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Le tabac dans les casinos : les profits avant la santé publique ou un mélange explosif Toxicomanie, sens à la vie et réhabilitation Étymologie de la Gestion expérientielle : des approches phénoménologique et systémique à la notion de style de vie – 4 ème partie Une pratique d’innovation pour le québec : Le programme de distribution de pipes à crack AVRIL 2007 5,00 $ VOLUME 23 NUMÉRO 03 Revue sur l’alcoolisme et la toxicomanie Envoi de poste–publications – Numéro de convention 40065296

Revuesurl’alcoolismeetlatoxicomanie 5,00$ VOLUME 23 NUMÉRO

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Le tabac dans les casinos : les profits avant la santépublique ou un mélange explosif

Toxicomanie, sens à la vie et réhabilitation

Étymologie de la Gestion expérientielle : des approchesphénoménologique et systémique à la notion de style de vie – 4ème partie

Une pratique d’innovation pour le québec :Le programme de distribution de pipes à crack

AVRIL 20075,00 $ VOLUME 23 NUMÉRO 03Revue sur l’alcoolisme et la toxicomanie

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SOM

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L’intervenant|23|03<2

20 avril 2007 Le paradoxe du hérisson :trouble de la personnalitélimite « borderline » et toxi-comanieUniversité de SherbrookeCampus de Longueuil

27 avril 2007 L’alcool et les drogues : duplaisir à l’agressionHôtel Québec, Québec

4 mai 2007 L’intervention et l’intégrationdes services auprès des pa-rents toxicomanes et de leursenfants : de multiples défisUniversité de SherbrookeCampus de Longueuil

7 au 11 mai 2007 75e congrès de l’ACFASL’esprit en mouvementUQTR, Trois-Rivières

24 mai 2007 14e colloque national del'ISPA : Quelles sont lesbases de la prévention ?Fribourg, Suisse

31 mai 2007 Assemblée générale desmembres de l’AITQDelta, Trois-Rivières

1er juin 2007 Les multiples facettes du jeuUniversité Laval, Québec

9 au 12 juillet 2007 Symposium estival national sur les toxicomanies Stanhope, Île du Prince-Édouard

28 au 31 octobre 2007 XXXVe colloque AITQToxicomanie et troubles con-comitants Delta, Trois-Rivières

25 au 27 novembre 2007 Questions de substance 2007Centre de conférence ShawEdmontonC

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03 Mot du président

04 Le tabac dans les casinos : les pro-fits avant la santé publique ou unmélange explosif

05 Toxicomanie, sens à la vie et réhabilitation

08 Une pratique d’innovation pour leQuébec : Le programme de distribution de pipes à crack

12 Étymologie de la Gestion expérientielle : des approchesphénoménologique et systémique àla notion de style de vie (4ème partie)

15 Info-Livres

AVRIL 2007 VOLUME 23 NUMÉRO 03

Matériel rédactionnelVous désirez publier dansnos pages? N’hésitez pasà nous faire parvenir toutarticle abordant la problé-matique des toxicomanies.Vos textes peuvent traiterdes initiatives pratiques degroupes dans la commu-nauté, du rôle des interve-nants pour améliorer lesservices à la clientèle,d’études ou d’analyses deprogrammes, etc.

AbonnementL’intervenant s’adresse aux professionnels et auxpersonnes intéressées audomaine de la toxicomanie.Vous pouvez obtenir un abonnement àL’intervenant au coût de17,95 $ par an (25 $ àl’extérieur du Canada).Parutions : janvier, avril,juillet et octobre.

Responsabilité de l’éditeurL’éditeur ne se tient pasresponsable des opinionsémises dans cette publi-cation. Les auteurs ontl’entière responsabilité deleur texte. Les écrits sontpubliés tels que soumis,qu’ils rencontrent ou nonles orientations de l’AITQ,en autant qu’ils soientpertinents et d’actualité.

Dates de tombéeMatériel publicitaire : 1er mars, 1er juin,1er septembre et 1er décembre.

Matériel rédactionnel : 15 février, 15 mai,15 août et 15 novembre.

ReproductionToute reproduction totaleou partielle d’articles, dephotos ou de graphiquesest interdite à moins d’une entente écrite avecl’éditeur.

EJ’espère que les derniers mois, considérés par plusieurs comme les pluspénibles à traverser, ont tout de même été fructueux et productifs. Àcet égard, avez-vous eu l’occasion de réfléchir à des candidatureséventuelles pour la remise des prix « Rose des Sables » qui serontattribués lors de la XXXV e édition du colloque de l’AITQ? Je vous rap-pelle qu’un prix est remis à un individu et un autre à un organismepour souligner une contribution exceptionnelle à la cause de la toxi-comanie. Je suis convaincu que plusieurs d’entre vous êtes témoinsd’initiatives qui méritent d’être soulignées et reconnues. Contactezsans tarder la permanence de l’association pour obtenir plus de pré -cisions sur les modalités de présentation d’une candidature. Faire con-naître les meilleurs projets ou actions peut conduire à la multiplica-tion des gestes porteurs d’espoir pour les personnes que vous soutenezquotidiennement. De plus, cet évènement survient pendant la 30 e

année d’existence de l’AITQ. Alors profitons de l’occasion pour serassembler et célébrer tous ensemble.

Au moment de rédiger ces quelques lignes, nous sommes en pleinecampagne électorale au Québec. J’imagine que vous occupez une par-tie de vos temps libres à suivre les interventions de celles et ceux quisollicitent votre vote, et qui injecteront plein d’argent neuf en toxico-manie… Mais lorsque ce numéro de L’Intervenant paraîtra, les élec -tions seront derrière nous et vous aurez à nouveau vos temps librespour lire les articles de nos collaborateurs.

Comme il est d’usage de le faire, je vous présente sommairement lecontenu de ce numéro. Ainsi, vous pourrez lire sous la plume d’AmnonSuissa un article sur la question du tabac intitulé « Le tabac dans lescasinos : les profits avant la santé publique ou un mélange explosif ».Seulement le titre laisse entrevoir des propos susceptibles d’alimenterles discussions dans les chaumières. Puis, d’André Therrien, la qua -trième partie de son article sur l’étymologie de la gestion expérientielle

qui, sans nous rendre des spécialistes, aura grandement contribué àaméliorer nos connaissances sur le sujet. Vous aurez ensuite la chancede vous informer sur un projet nouveau et audacieux. Tout le mondeconnaît aujourd’hui au Québec « Les têtes à claques ». Eh bien voici quenous avons maintenant « Les pipes à crack ». En effet, Marilou Savoieet Hugo Lemay, qui soit dit en passant est un nouveau membre du con-seil d’administration de l’AITQ à qui je renouvelle mes souhaits de bien-venue, vous entretiennent sur le programme de distribution de pipes àcrack dans la région de l’Outaouais. Audacieux vous dis-je! Un autrede nos collaborateurs appréciés, monsieur Réal Ouellette nous proposeune réflexion sur le thème de la toxicomanie, le sens de la vie et laréhabilitation.

Comme vous pouvez le constater, nous en avons pour tous les lecteurs.Du pragmatisme à la philosophie en passant par des éléments d’ordrepolitique. J’espère que ce numéro répondra à vos besoins, attentes etintérêts.

Je profite de l’occasion pour vous rappeler que si vous ou certains devos collègues souhaitiez publier dans la revue L’intervenant, nous serions heureux de vous compter parmi nos collaborateurs. Je réitèreégalement mon invitation à tous ceux qui ne sont pas encore membresde l’AITQ, de le devenir rapidement puisqu’il y a de nombreux avan -tages et que, plus nous serons nombreux, plus nous pourrons dévelop-per les services aux membres. D’ici là, je vous invite à visiter le site Webde l’association au <www.aitq.com> .

Merci et à la prochaine.

Pierre VachonPrésident

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Fidèles lectrices et lecteurs, salut!

