14
17 L A COLÈRE SOCIALE EST PARTOUT. Mais le « mouvement ouvrier » comme son nom ne l’indique pas ne polarise plus, loin s’en faut, la majorité des plus modestes, les plus abandonnés par le système. Paradoxe conjoncturel ? Effet délétère mais passager de la crise ? Le « vote ouvrier » justement ! Mais, de quelle classe ouvrière parle-t-on ? Que s’est-il passé en un quart de siècle au sein du salariat, au sein de l’orga- nisation du travail ? Peut-on se contenter du rituel consistant à dire que les « travailleurs » sont majoritaires ? Phrase qui n’a plus de sens depuis que les classes rurales sont ultra minoritaires. Alors première question : à qui s’adresse-t-on quand il s’agit de proposer une rupture avec le capitalisme ? À l’écrasante majorité de la population ? Oui. Mais encore ? À une grande partie de la jeunesse, à l’essentiel des salariés et agents de l’État, aux retraités modestes, aux petits acteurs indépendants du marché (agriculteurs, artisans), à une partie de ce qui est intitulé « professions libérales » et aux artistes et intellectuels ? Oui. Or, justement une force politique anticapitaliste (quelle que soit sa forme) devrait tendre à être plus ou moins le reflet de cet éventail ; devrait vouloir le faire. Nous en sommes évidemment bien loin. Car, si toutes ces catégories ne se définissent pas de manières identiques dans leurs rapports objectifs aux mécanismes d’exploitation du capitalisme, aucune pourtant n’échappe durablement aux effets néfastes, économiques et sociaux, de celui-ci. D’autant plus que le capitalisme contribue à alimenter toutes sortes d’oppressions, de violence, de destruction de l’environnement et d’angoisse sociale dont il est difficile de s’abstraire pour toutes ces catégories. Alors quoi ? Faudrait-il considérer cette mosaïque sociale comme un ensemble de cercles concentriques, fait de « fractions sociales et fractions de classes », mais avec en son centre les ouvriers d’industrie, qui eux et eux seuls n’auraient « vraiment » que leurs chaînes à perdre ? Ou faut-il revoir cette copie et recon- sidérer la formation sociale dans son ensemble ? Le grand arc social du salariat Les ouvriers et employés représentent autour de 45 % (évaluation à partir des tableaux « Population de 15 ans ou plus selon la catégorie socioprofes- sionnelle en 2010 », INSEE), en éli- minant de la catégorie « employés » les militaires et les policiers, en Réorganisation du capital et éclatement du salariat Claude Gabriel* * Claude Gabriel est économiste, il étudie plus spécialement l’économie des entreprises. ACTUALITÉ CT 1-PRESENTATION 28/06/12 23:18 Page17

Réorganisation du capital et éclatement du salariat · complexe et très étendue de primes, segmentation des établissements, exter-nalisation juridique de certaines fonctions,

  • Upload
    others

  • View
    2

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Réorganisation du capital et éclatement du salariat · complexe et très étendue de primes, segmentation des établissements, exter-nalisation juridique de certaines fonctions,

17

L A COLÈRE SOCIALE EST PARTOUT. Mais le « mouvement ouvrier » comme sonnom ne l’indique pas ne polarise plus, loin s’en faut, la majorité des

plus modestes, les plus abandonnés par le système. Paradoxe conjoncturel ?Effet délétère mais passager de la crise ?

Le « vote ouvrier » justement ! Mais, de quelle classe ouvrière parle-t-on ?Que s’est-il passé en un quart de siècle au sein du salariat, au sein de l’orga-nisation du travail ? Peut-on se contenter du rituel consistant à dire que les« travailleurs » sont majoritaires ? Phrase qui n’a plus de sens depuis que lesclasses rurales sont ultra minoritaires.

Alors première question : à qui s’adresse-t-on quand il s’agit de proposerune rupture avec le capitalisme ? À l’écrasante majorité de la population ?Oui. Mais encore ? À une grande partie de la jeunesse, à l’essentiel dessalariés et agents de l’État, aux retraités modestes, aux petits acteursindépendants du marché (agriculteurs, artisans), à une partie de ce qui estintitulé « professions libérales » et aux artistes et intellectuels ? Oui. Or,justement une force politique anticapitaliste (quelle que soit sa forme) devraittendre à être plus ou moins le reflet de cet éventail ; devrait vouloir le faire.Nous en sommes évidemment bien loin.

