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Résumédel’acteIV:
Àlasuited’unenouvellescènedejalousieetsouslecharmed’AndrewBlake,Katdécidedemettreun terme à sa relation avec Dan. Sa correspondance avec l’inconnu s’intensifie, leurs confidencesdevenantdeplusenplusintimes.
Intriguée par le personnage d’Andrew et inquiète des informations queGregory lui donne sur sasécurité, Kat voit ses automatismes de journaliste remonter à la surface et elle décide de mener desrecherches sur la femme d’Andrew, décédée dans un accident de voiture. Elle comprend alors quefréquenterunhommeaussipuissantqu’AndrewBlakepeutêtrecompliquéàgérer.
CHAPITRE19
Àmonretourchezmoi,jedécidaideremiserledossierEleanorBlake.Aprèsréflexion,j’enavaisfinalement conclu que c’était lemystère autour de sa personnalité quime dérangeait dansma relationavecAndrew.Jeluiavaisexplicitementdemandédenepass’appesantirsurlepassé,jenepouvaisdoncvraimentpasmepermettredemenerunecontre-enquête…Surtoutsurunaccidentdelaroute.
Lasemainesepassarapidement,rythméeparlescoupsdefilquotidiensd’Andrew.Ilavaitemployéles grands moyens – livraison d’une trentaine de roses, suppliques, menaces et promesse du collierassortiàmesbouclesd’oreilles–,maisjerefusaideluiavouerquoiquecesoit.
La semaine suivante, je signai, en compagnie de Philip, l’achat demon appartement.MalgrémarécentequerelleavecLynne,nouspassâmes lasoiréeensembleàdiscuteressentiellementdesdernierspréparatifs du mariage. J’en profitai pour la prévenir qu’Andrew souhaitait m’y accompagner. Elleacceptaaussitôt,serefusantàtoutcommentairehasardeux.
Monaménagementdevaitavoirlieuleweek-endprécédantlaréceptionàSanFrancisco.Aussi,jecommençais à empaqueter mes affaires. Alors que j’attaquai un second carton de livres, Andrewm’appela.Jem’assisàmêmelesol,calantmondoscontreundesmursdemachambre.
–Bonsoir,Kathleen,murmura-t-il.–Bonsoir,commentvas-tu?–Jecomptelesjours.Jediraismêmequejecomptelesheures.–Moiaussi.Quefais-tu?l’interrogeai-jeenentendantdumouvementdanslecombiné.–Mavalise.UndéplacementàSacramentopourfinaliserunetransaction.–Net’arrêtes-tudoncjamais?m’exaspérai-je.–Oh…Voilàuneconversationintéressante.L’impactdemonmétiersurmaviequotidienne…–Cen’estpascequejevoulaisdire!–Quevoulais-tudirealors?–Je…Rien…Quetutravaillesbeaucoup…C’esttout.Çadoitêtre…épuisant,bégayai-je.–C’estmonmétieretjel’aimeprofondément.Maissijedevaischoisirentremonmétierettoi,ça
seraittoi,Kathleen.–Andrew…,murmurai-je,cen’estpascequejevoulaisdire.Même à moi, ma voix me parut incertaine. Évidemment, le sujet des déplacements d’Andrew
m’avaitplusieursfoiseffleurél’esprit.Àvraidire,jem’étaismêmeréellementinterrogéesurlerythmedesavieprofessionnelleaprèsavoirluetrelul’interviewd’Eleanor.J’avaisdesdoutessurmacapacitéàfairefaceàsesabsencesrépétées.
–Sijemepermetsautantdedéplacements,c’estparcequejen’aipersonnequim’attend,avoua-t-ilfinalement.Maisquandtutedéciderasàvenirvivreici,jechangeraisûrementmeshabitudes.
–Quand«jemedéciderai»?répétai-je,stupéfaite.–L’hommedetavieapprécieraitsûrementquetuquittesNewYorkpourêtreàsescôtés!–«L’hommedemavie»?Cetteconversationmesemblaitdeplusenplussurréaliste–vivreavecAndrewBlakemesemblait
encoreirréel–etj’avaisbesoindesavoiroùjemettaislespieds.–Andrew, tu n’es pas sans savoir que ce poste a été assez convoité dernièrement,me repris-je.
Malheureusement,jenevoispasquipourraitdécemmentarriveràlachevilledemonpère!–Hum…Est-ceundéfi,Kathleen?–Justeuneconstatation.Monpèreestunhommejuste,droitetfidèleàsesprincipes.Jedoutequ’il
melaissefréquenterunhommedontlesintentionssontdouteuses.–Douteuses?Mesintentionssonttoutcequ’ilyadeplussincère!s’offusqua-t-ilenriant.–Jenecroispas,souris-je.–Jeneveuxquetonbonheur,chuchota-t-il.Etsijepeuxœuvreràça,alorsjeseraisleplusheureux
deshommes.Mais…touteplaisanteriemiseàpart,j’aimeraisquetuenvisagesl’idéed’êtreàmescôtés.Constamment,jeveuxdire,etpasseulementquandjeviensàNewYork.
–Andrew…C’estunpeu…–Prématuré…Jesais,jesais.Cetteconversationl’estaussiàvraidire.–Cen’estpasmoiquiailancélesujet,medéfendis-je.–C’est vrai.Et peut-être que tout cela te semblevraiment précipité…Mais je veux juste que tu
comprennesquemesintentionsnesontpas…douteuses.Jedevinai la traced’un souriredans sadernièrephrase et souris àmon tour. Jedevais admettre
qu’ilavaitsuamenerlesujet.Notrerelationseconstruisaitàdistance,pour lemoment,mais jesavaisquej’envoudraisplus.
–Jevaisyréfléchir,soufflai-je.–D’accord.Lapointededéceptiondanssavoixnem’échappapas.Maisprendredesdécisionssiimportantes
pourlui,commepourmoi,nes’improvisaitpas.–Jet’aurais…àl’usure,commed’habitude,ajouta-t-ilaprèsuncourtsilence.–Toujoursaussiprésomptueux,monsieurBlake.–Jegagnetoujours,Kathleen.Et rienqu’aveccettephrase, jeme sentis fondre. Il avait raison, il gagnait toujours, surtout avec
moi.Ilyeutunpetitsilencegênéetjemedécidaiàreprendrelaparolepourchassercetteconversation:–TuvasàSacramento,donc?–TroisjoursàSacramento,puisretourici,etensuiteNewYork.–MonDieu,maistupassestontempsàfaireetàdéfairetonsac?–Pasvraiment…J’aitoujoursunevalisedeprête.EtLucindafaitensortequejenemanquederien.–Lucinda?–Ma…Monemployéedemaison,sourit-il.Ditcommeça,çafaitvraimentsnob!plaisanta-t-il.–Parcequeçal’est.Etdonc,cettefemmefaittesvalises?–Etmesdîners,ainsiquelalessiveetl’intendancedemanièregénérale.C’estunpeu…lafemme
demavie,finalement.–Oh…Serait-ceundéfi?–Tuesintéressée?seréjouit-il.
– Je réfléchis…Te faire la cuisine, repasser tes chemises, préparer tes dîners… Je ne sais pas,pourrais-jeêtreàlahauteurdecetteLucinda?
–Taseuleprésenceicisuffirait.Tupourraisresterici,avachiesurlecanapé,quecelameferaitleplusgranddesplaisirs.
–Jepréfèrelire…–Aucunsouci.Jeteferaiconstruireunebibliothèque,riposta-t-ilaussitôt.Jejetaiunœilàmoncartondelivresenretenantunrire.Cethommeneconnaissaitaucunelimite.–Pourrons-nousavoirlasuitedecetteconversationdansunesemaine?demanda-t-ilavecsérieux.–Laconversationsurlabibliothèque?–Non…La conversation te concernant avachie surmon canapé, possiblement nue, évidemment,
compléta-t-il.–Évidemment.Biensûr,parlons-enpendantlasoiréequejetedois.–Parfait!–Etn’oubliepasquesicettesoiréen’estpassatisfaisante,nouscesseronstouterelation.–Crois-moi,jevaismettretoutmoncœuràfaireensortequecettesoiréesoitinoubliable.Ellete
hanterajusqu’àlafindetesjours.Je hoquetai en entendant sa voix rauque et chaude. Cette seule promesse suffisait : il y aurait
d’autressoirées.–Jedoisfinirmonsac,jet’embrasse.–Jet’embrasseaussi.Prendssoindetoi.–Jecomptesurtoipourça.Etjeneparlepasqued’intendance,murmura-t-ild’unevoixchaudeet
profonde.–Oh…Vraiment?Jepensequetuenattendsbeaucoupdemoi,Andrew.–Pourlemoment,tunem’asjamaisdéçu.Tudemeuresl’exceptiondansmavie.Je ne pus m’empêcher de sourire, conquise par cet homme. Toutes mes maigres tentatives pour
paraîtrehermétiqueàcesmarquesd’attentiondisparaissaientenuneseulephrase.–Nousreprendronscetteconversationentêteàtête.Jedoisvraimenttelaissermaintenant.–BonvoyageàSacramento.Jeraccrochai,secouantlatêted’incrédulité.Aucunelimite,c’étaitabsolumentcertain.Oualors,il
prenaitunmalinplaisiràleseffaceruneàuneetàm’entraîneravecluisuruncheminquejenemaîtrisaispas.
Jereprismoncartonetl’imaginaiseuldanssachambreentraindefairesonsac.Unsourires’étirasurmonvisage.Laperspectived’êtreprèsdelui,danscesmoments-là,paraissaitagréable.Nousaurionspuparler,plaisanter,partagerunmomentensemble.
Fairesondîner.M’avachirdanssoncanapé.Dormirdanssonlit.Riendetoutçanemesemblaitniimpossiblenidangereux.Aucontraire,cesimagesprovoquaient
cettesourdeetpétillanteexcitation.Monventresetorditetj’empilaimeslivresensouriantencoreplus.Ilavaitencoreraisonsurunpoint:ilgagnaittoujours.
Cen’estqu’enfermantlecartonquecelamefrappa.Jeretournaidanslesalon,l’espritencoreunpeu embrumé par ma conversation avec Andrew, et ressortis le rapport de police sur l’accidentd’Eleanor.J’avaischerchéuneexplicationrationnellependantdesheures,retournéleproblèmedanstouslessens,avantd’abandonner.Seulement,jen’avaispasvul’évidence.
Jeretrouvailalistedeseffetsdécouvertsdanslavoitured’Eleanor.
LesmotsdeBaileymerevinrent:Andrewarrivaitdel’aéroportaprèsdixjoursd’absence.Moncœurmanquaunbattement,et,enfin,jemerésolusàformulertouthautcequej’avaiscompris.–Ellevenaitdelequitter,murmurai-je,stupéfaite.Lespiècesdupuzzletrouvaientenfinleurplace.Jerepensaisàsoninterviewoùelledisaitàmots
couvertsquelasolitudeauseinmêmedesonmariageluipesait.Andrewétaitpartidepuisdixjours,maisquelgenred’emploidutempsavait-ileuavant?Eleanoravaitdûsesentirmiseàl’écartetseule.
J’épluchailerapportdepolicedenouveau,cherchantunindicesurlescausesdesafuite.L’avait-ellequittépourunautrehomme?Pourunhommequiauraitétéplusprésent?Andrew l’avaitdit lui-même:ilnecomprenaitpascequ’ellefaisaitlà.
Jefixaidenouveaulesclichésflous.Rienàfaire,onnedistinguaitriendecethomme.Aucunnomn’avaitfiltréet,pourtant,ilsemblaitavoirseshabitudesdansl’entouragedesBlake.Unproche,donc.Matêtecommençaitàbourdonner.J’étalailesdifférentspapiersausoletm’assis,lesexaminantunàunetrelisantlescomptes-rendus.
Après une heure d’analyse, je secouai la tête et dépliai mes membres engourdis. Je devais mepréparerpourallertravailler,etj’espéraisquecelam’aideraitàchasserEleanorBlakedemonesprit.
***
Àmaprisedeservice, jecomprisque lanuitneseraitpasdesplusagitées.L’hôtelétait réservéquasimententotalitépouruneconférencedecardiologie,ettouscesmédecins,généralement,nefaisaientguèred’esclandres.Alorsquejerangeaimonpupitre,jetrouvaiunenouvellelettredel’inconnudansmabannette,accompagnéed’unmot:
Lemondemoderneexiste,Kat…Lese-mailsaussi!Greg.
Jesourislargement,nonseulementàcausedelalettredel’inconnu,maisaussipourlaremarquedeGregory.C’était justement la présence du papier entremesmains, le dessin de ses lettres, l’odeur dupapierquirendaientcetterelationsitangibleetexceptionnelle.Larendreimmatérielleauraitgâchétoutelaforcedenotrelien.
Jeclassaimesdeuxdossiersetm’installaiconfortablementpourliremoncourrier:
ChèreMarie,Jesuisheureuxpourvous,heureuxquevousayeztrouvéunhommequivousmérite.Commentpouvez-vouscroirequepersonnenepuisses’intéresseràvous?Depuisledébut,jechercheàvousrencontrer…Vousrefusez,jelecomprends…Maissijetienstellementàvous,alorsquejenevousaijamaisvue,jepeuxtoutàfaitimaginerqu’unhommesoitattiréparvous.Vousavezsûrementraisonausujetdecequej’éprouvepourcettefemme.Jel’aimesûrementplusqueje ne le devrais. Elle me stupéfie un peu plus à chacune de nos conversations, elle affronte lesévénementssansjamaisselaisserabattre.Commevousledisiezdansunelettreprécédente:elleestincroyable…Etmessentimentspourellesontd’unetelleforce!Vouscroyezquejecontrôlelasituationalorsquec’estabsolumentfaux.Ellemecontrôle.Elleestcellequim’indiqueoùjedoisaller,cequejedoisfaire.Mesmotspeuventlaisserpenserquetoutestidéalementparfaitavecelle.J’aimeraisquecelalesoit…Maisj’ailasensationquecen’estpassuffisant.Laperdreseraitmeperdre,moi.Je crois tout faire pour qu’elle comprennemon attachement…Pourtant j’ai l’horrible pressentimentquel’aimernesuffirapasàlagarderprèsdemoi.Vous rappelez-vous quand vous m’avez parlé du destin, avoir mentionné ces « signes invisibles » ?Croyez-moi,ilsnesontpassiinvisiblesetilssurpassentn’importequelsentiment.Maisjel’aime,commejamaisjenecroisavoiraiméquelqu’un.Pasuniquementparcequ’ellemefaitmesentirbien,mais surtoutparcequ’ellem’acceptesans jugement, sanspréjugé.Etmalgrécequevous
pensez, je suis tourmenté… Tourmenté par toutes ces choses que je ne contrôle pas et quim’échappent…Tourmentéparsonabsence,parsavoix,parlalégèretéqu’elleapporteàmavie.Ilmetarded’avoirvotreréponse…Vouscomprendrez,sûrementmieuxquequiconque,mesdoutes.Jevousembrasse,Votreinconnu.
Jereposailalettreavecunsentimentmitigé.L’hommeàquij’écrivaisdepuismaintenantplusieurssemainesmedemandaitconseil.Etjen’avaisaucuneidéedecommentlerassurer.Jen’étaisfranchementpaslaplusaguerrieentermesderelationsamoureuses.
Toutefois,aupetitmatin,alorsquejerentraischezmoi,jem’installaisurmonlitpourluirépondre:
Cherinconnu,Votre lettre me surprend. Vousme demandez conseil alors que nous ne nous connaissons que parlettresinterposées.Parailleurs,jenesuispascertainedelapertinencedemonjugement.Vousl’aimez?Vousavezdoncrésolulaplupartdesdoutesquivousassaillent.Rien n’est plus important – plus fort que ce sentiment. Vous ne devriez pas croire en ces signesnéfastes…Ce sont ces propres signes qui vous ontmis sur sa route, cesmêmes signes qui vous ontpermisd’oubliervotrepeine.Dequoi avez-vouspeur ?Craignez-vousde laperdre, parcequ’ellenevousaimeraitpasen retour ?Craignez-vousqu’ellechanged’avisetvoustourneledos?Craignez-vousqu’unautrehommenepasseavantvous?Vous l’aimez… Vos décisions seront bonnes, parce qu’elles seront juste guidées par vos sentimentsenverselle.Leseulmoyend’apaiservoscraintesn’estpasdemeparler,maisdeluiparleràelle.Luiavez-vousditcequevousressentez?Qu’importecequevousaffrontez,vousn’êtespasseul.Vousditesqu’ellenevousjugepas,jesuisdonccertainequ’elleapprécieraquevousvousouvriezàelle.Tout va bien pourmoi. Les choses avancent. Dumoins, j’en ai l’impression. Je ne l’ai pas vu depuisquelquesjours,etilmemanquebienplusquejeneluiavoueraijamais.Jen’aipasencoredemotpourdirecequejeressenspourlui.Mais ilacetteincroyableconfianceennous,cetteassuranceennotreavenir,etcelam’aideàmeprojeter.Jecroisquevousaussi…vousdevriezvousprojeter.Parlez-lui.Marie.
Lelendemain,quandjepostaimalettreaprèsavoirlonguementhésité,j’avaisunesensationétrangeet horrible. Jem’aperçusque je n’avais pas été spécialement amicale, ni rassurantedansma réponse,alorsquec’étaitsûrementdusoutienqu’ilcherchait.
Peuimporte…Ildevait luidire.Etquelquepart,cen’étaitpasàmoidelerassurer,maisàcellequ’il aimaitde le faire.Notre relationépistolairevenaitde trouver sapremièrevraie limite :parfois,vousnepouvezpasfairedeschosesàlaplacedesautres.
***
Le reste de la semaine fut calme, tout juste mouvementé par les messages d’Andrew et nosconversationssurréalistes.Jepassaisunepartiedemesjournéesàemballermaviedansdescartons,negardant que le strict nécessaire pour mes derniers jours dans cet appartement. Le jour de l’arrivéed’Andrew,jeprisletempsdetoutnettoyerdefondencombleetdefairedescourses.
D’après Eleanor, Andrew ne savait pas cuisiner… J’avais donc décidé de lui apprendre et desavourerunedesraresoccasionsd’observerAndrewdansundomainequ’ilnemaîtrisaitpas.Jejubilaisd’avance. Pourtant, un coup de fil deNathanme sortit demes pensées heureuses.Après les banalitésd’usage,jedétectaiunchangementdetondanssavoix.
–Kat,avez-vousparlédecettesoiréeàquelqu’un?Mêmedemanièreévasive?
–Nathan, tout est souscontrôle, souris-je faceà sonquasi-affolement.Que sepasse-t-il ?Est-cequ’Andrewvabien?
–Ilestdansl’avion.Promettez-moidenepasluidirequej’aiappelé!–Nathan!râlai-jepourlaforme.–Promettez-moi,Kat,répéta-t-ilavechargne.–Nathan,ouvousmeditescequ’ilsepasse,oueffectivementjerisquedefairepartdecetappelà
Andrew.Je l’entendis soupirer et devinai que la situation n’était pas si légère que je le supposais. Je
m’installaidansmoncanapéetencourageaiNathanàmeparler.–Kat…C’estassezcompliquéàvraidire.–Jepensepouvoirsuivre,sifflai-je,mécontente.–Quelqu’unsaitpourAndrew…Enfinpourvousdeux.–JecroyaisqueLaurenétaitàl’originedesfuites!Mentalement,j’entamaiunelistedetouteslespersonnesaucourantdemarelationavecAndrew:
Lynne,Gregory,Maria,Daniel, Philip…Certaines personnes de l’hôtel devaient aussi le savoir, sanscompterAngelabiensûr,Perkinsquidevaitavoirdesdoutes…
–Maisjecroyaisquelecommuniquédepresseavaitcalmélesjournalistes?m’exclamai-je.–Eneffet…Cenesontpaslesjournalistesquinousinquiètent.Kat…ilfautquevouscompreniez
qu’Andrewn’estpas…M.Tout-le-monde.Saréussiteneplaîtpas,sonambitionattiselesjalousieset…–Ilaétémenacé?demandai-jeavecunevoixterne.– Oui. Et vous aussi. Ce qui nous inquiète réellement. Les menaces sont vraiment violentes et,
malgrétousnosefforts,impossibledelocaliserletypederrièretoutça.–Violentesàquelpoint?soufflai-je,lapeurmesaisissantlentement.– Très violentes. Cela arrive parfois, mais cette fois c’est vraiment différent. Quelqu’un sait…
beaucoupdechoses,desdétailspresqueintimes.–Comme?–CommelefaitquevousameniezlecaféàAndrewdanssasuite,commevotresoiréeauthéâtre…Autant l’idée que quelqu’un sache que j’apportais son café à Andrew ne me dérangeait pas
vraiment, autant le fait que cettemêmepersonne soit au courant des soirées impromptuesm’inquiétaitréellement.Celarelevaitdenotrerelation,denotrehistoireintime,secrèteetcachée.
Toucheràça,salirça,c’étaitécœurant.–CommentvaAndrew?m’enquis-jeavecinquiétude.–Ilapeurpourvousmaispaspourlui,ilesthabitué,enfaitilcraintsurtoutvotreréaction.–Jeprésumequec’estpourçaqu’ilnem’enapasparlé!conclus-jeavecamertume.– Possible…Mais je crois qu’il voulait surtout vous protéger de tout ça… Et nous cherchons
l’originedecesmenaces.–JeparleraiàAndrew,assurai-je.–N’enfaitesrien!Ilestvraimentinquietpourvous.Ilfaittoutcequ’ilpeutpourvouspréserver
ainsiquevotrerelation.Sivousleconfrontezsurlesujet,ilniera.–Jeneluilaisseraipaslechoix.– S’il vous plaît,Kat… Il a déjà envisagé beaucoup de solutions à votre sujet, j’ai réussi à les
écarter,neruinezpasmontravail!Andrewprétendquetoutvapourlemieux.Illefaitpourvousetparcequevouslerendezheureux.Jecomprendsquevousvousenfichiezderuinermontravail,maisneruinezpasça…PourAndrew.
LesilencesefitetjeprisconsciencequeNathanavaitraison.Jen’avaisaucuneenviedesaccagermarelationavecAndrew.
–Jefaisdemonmieux,Kat,pouridentifiercetype…Jesuiscertainquenousnousaffolonspourrien.Jevousdemandejusted’êtrelàpourAndrew.
–D’accord,soupirai-je,soudainementlasse.D’accord,jevaisjouerlejeu.Maispromettez-moidemeteniraucourants’ilsepasselamoindrechose.
–Jeleferai,Kat.Enattendant,jevousconseilled’endirelemoinspossibleàAndrew,etauxgensautourdevous.
–MêmeàLynne?tentai-jepoursonderlavéracitédesesdires.– Y compris à Lynne. Personne. Andrew arrive à New York vers 18 heures et prendra un taxi
jusqu’auPeninsula.Jenevousretienspasplus.Jedevinequevousavezmieuxàfaire.Je ris doucement, maintenant plus détendue. Curieusement, même si, de prime abord, apprendre
qu’Andrewetmoiétionsmenacésm’avaiteffrayée,j’étaismaintenantsoulagéedelesavoir.Aumoins,jesavaiscontrequoimebattre.
–CommentvaLynne?demandai-je,lesourireauxlèvres.–Auxdernièresnouvelles,plutôtbien…Sespréparatifsavancent,commenta-t-ild’unevoixterne.–Ellevousparledespréparatifsdesonmariage?–Oui…Jesuis…compréhensif.Etvouspouvezmetraiterd’idiotsivouslevoulez!–Commentfaites-vouspoursupporterça?–Voussavezcequ’ondit…Lepurgatoireavecelleestpréférableauparadissanselle…–Woah…C’estdevous?m’étonnai-je.–Non…J’aidûlireçasuruneboîtedecéréales,admit-ilenriant.Peuimporte,mêmesi jedois
resteréternellementsonami,c’estdéjà…–Elleestamoureusedevous!lecoupai-jevivement.Bonsang,Nathan,n’avez-vousaucuneforce
decaractère?C’estbienpourvotredéterminationqu’Andrewvousaembauché,non?Jeveuxdire,voussaveznégocier,décrocherdescontrats,obtenircequevousvoulezdevosclients…Etlà,vousrestezàatt…
– Lynne n’est pas un contrat. Je me fiche de perdre un contrat, mais perdre Lynne serait…dramatique.Si elle est vraiment amoureusedemoi, et jenevous cachepasque j’aimevraiment cetteprometteuseidée,alorselleviendra.
–Nat…–Findecetteconversation.Vousdevriezvousconcentrersurl’arrivéed’Andrew.Jesaisqu’ilavait
vraimenthâtedevousretrouver.–D’accord,soufflai-je,vaincue.–Bonnesoirée,Kat.Soyezprudente,surtout.–Bonnesoirée.Je raccrochai l’instant suivant et secouai la têtepour chassermespensées sombres.Nathanavait
raison : jedevaismeconcentrer surAndrew. Je jetaiun regardàmamontre.SiAndrewatterrissait à18heures,ilseraitàl’hôtelvers19heures.Celamelaissaitencoredeuxheurespourmepréparer.
