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DANS LA MÊME COLLECTION

1. Charles Baudouin. — BLAISE PASCAL ou l 'ordre du c œ u r

2. Guy Gaucher. — GEORGES BERNANOS ou l'invincible espérance .

3. Jean Onimus. — LA ROUTE DE CHARLES PÉGUY.

4. Michel Carrouges. — KAFKA CONTRE KAFKA.

5. Lucien Méroz. — RENÉ GUÉNON ou la sagesse initia- tique.

6. Jean Onimus. — PIERRE TEILHARD DE CHARDIN ou la foi au monde.

7. Victor-Henry Debidour. — SIMONE WEIL ou la t r a n s - parence .

8. René Girard. — DOSTOÏEVSKI, du double à l'unité.

9. Charles Baudouin. — JEAN RACINE, l 'enfant du déser t . 10. Pierre Hadot. — PLOT IN ou la simplicité du r ega rd .

11 . Georges Cattaui. — PROUST perdu et retrouvé.

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Hallâj ou

la religion de la croix

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LA RECHERCHE DE L'ABSOLU Collection dirigée par G.-H. de RADKOWSKI

Hallâj OU la religion de la croix par Roger Arnaldez

p l o n

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Photo de couver tu re :

Photo B. N./M.s. OR.

© 1964 by Librai r ie Plon, 8, r u e Garancière , P a r i s - 6

Droits de r ep roduc t ion e t de t r aduc t ion réservés p o u r tous pays, y compr i s l 'U.R.S.S.

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Alâ d'îni 'l-salîb yakûmu mawtî.

C'est dans la religion de la croix que je mourrai.

Diwân d'al-Hallâj.

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AVANT-PROPOS

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Le nom d'al-Hallâj reste lié intimement à celui du grand orientaliste qui l'a fait connaître à l'Occident, Louis Massignon. Ce pionnier des études islamolo- giques en France a, tout au long de sa vie, consa- cré au martyr musulman des recherches érudites dont l'ampleur est stupéfiante, une méditation phi- losophique et théologique dont la pénétration ne sera pas égalée, une sympathie religieuse et humaine qui anime et transfigure les pures et sèches données de l'histoire. Aussi pourra-t-on juger sévèrement cette entreprise de présenter un Hallâj quelques mois à peine après la disparition de ce maître regretté, sans même attendre que soit donnée au public la seconde édition, tant attendue, de la Passion. Mais je n'ai pas voulu faire une étude nouvelle de cet important mystique musulman. Je n'apporte rien qu'une ré- flexion sur tout ce que L. Massignon nous a livré dans ses œuvres, un essai de compréhension d'une expérience religieuse extraordinairement riche, à la lumière de tout ce qu'il m'a dit et fait découvrir en Islam, depuis que je l'ai connu, il y a vingt-cinq ans. Ce livre a été pour moi l'occasion de me rap- procher de lui et de sa pensée.

Lui ai-je été fidèle ? Question délicatel Sa person- nalité vivait d'une telle force, que seul il savait et pouvait dire ce qu'il avait à dire. Après lui, il n'y a pas à espérer le continuer. Vouloir l'imiter ne con- duirait qu'à faire de grossiers pastiches. A quoi de- vais-je me résoudre ?

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On a parfois pensé qu'Hallâj était une création de Massignon. Certes, parmi tous les visages divers q u e les auteurs musulmans donnent de ce mystique, i l fallait choisir : par une critique minutieuse, L. Mas- signon a reconstitué un caractère et une pensée, éli- minant les jugements tendancieux qui cherchaient soit à condamner, soit à annexer le martyr en l e défigurant. Sur ce point, j'ai été convaincu par l a thèse de la Passion, qu'Hallâj est un mystique sun- nite, et qu'il faut le distinguer soigneusement des gnostiques ésotériques si nombreux dans certaines régions et dans certaines sectes de l'Islam.

L'homme dont j'ai voulu suivre la Recherche d e l'Absolu est bien, en ce sens, le Hallâj massignonien.

D'autre part, j'ai cru qu'en écrivant ce livre, j e devais demeurer tel que notre maître m'avait connu, appliquant à mon objet cette forme de pensée qui est la mienne, et dont il me disait un jour, en souriant, qu'elle était restée grecque. Ce n'était pas un com- pliment dans sa bouche. Mais enfin, il n'a jamais cherché à me faire changer, et il m'a accepté ainsi, nonobstant cette fâcheuse hérédité intellectuelle.

Il m'a semblé que la condition essentielle de ma fidélité était de me refuser à jouer un personnage dans lequel il ne me reconnaîtrait pas.

R. ARNALDEZ, Vieux-Marché, ju i l le t 1963.

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ABREVIATIONS

P. = L. Massignon, La Passion d'al-Hallâj.

A. II. = L. Massignon, Akhbâr al-Hallâj ( 3 édition).

Lexique = L. Massignon, Essai sur les Origines du lexique technique de la Mystique musulmane (1954)

Taw. = Kitâb al-Tawâsin.