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Éditeur : ASSOCIATION DES INTERVENANTSEN TOXICOMANIE DU QUÉBEC INC.505, RUE SAINTE-HÉLÈNE, 2e ÉTAGELONGUEUIL (QUÉBEC) J4K 3R5

Directrice : CARMEN TROTTIER

Abonnements et secrétariat : (450) 646-3271 [email protected]

Maquette : KÉROZEN COMMUNICATION DESIGN

Infographie et impression : IMPRIMERIE G.G. INC

Revue trimestrielleMois de parution : JANVIER, AVRIL, JUILLET, OCTOBRE.

Envois de publications canadiennes : CONTRAT DE VENTEno 40065296

ISSN 0823-213X

Dépôt légalBIBLIOTHÈQUE NATIONALE DUCANADA

BIBLIOTHÈQUE ET ARCHIVESNATIONALES DU QUÉBEC

Indexée dans REPÈRE

Président : PIERRE VACHON,MAISON AU SEUIL DE L’HARMONIE

Vice-présidente : LYNE GUAY,SERVICE DE CONSULTATION PERSONNELLE ET FAMILIALE

Trésorière : LYNDA VILLENEUVE, PAR.T.A.G.E.DU HAUT-RICHELIEU INC.

Administrateurs : LUCIE LANIEL, TRAVAILLEUR AUTONOMENATHALIE MARTELCOMMISSION SCOLAIRE DES TROIS-LACSSÉBASTIEN PILONÉTABLISSEMENT ARCHAMBAULTSTEEVE POULIN,RÉSEAU DES DÉLÉGUÉS SOCIAUX QUÉBECET CHAUDIÈRE-APPALACHESPIERRE WILSON, PAVILLONS DU NOUVEAU POINT DE VUE

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Amnon Jacob Suissa, professeurÉ c o l e d e t r a v a i l s o c i a l , U Q À M

e plus en plus de chercheurs estiment que la plusgrande menace pour l’industrie des casinos proviendraitdavantage des tenants de la santé publique qui se posi-tionnent de plus en plus pour les intérêts des citoyens.Par exemple, si des lois exigeaient que tous les espaces

des casinos soient non fumeurs, l’industrie pourrait perdre des mil-liards de dollars en revenus. En fait, ce n’est pas seulement la pertedes clientèles, mais également la perte du temps alloué au jeu. Ditautrement, dans la mesure où les joueurs fumeurs passeraient plusde temps à fumer en dehors de l’enceinte des casinos, ces derniersperdraient en moyenne 12 % du temps qui pourrait être investi dansle jeu.

Sur le plan historique, rappelons que c’est en janvier 1964que la plus grande étude commandée par le président Kennedydémontrait le lien incontestable entre le cancer du poumon et letabagisme qui touchait alors 46 % de la population. À l’époque, lerapport présidé par le ministre de la santé (Surgeon General) LutherL. Terry, révélait que les médecins comptaient 54 % de fumeurs dansleurs rangs. En réaction à ces faits, le Congrès américain adoptait en1965 une loi pour bannir les publicités à la télévision qui prônaient lesvertus du tabac. Aujourd’hui, plus de 40 ans après, la proportion de fumeurs aux États-Unis a diminué de moitié pour s’établir à 22,6 %.À partir de poursuites judiciaires contre les lobbys des compa-gnies de tabac qui ne voulaient pas divulguer les informations perti-nentes quant à la dangerosité de cette substance toxique, lesmeilleurs résultats pour réduire l’incidence se sont effectués dansune perspective sociale et communautaire combinant les politiquesd’interdiction de fumer dans les espaces publics et de travail d’unepart, avec des actions curatives et préventives, d’autre part.Poursuivie à coup de centaines de millions, et censurée par certainsgouvernements, l’industrie du tabac a dû s’adapter à ce nouvel envi-ronnement. En l’espace de 15 ans, la crédibilité et les ventes desgéants du tabac se sont effondrées en Amérique du Nord et, dansune moindre mesure, en Europe. Sur le plan des stratégies de mar-

keting, leurs produits sont alors dirigés vers l’Asie, en particulier enChine, où le taux de décès à cause du tabagisme et du cancer dupoumon a triplé pour atteindre des dizaines de millions de person-nes.

Quelques stratégies des lobbys de l’industrie privéedu jeu Comme avec l’industrie du tabac et son impact sur la santé desCanadiens (45000 personnes décèdent annuellement du tabac),l’industrie du jeu adopte une stratégie similaire pour invalider leschiffres provenant d’études scientifiques indépendantes. Parmicelles-ci, l’étude de Pristos (2006) effectuée auprès de 17723joueurs dans l’État du Nevada et les plus gros casinos de Las Vegas,Reno, Lake Tahoe et le milieu rural, a démontré qu’à part le milieurural où le taux de fumeurs est de 36,5 %, le reste des casinos affi-che un pourcentage de fumeurs qui oscille entre 20,5 % et 26,3 %,soit celui de la moyenne nationale. La stratégie de l’industrie du jeurejette ces chiffres en soulignant que le taux dans les casinos estplutôt de 70 % à 85 % (sources non scientifiques où les chiffres sontobtenus par sondage, par l’industrie, auprès des directeurs des casi-nos), de quoi alarmer, bien sur, les instances économiques et touris-tiques. Ces dernières, organisées autour de lobbys puissants sur leplan politique, défendent l’idée qu’à part les tables de poker, lesjoueurs fumeurs représentent la majorité des clientèles et qu’intro-duire une loi anti-tabac dans les espaces des casinos nuirait audéveloppement de l’industrie et réduirait à néant les emplois et l’in-frastructure touristique. À part 13 états américains qui ont réussi àpasser des lois anti-tabac dans les espaces de travail (incluant barset restaurants), les états qui possèdent des casinos n’ont pas eu desuccès avec des politiques sans fumée, les lobbys derrière l’industriedu jeu étant trop puissants. À titre d’exemple, Philip Morris, une desplus grandes multinationales au monde, qui possède non seulementdes intérêts dans l’industrie du tabac mais également dans le jeu,utilise tous les moyens légaux pour empêcher de telles politiques.Assisterons-nous, comme avec l’histoire du tabac, à un bras de ferentre la santé publique et l’industrie privée du jeu dont l’objectif pre-mier est d’abord et avant tout l’augmentation des profits des action-naires? Y aura-t-il un débat ouvert et transparent au Québec et auCanada face à cet enjeu crucial? Si les gouvernements appuientpour des raisons économiques certaines industries qui nuisent àmoyen et long terme au bien-être des populations, le messagedevrait être clair et transparent, la santé des citoyens et descitoyennes avant tout. <

Le tabac dans les casinos : les profitsavant la santé publique ou un mélangeexplosif

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Réal Ouellette, M.A.I n t e r v e n a n t p s y c h o s o c i a lV i l l a I g n a t i a

e processus de réhabilitation du toxicomane s’effectue,nous le savons, en passant par des phases progressives etdialectiques. L’une des études les plus complètes sur ledéroulement de ces phases a été présentée à l’automne1992 par trois chercheurs américains, James Prochaska,

Carlo Di Clemente et John Norcross. Ceux-ci, devant le succès d’unecertaine démarche thérapeutique, ont établi un plan comprenantcinq phases successives :

a) avant la prise de conscience,b) la prise de conscience,c) la préparation,d) l’action,e) la persévérance.

Ainsi les problèmes de dépendance « avant la prise de cons-cience » ne sont pas reconnus ou ne sont pas perçus du tout par lapersonne qui est dépendante, bien que l’entourage les voit depuislongtemps et commence à en sentir les effets. Dans la deuxièmephase, le problème est reconnu par le patient lui-même, mais ilremet encore à plus tard de s’en occuper vraiment. Ce n’est quedans la « phase de préparation » que l’individu prend de bonnesrésolutions concrètes, le thérapeute et le patient examinent et médi-tent à fond sur les perspectives qui mèneront vers la réhabilitation etl’abstinence. C’est dans la « phase de l’action » qu’ils fixent enfin ledébut d’une structuration nouvelle de son mode de vie, où le toxico-mane investira du temps et de l’énergie. Suit la phase de « lutte » parla persévérance, l’abstinence vers une vraie réhabilitation en main-tenant les résultats acquis.

Cependant, une chose est manquante dans cette approchethérapeutique. Il manque une réponse à la question suivante :Qu’est-ce qui pousse une personne à vouloir avancer pas à pas ?

