152
RECUEIL ANNUEL D’ERGOTHéRAPIE 2012 | 1

Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

  • Upload
    others

  • View
    2

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 1

Page 2: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

2 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

Rédacteur en chef

Marc-eric guisset

Coordinatrices du comité de lecture

Marie-claude peterkenne et emilie piedboeuf

Comité de lecture

nicolas Mottard

anne ledoux

Frédérique Mortier

Séverine declercq

Béatrice Meert

claude Spicher

audrey Francis

claire Valentin

Yolaine dangel

Fabienne Vroye

Marie-agnès gérard

Florence Klimczak

Mélanie coulet

dominique holvoet

Marie Felix

Zelia pertin

Juliette Rouillé

pauline Marescaux

edith debroux

laurence luyckx

Page 3: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 3

Sommaire

Edito 5 Marc-Eric GuiSSEt

Articles scientifiques 9 l’ergothérapie pour soutenir le développement graphomoteur des

enfants de 4 ansMélissa CoAlliER, Marie-France MoRin, Denise St-CyR tRibblE

29 effets de l’ergothérapie sur la qualité du sommeil de résidents en maison de repos

Erika PluMAt, Sun Woo DElnEuFCouRt, Guy ADAnt

51 l’ergothérapie auprès de personnes ayant un trouble envahissant du développement ou une déficience intellectuelle présentant des troubles graves du comportement

Mélanie PilotE

Expériences en ergothérapie 63 l’ergothérapeute au sein de l’équipe multidisciplinaire : mise en

place d’une semaine de Réadaptation pour les patients présentant la polyarthrite Rhumatoïde ( pR ), la Sclérodermie Systémique ( SSc ) ou le lupus ( led )

Pauline HoEllinGER

75 enjeux de la pratique de l’ergothérapie à l’unité néonatale : expérience Québécoise

Anne-Marie SénéCHAl

87 prise en charge multidisciplinaire auprès de patients lombalgiques. Résultats de deux expérimentations au sein d’une école du dos.

Paolo SiGnoRino – Priscillia DEMEliS – François EuRAn – Walter HEMElRyCk

Page 4: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

4 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

101 « accompagner des adolescents présentant des troubles neurologiques dans la prise de conscience de leur corps »

kimberley HilDERSon, Claire MARtin

111 Rééducation de l ’écriture : s’agit-il de dysgraphie ou de dyscalligraphie ?

Claire HollEnStEin

119 Quelle prise en charge pour l’enfant dyspraxique ? priorités et réalités

Eliane DE bRAbAnDERE

Fait clinique

129 névralgie brachiale incessante de la branche cutanée palmaire du nerf ulnaire gauche : Fait clinique d’une diminution rapide des douleurs neuropathiques par la normalisation de la sensibilité cutanée.

Sophie DESRoCHERS

135 diminution des douleurs neuropathiques d’une névralgie lombo-fémorale intermittente avec allodynie mécanique par la méthode de rééducation sensitive.

A. RouZEAu

Expériences dans le cadre de la formation en ergothérapie

141 ‘Quels peuvent être les rôles de l’ergothérapeute dans la réinsertion professionnelle de personnes ayant un handicap d’ordres musculosquelettiques ?’

thomas ottE

Page 5: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 5

Edito

chers lecteurs,

préface, Mot de la rédaction, avant-propos, cette année ce sera un edito !

Je ne vais plus, comme en 2009, vous préfacer le Rae en vous rappelant l’importance de la recherche, ainsi que de l’utilisation des évaluations dans nos pratiques quotidiennes.

Je ne vais plus m’étendre sur ce sujet car je reste convaincu que nombreux d’entre vous ont pris conscience de l’importance de ces pratiques d’eBp pour aider la profession à asseoir sa place dans le paysage paramédical. c’est ainsi que chaque jour naissent divers postes dans des domaines inno-vants pour notre profession.

Mais ne relâchons pas la pression envers les moins convaincus, car un constat est clair, depuis ces 10 dernières années et dans certains secteurs, nous n’avons pas défendu suffisamment notre place et nous nous faisons remplacer par des animateurs, éducateurs spécialisés ou encore art-théra-peutes.

Je ne vais pas, comme en 2010, vous rédiger un mot de la rédaction pour vous présenter le programme de vos futures lectures ou pour vous faire part de nos accords d’échange d’article.

Je vais tout simplement vous écrire cet edito comme je vous adresserai une lettre ouverte. J’ai tout simplement envie de vous dire au revoir au travers de ces quelques lignes.

en 2008, à l’initiative d’olivier Ferrali et suite à la disparition de l’aeB, j’ai créé le Rae.

aujourd’hui, le cinquième numéro est entre vos mains. il s’agissait d’un projet extraordinaire rempli de défis et surtout jalonné de rencontres plus belles les unes que les autres.

en effet, ces cinq années en tant que rédacteur en chef m’ont permis de publier 78 auteurs, de produire 5 numéros, de lire 67 articles et de vous ga-rantir 876 pages de lectures passionnantes.

Page 6: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

6 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

en parallèle, avec l’équipe du ca, ces trois années à la présidence de l’ae m’ont amené à défendre la profession devant les instances politiques, à dy-namiser le site de l’ae, à mettre en place la journée inaMi mais surtout, et grâce à vous, à bien plus que doubler le nombre d’adhérents et ainsi passer de 170 à 407 membres.

Maintenant, je laisse le flambeau. J’espère qu’il sera repris rapidement et porté au plus haut.

comme chacun d’entre vous, je considère la famille comme un élément im-portant de mes occupations, et actuellement, elle a besoin de moi et moi d’elle. J’ai donc décidé de transférer l’énergie mise pour l’ae / Rae vers elle. Je ne vous cache pas que cette décision a été murie et peu aisée à prendre car « vous allez me manquer ». Mais un au revoir n’est pas un adieu… donc à bientôt peut-être…

enfin, je ne peux clore cette page sans remercier le comité de lecture coor-donné cette année par Marie-claude peterkenne et emilie piedboeuf et féliciter pauline hoellinger qui, après un choix difficile, se voit attribuer le premier « coup de cœur de la rédaction ».

Marc-Eric GuiSSEtRédacteur en chef

Président AE

Page 7: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 7

Page 8: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

8 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

Art

icle

s sc

ient

ifiqu

es

Page 9: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 9

L’ergothérapie pour soutenir le développement graphom

oteur des enfants de 4 ansl’ergothérapie pour soutenir le développement graphomoteur des enfants de 4 ans

Mots clés

habiletés graphomotrices, écriture, préscolaire, intégration visuo-motrice, ergothérapie en pédiatrie.

Résumé

l’objectif de cette étude était d’évaluer l’effet d’un programme en ergothérapie visant à soutenir le développement des habiletés gra-phomotrices d’enfants de quatre ans fréquentant un centre de la pe-tite enfance. Selon un devis quasi-expérimental prétest et post-test avec groupe témoin, 20 enfants ont reçu une intervention hebdoma-daire sur une période de 12 semaines. les résultats montrent que les enfants ayant reçu l’intervention ont significativement amélioré leurs habiletés d’intégration visuo-motrice et de précision motrice fine, qui constituent des habiletés prédictives du développement des habile-tés graphomotrices, en comparaison avec le groupe témoin. cette

Mélissa coallier ergothérapeute et professionnelle de recherche – chaire de recherche sur l’apprentissage de la lecture et de l’écriture chez le jeune enfant université de [email protected] Morinprofesseure titulaire à la Faculté d’éducation et titulaire de la chaire de recherche sur l’apprentissage de la lecture et de l’écriture chez le jeune enfant – université de [email protected] St-cyr tribbleprofesseure titulaire à l’école des sciences infirmières – Faculté de médecine et des sciences de la santé université de [email protected] première auteure a reçu une aide financière du Fonds de la recherche en santé du Québec dans le cadre de ses études de maîtrise en sciences cliniques, à la Faculté de médecine et des sciences de la santé de l’Université de Sherbrooke.

Mélissa CoAlliERMarie-France MoRinDenise St-CyR tRibblE

Page 10: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

10 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

étude permet d’envisager que les enfants ayant bénéficié du programme d’intervention débuteront leur scolarisation en maîtrisant davantage les bases graphomotrices nécessaires à l’apprentissage de l’écriture. elle illustre également l’apport de l’ergothérapeute dans la préparation scolaire des enfants et en promotion de la santé.

1. introductionune des principales difficultés scolaires rencontrée par les enfants du pri-maire concerne l’apprentissage de l’écriture ( Bazyk et al., 2009 ). les habile-tés graphomotrices liées à l’écriture sont non seulement importantes pour développer l’estime de soi de l’enfant, mais sont aussi considérées comme un ingrédient essentiel de sa réussite scolaire ( Feder et Majnemer, 2007 ; parush et al., 2010 ). l’apprentissage de l’écriture n’est pas une fin en soi mais bien un moyen pour l’enfant d’accéder à d’autres apprentissages ou d’autres connaissances. en effet, l’enfant n’apprend pas à écrire pour écrire mais bien pour transmettre un message par écrit, prendre des notes et pratiquer des notions ( Breton et léger, 2007 ). l’écriture est une activité occupationnelle complexe qui requiert la maitrise des habiletés perceptives, motrices, cognitives et linguistiques ( Bara et gentaz, 2011 ).

en début d’apprentissage de l’écriture, la composante graphomotrice est particulièrement sollicitée. elle mobilise des ressources attentionnelles importantes, ce qui rend la gestion des autres composantes presque im-possible. par exemple, le jeune enfant doit penser à bouger ses doigts pour tracer la lettre, à la trajectoire de cette dernière et à la tracer au bon endroit sur la feuille. en effet, la maîtrise des habiletés graphomotrices est un long apprentissage pour le jeune scripteur, qui doit évoluer d’un processus lent, irrégulier et hautement contrôlé à un processus rapide, régulier et en grande partie automatisé ( Zesiger, 1995 ). en ce sens, l’automatisation du geste d’écriture est considérée comme étant primordiale au développement de la compétence à écrire chez l’élève du primaire ( Berninger et Swanson, 1994 ; christensen, 2009 ).

de 10 à 30 % des enfants d’âge scolaire présentent des difficultés grapho-motrices ( Karlsdottir et Stefansson, 2002 ). ces difficultés constituent par ailleurs l’une des principales raisons de référence en ergothérapie chez les enfants d’âge scolaire ( Feder, Majnemer et Synnes, 2000 ). ainsi, pourquoi ne serait-il pas pertinent de travailler en amont pour prévenir des difficultés ultérieures, en intégrant l’ergothérapie dans les centres de la petite enfance ?

1.1 Développement des habiletés perceptivo-motrices

avant même de manipuler le crayon, la maîtrise de certaines habiletés per-ceptivo-motrices, dites habiletés de bas niveau, est nécessaire car elles ont une influence directe sur le développement des habiletés graphomotrices ( Kemp et carter, 2005 ). l’intégration visuo-motrice, qui réfère à la coordina-tion entre la perception visuelle et les mouvements des doigts et de la main

L’erg

othé

rapi

e pou

r sou

teni

r le d

ével

oppe

men

t gra

phom

oteu

r des

enfa

nts d

e 4 an

s

Page 11: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 11

( Beery et Beery, 2004 ) apparaît être la plus importante habileté prédictive des habiletés graphomotrices ultérieures chez le jeune apprenant. de nom-breuses études appuient la corrélation entre cette habileté et la lisibilité de l’écriture ( tseng et Murray, 1994 ; Weil et cunningham amundson, 1994 ; cornhill et case-Smith, 1996 ; daly, Kelly et Kraus, 2003 ; Beery et Buktenica, 1997 ; Feder et Majnemer, 2007 ). enfin, l’intégration visuo-motrice s’avère particulièrement importante dans l’acquisition des habiletés graphomo-trices en raison des composantes visuo-motrices nécessaires pour tracer les lettres ( Ziviani et Wallen, 2006 ).

la précision motrice fine, qui correspond aux habiletés motrices impliquant le contrôle et la coordination de la musculature distale des mains et des doigts, est également identifiée comme habileté préalable à l’écriture par de nombreux chercheurs ( tseng et Murray, 1994 ; cornhill et case-Smith, 1996 ; Feder et Majnemer, 2007 ). plusieurs chercheurs, dont daly et al. ( 2003 ), ont mis en évidence l’importance de maîtriser cette habileté avant de débuter l’enseignement formel de l’écriture.

Bazyk et al. ( 2009 ) ont évalué l’impact d’un service intégré d’ergothérapie sur le développement moteur fin de 37 enfants âgés entre 5 et 7 ans, avec et sans déficience, en s’appuyant sur un devis pré-expérimental prétest et post-test. d’une durée de sept mois, l’intervention consistait en un suivi di-rect ( ex : individuelle et de groupe ) et indirect ( ex : consultation avec l’ensei-gnante ). les résultats de l’étude ont démontré que tous les enfants, incluant ceux se développant normalement, ont amélioré de façon significative leurs habiletés de motricité fine. les auteurs concluent que ce type d’intervention dans le milieu pourrait être bénéfique pour prévenir les difficultés motrices fines et pour soutenir le développement d’habiletés essentielles aux ap-prentissages scolaires. toutefois, l’absence de groupe témoin ne permet pas de démontrer de relation cause à effet entre le programme d’intervention et les progrès observés chez les enfants.

1.2 Soutien et prévention au cours de la petite enfance

contrairement à la France et à la Belgique, les enfants québécois débutent la maternelle à l’âge de 5 ans, soit l’équivalent de la 3e maternelle en Bel-gique et de la grande Section de maternelle en France. avant l’âge de 5 ans, bon nombre d’enfants québécois fréquentent un service de garde. des données récentes du ministère de la Famille et des aînés du Québec ( 2010 ) indiquent que 65,5 % des enfants québécois âgés de quatre ans fréquentent un service de garde.

À notre connaissance aucune étude ayant pour but d’évaluer l’impact d’une intervention en ergothérapie pour soutenir le développement des habiletés graphomotrices n’a été menée dans les services de garde au Québec. pour-tant, l’année précédant l’entrée à l’école s’avère une période charnière pour la préparation et la stimulation d’habiletés préalables, telles que celles liées aux habiletés graphomotrices.

L’ergothérapie pour soutenir le développement graphom

oteur des enfants de 4 ans

Page 12: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

12 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

1.3 implication de l’ergothérapeute dans les services de garde éducatifs à l’enfance

depuis quelques années, les ergothérapeutes sont de plus en plus impli-qués en milieu scolaire, dans les classes. conséquemment, cette réorienta-tion des services d’ergothérapie a eu des répercussions positives autant en ce qui a trait à la collaboration entre l’enseignant et l’ergothérapeute que pour les progrès fonctionnels de l’enfant. les résultats d’une étude récente effectuée auprès de 91 enfants d’âge scolaire recevant des services d’ergo-thérapie ont révélé que le rendement occupationnel des élèves augmen-tait lorsque l’enseignant avait une meilleure connaissance des besoins de l’enfant et qu’il appliquait les recommandations et stratégies enseignées par l’ergothérapeute ( Reid et al., 2006 ).

dans la même optique, avec son champ d’expertise et ses connaissances du développement de l’enfant, l’ergothérapeute pourrait soutenir les inter-venants en petite enfance dans la réalisation d’activités visant à assurer un développement optimal des enfants, notamment leurs habiletés grapho-motrices.

de notre point de vue, les milieux de garde peuvent être considérés comme une porte d’entrée intéressante étant donné qu’ils desservent deux tiers des enfants québécois de quatre ans. dans un contexte de prévention et de promotion de la santé et de développement optimal, l’ergothérapeute est un acteur de choix pour soutenir les éducateurs en petite enfance dans le développement des habiletés graphomotrices des enfants.

1.4 objectifs de la recherche

la présente étude a pour but d’étudier l’effet d’un programme d’intervention visant à soutenir le développement des habiletés graphomotrices d’enfants de quatre ans qui fréquentent un centre de la petite enfance. pour atteindre le but énoncé, l’étude poursuit les objectifs spécifiques suivants : évaluer si la participation à un programme de stimulation axé sur le développement des habiletés graphomotrices améliore 1 ) l’intégration visuo-motrice des enfants ; 2 ) la précision motrice fine des enfants, habiletés considérées comme prédictives des habiletés ultérieures en écriture.

l’hypothèse de recherche est qu’il y aura une amélioration statistiquement et cliniquement significative des habiletés d’intégration visuo-motrice et de précision motrice fine chez les enfants de quatre ans à la suite d’une par-ticipation au programme de stimulation comparativement aux enfants du groupe témoin.

L’erg

othé

rapi

e pou

r sou

teni

r le d

ével

oppe

men

t gra

phom

oteu

r des

enfa

nts d

e 4 an

s

Page 13: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 13

2. Méthodologie

2.1 Participants

Selon un devis quasi-expérimental prétest et post-test avec groupe témoin, les enfants ont été recrutés dans deux centres de la petite enfance, l’un re-présentant le groupe expérimental, et l’autre, le groupe témoin. pour par-ticiper à l’étude les enfants devaient être âgés de 4 ans ( au 30 septembre 2009 ), comprendre et parler le français et fréquenter un ou l’autre des cpe choisis, de trois à cinq jours par semaine. les enfants présentant une défi-cience indiquant une atteinte du système nerveux central, étaient exclus de l’étude, de même que les enfants fréquentant une pré-maternelle.

2.2 intervention

l’intervention consistait en premier lieu en une formation donnée aux édu-catrices, suivie de l’application d’un programme d’intervention de groupe visant à développer les habiletés graphomotrices.

2.2.1 Formation des éducatrices

la formation théorique a porté sur le développement moteur des enfants ainsi que sur l’utilisation du programme d’intervention, soit le programme d’activités graduées. la formation a été offerte uniquement aux éducatrices du groupe expérimental.

2.2.2 Programme d’activités graduées

le programme d’activités graduées pour développer les préalables scolaires est un programme d’activités couramment utilisé dans le milieu de la réadapta-tion par les ergothérapeutes au Québec. le programme a été développé par des ergothérapeutes québécois de l’institut de réadaptation en déficience physique de Québec ( 2005 ). il a été conçu afin de fournir des outils faci-litant le développement de la motricité fine et la construction visuo-spa-tiale chez les enfants âgés entre quatre et sept ans ( présentant un retard de développement ) et chez les enfants se développant de façon typique âgés entre trois et six ans. À ce jour, ce programme est exclusivement utilisé dans le domaine de la réadaptation et n’a pas été expérimenté auprès de plus larges populations enfantines. de plus, il n’a jamais été utilisé dans le but de soutenir le développement des habiletés graphomotrices avant l’entrée à la maternelle.

ce programme est basé sur le jeu, élément primordial de l’apprentissage chez l’enfant d’âge préscolaire. les activités qui forment le programme ont été conçues en tenant compte de l’âge développemental des enfants. le programme comprend trois différents niveaux. le niveau deux a été choisi pour cette étude puisque qu’il s’adresse aux enfants âgés entre quatre et cinq ans. chacun des niveaux comprend 12 séances hebdomadaires de

L’ergothérapie pour soutenir le développement graphom

oteur des enfants de 4 ans

Page 14: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

14 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

groupe d’une durée de 45 minutes chacune. une thématique différente est présentée à chacune des séances qui comporte des activités de motricité globale et de stabilité proximale ainsi que des activités de bricolage sollici-tant la motricité fine et la construction visuo-spatiale. afin d’utiliser ce pro-gramme, l’ergothérapeute doit suivre la formation « programme d’activités graduées pour développer les préalables scolaires » offerte par l’institut de réadaptation en déficience physique de Québec ( iRdpQ ).

2.3 Variables dépendantes et instruments de mesure

les variables dépendantes principales de l’étude font référence aux habi-letés perceptivo-motrices préalables à l’écriture. tel que mentionné dans la recension des écrits, certaines habiletés sont essentielles au développe-ment des habiletés graphomotrices et sont considérées comme des habile-tés sous-jacentes ou des facteurs de réussite à l’écriture ( Bazyk et al., 2009 ; Bruininks et Bruininks, 2005 ; dankert, davies et gavin., 2003 ; cornhill et case-Smith, 1996 ). deux habiletés perceptivo-motrices ont été retenues et ont agi à titre de variables dépendantes pour cette étude : l’intégration visuo-motrice et la précison motrice fine.

2.3.1 intégration visuo-motrice

l’instrument de mesure choisi pour évaluer cette variable est le Beery VMI ( Beery et Beery, 2004 ). cet outil d’évaluation standardisé comporte trois sous-tests pour examiner la capacité de l’enfant âgé de deux à 18 ans à inté-grer et à coordonner ses habiletés visuelles, perceptives et motrices. Seule la forme abrégée du premier sous-test, soit le Beery VMI, a été utilisée pour mesurer la variable d’intérêt. elle permet de documenter l’intégration visuo-motrice des enfants de deux à sept ans ( Beery et Beery, 2004 ). l’enfant doit d’abord imiter le tracé de trois formes et ensuite copier 15 formes. les neuf premières formes à copier à ce test sont : 1 ) le trait vertical ; 2 ) le trait hori-zontal ; 3 ) le cercle ; 4 ) la croix ; 5 ) la ligne diagonale vers la droite ( / ) ; 6 ) le carré ; 7 ) la ligne diagonale vers la gauche ( \ ) ; 8 ) la croix ( X ) ; et 9 ) le triangle. la passation du test se termine lorsque l’enfant effectue trois er-reurs consécutives. l’enfant obtient un point pour chaque forme complétée correctement, avec une possibilité de score brut maximal de 21 points. le score brut est converti selon l’âge chronologique de l’enfant, à partir des valeurs de référence établies, afin d’obtenir un score normalisé. le temps d’administration est approximativement de 10 minutes. cet instrument de mesure possède de bonnes qualités psychométriques, dont une fidélité test-retest de 0,89 et une fidélité interjuges de 0,92 ( Beery et Beery 2004 ).

2.3.2 Précision motrice fine

l’instrument de mesure choisi pour évaluer cette variable est le Bruininks-Oseretsky Test of Motor Proficiency, 2nd edition ( BOT-2 ) ( Bruininks et Bruininks, 2005 ). il s’agit d’un outil standardisé largement utilisé par les ergothéra-peutes pour évaluer les habiletés motrices globales et fines d’enfants âgés

L’erg

othé

rapi

e pou

r sou

teni

r le d

ével

oppe

men

t gra

phom

oteu

r des

enfa

nts d

e 4 an

s

Page 15: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 15

entre quatre et 21 ans. pour répondre aux objectifs de l’étude, le premier sous-test, qui porte sur la précision motrice fine, a été administré. l’enfant doit réaliser cinq activités de précision motrice, soit : colorier à l’intérieur d’une forme, tracer une ligne à l’intérieur de traits, relier des points, plier une feuille et découper un cercle. le temps d’administration est approxima-tivement de 10 minutes. on obtient un score normalisé et une estimation de l’équivalence d’âge. c’est un outil qui possède de bonnes qualités psycho-métriques : une bonne fidélité test-retest et une cohérence interne modérée à forte ainsi qu’une bonne validité de convergence et discriminative ( deitz, Kartin et Kopp, 2007 ).

2.4 Déroulement

l’intervention a débuté en janvier 2010 par une formation théorique offerte aux deux éducatrices du groupe expérimental, suivie de l’application du programme d’intervention dans leur groupe respectif avec le soutien de l’ergothérapeute ( première auteure ). le groupe témoin a pour sa part béné-ficié des activités habituelles qui s’appuient sur le programme éducatif des services de garde du Québec ( Ministère de la Famille et des aînés, 2007 ).

les mesures évaluatives du prétest ( t1 ) et du post-test ( t2 ) se sont respec-tivement déroulées une semaine avant et après l’intervention, soit au début janvier 2010 et à la fin avril 2010. les enfants du groupe expérimental et du groupe témoin ont été évalués individuellement. les mesures évaluatives ont eu lieu aux cpe afin d’assurer une conformité des conditions d’évalua-tion.

2.5 Considérations éthiques

ce projet de recherche a été approuvé par le comité d’éthique de la re-cherche en santé chez l’humain du centre hospitalier universitaire de Sher-brooke à l’automne 2009. les parents des enfants participant à l’étude ont signé un formulaire de consentement à la suite d’une rencontre au cours de laquelle les objectifs et le déroulement de la recherche leur ont été expli-qués. l’approbation écrite de l’institut de réadaptation en déficience phy-sique a été obtenue pour utiliser ce programme à des fins scientifiques.

2.6 Méthodes d’analyse des données

les données sociodémographiques sont présentées par le biais de statis-tiques descriptives ( moyenne, écart-type, fréquence ) afin de décrire l’échan-tillon et de comparer les particularités des deux groupes. des analyses non-paramétriques ont été réalisées. le test de Mann-Whitney a été utilisé pour faire des comparaisons inter-groupes. plus précisément, le score des deux groupes a été comparé au t1 puis au t2. pour chaque groupe individuelle-ment, la comparaison du score au t1 et du score au t2, soit l’évolution dans le temps, a été analysée à l’aide du test des rangs signés de Wilcoxon ( gra-vetter et Wallnau, 2004 ).

L’ergothérapie pour soutenir le développement graphom

oteur des enfants de 4 ans

Page 16: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

16 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

3. Résultatsdans un premier temps, les caractéristiques des enfants et des parents sont présentées, suivies des résultats obtenus au temps 1, au temps 2 et l’évolu-tion survenue entre les deux temps de mesure ( t2 moins t1 ). par ailleurs, comme il s’agit de la mesure la plus exacte illustrant le centre des données dans le cas d’une petite taille d’échantillon et d’une distribution asymé-trique des données, la médiane du score est comparée. pour alléger le texte, seul le terme score est écrit. les résultats sont présentés par objectif.

3.1 Participants à l’étude

tous les parents du cpe représentant le groupe expérimental ont accepté de faire participer leur enfant à l’étude ( n=20 ). Sur une possibilité de 18 enfants au cpe formant le groupe témoin, 16 parents ont signé le formulaire de consentement. après vérification de l’admissibilité, un enfant du groupe témoin a été exclu puisqu’il il présentait un retard de langage. lors de la collecte de données au t1, une enfant était absente et a alors été exclue de l’étude. Finalement, un total de 14 enfants a formé le groupe témoin.

3.1.1 Caractéristiques des enfants

le groupe expérimental était composé de 11 garçons et neuf filles. l’âge moyen des enfants était de 4 ans et 8 mois. le groupe témoin était composé de sept garçons et sept filles. l’âge moyen des enfants de ce groupe était de 4 ans 10 mois.

3.1.2 Caractéristiques des parents

le tableau 1 présente les principales caractéristiques des parents. l’âge moyen des mères et des pères est similaire dans les deux groupes. la scola-rité des mères est comparable dans les deux groupes contrairement à la sco-larité du père qui diffère. en effet, 10,0 % des pères du groupe expérimental possède un diplôme universitaire comparativement à 53,8 % des pères du groupe témoin. le revenu familial diffère également entre les deux groupes. dans le groupe expérimental, 31,6 % des familles a un revenu annuel infé-rieur à 50 000$ comparativement à 7,7 % des familles du groupe témoin. l’état civil est également une caractéristique qui distingue les deux groupes. dans le groupe expérimental, 25 % des parents sont séparés comparative-ment à 7 % des parents du groupe témoin.

L’erg

othé

rapi

e pou

r sou

teni

r le d

ével

oppe

men

t gra

phom

oteu

r des

enfa

nts d

e 4 an

s

Page 17: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 17

tableau 1. Caractéristiques des parents

Caractéristiques Groupe expérimental Groupe témoin

Âge de la mère ( moyenne )

34,1 ans 34,2 ans

Âge du père ( moyenne ) 38,6 ans 36,2 ans

Scolarité mèreCollégial/professionnelUniversité

60,0 %40,0 %

46,2 %53,8 %

Scolarité pèreSecondaire Collégial/prof.Université

15,0 %75,0 %10,0 %

15,4 %30,8 %53,8 %

état civilMarié / en coupleSéparé

75,0 %25,0 %

92,9 % 7,1 %

Revenu familial30 000$ – 50 000$60 000$ – 80 000$ + 80 000$

31,6 %36,8 %31,6 %

7,7 %30,8 %61,5 %

3.2 intégration visuo-motrice

Comparaison des deux groupes au t1

au départ ( t1 ), les enfants des deux groupes présentent des habiletés d’in-tégration visuo-motrices similaires ( Beery et Beery, 2004 ). le score des deux groupes au t1 est comparable et ne présente pas de différence statistique-ment significative ( p=0,188 ). cependant, il est possible d’observer que le score initial ( t1 ) du groupe expérimental ( 95,5 ) se situe sous la moyenne des scores normalisés établie pour ce test, soit 100. le score initial ( t1 ) du groupe témoin ( 100,0 ) pour sa part, est équivalent à la moyenne établie ( tableau 2 ).

Comparaison des deux groupes au t2

au terme de l’intervention ( t2 ), le score final du groupe expérimental ( 106,0 ) est légèrement supérieur à celui du groupe témoin ( 103,0 ) bien que la différence ne soit pas statistiquement significative ( p=0,268 ). toutefois, la progression du groupe expérimental est plus marquée, telle qu’illustrée à la figure 1. également, on observe qu’au terme de l’intervention, le score du groupe expérimental se situe au-dessus de la moyenne établie pour le test. Relativement à l’évolution dans le temps, peu de changement est observé dans le groupe témoin.

L’ergothérapie pour soutenir le développement graphom

oteur des enfants de 4 ans

Page 18: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

18 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

Progression entre les deux temps de mesure

une progression statistiquement significative ( p=0,01 ) du groupe expé-rimental est observée lorsque l’on compare le score entre t1 et t2 ( figure 1 ), démontrant ainsi une amélioration plus marquée chez les enfants du groupe expérimental. la figure 1 illustre la comparaison des scores nor-malisés entre les deux groupes pour la variable intégration visuo-motrice au Beery VMI ( Beery et Beery, 2004 ). enfin, si l’on compare l’évolution dans le temps des deux groupes, soit la différence entre t2 moins t1 du groupe expérimental à la différence t2 moins t1 du groupe témoin, la différence entre les deux groupes est statistiquement significative, à l’avantage du groupe expérimental ( p=0,01 ). plus précisément, une différence de +7,0 est observée pour le groupe expérimental comparativement à une différence de +2,5 pour le groupe témoin ( tableau 2 ). le tableau 2 présente l’évolution de l’intégration visuo-motrice selon les groupes au Beery VMI.

Figure 1. comparaison des scores normalisés entre les deux groupes pour la variable intégration visuo-motrice au Beery VMI ( Beery et Beery, 2004 ) dans le temps

L’erg

othé

rapi

e pou

r sou

teni

r le d

ével

oppe

men

t gra

phom

oteu

r des

enfa

nts d

e 4 an

s

Page 19: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 19

tableau 2. évolution de l’intégration visuo-motrice selon les groupes au Beery VMI ( beery et beery, 2004 )

intégration visuomotrice

Groupe expérimental( n=20 )

Groupe témoin( n=14 )

Méd. ( eiQ ) Méd. ( eiQ )

Score normalisé t1 95,5 ( 91,5 - 102,25 ) 100,0 ( 95,0 - 109,0 )

Score normalisé t2 106,0 ( 97,0 - 115,75 ) † 103,0 ( 99,5 - 106,5 )

t2 moins t1 7,0 ( 1,5 - 14,5 ) 2,5 ( -3,5 - 5,25 ) *

Méd. : Médiane, eiQ : étendue interquartile, n : nombre* p<0.05 pour comparaison entre les groupes† p<0.05 pour la comparaison entre les temps

par ailleurs, sur le plan clinique, cette amélioration à la suite de la participa-tion au programme d’activités graduées se traduit par l’acquisition de deux nouveaux tracés. les enfants du groupe témoin ont, quant à eux, acquis en moyenne un nouveau tracé. À la fin de l’intervention, dix enfants sur 20 ( 50 % ) du groupe expérimental ont réussi la copie du triangle comparative-ment à trois enfants sur 14 ( 21,4 % ) du groupe témoin ( tableau 3 ). il est à noter que sept ( 35 % ) enfants du groupe expérimental ont acquis ce tracé entre les deux temps de mesure comparativement à aucun pour le groupe témoin, les autres maîtrisant déjà ce tracé au t1. le tableau 3 présente le nombre d’enfants ayant réussi la copie du triangle au Beery VMI ( Beery et Beery, 2004 ).

tableau 3. nombre d’enfants ayant réussi la copie du triangle au beery VMi ( beery et beery, 2004 )

Copie du triangle réussie

Groupe expérimental( n=20 )

Groupe témoin( n=14 )

t1 t2 t1 t2

nombre d’enfants 3 10 3 3

3.3 Précision motrice fine

Comparaison des deux groupes au t1

tel qu’illustré au tableau 4, avant le début de l’intervention ( t1 ), les deux groupes présentent des scores comparables ( p=0,77 ). plus précisément, le score du groupe expérimental est de 16,0 comparativement à 16,5 pour le groupe témoin.

L’ergothérapie pour soutenir le développement graphom

oteur des enfants de 4 ans

Page 20: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

20 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

Comparaison des deux groupes au t2

au terme de l’intervention ( t2 ), le score du groupe expérimental ( 18,0 ) est supérieur à celui du groupe témoin ( 15,0 ) et la différence est statistique-ment significative ( p=0,03 ) démontrant l’effet de l’intervention sur la préci-sion motrice fine.

Progression entre les deux temps de mesure ( t2 moins t1 )

tel qu’illustré à la figure 2, le score du groupe expérimental a augmenté entre les deux temps de mesure, alors que le score du groupe témoin a lé-gèrement diminué. le groupe expérimental a significativement progressé entre les deux temps de mesure pour cette variable ( p=0,001 ), démon-trant ainsi l’effet de l’intervention. de son côté, le groupe témoin a obtenu un score inférieur au deuxième temps de mesure, sans que le changement ne soit statistiquement significatif ( p=0,66 ). la figure 2 illustre la comparai-son des scores normalisés entre les deux groupes pour la variable précision motrice fine au BOT-2 ( Bruininks et Bruininks, 2005 ). enfin, si l’on compare l’évolution dans le temps des deux groupes, soit la différence entre t2 moins t1 du groupe expérimental à la différence t2 moins t1 du groupe témoin, la différence entre les deux groupes est statistiquement significative, à l’avan-tage du groupe expérimental ( p=0,012 ), ajoutant de la valeur à l’effet de l’intervention. le tableau 4 présente l’évolution de la précision motrice fine selon les groupes au BOT-2 ( Bruininks et Bruininks, 2005 ).

Figure 2. comparaison des scores normalisés entre les deux groupes pour la variable précision motrice fine au Bruininks-Oseretsky Test of Motor Proficiency, 2nd edition ( Bruininks et Bruininks, 2005 ).

L’erg

othé

rapi

e pou

r sou

teni

r le d

ével

oppe

men

t gra

phom

oteu

r des

enfa

nts d

e 4 an

s

Page 21: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 21

tableau 4. évolution de la précision motrice fine selon les groupes au Bruininks-Oseretsky Test of Motor Proficiency, 2nd edition ( bruininks et bruininks, 2005 ).

Contrôle moteur fin Groupe expérimental( n=20 )

Groupe témoin( n=14 )

Méd. ( eiQ ) Méd. ( eiQ )

Score normalisé t1 16,0 ( 13,5-17,0 ) 16,5 ( 12,5-20,3 )

Score normalisé t2 18,0 ( 16,3-20,0 ) † 15,0 ( 12,8-18,8 )*

t2 moins t1 3,0 ( 1,0-4,0 ) -1,0 ( -2,8-2,25 ) *

Méd. : Médiane, eiQ : étendue interquartile, n : nombre* p<0.05 pour comparaison entre les groupes† p<0.05 pour la comparaison entre les temps

tableau 5. nombre moyen de dépassements à l’épreuve de tracer à l’intérieur d’un parcours sinueux du Bruininks-Oseretsky Test of Motor Proficiency, 2nd edition ( bruininks et bruininks, 2005 ).

nombre moyen de dépassements

Groupe expérimental( n=20 )

Groupe témoin( n=14 )

t1 t2 t1 t2

nombre moyen de dépassements

5 3 4 5

Sur le plan clinique, les enfants du groupe expérimental ont amélioré à la fois la précision à remplir l’espace au coloriage, à tracer à l’intérieur d’un parcours, à relier deux points par un trait de crayon, à plier une feuille et à découper un cercle. des progrès supérieurs à ceux du groupe témoin sont notés pour chacune des épreuves évaluées.

À titre d’exemple, lorsque nous comparons le nombre de dépassements du crayon à l’épreuve où l’enfant doit tracer à l’intérieur d’un parcours sinueux, nous observons en moyenne cinq dépassements au t1 pour les enfants du groupe expérimental comparativement à quatre pour les enfants du groupe témoin. au t2, la précision du tracé se raffine chez les enfants du groupe expérimental et ceci se traduit au plan clinique par une diminution moyenne de deux dépassements ( tableau 5 ). nous observons une aug-mentation moyenne d’un dépassement pour les enfants du groupe témoin.

L’ergothérapie pour soutenir le développement graphom

oteur des enfants de 4 ans

Page 22: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

22 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

4. Discussion

4.1 Effet positif du programme d’activités graduées

4.1.1 intégration visuo-motrice : élément clé de l’éveil à l’écriture

l’objectif 1 était d’évaluer l’effet de la participation au programme sur l’amélioration de l’intégration visuo-motrice des enfants. les résultats ob-tenus indiquent une amélioration significative des habiletés d’intégration visuo-motrice chez les enfants du groupe expérimental, suggérant ainsi un effet positif de l’intervention. étant donné que des résultats normalisés en fonction de l’âge ont été utilisés pour ce test, nous soutenons l’idée que les progrès des enfants du groupe expérimental ont été acquis à un rythme excédant celui de la maturation, ce qui suggère que l’amélioration n’est pas seulement reliée à la maturation de l’enfant mais bien à l’intervention reçue.

Rappelons que les résultats de plusieurs recherches tendent à démontrer que le score obtenu au Beery VMI est un indicateur important de la compé-tence à écrire chez le jeune enfant ( daly et al., 2003 ; Weil et cunningham amundson, 1994 ; Ziviani et Wallen, 2005 ). ainsi, l’amélioration de l’intégra-tion visuo-motrice constitue un élément très intéressant quant à l’effet du programme sur le développement des habiletés graphomotrices, et consé-quemment sur la préparation scolaire des enfants. en effet, plusieurs études ciblent cette variable comme l’une des principales habiletés prédictives de réussite en écriture et comme habileté déterminante de la lisibilité de l’écri-ture ( Feder et Majnemer, 2007 ; daly et al., 2003 ; tseng et Murray, 1994 ; Weil et cunningham amundson, 1994 ). deux études ( daly et al., 2003 ; Weil et cunningham amundson, 1994 ) ont montré que les élèves ayant réussi la copie des neuf premières formes au Beery VMI ( la neuvième étant la copie du triangle ) avaient plus de facilité à copier lisiblement les lettres, les situant donc à un niveau de développement optimal pour débuter l’enseignement formel de l’écriture. Marr et cermack ( 2002 ) ajoutent que les enfants de maternelle capables de copier les neuf premières formes possédaient éga-lement une meilleure calligraphie en première année. dans l’étude actuelle, au terme de l’intervention, un pourcentage plus élevé d’enfants du groupe expérimental a réussi la copie du triangle comparativement au groupe té-moin. Bien que ces enfants ne fréquentent pas encore la maternelle, il est intéressant de constater que déjà la moitié des enfants ayant bénéficié du programme possèderaient les habiletés nécessaires pour amorcer l’appren-tissage des lettres.

contrairement au groupe témoin, le groupe expérimental a obtenu un score inférieur ( 95,5 ) à la moyenne établie pour ce test ( 100,0 ) au t1, avant l’intervention. une explication possible pourrait être en lien avec les carac-téristiques sociodémographiques ( ex : revenu familial ) des parents ( tableau 1 ) qui sont moins favorables dans le groupe expérimental. Selon Beery et Buktenica ( 1997 ), des difficultés d’intégration visuo-motrice, représentées

L’erg

othé

rapi

e pou

r sou

teni

r le d

ével

oppe

men

t gra

phom

oteu

r des

enfa

nts d

e 4 an

s

Page 23: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 23

par un score sous la moyenne au VMi sont plus fréquemment observées chez les enfants issus d’un milieu socioéconomiquement défavorisé. par ailleurs, les scores du groupe expérimental avant l’intervention ( t1 ) sont compa-rables à ceux obtenus dans les études de pelletier ( 2007 ) et ducharme-la-pointe ( 2005 ), provenant d’enfants issus de familles à faible revenu.

