2
424 Correspondance R6flexions sur I'article de P. Boyer et G. Hebuterne intituld : RELATIONS DE CONSERVATION POUR UNE FILE D'ATTENTE AVEC DES CLIENTS IMPATIENTS, (Annales des Tdldcommunications, mai-juin 1983, 38, n ~ 5-6, pp. 226-230) par P. LE GALL (CNET, DICET, AIN) 1. LE PROBLEME La lecture de l'article de MM. Boyer et Hebuterne est int6ressante sur un plan d'initiation th6orique ~t l'6tude d'un seul serveur, bien que les r6f6rences soient restreintes et r6centes. Le probl6me des queues avec impatience est en fait tr~s important en ing6nierie du trafic de t616communi- cation. I1 est consid6r6 d6j~t depuis une cinquantaine d'ann6es, et toute son importance apparut vers les ann6es 60, lors de la g6n6ralisation de l'exploitation interurbaine automatique. Afin d'6viter des prises d'organes de commande de dur6es anormales dues ~t des d6rangements ou des surcharges en trafic, c'est en effet une r6elle n6cessit6 que d'introduire des temporisations contr6- lant les attentes, se traduisant finalement par l'6mission de la tonalit6 d'occupation vers l'abonn6 demandeur pour le forcer ~ abandonner, ou 6ventuellement d'une annonce parl6e l'invitant ~t refaire son appel ult6rieu- rement. 2. LES I~TUDES Toutefois, les probl6mes pos6s par la r6alit6 tech- nique ne concernent pas un serveur, mais plusieurs serveurs. La difficult6 de l'6tude est beaucoup plus grande, et nous pensons utile d'indiquer les r6f6rences des principales 6tudes connues par les ing6nieurs du trafic. Elles supposent des arrivdes poissonniennes, car c'est la loi consid6r6e habituellement comme la plus r6aliste, et des durdes de service exponentielles, hypoth6se choisie pour la commodit6 des calculs, bien que peu r6aliste. 2.3 Cas GI/G/s (*) et impatience g6n6rale. En fair, on a g6n6ralement utilis6 une horloge unique telle que la dur6e de l'impatience est al6atoire- ment et uniform6ment r6partie entre deux valeurs fixes. Par exemple, les ing6nieurs <~ commutants )) ont l'habitude de dire que l'attente tombe sous le contr61e de la << came 15s-30s >>, dans le cas o/a ces deux valeurs limites sont respectivement 15 et 30 s. La difficult6 de l'6tude est alors la m~me que dans le cas d'une fonction de r6partition quelconque pour la dur6e al6atoire d'impatience. Les 6quations du processus dans le cas GI/G/s ont 6t6 6crites en 1962 par F. Pollaczek [7], mais elles ne sont pas encore r6solues, d'o~ un centre d'int6rSt pour les jeunes chercheurs. 3. L'EXP~RIENCE La th6orie ne donnant finalement pas les moyens de travail n6cessaires, l'ing6nieur s'est tourn6 vers l'observation des appels rejet6s par cette impatience. C'est que les << disciplines >> de queues r6ellement utilis6es sont complexes et le trafic est particuli6rement instable dans les 6quipements communs de commande : le trafic r6el est << vivant >~, suivant la terminologie anglaise. Le param6tre global g6n6ralement observ6 est celui (compl6mentaire) donnant la proportion d'appels tax6s (r6ception du signal de r6ponse), sommant tousles cas de r6ussite. I1 est utilis6 par l'Administra- tion frangaise sous le nora de taux d'efficacit6 et, peu ~t peu, est utilis6 par les autres Administrations sous des noms divers : taux de r6ponse, taux d'aboutis- sement. 2.1. Impatience de dur6e exponentielle 4. LA RECHERCHE Ce cas fut pos6 b. l'origine par les 6tudes d'attente de tonalitd d'invitation ~t num6roter : cf. [1, 2] et [3]. 2.2 Impatience de dur6e constante Nous esp6rons que ces brefs commentaires peuvent ~tre utiles pour orienter les esprits de jeunes chercheurs en ing6nierie de trafic, et pour les documenter. L'introduction de temporisations propres ~ certains organes de commande a donn6 lieu aussi ~t des 6tudes assez anciennes : cf. [4, 5 et 6]. (*) Cette notation habituelle, due ~t Kendall, d6signe le cas de s serveurs, recevant un processus d'arriv6es r6g6n6ratives g6n6ral (GI : General Input) et les dur6es de service ob6issant une loi g6n6rale. ANN. TI~LI~COMMUN., 38, n ~ 9-10, 1983 1/2