La description ci-haut mentionnée des phases n’est que leprocessus de la réhabilitation, la croissance de l’effort, du sérieux dela démarche; mais nous n’avons aucune information sur ce qui

motive la personne, après parfois des années de maladie, à trouverenfin le désir de s’en sortir et d’y mettre tout l’effort possible etnécessaire.

Une étude sur la motivation a été réalisée en Suisse en 1991,sous la direction de Harold Klingermann, au département derecherches de l’Institut spécialisé sur l’alcool et les dépendances1

Harold et ses collaborateurs se sont penchés sur les cas « d’au-toréhabilitation », c’est-à-dire les anciens dépendants de l’héroïne oude l’alcool qui ont réussi par eux-mêmes, sans thérapie. Chez latrentaine de personnes qui se firent alors connaître, ils ont évalué lephénomène de l’autorémission, dans le but d’en retirer des conclu-sions utiles pour aider plus efficacement les toxicomanes.

Ce qu’ils ont découvert fut la même succession de phasesque le groupe de savants américains a découvert un an plus tard,mais avec en plus des lumières très intéressantes sur les motivationsdes toxicomanes rétablis. Les phases « d’autoréhabilitation » furentdésignées comme suit :

1. phase de décision,2. phase de changement,3. phase de stabilisation.

La prise de conscience du problème se trouve présupposée,car sans décision, le problème de dépendance ne changera pas.Selon les patients « autorétablis », la conscience du problème ou lepoids de la souffrance n’avait jamais été, en aucun cas, le facteurdécisif dans le processus de réhabilitation d’abstinence.

Les anciens dépendants ont affirmé, unanimement, que laconquête de leur liberté et de leur dignité à l’égard des substancesa commencé avec la « phase de décision ». Cette décision a mûrigrâce à une « motivation constructive », à savoir l’apparition d’unnouveau contenu dans l’existence, de nouvelles orientations. Commeexemples de telles motivations constructives qui ont produit ceretournement, ils citaient la croyance en une Puissance Supérieure,un retour au travail, la naissance d’un enfant, un parrain, une mar-raine. Dans leurs expériences personnelles prédominaient les « stratégies de changement » à l’égard de soi-même, les « stratégiesde substitution » et également les « techniques de distanciation »,c’est-à-dire l’évitement des anciens comportements et des anciennesfréquentations, voire même dans certains cas, le déménagementdans une autre ville. Les « autorétablis » ont concrètement et obstiné-ment comblé le vide laissé par les substances toxiques au moyen denouveaux contenus et de contenus chargés de sens pour eux. Les

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Toxicomanie, sens à la vie et réhabilitation

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1. Medical Tribune, NR.31, 2/8/91

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<6 L’intervenant|23|03

contenus chargés de sens sont par exemple : une activité autonomequelconque, le travail professionnel où leur métier et la familleavaient gagné pour eux en importance, de la valeur qui donne unsens à leur vie.

Le « moteur » qui a poussé à la décision et à la persévérancea joué un rôle déterminant. C’est ce « moteur » que nous pouvonsappeler la « motivation constructive », selon l’approche du Dr. Frankl,l’orientation vers un sens et la découverte d’un sens. Les Suisses,autour de Harold Klingermann, nous ont amenés à examiner avecplus de précision ce « moteur », ce « motif existentiel » qui aide le toxi-comane à progresser d’une phase à l’autre. Il est important de com-prendre que, sans un « motif existentiel » d’ensemble pour « revivre »,l’objectif thérapeutique même le plus sophistiqué, technique et com-pétent, sera pour le patient une difficulté insurmontable et très peuprofitable pour la personne en thérapie. Pour regarder ensemble deprès ce « moteur », nous examinerons les résultats de la logothérapiequi, depuis près de 50 ans, s’occupe du problème de la quête d’uneraison de vivre, du moyen de trouver un sens à son existence. Nousreprendrons les trois phases mentionnées plus haut :

1. Phase de décision : Motivation constructive pour surmonterle problème grâce à de nouvelles orientations, de nouveaux contenusdans l’existence.

2. Phase de conversion : Créer le changement avec soi-même,stratégies de substitution, techniquede distanciation.

3. Phase de stabilisation : De nouveaux contenus, des contenuschargés de sens, comblent le vide laissépar la substance; études, famille etmétier gagnent de l’importance.

Nous essaierons d’interpréter ces phases selon le point devue de la logothérapie et d’en tirer des conclusions utiles pour letraitement des toxicomanes. Voyons la deuxième phase, celle de laconversion (changement). Elle représente les efforts pour l’absti-nence. L’abstinence est la condition qui rend possible une vie qui aitun sens. Cela signifie qu’il n’y a pas de sens à la vie pour un toxico-mane sans l’abstinence. Cette condition remplie, une vie peut avoir

un sens, mais ce n’est pas garanti sans travail thérapeutique sur soi-même. L’abstinence n’est pas le sens de la vie. Celui qui est capablede se maîtriser ne va pas nécessairement avoir une vie bien remplie.Il pourrait rater sa vie. L’abstinence signifie seulement que le « je » del’individu n’est pas dominé par les substances toxiques, qu’il estmaître chez lui. Nous atteignons ici le cœur de la question selon l’ap-proche de la logothérapie : Qui domine qui? Qui déjoue qui? Quicontrôle qui? Le Dr Frankl, fondateur de la logothérapie, répond « lapersonne spirituelle constitue l’être humain qui domine, qui déjoue,qui contrôle le moi que possède l’homme. La dimension spirituellede l’être humain, qui constitue sa dignité, sa valeur inconditionnelleest infiniment plus que ce moi (ego). C’est un être pourvu d’une étin-celle créatrice, capable de se modifier lui-même, de poursuivre sonpropre développement, de répondre de soi-même. Par suite,l’homme n’est pas une machine qui fonctionne selon un programmedepuis longtemps introduit dans ses gènes. Il peut se modeler lui-même. Et ce n’est pas tout : cette étincelle créatrice rayonne au-delàdes besoins personnels. La dimension spirituelle de l’humain inter-vient dans le monde qui l’entoure, il travaille l’environnement. Il estajusté à des ensembles qui transcendent son ego. Il est quelqu’unqui s’interroge sur la signification des choses qui transcendent sonmoi. Si nous faisons nôtre cette anthropologie que professe la logo-thérapie, nous comprenons aussi qui est en mesure de sauver qui?D’un côté la dimension spirituelle de l’homme avec son étincellecréatrice, de l’autre côté le moi (ego) avec ses faiblesses.

Si le poids de la souffrance peu à peu devient insupportable,obligeant le toxicomane à entreprendre quelque chose pour sa réha-bilitation, c’est que l’ego souffre d’être maltraité. Et la dimensionspirituelle de la personne (« je ») se décide à le sauver. La motivationconstructive pousse la personne en contact avec sa dimension spiri-tuelle à trouver un sens à sa vie et à l’univers. Ce sens, elle ne peutl’atteindre que par le sauvetage du moi biologique2 qui ne fonctionneplus. Donc, elle se décide à créer les conditions qui permettent d’at-teindre ces buts et de réaliser son accomplissement de sens. Lepoids de la souffrance peut, certes, motiver un homme et le pousserà sauver son moi biologique, mais il peut aussi bien le pousser àrejeter son moi, à se haïr lui et ses faiblesses, à se mépriser lui et sesdéficiences et à consentir à ce lent suicide. Dans le cas contraire, la____________________

2. Moi biologique : l’appareil biochimique de l’être humain

505, rue Sainte-Hélène, 2e étageLongueuil (Québec) J4K 3R5Téléphone : (450) 646-3271Télécopieur : (450) 646-3275Courriel : [email protected]

nn Je désire recevoir de l’information sur les formations.

nn Je désire recevoir de l’information sur l’Association des intervenants en toxicomanie du Québec inc. (AITQ).

nn Je désire m’abonner à la revue L’intervenant; je joins un chèque aumontant de 17,95 $ pour 4 numéros (25 $ à l’extérieur du Canada).

nn Veuillez prendre note de mon changement d’adresse à compter du : ____/____/____

Ancienne adresse : ________________________________Nom : _____________________________________________

Adresse : ___________________________________________ App. : ___________________________________________

Ville : ______________________________________________ Code postal : ______________________________________

Téléphone : (_______)___________________________________ Télécopieur : (_______)_________________________________

Courriel : ____________________________________________

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« motivation constructive » c’est reconnaître une valeur suprême etestimée, une valeur qui devient l’objet de la sobriété afin que la per-sonne puisse se mettre en entier au service de cette valeur, et qu’ellela vive pour sa propre réussite. La « motivation existentielle » la tireen dehors en ouvrant la porte du sens à son existence.

