CMAscarza, Eva (2018), Retention Futility: Targeting High-Risk Customers Might Be Ineffective, Journal of Marketing Research

M. Moustache, responsable des programmes de rétention, a bien compris qu’en réduisant le taux de départ client (le churn), il augmente la profitabilité de son entreprise. Il a donc calculé un score de risque pour chaque client de sa base CRM, puis il a lancé un programme proposant des réductions de prix aux 10% de clients présentant les scores de risque les plus élevés… Mais au fait, ce choix de cible est-il approprié ? Les clients à risque élevé sont-ils nécessairement les clients les plus réceptifs au programmede rétention ?

LE PROBLÈME

Dans de très nombreux secteurs d’activité, les entreprises gèrent désormais le churn de manière proactive, en détectant dans leur base CRM les clients qui ont le risque de départ le plus élevé. Pourtant, aucune étude n’est venue confirmer que ce sont bien les individus à risque élevé qu’il faut cibler. Prenonsl’exemple de deux individus. Le premier présente un risque de départ élevé, disons 40%, et le second un risque de départ plus faible, disons 30%. Il est tentant de cibler l’effort de rétention vers le premier client, celui qui a le plus fort r isque.

Mais imaginons maintenant une donnée supplémentaire qui pourrait modifier la perspective. Imaginons que vous soyez en mesure de prédire qu’à la suite de votre programme de rétention, le risque de départ du 1er client baisse de 5 points, alors que le risque du deuxième client diminue de 10 points. Cen’est alors plus le premier client qu’il faut cibler, mais le second, celui qui est le plus sensible àvotre programme de rétention.

LA QUESTION POSÉE PAR L’ARTICLE

Plutôt que cibler les clients à fort risque de départ, ne faut-il pas plutôt cibler les clients les plussensibles aux programmes de rétention ?

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L’ÉTUDE DES CHERCHEURS

La variable clef qui explique le succès d’un programme de rétention est la sensibilité au pro-gramme. Plus un client est sensible au programme, plus son risque de départ diminue lorsqu’il a été exposé au programme. Vous objecterez probablement qu’il est impossible de connaître a priori la sensibilitéd’un client à un programme de rétention, d’autant plus que les contenus changent d’un programme à l’autre. Pour connaître cette sensibilité, l’auteure de l’étude, Eva Ascarza, suggère de systématiserles prétests des programmes. La méthode consiste à faire un A/B testing sur la base de deux échantillonstirés au hasard dans la base CRM. L’intérêt de l’A/B testing est ici d’établir un lien statistique entre les caractéristiques de chaque client (par exemple : achats passés, âge, sexe, CSP, etc.) et sa sensibilité au programme, étant entendu que la sensibilité client se calcule programme par programme.

Par extrapolation à la totalité de la base, il devient ensuite possible de calculer, à partir des caractéristiques client, un score prédictif de sensibilité individualisé pour chaque client et pour chaque programme. Ceci permet de cibler les clients dont les scores de sensibilité sont les plus élevés.

Eva Escara montre au travers de deux expérimentations que la méthode consistant à cibler les clients les plus sensibles au programme de rétention est plus efficace que la méthode consistant à ciblerles clients ayant le plus fort risque de départ. Elle observe que plusieurs caractéristiques client sont fortementcorrélées au risque de départ alors qu’elles ne sont pas corrélées à la sensibilité au programme. Ceci explique que le ciblage des clients sur la base du risque de départ est peu efficace.

SO WHAT ? L’ANALYSE DU C*CM

La méthode fondée sur la sensibilité client au programme interroge les pratiques habituelles fondées sur le risque de départ. Bien sûr, il faut plus de temps (celui de l’A/B testing) et un minimum decapacité en science des données pour la mettre en œuvre. Mais cet effort devrait permettre d’accroîtrel’efficacité des programmes de rétention tout en optimisant les budgets marketing.

LE REGARD DES PARTENAIRES

Les programmes de rétention devraient surtout cibler les clients à forte valeur. Si les clients ne sont pas sensibles au programme de rétention, c’est que celui-ci est peut-être mal conçu. Il faut donc se poserla question de la sensibilité très en amont, en concevant un programme auquel les clients à forte valeur sont sensibles, plutôt que mesurer la sensibilité a posteriori. Toutefois, le concept de sensibilité au programme couplée à la démarche d’AB testing reste intéressante dans le sens où l’expérimentation permet de contrecarrer les biais cognitifs des managers, de confronter les a priori au réel, de vérifier par l’expérimenta-tion l’efficacité d’un programme.

Sur un plan pratique, l’AB testing est moins complexe à mettre en œuvre pour un e-commerçant pure player que dans l’univers du retail physique où il pose des difficultés parfois difficilement surmontables(deux versions de systèmes de caisse en magasin, deux versions de formation vendeurs, et surtout cohérence avec la communication online). De plus, la durée de l’expérimentation est par nature assezbrève, alors que l’efficacité d’un programme de rétention qui joue sur les fondamentaux (par exemplesur la reconnaissance) s’apprécie dans la durée. Enfin, la sensibilité au programme ne devrait peut-être pas être appréhendée au niveau global : plutôt que de mettre en cause un programme de rétention dans son ensemble, peut-être est-il préférable d’en AB tester les différentes composantes. Par exemple, le canal A est-il meilleur que le B ? Un effet surprise est-il plus efficace qu’un bon de réduction ? etc.

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COMMENT LES BIG DATA ANALYTICS PERMETTENT

L’INNOVATION DE SERVICE

Le choix de Thierry DELECOLLE du C*CM Lehrer et al. (2018), How Big Data Analytics Enables Service Innovation: Materiality, Affordance, and the Individualization of Service,

Journal of Management Information Systems, 35, 2, 424-460

Le marché de la vente de voyages sur internet connaît une guerre intense des prix. Différents voyagistes commercialisent les produits des mêmes tour-opérateurs. La communication auprès des prospects et clients est agressive et l’argument principal est le prix. Les foyers voient fleurir des objets connectés contrôlant les accès, la luminosité, la température… ces objets laissent des traces numériqueset représentent des enjeux de sécurité. Les acteurs de l’assurance réfléchissent à mettre en œuvre denouveaux services pour accompagner ces nouveaux comportements.

Dans ces deux cas, les technologies Big Data sont perçues comme un vecteur de différenciationpossible pour proposer un service individualisé. Dans le premier cas, il s’agit de déplacer la communicationdu prix sur les attentes du client; dans le second, imaginer avec les clients comment proposer de nouveaux services. L’article de Lehrer et ses co-auteurs présente comment intégrer les technologies du BDA pour se différencier par des services individualisés.

LE PROBLÈME

La banalisation des produits et la demande croissante des clients pour une individualisation de la relation voient l’émergence d’une innovation par les services en complément (voire en remplacement) d’une innovation produit. L’innovation de service représente l’opportunité de se différencier en proposant aux clients une offre unique. Les entreprises cherchent à capitaliser sur les technologies digitales afin de mettre en place ces innovations de service : au nombre desquelles les technologies liées au Big Data. Elles permettent de représenter les « traces digitales » des clients dans un schéma plus large, favorisant la conception de services orientés clients dans différents secteurs et pour différents usages : capteurs de conduite de véhicules, machines à laver le linge connectées… La technologie ouvre un champ des possibles, mais la littérature ne propose pas de cadre permettant de comprendre comment faire levier en termes d’innovation de service.

LA QUESTION POSÉE PAR L’ARTICLE

Comment les caractéristiques matérielles et logicielles du Big Data Analytics favorisent-elles l’innovation de service ?

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L’ÉTUDE DES CHERCHEURS

Les auteurs ont réalisé quatre études de cas auprès d’entreprises privées opérant sur des marchés BtoC (Assurance, banque, télécommunications, e-commerce/vente de voyages). Ces études de cas visentà comprendre comment les technologies associées au big data analytics (BDA) favorisent l’innovation de service et notamment l’individualisation de la relation client. Les auteurs identifient les caractéristiques matérielles et logicielles du BDA (sourcing et stockage, analytique/évènements, exploration/visualisation) et leur capacité à individualiser la relation client à travers la technologie seule (automatisation totale du service) ou l’interaction employés-technologies (c’est-à-dire s’appuyant sur un personnel en contact"augmenté" par les apports des BDA pour réaliser sa prestation de service).

SO WHAT ? L’ANALYSE DU C*CM

Les BDA impactent les services en termes de (1) proactivité, (2) vitesse et (3) individualisation. L’enjeu n’est plus seulement de mettre en place des technologies de filtrage multicritères – comme dans le cas des voyages – mais bien d’identifier en amont de la recherche d’un voyage les centres d’intérêt du client, son activité passée, et tout autre élément utile pour lui proposer la bonne destination au bon moment. Une entreprise se fixant comme objectif stratégique de délivrer un service individualisé aux clients pourra recourir aux technologies BDA soit de façon totalement automatisée (e.g. déclencher une alarme en cas d’infraction, apporter des réponses de premier niveau via un automate sur un canal digital) soit par l’intermédiation d’un collaborateur (l’idée est alors d’apporter au collaborateur des informations qu’il pourra utiliser pour approcher de façon proactive le client et/ou s’ajuster automatiquement à ses préférences). L’automatisation sera préférable lorsque le service est déterministe; le recours à un collaborateur s’imposera lorsqu’il faut donner à ce dernier des moyens d’actions dansun parcours non déterministe. Lorsque le client n’est pas suffisamment expert ou que l’objet de la transaction présente un risque fort, l’intermédiation humaine reste à proposer.

LE REGARD DES PARTENAIRES

L’axe de lecture proposé par cet article est intéressant en ce qu’il situe l’utilisation des technologies liées au Big Data dans une approche ouverte à la fois sur les clients et les collaborateurs de l’entreprise. Les entreprises doivent convaincre les collaborateurs en contact des clients de l’utilité des nouvelles technologies dans leur mission, et ne pas les laisser percevoir comme, au mieux inutiles, au pire concurrentes. Bien pensé, le traitement de l’information disponible à tous les points de contact permetd’enrichir la relation lors des interactions entre collaborateurs et clients. Les collaborateurs doivent aussi êtreen mesure d’accompagner les clients dans l’appropriation des nouveaux outils digitaux qui leurs sontofferts par les entreprises.

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COMMENT FAIRE FACE AU DÉLUGE DE DONNÉES, OU COMMENT JETER L’EAU DU BAIN SANS JETER LE BÉBÉ ?