Bien qu’une différence significative de revenu familial entre deux groupes ait été observée, on ne peut affirmer que les enfants du groupe expérimen-tal proviennent d’un milieu défavorisé sur le plan socio-économique.

le groupe expérimental a davantage progressé entre les deux temps de me-sure. au terme de l’intervention, il est possible de constater une différence de 7,0 points comparativement à 2,5 points pour le groupe témoin. Sur le plan clinique, en ergothérapie, cette différence s’illustre par une acquisition moyenne de deux nouveaux tracés pour les enfants du groupe expérimen-tal et d’un nouveau tracé pour les enfants du groupe témoin. il ne faut pas négliger le fait que le score initial du groupe expérimental se situait sous la moyenne normalisée établie pour le test ce qui signifie que les enfants du groupe expérimental ont réussi à copier un moins grand nombre de formes au t1 que la moyenne de l’échantillon normalisée. il est possible d’envisa-ger que l’inclusion d’activités faisant appel aux habiletés de coordination motrice dans le cadre du programme d’activités graduées aurait permis d’accroître davantage l’intégration visuo-motrice des enfants, étant donné que la coordination motrice constitue une composante de l’intégration vi-suo-motrice ( Beery et Beery, 2004 ).

considérée comme habileté prédictive de la compétence à écrire ( notam-ment sur le plan de la lisibilité ) et du succès scolaire en maternelle et en première année ( Feder et Majnemer, 2007 ; daly et al., 2003 ; dankert et al., 2003 ), l’amélioration significative de l’intégration visuo-motrice est un élément fort intéressant quant à l’impact du programme sur la préparation scolaire des enfants.

4.1.2 l’importance de la précision motrice fine dans les activités à l’âge préscolaire

l’objectif 2 était d’évaluer l’effet de la participation au programme sur l’amé-lioration de la précision motrice fine des enfants. en réponse à cet objectif, les résultats obtenus indiquent une amélioration significative de la préci-sion motrice fine chez les enfants du groupe expérimental. étant donné que des résultats normalisés en fonction de l’âge ont été utilisés pour ce test, il est possible de suggérer que l’amélioration de la précision motrice fine soit liée à l’intervention et non seulement à la maturation.

il est difficile de comparer les résultats obtenus à ceux des recherches pré-cédentes puisqu’à notre connaissance aucune étude comparable n’a uti-lisé ce sous-test. une explication possible pourrait être en lien avec la mise en marché récente de la nouvelle version de la batterie BOT-2 ( Bruininks et Bruininks, 2005 ). Malgré tout, ces résultats vont dans le même sens que

L’ergothérapie pour soutenir le développement graphom

oteur des enfants de 4 ans

Page 24: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

24 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

Bazyk et al. ( 2009 ) qui ont trouvé une amélioration significative des habi-letés motrices fines des enfants de maternelle à la suite d’une intervention de sept mois en ergothérapie en utilisant le Peabody Developmental Motor Scales-2 ( pdMS-2 ), Folio et Fewell ( 2000 ). Selon les résultats de dankert et al. ( 2003 ), une amélioration de la coordination motrice, telle que mesurée par le sous-test coordination motrice du Beery VMI ( Beery et Beery, 2004 ) est observée à la suite d’un suivi hebdomadaire en ergothérapie sur une période de huit mois. pour leur part, les résultats obtenus par ducharme-la-pointe ( 2005 ) démontrent une amélioration, quoique statistiquement non significative, de la coordination motrice, telle que mesurée avec le Beery VMI ( Beery et Beery, 2004 ). le suivi consistait en six rencontres échelonnées sur 12 semaines qui visaient à développer les préalables scolaires des enfants. en s’inspirant des résultats de l’étude actuelle et des études précédentes, il est possible d’envisager que la durée de l’intervention est importante pour obtenir des résultats significatifs. de là l’utilité d’une intervention hebdomadaire s’échelonnant sur plusieurs semaines.

4.2 implications pour l’ergothérapie

cette étude met en lumière l’apport disciplinaire de l’ergothérapeute en prévention et en promotion de la santé dans un contexte préscolaire. l’inter-vention précoce est importante pour promouvoir le développement opti-mal de l’enfant, lui permettre de réaliser ses occupations et prévenir des dif-ficultés ultérieures. il importe également de ne pas confondre l’intervention précoce, qui vise à encourager le bon déroulement du développement, et la surstimulation, qui est un excès de stimulation. lorsqu’on sait qu’un des en-jeux majeurs dans l’apprentissage de l’écriture concerne le problème d’au-tomatisation du geste d’écriture, il importe d’encourager et de soutenir un développement optimal en ajoutant des occasions et différents contextes pour pratiquer les habiletés de base.

avec ses connaissances du développement de l’enfant et ses objectifs visant à améliorer l’autonomie fonctionnelle de l’enfant dans toutes les sphères de sa vie quotidienne y compris le jeu ( case-Smith, 1998 ), l’ergothérapeute s’avère un acteur clé dans la mise sur pied et l’application d’un tel pro-gramme en milieu de garde. la contribution de l’ergothérapeute en milieu de garde permettrait non seulement d’offrir un soutien aux éducatrices mais permettrait aussi une prévention et un dépistage précoce d’enfants à risque.

4.3 Retombées sur le plan de la recherche, de la pratique et de l’éducation

cette étude exploratoire pourrait servir de tremplin à d’autres études en lien avec les résultats concluants obtenus. par exemple, une étude menée au-près d’un plus grand échantillon et à plus large échelle permettrait de pré-ciser les résultats obtenus sur les variables à l’étude ainsi qu’une meilleure généralisation des résultats à l’ensemble des enfants québécois de 4 ans.

L’erg

othé

rapi

e pou

r sou

teni

r le d

ével

oppe

men

t gra

phom

oteu

r des

enfa

nts d

e 4 an

s

Page 25: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 25

Sur le plan de la pratique, cette étude a permis non seulement d’enrichir l’intervention préscolaire mais également de sensibiliser les éducatrices à la façon d’aider les enfants à se développer de façon optimale en leur donnant des exemples concrets. les résultats obtenus nous incitent par ailleurs à pro-poser l’intégration de certains éléments du programme à la programmation des services de garde.

par ailleurs, il serait fort pertinent de procéder à un transfert de connais-sances dans les milieux d’enseignement supérieurs afin de mieux outiller les éducateurs et les nouveaux enseignants. de plus, les connaissances ac-quises ainsi que les outils utilisés pourraient être partagées à l’ensemble des éducateurs par le biais de formation continue.

comme la petite enfance relève du Ministère de la Famille et des aînés et que le milieu scolaire, incluant le préscolaire ( maternelle ), relève du minis-tère de l’éducation, du loisir et du Sport, on aurait avantage à créer un pont entre ces deux ministères de sorte à favoriser une meilleure communication ainsi qu’un meilleur partage des connaissances et des pratiques gagnantes. la préparation scolaire des enfants et le succès scolaire est un enjeu qui concerne toute la société. l’importance de soutenir l’enfant dans le déve-loppement de ses habiletés préalables à l’école est clairement établie. il reste à outiller et à soutenir les différents acteurs ainsi qu’à promouvoir des formations et des programmes comme celui proposé dans cette étude.

5. Conclusionla présente étude avait pour but d’étudier l’effet d’un programme d’inter-vention visant à soutenir le développement des habiletés graphomotrices d’enfants de quatre ans, avant l’entrée à l’école. il en ressort que ce pro-gramme a donné des résultats significatifs et prometteurs. ces stratégies semblent être gagnantes et pourraient facilement s’intégrer à la program-mation des services de garde pour favoriser le développement des habiletés graphomotrices. l’implantation d’un tel programme permettrait de bonifier la programmation dont le contenu portant sur les habiletés graphomotrices est peu élaboré. également, maîtriser certaines habiletés de base en prépa-ration à l’apprentissage de l’écriture permettrait à l’enfant de débuter la ma-ternelle mieux outillé et préparé et contribuerait du même coup à favoriser son estime de soi et sa réussite scolaire. éventuellement, il serait intéressant d’évaluer l’effet à plus long terme d’un programme comme celui-ci et de procéder à de nouvelles études qui toucheraient un échantillon plus grand, ce qui permettrait une meilleure généralisation des résultats.

en terminant, cette étude illustre la contribution particulière des ergothé-rapeutes en promotion de la santé et en prévention de déficits dans un des milieux de vie de l’enfant qui sert de tremplin vers le monde scolaire.

L’ergothérapie pour soutenir le développement graphom

oteur des enfants de 4 ans

Page 26: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

26 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

Références1. Bazyk, S., Michaud, p., goodman, g., papp, p., hawkins, e. et Welch, M.

a. ( 2009 ). integrating occupational therapy services in a kindergarten curriculum : a look at the outcomes. American Journal of Occupational Therapy, 63( 2 ), 160-171.

2. Feder, K. p. et Majnemer, a. ( 2007 ). handwriting development, compe-tency, and intervention. Developmental Medicine and Child Neurology, 49( 4 ), 312-317.

3. parush, S., lifshitz, n., Yochman, a. et Weintraub, n. ( 2010 ). Relationships between handwriting components and underlying perceptual-motor functions among students during copying and dictation tasks. Occupa-tional Therapy Journal of Rehabilitation, 30( 1 ), 39-48

4. Breton, S. et léger, F. ( 2007 ). Mon cerveau ne m’écoute pas : comprendre et aider l’enfant dyspraxique. Montréal : éditions du chu Ste-Justine, 188p.

5. Bara, F. et gentaz, e. ( 2011 ). haptics in teaching handwriting : the role of perceptual and visuo-motor skills. Human Movement Science, 30( 4 ), 745-759.

6. Zesiger, p. ( 1995 ). Ecrire : Approches cognitive, neuropsychologique et dé-veloppementale. paris : presses universitaires de France.

7. Berninger, V.W. et Swanson, h.l. ( 1994 ). Modifying hayes and Flower’s model of skilled writing to explain beginning and developing writing. Advances in cognition and educational practice, 2, 57-81.

8. christensen, c.a. ( 2009 ). the critical role handwriting plays in the abil-ity to produce high-quality written text. In R. Beard, d. Myhill, J. Riley et M. nystrand ( éd. ), The SAGE handbook of writing development ( 23-47 ). thousand oaks : Sage publications inc.

9. Karlsdottir, R. et Stefansson, t. ( 2002 ). problems in developing functional handwriting. Perceptual and Motor Skills, 94( 2 ), 623-662.

10. Feder, K., Majnemer, a. et Synnes, a. ( 2000 ). handwriting : current trends in occupational therapy practice. Canadian Journal of Occupational The-rapy, 67( 3 ), 197-204.

11. Kemp, c. et carter, M. ( 2005 ). identifying skills for promoting successful inclusion in kindergarten. Journal of Intellectual & Developmental Disabi-lity, 30( 1 ), 31-44.

12. Beery, K.e. et Beery, n.a. ( 2004 ). The Beery-Buktenica Developmental Test of Visual- Motor Integration. Administration, scoring and teaching manual ( 5th ed. ). Minneapolis, Mn : ncS pearson.

13. tseng, M. et Murray, e.a. ( 1994 ). differences in perceptual-motor mea-sures in children with good and poor handwriting. Occupational Therapy Journal of Research, 14, 19-36.

L’erg

othé

rapi

e pou

r sou

teni

r le d

ével

oppe

men

t gra

phom

oteu

r des

enfa

nts d

e 4 an

s

Page 27: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 27

14. Weil, M.J. et cunningham-amundson, S.J. ( 1994 ). Relationship between visual-motor and handwriting skills in children in kindergarten. Ameri-can Journal of Occupational Therapy, 48, 982-988.

15. cornhill, h. et case-Smith, J. ( 1996 ). Factors that relate to good and poor handwriting. American Journal of Occupational Therapy, 50( 9 ), 732-739.

16. daly, c. J., Kelley, g. t. et Krauss, a. ( 2003 ). Relationship between visual-motor integration and handwriting skills of children in kindergarten : a modified replication study. American Journal of Occupational Therapy, 57( 4 ), 459-462.

17. Beery, K.e. et Buktenica, n.a. ( 1997 ). The Developmental Test of Visual-Motor Integration : Administration, scoring, and teaching manual ( 4th ed. ) parsippany, nJ : Modern curriculum press.

18. Ziviani, J. et Wallen, M. ( 2006 ). the development of graphomotor skills. In a. henderson et c. pehoski ( dir. ), Hand function in the child : founda-tions for remediation, 2nd ed. ( p.217-238 ). St.louis, Mi : Mosby elsevier.

19. Reid, d., chiu, t., Sinclair, g., Wehrmann, S. et naseer, Z. ( 2006 ). out-comes of an occupational therapy school-based consultation service for students with fine motor difficulties. Canadian Journal of Occupational Therapy, 73( 4 ), 215-224.

20. institut de réadaptation en déficience physique de Québec ( 2005 ). Pro-gramme d’activités graduées pour développer les préalables scolaires. Qué-bec, Québec.

21. Bruininks, R. et Bruininks, B. ( 2005 ). Bruininks-Oseretsky Test of Motor Pro-ficiency ( 2nd ed. ) Minneapolis, Mn : ncS pearson.

22. dankert, h. l., davies, p. l. et gavin, W. J. ( 2003 ). occupational therapy effects on visual-motor skills in preschool children. American Journal of Occupational Therapy, 57( 5 ), 542-549.

23. deitz, J.c., Kartin, d. et Kopp, K. ( 2007 ). Review of the Bruininks- oseretsky test of Motor proficiency, 2nd ed. ( Bot-2 ). Physical and Occupa-tional Therapy in Pediatrics, 27( 4 ), 87-102.

24. Ministère de la Famille et des aînés ( 2007 ). Accueillir la petite enfance : le programme éducatif des services de garde du Québec. Québec, Qc : gouvernement du Québec.

25. gravetter, F.J. et Wallnau, l.B. ( 2004 ). Statistics for the behavioral sciences ( 6th ed ). Belmont, ca : thomson Wadsworth.

26. Marr, d. et cermak, S. ( 2002 ). predicting handwriting performance of early elementary students with the developmental test of visual-motor integration. Perceptual and Motor Skills, 95, 661-669.

L’ergothérapie pour soutenir le développement graphom

oteur des enfants de 4 ans

Page 28: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

28 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

27. pelletier, M.e. ( 2007 ). Préparation scolaire des enfants issus de familles à faible revenu : élaboration et évaluation des retombées d’un programme ludique. Mé-moire de maîtrise, Faculté de médecine, université laval, Québec.

28. ducharme-lapointe ( 2005 ). Les habiletés préparatoires à l’écriture : pro-gramme d’intervention novateur en ergothérapie. Mémoire de maîtrise, Faculté de médecine, université laval, Québec.

29. Folio, M.R. et Fewell, R.R. ( 2000 ). Peabody Developmental Motor Scales : Examiner’s Manual, 2nd ed. austin, tX, pRo-ed.

30. case-Smith, J. ( 1998 ). Pediatric occupational therapy and early interven-tion. Woburn, Ma : Butterworth-heinemann.

Remerciementsles auteures remercient les enfants, les parents et les centres de la petite enfance ayant participé à l’étude.

L’erg

othé

rapi

e pou

r sou

teni

r le d

ével

oppe

men

t gra

phom

oteu

r des

enfa

nts d

e 4 an

s

Page 29: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 29

Effets de l’ergothérapie sur la qualité du somm

eil de résidents en maison de repos

erika pluMatergothérapeuteetudiante en Master en sciences de la santé publique, option éducation pour la santé et du [email protected]

Sun Woo delneuFcouRtergothérapeute et psychologue spécialisé en tccMaster en sciences de la santé publiqueMaître-assistant à la heph condorcet, section ergothérapie, implantation de [email protected]

guy adantergothérapeute et kinésithérapeute spécialisé en santé mentaleMaster en santé publiqueenseignant honoraire à la heph condorcet de [email protected]

Effets de l’ergothérapie sur la qualité du sommeil de résidents en maison de repos

Mots clés

sommeil, insomnie, personne âgée, maison de repos, ergothérapie

Résumé

au même titre que la dépression, la fatigue ou le stress, l’insomnie chronique est susceptible d’affecter la santé physique et psychique des individus et plus particulièrement celle des seniors. en effet, plus de la moitié des résidents en maison de repos se plaint de troubles du sommeil. Souvent, cette affection est traitée par médicaments. cette option présente des effets relativement néfastes et bien connus tels que : dépendance, troubles cognitifs, risques de chutes augmentés, etc. l’objet de cette étude est d’analyser les effets de l’ergothérapie, traitement non pharmacologique, comme alternative au traitement médicamenteux. cet article aborde la thématique de l’insomnie chronique chez la personne âgée en apportant des repères théo-riques, méthodologiques et pratiques.

Erika PluMAtSun Woo DElnEuFCouRtGuy ADAnt

Page 30: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

30 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

introductionl’insomnie est un problème majeur de santé publique. en effet, une enquête de santé menée en Belgique en 2004 par Bayingana, demarest, gisle et al. indique que une personne sur cinq ( âgée de 15 ans ou plus ) mentionne des troubles du sommeil. ceux-ci sont plus fréquemment rapportés par des femmes ( 23 % ) que par des hommes ( 17 % ) et varient selon l’âge ( 15 % chez les plus jeunes et 25 % chez les personnes âgées de 75 ans ou plus ). des éva-luations objectives effectuées en unité de sommeil montrent que le sommeil des hommes tend à être plus perturbé que celui des femmes ( espie, 1994 ). Selon lechevalier et al. ( 2008 ) et Morin ( 1996 ), l’insomnie peut être occa-sionnelle ( concerne 27 % des individus ), d’une nuit à quelques semaines ou chronique ( pour 36 % de la population ) se comptant en mois ou en années. Selon Morin ( 1996 ), chez la personne âgée l’insomnie est essentiellement chronique et est liée à des changements normaux s’opérant au cours de la vie. ce trouble a des répercussions sur le fonctionnement général des seniors. ces conséquences se manifestent sur le plan physique par une vulnérabilité ac-crue ainsi qu’une impression de réveil douloureux avec les effets somatiques d’une mauvaise nuit. les conséquences psychologiques se traduisent par une diminution du bien-être avec plus d’irritabilité, de tensions voire de dépres-sion. l’activité sociale est aussi perturbée par une augmentation des siestes diurnes ainsi qu’une fatigue, une diminution des performances se traduisant par des problèmes de concentration, de mémoire et d’attention engendrant des répercussions négatives sur les activités quotidiennes et des liens rela-tionnels avec autrui qui, dans le pire des cas, peut aller jusqu’au retrait social. en outre, l’institut national de la Santé et de la Recherche Médicale ( 2009 ) s’est également penché sur les liens existant entre les troubles du sommeil et la mortalité chez les personnes âgées vivant à domicile. une somnolence excessive et régulière dans la journée augmente de 33 % le risque de décès et près d’une personne sur cinq de plus de 65 ans serait concernée par cette somnolence. cette étude souligne l’importance d’une recherche systéma-tique des troubles du sommeil chez la personne âgée afin de pouvoir détecter et traiter des affections sous-jacentes. onen F. et h. ( 2006 ) rapportent aussi divers constats concernant les troubles du sommeil chez le sujet âgé. ainsi, ils expliquent que le taux de mortalité lié au manque de prise en charge des troubles du sommeil du sujet âgé est très élevé.

le défi serait d’améliorer la qualité des soins et la qualité de vie des per-sonnes âgées, mais aussi de réduire l’incidence et la prévalence des patho-logies du sommeil afin de minimiser leurs coûts économiques. la plainte de mauvais sommeil est souvent sanctionnée soit par la prescription d’un hypnotique apparenté aux benzodiazépines soit par de l’indifférence. Rare-ment les plaintes concernant le sommeil et la vigilance des patients âgés font l’objet d’une analyse exhaustive en médecine. toujours selon onen F. et h. ( 2006 ), la méconnaissance des troubles du sommeil chez le sujet âgé, l’inadéquation et l’insuffisance de leur prise en charge sont liées à plusieurs

Effet

s de l

’ergo

thér

apie

sur l

a qua

lité d

u so

mm

eil d

e rés

iden

ts en

mai

son

de re

pos

Page 31: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 31

facteurs : le manque de formation des médecins et des autres profession-nels de la santé ; le problème d’éducation du grand public et en particulier des sujets âgés et de leurs aidants ; les difficultés d’accès des patients âgés aux unités de sommeil ( priorité aux jeunes ). le bilan par rapport à la sur-consommation des médicaments est également préoccupant. c’est pour-quoi, il serait utile de se pencher davantage sur une prise en charge ergo-thérapique non médicamenteuse et sans effet indésirable. les objectifs de cette étude consistaient à améliorer la qualité du sommeil des personnes âgées, diminuer la sévérité de leur insomnie et leur permettre de partici-per activement au programme d’intervention. d’autre part, il s’agissait aussi d’amener les seniors à mieux comprendre les mécanismes du sommeil et les changements normaux liés au vieillissement pour qu’ils puissent prévenir une éventuelle « rechute » d’insomnie.

Problématique du sommeil des personnes âgées

Sommeil de la personne âgéegénéralement, deux types de sommeil sont mis en évidence : le sommeil lent ou nReM ( Non Rapid Eye Movement ) et le sommeil paradoxal ou ReM ( Rapid Eye Movement ). le nReM est dit lent car l’ensemble de nos fonctions subit un ralentissement. ce sommeil comporte trois stades : l’endormisse-ment, le sommeil léger, le sommeil profond. ce type de sommeil est carac-térisé par une respiration calme, les changements de positions du dormeur, les battements du cœur réguliers et le visage inexpressif. il est indispensable pour la récupération principalement physique, la croissance, la cicatrisation.

a l’opposé, le ReM ou sommeil paradoxal comporte une activité mentale assez proche de l’éveil d’où son nom. il est caractérisé par des mouvements oculaires rapides, une augmentation des battements du cœur et de la res-piration, la présence de rêves et un tonus musculaire qui disparaît sauf au niveau du visage, de l’extrémité des doigts et des organes génitaux ( Morin, 1996 ). Ses fonctions concernent la maturation du cortex, le stockage des apprentissages, la mémoire à long terme, la gestion des émotions. les rêves serviraient à résoudre partiellement les conflits ou les apaiser et représente-raient une soupape à la tension psychique ( adant, 1996 ).

au cours de la vie, le rythme circadien tend à se modifier. ainsi, Sabbah ( 2009 ) explique que le sommeil du nourrisson est polyphasique sur une pé-riode de 24 heures ( plusieurs épisodes de sommeil de courte durée répartis entre jour et nuit ). pendant l’enfance, le sommeil devient progressivement biphasique ( sommeil nocturne de longue durée suivi d’une sieste dans la journée ) puis monophasique avant l’adolescence ( uniquement sommeil nocturne de longue durée ). plus tard, le sommeil monophasique de l’adulte

Effets de l’ergothérapie sur la qualité du somm

eil de résidents en maison de repos

Page 32: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

32 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

converge de nouveau vers un aspect biphasique avec réapparition des siestes chez le sujet âgé ( voir figure 1 ). l’âge est le facteur le plus impor-tant affectant la quantité et la qualité de notre sommeil ( Morin, 1996 ). les changements s’opérant au cours du vieillissement sont considérés comme normaux.

Figure 1 : comparaison de l’hypnogramme des adultes et des personnes âgées ( espie, 1994 )

pour cappeliez et al. ( 2000 ), la modification la plus significative, chez les aînés, consiste dans une réduction du stade profond du nReM et une aug-mentation du sommeil léger. de plus, le temps de sommeil paradoxal dimi-nue légèrement au cours de la nuit. ces changements s’accompagnent de réveils plus fréquents et de plus longue durée ainsi que de l’efficience calcu-lée par le rapport entre le temps de sommeil total divisé par le temps passé au lit multiplié par 100. la capacité de dormir diminue avec l’âge, tandis que le besoin de sommeil reste relativement inchangé. concernant le temps total de sommeil, il n’est pas significativement réduit au cours du vieillisse-ment. en effet, lorsque le sommeil des siestes est ajouté au sommeil noc-turne, la quantité de sommeil par période de 24 heures s’avère comparable entre les adultes et les aînés.

Effet

s de l

’ergo

thér

apie

sur l

a qua

lité d

u so

mm

eil d

e rés

iden

ts en

mai

son

de re

pos

Page 33: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 33

Du vieillissement normal à l’insomnie chroniqueles aînés connaissent des perturbations du sommeil qui excèdent les chan-gements normaux se produisant avec l’âge ( cappeliez et al., 2000 ). dans une étude d’ohayon et lemoine menée en France, la prévalence de l’insomnie chez des individus de plus de 65 ans est deux fois plus importante que chez des individus de 45 ans ( lianqui & ancoli-israel, 2006 ). les plaintes liées à la mauvaise qualité et quantité de sommeil sont récurrentes dans la popula-tion âgée. de 40 à 50 % des personnes de plus de 60 ans disent mal dormir ( Stepnowski & ancoli-israel, 2008 ). cappeliez et al. ( 2000 ) et Snoussi ( 2012 ) corroborent ces plaintes et constatent que plus de 40 % des personnes âgées rapportent des problèmes chroniques de sommeil avec des réveils fréquents ou prématurés pendant la nuit, des périodes plus courtes de sommeil et de la somnolence diurne indésirable. Selon l’institut national de la Santé et de la Recherche Médicale ( 2009 ), cette somnolence est chiffrée à 30 % des sujets de plus de 65 ans.

Selon Benoît et goldenberg ( 2004 ), l’insomnie est définie comme étant une plainte subjective de mauvais sommeil accompagnée d’un retentissement négatif sur le vécu diurne. il s’agit d’une pathologie chronique complexe d’origine plurifactorielle. ces troubles du sommeil ont des conséquences délétères sur la santé. ainsi, pour Morin ( 1996 ), l’insomnie peut provoquer de la fatigue diurne et un affaiblissement des performances ( problème de concentration, d’attention, de mémoire, diminution de la motivation, vulné-rabilité aux accidents, etc. ). d’autre part, il existe un impact non négligeable sur le bien être psychologique ( irritabilité, tensions, déprime, vulnérabilité à la dépression lorsque l’insomnie est chronique, diminution de la qualité et la quantité des contacts sociaux, etc. ) ainsi que sur la santé physique.

Du traitement pharmacologique à l’ergothérapieSuite aux recherches assidues dans ce domaine et aux constats face à ces troubles du sommeil, il apparaît que la prise en charge de l’insomnie chez le sujet âgé est insuffisante voire inadaptée. en effet, beaucoup de méde-cins favorisent encore le traitement pharmacologique qui comprend des médicaments anxiolytiques, hypnotiques ou certains antidépresseurs. or, si il n’est pas à exclure dans l’insomnie transitoire, il n’est pas recommandé dans l’insomnie chronique. Selon un comité d’experts ( Bloom et al. 2009 ), il n’y a aucune preuve quant à l’efficacité d’un traitement pharmacologique de l’insomnie appliqué à des personnes âgées souffrant d’insomnie et séjour-nant dans les unités de soins à long terme. au contraire, comme le souligne corman ( 2009 ), « le recours aux psychotropes – antidépresseurs, anxiolytiques et hypnotiques – est fréquent ( en Etablissement d’Hébergement pour Personnes Agées dépendantes, EHPAD ) avec des risques d’accoutumance, d’effets secon-daires et de somnolence pendant la journée. Les effets indésirables les plus délé-tères chez le sujet âgé sont l’altération de la vigilance avec risques de chutes et de fractures, les troubles mnésiques et l’aggravation des apnées du sommeil ». dans

Effets de l’ergothérapie sur la qualité du somm

eil de résidents en maison de repos

Page 34: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

34 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

une étude récente, Buysse et al. ( 2011 ) montrent à partir d’un échantillon de convenance de 82 sujets adultes ( moyenne d’âge 71,7 ans ) souffrant d’in-somnie chronique qu’un traitement psychologique composé d’éducation pour la santé du sommeil, de restriction du temps passé au lit, de contrôle du stimulus et de gestion de l’anxiété comparé à des informations sur le sommeil seules entraîne une amélioration de la qualité du sommeil, de son efficience, augmente le sommeil lent dans le groupe expérimental. les effets de ce traitement se maintiennent dans les six mois après intervention. cette dernière étude est intéressante car d’une part l’intervention est brève ( quatre semaines ) et d’autre part elle ne porte que sur les aspects comportementaux de l’insomnie. a partir d’une méta-analyse irwin et al. ( 2006 ) évaluent l’effi-cacité des traitements psychologiques comportementaux tirés de 23 études pour conclure que les traitements comportementaux sont efficaces pour traiter l’insomnie chronique de sujets âgés de 55 ans et plus. ces traitements améliorent la qualité du sommeil, diminuent la latence d’endormissement et les éveils intra-sommeil et augmentent l’efficience du sommeil.

en maison de repos, les problèmes liés au sommeil sont plus prononcés qu’au domicile en raison de facteurs institutionnels et de la forte préva-lence des comorbidités couplée à la fragilité des personnes âgées ( gordon & gladman, 2010 ). dans les institutions pour personnes âgées, la somno-lence diurne est associée aux déficits fonctionnel et cognitif et peut ainsi prédire le déclin cognitif et la mortalité plus élevée. de multiples facteurs contribuent aux troubles du sommeil dans ces institutions : la comorbidité et les syndromes gériatriques tels que l’incontinence urinaire, les troubles psychiques ( dépression et démence ) et certaines médications. les change-ments dans l’évolution du sommeil en fonction de l’âge et les perturbations des rythmes biologiques jouent également un rôle ainsi que des éléments environnementaux : moindre exposition à la lumière naturelle, temps exces-sif passé au lit, bruit et lumière la nuit, horaire du dernier repas trop pré-coce donc peu approprié. on constate aussi une diminution importante du niveau des activités tant physiques que mentales ( alessi et al. 2005 ).

les interventions ponctuelles sans médicament les plus utilisées sont géné-ralement ( au choix, l’une ou l’autre de ces interventions ) : l’exposition à la lu-mière naturelle ou artificielle, l’augmentation des activités physiques, des mo-difications des conditions environnementales la nuit ( bruit et lumière ). elles ne donnent que des résultats modestes ( alessi et al. 2005, gordon & gladman, 2010 ). les interventions multidimensionnelles sont préférables. elles asso-cient l’éducation pour la santé, des modifications comportementales, cogni-tives et environnementales. ces chiffres et conséquences délétères montrent à quel point l’intervention ergothérapique est importante dans la prise en charge non médicamenteuse des troubles du sommeil de la personne âgée institutionnalisée.

Effet

s de l

’ergo

thér

apie

sur l

a qua

lité d

u so

mm

eil d

e rés

iden

ts en

mai

son

de re

pos

Page 35: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 35

Approche cognitivo-comportementale en ergothérapieSur base des conclusions d’irwin et al. ( 2006 ) et des résultats encoura-geants de Buysse et al. ( 2011 ) en ce qui concerne les traitements psycholo-giques comportementaux, notre intervention ergothérapique s’inscrit dans l’approche pragmatique cognitivo-comportementale. les fondements de l’approche comportementale se situent dans les théories de l’apprentissage par conditionnement. de fait, le comportement répondant ou classique est contrôlé par des stimuli ( l’apprentissage d’un rituel avant le coucher par exemple ) alors que le comportement opérant est lié à la nature de ses consé-quences ( négatives ou positives ). d’autre part, dans l’approche cognitive, il s’agit de modifier le comportement en influençant les cognitions ( pensées ) de l’individu. il est indispensable de les analyser pour ensuite les modifier afin de constituer de nouvelles croyances plus fondées vis-à-vis du sommeil. par exemple, certains pensent que pour trouver le sommeil, il suffit de le vouloir. hors se répéter « il faut que je m’endorme » est la meilleure façon de ne pas s’en-dormir. Selon Samacher et al. ( 2005 ), les thérapies cognitivo-comportemen-tales ( tcc ) étudient chez l’individu ce qui ne fonctionne pas ou fonctionne mal sur les plans comportemental et cognitif ( cognitions, pensées ). ainsi par exemple, le comportement problème d’une personne souffrant d’insomnie est la difficulté liée à l’endormissement ou le maintien de son sommeil. en tcc, il est admis que tout comportement, pensée ou attitude a été appris et peut donc être modifié, désappris et réappris. le but de ces thérapies est donc d’aider les personnes à acquérir des conduites plus adaptées à leur vie quo-tidienne. nevid et al. ( 2009 ) expliquent que les tcc reposent sur l’hypothèse que les schémas de pensées et les croyances affectent le comportement et que, modifier ces cognitions induit les modifications émotionnelles et com-portementales souhaitées. chez les personnes insomniaques, par exemple, une des croyances erronées est qu’ils ne trouvent pas facilement le sommeil. cela engendre chez eux une certaine anxiété lors du coucher et augmente donc cette difficulté à s’endormir ( cercle vicieux ). l’objectif de la thérapie, ba-sée sur l’apprentissage de comportements nouveaux et la modification des croyances, est d’amener le sujet à entrer dans un cercle dit vertueux ( Fontaine o. et Fontaine p., 2007 ). Selon adant ( 2011 ), il n’est pas nécessaire de recher-cher l’étiologie du problème. en effet, dans beaucoup de troubles chroniques, la cause peut avoir disparu. les tcc impliquées dans le traitement de l’insom-nie chronique des seniors sont efficaces, leurs effets se maintiennent dans le temps et elles ne présentent aucun effet secondaire.

Effets de l’ergothérapie sur la qualité du somm

eil de résidents en maison de repos

Page 36: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

36 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

Méthodologie

Dispositif expérimental, échantillonnage et échantillonla validité d’une recherche dépend directement de son dispositif et de son échantillon ( delory, 2003 ). les auteurs ont opté pour un plan à observations pré et post-expérimentales avec groupe contrôle car la mesure répétée avant-après réduit la variance résiduelle en éliminant la variance due à l’effet du sujet.

de plus, l’introduction d’un groupe contrôle permet de contrôler les effets négatifs liés à une mesure répétée ( histoire rétro-active, maturation, instru-mentation, régression vers la moyenne ). en ce qui concerne l’échantillon-nage, les résidents d’une maison de repos en Belgique ont été choisis comme participants à cette étude. l’accord de la direction, du personnel de santé et des participants a été obtenu ainsi que leur consentement éclairé. la sélec-tion des participants a été réalisée parmi les résidents de cette maison de repos. Sur base des plaintes et des dossiers médicaux ( traitement médica-menteux ), l’équipe soignante a répertorié la population des personnes âgées souffrant de troubles du sommeil. il était nécessaire de détecter les patients présentant des troubles du sommeil. pour ce faire, l’infirmière en chef et les infirmières de nuit ont rempli une grille qui permettait de mettre en évidence les patients qui se plaignaient de leur sommeil ou qui suivaient déjà un trai-tement médicamenteux. etant donné la courte période d’expérimentation, aucun sevrage n’a été envisagé. les évaluations ont suivi cette détection. les critères d’exclusion étaient : une atteinte significative des fonctions cognitives mesurée par eRFc ( voir ci-après ) et pas de présence d’insomnie. les critères d’inclusion étaient : souffrir d’insomnie objectivée par iSi ( voir ci-après ) et ne pas avoir d’atteinte cognitive. douze personnes répondaient aux critères d’inclusion et ont été réparties de façon aléatoire par tirage au sort soit dans le groupe expérimental soit dans le groupe témoin. le groupe témoin était composé de six personnes de genre féminin de moyenne d’âge 86 ans, toutes veuves. elles ont toutes des comorbidités diverses associées à de l’insomnie modérée. Quatre de ces personnes étaient très peu actives. le groupe expé-rimental est composé de six personnes, deux hommes et quatre femmes de moyenne d’âge 69 ans avec des caractéristiques proches du groupe témoin ( comorbidités, occupations, médications ). Sur le plan de l’état civil, il y avait un homme marié, une femme célibataire, trois veuves et un veuf. au point de vue occupationnel, on notait trois personnes inactives et trois personnes actives. cette procédure s’apparente à une méthode expérimentale1 avec un groupe contrôle ( eth, 2012 ).

1 les méthodes expérimentales ont les particularités suivantes : 1° ) les participants sont répartis de façon aléatoire sur un groupe expérimental ( ge ) et un groupe de contrôle ( gc ) ( ge et gc étant ainsi équivalents ) ; 2° ) un « traitement » ( X ) est utilisé de façon ciblée. le groupe expérimental reçoit le traitement qu’il s’agit d’examiner, tandis que le groupe de contrôle ne reçoit pas ce traitement ( ou reçoit un traitement de contrôle approprié ) et 3° ) la dimension visée ( la caractéristique qu’on observe ) est mesurée dans les deux groupes, éventuellement avant, mais en tout cas après le traitement ( mesure = o ) ( eth, 2012 ).

Effet

s de l

’ergo

thér

apie

sur l

a qua

lité d

u so

mm

eil d

e rés

iden

ts en

mai

son

de re

pos

Page 37: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 37

une fois les deux groupes constitués, la procédure consistait à adminis-trer les pré-tests au sein des deux groupes par iSi et agenda de sommeil. le groupe témoin n’a reçu aucune intervention ni éducative ni thérapeu-tique. les personnes présentant une atteinte cognitive significative étaient orientées vers une prise en charge plus adaptée. les capacités cognitives étant un critère d’inclusion, l’eRFc était la première évaluation présentée au patient. en fonction des résultats de celle-ci, soit le patient était orienté vers une autre prise en charge, soit le pSQi lui était proposé. Si le pSQi s’avé-rait positif, l’iSi complétait cette série de test. après analyse des évaluations, les patients entrant dans les critères d’inclusion ont rempli, pendant deux semaines, un agenda du sommeil qui permettait de recueillir différentes données telles que la latence d’endormissement, la durée des éveils noc-turnes, le réveil matinal, le temps total éveillé, le temps total de sommeil, le temps total passé au lit et l’efficience du sommeil. le groupe expérimental a participé aux séances d’ergothérapie à raison de quatre jours par semaine pendant cinq semaines consécutives. chaque séance durait environ 1h30 et se déroulait de 15h30 à 17h00 pour une question de chronobiologie. elles se composaient d’activités physiques légères, d’activités mentales et se ter-minaient par de la relaxation. deux séances d’éducation pour la santé d’une heure ont eu lieu au début du programme. les activités se déroulaient dans une salle calme et bien insonorisée, disposant de fauteuils adaptés aux acti-vités physiques et d’autres à la relaxation. a l’issue de l’intervention dans le groupe expérimental, des post-tests ( agenda du sommeil ) ont été réalisés dans les deux groupes afin de comparer les mesures étudiées.

Question de recherche, variables et contexte

il est intéressant de souligner que plus de la moitié des résidents en maison de repos souffrent d’insomnie chronique. ce phénomène est d’autant plus pré-sent en maison de repos en raison des conditions institutionnelles qui leurs incombent. la mauvaise qualité de leur sommeil influence négativement le bon déroulement de leurs journées. en effet, l’insomnie a des répercussions sur la qualité et la quantité des contacts sociaux ainsi que sur la qualité des activités diurnes. l’ergothérapie semble représenter une alternative au traite-ment médicamenteux et n’a pas d’effet indésirable. ainsi, notre question de recherche générale peut se formuler de la manière suivante : « le traitement d’ergothérapie peut-il améliorer la qualité du sommeil des résidents en mai-son de repos ? » a partir de notre variable dépendante principale, la qualité du sommeil, il convient de définir les cinq variables suivantes :

• Lasévéritédel’insomnieestmesuréeparl’ISI.

• La latence d’endormissement (LE) correspond au temps que la per-sonne met pour s’endormir. une moyenne est obtenue en additionnant le nombre de minutes ( d’endormissement ) de chaque nuit divisé par le nombre de nuits.

Effets de l’ergothérapie sur la qualité du somm

eil de résidents en maison de repos

Page 38: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

38 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

• Laduréedeséveilsnocturnes(DEN)concernelenombrederéveilsainsique le temps d’éveil. une moyenne est calculée en additionnant toutes les durées d’éveils divisées par le nombre de nuits.

• Letempstotaléveillé(TTE)estobtenuenadditionnantlesmoyennesdele, den et RM2.

• L’efficiencedusommeil(ES)consisteàdiviserlamoyenneduTTS3 par la moyenne du tpl4 et multiplier par 100. ce calcul indique le pourcentage du temps passé au lit qui est réellement consacré au sommeil. une eS de 85 % et plus est considérée comme normale ( Morin, 1996 ).

Recueil et analyse des données

pour mesurer objectivement nos variables dépendantes opérationnalisées, quatre outils ont été utilisés, à savoir : l’eRFc, le pSQi, l’iSi et l’agenda du sommeil.

l’évaluation Rapide des Fonctions cognitives ( eRFc ) de gil, toullat et al ( 2010 ) est un examen neuropsychologique minimal. l’échelle se compose de 12 items : orientation temporo-spatiale, attention et mémoire, calcul mental, raisonnement et jugement, compréhension, dénomination, répé-tition, ordre écrit, fluidité verbale, praxies, décodage visuel, écriture. ce pre-mier test sert à évaluer une détérioration significative éventuelle des fonc-tions cognitives et fait donc intervenir les critères d’inclusion et d’exclusion. en effet, pour le bon déroulement des séances, les patients présentant une atteinte cognitive significative ( score inférieur à 46/50 ) sont orientés vers une prise en charge plus adéquate.

l’outil « pittsburgh Sleep Quality index » ( pSQi ) de Buysse et al. ( 1989 ), dans sa traduction française, comprend 19 questions qui évaluent la qualité du sommeil à travers la qualité subjective du sommeil, la latence d’endormisse-ment, la durée du sommeil, l’efficience de sommeil, les troubles du sommeil, l’utilisation de médicaments du sommeil et la mauvaise forme pendant la journée. Seuls les patients présentant une insomnie ( score supérieur à 5/21 ) participent au traitement d’ergothérapie.

l’index de Sévérité de l’insomnie ( iSi ) de Morin ( 1993 et 1996 ) dans sa ver-sion en français est un questionnaire de 7 items qui étudie les répercussions quantitatives de l’insomnie : sévérité des difficultés de sommeil, satisfaction du sommeil actuel, interférence de l’insomnie dans la vie quotidienne, per-ception des conséquences attribuées à l’insomnie, niveau de détresse cau-

2 le réveil matinal ( RM ) correspond à la différence entre l’heure du réveil et l’heure du lever. la moyenne est l’addition de cette différence en minutes divisée par le nombre de nuits.