Sur le plan psychothérapeutique, cela signifie de cherchercomment éliminer les entraves. Elle s’occupera des objectifs à attein-dre au-delà de ses entraves. Quelle sorte d’objectif? Quel effet aurontles objectifs envisagés? Quels sont les avantages de la maladie?Nous ne pouvons pas attendre du malade qu’il se prenne entière-ment encharge. Il est difficile pour lui de franchir la porte et d’entrerdans un monde hostile, inconnu, sans orientation. Qui ne serait paseffrayé? Il est important de découvrir la valeur suprême (Dieu,famille, enfant, thérapeute, parrain, etc.) placée au-dessus de moiqui me mettra en route vers la réalisation d’un sens, d’une signi-fication réhabilisatrice, vers le moi biologique restabilisé, afin que lapersonne puisse toute entière se mettre au service de cette Valeur etqu’elle vive pour sa propre joie de vivre. Le risque potentiel d’au-torejet toxique est alors minime. Une « motivation existentielle » la tireau-dehors en ouvrant la porte de la sobriété. La maladie des dépen-dances est une fuite devant des réalités, des variétés désagréables àvoir et à entendre sur soi-même et de prendre des décisions qui sontpénibles; les toxicomanes ont l’art d’endormir les sentimentsdésagréables, ils refusent de se voir tel qu’ils sont; ils ont tendanceà écarter les aveux pénibles de leur culpabilité et de leur honte. Desobjectifs existentiels qui motivent assez pour qu’ils ouvrent la portede sortie vers la sérénité sont en règle générale suprapersonnels.

C’est seulement par une « motivation existentielle » dont lesens est une raison de vivre suffisante pour qu’on saute par-dessusles plaisirs éphémères ou l’économie de souffrances pour réaliserl’objectif reconnu et consenti. Le « prisonnier » qui s’éveille d’uncauchemar, son « œil intérieur » voyant où il lui faut parvenir pourremplir telle « tâche » précise qui se présente à lui et mettre tout enœuvre pour franchir l’obstacle du seuil. C’est la personne qui a la cléqui peut s’en servir, parce qu’elle veut s’en servir. Souvent, le dépen-dant manque de « motivation constructive », cette « étincelle » pourdéclencher la décision de changer de mode de vie. Il lui faut parfoisune secousse, un recueillement intérieur profond et une réflexionspirituelle authentique pour avoir une chance, la seule, d’agir sur lesderniers retranchements de sa motivation et ainsi obtenir, grâce àelle, sa participation au changement de vie.

Si nous faisons le bilan touchant les objectifs thérapeutiquesdans le processus de réhabilitation des toxicomanes, une chose estcertaine : l’abstinence totale, comme objectif thérapeutique,représente la condition qui rend possible le repérage des « buts exis-tentiels » qui sont dignes d’un être humain. Cependant, l’abstinencecomme objectif ne suffit pas à une réelle sérénité; un second faitclinique résulte des réflexions et des expériences touchant notresujet. Voir les buts assignés3 à la vie et qui sont dignes d’un êtrehumain paraît être la condition sans laquelle le patient ne serait pasdisposé à s’engager dans l’abstinence. Cela étant, il convient de dis-cuter, dès le début du processus thérapeutique, des buts assignés,buts conditionnés par des facteurs tels que l’abstinence, la per-sévérance, la maîtrise de soi. Ce qui favorise ces facteurs c’est l’étincelle créatrice qui couve en nous, même sous les cendres de la

maladie, et qui jaillit dans le monde, lien entre le sens qu’a l’exis-tence et le sens ultime de l’univers.

a) L’abstinence ne suffit pas pour trouver une authentiquesobriété.

b) L’abstinence est une condition obligatoire pour reconnaître et effectuer les objectifs existentiels consentis.

c) Regarder ensemble les buts assignés en faveur de la vie,condition pour s’engager dans l’abstinence.

d) L’étincelle créatrice qui favorisera l’exécution de l’abstinence,de la persévérance et de la maîtrise de soi.

BibliographieFrankl, Viktor (1993). Raison de vivre, Éditions du Tricorne, Genève

Lukas, Elizabeth (1995). Quand la vie retrouve un sens, Pierre Téqui, éditeurs, Paris.

Frankl, Viktor (2000). Trouver un sens à sa vie, introduction à la logothérapie, Éditions de l’Homme, Paris.

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3. Buts assignés : attribués ; prescrire quelque chose à quelqu’un ; assigner une tâche

Programme de formation

continue 2007

et

LE PARADOXE DU HÉRISSON : trouble de la person-nalité limite « borderline » et toxicomanieLieu : LongueuilDate : 20 avril 2007

L’ALCOOL ET LES DROGUES : du plaisir à l’agression Lieu : QuébecDate : 27 avril 2007

L’INTERVENTION ET L’INTÉGRATION DES SERVICESAUPRÈS DES PARENTS TOXICOMANES ET DELEURS ENFANTS : de multiples défisLieu : LongueuilDate : 4 mai 2007

Information : 450 646-3271

Association des intervenants en toxicomanie du Québec inc.

Marilou SavoieB u r e a u r é g i o n a l d ’ a c t i o n s i d a 1

Hugo LemayC e n t r e d ’ i n t e r v e n t i o n e t d e p r é v e n t i o n e n t o x i c o m a n i e d e l ’ O u t a o u a i s 2

IntroductionÉtant une des quatre régions ayant le taux de prévalence le plusélevé pour l’hépatite C au Québec, à raison de 27 par 100 000 habi-tants, l’Outaouais se démarque également dans l’élaboration et laréalisation d’un tout nouveau programme au sein même du pro-gramme d’échange de seringues, soit la distribution gratuite dematériel d’inhalation de crack. Après un an de distribution, noussommes fin prêts à partager avec vous les différentes démarches quenous avons entreprises, le fonctionnement et la mise en œuvre de ceprojet de distribution, les résultats obtenus ainsi que l’arrimage avecles services présents.

HistoriqueLes premières démarches ont été entreprises en février 2005, suiteaux demandes répétées des usagers du centre-ville de Gatineau. Enplus de ces demandes, résultant probablement de l’implantationd’un programme similaire à Ottawa, nous avons fait les constatsd’une augmentation de la consommation de crack en raison d’uneplus grande accessibilité de cette drogue sur le marché. De plus, latravailleuse de rue du Bureau régional d’action sida (BRAS), LinaCastonguay, observait fréquemment le partage de pipes à crack fabri-quées de façon artisanale et de ce fait beaucoup plus dangereusespour la transmission des ITSS, entre de nombreux consommateursdont certains atteints du VIH et de l’hépatite C. À cet effet, avec leconcours du Centre d’intervention et de prévention en toxicomaniede l’Outaouais (CIPTO), le BRAS a donc formulé une demande à laDirection de la santé publique de l’Outaouais afin d’obtenir dumatériel d’inhalation de crack sécuritaire à distribuer gratuitementaux usagers du centre-ville de Gatineau qui en faisaient la demande.

InnovationIl faut mettre en lien l’implantation du programme de distribution dematériel de prévention des ITSS par inhalation avec le contexte

régional. L’Outaouais est une région dont l’innovation a toujours étéun des grands moteurs de développement. Cette prédisposition àl’innovation et son encouragement par les instances décisionnelleslocales et régionales sont des facteurs de réussite importants dansla mise en place de projets atypiques. Alors que l’expérienced’Ottawa nous a démontré l’impact politique et médiatique entourantles programmes de santé publique, il est particulièrement intéressantde faire le parallèle avec Gatineau.