Car, si toutes ces catégories ne se définissent pas de manières identiquesdans leurs rapports objectifs aux mécanismes d’exploitation du capitalisme,aucune pourtant n’échappe durablement aux effets néfastes, économiques etsociaux, de celui-ci. D’autant plus que le capitalisme contribue à alimentertoutes sortes d’oppressions, de violence, de destruction de l’environnement etd’angoisse sociale dont il est difficile de s’abstraire pour toutes ces catégories.Alors quoi ? Faudrait-il considérer cette mosaïque sociale comme un ensemblede cercles concentriques, fait de « fractions sociales et fractions de classes »,mais avec en son centre les ouvriers d’industrie, qui eux et eux seuls n’auraient« vraiment » que leurs chaînes à perdre ? Ou faut-il revoir cette copie et recon-sidérer la formation sociale dans son ensemble ?

Le grand arc social du salariat

Les ouvriers et employés représentent autour de 45 % (évaluation à partirdes tableaux « Population de 15 ans ou plus selon la catégorie socioprofes-

sionnelle en 2010 », INSEE), en éli-minant de la catégorie « employés »les militaires et les policiers, en

Réorganisation du capital et éclatement du salariat

Claude Gabriel*

* Claude Gabriel est économiste, il étudie plusspécialement l’économie des entreprises.

ACTUALITÉ

CT 1-PRESENTATION 28/06/12 23:18 Page17

Page 2: Réorganisation du capital et éclatement du salariat · complexe et très étendue de primes, segmentation des établissements, exter-nalisation juridique de certaines fonctions,

18

incluant les retraités, les chômeurs n’ayant jamais travaillé et environ 1/4 despersonnes déclarées diversement comme inactives.

Les catégories « populaires » représentent 87 % de la population de plusde 15 ans :

➜ 45 % pour les ouvriers et employés ;➜ 41,8 % pour ceux qui ne sont ni ouvrier, ni employé, ni chômeur ou

retraité de ces deux catégories… mais qui ne sont ni agriculteurs moyens etgrands, ni policiers, ni militaires, tout en y incluant les jeunes de plus de 15ans (8,3 %), une part des cadres (du privé et de l’administration, 6.7 % contreles 9 % globalement), des professions libérales (0,2 % contre 0,9 %).

Les catégories sociales « bourgeoises, policiers, curés et gros agriculteurs »ne représentent pas plus de 13 % de la population.

Les salariés – cette fois-ci au sens de personnes actives ayant un emploi –représentent 48 % de la population de plus de 15 ans, hors scolarisés, dont20 % de cadres (après correctif des niveaux supérieurs) et les professionsintermédiaires. Ces deux dernières catégories représentent donc 41 % dusalariat proprement dit. Quel que soit le périmètre, on arrive ainsi à un effectifouvriers et employés qui représente entre 50 % et 60 %.

L’industrie maintenant puisqu’elle est souvent au cœur des enjeux… Dansla métallurgie, il y a 52 % d’ouvriers, 28 % d’administratifs, techniciens etagents de maîtrise et 20 % d’ingénieurs et cadres, soit en gros 1/3 decatégories dites cadres et intermédiaires. Les cadres seuls représentent 20 %de l’effectif dans la chimie, 33 % dans l’aéronautique et l’industrie ferroviaire(9 % en agro-alimentaire et dans l’automobile). Et encore prend-on ici lesbranches dans leur globalité, TPME incluses.

Dans toute l’industrie en 2010, les recrutements de cadres dans les fonctionsindustrielles clefs non administratives se sont élevés à 60 % de l’ensemble desentrées. Pourquoi cela ? Premier élément, la progression du taux d’encadrement :les gains de productivité dans le secteur industriel ont été continus entre 1997et 2006, de +3,5 % en moyenne par an, permettant une utilisation plusintensive du capital et du travail et favorisant au final la création d’emplois decadres. La progression du taux d’encadrement a été significative dans lessecteurs où les capacités d’innovation sont les plus élevées, par exemple dansles industries aéronautiques, ferroviaires et navales.

L’effectif salarié de l’industrie a diminué de 18 % entre 1994 et 2009,alors que pour l’ensemble des secteurs du privé il a progressé de 16 % sur lamême période. À l’inverse, l’effectif cadre dans l’industrie s’est accru de 23 %entre 1994 et 2010, pour atteindre 473 000 fin 2010. Les entreprises parailleurs ont procédé à une externalisation croissante des fonctions auxiliaires etles délocalisations ont laissé sur place les activités à plus forte valeur ajoutée.