Réflexions sur l’article de P. Boyer et G. Hebuterne intitulé: « Relations de conservation pour une file d’attente avec des clients impatients » (Annales des Télécommunications,

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Réflexions sur l’article de P. Boyer et G. Hebuterne intitulé: « Relations de conservation pour une file d’attente avec des clients impatients » (Annales des Télécommunications,

424

Correspondance R 6 f l e x i o n s sur I ' a r t ic le

de P. B o y e r e t G. H e b u t e r n e in t i tu ld :

RELATIONS DE CONSERVATION POUR UNE FILE D'ATTENTE AVEC DES CLIENTS IMPATIENTS,

(Annales des Tdldcommunications, mai-juin 1983, 38, n ~ 5-6, pp. 226-230)

par P. LE G A L L (CNET, DICET, AIN)

1. LE PROBLEME

La lecture de l 'art icle de MM. Boyer et Hebuterne est int6ressante sur un plan d ' ini t iat ion th6orique ~t l '6tude d ' un seul serveur, bien que les r6f6rences soient restreintes et r6centes.

Le probl6me des queues avec impatience est en fait tr~s impor tan t en ing6nierie du trafic de t616communi- cation. I1 est consid6r6 d6j~t depuis une cinquantaine d'ann6es, et toute son importance apparu t vers les ann6es 60, lors de la g6n6ralisation de l 'exploi ta t ion interurbaine automat ique.

Afin d '6viter des prises d 'organes de commande de dur6es anormales dues ~t des d6rangements ou des surcharges en trafic, c 'est en effet une r6elle n6cessit6 que d ' in t roduire des temporisat ions contr6- lant les attentes, se t raduisant finalement par l '6mission de la tonalit6 d 'occupa t ion vers l ' abonn6 demandeur pour le forcer ~ abandonner , ou 6ventuellement d 'une annonce parl6e l ' invi tant ~t refaire son appel ult6rieu- rement.

2. LES I~TUDES

Toutefois, les probl6mes pos6s par la r6alit6 tech- nique ne concernent pas un serveur, mais plusieurs serveurs. La difficult6 de l '6tude est beaucoup plus grande, et nous pensons utile d ' indiquer les r6f6rences des principales 6tudes connues par les ing6nieurs du trafic. Elles supposent des arrivdes poissonniennes, car c 'est la loi consid6r6e habituellement comme la plus r6aliste, et des durdes de service exponentielles, hypoth6se choisie pour la commodit6 des calculs, bien que peu r6aliste.

2.3 Cas GI/G/s (*) et impatience g6n6rale.

En fair, on a g6n6ralement utilis6 une horloge unique telle que la dur6e de l ' impatience est al6atoire- ment et uniform6ment r6partie entre deux valeurs fixes. Par exemple, les ing6nieurs <~ commutants )) ont l 'habitude de dire que l 'a t tente tombe sous le contr61e de la << came 15s-30s >>, dans le cas o/a ces deux valeurs limites sont respectivement 15 et 30 s.

La difficult6 de l '6tude est alors la m~me que dans le cas d 'une fonct ion de r6parti t ion quelconque pour la dur6e al6atoire d ' impat ience . Les 6quations du processus dans le cas G I / G / s ont 6t6 6crites en 1962 par F. Pollaczek [7], mais elles ne sont pas encore r6solues, d 'o~ un centre d'int6rSt pour les jeunes chercheurs.

3. L ' E X P ~ R I E N C E

La th6orie ne donnan t finalement pas les moyens de travail n6cessaires, l ' ing6nieur s 'est tourn6 vers l 'observat ion des appels rejet6s par cette impatience. C 'es t que les << disciplines >> de queues r6ellement utilis6es sont complexes et le trafic est particuli6rement instable dans les 6quipements communs de commande : le trafic r6el est << vivant >~, suivant la terminologie anglaise.