Aprèsavoirprisunbainetm’êtrelittéralementlustréedelatêteauxpieds,j’enfilaiunerobenoirecourtememoulantdefaçonavantageuse.Pourl’occasion,j’avaisdécidédememettreenvaleur.MêmesiAndrew semblait se satisfaire de mon uniforme en polyester, et que son envie de me voir nue étaitrécurrente,j’avaisenvied’êtreféminine.
Je remontai mon second bas et vérifiai mon maquillage. Je plaçai les boucles d’oreilles qu’ilm’avaitoffertes.Puis,jefisuntourrapidedel’appartement,tamisantleslumièresavantdemettreunpeu
demusique.Danslacuisine,jesortislesquelquesbougieschauffe-platsquej’avais,avantdelesposersurlatablebassedemonminusculesalon.
Soudain, je me demandai si tout cela était une bonne idée. Andrew était déjà venu à monappartement,maisjeletrouvaismaintenanttropétroit,tropétriquépourlui.LasuiteduPeninsulaallaitcertainementluimanquer.Lavibrationdemonportablemesortitdemespensées.
Suisendirectiondecheztoi…A.
Mon cœur s’emballa bêtement dansma poitrine et je vérifiai une dernière fois que tout était enordre.J’ajustaimarobe,pinçaimeslèvrespourlescolorerunpeuplusetreplaçaimescheveuxsurmesépaules.
Prèsdetrenteminutesplustard,alorsquejefrottaimesmainsmoitesl’unesurl’autre,lasonneriedelaportemefitbondirducanapé.Parhabitude,jecollaimonœilaujudasetdécouvrisAndrew.Unsourire immense s’étira surmes lèvres et, tandis quemon cœur frappait dansma poitrine, j’ouvris laporte.
Àsontour,levisaged’Andrews’illuminaetildégainauneroseparfaiteetimmaculéedederrièresondos.
–Depuisletempsquejevoulaist’enapporterunemoi-même!Jem’effaçaipourlelaisserentrer,observantsasilhouettelongilignehabilléed’unjeanbrutetd’une
chemisebleueàpeinecachéeparsonhabituelcaban.Jerefermailaporteetilsetournaversmoi.–Merci,murmurai-jeenprenantlafleurdesesmains.–Maisderien,sourit-ilpendantquesonregardnaviguaitsurmoi.Tuesmagnifique.Ilfitunpasversmoi,alorsquejerestaistatufiée,colléeàlaportedemonappartement.Ilplongea
sonregarddanslemienet,trèsvite,jemeretrouvaicoincéeentresoncorpsetlaporte.–Tum’asmanqué,murmura-t-ilsurmeslèvresavantdem’embrasserdoucement.J’enroulaimesbrasautourdesanuqueetapprofondislebaiser,caressantseslèvresdemalangue.
Andrew me plaqua contre la porte, étouffant un grognement contre ma bouche, avant d’agripperfermementmes hanches. Je lâchai la rose pourme perdre dans sa chevelure, gémissant en sentant lesmainsd’Andrewdescendresurmesfesses.Ilrompitlebaisertropviteàmongoûtetsoudasonfrontaumien.
–Bonsoir,dit-ilàboutdesouffle.–Bonsoir.Il retrouvames lèvres dans un nouveau baiser passionné et brûlant.Mes gémissements devinrent
incontrôlables.Pantelante,jem’écartaideluietilposaseslèvresdansmoncou,embrassanttouteslesparties découvertes dema peau.Une de sesmains remonta le long demes flancs et jeme perdis denouveau,noyéedansl’enviedesoncorpscontrelemien.Jebasculailatêteenarrière,mefaisantpresquemal,pendantquelabouched’Andrewcaressaitlehautdemapoitrine.
–Andrew,murmurai-je,lesjambesflageolantes.Ses lèvres firent le chemin inverse, embrassantmon cou, puismonmenton avant d’effleurermes
lèvres.–Répète-le,m’ordonna-t-ilenpressantmesfessesdanssesmains.–Andrew,soufflai-jedenouveauensoutenantsonregard.Il ferma les yeux brièvement et quand il les rouvrit, j’y trouvai la lueur sombre du désir. Ilme
voulait. Ses mains remontèrent dans mon dos et il se recula un peu, créant un vide minuscule maispourtantinsoutenable.
–Tum’asmanquéaussi,avouai-jedansunsourire.
Jeposaiunemainsursontorseavantd’ycalermatêtepourquémanderuneétreinte.Ilmeserradanssesbrasavecuneforceincroyableavantdeposerunchastebaisersurmonfront.
–Distrais-moi,sourit-il,avantquejenedéchirecetterobepourtesauterdessus.–Etsijenesuispasd’accord?demandai-je,unsourirecoquinsurleslèvres.– Kathleen, même si je sais que tu as programmé cette soirée, j’ai pris la libertémoi aussi de
programmercertaineschoses.–Oh…Comme?–Commefaireensortequecettenuitsoitinoubliable.Je rougisviolemment, avantdepasserdevant lui pourmedirigervers la cuisine. Ilme suivit en
silencedanslapetitepièce.Jemeplaçaidevantleplandetravail,prêteàluiexpliquercequej’attendaisde lui.Mais, soudain, il se plaça derrièremoi et attirames fesses contre son entrejambe.Son soufflechaudcaressamanuqueetunebouledechaleur intenseexplosadansmonventrequand jedevinaiseslèvresàproximitédemoncou.
–JeveuxquetoutNewYorksachequetuesàmoi,murmura-t-ilenappuyantchacundesesmotsparunfrottementexplicite.
–Garderlesilenceestdoncexclu?demandai-je,lesoufflecourt.–Jeneveuxentendrequetoi…Etcettefaçonsiparticulièrequetuasdeprononcermonprénom.
Maisavant…jemeplieàtonprogramme,annonça-t-ilenmerelâchantpourseplaceràmescôtés.Lesjouesenfeu,jeréprimailetremblementdemesmainsetinspiraifortement.–J’aiapprisquetun’étaispasungrandcuisinier,commençai-je.–Quit’adonnécegenred’information?demanda-t-ilavecsérieux.–J’aimessources.Inutile de lui préciser que j’avais lu l’interview d’Eleanor. Cette soirée ne devait être que pour
nous,etjenecomptaispasrouvrirdedossierssensiblesavantunlongmoment.–Donc,j’aipenséqu’onpourraitpréparerledînerensemble.–Tucherchesàmemettremalàl’aise?–Non…Justeàpartagerunmomentavectoi.–Encuisine?s’étonna-t-il.–Encuisine,approuvai-je.J’aienviede t’apprendrecertaineschosesetde trouver la faillechez
monpetitamiparfait.Ilsourit,incrédule,avantdesecouerlatête.Quandilrelevalesyeuxsurmoi,sérieuxetconcentré,
jesentismapoitrinesecomprimerdouloureusement.–Kathleen,c’est toimafaille.Tumerendsfaible.Laseulechosequiestparfaitechezmoi,c’est
toi…Riend’autre.Ilposaseslèvressurlesmiennes,commes’ilvoulaitscellercettepromesse.Hagarde,jem’écartai
deluietmedirigeaiversleréfrigérateur.–Quedois-jefaire?demanda-t-ilendéboutonnantlesmanchesdesachemisepourlesreplier.–Je…Euh…j’aiprévudeslinguinesaucitron.J’observai ses avant-bras tandis qu’il pliaitméticuleusement sa chemise. Il défit samontre et la
posa sur la petite table derrière lui. Je sortis de ma stupeur et tendis trois citrons à Andrew, luidemandant de les zester, de les presser et d’en filtrer le jus. Il suivitmes instructions à la lettre et jem’étonnaidesonobéissance.J’avaisespérélemettreenpositiondefaiblessecesoir,maisenfaitj’étaisplutôtadmirative.
–Tuveuxgoûter?proposai-jeenremuantlasauceaucitron.–Avecplaisir.
Jeluitendislacuillèreavecprécautionetvisunsouriremoqueurs’étirersurseslèvres.–Pascommeça.Ilmepritlacuillèredesmainsetmefitouvrirlabouche.Lasaucecoulasurmalangue,douceet
onctueuse,etAndrewposaseslèvressurlesmiennes.Salangues’insinuadansmaboucheetjetrébuchaisurmesproprespieds,faceàlaviolencedel’assaut.
–Parfait,assura-t-ilensereculanttoutaussibrutalement.Ilseléchaleslèvresavecgourmandiseetmetoisa.–Absolumentparfait.Je dressai rapidement deux assiettes et demandai à Andrew de prendre le vin qui attendait au
réfrigérateur.Ilmesuivitdanslesalon,armédelabouteilledevinblancquej’avaisréservée.J’étalaisquelquescoussinsausolavantdem’asseoirdevantlapetitetable.Andrewremplitnosverresetdéposalabouteilledansunseauàglaçonsavantdes’installeràmescôtés.
–JesaisqueçanevautpasleVesuvio,m’excusai-jependantqu’ils’installaitausol.–C’esttrèsbien,Kathleen.Vas-tumedirecequesonttouscescartons?medemanda-t-ilaprèssa
premièrebouchée.–Jedéménage.J’aiachetéunappartement.–Oh,vraiment?Celui-cineteplaisaitplus?–J’avaisbesoindeplusd’espaceetjevoulaistournerlapagesuruncertainnombredechoses.–Jenesuisdoncpasleseulàvouloirfuirmonpassé?–Jenefuispas.Jeveuxjusteoubliercettevie-là.Ilsemblaméditersurcequejevenaisdedire.Jedevinaisqu’ilseposaitdesquestionset,quelque
part,j’étaisreconnaissantequ’ilnem’interrogepasplus.–As-tupristonbilletpourdansquinzejours?–Je…oui.J’aitransmisàtonassistantemonheured’arrivée.– Une voiture t’attendra à l’aéroport. J’aimerais t’assurer que je serai là, mais les choses sont
compliquées.Je repensais à ma conversation avec Nathan, et décidai de tenter une approche espérant qu’il
s’ouvreàmoi.–Compliquéesàquelpoint?Lapressefaitencoredessiennes?–Elleestcalmée.Laplupartdesjournalistescraignentpourleurcartedepresse.Ilsneveulentpas
semettreàdosuntypequipourraitpotentiellementdevenirleurpatron.–Tucomptesracheterdestitres?demandai-je,curieuse.–J’attendsdevoirsiPowerfullfonctionnebienici.J’enaibesoinpourêtrecrédiblesurlacôteest,
expliqua-t-ilavantd’avalerunpeudesespâtes.–Donc,sicen’estpaslapresse…,commençai-jeenlaissantdélibérémentmaphraseensuspens.–Tunedevraispast’inquiéter.Jem’occupedetout.–Jeveuxsavoir,Andrew.Dois-jecraindrequelquechose?Il reposa sa fourchette et fronça les sourcils. Jeme retenais de lâcher le flot d’informations que
Nathanm’avaittransmis.Andrewpritmamaindanslasienneetlaportaàseslèvrespourl’embrasser.– Kathleen, souffla-t-il en entremêlant nos doigts, tu es… tu es… à ce jour l’élément le plus
importantdemavie.Etmaseulecrainte,c’estqu’ilt’arrivequelquechose.–Jesaisquetucherchesàmeprotéger.Jerelâchaisamainetm’approchaideluipourm’installersursesjambes.Duboutdesesdoigts,il
repoussalescheveuxquicachaientunepartiedemonvisage,avantdesoupirer.
–Jeneveuxpas…tepropulserdanscemonde.Tuestellement…loindetoutça.Jerefusedetejeterenpâtureàces…vautours,defairedetoiunecibledanscemondedefousfurieux.
–Mais…Ilagrippaunedemesjambesetm’installafaceàlui.Ilpritmonvisageentresesmainsetsesyeux
plongèrentdanslesmiensavecunerareintensité.–Jen’aipaschangéd’avissurnous,assura-t-il.Je…Jerefusedetesavoirharcelée.Tues…rare
etprécieuse,etjefaisçapournous.–Pournous?murmurai-jesanscomprendre.–Pourtoi,pourteprotéger…Etpourmoi…Sijeteperds,jemeperdsaussi.Je me figeai et sentis mon cœur tressauter dans ma poitrine. Andrew me fixait toujours,
incroyablementsincère.–Fais-moiconfiance,m’implora-t-il.J’aidéjàfait lenécessairepour…limiterlesimpactssurta
vie.Nichantmatêtedanssoncou,jesentissesmainsentourermatailleetmeserrercontrelui.Ilrespira
mon parfum. Jeme perdis volontiers dans son étreinte,m’apercevant que je lui faisais une confiancetotale.Jen’avaispasenviedereplongerdansunmondedeviolence,d’appelsanonymesetdemenacesexplicites.Danssesbras,jemesentaisàl’abridetout,dansunebullechaudeetparfaite…
Jem’écartaiunpeuetposaimabouchesurlasienne.D’abordsurpris,jesentisensuitesesdoigtss’enfoncerdansmatailleetilm’entraînaavecluisurlesoldemonsalon.Ilmefitallongersurledos,soncorpsrecouvrantlemientandisqueseslèvresbougeaientlentementcontrelesmiennes.
Denouveau,lachaleursepropageadansmoncorps,excitanttoutesmesterminaisonsnerveuses.Jetentaideprendrelecontrôledenotreétreinte,mesmainspassantdesondosàsesépaules,avantdefinirsur l’encoluredesachemise.MaisAndrewlescapturaet lescoinçaau-dessusdema têteavantdesedétacherdemeslèvres.
–Finissonscetexcellentdînerd’abord,murmura-t-ilprèsdemonoreille.Ilseredressa,melaissantausol,àboutdesouffleetlecœurtrépidant.Jemerelevaipéniblement,
luijetantunregardnoir.Ilpritsonverre,ettoutenmeregardantmeréajuster,leportaàseslèvres.Aprèsquelquesminutesdesilence,ilrepritleshostilités.
–Oùdevons-nousfinirlasoirée?demanda-t-il.–Ici.–Oh…Meferas-tuvisitertachambre?–Afindeconcrétisertesfameuxprojets?souris-jeennousresservantduvin.–Toutescespenséespeuchastesetimpuresquetuassuggéréesdernièrement.–Jen’airiensuggéré,ils’agitplutôtdetespropresconclusions.Iléclataderire,unrirejoyeuxetclairquirésonnadanstoutl’appartement.Ilrepritdespâtes,me
fixantavecunelueurd’amusementtoutenseléchantleslèvres.–J’aiunequestion,lâcha-t-ilsoudainement.–Oui?–Toutlemondet’appelleKat…Ycomprismamère,souligna-t-il.Est-cejusteréservéàuncercle
d’amisproches?– J’aime que tu m’appelles Kathleen, répondis-je en rougissant. Ça sonne… différent dans ta
bouche.Jepensequec’estéquivalentàcequeturessensquandjet’appelleAndrew.J’ail’impressiond’êtreimportante.
–Tul’es,Kathleen,confirma-t-ileninsistantvolontairementsurmonprénom.
NousfinîmesnotreplatendiscutantessentiellementdelaréceptiondeSanFrancisco.J’occultailesdétailspurementlogistiques,medoutantqu’Andrewnetenaitpasvraimentàenparler.
Jecomposailedessertencuisine,untiramisuauxfruitsrouges,quandAndrewm’yrejoignit.–Àquelleheurearriveras-tu?medemanda-t-il.–Auxenvironsde15heures,heuredeSanFrancisco.–Dois-jeprévoirunerobe?Enfinquelquechosed’habillé,précisai-jeenvoyantunsourirecoquin
naîtresurseslèvres.–Jeseraiensmoking,jedemanderaiàMeghandefairelenécessaire.–Mais…–Elleprivatiserauneboutique,ouleSheratonmettraàdispositioncequ’iltefaut.Net’enfaispas
pourça…Je soupirai, sachant que râler ne changerait rien à sa décision. Je déposai la crème dans les
verrines,meconcentrantsurmatâche.Jeréfléchissaisàtoutevitesseauximplicationsdemaprésenceàcettesoirée.Aprèsça,nousnepourrionsplusvraimentniernotrerelation.Surtoutquejen’envisageaispasd’agircommeuneamie,nid’êtreeffacée.Andrewavaitdéjàfaitmontre,enpublic,desonattirancepourmoi.
–Àquoipenses-tu?dit-il.Jesursautai,moncœurbondissantdesurprisedansmapoitrine.Ilenroulasonbrasgaucheautourde
moietposaseslèvresdansmoncou.–Àlaréception,dis-jeenreprenantmonsouffle.–Humm…Etàquoienparticulier?demanda-t-ild’unevoixchaude.–Àça,murmurai-jeenposantmamainpar-dessuslasienne,àhauteurdemonventre.À…ànotre
comportement,balbutiai-jeensentantAndrewsuçoterlapeaudemoncou.–J’essayeraidemeretenir,promit-il.Àuneconditiontoutefois.Ilquittamoncouetcalasoncorpscontrelemien.Samains’appuyasurmonventre,m’empêchant
unequelconquefuite.–Jeveuxêtrelàpourlesessayagesdetarobe.–EtMeghan?–OublieMeghan.Justetoietmoi…Notredernièreséanced’essayageétaitplutôtréussie,non?– Tu n’as pas le temps de m’accueillir à l’aéroport, mais tu as le temps de me voir en plein
essayage?raillai-je.–Lavieestunequestiondepriorité…Etdesécurité.Jen’aipaslecontrôlesurl’aéroportetsurla
sécuritélà-bas,alorsqu’àl’hôtel…C’estdifférent,conclut-il.Jeposaimesmainssurlerebordduplandetravail.Moncorpsavaitcessédem’obéiràl’instantoù
Andrewavaitposé sonbraspossessif autourdemoi.Moncerveauétait auxabonnésabsents, et ilmefallutuneconcentrationmonstrepourluirépondre.
–C’estvrai,admis-jeenpensantàl’effetdesesmainssurmapeaulorsdel’essayagedesbijouxdanssasuite.
–Etjeveuxpouvoircontrôlercequetuportes.–N’aimes-tupasmonchoixdecesoir?soufflai-je.–Si…Maisjetueraiquiconqueteverraitvêtuedelasorte.Cequiestàmoiestàmoi.Jenepartage
pas.Derrièremoi,j’entendisunbruitétrangepresquemétallique.J’échappaiuncriensentantunfrisson
meparcourir.Andrewmemaintintcontrelui,accentuantsapressionautourdemoi,pendantqu’ilfaisaitcourirunglaçonsurlehautdemonbrasnu.Surmapeauenfeu,ilfonditpresqueinstantanément.
–Cetterobeestsublime,maisdévoilebeaucoup,beaucouptropdepeau,commenta-t-il.Jehoquetai,melaissantallerdanssesbras.Lasensationdefroidnemecalmaitpas.Aucontraire,il
mesemblaitquej’avaisencorepluschaud,plusenviedeluimême.–Jerefusequ’unautrehommeposelesyeuxsurtoi…Nevois-tupascequetuprovoques?Leglaçonglissalelongdemonbras,finissantsurledosdemamain,toujourscrispéesurleplande
travail.–Andrew,murmurai-je,lesoufflecourt.–Pourtous,lorsdecettesoirée,tuserasMlleDillon…Tonprénomettoncorpsmesontréservés,
gronda-t-ilensedébarrassant,surleplandetravail,duglaçonquasimentfondu.Denouveau,jedevinaislebruitdesglaçonsdansleseauàglace,puislasensationdefroidenvahit
mesépaules.L’eauglacéecoulalelongdemacolonne,passantsousmarobe.Jegémisdoucement,avantdesentirlabouchechauded’Andrewsuivrelemêmechemin.
– Satin et soie, murmura-t-il sur ma peau. Satin, soie et moi… voilà les seules choses quej’autoriseraisurtoi.
Jegémisdenouveau,plus lourdement,matêtepesantmaintenantunetonne.Saboucheremonta lelongdemondos,traînantparesseusementsurmapeau.Sapriseautourdemataillefaiblitlégèrementetj’enprofitaipourmetournerversluietl’embrasseràenperdrehaleine.
–Satinetsoie,acquiesçai-jefinalement.–Etmoi,ajouta-t-ilenplantantsonregardcarnassierdanslemien.–Ettoi.Toujourstoi…Son glaçon toujours enmain, il le passa surmon décolleté, m’arrachant un cri de surprise. Ses
lèvressesoulevèrentdansunpetitsouriresatisfait,puisilsuivitduregardunegouttequidisparaissaitentremesseins.Sansunmot,ilposaseslèvresàlanaissancedemapoitrineetléchalatraceglacée.Jemecambrais,savourantsacaresse,bloquéecontreleplandetravail.Lentement,ilseredressaettrituralesbretellesdemarobe.
–C’estunebonnechosequetuaiesprévucettesoiréecheztoi.–Ahoui?balbutiai-je.Jesentaissonsoufflecourtetchauddansmoncou,etluilançaiunregard.–Oui.Jen’aipasspécialementenviedemecomporterengentlemanmaintenant.Aumêmeinstant,lesbretellesglissèrentsurmesavant-bras,etilfitglisserleZip–laseulechose
maintenantletissusurmoi.Larobetombaàmespiedsdansunbruissementetj’entendisAndrewgrognerenmevoyantquasimentnuedevantlui.
–Portais-tudesbassoustonuniforme?demanda-t-ild’unevoixrauque.–Je…Non…–Tuleferasmaintenant…Justepourmoi.–D’accord,monsieurBlake,soufflai-je,prêteàmesoumettreaumoindredesescaprices.Denouveau,cepetitsourireheureuxapparutsurseslèvres.–J’aitellementluttépourquetum’appellesAndrew…Maintenant,jerêvedet’entendrem’appeler
«monsieurBlake».Jesourisàmontour,satisfaitedevoirsonregardsombrenaviguersurmoncorps.Ensonabsence,
jemedemandaissouventcequ’Andrewme trouvaitmais,soussonregard, jemesentais idolâtrée.Unbruitvenantduseauàglacemesortitdematorpeur.Andrewmefixaitdroitdanslesyeuxpendantqueleglaçonapprochaitdemapeaubrûlante.Del’espaceentremesclavicules,ildescenditversmapoitrine.J’étouffaiungémissement,mepinçantleslèvrespourreteniruncri.
Quand le glaçon atteignit mon sein et son téton déjà érigé, je bougeai légèrement et soufflaibruyamment.Andrewmetorturaainside longuessecondes, laissant leglaçonfondresurmoi.Quandilrelevalesyeuxversmoi,jen’yvoyaispluslalueurd’amusement,justeledésiretl’envie.Puisilfronçalessourcils,visiblementagacéparquelquechose.Moncerveaumitquelquesinstantsàréagiravantdedétecterlasonneriedesontéléphone.
Ilreposaleglaçonprèsdemoietarrachasonportabledesapoche.Ilyjetaunœilfurtifavantdelecouperetdeleremettredanssapoche.
–C’était…C’étaitpeut-êtreurgent,balbutiai-jeenmecouvrantlapoitrinedemonbras.–Rienn’estplusurgentquetoicesoir.D’ungestevif,ilrepoussamonbrasetpressasoncorpscontremoi.Sonbassinsefrottacontrele
mien,etjedevinaiaisémentsonexcitation.–Puis-jeretirerlerestedetesvêtements?–Je…Oui…,soufflai-je,presquesoulagéedesavoirqu’ilnefaisaitpasques’amuseravecmoi.Dansune lenteurextrême, il s’agenouilladevantmoiet fitglissermonstringnoir le longdemes
jambes.Ilm’endébarrassarapidement,mefaisantleverunpied,puislesecond.Jefisglisserlehautdemonpremierbas,maisAndrewchassamesmainsetleremitenplace.
–Interdictiondelesretirersansmonaccord.–OK…,murmurai-je,décontenancéeparsontonsévère.Ilpassasamainprèsdemonintimité,mefaisantmetendreaumaximumdansl’instant.Ilcapturaun
nouveauglaçon,mefaisantgémird’anticipationet,commeill’avaitfaitavecmonpremiersein,torturalesecond. La respiration hachée, je ne savais plus si je devais lui demander d’arrêter ou de continuer.L’adrénalinecavalaitdansmoncorps,éveillanttousmesmuscles,toutesmesterminaisonsnerveuses,etquémandantAndrewcontremoi.
Ilm’embrassa avec ferveur, insinuant sa langue puissante dansmabouche. Je l’entendis grogner,tandisquel’eauglacéeparcouraitmonventre.Unebouledechaleurénormeseformaitdanslecreuxdemonestomac,etjemesentaisdéjàauborddel’implosion.Andrewquittameslèvresetsaboucheglissasurmoipourtrouvermonseinfroidethumide.
La sensation de chaud intense juste après ce froid glacial fut saisissante et je poussai un cri desurprise.Perduedansmonplaisir,accrochéeauplandetravail,jeneprisconsciencequ’aprèsplusieurssecondesqu’Andrewmeparlait.