Finalement, à moins de croire que l’on puisse briser la dépendancecapitaliste de l’une des premières puissances économiques mondiales par laseule mobilisation volontariste d’une partie spécifique de la populationlaborieuse… le problème est éclatant : la conviction de cette rupture doit être

ACTUALITÉ

CT 1-PRESENTATION 28/06/12 23:18 Page18

Page 3: Réorganisation du capital et éclatement du salariat · complexe et très étendue de primes, segmentation des établissements, exter-nalisation juridique de certaines fonctions,

19

transmise bien au-delà des seules catégories les plus populaires, celles géné-ralement qualifiées d’ouvrières.

Plus grande diversification du travail

Les gains de productivité, déjà mentionnés, mais aussi la quantité de« savoir » accumulé dans les machines, les procédés et les procédures onttrès fortement accru la part de « travail intellectuel » dans toutes les brancheséconomiques et sur beaucoup de postes de travail. Ce phénomène est loin dese restreindre aux catégories de cadres et de techniciens et s’est étendu depuisau moins vingt ans dans les catégories employés et ouvriers. Niveau d’étudesrequis, apprentissage sur le tas, autoformation, tout cela a accompagné l’évo-lution des emplois. Toutes choses sur lesquelles se sont appuyées les entreprisespour créer une confusion entre faculté des personnes à arbitrer dans certainessituations et autonomie réelle.

Le contenu cognitif croissant du travail pour une grande partie du salariatet le renforcement numérique des catégories cadres et techniciens se sontaccompagnés de deux grands mouvements contradictoires :

1- Un partie du salariat est restée engluée – en conformité avec les besoinsdu système contrairement à ce qui est affirmé sur la crise de l’employabilité –dans des métiers n’appelant pas d’autres gains de productivité que la simpleintensification de la productivité physique, le plus souvent des emplois sous-qualifiés dans l’industrie et surtout les services. La massification de l'échecscolaire, reflet d’une dégradation d’un système éducatif, renvoie à cette dualitédes besoins actuels de capital, entre production de haute technicité et nonqualification. Phénomène général en Europe au demeurant, et que l’Allemagnetraduit par exemple par l’absence de salaire minimum dans les services et lalibéralisation massive de l’intérim.

2- Par ailleurs, le contenu cognitif grandissant du travail, au lieu dedéboucher sur un renforcement de l’autonomie des individus vis-à-vis des direc-tions supérieures de l’entreprise, a finalement été gagné et capturé par cesdernières grâce… aux sauvegardes informatiques. Là où, par le passé, lesavoir accumulé restait essentiellement la « propriété » des individus et faisaitpartie du dispositif de pression/négociation du technicien voire de l’ouvrier,dorénavant les procédures informatiques immobilisent ce savoir (y comprisau sens comptable du terme) dans les actifs de l’entreprise, dépossédant lescadres opérationnels, les commerciaux, les chercheurs, les ouvriers les plusqualifiés de leurs savoirs empiriques cumulatifs. C’est un processus de prolé-tarisation par le haut qui se diffuse à différents niveaux : dans la baisse dessalaires à l’embauche des jeunes cadres, dans l’aptitude des entreprises àgérer un turn over croissant de leurs personnels qualifiés, dans les écartssalariaux grandissant entre haute hiérarchie et encadrement général, dans lemaintien voire l’accentuation des inégalités entre femmes et hommes cadres.

ACTUALITÉ

CT 1-PRESENTATION 28/06/12 23:18 Page19

Page 4: Réorganisation du capital et éclatement du salariat · complexe et très étendue de primes, segmentation des établissements, exter-nalisation juridique de certaines fonctions,

20

Si, depuis toujours, l’entreprise se pose objectivement la question de« comment mettre les gens au travail et comment optimiser leur savoir ? », lapériode récente a vu s’accroître spectaculairement la capacité du système àdérober une part grandissante du savoir individuel des salariés plutôt que sasimple « mise à disposition ».

Ces mouvements paradoxaux ont accru les divisions au sein du salariat.La position sociale dans le salariat n’est plus seulement « combien gagnez-vous ? », mais « où travaillez-vous ? » et « quelle est votre place dans leprocessus de travail ? ». Pour le vote Front national en mai 2012, c'est leniveau de diplôme qui compte le plus, comme l'avaient déjà noté dessociologues pour les précédents scrutins : un électeur sans diplôme sur deux(49 %) voterait pour la candidate frontiste (Ifop) !