Le choix de Pierre Volle du C*CM Brent Kitchens, David Dobolyi, Jingjing Li et Ahmed Abbasi (2017), Advanced Customer Analytics: Strategic Value Through Integration

of Relationship-Oriented Big Data, Journal of Management Information Systems, 35, 2, 540-574.

Marion est Chief Data Officer pour un site marchands en B2B. Avec plus de 400 000 clients, plusieurs milliers de produits et plusieurs millions de transactions, le volume de données captées par les différents systèmes d’information (transactions, commentaires sur les produits, échanges sur l’ensemble des canaux…) a considérablement augmenté depuis quelques années. Comme l’ensemble du comex, Marion sait que la maîtrise des données constitue un avantage concurrentiel sur ce marché. D’ailleurs, les moyens alloués à son service n’ont cessé d’augmenter, en termes de budget comme d’effectif, malgré la rareté des profils de « data scientists ». Pour autant, quelle méthode adopter pour décider quellesinformations doivent être prioritairement intégrées et valorisées ? L’étude menée par Kitchens et ses collègues répond en partie à cette interrogation.

mais à inventer des outils – les chercheurs proposent une méthode pour développer une infrastructure de données agile permettant de dépasser les silos organisationnels, en intégrant des données provenantde sources multiples.

La recherche vise à développer un modèle prédictif de la conversion, de la rétention et de la valeur à vie d’un portefeuille de plus de 660 000 clients d’un site marchand, chacun décrit par plus de 1 000 caractéristiques.

Elle repose sur la modélisation de données massives par les méthodes d’apprentissage automa-tique (composite convolution kernel support vecteur machine). Le modèle considère également le coût des données dans la décision d’intégrer telle ou telle source. Par ailleurs, notons qu’à la différence des approches purement exploratoires (fouille des données), cette méthode repose sur les théories du marketingrelationnel puisqu’elle repose sur le calcul d’indicateurs de satisfaction ou d’engagement.

Finalement, la méthode propose de calculer un ensemble d’indicateurs sophistiqués (portfolioof advanced analytics) pour prédire la performance commerciale du site marchand et débouche sur l’identification des sources de données les plus critiques, structurées ou non (commentaires sur les produits ou contenus des messages échangés avec le site, par exemple). Cette méthode aide clairement lesmanagers à comprendre la valeur des données dont ils disposent dans toute l'organisation.

LE PROBLÈME

Face au déluge de données, les managers comme les spécialistes peuvent être désemparés. Ils sont confrontés à des choix drastiques pour intégrer et exploiter les données à forte valeur ajoutée. Maislesquelles ?

LA QUESTION POSÉE PAR L’ARTICLE

La capacité à analyser des données massives à propos des clients constitue assurément un avan-tage concurrentiel. Mais quelles données intégrer enpriorité ?

L’ÉTUDE DES CHERCHEURS

Dans une perspective de « design science » – lorsque la recherche vise fondamentalement non pas à expliquer le monde qui nous entoure,

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SO WHAT ? L’ANALYSE DU C*CM

Cette recherche montre que le rôle des chercheurs n’est pas seulement de décrire, expliquer ouprévoir des phénomènes, mais également d’élaborer des méthodes efficaces applicables dans desorganisations. Cette recherche montre également que les méthodes d’apprentissage automatique sur données massives rentrent progressivement dans le champ de la recherche académique. Par ailleurs, la méthode est intéressante car elle montre l’intérêt de collecter des données « soft » (satisfaction, recommandation…) et pas seulement des données « hard » (transactions, usages…). Autrement dit, lesconcepts relationnels sont utiles pour améliorer la performance commerciale. Par ailleurs, la méthodeintègre cette notion de coût des données qui est souvent ignorée par les entreprises.

LE REGARD DES PARTENAIRES

Aujourd’hui, les données sont tellement massives qu’il n’est plus possible de tout collecter pour ensuite déterminer ce qui sera utile. De fait, être en capacité de déterminer quelles données valoriser en priorité devient une capacité critique. Cette capacité repose sur une étroite coordination entre équipes commerciales et équipes informatiques. Si les équipes marketing étaient limitées par les technologies, elles sont désormais dépassées. Dans ce contexte, il est important d’investir dans le développement de compétences en data marketing. La méthode proposée ici est intéressante car elle nécessite au préalablede savoir dans quel objectif collecter prioritairement les données (conquête, rétention…). Une fois les priorités « business » bien définies, ce qui reste le rôle essentiel du décideur, l’intelligence artificielle apporte un soutien considérable. La méthode d’apprentissage automatique utilisée ici est particulièr-ement pertinente dans la mesure où il est possible de retracer le lien entre la priorité « business » et le ré-sultat de l’analyse. Ce n’est pas une boîte noire, contrairement à de nombreux algorithmes. C’est dansun équilibre entre les donnéesobservées (comme les usages) et les données déclarées (comme lescommentaires sur les produits) que l’on pourra améliorer les modèles de compréhension.

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ENTRE ROBOCOP ET TERMINADOR, QUELS IMPACTSDES ROBOTS SUR L’EXPÉRIENCE DE SERVICE ?

Le choix de Lionel Nicod du C*CM Jochen Wirtz, Paul G Patterson, Werner H.Kunz, Thorsten Gruber, Vinh Nhat Lu, Stefanie Paluch et Antje Martins (2018), Brave new

world: service robot in the frontline, Journal of Service Management, 29, 5, 907-931.

LE PROBLÈME

La robotisation est en marche et cette nouvelle révolution industrielle est en train de modifier en profondeur les expériences de service ainsi que les organisations. Les robots se définissent comme dessystèmes autonomes et adaptables, qui interagissent, communiquent et fournissent un service. Ces robots prennent des formes diverses mais deviennent omniprésents. Ils envahissent notre quotidien : bot sur internet, caddie automatique dans les supermarchés, drones de livraison, voitures autonomes… Pour l’expérience du client, cette robotisation offre de nouvelles opportunités. Par exemple, l’aéroport Lyon St Exupéry teste des robots voituriers. Au niveau du marché, elle rebat les cartes de la concurrence. L’utilisation de bot pour les chatbox permet de réduire drastiquement les coûts de masse salariale et génère un avantageconcurrentiel. À l’échelle de la société, elle induit des changements profonds. D’après un rapport de l’OCDEdu 25 avril 20191, 16,4% des emplois en France disparaîtraient et près de 33% seraient modifiés radicalementsuite à la robotisation.

LA QUESTION POSÉE PAR L’ARTICLE

Face à cette croissance exponentielle des robots dans l’expérience de service, il est intéressant de tenter d’anticiper les conséquences d’une telle révolution et la place qui restera aux employés en front office. Quel sera le rôle des robots ? Quel sera leur impact au niveau de l’expérience client ? Du marché ? Et de la société ?

L’ÉTUDE DES CHERCHEURS

L’étude des chercheurs repose sur une réflexion collective et prospective du monde de demain, dans lequel les employés, clients et robots seront voués à collaborer pour produire le service. Cette analyse est menée en considérant trois niveaux : le niveau micro, qui correspond à l’expérience de service d’un client, le niveau meso, celui de l’organisation, et le niveau macro, la société de façon générale. Ils comparent d’abord les caractéristiques d’un employé et d’un robot. Au niveau micro, les employés agissent en tant qu’être humain : ils ont des capacités limitées, ils doivent être formés de façon individuelle, ils ont besoinde comprendre ce qu’ils font et pourquoi, les résultats de leur travail sont variables et dépendent de leur investissement. En revanche, les émotions qu’ils ressentent sont naturelles, ils sont capables de sortir de schéma pré-construit pour régler des problèmes complexes et d’être créatifs.

Les robots, quant à eux, sont des acteurs d’un réseau, qui pour s’améliorer doivent être mis à jour. Les résultats de leurs actions sont homogènes, ils disposent d’une mémoire et de capacité de calcul quasi-illimitées, ils reconnaissent des cas et les traitent en fonction d’algorithmes. En revanche, ils sont uniquement capables d’imiter des émotions, ils ne peuvent pas gérer des situations en dehors de cellesconnues et des règles prédéfinies. Au niveau du marché, robots et employés peuvent tous les deuxêtre des sources d’avantage concurrentiel, mais en s’inscrivant dans des stratégies différentes. Les employés permettent une différentiation plus qualitative avec des coûts importants, les robots génèrentdes économies sur des tâches plus basiques.

Au niveau de la société, les économies générées par les robots pourraient permettre de baisserles prix et rendre accessibles de nombreux produits/services. Ils remplaceront les employés sur les em-plois non attractifs et répétitifs. Les employés, quant à eux, resteront incontournables sur les métiersà haute technicité et à forte implication émotionnelle.

1 : https://www.oecd-ilibrary.org/sites/9ee00155-en/index.html?itemId=/content/publication/9ee00155-en&_csp_=b4640e1ebac05eb1ce93dde646204a88&itemIGO=oecd&itemContentType=book

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En partant de ces différences, les auteurs réfléchissent ensuite aux tâches qui pourraient êtreconfiées aux robots et/ou conservées par les employés en fonction des besoins clients :

SO WHAT ? L’ANALYSE DU C*CM

Les robots sont déjà une réalité et leur influence ne va pas cesser de croître. Comprendre comment lesintégrer au niveau de l’expérience client, du marché et de la société est un enjeu de taille. Savoir comment et quand les articuler avec le personnel en contact est un défi majeur pour la création de valeurpour l’entreprise et le consommateur.

LE REGARD DES PARTENAIRES

Les robots sont une vraie préoccupation pour les entreprises. Ils posent de nombreuses questions tant sur le plan de la relation client (Quand les robots sont-ils pertinents ? Faut-il que le client sache qu’ilinteragit avec un robot ? Les robots doivent-ils ressembler à des humains ?...) que managériales (Com-ment gérer l’intégration des robots en front office ? Comment créer des équipes robots/employés ?...).Il est donc primordial se pencher sur la question et l’article apporte un premier éclairage.

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CO-DESIGNER SES SERVICES AVEC LES CLIENTS, EST-CE EFFICACE ?

Le choix d’Isabelle Prim-Allaz du C*CM Trischler J., Pervan S.J. & Kelly S.J. (2018) The value of co-design: the effect of customer involvement in service, Journal of Service

Research, Vol 21, Issue n°1, pp.75-100

Doit-on innover avec ses clients ? Apportent-ils réellement de nouvelles idées permettant de vraiesinnovations de rupture ou sont-ils tout au plus capables de réaliser de petites innovations incrémentales ?Sont-ils plus innovants seuls ou doivent-ils être accompagnés par des équipes internes à l’organisation ?Bref, dit autrement, quelle place leur accorder dans les processus d’innovation ?