3 le temps total de sommeil ( ttS ) est la soustraction de tpl au tte de chaque nuit. ensuite, faire la moyenne de ttS.

4 le temps passé au lit ( tpl ) correspond au temps écoulé entre l’heure du coucher et l’heure de sortie du lit. il faut convertir en minutes et faire la moyenne en additionnant les minutes et diviser par le nombre de nuit.

Effet

s de l

’ergo

thér

apie

sur l

a qua

lité d

u so

mm

eil d

e rés

iden

ts en

mai

son

de re

pos

Page 39: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 39

sée par l’insomnie. l’iSi est utilisé en pré et post test pour constater l’évolu-tion de la sévérité de l’insomnie.

l’eRFc et le pSQi sont utilisés uniquement pour la sélection des participants alors que l’iSi est utilisé comme mesure de pré-test et de post-test. en outre, l’agenda de sommeil, complété durant deux semaines en pré-test et une semaine après l’intervention ( post-test ), donne des informations complé-mentaires aux précédentes évaluations pour mesurer les améliorations de différentes variables de la qualité du sommeil ( latence d’endormissement, durée eveils nocturnes, temps total eveillé et efficience de Sommeil ).

l’analyse des données est effectuée par le test de Wilcoxon ( 1945 ). ce test sta-tistique est utilisé pour une variable ordinale de scores rangés ( delory, 2003 ) et permet donc d’objectiver l’amélioration constatée. ainsi, si la différence est significative nous pouvons affirmer que cette amélioration est due au traite-ment opéré et non liée au hasard. dans notre recherche, la variable indépen-dante ( Vi ) est une variable nominale dichotomique ( avec ou sans le traite-ment d’ergothérapie ) alors que la variable dépendante ( Vd ) est une variable ordinale de scores rangés ( sévérité de l’insomnie et qualité de sommeil ).

intervention

l’intervention ergothérapique avait pour objectif d’améliorer la qualité du sommeil des résidents en maison de repos. elle était multidimensionnelle et comportait de l’éducation pour la santé, des activités physiques légères, des activités mentales et de la relaxation en groupe.

l’éducation pour la santé ( éducation du patient ou éducation thérapeu-tique ) auprès des personnes âgées comprend comme le soulignent corman et al. ( 2008 ) citant Vita et al. « les activités de formation et d’information pour maintenir leur autonomie, une intégration sociale optimale, une bonne qualité de vie, un état de santé physique satisfaisant, ( … ) une estime de soi correcte ». en informant, avec une pédagogie adaptée au public âgé, des réalités du sommeil, l’éducation pour la santé procure un savoir qui est un préalable indispensable pour comprendre puis modifier les comportements et les croyances. ce premier élément du package thérapeutique doit permettre d’agir sur les manifestations de l’insomnie chronique plutôt que de les su-bir. d’autre part, l’éducation pour la santé autonomise l’insomniaque et en fait un acteur du changement souhaité. on pourrait aller jusqu’à dire que l’insomniaque voit son statut de patient ( littéralement, celui qui endure ), tel un receveur passif, se muer en client ( celui qui requiert un service ), par-tenaire actif. l’intervention a eu lieu dans une salle agréable et bien isolée des bruits extérieurs. l’ergothérapeute-animateur s’est placé au centre du groupe de résidents en cercle. l’atmosphère était détendue car les partici-pants se connaissaient et s’appréciaient. le programme comprenait des in-formations simplifiées sur le sommeil où étaient développés principalement les aspects phénoménologiques du sommeil, les croyances, ainsi que les comportements favorables et défavorables au sommeil. les informations

Effets de l’ergothérapie sur la qualité du somm

eil de résidents en maison de repos

Page 40: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

40 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

adaptées au public-cible étaient distillées petit à petit, répétées et suivies de synthèses partielles. en outre, différents supports visuels étaient présentés afin de simplifier la compréhension des explications.

les activités physiques comprenaient des mobilisations corporelles d’inten-sité légère basée sur les recommandations de choque et al. ( 2007 ) qui re-prennent divers exercices de gymnastique douce adaptés aux personnes à mobilité réduite. d’ailleurs, pour Vecchierini et al. ( 1997 ), une quantité modé-rée mais régulière d’activité physique légère située dans l’après midi favorise-rait l’endormissement et la stabilité du sommeil. les patients étaient confor-tablement assis en cercle sur des chaises sans accoudoir ( excepté pour les patients en fauteuil roulant ). les exercices débutaient par de la respiration ab-dominale et s’enchaînaient par de la mobilisation active douce de l’ensemble du corps en commençant par la mobilisation de la colonne cervicale ensuite des membres supérieurs puis du tronc et finalement des membres inférieurs. la répétition des exercices se faisait au nombre de dix avec une pause tous les trois groupes d’exercices. Si un patient présentait des difficultés au niveau moteur, les exercices étaient adaptés pour lui. durant les cinq semaines d’ex-périmentation, un roulement des différents mouvements a été effectué.

les activités cognitives simples comprenaient des activités ludiques adap-tées à la population : jeux de recherche de mots, de synonymes et de défini-tions, des jeux de logique et de réflexion, des jeux de culture générale. Vec-chierini et al. ( 1997 ) expliquent que comme toute autre activité, les excès en fin de journée stimulent l’activité des systèmes d’éveil et perturbent l’endor-missement. par contre, l’activité cognitive répétée chaque jour, organisée en « rituel », favorise pour certains un détachement des préoccupations quoti-diennes qui est nécessaire au sommeil.

présentée à la fin de chaque séance, la relaxation était précédée d’exercices de respiration diaphragmatique lente et profonde qui ont servi à induire le calme et elle était suivie de relaxation passive inspirée du cycle inférieur du training autogène de Schultz ( guiose, 2007 ). cette méthode passive s’ap-puie sur l’induction au calme, les perceptions de lourdeur, de chaleur, de ralentissement de la fréquence cardiaque et de la respiration. cette activité demande plusieurs séances d’entraînement et d’apprentissage avant d’ob-tenir un état de relaxation. elle a été choisie en fonction de la population étudiée. a l’issue de chaque intervention un espace de dialogue a été créé. toute précipitation a été soigneusement évitée de manière à permettre à chacun de suivre les activités proposées à son rythme personnel. espie ( 1994 ) souligne que les traitements à base de relaxation se révèlent effi-caces dans la réduction des latences d’endormissement et qu’ils amènent également des modifications positives en ce qui concerne d’autres para-mètres du sommeil. les effets des traitements sont souvent statistiquement significatifs. la relaxation amène d’importantes améliorations de l’état de repos et de l’agrément du sommeil. elle participe également au bien être général.

Effet

s de l

’ergo

thér

apie

sur l

a qua

lité d

u so

mm

eil d

e rés

iden

ts en

mai

son

de re

pos

Page 41: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 41

Résultats5 et interprétationsl’objet de cette étude est d’étudier l’impact supposé de notre intervention multidimensionnelle en ergothérapie ( variable indépendante ) comprenant de l’éducation thérapeutique, des activités physiques légères et cognitives ainsi que de la relaxation sur la qualité du sommeil ( variable dépendante ) des personnes âgées institutionnalisées sans troubles cognitifs majeurs et souffrant de troubles du sommeil de type insomnie. de ce fait, les résultats sont présentés en fonction de notre variable dépendante opérationnalisée en sous variables, à savoir : 1° ) l’index de sévérité de l’insomnie ( iSi ), 2° ) la latence d’endormissement ( le ), 3° ) la durée des éveils nocturnes ( den ), 4° ) le temps total éveillé ( tte ) et 5° ) l’efficience du sommeil.

Sur base de l’évolution des résultats obtenus aux pré et post-tests ( agenda du sommeil et iSi ), une analyse statistique a été effectuée ( test de Wilcoxon ) pour vérifier que cette amélioration est bien due au traitement opéré et non au hasard. dans ce test, la p valeur nous indique si l’amélioration est signifi-cative ou pas. habituellement, les chercheurs considèrent que la différence entre les groupes est significative si elle est inférieure à 0.05. dans ce cas, on pourra en déduire que l’amélioration est due au traitement d’ergothérapie et non au hasard.

index de Sévérité de l’insomnie ( iSi )

le test de Wilcoxon en pré-test indique qu’il n’existe pas de différence si-gnificative ( nS à 0.6250, cfr. figure n°2 ) entre la sévérité de l’insomnie du groupe contrôle ( iSi=15 ) et celle du groupe expérimental ( iSi=15 ). en d’autres termes, les deux groupes sont comparables et présentent la même sévérité d’insomnie. par contre, au post-test, les résultats sont significatifs ( S à 0.0264 ) ; ce qui veut dire que l’insomnie est significativement moins sévère dans le groupe expérimental ( iSi=9 ) par rapport au groupe contrôle ( iSi=15.5 ). la diminution des données entre les deux groupes confirme une amélioration de l’insomnie liée au traitement. on peut donc conclure que le traitement ergothérapique a eu un impact favorable sur le sommeil du groupe expérimental. ces résultats sont corroborés par Vecchierini et al. ( 1997 ) qui mettent en évidence que l’activité physique légère dans l’après midi favoriserait l’endormissement et la stabilité du sommeil.

5 Remarque : le groupe expérimental a subi un effet de mortalité expérimentale. Statistiquement, la médiane des données de ce groupe est donc basée sur 5 patients au lieu de 6. Seules les variables les plus représentatives du sujet seront présentées ci dessous sous forme graphique avec leur légende.

Effets de l’ergothérapie sur la qualité du somm

eil de résidents en maison de repos

Page 42: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

42 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

Figure 2 : index de sévérité de l’insomnie

latence d’Endormissement ( lE )

les résultats aux pré-tests indiquent que la latence d’endormissement dans les groupes expérimental ( le=76.50 ) et contrôle ( le=73.25 ) ne se différen-cient pas significativement ( nS à 0.5000, cfr. figure n°3 ). donc, avant le trai-tement, ces deux groupes sont homogènes à ce niveau. après l’intervention ergothérapique ( post-test ), le test de Wilcoxon met en évidence une diffé-rence significative ( S à 0.0312 ) entre le groupe expérimental ( le=36 ) et le groupe témoin ( le=81 ). les personnes âgées ayant bénéficié du package thé-rapeutique s’endorment significativement plus vite que les autres. cette dimi-nution du temps d’endormissement observée dans le groupe expérimental peut donc être imputée au traitement. ces résultats vont dans le même sens que ceux d’espie ( 1994 ) qui souligne que les traitements à base de relaxation se révèlent efficaces dans la réduction des latences d’endormissement.

Figure 3 : latence d’endormissement

Effet

s de l

’ergo

thér

apie

sur l

a qua

lité d

u so

mm

eil d

e rés

iden

ts en

mai

son

de re

pos

Page 43: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 43

Durée des Eveils nocturnes ( DEn )

le test statistique indique que la différence entre ces deux groupes, avant l’intervention ergothérapique ( pré-tests ), n’est pas significative ( nS à 0.4375, cfr. figure 4 ). autrement dit, la durée des éveils nocturnes est simi-laire dans les deux groupes expérimental ( den=105 ) et témoin ( den=119 ) qui sont donc homogènes. après le traitement d’ergothérapie ( post-tests ), il apparaît que les personnes âgées du groupe expérimental ( den=50 ) se réveillent moins longtemps que les sujets du groupe contrôle ( den=129 ). la différence observée entre ces deux groupes est donc significative ( S à 0.0381 ). ce qui signifie que le traitement est efficace pour améliorer le som-meil en diminuant la durée des éveils nocturnes.

Figure 4 : durée des éveils nocturnes

temps total Eveillé ( ttE )

la situation des deux groupes avant l’intervention ergothérapique ( pré-test ) est tout à fait comparable puisque les différences observées au niveau du temps total d’éveil entre le groupe expérimental ( tte=182.50 ) et le groupe contrôle ( tte=257.50 ) n’est pas significative ( nS à 0.3053, cfr. figure 5 ). comme la différence entre les sujets ayant bénéficié du programme ( tte=107 ) et les personnes qui n’ont pas participé à cette intervention ( tte=261 ) est statistiquement significative ( S à 0.0144 ), il apparaît que le traitement provoque une diminution du temps total éveillé et permet donc aux personnes âgées du groupe expérimental de mieux dormir.

Effets de l’ergothérapie sur la qualité du somm

eil de résidents en maison de repos

Page 44: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

44 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

Figure 5 : temps total éveillé

Efficience du Sommeil ( ES )

l’efficience du sommeil en pré-test dans le groupe expérimental ( eS=65 ) ne se différencie pas significativement de celle du groupe contrôle ( eS=58.75 ). ces deux groupes de sujets possèdent une efficience de sommeil similaire et donc comparable ( nS à 0.3569, cfr. figure 6 ). Suite à l’intervention ergothé-rapique, les résultats du post-test indiquent clairement que les personnes âgées du groupe expérimental ( eS=82 ) possèdent une meilleure efficience de sommeil que les autres ( eS=56.5 ) puisque la différence entre ces deux groupes est significative ( S à 0.0126 ). il apparaît donc que le traitement améliore la qualité de sommeil dans sa composante d’efficience ( eS ). nos résultats rejoignent les constatations d’espie ( 1994 ).

Figure 6 : efficience du sommeil

Effet

s de l

’ergo

thér

apie

sur l

a qua

lité d

u so

mm

eil d

e rés

iden

ts en

mai

son

de re

pos

Page 45: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 45

Discussionl’hypothèse d’une amélioration de la qualité du sommeil suite à une inter-vention multidimensionnelle non pharmacologique ( ergothérapie ) auprès d’un échantillon de personnes qui résident en maison de retraite est confir-mée. ce qui est semblable à ce que l’on peut lire dans la littérature ( lianqi et al., 2006 ; glovinsky et al., 2008 ; Stepnowski et al. 2008 ). cependant, cette recherche préliminaire comporte certaines limites. en effet, il existe une li-mite liée directement au dispositif expérimental ( plan avant-après ). ce plan ne permet pas d’évaluer des interactions éventuelles entre le pré-test et la manipulation de la variable indépendante. d’autre part, l’échantillon est un échantillon de convenance de petite taille ce qui rend toute généralisation abusive. il s’agit d’un manque de validité externe lié au choix d’un échantil-lon non représentatif de la population ( les sujets sont tous issus de la même maison de repos ). les personnes âgées qui vivent en maison de repos sont souvent marginalisées socialement. des séances répétées avec une ergo-thérapeute enthousiaste suscitent l’intérêt et l’engouement. de ce fait, un effet dû à l’animateur n’est pas à exclure ( effet animateur ). la nouveauté de l’intervention est également un élément qui peut biaiser les résultats dans le groupe expérimental ( effet nouveauté ). Finalement, la mortalité expéri-mentale pourrait être évoquée puisque un sujet a quitté le groupe expéri-mental pour diverses raisons médicales.

l’intérêt principal de cette recherche est d’avoir montré la faisabilité de l’in-tervention ergothérapique auprès de cette catégorie de personnes et par là de susciter des recherches complémentaires avec des échantillons plus grands et plus représentatifs de la population des personnes qui vivent en maison de repos. nous sommes conscients que l’intervention ergo-thérapique est plus exigeante en temps et en personnel de santé que les interventions médicamenteuses. Mais comme elle ne comporte pas d’effet secondaire, elle améliore la qualité de vie et la santé globale des résidents. nous pensons aussi que cette intervention s’inscrit parfaitement dans le domaine thérapeutique couvert par les ergothérapeutes à l’intersection des soins physiques et psychologiques pour la promotion de l’autonomie.

Conclusionl’objet de cette recherche était de mesurer l’impact d’une intervention ergo-thérapique multidimensionnelle sur la qualité du sommeil ( sévérité de l’in-somnie, le, den, tte et eS ) chez la personne âgée en maison de repos. pour ce faire, un traitement ergothérapique basé sur l’approche cognitivo-com-portementale et constitué d’éducation pour la santé, d’activités physiques légères, de stimulations cognitives et de relaxation a été mis en place durant cinq semaines. deux groupes ont préalablement été formés pendant la pro-cédure d’échantillonnage en fonction des résultats des évaluations eRFc et pSQi. les groupes témoin et expérimental étaient tous deux constitués de six personnes.

Effets de l’ergothérapie sur la qualité du somm

eil de résidents en maison de repos

Page 46: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

46 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

le constat de la variabilité inter-individuelle mais aussi intra-individuelle du sommeil était évident. les troubles du sommeil sont d’une part liés à cer-taines pathologies, d’autre part à la médication, à la personnalité et au vécu de chacun. cependant, l’intervention ergothérapique proposée s’avère effi-cace dans cet échantillon de personnes vivant en maison de repos. la qualité du sommeil est améliorée : la latence d’endormissement et la durée des éveils nocturnes sont diminués, le temps total de sommeil et l’efficience de sommeil sont augmentés dans le groupe expérimental alors qu’on note peu de chan-gements dans le groupe témoin. on note des améliorations statistiquement significatives selon le test de Wilcoxon pour les paramètres étudiés. de plus, dans le groupe témoin qui n’a pas été soumis à l’intervention, les scores à l’in-dex de Sévérité de l’insomnie ( iSi ) révèlent en moyenne de l’insomnie sévère au pré-test et aucune modification de cet état au post-test.

Malgré ces résultats plus qu’encourageants mis en évidence chez tous les résidents ayant participé à l’expérimentation, il n’est pas possible de les généraliser. en effet, il est important de tenir compte du fait que l’expéri-mentation a été effectuée sur une courte période et dans un échantillon de convenance de petite taille non représentatif. de plus, l’échantillon a subi un effet de mortalité expérimental, ce qui rend la généralisation encore plus hasardeuse. dans le cadre d’une vérification plus objective du traitement opéré, il serait intéressant d’augmenter la taille de l’échantillon ainsi que la période de test.

Subjectivement, les séances organisées ont contribué à améliorer le quo-tidien des résidents. les mots pour certains, les émotions pour d’autres, ont permis de comprendre qu’une partie de leur souffrance physique, mais aussi psychologique a pu être atténuée pendant et à la suite de ce pro-gramme. cela a également permis à certaines personnes de modifier leur façon d’envisager l’avenir et ainsi de soulager leurs inquiétudes et leurs an-goisses par rapport à leur devenir. notons que certains résidents actifs dans le programme ne participaient jamais aux séances « classiques » d’ergothé-rapie prévues dans leur institution. il faut encore souligner que le travail en équipe pluridisciplinaire a permis de mener à bien ce projet et met l’accent sur l’importance d’une collaboration bienfaisante autour du patient.

Effet

s de l

’ergo

thér

apie

sur l

a qua

lité d

u so

mm

eil d

e rés

iden

ts en

mai

son

de re

pos

Page 47: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 47

bibliographieadant g. ( 1996 ), Bien dormir, Question-santé, Bruxelles, 70p.

adant g. ( 2011 ), Eléments d’hypnologie, initiation au traitement de l’insom-nie chronique sans médicaments, cours inédit, cRea-helB Bruxelles, 32p.

aleSSi c.a., MaRtin J., WeBBeR a., KiM c.e., haRKeR J.o., JoSephSon K.R. ( 2005 ), Randomized, controlled trial of a nonpharamcological interven-tion to improve abnormal Sleep/Wake patterns in nursing home Residents ( 2005 ) Journal of the American Geriatrics Society, Vol. 53 : 803-810.

BaYingana K., deMaReSt S., giSle S., heSSe e., MieReManS p.J., taFFo-Reau J., Van deR heYden ( 2004 ), Enquête de santé par interview, Belgique, Service d’épidémiologie de l’Institut Scientifique de Santé Publique, n°2006-034.

BelleVille g. ( 2010 ), in Mortality hazard associated with anxiolytic and hypnotic drug use in the national population health survey, la Revue cana-dienne de psychiatrie, vol.55, n°9, septembre 2010.

Benoit o., goldenBeRg.F. ( 2004 ), L’insomnie chronique, Masson, paris, 194p.

BilliaRd M., dauVillieRS Y. ( 2006 ), Les troubles du sommeil, Masson, paris, 395p.

BlooM h.g., ahMed i, aleSSi c., ancoli-iSRael S., BuYSSe d., KRY-geR M., phillipS B., thoRpY M., Vitiello M., Zee p. ( 2009 ), evidence-Based Recommandations for the assessment and Management of Sleep disorders in older persons, Journal of the American Geriatrics Society, Vol. 57 : 761-954.

BuYSSe d.J., geRMain a., Moul d.e., FRanZen p.l., BRaR l., FletcheR M.e., BegleY a., houcK p.R., MaZundaR S., ReYnoldS c.F., MonK t.h. ( 2011 ), efficacy of Brief Behavioral treatment for chronic insomnia in older adults, Arch Intern Med. published online January 24, 2011. doi:10.1001/archintern-med.2010.535

cappelieZ p., landReVille p., VeZina J. ( 2000 ), Psychologie clinique de la personne âgée, Masson, collection psychologie ( ottawa,ont. ), 269p.

choQue J., Quentin o. ( 2007 ), Gym douce pour les personnes handicapées ( ou à mobilité réduite ), ed. amphora, 240p.

coRMan B., lauQue S., VanBoSKStael V., teillet l. ( 2008 ), les programmes d’éducation pour la santé semblent efficaces pour bien vieillir, Fédération nationale de gérontologie, Gérontologie et Société, 125 : 105-109.

coRMan B. ( 2009 ), le sommeil en ehpad, La Revue de Gériatrie, 34 : 401-405.

Effets de l’ergothérapie sur la qualité du somm

eil de résidents en maison de repos

Page 48: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

48 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

deloRY c. ( 2003 ), Guide pratique de la recherche en sciences humaines, erasme, namur, 272p.

eldgenossische technische hochschule Zurich ( eth ) ( 2012 ), eval-guide, Méthodes expérimentales, consulté le 19/09/2012 à l’adresse http://www.evalguide.ethz.ch/program_evaluation/collect_data_prog/design/experimental_design_FR

eSpie c.a. ( 1994 ), Le traitement psychologique de l’insomnie, ed. Mardaga, 331p.

Fontaine o., Fontaine p. ( 2007 ), Guide de thérapie comportementale et cognitive, les usuels Retz, paris, Retz, 672p.

gil R. ( 2010 ), Neuropsychologie, 5ème éd., paris, Masson.

gloVinSKY p., Yang c-M, duBRoBRoVSKY B., SpielMan a. ( 2008 ), non-pharmacologic Strategies in the Management of insomnia : Rationale and implementation, Sleep Medicine Clinics, 3 : 189-204.

goRdon a., gladMan J.R.F. ( 2010 ), Sleep in care homes, Rewiews in Clini-cal Gerontology, 20 : 309-316.

guioSe M. ( 2007 ), Relaxations thérapeutiques, ed. heure de France, paris, 107p.

inStitut national de la Sante et de la RecheRche Medicale ( 2009 ) Le sommeil des personnes âgées : un indicateur important de mortalité, consulté le 26 aout à http://www.inserm.fr/espace-journalistes/le-som-meil-des-personnes-agees-un-indicateur-important-de-mortalite

iRWin M.R., cole J., nicassio p.M. ( 2006 ), comparative Meta-analysis of Behavioral interventions for insomnia and their efficacy in Middle-aged adults and in older-adults 55+ Years of age, Health Psychology, Vol.25, n°1 : 3-14.

lecheValieR B. et al. ( 2008 ), Traité de neuropsychologie Clinique, de Boeck, Bruxelles, 1040p.

lianQi l., ancoli-iSRael S. ( 2006 ), insomnia in the older adult, Sleep Medicine Clinics, 1 : 409-421.

MiniSteRe de la Sante et deS SolidaRiteS ( 2006 ), Rapport sur le thème du sommeil, résumé du rapport des DRS F ET H ONEN : les troubles du sommeil chez le sujet âgé, consulté le 26 aout à http://www.sante.gouv.fr/iMg/pdf/rapport-5.pdf

MoRin c. ( 1993 ), insomnia : psychological assessment and management. new York, guilford press.

MoRin c. ( 1996 ), Vaincre les ennemis du sommeil, les editions de l’homme, Marabout, 271p.

Effet

s de l

’ergo

thér

apie

sur l

a qua

lité d

u so

mm

eil d

e rés

iden

ts en

mai

son

de re

pos

Page 49: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 49

neVid J. ( 2009 ), Psychopathologie, pearson education France, 7ème édition, 448p.

pSQi : index de Qualité du Sommeil de pittsburgh, traduction française, centre du Sommeil et de la Vigilance de l’hôtel-dieu, paris.

SaBBah l. ( 2009 ), Le tout en un : révisions IFSI, Masson, 1823p.

SaMacheR R., aleXandRe B. ( 2005 ), Psychologie clinique et psychopatholo-gie, ed. Bréal, collection grand amphi psychologie, 446p.

SenningeR F. ( 2012 ), Abord clinique des troubles du sommeil, Springer, col-lection abord clinique, 116p.

SnouSSi a., caMilleRi J.p. ( 2012 ), L’éternelle jeunesse : L’Art de bien vieillir, harmattan, collection ethique et pratique médicales, paris, 242p.

StepnoWSKi c.J., ancoli-iSRael S. ( 2008 ), Sleep an its disorders in Sen-iors, Sleep Medicine Clinics 3 : 281-293.

VecchieRini M.F., touchon J. ( 1997 ), Le guide du sommeil, ed. John libbey eurotext, paris, 170p.

Effets de l’ergothérapie sur la qualité du somm

eil de résidents en maison de repos

Page 50: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

50 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

Page 51: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 51

l’ergothérapie auprès de personnes ayant un trouble envahissant du développement ou une déficience intellectuelle présentant des troubles graves du comportement

Mots clés

ergothérapie, troubles envahissants du développement, déficience in-tellectuelle, troubles graves du comportement, évaluation, intervention

Résumé

les personnes ayant une déficience intellectuelle ( di) ou un trouble envahissant du développement ( ted) présentent des caractéris-tiques les rendant plus susceptibles de développer des troubles du comportement ayant des conséquences majeures sur leur fonction-nement quotidien et leur entourage. parmi ceux-ci, environ 10% seront considérés comme des troubles graves du comportement ( tgc). les causes des tgc sont multiples et demandent une éva-luation et une analyse approfondie de tous les aspects entourant la personne. plusieurs professionnels doivent unir leurs expertises pour travailler en équipe et intervenir dans l’amélioration de la qualité de vie non seulement de l’individu, mais également des personnes qui

Mélanie PilotE

L’ergothérapie auprès de personnes ayant un trouble envahissant…

Mélanie pilote ergothérapeute, M.Sc. coordination tgc cRdi de Québec 7843 Rue des Santolines Québec, Qc g1g 0g3 tel: 418-683-2511 poste 2295 Fax : 418-626-6514 courriel : [email protected]

www.crdi.qc.ca

Page 52: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

52 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

gravitent autour de lui. l’ergothérapeute peut être appelé à jouer un rôle prédominant au sein de cette équipe. cet article vise dans un premier temps à décrire les troubles graves du comportement chez les personnes ayant une di et / ou un ted. dans un deuxième temps, il expose le rôle joué par l’ergothérapeute au sein d’une équipe professionnelle spécialisée auprès de cette population pour évaluer, intervenir et prévenir les tgc.

1. introductionde part leur formation, les ergothérapeutes sont appelés à travailler auprès de multiples clientèles. or, de plus en plus il s’avère essentiel d’avoir une expertise pour intervenir auprès de personnes ayant un diagnostic de ted avec ou sans di. il est estimé qu’environ 10 % des adultes présentant un ted développent des tgc ( tassé, Sabourin, garcin et lecavalier, 2010)1. en ce qui a trait aux jeunes enfants, il n’y a pas de consensus sur la prévalence de ces troubles ( Rivard, 2012 )2. pourtant, les besoins de ces enfants sont importants et découlent d’une situation liée à la présence de diagnostics complexes avec comorbidité ainsi que d’habiletés cognitives, sociales et adaptatives limitées, sans oublier un contexte familial bien souvent au bord de l’épuisement. il importe alors, dans le but de répondre aux besoins de l’enfant et de sa famille, de travailler avec une équipe multidisciplinaire incluant psychologue, psychoéducateur, infirmière, orthophoniste ( logo-pède) et ergothérapeute. au Québec, les services auprès de cette popula-tion sont offerts par les centre de réadaptation en di et en ted ( cRdited). ces centres ont entre autre développé l’expertise pour travailler auprès de jeunes di / ted ayant un trouble grave du comportement ( tgc).

2. Qu’est-ce qu’un trouble grave du comportement ( tGC)? actuellement, il n’existe pas de définition québécoise de ce qu’est un tgc chez les jeunes enfants ( Rivard, 2012 )2. chez les adultes, ceci réfère à : « Un trouble du comportement est jugé grave s’il met en danger, réellement ou po-tentiellement, l’intégrité physique de la personne, d’autrui ou de l’environne-ment ou qu’il compromet sa liberté, son intégration ou ses liens sociaux. » ( tas-sé, Sabourin, garcin et lecavalier, 2010, p.64 )1. dans les écrits scientifiques anglophones, les termes « challenging behaviors » et « disruptives behaviors » sont utilisés pour aborder ce sujet.

de façon générale, Willaye et Magerotte ( 2008)3 divisent les comporte-ments-défis en six catégories :

1. agressions : frapper, donner des coups de pieds, mordre, tirer les che-veux, pousser,…

2. automutilation : Se frapper la tête, se mordre, s’arracher les cheveux, se griffer,…

L’erg

othé

rapi

e aup

rès d

e per

sonn

es ay

ant u

n tr

oubl

e env

ahiss

ant…

Page 53: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 53

3. destruction : Briser les objets, déchirer les vêtements, lancer des objets,…

4. perturbation : crier, fuguer, opposition permanente, menaces, se mettre en colère, se déshabiller en public,…

5. Stéréotypie/autostimulation : Vocalises, balancements, marcher de long en large, mouvements des mains, rocking, etc.

6. alimentation : se faire vomir, pica, vol de nourriture, hypersélectivité ali-mentaire, …

précisons que les causes d’un tgc sont souvent multiples. À prime abord, plusieurs caractéristiques de la personne découlent des diagnostics d’au-tisme ou de di et ont des conséquences majeures sur son fonctionnement, ce qui la rend plus vulnérable. la di entraîne des déficits sur le plan cognitif, des difficultés d’abstractions et d’adaptation ainsi que des habiletés sociales et langagières limitées. chez les personnes autistes, il ressort en plus une grande difficulté à se mettre à la place de l’autre ( théorie de l’esprit) et à interpréter les actes sociaux d’autrui. les intérêts demeurent restreints et l’adaptation aux changements est souvent difficile. par ailleurs, la présence de troubles sensoriels est également de mieux en mieux documentée. À ce propos, il a été démontré dans des études récentes ( Silva et Schalock, 20124 ; leekam et al., 20075 ) que plus de 90 % des enfants ayant un ted présentent à divers degrés des problèmes au plan sensoriel.

la comorbidité est également un facteur qui affecte les comportements de la personne et peut favoriser l’apparition de tgc. il est vrai qu’il est diffi-cile de diagnostiquer la présence de troubles mentaux chez la population ayant une di ou un ted, mais il n’en demeure pas moins que la prévalence de ceux-ci est trois à quatre fois plus élevée que dans la population normale ( american psychiatric association, 2003 )6.

les problèmes d’ordre médicaux sont un autre facteur sous-jaccent à la pré-sence de tgc ( Willaye et Magerotte, 2008 )3. par exemple, la douleur cau-sée par une otite chez tous les enfants est intense. les enfants ayant une di ou un ted, ne peuvent exprimer facilement leur malaise qui peut alors se manifester en agitation, en irritabilité et voire même en agressivité. des comportements d’automutilation peuvent aussi apparaître ( ex. se frapper à la tête ). Souvent, étant incapable de s’exprimer verbalement, c’est sa façon d’exprimer sa douleur. c’est pourquoi il est important de toujours vérifier si la cause au tgc est d’origine médicale ou physiologique.

en outre, l’apparition de tgc peut être influencée par le milieu de vie, sur-tout si ce dernier n’est pas adapté aux caractéristiques de la personne. en effet, il est possible que l’environnement physique ou humain ne réponde pas adéquatement aux besoins particuliers de la personne.

la qualité de vie est rapportée par Fraser et labbé ( 1999 )7 comme étant un facteur déterminant dans l’apparition ou non des tgc. cette notion inclut l’ensemble des facteurs entourant le milieu de vie de la personne : les condi-tions environnementales, les activités offertes, l’encadrement, les relations avec les autres personnes et les intervenants.

L’ergothérapie auprès de personnes ayant un trouble envahissant…

Page 54: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

54 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

en résumé, la manifestation de tgc est causé par un ensemble de facteurs d’origine biomédicale, environnementale ( physiques, humains ) et contex-tuelle. comme plusieurs éléments doivent être pris en compte pour inter-venir adéquatement auprès de l’enfant, il importe de faire une analyse ap-profondie et attentive de la situation. d’autant plus que ces derniers ont des impacts importants sur le fonctionnement quotidien de la personne. en effet, comme ils entravent le développement de l’enfant, celui-ci sera moins disponible à faire des apprentissages ( Rivard, 2012 )2. ces facteurs mettent l’enfant à risque d’exclusion des milieux de garde, scolaires, loisirs, etc. ( Mcgill, tennyson et cooper, 2006 )8. les conséquences peuvent aller vont jusqu’à altérer l’unité familiale qui vivra un haut niveau de stress, une détresse émotionnelle importante et une moins belle qualité de vie ( neece et Baker, 2008 )9. les intervenants quant à eux font face, non seulement, à un niveau élevé de stress, mais aussi à de l’épuisement professionnel, sans négliger le fait que les accidents de travail sont plus fréquents ( hasting et Brown, 2002 )10.

3. l’analyse multimodale, le plan d’action multimodal et le monitoringl’approche multimodale a été développée par gardner ( 2002 )11. Basée sur le modèle biopsychosocial, elle permet de procéder à une analyse permettant de comprendre la fonction du comportement problématique par la mise en commun des différentes connaissances dans les domaines suivants : psy-chologie, santé physique, santé mentale et neurologie. À prime abord, le comportement doit être défini de façon objective et mesurable.

ensuite, il faut documenter la fréquence, la durée et l’intensité de ce com-portement. l’étape suivante consiste à observer le comportement pour dé-terminer ce qui se passe avant, pendant et après le comportement.

cette analyse permet ensuite d’émettre des hypothèses quant aux causes possibles des troubles du comportement de la personne. par la suite, un plan d’action est développé et implanté dans le milieu. il comprend des aménagements préventifs, des stratégies de prévention actives et un plan de traitement.

le monitoring est un processus de suivi des interventions tant sur le plan clinique que de la gestion. il assure, en équipe, le suivi de l’application du plan d’action multimodal. il permet, par le biais de grilles d’observations complétées quotidiennement par l’équipe terrain, de mesurer l’efficacité du plan d’action, de valider les hypothèses quant aux fonctions du ou des comportements, d’ajuster les interventions en conséquence. cette étape de l’approche multimodale prend la forme de rencontres régulières réunissant les éducateurs spécialisés impliqués auprès de la personne et les profession-nels ( Buisson, Rondeau, et Sabourin, 2012 )12.

L’erg

othé

rapi

e aup

rès d

e per

sonn

es ay

ant u

n tr

oubl

e env

ahiss

ant…

Page 55: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 55

4. le rôle de l’ergothérapeuteau Québec, ce sont les centres de réadaptation en di et en ted ( cRdited ) qui accueillent les personnes ayant ces diagnostics. le cRdited de Québec possède une équipe de professionnels spécialisés en trouble grave du com-portement qui est composée de psychologues, psychoéducateurs, infirmier, orthophoniste et ergothérapeute. lors de la réception d’une demande de service d’une référence, c’est le psychologue qui coordonne l’analyse mul-timodale. Selon les besoins de la personne, il sollicitera l’expertise d’autres professionnels pour compléter l’analyse. il est possible que l’ergothérapeute soit appelé à intervenir tout au long du processus. il y apportera son exper-tise dans l’évaluation des habiletés fonctionnelles en considérant les aspects sensoriels, moteurs, perceptuels et cognitifs, de même que leurs influences sur la manifestation des tgc. il participera à l’élaboration et au suivi du plan d’action, soit par des interventions agissant directement auprès de l’enfant, soit en formant les membres de l’équipe régulière ou de la famille sur les dif-férentes modalités d’interventions à mettre en place ( ex : diète sensorielle, aménagements préventifs, etc ). il peut également être appelé à jouer un rôle de soutien-conseil.

Son travail se fait de concert avec les membres de l’équipe tgc, mais éga-lement avec les personnes qui gravitent autour de l’enfant, soit les parents, l’éducateur spécialisé, l’enseignant, etc.

3.1 l’évaluation

comme il fut mentionné plus tôt, les problèmes sensoriels sont fréquents chez les enfants ayant un ted, et ce, à différents niveaux. Bien souvent, ces particularités ont des impacts significatifs sur les comportements de ces enfants. Face à ce constat, il est primordial de bien évaluer le profil senso-riel de l’enfant car il peut s’agir d’une cause sous-jacente aux troubles du comportement. l’évaluation de l’aspect sensoriel peut se faire à partir de questionnaires, tels que le profil Sensoriel ( dunn, 1999 )13 ou l’inventaire de l’intégration sensorielle de la personne ayant un trouble du développement ( Reisman et hanschu, 1997 )14. une fois que les résultats à ces question-naires sont analysés, il importe de poursuivre par des observations dans les différents milieux de vie. en plaçant la personne dans divers contextes et en proposant des stimulations variées, il est possible d’évaluer comment elle réagit. les observations dans les milieux permettent également de déter-miner les éléments dérangeants liés à l’environnement et de planifier quels aménagements préventifs peuvent être mis en place.

en plus d’évaluer le profil sensoriel, il importe d’évaluer les habiletés cogni-tives afin de déterminer le processus d’apprentissage et le niveau de fonc-tionnement de la personne. l’ergothérapeute peut utiliser la grille d’analyse d’activité Percive Recall Plan Perform ( pRpp ) de chapparo et Ranka, ( 2006 )15 qui s’avère un outil pertinent à utiliser avec cette clientèle car elle est faci-lement adaptable à plusieurs tâches. de plus, elle apporte un complément

L’ergothérapie auprès de personnes ayant un trouble envahissant…

Page 56: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

56 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

intéressant aux évaluations neuropsychologiques. ainsi, en observant com-ment la personne réalise ses tâches au quotidien, il est possible de voir des éléments qui peuvent contribuer à l’apparition des tgc ( ex. : déficit d’atten-tion, problème d’inhibition, manque d’initiative, persévération, difficulté à planifier les étapes, manque de jugement, capacité d’abstraction limitée, incapacité à résoudre un problème, etc. )

les habiletés sociales sont évaluées conjointement avec l’orthophoniste, le psychologue et le psychoéducateur1. l’observation du jeune dans son mi-lieu ou dans un contexte d’activités structurées ou non-structurées met en lumière la façon dont il entre en interaction avec son entourage, comment il réagit devant de nouvelles personnes, comment il gère ses comportements face aux contraintes et aux demandes.

l’évaluation des habiletés motrices peut parfois être pertinente, et ce, se-lon les incapacités de l’enfant. toutefois, il existe très peu d’outils qui soient adaptés et normés aux personnes di et ted. plus les déficits cognitifs sont importants, plus ils limitent les outils pouvant être utilisés. ainsi, il sera plus complexe d’utiliser des évaluations standardisées, telles que la batterie Mil-ler Function and Participation Scales ( Miller, 2006 )17 ou la batterie Bruininks-Oseretsky Test of Motor Profeciency, 2e édition ( Bruininks et Bruininks, 2005 )18. dans ce cas, il sera nécessaire d’observer l’enfant à la tâche. l’impact des déficits moteurs peut sembler moindre. il faut cependant en tenir compte pour ajuster les exigences et les demandes du milieu. Si les demandes ne tiennent pas compte des difficultés au plan moteur, l’enfant se sentira en échec pourra se montrer moins collaborant, davantage en opposition et même devenir agressif.

