Synthèse des études réalisées par l’Institut de veille sanitaire sur la vague de chaleur d’août 2003

Rôle des îlots de chaleur urbains dans la surmortalité observée pendant les vagues de chaleur

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Lesimpactsdesvaguesdechaleursurlamortalitéetsurlamorbiditésontaujourd’huibiendocumentésenFrance.Prèsde15000décèsontétéobservéspendantlavaguedechaleurde2003,etprèsde2000pendantlavaguedechaleurde2006.

Pendant les vagues de chaleur, l’impact relatif est plusimportantdanslesgrandesagglomérationsetlespersonneslesplusvulnérablessontlesplusâgées,dontlenombredoubleraàl’horizon2050(encadré).

Unedesraisonsavancéesdecetteplusgrandevulnérabilitédeszonesurbainesestl’existenced'îlots de chaleur urbains(ICU). Les ICU caractérisent le fait que les températuresambiantesenzonesurbainessontgénéralementsupérieuresde plusieurs degrés à celles des zones rurales alentours.Ilss’expliquentparleremplacementenmilieuurbaindessolsnusetdelavégétationpardessurfacesimperméablesquis’échauffentplusfacilement,parlesstructuresurbainesquientraventleséchangesdechaleurentrelesoletl’air,etparl’émissiondechaleurparlesactivitéshumaines.

LesICUentraînentdoncuneexpositiondelapopulationurbaineàdestempératuresplusélevées,avecdesécartsdetempératurequipeuventêtreconsidérablesd’unquartieràl’autre.

Cephénomènetendàs’accroîtreaucoursdutemps.Ainsi,ladifférencemesuréeentrelavilleetlacampagnealentourétaitde+1°Cen1868àParis,tandisqu’elleaatteint+10°Cen2003.

Plusieursétudesontestiméquel’ICUaugmentaitlerisquedemortalitépendantlesvaguesdechaleur,commeparexempleàPhiladelphie,BerlinouShanghai.

Contexte

Le risque vague de chaleur en quelques chiffres

Surmortalité pendant la vague de chaleur de 2003 : -petiteetmoyennesvilles40%;-grandesagglomérations:Lyon80%,Paris141%.

Part des personnes de 75 ans et plus (les plus vulnérables à la chaleur) dans la population française :-8,8%en2003;-15,6%en2050.

Différence de température campagne/ville à Paris :-+1°Cen1868;-+10°Cen2003.

Schéma des îlots de chaleur urbains

Danscecontexte,l’Institutdeveillesanitaire(InVS)aconduitdeuxétudesafindedéterminerlesfacteursderisquededécèschezlespersonnesâgéespendantlacaniculed’août2003.Parmilesfacteursétudiés,l’environnementdespersonnesentermesd’habitatetdetempératureafaitl’objetd’uneattentionparticulière.

Pendant la canicule d’août 2003, l’InVS a étudié 482personnesde65ansetplus,résidantàParisetdansleVal-

de-Marne,encomparantlesconditionsenvironnementalesdecellesquisontdécédéespendantcettepériodeaveccellesquiontsurvécu.

Afind’estimerlestempératuresauxquellescespersonnesontétésoumisespendantlacanicule,desdonnéessatellitaires(satellitesLandsat-TMetNOAA-AVHRR)ontétéutiliséesafind’avoirunecartographieprécisedestempératuressurlazoned’étude.

Les enseignements tirés de nos études

Institut de veille sanitaire - Rôle des îlots de chaleur urbains dans la surmortalité observée pendant les vagues de chaleur / p. 3

Cetteétudeapermisdemettreenévidencecertainsfacteursderisque,liésauxcaractéristiquesdespersonnesouàleurenvironnement:

•facteursderisqueindividuel:- laperted’autonomie,enparticulierlebesoind’aidepourseleverous’habiller,oulefaitd’êtreconfinéaulit,multiplielerisquededécèspar4à10,- l’existencedepathologiespréexistantes (psychiatriques,cardiovasculairesouneurologiques)multiplielerisquededécèspar3à5;

•facteursderisqueliésàl’environnement:- lefaitdedormirdansunechambresouslestoits(endroitlepluschauddulogement)multiplielerisquededécèspar4,- lefaitd’habiterdansunquartierpluschaud(c'est-à-direunICU),surtoutsicettechaleurpersistelanuitetpendantplusieursjours,multiplielerisquededécèspar2.

Enrevanche,certainscomportementsprotecteurspermettentdediviserpar3à5lerisquededécès,enparticulierlefaitdesevêtirplus légèrementoudese rafraîchir (douches,brumisation,etc.).

En région parisienne, les zones les plus chaudes, et donc les plus à risque, sont situées dans les zones industrielles le jour et en centre-ville la nuit.

Les enseignements tirés de nos études (suite)

Cartographie des ICU le jour et la nuit (valeurs moyennes du 4 au 13 août 2003, données des satellites NOAA-AVHRR).Enjournée,lesICUsontmorcelés,situésprincipalementenzonesindustriellesdu fait des propriétés physiques des surfaces quiabsorbentlachaleur.Àl’inverse,lanuit,seformeunICUunique, centré sur le centre ville, du fait de ladensitéurbainequiempêchelachaleurdes’évacuer.Celasignifiequelapopulationsubitdestempératurestrèsélevéespendantlanuit,rendantdifficilelereposetlarécupération.

Îlots de chaleur de jour

Îlot de chaleur de nuit Îlots de chaleur de jour

Îlots de chaleur de nuit

Îlot de chaleur de nuit Îlots de chaleur de jour

Évolution des températures sur un cycle de 24 heures pourdifférentsmodesd’occupationdusol(industriel,urbain,parc).