LE PROBLÈME

Sur le papier, le co-design permet d’amener des points de vue et des savoirs différents et complémentaires supposés aboutir à des idées nouvelles et à des concepts avec une viabilité accrue. En pratique, les résultats restent souvent très mitigés, d’où la nécessité de mieux comprendre lesconditions du succès d’opérations de co-design.

LA QUESTION POSÉE PAR L’ARTICLE

Le co-design consiste à intégrer les clients à l’équipe pour proposer des idées nouvelles. Son efficacité fait débat. Et la question de la constitution de l’équipe n’est que peu abordée : choix des « bons »clients et intégration dans l’équipe.

L’ÉTUDE DES CHERCHEURS

Les chercheurs proposent une expérimentation au sein de bibliothèques universitaires australiennes.Ils rappellent la pression mise sur ces institutions en termes de satisfaction des utilisateurs ce qui permet seloneux de se rapprocher d’un secteur concurrentiel plus « classique ».

Trois situations de co-design sont testées via la mise en place de 4 concours d’idées visantau développement de nouveaux usages et de nouveaux environnements : • design par une équipe de R&D interne; • design uniquement par des clients (lead users); • design par une équipe mixte.

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SO WHAT ? L’ANALYSE DU C*CM

Le co-design permet des solutions plus innovantes et intéressantes pour les clients mais avec un degré de faisabilité moindre (ce qui peut ralentir le délai de mise sur le marché et augmenter les coûts). À condition que les clients soient bien choisis (via une communication claire sur les objectifs de l’opération de co-design) et qu’un processus collaboratif (entre les clients et entre les clients et les salariés) se mette vraiment en place!

Par conséquent, il est fondamental de consacrer du temps à la mise en place de la coordinationde l’équipe pour que chacun apprenne à connaître les autres membres de l’équipe, ainsi qu’à larésolution des conflits qui peuvent apparaître entre les membres de l’équipe.

LE REGARD DES PARTENAIRES

Le co-design ne peut être LA solution. Ce n’est pas le plus efficace en termes de productiond’idées et cela peut rallonger le temps nécessaire à l’innovation. En revanche, son implication dans unprocessus itératif de type test and learn peut être très intéressant pour éviter des erreurs industrielles, c’est-à-dire faire des allers-retours avec des user testings au cours de la phase de production pour s’assurer que l’on fabrique des produits qui seront adaptés aux usages.

Le co-design présente un véritable intérêt en termes d’implication des salariés et des clients : il permet de renforcer leur engagement, leur empowerment. Cela fait de ces clients et de ces salariés,impliqués dès le début du processus, les meilleurs ambassadeurs de l’innovation.

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LE PERSONNEL EN CONTACT IDÉAL ? À LA FOIS CRÉATIF ET ATTENTIF AUX DÉTAILS ?

Le choix d’Isabelle Prim-Allaz du C*CM Sok P., Sok K.M. & Danaher T.S. (2018), The complementarity of frontline service employee creativity and attention to detail in service

delivery, Journal of Service Research, Vol 21, Issue n°3, pp.365-378

Paul se rend dans un café, il est accueilli avec un mot de politesse (le même que le client précédent et que le client suivant !), le serveur semble suivre un script parfaitement rodé pour chacun de ses gestes et paroles. Paul obtient ce qu’il était venu chercher, mais trouve l’expérience un peu triste. Jade se rend dans un café, elle est accueillie avec un trait d’humour qui semble très personnel au serveur. Celui-ci lui propose une boisson qu’elle ne voit pas à la carte et qui semble un cocktail de sa propre composition. Il le lui sert de longues minutes plus tard semblant avoir eu quelques difficultés à réaliser sa promesse. Elle obtient à la fin ce qu’elle était venue chercher, mais ne sait que trop penser de cette expérience.

Finalement, le serveur idéal ne serait-il pas un savant mélange de celui qui a servi Paul avec celui qui a servi Jade ? Créatif et attentif aux détails.

LE PROBLÈME

Pour maîtriser la qualité de service, les entreprises ont eu tendance, ces dernières années à formaliser de plus en plus les tâches du personnel en contact dans des procédures. En résumé, le clienta parfois le sentiment d’être en face d’un robot plus que d’un être humain. Et le personnel en contactpeut trouver le travail peu gratifiant.

À l’inverse, laisser libre cours à la créativité du personnel en contact peut rendre leur travail plus intéressant – et parfois plus incertain mais l’expérience vécue par le client peut s’en trouver dégradée si le personnel perd toute rigueur. Il s’agit dès lors de comprendre l’articulation entre, d’un côté, l’attention aux détails et le respect des procédures et, de l’autre côté, la possibilité de laisser libre cours à la créativité.

LA QUESTION POSÉE PAR L’ARTICLE

Les prestataires de services souhaitent largement offrir des services personnalisés. Le personnel en contact est ainsi amené à des rôles différents, voire divergents : exécuter des tâches prédéfinies tout en étant capable de sortir du cadre pour imaginer des solutions originales. Il faut ainsi trouver le bon équilibre

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entre créativité et attention aux détails, deux comportements jugés potentiellement peu compatibles,pour délivrer un service performant.

L’ÉTUDE DES CHERCHEURS

Les auteurs ont réalisé deux études. Une auprès d’agences de voyages basées en Asie. 579 employées Et 127 managers ont été interrogés. L’autre auprès de salons de coiffure, toujours en Asie, sur un échantilloncomprenant 426 employés et 104 managers. Les résultats montrent que :

• Lorsque le personnel en contact porte une grande attention aux détails, une plus grandecréativité améliore la performance de service et inversement. • Porter une plus grande attention aux détails ou proposer une plus grande créativité lorsque l’autre caractéristique est faible améliore la performance dans un premier temps puis la dégrade(Courbe en U inversée).

SO WHAT ? L’ANALYSE DU C*CM

Le personnel en contact doit montrer de l’ambidextrie, c’est-à-dire être à la fois créatif et attentif aux détails, et être recruté en conséquence et/ou formé à mettre en œvre ces deux comportements simultanément. Cela passe par des machines. Le personnel en contact est plus dans le développementde la confiance en soi et l’autonomie.

LE REGARD DES PARTENAIRES

Le rôle du personnel en contact change. Il devient moins répétitif et dans le suivi de procédures strictes, les tâches les plus répétitives pouvant être prises en charge par des machines, et plus dans le diagnostic et le problem solving. La créativité et la réactivité deviennent primordiales. Plutôt que de parier sur des procédures, il vaut mieux parier sur l’autonomie et l’intelligence du personnel en contact, qui trouvera ainsi son travail plus intéressant. Cela n’empêche pas le contrôle a posteriori. La coordina-tion du personnel peut se faire via les procédures, le partage de valeurs ou les principes. Les entreprises innovantes et performantes en termes de relation client ont tendance à mettre de côté la coordinationpar les procédures, proposant tout au plus des guidelines, sauf pour certains éléments commela sécurité ou l’hygiène.

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RENFORCER LE LIEN PERSONNEL À LA MARQUE : LA PAROLE DE VOS CLI-ENTS LES ENGAGE PLUS QUE LEURS POSTS !

Le choix de Françoise Simon du C*CM Shen, H. & Sengupta, J. (2018), Word of Mouth versus Word of Mouse: Speaking about a Brand Connects You to It More Than Writing Does,

Journal of Consumer Research, 45, 595-614.

Que se passe-t-il quand le bouche-à-oreille des clients sur les marques qu’ils apprécient se dérouleen face à face plutôt qu’en ligne ? En d’autres termes, la modalité orale plutôt que virtuelle de la prise de parole d’un client peut-elle influencer le futur de la relation que ce client entretient avec la marque ?Et si oui, quels sont les processus communicationnels à l’œuvre ?

LE PROBLÈME

Avec le développement des écosystèmes Internet, les marques s’efforcent d’augmenter le volume des avis en ligne de leurs clients pour renforcer leur e-réputation. Parallèlement, les marques cherchent à favoriser le bouche-à-oreille au sein de leurs communautés de marque pour favoriser la création d’une culture commune et augmenter l’attractivité de ces lieux de socialisation et de co-création. Pour autant, ces formes de prise de parole du client voulues par la marque ont pour caractéristique de mobiliser le langage écrit plutôt qu’oral des clients. Or, le langage oral et les conversations menées dans uncontexte physique ont des effets relationnels qui les différencient du langage écrit. Dès lors, il importe de comprendre la nature du risque relationnel pris par les marques lorsqu’elles optent pour des stratégiesconversationnelles centrées sur le bouche-à-oreille électronique.

LA QUESTION POSÉE PAR L’ARTICLE Quelles sont les modalités communicationnelles du bouche-à-oreille les plus efficaces pour renforcerle lien psychologique qui relie l’émetteur du message à la marque ? En s’appuyant sur lesthéories récentes de la communication, plusieurs arguments théoriques conduisent à formuler l’hypothèse que la communication orale plutôt qu’écrite relative à la marque produira plus de penséespersonnelles de l’émetteur en lien avec celle-ci, contribuant ainsi au renforcement du lien identitaireet affectif qui relie le client comme émetteur du message à la marque.

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L’ÉTUDE DES CHERCHEURS

Cinq expérimentations réalisées auprès d’étudiants ont permis de valider trois grandesfamilles d’impact associées à la parole du client :

• Est établi l’effet supérieur de la prise de parole du client, comparativement au post en ligne, sur le renforcement du lien psychologique et identitaire qui relie le client émetteur du message à la marque • Est mise en évidence l’influence positive du renforcement du lien à la marque sur la qualité de la réponse du client en cas d’attaque concurrentielle ou de rupture de stock • Est décrit le mécanisme communicationnel selon lequel, lors du processus de prise de paroled’un individu, la conscience de l’audience physique à laquelle il s’adresse conduit l’émetteur du message à produire spontanément des pensées auto-centrées reliées à la marque (réminiscence d’usages du produit, cognitions relatives à la place de la marque dans la vie du client, ….).