Fonctionnement et mise en œuvreAfin d’assurer que la mise en place du programme se déroule demanière contrôlée et que les données soient cohérentes, deuxacteurs seulement ont été mandatés pour faire la distribution dumatériel : le BRAS, qui est le mandataire principal, et le CIPTO. C’estdonc pas le biais de ces deux organisations que le matériel est dis-tribué, par une pratique standardisée visant à recueillir des informa-tions non nominatives afin de mieux comprendre les besoins de lapopulation utilisatrice, de cibler les priorités et les zones de distribu-tion ainsi que de contredire certains mythes et préjugés.

La distribution de matériel, tout comme pour le programmed’échange de seringues, s’insère dans une pratique de création deliens, ce qui permet aux intervenants(es) d’agir à titre de premierscontacts auprès des consommateurs de drogues. Dans le cas duBRAS, la distribution s’effectue à deux niveaux : par le travail de rueet le bureau, alors que le CIPTO ne distribue qu’à partir de sonbureau principal.

Ces deux points de distribution permettent à la fois derejoindre la population ciblée et davantage à risque de Gatineau,située majoritairement au centre-ville, tout en permettant de cou-vrir une partie du territoire urbain par le déplacement des tra-vailleurs de rue.

Plus concrètement, deux (2) trousses d’inhalation par person-ne sont remises dans le cas de la distribution au bureau (accueil) auBRAS et au CIPTO. Cette mesure vise notamment à éviter, car le pro-gramme est dans une phase d’implantation, que le matériel soitrevendu par la suite. Pour ce qui est des intervenants distributeurs(travailleurs de rue) – ils en donnent une plus grande quantité si ledemandeur agit en tant qu’agent multiplicateur ou lorsque les inter-venants se retrouvent dans des lieux de haute fréquentation(appartement, maison), tout en spécifiant la raison d’une plusgrande quantité en distribution.

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Une pratique d’innovation pour le Québec :Le programme de distribution de pipes àcrackP

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1. Madame Savoie est coordonnatrice du programme Éducation à la prévention.

2. Monsieur Lemay est directeur général.

Trousse de pipes à crackChaque trousse de matériel d’inhalation contient les articlessuivants :

• un tube de verre – pour inhaler la fumée d’une roche decrack;

• un embout de caoutchouc – pour réduire les brûlures auxlèvres causées par la chaleur;

• un bâton de bois – pour entasser les grilles;

• un paquet de cinq grilles – pour filtrer la fumée du crack;

• un tampon d’alcool – pour désinfecter l’embout lorsqu’ilssont obligés de partager leur pipe;

• une fiche blanche - instructions de l’Agence de santé etdes services sociaux de Gatineau;

• un carton d’informations – numéros de téléphone impor-tants et un avis aux risques de partager une pipe à crack.

Enjeux éthiquesUn des plus grands enjeux dans la distribution gratuite dumatériel d’inhalation est celui de faire de la distributionauprès de personnes d’âge mineur. Actuellement, elle se faitexclusivement par les travailleurs de rue. Des situations déli-cates de ce type obligent une approche plus développée voiremieux ajustée de la part des intervenants. Voici donc ledéroulement typique d’une rencontre entre une travailleuse derue et un jeune inhalateur de crack :

• Explication du travail de la travailleuse de rue et pourquoi elleest là;

• Vérification de la consommation du jeune (quantité, con-texte, environnement, moyens qu’il prend pour se procurer del’argent et sa consommation);

• Explication des conséquences de la consommation (mala-dies, loi, les moyens pris pour avoir de la dope – vol, prosti-tution, etc.);

• Explication du fonctionnement de la pipe et de chaque élé-ment de la trousse;

• Explication lors d’une obligation de partager une pipe à cracken raison de violence – possibilité de désinfecter l’embout decaoutchouc avec le tampon d’alcool avant de l’utiliser;

• Sensibiliser le jeune sur le processus et l’aviser que les inter-venants n’en donneront pas à ses amis(es) sans une ren-contre d’informations;

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• Le ton de la travailleuse de rue n’est pas moralisateur, mais davan-tage informatif et compréhensif;

• Partage ses coordonnées avec lui pour jaser ou tout autre besoin.

RésultatsAprès un an d’opération, nous constatons que le fait de dis-tribuer du matériel d’inhalation de cr ack n’encourage en rienles personnes à devenir des consommateurs de cr ack parinhalation. Sur les 2733 pipes à crack distribuées, seulement 0,1 % des gens rencontrés étaient des nouveaux inhalateurs decrack. Il est évident que nous ne pouvons relier le choix d’unusager à inhaler du crack au programme de distribution gratuite dumatériel d’inhalation.

Des changements positifs ont également été observés :diminution du partage de pipes et d’utilisation de pipes de fabrica-tion artisanale. Ce qui est un pas important dans la réduction desméfaits liés à une telle pratique.

Voici quelques-uns de nos résultats qui ont été recueillis dumois de décembre 2005 au mois de novembre 2006 :

1. Nombre total de pipes à crack distribuées – 2005-2006 :

2. Nombre de pipes à crack données selon le sexe et l’âge – 2005-2006 :

3. Nombre de nouvel inhalateur de crack selon le sexe et l’âge –2005-2006 :

Problèmes rencontrésLes problèmes rencontrés sont principalement rapportés par les tra-vailleurs de rue du BRAS : possibilité de vente des pipes par lesusagers et/ou de chantage sexuel et très peu de récupération possi-ble en raison de l’accumulation de résine dans le tube de verre. Cesproblèmes sont abordés en concertation, visant à adapter les pra-tiques des distributeurs de matériel afin de réduire les impacts. Leslimites de distribution ont diminué la vente. Il faudra juger, lorsquele programme sera implanté depuis plus longtemps, comment modi-fier ces limites afin de répondre aux besoins des personnes sans lespénaliser. Par ailleurs, en ce qui a trait à la récupération du matériel,sa structure même le rend plus difficile à récupérer, mais les risquesde contamination sont très faibles. À ce jour, le matériel distribué nes’est pas retrouvé dans des lieux publics. Ses composantes sontmoins dangereuses qu’une seringue et son démantèlement plusfacile.

L’implantation locale du programme n’a pas suscité deréactions particulières dans la communauté, l’ensemble des prin-cipaux acteurs ayant été rencontrés avant ou au tout début desdémarches.

Arrimage avec les servicesAlors que l’organisation des services du Québec diffère de celle del’Ontario, il ne faudrait pas y voir la seule explication aux différencesde parcours. Nous avons identifié quelques éléments significatifsayant contribué à la réussite de l’implantation du programme àGatineau : 1) une distinction entre les pouvoirs publics (municipaux)et la Santé publique; 2) une collaboration entre les acteurs terrains(fournisseurs de services) et les instances décisionnelles (Santépublique, service de police, etc.); 3) un respect des mandats res-pectifs des acteurs impliqués et une compréhension commune desobjectifs visés.

Le programme actuel, n’étant plus en phase pilote, il se trou-ve à être le premier en territoire québécois. Alors que sa pertinenceest remise en question à Ottawa par l’administration municipale, laSanté publique de l’Outaouais maintient les orientations actuellesvisant à faire diminuer le taux d’infection aux ITSS, notamment àl’hépatite C. <

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André TherrienA Q G E

Dans un premier temps, voyons ce que préconise l’approchephénoménologique en matière de prévention :

De tels principes servent d’assises à la prévention positive parla promotion de la santé optimale, de l’épanouissement intégral dela personne : par diverses modalités, ouvrir la personne à ce qu’ellereprésente vraiment pour elle-même et l’aider à se choisir un stylede vie r espectueux de cette réalité 1. Selon ce modèle utilisé enprévention primaire, l’enfant, ou le jeune, sera constamment invité àporter une attention expérientielle aux rétroactions en ter mes desentiments ou de sens corporels qui émergent de l’interaction entrelui et l’environnement dans l’ici et maintenant de la situation et d’ex-pliciter au plan cognitif, symbolique, ce qui est ressenti. Il en vient àmieux se connaîtr e dans toute situation et à choisir des compor te-ments plus adaptés à la fois à ce qu’il est vraiment et ce qu’estréellement la situation pour lui. C’est fair e appel à tout l’aspectexpérientiel dans la direction du comportement, de l’expérienciationpersonnelle des situations internes et externes.