Zones industrielles : trèschaudeslejour,plusfroideslanuit(lesinfrarougess’échappentfacilement).

Centre ville : trèschaudlanuit,nepermetpasàl’organismederécupérerdelachaleurdiurne.

Parcs : températures2à3°Cinférieuresaucentre-villesurl’ensembleducyclediurne.

Institut de veille sanitaire12 rue du Val d’Osne94 415 Saint-Maurice Cedex FranceTél. : 33 (0)1 41 79 67 00Fax : 33 (0)1 41 79 67 67www.invs.sante.fr

ISSN : 1958-9719ISBN : 978-2-11-129347-2ISBN NET : 978-2-11-129320-5Impression : Bialec - NancyTirage : 1 000 exemplairesDépôt légal : avril 2012Réalisation : Service communication - InVS

•DoussetB,GourmelonF,GiraudetE,LaaidiK,ZeghnounA,BretinPetal.Évolutionclimatiqueetcaniculeenmilieuurbain.Apportdelatélédétectionàl'anticipationetàlagestiondel'impactsanitaire.2011.82p.

•LaaidiK,ZeghnounA,DoussetBetal.The ImpactofHeatIslandsonMortalityinParisduringtheAugust2003Heatwave.Environ Health Perspect 2012;120:254-9. Disponible sur :http://ehp03.niehs.nih.gov/article/ info:doi/10.1289/ehp.1103532

•BretinP,VandentorrenS,ZeghnounA,LedransM.Étudedesfacteursdedécèsdespersonnesâgées résidantàdomiciledurantlavaguedechaleurd'août2003.Saint-Maurice:Institutdeveillesanitaire;2005.104p.Disponibleàpartirdel'URL:http://www.invs.sante.fr

•Lespublicationsdel’InVSsurlesujetsontconsultablesàpartirde l’URL : http://www.invs.sante.fr/Dossiers-thematiques/Environnement-et-sante/Climat-et-sante/Chaleur-et-sante/Publications

Pour en savoir plus

KarineLaaidi,InVS.E-mail:ka.laaidi@invs.sante.fr

Contact

Les ICU sont la cause d’une forte surmortalité en période caniculaire.

L’ICU est disséminé dans les zones industrielles le jour, et concentré sur le centre ville la nuit,cequiempêchele repos nocturne et la récupération pour les personnesconcernées.L’impactsurlamortalitéestconsidérable,avecunrisquedeuxfoisplusélevéchezlespersonneslesplusexposéesàlachaleur,enparticulierlanuitetlorsquelacaniculepersistedurantunesemaineouplus.

Or le changement climatique se traduira par une augmentation de l’intensité et de la fréquence des vagues de chaleur : d’ici2050,unecaniculesimilaireàcelledel’été2003pourraitseproduireenmoyenneuneannéesurdeux,etenFrancelenombredejoursavecdestempératuressupérieuresà30°CpourraitégalerceluiquiestactuellementobservéenEspagneouenSicile.Cesforteschaleursontetserontd’autantplusdifficilesàsupporterdanslesvilles.

Différentes mesures permettent de réduire le risque de surmortalité lié aux vagues de chaleur :

•tout d’abord des mesures d’adaptation à court terme,quiontétémisesenplacedanslecadreduPlannationalcanicule:installationdepiècesrafraîchiesdansleshôpitauxetlesmaisonsderetraites,aideauxpersonnesvulnérables,diffusiondeconseilsdecomportement.Desmesuressimplespeuventêtreprisesparchacunpourseprotégerdelachaleurtelles que se rafraîchir, s’hydrater, se vêtir légèrement,

nepaslaisserentrerlachaleurdanssonlogementlejouretaérerlanuit.Cependantcesmesuresnesontpassuffisantespourassureràellesseulesunepréventioncomplètedeseffetsdelacanicule.Ellesleserontd’autantmoinsàl’aveniravecleréchauffementclimatiqueetlevieillissementetl’urbanisationdelapopulation;

•undeuxièmetypedemesuresconcerne l’atténuation des ICU,enparticuliernocturnes.Ilpeuts’agird’augmenterlesespacesverts,d’isoleradéquatementlesbâtimentspourleconfortd’été(jusqu’àprésentl’isolationvisaitenpremierlieulesdéperditionsdechaleurenhiver),d’utiliserdesrevêtementsurbainsquiabsorbentmoinslachaleur,ouencored’opterpourunurbanismefavorableàl’évacuationnocturnedelachaleuraccumuléeenjournée.Cesmesuressontcomplémentairesdesmesuresd’adaptationàcourtterme,quisontactuellementlesseulesàprotégerlapopulation,carilfautdutempspourfaireévoluer lebâtiet l’urbanisme.Ellesdoiventprendreen compte les particularités de chaque ville, et intégrerlesexigencesdeprotectiondelaqualitédel’air,demanièreàavoirdesactionsefficacespourunemeilleureprotectiondelasanté.Cecicommenceàêtreenvisagéautraversdesplansclimat-énergieetdesschémasrégionauxclimat-air-énergie;

•enfin, à l’échelledu siècle et de laplanète, il s’agiraderéduirelesémissionsdesgazàeffetdeserrepourjugulerl’emballementduclimatencours.

Perspectives

Citationsuggérée:

LaaidiK.Rôledesîlotsdechaleururbainsdanslasurmortalitéobservéependantlesvaguesdechaleur-Synthèsedesétudesréaliséesparl’Institutdeveillesanitairesur

lavaguedechaleurd’août2003.Saint-Maurice:Institutdeveillesanitaire;2012.4p.Disponibleàpartirdel'URL:http://www.invs.sante.fr

Mots clés : canicule,milieuurbain,température,mortalité,facteurrisque