SO WHAT ? L’ANALYSE DU C*CM

Parce que la parole du client l’engage plus vis-à-vis de la marque que les posts, les marques doivent favoriser la prise de parole orale de leurs clients soit en organisant des rencontres physiques de clients, soit en favorisant la mise en ligne de vidéos de témoignage sur les réseaux sociaux. De plus, les posts des clients peuvent être rendus plus engageants pour leurs auteurs si la marque les incite à développerun contenu incluant des aspects interactionnels en lien avec la communauté de marque. .

LE REGARD DES PARTENAIRES

Les entreprises prennent conscience de l’importance de la parole du client et des avis produit. Par conséquent, agir sur le bon canal est primordial pour obtenir de l’engagement client. Il est vrai queparler semble de prime abord plus engageant que poster. Encourager les clients à laisser des témoignages vidéo peut être une bonne idée mais deux points de vigilance sont à considérer. Premièrement, un postse lit plus vite qu’une vidéo ne s’écoute.

Deuxièmement, les vidéos sont plus difficiles à gérer par les systèmes d’information. Plus généralement, les témoignages vidéo s’inscrivent dans la tendance éditoriale du « live » sur les réseaux sociaux. Les consommateurs aspirent à des contenus plus authentiques, moins formatés qui caractérisentla communication de type « live ». Mais, en même temps, cela signifie un moindre contrôle de la marque sur les contenus qui la concernent.

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INCITATIONS DES CLIENTS À LAISSER UN AVIS SUR INTERNET : LE POINT DE VUE DES LECTEURS

Le choix de Sylvie Llosa du C*CM Thomas Reimer et Martin Benkenstein (2018)Not just for the recommender: How eWOM incentives influence the recommendation

audience, Journal of Business Research, 86, 11-21.

Julie souhaite découvrir un restaurant dans une ville qu’elle ne connaît pas encore, une bonne adressedans laquelle elle est sûre d’être satisfaite. Pour cela, comme beaucoup, Margaux navigue sur l’Internet et analyse les avis formulés par les internautes qui y ont déjà été afin de se faire un avis sur l’établissement

LE PROBLÈME

Le bouche à oreille est un moyen de communication beaucoup plus crédible et persuasif que toute autre publicité traditionnelle. De nos jours, les avis sur l’Internet concernant un service ou un produit sont facilement accessibles et également très persuasifs. La qualité de service étant incertaine avant consom-mation, les consommateurs sont dépendants des expériences antérieures des autres. Le eWOM est un levier à solliciter pour une entreprise qui souhaite jouir de sa haute crédibilité et de son faible coût. Ainsi, afin d’augmenter la probabilité qu’un individu rédige un avis positif, les managers ont usé de moyens reposant sur les motivations extrinsèques d’un individu, comme la motivation par la récompense financière. Cependant, si les lecteurs se rendent compte de l’utilisation de ces techniques, quelles en sont les conséquences ? Et quelles sont les meilleures façons de motiver un consommateur à laisser un avis ? Les auteurs pensent ainsi qu’il existe d’autres motivations, comme celles visant à aider les consommateurs et l’entreprise, et la donation à un projet social.

LA QUESTION POSÉE PAR L’ARTICLE Quelle est la meilleure façon pour une entreprise d’inciter ses clients à laisser un avis positif crédible et fiable sur l’Internet, du point de vue des lecteurs ?

L’ÉTUDE DES CHERCHEURS

Reimer et Benkenstein interrogent 150 étudiants quant à leurs perceptions d’un restaurant suite à la lecture d’avis tout à fait positifs (du point de vue du service, du repas et des prix) rédigés par des individus. On leur apprend par la suite que les individus ayant rédigé cet avis ont peut-être été influencés par un programme de motivation de la part de l’entreprise de service. Les répondants étaient classés en trois groupes. On indique au premier groupe que chaque mois, cinq rédacteurs sont récompensés par un coupon de 20 euros pour rédiger leur avis. Les lecteurs ont donc l’impression que leur motivation est extrinsèque, motivée par l’argent.

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On indique au second groupe que les rédacteurs ont laissé leur avis suite aux motivations suivantes : « En disant à quel point vous êtes satisfaits vous contribuerez à notre succès, à partager votre expérience et aider d’autres consommateurs à trouver le bon restaurant ». Les lecteurs ont l’impression que ces motivations sont altruistes, rédigées pour aider les autres. On indique au troisième groupe que chaque mois cinq rédacteurs d’avis choisissaient un projet social qui reçoit 20 euros de la part du restaurant. Les motivationsparaissent de nouveau altruistes. L’étude montre les avis motivés par l’idée d’aider les consommateurs dans leurs choix et l’entreprise,et ceux motivés par les donations paraissent plus fiables que ceux motivés par l’argent, et génèrent moins de scepticisme. Les avis fiables ont un effet positif sur l’attitude vis-à-vis de l’entreprise, qui a elle un effet positifsur l’intention d’achat.

Les avis motivés par l’argent laissent les lecteurs sceptiques, scepticisme qui a un effet négatif sur l’attitude et donc l’intention d’achat.

SO WHAT ? L’ANALYSE DU C*CM

Les entreprises, pour conserver leur crédibilité et pour que le client ait confiance en l’avis, ont intérêtà privilégier les programmes d’incitations altruistes en ligne. Parmi les deux incitations altruistes testées, laseconde (aide entreprise et autres consommateurs) a, de plus, l’avantage d’être la moins chère.

Les entreprises qui utilisent l’incitation par le don devraient être en mesure d’élaborer une stratégie de communication pour convaincre les consommateurs que la motivation altruiste n’est pas uneaction unique de marketing, mais qu’elle fait partie intégrante de sa philosophie en matière de responsabilité sociale et qu’elle s’aligne avec le cœur de métier de l’entreprise.

LE REGARD DES PARTENAIRES

On retrouve la suprématie des motivations altruistes (l’aide et le conseil aux autres clients) dans certaines politiques d’enseigne de distribution. Par exemple, chez Décathlon, tout produit qui de façon significative obtient moins de 3 étoiles est déréférencé. Ce sont des décisions fortes, qui transfèrent beaucoup de pouvoir dans les mains des clients. Le client apprécie de « peser » sur l’avis des autres.

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SIMPLE MANQUE DE BOL ? L’INFLUENCE D’UNE CONVERSATION AVEC UN CLIENT AYANT VÉCU

UNE EXPÉRIENCE CONTRASTÉE

Le choix de Sylvie Llosa du C*CM Daniel Carlos Brannon et Adriana Samper (2018), Maybe I Just Got (Un) lucky: One-on-One Conversations and the Malleability of Post-

Consumption Product and Service Evaluations, Journal of Consumer Research, 45(4), 810-832.

Vous venez d’acheter le dernier IPhone. Après une semaine, l’appareil photo ne marche plus, vous ne pouvez plus prendre de photos. Vous rencontrez un ami, vous remarquez qu’il a le même téléphone, et vous lui racontez votre mauvaise expérience. Votre ami vous répond alors que son appareil fonctionneparfaitement. Cette conversation va-t-elle changer votre évaluation (attitude, satisfaction, intention de rachat de la marque) ?

Lors d’une rencontre où deux personnes comparent leurs évaluations quant aux performances et à la qualité d’un produit ou service, deux retours d’expériences s’affrontent, l’un positif, l’autre négatif. Mais un des deux influencera-t-il l’autre ?

LE PROBLÈME

Les recommandations de la famille et des amis restent aujourd’hui un enjeu incontournable pour les marques qui savent combien elles influencent le client. 75% des conversations de bouche à oreille entre individus sont en face à face ou bien par téléphone Aucune recherche n’a été effectuée sur l’influence persuasive des conversations dyadiques où les consommateurs partagent à la fois desexpériences directes similaires ou contrastées en matière de produits et de services.

LA QUESTION POSÉE PAR L’ARTICLE Un individu ayant vécu une expérience négative (positive) sera-t-il influencé dans son jugementdu produit/service par une conversation avec un proche ayant vécu une expérience opposée ? Comment et pourquoi les consommateurs mettent-ils à jour les évaluations négatives et positives initiales en fonctiondes conversations post-consommation avec les autres ?

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L’ÉTUDE DES CHERCHEURS

Les auteurs ont effectué quatre expérimentations. Leurs résultats sont résumés ici :

• Un client qui a, à priori, des attentes hautes vis à vis d’un produit/service, et qui a eu une mauvaiseexpérience avec ce produit/service, revoit son jugement à la hausse après avoir discuté en face à face avec un client ayant eu une expérience positive avec ce produit/service. Il sera plus enclin à penserque sa mauvaise expérience était une expérience unique et à la rejeter. C’est ce que les auteurs appellentl’effet de positivité. Par contre l’inverse n’est pas vrai, un consommateur ayant eu une expériencepositive ne reverra pas son jugement à la baisse après avoir échangé avec un consommateur ayant eu une expérience négative car son expérience personnelle confirme ses attentes.

• Inversement, et plus rarement, un client qui, à priori,a des attentes basses et qui a vécu une mauvaiseexpérience avec un produit/service, ne reverra pas son jugement à la hausse après avoir échangé avecun consommateur ayant eu une expérience positive, car son expérience confirme ses attentes. Parcontre, s’il a eu une expérience positive, il revoit son jugement à la baisse après avoir discuté en faceà face avec un client ayant eu une expérience négative avec ce produit/service, il perçoit son expériencecomme anecdotique.

SO WHAT ? L’ANALYSE DU C*CM

Dans les secteurs où les consommateurs ont des attentes élevées, les entreprises devraient privilégierle partage d’expériences positives (par le biais d’incitations, de communication d’avis, de retweets, etc.). Dans ceux où les attentes des consommateurs sont faibles (ex. compagnies aériennes, assurances maladies, etc.) les entreprises devraient se concentrer sur le traitement et la résolution des expériencesgénérant du bouche-à-oreille négatif plutôt que de communiquer et promouvoir des expériencespositives car cela a peu d’effet.

LE REGARD DES PARTENAIRES

Comprendre ce qui se passe quand les clients partagent des avis est riche d’enseignement. Le client cherche la confirmation de ses attentes pour éviter la dissonance cognitive. Cela dit, Il n’est pastoujours facile de savoir si les attentes des clients sont hautes ou basses sur un service. De plus, quid desrésultats si le client vivait non pas une mais plusieurs ?