–Donne-moitonportable,m’ordonna-t-il.–Qu…Quoi?marmonnai-jeenmeretenantdedemandersabouchedenouveausurmoi.–Tontéléphone.Donne-le-moi!Maladroitement,jerécupéraimontéléphonederrièremoietleluitendis.Denouveau,ilgrimaçaen
voyantl’appareilvibrerentresesmains.–Quelqu’uncherchevraimentànousinterrompre,râla-t-il.–Quiest-ce?m’enquis-je.–Personne.Etpours’assurerquejen’iraispasvérifier,iljetamonportabledansleseauàglaçonsderrièrelui,
noyantainsilecorrespondantquicherchaitàmejoindre.–Andrew!m’offusquai-je.C’estpeut-êtreimportant.–Tueslaseulechosequim’importecesoir…Ilmesemblaitavoirétéclairsurcepoint,répondit-
ilens’agenouillantdevantmoi.Ilmelançaunregardsombre,presquesévère.Jerougissaisviolemmentensentantsesyeuxbrûler
mapeauets’attardersurmonentrejambe.Ilfronçalessourcilsetseléchaleslèvres.
–Mais…Maisc’estpeut-êtreunproblème…unproblèmegrave,enchéris-je.Mavoixs’éteignitensentantsesmainsparcourirmapeau.Ilcaressamescuissesets’approchaun
peuplusdemoi.Ilglissasongenoudemanièreautoritaireentremesjambespourlesécarter.Sonregards’attardasurmescuisses,puisremontalentementversmonintimité.Il levalatêteversmoietjesentismonexcitations’intensifier.
–Demain, tu pars avecmoi, affirma-t-il avec autorité, tout en enroulant ses bras autour demescuisses.
–Andrew,murmurai-je,jenepeuxpas.J’ai…Enfin…Çava…poser…problème,bégayai-jealorsquesescheveuxcaressaientmonbas-ventre.
–Problème?Detoutefaçon,iln’yaquepeudeproblèmesqu’unorgasmenepeutrésoudre,lança-t-ilavantderécupérerunglaçonetdelemettredanssabouche.
–Qu…Quoi?balbutiai-jeavantdelaisseréchapperungémissement.Mesyeuxfixèrentl’espaced’uninstantlatêted’Andrewnichéeentremescuisses,puisjebasculai
lamienneenarrièreenhaletant.Sa languepassa surmonsexeet j’écartaiunpeuplus les jambes.Lasensation de froid sur mon intimité brûlante m’arracha un cri et je lâchai le plan de travail pourm’agripperàsescheveux.
Andrew raffermit sa prise autour de mes cuisses et, dans un grognement, me lécha de nouveau,s’insinuantpour trouvermonclitoris. Il y appliqua leglaçon, etunevaguedeplaisir s’abattit surmoidansuneviolenceindescriptible.
Sesmainsbougeaientsurmoi,nemelaissantaucunepossibilitédeluiéchapper.Jemurmuraisonnom,commeunesupplique,espérantqu’ilm’entende.Maisàl’inverse,salangueredoublaitd’effortsetme faisait l’amour. Je relevai la jambe, cherchant un équilibre précaire avant de me repositionner.Andrew, sansme lâcher, profita de cemouvement pour plaquer un peu plus sa bouche et approfondirnotreétreinte.
Je l’entendis grogner, puis il s’écarta. Je gémis de frustration. J’étais si près de l’orgasme quej’auraisprotestésij’enavaiseulaforce.Maisjen’euspasletempsd’yréfléchir.Mesmainstoujoursperduesdanssescheveux,jeplaquaiAndrewcontremoiavecforce,tandisqueseslongsdoigtsentraientdansmonintimité.
Ilsglissaientenmoidansunelenteurextrême,caressantmonpointGàunrythmerégulier.–Plus…vite,quémandai-je,ensentantmoncœurbattreàtoutrompredansmapoitrine.Etils’exécuta,enfonçantsesdoigtsensaccade,caressantduboutdesalanguemonclitorisgonflé.
Jepressaisa têtecontremoi, l’orgasmeempêchant toutepenséecohérente. Ilaccéléraencore,allantetvenantenmoi.Andrewdutsentirmesjambestremblercarilresserrasamaingaucheautourdemoi,memaintenantcontrelui.Ilgrognafortement,faisantvibrertoutmoncorps.L’orgasmedéferlaenmoialorsqu’ils’attardaitsurlapartielaplussensibledemachair.
Àboutdesouffle,jecriaisonnom.Mesjambeslâchèrentetjeglissaiausol.Andrewmerécupéra,pantelante.
–Allonsdanstachambre,murmura-t-il.Ilmesoulevaetj’enroulaimesbrasautourdesanuque.Unefoisallongéesurmonlit,jerouvrisles
yeuxetlevis,àmescôtés,mecouvantduregardtandisquejemelovaidanssesbras.Brutalement,sademandemerevintenmémoire.–Tuveuxquejeparteavectoi?demandai-jepourm’assurerquej’avaisbiencompris.–Oui.Tondînerm’aconvaincu…–Tumeveuxjustepourmestalentsdecuisinière?souris-jeentriturantlesboutonsdesachemise.–Jeteveuxpourtoutesceschosesqu’onpeutfairedansunecuisine.
Sonsourires’effaçaquandjerelevai lesyeuxvers lui.Malgrécettesoirée, jesavaisqu’ilnemedisaitpastout.
–JenepeuxpasquitterNewYorkcommeça,soufflai-je.J’aimontravail,j’ai…desamis.–Kathleen,râla-t-il,jen’aimepasl’idéed’êtreconstammentloindetoi…decompterlesjours.Jedéfislepremierboutondesachemise,puisledeuxième,passantmamainsousletissupoursentir
sapeau.Jelesentisfrémir,puisilsaisitmonpoignetpourmefairecesser.–Tucherchesàévitercetteconversation?demanda-t-ilavecunsourire.–Non.Ildesserrasapriseetj’eusleloisird’ouvrircomplètementsachemise.Ilseredressaetlaretira.Je
passaimesmainssursontorse,appréciantdelesentirréagircontremapaume,avantdegagnerlaboucledesonjean.
–Tusembles…tendu,murmurai-jeenembrassantsonventre.–Jesuisrarementcalmeentaprésence.Jedéfis les boutonsde son jean et passaimamain sous sonboxer.Son sexe était gonflé, dur, et
diablementtentant.Jelecaressaidoucement,sentantAndrewsecontracterunpeupluscontremoi.–Moiquipensaisavoirrencontrél’undeshommeslespluspuissantsdupays…–Tu l’asdit…jenesuisqu’unhomme,Kathleen,marmonna-t-ilalorsque je lecaressaisunpeu
plusfermement.Jelelibéraietmelevaipourluiretirersonjean,sonboxeretseschaussures.Jemeréinstallaiprès
delui,mecalantdanssesbras.Sonsexetoujourstendumetentait,maisj’avaisdansl’idéedeletorturerunpeu.Ilsoupiralourdementetfermalesyeuxenmeserrantcontrelui.
–Àquoipenses-tu?demandai-jedansunmurmure.–À ladernière foisoù j’ai faillibaisser lesbras,quand tum’asparléd’une relation strictement
professionnelle.J’aicruteperdreetcettesimpleidéeestrévoltante.Ilme bascula sur le dos etm’embrassa tendrement.Lentement, il glissa le long demon corps et
s’attelaàretirermesbas,avantdelesjeterausol.–Jeneveuxplus…jamaisressentirçadenouveau.J’étaisencolèreparcequeturefusaisdevoirla
véritéenface.–Lavérité?chuchotai-je.–Toietmoi.Ilembrassa lehautdemapoitrineetcaressamescôtesdesesmains.Jesentissonsexeeffleurer
mon intimité,mais je refusaidebouger. Je repensaisàcettesoirée,àsonregardglacialquand j’avaisdéposédesserviettesàlapiscine.
–Viensavecmoi,m’intima-t-ild’unevoixdouce.Etlasecondesuivante,enuneseulepoussée,ilentraitenmoimefaisantcrierdeplaisir.–Jevaisprendreçapourun«oui».Il bougea son bassin,me pénétrant une nouvelle fois avec force.Quand je croisai son regard, je
sentismoncœurbondirdansmapoitrine.Cettemêmesincéritéquelorsdenotredîner,cetteincroyableintensitéquimedonnaitlasensationd’êtreexceptionnelle.
–J’aidéjàuntravailpourtoi,continua-t-il.–Andrew!gémis-jesousl’assautd’unnouveaucoupdereins.–Jevaisaussiprendreçapourun«oui».Jemecambrai,mondoss’arquantpresquedouloureusement.Sonregardsombremescrutaitetjeme
forçaiàgarderlesyeuxouverts.Jeplantaimesdoigtsdanssesépaules,sesmusclesbougeantenrythmeavecchacunedesespoussées.
–Jeveuxt’entendremurmurermonprénomchaquesoir.–Andrew,soufflai-je,aubordd’unnouvelorgasme.–Etchaquematin…,ajouta-t-ild’unevoixrauque.Jemetendisautourdelui,sentantsonbassinbougercontrelemiendeplusenplusrapidement.Il
enfouitsatêtedansmoncou,lesouffledeplusenplussaccadéàmesurequeleplaisirnousgagnait.–Jegagnetoujours,Kathleen,gronda-t-ilcontremapeauenappuyantchacundesesmotsparune
nouvellepoussée.Puisilseredressaetplantasesyeuxdanslesmiens.Haletantstouslesdeux,nousnoussourîmes,
heureuxetseulsaumonde.–Demain?articulai-jepéniblement.Ilpoussaunpeuplusfortenmoietl’orgasmemefoudroya.Ilposaseslèvressurlesmiennes,se
tendantau-dessusdemoi, sansbouger.Dansunderniercoupde reins, il jouitavec forceet s’effondracontremapoitrine.
Jecaressaisescheveuxavectendresseetilmeserracontrelui.–Jevaisprendreçapourun«oui»,murmurai-je.
CHAPITRE20
Andrewsedécala sur son flancavantdemeprendredans sesbras. Jeglissaimesdoigts sur lessiens, réfléchissant à ce qu’il venait deme demander. Si l’idéem’avait paru effrayante au départ, jel’envisageaimaintenantdifféremment.Seslèvresbutinaientmoncouetsachaleurirradiaitmoncorps.
–Turéfléchistrop,murmuraAndrewderrièremoi.–Non…Je…Jemeprojetai,àvraidire.Jeme tournai vers lui et remontai le drap sur nous. Il repoussa les quelquesmèches de cheveux
masquantmonvisageetposaseslèvressurlesmiennes.–Dis-moicequitetourmente,souffla-t-ilsurmeslèvres.–Rien…Vraimentrien,promis-jeavantdemecalerdanssesbras.L’instant suivant, alors qu’Andrew caressaitmes cheveux de façon apaisante, je sombrai dans le
sommeil.
***
Jeme réveillaiensursautpendant lanuit,hantéepar levisagesanguinolentd’Eleanor.Dansmoncauchemar,ellemepoursuivaitenhurlantunflotinintelligibled’insultesetdevociférations.Haletanteetlecœurbattant, jecherchaiAndrew.Maismonlitétaitvide.Monréveilaffichait4heuresdumatin,etaprèsm’êtrefrottélevisagepourchassercemauvaisrêve,jetâtonnaiàlarecherched’unT-shirt.
Leshabitsd’Andrewnetraînaientplusaupieddulit,l’angoissemegagnaetjerejoignislesalonenespérantl’yretrouver.
–Jenevoulaispasteréveiller,dit-ilenmevoyantentrerdanslapetitepièce.–Justeunmauvaisrêve,expliquai-jeavantdeconstaterqu’ilétaithabillé.Tupars?–Oui,répondit-ilsèchement.J’approchai de lui, mais il recula aussitôt. Son visage, partiellement éclairé par un lampadaire,
m’effraya.Sesmâchoiresétaientserréesetilétaitd’unepâleurextrême.–Quesepasse-t-il?demandai-je,deplusenplusinquiète.–Meghanaétéagresséehiersoir,répondit-ilavecuneétonnantefranchise.–Agressée?Etcommentva-t-elle?m’inquiétai-je.–Bien…Sionpeutdire.Ilenfilasoncabanets’attachaànepascroisermonregard.–Jedoispartir.JerentreàSanFrancisco.–Tuveuxdiremaintenant?m’étonnai-je.
–Maintenant,oui.J’approchaidenouveaudelui,espérantqu’ilnemefuiraitpascettefois.Ilnebougeapas,maisson
visageserefermaunpeuplus,témoignantduprofondcombatquidevaitl’habiter.Jesoupirai,prised’unprofondetmauvaispressentiment.
–Jevaisfaireunsac,affirmai-jeenmedirigeantversmachambre.–Inutile.Tunevienspas.Je me figeai et sentis mon corps se glacer dans la foulée. J’allumai la lampe près de moi et
découvrisAndrew,blanccommeunlingeetcrispé.–Jepars.Turestesici.–Qu…Quoi?m’écriai-je.–J’aiprismadécision,ajouta-t-ilenboutonnantsaveste.–Tuaspris tadécision? répétai-je,abasourdie.Et jeprésumeque jen’aipasmonmotàdire?
sifflai-je.–Eneffet.Ilsoufflaprofondémentetsonvisagepassadel’angoisseàlacolèrelaplusviveenuneseconde.Il
diminua ladistanceentre lui etmoi, alorsque jeparvenaisàpeineàcontrôler les larmesde ragequipointaientàmesyeux.Jeposaiunemainsursontorsepourlerepousser.Jelefixai,cherchantlafailledanslemasqued’hommed’affairesparfaitementvissésursonvisage.Envain.
–Jevaisdisparaîtredetavie,expliqua-t-il.Toutredeviendracommeavant.–Commeavant?hurlai-je.Avantquoiaujuste?AvantquetudébarquesauPeninsula?Avantque
tumeséduises?Avantquejetombeamoureusedetoi?Ilreculalégèrementetsemblasurprisparmaréaction.Sesmâchoiresseserrèrentencoreplusetson
corpsseraidit.–Tunesaispascequetudis,riposta-t-il.Tutetrompessurmoi.–Eneffet,jemesuislourdementtrompée.Ai-jeaumoinsledroitàuneexplication?–Jenepensaispast’endevoirune,siffla-t-ilentresesdents.–Tunepensaispas?Alorsquoi? J’étais justeunamusementdepassage?C’est…agréablede
foutreenl’airlaviedequelqu’un?–Kathleen,nerendspasleschosesplus…compliquées.– Tu croyais pouvoir partir de chez moi et disparaître sans aucune explication ? Je n’ai donc
vraimentaucunevaleuràtesyeux?–Entoutcas,pasaussiimportantequecequejecroyais.Jemetusetsentismoncœurpartirenlambeaux.Ilarboraittoujourscemasqueimpénétrable,dénué
d’émotions,hormislepouvoir.Ilvoulaitgagner.–Jetel’aidit,jen’abandonnepasfacilement,ripostai-je.–Vraiment?Devons-nousabordertabrillantecarrièredanslejournalisme?Mamainpartitbrutalementetclaquacontresajouedansunbruitsecenylaissantunetracerouge.
Andrewnecillapas,risquantmêmeunpetitsouriresatisfait.–Tunesaisrien,grognai-jeenprenantconsciencequejeneregrettaispasmagifle.–Cette petite scènem’en a appris suffisamment.De toute évidence, tu n’es pas la seule à t’être
trompée.Ilpassaàmescôtés,froidetdistant.Moncœurfrappaitdansmapoitrine.Moncerveaum’intimait
deluidirederester,demefournirunevéritableexplication.Ledostournéàlui,jefermaimespoingsetsoufflai.
–Couches-tuavecMeghan?demandai-jedansundernieraccèsderage.
–Jenevoisvraimentpasenquoiçateregarde,répondit-ilfroidement.–Jevaisprendreçapourun«oui»,assénai-je.J’entendis un déclic et je compris qu’il était en train d’ouvrir la porte de mon appartement. Je
n’auraisdoncdroitàaucuneexplication.Jemeruaisurleguéridonetenextirpaisanoteetsonalliance.Ilmefixaétrangement,presqueinquietdecequej’allaisfaire.
–Reprends-la,luiintimai-je.Denouveau,ilmefixaet,aprèsunebrèvehésitation,ilpritl’alliance.Nosdoigtssefrôlèrentetje
perçusclairementcelégertressautementdemoncœur,cemouvementquimedisaitqu’ilnepouvaitpasmequitter.Maislacolèrerepritinstantanémentledessus.
– Je n’étais donc qu’un amusement… Comment disait Abby déjà ? « Une rafraîchissantedistraction»?
–Kathleen…–Non,lecoupai-je.Plusde«Kathleen»!Ilobservasonalliance,nichéeaucreuxdesamain,puismefixa.Lesoufflecourt,j’attendaisune
réactiondesapart,ungeste,unmot,untremblementmême,n’importequoiquiauraitpuletrahir.Contretouteattente,ilsefigeaunpeuplusetunsouriresansâmes’affichasursonvisage.Il remit son alliance à son annulaire et les larmes que j’avais eu tant demal à retenir coulèrent
finalement.Jeleschassaid’unreversdemainetAndrewsortitdemonappartement.–Aurevoir,Kathleen,murmura-t-ilavantderejoindrel’ascenseur.Jefermailaportederrièreluietlaissaileslarmesroulerlelongdemesjoues.Machinalement,je
regardaisl’horloge:4h20…Envingtminutes,ilvenaitderuinermavie.Curieusement,c’estlaragequis’exprimad’abord.Ilm’avaitmanipulée,ilavaitfaitensortequeje
tombe sous son charme pour finir par me quitter, sans aucune explication. Je filai vers la cuisine,cherchantmontéléphone,avantdemesouvenirqu’ilflottaitaumilieudesglaçonsfondus.
Encoreplusencolère,jerécupéraimapuceetjetailetéléphonedanslevide-ordures.Brutalement,j’eusundéclic.Jedébarrassai lacuisine,effaçantlestracesdenotresoirée,puisnettoyai lesalon.Auboutdetrenteminutes,j’avaisréussiàéradiquertoutcequiauraitpumerappelerAndrewBlake.
Dansmachambre,jeretirailesdraps,sonodeurnedevaitpasresterici.J’avaiscommisl’erreurdefaire à nouveau confiance à unhomme…Et j’avais à présent la sensationd’avoir été percutéepar untrente-huittonnesmaisd’êtrepourtanttoujoursenvie,souffrantlemartyre,etattendantladélivrancedelamort.
Des souvenirs de la soirée d’hier me revinrent, violents et m’anéantissant peu à peu. La colèrelaissaplaceàl’incompréhension.Pourquoidéployertantd’efforts,pourquoitrouverlesprétexteslesplusfallacieuxpourpasserdutempsavecmoi,pour,auboutducompte,mequitterenpleinenuit?
Jeparvins àgagnermacabinededouche, lavuebrouilléepar les larmes.Sous le jetbrûlant, jem’autorisai à réellement pleurer. Les larmes coulaient surmes joues dans un flot ininterrompu. Je nesavaispascequiétaitleplusdurfinalement:sondépart,sontonglacialoujustel’impressiondechutevertigineuseettourbillonnante.
Après notre première nuit, Andrew avait abandonné le masque d’arrogance et de froideur qu’ilportaithabituellement.Ilm’avaitlaissél’accèsàuneautrefacettedesapersonnalité,lafacettequ’ilnerévélaitqu’auxproches.
Maiscematin,lemasquefroidétaitréapparu,plussolidequejamais,infranchissableetdéroutant.Iln’avaitriendit,iln’avaitpasfournid’explications,iln’avaitmêmepasessayédemeparler:sonairduretsévère,ajoutéauretourdel’allianceàsondoigtm’avaientravagée.
Levisagerougipar les larmes, jem’habillaiet retrouvai lesalon.Malgré tousmesefforts, ilmesemblaitencoresentirsaprésence.Ilhantaitleslieuxetmehantaitencoreplus.Complètementabrutieparcemélangeétrangedecolèreetdepeine, je fixai la tablebasse, lescoussins, lecarrédemoquetteoùnousnousétionsembrassés.
Jerevoyaissonsourireheureuxetl’intensitédesonéblouissantregard.Commentavait-ilpufaireça?Commentavait-ilpumefairecroirequej’étaisimportante,quej’existaisàsesyeux,pourfinirparpartir?
Écœurée et passablement déprimée, je retournai àma chambre. Je retrouvai la robe beige de laréceptionet la replaçaidanssahousse.De lamêmefaçon, je retirai lesboucles toujours fixéesàmesoreilles et les replaçai dans leur boîte. Je refermai l’écrin brutalement, le faisant claquer entre mesdoigts.
Jeréfléchisrapidementaumotquiaccompagneraitmon«colis»,avantdesongeràcequ’Andrewm’avaitditcematin.
MonsieurBlake,Jevouspriedetrouverci-jointlesélémentsindispensablesàtoutedistractiondignedecenom.Letoutest en excellent état – ayant très peu servi – et je ne doute pas que vous trouverez d’ici peu unenouvelle«exception»pourutilisercesdélicieuxaccessoires.KathleenDillon.
Je repliaima note et l’accrochai au cintre,m’assurant qu’elle tiendrait jusqu’auPeninsula. Vers6heuresdumatin,lassedetournerenrondetdechercheruneexplicationrationnelleauchangementdecomportement d’Andrew, je gagnai l’hôtel, avec la housse, dans l’espoir de pouvoir parler à Lynne.J’étaisconvaincuequ’ellemeremonteraitlesbretelles,m’anéantissantunpeuplusenm’assénantun«jet’avaisprévenue»,maisj’avaisbesoind’yvoirclair.
–Bonjour,Sam,lançai-jeententantd’êtreenjouée.–Kat?s’étonna-t-il.Ilmefixabrièvement,maisjecomprisàsonregardquej’avaiséchoué.Mesyeuxbrûlaientencore
deslarmesquej’avaisverséesetjedevaissûrementavoirl’airencorepluspâlequed’ordinaire.– Sais-tu si Blake a libéré sa suite ? demandai-je en me tordant pour déchiffrer le cahier de
transmissions.–Pasencore.–Parfait.Peux-tuluifairemonterça?lepriai-jeendéposantlescadeauxd’Andrewsurlepupitre.Denouveau,Sammefixa,puisregardalahousse,avantderevenirsurmoi.J’osaiunsourireetil
pritlahousseentresesmainspourlaplacerderrièrelui.–Çaluiappartient,expliquai-jesobrement.Jepensequeçaluiferaplaisirderetrouverseseffets
personnels.S’il le perçut, Sam ne releva pas le sarcasme dans ma voix. Quelques minutes plus tard, il fit
appelerundesvaletsdechambreetluiconfialahousse.Lapeinequejeressentaiss’estompal’espaced’unedélicieuseseconde,remplacéeparuneintensejubilation.Ilavaitrécupérésonalliance, ildevaitdoncrécupérerlereste.
Jemedécidaiàgagnernotresalledepause.Boireuncafé,mêmemauvais,nepouvaitpasmefairedemal.J’eusunsursautdesurpriseenvoyantGregory,latêteappuyéecontrelamachine,pendantqu’elleronronnaitetcrachotaitunliquidebrunâtre.
–Greg?–Kat?
Ilsetournaversmoi,lesyeuxronds,avantdesepropulserdansmadirectionetdemeserrerdanssesbrasmusclés.Quand ilmerelâcha, lasurpriseavait faitplaceà l’angoisse. Il scrutaitmonvisage,sûrementencoremarquéparladéceptionetl’amertume.
–Est-cequetoutvabien?medemanda-t-ilavecurgence.TuesvenueattendreBlake?–Je…Euh…Oui,çava…Etnon,jenel’attendspas,marmonnai-je.J’aieuunenuit…courte.Que
fais-tuàl’hôtelàcetteheure-ci?demandai-jesoudain.–Jenedésespèrepasderentrerchezmoi.Jereviensdel’hôpital.LapetiteblondedeBlakeaété
rouéedecoupsparunfoufurieux…Jel’airetrouvée,recroquevilléeetinconsciente.Blakenet’enapasparlé?m’interrogea-t-il.Onafinalementréussiàlejoindre,tôtcematin.
Je repensais furtivement au visage torturé d’Andrew à mon réveil. Je chassai la vague decommisération qui était en train deme gagner. Ilm’avait quittée, plutôt lâchement. Je n’aurais pas depeinepourcethomme,jedevaisavanttoutgérerlamienne.
–Seulementtrèsbrièvement.Ilestpartitôtcematin.Quanda-t-elleétéagressée?demandai-jepourchangerdesujetrapidement.
–Onaaussitentédet’appelerpourlecontacter,réponditGregoryenignorantmaquestion.–On…Onavaitcoupénostéléphones.Brutalement,jesentismesjambesflageoleretjereculaiendirectiond’unedeschaisesenplastique
mises à notre disposition. Je m’assis prudemment, observant mes mains trembler de manièreincontrôlable.Lafatigueetleraz-de-maréeémotionnelprirentlepassurmaraisonetsurmavolonté.