Le processus s’exprime dans un style de vie intégré. La con-sommation indue dans le but d’affronter de façon adéquate et sanstrop de blessures les situations n’est pas nécessair e à ce moment.Il n’y a pas usage utilitaire des substances, mais usage récréatif pro-pre à cer taines situations socialement définies dans lesquellesd’ailleurs la consommation se fait de façon réfléchie et responsable.Cela s’effectue dans la modération. Il existe des techniques relativesà ce point de vue2.

Le jeune y est appelé (prévention primair e) à appr endre àmieux se connaîtr e ou encor e à mieux expliciter ce qu’il est, com-ment les choses l’affectent et comment il a alor s tendance à agir3.

La référence que fait monsieur Cormier à des techniques rela-tives à ce point de vue concerne directement le programme Prismequi a servi dans les faits d’exemple principal aux commentaires pra-tiques exprimés par ce chercheur et ses acolytes (Serge Brochu etJean-Pierre Bergevin).

Il est impor tant de constater que cette approche (la Gestionexpérientielle) vise à créer des habiletés de base chez les jeunes afinde mieux les outiller pour faire leurs propres choix, sans leur dicter lanature des choix à fair e. Elle se distingue donc des pro grammescourants de prévention de la consommation de psychotropes, de ladélinquance ou de la criminalité.(…) Le programme Prisme est conçupour s’implanter pro gressivement au sein des ter ritoires natur els formés des écoles secondaires et des écoles primaires de leur bassinde desserte. On rejoint les enfants à la fi n du primaire pour les pré-parer aux choix auxquels ils seront confrontés; on les r ejoint encoreau début du secondaire, au moment où le risque s’accroît, pour ren-forcer les messag es et les habiletés. (Analyse du Rapport sur leshabiletés sociales des enfants 5 à 12 ans de la Régie régionale desLaurentides, Natalie Kishchuk et Louise Leduc, 2003).

Le programme Prisme prévoit en ce sens une interventionpréventive de base auprès des élèves de 6ème année primaire (11-12 ans) et des élèves de niveau secondaire 1 à 3 (12-15 ans). Auprimaire, l’intervention s’effectue par l’entremise d’une série de 5ateliers d’un minimum de 60 minutes dont l’objectif principal est deposer les bases et de développer la capacité de réflexion des jeunesconcernant leur rencontre éventuelle avec les psychotropes.

Le premier atelier explore le corps humain sur trois dimen-sions fondamentales : les organes, les sens et les émotions. Lecerveau y occupe une place particulière parce qu’il se retrouve aucentre du fonctionnement intégré des organes et de la perceptionsensorielle, parce qu’il est le siège de la naissance des émotions etle siège de l’intégration de toutes ces dimensions. La méthodologied’animation repose sur l’apprentissage expérientiel tel que définidans les travaux de monsieur Goodstat4. Il s’agit de transposer toutesles notions d’apprentissage en expériences à vivre (contrairement àune méthodologie de type magistral, basée sur des exposésthéoriques), une exigence sévère qui permettrait cependant d’inscrireplus profondément, pour une plus longue période de temps et avecune plus grande influence sur le processus décisionnel, les notionsciblées. Ainsi, pour chaque notion identifiée, il faut faire vivre auxjeunes une expérience de vie qui saura susciter en eux-mêmes, etpar elle-même, ladite notion en apprentissage. Tout le programmePrisme a été au fil des années construit et modifié en fonction de cetype d’apprentissage.

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Étymologie de la Gestion expérientielle : desapproches phénoménologique et systémiqueà la notion de style de vie (4ème partie)

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1. CORMIER, D., BROCHU, S., BERGEVIN, J.-P. 1991. Prévention primaire et secondaire de la toxicomanie.Éditions du Méridien. Montréal. p. 31-33.

2. Idem 1, p. 99.

3. Idem 2, p. 191.

4. GOODSTADT, M.S., SHEPPARD, M.A. (1983). « Three approaches to alcohol education », Journal of stu-dies on alcohol, 44, 362-380.

Le deuxième atelier explore le domaine des psychotropes eninscrivant des notions particulières à la Gestion expérientielle,comme l’existence des neurotransmetteurs, leur rapport précis etunique avec le potentiel de perturbation des drogues ainsi que cer-taines lois régissant ce rapport.

Le troisième atelier aborde les notions de responsabilisationet d’autodétermination dans le choix de consommation de psy-chotropes. Les processus d’influence y sont identifiés et explorés. Ilest important de mentionner que la position du programme pourcette catégorie d’âge est de renforcer le choix de l’abstinence, enconcordance avec les valeurs du milieu et le respect de l’âge desjeunes.

Le quatrième atelier complète la réflexion du troisième enabordant l’influence sociale par l’entremise de la publicité, lesvaleurs sous-jacentes et les risques inhérents de surconsommation.Il ne s’agit pas de dénoncer la production de biens et leur consom-mation (un choix de vie parmi d’autres), mais plutôt de situer l’indi-vidu dans son contexte social et de préciser le risque de la moder-nité conséquent.

Le cinquième atelier revient sur la notion des émotions pourpréciser leur pouvoir sur la capacité de réflexion et installer les basesd’une écoute empathique propre à la Gestion expérientielle, l’Écouteactive minimale.

Il est important de mentionner que l’animation de ces 5 ate-liers est un effort concerté de plusieurs intervenants (infirmières sco-laires, policiers et intervenants sociaux) et d’animateurs bénévoles,dont la plupart sont des parents des élèves impliqués.

« Ce programme donne la chance de pouvoir trav ailler sur leterrain en par tenariat avec des par ents, infirmières, travailleurs so-ciaux, professeurs. Ce qui n'est pas toujour s le cas dans d'autr esprogrammes. » Agent C. D., Sûreté du Québec, MRC des MaskoutainsOuest.

Les parents animateurs sont en fait la pierre angulaire detoute la programmation pour les 6ème, en concordance avec ce queprécise monsieur Cormier sur leur rôle en prévention :

La famille constitue la pr emière institution dans laquelle sedéveloppent l’enfant et l’adulte qui en émerg era. Elle est de fait lebain de valeurs personnelles et sociales dans lequel puise le jeunetout au long de sa for mation. Les parents sont les premiers promo-teurs de la santé optimale, c’est-à-dire du développement har-monieux des potentialités vers une prise en charge constante de soi,la responsabilisation de soi face à chaque situation qui se présentedans sa vie5.

Par ailleurs, les parents peuvent aussi transmettr e des mes-sages de modération impor tants à leur s enfants. Les par ents quifont un usage modéré d’alcool dans un contexte social propice cons-

tituent par leur exemple des ag ents de prévention primair e de pr e-mière ligne. Ceux qui acceptent de discuter ouver tement avec leurjeune garçon ou fille de la consommation de drogues de ces dernierspeuvent avoir un impact positif beaucoup plus grand que bien desprogrammes organisés de prévention. La responsabilité première del’éducation des jeunes repose entre les mains des parents. Il ne fautsurtout pas s’en débarrasser pour la remettre entre des mains asep-tisées d’une institution qui v alorise peu les contacts per sonnels,mais plutôt les performances individuelles6.

Par l’entremise de leur implication dans l’animation des ate-liers du programme Prisme au primaire, les parents acquièrent descompétences d’apprentissage en matière de réflexion et d’au-todétermination. Ces compétences pourront par la suite être mises àla disposition de la famille, du réseau social, des amis et des voisins,créant avec le temps un véritable effort de prévention communau-taire intégrée. En permettant l’animation des ateliers par les parents,l’école participe activement à cette élaboration d’une préventioncommunautaire.

Au cours de cette étude, nous avons pu obser ver que rejoin-dre les par ents constitue un défi de taille et ce, autant pour lesecteur scolaire que le secteur communautaire. Par contre, certainesactions, par exemple Prisme (…), ont acquis des capacités impor-tantes dans ce domaine et peuvent ainsi ser vir de modèle pourl’ensemble des secteur s, y compris le réseau de la santé et desservices sociaux. (…) L’implication des par ents est considérable :chacun contribue environ 50 heur es au programme chaque année.L’intervention se réalise dans l’école à l’invitation de celle-ci (pro -fesseur, direction ou conseil d’établissement) (Analyse du Rappor tsur les habiletés sociales des enfants 5 à 12 ans de la Régierégionale des Laurentides, Natalie Kishchuk, Louise Leduc, 2003).