3.2 l’intervention

la résolution des problèmes de comportement se basera d’une part sur l’application de techniques centrées sur les conséquences liées aux com-portements.

nous parlons ici des stratégies punitives ( Willaye et Magerotte, 2008 )3. or, les interventions doivent davantage être préventives, tenir compte du potentiel de la personne et viser à améliorer la qualité de vie. le Positive Behavior Support ou approche positive suit cette ligne de conduite. «Il s’agit d’une science appliquée qui utilise, d’une part, les méthodes éducatives pour dé-velopper le répertoire comportemental de l’individu et qui, d’autre part, utilise les méthodes de changement de système pour redessiner une environnement de vie personnalisé susceptible de réaliser d’abord la mise en valeur de la qualité de vie et deuxièmement, de réduire au minimum le comportement probléma-tique. »( carr, dunlap, horner et al., 2002, p.4 )19 en résumé, cette approche offre une vision holistique de l’individu. dans cette optique, il est préférable

1 Selon l’ordre des psychoéducateurs du Québec, le psychoéducateur est formé pour intervenir dans l’action auprès de la personne aux prises avec des difficultés d’adaptation se manifestant sur le plan comportemental. ( http://www.ordrepsed.qc.ca/psychoeducateur.aspx?sc_lang=fr-ca) 16

L’erg

othé

rapi

e aup

rès d

e per

sonn

es ay

ant u

n tr

oubl

e env

ahiss

ant…

Page 57: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 57

que les interventions ne mettent pas l’emphase sur le comportement pro-blématiques, mais qu’elles soient davantage centrées sur l’individu, tout en offrant un soutien personnalisé. elles doivent viser le développement d’habiletés, l’aménagement de l’environnement et favoriser l’autodéter-mination2 ( Fraser et labbé, 1993 )20. en ce qui concerne plus concrètement l’ergothérapie, il n’y a pas d’approche spécifique pour intervenir auprès des personnes ayant un tgc. l’ergothérapeute fait appel à un ensemble de connaissances en lien avec ses champs d’expertises.

l’évaluation en ergothérapie permettra de déterminer si un problème de modulation ou de traitement de l’information sensorielle peut être une cause sous-jacente au tgc. Si tel est le cas, les modalités d’interventions seront basées sur une approche sensorielle inspirées de la théorie de l’inté-gration sensorielle de J. ayres ( 1979 )21. depuis les travaux de J. ayres en 197921, les connaissances à ce sujet se sont considérablement multipliées et raffinées. À ce propos, Miller et al. ( 2007 )22 propose une taxonomie ré-visée des troubles sensoriels. d’autres ergothérapeutes, tels que Winnie dunn ( 2007 )23 ou tina champagne ( 2011 )24, et bien d’autres ont développé des interventions. de façon concrète, l’ergothérapeute peut suggérer des moyens pour aider l’enfant à réguler son niveau d’énergie, en diminuant l’anxiété et l’agitation motrice. ces stratégies peuvent provenir d’une diète sensorielle intégrée aux activités quotidiennes de l’enfant. d’autre part, il peut recommander des aménagements dans le milieu et enseigner à l’entourage des attitudes à adopter pour prévenir les comportements pro-blématiques. À titre d’exemple, si l’enfant présente des défenses tactiles, il pourra souligner aux parents l’importance de toujours utiliser un toucher ferme plutôt que léger. l’approche READY ( clopton, 2012 )25 développée sur plusieurs années par Bonnie hanschu découle de la théorie de J. ayres et s’adresse plus particulièrement aux personnes ayant des comportements excessifs, tels que l’automutilation et l’hyperréactivité sensorielles. cette approche a pour but de préparer le système nerveux à s’engager dans des activités fonctionnelles en offrant au préalable des stimulations sensorielles tactiles, proprioceptives et vestibulaires ( Baker, 2006)27.

certes, l’ergothérapeute ne fait pas qu’intervenir sur l’aspect sensoriel. il apporte également des recommandations sur comment adapter les tâches aux plans moteur et cognitif de l’enfant. dans certains cas, il offrira un suivi individuel auprès de l’enfant pour travailler des habiletés plus spécifiques et développer son niveau d’indépendance fonctionnelle.

certaines interventions doivent considérer certains aspects éthiques. c’est le cas dans la prescription de mesure de contention. en effet, l’ergothéra-peute peut, dans des cas extrêmes, déterminer la nécessité d’avoir des contentions, comme les harnais dans les transports. chaque situation doit cependant être analysée avec soins en considérant tous les conséquences

2 le concept d’autodétermination est utilisé dans le but de promouvoir l’autonomie et la liberté de choix des personnes ayant une déficience quelconque ( lachapelle, lussier-desrochers et grégoire, 2010)26.

L’ergothérapie auprès de personnes ayant un trouble envahissant…

Page 58: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

58 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

pouvant découler d’une telle recommandation. au cRdited de Québec, ce sont les psychologues qui prescrivent les mesures d’isolement. les mesures de contentions humaines pour escorter les usagers sont, pour leur part, prescrites par les infirmiers. par contre, l’ergothérapeute peut collaborer à la mise en place des mesures alternatives qui éviteront de se rendre jusqu’à l’isolement.

les caractéristiques de la clientèle tgc impliquent qu’il est préférable d’intervenir dans le milieu de vie de la personne. il vaut mieux former les intervenants et la famille dans le milieu de vie de l’enfant. Bien souvent, il sera nécessaire de procéder à des essais de modalités et de stratégies d’in-terventions auprès de l’enfant. le monitoring permettra ensuite de valider l’efficacité des recommandations et de les ajuster au besoin. le travail le plus important de l’ergothérapeute se fera de façon indirecte par des dis-cussions avec les autres professionnels et intervenants et la rédaction de documents qui expliquent étape par étape les procédures et les activités à mettre en place auprès de l’enfant. il doit, par la suite, s’assurer que toutes les personnes qui gravitent autour de l’enfant soient informées de ces inter-ventions.

5. les défisl’ergothérapeute qui travaille auprès des enfants qui présentent des tgc fait face à plusieurs défis.

en effet, il s’agit d’une clientèle complexe présentant une variabilité d’at-teintes. il est parfois difficile de bien comprendre la nature des comporte-ments problématiques. par chance, le travail en équipe multidisciplinaire facilite cette compréhension. les progrès se font sur une longue période de temps. il faut faire preuve de patience et d’optimisme.

l’ergothérapeute doit également s’adapter aux caractéristiques du milieu de vie de l’enfant. lorsqu’il est placé dans un milieu résidentiel du cRdited, il peut y avoir beaucoup de changements au sein du personnel. l’ergothé-rapeute doit alors adapter ses interventions aux réalités de ces milieux de vie et s’assurer que les recommandations soient transmises à tous les inter-venants.

lorsque l’enfant est dans son milieu familial naturel, d’autres défis sur-viennent. les parents, souvent épuisés par la situation problématique, peuvent avoir de la difficulté à mettre en place les recommandations. l’équipe tgc et l’éducateur spécialisé doivent s’assurer que les parents ont toutes les ressources nécessaires pour vivre le succès des interventions et observer une diminution des comportements problématiques. enfin, un autre défi à lequel l’ergothérapeute doit faire face au moment actuel est le manque de données probantes sur lesquelles il peut baser son travail et ses interventions.

L’erg

othé

rapi

e aup

rès d

e per

sonn

es ay

ant u

n tr

oubl

e env

ahiss

ant…

Page 59: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 59

6. travailler en préventionle cRdited de Québec a placé parmi ses priorités l’intervention précoce et l’intervention des personnes ayant un tgc. dans le cas de problèmes de comportement, il s’avère essentiel de travailler en prévention et le plus tôt possible afin d’éviter que les comportements problématiques se cristal-lisent. pour ce faire, il faut savoir dépister les jeunes qui pourraient potentiel-lement développer des tgc plus tard dans l’enfance. des comportements qui peuvent sembler anodin ou être considérés comme des caprices chez un petit enfant deviennent beaucoup plus lourds et difficiles à modifier au fur et à mesure qu’il grandit ( Rivard, 2012 )2. actuellement, il n’existe pas d’outils qui permettraient de mieux dépister les enfants à risque, mais un psychologue clinicien du cRdited de Québec et une chercheure de l’uni-versité du Québec à Montréal travaillent sur ce projet ( Rivard 2012 )2.

7. Conclusionles personnes ayant une déficience intellectuelle ou de trouble envahissant du développement sont plus à risque de développer des troubles graves du comportement. ces personnes présentent souvent un tableau clinique complexe composé d’un ensemble de facteurs ( biomédicaux, environne-mentaux, physiques, humains et contextuels ) dont les conséquences sont lourdes. l’évaluation et le traitement des tgc exigent une expertise spécia-lisée et un travail en équipe multidisciplinaire. avec l’aide des autres profes-sionnels, l’ergothérapeute peut contribuer à la compréhension et au trai-tement des tgc. il peut proposer des aménagements qui permettront de minimiser l’impact des tgc sur le fonctionnement quotidien de l’enfant tout en favorisant la participation sociale à la maison, à l’école et dans les loisirs. il importe également de travailler en amont avant que les problèmes de com-portement ne deviennent graves. À ce propos, il pourrait s’avérer pertinent de voir si l’utilisation d’une approche plus basée sur le jeu telle Floortime ( greenspan et Wieder, 2006)28 permettrait de réduire les troubles du com-portement chez les enfants et ainsi de prévenir l’apparition de tgc. il n’en demeure pas moins que dans les cRdited du Québec, l’apport de l’ergothé-rapeute et des autres professionnels de la réadaptation au sein des équipes spécialisées en tgc en est à ses premiers balbutiements. l’exploration de nouvelles approches et la recherche de données probantes doivent se poursuivre. de cette façon, l’ergothérapeute travaillant auprès des enfants di / ted ayant des troubles du comportement continuera de développer son expertise et pourra apporter des solutions pour travailler à prévenir les tgc.

L’ergothérapie auprès de personnes ayant un trouble envahissant…

Page 60: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

60 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

8. Références1. tassé, M. J., Sabourin, g., garcin, n., & lecavalier, l. ( 2010 ). définition d’un

trouble grave du comportement chez les personnes ayant une déficience intellectuelle [definition of Severe problem Behavior in individuals with intellectual disability]. Canadian Journal of Behavioural Science, 42, 62-69.

2. Rivard, M. ( 2012 ) Dépistage et évaluation des troubles de comportements chez les enfants. présentation de la journée de la chaire ditc, 20 mars 2012. http://www.chaire-ditc.uqam.ca/upload/files/presentation_Meli-na_Rivard.pdf

3. Willaye, é. et Magerotte, g. ( 2008 ) Évaluation et interventions auprès des comportements-défis : Déficience intellectuelle et/ou autisme. de Booek.

4. Silva, l.M.t. et Schalock, M. ( 2012 ). Sense and Self-Regulation chacklist, a Mesure of comorbid autism Symtoms : initial psychometric evidence. The American Journal of Occupational Therapy, 66( 2 ), 177-186.

5. leekam, S. R., nieto, c., libby, S. J., Wing, l., et gould, J. ( 2007 ). describ-ing the Sensory abnormalities of children and adult with autism. Jour-nal of Autism and Developmental Disorders. 37, 894-910.

6. american psychiatric association ( 2003 ). dSM-iV-tR. Manuel diagnostic et statistique des troubles mentaux. paris : Masson.

7. Fraser et labbé ( 1999 ). Michel’s Story : We needed only to listen to him. in J. R. Scotti & l. h. Meyer, Behavioral intervention. Principles, models and Practices ( pp. 291-303 ). Baltimore: paul h. Brookes.

8. Mcgill, p. and tennyson, a. and cooper, V. ( 2006 ) Parents whose children with learning disabilities and challenging behaviour attend 52-week resi-dential schools: their perceptions of services received and expectations of the future. British Journal of Social Work, 36 ( 4 ). 597-616.

9. neece, c et Baker, B. ( 2008 ). predicting maternal parenting stress in middle childhood: the roles of child intellectual status, behaviour prob-lems and social skills. Journal of Intellectual Disabilities Research, 52( 12 ) : 1114–1128.

10. hastings R. p. et Brown t. ( 2002 ) Behavioural knowledge, causal beliefs, and self-efficacy as predictors of special educators’ emotional reactions to challenging behaviours. Journal of Intellectual Disability Research 46, 144–50.

11. gardner, W. i. ( 2002 ) Agression and Other Disruptive Behavioral Challen-ges, nadd press.

12. Buisson, Rondeau, et Sabourin, ( 2012 ). Le suivi des interventions en troubles graves du comportement ( TGC ) pour les personnes ayant une Di ou un TED. © FQcRdited/SQetgc.

13. dunn, W. ( 1999 ). The Sensory Profile. San antonio, tX : psychcorp.

L’erg

othé

rapi

e aup

rès d

e per

sonn

es ay

ant u

n tr

oubl

e env

ahiss

ant…

Page 61: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 61

14. Reisman, J. e. et hanschu, B. ( 1997 ). Sensory Integration Inventory – Re-vised - for Individuals With Developmental Disabilities. User’s Manual. pdp press.

15. chapparo, c. and Ranka, J. ( 2009 ) The PRPP System of Task Analysis : User’s Training Manual Course, Research edition.

16. ordre des psychoéducateurs du Québec, ( consulté le 26 octobre 2012 ). La profession. http://www.ordrepsed.qc.ca/psychoeducateur.aspx?sc_lang=fr-ca

17. Miller, l.J. ( 2006 ) Miller Function and Participation ScalesM-FUN, pearson.

18. Bruininks, R.h. et Bruininks, B.d. ( 2005 ) Bruininks-Oseretsky Test of Motor Profeciency, 2nd edition, pearson.

19. carr e.g, dunlap g, horner R.h, Koegel R.l, turnbull a.p, Sailor W, et al. ( 2002 ) positive behavior support : evolution of an applied science. Jour-nal of Positive Behavior Interventions. 4, 4–16.

20. Fraser et labbé ( 1993 ). L’approche positive de la personne. Une conception globale de l’intervention. ottawa : éditions agences d’arc.

21. ayres, a. J. ( 1972 ). Sensory integration and learning disorders. los angeles, ca : Western psychological Services.

22. Miller, l. J., anzalone, M. e, lane, S. J., cermak, S. a. et osten, e., t. ( 2007 ). concept evolution in Sensory integration : a proposed nosology for diag-nosis. th american, Journal of occupational therapy, 61( 2 ), 135-140.

23. dunn, W. ( 2007 ). Supporting children to participate Successfully in everyday life by using Sensory processing Knowledge. Infant and Young Children, 20( 2 ). 84-101.

24. champagne, t. ( 2011 ). Sensory Modulation and Environment : Essential Elements of Occupation, 3rd edition, psycorp.

25. clopton, h. ( consulté le 4 juillet 2012 ) http://www.developmental-delay.com/page.cfm/288

26. lachapelle, Y., lussier-desrochers, d. et grégoire, M. ( 2010 ). aspect théo-riques et pratiques associés à l’émergencee de l’autodétermination chez les adolescents. dans haelewyck, M.c et gascon, h. Adolescence et retard mentale. pp 111 à 122. Bruxelles : éditions de Boeck.

27. Baker, l. ( 2006 ) The Ready Approach. Evaluation & Treatment of Sensory Processing Disorders ( note de cours ). Making connection inc.

28. greenspan, S. i. et Wieder, S. ( 2006 ). Engaging Autism. cambridge : da capo press.

L’ergothérapie auprès de personnes ayant un trouble envahissant…

Page 62: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

62 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

Expé

rien

ces

en e

rgot

héra

pie

Page 63: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 63

Pauline HoEllinGER

l’ergothérapeute au sein de l’équipe multidisciplinaire : mise en place d’une semaine de Réadaptation pour les patients présentant la Polyarthrite Rhumatoïde ( PR ), la Sclérodermie Systémique ( SSc ) ou le lupus ( lED )

Mots clés

pathologie rhumatismale inflammatoire, réadaptation, rôle ergothéra-peutique.

Résumé

les semaines de réadaptation pour patients inflammatoires en Rhu-matologie sont organisées par une équipe multidisciplinaire. la pre-mière journée s’articule autour de présentations théoriques compor-tant des thèmes médicaux, psycho-sociaux et de rééducation. les jours suivants permettent aux patients d’expérimenter différentes méthodes de prises en charge kinésithérapique et ergothérapeu-tique. l’ergothérapeute évalue le patient à l’aide d’un entretien indi-viduel personnalisé basé sur le modèle Kawa ainsi que d’autres éva-luations de la fonctionnalité du membre supérieur. il prépare ensuite des ateliers ‘aVQ’ incluant l’apprentissage de nouvelles gestuelles et postures ainsi que l’utilisation d’aides techniques. enfin, il amène le

Expériences en Ergothérapie : Catégorie « une pratique professionnelle …

pauline hoellinger,

ergothérapeute aux

cliniques universitaires

Saint-luc

Page 64: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

64 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

patient à inclure des activités améliorant la condition physique dans sa vie quotidienne.

i. Description du Contexte« depuis plus de 10 ans, à l’instar d’un certain nombre de centres hospita-liers européens, se développe, notamment en Belgique au sein de certains services de Rhumatologie une prise en charge davantage pluridisciplinaire de la polyarthrite. » ( durez, 2003 ). les cliniques universitaires Saint-luc, en tant que centre de Référence des maladies rhumatismales bien connues telles que la polyarthrite Rhumatoïde ( pR ) ou encore plus rares ( hous-siau, 2009 ) telles que la Sclérodermie Systémique ( SSc ) ou le lupus ( led ), contribuent à développer une approche centrée sur le patient en unissant les acteurs médicaux et paramédicaux.

a cette fin, depuis le 17 novembre 2008, rhumatologue, médecin réadap-tateur, kinésithérapeute, ergothérapeute, assistante sociale et infirmière de coordination se rencontrent pour un staff interdisciplinaire mensuel.

cette réunion a tout d’abord pour but de présenter à l’ensemble des interve-nants les patients qui ont retenu l’attention de l’un d’entre eux. le screening s’effectue grâce aux échéances régulières des consultations chez le rhuma-tologue ainsi qu’une consultation paramédicale réalisée par le kinésithé-rapeute, ayant pour but d’évaluer le membre supérieur ( MS ), le membre inférieur ( Mi ) ainsi que la condition physique ( cp ). en équipe, il s’agit de proposer au patient une prise en charge ponctuelle ( conseils sur les aides techniques avec l’ergothérapeute, démarches communales avec l’assistante sociale par exemple ) ou la mise en place d’un programme de revalidation. enfin, le staff interdisciplinaire permet aux personnes autour de la table de planifier de nouveaux projets spécifiques à la Rhumatologie.

ii. Cadre méthodologique

ii. 1. objectifs

c’est dans ce cadre qu’a émergé l’idée de mettre en place des semaines à thèmes axées sur les pathologies rhumatismales et leur traitement médi-cal et paramédical. la première semaine à thème portait sur la SSc en sep-tembre 2009, puis en mai et en octobre 2011 ont été organisées deux fois une semaine pour les patients pR, enfin une semaine led a eu lieu en no-vembre 2011.

Selon euller-Ziegler et al., « on peut considérer que différents degrés de multi- ou pluridisciplinarité existent, de la juxtaposition occasionnelle et informelle à l’organisation structurée interactive, plus ou moins spécialisée,

Expé

rienc

es en

Ergo

thér

apie

: Cat

égor

ie «

une p

ratiq

ue p

rofe

ssio

nnel

le in

nova

nte »

Page 65: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 65

intégrant ou non l’unité de lieu et de temps. il ne s’agit pas d’une simple somme de compétences techniques, mais d’une potentialisation et d’une optimisation des ressources, les maître-mots restants : complémentarité, synergie, coordination et évaluation ». ( euller-Ziegler, 2001 )

d’autres auteurs ( dikaios, 1995 ) et ( Bordeyne, 1995 ) enrichissent cette association collégiale d’une information donnée aux patients, basée sur différents supports pédagogiques et sur un programme de rééducation/réadaptation dont les principaux intervenants sont le kinésithérapeute et l’ergothérapeute.

lors des semaines à thèmes, intégrant une unité de lieu et de temps à une équipe pluridisciplinaire, les objectifs communs poursuivis étaient :

– informer le patient des diverses possibilités de réadaptationcela consiste en une présentation théorique de certains aspects de la pa-thologie, de techniques de rééducation et des rôles des professionnels de la santé compris dans l’équipe pluridisciplinaire.

– Evaluer les besoins spécifiques du patientles évaluations utilisées pour la pR sont l’abilhand ( Vanthuyne M., 2009 ) et un entretien semi-dirigé visant à évaluer les difficultés et les ressources à l’aide du modèle Kawa.

dans le cas de la SSc, les évaluations utilisées sont destinées à mesurer l’ouverture buccale ( mesure en cm ), l’endurance à l’effort grâce au test des 6 minutes ainsi qu’un bilan complet du MS. celui-ci comprend la dextérité globale ( Box&Blocks test ( Mathiowetz, 1985 ) ), la dextérité fine ( perdue pegboard test ( tiffin, 1948 ) ), la grip force ( dynamomètre de Jamar ), la fonc-tionnalité des préhensions ( abilhand et hamis ( Sandqvist, 2000 ) ).

pour les patients lupiques, on évalue leur endurance à l’effort ainsi que la fatigue qu’ils éprouvent ( VaS fatigue et echelle de fatigue ). l’ergothéra-peute se base sur l’auto-questionnaire SF-36 ( archenholtz, 1999 ) évaluant la qualité de vie : elle creuse avec le patient les items portant sur les activités de vie quotidienne.

Si l’on classifie les évaluations susmentionnées selon les critères de la ciF, il s’agit de les répartir entre celles relatives aux aptitudes ( ouverture buccale, endurance à l’effort, dextérité globale et fine, grip force, VaS fatigue ), celles relatives aux activités ( hamis, echelle de fatigue ) et celles relatives à la par-ticipation ( abilhand, entretien basé sur le modèle Kawa, SF-36 ).

– Expérimenter un programme de rééducation individualiséprivilégier les mises en situation afin que le patient puisse se situer dans des activités physiques, ou vis-à-vis d’aides techniques, etc. qui puissent lui correspondre.

– Etablir avec lui un programme de suivi personnaliséSur base de l’évaluation des besoins spécifiques du patient et en fonction de son vécu, remettre au patient des outils didactiques et les contacts de

Expériences en Ergothérapie : Catégorie « une pratique professionnelle innovante »

Page 66: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

66 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

personnes ressources afin de favoriser une continuité dans sa démarche de ‘remise en route’.

ii. 2. Méthodes

II.2.A. Exposés théoriques

concrètement, la première journée ( ou demi-journée ) de la semaine ras-semble l’ensemble des patients autour de présentations théoriques com-portant :

– des thèmes médicaux

le rhumatologue introduit en expliquant les atouts de l’approche pluridis-ciplinaire dans le cadre de la maladie chronique rhumatismale ainsi que les objectifs de traitement. il intervient généralement en fin de séance pour un Questions/Réponses aux patients.

l’infirmière de consultation expose le rôle qu’elle joue auprès du patient, en termes d’éducation thérapeutique ( ce qui correspond à « Bien comprendre les implications médicamenteuses et les actes médicaux liés à la maladie. » ).

le chirurgien orthopédiste est amené à intervenir auprès des patients pré-sentant la pR afin de développer les différentes possibilités chirurgicales actuelles au niveau de la main et du poignet.

– des thèmes psycho-sociaux

le psychologue présente l’implication des douleurs vécues dans les patho-logies chroniques et aborde la notion de santé psychologique.

l’assistant social aborde les thèmes de reconnaissance du handicap et d’inscription aux régions ainsi que les avantages dont peuvent bénéficier les patients, du fait de la maladie.

– des thèmes de rééducation

le médecin réadaptateur souligne l’importance de la démarche de réadap-tation et relate les bienfaits d’une prise en charge rééducationnelle tant au niveau des évaluations proposées que pour les traitements.

le kinésithérapeute articule les atteintes fréquentes des pathologies rhu-matismales aux moyens mis en œuvre pour y pallier, notamment le pro-gramme de réentraînement à l’effort et les diverses thérapies passives, acti-vo-passives et actives.

l’ergothérapeute fait le lien entre les atteintes de la personne malade, sa vie privée ( soins personnels ), ses occupations ( habitudes de vie ) et son envi-ronnement physique et social. il sensibilise le patient à l’importance d’un équilibre entre la gestion de sa maladie et le maintien d’une performance occupationnelle satisfaisante.

Expé

rienc

es en

Ergo

thér

apie

: Cat

égor

ie «

une p

ratiq

ue p

rofe

ssio

nnel

le in

nova

nte »

Page 67: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 67

– des thèmes divers

d’autres intervenants peuvent être conviés afin de personnaliser l’approche de la maladie et d’offrir au patient une vision la plus complète possible. il s’agit de la diététicienne, du président d’une association de patients ou encore d’un dermatologue. enfin, lors de la semaine du lupus, un atelier intitulé « lupus et grossesse » a été mené par un gynécologue et une pédo-psychiatre.

II.2.B. Programme de rééducation

il s’ensuit un programme de rééducation organisé sur plusieurs jours et ras-semblant un ou deux groupe( s ) de patients. le kinésithérapeute et l’ergo-thérapeute sont les principaux acteurs de la rééducation, sous la supervi-sion du médecin réadaptateur. les formules diffèrent en fonction de la pathologie visée. les rééducateurs tentent d’amener le patient à intégrer une rééducation dans sa vie quotidienne. pour cela, ils invitent le patient à expérimenter diverses techniques d’évaluation et de rééducation.

II.2.B.a. Démarche d’évaluation de l’ergothérapeute

a côté des évaluations du MS bien connues dans le domaine de la réadap-tation fonctionnelle ( citées ci-dessus ), l’ergothérapeute utilise le modèle Kawa ( Morel-Bracq, 2008 ) lors d’un entretien individuel personnalisé afin d’identifier avec le patient ses ressources et difficultés. cet entretien s’inscrit dans un processus d’autodétermination, de responsabilisation et de parti-cipation active du patient. il permet à l’ergothérapeute ( et donc à l’équipe ) d’apprécier le patient dans un contexte de vie large et au patient d’éclaircir sa situation de vie, de faire un « état des lieux » de l’incidence de sa maladie dans sa vie quotidienne et de se fixer des objectifs, de prendre sa propre responsabilité dans son traitement et l’adapter aux variations de la vie quo-tidienne. ( lacroix, 1998 ) pour le patient, cela correspond principalement à prendre du recul par rapport à son vécu et définir son projet.

l’entretien individuel personnalisé est guidé par des supports visuels et se déroule en quatre temps :

1er temps : Introduction et rappel des étapes de l’entretien

2e temps : La rivière dans son entièreté

des photos de rivières sont disposées sur la table face au patient qui décide de choisir celle qui correspond le mieux à son parcours de vie. ensuite, il situe sur la rivière sa naissance, l’apparition de sa maladie et le jour d’aujourd’hui. il évoque alors les événements de vie qu’il pense nécessaire de souligner.

l’ergothérapeute appréhende de la sorte le parcours de vie de la personne. début, fin, méandres, « accidents » de la rivière représentent des étapes de

Expériences en Ergothérapie : Catégorie « une pratique professionnelle innovante »

Page 68: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

68 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

vie que le patient décide ou non d’aborder. l’ergothérapeute à l’écoute, ne cherche en aucun cas à analyser ou à creuser ce que lui confie le patient. le modèle de la rivière permet une approche ouverte de la complexité de la situation de vie et de handicap de la personne. l’entretien se déroule dans une démarche de non jugement et de neutralité bienveillante.

3e temps : La rivière en coupe

des schémas de coupes de rivières sont disposés sur la table face au patient qui décide une nouvelle fois de choisir celle qui correspond le mieux à « l’au-jourd’hui » de sa vie. la métaphore de la rivière comporte les facteurs per-sonnels positifs ou négatifs ( troncs d’arbres qui surnagent ou coulent ), les facteurs de risque de la personne ( rochers ), les facteurs environnementaux ( lit et rives ) et l’énergie qui permet l’écoulement de la vie ( eau ). ( iwana, 2006 )

l’ergothérapeute accompagne le patient dans l’identification des éléments personnels ou extérieurs qui représentent une ressource ou une difficulté pour le patient. une grille de lecture reprenant les sphères de l’occupation humaine lui permet, si nécessaire, de mentionner au patient un domaine que ce dernier aurait pu oublier.

4e temps : Reformulation et synthèse

a la fin de l’entretien, l’ergothérapeute reformule les éléments principaux mentionnés par le patient. il demande l’approbation au patient et récapitule en proposant au patient de formuler un projet. Quelque soit le contenu du projet, le patient est invité à émettre un ou plusieurs objectifs.

II.2.B.b. Démarche de rééducation

le kinésithérapeute et l’ergothérapeute planifient ensemble le programme de rééducation. leur ligne de mire est de faire vivre aux patients des expé-riences rééducationnelles. les traitements de l’ergothérapeute comportent quatre volets.

1er volet : mises en situation et adaptation

le local est organisé de telle sorte que les patients puissent se répartir dans les différents ateliers pour vivre une activité. les mises en situation propo-sées sont :

– la station assise prolongée : s’installer et essayer les sièges et supports d’assise tels que siège suédois, ballon, siège-selle, tabouret assis-debout, coussin triangulaire sur chaise classique, etc.

– la lecture : découvrir des livres ou magasines grâce aux supports que sont le porte-livre et le lutrin. etre sensibilisé à déposer le livre sur ses genoux ou encore disposer le livre sur un lutrin adaptable à la position corporelle assise/couchée.

Expé

rienc

es en

Ergo

thér

apie

: Cat

égor

ie «

une p

ratiq

ue p

rofe

ssio

nnel

le in

nova

nte »

Page 69: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 69

– l’écriture : remplir une formalité administrative, signer ou recopier un pangramme ( phrase qui reprend les 26 lettres de l’alphabet ) à l’aide de stylos adaptés c’est-à-dire grossi, alourdi ou facilitant la prise tri-digitale.

– la toilette : découvrir et manipuler des objets d’aide à la toilette dispo-sés sur une table et à proximité ( siège de bain, brosse pour pieds, gant double poignées, etc. ).

– l’habillage : boutonner un gilet ou fermer son pantalon grâce à un en-file-bouton, enfiler des chaussettes ou bas en utilisant les diverses aides techniques.

– les activités ménagères : rallonger le manche d’une raclette pour vitres, essayer une raclette permettant d’essorer avec les pieds, utiliser un essore-lavette.

– la couture : la manipulation de l’aiguille est facilitée par l’enfile-fil.

Expériences en Ergothérapie : Catégorie « une pratique professionnelle innovante »

Page 70: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

70 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

2e volet : activité écologique

une activité cuisine est proposée au groupe de patients. tous participent aux différents pôles organisés autour de la table, en se relayant. ustensiles ergonomiques, aides techniques et modification des habitudes sont les maîtres-mots de l’activité. il s’agit plus de découverte que de rentabilité dans la cuisine c’est pourquoi les recettes sont simplifiées au maximum.

la proposition est de préparer un apéritif à partager ensemble en fin de matinée. pour cela, les pôles à découvrir par les patients sont les suivants :

– Mini saucisses Zwan et moutarde : utiliser l’ouvre-boîte ainsi que l’ouvre-bocal manuel ou électrique. placer les saucisses sur une assiette que l’on retire du micro-ondes avec un manche porte-assiette.

– légumes crus : éplucher carottes et concombres à l’aide d’éplucheurs dont le manche est grossi ou à fixer sur le majeur pour une prise à l’inté-rieur de la main. les poivrons sont plongés quelques instants dans l’eau bouillante, disposés dans un panier-passoire en silicone pour retirer la peau plus aisément. un pèle-légume peut également être utilisé. la dé-coupe des légumes se fait à l’aide d’un couteau angulaire, d’une roulette à pizza ou bien d’un couteau céramique.

– Verrines de fruits frais : les fraises sont équeutées grâce à un équeu-ter ( pince ), les melons sont vidés par une cuillère à boules, les quartiers d’agrumes sont extraits avec une cuillère à dents, les pommes sont pe-lées/épépinées et tranchées à l’aide d’un moulin à pommes ( manivelle à tourner ).

– boissons : l’ouverture des bouteilles en plastique neuves est entraînée en utilisant une feuille d’antidérapant comme support et un sur-bou-chon en silicone ou encore un ouvre-bouteille électrique.

Expé

rienc

es en

Ergo

thér

apie

: Cat

égor

ie «

une p

ratiq

ue p

rofe

ssio

nnel

le in

nova

nte »

Page 71: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 71

3e volet : exercices analytiques

ils sont pratiqués surtout pour les patients nécessiteux d’exercer la fonc-tionnalité des mains et sont supervisés en individuel ou par paire de pa-tients. les buts principaux sont de favoriser un renforcement des muscles intrinsèques de la main, d’entraîner la mobilité articulaire existante en dimi-nuant les raideurs et permettre une meilleure manipulation des mains. ces exercices utilisent des moyens simples et peu coûteux afin que les patients puissent reproduire très facilement les séries au domicile ( exemples : pâte thérapeutique, pinces à linge, pièces de monnaie, balles de ping-pong ).

un feuillet reprenant le matériel nécessaire, la position initiale et le déroule-ment de l’exercice est remis au patient s’il le désire.

4e volet : activité physique

l’ergothérapeute essaye d’aborder l’activité physique sous un autre angle que le kinésithérapeute. tous deux tentent d’amener les patients à une en-durance à l’effort, une mobilisation articulaire globale ainsi que des correc-tions des positionnements corporels.

l’ergothérapeute se base sur l’activité physique comme faisant partie de la vie quotidienne ; il propose donc au patient d’intégrer une dimension spor-tive à son organisation hebdomadaire. pour cela, il cherche à intéresser le patient à différentes activités sportives telles que la randonnée, l’aquagym ou encore un sport de raquette.

il réalise avec le patient le suivi de ses activités physiques en mettant à sa disposition un semainier de l’activité physique incluant le type d’activité, la durée de celle-ci, la douleur, la fatigue et l’intensité cotées de 0 à 10 ainsi que les remarques éventuelles. ce support écrit permet au patient d’objec-tiver son niveau d’activité physique.

Expériences en Ergothérapie : Catégorie « une pratique professionnelle innovante »

Page 72: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

72 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

les autres intervenants

le kinésithérapeute apporte au patient un programme adapté à ses besoins ; après évaluation spécifique des déficits les plus invalidants du patient, il propose des exercices analytiques à intégrer soit dans un home-training soit à poursuivre lors du suivi avec son kinésithérapeute habituel.

l’infirmière coordinatrice assure la coordination administrative relative à l’organisation de ses journées. elle invite les patients et les relance si néces-saire. durant la semaine, elle réalise un entretien individuel avec les patients leur offrant la possibilité de mieux comprendre et organiser leur traitement médicamenteux ou leur accès aux différents examens proposés par le corps médical.

iii. Perspectives et ouverturesau terme d’une semaine de réadaptation en Rhumatologie, les patients sont invités à compléter un questionnaire d’évaluation. cela permet d’obte-nir l’avis des patients : leur appréciation globale de la semaine, la qualité des présentations théoriques, leur expérience en kinésithérapie, leur expérience en ergothérapie, l’intervention qui les a le plus et le moins intéressés, s’ils es-timent qu’une formule différente conviendrait davantage, leurs suggestions quant à l’organisation pratique de ces journées. le niveau de satisfaction du patient est évalué par une cote sur une échelle ordinale variant entre 10% et 100%.

pour les acteurs de terrain, mener à bien un tel projet soude l’équipe pluri-disciplinaire en permettant une meilleure connaissance des différents ac-teurs ainsi qu’une dynamisation. cependant, l’investissement qu’implique une semaine de réadaptation en rhumatologie tant pour mobiliser les forces existantes ( l’équipe pluridisciplinaire ) que pour sélectionner et inviter les patients, s’avère important en temps et en énergie par rapport à la mobi-lisation d’un nombre de patients restreint. a l’heure actuelle, les réflexions des différents intervenants portent à une meilleure intégration des données résultant de ces semaines à thème ainsi qu’à un suivi des patients à moyen terme plus efficace.

pour les patients, les avantages sont le vécu d’expériences positives en lien avec leur maladie et au sein d’un groupe le plus souvent porteur, la richesse des outils apportés par l’équipe pluridisciplinaire, les faibles coûts des traite-ments. Bien que cela représente un encouragement considérable, le risque est que, fortifié sur le court terme par cette expérience dense, le patient s’es-souffle rapidement s’il ne réalise pas par lui-même les démarches de relais. de la même manière, les activités vécues en groupe limitent intrinsèque-ment l’individualisation du traitement.

Expé

rienc

es en

Ergo

thér

apie

: Cat

égor

ie «

une p

ratiq

ue p

rofe

ssio

nnel

le in

nova

nte »

Page 73: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 73

pour l’ergothérapeute, ce type de semaine est l’occasion d’occuper sa place spécifique au sein de l’équipe pluridisciplinaire en utilisant les évaluations fonctionnelles qui lui sont propres, en exploitant une vaste palette de maté-riel d’aides techniques et en préparant des supports proches du quotidien du patient pour effectuer les mises en situation. il peut tirer partie de la dy-namique de groupe pour conseiller l’économie articulaire et la correction gestuelle, pour informer les patients des brochures existantes et pour créer des supports visuels utiles à la continuité du traitement.

par ailleurs, la surcharge de travail causée par la préparation et la réalisation d’une telle semaine est non négligeable. il serait préférable de favoriser une patientèle de proximité qui participe à des prises en charge plus régulières sur un moyen terme afin de répartir la charge de travail et de permettre ainsi au patient d’effectuer progressivement le relais pour le long terme.

iV. Référencesdurez p., la polyarthrite Rhumatoïde, Brochure d’information à l’usage des patients, janvier 2003, 44 pages.

houssiau F.a., Sclérodermie : la cohorte belge provoque une importante dynamique, site internet www.frsr.be/node/160, consulté le 27/09/12, der-nière mise à jour en 2009.

euller-Ziegler l., Ziegler g., Qu’est-ce qu’une approche multidisciplinaire ? définition, cadre de soins, problématique, in Rev Rhum, 2001 ; 68 : 126-30.

dikaios M., nguyen M. F., les consultations éducatives en rhumatologie à l’hôpital cochin : application à la polyarthrite rhumatoïde, in Rhumatologie, 1995 ; 47 ( 8 ) : 300-1.

Bordeyne S., doidy c., Bar a., Knapen e., dugardin F., carlux h., et al., Kinésithérapie et ergothérapie de la rééducation à la réadaptation : un tandem hospitalier, in Rhumatologie, 1995 ; 47 ( 8 ) : 277-80.

Vanthuyne M., Smith V., arat S., Westhovens R., de Keyser F., houssiau F.a., thonnard J.l., Vandervelde l., Validation of a manual ability questionnaire in patients with systemic sclerosis, in arthritis Rheum., 2009, 15 ; 61 ( 5 ) : 695-703.

Mathiowetz V., Volland g., Kashman n., Weber K., adult norms for the Box and Block test of Manual dexterity, in June am J occup ther., 1985 ; 39 ( 6 ) : 386-91.

tiffin J., asher e.J., the purdue pegboard : norms and Studies of Reliability and Validity, in J appl psychol., 1948 ; 32 ( 3 ) : 234-47.

Sandqvist g., eklund M., hand Mobility in Scleroderma ( haMiS ) test : the Reliability of a novel hand Function test, in arthritis care and Research, american college of Rheumatology, 2000 ; 13 ( 6 ) : 369-374.

Expériences en Ergothérapie : Catégorie « une pratique professionnelle innovante »

Page 74: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

74 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

archenholtz B., Burckhardt c.S., Segesten K., Quality of life of women with systemic lupus erythematosus or rheumatoid arthritis : domains of importance and dissatisfaction, in Quality of life Research, 1999 ; 8 : 411-416.

Morel-Bracq M.-c., iwana M., un nouveau modèle en ergothérapie : le mo-dèle kawa ( rivière ), in expériences en ergothérapie, 2008, 21e série, n°14, Sauramps médical, pages 25-26.

lacroix a., assal J.-p., l’éducation thérapeutique des patients, nouvelles ap-proches de la maladie chronique, 1998, Vigot, pages 16-17.

iwana M., the Kawa Model, culturally Relevant occupational therapy, 2006, churchill livingstone, elsevier, pages 141-143.