–Il…Ilnevoulaitpasêtredérangé,dis-jed’unevoixterne.–Saufurgence…C’étaituneurgencehiersoir!J’aiquittél’hôpitalquandjel’aivuentrerdansla
chambredeMeghan.–Commentva-t-elle?–Quelquescontusionsetdeuxcôtescassées…Uneentorseaupoignet.JetremblaideplusenplusetGregoryposasamaingigantesquesurlesmiennespourmecalmer.–Toutvabien,Kat.Ellevas’enremettre.–Est-ce…Est-cequ’onsaitquiafaitça?–Non.Laseulechosequim’inquiète,c’estqu’elleaétéagresséedansl’ascenseur.Jel’aitrouvée
dans leparking.Jedoisramener les imagesde la télésurveillancepour l’enquête.Mais jedoutequ’ontrouvequoiquecesoit.
Jeme relevai dema chaise, toujoursmal assurée.Gregoryme suivit des yeux, s’assurant que jen’allaispastomberdanslaseconde.Jemefiscouleruncafé,pluspourmedonnerunecontenancequeparréelleenvie,etfixailegobeletentraindeseremplir.
–Kat,jesuisinquietpourtoi,lâchaGregoryavecsérieux.–Jesuisjuste…chamboulée.–Cen’estpascequejevoulaisdire.TarelationavecBlake…–Actualisetesinformationsalors,ripostai-jeaveccolère.Jen’aiplusderelationavecBlake,ila
rompucematin,avantd’allerrejoindresachèreMeghan…Gregorymedévisageaétrangementetjemerendiscomptedelaméchancetégratuitedansmavoix.
AndrewconnaissaitMeghandepuisdesannées,jenepouvaispasluireprocherd’êtreinquietpourelle.–C’estsûrementmieuxainsi,commentaGregory.Mieuxquetunesoisplusaveclui.–Mieuxpourqui?grinçai-je.–Pourtoi.Kat,çaauraitpuêtretoi.–Biensûrquenon,soufflai-je,exaspérée.
Gregorys’approchademoietposasesmainssurmesépaules,commepours’assurerquej’allaisbienl’écouter.
–Elles’estfaitattaquerici.Cen’étaitpasunhasard.NousrecevonsdesmenacesdepuisqueBlakeadébarquéici,etsij’encroisEvans,leschosessontencorepiresàSanFrancisco.
Gregoryme relâcha, visiblement soulagé de voir que son discours avait fait son petit effet.Moncœurbattait lachamade. Jeme rassis, toujoursbouleversée : j’envoulaisàAndrew, je lui envoulaisd’avoiragiengoujatetenhypocriteavecmoi,maissavoirqueMeghanavaitétéagresséeicimemitmalàl’aise.
–CombiendetempsdoitpasserMeghanàl’hôpital?demandai-jesoudain.–Ellesortdansl’après-midi.–Bien.J’irailavoir.– Aucune chance. Consignes de sécurité ultra-strictes. Personne n’entre dans sa chambre, sauf
Blake.–Merde!pestai-je.Jerepensaisauregardglaciald’Andrew,àsonmasqued’arrogance,presquehaineux…D’aprèsce
que j’avaispuconstater, il était intraitable lorsqu’onattaquait son territoireou soncercledeproches.Laurenenavaitfaitlesfrais,etj’enfaisaismaintenant,moiaussi,l’amèreexpérience.Peuimportaitquej’aieétéprésentedanssavie,jesavaisqu’ilm’expulseraitmanumilitarisij’osaisledéfier.
Et pourtant, il y avait quelque chose, dans sa manière de fuir mon regard, dans sa façon dem’ignorer,quineluiressemblaitpas.
Jevoulaislehaïr,maiscettesimplepenséemerebutait.Jen’avaispassacapacitéàêtrefroideethermétiqueauxsentimentshumains.–Jedoisluiparler,soufflai-jeàGregory.–Impossible,Kat…Moiaussij’aidesconsignes!–Maisiln’estmêmepasàl’hôtel!m’exaspérai-je.Quetuappliquessesinstructionsquandilestlà,
jeveuxbien,mais…–Maismaintenantjedoisaussiappliquersesinstructionsailleurs!mecoupa-t-ilavecsévérité.–Tubossespourlui?m’étonnai-je.Jen’arrivepasàycroire!–Pourêtretoutàfaitprécis,ajouta-t-ilavantdeboireunpeudesoncafé,techniquement,jedépends
d’Evans!–Explique-moicomment tuenesarrivéàbosserpourunhommequine t’inspiraitencoreaucune
confianceilyaquelquessemaines…Dois-jeterappelertestiradesàbasede«Tunesaisriendesonpassé»?m’enquis-jeaveccolère.
–J’aimisleschosesauclair…Jen’apprécietoujourspasBlake,maisiln’estpassi…mauvaisquejelepensais.
–Alorslaisse-moiallerlevoir.S’ilteplaît,Gregory,suppliai-je.–J’aidesinstructions.Désolé,s’excusa-t-il.Je jetai le restedemoncafé,prêteàmenerunemissioncommandoauseinde l’hôpital.Gregory
m’adressaunregard,plutôtinquietdemevoirreprendreaussivitedesforces.Jenevoulaispasabdiquer.J’avaisdéjà faitpire…avant.Passer lesbarrièresdesécuritéde l’hôpitaln’étaitpasgrand-choseparrapportàcrocheter lebureaudemonsupérieurpourobtenirdes informationspourunarticle. Idéequis’étaitrévélée…bonne,maisdontjen’avaispasmesurélesconséquencesàlongterme.
–Allez, venez, je vous offre notremeilleur café, entendis-je rireLynne alors qu’elle poussait laporte.
– Lynne, tu ne devrais pas leur mentir…Ce café provoque des ulcères, plaisanta une voix quej’identifiaiscommeétantcelled’Angela.
Quelques secondes plus tard, elles entrèrent dans la petite salle accompagnées de Maria et dePhilip.Lynnemarquauntempsd’arrêtenmevoyant,avantdefroncerlessourcils.
–J’avaisoubliéuntruc,mentis-jepourexpliquermaprésencematinale.Dansmonvestiaire…EtGregorym’aproposéd’allerboireuncafé.
Àsontour,Gregorymefixaétrangement,puissedécidaàallerdansmonsens.Ildevaitsûrementserendrecomptequ’ilnem’avaitpasdemandéunevéritableexplicationàmaprésenceici.
–CommentvaMeghan?s’enquittoutdesuiteAngelaavecinquiétude.–Ellevamieux.Désolépourhiersoir,s’excusaGregoryenregardantLynne.–Non…Tuasbienfaitdem’appeler.Perkinsl’auraitfaitdetoutefaçon.–Etnouspréparionsleplandetabledumariage,donctuastrèsbienfaitdenousinterrompre,sourit
PhilipenenroulantsonbrasautourdelatailledeLynne.Mariasirotaitsoninfâmeboissonsansriendire,nousobservanttouràtour.Detouteévidence,elle
n’étaitpasaucourantdel’agressiondeMeghan.– Ça fera sûrement la une des journaux de fin de journée, commenta pensivement Gregory. J’ai
l’impressionquelamoitiédelavilleestaucourant.–Tuasfinitonservice?demandai-jeàAngela.–Dansunepetiteheure…MaisLynneaproposéd’offrircetalléchantcafé,jen’aipaspurefuser…
Danmeremplace.–Dan?m’écriai-je.–Embauchéhier…Ilm’aideensallepourlemoment,maisilassurerasurtoutlesservicesdejour.
Net’inquiètepas.–Voilàpourquoionnemélangepasleboulotetlereste,raillaLynne.–Laferme,grognai-je.–N’étais-tupasavecBlakehiersoir?demandaAngela.Jenerépondispas,toisanttouslesregardsbraquéssurmoi.Andrewvoulaitdeladiscrétion,j’étais
servie!–Jevaisyaller,dis-jeàGregoryensachantqu’ilrelèveraitledoublesensdemaphrase.–Jeparsavectoi,annonçaMaria,visiblementmalàl’aiseparminous.–J’aiglisséuntrucpourtoidanstonvestiaire,m’informaGregoryalorsquejequittailapièce.–OK,murmurai-je.Jepassaipar lesvestiaires etmehâtaid’ouvrirmoncasier. J’avaisundoute sur le« truc»que
Gregoryyavaitglissé.Lalettredel’inconnuvirevoltadanslesairsavantdes’écraseràmespieds.JelafourraidansunedemespochesetretrouvaiMariadanslehall.
Cette dernière réajustait des fleurs au pied des escaliers avec concentration. Soudain, j’eus cetespoirstupideetincroyablementsurréaliste.Andrewn’avaitpasrendusasuite,peut-êtrequetoutn’étaitpasperdu.Jelarejoignisetsoupirailourdement,avantdemelancer.
–Maria,as-tueuunecommande…pourmoi?demandai-jetimidement.Ellesetournaversmoi,délaissantlesfleurs,etmefitunfaiblesourire,avantdesecouerlatête.–Rienpourtoi.Lacommandeaétéannuléecematin.Jebaissai les yeux sur lemarbrede l’entrée.Unenouvelle fois, je venais d’être percutéepar le
fameux trente-huit tonnes. Ma conversation avec Gregory avait distrait mes pensées d’Andrew, maisapprendremaintenantqu’ilavaitprévudesfleurspourensuitelesannulerétait…horrible.
–Jesuisdésolée,murmuraMariaenposantsamainsurmonépaule.
–Cen’estrien.–Kat,j’aimeraisallerdanstonsens,maisjenetediraipasquecen’estrien.J’aivucethommeet
jesaisqu’ilt’aime.–Jenecroispas,Maria.Ilestparticematin,jemesuisréveilléeàcaused’uncauchemaretj’envis
maintenantunautre.Jesentisleslarmesaffluer,maisravalailabouledansmagorge.Jenedevaispasmelaisseraller,
paspourlui.–Jem’enremettrai,assurai-jeenrelevantfièrementlatête.–Jenecroispasquecesoitlasolution…Tudevraisplutôtleconfronter,non?–J’aiessayé.–OùestpasséelaKatquin’abandonnejamais?Elleme fit un sourire encourageant et je repensaibrièvement à l’inconnu. Je l’avais encouragé à
parler à cette femme qui l’aimait. Je me sentais maintenant hypocrite de ne pas suivre mes propresconseils.Mariasedirigeaverslasortieetjelasuivis,incertaine.
–Maria,toutmesembletellementcompliqué,soupirai-je.–Personnen’aditqueçaseraitsimple.Maisjerefusedetevoirteréfugierdanstesannonces,alors
quecequetucherchesestdevanttesyeux…–Mais…–Ilt’aime,répéta-t-elle.C’estévident.Tunedevraispastesoucierdesroses.–Non,jedevraisjustemesoucierdel’annulationdesroses,corrigeai-jeavecironie.–Jedisjustequelesrosessontlàpourpalliersonabsence!Etque,pourl’instant,ilesttoujoursà
NewYork.–Auchevetd’uneautre…–…quin’étaitpasavecluihiersoir…–Tum’agaces,râlai-jeenvoyantoùellevoulaitenvenir.–Jesais.Jet’agaceparcequej’airaison.Valevoir!–Tuastort.Parcequ’àpartarriversurunbrancardensimulantunemortimminente,jamaisjene
pourraisentrerdanscefoutuhôpital.Mariagrimpadanssacamionnetted’unautreâgeetmefitunsignedetêtepourl’accompagner.Je
fronçailessourcilssanscomprendre.–J’aidesfleursàfairelivrer,expliqua-t-elle.–Et?–DesfleurspourMeghanStantonetjecroisquejevaisavoirbesoind’unlivreurvraimentmotivé!
***
Prèsde trenteminutesplus tardetaprèsundétouràsaboutique,Mariasegaradevant leLennoxHillHospital.J’étaisdeplusenplusnerveuseetsurtoutpeuconvaincueparl’efficacitédemadémarche.Andrewavaitétéclair:iln’interviendraitplusdansmavie,jedoutaisqu’ilreviennesursaposition.
Mariameglissalebouquetdefleursdanslamainetsepenchapourouvrirlaportière.–Etsionmedemandedequiviennentlesfleurs?tentai-jeencherchantunmoyend’esquiver.–Tudisqu’ilyaunecarte!–Elleestvierge!–Tudisquetuesjustelalivreuse.–Meghanmeconnaît!
–Meghan,oui,maispaslasécurité.Necherchepasàfairemarchearrière!Jeramenaimescheveuxsurmoncrâneetvissaiunecasquettesurlatête.Mariam’aidaàl’ajusteret
jequittailacamionnette.Monamiedémarrajusteaprès,nemelaissantpasletempsdechangerd’avis.Entrerdansl’hôpitalfutrelativementsimpleetm’encourageapourlasuite.Cen’estqu’entombant
nez à nez avec le panneau référençant l’ensemble des services de l’hôpital qu’une forme dedécouragementpritledessus.Jen’avaisaucuneidéedel’endroitprécisoùpouvaitsetrouverMeghan.Jegagnail’accueil,décidéeàmeneràbienmamission.
–Excusez-moi,j’aidesfleursàlivrerpourMlleMeghanStanton.Elle fronça les sourcils – le nomdeMeghan devait sûrement éveiller quelque chose chez elle –
avantderiverlesyeuxsursonécran.Sachevelureroussedébordaitsursesépaules.Quandellerelevasesyeuxclairssurmoi,jecomprisqu’ellenem’aideraitpas.
–Désolée,aucunevisiteautorisée,répondit-elle,laconique.–Oh…Maisc’estvraimentimportant,jedoism’assurerquecesfleursluisoientlivrées.–Danscecas,laissez-les-moietjelesluiamèneraidirectement.Jemesentaiscoincéemaintenant.Sijerefusais,jepasseraispourunefolleàlieretelleappellerait
sûrementlasécurité.– L’expéditeur tenait vraiment à ce queMlle Stanton les reçoive enmains propres, tentai-je de
nouveau.–J’aidesinstructions.Donnez-moilesfleurs,répéta-t-elleenselevantdesachaise.Jereculai,lapaniquemegagnanttoutàfait.J’auraistoutaussibienpuprendrelesescaliers,maisje
nemevoyaispasentraind’arpentertoutl’hôpitalavecmessatanéesfleurs.Ellecontournasonpupitre,visiblementperturbéeparmaréaction,tandisquejereculaijusqu’àcequemondospercutequelqu’un.
Jemetournaivivement,àlafoisgênéeetauborddelacrisecardiaque.–Mademoiselle?entendis-jedirelajeunefemmederrièremoi.–Nathan?soufflai-jeencroisantceregardgrisfamilier.–Kat?Son regard navigua demoi aux fleurs, puis à la jeune fille derrièremoi. Je rougis violemment,
songeantquejen’allaissûrementpasavoird’explicationsvalablespourjustifiermaprésenceici.Maisj’étaispresquesoulagéedelevoir,ilallaitsûrementêtremasolution.
–Je…JevoulaisamenerdesfleursàMeghan,murmurai-jeenbaissantlatête.–Depuisquandêtes-vousfleuriste?demanda-t-ilenpointantmacasquettedesonindex.– Jevaisvousexpliquer,parvins-je àdire enmedécouvrant la tête.Pouvez-vousm’amenerà la
chambredeMeghan?Ilme fixa étrangement, à la limite de l’incrédulité, et la jeune femme de l’accueil finit par nous
rejoindre.Denouveau,elledemandad’unevoixforteetsévèreàcequejeluiconfielesfleurs.JelançaiunregardsuppliantàNathan,éloignantlebouquetdelarousse.
–Jevaisaccompagnermademoisellepourlesfleurs,répondit-ilàlajeunefemmedel’accueil.–Puis-jeavoirvotrenom?demanda-t-elle.–Jevousdemandepardon?fitNathanenlafusillantduregard.–Votrenom,jevousprie.J’aiunelisteetjenepeuxpaslaissern’importequientrer.–Evans.Neprenezmêmepaslapeinedevérifier,jesuissurcettefichueliste.Lajeunefemmebaissalesyeux,apparemmentheurtéeparleregardglacialdeNathan.Laseconde
suivante,Nathanagrippamoncoudeetmetiraendirectiondesascenseurs,mefaisanttrébuchersurmesproprespieds.Lacabinesurlagauches’ouvritdansun«ding»etNathanm’ypoussaviolemment.Lesportesserefermèrentetilsetournaversmoi,encolèreetperdu.
–C’estquoicettehistoire?cria-t-il,m’effrayantunpeuplus.DesfleurspourMeghan?s’étonna-t-il.
–J’aibesoindevoirAndrew!–Andrew?Son visage s’apaisa aussi brutalement qu’il s’était crispé et un silence s’installa entre nous. Je
relevailesyeuxverslui.–Ilestparticematin,murmurai-je.–Commentça«parti»?–Parti.Il…Ilneveutplusmevoir,iladitqu’ilavaitfaituneerreuretque…Mavoixs’éteignitetjesentisleslarmescoulersurmesjoues.Jeleschassaid’ungestenerveuxde
lamain,mefustigeantdemelaisserallerdevantNathan.Jebaissailatête,fixantmespiedstoutententantdemerecomposerunvisagedigne.
Jeserrailebouquetdansmamain,mefaisantpresquemal.Nathanmefitreleverlatête,tirantmonmentonversluiduboutdesonindex.Ilplongeasesyeuxdanslesmiensetjecomprisqu’ilvoyaitquejeluttais pour ne pas craquer. L’ascenseur s’arrêta dans une secousse et il m’entraîna dans les couloirsverdâtresdel’hôpital.
–Allonsensalled’attente,proposa-t-ilenbifurquantsurlagauche.–D’accord,acquiesçai-je.Cen’estqu’enlesuivantdansledédaledecouloirsquejeremarquaislapetitevalisetrolleyqu’il
traînaitderrièrelui.NathanétaitàSanFranciscohiersoir,ilvenaitsûrementd’arriveràNewYork.Jem’assissurunedeschaisesrembourréesetNathans’installafaceàmoi,penchéenavant,sesavant-brassursescuisses.
–Vousvoussentezmieux?s’inquiéta-t-il.–Je…Oui…Désolée.C’était…unmomentdefaiblesse,dis-je.–Çaarriveàtoutlemonde.Mêmeàmoi!–Jen’ycroispasuneseconde!ripostai-je,incrédule.Vousêtesuneespècederoc…Unrocavec
beaucoupd’humour,maisunroctoutdemême!–Jevousassure,derrièrecettefabuleuseapparence,plastronna-t-ilensedésignant,ilyauncœur
quibat.–Aumoinsvousêtesdigne,marmonnai-je,honteuse.–Pasvraiment…J’aijusteunebonnecrèmedejour,untrucrevitalisant,avecconcentrésactifset
caféineintégrés.Franchement,çarendraitdigneRamsèsII,mêmeaufinfonddesapyramide.J’éclataideriredevantsonaveuet ilsouritàson tour,heureuxd’avoirpuaméliorerunpeumon
humeur.–Jepréfèreça.Maintenant,racontez-moi,m’encouragea-t-ild’unsignedemain.–Nousavonspassélasoiréeensembleet…cematin,ilm’aannoncéquec’étaitfini.–Fini?répéta-t-ilavecétonnement.–Fini.–Iladéveloppé?– Aucune explication, répondis-je en me tordant les mains. Tout allait bien et…Meghan a été
agresséeet…Nathansoupira,mecoupantdansmonexplication. Ilseredressaetdégainason téléphonepour le
couper. Quelques secondes plus tard, il se dirigea vers la porte de la salle d’attente pour s’assurerqu’elleétaitbienfermée,nousisolantainsitotalement.
–Donc,voustentiezdetrouverlachambredeMeghanpourlevoir?demanda-t-ilenseréinstallantdanssapositioninitiale.
J’opinai,prenant consciencede la faiblessedemonstratagème.Mêmesi j’avais réussi à trouvercettechambre,Andrewm’auraitsûrementmisedehorssansprendredegants.
–Cetteobstinationest…déconcertante.–Nathan, je ne remets pas en cause notre… rupture, articulai-je avec difficulté. J’aimerais juste
avoiruneexplicationraisonnableet…– «Raisonnable » ? s’esclaffa-t-il. Vous voulez une explication « raisonnable » de la part d’un
hommequin’aaucuneidéedecequecemotveutdire?–Jesuisheureusedevousfairerire!raillai-jeencroisantlesbrassurmapoitrine.–Désolé,Kat…Maiscequevousalliezfaireétaitdetouteévidenceunemissionsuicide!Iltentadecamouflersonsourire,maisjevislescoinsdesabouchesetordremalgrésesefforts.–Etlacasquettenevousvavraimentpas!ajouta-t-ilenladésignant,repliéeentremesdoigts.–J’aibesoind’uneexplication,Nathan!Je…Ilm’ademandédeveniravecluiàSanFrancisco,et
quelquesheuresplustard,ilm’annoncequejenesuisqu’unecharmanteerreur!–Andrewadit«charmanteerreur»?–Non…Maisilaremissonalliance.LesouriredeNathans’effaçainstantanémentetilrepritsonsérieux.–Jenepeuxcroirequ’ilaitfaitça,murmura-t-ilavecstupéfaction.–Jedoislevoir,répétai-jedenouveau.–Kat…Andrewestmonpatron,c’estvrai.Maisc’estaussiunamiproche,jeleconnaisetiln’est
paslegenred’hommeàprendreunedécisionàlalégère.Jem’enfonçaidansmachaise,sentantl’amertumemegagnerdeplusenplus.MêmeNathann’était
pasunalliésurlequeljepouvaiscompter.J’étaisentraindeperdremameilleurecarte.–Etjesaisaussiqu’ilagitplussouventdansl’intérêtdesautresquedanslesien.Nathanmefixaavecintensité,joignantsesmainsdevantluiensignederéflexion.–Entoutcas,danssaviepersonnelle,précisaNathan.Quelquechosem’échappait.J’entendisdesriresdanslecouloir,puisunesonneriedetéléphone.Sasonnerie.Ilétaitlà.Et soudain, je compris.D’unemanière ou d’une autre, l’information sur la présence d’Andrewà
NewYorkavaitfiltré.–Quelqu’unsait,murmurai-jeencitantNathan.Quelqu’unasuqu’ilétaitàNewYork.–Kat…–Maisc’estévident.PourquoiattaquerMeghan?Çan’apasdesens!–Ilyadesdétraquéspartout!tenta-t-il.–AuPeninsula ?m’écriai-je.C’est impossible.Gregorym’adit qu’elle avait été agresséedans
l’ascenseuretque…Mavoixs’éteignitet jen’osaimêmepas formuler la suitedema réflexion. Jen’aimaispascette
implacablelogique.–Ilapeurpourmoi?exhalai-je,incertaine.Ilm’aquittéepourça?Justepour…meprotégerde
ça?Nathanpassaunemainsursonvisageetlafatigueduvoyagesemblafinalements’abattresurlui.Les
traitstirésetleregardterne,ilfrottanerveusementsesmainsl’unecontrel’autre.–C’estl’unedesnombreuseschosesquej’étaisparvenuàchasserdesonesprit…–Mais…Mais…Cen’estpas…,balbutiai-jeensentantlapaniquemegagner.
–Kat, calmez-vous,me rassuraNathanenprenantunedemesmainsdans la sienne. Il veut justevotrebien.
–Monbien?Andrewpensequejesuisuneenfantfragilequidoitêtrepréservée?Jepeux…–Iladéjàperdusafemme.Jenecroispasqu’ilsurvivraitàunnouveaudrame.–Alorsquoi?Ilveutsepréserveràtoutprix?–Kat,vousnecomprenezpas.Andrewétait…endeuildepuisdesmois,nousavonstoutfaitpour
qu’ils’ensorte.Mais,ilfautêtrehonnête,c’estvousquiavezétéledéclencheur.Lorsqu’ilm’aditqu’ilvousavaitconfiésonalliance,çaaétélameilleuredesnouvellesdepuisdessemaines!
–Sincèrement,jenecomprendspas.Toutétaitparfait…–Exactement,Kat.Ilserraunpeuplusfortmamaindanslasienneet,brutalement,laportes’ouvrit.Jebondissurma
chaiseetretiraimamaindecelledeNathan,avantdemeleverprécipitamment.–Andrew!soufflai-je,atterréequ’ilmetrouveici.Nathanselevaàsontour.Leregardd’Andrewnaviguasurnousdeuxetmoncœurseserra.Ilme
toisait de cette même façon, abjecte et méprisante, que la plupart des clients de l’hôtel. Dans cetteminusculepièce,j’étaisdenouveautransparente.
CHAPITRE21
–As-tufaitcequejet’aidemandé?demandaAndrewàNathan.Cedernierouvritsavaliseet lui tenditun téléphoneportable.Andrewlerécupéraet,d’unmême
geste,ensortitunautredesapochepuislerenditàNathan.–Nouveaunuméro?s’enquitAndrewenm’ignoranttoujours.– Oui, il s’agit de ta ligne professionnelle. Ta nouvelle ligne personnelle sera activée dans la
matinée.– Parfait. Demande à Emily de commander de nouvelles cartes de visite avec ce numéro. Et
rappelle-luilesrèglesdeconfidentialité.–Çaserafait.Ilyeutunsilenceetjem’aperçusquejefixailetéléphoneentrelesmainsdeNathan.J’osaiespérer
qu’il ne s’agissait pas de la ligne quime servait à joindreAndrew.Nathanme jeta un coup d’œil etsoupiraavantdeposerlaquestionquimebrûlaitleslèvres:
–Qu’est-cequejefaisdecetteligne?–Annule-la.Elleestinutiledésormais,ajouta-t-ilenévitantsoigneusementdecroisermonregard.Sans ajouter un mot, Nathan rangea le petit appareil dans sa valise et Andrew en profita pour
composerunnuméro.–S’ilteplaît,plaidai-jepourattirersonattention.IlrepoussaletéléphonedesonoreilleetsetournaversNathan.–Laisse-nous,luiintima-t-il.SoncollaborateursortitdelapièceetAndrewrefermalaportederrièrelui.Jemerassis, lapeur
tourmentantmonventre.Je ledévisageai.Iln’avaitrienàvoiravecl’Andrewdelaveille.Sonvisageétaitcendreux,sestraitstirésetsonregardd’uneduretésansnom.Jemerecroquevillaisurlachaiseenplastique,effrayéeparlemélangedecolèreetderagequ’ildégageait.