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ATTENTESEXPERIENCE

PERSONNELLE CLIENT 1

EXPÉRIENCE CONTRASTÉE DU

PARTENAIRE CLIENT 2

CHANGEMENT DANS LES ÉVALUATIONS DU

CLIENT 1PROCESSUS

HAUTES (POSITIVES)

Négative Positive Déplacement vers le hautRejet de sa propre expérience perçue

comme un événement ponctuel

Positive NégativeAucun changement

Croyance en sa propre expérience

BASSES (NÉGATIVES)

Négative Positive

Positive Négative Déplacement vers le basRejet de sa propre expérience perçue

comme un événement ponctuel

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À QUOI SERT DE PHYGITALISER SON MAGASIN ? L’INFLUENCE DES NOUVELLES TECHNOLOGIES

SUR L’EXPÉRIENCE DE SHOPPING

Le choix de Lionel Nicod du C*CM Christian Rivet, Julie Reghem et Marianela Fornerino (2018), Explorer l’expérience de shopping dans un monde phygital, Décision

Marketing 91, Juillet-Septembre, 45-60.

LE PROBLÈME

Durant les 2 dernières décennies, les distributeurs sont passés d’une approche multi-canal, dans laquelle ils proposaient aux clients plusieurs canaux de distribution sans lien entre eux, à une approche cross-canal permettant de commencer ses achats sur un canal pour les achever sur un autre, pour finir par une approche omni-canal dans laquelle les clients sont connectés simultanément à plusieurs canaux. Les technologies connectées ont ainsi radicalement changé l’expérience du client en magasin. Le clientscanne désormais ses produits avec l’application de l’enseigne, envoie ses essayages de vêtementssur les réseaux sociaux via des cabines connectées, cherche des conseils de recettes culinaires sur tablettes en rayon, s’oriente à l’aide de robot… Côté entreprise, ces technologies ont aussi conduit à repenser les stratégies distributeur avec l’ouverture de magasins de proximité pour des enseignes commeIKEA ou Décathlon, dont une part de l’assortiment est disponible uniquement sur tablette in-store. Ces dispositifs relèvent de la phygitalisation du magasin, à savoir l’utilisation du digital dans le lieu de vente physique. L’environnement réel se confond dès lors avec l’environnement virtuel pour offrir une réalité dite mixte aux consommateurs. Ce nouvel environnement offre une myriade de possibilités aux distributeurs.

LA QUESTION POSÉE PAR L’ARTICLE Face à l’ensemble de ces opportunités, comment les distributeurs peuvent-ils tirer profit de ces technologies et quels sont leurs impacts sur l’expérience client en magasin ?

L’ÉTUDE DES CHERCHEURS

L’étude des chercheurs se déroule dans un magasin laboratoire créé pour analyser l’impact d’un environnement phygital sur l’expérience du consommateur et son comportement. L’activité de ce point de vente repose sur la vente de vêtements et d’articles de montagne. Plusieurs technologies sont déployées dans le magasin-laboratoire. Dans la première zone, qui constitue un lieu d’accueil des clients, l’ensei-gne propose des écrans connectés et une vitrine connectée. Dans la seconde zone, le client retrouve les produits de la marque et plusieurs technologies sont utilisées : lumière connectée déclenchant un contenu vidéo sur tablette, un casque virtuel, des cabines d’essayage connectées (avec détection RFID pour déclencher des stimuli sensoriels et compteur de likes Facebook) et enfin une caisse automatique RFID. Chaque technologie est alors étudiée en fonction de la valeur qu’elle crée pour le client. Les auteurs identifient deux grandes familles de valeur : la valeur utilitaire (la technologie permet au client d’obtenir le produit qu’il cherche) ou la valeur hédonique (la technologie permetd’améliorer le plaisir lié à la visite en elle-même). En partant de ces deux grandes catégories, les technologiessont classées suivant leur utilisation (tableau ci-après).

Ces fonctions améliorent ainsi l’expérience globale du client sur chacune de ses dimensions. Le client est mieux immergé dans l’univers ciblé et ressent plus de plaisir lors de sa visite (dimension hédonico-sensorielle). Les interactions avec les produits et les autres personnes présentes (employés/autres clients) sont facilitées (dimension praxéologique). Le client perçoit mieux les valeurs de l’enseigne et son histoire (dimension rhétorique). Le client gère mieux le temps comme il le souhaite. S’il veut aller plus vite lestechnologies lui font gagner du temps. Inversement, s’il désire flâner, elles améliorent sa «balade» (dimension temporelle).

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SO WHAT ? L’ANALYSE DU C*CM

Les dispositifs digitaux en magasin se démultiplient. Pourtant, pour que leur efficacité soit réelle, il faut qu’ils remplissent deux conditions. La première est que leur déploiement soit le fruit d’une analyse de la valeur créée par leur utilisation et que ces dispositifs soient cohérents avec la stratégie et l’image de l’entreprise. La deuxième est qu’ils s’inscrivent dans une stratégie omni-canal, et non comme un gadget isolé.

LE REGARD DES PARTENAIRES

Il s’agit d’un sujet central pour les distributeurs, car le magasin de demain sera phygital. Les distributeurs doivent dépasser les réflexions technologiques (quelle technologie utilisée ?) pour aller vers des réflexions marketing (quelle valeur créée par quelle technologie pour le client ?). Le phygital ne doit pas se limiter à enrichir le parcours client mais à le réinventer intégralement, ce qui remet profondémenten cause les systèmes de vente actuel.

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FONCTIONS UTILITAIRES FONCTIONS HÉDONIQUES

ASSISTER RÉHUMANISER / COLLABORER

Les écrans-catalogues et ceux dans les cabines connectées aident les clients dans leur recherche. Ils fournissent des informations techniques sur les produits.

Les cabines connectées créent une relation personnalisée avec l’utilisateur. Elles prennent le relais des vendeurs et proposent une interaction customisée avec le consommateur.

ÉDUQUER ATTIRER / SÉDUIRE

Les tablettes et murs digitaux expliquent aux clients comment utiliser les produits. Ils comprennent mieux leur usage.

Les divers dispositifs (écrans, cabines, casques…) améliorent l’immersion dans une ambiance choisie. Dans le cas présent, ils renforcent le côté montagne du point de vente.

CONFORTER SUSCITER L'ENVIE

Les compteurs facebook rassurent les clients sur leurs achats et dans leurs prises de décision.

Cette immersion liée aux différentes technologies conduit à une plus grande envie d’acheter les produits qui sont mieux valorisés.

RECOMMANDER

Les écrans dans les cabines connectées conseillent les clients en proposant des produits qui leur correspondent et des variations de couleur. Un dispositif à base de caméra et de reconnaissance faciale est aussi testé mais a été source de polémique compte tenu de son caractère intrusif.

FACILITER LE PAIEMENT

Les caisses automatiques RFID permettent de gagnerdu temps en caisse et de limiter les manipulations.

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FAUT-IL FAVORISER L’USAGE DU MOBILE EN MAGASIN ?

Le choix de Florence Jacob du C*CM D. Grewal, C-P Ahlbom, L. Beitelspacher, S M. Noble et J Nordfalt (2018), In-Store Mobile Phone Use and Customer Shopping Behavior:

Evidence from the Field, Journal of Marketing, 82, 1, 108-126.

Claire, mère de famille, utilise sont smartphone toute la journée pour interagir avec sa famille, ses amis, regarder son fil d’actualité sur Facebook et traiter ses mails professionnels. Quand elle fait ses cours-es en hypermarché, elle continue à faire du multi-tâche sur son mobile tout en complétant son caddie. Le responsable de l’hypermarché, en observant ses clients se demande si cette pratique grandissante pollue leur expérience de shopping. Cela réduit-il le panier d’achat et il a alors intérêt à limiter les connexions dans son magasin ou cela augmente t-il la distraction des clients qui achètent plus de manière instinctive?

LE PROBLÈME

Les études sur l’usage du smartphone en magasin sont réduites et souvent contradictoires. D’un côté, elles montrent que le smartphone a un effet négatif sur l’expérience de shopping car c’est une source de distraction qui détourne les clients des dispositifs incitatifs en magasin (stop prix en rayon par exemple).Ce détournement crée aussi une réduction des souvenirs de l’expérience de shopping. Les clients réduis-ent aussi leurs paniers d’achat en nombre de produits car ils se limitent à leurs listes de course diminuantles achats additionnels. D’un autre côté, certaines recherches montrent que l’usage du smartphonerend les shoppers moins sensibles aux prix et diminue leurs capacités à comparer des produits.

LA QUESTION POSÉE PAR L’ARTICLE Alors que la littérature antérieure tend à penser que l’usage personnel du smartphone dans un GMS a tendance à diminuer le montant des achats effectués et à dégrader l’expérience de shopping, qu’en est-il vraiment quand on peut étudier parallèlement le parcours d’achat, tous les usages du smartphone en magasin et les données de sorties de caisse? Quel est effet réel du mobile sur l’expérience vécue en magasin?

L’ÉTUDE DES CHERCHEURS

Cette recherche est composée de deux terrains.

Dans un premier terrain, ils ont recruté 295 clients de 18 à 73 ans et de 4 magasins de la même en-seigne et leur ont demandé de porter des lunettes d’eye-tracking durant leur shopping sans changer leurs habitudes. A la fin de l’expérience de shopping, ils remplissaient un questionnaire.

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Dans un deuxième terrain, 120 clients de 19 à 80 ans porteur de carte de fidélité de l’enseigne ont été équipés des lunettes d’eye-tracking enregistrant leur parcours d’achat. A 60 personnes il a été demandé de faire comme d’habitude et ils ont quasiment tous fait usage de leur smartphone. 60 autres personnesont été interdites de smartphone. Grâce à leur carte de fidélité, l’intégralité de leur panier d’achata été enregistrée pour les 120 clients.

Ces deux études montrent que l’usage du smartphone a un effet sur le temps passé en magasin, l’attention portée sur le magasin et sur la capacité à suivre le parcours classique et donc, dans un deux-ième temps, sur le montant du panier d’achat. L’usage du Smartphone augmente les achats en magasin de produits plus chers et plus qualitatifs et diminue les achats impulsifs. Cela s’explique par le fait que lesmartphone modifie l’attention mais aussi la structure décisionnelle de l’acheteur. Cet effet est croissant surtout après 32 ans car le temps en magasin augmente et le parcours classique n’est pas suivi (le client revient sur ses pas). La satisfaction générale liée à l’expérience en magasin n’est pourtant pas vraimentaltérée par le multi-tasking.