Expé

rienc

es en

Ergo

thér

apie

: Cat

égor

ie «

une p

ratiq

ue p

rofe

ssio

nnel

le in

nova

nte »

Page 75: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 75

Enjeux de la Pratique de l’Ergothérapie à l’Unité Néonatale

Anne-Marie Sénéchal, erg. MSc.

anne-Marie Sénéchal, erg. MSc. ergothérapeute chu de Québec pavillon chul

Enjeux de la Pratique de l’Ergothérapie à l’unité néonatale : Expérience Québécoise

Mots clés

prématurité, ergothérapie, unité néonatale, développement de l’en-fant, famille

Résumé

depuis plus de trois décennies, des ergothérapeutes œuvrent au sein d’unités néonatales ( unn ) nord-américaines dans le but d’offrir des services spécialisés aux nouveau-nés prématurés ainsi qu’à leur famille. dans plusieurs pays industrialisés, on observe que le taux de naissances prématurées croît avec les années. cependant, malgré l’amélioration des soins pré-péri et post-nataux, l’incidence des pro-blèmes neurodéveloppementaux associés à la prématurité demeure élevée. dans ce contexte, il importe d’agir précocement en portant une attention particulière aux soins prodigués à l’enfant né prématu-ré ainsi qu’à l’environnement de l’unn. l’ergothérapeute, de par ses connaissances et ses compétences, apporte une contribution signifi-

Page 76: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

76 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

cative à l’équipe interdisciplinaire de l’unn. Ses interventions sont orientées non seulement vers l’enfant, mais aussi vers sa famille. cet article a pour but de décrire les enjeux de la pratique de l’ergothérapeute à l’unn à la lumière des services offerts au sein de l’unn du chu de Québec.

introductiondepuis plus de trente ans, des ergothérapeutes œuvrent au sein d’unités néonatales ( unn ) nord-américaines dans le but d’offrir des services spécia-lisés aux nouveau-nés prématurés ainsi qu’à leur famille. en effet, ces enfants nécessitent des soins à la fine pointe de la technologie dans un environne-ment hautement spécialisé et ce, sous l’œil vigilant d’une équipe de spécia-listes dédiés dont fait partie l’ergothérapeute ( tanta et al., 2010; Vergara et al., 2006; dewire et al, 1996 ).

au canada, on observe un nombre de plus en plus élevé de naissances prématurées ( ≤ 37 semaines gestationnelles ) : le taux de 7,0 pour 100 nais-sances vivantes en 1995 est passé à 8,2 en 2004 ( agence de la santé pu-blique du canada, 2008 ). de fait, non seulement le nombre de naissances prématurées augmente avec les années, mais l’amélioration des soins pré- péri- et post-nataux accroît le taux de survie de ces enfants et ce, à des âges et des poids gestationnels significativement plus bas qu’il n’était possible de le faire auparavant ( allen, 2002 ).

toutefois, malgré cette augmentation du taux de survie des enfants nés prématurés, l’incidence des problèmes neurodéveloppementaux, causés par une variété de facteurs de risque associés avec la naissance prématurée, demeure élevée ( Vohr et al., 2000; Sayeur et al., 2011 ). les lésions cérébrales sont une cause majeure de troubles neurologiques subséquents chez les enfants nés prématurés ( nolin et laurent, 2004 ). le moment auquel les atteintes se produisent, leur sévérité et leur nature, sont des indicateurs du type et de la sévérité des déficits pouvant en découler. ( Rees et inder, 2005 ). avec les avancées dans les soins intensifs néonataux, le risque pour les enfants nés prématurés de présenter des déficiences majeures telles la paralysie cérébrale, la déficience intellectuelle, la déficience auditive ou visuelle, est de moins en moins élevé ( aarnoudse-Moens et al., 2009 ). par ailleurs, il y a de plus en plus d’évidence que les survivants de la prématurité qui ne présentent pas de déficience majeure risquent d’expérimenter divers problèmes plus subtils tel que des difficultés académiques, des problèmes de comportements et des déficits neurocognitifs qui persisteront jusqu’à l’adolescence ou au début de l’âge adulte ( aarnoudse-Moens & al., 2009 ).

dans le contexte d’une naissance prématurée, il importe donc d’agir précoce-ment en portant une attention particulière à l’environnement de l’unn ainsi qu’aux soins prodigués à l’enfant né prématuré, car ce dernier est vulnérable face à toutes influences extérieures ( Kenner et Mcgrath, 2004 ). la philoso-

Enje

ux de

la P

ratiq

ue de

l’Erg

othé

rapi

e à l’U

nité

Néo

nata

le

Page 77: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 77

phie de l’ergothérapie et le savoir de ces thérapeutes leur fournissent des fon-dements solides leur permettant d’apporter une contribution significative à l’équipe de néonatalogie. un des apports importants de l’ergothérapeute à cette équipe est de promouvoir un rapport harmonieux entre les capacités de l’enfant et l’environnement physique et social dans lequel il évolue. ayant des connaissances au plan de l’adaptation et de l’analyse de l’activité, l’ergothé-rapeute tient compte des capacités de l’enfant et des demandes de son envi-ronnement afin de favoriser son développement optimal ( nightlinger, 2011 ). la pratique de l’ergothérapeute à l’unn doit non seulement être centrée sur l’enfant, mais elle doit également être orientée vers la famille de ce dernier. À cet effet, de l’enseignement est prodigué aux parents de l’enfant concernant entre autres les soins, les activités de stimulation et l’alimentation dans le but de faciliter la transition entre l’unn et la maison ( gorga 1994 ).

dans ce contexte de pratique, les ergothérapeutes sont constamment mis au défi. ils doivent garder comme objectif de continuer à développer un modèle de pratique qui prend en considération ce qui est commun à toutes les unn : une approche pour prévenir ou minimiser les déficits physiques ainsi que les problèmes de développement des enfants en tenant compte du contexte familial de ces derniers ( gorga, 1994 ). l’approche de soins qui supportent le développement ( developmentally supportive care ) et celle des soins centrés sur la famille ( family-centered care ) sont rapportées dans la lit-térature comme étant de plus en plus utilisées par les équipes interdiscipli-naires qui œuvrent au sein des unn nord-américaines. pour ce qui est des approches propres à l’ergothérapie, telles que l’approche d’intégration sen-sorielle ( ayres, 1972, 1979 ), l’approche développementale ( Kramer et hino-josa, 2010 ) et l’approche neurodéveloppementale ( ndt ) ( Bobath, 1948 ), elles sont applicables dans le contexte de l’unn. toutefois, elles doivent être adaptées à la pratique de ce milieu de soins afin de bien cerner la condition médicale de l’enfant, son équilibre physiologique, ses besoins développe-mentaux, ainsi que les besoins de sa famille ( Vergara et al., 2006 ).

ainsi, dans le cadre de cet article, les enjeux de la pratique de l’ergothéra-peute auprès des enfants nés prématurés seront décrits à la lumière des ser-vices offerts au sein de l’équipe interdisciplinaire du chu de Québec.

la prématurité et ses conséquencesla prématurité qualifie toute naissance qui survient lorsque le temps de gestation intra-utérin est inférieur à 37 semaines révolues ( constantine & al., 1987 ). elle représente en quelque sorte une insulte à un système imma-ture en développement. en effet, lorsqu’un enfant qui n’était pas encore prêt à voir le jour naît et poursuit son développement hors du ventre de sa mère, celui-ci s’effectue parfois plus difficilement, selon le degré de préma-turité et les problèmes éventuels que l’enfant aura vécus pendant la période périnatale ( louis, S., 2010 ).

Enjeux de la Pratique de l’Ergothérapie à l’Unité Néonatale

Page 78: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

78 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

la naissance prématurée qui survient au courant du dernier trimestre de la grossesse rend l’enfant vulnérable face à son environnement car il s’agit de la période où l’on assiste à une croissance et à une différenciation très rapide des cellules cérébrales ( louis, S., 2010 ). l’enfant né prématuré est un être fragile continuellement influencé par les différents stimuli en provenance de son environnement et constamment en réaction à ces différents stimuli. au moment de la naissance, les différents systèmes en développement de cet enfant demeurent immatures. c’est pourquoi il est plus à risque que l’enfant né à terme de présenter des retards de développement et des diffi-cultés d’apprentissage durant l’enfance.

chez nombre d’enfants, les délais et les différences dans le développement finissent par s’estomper. par contre, chez d’autres, les délais qui persistent ainsi que les problèmes qui surviennent ou s’accentuent, au fil du temps, conduisent parfois à l’identification d’un diagnostic ( louis, S., 2010 ). le dé-veloppement neurologique est unique à chaque enfant et il est influencé par les expériences environnementales de chacun, la sévérité des atteintes neurologiques, son âge gestationnel ainsi que son poids au moment de sa naissance ( legendre et al., 2011 ). les séquelles d’ordre neurologique asso-ciées à la prématurité, telles la leucomalacie périventriculaire ( atteinte de la substance blanche autour des ventricules cérébraux ) et la déficience mo-trice cérébrale, sont les atteintes les plus sévères. la littérature mentionne également que les enfants nés prématurés sont à haut risque de présenter des séquelles aux plans cognitif, perceptuel, langagier, intellectuel et sen-soriel ( Volpe, 2001; aylward, 2005; aarnoudse-Moens et al., 2009; Vanden-berg, 2007; Watson, 2010 ). ces atteintes se manifestent le plus souvent sous forme de retard de développement, de dyspraxie, de trouble d’apprentis-sage et de trouble du comportement.

enfin, quelque soit l’âge gestationnel ou le poids à la naissance de l’enfant, il importe de garder en mémoire que tout enfant né prématuré naît dans un environnement pour lequel son système neurologique immature n’est pas préparé, ce qui occasionne des insultes qui affecteront potentiellement, à court et à long terme, son développement ( legendre et al., 2011 ).

la famille de l’enfant né prématuréun souci important par rapport à l’influence de l’environnement et des soins prodigués aux nouveau-nés vulnérables que sont les enfants nés prématu-rés, a élargi le cadre des soins dans les unn. cela a pour but d’englober les questions relatives à la famille et au développement de l’enfant, en plus des principales préoccupations d’ordre médical. en effet, l’admission d’un enfant à l’unn entraîne fréquemment une forme de crise familiale car elle comporte une charge intense de confusion au plan émotionnel ( cleveland, 2008; case-Smith et o’Brien, 2010 ).

Enje

ux de

la P

ratiq

ue de

l’Erg

othé

rapi

e à l’U

nité

Néo

nata

le

Page 79: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 79

heureusement, on assiste maintenant à une plus grande reconnaissance des besoins particuliers des familles dont les enfants sont à l’unn. l’état de santé de l’enfant, l’incertitude des résultats d’examens médicaux, l’environnement hautement technologique de l’unn, le fait d’être séparé de ses parents et les complications maternelles potentielles suite au travail et à l’accouchement prématuré contribuent au stress et à l’état de crise vécu par les familles. ces situations risquent aussi d’altérer le lien d’attachement parent-enfant, lien essentiel pour le développement optimal de l’enfant ( Vergara et al., 2006 ).

l’approche des soins centrés sur la famille comprend une planification, une offre de services et d’évaluation des soins basés sur un partenariat entre les profes-sionnels de la santé et les familles des patients ( griffin, 2006 ). elle regroupe différentes philosophies, attitudes et approches de soins pour l’enfant qui pré-sente une condition médicale spécifique et des besoins particuliers au plan développemental. cette approche reconnaît que la famille représente une constante dans la vie de l’enfant et qu’à cet effet, la relation de partenariat entre la famille de l’enfant et l’équipe de professionnels de la santé est essentielle au regard des soins et des services efficaces de grande qualité ( Vergara et al., 2006 ). ainsi, lorsqu’ils sont évalués adéquatement, les besoins des familles peuvent être inclus dans le plan de soins individualisé de l’enfant ( Mundy, 2010 ).

l’ergothérapeute qui travaille à l’unn doit non seulement connaître les be-soins de l’enfant, mais il doit également être sensible aux circonstances fami-liales, aux priorités des familles, à leurs préoccupations et à leurs croyances. il doit viser l’établissement d’une relation thérapeutique axée sur le support et la collaboration avec les membres de la famille afin de favoriser le déve-loppement optimal de l’enfant ( Vergara et al., 2006 ).

l’unité néonataleau chu de Québec, l’unn constitue l’environnement physique de soins qui accueille l’enfant né prématuré. cette unité de soins est subdivisée en une section de soins intensifs et une autre de soins intermédiaires. elle com-prend différentes salles telles une salle de réunion afin que les profession-nels s’y réunissent, une salle d’allaitement, une salle d’attente pour les pa-rents et familles, de même qu’une chambre pouvant accueillir des parents qui souhaitent faire l’essai d’un court séjour avec leur enfant qui nécessite des soins particuliers à domicile ou des parents qui veulent partager les derniers moments avec leur enfant en fin de vie.

un grand nombre de professionnels de la santé travaillent auprès des enfants et de leurs familles à l’unn. cette équipe de professionnels peut varier d’un centre hospitalier à un autre, mais de façon générale, elle est composée de néonatalogistes, d’infirmiers, de pharmaciens, d’inhalothérapeutes1, de nutri-

1 au Québec, professionnel de la santé spécialisé dans les traitements appliqués au système cardio-respiratoire

Enjeux de la Pratique de l’Ergothérapie à l’Unité Néonatale

Page 80: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

80 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

tionnistes, de travailleurs sociaux, d’orthophonistes, de physiothérapeutes et d’ergothérapeutes. autour de cette équipe gravitent d’autres médecins spé-cialistes qui œuvrent à titre de consultants comme, par exemple, le neuro-logue, le cardiologue, le généticien, l’ophtalmologue et le radiologue.

l’apport spécifique de ces différents professionnels est essentiel. aussi, il importe de reconnaître la force et la valeur inestimable de la mise en com-mun de chacune de ces disciplines. le résultat de cette mise en commun est au cœur de l’approche interdisciplinaire, approche reconnue comme étant grandement bénéfique auprès des enfants nés prématurés et de leur famille ( tanta et langton, 2010 ).

le rôle de l’ergothérapeute et ses défisdans la littérature, la pratique de l’ergothérapie à l’unn est considérée comme étant une pratique spécialisée requérant des connaissances et des compétences spécifiques devant être acquises au cours, entre autres, d’une formation continue prolongée, de stages spécialisés, d’une expérience professionnelle antérieure en pédiatrie, ou d’une expérience de mentorat ( nightlinger, 2011 ). il s’agit en effet d’un domaine de travail hautement spécialisé étant donné la fragilité des enfants impliqués, l’état émotionnel vulnérable des familles et la complexité des variables médicales et sociales qui affectent tant l’enfant que sa famille ( dewire et al., 1996 ). À cet effet et dans le but d’améliorer les soins et services offerts aux patients, l’association américaine d’ergothérapie a publié les lignes directrices qui guident la pra-tique des ergothérapeutes à l’unn ( aota, 2006 ).

le champ de pratique de l’ergothérapeute s’intéresse particulièrement à l’interaction entre les aspects biologiques, développementaux et socio-émotionnels de la fonction humaine et ce, à travers la réalisation des acti-vités de la vie quotidienne et des occupations de la personne. c’est dans cette perspective que ce professionnel de la santé est particulièrement bien outillé pour répondre aux besoins de l’enfant en développement et de sa famille ( aota, 2002 ).

au plan développemental, en néonatalogie, les interventions de l’ergothéra-peute qui visent une stabilité des fonctions physiologiques et le développe-ment neurologique de l’enfant incluent des pratiques telles une variation de l’intensité de la luminosité des salles de l’unn, la modification de l’environ-nement sonore, le positionnement thérapeutique, le toucher thérapeutique, la succion non-nutritive, la préservation du sommeil, ainsi que l’implication de la famille ( case-Smith et o’Brien, 2010 ). ces interventions s’appuient sur des études qui démontrent que dès la naissance, l’enfant né prématuré est soumis à l’environnement physique de l’unn, un environnement complè-tement différent de celui connu in utero. différents aspects de l’environne-ment social de l’unn peuvent également être générateurs de stress tant

Enje

ux de

la P

ratiq

ue de

l’Erg

othé

rapi

e à l’U

nité

Néo

nata

le

Page 81: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 81

pour l’enfant que pour sa famille. toute personne qui interagit avec l’enfant constitue l’environnement social ( Vergara et al., 2006 ). les composantes sensorielles de l’environnement intra-utérin typique et de celui extra-utérin qu’est l’unn sont significativement différentes. le système nerveux central immature de l’enfant né prématuré est généralement adapté à la sécurité de la vie intra-utérine, mais n’est pas suffisamment développé et mature pour s’ajuster et s’organiser face aux stimuli et aux demandes de l’environnement de l’unn. ceci entraîne une disparité entre la réalité du nouveau-né et celle du monde hautement technologique de l’unn ( Vandenberg, 2007; case-Smith et o’Brien, 2010 ).

l’ergothérapeute qui travaille à l’unn doit donc connaître et comprendre l’interaction des différentes composantes de l’environnement de cette unité et l’influence de ces interactions sur l’enfant, sur sa famille et sur les membres de l’équipe. ces connaissances lui servent de base pour évaluer l’enfant dans sa globalité et elles contribuent à l’élaboration de stratégies d’intervention efficaces ( Vergara et al., 2006 ) et adaptées aux besoins de l’enfant et de sa famille.

interventions spécifiques en ergothérapieinitialement, dans plusieurs unn nord-américaines, le travail de l’ergo-thérapeute se limitait à intervenir auprès de certains enfants pour évaluer leurs amplitudes articulaires ( RoM ), leur positionnement et à procéder, dans certains cas, à la fabrication d’orthèses ( Bader, 2010 ). de nos jours, même si ces aspects demeurent au cœur de la pratique ergothérapique lors de l’évaluation et des interventions à l’unn, d’autres interventions ont été développées et le champ d’expertise de l’ergothérapeute s’est gran-dement diversifié. en effet, par ses connaissances au plan de l’analyse de l’activité ( physique, sociale, sensorielle, biologique et psychosociale ) et de l’adaptation ( modifications, stratégies compensatoires pour renforcer la participation fonctionnelle dans l’environnement ), l’ergothérapeute aborde maintenant la question de la relation entre les habiletés de l’enfant et son environnement physique et social afin de favoriser son développement glo-bal optimal ( nightlinger, 2011 ). de façon plus spécifique, l’ergothérapeute est le membre de l’équipe interdisciplinaire qui s’intéresse au positionne-ment, aux techniques de manipulation, aux modifications de l’environne-ment, aux soins du développement, au traitement neurodéveloppemental ainsi qu’à l’intégration sensorielle ( limperopoulos et Majnemer, 2002 ).

Enjeux de la Pratique de l’Ergothérapie à l’Unité Néonatale

Page 82: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

82 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

Enjeux de la pratique de l’ergothérapie au CHu de QuébecÀ l’unn du chu de Québec, une ordonnance permanente spécifique à l’éva-luation et aux interventions en ergothérapie a été élaborée afin de faciliter le travail de l’ergothérapeute. cette ordonnance est en fait une entente entre le département de pédiatrie et le service de réadaptation de l’établissement qui mentionne que les ergothérapeutes sont autorisés à intervenir de façon systématique auprès de la clientèle de l’unn. elle stipule que l’ergothé-rapeute peut procéder à l’évaluation de tout enfant né à moins de 34 se-maines d’âge post-conceptuel ou ayant un retard de croissance intra-utérin, des troubles neurologiques, génétiques, malformatifs ou organiques, des problèmes respiratoires ( ex. bronchodysplasie, hernie diaphragmatique ) ou des troubles alimentaires. cependant, pour que l’ergothérapeute puisse procéder à son évaluation, l’enfant doit être stable médicalement. ainsi, les patients sont pris en charge en respectant les contre-indications mention-nées au dossier médical de l’enfant. tout au long de sa démarche clinique, l’ergothérapeute doit tenir compte de toutes les informations contenues au dossier médical de l’enfant ou recueillies auprès de l’équipe interdiscipli-naire. conformément à la politique sur la tenue de dossiers de l’ordre des ergothérapeutes du Québec, l’évaluation initiale en ergothérapie incluant le plan d’interventions de même que les notes évolutives subséquentes, est consignée au dossier du patient immédiatement après chaque intervention ( Service d’ergothérapie et de physiothérapie, 2001 ).

lorsqu’un patient répond à l’un des critères mentionnés ci-haut, le proces-sus d’évaluation de l’ergothérapeute peut débuter. généralement, l’éva-luation initiale a lieu lorsque l’enfant a atteint l’âge post-conceptuel de 32 semaines et que son état est stable médicalement. l’information générale concernant la condition médicale de l’enfant est principalement recueillie dans le dossier médical. dans ce processus, l’infirmier responsable de l’en-fant doit être consulté afin d’identifier le moment opportun pour procéder à l’évaluation proprement dite de l’enfant ( habituellement quelques minutes avant l’heure d’un repas ) et être informé préalablement si des précautions doivent être prises ( ex. une perfusion est installée sur le bras de l’enfant qui ne peut être mobilisé ).

par la suite, l’ergothérapeute peut procéder à l’évaluation de la performance de l’enfant concernant son développement sensorimoteur et son intégra-tion sensorielle. plus spécifiquement, il évalue ses amplitudes articulaires, son tonus musculaire, ses réflexes, sa posture et son positionnement, son contrôle moteur et son activité motrice spontanée, ainsi que ses réponses et ses capacités d’autorégulation face aux différents stimuli en provenance de l’environnement ( éveil, interactions, réponses aux stimuli visuels et audi-tifs ). en ce qui concerne les habiletés liées à l’alimentation, les interventions de l’ergothérapeute consistent à statuer si l’enfant est prêt ou non à être ali-

Enje

ux de

la P

ratiq

ue de

l’Erg

othé

rapi

e à l’U

nité

Néo

nata

le

Page 83: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 83

menté par voie orale en s’attardant à ses habiletés de succion, à sa dégluti-tion et à sa respiration.

toutes ces observations sont compilées à l’aide d’outils d’évaluation standar-disés. lorsque tous les résultats liés au processus d’évaluation sont rassem-blés, un rapport d’évaluation qui identifie les principales problématiques de l’enfant est rédigé. un plan d’intervention individualisé en ergothérapie est ensuite élaboré et proposé sous forme de recommandations verbales ou écrites à la famille et au personnel soignant.

au cours de l’hospitalisation de l’enfant, l’ergothérapeute effectue un suivi sous forme de contrôles hebdomadaires qui vise la réalisation des différents objectifs du plan d’interventions individualisé. À cet effet, un feuillet d’in-formations ou des fiches d’exercices sont remis aux parents concernant les positions de jeu et les activités de stimulation à favoriser à l’hôpital et lors du retour à la maison.

l’implication et la participation active de l’enfant et de sa famille dans les soins et les activités de stimulation est l’objectif principal poursuivi par l’er-gothérapeute. la philosophie de l’approche en ergothérapie est basée sur le principe des soins centrés sur la famille. l’emphase est mise sur la collabo-ration parents-professionnels afin d’aider les membres de la famille à déve-lopper une relation positive avec leur nouveau-né. cela permet aussi aux parents de développer un sentiment de confiance et de compétence dans leurs habiletés à prendre soin de leur enfant et ultimement, ceci permet de promouvoir le développement optimal de l’enfant.

Conclusiondans la littérature, l’approche de soins qui supportent le développement ainsi que celle de soins centrés sur la famille ressortent comme étant les fonde-ments d’une approche individualisée prometteuse pour les enfants nés prématurés. cependant, à ce jour, peu de recherches basées sur des don-nées probantes s’y attardent en ergothérapie et il semble même que ces approches ne sont pas toujours bien implantées dans les milieux cliniques.

l’intégration de telles approches au sein d’une équipe déjà existante néces-site des changements de valeurs, la collaboration de tout le personnel soi-gnant, ainsi que la poursuite de l’objectif ultime qu’est l’offre des soins indi-vidualisés au patient et à sa famille. la réalité clinique des différents milieux hospitaliers ne permet pas toujours de s’attarder à l’intégration de nou-velles approches et à la mise en place de nouvelles pratiques. le manque de temps, la grande mobilité du personnel et le manque de ressources chez certains parents sont quelques-unes des limites à l’implantation de telles approches. une meilleure compréhension et une plus grande reconnais-sance de l’apport de ces approches pour ces enfants fragiles et vulnérables que sont les enfants nés prématurés, contribueront à élargir la vision des

Enjeux de la Pratique de l’Ergothérapie à l’Unité Néonatale

Page 84: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

84 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

différents professionnels impliqués et à améliorer la qualité des soins pro-digués dans les unn.

l’unn est un milieu de soins complexe au sein duquel des soins hautement spécialisés sont prodigués aux enfants nés prématurés. il apparaît essentiel que l’ergothérapeute qui travaille auprès de cette clientèle fragile ait des connaissances de base solides, ainsi qu’une formation continue spécialisée dans ce domaine afin d’obtenir un niveau de compétence qui assure des soins sécuritaires et une intégration harmonieuse au sein de l’équipe inter-disciplinaire.

au cours des dix dernières années, les enjeux du travail de l’ergothérapeute à l’unn ont beaucoup évolué. il est maintenant évident que le besoin de soins individualisés pour chaque enfant, dont la trajectoire de développe-ment doit être considérée comme unique, combiné au soutien, à l’impli-cation et au partenariat entre les professionnels de la santé et les familles des enfants est primordial. pour ce faire, une attention particulière doit être portée au développement de meilleures pratiques au sein des unn. ces pra-tiques doivent viser une prise en charge des enfants dès le début de leur séjour à l’unn et la mise en place des services spécialisés dans les milieux de vie de ces derniers afin de les accompagner tout au long de leur déve-loppement.

Références1. tanta, K.J. et langton, S.Y. ( 2010 ). nicu primer for occupational therapists:

exploring the needs of fragile infants, the context in which they are cared for, and the role of ot in this specialized practice area – part i of ii. Journal of Occupational Therapy, Schools, and Early Intervention, 3, 179-186.

2. Vergara, e., anzalone, M., Bigsby, R. et al. ( 2006 ). Specialized knowledge and skills for occupational therapy practice in the neonatal intensive care unit. American Journal of Occupational Therapy, 50( 7 ), 486-494.

3. dewire, a., White, d., Kanny, e. et al. ( 1996 ). education and training of occupational therapists for neonatal intensive care units. The American Journal of Occupational Therapy, 50 ( 7 ), 486-494.

4. agence de la santé publique du canada. ( 2008 ). Rapport sur la santé périnatale au canada.

5. allen, M.c. ( 2002 ). preterm outcomes research: a critical component of neonatal intensive care. [Review]. Mental Retardation & Developmental Disabilities Research Reviews, 8( 4 ), 221-233.

6. Vohr, B.R., Wright, l.l., dusick, a.M. et al. ( 2000 ). neurodevelopmental and functional outcomes of extremely low birth weight infants in the national institute of child health and human development neonatal Research network, 1993-1994. Pediatrics, 105( 6 ), 1216-1226.

Enje

ux de

la P

ratiq

ue de

l’Erg

othé

rapi

e à l’U

nité

Néo

nata

le

Page 85: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 85

7. Sayeur, M.S., McKerral, M. et lassonde, M. ( 2011 ). les troubles cognitifs, comportementaux et d’apprentissage chez les enfants nés prématuré-ment : une revue de littérature. Revista Neuropsicologica Latinoamerica-na, 3( 2 ), 14-22.

8. nolin, p. et laurent, J.-p. ( 2004 ). neuropsychologie, cognition et dévelop-pement de l’enfant. Sainte-Foy, Qué. : presses de l’université du Québec.

9. Rees , S. et inder, t. ( 2005 ). Fetal and neonatal origins of altered brain development. Early Human Development, 81( 9 ), 753-761.

10. aarnoudse-Moens, c., Weisglas-Kuperus, n., Bernard van goudoever, J., et al. ( 2009 ). Meta-analysis of neurobehavioral outcomes in very pre-term and/or very low birth weight children. Pediatrics, 124, 717-728.

11. Kenner, c. et Mcgrath, J.M. ( eds ). ( 2004 ). developmental care of new-borns and infants: a guide for healthcare professionals. St. louis: Mosby.

12. nightlinger, K. ( 2011 ). developmentally supportive care in the neonatal intensive care unit: an occupational therapist’s role. Neonatal Network, 30( 4 ), 243-248.

13. gorga, d. ( 1994 ). the evolution of occupational therapy practice for infants in the neonatal intensive care unit. American Journal of Occupa-tional Therapy, 48( 6 ), 487-488.

14. ayres, a.J. ( 1972 ). Sensory integration and learning disorders. los an-geles: Western psychological Services.

15. ayres, a.J. ( 1979 ). Sensory integration and the child. los angeles: Wes-tern psychological Services.

16. Kramer, p. et hinojosa, J. ( 2010 ). Frames of reference for pediatric occu-pational therapy ( 3e éd. ). philadelphia: Wolters Kluwer/lippincott Wil-liams & Wilkins. 602 p

17. Bobath, B. ( 1948 ). the importance of the reduction of muscle tone and the control of mass reflex action in the treatment of spasticity. Occupa-tional Therapy and Rehabilitation, 27( 5 ), 371-383.

18. constantine, n.a., Kraemer, h.c., Kendall-tackett, K.a., et al. ( 1987 ). use of physical and neurologic observations in assessment of gestational age in low birth weight infants. Journal of Pediatrics, 110( 6 ), 921-928.

19. louis, S. ( 2010 ). le grand livre du bébé prématuré ( 2e éd. ). Montréal: éditions du chu Sainte-Justine. 578 p.

20. legendre, V., Burtner, p.a., Martinez, K.l. et al. ( 2011 ). the evolving prac-tice of developmental care in the neonatal unit: a systematic review. Phy-sical & Occupational Therapy in Pediatrics, 31( 3 ), 315-338.

21. Volpe, J.J. ( 2001 ). neurobiology of periventricular leukomalacia in the premature infant. Pediatric Research, 50( 5 ), 553-562.

Enjeux de la Pratique de l’Ergothérapie à l’Unité Néonatale

Page 86: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

86 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

22. aylward, g.p. ( 2005 ). neurodevelopmental outcomes of infants born prematurely. Journal of Developmental and Behavioral Pediatrics, 26( 6 ), 427-440.

23. Vandenberg, K. ( 2007 ). individualized developmental care for high risk newborns in the nicu:a practice guideline. Early Human Development, 83, 433-442.

24. Watson, a. ( 2010 ). understanding neurodevelopmental outcomes of prematurity: education priorities for nicu parents. Advances in Neonatal Care, 10, 188-193.

25. cleveland, l.M. ( 2008 ). parenting in the neonatal intensive care unit. Journal of Obstetric, Gynecologic and Neonatal Nursing, 37( 6 ), 666-691.

26. case-Smith, J. et o’Brien, J.c. ( 2010 ). neonatal intensive care unit. tiré de Occupational therapy for children ( 6th ed., pp. 649-680 ). St. louis, Mo: Mosby.

27. griffin, t. ( 2006 ). Family-centered care in the nicu. The Journal of Perina-tal and Neonatal Nursing, 20( 1 ), 98-102.

28. Mundy, c.a. ( 2010 ). assessment of family needs in neonatal intensive care units. American Journal of Critical Care, 19( 2 ), 156-163.

29. tanta, K.J. et langton, S.Y. ( 2010 ). nicu primer for occupational thera-pists: therapeutic staffing trends in northwest neonatal intensive care units – part ii of ii. Journal of Occupational Therapy, Schools, and Early Intervention, 3, 268-281.

30. american occupational therapy association. ( 2006 ). Knowledge and skills for occupational therapy practice in the neonatal intensive care unit. American Journal of Occupational Therapy, 60 ( 6 ), 659-668.

31. american occupational therapy association. ( 2002 ). occupational the-rapy practice framework: domain and process. Bethesda, Md: author.

32. Bader, l. ( 2010 ). intervention techniques for ots in the nicu. Occupatio-nal Therapy Practice, 15( 2 ), 7-11.

33. limperopoulos, c., Majnemer, a. ( 2002 ). the role of rehabilitation spe-cialists in canadian nicus: a national survey. Physical and Occupational Therapy in Pediatrics, 22( 1 ), 57-72.

34. Service d’ergothérapie et de physiothérapie. ( 2001 ). entente entre le dé-partement de pédiatrie et le Service d’ergothérapie et de physiothérapie pour la clientèle de l’unité néonatale du chul, chu de Québec, 1p.

Enje

ux de

la P

ratiq

ue de

l’Erg

othé

rapi

e à l’U

nité

Néo

nata

le

Page 87: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 87

Paolo SiGnoRino – Priscillia Demelis – François EuRAn – Walter HEMElRyCk

Prise en charge multidisciplinaire auprès de patients lombalgiques.Résultats de deux expérimentations au sein d’une école du dos.

Mots clés

lombalgie chronique, école du dos, traitement multidisciplinaire, évaluation, rééducation.

Résumé

après avoir consulté la littérature relative à la prise en charge de pa-tients lombalgiques chroniques, nous avons voulu objectiver notre expérience ergothérapeutique. nos observations pratiques nous amènent à nous poser plusieurs questions : les bénéfices d’un traite-ment multidisciplinaire pour des patients lombalgiques chroniques se maintiennent-t-ils à court et moyen terme ? en ergothérapie, y a-t-il un intérêt particulier à proposer un programme individualisé ou collectif ?

nous décrirons notre programme et notre pratique et nous tenterons de répondre à ces questions par le biais de deux expérimentations menées au sein d’une école du dos.

Prise en charge multidisciplinaire auprès de patients lom

balgiques.

Signorino paolo ( ergothérapeute )

demelis priscillia ( ergothérapeute )

euran François ( Kinésithérapeute )

hemelryck Walter ( Kinésithérapeute )

Page 88: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

88 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

introductionl’utilisation d’un traitement unique ne convient pas à la nature multidimen-sionnelle de la lombalgie chronique. les approches les plus prometteuses semblent articuler les interventions cognitivo-comportementales encoura-geant l’activité avec l’exercice actif. actuellement, une perspective de travail multidisciplinaire de type école du dos est à conseiller.

Selon la littérature, l’approche de type école du dos consiste en une prise en charge pluridisciplinaire associant le reconditionnement physique à des conseils ergonomiques et d’hygiène de vie. néanmoins, nous ne disposons que de peu d’indication concernant tant le contenu de ce type de prise en charge que sur sa méthodologie.

Quels en sont les résultats dans ses composantes physiques, psycholo-giques et en terme de qualité de vie ?

notre pratique quotidienne nous incite à penser que les prises en charge en groupe associées à des prises en charge individuelles seraient plus indi-quées.

les traitements multidisciplinaires, sont actuellement recommandés dans le cas de lombalgies rebelles aux traitements conventionnels. ils agissent à la fois sur les dimensions physiques, psychologiques, affectives et sociopro-fessionnelles. les « écoles du dos » semblent être une bonne réponse aux problèmes lombalgiques. ces dernières font, généralement, intervenir plu-sieurs thérapeutes.

Malgré la diversité des programmes proposés, le principe repose toujours sur les mêmes notions ; à savoir, un enseignement didactique et des infor-mations d’économie rachidienne associés à une stimulation d’utilisation des principes de protection dorsale au quotidien. l’objectif principal repose sur l’éducation du patient.

une étude parue en 2010 a évalué l’efficacité d’un programme multidiscipli-naire semi-intensif externe répondant aux exigences de l’institut national Belge de la Santé et de l’assurance Maladie invalidité. cette étude, menée auprès de patients atteints de lombalgie, a mis en évidence une améliora-tion sur un ensemble de variables1. cette étude ne met cependant pas en avant plan de protocole bien défini ; en effet, la prise en charge de patients lombalgiques chroniques diffère en fonction des institutions. les critères de jugement ( les évaluations peuvent varier d’un endroit à l’autre ), les moda-lités d’organisation ( durée, fréquence, nombre et type de séances ), le pro-gramme proposé et le type de patient sont autant d’éléments qui limitent la comparaison des études réalisées.

1 demoulin c. et al, ( 2010 ), intérêt d’une prise en charge multidisciplinaire ambulatoire semi-intensive dans la lombalgie chronique, in Revue du Rhumatisme, n°77, elsevier, paris, p68-73

Prise

en ch

arge

mul

tidisc

iplin

aire

aupr

ès d

e pat

ient

s lom

balg

ique

s.

Page 89: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 89

notre école du dosnotre école du dos, en tenant compte des recommandations de l’associa-tion belge des écoles du dos2 et de l’inaMi, s’est construite sur le principe d’une éducation cognitive et comportementale en y associant un recondi-tionnement physique à l’effort.

le programme comporte 36 séances et s’adresse à des groupes de huit à dix patients maximum. ( Fig. 1 )

– trois séances d’évaluation ( S1, S18, S30 ),

– cinq séances collectives ( de S2 à S6 ). ces séances se répartissent sur trois semaines à raison de deux séances par semaine.

– trente séances d’entraînement et de reconditionnement physique asso-ciées à des séances d’ergothérapie ( de S7 à S36 ). ces séances sont de deux heures, à une fréquence de deux par semaine.

Fig.1

les évaluations

un certain nombre d’outils a été mis en place pour assurer au mieux le suivi de cette prise en charge multidisciplinaire. les évaluations suivantes nous permettent de suivre l’évolution de l’aspect cognitif et comportementale aux cours des séances :

– la douleur, qui constitue la principale plainte des patients lombalgiques chroniques, est évaluée de façon multidimensionnelle : l’échelle visuelle analogique ( eVa ) permet de quantifier l’intensité de la douleur subjec-tive du patient de façon simple et de manière objective. ce sera notre premier indicateur.

– l’incapacité fonctionnelle est évaluée au travers de deux questionnaires : le questionnaire eiFel3 et le « dallas pain Questionnaire4 » ce dernier explore l’impact de la douleur rachidienne sur 4 aspects de la vie du

2 henrotin Y, Vanderthommen M, Fauconnier c, grisart J, Masquelier e, peretz a, toussaint F, lemaître d, angenot p, Mahieu g, Rossion p, Bailly d, Mahy J-l, chif d, dechef p, crielaard J-M « définition, critères de qualité et évaluation d’un programme de type école du dos. Recommandations de la Société belge des ecoles du dos ( SBed ) », in Revue du rhumatisme, Volume 68, issue 2, 2001, pp 185-191

3 coste J., parc J.M., Berge e., delecoeuillerie g., paolaggi J.B., Validation française d’une échelle d’incapacité fonctionnelle pour l’évaluation des lombalgies ( eiFel ), Rev. Rhum. ( ed Fr ), 1993, 60( 5 ), pp 335-341.

4 Marty M, Blotman F, avouac B, Rozenberg S, Valat, Jp., Validation de la version francaise de l’échelle de dallas chez les patients lombalgiques chroniques , Rev Rhum ed Fr, 65: pp139-47

Prise en charge multidisciplinaire auprès de patients lom

balgiques.

Page 90: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

90 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

patient : les activités de la vie quotidienne ( aVQ ), le travail et les loisirs ( ap ), l’anxiété plus la dépression ( a/d ) et la sociabilité ( S ).

– les aspects psychologiques sont évalués par les questionnaires « hospi-tal anxiety and depression scale » ( hadS ) et « tampa Scale of Kinesio-phobia5 » ( tSK ).

– l’évaluation de la force musculaire est menée à l’aide d’un test de force maximale en isométrique des muscles fléchisseurs, extenseurs, rotateurs et latéro-fléchisseurs. nous utilisons, pour ce faire, un outil informatisé ( tergumed® ). cet outil permet l’analyse systématique et l’entraînement spécifique des muscles du dos. il combine l’entraînement en force, en endurance et l’entraînement cognitif.

– l’évaluation filmée du comportement gestuel de Vanderthommen( Vdt )6 permet de mettre en situation le patient et d’analyser les qualités ges-tuelles. un score reflète le comportement gestuel du patient.

ce test se base sur diverses situations rencontrées dans la vie quotidienne et est divisé en plusieurs tâches :

1. adopter et quitter la position couchée ( s’asseoir sur un lit, se coucher, se relever ),

2. Réalisation d’une tâche ménagère avec manipulation d’un balai,

3. Manipulation d’une charge encombrante ( déplacement d’une charge ),

ce test peut-être répété plusieurs fois au cours des séances. lors du dernier test, deux tâches supplémentaires sont introduites à savoir :

4. lacer ses chaussures

5. le rangement rationnel d’objets sur une étagère.

ces deux dernières tâches permettent de vérifier l’intégration des acquis de la prise en charge des patients et leur capacité à les transférer dans de nouvelles situations. la comparaison des résultats des tests et l’analyse de la vidéo donnent la possibilité d’apporter d’éventuelles corrections indivi-duelles et des recommandations personnalisées.

les séances d’entraînement et de reconditionnement physique

des procédures d’évaluations et de ( ré )entraînement standardisées donnent lieu à la planification d’un programme d’entraînement personnel.

elles s’organisent comme suit :

5 tampa Scale of Kinesiophobia ou tSK, ( Kori & Miller, 1990 )

6 Vanderthommen M, Boulanger aS, defaweu M, tomasella M, « Validation d’un test d’évaluation du comportement gestuel du patient lombalgique chronique », ann. Réadaptation Med physique, 2001, 44 :281-90

Prise

en ch

arge

mul

tidisc

iplin

aire

aupr

ès d

e pat

ient

s lom

balg

ique

s.