Pour les élèves du secondaire, le programme Prisme prévoitune série minimale de trois ateliers. Inscrits dans la suite du travaileffectué au primaire, ces ateliers permettent une première explo-ration de la capacité de réflexion des jeunes et des choix de modesde vie auxquels ils sont rapidement confrontés, dans le sens précisque propose la Gestion expérientielle.

Le premier atelier aborde résolument le domaine des psy-chotropes en inscrivant les notions fondamentales à l’origine detoute réflexion sur le sujet : les dimensions biopsychosocialesimpliquées, les liens à faire avec les neurotransmetteurs, la récupéra-tion comme principe physiologique d’équilibration, les réserves d’énergie et leur gestion, l’effet placebo et les liens avec l’expérienceglobale du plaisir et de la douleur/souffrance et, enfin, l’explorationde la dépendance physique.

Le deuxième atelier installe la réflexion proprement dite sur lesexpériences du plaisir, notamment par l’entremise de la relation entrele plaisir et les neurotransmetteurs et les lois subséquentes de laréciprocité, de l’intensité et de la désensibilisation, par l’utilisationd’un diagramme de base descriptif, par les liens avec les expériencesde douleur/souffrance, par la définition de modes de vie maximal,minimal et inversé et par le positionnement des individus en rapportavec ces modes, par la définition de l’optimalité par l’intermédiairede la satisfaction ressentie par rapport aux choix de vie posés. Cetatelier comprend aussi la généralisation des notions à toutes lesprises de risques sociales auxquelles sont exposés les jeunes de cetâge : sexualité, jeu, nourriture, sport, etc.

Le troisième atelier installe la même réflexion pour les expé-

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riences de douleur/souffrance, en y ajoutant l’exploration de ladépendance psychologique (l’assuétude) et la manipulation plusapprofondie du modèle d’Écoute active minimale déjà introduit auprimaire.

Les animateurs de ces ateliers sont cette fois-ci des inter-venants dûment formés à cette fin. Ils sont supervisés afin des’assurer de leur respect de la responsabilisation et de l’au-todétermination des individus, s’assurer du respect des choix devie possiblement adoptés par ceux-ci et de renforcer leur capacitéde tolérer cette part d’incertitude que comprend toute interventionqui s’inscrit en phénoménologie expérientielle et en Gestionexpérientielle.

Je viens de vous exposer le programme Prisme dans sa ver-sion de base. Les huit ateliers constituent un minimum obligatoirepour quiconque veut appliquer ce programme. Une contingence quecertains trouvent difficile à assurer et que d’autres trouvent … insuffi-sante. Notre expérience démontre que la phase d’implantation dePrisme dure trois années, que la phase de consolidation dure entrecinq et sept années avant d’aborder de plein pied la phase dedéveloppement. Le programme Prisme exige donc une implication àlong terme. Comment pourrait-il en être autrement alors que l’ap-proche de la Gestion expérientielle veut accompagner les individusdans leur réflexion sur leurs expériences de vie en fonction d’unobjectif d’optimalité et de satisfaction ?

L’AQGE compte parmi ses membres des organisations qui ensont à dix, quinze et vingt ans de programmation Prisme. Des parentss’impliquent pour leur part dans l’animation des ateliers du primairedepuis cinq, huit et plus de dix ans. On retrouve actuellement parmieux des personnes qui ont eu le programme Prisme lorsqu’ils étaienteux-mêmes adolescents.

« Ce sont parfois de petits indicateur s qui nous disent que leprogramme fait son chemin. Lorsque j’ai vu, l’année der nière, uneétudiante de 3ème année, en techniques d’éducation spécialisée,venir me voir, pour la libérer quelques heures pour qu’elle puisse ani-mer bénévolement des atelier s du programme Prisme parce qu’elleen avait bénéficié elle-même,au primaire, j’ai souri. Elle ne savait pasque j’avais coordonné ce programme et c’est le fr uit du hasard si jel’ai su. Ce sont de petits gestes comme celui-là qui font que l’on saitque ça av ance et que, quelque par t les g ens en r etirent quelquechose. » M. J., psychoéducatrice, enseignante en techniques d’édu-cation spécialisée

On retrouve des écoles où les intervenants chargés de suivreles élèves problématiques ont été formés eux aussi à la Gestionexpérientielle et poursuivent l’accompagnement de la réflexion enprofitant du langage commun installé par le programme Prisme.Enfin, certains projets de prévention ont largement dépassé la sériede huit ateliers de base pour offrir une programmation de 10, 12 et15 ateliers. D’autres projets ont implanté des programmes complé-mentaires destinés par exemple aux classes de la première à lacinquième année du primaire (programme GymSat) ou encore des-tinés aux élèves présentant des difficultés d’apprentissages (pro-gramme Ad modus vivendi).

B) La réadaptation en toxicomanieDans le domaine de la réadaptation, le fil conducteur des dif-

férents outils et programmes d’intervention proposé repose essen-tiellement sur le bilan expérientiel. Celui-ci prévoit une intervention

en quatre étapes : la réflexion sur les expériences de vie en fonctiondes avantages retirés et des désavantages rencontrés, la définitiondes possibilités de mode de vie et, enfin, l’identification d’un choixpersonnel de mode de vie et la satisfaction ressentie face à ce choix,définition de l’objectif général d’intervention (renforcement du modevie, changement de mode de vie ou poursuite de la réflexion). Pourchaque étape, et en fonction de différentes clientèles, existent dif-férents outils spécifiques d’application permettant de réaliser lestâches correspondantes. Les programmes permettent quant à eux,toujours en fonction des clientèles, un accompagnement plus oumoins progressif de l’individu à travers les quatre étapes du bilanexpérientiel.

En ce sens, et pour fin de démonstration, j’utiliserai la GSM(grille de satisfaction et de motivation) qu’ont magistralementélaborée messieurs Bonneau et Lamontagne et à laquelle j’ai mo-destement contribué au niveau des intuitions cliniques de départ.

Les bases de la GSM sont essentiellement traditionnelles. Eneffet, l’outil propose aux individus une réflexion sur les principalessphères de vie (travail, famille, loisirs, argent, etc.) avec l’objectifd’aider à créer une réflexion la plus complète et exhaustive possiblesur les avantages et les désavantages rencontrés dans le mode devie choisi. Mais l’originalité du GSM repose en grande partie sur l’u-tilisation du niveau de satisfaction ressentie comme mesure globaleet intégrative du rapport entre ces avantages et ces désavantagesdans la vie de l’individu. Par exemple, d’entrée de jeu la personnedevra, sur une échelle en dix points, exprimer son niveau de satis-faction à l’égard d’une première sphère de vie, nommément son tra-vail. Puis, elle doit préciser les raisons qui supportent directement lanote accordée, mettant tout de suite l’emphase sur les dimensions

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importantes impliquées dans sa réflexion. Ensuite, elle doit préciserce qui pourrait être ajouté afin d’atteindre une note parfaite, ouvrantla réflexion sur de nouvelles possibilités existantes au regard de lapersonne elle-même.

L’originalité de la GSM repose aussi sur la distinction qui estfaite entre le niveau de satisfaction et la motivation au changement.En effet, aucun lien de causalité entre les deux n’est établi de facto,comme l’intervention classique le suppose très souvent. De nom-breuses possibilités existent sur cette relation entre satisfaction etmotivation au changement et la GSM en permet l’exploration inté-grale en demandant à la personne d’exprimer sa motivation àapporter des changements sur une autre échelle en dix points. Unemotivation qui est définie non pas en relation avec une utopie, unrêve, mais plutôt en fonction d’un investissement conséquent d’énergie, de ressources, d’argent et de temps. Ainsi, une personnerelativement satisfaite de son choix de vie sur une sphère donnéepeut fort bien exprimer une faible motivation d’y ajouter un avantagesupplémentaire. Mais elle pourrait aussi être hautement motivée àajouter ce qu’elle a précédemment identifié comme manquant ouencore supprimer un désavantage important à ses yeux. D’autre part,une personne relativement insatisfaite de son choix de vie peut fortbien exprimer une forte motivation à apporter des changements pourajouter un avantage ou supprimer un désavantage. Mais elle pourraitaussi se contenter des quelques avantages qu’elle y retrouve ou trou-ver anodin les désavantages rencontrés.