D. = Le Dîwân d'al-Hallâj, Journal asiatique; 1931. Q. = Qasîda (numéro en chiffres romains). M. = Muqatta' ât (numéro en chiffres arabes). Y. = Yatâmâ (id.).

S. = Coran, sourate... (le premier chiffre est le numéro de la sourate, le second, celui du verset).

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VIE D'AL-HALLAJ

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Vers 244 de l'hégire (858 de l'ère chrétienne) nais- sait à al-Bayda, dans le Fars, Abû Abd-Allah al-Hu- sayn ibn Mansûr, qui devait devenir célèbre sous la désignation d'al-Hallâj, « le cardeur », surnom qui fut interprété dans le sens de « cardeur des cons- ciences », car, à ce qu'on dit, au cours de ses pré- dications dans le pays d'Ahwâz, il révélait à ses audi- teurs les secrets de leurs pensées intimes. D'autres explications, moins merveilleuses, ont d'ailleurs été données. Cela est de peu d'importance. Notons sim- plement qu'il a pu exercer le métier de cardeur de coton, au moins dans les premiers temps de sa vie de soufi, ce qui montre que les pratiques d'ascétisme m'impliquaient pas forcément la retraite hors du monde.

A l'âge de seize ans, il devint le disciple de Sahl al-Tustarî, se mettant, selon la coutume, au service de son maître. Il le suivit dans son exil à Basra quand Sahl fut banni pour avoir soutenu le caractère obli- gatoire de la repentance (tawba). En effet, la disci- pline de ce mystique consistait essentiellement à maintenir dans sa pensée l'idée qu 'on est sous le Iregard de Dieu; et son enseignement rappelait que, pour rester en présence de Dieu, on doit garder son cœur à l'abri des tendances mauvaises de l'âme, par

des actes de contrition incessamment renouvelés, sous peine de perdre la qualité de vrai croyant. La foi

est l'attitude religieuse de l'homme en face du Créa-

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teur et elle fait du fidèle une preuve (hujja) de Dieu devant la création. Elle implique un mystère divins. Cette doctrine servira de base à la méditation person- nelle d'al-Hallâj.

Puis, en 262-875, Hallâj se rend à Bagdad auprès: d'un autre maître en soufisme : Amr al-Makkî Comme Sahl, al-Makkî était sunnite et suivait les t r a - ditions du Prophète (hadîth). C'était un rigoriste qu i se méfiait de toutes les impressions internes que l'homme pouvait éprouver dans son ascèse mystique. Cette rigueur devait marquer son disciple, b ien qu'Hallâj ne l'ait pas suivi dans sa conclusion q u e la grâce divine limite ses effets à disposer le cœur à; une exacte et scrupuleuse observation des prescrip- tions cultuelles.

Hallâj épousa à cette époque la fille d 'un autre mystique, puis il quitta al-Makkî mécontent de c e mariage, et il s'attacha à Junayd qui devint son di- recteur spirituel. Nous aurons à reparler de la doc- trine de ce grand maître du soufisme qui pensa i t que « le saint, dès cette vie, et l'élu, après la mort, sont détruits par Dieu » (P., p. 37), de telle sortes que ce Dieu unique reste seul, isolé du temporel, les créatures redevenant ce qu'elles étaient avant d ' ê - tre, de pures idées. Hallâj resta vingt ans à cette austère école de mortification et d'anéantissement. Il connut cependant d'autres maîtres, en particulier al-Nûrî, ami de Junayd et, comme lui, élève de Mu- hâsibî, dont il développe les idées sur l'amour d e Dieu en une doctrine de pur amour : on doit obéir à Dieu parce qu'on l'aime, sans espoir de récom- pense. Hallâj, « l'amant parfait » de Dieu, appro- fondira la réalité religieuse de l'amour, en évi tant l'écueil du quiétisme qui fait à l 'homme une p a r t trop grande et tombe immédiatement sous les coups de la critique musulmane orthodoxe, que Dieu n'a nul besoin de l'amour des hommes, et qu'il ne ré- clame d'eux qu'une obéissance révérante.

Vers 282-895, Hallâj fait le pèlerinage de La Mec- que et à son retour, après un an de retraite solitaire, ,

il rompt avec les soufis, quitte l'habit de laine blan-

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che (sûf) et commence une vie de prédication, d'a- bord dans le Khurâsân, le Fars et en Ahwâz, puis, après un second pèlerinage, dans l'Inde et le Tur- kestan, et jusqu'aux frontières de la Chine.