SO WHAT ? L’ANALYSE DU C*CM

Cette étude montre que les plus jeunes shoppers, dont la pratique du smartphone est intensive, ne sont que peu perturbés par l’usage du smartphone en magasin. En revanche, sur des populations plus âgées, le smartphone perturbe les routines de course et augmente les paniers d’achat sans détruirevraiment la fonction expérientielle du magasin. L’usage du smartphone doit être favorisé et laréduction de zone grise sans connexion devrait disparaitre afin de faciliter les usages.

LE REGARD DES PARTENAIRES

Cette recherche, avec un dispositif d’étude sans précédent permet de répondre à cettequestion cruciale de la favorisation ou non de l’usage du mobile en magasin. On peut aussi se dire que l’expérience shopping si la connexion smartphone est incertaine sera déceptive de tout façon car les clients souhaitent ne pas avoir de rupture de connexion.

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“TELLE ÉDUCATION, TELS FRUITS”*... OU POURQUOI ET COMMENT FORMER SES CLIENTS

Le choix de Gilles N’Goala du C*CM Lionel Nicod & Sylvie Llosa (2018), Comment former le client à son rôle de coproducteur ? Etude de l’influence de la formation et de ses

caractéristiques sur les bénéfices de la coproduction, Recherche et Applications en Marketing, 2018, Vol. 33(4) 50–77

LE PROBLÈME

Avec l’avènement du libre-service et l’explosion des canaux numériques et mobiles, les clientssont de plus en plus appelés à se muer en co-producteurs des services qu’ils consomment. Si le phénomènen’est pas nouveau, force est néanmoins de constater que la formation et l’accompagnement des clients vers de nouvelles tâches, de nouveaux rôles et de nouveaux objectifs s’avère souvent insuffisant ou inapproprié, ce qui peut dégrader à la fois l’expérience vécue par les clients et la performancedes dispositifs de coproduction mis en œuvre par les entreprises (IKEA, Amazon, etc.).

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LA QUESTION POSÉE PAR L’ARTICLE Alors, les entreprises doivent-elles former leurs clients en début d’expérience et, si oui, comment ? Quelles sont en particulier les conséquences en termes de satisfaction et/ou de productivité des clients ? Satisfaction et productivité client évoluent-elles dans le même sens ? Quels types de contenus (cognitifs et/ou affectifs) et de moyens (humain vs. numérique) devraient être mobilisés pour former les clients ?

L’ÉTUDE DES CHERCHEURS

Sur la base d’une revue exhaustive de la littérature sur la coproduction des services, une étude empirique a été réalisée sur 557 répondants, celle-ci conjuguant à la fois une collecte de questionnaireset l’observation des comportements en magasin (IKEA). Les résultats montrent que la formation accroît la productivité des clients (montant d’achat/temps passé avec les vendeurs) sans détériorer leur niveau général de satisfaction. Cette formation sera d’autant plus efficace qu’elle saura combiner des contenus cognitifs (explications) et affectifs (soutien social). En revanche, si la formation via des médias numériques n’affecte pas cette productivité, elle a néanmoins tendance à altérer la satisfaction des clients formés. L’humain "formateur" reste ainsi un vecteur important de la satisfaction client.

SO WHAT ? L’ANALYSE DU C*CM

L’un des intérêts de cette recherche est de considérer simultanément les intérêts de l’entreprise (productivité) et du client (satisfaction). Les entreprises évoquent souvent la nécessité d’éduquer, de socialiser et de faciliter les apprentissages de nouveaux rôles et de nouvelles tâches à leurs clients pour qu’ils deviennent de bons « co-producteurs ». Mais avant cela, elles devraient prévoir plus modestementdes dispositifs de formation explicites au tout début de leurs expériences et promouvoir « l’acquisition de savoirs, compétences et attitudes ciblées pour une application immédiate et à court terme ».

LE REGARD DES PARTENAIRES

Cet article renvoie vraiment à notre travail sur le parcours du client en magasin et la nécessité de réfléchir à son rôle et à ce qu’on lui demande. Il nous faut avoir une vision autant qualitative que quantitative sur ces questions afin de définir les dispositifs nécessaires fondés sur les collaborateurs ou dudigital en magasin.

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GÉRER LA PRESSION DES CLIENTS QUI ARRIVENT

EN TÊTE DE LA QUEUE...

Le choix de Valérie Renaudin du C*CM Martin Dahm, Daniel Wentzel, Walter Herzog and Annika Wiecek (2018), Breathing Down Your Neck! The Impact of Queues on

Customers Using a Retail Service, Journal of Retailing, 94, 2, 217-230.

Faire la queue, quel ennui… C’est fatigant, irritant ! Tout le monde le sait et appréhende ce moment pénible. Mais faire la queue peut également être stressant, et cela personne n’en parle ! Stressant pour la personne qui arrive face au personnel en contact et qui sent dans son cou la respiration pressante des clients qui attendent derrière elle… Réagissons-nous différemment lorsque c’est « notre tour » s’il y a plus ou moins de monde derrière nous ? C’est en effet ce qu’ont montré Dazhm, Wentzel, Herzog et Wiecek.

LE PROBLÈME

Les retailers cherchent depuis longtemps à améliorer l’expérience des clients pendant l’attente. Ils focalisent leur attention sur les personnes qui attendent au milieu de la queue, tentant de réduire le tempsd’attente ou de le rendre moins ennuyeux, voire productif. La recherche s’est également largementintéressée à la gestion de l’attente des clients. L’article présenté ici adopte une nouvelle perspective : cellede la personne qui est en interaction avec un hôte de caisse ou un conseiller de clientèle et qui perçoit derrière elle, de manière plus ou moins pressante, l’attente des autres clients.

LA QUESTION POSÉE PAR L’ARTICLE La pression ressentie par un client lorsqu’il y a des personnes qui font la queue derrière lui altère-t-elle la qualité de son interaction avec le personnel en contact et sa perception de la qualité de service ? Et si oui, le retailer peut-il réduire les effets de la pression sociale de la queue pour ce client en contact avecle personnel ?

L’ÉTUDE DES CHERCHEURS

Cinq études ont été mises en place pour comprendre et décrypter l’expérience vécuepar le client en tête de la queue et pour aider les managers à mieux gérer son expérience . Ces études utilisent différentes méthodes (observations, expérimentations) dans des contextes de service variés (distributeur automatique de billets, services de e-learning, caisses de supermarché, customization de produits).

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Les auteurs montrent que plus il y a de personnes dans la queue derrière lui, moins l’expérience du client sera positive et moins il sera enclin à participer et à co-créer le service. Ils montrent également que la pression ressentie dépend du temps d’attente qu’a lui-même vécu le client : s’il a fait la queuelongtemps, il ressent moins la pression et son expérience est moins détériorée que s’il n’a pas fait la queue avant d’accéder au service.

Les chercheurs formulent des pistes concrètes pour les retailers. Pour éviter les effets négatifs des queues qui se forment derrière un client, deux stratégies sont efficaces. Le distributeur peut réduirela pression ressentie en configurant le magasin de sorte que le client n’ait pas une vision directe sur les gensqui sont derrière lui. L’autre moyen consiste à rassurer le client sur le fait qu’il peut prendre son tempspour réaliser la tâche qu’il doit effectuer ou pour poser les questions qu’il souhaite poser : la pression de lanorme d’efficience ressentie à cause de la queue est alors réduite.

SO WHAT ? L’ANALYSE DU C*CM

À l’heure où les enseignes cherchent à supprimer le passage en caisse (avec des applicationscomme Monop’easy ou Neos par exemple), et donc la fameuse queue en caisse, la question du client « en tête de la queue » semble n’avoir ni queue ni tête…

Et pourtant, les caisses restent très largement présentes en magasin. Et puis, cet article ne s’applique pas seulement au contexte des caisses mais également à d’autres interfaces de service quidonnent lieu à une attente.

Comprendre la pression parfois très forte ressentie par les clients quand une queue s’est formée derrière eux et qu’ils sont en interface avec le personnel ou devant un DAB ou une caisse automatiqueest essentiel. Et trouver les manières de réduire ce stress est évidemment une excellente chose pouraméliorer l’expérience du client et la qualité du service.

LE REGARD DES PARTENAIRES

Cet article sur la gestion des files d’attente est très original et ouvre des pistes de réflexion variées. Y-a-t-il par exemple un facteur culturel dans la notion de file d’attente ?

La gestion de l’attente a évolué avec le système de file unique qui se déploie à la Fnac ou chez Primark. Aurait-t-on les mêmes résultats sur la pression du premier client avec ces nouvelles queues plus longues mais aussi plus rapides ?

De même, la pression est-elle plus forte avec les caisses automatiques ? Le fait d’avoir un aidantpeut-il dans ce cas rassurer, et comment former ces aidants àréduire le stress du client ? Les nouveaux systèmes d’attente utilisés dans les boutiques de téléphonie mobile, quilaissent le temps de visiter le magasin en attendant d’être contacté sur son mobile par un conseillersont une piste prometteuse pour éviter la pression de la queue.

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MAIS QUELLE ROUTE VA-T-IL-PRENDRE ET POURQUOI? (COMMENT CONFIGURER MES CANAUX D'INTÉRACTION?)

Le choix d’Eric Stevens du C*CM Barwitz, N., Maas, P. (2018), Understanding the Omnichannel Customer Journey: Determinants of Interaction Choice, Journal of Interactive

Marketing, 43, 116-133

On ne peut que constater la multiplication des possibilités d’interactions offertes par les outils numériques. Que l’on passe par le site web, l’application mobile, le plateau d’appel, l’usage de chatbots, ou les réseaux sociaux, la marque doit proposer une offre cohérente et économiquement efficace. Déterminer le parcours client idéal, c’est à dire le mix de moyens d’interaction optimum suppose alors de comprendre les raisons de leur choix et de leur utilisation par le client. Il devient alors possiblede proposer des chemins d’interactions adaptés aux besoins et attentes clients.

LE PROBLÈME

Face au choix croissant des outils d’accès possibles, le responsable marketing doit trancher et définir les canaux par lesquels la marque ou l’entreprise va interagir avec son client. Cette optimisationsuppose de comprendre les raisons d’un choix d’itinéraire – le parcours client – emprunté dans la relationdu client avec sa marque. Il s’agit alors de comprendre les déterminants du choix d’un canal lors des différentes phases de l’achat et plus généralement de la relation établie avec la marque.