–Jepensaisquenousnousétionstoutdit,asséna-t-ilens’installantfaceàmoi.Il se voûta légèrement et releva les yeux vers mon visage. Figée dans mon siège, je tentai de
canaliser lesmille pensées qui se bousculaient dansma tête. Il recala le téléphone sur son oreille etm’ignoradenouveau.
–Danscinqminutes,auLennox,dit-ilsèchementàlapersonneautéléphone.Ilraccrochaetserelevadesachaise.Jefixaisonvisagefatigué,espéranttrouverlafaille.Andrew
avaitrarementétéaussiglacialavecmoietjenesavaispascommentcontournersonattitudefroide.–Unevoituret’attendradehorsd’icicinqminutes,annonça-t-il.–Jenepartiraipasd’icisansuneexplication.
Ileutunsouriremanifestementironique,puisilsecoualatête.–Cen’étaitpasuneproposition.Turentrescheztoi.–Jeveuxjusteteparler,tentai-jeavecdésespoir.–Commebeaucoupdegens,tuenattendstropdemoi,répondit-il,glacial.– Pour l’instant, j’aimerais juste que tume regardes ! ripostai-je en le voyant se diriger vers la
porte.Ils’immobilisaet,soussachemise,jedevinailedessindesesépaules.Sesmusclessetendirentet
ilsetournaversmoi.–Jesaispourquoituasfaitça,assénai-jeavecviolence.Sonsilencem’encourageaàpoursuivre.J’avaisenfinréussiàcaptersonattention.Ilnepouvaitplus
m’ignorer.–JesuisdésoléepourMeghanetpourcequej’aiditàsonsujetàl’appartement,continuai-je.–Bien.–C’étaitstupidedemapart.Meghanesttonamieet…– J’ai déjà couché avec elle,me coupa-t-il alors que ses lèvres se soulevèrent dans un agaçant
rictus.Cetteméchanceté gratuiteme coupa le souffle.Mais jeme repris : il était évident qu’il voulait
m’éloignerdeluiàtoutprix.–Etj’aicouchéavecd’autreshommesavanttoi.Sommes-nousquittessurlesujet?sifflai-je.Sesmâchoiresseserrèrentunpeuplusetjel’entendisdéglutirbruyamment.Jerisquaiunsourire,
satisfaitedenepasêtretombéedanssonpiège.–Jesaiscequetucherchesàfaire.Tuveuxm’éloignerdetoipourassurermasécurité,maisjene
melaisseraipasfaire,Andrew.–Ilterestedeuxminutes,mecoupa-t-ilenjetantuncoupd’œilàsamontre.Jesentismoncœurtambourinerfurieusementdansmapoitrine.J’avaislasensationdem’écraserde
plein fouet contre un roc indéboulonnable. Malgré mes assauts, malgré notre apparente proximité,Andrewmefuyaittoujoursetm’ignorait.
–Jecomprendsque tuaiespeurpourmoi.CequiestarrivéàMeghanest…horrible,mais jeneveuxpas…Jeneveuxpasêtreloindetoi.
Avec prudence, je m’approchai de nouveau de lui. Nous n’étions plus séparés que de quelquescentimètresetjeressentaistoutel’énergiequ’ildépensaitàsecontenir.
–Je…Tu…Mavien’estplus lamêmemaintenantet je refuseque tuprennes lesdécisionspourmoi.
–Jeprendslesdécisions,Kathleen.Findel’histoire.–Findel’histoire?Noussommesuncouple…–Étions,mecorrigea-t-il.–Alors tu t’es donné tant demal pourme séduire, tant demal pour que je tombe dans tes bras
pour…rien.Pourm’écarterdèsquequelquechosenerentrepasdanstesplans?Ilritdoucement,unpeudésabusé.–Tunecomprends toujourspasqui je suis, contra-t-il.Tout…ycompris toi, tout rentre toujours
dansmesplans.Jet’aivoulue…–Et tum’as eue, finis-jepour lui.Oùest l’hommequi, hier soir,m’adit « si je teperds, jeme
perds»?–J’appliqueceprincipe,Kathleen.
–Maistutetrompes,m’écriai-je,àboutdenerfs.Tutetrompes!Cen’estpasenm’écartantdetaviequetuvasécarter…les…problèmes,finis-jeenbégayant.
Nousnoustoisâmesdelonguesminutes,luipresquetétaniséparcequej’osailuidire,etmoiàboutdesouffle.
–As-tuterminé?demanda-t-ilenregardantdenouveausamontre.–Tontempsest-ilsiprécieuxquetunepeuxmêmepasm’accorderdeuxminutessupplémentaires?–Jegèrelespriorités.EtMeghanestlapriorité.–Pendantquelquetemps,j’aibêtementcruquec’étaitmoi.J’aibêtementcruquetun’étaispasjuste
AndrewBlake,l’hommeauxexcèshallucinants.Jet’aidéfendu,Andrew,j’aidéfendunotrerelation.J’aigérélespriorités,moiaussi.Tuasétémafichueexception!criai-je.
Sonregardsevoilaetjesoupirailourdementpourcontenirmacolère.Jevoulaistellementunsigne,oujusteunmotdesapartmesignifiantquej’avaiseuraisond’ycroire.
–Jesuisflatté,lâcha-t-ilavecunpetitsourire.–Évidemment…Voilàdonccommenttutraites toutestesrelationsfinalement :elles teserventun
tempsetquandtuledécides,tut’ensépares.–Kathleen…–Tu sais quoi ? Je comprends qu’Eleanor ait choisi d’aller voir ailleurs…As-tu agi avec elle
commetuagisavecmoimaintenant?–Celaneteressemblepasd’êtreàcepointcynique,riposta-t-il.Son regard semit àbrillerde rage. Je connaissais l’homme jusqu’au-boutiste, l’hommearrogant,
l’hommeextravagant,maisjen’avaisjamaiseul’occasiondemeconfronteràlapartielaplussombredesapersonnalité.
–Tun’asrienàvoiravecelle,tues…tellementdifférente.–Jen’aipasbesoind’êtreprotégée,assurai-jeavectoutemaconviction.–Toutlemondeabesoind’êtreprotégé.–Jenesuispasfragile!–Tunecomprendspas!mecoupa-t-ilvivement.Cen’estpastoiquejeveuxsauveroupréserver…
Jenet’aijamaisconsidéréecommeunefemmefragileousousinfluence!–Mais…Brutalement, son regard vira. S’il avait vacillé pendant que je lui parlais d’Eleanor, il était
maintenantprofond,quasimentimpénétrable.–Jeneveuxpasquetum’éloignesdetoi,dis-jeunefoisdeplus.–Tun’aspaslechoix…Bonsang,tuessi…têtue!râla-t-il.JevaisrentreràSanFranciscoettu
resterasici.–Andrew,cen’estpas…– C’est ma décision. Et même si cela t’horripile, il va falloir que tu l’acceptes. Nous nous
limiteronsàcequetuvoulaisdèsledépart:unerelationstrictementprofessionnelle.–Cen’estpluscequejeveux!m’écriai-je.–Jemefichedecequetuveux!mecoupa-t-il.–Crois-tuquejevaisacquiescersansriendire?Quejevaisoublier…toutcequis’estpassé?La
robe?Lesbouclesd’oreilles?Tonalliance?TuvoulaisquejevienneavectoiàSanFrancisco…–Tun’espasunefemmefragile,si j’encrois tespropresmots.Tuoublieras…Etjecroissavoir
quetuastoi-mêmefaitletri,ajouta-t-ilavecsarcasme.Sa remarquemedésarçonna,et je repensaisbrièvementà la robeet auxbouclesque je lui avais
rendues. Pendant une seconde, je me demandais si mon geste l’avait, d’une manière ou d’une autre,
touché.–Tavoituret’attend.Moncœurs’effondraaufinfonddemonestomac.Mesmainssemirentàtrembleretjemislepeude
forcequimerestaitdanslacanalisationdecessecousses.Andrews’éloignaet,tandisquechacunedesfonctionsdemoncorpssemblaits’éteindreaufuretàmesure,j’entendislaportedelasallegrincer.
–Jevaisrentreràpied,soufflai-je.–Kathleen,menaça-t-il,jeveuxqueturentrescheztoienvoiture.C’estnonnégociable.Ilsetournaversmoietjemerelevaipéniblementdemachaise,encoreétourdieparlaconversation.–Jecroisquecelaseraitendésaccordaveclestermesdenotrerelationstrictementprofessionnelle,
conclus-je.– Kathleen, ce n’était aucunement un souhait. Tu rentres en voiture, m’intima-t-il en accentuant
chacundesmots.–Jemefichedecequetuveux,murmurai-jeenletoisant.Avecdéceptionetamertume,jeconstataiqueleregardd’Andrewétaitterneetvide.Denouveau,il
me fixait avec cette ignorance méprisante des gens qui ont l’argent et le pouvoir. Non seulement jen’avaispasréussiàfairetomberlemasque,maisj’avaislasensationqu’ils’enétaitconstruitunautre,plusrobusteetinfaillible.
–JevaisdemanderàNathandet’escorter,lâcha-t-ilenfaisantfidemadernièreremarque.–Àvotreconvenance,monsieurBlake,raillai-je.–Aurevoir,Kathleen,murmura-t-ilavantdedécrochersontéléphone.Ilrefermalaportederrièreluietlebruitdesespas,s’éloignantdemoi,s’atténuapeuàpeu.Nathan
réapparut quelques instants plus tard. Sans un mot, je le suivis jusqu’aux ascenseurs. Je sondai sonregard,maisilétaitaussivideetdésemparéquelemien.
Ensilence,ilm’ouvritlaportièredelavoiturequ’avaitcommandéeAndrew.Jem’installaisurlabanquetteencuir,laminéeparmonentretienaveclui.
–Nathan,ilfautquevousluiparliez,tentai-je.–Laissez-luiunpeudetemps.IlestencorebouleverséparcequiestarrivéàMeghan.J’acquiesçai. Harceler Andrew n’était de toute évidence pas une bonne idée. Nathan claqua la
portière,mais je fisdescendre lavitreetpenchai la tête.Soudain,alorsque jesongeaiàMeghan,unequestionmevintàl’esprit.
–A-t-ontrouvél’agresseur?m’enquis-jeauprèsdeNathan.Nathansoupiraetsembladouterdelapertinencedemaquestion.–Lapolices’enoccupe.J’attendais plus de détails,mais alors queNathan était sur le point de parler, il se ravisa et se
penchaàmahauteur.–Kat,faitesattentionàvous.Mêmeàl’hôtel,ajouta-t-ilaprèsunenouvellepause.–Andrews’enva…Jenepensepasque…–Soyezprudente.Kathleen,jesaisquevousêtesintelligenteetjesaisaussiquevousavezduflair,
maisjevousimplored’êtreplusprudentequejamais.–Nat…–Jerefused’annoncerunemauvaisenouvelleàAndrew,lâcha-t-ilavecsérieux.JehochailatêteetNathanordonnaauchauffeurdedémarrer,nemelaissantpasletempsdecreuser
lesujet.Jetournailatêteverslepare-brisearrière.LasilhouettedeNathandisparutprogressivement,etjemedemandaisij’allaislerevoirunjour.
Cen’estquequandlechauffeurdescenditdelavoiturequejeprisconsciencequej’étaischezmoi.Je gagnai mon appartement, toujours empli de cartons, en tentant de remettre en place les pièces dupuzzle,maismonespritétaittropembrouillé.
Ilétaitàpeinemidietjeprenaismonservicecesoir.Jedevaisimpérativementdormirpourtenirlechoc.Curieusement,monorganismeneluttapas.Àpeinem’allongeai-jedansmonlitauxdrapsfraisquele sommeil me gagna. Je dormis dans le calme, parvenant, je ne sais trop comment, à chasser lessouvenirsheureuxavecAndrewetlessentimentsmitigésqu’ilm’inspiraitdésormais.
***
À mon réveil, je grignotai un morceau et me préparai, sans motivation aucune, à rejoindre lePeninsula. Si être dansmon appartement était difficile, passermon temps là-bas allait forcémentmerappelerAndrew.Àmonarrivée à l’hôtel, j’étaisheureusede constaterqu’il n’y avait pluspersonne,hormisSam.
Ilmefitlespassationsrapidement,soulignantqu’AndrewBlakeavaitlaisséunmotpourmoi.–Ilveutsûrementteremercierpourleséjour,tentaSamavecunsourireentendu.–Sûrement…Bonnesoirée,lançai-jepourlecongédierauplusvite.Jeplongeaidansmes tâcheshabituelles.Lire lemotd’Andrewn’étaitpasmapriorité. Ilm’avait
demandédepoursuivremavie,etj’avaisbesoindecetravail,nonseulementpourmechangerlesidées,maisaussipourgarderunbut.
Cen’estqu’enlisantunmaildeGregorysurlesconsignesdesécuritéauseindel’hôtelqu’Andrewresurgitdansmespensées.Àcetteheure,ildevaitêtreàSanFrancisco.Mécaniquement,jecherchaimonportable,avantdemesouvenirqu’ilavaitétésacrifié,luiaussi,dansmarelationavecAndrew.
Lafindecetterelationavaitempiétésur tout le reste.Jen’avaisaucune idéede l’avancementdumariage de Lynne, je n’avais pas appelé mon père depuis des lustres, j’avais ignoré Angela et nosconfidencesnocturnesd’avant.
Etlalettredel’inconnu!Jerâlai,mefustigeantdemalégèreté.Ceslettresm’avaientapportétellementdechoses,l’inconnu
m’avaittellementinfluencéedansmeschoixquejem’envoulaisdel’ignorer.Parailleurs,madernièrelettren’avaitpasétédespluschaleureuses.Jefonçaijusqu’àmonvestiaireetextirpail’enveloppedelapochedemaveste.Jedevaisreprendremavie,celled’avantAndrew.
De retour à mon pupitre, je déchirai précautionneusement l’enveloppe et sortis le courrier avecfébrilité:
ChèreMarie,Merci pour votre lettre… Derrière ces mots, je devine une force de caractère et une incroyabledétermination.J’aimeça,chezvous.Cemélangeétrangededouceuretdeforce.Quepuis-jerépondreàvotrequestion,àpartvousdirequeoui,jel’aime.Profondément…C’estmêmeuneexpériencenouvellepourmoi.Pendant longtemps, j’aicruque jamaisplus jeneressentiraicetteénergie.Etpourtant,dèsquejelavois,dèsquejelatouche,j’ailasensationd’êtreunesortedesuper-hérosquemonneveunerenieraitpas…Jenevolepas,maisc’esttoutcomme…Elleestunesortedeconcentrédevie,ultra-puissant,résistantàpresquetoutetvraimentaddictif.Jesuistombéamoureuxd’elleàl’instantoùjel’aivue.Jenesaispassiellesesouvientdenotrerencontre,maisjem’ensouviensparfaitement…desesyeux,deseshésitations,desacoiffure,desonalluremême.Ellerayonnait.Voilàpourquoijecrainspournousetencorepluspourelle.Jecroisqu’ellemevoitcommeunesorte…desuper-héros.Cequ’ellenesaitpas,c’estquejefaisjusteillusion.J’aidel’argent,celamepermetde
vivreconvenablement,d’exagérerparfoiscommeelle leditsouvent…Mais jemefichede l’argent.Jemefichedupouvoirquecelamedonne,cequim’importe,c’estelle.Toujourselle.Alors,ouij’aimeraisluiparler,j’aimeraisluidirequej’aipeurdelaperdre,peurqu’onnoussépare…Jenecrainspasunautrehomme–elleesttroployalepourça.Jenecrainspasqu’ellenem’aimeplus–parceque làencore, ellene saitpasmentir.Mais jene contrôlepas tout. Je l’arrached’unmondepaisible,calme,pourl’attirerdansunmondeimprévisible.Peut-êtrenemérite-t-ellepasd’affrontertoutça.Mais je l’aime. C’est indéniable. Et je veux la garder près de moi. Croyez-moi, j’ai déjà un nombreincalculabledepropositions,relativementindécentes,àluifaire!Qu’enest-ildel’hommequipartagevotrevie?J’oseespérerqu’ilsavourecetteincroyablechance.Vousnedevriezpascraindredeluidirequ’ilvousmanque.Jeneconnaispasunhommequirésisteàcegenred’arguments.Marie,aprèstoutesceslettres,jemedemandesijenedevraispasvousdonnermonprénom…Cecidit,j’ai une condition : le printemps se profile, peut-être pouvons-nousprofiter du retour du soleil pournousrencontrer?Offrez-moicettechance–j’achèteraiduchocolat,vousm’apporterezdeslivres.Jevousdonneraimonprénom,donnez-moiunpeudevotretemps…réellement.Jevousembrasse,Votreinconnu.
Je repliai la lettre après l’avoir lueplusieurs fois. J’étais partagée entre le bonheurde le savoirheureuxetlajalousie.Ilvivaitunerelationmerveilleuse,quandmoi,j’étaisenpleinmarasme.Andrewme manquait, sa folie, son exubérance, sa façon horripilante de toujours vouloir avoir raison memanquaient.Jetrouvaisoudainementmavievideetpresquepitoyable.
Néanmoins, je me décidai à lui répondre, espérant faire parler le côté le plus joyeux de mapersonne:
Cherinconnu,Croyez-moisivousvoulez,maisvotreprénomnemesembleplusaussiimportantqu’avant.Jenecroispas que le connaître enrichirait notre relation déjà très… forte.Vous allez sans doute penser que jeveuxesquiverunerencontreéventuelle,etvousaurezraison.Pourêtrehonnête,mêmesivotrelettreaétéleseulaspectpositifdemajournée,jevousavouequejesuisloindepartagervotreétatd’esprit.Cet homme qui partageait ma vie a décidé brutalement que nous devions nous séparer. Et je n’enconnaismêmepaslesraisonsprécises…Ilestrestéassezévasifetplutôtdéfinitifsurnotrerupture.Lepire, c’est que je ne suis pas certaine d’être malheureuse. Pour l’instant, je suis juste sous le choc,incapabledemesurerl’ampleurdudésastre.Commentvousdire ? Je suiséteinte…Triste, évidemment…Maispasautantque je l’imaginais.Vide,aussi,commesiune lamedefondm’avaitemportéeetavaittoutravagé.Jesuisquasimentàboutdeforces.Peut-êtreparcequej’aitropluttéaudépartdecetterelation,etsûrementaussiparcequej’aitropluttépourlasauver.Jenesaisplussij’aifaitlesbonschoix.Ilmemanque.Maisj’aidéjàsubiça…J’aidéjàétéseule,j’aicrunejamaism’enreleveret,finalement,j’ysuisparvenue.Maisjenetienspasàvousmineravecmavie.Jesuistellement,tellementheureusepourvous!Votrelettrerespirelajoiedevivre.Etjecroisquej’envievotrebonheur,j’enviecettefemmequisembleêtretellementimportantepourvous.Jesuisraviequevousvoussoyezbattupourelle,parcequerienqu’enlisantvotredescription,jesaisqu’ellevousconvient.Quelgenred’hommesesouvientd’unecoiffure?Sincèrement?Nousdevrionsparlerensembledecespropositions…Àquelpointsont-ellesindécentes?Dois-jevousprévenirqu’unefemmesouspressionnefaitjamaiscequevousespérez?Commevousledisiezdansvotrelettre,j’espèremoiaussiqu’ellesavourelachancequ’ellead’êtreavecunhommecommevous.Jecommenceàm’apercevoirquevousressemblezàl’hommeidéal…Etjenepeuxpascroirequevousensoyezvraimentun.Lessuper-hérosontleurtalond’Achille…Donc,histoiredemeremonterlemoral,jevaisvousimaginerbourréd’improbablesdéfauts.Vousavezforcémentuneaddictionhonteuse,unehabitudeaffreuse…oupeut-êtremêmequevousnesavezpasêtreàl’heurenitenirvospromesses…Voussavez,jemesensnettementmieux.Grâceàvous,enpartie…Pasderencontrepourlemoment.Bienqu’ellenesoitpasencorelà,ladévastationvafinirparprendrepossessiondemoncorpsetruineratousleseffetspositifsdenotrecorrespondance…Jevousembrasse,Marie.
JerepliaimalettreavecprécautionetlamissousplicomptantlaposteràlafindemonserviceauPeninsula.
Lanuit s’écoula tranquillement,et la sourdedouleurque je ressentaisdans toutmoncorpsnemequittapas.Malgrétoutel’énergiequejedéployaisàm’occuperl’esprit,l’imaged’Andrew,etnotammentnotredernierentretien,mehantait.Jen’avaisdésormaisplusaucunmoyendelejoindre.
Machinalement, je vérifiai les prochaines réservations pour Blake Medias. Mais rien. Il allaitsûrement changer d’hôtelmaintenant pour éviter un scandale.En revenant sur sondossier, je vis qu’ilavait quitté la suite dans l’après-midi. Je soupirai lourdement, fixant d’unœil hagard l’enveloppe quicontenaitsonmot.Jen’avaispaslaforcedelelirepourlemoment.
***
À7heuresdumatin,jefussurpriseparl’arrivéeconjointedeLynneetdeGregory.Ilsriaientdeboncœur, se dirigeant vers le bureau de Lynne sans vraiment regarder dans ma direction. Je devinai leprénomdeMeghandansleurconversationetsourisenvoyantGregoryfanfaronner.Ilavaitdûdécrocherla timbale ! Je les interpellai et ils se tournèrent vers moi, leurs rires mourant progressivement. Jen’aimaispascequisepassait.Ilsallaientfaireensortedememénager,alorsquejevoulaisjustementnepluspenseràça.
–Kat!Désolé,magrande,maisLynnem’inculquaitunpeudesasciencedelamode.–Vraiment?souris-je.Tuvasàunesoiréedéguisée?– Très drôle ! Je vais à San Francisco à la fin de semaine, protéger de mes bras musclés la
plantureuseMeghanStanton.Mes yeux s’agrandirent etma respiration devint haletante. San Francisco. La réception. Gregory
balbutia des excuses presque aussitôt et Lynne me lança un regard gêné. Tout le monde semblait aucourantmaintenant.
–Non…C’est…C’esttrèsbien,assurai-je.Unesortedeprotectionrapprochée?–C’estça…– Ouais… Juste que ce n’est pas vraiment du « rapproché », corrigea Lynne avec une moue
moqueuse.Ilvafairecequ’ilfaitici…Seplanterdansuncoin,fairecommes’ilfaisaitpartiedudécoretregarderlesinvitésmangerdespetits-fours…
–JevaissurtoutregarderlabelleMeghanmangerdespetits-foursavecsesdivineslèvreset…–Pervers!lecoupaLynne.–Jesuiscontentepourtoi,dis-jeàGregory.Est-elledéjàtombéeàtespiedsentevénérant?–C’estlaphaseBduplan,répondit-il,trèsconfiant.J’assuresaprotectionetensuite…badaboum!–Badaboum?répétions-nous,Lynneetmoi,enécho.–Ouais…Untrucdustyle.Cettefemmemedoitaumoinsunesoirée…Jeluiaisauvélavie!–Gregory,tul’asdittoi-même,justeunpoignetcassé!ripostai-je.–Ouais,maisBlakem’aàlabonnemaintenant!Je me figeai à la mention du nom d’Andrew. Constater qu’il avait toujours des liens avec les
personnesdel’équipemefaisaitmal.J’avaisétéévincéeet,bizarrement,j’étaisconvaincuequ’ilallaitécarterdelamêmefaçontouteslespersonnesluirappelantnotrerelation.Jem’étaistrompée:Andrewn’étaitpasunsentimental.IlavaitbesoindeGregory,illuifaisaitconfiance.J’imaginaisquelaplupartdeschosesfonctionnaientainsidanssonmonde.
–Pourras-tusaluerAndrewpourmoi?risquai-je.–Jeleferai,Kat,assura-t-il.
–Jedoisallerbosser…Cesfichusmédecinsadorent lesconférencesmédicalesetmedemandenttoutetn’importequoi!Kat,quedirais-tud’undînercesoir?
–Jesuisdeservicecesoir!– Remercie tameilleure amie en charge des plannings…Sam te remplacera, je pense que tu as
besoindefaireunepause.Elleme laissa seule avecGregory. Je la regardai s’éloigner en songeant à quel point elle avait
raison.J’avaisbesoindevoirdumonde,depenseràautrechosequ’àAndrew.JeretournaimonattentionsurGregory.