L'activité de prédication exposait Hallâj à de gra- ves dangers. Une pensée mystique, même quand elle est d'intention orthodoxe comme la sienne, menace toujours d'ébranler les structures institutionnelles d'une religion. Mais la situation, dans l'Orient mu- sulman de cette époque, était particulièrement grave. Depuis le califat d'Alî, on avait vu se développer un parti d'opposition aux Omeyyades, puis aux Abbasi- des, parti qui donna naissance aux diverses sectes chiites dans lesquelles, sous le couvert de l'Islam, les idées religieuses de l'ancienne Perse surent se maintenir, si bien que le chiisme devint une menace permanente pour le califat de Bagdad. Or, chaque fois qu'on s'éloignait de l'Islam légaliste, on pouvait être suspect de sympathies chiites. Mais, plus grave encore, à cette époque même, des missionnaires qar- mates prêchaient eux aussi à travers le pays. Ce mou- vement social et philosophico-religieux qui a ébranlé tout le monde musulman proche-oriental, avait une doctrine initiatique à sept degrés, et usait d'un sym- bolisme ésotérique avec lequel on pouvait aisément confondre un enseignement hermétique, tel que celui d'al-Hallâj, d'autant plus que notre nouveau prédi- cateur, dans son zèle, se lie avec les gens les plus suspects qu'il voulait gagner à son apostolat. Or, on donnait alors à tous ceux dont la pensée ou l'acti- vité inquiétait le pouvoir établi, le nom de zanâdiqa (pluriel de zindîq). Nombreux furent les malheureux que cette étiquette mena aux pires supplices. Enfin, après son voyage aux Indes, pays qui, dans l 'ima- gination des musulmans, était la patrie de la magie et de la sorcellerie, Hallâj fut soupçonné de se livrer à une « inspiration satanique ». Des légendes se for- mèrent, de son vivant déjà, et même quand la mal- veillance n'est pas à leur origine, elles n'en contri- buèrent pas moins à indisposer bien des esprits.

En 294-906, Hallâj fait un troisième pèlerinage à

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La Mecque où il séjourne deux ans. Il semble que cette période de sa vie soit décisive. Rentré à Bag- dad, il change de vie, renonce aux lointains voyages, et se livre à une intense activité de prédication dans la capitale califienne, s'exposant aux calomnies de ses ennemis. Il est alors vêtu de la muraqqa'a, sorte de haillon rapiécé, jeté sur les épaules. D'a- près la tradition musulmane, c'était le vêtement de Jésus, tandis que Mahomet avait porté le froc de laine blanche. Il y avait un « conflit entre la mu- raqqa'a et le sûf, écrit L. Massignon; le froc blanc étant le signe de ralliement de tous les sunnites stricts et disciplinés, tandis que l'étoffe rapiécée de loques bigarrées deviendra la marque de tous les moines errants, indisciplinés et gyrovagues, les « calenders » hindous des Mille et Une Nuits » (P., p. 51). Le port de ce vêtement prend donc une profonde signi- fication : Hallâj a dépassé la pratique légale et ins- titutionnelle de l'Islam, il a dépassé la stricte obser- vance de la Loi apportée par Mahomet; il est au delà du niveau des prophètes; il a pour guide Jésus, mais entendons bien, le Jésus de l'Islam sunnite.

Hallâj prêchait au peuple dans les marchés et les mosquées. Mais il entretint aussi des relations avec de grands personnages et de hauts fonctionnaires. Il réussit ainsi à se rendre suspect à tous les partis : les purs sunnites, trompés par les termes et le voca- bulaire de son soufisme, craignaient en lui un agi- tateur chiite possible; mais certains groupes alides, qui cherchaient à entretenir dans l'entourage du ca- life des tendances favorables à leurs ambitions, ne voulaient pas laisser se répandre une mystique pure- ment sunnite. En 297-909, Ibn Dâwûd al-Isfahânî, fondateur de l'école zâhirite qui prétendait tirer tout le droit de l'interprétation littérale des textes, lance une fatwa contre Hallâj qui fut alors mis sous la sur- veillance de la police; mais il parvient à s'évader, l'année suivante, pour aller se cacher à Sous, en Ah- wâz. Il fut de nouveau arrêté en 301-913. A la suite d'un premier procès à Bagdad, il passa huit années dans les prisons de la capitale. Puis eut lieu un

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second procès qui dura sept mois et se termina par ! la condamnation à mort. Hallâj avait été renié par

ses amis, en particulier le soufi al-Shiblî. Seul lui resta fidèle le confident le plus intime de sa pensée, celui qui avait été le plus proche de lui par sa doc- trine mystique, celui à qui il se sentait profondé- ment uni par un commun amour extatique de Dieu, son compagnon de lutte Ibn 'Atâ.

Alors commença la Passion d'al-Hallâj. Il fut exé- cuté pour des motifs surtout politiques. Mais son supplice et sa mort ont un sens religieux qui jette une lumière sur toute son expérience mystique.