Le param6tre global g6n6ralement observ6 est celui (compl6mentaire) donnan t la proport ion d 'appels tax6s (r6ception du signal de r6ponse), sommant tous le s cas de r6ussite. I1 est utilis6 par l 'Administra- tion frangaise sous le nora de taux d'efficacit6 et, peu ~t peu, est utilis6 pa r les autres Administrations sous des noms divers : taux de r6ponse, taux d 'about is- sement.

2.1. Impatience de dur6e exponentielle 4. LA RECHERCHE

Ce cas fut pos6 b. l 'or igine par les 6tudes d'attente de tonalitd d ' invi ta t ion ~t num6roter : cf. [1, 2] et [3].

2.2 Impatience de dur6e constante

Nous esp6rons que ces brefs commentaires peuvent ~tre utiles pour orienter les esprits de jeunes chercheurs en ing6nierie de trafic, et pour les documenter.

L' in t roduct ion de temporisat ions propres ~ certains organes de c o m m a n d e a donn6 lieu aussi ~t des 6tudes assez anciennes : cf. [4, 5 et 6].

(*) Cette notation habituelle, due ~t Kendall, d6signe le cas de s serveurs, recevant un processus d'arriv6es r6g6n6ratives g6n6ral (GI : General Input) et les dur6es de service ob6issant

une loi g6n6rale.

ANN. TI~LI~COMMUN., 38, n ~ 9-10, 1983 1/2

Page 2: Réflexions sur l’article de P. Boyer et G. Hebuterne intitulé: « Relations de conservation pour une file d’attente avec des clients impatients » (Annales des Télécommunications,

CORRESPONDANCE 425

BIBLIOGRAPHIE

[1] PALM (C.). Etude des d61ais d'attente. Ericsson Technics, Stockholm (1937), 5, n ~ 2, pp. 39-56.

[2] PALM (C.). Research on telephone traffic carried by full availability groups. Tele (6dition anglaise), Su6de (1957), n ~ 1, pp. 1-107.

[3] CLOS (C.), WILKINSON (R. I.). Dialing habits of telephone customers. Bell. Syst. tech. J., USA (1952), 31, pp. 32-67.

[4] ST6RMER (H.). Archiv d'elektr. Uebertragung (1956), 10, pp. 58-64.

[51 BARRER (D. Y.). Queueing with impatient customers and indifferent clerks. Opns. Research, USA (1957), 5, pp. 644- 649.

16] BARRER (D. Y.). Queueing with impatient customers and ordered service. Opns Research., USA (1957), 5, pp. 650-656.

[7] POLLACZEK (F.). SHF une th6orie unifi6e des probl6mes stochastiques soulev6s par l'encombrement d'un faisceau parfait de lignes t616phoniques. C. R. Acad. Sci., Fr. (4 juin 1962), pp. 3965-3967.

REPONSE DES AUTEURS

Les remarques de M. Le Gall nous incitent /l pr6ciser quelques points de d6tail concernant l 'article pr6cit6, qui nous semblent de nature/~ clarifier le d6bat.

1) I1 ne faut pas donner / l l 'article plus d ' importance qu' i l n 'en veut avoir. Ce n 'es t absolument pas une synthbse sur le probl~me des files avec impatience. I1 ne s 'agissait pour nous que d '6tendre la validit6 de r6sultats ant6rieurs au cas de lois d'arriv6es g6n6- rales, en mont ran t la puissance et la simplicit6 d 'une approche rdgdndrative ; il va de sol dans ces conditions que la bibliographie, qui ne concerne que le contenu de l 'article, est forc6ment tr6s incompl6te. N6anmoins, la r6f6rence [BaH 81] de l 'article donne des 616ments bibliographiques assez complets (les r6f6rences [6] et [7] de M. Le Gall y sont cit6es). Signalons 6galement pour compl6ter l 'ouvrage classique de Syski [Sys 60], qui analyse assez compl6tement les t ravaux ant6rieurs /t 1960.