–Jenecautionnepascequ’ilafait,Kat.–Cen’estrien…OK?C’estAndrewBlake,àquoipouvais-jem’attendre?– C’est peut-être Andrew Blake, mais c’est un enfoiré de première ! Crois-moi ! Il a été…
Franchement,tuvauxmieuxquecetype,Kat.–Merci,Gregory.TumeraconterastasoiréeàSanFrancisco?–Surdesgensquimangentdespetits-fours?plaisanta-t-il.–Ouais…Paspalpitant,hein?tentai-jeenespérantfaireillusion.Dis-luiquejesuisenformeet
quejesorstouslessoirsavecunhommedifférent!plastronnai-je.–Jedoutequ’ilycroie.Maistusaisquoi?Danslefond,jenecroispasqu’ilsoitvraimentheureux
desadécision.Le téléphone de Gregory vibra et il lut rapidement le message qui s’affichait sur son écran. Je
rangeairapidementlespapiersetmesyeuxtombèrentsurledossierclientd’Andrew.Ilétaittrèsépaismaintenantet je leposaiau-dessusdesautrespour le laisserenévidence.Il fallaitqueje trouvedelaplacepourl’archiver.Gregoryposasontéléphonesurmonpupitreetnotreconversationreprit.
–Desnouvellesdelapolice?demandai-je.–Riendeplus.Jedoutequ’ontrouvelapersonnequiaitfaitça.–Vraiment?Pourquoi?–Ils’agitsûrementd’untruccommandité,quelqu’unquifaitfairelesaletravailàunautretype…
Meghan n’a pas pu donner de description, elle a été attaquée en sortant de sa suite et on l’a traînéejusqu’auxascenseurs.
–Etlescamérasn’ontriendonné?m’étonnai-je.– Rien d’exploitable. Je dois garder un œil sur elle, en espérant que les choses se tassent. En
attendant,soisprudente.–JenesuisplusavecAndrew…C’étaitlebutdelamanœuvre,non?–Turestesliéeàlui.Etcommejeteledisais,jenecroispasqu’ilsoit…d’accordavecsapropre
décision.Undesagentsdesécuritéde l’équipevintsaluerGregoryet, trèsvite, ils’excusapoursediriger
verssonbureauetlecentredesurveillance.Jefinismonrangement,récupérantlalettredel’inconnu,malettre et lemot d’Andrew. Je plaçai le tout dans un coin, priant pour queSamarrive au plus vite.Lafatiguemegagnaitdéjàetjevoulaisjusterentrerchezmoipourdormir.
Jem’aperçusqueGregoryavaitoubliésontéléphone.JelerangeaivivementsouslepupitretoutensignantlebondelivraisonpourLynne.Lecoursierpartitaussivitequ’ilétaitvenu,alorsquejemettaisdecôtélecolispourLynne,mesyeuxretombèrentsurletéléphone.
Gregoryavaitlenumérod’Andrew.Etsij’avaiscenuméro,jepourraispeut-êtretenterdenouveaudeluiparler.Oupeut-êtrequejepourraisaumoinsluienvoyerunmessage,pourprendredesnouvellesdeMeghan…Oupeut-êtrequepasserparNathanseraitplushonnête…Voiremêmeluienvoyerunmail…
Dansl’instantquisuivit,jemesurprisàéplucherlerépertoiredeGregory.Iln’yavaitrienàBlake,ni àAndrew. J’abandonnai le répertoire et consultai les derniers appels composés. Lemême numérorevenait quatre fois depuis hiermidi et les appels semblaient être assez longs. Je notai aussi vite quepossiblelenuméro,mepromettantdetentermachance.
– Jecroisque j’ai laissémon téléphone, lançaGregoryen revenantversmonpupitre,me faisantbondirsurmespieds.
–Je…euh…oui,bégayai-jeentriturantl’appareilentremesmains.Ilmefitunsourireetjecomprisalors:sonoubliétaittotalementprémédité.–AndrewBlakeestjusteunhomme,Kat.–Et?fis-jeencraignantpresquelaréponsedeGregory.–Etmêmesijedevraist’envouloirparcequ’ilm’asacrémentbottélesfessesaprèst’avoirvueà
l’hôpital,mêmesijedevraistemaudireparcequetuasfaillimefairelouperlerencarddemavie…–Gregory,tuvasfairedelaprotectionrapprochée,çan’aRIENd’unrencard!–EtmêmesituremetsencausemarelationavecMeghan,continua-t-ilenignorantmaremarqueet
monsouriremoqueur,jecroisquetudevrais…lemettredevantlefaitaccompli!–J’aipeurdenepascomprendre.–Généralement,êtrenueaide!–Lynnearaison,tun’esqu’unpervers!ris-jeauxéclats.–Peut-être,maisçatefaitrire…Etjecroisquec’estaussidanslalisteinterminabledesfonctions
queBlakem’aconfiée!–Passerpouruncharlatandépravé?tentai-je,dubitative.–Tefairerire,riposta-t-ilavecsérieux.Ilm’adit:«Assurez-vousqu’elleriedenouveau.»Monrirefrancs’éteignitdanslasecondeetjesentisGregoryprendremamainpourlaserrerdansla
sienne.Lepeudeforcequimerestaits’évaporaetjeravalailabouledechagrinquiseformaitdansmagorge.
–Iladitça?soufflai-je.Gregoryopinadoucement,sonvisaged’oursgéants’ornantd’unsourirecompréhensif.–Etilytenaitvraiment…Àçaetàtasécurité.Maisjeprésumequetulesaisdéjà!ajouta-t-ilsur
letondelaplaisanterie.Je serrai la main de Gregory un peu plus fort. Ce que je craignais était en train d’arriver. La
dévastation, la peine, le chagrin, la douleur étaient en train de me consumer maintenant. Savoir que,malgrénotrerupture,Andrewtenaitàmoiétaitencoreplusdouloureuxquenotreséparation.
–Tudevraisrentrercheztoi,proposaGregory.JevaisdireàLynnequetunetesenspasbien.–Lynnevarâler,protestai-jeenrepensantàtoutescesmisesengarde.–Net’enfaispaspourelle.Ellepeutrâlerautantqu’elleveut…Tucouchesavecl’empereur!–Gregory!Cen’estplusvraidetoutefaçon!Etvas-tucesseraveccetteimaged’empereur?–J’airevuGladiatorhiersoir…Ehbien,jet’assurequecefichuempereurn’avaitriendesympa.
Blakeàcôtépassepourunvraiboute-en-train.–Andrewestdrôle,ledéfendis-jeenessuyantunelarmequicoulaitsurmajoue.–C’estça!EtmoijesuisSpartacus?–TuassauvéMeghan!–Mouais…Allez,sauve-toi…Jevaisallerfairemonrapportàl’empereur,sourit-il.Je rassemblaismes affaires, reconnaissante enversGregory et sa faculté àme changer les idées.
Parlerd’Andrewdemanièrelégèreétaitassezrelaxant.
–Donc,jevaispouvoirluidirequetuasrià7h23,etquetuasquittéletravailsurtesdeuxjambesà7h28,commenta-t-ilenregardantsamontre.
– Je doute que ce soit vraiment le rapport qu’il attende, commentai-je alors que Gregorym’accompagnaitauxvestiaires.
–Laplupartdenosconversationscommencentpar«Commentva-t-elle?».Entoutehonnêteté,jedoutequ’ilmeparledel’étatdelacouched’ozone!
Jeluisouris,étrangementrassuréeparl’idéequ’Andrewveilletoujourssurmoi.Gregorym’ouvritlaportedesvestiairesdupersonnel.
–Merci,Greg,soufflai-jeavecgratitude.–De rien…Jenedispasqu’il va t’ouvrir lesbras…Il est sacrément têtu sur le sujet, etmême
passablementborné.Ilrisqueaussisansdoutedemevireretdem’expédiersurPluton,maistevoirtristeàcausedeluiestvraimentinsupportable.
–Peut-êtrequejedevraisrespectersadécision…–Etdepuisquandfais-tucegenredechoses?Jet’aiconnueplusvindicative!–Etjemesuiscassélesdents!Sanstoij’auraissûrement…–Sansmoituauraisétéuneteignedejournaliste,undecestrucsquis’accrochentjusqu’àceque
morts’ensuive…TudevraisenvisagerAndrewBlakecommeunsujet…d’investigation.–Parcequetucroisquejenel’aipasdéjàfait?souris-je.Iléclatad’unriregrasetmesalua.Jemechangeairapidementetsortisdel’hôtelenm’assurantqu’ilyavaitquelqu’unpouraccueillir
les clients. Je me promis d’appeler Lynne pour m’excuser de fuir en catimini. Nous devions dînerensemblecesoiretjesavaisqu’elleallaitmecuisinersurAndrew.Jepostaimalettreàl’inconnuavantdemedirigerverslabouchedemétro.
Perduedansmessombrespensées,jefixaimespieds,luttantcontrelesfortesbourrasquesdevent.Cen’estqu’ensentantunchocauniveaudel’épaulequejerelevaislenez.
–Pardon,marmonnai-jesansvraimentfixerleregarddevantmoi.–Kat?s’exclamalajeunefemmebrune.Jemisquelquessecondesàlaresitueravantd’esquisserunfaiblesourire,àpeinepoli.Lameilleure
amiedeDaniel…–Jodie,murmurai-je.Désolée,jenet’avaispasvue.–Est-cequetoutvabien?s’enquit-elleenpenchantlevisagepourtenterd’interceptermonregard.–Justefatiguée…etfrigorifiée.–Danielm’adit…pourvousdeux.Jesuisdésoléequecelan’aitpasfonctionné.–C’estuntypebien,jesuiscertainequ’ilretrouveraquelqu’untrèsvite.–Lesrelationsamoureusesnesontjamaissimples,lâcha-t-elle.Jeluilançaiunregard,cherchantlavéritablesignificationdesadernièrephrase.–Moi-même,j’avouequej’airenoncé,plaisanta-t-elle.Ellem’arrachafinalementunsourireetmeproposad’allerboireuncafé.Jedéclinaipoliment,trop
fatiguéepourresterpluslongtempshorsdemonlit.–Jevaisrentrerchezmoi,cetempsestatroce,tuallaisauPeninsula?demandai-jeendésignant
l’hôtelderrièremoi.–Ohnon…Moinssexy:j’allaisfaireunelessive!Elledésignaunsacdevoyage,monstrueuxetvisiblementlourd,qu’elleportaitdelamaindroite.–Danielestunevraieplaieaveclestâchesménagères.Heureusement,jerentrebientôtàlamaison.–D’accord,acquiesçai-jeenregardantmamontre.
–Rentrecheztoi,tuasbesoindedormir.Elle me frappa amicalement l’épaule, comme l’aurait fait une vieille connaissance. Je souriais
franchementcettefois,songeantquej’auraisaiméavoiruneamiecommeelleàmescôtés,encemoment.Lynneétaitsûrementconcentréesursonmariage,etellen’avaitjamaisacceptémarelationavecAndrew.Jodies’éloigna,mesaluantd’unmouvementdebras.
–Kat?cria-t-elle,mefaisantpivoterpourluifaireface.–Oui?–J’espèrequ’onaural’occasiond’allerboirececaféunjour…–Quandtuveux!Ellemelançaundernierfrancsourire,etcesimplesigned’intérêtmeréchauffalecœur.Jerentraichezmoi,exténuéeparmanuitetparmaconversationavecGregory,maismoinsminée.Je
medéshabillaidansmonsalonetmemisaulitdanslafoulée.Monsommeil,contrairementàlaveille,futplutôtagité.
***
Jemeréveillaidifficilement,aveclasensationd’êtreencoreplusfatiguéequ’avantd’avoirdormi.Jeme fisun thé et trébuchai surundemes cartons en ressortantde la cuisine.Ledossierque j’avaisétabli surEleanor s’éparpilla au sol et je pestai contremamaladresse. Je rangeai le tout rapidement,entassant lespapierssur lecanapéavantdem’yasseoir.Lemotd’Andrewmenarguait.Gregoryavaittentédemerassurer,maisjeredoutaisvraimentdelirecequ’ilm’avaitécrit.
Jeposaimonmugsurlatableetouvrisl’enveloppe.L’écriturenetted’Andrewm’agressapresque.Ilnes’agissaitenriend’unmotgriffonnéàlava-vite.Andrewavaitquittélasuitedansl’après-midi,jeprésumaisqu’ilavaitécritcesquelquesmotsavantdequitterNewYork:
Kathleen,Mercid’avoirpartagéunmomentdemavie.Tuyasapportéplusenquelquessemainesquecertainsenplusieursannées.Jenedevraispasm’enétonner.Danscedomaineaussi,tuesuneexception.Andrew.
Mesmainstremblaientquandjerelâchaislapetitenotedepapier.Entroislignes,ilétaitparvenuàdécuplerl’étatdemanque.Jefermailesyeux,espéranttrouverdesressourcesencoreinexploitéespourretenirmeslarmesetmonamertume.
Jedécidaidepasseroutreetfinismonthéaussirapidementquepossible.J’avaisbesoindeprendrel’air.Etsurtout,j’avaisbesoindemeracheteruntéléphone.Jepassaiausupermarchépouruneopérationravitaillementetrentraichezmoienfind’après-midi.
***
DîneravecLynnem’effrayait:jecraignaissesremarquessurlafindemonhistoireavecAndrewetjecraignaisencorepluslesréactionsquecelaallaitprovoquerchezmoi.Plusd’unefois,j’avaisétédureavecelleconcernantsarelationavecPhilip,jemedoutaisqu’àlapremièreremarquesurAndrewj’allaisexploser.Afindem’assurerquetoutsepasseraitbien,j’invitaisAngelaqui,heureusementpourmoi,etpourmonamitiéavecLynne,étaitlibre.
Je soupirai de soulagement et me décidai à m’activer pour préparer un dîner agréable. Mondéménagement devait avoir lieu avant la fin de la semaine. Je vidai donc les tiroirs non essentiels,
retrouvantainsiàmonchevetl’ensembledeslettresdel’inconnu.Les six enveloppes étaient classées par ordre chronologique. J’avais la sensation de lui écrire
depuisdesannéesalorsquecelanefaisaitquequelquessemaines.Jesourisensongeantàsadernièrelettre.Ilétaitheureux,vraimentheureux.
Jeretournaidanslesalon,posantmeslettressurlatablebasse,avantdemonterunnouveaucarton.J’yglissailesvestigesdemonancienneviedejournaliste,vestigesquitenaientdansundossierépaisquejen’avaispasrouvertdepuisdeslustres.J’ajoutaiquelquesphotosfamiliales.Jemepromis,aupassage,d’appelermonpère,avantqu’ilnelancelamoitiédelapolicedecepaysàmarecherche.
Jerécupérai ledossierd’Eleanoret leglissaidans lecarton.Montéléphonevibra,mesortantdemesdangereusespensées.
Papa.–Kat!seréjouit-ilenentendantmontimide«Allô».Oùdiableétais-tuencorepassée?–Désolée,papa.Mesjournéesontétéunpeumouvementéesdernièrement.Commentvas-tu?–Bien…Maisjemesensseul.Mafillememanque!–Nemefaispaspasserpourlafilleindigne.J’aiappelélecommissariatiln’yapassilongtempset
tunem’aspasrappelée!–Certes…Baileym’aprévenu…Maismes journéesontétéunpeumouvementéesdernièrement,
sourit-il,unpeumoqueur.–As-tujusteappelépourmefaireculpabiliser?raillai-jeenretournantencuisineavecmonmug.–Non.Àvraidire,jevoulaism’assurerquetoutallaitbien.Le ton de sa voix passa d’un extrême à l’autre.Mon père avait toujours eu une nette tendance à
l’exagération,meprotégeantoutrageusementdetoutetden’importequoi.Lepireavaitétél’annoncedemondépartpourNewYork.Ilavaitencaissélanouvelleavecunedignitéetuncalmepresquesuspect.Quelquessemainesplustard,enretournantàlamaisonpourNoël,j’avaisretrouvéunrapportdepolicecontenantuneenquêtedevoisinageassezpoussée.Papaavaitnié…avantd’admettresoninquiétudeausujetd’unrésidentdupremierétage,arrêtéàl’âgede16anspourdétentiondemarijuana.
–Surquias-tuenquêtécettefois?demandai-je,exaspérée,appuyéesurleplandetravail.–Personne!Jet’assure!–Tun’astoutdemêmepasenquêtésurAndrewBlake?m’écriai-je,stupéfaite.–Pasrécemmentnon.–Commentça«pasrécemment»?–Pasdepuislamortdesafemme.–Papa,soufflai-jeensentantlesermonpaternelarriver.Jeneveuxpasparlerdeça.–Kat,sais-tuqu’ilaétésuspecté?–Lerapportditqu’ils’agitd’unaccident!–Parcequetuaslulerapport?s’enquit-il.–Leschiensnefontpasdeschats,papa!Oui,j’ailulerapport.Justeunaccident!Andrew…je
veuxdire…Blakeaimaitsafemme.Commentas-tupulesuspecter?Çan’apasdesens!Papa,tut’enfaispourrien.Andrewetmoi…Disonsqueçan’apasmarché!
–Oh…Jesentisunepointedesoulagementdanslavoixdemonpèreetcelameserralecœur.J’avaisla
sensationétrangequ’ilnemefaisaitaucuneconfianceausujetdemesrelations.–Faisjusteattentionàtoi,chérie,murmura-t-il.Jen’aiaucuneconfianceencetype.–C’étaitunsimpleaccident!–Jesais…Dumoinsj’espère.
–Queveux-tuquecesoitd’autre?Ilyavaitduverglas,elleajustemanquéd’attention…–Mêmeaveclameilleureattentiondumonde,jenevoispascommentelleauraitpufinirsontrajet
avecdespneuslisses!–Despneuslisses?–Parfaitementlisses.Unsouvenirnetdemonadolescencemerevint.Àmondépartpourl’université,monpèrem’avait
offertcettehideuseFord,bleudécoloré.Ilavaitfaitchangerlespneusenprévisiondel’hiver.Cheznous,personnenepouvaitréellementsepermettredenepass’équiperdignement.
–C’est…dingue,soufflai-je,estomaquée.– Ces gens sont bourrés d’argent, mais n’ont aucune conscience des équipements vraiment
nécessaires.Danslecombiné,j’entendislecrachotementtypiquedelaradiodelavoituredemonpère.Ilavait
dûprofiterd’unepausedanssa journéepourm’appeler. Je remismabouilloireàchaufferet retournaidanslesalon.Machinalement,jeglissaileslettresdel’inconnudansmoncarton.
–Kat,lavieilleGrangerfaitencoredessiennes,jedoistelaisser.–Encoredesgaminsquilarendentfolle…– C’est elle la folle, railla mon père. Je t’embrasse, chérie. Sois bien prudente. Je te vois au
mariagedeLynne?–Biensûr !Je tegarderaiunedanse, ironisai-jeensongeantquemonpèren’avaitaucunsensdu
rythme.–Netemoquepasdetonvieuxpèrequit’aimeetqui…–…meprotègetrop,finis-jepourlui.–Prendssoindetoi,chérie.Je raccrochai dans la foulée, jetant négligemmentmon téléphone àmes côtés. Pendant un instant,
j’envisageaideressortir ledossierd’Eleanor,maisrenonçaiaussitôt : jeconnaissaiscettehistoireparcœur…Savoirqu’elleroulaitavecdespneuslissesexpliquaitl’accident.
J’eusuneseconded’hésitationquandmesyeuxretombèrentsurlemotd’Andrew:devais-jegarderunetracedenotrerelation?Peut-êtrequ’uneréponseauraitétédebonton.Jenesavaisplusoùétaitlalimitedansnotrerelation.Ilnevoulaitplusmerevoir,ilvoulaitmettredeladistanceentrenous,maismelaissaitcemot…Etmoi, j’avais justeenvied’entendresavoix,avecce timbresiparticulierquand ilprononçaitmonprénom.
Jefuiscespenséesdouloureuses.ReprendrecontactavecAndrewsigneraitmaperte.Jen’étaispascertainedepouvoirencaisserunenouvelleconfrontation.
Ravalantmapeine,jedécidaideconserversonmessageetlerajoutaidanslecarton.J’enfermailepremierbordavantdem’immobilisernet.
Jesecouailatête,mefustigeantd’êtreaussiidiote.Monimagination,quejecroyaispourtantavoircanaliséedepuisplusieursannées,mejouaitànouveaudestours.Jesursautaienentendantmabouilloiresiffleretretournaiencuisinepourmeverserunenouvelletassedethé.
Portant lemug àmes lèvres, je retournai au salon et fixaimon attention surmon carton àmoitiéfermé. Je posaimonmug, incertaine, avant deme saisir d’une des premières lettres de l’inconnu.Denouveau,jesentiscetressautementparticulierdansmapoitrine,celuiquiaccompagnaitl’arrivéedeseslettresetledépartdesmiennes.
Et,brutalement,celamesautaauxyeux.
CHAPITRE22
Lafinessedel’écriture.L’élancementdesmajuscules.Lafaçondontseformaitlabarredes«t».Laboucledes«a».L’espacemententreleslignes.Jereprislemotd’Andrewetcomparailesécritures.Mesyeuxnaviguaientdelalettredel’inconnu
auderniermessaged’Andrew,relevantunpeuplusdesimilitudes.L’épaisseurdutrait.Lacouleurdel’encre.C’étaittoutsimplementimpossible…Impossible.L’inconnunepouvaitpasêtreAndrew.Ilsétaient
tropdifférents.Je ressortis les lettres et les plaçai, parfaitement alignées, au sol. Accroupie, je comparais les
différentes lettresavec lanoted’Andrew. Ilnepouvait s’agirqued’unecoïncidence…Uneeffroyablecoïncidence.Moncœurfrappait tellementfortdansmapoitrinequej’étaisàpeuprèscertainequetoutl’immeubledevaitl’entendre.Marespirationdevintlourde,pénible,mesmainsétaientmoites,uncreuxétrangeseformaitdansmonestomac…
Jedéglutislourdementetsecouailatêtepourreprendremesesprits.Jedevaisêtrerationnelle.Finalement,jemeredressaietcourusjusqu’autiroiroùrestaientencorecertainestracesdupassage
d’Andrew dansma vie : la carte de visite qui accompagnait inutilement la robe de la réception et lecartondupremierbouquetderoses.Àgenouxsur lesol, jeparcourus les lettres, faisantnaviguermonregarddesunesauxautres,l’incrédulitémesaisissantdeplusenplus…
Andrew.–Impossible…impossible,murmurai-jeeneffleurantleslettresduboutdesdoigts.Ilyavaitforcémentuneexplication,unefaille.Çanepouvaitpasêtrelui.Parcequ’ilyavaitdes
milliersd’hommesdanscetteville,desmillionsdanscepays…Parcequepersonnen’avaitdécemmentcette chance ou cette… malchance. Je ne savais plus. Comment avais-je pu me retrouver dans cettesituation?Commentavais-jepuécrireàunhomme,parleràunautre…etmaintenantcomprendrequ’ilsneformaientquelesdeuxfacettesd’uneseuleetmêmepersonne?
Je songeai à ma dernière lettre. Je m’étais épanchée sur ma rupture avec lui. J’avais dévoilétellement de moi-même dans cette correspondance ! Je ne pouvais pas croire que le destin que jechérissaistants’étaitfinalementretournécontremoi.
Jereprislapremièredeseslettres.
J’aimangéduchocolat.
Mes souvenirs me transportèrent à ma première véritable rencontre avec Andrew. L’assiette dechocolatentrenousdeuxalorsquejefinissaisdefairemacritiquesurPowerfull.
Jevissurlacôteouest.
SanFrancisco.Jerepoussailapremièrelettreetmejetaicommeuneaffaméesurladeuxième.Ilyparlaitdesasolitude,durythmeparfoistrépidantdesavie.Monincrédulitécommençaàs’estomperentombantsurunephraseenparticulier:
C’estprécieuxetrare,pasvraimentpartageable.
«Précieuseetrare»:voilàcequej’avaislongtempsétéauxyeuxd’Andrew.C’étaitainsiqu’ilmedécrivait, c’était cesmots qui déclenchaient d’incroyables secousses dans toutmon corps.Mesmainstremblaient légèrement, mais, étrangement, mon cœur se calma, comme si, finalement, la chose étaitnaturelleetévidente.Tellementévidente.Commentn’avais-jepaspulevoir?
Je frottaismesmains contremon jean etme saisis de la troisième lettre.Celle qui parlait de sapassionpourlepiano.Cellequiparlaitdecettefemmequ’ilavaitrencontrée.C’estàpartirdecettelettrequenos échanges avaient été pluspersonnels.Les échangesdebanalité s’étaient raréfiés, auprofit deconfessionsplussérieusesetpersonnelles.