Page 91: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 91

• un entraînement proprioceptif isotonique du tronc, individualisé et pro-gressif, au moyen de l’appareil tergumed®, ( cela permet de travailler les mouvements de flexion, d'extension, d'inclinaison latérale et de rotation avec feed-back ),

• un entraînement cardio-vasculaire sur vélo, rameur, tapis roulant avec des résistances individualisées, afin d’améliorer le potentiel d’endurance,

• un renforcement isotonique des grands groupes musculaires sur des machines de fitness,

• une gymnastique collective reprenant des exercices choisis de façon à minimiser les contraintes mécaniques lombaires, dirigés par un kinési-thérapeute et/ou un ergothérapeute. l’accent est mis sur des exercices favorisant les automatismes de la stabilisation lombaire,

• un programme d’exercices à réaliser à domicile,

• un cycle de formations pratiques à la manutention et aux gestes de la vie quotidienne ( se fléchir, porter, s’asseoir, se coucher, … ),

• une prise en charge ergothérapeutique individuelle avec mises en situa-tions pratiques, conseils ergonomiques et un travail de l’automatisme des gestes quotidiens,

• un parcours de manutention dirigé par les ergothérapeutes.

le parcours de manutention

ce dernier, basé sur l’approche américaine « work hardening » , met en situa-tion les patients dans des activités similaires aux activités professionnelles, réalisées pour les reconditionner physiquement afin de permettre, entre autres, la reprise d’une activité professionnelle.

dans la littérature, certains auteurs7 recommandent, dans le cadre d’une lombalgie chronique, la réalisation de mouvements répétés de certaines régions du corps ( jambes, bras, tronc, … ) ou de l’ensemble du corps, avec ou sans mise en charge externe ( par des poids ). d’autres8, soulignent que le principe du reconditionnement reposerait sur la réalisation par le patient, d’une activité physique contrôlée.

l’objectif de ce parcours est de conduire progressivement les patients vers des bons automatismes leur permettant d’effectuer les activités de la vie quotidienne sans trop de difficultés. Mais aussi de les éduquer à l’activité physique par des apprentissages en vue d’une gestion de leurs limites.

7 Mairiaux ph, Mazina d., « Recommandations de bonne pratique pour la prise en charge de la lombalgie en médecine du travail », université de liège Service de Santé au travail education à la santé, école de Santé publique, 2007, 48 p.

8 gagnon S. ( 2008 ), « evaluation et approche multicentrique de la prise en charge pluridisciplinaire du patient lombalgique chronique, à travers l’expérience du Réseau nord-pas de calais du dos ( RenodoS ) », thèse de doctorat Sciences et techniques des activités physiques et Sportives : activités physiques adaptées, lille, France, 218 p.

Prise en charge multidisciplinaire auprès de patients lom

balgiques.

Page 92: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

92 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

les activités proposées lors des séances correspondent à une sélection de différentes tâches accomplies lors de certaines activités professionnelles et/ou des activités de vie quotidienne. les exercices ont été établis en fonction des questions posées par nos patients et leurs habitudes de vie.

ce parcours est composé de sept exercices ( Fig. 2 ).

1. lever une charge sol-taille

2. Soulever une charge posée sur le sol et se déplacer

3. déplacer des petits objets ( épaule-sol )

4. assis, déplacements d’objets bureau-sol ( gauche-droite )

5. Ranger 6 objets sur une étagère ( différents niveaux )

6. pousser-tirer une table

7. lever une charge ( taille-épaule )

Fig. 2

pratiquement, le parcours s’organise sous forme d’ateliers pratiques où le patient reçoit certaines recommandations :

– contrôler ses mouvements et doser ses efforts,

– évaluer la douleur avant chaque exercice par une échelle visuelle analo-gique ( eVa ),

– exécuter un plus grand nombre de mouvements en une minute,

– comptabiliser entre chaque exercice, le nombre de fois que le mouve-ment a été réalisé en 1 minute,

– évaluer la perception de l’effort ( échelle de Borg ) et éventuellement la douleur ressentie ( eVa ),

– réévaluer la douleur à la fin du parcours.

Prise

en ch

arge

mul

tidisc

iplin

aire

aupr

ès d

e pat

ient

s lom

balg

ique

s.

Page 93: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 93

ces différentes échelles réalisées lors du parcours d’exercices, permettent de tracer l’évolution du patient. elles sont utilisées comme feed-back pour le patient.

de cette pratique, nous avons émis une hypothèse qui met en avant le fait que la mise en situation lors d’un parcours de manutention réalisé pendant une prise en charge individuelle serait plus adéquate que la mise en situa-tion d’un parcours de manutention en collectif. en effet, pendant l’exercice en collectif, les patients doivent réaliser des mouvements le plus rapidement possibles. le thérapeute ne peut pas intervenir auprès de tous les patients durant l’exercice sachant que le temps est limité. par contre, en individuel, des recommandations et des précisions peuvent être apportées et directe-ment mises en pratique.

Méthodenotre approche à consisté de repérer l’évolution pour chaque groupe. les moyennes des scores obtenues sont comparées et analysées. en partant de là, il nous a été possible d’apporter plus d’interprétation par rapport aux résultats bruts des évaluations.

deux expérimentations ont été menées afin d’évaluer la pertinence de notre pratique :

Première expérimentation

dans cette expérimentation, nous avons voulu vérifier si la mise en situation lors d’un parcours de manutention réalisé en collectif était à privilégier par rapport à une mise en situation selon approche plus individualisée.

nous avons comparé les résultats de toutes les évaluations à jour 1, à jour 18 et à jour 30 d’une population de 51 patients ayant fréquenté notre école du dos.

nous avons créé trois groupes.( Fig. 3 ) :

– un groupe de patients ayant participé au parcours de manutention en prise en charge collective,

– un groupe expérimental dont la participation à la mise en situation d’un parcours de manutention s’est faite en prise en charge individualisée,

– un groupe témoin n’ayant pas participé au parcours de manutention.

Prise en charge multidisciplinaire auprès de patients lom

balgiques.

Page 94: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

94 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

Fig. 3

Résultats

de manière générale, nous avons constaté l’amélioration :

– de la force musculaire globale,

– des qualités gestuelles,

– du retentissement émotionnel positif sur la symptomatologie dépres-sive et anxieuse

nous n’avons pas observé d’amélioration significative sur la répercussion de la douleur lombaire dans la vie quotidienne et sur la kinésiophobie.

nous avons comparé les moyennes des scores pour les différents groupes. ceci afin d’objectiver l’efficacité du traitement par le parcours de manuten-tion en collectif ou en individuel.

au vu des résultats des moyennes statistiques de notre expérimentation, nous pouvons dire que la prise en charge collective est plus bénéfique que la prise en charge individuelle pour le parcours de manutention.

Deuxième expérimentation

l’objectif était d’évaluer chez nos patients lombalgiques l’efficacité à court et moyen terme de notre programme école du dos.

nous avons réévalué une population de 20 patients qui avaient suivi et terminé le programme complet de notre école du dos depuis au moins six mois.

nous avons encodé puis analysé les valeurs de toutes les évaluations ( ter-gumed®, eVa, dallas, hadS, Roland-Morris, taMpa, Vanderthommen réali-sées à jour 1,à jour 18 à jour 30 et à 6 mois post. école du dos.

Prise

en ch

arge

mul

tidisc

iplin

aire

aupr

ès d

e pat

ient

s lom

balg

ique

s.

Page 95: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 95

Résultats :

on a pu observer que :

• laforceaugmentedefaçonsignificativeàcourttermeetlesbénéficessemaintiennent à moyen terme,

en ce qui concerne les questionnaires algofonctionnels, nous observons :

• unediminutionsignificativedeladouleuràmoyenterme,

• uneévolutionduscoredeDallasmaisnonsignificativeàmoyentermeetle maintien des bénéfices avec une diminution significative de l’anxiété,

• pasdediminutionsignificativede l’incapacité fonctionnelleàcourtetmoyen terme,

• pasdemodificationsignificativeàcourtetàmoyentermedelakinésio-phobie,

• unmaintiendesbénéficesàmoyentermedel’anxiétéetdeladépres-sion.

• uneaméliorationdelaqualitégestuelleàcourttermeetàmoyenterme.les bénéfices acquis sont conservé.

Voici en exemple le graphique des résultats des moyennes des scores algo-fonctionnels à jour 30 et à 6 mois post. école du dos ( ed ).

Fig. 4

l’analyse des résultats de cette deuxième expérimentation, concernant des sujets lombalgiques chroniques évalués avant et après un programme plu-ridisciplinaire, nous a permis de conclure qu’il existe une efficacité à court terme et qu’il existe à moyen terme, une efficacité modérée pour ce type de programme.

Prise en charge multidisciplinaire auprès de patients lom

balgiques.

Page 96: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

96 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

Discussionau vu de la littérature, nous n’avons pas eu d’indication concernant le contenu des prises en charge dans l’ensemble du processus du programme de l’école du dos. néanmoins, nous avons pu constater que celle-ci recom-mande des prises en charge collectives.

Selon notre pratique, nos observations nous amenaient à penser que les séances individuelles permettaient un meilleur apprentissage des automa-tismes de protection lombaire. or, les résultats de notre expérimentation montrent que le parcours de manutention en collectif serait plus bénéfique.

nous pouvons supposer que le groupe a une influence sur l’individu et le nombre de sujets étudié n’est pas représentatif au vu des résultats.

il nous semble judicieux de poursuivre cette expérimentation par une étude plus précise et surtout, à plus grande échelle afin de vérifier ces conclusions.

lors du parcours de manutention, nous nous sommes rendu compte que certains patients qui avaient moins de douleurs n’avaient cependant pas bien intégré les notions de protection lombaire. leurs évaluations ne per-mettaient pas de mettre en évidence leurs niveaux acquis. ils reproduisaient par imitation les positions ergonomiques sans les contrôler.

la durée totale du traitement pourrait également jouer un rôle sur l’effica-cité et le maintien des bénéfices.

dans ces expérimentations plusieurs paramètres sont susceptibles d’être influencés et les résultats obtenus pourraient être remis en question, ce qui nous incite à les relativiser.

la proprioception est un élément important pour réaliser le parcours de manutention. il n’a cependant pas été spécifiquement pris en compte dans les critères d’inclusion des patients ayant participé à l’expérimentation.

Conclusionla prise de conscience des bonnes ou mauvaises habitudes de vie en termes de mouvements, la compréhension des mécanismes de lésions vertébrales, l’apprentissage des techniques visant à préserver l’intégrité du rachis ne sont pas les seuls moyens de prévention contre les maux de dos.

le constat qui ressort de notre revue de littérature, de notre pratique et de nos expérimentations est que le caractère multidimensionnel de la lombal-gie chronique nécessite de prendre en charge cette pathologie de façon pluridisciplinaire. nous recommandons aux intervenants d’investiguer da-vantage d’autres notions tels que la proprioception par exemple.

Prise

en ch

arge

mul

tidisc

iplin

aire

aupr

ès d

e pat

ient

s lom

balg

ique

s.

Page 97: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 97

nos résultats montrent que notre programme de traitement s’avère béné-fique à court terme sur le plan algofonctionnel, psychologique, gestuel et kinésiophobique et privilégie une approche collective.

Malgré cela, nous sommes convaincus qu’une intervention personnalisé du thérapeute lors d’une prise en charge de groupe est limitée et difficilement précises. la prise en charge individuelle permettrait de mieux corriger le patient et de le suivre au cours de chaque exercice. Mais, elle doit s’inté-grer dans l’approche collective et/ou la complémenter dans une logique de renforcement. Maintenir une approche individualisée dans le programme, permettrait peut-être d’obtenir des résultats à moyen et long terme plus si-gnificatifs tout en maintenant les bénéfices avérés de l’approche collective.

bibliographieairaksinen o., et al., european guidelines for the management of chron-ic nonspecific low back pain, in european Spine Journal, 2006, n° 15 ( Suppl. 2 ) pp. S192–S300, chapter 4.

Bader l., « le traitement de la lombalgie : intérêt de l’ecole du dos et du ter-gumed », département kinésithérapie, ulB, Bruxelles, 2006, 75 p.

Bethoux F., calmels p., « guide des outils de mesure et d’évaluation en méde-cine physique et de réadaptation, Frison-Roche, paris, 2003, 403 p.

Bontoux l, Roquelaure Y. and Billabert c. et al., prospective study of the outcome at one year of patients with chronic low back pain in a pro-gram of intensive functional restoration and ergonomic intervention. Factors predicting their return to work, ann Readapt Med phys 47, 2004, pp. 563–572.

coste J., parcj.M., Bergee e., delecoeuillerie g., paolaggi i J.B., Validation fran-çaise d’une échelle d’incapacité fonctionnelle pour l’évaluation des lombal-gies ( eiFel ) Rev. Rhum ed F., 1993,60( 5 ), pp 335-341.

de Melis p., comparaison d’un reconditionnement par l’activité en prise en charge collective et prise en charge individuelle sur l’évolution de patients lombalgiques chroniques, haute ecole paul henri SpaaK, section ergothéra-pie, Bruxelles, 2011, 100 p.

demilly M., evaluation de l’efficacité d’une prise en charge pluridisciplinaire, type « ecole du dos » pour des patients lombalgiques chroniques à l’hôpital d’erasme , département kinésithérapie, ulB, Bruxelles, 2008, 78 p.

demoulin c., contribution à l’évaluation et à la rééducation de la fonction musculaire du sujet lombalgique chronique, Mémoire publié, doctorat en kinésithérapie et de réadaptation, liège, 2008, 181 p.

Prise en charge multidisciplinaire auprès de patients lom

balgiques.

Page 98: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

98 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

demoulin c. et al, intérêt d’une prise en charge multidisciplinaire ambula-toire semi-intensive dans la lombalgie chronique, in Revue du Rhumatisme, n°77, elsevier, paris, 2010, pp 68-73

gagnon S., evaluation et approche multicentrique de la prise en charge plu-ridisciplinaire du patient lombalgique chronique, à travers l’expérience du Réseau nord-pas de calais du dos ( RenodoS ), thèse de doctorat Scienc-es et techniques des activités physiques et Sportives : activités physiques adaptées, lille, France, 2008, 218 p.

Kaapa e.h., Frantsi K. and Sarna S. et al., Multidisciplinary group rehabilita-tion versus individual physiotherapy for chronic nonspecific low back pain : a randomized trial, Spine 31, 2006, pp 371–376.

Kori, S.h., et al., Kinisophobia: a new view of chronic pain behavior, pain Management, n°3 Jan./Feb., elsevier, 1990, pp 35-43.

helmhout p. h., harts c. c., Staal J. B., candel M. J. and de Bie R. a., com-parison of a high-intensity and a low-intensity lumbar extensor training program as minimal intervention treatment in low back pain: a randomized trial, Springer, european Spine Journal , 2004, Volume 13, number 6, pp 537-547

hérisson c, Revel M., lombalgie et évaluation , Masson, paris, 2000, 106 p.

Maigne J.-Y., le mal de dos : pour une prise en charge efficace, Masson, paris, 2009, 218 p.

Mairiaux ph, Mazina d, Recommandations de bonne pratique pour la prise en charge de la lombalgie en médecine du travail, université de liège Ser-vice de Santé au travail et education à la Santé ecole de Santé publique, 2007.

Marty M, Blotman F, avouac B, Rozenberg S, Valat, Jp., Validation de la version francaise de l’échelle de dallas chez les patients lombalgiques chroniques , Rev Rhum ed Fr., 1998, 65 : pp 139-147.

Maurice M., Blanchard-dauphin a., laurent p., thevenon a., tiffreau V., ef-ficacité à court et moyen terme d’un programme d’école du dos. etude de cohorte rétrospective réalisée sur 328 lombalgiques chroniques de 1997 à 2004, annales de réadaptation et de médecine physique, 2008, pp 292-300.

Montcharmont J., dans le programme thérapeutique des lombalgiques : l’approche work hardening, chuV, 1995, Suisse.

palm M., evolution des paramètres fonctionnels chez des lombalgiques chroniques suite à l’école du dos , département kinésithérapie, ulB, Brux-elles, 2005, 84 p.

Prise

en ch

arge

mul

tidisc

iplin

aire

aupr

ès d

e pat

ient

s lom

balg

ique

s.

Page 99: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 99

poiraudeau S., Rannou F. et Revel M., intérêts du réentraînement à l’effort dans la lombalgie : le concept de restauration fonctionnelle, annales de Réadaptation et de Médecine physique, Volume 50, issue 6, elsevier, paris, 2007, pp 419-424.

Roques c.F., Felez a, Marque p, Maupas e, chtain M, lazorthes Y., etude de faisabilité d’un programme d’évaluation à l’école du dos, annales de Réad-aptation Méd .phys., 2002, 45 : pp 257-64 .

Salmochi J.F., Maigné S, protocole d’évaluation du lombalgique en pratique quotidienne, Résonance européennes du Rachis, 2005, Volume 13, n°14, pp 634-638.

Société Scientifique de Médecine générale ( SSMg ), Recommandations de bonne pratique, 2001, pp 1-33.

Vanderthommen M, Boulanger aS, defaweu M, tomasella M, Validation d’un test d’évaluation du comportement gestuel du patient lombalgique chro-nique, ann. Réadaptation Med physique, 2001, 44 : pp 281-290.

Vanderthommen M, defaweu, tomasella M, crielaard J.M., le comporte-ment gestuel du patient lombalgique fréquentant une école du dos : anal-yse d’un test d’évaluation, annales Réadaptation Med phys., 1999, 42 : pp 485-492.

Verbaeys M., Mémoire, département kinésithérapie, ulB, Bruxelles, 2011.

Prise en charge multidisciplinaire auprès de patients lom

balgiques.

Page 100: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

100 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

Page 101: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 101

kimberley HilDERSon Claire MARtin

« Accompagner des adolescents présentant des troubles neurologiques dans la prise de conscience de leur corps »

Mots clés

conscience du corps - adolescence - groupe - eutonie - activités de la vie quotidenne.

Résumé

la prise en charge d’adolescents présentant des troubles neuro-moteurs avec des atteintes diverses, nous a conduites à revoir notre pratique thé-rapeutique . nous nous sommes progressivement dirigées vers une prise en charge incluant la « conscience du corps ». nous décrivons quelques techniques que nous leurs avons proposées afin de sentir, et percevoir leur corps et d’en prendre conscience dans le but d’améliorer leurs situa-tions de vie quotidienne. ces activités mensuelles sont animées par des ergothérapeutes de l’i.R.a.h.M. ( institut Royal d’acceuil pour le handicap Moteur ), en partenariat avec les éducateurs du centre d’hébergement où vivent les adolescents du groupe. différentes approches sont utilisées dont la méthode Véronica Sherborne, l’eutonie, la relaxation...

« Accompagner des adolescents présentant des troubles neurologiques …

Kimberley hilderson, ergothérapeute en neuropédiatrie à l’i.R.a.h.M.

claire Martin, ergothérapeute en neuropédiatrie à l’i.R.a.h.M.

Page 102: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

102 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

introduction : lors de prises en charge individuelles en ergothérapie d’adolescents pré-sentant des troubles neurologiques, la question autour de la conscience du corps a vite été soulevée. d’une part, parce que la conscience du corps dans son volet perceptif est « la première étape vers la connaissance du schéma cor-porel. ( Bucher 1970 )1. Elle recouvre la prise de conscience globale du corps, de son unité, et de sa position dans l’espace ». cette notion est essentielle à la réalisation indépendante d’activités dans la vie quotidienne. d’autre part, parce qu’après de nombreuses années de prises en charge thérapeutiques diverses ( kinésithérapie, ergothérapie, logopédie... ) nous avons observé que cette conscience du corps dans sa partie perceptive restait très variable d’un jeune à l’autre et était également très pauvre. c’est alors que nous avons, en tant qu’ergothérapeutes, cherché à accompagner ces adolescents dans l’intégration de ce corps « blessé », afin d’améliorer leurs capacités d’agir avec celui-ci. nous avons pour cela choisi de proposer, en lien avec les éducateurs de ces adolescents, un groupe mensuel de travail autour de la perception consciente du corps par le biais de l’eutonie, de la méthode de Veronica Sherborne et d’exercices de relaxation.

Populationl’adolescence est un moment de grands changements physiques, mais aussi de transitions entre l’enfance et le monde adulte. comme le montre l’article « about teens with cerebral palsy », de leRhMan M2 , disponible sur internet, les adolescents présentant une atteinte neurologique qui diminue leurs capacités motrices et sensorielles, sont « plus souvent isolés, moins actifs socialement ». ces barrières sociales incluent les « limitations physiques, les expériences sociales négatives et une pauvre image de soi »

de même, une étude menée et parue dans le « developmental medecine & child neurology »3 en 2009 sur la « Qualité de vie des adolescents avec une paralysie cérébrale », informe que les « adolescents avec un fonctionnement physique pauvre ont davantage de problèmes de santé, les tâches de la vie jour-nalière leur sont plus difficiles, et leurs taille et poids en pleine transformation peuvent affecter leur équilibre et leur mobilité ». ( davis, 2009 )

il existe également à l’adolescence des ressources qui peuvent favoriser une bonne image de soi. et comme le montre l’étude sur la « Qualité de vie des adolescents avec une paralysie cérébrale» ( davis, 2009 )3, les adolescents indiquent qu’être inclus dans un groupe joue un rôle majeur dans leur qua-lité de vie.

« Acc

ompa

gner

des a

dole

scen

ts p

rése

ntan

t des

trou

bles

neu

rolo

giqu

es …

Page 103: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 103

la méthodologie

Approche utilisée

pour guider et accompagner les adolescents dans la prise de conscience de leur corps au niveau perceptif nous nous sommes inspirés de plusieurs méthodes. nous recherchions des techniques qui pouvaient rendre les ado-lescents acteurs de leur vécu sensoriel.

l’eutonie, comme citée dans l’article « eutonie et ergothérapie » ( Jacquot, 2001 )4 est une technique corporelle qui permet notamment ce travail de prise de conscience du corps, mais elle englobe également l’ouverture vers l’autre et le monde qui l’entoure. c’est une technique diversifiée dans les exercices de découvertes sensorielles qu’elle propose.

la relaxation est une technique utilisée en début et en fin de séance pour d’une part rechercher une harmonisation du tonus afin de préparer le corps à s’éveiller aux sensations, et d’autre part pour permettre aux jeunes de se centrer sur soi avant de s’ouvrir à l’espace et à l’autre. concrètement, la relaxation est guidée verbalement par le meneur vers une détente progres-sive des différentes parties du corps.

Veronica Sherborne a développé une approche corporelle pour les enfants basée sur l’idée que : « se sentir chez soi dans son corps permet de gagner en maîtrise de soi et amène à établir des liens avec autrui » ( Sherborne,2001 )5. c’est dans l’approche de cette dimension relationnelle que nous avons utili-sé la méthode Veronica Sherborne. nous avons été intéressés par la progres-sion des exercices qu’elle propose afin de rencontrer l’autre. en effet, nous avons cherché à suivre son déroulement qui est, dans un premier temps, de mettre en place un sentiment de sécurité avant de faire « avec » l’autre et puis « contre » l’autre.

l’eutonie, la relaxation et Veronica Sherborne, offrent toutes des principes généraux dont nous nous sommes inspirés afin de construire notre activité de groupe sur la « conscience du corps ». Voici les principes généraux que nous avons suivis dans la mise en place des différents moments de l’activité :

• prisedeconsciencedelaglobalitécorporelle(lesquelette,lesmuscles,la peau )

• prise de conscience du corps dans l'espace (les appuis sur le sol, lecontact avec l'air, avec les vêtements )

• prisedeconsciencedel'autre(lecorpsdel'autre,faireavec,fairecontre)

en ajoutant un principe plus ergothérapeutique qui est :

• fairelelienentrelecorpsetlaparticipationauxactivitésdelaviequoti-dienne.

« Accompagner des adolescents présentant des troubles neurologiques …

Page 104: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

104 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

Participants

une partie des adolescents de l’i.R.a.h.M. sont des jeunes qui séjournent au centre d’hébergement durant la semaine.

c’est en collaboration avec les éducateurs que nous avons mis en place ce groupe. dans un premier temps, l’activité « conscience du corps » a été proposée à deux groupes. Suite à une première séance, l’un des groupes a arrêté de participer à l’activité car cela ne correspondait pas à leurs attentes ni à leurs niveaux de maturité.

les jeunes du groupe ont entre 12 et 18 ans. ils ont tous une atteinte motrice, voire même dans certains cas sensitive ( gMFcS level 2 – level 5 )-( palisano, Rosenbaum, 1997 )6, ainsi qu’une connaissance corporelle incomplète voire inexacte. ils sont au nombre de 8 à 12 participants identiques chaque mois.

Création du groupe

en septembre 2010, le groupe « conscience du corps » a été mis en place à raison d’une fois par mois. cette activité est proposée aux adolescents le mercredi après midi à la place d’une autre activité parascolaire. c’est donc un choix personnel de chaque jeune d’être présent lors de cette activité.

Durée des séances

chaque séance dure environ 1h30 dont près de 30 minutes sont consacrées à l’installation des jeunes et à recevoir leurs feed-back en fin de séance. la séance en elle-même dure 1h. ces séances ont lieu durant toute l’année scolaire.

lieu des séances

le choix du lieu des séances est important. en effet, cette activité de conscience du corps demande beaucoup d’énergie aux animateurs, accom-pagnateurs et à nos jeunes. il fallait donc trouver un lieu calme et isolé. les exercices proposés durant les séances demandent aussi que le local soit assez spacieux afin que chaque jeune et accompagnateur puissent réaliser les mouvements confortablement. la salle de kinésithérapie étant peu uti-lisée le mercredi après midi, nous avons pu profiter de cette salle qui nous permettait d’animer cette séance au calme et avec suffisamment d’espace.

Matériel

a chaque séance, les jeunes sont placés sur des tapis. en effet, le corps doit vraiment « s’ancrer » dans le sol afin de mieux le découvrir, ce pourquoi de fins tapis de psychomotricité sont nécessaires.

Selon le contenu de la séance, le matériel utilisé varie. en effet on peut em-ployer des boudins en mousse, des balles de différentes tailles et de diffé-rentes densités, des bâtons de psychomotricité, des draps…

le choix du matériel dépend de la zone corporelle ciblée pour la séance, de l’objectif visé, des capacités motrices et des tolérances sensitives des jeunes.

« Acc

ompa

gner

des a

dole

scen

ts p

rése

ntan

t des

trou

bles

neu

rolo

giqu

es …

Page 105: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 105

Cadre thérapeutique

nous avons inclus l’activité « conscience du corps » dans une activité de groupe. en effet nous trouvons que c’est en présence d’autres personnes qu’une dynamique se crée ( surtout chez les adolescents ). c’est dans une dynamique propice à l’échange que les jeunes vont plus facilement s’expri-mer ( feed-back de fin de séance ).

pour qu’il y ait constitution de groupe, il faut respecter 3 points ( aubry , Saint arnaud, 1963 )7:

1. la présence d’un but perçu comme commun. ici, c’est la ( re )-décou-verte de son corps, aussi bien en termes de connaissances qu’en termes de capacités motrices. le but commun pour chaque jeune participant à ce groupe est également de pouvoir transférer certains acquis dans la vie quotidienne.

2. l’interaction entre les participants : ici, les exercices demandés en cours de séance sont souvent des exercices en duo ou en groupe. cela génère des échanges corporels et verbaux. le feed-back en fin de séance permet également aux jeunes d’échanger leurs ressentis et de réagir sur les évocations des autres.

3. l’existence collective : chaque jeune participe en même temps à l’acti-vité, adoptant un rythme commun afin de permettre au groupe d’exister. tous sont là pour des raisons communes ou semblables et ils existent dans le groupe à travers ça.

Meneurs et accompagnateurs

afin qu’une séance puisse se réaliser correctement, il faut des « meneurs » et des « accompagnateurs ». chacun a son rôle durant la séance. ( Blos-sier,2002 )8.

Le meneur

Son rôle a de multiples facettes :

– le meneur est celui qui dirige la séance. il est la seule voix qu’on entend durant la séance ( sauf durant les exercices et durant le feed-back ).

– il doit adopter une attitude très calme, une voix basse et fluide.

– il doit être capable de donner le rythme de la séance, mais aussi de suivre le rythme des jeunes.

– il doit susciter le questionnement corporel auprès des jeunes.

– il doit gérer le feed-back et susciter les échanges.

– il doit amener le jeune à faire des transferts avec sa vie quotidienne ( im-portance du rôle de l’ergothérapeute )

– ce sont toujours les mêmes meneurs présents à chaque séance, adop-tant le même comportement ( voix, attitude, écoute… )

« Accompagner des adolescents présentant des troubles neurologiques …

Page 106: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

106 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

L’accompagnateur

lui aussi, a plusieurs rôles à jouer :

– il est là pour suivre et guider les jeunes durant les exercices demandés.

– il doit pouvoir écouter le ressenti du jeune et pouvoir s’adapter à celui-ci.

– en dehors des séances, il est parfois le lien entre les jeunes et les meneurs ( pour les demandes éventuelles,… )

– il peut, durant la vie à l’internat, susciter les transferts ( de conseils et d’astuces ) dans la vie quotidienne des jeunes.

– ils restent les mêmes au fil des séances afin d’accentuer la relation « ac-compagnateur-jeunes ».

Structure type

le déroulement des séances se fait toujours de la même façon. cela permet aux jeunes d’avoir une structure claire au fil des séances.

en effet, ce sont des jeunes qui ont généralement besoin d’anticiper les évé-nements afin de se sentir à l’aise durant l’activité. cette structure permet également aux meneurs d’adopter une certaine logique à chaque séance.

les séances se déroulent de la façon suivante :

– les jeunes arrivent en salle de kiné avec leurs éducateurs ( = accompa-gnateurs de la séance ).

– les jeunes sont amenés à se diriger vers le tapis sur lequel ils souhaitent s’installer pour la séance.

– ceux qui savent s’y coucher, s’y mettent seuls. les autres sont aidés dans leurs transferts par les meneurs et les accompagnateurs.

– on retire tout le matériel orthopédique ( attelles, orthèses, chaussures orthopédiques… ) et les chaussures.

– une brève explication du contenu de la séance est donnée aux jeunes.

– chaque séance commence par un moment de relaxation sur consignes verbales, vers une détente progressive des différentes parties du corps.

– puis un inventaire est effectué : l’ensemble des parties du corps ( os, articulations, muscles,… ) sont cités et évoqués de différentes manières ( dou-leurs, gènes, légèreté, tensions, confort… ). l’inventaire se fait toujours en dé-marrant des pieds, remonte par les jambes, le bassin, le tronc/dos, les épaules, les bras, les avant-bras et les mains, pour reprendre après au cou et à la tête. l’inventaire peut se faire 2 fois en début de séance : une fois couché sur le dos ou dans une position confortable, choisie par le jeune, et souvent une deuxième fois, placé dans une position dite « de contrôle », pas toujours confortable, afin de stimuler la zone ciblée pour la séance.

« Acc

ompa

gner

des a

dole

scen

ts p

rése

ntan

t des

trou

bles

neu

rolo

giqu

es …

Page 107: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 107

– après le ou les inventaires, des exercices sont proposés aux jeunes afin de stimuler de manières sensitive et motrice la zone ciblée ( bassin, pieds, nuque,… ). Souvent ces exercices sont faits d’abord sur soi puis par petits groupes de jeunes.

– ensuite, nous refaisons le ou les inventaires ( identiques à ceux fait en début de séance ).

– les jeunes regagnent leurs installations ( voiturettes ou chaises ), sans remettre le matériel orthopédique ( en tout cas pour ceux pour qui ce n’est pas indispensable aux transferts ).

– enfin un feed-back a lieu, afin que chaque jeune puisse nous transmettre son ressenti et son vécu de la séance. c’est également à ce moment-là, que des échanges entre jeunes ont lieux, et que des liens se font entre le vécu de la séance et la vie quotidienne.

Analyse

la récolte des observations effectuées durant la séance et tout au long de l’année se fait de différentes manières :

il y a notre observation de thérapeutes pendant la séance qui permet un ajustement immédiat des exercices, du tempo donné aux consignes...

il y a une observation plus structurée faite après la séance dans laquelle on note, selon les grands principes généraux, comment chaque adolescent a pris conscience de son corps, de l’espace, de l’autre, et de la façon dont il fait les liens avec la vie quotidienne.

et il y a le témoignage propre des adolescents sur leur ressenti suivant les différents moments clefs de la séance, et sur les liens qu’ils sont capables d’effectuer avec la vie quotidienne.

ces différentes récoltes d’informations nous permettent d’ajuster le conte-nu des séances dans le temps. nous essayons également de partir de mo-ments clefs de la vie quotidienne des jeunes pour construire les séances. par exemple s’ils sont sur le plan scolaire en préparation aux examens, nous leur proposons de cibler la séance sur la respiration afin de leur donner des outils qu’ils pourront utiliser dans un avenir proche.

Discussion

le cadre d’une activité mensuelle de groupe basée sur la conscience du corps semble convenir aux adolescents qui reviennent chaque fois, et ce depuis deux ans, de leur propre initiative.

l’encadrement d’un tel groupe avec des adolescents qui présentent des limitations motrices parfois importantes ne peut se faire qu’avec la partici-pation de plusieurs adultes accompagnateurs. nous remercions pour cela

« Accompagner des adolescents présentant des troubles neurologiques …

Page 108: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

108 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

les éducateurs qui font partie intégrante du projet et qui forment un lien précieux avec les situations de vie quotidienne à l’internat.

le lieu est également un élément favorable lorsqu’il permet une occupation de l’espace libre et cela dans le calme.

l’organisation d’une telle activité dans une institution ne peut se faire que si différents services ( internat, école, thérapeutes... ) se coordonnent dans la recherche d’une prise en charge transdisciplinaire. et c’est parce que l’iRahM encourage ces liens entre les différents services que nous avons pu mener à bien ce projet avec les adolescents.

le fait de suivre des principes généraux tirés de différentes approches et d’avoir des constructions de séances répétitives, permet d’installer un senti-ment de sécurité pour les jeunes au sein duquel ils se sentent libres d’explo-rer leurs perceptions et de s’ouvrir aux autres. nous avons pu remarquer de nettes différences de comportements au fur et à mesure de l’année ! pour exemples :

• L'annéepassée,unnouvelarrivantà l’internatnetrouvaitpassaplacedans son groupe, et ne s’impliquait pas dans les séances, il ne donnait jamais son feed-back et ne parvenait pas à se détendre. aux fils des mois, cet adolescent a trouvé un intérêt à venir, il est parvenu à se relaxer, et il nous transmet actuellement de petits feed-back en fin de séance.

• Lamajoritédesjeunesfilles,avaienttendancelorsdespremièresséancesà très vite avoir des fous rires ( nerveux ). elles semblaient se sentir mal à l’aise dans ces exercices corporels. de mêmes que pendant les inven-taires « corporels », elles ne parvenaient pas à se relâcher totalement. après 2 ans de séances mensuelles, elles sont celles qui sont les plus demandeuses de cet atelier. elles parviennent a très vite « lâcher-prise », se détendent rapidement et réalisent les exercices avec beaucoup de bonne volonté. leurs feed-back sont très enrichissants.

l'espace d'échange verbal à la fin, leur permet de communiquer, mais aussi de devenir acteur, en proposant des liens avec leur quotidien ou en deman-dant que telle ou telle partie du corps soit abordée lors des prochaines séances.

il manque sans doute une plus grande objectivité dans la récolte des infor-mations afin de pouvoir mieux répondre aux besoins thérapeutiques indivi-duels au sein du groupe. nous avons le projet de mettre en place une feuille de suivi individuel afin d'objectiver à long terme quels sont les bénéfices ou non d'une telle activité.

nous sommes également à la recherche d'outils qui nous permettraient de faire le lien entre la «conscience du corps» et la participation aux activités de la vie quotidienne.

« Acc

ompa

gner

des a

dole

scen

ts p

rése

ntan

t des

trou

bles

neu

rolo

giqu

es …

Page 109: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 109

Conclusionles limites rencontrées se portent essentiellement sur le peu d’objectivation de l’impact d’une telle prise en charge sur la vie quotidienne des jeunes. cette séance n’ayant lieu que de manière mensuelle, notre impact dans le quotidien des jeunes reste minime.

le groupe « conscience du corps », demande également une «certaine» connaissance des différentes parties du corps ( dénomination ). en effet, celles-ci étant nommées lors de l’inventaire, un minimum de connaissances est nécessaire pour pouvoir bénéficier pleinement des apports de ce groupe. une évaluation psychomotrice préalable à la participation au groupe serait bénéfique. elle mesurerait quelles sont les connaissances du jeune par rap-port à son schéma corporel et nous permettrait de suivre l’évolution de ses connaissances et aussi de nous adapter à son niveau.

les témoignages que nous avons reçus montrent cependant un gain au niveau du bien-être et un plaisir à être en groupe.

ce type de prise en charge en ergothérapie, d’adolescents présentant des troubles neurologiques, nous a permis plusieurs choses : d’’abord de nous renouveler au niveau des techniques utilisées, techniques qui amènent à reprendre contact avec le corps du jeune de façon globale et à repartir des perceptions propres à chaque individu ; ensuite, cet atelier apporte une autre image de l’ergothérapie : les jeunes y sont amenés à être acteurs et à trouver des solutions pour améliorer leur participation aux activités de leur vie quotidienne.

« Accompagner des adolescents présentant des troubles neurologiques …

Page 110: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

110 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

bibliographie

livres

1. BucheR h., troubles psychomoteurs chez l’enfant, ed.Masson, paris, 1970, 223p

5. SheRBoRne V., developmental Movement for children, Worth publish-ing, 2001, 136p.

7. auBRY J.M. et Saint aRnaud Y., dynamique des groupes-initiation à son esprit et à quelques-unes de ses techniques, ed universitaires, canada, 1963, 109p.

8. BloSSieR p. et al., groupe et psychomotricité le corps en jeu, ed. Solal, Marseille, 2002, 208p.

Sites internets

2. leRhMan M., about teens with cerebral palsy. disponible sur http://www.livestrong.com/article/118116-teens-cerebral-palsy/ ( consulté le 09/08/2012 ).

Articles

3. daViS e. et al., Qol of adolescents with cp., developmental Medecine & child neurology, 2009 51 : 193-199.

4. JacQuot l., eutonie et ergothérapie, Revue ergothérapies, n°3-Sept. 2001, p.21-24.

6. paliSano R., RoSenBauM p., WalteR S., RuSSel d., Wood e., galuppi B., development and reliability of a system to classify gross motor func-tion in children with cerebral palsy., dev Med child neurol, 1997 ; 39 : 214-23.

« Acc

ompa

gner

des a

dole

scen

ts p

rése

ntan

t des

trou

bles

neu

rolo

giqu

es …

Page 111: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 111

Claire HollEnStEin

Rééducation de l’écriture : s’agit-il de dysgraphie ou de dyscalligraphie ?

Mots clés

dysgraphie – rééducation de l’écriture - dyscalligraphie – intégration sensorielle et corporelle

Résumé

l’écriture de certains enfants diagnostiqués dysgraphiques révèle des lacunes scripturales. les prendre en considération modifie la prise en charge en ergothérapie car il ne s’agit pas nécessairement d’un trouble fonctionnel, d’une incompréhension ou d’une mauvaise exé-cution des consignes. l’enfant nous montre sa finesse d’observation et d’analyse qui lui ont fait prendre quelques raccourcis au détriment du fondamental de la lettre. il nous appartient donc de lui redonner les bases constitutives des caractères mais aussi des repères spatio-temporaux qui l’aideront à construire autrement sa gestuelle et son expression visuelle.

Rééducation de l ’écriture : s’agit-il de dysgraphie ou de dyscalligraphie ?

claire hollenStein ergothérapeute, ergocom - cabinet d’ergothérapie et de formations 5 cour Fernand Jaenger 67200 StRaSBouRg ( France ) [email protected]

Page 112: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

112 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

introductionl’augmentation du nombre d’enfants diagnostiqués dysgraphiques nous surprend depuis quelques années. Beaucoup d’entre eux présentent des troubles fonctionnels d’usage : crispations intempestives des doigts, raideur d’épaule… parallèlement, nous constatons quelques constantes dans l’écri-ture de ces enfants qui nous ont fait nous interroger sur la compréhension que ces derniers avaient pu avoir de l’écriture au sens calligraphique du terme. nous nous sommes replongés dans les métiers de la lettre pour véri-fier les différentes étapes de l’écriture et comprendre où se situait la carence chez chacun des enfants dont nous avons la charge rééducative.

Des métiers de la lettrelorsque l’on interroge des professionnels de la lettre ( typographes, cal-ligraphes, graphistes ), nous découvrons que la reproduction d’un texte s’effectue par succession d’étapes chronologiques incontournables : le tracé du caractère ( de la lettre ) d’une part, l’assemblage des caractères entre eux d’autre part et enfin leur mise en page, pour parvenir à une expression visuelle ( et esthétique ) d’un texte dans son entier. chaque étape est fonda-mentale et demeure indispensable à chaque professionnel. et chaque corps de métier nous ouvre des perspectives intéressantes pour la rééducation de la « dysgraphie » :

• le calligrapheparexemple,nousenseigne l’artdebien former les carac-tères ( dürer, 1987 ). cet art ne peut se développer qu’à partir d’une bonne connaissance préalable du tracé de base du caractère ( ou de la lettre ) : il s’agit avant tout de savoir reproduire un signe à l’identique ( Médiavilla, 1993 ). cet apprentissage est drastique et impose ses règles d’application et d’observation. le tracé ne s’enseigne pas tant par une gestuelle, que par la patience, à force de dessiner et de s’appliquer des heures durant : chacun apprend à s’organiser seul, dans la contrainte de la feuille, de l’instrument et du modèle à reproduire. S’il veut parvenir à un bon résultat, le calligraphe ne peut se concentrer sur une gestuelle qui le contraindrait, mais il s’applique à la construction de chaque trait, de chaque forme en laissant le geste se for-mer et se libérer au fur et à mesure de l’évolution sur la feuille. certains calli-graphes racontent toutefois qu’il arrivait que certains enseignants tiennent la main de leurs élèves ( ou disciples ) pour mieux les guider dans la volute d’un trait ( Mérou, 2012 ).

le calligraphe nous rappelle également que le tracé est scandé par le rythme, celui de la respiration, celui du temps présent, temps suspendu mais aussi par le bruissement de l’instrument sur le papier.

il nous démontre qu’un caractère peut rester inachevé le temps de com-poser le suivant, afin de trouver un juste équilibre spatial entre les deux. la technique est imposée par l’instrument qui dicte ses propres règles de traçage et la discipline à respecter. en changeant d’outil, les règles changent ainsi que la logique de construction graphique ( chazal, 2012 ).