2) C o m m e le dit for t jus tement M. Le Gall, le probl6me de l ' impat ience est tr6s impor tant en ing6- nierie du t616trafic. I1 n 'emp~che qu' i l n ' a jamais vraiment 6t6 abord6 (sauf peut-~tre dans l '6tude de St6rmer, r6f6rence [4] ). I1 est significatif/t cet 6gard de constater que le Congr6s de T616trafic n ' a jamais accueilli une seule communica t ion sur le sujet (h la connaissance des auteurs tout au moins). L 'ensemble des r6f6rences cit6es par M. Le Gall et nous-m~mes (soit 15 articles) repr6sente probablement un inven- taire exhaustif de la b i b l i o g r a p h i e : soit environ un article t o u s l e s trois ans !

C 'es t assez dire q u ' o n est en pr6sence d 'un domaine d '6tude difficile, mSme en voulant se limiter/~ la file /t un serveur.

3) Faut-il 6tudier un syst6me /~ un ou /t plusieurs serveurs ? Dans le cas d ' une file /t s > 1 serveurs, il faudra en prat ique venir au cas simplifi6 d'arriv6es poissonniennes et de lois de service exponentielles.

Pr~cisons qu ' i l s 'agit de lois simplifi6es, q u ' o n ne peut justifier autrement que par les r6sultats qu'elles autorisent. L '&ude du syst6me markovien h s serveurs et loi d ' impat ience gkndrale a 6t6 faite enti6rement (au plan des temps d 'a t tente et du rejet) dans la r6f6rence [BaH 81], ofz est 6galement 6voqu6e une applicat ion h u n probl6me r6el de t616trafic (fonction- nement d ' un PABX, et attente devant les op6ratrices) ; signalons que le m6me probl6me a 6t6 6galement r6solu, de fa~on ind6pendante, dans la r6f6rence [HaS 80], dont nous n ' avons pris connaissance que tr6s r6cemment. I1 nous semble qu ' i l y a 1/t le premier r6sultat impor tan t depuis ceux de St6rmer : la raise en 6quation de Pollaczek [7] est une impasse au plan de l 'ing6nierie du trafic.

Pour le cas h u n seul serveur, on peut au moins rel~cher l 'hypoth6se de lois de service exponentielles : voir [BaH 81]. Est-ce une &ude utile ? Pour notre part , notre r6ponse est affirmative bien stir. Remar- quons q u ' u n livre d 'environ 700 pages a 6t6 consacr6

la file ~ un serveur (<< The single server queue >> par J. W. Cohen). Le t616trafic ne se r6duit pas au probl6me (tr6s important) du calcul des faisceaux ou d 'o rganes communs. Les probl6mes pos6s par les architectures d ' au tocommuta teu r s modernes, par les protocoles de transmission (HDLC, CCITT n ~ 7, etc.) aboutissent naturellement /t des mod61es de files h un serveur, avec clients impatients (impatience humaine, temporisation).

I1 reste n6anmoins que le t ra i tement de la file h s serveurs, /l lois d 'arriv6e et de service g6n6rales (GI /G/s , dans la notat ion consacr6e) avec impatience g6n6rale reste /t faire, et que l ' explora t ion du cas s = 1 ne donne pas d ' a rme pour l ' aborder . D 'au t res m6thodes seraient n6cessaires, qui d 'ai l leurs r6sou- draient le probl~me <r plus simple >> de la file G I / G / s sans impatience.. .

BIBLIOGRAPHIE

[BaH 81] BACCELLI (F.), HEBUTERNE (G.). On queues with impatient customers Performance 81. North Holland Ed, Amsterdam (1981).

[HaS 80] HAUGEN (R. B.), SKOGAN (E.). Queueing system with

stochastic timeouts. IEEE Trans. COM, USA (1980), 28, n ~ 12, pp. 1984-1989.

[SYS 60] SYSK[ (R.). Introduction to congestion theory in telephone systems. Oliver and Boyd, London (1960).

2/2 ANN. T~L~COMMUN., 38, n ~ 9-10, 1983