Laquatrièmelettreneparlaitplusquedecettefemme.Lafemmequiluiavaitfaitprogressivementoubliersonâmesœur.Enlarelisant,jesentismeslèvress’étirerdansunsourire.C’étaitsûrementunelettre qu’il avait écrite lors de notre nuit à l’hôtel. Il n’y avait plus aucun doute. J’étais cette femmesereine,paisiblecommeunlac…encomparaisondel’intrépideetenthousiasteEleanor.
L’avant-dernièrelettreeffaçamonsourire.
Laperdreseraitmeperdremoi.
Exactement ce qu’Andrewm’avait dit avant notre rupture. Exactement les mots que je lui avaisrépétésàl’hôpital.Moncœursecomprimadansmapoitrine,mefaisantpresquesuffoquer.Sij’avaissuvoir dès le début, si j’avais compris bien avant…nous n’en serions pas là. Je n’en serais pas là : àrevivredansmessouvenirsetàtraversseslettresnotrerelation.
Jefinisparladernièrelettre.Celleàlaquellej’avaisréponducettenuit.Ilsesouvenaitparfaitementdenotrerencontre…Moi,jemerappelaisjustel’avoirsnobéaprèsl’avoirdévoréduregardpendantsaconférence de presse. Je l’avais trouvé beau, mais je n’avais aucun souvenir de la couleur de soncostume.
Seulelaprésencedesonalliancem’avaitdouloureusementsautéauxyeux.Jereposailalettreetdenouveaumonregardglissasurnotrecorrespondance.J’auraisaiméenrire,
voireensourire,maisj’étaisjusteestomaquéeetépuisée.Maintenant,chacundesesmots,chacunedesesdéclarationsd’amourmesautaientauxyeux.
Ildisaitqu’ilm’aimait,qu’ilm’aimaitbienau-delàdecequ’ilavaitressentipourEleanor.Ilparlaitdudestin,desélémentsincontrôlablesdesavie,del’impassedanslaquelleilsetrouvait.Jerangeaileslettreset lesnotes,sentantmesyeuxpicoterfortement.Jenepouvaispasycroire:
j’avaismanquél’immanquable.Hagarde,jemeredressaietrécupérailenuméroduNewYorkercontenantl’annonce.
Les larmes au bord des yeux, toutme sembla subitement clair.C’étaitEleanor dont il parlait. Jereposailemagazineetépluchaiunenouvellefoisleslettres.
C’était Andrew. L’homme auquel j’écrivais depuis des semaines, l’homme à qui jeme confiais,l’homme que j’encourageais, c’était lui. Le côté pile et le côté face…Un seul homme. Il nem’avaitjamaisrévélécequ’ilavouaitvolontiersdansseslettres.Ilétaittellementvulnérableetaimant,bienplussensiblequel’hommedepouvoiretdemédiasquej’avaiscôtoyé.
Jem’effondrai finalement surmon canapé, toujours stupéfaite. Ce n’était pas tant la surprise dedécouvrir qu’Andrew était l’inconnu, c’était plutôt la stupéfaction de n’avoir rien vu plus tôt quidominait.Tousces indices, toutesces ressemblances…Mais j’avais inconsciemment refusédevoir lavéritéenface.
Soudain,jemedemandaissiAndrewsavait.Ilconnaissaitmonécriture.IlavaitgardémesnotessurPowerfull,ilavaitlargementdequoicomparer.J’envisageaipendantunmomentdel’appelermais,unefoisdeplus,jerenonçai.
Nousn’étionsplusensemble,etmêmesijemouraisd’enviedeluidirequejel’aimaisencoreplusmaintenant, jedevaismerésoudreàgardercetterelationsecrète.Andrewnevoulaitplusdemoi,maisl’inconnum’écrivait. Je ne pouvais pas briser le seul lien tangible qui existait entre nous deux. Je nepouvaispasperdrelesdeux…
J’étaisentrainderelirelapremièrelettrepourlaénièmefoisquandAngelaannonçasonarrivée.Jeregardais ma montre, constatant que j’avais passé un temps incroyable sur ma correspondance avecAndrew,audétrimentdudîner.Jemeregardai furtivementdans lemiroirprèsde laporteavantde luiouvrir.
–Bonsoir,Angie!dis-jeavecjoie.–Salut,toi!J’airapportéduvin!s’exclama-t-elleenbrandissantlabouteilledevantelle.–Lynnen’estpasavectoi?–Ellenedevraitpastarder…Maisd’aprèssonderniermessage,ellesouhaitaitunemortimminente
àtouscesfichusmédecins.JelaissaiAngelaentrerdansl’appartement,m’excusantpourledésordreetl’empilementdecartons.
Elle balayames excuses d’un geste de lamain, indiquant que les cartons deSteven traînaient encore,alorsqu’il avait emménagéavecelledepuispresque sixmois. Jeposai labouteilledans la cuisineetsortisdeuxverres.
–Tufaistoncourrier?criaAngiedusalon.–Non…non…,dis-jeensortantprécipitammentdelacuisinepourmeruersurlatablebasse.Jerassemblai lesdifférentes lettreset lesmotsd’Andrewprécipitammentpuis lesfourraidans le
carton.Angelamelançaunregardétrange,necomprenantvisiblementpascetaccèsdefrénésie.–Cesontdevieilleslettres,mentis-jepourexpliquermongeste.–Tuasl’aird’ytenir.–Je…Euh…oui.Unvieilami.–Sympal’idéedes’écrire,commenta-t-elleens’installantsurlecanapé.LesseulsmotsqueSteven
melaissesont…lalistedescourses!Saremarquemefitsourire.JerepensaisàAndrew,àsongoûtpourlesvaleurséculées.Jen’aurais
pasdûêtreétonnéedeceslettresmanuscritesetpresqueritualiséesdansleurécriture.–Oui,c’est…chaleureux,soulignai-je.Angelasemblaméditersurmonassertion,puisfronçalessourcils.–Cen’estpasuntrucgenreLesLiaisonsdangereusesaumoins?s’inquiéta-t-elledansundemi-
sourire.
–Non…Non,pasdutout!m’esclaffai-je.Rienquedeschosestrès…banales.Onseparledenosvies,essentiellement.
–Oh…Tuluiasparléd’Andrew?s’enquit-elle.–Plusoumoins.Veux-tuunverredevin?proposai-jepouréluderlaquestion.Jen’attendispassaréponseetallaiencuisinepournousservirdeuxverres.Jerevinsdanslesalon,
nonsansavoirjetéuncoupd’œilàmontéléphone,scrutantl’arrivéedeLynne.–Toutl’hôtelestaucourant,tusais,repritAngelaavecunsourirecompatissant.–Jemedoute.Jesoupiraidenouveau.Êtrel’objetdescommérages,unefoisencore,nemeréjouissaitpas.–Veux-tuenparler?m’interrogea-t-elle.–Jenesaispas…Jenecroispas…Cen’estpasutile,dis-jefinalement.Ilestpartimaintenantet
moi…jedoisreprendremavie.Lasonnetteretentitetj’ouvrisàLynnequelquessecondesplustard.Lestraitstirésetleteintunpeu
pâle,ellemefitunfaiblesourireavantdes’effondrersurlecanapé.–Jehaislescardiologues!grogna-t-elletandisquejeluiservaisunverredevin.–Leséminaireestterminé?–Dieusoitloué,oui!Merci,Kat,sourit-ellefinalementenprenantsonverre.Ilsontfaillimetuer
avecleursexigencesinfernales!Elle but de son vin, visiblement soulagée de ne plus être à l’hôtel, et prit son sac àmain pour
fouilleràl’intérieur.–C’estpourtoi!annonça-t-elleenposantuncuberougequejeneconnaissaisquetrop.Il y eut un silence étrange, comme si aucune de nous trois n’était vraiment prête à formuler ce
qu’elle voyait. Je savais exactement ce qu’il y avait dans cet écrin. Angela me lança un regardencourageantpendantqueLynnefixaitlapetiteboîte,unairsévèresurlevisage.
–Tuneveuxpasl’ouvrir?dittimidementAngela.–Jesaiscequ’ilyadedans.Quandtelesa-t-ildonnées?interrogeai-jeLynne.–C’estNathanquimelesarendues.Commentas-tupufaireça,Kat?–Fairequoi?râlai-je.–Luirendresescadeaux!Vraiment?C’étaitçatapetitevengeancepersonnelle?Jeposaimonverre,prislaboîteetlajetainégligemmentdanslecartonquicontenaitmessouvenirs
d’Andrew.–Findel’histoire,commentai-jeavectristesse.–Kat,tuastort,soufflaAngeladerrièremoi.– Non, elle a parfaitement raison, la coupa Lynne. Toute cette histoire était vouée à l’échec. Je
t’avaisprévenue!Jet’avaisditquec’étaitunemauvaiseidée!–Lynne, tuneconnais riendemonhistoireavecAndrew,m’exaspérai-je.Tu…Tune leconnais
mêmepas,lui.Tuasdécidé,pourjenesaisquelleraison,qu’iln’étaitpaspourmoi.–Parceque,detouteévidence,c’était lecas!semoqua-t-elle.Regarde-toi!Sortiravecluiétait
unemauvaiseidée,etsortiravecluialorsquec’estunclientétaituneidéeencoreplusmauvaise!JelançaiunregardhaineuxàLynne.Angelaselevaettentades’interposer.Jesentaislacolèreme
gagner de plus en plus. J’aimais Lynne… J’aimais son côté drôle et ultra-organisé, sa créativité, sonenthousiasme,maisjenecomprenaispaspourquoiellefaisaitça.
–Parfait,Lynne!J’admets!J’admetsquesortiravecunclientétaitunemauvaiseidée!dis-jeavecuncalmeeffrayant.
–Ils’agitd’AndrewBlake,pasd’un…cardiologuedufinfonddel’Ohioquivients’encanaillerici.
–Lynne,jecroisqu’elleacompris!lacoupaAngelasèchement.Inutiled’enrajouter.Ellesetut,s’apercevantquetirersuruneambulanceneservaitàrien.J’auraisévidemmentpréféré
un soutien compatissant de sa part, voire même juste un silence glacial, mais entendre critiquer marelationavecAndrewétaithorrible.Jefixaistupidementleslettres,medemandantsijedevaisavouerlavéritésurce«vieilami».Maisunefoisencore,jesavaisqueLynnenecomprendraitpas.
–Jesuisamoureusedelui,lâchai-jebrutalement.J’entendisLynnesoupireretdécidaidereprendrelecontrôle.–Jen’ypeuxrien,Lynne!–Tun’ypeuxrien?Tuveuxquejetedonnecombiendebonnesraisons?–Lynne!lamorigénaAngela.–C’estunclient!C’estAndrewBlake,magnatdelapresse!Tun’asétéqu’unjouetpourlui!Ça
n’apasdesensdetemorfondrepourlui.Cen’estpascommesi…commesitoutcelaétaitréel.–C’étaitréel,Lynne.Jerécupérailesbouclesd’oreillesdanslecartonetlesmontraiàLynne.Lacolèrefaisaitplaceà
uneformederageultra-énergisante.DéfendremarelationavecAndrewdevenaitprimordial.–C’étaitréel,répétai-je.Jet’interdisderemettreçaencause!–S’iltenaitàtoi,ilseraitresté…Maisnon,ilestpartiavecsacollaboratrice.–IlconnaîtMeghandepuisdeslustres,explosai-je.JetoisaiLynne,nesachantplussijedevaislaconvaincredelaréalitédemarelationavecAndrew
oujusteencaissercequ’ellemedisait.Soudain,sonportablesonna,brisantlesilencenousentourant.–Tunerépondspas?luidemandai-jeaprèsquelquessecondes.–Riend’important.–Riend’importantcomme«Philipqui tedemandede ramenerson journal»ou riend’important
comme«Nathanquitentedetesauverdetonmariage»?Ellesefigeaetlasonneriedesontéléphones’arrêta,avantdereprendredanslescinqsecondes.Je
sourisàLynne,incréduledelavoirsipeucourageuse.Elleregardaitsonsaccommes’ilétaitsurlepointd’explosermaisavecpourtantl’enviefolledeseruerdessus.
–Ettumefaislamorale?sifflai-je.–Nemélangepastout!m’ordonna-t-elle.Cen’estpasmoiquisemblesurlepointdem’effondrer
dèsquelenomdeBlakeestprononcé.Unpeu surprise, je coulai un regardversAngelapourme rassurer. J’étais forte, quoiqu’endise
Lynne. Elle me fit un sourire compréhensif et je compris que mon corps trahissait plus que je ne lepensaismesémotions.
–Jerêveoututentesdechangerdeconversation?ironisai-je.–Jenechangepasdeconversation!OnenétaitàBlakeettoi…–Et c’est terminé, tu l’as dit toi-même !Maintenant, vu que tu sembles si bien informée sur les
relationshumaines,peut-êtrepeux-tum’éclairersurlegenrederelationsquetuentretiensavecNathan?–Jenecroispasquecelateregarde!– Peut-être que ça intéresserait Philip de savoir que sa future femme entretient une relation
clandestineavec…–Cen’estpasunerelation!hurla-t-elle.–Alorsc’estquoi?Unedistraction?Ahnon,pardon,çac’étaitmoi…Lefameuxjouet!Lynnemejetaunregardetilmesemblaquesonvisageparfaitementstoïquesevoilalégèrement.Je
m’installaiprèsd’elle,effaréeparsonaveuglémentetparlaluttequejedevinaisenelle.Laculpabilité
la rongeait de toute évidence, etmême si j’avais enviede la gifler pourqu’elle se réveille, je savaisqu’affronterLynnedecettefaçonnemèneraitàrien.
– Comment oses-tu juger ma relation avec Andrew quand tu n’as même pas le courage dereconnaîtrequetuvasdanslemur?
–Tun’asplusderelationavecAndrew,corrigea-t-elle.–Ça,c’estmonproblème!TufaiscroireàNathanquequelquechoseestpossible…Etjetrouve
ça…assezhorrible!–Jen’entretiensrien…Ilpassesontempsàm’appeler.–Chosequ’ilneferaitpass’ilsavaitàquois’entenir!Elletremblalégèrementetsonregardsetroubla.Jenesavaispluspourquij’avaisleplusdepeine:
Lynne,aveuglée,ouNathan,complètementamoureuxd’elle.Sontéléphonesonnadenouveauetsesyeuxs’embuèrent.
–Jecroisquenousdevrionschangerdesujet,tentaAngela,malàl’aise,faisantmined’ignorerlasonnerie.
–Réponds,Lynne…Jet’enprie,réponds-lui.Letéléphonesetutetunsilencelourdetpénibles’installa.JefixaiLynne,cherchantàcomprendre.
Ilyavaituneformededétressedanssonregardquejen’arrivaispasàanalyser.–Ons’estembrassés,avoua-t-elledansunchuchotementàpeineaudible.LesépaulesdeLynne s’affaissèrent et elle semblaenfin soulagéede s’être libéréede son secret.
Ellemefixaetjelavis,auborddeslarmes,incapabledesavoirquoifaire.– Je suisamoureusedePhilip,bégaya-t-elle.Et…j’aiembrasséunautrehomme. Jenepeuxpas
faireça.Jenepeuxpastoutplaquerpour…Sa voix s’éteignit, nous laissant comprendre qu’elle l’avait envisagé. Peut-être seulement
brièvement,maisellel’avaitenvisagé.–Nathant’aimebeaucoup,larassurai-je.–Jesais.MaisilyaPhilip…–Lynne,tunepeuxpasrestercommeça!–J’aimePhilip,répéta-t-elle.–Alors,danscecas,ilfautquetuparlesàNathan.Ellemefixa,incréduleethésitante.Lynnemeregardaitcommesijeluiavaisannoncémondépart
pourMars.Jedécidaideluilaisserunpeuderépit.–Bien.Sinouscommandionsàdîner,proposai-je,pastrèsenthousiasteàl’idéedecuisiner.–Super!s’enthousiasmaAngelaenselevantducanapé.Jemeursdefaim!Ellesedirigeavers lacuisineet j’enprofitaispourlaisser l’atmosphèresedétendreunpeuentre
Lynneetmoi.–Tucroisvraimentquejedoisl’appeler?demanda-t-elle.–Lynne,toutecettehistoire…c’estjuste…del’honnêteté.EtpasseulementenversNathan.–Promets-moideneriendireàPhilip.–Promets-moideréfléchiràtoutça.Jeluifisunsourireetsonvisagerayonnaunpeu.Jemefichaisdegardersonsecret,laseulechose
quimeplaisait,c’étaitdevoirqu’elletenaitassezàsarelationavecNathanpourprendresontéléphoneetluienvoyerunmessage.Curieusement,mespenséesvagabondèrentjusqu’aupremierbaiserquej’avaiséchangéavecAndrew.Àcetinstantprécis,j’avaisdevinéqu’ilsepassaitquelquechose,quecebaisern’étaitpas«juste»unbaiser.
Angela appela le restaurant chinois en bas de ma rue et se dévoua pour aller récupérer noscommandes.Pendantcetemps,jelaissaisLynnes’isolerdansmachambre.Elleeutunbrefregardemplideculpabilitéalorsqu’ellecomposaitlenumérodeNathan.Jetentaidelarassurerd’unsourire.
Le dîner fut calme et apaisant.Nous parlâmes furtivement dumariage de Lynne et je ne fus pasvraiment surprise qu’elle-même élude le sujet. Je m’autorisai un épanchement sur ma rupture avecAndrew,expliquantàmesamieslacauseprincipaledenotreéloignement.
–Etautravail?demandafinalementLynneenfinissantsescrevettes.Tuvaspouvoir…gérer?–Jenesaispas.Meretrouverdevant lui…Oupire, luiparleret fairecommes’ilnes’était rien
passé.–Jesaisquetupeuxlefaire,assuraAngela.–Madernièrenuitaétédifficile,moralement.Là, jevaisdevoir fairemonmaximumpouréviter
Daniel.–Danestuntypebien,soufflaLynne.–Notre rupturen’apasété…amicale. Ilpensaitqu’Andrewmepiétinerait, et c’estquasiment le
cas,maintenantquej’ypense.–Techniquement,ilestpartipourterendreservice,argumentaAngela.–Lerésultatestlemême:jesuislessivée,commes’ilavaitemportéunepartiedemoi.Jenesuis
plusmoi-même.Etmêmesijel’admetsvolontiers,jenecroispaspouvoirentendreDanielmedirequ’ilavaitraisondepuisledépart.
–Jecomprends,murmuraLynne.Veux-tuquejelebriefeàcesujet?Jefronçailessourcils,necomprenantpasoùellevoulaitenvenir.–Kat,tuvasdevoirgérerAndrewBlaked’icipeuetjongleravecDaniel…Sijepeuxt’aider…–Nathanauneinfluencetellementénormesurtoi,souris-je.Ellehaussalesépaulesenrougissantlégèrement.Lynnenem’avaitpashabituéeàcegenred’élans
généreuxetdésintéressés.–Merci,Lynne,soufflai-je,pleinedegratitude.Peux-tumemettreencongéspourlasemaine?Ça
mepermettradegérerledéménagement.–Sansproblème…Tureprendraslundi,affirma-t-elleenmedésignantavecsafourchette.Je la remerciai d’un nouveau sourire et nous finîmes notre dîner tranquillement. Mes amies
quittèrentl’appartementàprèsdeminuitetj’étreignisLynneavecforce.Mêmesinotredisputeavaitétéviolente,jesavaisquelerésultatenvalaitlapeine.
–EmbrasseNathanpourmoi,murmurai-jeenlaserrantcontremoi.–Jeluiaiditdebotterlesfessesd’Andrew!rit-elledoucement.–N’enfaispasundommagecollatéral!Etréfléchisàcequejet’aidit.Elle s’écarta de moi et acquiesça. Je remerciai Angela pour son soutien. Elle m’assura que ce
n’étaitrienetmepromitdeparleràDanpourqu’ilnem’importunepas.–Detoutefaçon,jenecroispasqu’ilsoitremisdevotrerupture,ajouta-t-elle.–Ahbon?m’étonnai-je.–Ilesttrèsrenferméetneparlequetrèspeu.Commes’ilnevoulaitpasfairedevagues…Aprèsledépartdemescollègues,lesilenceétouffantdel’appartementrefitsonapparition.Lapaire
debouclesd’oreilles reposaitdans lecarton. Je récupérai l’écrinet leposai sur la table.Andrewmemanquaitencoreplusmaintenant.Jereprisleslettresdel’inconnu,désormaisdémasqué,etmereplongeaidedanspendantunepartiedelanuit.
***
Lesurlendemain,jebouclaimonderniercarton,attendantlecamiondedéménagement.Toutesmesaffairesétaientsoigneusementempaquetées.Lesbouclesd’oreillesétaientdansmonsacàmain.J’avaisété incapable de les remettre dansun carton et de le refermer ensuite. Jem’attachai aux traces demarelationavecAndrew:ses lettresetsesbijoux.Mais les jourspassant, jecommençaisàmefaireuneraison:ilnereviendraitpas.
Cefutavecenthousiasmequej’aménageaimonnouveauchez-moi.NouvelappartementsansaucunsouveniravecAndrew.Leslettres,empilées,trouvèrentleurplacedansuntiroir.Jedisposailesbouclessurmonchevetetpassaiensuitelasoiréeàdéballermesaffaires.
Cetappartement,plusgrandqueleprécédent,meparaissaitunpeuvide.Moncanapéoccupaitunepartiedelaplace,maislerestedeladécorationétaitfranchementminimaliste.Mesphotosprirentplacesur un des murs. Malgré tous mes efforts pour m’occuper l’esprit, il fallait admettre qu’Andrew memanquait toujours.Mes soirées étaient dédiées à la relecture des lettres. Je les connaissais par cœurdésormais.
Lesdeuxdernièresm’étaientpresqueinsoutenables.Parcequ’ilparlaitdemoi,desessentiments,etquejemedemandaismaintenantsitoutcelaavaitvraimentexisté.
***
Levendrediaprès-midi,jepassaiàl’hôtel,assurantàLynnequejepourraisreprendremonservicelundisoir.
–Tuessûre?–Certaine.J’aibesoindetravailler…Histoiredepenseràautrechose.–Ettupourraspenseràautrechoseenbossantici?–J’yarriverai,Lynne…Jemesensdéjàmieuxd’avoirdéménagé.Tul’asdittoi-même,jen’aipas
euunerelationtrèslongueavecAndrew.Mais,mêmeàmonoreille,mavoixmesemblaterneetpeuconvaincante.Notrerelationavaitété
forte,violente,etjem’yétaisjetéetêtelapremière,persuadéequeriennepourraitnousarriver.–Commetuveux,avaitalorsabdiquéLynne.Ensortantdesonbureau,jecroisaiGregory.Cedernier,aprèss’êtreassuréquetoutallaitbien,me
questionnasurmondéménagement.–Ilademandédetesnouvelles,tusais.–Toutvabien,Greg,lerassurai-jeautomatiquement.–Etilm’ademandétanouvelleadresse.–Tulaluiasdonnée?–Jenel’avaispas!–Nelaluidonnepas.–Kat,c’estjustetonadresse.–Non.Ilavouluqu’ons’éloigne.Qu’ilenassumelesconséquences.Jetentaideprendreletonleplusglacialpossible.Lavérité,c’étaitqu’enluidonnantmonadresse,
j’allaisdenouveaucroirequ’ilpouvaitdébarquerchezmoiouqu’ilpouvaitmefairelivrerdesfleurs.Jen’avaispasbesoindeça.
–Kat…,avait-ilsoufflé,unpeudépité.–Greg,jenechangeraipasd’avis.Ilapeut-êtrel’habitudedevoirlesgensacquiescerentremblant
àtoutessesexigences,maispasmoi.
Ilme fixaet sembla réfléchir àceque jevenaisde luidire. J’étais sûredemadécisionet jenevoulaispas jouerauyoyoetcroirequ’Andrewallait revenirdansmavie,quand,de touteévidence, ilavaittoutfaitpourmerayerdelasienne.
–Jet’aidéjàditquejenecautionnaispasetqu’iln’étaitpasheureuxdesadécision.–Ehbien,qu’ilviennemeledire,lâchai-je,unpeuexaspérée.S’ilachangéd’avissur…moietsur
nous,jesuisprêteàendiscuter.Mais,pourlemoment,jenefaisqu’appliquercequ’ilsouhaite.–Jecomprends,approuvaGregory.Puis-jequandmêmeluidirequetuvasbien?–Commentai-jel’aird’aller?ripostai-je.Mon collègue soupira avant d’opiner, vaincu. Je me doutais que Gregory allait se faire hurler
dessus,maisc’étaitleprixàpayer.–Kat?criaGregoryalorsquejequittaisl’hôtel.Jemeretournai,levoyantavancerversmoiàgrandesenjambées.Iltenaitunelettreàlamainetmon
cœurfitunpetitbonddansmapoitrine.Voilàunedesrareschosesquejenevoulaispasabandonner.MonderniercontactavecAndrew,monseulliendésormaisaveclui.