Rééd

ucat

ion

de l ’

écrit

ure :

s’ag

it-il

de d

ysgr

aphi

e ou

de d

ysca

lligr

aphi

e ?

Page 113: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 113

• Letypographe,quantàlui,nousenseignel’importancedesblancsdansl’assemblage des lettres entre elles, ne laissant rien au hasard. il construit des espaces équilibrés ( et non forcément identiques ) entre les carac-tères, selon leurs juxtapositions, mais aussi entre les lignes et autour du texte ( Blanchard, 1974 ). lorsque les mots arrivent ainsi à se former, il devient plus facile de constituer une phrase, puis un texte dans la page.

• Enfin legraphiquenous rappelle l’importance esthétiquede l’écritureet sa résonnance psychologique. grâce à lui, les styles et les mises en page se transforment pour se singulariser et laisser place à l’expression visuelle.

observation cliniquelorsque nous interrogeons les enfants sur leur connaissance du dessin de la lettre, nous découvrons leur désarroi qui se traduit le plus souvent par une ignorance ou par une confusion du tracé de base. généralement, ils ont compris l’écriture comme l’apprentissage d’une gestuelle et c’est ce qu’ils s’appliquent à reproduire ( gallwey, 1992 ). Si nous reprenons leurs premiers cahiers d’apprentissage, nous pouvons reconnaître leur sens de l’observa-tion et la finesse d’analyse qu’ils en ont fait : le cahier proposait de construire un tracé de la lettre selon un code fléché qui indique quel mouvement faire en trait continu. l’enfant a enregistré la consigne et la restitue par un mou-vement continu, au risque que les lettres ne soient pas fermées puisque cela ne lui a pas été présenté comme une valeur fondamentale. concentrés sur le mouvement du tracé, ces enfants ne comprennent pas que l’on s’attarde sur le dessin du caractère. ce faisant, la gestuelle se transforme ( effet de style et d’efficacité obligent ), déforme le tracé initial du caractère qui devient illisible pour la plus grande incompréhension de l’enfant qui reste convaincu qu’il a correctement exécuté la consigne initiale d’apprentissage ( clot, 1993 ).

il ne s’agit pas de remettre en cause une méthode d’apprentissage ou une autre, mais de comprendre où se situent les dissonances qui perturbent encore l’enfant au point qu’il ne puisse voir ses erreurs ou modifier son tracé.

Emergence de la « dyscalligraphie »le détour par la calligraphie et la typographie nous pousse à présent à intégrer une nouvelle composante aux troubles de l’écriture, que nous avons choisi de nommer « dyscalligraphie ». Si la dysgraphie, comme son nom l’indique concerne le graphisme, donc le dessin et sa représentation spatiale, la « dyscalligraphie » est un trouble d’identification de la structure de base de la lettre dans ses différents styles : capitales d’imprimerie ( haut de casse ), minuscules ( bas de casse ) et lettres attachées ( cursives ). elle affecte donc les opérations du tracé du fait de cette méconnaissance mais non par manque de compréhension des procédures d’écriture. la dyscalli-graphie englobe également les troubles du rythme qui viennent perturber l’écriture, entravant sa régularité et sa fluidité.

Rééducation de l ’écriture : s’agit-il de dysgraphie ou de dyscalligraphie ?

Page 114: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

114 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

depuis que nous avons intégré cette nouvelle composante à nos bilans, nous constatons que la majeure partie des enfants présente une dyscalligra-phie. la prise en compte de cette composante modifie considérablement la rééducation que nous pouvons proposer : avant d’installer l’enfant sur un ordinateur ou de lui imposer une nouvelle gestuelle, nous le soumettons à une nouvelle exploration calligraphique.

Rééducation de la dyscalligraphiel’identification ou la reconnaissance des différents caractères s’effectue à partir de différents modèles typographiques existants ( anciens ou nou-veaux ), caractères isolés ou entrelacés, ornementés ou non. l’enfant ap-prend le trait de base qui constitue chaque caractère et qui le distingue des autres. l’exploration se fait également corporellement et sensoriellement afin de garantir l’intégration des différents caractères. par exemple, nous de-mandons à l’enfant de constituer chacune des lettres de l’alphabet avec son corps. les lettres assimilées sont toujours reproduites correctement avec le corps, à moins d’un trouble psychomoteur majeur.

par le corps, l’enfant désigne ce qu’il a retenu et nous explique les distorsions que nous retrouverons sur son cahier. lorsque l’erreur d’interprétation de la lettre est massive, nous reprenons le support typographique ou l’ergothéra-peute trace le modèle calligraphique sur une feuille. l’enfant parvient alors toujours à le reproduire aisément avec tout son corps. d’autres exercices ba-sés sur l’intégration sensorielle et l’approche psychocorporelle aident aussi à l’apprentissage et à l’assimilation de la calligraphie de base.

effet surprenant : nous constatons que le simple fait de lui demander de réa-liser une lettre avec son corps, de façon stable et confortable sur le tapis suffit à l’enfant pour qu’il puisse ensuite asseoir la lettre correctement sur la ligne du cahier sans que nous lui en donnions la consigne.

a ce stade, nous pouvons démarrer ensemble un travail graphique où il s’agira pour l’enfant de retrouver confiance en son observation et de réus-sir à retracer fidèlement ce qu’il voit ( edwards, 2002 ). cela lui permet de prendre une distance sur le premier apprentissage suivi. pour éviter tout phénomène de comparaison, nous ne travaillons pas avec la lettre. ce se-rait remettre en cause un enseignement qui doit rester de référence pour l’enfant : l’instituteur lui ouvre les portes du savoir. il est donc essentiel que l’enfant puisse garder sa confiance envers cette autorité qui le guidera sa vie durant. nous utilisons l’autoportrait car chaque trait du visage a déjà été stigmatisé par une schématisation. par exemple, la bouche est une ba-nane, l’œil est vulgairement représenté par un rond qui touche les bords d’un ovale. Mais si l’enfant s’observe dans le miroir, il découvre vite que cette schématisation ne correspond pas forcément à la réalité. et cette réalité, il lui appartient de la représenter à sa façon, le plus correctement possible. tous les enfants y parviennent ( hollenstein, 2010 ). tous ne fixent pas leur énergie sur les mêmes détails, mais ils parviennent toujours à s’appliquer

Rééd

ucat

ion

de l ’

écrit

ure :

s’ag

it-il

de d

ysgr

aphi

e ou

de d

ysca

lligr

aphi

e ?

Page 115: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 115

sur quelques détails suffisants qui permettront à leurs parents de le recon-naître ! c’est l’avantage de l’autoportrait : si l’enfant ne parvient pas toujours à se valoriser dans son évaluation, il profite souvent de l’évaluation exté-rieure de ses parents qui commentent les ressemblances. c’est le meilleur moyen pour lui garantir la réussite de son dessin. il peut croire en ses capa-cités graphiques et en son sens de l’observation ! de plus, par ce portrait, il a réappris à composer un dessin à partir de signes retracés individuellement et séparément. cet exercice lui permet de réinterroger la norme et les repré-sentations qu’il en a et de prendre une distance suffisante qui lui permettra ensuite de mieux s’approprier les règles transmises ( Schwartz, 1997 ).

nous pouvons alors revenir à l’écriture des caractères isolés d’abord, puis des ligatures qui articulent les lettres. il s’agit de pouvoir construire le mot dans une réalisation graphique, jouant sur des espaces équilibrés ( et non forcément identiques ) qui pourront lier les lettres entre elles dans un rap-port intime les unes aux autres. c’est sans doute cette composition qui de-meure la plus difficile à acquérir. le travail avec la laine aide énormément à intégrer le sens gestuel qui guide l’écriture cursive.

a ce stade, il est également important de rappeler que l’écriture s’est façon-née avec le calame et la plume. l’instrument impose des règles qui lui sont propres et qui induisent la construction du mot, le sens gestuel de la lettre et son assise spatiale.

lorsque le mot peut être composé correctement en cursive ( en attaché ), la phrase n’est pas loin car la notion d’espace et d’équilibre ont déjà été assi-milés.

Mais n’oublions pas que le rythme intervient dans l’écriture. Si l’on se réfère à Marcel Jousse ( 1974 ), le geste est étroitement lié au rythme. le travail d’écri-ture peut donc se faire avec différents instruments ( plume, calame, laine, etc ) mais il doit aussi passer par cet apprentissage rythmique pour conduire à une véritable incorporation. par nature, l’être humain est animé de plu-sieurs rythmes intérieurs ( respiratoire, cardiaque… ) qui changent selon la situation et les circonstances. travailler le rythme entre autres sur cette base permet à l’enfant de prendre conscience de ses appuis intérieurs possibles et d’augmenter ses capacités de concentration. cela lui permet également se détacher de tout parasitage extérieur ( ex. la pression de la montre de l’instituteur, de l’horloge de la classe… ). cette notion de tempo dans l’écri-ture est essentielle : si l’enfant parvient à écrire en respectant un rythme, l’écriture devient régulière et fluide. des expériences avec une collègue psychomotricienne nous ont montré que si nous ne faisons que travailler le rythme même à la frappe dactylographique sur le clavier d’un ordinateur, l’écriture manuscrite s’améliorait considérablement.

enfin, la rééducation ne serait pas complète si nous ne permettions pas la libre expression de la lettre ( l’aspect graphique et personnel ) : l’écriture est une marque identitaire par le style graphique qu’on lui donne et qui nous ré-vèle au monde. les jeux d’écriture que nous faisons avec les enfants se font

Rééducation de l ’écriture : s’agit-il de dysgraphie ou de dyscalligraphie ?

Page 116: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

116 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

sur une base ludique et créatrice afin de libérer la parole ( Massin, 1970 ). les lettres sont déguisées ou transformées pour coller aux attributions que l’en-fant souhaite leur donner. par exemple, un enfant écrit le mot « quilles » en lettres verticales, de plus en plus penchées ( sur la ligne ) telles des quilles au bowling, qui sont en instance de tomber ! Mais il peut tout aussi bien écrire le nom de ses proches avec des lettres personnalisées qui caractérisent l’his-toire de chacun ou son trait de caractère qui le distingue des autres. indirec-tement, cet exercice, tout comme celui de la laine, permet de travailler sur les résonnances affectives de l’écriture ( Bedouin, 2012 ). lorsque l’écriture devient un jeu, elle devient aussi plus facile à réutiliser !

Conclusionconsidérer la dyscalligraphie comme un trouble à part entière permet de partir de l’enfant et de s’interroger sur ce qu’il a compris, observé et inté-gré de ses premiers apprentissages scolaires. cela permet de lui redonner confiance car nous lui reconnaissons une logique qui l’a justement guidé dans sa réalisation.

Mais cela nous oblige également à reconsidérer sa graphie en repassant par les fondamentaux calligraphiques puis typographiques.

le travail sensoriel et corporel aide l’enfant à développer des capacités de perception sensorielle, de reproduction graphique mais aussi d’expres-sion visuelle, propres à l’écriture manuscrite. de plus, lorsque l’enfant peut reproduire ce qu’il voit, il acquiert une fiabilité sur laquelle il peut se reposer en confiance.

Même si l’écriture paraît être une application en deux dimensions, elle se construit à partir de repères spatio-temporaux en 3 dimensions que l’enfant doit avoir acquis au préalable. le travail du rythme par un vécu corporel permet de redonner des repères tangibles et pérennes.

Rééd

ucat

ion

de l ’

écrit

ure :

s’ag

it-il

de d

ysgr

aphi

e ou

de d

ysca

lligr

aphi

e ?

Page 117: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 117

bibliographieBedouin l., apprendre à écrire, quels enjeux ?, intervention de congrès, lurs, 60ème rencontres internationales de lure, 2012.

BlanchaRd g. ( 1974 ), albert hollenstein, typographe audio-visualiste, paris, communication et langages, 24, pp. 62-81.

chaZal J., calligraphie : l’écriture en mouvement, lurs, intervention aux 60èmes rencontres internationales de lure, 2012.

clot Y., Réflexions sur le geste technique, Performances humaines et tech-niques, auxerre, Sciences humaines, 1993, hors série, pp. 57-62.

duReR a., Proportions des lettres, paris, presses de l’ecole estienne, 1987.

edWaRdS B., Dessiner grâce au cerveau droit, Wavre, Mardaga, 2002, psycho-logie et sciences humaines, 326 p.

gallWeY t., Tennis et concentration, paris, Robert laffont, 1992, sports pour tous, 157 p.

hollenStein c., les différentes facettes de la dysgraphie, XXIII èmes journées d’ergothérapie de Montpellier, s/s direction M.-h. izard, Montpellier, Sauramps Médical, 2011, pp. 294-298.

i.n.p.R., deux alphabets pour l’école, actes du colloque du 14 au 19 mars 2005, paris, Musée national de l’éducation, 2005.

JouSSe M., L’anthropologie du geste, paris, gallimard, 1974, voies ouvertes, 410 p.

MaSSin R., La lettre et l’image, paris, gallimard, 1970, 286 p.

MeRou h., les bancs d’écriture, lurs, intervention aux 60èmes rencontres in-ternationales de lure, 2012.

MediaVilla c., Calligraphie, paris, imprimerie nationale, 1993, 332 p.

SchWaRtZ Y., les ingrédients de la compétence : un exercice nécessaire pour une question insoluble, paris, Education permanente, 1997, 133, pp. 9-34.

Rééducation de l ’écriture : s’agit-il de dysgraphie ou de dyscalligraphie ?

Page 118: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

118 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

Quel

le p

rise e

n ch

arge

pou

r l’en

fant

dys

prax

ique

?

Page 119: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 119

Quelle prise en charge pour l’enfant dyspraxique ?

Priorités et réalités

Eliane DE bRAbAnDERE

Mots clés

dyspraxie - troubles spécifiques des apprentissages - scolarité - prise en charge thérapeutique - collaboration ergothérapeutes enseignants

Tout d’abord, nous souhaitons attirer l’attention du lecteur sur le fait que cet article n’a d’autre prétention que de partager notre expérience professionnelle sur ce sujet encore relativement peu étudié scientifiquement. Si la dyspraxie commence à être mieux décrite, la littérature nous informe encore très peu quant aux modalités de prise en charge thérapeutique de ce trouble spécifique d’apprentissage. Nous précisons donc que ce n’est pas une revue de la littérature que nous proposons ici, mais bien une réflexion issue de notre travail d’accompagnement auprès de ces enfants ayant des besoins spécifiques non suffisamment reconnus.

Quelle prise en charge pour l’enfant dyspraxique ?

eliane de Brabandereergothérapeute et Kinésithérapeute Bruxelles

Page 120: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

120 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

evoquer la prise en charge de l’enfant dyspraxique de façon concise est en fait assez complexe, car la diversité des situations influence considérable-ment les moyens qu’il est possible de mettre en place et même les objectifs recherchés. avant d’évoquer l’aide à apporter à ces enfants, arrêtons-nous donc quelque peu sur cette diversité qui s’explique à différents niveaux.

tout d’abord, la définition même de « dyspraxie » est variable d’un auteur à l’autre et plusieurs mots existent pour évoquer, de façon relativement simi-laire, ce trouble spécifique d’apprentissage.

ensuite, si nous savons que la dyspraxie correspond à un vaste ensemble de troubles touchant la motricité et l’habileté manuelle en particulier, les compétences neurovisuelles et visuo-spatiales, nous oublions trop souvent de préciser à quel point les enfants dyspraxiques peuvent présenter des tableaux cliniques différents. il est en effet indispensable de réaliser que chaque enfant présente ce que Michèle Mazeau décrit comme « une mo-saïque particulière et unique ».

de plus, selon les cas, le diagnostic est parfois établi dès l’âge de 4 ou 5 ans, souvent plus tardivement, voire même à l’adolescence. la dyspraxie se révèle aussi plus ou moins sévère, isolée ou associée à d’autres troubles spécifiques d’apprentissage. les ressources intellectuelles, les capacités attentionnelles et exécutives, les capacités mnésiques et spécialement la mémoire de travail, la qualité des autres canaux cognitifs, et plus fondamen-talement encore, la sécurité psycho-affective, la façon dont l’enfant s’inscrit dans la relation à l’autre, son désir de grandir… influencent de façon pro-fonde le pronostic et bien sûr la disponibilité de chacun de ces enfants pour les apprentissages.

aussi, l’attitude et, plus largement les ressources des parents, de même que la relative disponibilité des différents enseignants, influencent également de façon extrêmement significative l’avenir scolaire. le projet pédagogique et le souci concret du chef d’établissement pour l’accueil d’un enfant ayant des besoins spécifiques, ou le choix de l’enseignement spécialisé, illustrent encore la variété des contextes dans lesquels vont évoluer les élèves dys-praxiques.

enfin, la diversité existe également au niveau thérapeutique. en France, les ergothérapeutes occupent une place importante dans l’accompagnement de ces enfants. en Belgique, nous regrettons que la profession soit insuffi-samment représentée. Sur le terrain, selon les situations, les enfants sont accompagnés par des logopèdes, kinésithérapeutes, psychomotriciens, neuropsychologues et/ou des ergothérapeutes...

enfin, par manque de centres de rééducation spécialisés, par manque de médecins assurant le rôle indispensable de coordination, en définitive par manque de moyens, les rééducations sont rarement pluridisciplinaires et le plus souvent à charge des parents.

Quel

le p

rise e

n ch

arge

pou

r l’en

fant

dys

prax

ique

?

Page 121: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 121

Face à cette hétérogénéité, nous comprenons que les priorités pour la prise en charge thérapeutique doivent être spécifiques à chaque enfant. les orientations thérapeutiques et pédagogiques peuvent cependant être déterminées dès le début de la prise en charge, en lien bien sûr avec les objectifs recherchés, objectifs qui vont à la fois s’inscrire dans la durée et évoluer avec l’âge.

Sachant que les répercussions scolaires sont les conséquences les plus pénalisantes de la dyspraxie, car c’est face aux apprentissages scolaires que l’enfant va être le plus « handicapé », la réussite à l’école est donc la grande priorité de l’intervention thérapeutique. Si pour certains, la réalité nous oblige à devoir être moins ambitieux, pour de nombreux enfants dys-praxiques, cet objectif reste, à long terme, au centre du projet d’aide.

la collaboration entre thérapeutes et enseignants, entre projet pédago-gique et thérapeutique, la gestion de l’autonomie se présentent comme les corollaires de ce projet.

l’essentiel reste en filigrane ; mettre en place les conditions pour que l’en-fant puisse préserver et développer sa confiance en lui.

l’accompagnement des parents est une autre priorité à établir de façon pré-coce. les inviter à prendre place, de façon adéquate, au sein des équipes professionnelles, facilite l’intervention d’aide. en effet, lorsque celle-ci peut trouver un relais à la maison, elle devient plus solide, plus pertinente, plus cohérente.

Quels sont ces moyens spécifiques à mettre en place pour aider l’enfant ? d’une part, comme déjà évoqué, il existe des objectifs stables au fil du temps : informer, faciliter le dialogue entre tous les intervenants, valoriser les forces de l’enfant, mettre à sa disposition des stratégies appropriées à sa sin-gularité. lui donner des outils efficaces pour économiser son énergie, éviter la double tâche attentionnelle, favoriser les canaux d’apprentissages préser-vés, sont autant de démarches essentielles à mettre en place sans attendre. une approche verbale, analytique et séquentielle constitue la stratégie fon-damentale pour permettre à l’enfant de se forger des représentations men-tales stables, telles de réelles bases sur lesquelles il peut construire. a diffé-rents niveaux, la mise en place systématique de ces stratégies a pour but de réduire l’impact de la dyspraxie et de faciliter au maximum le contourne-ment du trouble. ce sont là, les fils conducteurs de la prise en charge tout au long de la scolarité de l’enfant dyspraxique.

d’autre part, les moyens varient au fur et à mesure des années : en mater-nelle, ou au début de l’école primaire, nous guidons étroitement l’enfant. ensuite, petit à petit, nous cherchons à lui donner les moyens pour qu’il

Quelle prise en charge pour l’enfant dyspraxique ?

Page 122: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

122 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

puisse s’approprier, à son rythme, ce projet d’aide mis en place pour lui par les adultes.

cette distinction entre ces deux périodes nous semble particulièrement importante, car, selon les situations à gérer, ce n’est pas avant l’âge de 8, 10 ans et plus, que nous pouvons solliciter l’enfant pour trouver lui-même les stratégies qui lui sont les plus appropriées. la qualité des fonctions exécu-tives, qui se développent tardivement, devient alors pleinement détermi-nante pour le pronostic.

n’ayant ni la prétention, ni la possibilité de détailler ici tous ces moyens spécifiques, nous nous limiterons à mettre en évidence quelques éléments essentiels.

tout d’abord, rappelons l’importance du bilan qui constitue la première étape indispensable pour toute intervention pertinente. cette démarche permet d’établir le diagnostic et évite les malentendus. les difficultés de l’enfant sont nommées et reconnues, ses forces également. a l’issue de ce bilan, il est nécessaire de prendre le temps d’expliquer la dyspraxie à toutes les personnes qui entourent l’enfant sans oublier le premier concerné. ceci constitue véritablement les prérequis pour que le petit dyspraxique puisse progressivement intégrer et surmonter ce qui constitue son « handicap ». enfin, rappelons également que c’est à partir des résultats à ce bilan, corré-lés aux nombreux éléments de réalité décrits plus hauts, que le projet péda-gogique et thérapeutique peut se mettre en place.

idéalement, cet accompagnement spécifique débute vers l’âge de 4 ans et demi ou 5 ans, voire plus tôt dans certaines situations. Si, à cet âge-là, une in-tervention thérapeutique psychomotrice globale 1 reste souvent pertinente, il ne faut pas pour autant attendre pour établir progressivement les priorités au niveau scolaire. en effet, dès la maternelle, l’enfant est déjà en difficulté dans de nombreuses tâches telles que le graphisme, l’apprentissage de l’écriture de son prénom, certaines activités logico-mathématiques… il en est conscient tout en se sentant très démuni pour y faire face. Souvent, il est déçu du résultat ou plutôt du manque de résultat obtenu lorsqu’il dessine, bricole… de plus, si « l’autre » ne connaît pas la dyspraxie, l’enfant découvre vite cette même déception dans le regard de l’adulte, et même dans celui de ses pairs... il ne se sent pas encouragé à persévérer et perd trop vite le plaisir de « faire ». il abandonne parfois très rapidement quantités d’activités si fréquentes à l’école maternelle. tout ceci, de même que la perspective des apprentissages fondamentaux de l’école primaire, justifie l’intérêt d’une intervention précoce. celle-ci a bien sûr pour objectif de réduire l’impact des difficultés, mais cherche également à préserver au mieux l’estime de soi.

concrètement, cela signifie que nous allons tout d’abord encourager ce qui va bien ! en effet, souvent, nous nous intéressons à ce qui pose problème, mais n’oublions pas de soutenir l’enfant pour qu’il puisse développer ses forces ! Valoriser son bon niveau verbal, sa mémoire, sa réflexion, éveiller l’enfant pour qu’il développe des centres d’intérêts… constituent des dé-

Quel

le p

rise e

n ch

arge

pou

r l’en

fant

dys

prax

ique

?

Page 123: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 123

marches essentielles. par ailleurs, là où il est gêné par ses troubles praxiques nous éviterons de le laisser expérimenter trop par lui-même, par essais et erreurs, comme c’est le plus souvent proposé dans un environnement sco-laire habituel. nous proposons au contraire de le guider de façon précise et étroite, étape par étape, via des informations claires et structurées. le prin-cipe de « faire équipe » avec lui est essentiel. pour illustrer cette démarche, prenons l’exemple du dénombrement. en cas de dyspraxie, l’enfant ne peut ajuster la récitation de la litanie et le pointage. de plus, il risque de compter deux fois le même objet ou d’oublier l’un ou l’autre élément. ceci a pour conséquence de freiner, de fragiliser l’apprentissage de la notion de nombre. donc, pour éviter cela, nous comptons à deux ; si l’enfant pointe ou déplace les objets de la collection, nous l’accompagnons en disant « 1…, 2…, 3… ». ensuite, nous proposons d’inverser les rôles.

conscients des répercussions de la dyspraxie à l’école primaire, nous propo-sons par moments certains apprentissages de façon un peu plus précoce. c’est le cas, entre autre, pour l’écriture des chiffres, apprentissage que nous proposons sans attendre, du moins après que nous nous soyons assurés que l’enfant ait bien acquis la notion correspondante. nous guidons alors verba-lement le tracé, décrivons de façon analytique toutes les étapes pour écrire le chiffre, sans nécessairement dire à l’enfant notre projet. avec un outil scripteur adéquat, l’enfant nous suit, étape par étape, et c’est après coup qu’il découvre le résultat obtenu, et constate qu’il est par exemple capable d’écrire « 5 ». au-delà de son étonnement, l’enfant éprouve rapidement une certaine fierté et prend confiance. dans un deuxième temps, pour pouvoir le reproduire par lui-même, il mémorise progressivement le chemin qui lui a été raconté (point de départ, direction, étapes successives…) et non le mo-dèle « tout fait » tel qu’on le (re)connaît. pour se forger une représentation mentale correcte et efficace, à nouveau, le changement de rôles nous est très précieux. nous devenons par moments « élève » et notre petit patient prend le rôle du « professeur », ce qu’il fait le plus souvent avec bonheur !

cette approche permet à l’enfant de structurer petit à petit son activité ou ses nouveaux apprentissages, et surtout d’obtenir des résultats nettement plus sa-tisfaisants. de nombreux autres exemples pourraient être cités ; écrire son pré-nom, s’habiller, construire un circuit, se repérer à partir d’un modèle, « dessiner » un château ou un robot… le choix parmi ces activités se fait d’une part en fonc-tion de la nécessité de l’apprentissage (notons ici que, par exemple, réussir un puzzle, n’est pas essentiel…) et d’autre part, selon les envies et la motivation de l’enfant. l’exemple de l’apprentissage des lacets illustre bien la nécessité d’une réflexion et l’obligation de faire des choix car, la quantité d’énergie requise pour arriver au résultat escompté est à prendre pleinement en considération.

au fil des séances individuelles, nous reprenons régulièrement les mêmes situations, ou nous les varions, mais surtout, nous maintenons les mêmes objectifs : permettre à l’enfant d’acquérir des représentations mentales stables dans les domaines fragilisés par la dyspraxie, accroître donc ses

Quelle prise en charge pour l’enfant dyspraxique ?

Page 124: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

124 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

compétences, et toujours, préserver au mieux sa confiance en lui. Si nous n’oublions pas que nos objectifs doivent toujours être individualisés, nous pensons néanmoins que, pour beaucoup d’enfants dyspraxiques, lorsque l’apprentissage est proposé de façon pertinente, cet objectif visant la repré-sentation mentale stable, peut souvent être atteint. la littérature d’une part – en particulier le livre de h. geuze 2 – et notre expérience d’autre part nous montrent en effet qu’en travaillant de façon appropriée, nous pouvons agir sur la qualité du geste et améliorer le résultat.

par contre, la performance et l’automatisation ne constituent à aucun mo-ment nos objectifs.

notre souci premier est donc d’accompagner l’enfant et lui donner les ou-tils essentiels dont il aura besoin. par exemple, au niveau de l’écriture, nous aurons comme objectif l’apprentissage spécifique des schèmes grapho-moteurs de chaque lettre, pour que l’enfant soit progressivement capable d’écrire, à son aise, et surtout se relire et être relu.

la troisième primaire représente souvent une étape un peu délicate. en effet, lorsque l’enfant débute ce nouveau cycle scolaire, quantité de tâches « basiques » telles qu’écrire « proprement » et sur la ligne, ouvrir le cahier à la bonne page, tracer une marge, faire son cartable… sont maintenant consi-dérées par les enseignants comme intégrées. ceci signifie qu’elles com-mencent à être exécutées plus rapidement, et surtout de façon plus auto-matique et sans coût attentionnel élevé. or, nous le savons, ceci n’est pas le cas pour l’enfant dyspraxique. au contraire, c’est ce déficit d’automatisation qui risque de tellement le pénaliser car son attention va rester polarisée sur ces tâches de bas niveau, et ce, au détriment des nouveaux apprentissages à acquérir. donc, pour que l’enfant puisse progresser au niveau scolaire, il est nécessaire qu’à l’école, les enseignants comprennent que la dyspraxie ne guérit pas, et qu’il sera indispensable de soulager l’enfant à plusieurs niveaux, qu’il faudra continuer à adapter les exigences, et ce pendant long-temps.

la question de l’écriture reste souvent au cœur des difficultés pour l’enfant et au centre du dialogue de tolérance qui se doit d’être établi avec l’école. Si l’élève dyspraxique arrive à maîtriser tant bien que mal son geste graphique « quand il fait bien attention », il n’y arrive pas de façon fluide, et lorsque petit à petit, les exigences de vitesse sont requises, lorsqu’il faut porter son atten-tion au niveau de l’orthographe ou du contenu, il ne peut tout gérer. Voilà pourquoi se pose la question de l’écriture à l’ordinateur.

Que penser dès lors de l’apprentissage du clavier ? nous savons que la ré-ponse à cette question est controversée à plusieurs niveaux et la discussion se justifie car, à nouveau, nous sommes face à un manque de références théoriques, face à un manque de recul, face à des expériences portant sur des conclusions diverses. personnellement, nous sommes convaincues que le clavier est un outil précieux, tout en sachant que ce n’est pas la solution. en fonction de la situation de chaque enfant, tôt ou tard, de façon complé-

Quel

le p

rise e

n ch

arge

pou

r l’en

fant

dys

prax

ique

?

Page 125: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 125

mentaire à l’apprentissage de l’écriture manuscrite, nous proposons sou-vent cet apprentissage, et toujours, nous suggérons de ne pas introduire le clavier à l’école sans apprentissage spécifique préalable. par cette démarche que nous souhaitons préventive, en séance individuelle, le travail au cla-vier devient avec certains une priorité. il est intéressant de relever que cet apprentissage est proposé non seulement avec l’objectif d’un relais ulté-rieur pour l’école, mais comme support pour d’autres objectifs spécifiques, comme par exemple, le développement de la conscience phonologique ou la correspondance phonème - graphème. nous pouvons l’utiliser pour développer la mémoire de travail, la vitesse aussi, avec la gestion que cela implique au niveau du stress. les stratégies du regard de même que l’ap-prentissage de l’orthographe peuvent aussi être renforcées par le travail au clavier. avec des enfants plus âgés, le clavier et le traitement de texte qui l’accompagne, deviennent aussi les supports thérapeutiques parfaits pour, pourquoi pas, écrire un livre... projet particulièrement intéressant car, tout en étant source de plaisir, il impose de la structure, enrichit les forces de l’enfant, et le valorise.

au-delà de la question spécifique de l’écriture, c’est à travers quantité de situations variées, liées de près ou de loin aux exigences scolaires, que nous cheminons avec l’enfant pour qu’il prenne de mieux en mieux conscience de sa singularité, de ses forces, mais aussi de ses limites. nous apprivoisons avec lui ce qui peut représenter « des pièges », nous apprenons à les dépasser ou les contourner. ceci avec l’idée de lui permettre de mieux se connaître, pour qu’il sache ce qui l’aide, ce qui le pénalise. au total, notre objectif est de lui donner les outils, les moyens pour faire face à ce qui lui est demandé à l’école, via les stratégies les plus pertinentes.

nous répétons encore que la collaboration entre équipe pédagogique et thérapeutique est ici indispensable. lorsque l’enfant fréquente l’enseigne-ment spécialisé, la présence d’une équipe multidisciplinaire favorise plei-nement ce dialogue. par contre, lorsque l’enfant fréquente l’enseignement ordinaire, cette collaboration est par définition plus distante, plus frêle. dans la réalité, ceci constitue clairement un obstacle de plus à surmonter.

nous reconnaissons ici que, en tant que thérapeute travaillant avec des enfants fréquentant l’enseignement ordinaire, cela implique régulièrement une certaine frustration. en effet, ce que nous pouvons travailler en indi-viduel a ses limites si cela ne trouve écho au sein de l’école. de plus, pour être pertinent dans notre intervention, il nous faut un minimum connaître ce qui est travaillé en classe et la manière dont c’est enseigné. en effet, avec ces informations, de façon plus spécifique, nous avons la possibilité de re-prendre certains points, et proposer des aménagements adéquats. il nous faut par ailleurs continuer à informer les enseignants, expliquer notre tra-vail et les adaptations possibles. ceci n’est toutefois envisageable que si on prend le temps d’écouter le point de vue des enseignants, et si on imagine quelque peu la réalité de la vie scolaire... c’est à nous de nous y ajuster pour

Quelle prise en charge pour l’enfant dyspraxique ?

Page 126: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

126 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

établir un climat de confiance et chercher en commun les aménagements possibles. Mais, ce travail si précieux de collaboration nécessite que nous prenions beaucoup de temps en dehors des séances individuelles, ce qui matériellement reste souvent compliqué, voire impossible. cette réalité de terrain nous oblige parfois à être patients pour accepter que les moyens que nous souhaiterions voir mis en place puissent l’être ne fut-ce que partielle-ment… la réalité, comme nous le mentionnions en ce début d’article, la réalité, c’est la diversité ! Si parfois, c’est vraiment difficile de pouvoir mettre en place les moyens nécessaires, dans certaines situations par contre, de réels projets individualisés sont possibles. certaines écoles font le choix d’accueillir parmi leurs élèves ces enfants qui ont des besoins spécifiques, et se donnent les moyens pour mettre en place les conditions adaptées à leurs besoins. un partenariat entre école, parents et thérapeutes peut alors se mettre en place, et l’enfant qui est au cœur de ce projet, en reçoit pleine-ment les bénéfices.

avec les récents décrets relatifs à l’intégration scolaire en communauté française 3, nous disposons de nouvelles ressources pour aider les enfants présentant un trouble spécifique d’apprentissage. d’une part, en enseigne-ment ordinaire, dans des situations bien établies, les professeurs sont main-tenant autorisés à individualiser certaines modalités, par exemple, favoriser les réponses orales, accorder du temps supplémentaire, permettre l’écriture au clavier... d’autre part, via la double inscription (c’est-à-dire une inscription scolaire dans une école ordinaire et une autre inscription dans une école spécialisée) l’enfant peut rester dans son école normale et y bénéficier d’une aide supplémentaire (quatre heures / semaine). ce sont là de nouveaux moyens certes encourageants, même s’ils restent encore actuellement li-mités. ces dispositions récentes donnent en tout cas une reconnaissance officielle des besoins spécifiques de ces enfants, donc une base sur laquelle nous appuyer lors de nos interventions dans les écoles.

Conclusionnous devons retenir que les répercussions de la dyspraxie s’exprimant sur-tout à travers les apprentissages, c’est à ce niveau qu’il nous faut établir nos priorités. en sachant que la prise en charge de ces enfants est liée à de nom-breux critères, le projet proposé et le parcours scolaire envisagé doivent être ajustés et réalistes.

la prise en charge d’un enfant dyspraxique se passe donc bien au-delà des séances individuelles et nécessite la participation de tous ; enseignants, pa-rents et thérapeutes.

en filigrane, cette collaboration a également pour objectif de permettre à l’enfant de préserver l’estime de soi. a titre d’exemple, évoquer la dyspraxie de daniel Radcliffe, allias harry potter, peut nourrir cette confiance.

Quel

le p

rise e

n ch

arge

pou

r l’en

fant

dys

prax

ique

?

Page 127: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 127

ainsi, suffisamment compris et soutenu, valorisé par ses ressources, l’enfant pourra progressivement s’impliquer, devenir acteur pour surmonter ses dif-ficultés et prendre son autonomie face à sa scolarité et son avenir.

par ailleurs, au-delà d’une grande générosité chez de nombreux ensei-gnants, au-delà d’une grande ouverture de la part de nombreux directeurs, il faut reconnaître qu’il n’est pas facile d’obtenir le partenariat souhaité dans les différentes écoles avec lesquelles nous collaborons.

notre souhait est donc de voir encore s’affirmer les premières ouvertures de l’enseignement ordinaire pour que la reconnaissance des besoins de l’en-fant dyspraxique soit mieux prise en compte et que, sur le terrain, il soit plus aisé de pouvoir répondre au mieux aux besoins spécifiques de ces enfants.

bibliographie1. de BRaBandeRe e. « intérêt d’une aide thérapeutique en psychomotri-

cité », in « dyspraxie » uplF-info XXiX 1 – dossier – 2012/2, p.7

2. geuZe h., le trouble de l’acquisition de la coordination, ed. Solal, 2005

3. enseigner aux élèves avec troubles d’apprentissage administration générale de l’enseignement et de la recherche scientifique editeur responsable: Martine herphelin

Quelle prise en charge pour l’enfant dyspraxique ?

Page 128: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

128 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

Fait

clin

ique

Page 129: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 129

Névralgie brachiale incessante de la branche cutanée palmaire du nerf …

Sophie DESRoCHERS

desrochers Sophie ergothérapeute Bsc en ergothérapie, centre professionnel d’ergothérapie, Montréal (Qc). canada.

névralgie brachiale incessante de la branche cutanée palmaire du nerf ulnaire gauche : Fait clinique d’une diminution rapide des douleurs neuropathiques par la normalisation de la sensibilité cutanée.

Mot clés

douleur neuropathique, hypoesthésie, rééducation sensitive, lésions axonales, neuroplasticité.

Résumé

la méthode de rééducation sensitive ( Spicher 2003 ; degrange, noël, Spicher, Rouiller 2006 ) s’est avérée particulièrement efficace dans le traitement des douleurs neuropathiques d’origine périphérique. ces dernières sont survenues dans les premières semaines suivant des lésions axonales d’une branche d’un nerf cutané reliée à un accident de travail au niveau de l’avant bras gauche. cette méthode a permis une reprise rapide des activités professionnelles. Suite à l’évaluation et à la mise en place du traitement sensitif, le travailleur a pu re-prendre ses activités de travail sans inconfort et, dans ce cas-ci, sans douleur résiduelle significative. les exercices quotidiens en clinique et à domicile ont permis d’améliorer la sensibilité tactile cutanée ( es-

Page 130: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

130 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

thésiographie, seuil de perception à la pression ) et de diminuer le score au Questionnaire de la douleur de St-antoine de 36 à 15 points.

introductionun territoire hypoesthésique peut être accompagné de douleurs inces-santes et ainsi limiter considérablement le niveau d’activités d’un individu ( incapacité de travailler, problèmes fonctionnels ). ceci est encore plus déconcertant quand cela survient suite à un évènement banal tel qu’une simple lésion cutanée superficielle ( sans atteinte tendineuse, musculaire ni infection ).

le but de cet article est de démontrer que des stimulations sensitives régu-lières et ciblées permettent une diminution et, dans certains cas, une dis-parition des douleurs neuropathiques initialement invalidantes. en réédu-cation sensitive la récupération peut se faire par la régénération axonale au niveau du tissu lésé et/ou par la neuroplasticité ( degrange, noël,Spicher et Rouiller 2006 ).

la rééducation sensitive lors de la présence d’une hypoesthésie ( Spicher et Quintal 2013 ) peut également s’inscrire conjointement comme modalité de traitement dans le cadre d’un programme de réadaptation au travail impli-quant, par exemple, la mobilisation articulaire, le renforcement et les simu-lations de tâches de travail.

Patient et méthodesM. t. est un jeune homme de 23 ans œuvrant comme technicien nettoyeur après sinistre. il fut référé en ergothérapie le 1er novembre 2011 ( accident survenu le 1er septembre 2011 ) initialement pour mobilisation et renforce-ment suite à la lacération cutanée de l’avant bras gauche survenue lors de la réparation d’un mur endommagé par une inondation. la lacération était superficielle et n’avait nécessité que deux ( 2 ) points de sutures. Suite à l’éva-luation initiale, les problèmes suivants ont été identifiés :

• Desamplitudesarticulairesactivesdupoignetgauche.

• Delaforcedepréhension.