LA QUESTION POSÉE PAR L’ARTICLE Quelques études ont déjà démontré que la satisfaction dans l’utilisation d’un canal induit une plus grande utilisation de celui-ci. Mais l’on constate par ailleurs que de façon très générale, les clients utilisent plusieurs canaux tout au long de leur relation avec la marque. L’étude essaye alors de comprendre les raisons qui amènent un client à utiliser tel canal plutôt que tel autre tout au long de son parcours. Quels sont, du point de vue du client, les déterminants du choix d’un canal d’interaction dans un processus d’achat ? Existe-t-il des typologies d’attentes dans les processus d’interaction ? Voilà les deux questionsposées par cette recherche

L’ÉTUDE DES CHERCHEURS

Au-delà des critères déjà identifiés (effets d’expérience, critères psycho et socio démo, habitudes d’achats, …), l’étude qualitative portant sur des contrats d’assurance permet de faire deux constats :

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• Le choix des canaux est lié d’abord à l’étape du processus d’achat. Les raisons de choix d’un canal sur les parties amont ou aval de l’achat différent sensiblement. Alors que les canaux semi-personnels ou impersonnels (comme un site web vitrine) sont privilégiés pour l’amont, les phases d’achatdemandant plus d’interaction sont menées au travers de canaux plus personnels (comme un plateau d’appel par ex). Enfin on constate le choix de canaux peu interactifs pour les phases en post achat. • Quatre typologies de client, définies au travers des valeurs d’usages, émergent desanalyses et permettent d’expliquer les choix de canaux : • Le client Utilitariste privilégie l’efficacité des moyens utilisés par rapport au but recherché.Il est celui qui va utiliser le plus grand nombre de canaux différents, en privilégiant les canaux impersonnelset peu interactifs, dans une logique d’efficacité dans les réponses attendues. • Le client Hédoniste privilégie les canaux permettant la plus grande interactivité etl’engagement. • Le client cherchant la Minimisation des Coûts, privilégie les moyens impersonnels maisen utilisant un faible nombre de canaux pour éviter des pertes de temps. • Le client Relationnel est très attaché aux canaux permettant une relation individuellepar exemple avec les vendeurs, ou encore avec ses réseaux d’amis.

SO WHAT ? L’ANALYSE DU C*CM

S’il est impossible de prévoir à l’avance le trajet du client, il est possible de choisir et de configurer les canaux en fonction du niveau d’interaction attendu tout au long du parcours client. Pour cela, il est donc intéressant d’analyser les typologies d’attentes relationnelles, pour une famille de produits déterminée, et de construire un dispositif d’interaction qui permettra à chaque client de construireun parcours correspondant à la valeur d’usage attendue.

LE REGARD DES PARTENAIRES

L’analyse est intéressante et peut être prise en compte dans le choix des moyens d’interaction proposés au client dans le parcours d’achat. La multiplication des canaux d’interaction et les changements nombreux de canaux tout au long du parcours pose la question du processus d’achat. Peut-on encore parler d’un processus d’achat alors que les multiples interactions n’ont pas nécessairement pour finalité l’achat lui-même.

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FAUT-IL ENCOURAGER LA FRAGMENTATION DES PARCOURS D’ACHATS

DIGITAUX ENTRE PLUSIEURS CANAUX / DEVICES ?

Le choix de Virginie Pez du C*CM de Haan E., Kannan P.K., Verhoef P.C., & Wiesel T. (2018). Device Switching in Online Purchasing : Examining the Strategic Contingencies,

Journal of Marketing, 82(4), 1–19.

Madame B. souhaite acheter un tricycle pour l’anniversaire de son neveu. Elle profite deses trajets quotidiens en bus pour se renseigner sur les différents modèles de tricycles disponibles, lesfournisseurs et les prix, grâce à son smartphone. Elle consulte même avec son mobile des sites en ligneproposant des comparatifs produits et des avis de parents. Une fois son choix effectué, elle attendd’être de retour chez elle, derrière son ordinateur portable, pour passer commande.

LE PROBLÈME

Le trafic sur mobile est passé de moins de 1% en 2009 à plus de 50% en 2018. Pourtant, en dépit de cette augmentation vertigineuse, les taux de conversion sur mobile sont restés inchangés sur la période.Cela pose la question du rôle et de la valeur attribuée au mobile dans les achats. Pourquoi les consommateurs utilisent-ils leur mobile ou leur tablette sur les parcours d’achats, si ce n’est pas pour acheter ?

LA QUESTION POSÉE PAR L’ARTICLE Quel est le rôle joué par les différents devices (devices « mobiles », c’est-à-dire les smartphones et tablettes, et « moins mobiles », les ordinateurs fixes et portables), dans les parcours d’achats ? Quelles sont lesconséquences d’un changement de device en cours de parcours d’achat ?

L’ÉTUDE DES CHERCHEURS

Les chercheurs ont analysé les données de navigation d’un grand retailer en ligne, comparable à Amazon, sur une période d’un an (Déc 2011 à Oct 2012). Ce retailer propose un assortiment de près de 140 000 produits allant de la mode à l’électronique, en passant par la beauté ou le jardinage. Leur analyse se base sur plus de 950 000 sessions de navigation réparties sur au moins deux devices différents lors d’un même parcours d’achat, provenant de plus de 37 000 visiteurs uniques. Leurs résultats montrent queles taux de conversion sont nettement améliorés lorsque le client utilise un device « mobile » (smartphone ou tablette) en début de parcours :

• Si le client utilise uniquement son ordinateur, le taux de conversion est de 8,9%, alors qu’il est de 15,3% (+72%) si le client utilise smartphone + ordinateur ou tablette + ordinateur; • Si le client utilise uniquement son smartphone ou sa tablette, les taux de conversion restent faibles(respectivement 1,6% et 6,6%).

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Cet effet est d’autant plus fort que le risque perçu dans la catégorie de produits est élevé, que le prix du produit est élevé, et que l’expérience passée avec l’entreprise ou la catégorie de produits est faible.

Les chercheurs en tirent les conclusions suivantes :

• Le changement de device en cours de parcours client est un signe/indicateur de la maturitédu consommateur dans son parcours d’achat, que les entreprises pourraient exploiter (ex : si un client seconnecte sur son espace client depuis un ordinateur, après avoir fait une recherche sur la catégorie de produits depuis son mobile, c’est un signe qu’il a sans doute en tête de finaliser son achat). • Le changement de device en cours de parcours devrait être encouragé et facilité, car chaque device apporte ses spécificités/sa valeur ajoutée dans le parcours d’achat, et participe au final àla décision du client.

SO WHAT ? L’ANALYSE DU C*CM

Ces résultats encouragent les entreprises à prendre en compte cette fragmentation multi-devices desparcours d’achats. Pourquoi ne pas encourager une première recherche d’informations sur mobile,et mettre en place des relances lorsque l’on sait le client derrière son ordinateur ?

LE REGARD DES PARTENAIRES

La part du mobile dans la conversion client est sans doute sous-estimée par la plupart des entreprises. Cette recherche prouve que les devices mobiles sont un outil précieux et sans égal pour les étapes de recherche d’informations ou de comparaison de prix. À ne regarder que les taux de conversion, on pourrait considérer à tort que ces outils n’ont pas d’importance dans les tunnels de trans-formation, alors qu’en fait, il est essentiel de soigner les parcours sur mobiles ou tablettes pour convertir !

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TAUX DE CONVERSION

PAR PARCOURS CLIENT

1ER DEVICE

ORDI FIXE / PORTABLE TABLETTE SMARTPHONE

PUIS

CHANGE-

MENT SUR :

ORDI FIXE /

PORTABLE8,9% 15,3% (+72%) 15,3% (+72%)

TABLETTE 7,1% 6,6% 11,6% (+76%)

SMARTPHONE 1,6% 1,6% 1,5%

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COMMENT RÉUSSIR LA MISE EN PLACE DE MON CRM ?

Le choix d’Eric Stevens du C*CM Dalla Pozza, I., Goetz, O., Sahut, J.M. (2018), Implementation effects in the relationship between CRM and its performance, Journal

of Business Research, 89, 391-403

L’installation d’un CRM est un chantier complexe, mobilisant un grand nombre d’acteurs et dont les taux d’échecs ont été soulignés par de nombreux acteurs. La question se pose alors d’identifier les facteurs associés au succès de la mise en place de tels systèmes.

censés soutenir l’effort relationnel, génèrent un niveau d’insatisfaction élevé ainsi que l’ont montré de nombreuses études.

LA QUESTION POSÉE PAR L’ARTICLE Alors que les systèmes CRM sont largement adoptés par les entreprises, les facteurs associés à leur performance restent trop souvent ignorés, ceci conduisant à des taux d’échecs préoccupants. La recherche vise donc à identifier et à démontrer, à partir de l’expérience d’un large échantillon d’en-treprises, quelles sont les variables associées au succès ou à l’échec de la mise en place de tels outils.

L’ÉTUDE DES CHERCHEURS

Au travers d’une étude quantitative internationale, la recherche identifie 4 facteurs liés à la performance relationnelle, définie au travers de l’acquisition de client, de la croissance d’achat des clientsacquis et de la fidélité à l’entreprise :

• L’Alignement Organisationnel désigne l’ensemble des moyens par lequel l’organisation définit ses process internes, motive, forme et rémunère les acteurs de l’entreprise impliqués dans le système. • La Technologie CRM renvoie aux outils permettant de mener les opérations, l’analyse, et lacollaboration entre services. • La Gestion des Clients désigne la façon dont l’entreprise crée de la valeur pour chaque groupeou typologie de clients. • La Stratégie clients renvoie à l’orientation client précisant la façon dont l’organisation dans son ensemble vise à maximiser l’expérience client.

LE PROBLÈME

L’attention croissante portée à la relation clienta conduit un nombre grandissant d’entreprises à adopter et implanter des outils CRM au sein de leurs organisations.

Ces outils sont d’une grande complexité puisqu’ils intègrent au sein d’un système d’informa-tion, partagé entre de nombreux acteurs (vendeurs,plateaux d’appels, magasins, etc…), les données clients interfacées avec les systèmes de vente,de facturation ou de production. Or ces outiis,

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L’étude montre à partir d’un échantillon large et significatif d’entreprises Européennes et Américaines que l’Alignement Organisationnel, en particulier sa mise en œuvre précoce, la Stratégie Client et les Choix Technologiques sont déterminants dans la performance des CRM.

SO WHAT ? L’ANALYSE DU C*CM

Le caractère très significatif des résultats liés à l’Alignement Organisationnel, et notamment sa mise en œuvre précoce, montre qu’avant de penser technologie, il faut stimuler la réflexion sur les compétences, la formation, la rémunération et la motivation du personnel en charge de l’utilisation dessystèmes. L’anticipation de ces chantiers doit être considérée comme étant le facteur le plus corrélé àla bonne performance du CRM.