–C’estpourtoi,dit-ilinutilementenmetendantl’enveloppe.–Merci,Greg.Àlundi!–Àlundi,Kat…Enfin,sijesuistoujoursenvie!Jeluisouris,presquecompatissante,avantdequitterl’hôtelpourdebon.Unefoisdanslarue,mon
corps se détendit subitement. La fatigue prit très vite le dessus et je somnolai dans lemétro, épuiséed’avoir tant lutté contremes souvenirs auPeninsula. En rentrant chezmoi, jemedemandai sima vieallaitdésormaisêtre rythméedecette façonet si j’allaisun jourêtreautrechosequ’unesurvivantedutsunamiAndrewBlakedanscegrandhôtel.J’avais toujoursprismonpartidemoninvisibiliténotoire,desclientsinfects,del’argent-roi.Maismaintenantquej’avaisfranchilaligne,toutétaitdifférent.
Andrewavaitlaissécettetracedansmavie,unecicatriceprofondeetdouloureuse,quiserouvraitàchaqueinstantpassédansl’hôtel.Jememorigénaiensongeantquec’étaitencorelapartielaplussimpleàgérer.QuandAndrewseraiteffectivementàl’hôtel,ilmefaudradéployerd’autantplusdeforces.
Laportedemonappartementfranchie,jeposailalettresurlatablebasse.J’avaislaisséentendreàGregory que je ne voulais plus qu’Andrew intervienne dans ma vie, que je ne pouvais plus avoirconfianceenlui.Etpourtantcettelettremetentait.Parcequej’étaiscertainedenepastrouverl’Andrewque je connaissais,mais un autreAndrew, plus secret et plus enclin à se confier. J’admettais l’aspectpresquemalsainetsadiquedecettecuriosité,maisquelquechose,uneformed’espoirinfime,meforçaitàmainteniruncontact.Leseulcontactqu’ilm’autorisait,àvraidire.
Je craignais ce que j’allais découvrir et de lire ses états d’âme. En dépliant la lettre, j’eus unsentiment demal-être assez perturbant : jeme faisais la sensation étrange d’espionner sa vie privée,d’êtrelà,dansl’ombre,àmerégalerdesesconfidences.Maisjen’avaisplusqueça.
Une relation épistolaire, sans ancrage dans lemonde réel, et vouée à se terminer un jour… J’ymettraiunterme,quandletempsseraitvenu.
ChèreMarie,Commentest-cepossible?Commentunhommepeut-ilvouslaisserpartir,sansmêmeréagir?Vousmeditesqu’ilasesraisons,etjevaisdoncdevoirvouscroiresurparole.J’osejusteespérerquevousallezbienetquelapeinen’apaseuraisondevotreforcedecaractère.Jenepeuxpascroirequeledestinaitétésimauvaisavecvous.Etjepeuxencoremoinscroirequevousle laissiez faire ! Marie, grâce à vos conseils, j’ai remonté la pente, j’ai retrouvé goût à la vie, j’airencontré cette femme formidable…Sans vous, je serais encore ce fantômedésespéré.Vousm’avezapprisàmebattre,àcroireà toutesceschoses invisibleset importantesque lavienousréservait.Àmontour,jevousconjured’ycroire,devousbattre…
Vos mots me hantent encore : vous l’aimez ? Parlez-lui… Dites-lui ce que vous ressentez, faites-luiregrettersadécision…
Jesoupirailourdement.Sileschosesétaientaussisimples…Malheureusement,tomberamoureused’Andrewavaitpresqueruinétoutesmescapacitésderésistanceetaliénémaraison.
Ma vie est compliquée. Elle l’a toujours été et si j’ai cru, pendant un temps, trouver une formed’équilibre,j’aidûyrenoncer.J’aiperdulafemmequej’aimais.Parmafaute,évidemment.Parcequejen’aipasétéassezfortpourluidirequejel’aimais,parcequejen’aipasétéassezfortpourfairefrontetassumermesactes,parcequejen’aipasétéassezfortpourl’écouteretluiavouerqu’elleavaitmillefoisplusraisonquemoi.Maintenant,jesuisseul.Encoreplusseulquejenel’étaisavantelle,avantqu’ellenevienneilluminermavie.Unepartiedemoisaitquec’estainsi,quejenepeuxpaslutter…Maisuneautrepartiedésespèredelarevoiretdelaserrercontremoi.Parcequelasentiràmescôtésmefaisaitsentirvivant,heureuxetfort.
Jerelevaimesyeuxembuésdelarmesversl’écrandelatélévision.J’étaissonnée,hébétéemême.Commentpouvait-ils’ouvrirainsiàuneinconnueetmecacheràmoicequ’ilressentait?
C’estàlafoislapireetlameilleuredécisionquej’aiprise.Lameilleurecarjel’aifaitpoursonbien;lapireparcequejeluiaifaitdumaletquejenepeuxpaslaconsoler.Sij’avaisseulementl’occasiondelefaire,delavoir,delaserrerdansmesbras.Sij’avaissu,j’auraisfaitleschosesdifféremment.J’aisentidansvotredernièrelettrequevousétieztriste.Trèstriste.Pourtoutvousdire,j’aimauditcethommedevousavoirfaitperdrelesourire.Maisjesaisquevousnefaitespaspartiedesfemmesqu’onoubliefacilement.Et jesaisquevousêtesforte,courageuseet impétueuse.Jenevousautorisepasàvouslaisserabattre.Cedroitm’estexclusivementréservépourlemoment.Avez-vous seulement remarqué l’ironie du destin ? Vous à New York, moi sur la côte ouest…Finalement,noussommesaussiseuls l’unque l’autre.Nosdestinssontsimilaires.Laseuledifférencequejeconstate,c’estlechoix.J’aichoisid’êtreseul,pasvous…Nesuivezpasmonexemple.Faitesleschosesdifféremment…J’osecroireque,làencore,nousnousressemblons.Jevousembrasse,Votreinconnu.
Je reposai la lettre, incertainedemonétat. J’étais à la foisdévastéeet enmême temps rassurée.Avecironie,jeconstataiquelesavoirmalmefaisaitpresquedubien.
Jen’étaispaslaseuleàsouffrirdumanque.
***
Le lendemain, aprèsunenuit de sommeil agité et une séance intensede rangement, jem’installaidevant la télévision,prêteàm’abrutirunpeuplus.La lettred’Andrewétaitpliéesur la tableet jemedécidais à la relire pour une énième fois, relevant à quel point il se sentait dépassé par la situation.Andrew,pourquoiavoir faitça?Pourquoiavoirvouluaffronterça seul?Cen’étaitpasainsique leschosesauraientdûsepasser.Jemeperdisdansmessouvenirsaveclui,etparticulièrementdansceuxquejevoulaisrefouler.
Sonsouriresatisfaitetpresquesuffisant…Safaçondemeserrercontreluiàmonréveil…Sesbaisersdévastateurs…Lecontactdeseslèvresdoucescontreledosdemamain…Je soupirai et dépliaimes jambes calées sousmes fesses pour récupérer la télécommande de la
télévisionafind’entamerleritueleffrayantduzapping,avantdem’arrêtersurunfilmsansintérêt.Jedusm’endormircar,quandjerouvrislesyeux,lanuitétaittombée,noired’encre,surlaville.
***
Les informations de 23 heures touchaient quasiment à leur fin. J’allais éteindre quand une imagereprenantlelogodeBlakeMediasattiramonattention.J’augmentailesonavantdecomprendredequoiils’agissait.LaréceptionàSanFranciscoétaitenfaitungaladecharité.
Une jeune femme blonde, outrageusement maquillée, était sur place et se chargeait de faire uncommentairedétaillésurl’événementmondaindelasoirée.
–AndrewBlakeestattendud’icipeudetempspourledînerquiseradonnéauxgénéreuxdonateursdel’hôpitalpourenfantsdeSanFrancisco.Cedernierdevraitinaugurerlasoiréeparundiscoursavantdepartagerledîner.Lesplacespourcettesoiréesesontarrachéesàprixd’oretc’esttoutlegratindeSanFranciscoetdesenvironsquiestattendu.Jevousrappellequel’hôpitalestencoursderestaurationsuite à un incendie qui a ravagé les services de chirurgie. On sait Andrew Blake particulièrementconcernéparlesujet,etiln’apashésitéàfaireundonimportantpourlancerlespremierstravauxauplusvite. Depuis le décès de sa femme, ses apparitions sont très rares. Son intervention ici est donc unévénement.Lesspéculationssursavieprivéevontbontraindepuisquelquessemainesmais,selonnosinformations,AndrewBlakeneseraitpasaccompagné.
Je secouai la tête.Une fois deplus, les journalistes sepréoccupaient de savie privée.Lesyeuxrivéssurl’écran,jescrutailesimagesdelafouledensequientouraitl’entréedel’hôtelSheraton.
– Toutefois, lemystère plane toujours sur la jeune femme qui l’accompagnait récemment àNewYorklorsdulancementdesonmagazine,Powerfull,surlacôteest.AndrewBlakearefusédecommenterquoiquecesoit,indiquantquesesnombreuxdéplacementsàNewYorkétaientavanttoutprofessionnels.
Brutalement, la journaliste disparut de l’écran et la caméra fit un plan sur un véhicule noir, sepostant près de l’entrée. Je retins mon souffle, espérant voir Andrew, même furtivement. J’étaistotalementhypnotiséeparl’écran,lesdoigtscrochetéssurlatélécommande.
Finalement,ilsortitdelavoiture.J’approchaidel’écran,distinguantsasilhouettelongiligne,miseenvaleurparun élégant smokingnoir.Leparterrede journalistes sepressaunpeuplusvers l’entrée,pendantqu’Andrewcontournaitlavoiturepourouvrirl’autreportière.
–Non,non…Tuétaiscenséêtreseul,gémis-jeavecdésespoir.SiAndrewsemontraitavecuneautrefemme,celasonneraitmaperte.Cen’étaitpasquemajalousie
quiparlait,c’étaitsurtoutmacolèrecontrelui.S’ilnepouvaitpasgérernotrerelation,commentpouvait-ilengéreruneautre?
IltenditlamainetMeghan,éblouissantedansunerobedecocktailvertémeraude,apparut.Ellecalasamaindanscelled’Andrewetun troumonumental secreusadansmonventre.Meghanétait superbe,souriante.EtAndrewluisouriaitaussi,alorsqu’ilssedirigeaientverslesjournalistes.
Derrière eux, j’aperçus furtivement la silhouette imposante de Gregory, les suivant à distance.Andrewsetournaversluietluiadressaungestepresqueimperceptibledelatête.Gregorylesrejoignitetseplaçaderrièreeux.Lacaméraabandonnaleplanlarge,etuneautrepritlarelève.Levisaged’Andrew,souriantetbeaucommejamais,illuminal’écran.
–MonsieurBlake,qu’attendez-vousdecettesoirée?hurlaunjournalisteentendantunmicro.– Soulever beaucoup de fonds… Reconstruire l’hôpital est primordial, et j’espère que tous les
invitéssaurontsemontrergénéreux.–Avez-vousdécidéderefairedesapparitionspubliques?enchaînaunautrehomme.–Uniquementpourlesévénementsd’importance.–Pourunhommedemédias,vousavezétéplutôtabsentde lascènepubliquedepuis ledécèsde
votrefemme.
–Eneffet,avoua-t-il.Son sourire se défit un peu et son regard se durcit. Meghan se pencha vers lui et son sourire
réapparut,francetheureux.Cettefois,j’étaisjalouse.J’étaisl’exception,j’étaislafemmequiauraitdûluitenirlamain!–LarumeurditquevousallezvousinstalleràNewYorkdemanièredéfinitive,est-ceenrapport
aveclajeunefemme…–Larumeurestinfondée,ripostaimmédiatementAndrew,lesmâchoiresserrées.Iln’ajamaisété
questionquejequitteSanFrancisco.–Mêmepourcettefemme?–C’estuneamie,riendeplus.Danslecascontraire,elleseraitlàavecmoi.LacamérafitunplansurMeghan,littéralementbéated’admirationenversAndrew.Lesouvenirde
sonaveu–ilavaitcouchéavecelle–merevintentête.J’avaiscruqu’ils’agissaitd’unpassélointain,mais,detouteévidence,ilsvivaientunretourdeflamme.
–MademoiselleStanton?Êtes-vousheureused’êtreici?–Trèsheureuse,etraviedepouvoiraccompagnerAndrew.C’estuncavaliertrèsattentionné.–Seulementuncavalier?risquaunejeunefemmeaudernierrang.–L’avenirnousledira!lançaMeghanavantderedirigersonattentionversAndrew.Il lui sourit avec joie et ils s’écartèrent des journalistes afin de prendre la pose pour quelques
photos.Jereculaidel’écran,meconcentrantnonpassurlevisaged’Andrewmaissursesmains,iltenaitmaintenantMeghanpar la taille. Ils ne laissèrent rien transparaître sur la nature de leur relation et cesimpledoutemefusillaunpeuplus.Levoirrireavecelle,mêmeensachantqu’illaconnaissaitdepuisdes années, et que leur relation était avant tout professionnelle, était vraiment douloureux. Quelquessecondesplustard,ilsentrèrentdansl’hôteletj’éteignislatélévision,écœurée.
Jemeréinstallaisurlecanapé,toisantlalettred’Andrewdevantmoi.Jenesavaisplusàquij’avaisaffaire,quelAndrewjedevaiscroire:celuidelatélévision,paradantavecMeghan;celuideslettres,émouvantetblessé;celuiquej’avaisintimementconnu,arrogantetprésomptueux.
Vousl’aimez?Parlez-lui…Allezluidirecequevousressentez,allezluifaireregrettersadécision…
Siseulement,songeai-je,siseulementleschosesétaientaussisimples.MaisaffronterAndrewétaitau-delàde tout. J’étaisdansunétat lamentable,effondréesurmoncanapé,hagarde, tremblanteetaveccettedouleurlancinantedanstoutmoncorps.Andrew,parsimpleécraninterposéetsansmêmelesavoir,m’avaitanéantie.Sonsourire,sonallure,saprévenance…Tout.Lui.
Jesoupirailourdement,essuyaimeslarmesetmedécidaiàprendreenfinunedécisionraisonnable.LaseuledécisionquimepermettraitdesurvivreàAndrewBlake.
MadémissionduPeninsula.JemecouchaiaumilieudelanuitaprèsavoirenvoyéunmailàLynneluidévoilantmesintentions.
J’envisageai de poser le courrier demain à l’hôtel et de vider mon vestiaire dans la foulée. Je medemandaisencorecommentj’avaispucroireunseulinstantyarriver.Jen’avaispascetteforce,luifaireface, satisfaire ses demandes, l’écouter me parler, respirer son parfum. Trop difficile pour moi.J’abandonnai.
***
Àmon réveil,madécisionmesemblaencoreplusnaturelleet juste.Commeprévu, je laissaimalettre de démission en évidence sur le bureau de Lynne avant de récupérer les quelques affaires quitraînaientdansmonvestiaire.Enpassantdevantlekiosqueàjournaux,jetombaisurunephotod’AndrewavecMeghan,posantcommeuncoupleheureux.Pourunhommequinecouchaitpasavecsesemployées,il tombaitallègrementdans la récidive :Eleanor,Meghan…etmêmemoi, sionconsidéraitqu’ilétaitpartiellementpropriétairedel’hôteletdoncpartiellementmonpatron.
***
Lelundimatin,encoregroggypar les imagesd’Andrewetmadémission, j’ouvris lesyeuxenmedemandantcequejedevaisfairemaintenant.Cettevilleétaitimmense,jepouvaiscertainementtrouverunautretravail,vivreunenouvellefuite.Oubienjepourraisenprofiterpourallervoirmonpère,meviderl’esprit.
Lynnemesortitfinalementdemonengourdissement.–Tudémissionnes?Dis-moiquec’estuneplaisanterie!hurla-t-elledansletéléphone.–Cen’estpasuneplaisanterie.–Alorstudéménages,etensuitetudémissionnes…C’estquoilaprochaineétape,tuvasdisparaître
delasurfacedelaplanète?–Lynne,j’aibesoindefairelevide,lacoupai-jerapidement.–Àcausedelui?–Pourmoi,avanttout.–Kat,jen’aimepasça.MonavissurAndrewBlaken’estpasfranchementpositifencemoment!–Iln’estpassimauvais.Lescirconstancesn’étaientpasavecnous,c’esttout!–Bien…Jenevaispastefairelamorale.Onestlundi,j’aiencoreundecesfoutusséminairesde
médecinsetjesuisloind’avoirassezdecaféinedanslesang.Veux-tudemonaide?–Pourquoi?demandai-je,hésitante.–Pourtrouverduboulot!Jenetelaisseraipaspartiràladérive.Jet’aiconnueavecplusdeforce
queça!–C’estjuste…passager.–Peuimporte,tesavoirinactiveestpirequetout.Jepeuxadmettrequetunerestespasàl’hôtel…
Maisdemanderunemutation,mêmeaufinfonddelaChine,auraitétémoinsdrastique!Laisse-moiaumoinsvoirsionpeuttetrouverunpointdechute.
–OK,abandonnai-jefinalement.
***
Etlesjourspassèrent, lentsettristes,bercésparlamêmeroutine.Lynnemefitparvenirplusieurspropositionsdeposte,maisjeposaiàpeinelesyeuxdessus.JefiltrailesappelsdeNathanetdeGregory.Je savais qu’ils en rendraient compte à Andrew. Je ne voulais plus le laisser pénétrer dans ma vie.Curieusement, je n’avais pas l’impression d’être faible oumisérable.Certes, je n’étais pas en forme,maismonétatserapprochaitplusdelastupeurpermanentequedelaréelletristesse.
Le jeudi soir, affalée dans mon canapé, je fixai mon attention sur l’écran de télévision. Lesinformationsde23heures,unefoisdeplus,défilaientdevantmoisansquejelesregardevraiment.Maiscommeleweek-enddernier,levisaged’Andrewapparutet,bienmalgrémoi,jemesurprisàmonterleson.
– Blake Medias vient d’acquérir un nouveau journal à New York. LeW, magazine branché etculturel,estdésormaislapropriétédugroupedepresse.AndrewBlakeentendainsiasseoirsaprésencesurlacôteest.Àl’annoncedecerachat,l’actionagrimpéenflècheetlespremièrescritiquessesontfaitentendre. La concurrence reproche à Andrew Blake d’étouffer le marché et de fausser les règles, enprenant de plus en plus de participation dans différents titres. Par ailleurs, l’empire Blake entends’attaquer à l’immobilier en répondant àdes appelsd’offres lucratifs sur la constructionde logementssociaux.
LesimagesmontraientAndrewserrantlamaind’undéputé.–AndrewBlakeestattenduprochainementàWashingtonpourrépondreàunpremiermarché.Après
cinqansd’absencetotalesurcesecteur,cederniersembledéterminéàrefaireparlerdelui.Lereportages’achevadansundernierplansurAndrewdevantunbâtimenttotalementdélabré.Àce
rythme,lamoitiédupaysluiappartiendraitd’icidixans.L’espritunpeuembrumé,jegagnaimachambre.Jemetournaietmeretournaiplusieursfoisdans
monlit,avantd’abandonnermalutte.Jemerelevaiprèsd’uneheureplustardpourmepréparerunthé,tourmentéeetagacéedenepasdéterminerlescausesdemoninsomnie.
Jepensaisàlui.Encoreettoujours.Etquandjenelefaisaispas,jelisaisseslettres,résistantàl’enviededévoilerlavérité.Dernièrement, j’avaisdûgéreruninterrogatoiredeLynnesur laprésenced’Andrewounonàson
mariage. Elle m’avait suppliée de venir avec quelqu’un… Non pas pour moi, mais pour garantirl’équilibredelatable.Parfait!
La tentation était trop forte et je retombai dansmanouvelle addiction : relire ses lettres. Jem’yaccrochaiset,généralement,ellesmedonnaientassezd’énergieetassezdeforcespoursurmontercequejeressentais.Maiscettenuit,pouruneraisonquej’ignorais,j’avaisbesoindeplus.Cetterelationsecrètenemesuffisaitplus,penseràAndrewnemesuffisaitplus,levoiràlatélévisionétaitau-dessusdemesforces…Etlesentirdanslemêmeétatquemoimerendaitdingue.
Vousl’aimez?Parlez-lui…Allezluidirecequevousressentez,allezluifaireregrettersadécision…
Voilàcequejedevaisfaire:lerevoir,lesentir,luidirequ’ilavaittort…Luidirequej’étaisMarieet que je savais ce qu’il ressentait. Rien neme retenait vraiment àNewYork, nimon travail nimesamis…Lynneavaitraison:fuiretmerenfermerneservaientàrien.
JerécupéraimonordinateuretréservaiunbilletpourSanFrancisco.Cesimpleachatanéantitlepeud’économies quime restait. J’avais un vol à 6 heures. Je fonçai dansma chambre, remplis un sac devoyagedequelquesaffaires, réunismonessentielde toilette et rassemblai les lettres.Monsac fait, jedevaisréfléchiràunefaçond’escaladerlemontBlake.
À vrai dire, j’aurais dû, avant tout, vérifier sa présence à San Francisco. Jeme décidai alors àreprendrecontactavec la seulepersonnequim’avait toujoursapporté sonaideconcernantma relationavecAndrew.
–Nathan,murmurai-je.Ilfautquevousm’aidiez.
Kata-t-elleraisondes’entêter?QuelaccueilluiréserveraAndrewàSanFrancisco?L’acteVI–l’avant-dernierdelasagaDearYou–vousapporteracesréponses,maispourraitbienensoulever
plusencore…
Tabledespersonnages
Kathleen–Kat–Dillon:Aprèsavoirabandonnésacarrièredejournaliste,Kathleen,jeunefemmede 25 ans, est devenue concierge de nuit dans un palace new-yorkais, le Peninsula. Romantique etprofondémentattachéeàl’importancedudestindanssavie,elleespère,unjour,sereconnaîtredansunedespetitesannoncesduNewYorker.Prenantconsciencedelamonotoniedesonexistenceethantéeparune annonce qui l’a bouleversée, elle finit par y répondre. C’est également au Peninsula qu’ellerencontre Andrew Blake, puissant magnat de la presse, client de son hôtel, un homme séduisant quitroublelaroutineprofessionnelledeKat.
AndrewBlake:ClientduPeninsulaetchefd’entreprisepuissant.Magnatdelapressesurlacôte
ouest,AndrewBlakeestaussiarrogantqueriche.Ilalimentelesrumeurs,attiselesconvoitises,maispeutsemontrerparticulièrementfragilequandons’attaqueàceuxqu’ilaime.
LynneHoffman : Collègue de Kat, en charge de l’événementiel, Lynne est très terre à terre et
raisonnable.TroppourKatquiluireprocheunevieterneetsanspassion.FiancéeàPhilipKingston,elleprépareassidûmentsonmariage.
NathanEvans : Bras droit dévoué d’Andrew Blake, Nathan est un charmeur, bourré d’humour.
C’estauPeninsula,àl’occasiond’unerencontrefortuiteetbrutale,qu’ils’éprenddeLynne,collèguedeKat.
DanielCooper:EngagécommebarmanintérimaireauseinduPeninsula,Danielserapprochetrès
vitedeKathleen.Gregory :Ancienpolicier,GregaconnuKathleenquandelleétaitencore journaliste.Désormais
responsabledelasécuritéduPeninsula,ilagitcommeungrandfrèreavecelle.MeghanStanton:Belle,brillanteettoutàfaitconscientedel’être,Meghanpeutsembler,deprime
abord,glaciale,voiremêmepédante.ElleserévèlechaleureuseetsensibleaucharmedeGregoryaufuretàmesuredel’évolutiondelarelationd’AndrewavecKathleen.
Maria:Fleuristeofficielledel’hôtel.TrèsliéeàKathleen,ellesontunerelationdetypemère-fille
quicompensel’absencedelamèredeKathleen.Debonconseiletdouce,elleesttoujoursprêteàaiderKathleen.
M.Perkins:Directeurdel’hôtel.Joe/Kim:Personneldel’hôtel.Angela:Amie,confidenteetcollèguedeKathleen.Sam:CollèguedejourdeKathleen,c’estluiquil’aforméeàsonposte.Ilssonttrèsamis.JimCooper:PèredeDan.Jodie :Meilleure amie deDaniel depuis l’enfance.Elle est ravie de la relation qu’entretiennent
KathleenetDaniel,quitteàêtreintrusive.MattetAbby:Collèguesd’Andrew.Mattsemontreparticulièrementdésagréableetdubitatifsurla
relationd’AndrewavecKathleen.Walt Dillon : Père de Kathleen, policier. Éloigné géographiquement, il demeure pourtant très
protecteurenverssafille.Ilespèrelafairereveniràsonmétierdejournaliste.EleanorBlake :Décritecommeétantenthousiasteetpétillanteparsonmari,Eleanorestdécédée
dansunaccidentdevoiture,laissantAndrewdansl’incompréhensionetlechagrin.Lauren:Assistanted’AndrewBlake.Nelson:Vendeurdebijoux,représentantdelamaisonCartier.Ilaseshabitudesauseindel’hôtelet
estsurnommé«l’hommequivalaittroismilliards».
HarlequinHQN®estunemarquedéposéeparHarlequinS.A.
Conceptiongraphique:AliceNUSSBAUM
©2013HarlequinS.A.
ISBN9782280300520
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