La GSM systématise en conséquence tout le processus deréflexion et permet dans un temps relativement court de dresser pourl’individu une synthèse des plus complètes de son appréciation deses choix de vie pour chaque sphère identifiée. Cette synthèseindique clairement à l’intervenant autant les sphères de satisfactionet d’insatisfaction de l’individu concerné que sa motivation auchangement conséquent, facilitant d’autant la compréhension deson expérience de vie ainsi que l’établissement des objectifs de l’in-tervention dans le respect du principe de l’autodéterminationavancée par l’approche.

Les intervenants formés à l’utilisation de cet outil ne cessentd’en souligner le potentiel unique et le caractère très convivial de sonutilisation, que ce soit dans son application classique individuelle ouencore dans des applications plus récentes en intervention de cou-ple, familiale et intergénérationnelle. Par exemple, un intervenant meconfia une situation délicate : il n’avait qu’une rencontre avec unclient pour définir sa problématique, fixer des objectifs d’interventionet transmettre ces informations à une équipe qui connaissait déjàdepuis longtemps le client en question. Il prit la décision d’utiliser àcette fin la GSM. Il me mentionna à quel point l’équipe avait été éton-née de sa profonde compréhension de la personne en question étantdonné le peu de temps passé en sa compagnie et par la justesse etla pertinence des objectifs d’intervention identifiés. Évidemment, jedemeure convaincu que les 25 années d’expérience professionnellede cet intervenant sont à l’origine d’une telle efficacité, mais luidemeure convaincu qu’il n’aurait pu atteindre celle-ci dans ce casprécis sans l’aide précieuse de la GSM.

Que ce soit pour le domaine de la prévention ou celui de laréadaptation, que ce soit pour la problématique des toxicomanies outoute autre problématique sociale d’importance, que ce soit pour laformation des intervenants, la conception et le développement desoutils d’application ou encore la recherche et l’évaluation, les per-

sonnes intéressées peuvent trouver plus d’informations sur le siteWeb : <http://membres.lycos.fr/aqge>.

NDLRLa dernière partie de cet article sera publiée dans L’intervenant, vol.23, n° 4, juillet 2007.

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Un regard sur les phénomènes entourant la parentalité des per-sonnes présentant un trouble mental grave, voici ce que proposeAu-delà des troubles mentaux, la vie familiale . Regard sur laparentalité . Face à un trouble, le rôle parental constitue en effetune source de stress intense et devient très difficile à assumer. Lesauteurs abordent de manière exhaustive ce que vivent ces familleset proposent des pistes d’actions simples et efficaces qui peuventêtre mises en œuvre dans les milieux de pratique afin de répondreadéquatement aux besoins de la population visée. Nul doute quecet ouvrage, réalisé à l’initiative du Comité de la santé mentale duQuébec et préfacé par Luc Blanchet, son président, apportera unéclairage nouveau sur cette réalité difficile et inspirera les acteursqui oeuvrent dans les domaines des services en santé mentale etdes services à l’enfance et à la famille.Disponible en librairie au coût de 29,95 $.

n De la dépendance affective à la recouvrance – Croire en soiMarie-Chantal Deetjens

Être dépendant affectif, c’est compter sur l’autre pour combler unsentiment de vide, c’est oublier de se respecter, de s’aimer, c’estmanquer de confiance en soi dans ses relations et vivre, avanttout, par le regard d’autrui. Mais qui est le dépendant affectif?Quelle souffrance l’habite? Quelles sont les sources de sa douleur?Surtout, comment la personne dépendante affective peut-elle s’ensortir? Marie-Chantal Deetjens fait ici le tour de cette vaste ques-tion. Elle fournit au lecteur nombre d’outils pour en guérir ou pouraccompagner une personne qui souffre de cette condition.Québécor (2006)Disponible à l’AITQ.

n Grilles d’évaluation du personnel et de l’organisation AITQ

Cet outil de gestion comprend neuf grilles d’évaluation : Auto-évaluation d’un membre du CA;Évaluation de l’organisation parla clientèle; Évaluation de l’orga-nisation par ses administrateurset dirigeants; Évaluation de ladirection administrative; Évalua-tion de la direction générale; Évaluation des bénévoles; Éva-luation du personnel auxiliaire;Évaluation du personnel clérical et administratif; Évaluation dupersonnel clinique. AITQ (2006)Disponible à l’AITQ.

n Les troubles obsessionnels compulsifs :Principes, thérapies, applications (2ème édition) Martine Bouvard

L’originalité de cette deuxième édition réside dans l’introduction enfin d’ouvrage d’un manuel destiné au patient, qui permet de l’in-former sur le TOC, sa fréquence et les différentes thérapies adap -

tées. Ce supplément inclut 20 exercices pour s’évaluer seul ou avecle thérapeute, en suivant la trame progressive de la thérapie cogni-tive et comportementale. L’objectif de cet ouvrage est d’offrir auxpsychothérapeutes, psychiatres et psychologues une meilleure con-naissance des traitements utiles aux patients souffrant de TOC.Maladie hétérogène, certaines catégories du TOC demandent eneffet une stratégie thérapeutique spécifique. Deux méthodes detraitement reconnues sont exposées : la thérapie comportementaleet cognitive et la pharmacologie. Éditions Masson (2006)Disponible à l’AITQ.

n TOXICOMANIE FÉMININEDu traumatisme sexuel à l'amour de transfertThomas, O.

Qu'en est-il de la toxicomanie au féminin et de sa logique passion-nelle dans son rapport au traumatisme? Au moment même où lapsychiatrie se fabrique une sous spécialité médicale avec la notiond'addiction, ce travail réintroduit la différence entre hommes etfemmes, que la passion de la drogue tend à abolir. La réflexion del'auteur s'étaye sur une pratique de dix-huit ans comme psycho-logue clinicien auprès d'une population de toxicomanes dans unCentre spécialisé de soins en toxicomanie (CSST). L'anamnèse denombreuses femmes toxicomanes révèle la fréquence de trauma-tismes sexuels subis dans l'enfance ou l'adolescence. Le recours àla drogue ici a pour fonction de se soustraire au souvenir del'événement traumatique. L'évocation de ces histoires trauma-tiques dans le cadre du travail psychothérapeutique s'effectue leplus souvent sur un mode passionnel. L'auteur montre à partird'exemples cliniques que sous le couvert du transfert peut sedévoiler une passion : amoureuse, haineuse, véritable toxicomanied'objet qui vient se substituer à la passion du toxique. Ces passionsde transfert sont de véritables constructions, qui ont une fonctionde suppléance. Elles dévoilent un positionnement spécifi que desfemmes toxicomanes quant à la question de l'être dans son rapportà l'objet : un défaut de reconnaissance radicale et un défaut detravail de deuil. ÉRÈS (2006)Disponible à l’AITQ.

n Traité d’addictologieSous la direction de Michel Reynaud

Encyclopédie traitant de la problématique générale en 28 chapitres(210 p.), des addictions : approches thérapeutiques en 14 chapitres(80 p.), d’alcool en 16 chapitres (95 p.), du tabac en 11 chapitres (65 p.), du cannabis en 13 chapitres (60 p.), de l’héroïne, la cocaïneet autres drogues en 15 chapitres (110 p.), des autres addictions en7 chapitres (50 p.), du dopage en 4 chapitres (30 p.), du foie et desaddictions en 3 chapitres (20 p.) et des addictions et la grossesseen 5 chapitres (35 p.). Un certain nombre de données récentes per-mettent de mieux comprendre le phénomène d’addiction, justifientune approche commune et éclairent l’intérêt principal de cetteapproche : mieux prévenir l’installation des addictions et mieuxsoigner nos patients. Flammarion Médecine-Sciences (2006) Disponible à l’AITQ.

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