LE REGARD DES PARTENAIRES

On peut affirmer de façon générale que dans la plupart des cas, c’est l’organisation qui a raisoncontre les outils. Les chantiers de CRM requièrent alors une attention particulière concernant les futursdesign de l’organisation. Ce point est particulièrement vrai dans la partie Ventes. Dans ce domaine, laquestion de l’alignement organisationnel est déterminante dans l’efficacité obtenue.

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LES RÉDUCTIONS DE PRIX POUR CONQUÉRIR LES

NOUVEAUX CLIENTS : LA FAUSSE BONNE IDÉE ?

Le choix de Virginie Pez du C*CM del Rio Olivares M.J., Wittkowski K., Aspara J., Falk T., & Mattila P. (2018). Relational Price Discounts: Consumers’ Metacognitions and

Nonlinear Effects of Initial Discounts on Customer Retention, Journal of Marketing, 82 (1), 115–131.

Monsieur C. a récemment changé de fournisseur d’accès à internet. Il s’est laissé séduire parun tarif spécial proposant aux nouveaux clients la box internet complète à un tarif de 9,90 euros par mois pendant 1 an (au lieu de 39,90 euros), défiant ainsi toute concurrence. Monsieur C. n’aime pas particulièrement ce fournisseur, et en l’occurrence, son choix est purement motivé par la promotion. Il réfléchit également à se laisser tenter par les services d’une banque en ligne qui lui propose une promotiontrès avantageuse la première année, ainsi que par une offre de musique en streaming qui luipropose un abonnement à 3,99 euros/mois (au lieu de 12,99 euros) les 3 premiers mois.

LE PROBLÈME

Les entreprises dépensent des sommes colossales pour proposer des réductions aux prospects, dans le but d’initier une relation. Pour finir, n’attirent-elles pas seulement des opportunistes, à l’affut d’uneréduction intéressante et qui changeront de fournisseur au gré de la surenchère des réductions ?

Les résultats de recherche en la matière sont partagés : une partie des travaux montre que ces réductions sont tout à fait inefficaces car elles augmentent la sensibilité au prix. Une autre partie conclut l’inverse, en avançant que ces réductions induisent des habitudes de nature à agir sur la fidélité/le comportement de réachat. La recherche ici présentée est la première à étudier l’effet non-linéaire de cetype de réductions, dont l’influence est différente en fonction du montant de réduction accordé.

LA QUESTION POSÉE PAR L’ARTICLE Les réductions de prix accordées pour attirer de nouveaux clients permettent-elles de construireune relation sur le long terme ?

L’ÉTUDE DES CHERCHEURS

Dans l’étude principale de cette recherche, les chercheurs analysent les données provenantd’un leader de l’assurance automobile dans un pays européen, sur une période de 4 ans (2008-2011)(base de données de 191 165 clients nouvellement acquis). Ils répliquent ensuite leurs analyses sur l’assurance habitation de la même entreprise (216 431 clients nouvellement acquis). Ils comparent la longévité des clients ayant bénéficié d’une promotionlors de leur recrutement, aux clients n’ayant pas reçu de promotion. Leurs résultats montrent que l’effetde ces promotions sur la fidélité est intéressant lorsque celles-ci sont d’un montant « modéré » (5%-35%du prix du service) ; les réductions « faibles » (<5%) et « fortes (>35%) ont un effet négatif.

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Pour expliquer les mécanismes psychologiques à l’œuvre dans ce phénomène, les chercheurs ont complété leur dispositif par une expérimentation en laboratoire, sur 284 répondants, avec un design 3(réduction faible vs. modérée vs. forte) x 2 (contexte expérimental; assurance auto vs. service de vidéo à la demande). Concrètement, les répondants ont été soumis à un scénario projectif, fonction de la condition expérimentale, puis étaient invités à imaginer qu’une année s’était écoulée depuis la souscription au service. Ils devaient ensuite décider s’ils choisissaient ou non de renouveler leur contratau tarif en vigueur (hors promotion) et étaient ensuite soumis à une série de mesures (principalement,leurs attentes en termes de qualité de relation et leurs attentes de promotions à venir).

Finalement, les résultats montrent que les réductions modérées (5%-35%) ont un effet positif sur la fidélité, car elles ont un effet positif sur les attentes en termes de qualité de relation et aucun effet sur les attentes de promotions futures. En revanche, les réductions fortes ont un effet négatif sur les attentes en termes de qualité de relation et un effet positif sur les attentes de promotions futures, ce qui, in fine, détériore la fidélité.

Les chercheurs formulent des pistes concrètes à destination des professionnels du marketing :

• Les réductions de prix sont une stratégie intéressante pour recruter des clients, à conditionque ces réductions soient modérées. Les meilleurs résultats semblent être obtenus avec des réductions de 15-20% sur le prix du service, • Dans la mesure où les réductions modérées fidélisent car elles donnent l’impression que l’entreprise est « orientée client » (augmentation des attentes en termes de qualité de relation), il faut ensuite soigner la relation avec les clients nouvellement recrutés pour ne pas créer de déception, • Enfin, les auteurs conseillent de ne pas négliger d’explorer d’autres aspects de la fidélisation,notamment l’augmentation de la qualité de service et la communication avec les clients.

SO WHAT ? L’ANALYSE DU C*CM

Il est illusoire de penser que les réductions de prix sont un outil de recrutement miracle. Si la réductionest trop importante, de nombreux clients seront tentés d’y céder, mais ils se détourneront de l’entreprise aussitôt la réduction perdue. Une fois encore, tout est dans le dosage du montant de réduction accordé !

LE REGARD DES PARTENAIRES

Les réductions de prix accordées aux nouveaux clients peuvent avoir un effet collatéral majeur qu’il ne faut pas oublier lors de l’élaboration de la stratégie clients : ces réductions réservées exclusivement aux prospects peuvent être source de forte déception pour les clients fidèles, qui eux, ne bénéficient pas d’un tel traitement de faveur.

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LE PROBLÈME

Cet article tente de comprendre la collision imminente entrepublicité classique et programmatique à la télévision. L'applicationd'approches programmatiques à la publicité télévisée n'en estencore qu'à ses débuts. De quoi dépend son succès ? Quelles sontles parties prenantes ? Quelles décisions devront-elles prendre qu'ellesoit plus largement mise en œuvre ?

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EN PASSE DE DEVENIR PROGRAMMATIQUE, LA TV AU CŒUR DES ENJEUX DE LA DATA

Le choix de Grégoire Bothorel du C*CM Malthouse Edward C., Maslowska Ewa & Franks Judy U. (2018). Understanding programmatic TV advertising, International Journal

of Advertising, Vol 37, Issue n°5, pp 769-784.

La télévision est confrontée à des développements technologiques considérables, qui permettront aux Marketers de diffuser des messages commerciaux à des audiences spécifiques en fonction de l'individu et/ou du foyer. Les moyens traditionnels d'acheter de la publicité télévisée sont remis en question par l'ap-proche programmatique, qui trouve son origine dans le Search et le Display, et exploite des données, une technologie et des enchères en temps réel pour automatiser les transactions entre acheteurs et vendeurs.

LA QUESTION POSÉE PAR L’ARTICLE Voir une publicité TV différente de celle de son voisin à la même heure, sur la même chaîne : est-ce pour demain ? Si oui, à quelles conditions ?

L’ÉTUDE DES CHERCHEURS

Davantage conceptuelle, elle décrit les évolutions majeures de la publicité TV au fil des années à travers un prisme de lecture original - la disponibilité et à la coordination de trois facteurs : la diffusion de contenu, l’inventaire publicitaire disponible (Ad Inventory) et les données permettant un ciblage d’audi-ence. Quatre « ères » de la publicité télévisée sont analysées et caractérisées par l’arrivée de nouvelles parties prenantes.

ÈREÈRE DE LA

DIFFUSION LINÉAIRE

L'ÈRE DU CÂBLE

ET DU SATELLITE

L'ÈRE DE L'OTT

(ÉMERGENTE)

L'ÈRE DES JARDINS

CLOS (FUTURE)

PARTIE

PRENANTES

Chaînes de TVAudiencesMesureurs

Annonceurs

Chaînes de TVAudiencesMesureurs

AnnonceursNouveaux

distributeurs

Chaînes de TVAudiencesMesureurs

AnnonceursNouveaux

distributeursServices de streaming

Application Smart TV

Chaînes de TVAudiencesMesureurs

AnnonceursNouveaux distributeursServices de streamingApplication Smart TV

Ad Exchange ou Marketplace Governement

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Elle dessine les contours de l’écosystème futur de la télévision programmatique, elle décrit le positionnement et les intérêts des parties prenantes.

SO WHAT ? L’ANALYSE DU C*CM

Cette recherche met en exergue les enjeux de la Data Battle appliqués à un champ encorelargement sous exploré : la publicité ciblée sur le petit écran. Cela ouvre des perspectives particulièrement riches, notamment pour mesurer avec une précision inégalée les effets d’exposition aux campagnes de publicité sur un média qui concentre une part importante des investissements marketing. Les données comportementales sont désormais catégorisées en quatre grands data hubs en fonction desfoyers : données sur le comportement passé des individus, les caractéristiques d’un foyer (utiles en matière d’acquisition client), les données de consommation média (de TV et au-delà (facebook etc…)) et le contexte media (Qui? uoi? Quand? Où? Comment?). Au-delà de ces nouvelles capacités à cibler et à mesurer, la télévision programmatique pose la question de l’acceptation par le consommateur de tellespratiques dans un contexte de régulation forte en matière de Data Privacy.

LE REGARD DES PARTENAIRES

Cette recherche met l’accent sur un phénomène central : la structuration des écosystèmes data dans l’univers de la publicité digitale. Au coeur de la Data Battle entre les parties prenantes, le scénario de l’émergence de nouveaux « Walled Garden » pose une question centrale : comment tendre vers une croissance saine, durable et partagée ? Vers une transparence de l’écosystème ? En particulier le rôle des annonceurs dans cet écosystème mérite une réflexion de fond, face à l’importance des data 1st par-ty & 2nd party à des fins de ciblage et de pertinence des messages adressés aux consommateurs finaux.

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CENTER FOR CUSTOMER MANAGEMENT

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Juillet 2019