• Douleursurlafacedorsaleulnairedel’avantbrasgauche.

les douleurs rapportées étaient présentes en tout temps et perturbaient le sommeil. lors de la passation du Questionnaire de la douleur St-antoine ( QdSa ), les termes élancements, brulûres et engourdissements ont été rete-nus. Suite au bilan initial, nous avons émis l’hypothèse suivante ( Spicher, desfoux, 2010 ) :

• Névralgiebrachialeincessantedelabranchecutanéepalmairedunerfulnaire droite ( stade iV des lésions axonales ).

Névr

algi

e bra

chia

le in

cess

ante

de la

bra

nche

cuta

née p

alm

aire

du

nerf

Page 131: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 131

évaluation somesthésique

lors de la première rencontre, une esthésiographie ( figure 1 ) est identifiée à 0,7 gramme ( esthésiomètre 3.84 ) ainsi qu’un seuil de perception à la pres-sion ( Spp de 2.8 grammes ).

ces évaluations permettent l’identification d’un territoire anormalement hypoesthésique ( esthésiographie ) et connaître la capacité de la personne à percevoir la pression à un point précis ( Spicher 2003 ; noël,desfoux,Spicher 2009 ).

Figure 1 : évolution de l’esthésiographie à 0,7 gr ( esthésiomètre de Semmes-Weinstein 3.84 ) de la branche cutanée palmaire du nerf ulnaire gauche.

Méthode de traitementla rééducation de l’hyposensibilité a été réalisée à l’aide de la thérapie du touche à tout et de vibrations mécaniques ( Vibralgic™ 4, 100hz, niveau 2 ) à l’intérieur du territoire hypoesthésique.

Monsieur devait effectuer ses exercices de rééducation à domicile quatre fois par jour durant cinq minutes. de plus, il recevait une fois par semaine en clinique des stimulations par vibrations mécaniques durant cinq minutes sur la région identifiée hypoesthésique.

en plus des traitements reliés à la problématique sensitive, Monsieur devait poursuivre un programme de mobilisation, de renforcement et de simula-tion de tâches de travail, car cela demeurait la raison initiale de la référence et cela n’était pas contre indiqué pour la méthode de rééducation sensitive de la douleur, contrairement à une situation d’allodynie mécanique ( Spi-cher, c.J aniglio,d., delaquaize, F.,crohas, a.Vianin, M. 2010 )

Névralgie brachiale incessante de la branche cutanée palmaire du nerf …

Page 132: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

132 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

RésultatsMonsieur a été suivi du 1er novembre 2011 au 30 décembre 2011 ( 60 jours ). l’arrêt des traitements a été demandé par le médecin traitant et un retour aux tâches régulières de travail a été entrepris étant donné les améliorations notées. Voici le tableau illustrant l’évolution de l’hyposensibilité ( se référer au tableau 1 pour l’évolution de l’esthésiographie ).

Dates Hypoesthésie Douleurs neuropathiques

Spp QdSa

01/11/2011 2,8gr 36 points

23/11/2011 1,5gr. n/d

30/11/2011 1,4 gr. n/d

06/12/2011 0,5gr n/d

14/12/2011 0,3gr. 25 points

30/12/2011 0,2 gr 15 points

tableau 1 : Spp : Seuil de perception à la pression QdSa :Questionnaire de la douleur St-antoine

Discussionune personne subissant des lésions axonales d’une branche d’un nerf cuta-né peut présenter des douleurs neuropathiques qui limitent considérable-ment son niveau de fonctionnement dans l’ensemble de ses domaines de rendement occupationnel. la rééducation sensitive basée, dans ce cas-ci, sur la régénérescence axonale ( lésion de moins de 2 ans ) et / ou le neuro-plasticité a permis de diminuer considérablement des douleurs neuropa-thiques. Malgré la présence de 15 points au QdSa ( 25% ), Monsieur ne rap-portait aucune douleur gênante et ressentait une amélioration notable de sa sensibilité conjointement à une amélioration de sa force de préhension et à la normalisation de sa mobilité. en voie de conséquence, il a pu reprendre rapidement ses activités de travail.

Névr

algi

e bra

chia

le in

cess

ante

de la

bra

nche

cuta

née p

alm

aire

du

nerf

Page 133: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 133

Conclusionles douleurs neuropathiques peuvent être un frein important dans la réa-daptation professionnelle d’une personne. l’évaluation ciblée des branches nerveuses lésées, la mise en place rapide du traitement approprié ( ex : touche à tout ) et la réévaluation permanente de l’hypoesthésie ( Spp, QdSa, ) permettent la diminution des douleurs neuropathiques et, dans certain cas, le retour à une sensibilité cutanée quasi normale. de plus, il est possible lors du traitement d’une hypoesthésie de poursuivre les autres types de moda-lités de traitement sans interférer sur le processus de rééducation sensitive.

bibliographies1. Spicher, claude. ( 2003 ). Manuel de rééducation sensitive du corps humain.

paris : Médecine et hygiène.

2. noël, l., desfoux, n.,Spicher, c.J. ( 2009 ). Le Bilan diagnostique de lésions axonales en rééducation sensitive. e-news for Somatosensory Rehabilita-tion 6( 1 ), 31-37.

3. B. degrange, l. noël, c. Spicher, e.-M Rouiller ( 2006 ). De la rééducation de l’hyposensibilité cutanée tactile à la contre-stimulation vibrotactile, in M.-h izard et R. nespoulous ( eds. ), expériences en ergothérapie, 19ème série ( pp.207-220 ). Montpellier, paris : Sauramps médical.

4. Spicher et Quintal ( 2013 ). La méthode de rééducation sensitive de la dou-leur. Montpellier, paris : Sauramps Médical.

5. Spicher, claude. , desfoux, nadège, Sprumont, pierre.( 2010 ). Altas des ter-ritoires cutanés du corps humain. Montpellier : Sauramps Médical.

6. Spicher J., claude., delaquaize, François, antiglio, dominique., crohas, alexandre., Vianin, Michael., ( 2010 ). L’allodynie mécanique : une contre-indication temporaire pour certains traitements physiques. Mains libres 5,199-205.

Névralgie brachiale incessante de la branche cutanée palmaire du nerf …

Page 134: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

134 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

Page 135: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 135

A. RouZEAu

Diminution des douleurs neuropathiques d’une névralgie lom

bo-fémorale

Diminution des douleurs neuropathiques d’une névralgie lombo-fémorale intermittente avec allodynie mécanique par la méthode de rééducation sensitive.

Mots-clés

allodynie mécanique, lésions axonales, hypoesthésie, douleurs neu-ropathiques, contre-stimulation vibrotactile.

Résumé

ce fait clinique illustre comment la méthode de rééducation sensi-tive peut faire disparaître une allodynie mécanique, améliorer l’hy-posensibilité sous-jacente et diminuer les douleurs neuropathiques dans le cas d’une névralgie lombo-fémorale. il montre aussi que des facteurs extrinsèques au traitement peuvent freiner sa progression, notamment si le patient ne se sent pas suffisamment écouté dans l’expression de ses douleurs, et s’il se trouve confronté à des facteurs de stress.

Rouzeau, a., et indépendante 9, avenue de la gare, ch - 1920 Martigny, Suisse

Page 136: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

136 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

introductionla méthode de rééducation sensitive décrite par claude Spicher [1] permet de traiter les douleurs neuropathiques.

parfois, il est difficile pour un patient souffrant de telles douleurs, d’obtenir une prescription pour de l’ergothérapie dans le but de les diminuer. déjà en situation de lutte physique et émotionnelle contre ses douleurs, il doit de surcroît trouver la force de convaincre pour bénéficier de réé-ducation sensitive, traitement ayant pourtant prouvé son efficacité dans de nombreuses publications.

le but de ce fait clinique est de montrer comment l’utilisation de la mé-thode de rééducation sensitive a permis une diminution des douleurs neu-ropathiques spontanées et au toucher chez une jeune femme ayant subi une lésion nerveuse lors d’un accident de voiture, et en quoi l’évolution du traitement a pu être été ralentie par des facteurs extrinsèques.

Patiente et méthode

Présentation de la patiente

Mme p., âgée de 27 ans, est victime d’un choc frontal en voiture, au cours duquel un objet métallique perfore son aine gauche, entraînant une lésion nerveuse et des douleurs neuropathiques. depuis son accident, Mme p. ressent un endormissement et des douleurs spontanées et au toucher sur la face latérale de la cuisse gauche. Sa vitesse de marche est diminuée et ses douleurs la contraignent à des pauses fréquentes. les douleurs sont quantifiées à 26 points au Questionnaire de la douleur St-antoine ( QdSa ) initial, avec notamment des « piqûres » et des « brûlures » survenant spon-tanément et lors d’effleurements sur la face latérale de sa cuisse gauche, et une sensation « d’endormissement ».

ayant entendu parler de la méthode de rééducation sensitive par une amie qui en a bénéficié, elle doit insister pour obtenir de son médecin traitant une ordonnance pour de l’ergothérapie, traitement qui débute deux mois après son accident.

a son arrivée en ergothérapie, Mme p., chimiste, n’a pas encore recom-mencé son travail. la reprise aura lieu dans un mois. la jeune femme va se marier, l’événement est prévu deux semaines après le début du traitement. lors des premières séances, elle a facilement les larmes aux yeux lorsqu’elle évoque sa sa situation et affirme que ses plaintes ne sont pas prises au sérieux par son médecin. elle a aussi très peur de conduire sa voiture.

Dim

inut

ion

des d

oule

urs n

euro

path

ique

s d’u

ne n

évra

lgie

lom

bo-fé

mor

ale

Page 137: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 137

Présentation des méthodesle traitement d’une allodynie mécanique consiste à évaluer puis faire dis-paraître la zone allodynique, puis à évaluer et améliorer l’hyposensibilité sous-jacente.

Suppression de l’allodynie mécanique

nous évaluons l’allodynie mécanique le 27.8.2009 : sa taille avec un mono-filament de Semmes et Weinstein de 15 grammes ( fig. 1 ) ; sa sévérité avec un monofilament de Semmes et Weinstein de 3,6 grammes, ce qui cor-respond à un arc-en-ciel des douleurs bleu ; nous faisons l’hypothèse de la branche nerveuse lésée : névralgie lombo-fémorale intermittente ( appelée aussi méralgie paresthésique ou meralgia paraesthetica ), du nerf cutané latéral de la cuisse1

gauche avec allodynie mécanique ( stade iii de lé-sions axonales ).

Fig. 1 : allodynographie à 15 grammes du nerf cutané latéral de la cuisse gauche, le 27.8.2009

la zone confortable de contre-stimulation vibrotactile à distance se situe sur le territoire de distribution cutanée du 12ème nerf thoracique gauche : sur sa branche perforante antérieure, il est demandé à la patiente d’effectuer des stimulations tactiles avec une peau de lapin 8 fois par jour durant 1 minute au maximum ; sur sa branche postérieure, une contre-stimulation médicamen-teuse avec du neurodoltM tissugel ( version suisse du VersatistM) et vibratoire avec un Vibralgic, est effectuée lors des séances d’ergothérapie.

1. appelé, anciennement, nerf fémoro-cutané [2] ( Spicher & al., 2010 )

Diminution des douleurs neuropathiques d’une névralgie lom

bo-fémorale

Page 138: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

138 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

Rééducation de l’hyposensibilité sous-jacente

l’allodynie mécanique a disparu le 7.1.2010. nous avons alors évalué l’hypo-sensibilité sous-jacente : sa taille avec le monofilament de 0,7 gramme ; son importance avec le monofilament de 2,1 grammes.

un programme d’exercices à domicile est alors prescrit, dont la durée aug-mente progressivement de 15 secondes à 5 minutes : il est demandé à Mme p. de se concentrer et d’effleurer la zone hyposensible avec une tex-ture, et de comparer la sensation avec la même texture sur l’autre cuisse. elle doit faire de même avec deux autres textures. en thérapie, des stimulations vibratoires sont appliquées sur la zone hyposensible.

RésultatsMme p. s’est montrée progressivement moins affectée émotionnellement, une fois passées les échéances importantes de son mariage et de la reprise du travail. de plus, son médecin du travail l’a soutenue dans ses efforts. a la fin du traitement, sa vitesse de marche n’était plus limitée, elle avait même repris la course à pied. le frottement des vêtements sur la cuisse, quel que soit le tissu, ne provoquait plus de gêne.

l’allodynie mécanique a disparu le 7.1.2010, après 130 jours de traitement ; l’hypoesthésie sous-jacente s’est progressivement améliorée et les douleurs neuropathiques ont diminué de la manière suivante ( tableau 1 ) :

Dates Hypoesthésie sous-jacente : seuil de perception de la pression

Hypoesthésie sous- jacente : seuil de discrimination de 2 points statiques

Douleurs neuropathiques : QDSA

27.8.2009 non défini ( allodynie )

non défini ( allodynie )

26 points

15.1.2010 Supérieur à 2,1 grammes

non défini 22 points

21.1.2010 non défini Supérieur à 66 mm non défini

22.4.2010 0,7 gramme : normalisé

56 mm : presque normalisé ( cuisse droite : 48 mm )

3 points

tableau 1 : amélioration de l’hypoesthésie sous-jacente corrélée avec la diminution des douleurs neuropathiques

Dim

inut

ion

des d

oule

urs n

euro

path

ique

s d’u

ne n

évra

lgie

lom

bo-fé

mor

ale

Page 139: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 139

Discussionl’allodynie mécanique a disparu 130 jours après le début du traitement, ce qui est plus lent que la moyenne : car 75 % des patients présentant un arc-en-ciel des douleurs bleu voient leur allodynie disparaître au maximum en 108 jours [3]. les facteurs intrinsèques ne semblent pas expliquer cette durée prolongée : étiologie avec bon pronostic, présence d’une zone de travail, un seul territoire allodynique sans débordement extra-territorial, pas de cRpS. par contre, des facteurs extrin-sèques, dans ce cas les difficultés émotionnelles du premier mois de traitement, peuvent constituer une explication : en effet, après son mariage et sa reprise pro-fessionnelle, Mme p. étant plus détendue et disponible et bénéficiant du soutien de son médecin du travail, la régression de l’allodynie mécanique s’est accélérée.

Quant aux douleurs neuropathiques, elles ont diminué rapidement avec la rééducation de l’hyposensibilité sous-jacente [4], passant de 26 à 3 points, signe d’une situation stabilisée [5]. la méthode de rééducation sen-sitive [1] s’est révélée efficace pour soulager Mme p.

Conclusionce fait clinique montre que parfois, les patients en situation de souffrance doivent de surcroît savoir convaincre pour pouvoir bénéficier d’un traitement efficace pour leurs douleurs. la méthode de rééducation sensitive fait l’objet de nombreuses publications mais tous les médecins ne la connaissent pas. cela constitue non seulement un obstacle à l’accès au traitement, mais cela peut aussi en ralentir l’évolution, ce qui a été le cas de notre patiente dans un premier temps. ce fait clinique pourrait contribuer à faire connaître cette méthode et faciliter la tâche d’autres patients dans une situation similaire.

Références bibliographiques[1] Spicher, c. ( 2003 ). Manuel de rééducation sensitive du corps humain.

genève, paris : Médecine et hygiène.

[2] Spicher, c., desfoux, n. & Sprumont, p. (2010). Atlas des territoires cuta-nés du corps humain : Esthésiologie de 240 branches. Montpellier, paris : Sauramps médical.

[3] clément-Favre, S., latière, p., desfoux, n., Quintal, i. & Spicher, c.J. ( 2011 ). allodynie mécanique du membre supérieur : Zones de travail et pronostic du traitement. M.-h. izard ( ed. ), Expériences en ergothérapie, 24ème série, ( pp.145-152 ). Montpellier, paris : Sauramps medical.

[4] Mathis, F., desfoux, n., Sprumont, p., hecker, e., Rossier, ph. & Spicher, c.J. ( 2007 ). diminution des douleurs neuropathiques périphériques par la rééducation sensitive. Rev Med Suisse 3 ( 135 ), 2745-2748.

[5] Spicher, c.J. & Spicher, p. ( 2008 ). l’évaluation du phénomène de la dou-leur. Ergothérapie, 10, 17-21.

Diminution des douleurs neuropathiques d’une névralgie lom

bo-fémorale

Page 140: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

140 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

Expé

rien

ces

dans

le c

adre

de

la fo

rmat

ion

Page 141: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 141

thomas ottE

‘Quels peuvent être les rôles de l’ergothérapeute dans la réinsertion professionnelle de personnes ayant un handicap d’ordre musculosquelettique ?’

Mots clés

ergothérapie - intégration sociale - handicap physique – Méthode d’évaluation - normes de travail

Résumé

les possibilités de trouver un emploi pour les personnes en situation de handicap ne sont pas aisées, d’autant plus dans le secteur privé. les ergothérapeutes œuvrant à l’accompagnement professionnel sont rares en Belgique. le modèle peo apparaît être adéquat pour illustrer et mettre en avant les capacités et incapacités de la personne en situa-tion de handicap ainsi que les aptitudes nécessaires à avoir pour utiliser un poste de travail. une mise en avant de perspectives d’intervention de l’ergothérapeute en matière d’accompagnement professionnel a été réalisée. les rôles que l’ergothérapeute pourra exercer au cours d’une insertion ou d’un retour au travail sont abordés. le recours à des éva-luations spécifiques sera primordial. un panel d’outils intéressants pour appuyer notre travail d’analyse et le légitimer est présenté.

Quels peuvent être les rôles de l’ergothérapeute...

thomas otteergothérapeute au centre d’aptitude à la conduite et d’adaptation des Véhicules ( caRa )institut Belge pour la Sécurité Routière chaussée de haecht, 1405 1130 BruxellesBachelier en ergothérapie en 2012 à l’ieS parnasse-deux alice ( 2012 ) Bachelier en arts du spectacle et technique de diffusion et de communication à l’institut des arts de diffusion ( 2007 )

Page 142: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

142 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

cet article découle de la rédaction de mon travail de fin d’études à la haute ecole léonard de Vinci – institut d’enseignement Supérieur parnasse-deux alice présenté au mois de juin dernier. intitulé « analyse d’un poste de travail d’empaquetage de thé : rôles et accompagnement de l’ergothérapeute », ce travail m’a permis de me pencher sur la problématique d’insertion ou de retour au travail de personnes en situation de handicap physique et de la place que nous, ergothérapeutes, pouvons y avoir.

l’ergothérapeute – au travers de son cadre de référence et par l’usage de ses outils d’évaluation et de planification – est un professionnel capable d’ap-procher la problématique de la personne en situation de handicap dans sa vie professionnelle et de lui proposer des solutions ergonomiques, organi-sationnelles et thérapeutiques.

Sur cette base, et selon la définition belge de l’ergothérapie, il apparaît que l’ergothérapeute a un rôle primordial à jouer dans ce domaine. or, il semble que les interventions en ergothérapie visant l’accompagnement vers une réinsertion au travail soient marginales dans notre pays.

nous aborderons au travers de cet article la mise en évidence d’un modèle pouvant être utilisé dans une prise en charge de retour à l’emploi, les rôles de l’ergothérapeute dans cette prise en charge et un relevé d’évaluations et d’outils utiles lors de l’accompagnement d’un client en âge de travailler.

le modèle P-E-oafin de pouvoir modéliser notre prise en charge, j’ai choisi le modèle peo ‘person-environment-occupation’.

le modèle peo est un modèle centré sur le client.1 il se compose de trois éléments principaux : la personne, l’environnement et l’occupation. a cela s’ajoute un quatrième élément qui est l’intersection des trois premiers éléments, à savoir la performance occupationnelle. plus l’intersection est grande, meilleure est la performance occupationnelle ; dans la cadre d’une situation de travail, cela signifie que cette dernière sera davantage optimale.

la taille de l’intersection se modifie plus ou moins fort tout au long de notre existence en fonction de l’interaction des trois cercles. ces derniers inter-agissent de manière dynamique tout au long de la vie. cette dernière est schématisée par un tuyau.

1 StRong S., RigBY. p., SteWaRt d. et al., Application of the Person-Environment-Occupation Model : A practical tool. p.122

Quel

s peu

vent

être

les r

ôles

de l’e

rgot

héra

peut

e...

Page 143: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 143

Figure 12 : illustration du modèle peo

utilités du modèle PEole modèle peo, par son concept simple, permet au thérapeute d’identifier facilement les barrières qui mettent un frein à la croissance de la perfor-mance occupationnelle de la personne. c’est un modèle qui permet éga-lement d’être utilisé avec le client. il est facile à comprendre et schématise bien l’intervention du thérapeute en fonction des caractéristiques propres de l’individu. l’intervention du thérapeute consistera en un entretien indi-viduel avec la personne. c’est le thérapeute qui schématisera les propos de la personne sur base du modèle peo. cet entretien sera axé sur ce que le client désire en matière d’emploi, ses moyens pour atteindre les objectifs, comment il se perçoit, quel pourrait être son rôle de travailleur, etc. nous verrons plus loin que le Worker Role interview ( WRi ) pourra nous guider lors de cette entrevue en servant de trame.

avec le client, le thérapeute pourra planifier diverses interventions en les focalisant sur la personne, les environnements et / ou les occupations3. ce modèle facilite le relevé des facilitateurs et des obstacles entre les trois élé-ments paires par paires ; c’est-à-dire la personne avec l’environnement, l’en-vironnement avec l’occupation et l’occupation avec la personne.

2 BRoWn c.e., Ecological Models in cRepeau e.B., cohn e., BoYt Schell B.a., Willard & Spackman’s Occupational Therapy, p.438

3 StRong S., RigBY. p., SteWaRt d. et al., op. cit., p.125

Quels peuvent être les rôles de l’ergothérapeute...

Page 144: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

144 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

le modèle peo permet de suivre l’évolution de la performance occupation-nelle du client par de nouveaux schémas montrant l’évolution de l’interven-tion thérapeutique. il est idéal pour illustrer les différentes interventions de l’ergothérapeute. c’est en adaptant ou en modifiant les occupations ( = les tâches et les activités qui les composent ) et l’environnement où se situent les tâches de travail ( ou l’environnement pour accéder aux tâches de travail ) que nous allons permettre une meilleure performance occupationnelle.

l’insertion et la réinsertion professionnelles

a) la personne handicapée de naissance ou ayant subi un traumatisme en n’étant pas active professionnellement

le modèle peo, comme dit précédemment, va se révéler utile lors de l’in-sertion professionnelle d’une personne ayant subi un traumatisme. S’il s’agit d’une personne handicapée n’ayant pas d’employeur, il permettra de recueillir et de mettre en liens les différents paramètres et capacités de la personne ( = le futur travailleur ), de l’environnement ( = la législation en vigueur, les différentes caractéristiques de l’entreprise et son accessibilité, … ) et de l’occupation ( = les tâches de travail ). cette analyse devra se faire avec la personne afin de l’intégrer pleinement dans sa réinsertion. les autres acteurs tels que l’employeur potentiel pourront également intervenir lors du relevé des paramètres afin de faciliter l’adaptation des conditions de tra-vail et de favoriser ainsi l’embauche du travailleur. lorsque les informations auront été recueillies, une présentation du schéma peo pourra se faire avec les différents intervenants ( futur travailleur, employeur, tuteur, etc. ) afin de faciliter la compréhension de la situation. des propositions d’évolution ou de modification des p, e et o pourront ensuite être discutées et réalisées afin d’augmenter la performance occupationnelle ( = la participation, la pro-ductivité et la rentabilité ) et indirectement l’estime de soi du travailleur en situation de handicap.

b) la personne ayant subi un traumatisme duquel découle un handicap et qui était occupée professionnellement

dans le cas d’un accident (survenu au travail ou non) qui a écarté l’employé de son entreprise, la démarche sera plus ou moins semblable que pour une personne n’ayant pas encore d’employeur. cependant, l’expérience passée du travailleur au sein de l’entreprise, les relations entretenues avec ses collè-gues et superviseurs et éventuellement une prise en charge de type Retour thérapeutique au travail (Rtt) pourront faciliter la réintégration du travail-leur.

Quel

s peu

vent

être

les r

ôles

de l’e

rgot

héra

peut

e...

Page 145: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 145

le modèle est très modulable et permet ainsi d’être utilisé dans beaucoup de situations différentes. il permet d’utiliser des évaluations spécifiques qui seront pertinentes en fonction de l’intervention de l’ergothérapeute. cependant, la simplicité du modèle pourra apparaître comme un frein car il ne pourra pas toujours prendre en compte certaines techniques d’inter-vention ou d’évaluations4. Sa compréhension simple permettra au modèle d’être compris et éventuellement utilisé par des personnes n’ayant pas de formation médicale ou paramédicale et pourra être facilement utilisé par des personnes issues d’autres cultures5.

l’utilisation d’un modèle écologique tel que le peo fournit une structure afin de comprendre la multitude de facteurs qui doivent être pris en compte dans l’évaluation et dans l’intervention ergothérapique destinées à amélio-rer la performance occupationnelle6.

Figure 27. exemples d’items abordés lors de l’utilisation du modèle peo

le rôle de l’ergothérapeuteil y a souvent un manque important de relais entre le médecin qui suit la personne avec un handicap et le monde professionnel qui peut paraître souvent inaccessible. une certaine culture de la fatalité faisant découler une logique d’assistanat est fréquente chez nous.

4. StRong S., RigBY. p., SteWaRt d. et al., op. cit., p.130

5. StRong S., RigBY. p., SteWaRt d. et al., ibid., p.132

6. BRoWn c.e., op. cit., p.444

7. StRong S., RigBY. p., SteWaRt d. et al., op. cit., p.130

Quels peuvent être les rôles de l’ergothérapeute...

Page 146: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

146 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

Suite à un diagnostic de handicap et lorsque les habitudes de vie essen-tielles ( se laver, s’alimenter, s’habiller, etc. ) auront été regagnées, l’ergothé-rapeute pourrait intervenir afin d’évaluer les capacités de la personne et les possibilités de reprendre un travail similaire à celui exercé antérieurement à la venue du handicap. le cas échéant, l’ergothérapeute pourra déterminer avec la personne une adaptation ou une réorientation professionnelle en se basant, par exemple, sur le modèle peo.

une autre tâche qui appartiendrait également à l’ergothérapeute se situe plus en aval, c’est-à-dire directement dans le milieu professionnel. l’ergo-thérapeute va servir de maillon entre le ‘monde médical’ et l’environnement de la personne qui – dans ce cas – est son lieu de travail. par sa formation paramédicale basée sur la personne, en la voyant de manière holistique, l’ergothérapeute fait partie des professionnels les plus adaptés pour faire le lien entre le client lui-même, ses capacités et les tâches de travail requérant des habiletés. ainsi, son but est d’accompagner le client en situation de han-dicap afin qu’il intègre ou réintègre son milieu de travail.

a ce propos, le concept de « Retour thérapeutique au travail » ( Rtt ) peut être très bénéfique. il consiste à réintégrer petit-à-petit le travailleur à son emploi. une Réadaptation Fonctionnelle intensive ( RFi ) majoritaire au dé-but associée à un retour sur le lieu de travail quelques heures par semaine permettra au travailleur de se confronter en douceur à ses tâches de travail. au fil des semaines, le nombre d’heures de RFi diminuera pour laisser place à plus d’heures de travail. l’ergothérapeute accompagne ainsi le travailleur durant toute sa réintégration. le Rtt se fait en étroite collaboration avec l’entreprise par un dialogue permanent avec l’employeur et l’employé.

Malgré l’absence de références scientifiques, il est vraisemblable que la ren-contre et l’accompagnement systématiques d’un thérapeute après la venue d’un handicap augmentera le taux d’emploi des personnes avec un handi-cap pour peu que les entreprises soient enclines à les accueillir. cela semble être de plus en plus le cas.

l’ergothérapeute se démarque de l’ergonome. en effet, l’ergonomie tentera d’adapter des outils et situations de travail au plus grand nombre de travail-leurs dans un but de confort et d’augmentation des performances, tandis que l’ergothérapie tentera de favoriser la participation de l’homme fragilisé à une situation de travail spécifique en développant une approche ergo-nomique personnalisée. la démarche de l’ergothérapeute sera davantage centrée sur le client ( l’employé ).

Quel

s peu

vent

être

les r

ôles

de l’e

rgot

héra

peut

e...

Page 147: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 147

Quels évaluations et outils utiliser ?l’ergothérapeute aura comme rôles principaux d’évaluer l’aspect fonction-nel de la personne, d’analyser l’aspect ergonomique d’un éventuel poste de travail ainsi que l’environnement de la personne et de proposer un potentiel lieu de travail en adéquation avec le handicap du ( futur ) travailleur. l’utilisa-tion d’outils d’évaluation facilitera son travail.

lors de la partie pratique de mon travail de fin d’études, j’ai eu l’occasion d’utiliser la fiche FiFaRiM ( Fiche d’identification des Facteurs de Risques liés à la Manutention ) afin d’évaluer les facteurs de risque liés à la manutention. cet outil d’évaluation était tout à fait adéquat par rapport à la situation de travail évaluée, à savoir le conditionnement de sachets de thé. la tâche de travail des ouvriers était composée en très grande majorité d’activités de manipulation de matériaux ( boîtes, palettes, caisses, etc. ).

cette évaluation est disponible gratuitement sur le site du Service public Fédéral ( SpF ) emploi, travail et concertation sociale.

outre la FiFaRiM, j’ai eu l’occasion de m’intéresser à d’autres outils d’évalua-tions susceptibles de nous concerner en fonction des différentes situations que nous pourrions rencontrer. Vous en trouverez ci-dessous une liste.

• WorkerRoleInterview(WRI)

• Handitest

• Évaluationsystémiquedesaptitudesprofessionnelles(ESAP)

• MéthodeELHAN

• Dépistageparticipatifdesrisques(DÉPARIS)

• ERTOMISAssessmentMethod(EAM)

• Grillesd’évaluationCinergie(dontlagrille«étudedescontraintesduposte de travail » )

• OutildeRepérageetd’ÉvaluationdesGEstes(OREGE)

• RapidUpperLimbAssessment(RULA)

• Check-Listdel’‘OccupationalSafetyandHealthAdministration’(OSHA)

• LequestionnaireTMSdel’InstitutNationaldeRechercheetdeSécurité( inRS )

• Équationréviséeduleverdechargesdu‘NationalInstituteforoccupational Safety and health’ ( nioSh - uSa )

• Logiciel«Préventiondeslombalgies»éditéparlaCaisseRégionaled’assurance Maladie ( cRaM ) d’alsace-Moselle ( ‘Risques professionnels cRaM’ )

deux d’entre elles semblent fort intéressantes lors de prises en charge de clients en âge de travailler :

Quels peuvent être les rôles de l’ergothérapeute...

Page 148: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

148 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

1. le Worker Role interview ( WRi ) est un questionnaire qui permet d’iden-tifier les facteurs psychosociaux et environnementaux qui peuvent in-fluencer le retour au travail de la personne en situation de handicap. le questionnaire reprend différents items à aborder avec le client. l’ergo-thérapeute est relativement libre dans la conduite de la passation de l’entrevue. les thématiques suivantes devront être abordées : capacité de rendement, valeurs, intérêts, rôles, habitudes et environnement.

2. le handitest est également un outil très intéressant. il permet d’évaluer le handicap de manière assez complète. il se déroule en quatre parties : l’évaluation corporelle, l’évaluation fonctionnelle, l’évaluation situation-nelle et l’évaluation de la subjectivité. il permet de passer de nombreux items en revue et d’obtenir un score à la fin du test. ce dernier a été conçu par l’université paris Vii et le chu henri Mondor. il est disponible gratuitement sur internet.

n’oublions pas toutes les autres évaluations citées plus haut dont l’evaluation Systémique des aptitudes professionnelles ( eSap ) qui permet de confronter les capacités du travailleur avec les exigences des tâches de travail.

l’évaluation de la situation de travail devra être complétée par nos obser-vations parallèlement à l’utilisation de certaines évaluations. en effet, les évaluations existantes ne seront bien souvent pas suffisantes pour évaluer adéquatement la variété et la complexité des tâches de travail.

un contact précoce avec l’employeur sera établi afin de pouvoir mener à bien l’évaluation de la situation de travail. cinq points de base devront être détaillés lors de l’analyse de l’emploi : la position ( ex : chef d’atelier ), les res-ponsabilités, les tâches, les éléments d’une tâche c’est-à-dire les activités et les mouvements.

ensuite, les activités physiques du travail ( s’agenouiller, parler, voir, grim-per… ), les conditions d’ambiance ( intérieur, extérieur, bruits, qualité de l’air… ), les dimensions cognitives, les dimensions psychosociales et le ni-veau de productivité devront être précisés. des entretiens avec la ou les per-sonne( s ) concernée( s ) ( chef de service, chef d’équipe, directeur, conseillé en prévention, etc. ) seront également des ressources importantes. il pourra être intéressant pour l’ergothérapeute de faire équipe avec d’autres interve-nants tels que l’ergonome ou le neuropsychologue8.

8 RoY S., Les interventions précoces reliées au travail dans un contexte d’URFI, pp.13-21

Quel

s peu

vent

être

les r

ôles

de l’e

rgot

héra

peut

e...

Page 149: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 149

Conclusionil apparaît que l’ergothérapeute a bel et bien un rôle dans l’accompagne-ment visant une (ré)insertion professionnelle. cependant, il apparaît difficile de l’exercer en Belgique et ce, pour diverses raisons d’ordres structurel et politique.

une réflexion sur la mise en place de services, associations ou institutions permettant à l’ergothérapeute d’œuvrer dans cette voie s’avère nécessaire chez nous. il est urgent d’élargir le rôle de l’ergothérapeute et d’y mettre les moyens.

l’évolution des mentalités et des modèles culturels permettra probablement un jour à toute personne limitée dans ses capacités de participer plus active-ment à la société. l’ergothérapeute pourra dès lors mettre à profit ses diffé-rents savoirs pour contribuer à ces projets de ( ré )insertion professionnelle.

travailler contre une rémunération fait partie du domaine de la « producti-vité ». cette dernière permet à la personne de « participer », de jouer son rôle dans la société. la participation est un pilier important de l’ergothérapie. Bien sûr, la participation n’a pas toujours besoin d’être productive au sens économique du terme mais il est important de permettre à un maximum de personnes possible de pouvoir exercer leur rôle afin qu’elles puissent don-ner un sens à leur vie.

le tFe complet est consultable à la bibliothèque de la haute ecole léonard de Vinci - institut d’enseignement Supérieur parnasse-deux alice à Bruxelles.

bibliographie1. StRong S., RigBY p., SteWaRt d. et al., application of the person-

environment-occupation Model : a practical tool in canadian Journal of occupational therapy ( n°66( 3 ) juin 1999 ), pp 122-132

2. cRepeau e.B., cohn e., BoYt Schell B.a., Willard & Spackman’s occupational therapy ( 11ème édition ), philadelphia, lipincott Williams & Wilkins, 2008, 1120 p.

3. cRepeau e.B., cohn e., BoYt Schell B.a., Willard & Spackman’s occupational therapy ( 10ème édition ), philadelphia, lippincott Williams & Wilkins, 2003, 1088 p.

4. laW M., coopeR B., StRong S.et al., the person-occupation-environment model : a transactive approach in canadian Journal of occupational therapists ( n°63( 1 ) avril 1996 ), pp 9-23

5. WeStMoRland M.g., WilliaMS R., StRong SuSan et al., perspectives on work ( re )entry for persons with disabilities : implications for clinicians in Work : a Journal of prevention, assessment and Rehabilitation ( Volume 18 janvier 2002 ), pp 29-40

Quels peuvent être les rôles de l’ergothérapeute...

Page 150: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

150 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

6. association canadienne des ergothérapeutes, promouvoir l’occupation : une perspective de l’ergothérapie, ottawa, association canadienne des ergothérapeutes, 2002, 240 p.

7. JacoBS K., ergonomics for therapists ( 3ème édition ), philadelphia, Mosby elsevier, 2007, 480 p.

8. duRand M.-J., loiSel p., duRand p., le Retour thérapeuthique au travail comme une intervention de réadaptation centralisée dans le milieu de travail : description et fondements théoriques in la Revue canadienne d’ergothérapie ( n°65( 2 ) avril 1998 ), pp 72-80

9. institut de Réadaptation en déficience physique de Québec, [page consultée le 19 mai 2012], Réadaptation socioprofessionnelle, [en ligne], adresse uRl : http ://www.irdpq.qc.ca/services_clientele/programmations/adultes/integration_scolaire_professionnelle.html, dernière mise à jour inconnue

10. KennY claiRBoRne d., J.poWell n., ReYnoldS-lYnch K., ergonomics and cumulative trauma disorders : a handbook for occupational therapists, San diego, Singular publishing group, 1999, 82 p.

11. WilliaMS l., Mchugh h., SchultZ-KRohn W. et al., pedretti’s occupational therapy : practice skills for physical dysfunction ( 5ème édition ), Saint-louis ( uSa ), Mosby/elsevier, 2006, 1262 p.

12. Service public Fédéral emploi, travail et concertation sociale, [document consulté le 22 février 2012], FiFaRiM, [en ligne], adresse uRl : http ://www.emploi.belgique.be/Workarea/downloadasset.aspx?id=21338,avril 2008

13. MalchaiRe J., évaluation et prévention des risques lombaires : classification des méthodes in Médecine du travail & ergonomie ( volume XXXViii, n°2 2001 ), pp 53-66

14. institut national de Recherche et de Sécurité, [document consulté le 2 mars 2012], Méthode de prévention des troubles musculosquelettiques du membre supérieur et outils simples in documents pour le Médecin du travail n°83 3ème trimestre 2000, [en ligne], adresse uRl : http ://www.inrs.fr/inrs-pub/inrs01.nsf/inrs01_pc_view/B71399c93005335dc1256cc60045cB9B/$File/tc78.pdf, septembre 2000

15. RoY S., les interventions précoces reliées au travail dans un contexte d’uRFi, Sherbrooke ( canada ), université de Sherbrooke, document de la conférence des 19 et 20 octobre 2010, 26 pages

16. hôpital henri Mondor – Service de Médecine physique & Réadaptation ( université paris Xii ), [page consultée le 12 mars 2012], handitest, [en ligne], adresse uRl : http ://handitest.free.fr/fr_htest.htm, dernière mise à jour en 2012

Quel

s peu

vent

être

les r

ôles

de l’e

rgot

héra

peut

e...

Page 151: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012 | 151

17. eSap, [page consultée le 12 mars 2012], présentation générale du processus eSap, [en ligne], adresse uRl : http ://users.skynet.be/gravir/esapmenu.htm, dernière mise à jour inconnue

18. cinergie, [document consulté le 20 mars 2012], echocinergie n°15, [en ligne], adresse uRl : http ://www.handitrav.org/echo15/echo15.pdf, numéro de mai 2006

19. osmond ergonomics, [page consultée le 18 mars 2012], Rapid upper limb assessment, [en ligne], adresse uRl : http ://www.rula.co.uk, dernière mise à jour inconnue

20. institut national de Recherche et de Sécurité, [page consultée le 20 février 2012], Santé et Sécurité au travail, [en ligne], adresse uRl : http ://www.inrs.fr/accueil.html, dernière mise à jour inconnue

21. centre canadien d’hygiène et de sécurité au travail, [page consultée le 17 mars 2012], évaluation des facteurs de manutentions pertinents, [en ligne], adresse uRl : http ://www.cchst.ca/oshanswers/ergonomics/niosh/assessing.html, dernière mise à jour le 31 octobre 2002

22. cRaM alsace-Moselle, [page consultée le 22 février 2012], outils d’évaluation du risque, [en ligne], adresse uRl : http ://www.cram-alsace-moselle.fr/prevent/doc/docana.htm, dernière mise à jour inconnue

Quels peuvent être les rôles de l’ergothérapeute...

Page 152: Recueil annuel d’e RgothéRapie 2012 | 1

152 | Recueil annuel d’eRgothéRapie 2012

APPEl à AutEuRle recueil 2012 à peine dans vos mains, nous travaillons déjà sur l’édition 2013.

Et pourquoi pas vous ?Malgré le grand nombre de riches pratiques ergothérapeutiques

mises en place en Belgique, il est dommage de constater que trop peu d’entre elles sont exposées dans la littérature.

Suite à ce constat, l’association veut encourager à sa façon tous les ergothérapeutes qui prennent le temps de mettre

par écrit leurs pratiques, enquêtes ou études.

un article publié = une affiliation d’un an à l’AE

et ainsi bénéficier de tous les avantages de l’ae. Vous retrouverez sur notre site www.ergo-ae.be

toutes les informations nécessaires en vue de participer, à votre façon, à ce projet Rae 2013.

Contactez : [email protected]

APPEl à lECtEuRen vue de notre future publication, nous recherchons également des ergothérapeutes qui pourraient relire

les textes produits par les auteurs.

en tant que relecteur-correcteur, vous assisterez le rédacteur ( par e-mail ) dans la relecture des contenus produits par les auteurs.

Vous veillerez ainsi à la qualité orthographique, syntaxique et typographique des textes. Vous serez amené à faire preuve

d’autonomie pour la vérification, sur le fond comme sur la forme, des articles proposés.

Contactez : [email protected]