Tout cela doit attirer l’attention de quiconque veut poser la question dupouvoir, de quiconque a besoin de gagner l’écoute de couches salariales lesplus larges pour être en position de poser un peu sérieusement la question dela rupture, en s’évitant l’ornière de la catégorie fumeuse de « classes moyennes »,au pluriel en plus.

« Ouvriers, employés, techniciens et cadres »

Un autre facteur important doit être pris en compte, celui des modèlessociaux propres à chaque entreprise (relations sociales, politique salariale,formations, etc.). Deux dynamiques se combinent : d’abord un mouvementgénéral de gains de productivité et d’intensification de la charge de travail(quels que soient le secteur et la taille de l’entreprise, y compris bien sûr dansles entreprises publiques et les administrations) ; ensuite une dispersion gran-dissante des modèles sociaux non seulement entre secteurs et entreprises,mais aussi entre filiales et activités au sein d’un même groupe.

L’équilibre entre ces deux mouvements (l’un centripète, l’autre centrifuge)se fait grâce à des stratégies sociales à chaque fois spécifiques : politiquecomplexe et très étendue de primes, segmentation des établissements, exter-nalisation juridique de certaines fonctions, etc. – sans parler des spécificitéslocales en matière de temps partiel, heures supplémentaires, taux du recoursà l’intérim et aux CDD. Le tout permettant de fractionner le modèle socialinterne. Il ne s’agit pas simplement de « diviser les salariés », mais plus sérieu-sement de chercher le modèle social optimum du point de vue desperformances attendues de différentes divisions et tâches de l’entreprise, enfonction aussi de l’endroit où l’entreprise a décidé de « loger » sa margedans ses comptes d’exploitation.

La sophistication de ces arbitrages sociaux internes (parfois aidée par l’am-pleur des marges dégagées) a contribué à une plus grande dispersion dessalaires, même si la relation objective de subordination et d’exploitation estgénérale. La décentralisation productive (réseau de filiales, compartimentationdes activités, filialisation, externalisation) a facilité cette forte segmentation,pas seulement subjective, mais souvent sonnante et trébuchante, la politique

ACTUALITÉ

CT 1-PRESENTATION 28/06/12 23:18 Page20

Page 5: Réorganisation du capital et éclatement du salariat · complexe et très étendue de primes, segmentation des établissements, exter-nalisation juridique de certaines fonctions,

21

sociale et salariale se montrant très différenciée, y compris au sein descatégories traditionnelles, ouvriers, agents de maîtrise ou cadres.

Les exemples abondent :● Du personnel volant d’Air-France à celui des petites entreprises travaillant

en sous-traitance (bagages, sécurité, catering) dans les aérogares.● Des employés des laboratoires pharmaceutiques aux ouvriers façonniers

de sous-traitance.● Des techniciens de PSA ou Renault aux employés de petites entreprises

de sous-traitance de 3e ou 4e rang.Les disparités de revenu salarial sont plus marquées parmi les employés et

parmi les ouvriers, ces deux catégories socioprofessionnelles étant très hété-rogènes en matière de durée d’emploi dans l’année, mais aussi en termes demétiers ou de secteurs d’activité. Chez les cadres, les disparités de revenusalarial sont nettement plus faibles, mais les écarts sont très importants quandchacun est ramené à un temps de travail égal (cf. Bertrand Marc, NathalieMissègue, Laurence Rioux, Insee).

Il faut ajouter que la part des salaires les plus élevés (les 1 % qui en 2009touchaient plus de 79 000 euros) a fortement crû au cours des vingt dernièresannées : de 6 % en 1995 à 7 % en 2007. Et ce phénomène est encore bienplus spectaculaire si l’on prend les 0,1 % les mieux rémunérés ! Cet étirementsalarial au sein du 9e décile, sans parler de la ponction scandaleuse des« grands patrons », n’est pas sans conséquence sur la manière dont une partiedes cadres peut prendre conscience de sa place définitivement subalterne.Lorsqu’en l’espace d’une génération son salaire est passé d’une proportionde 1 à 10 à une proportion de 1 à 30 (voire bien plus) avec celui du PDG deson groupe, on ajuste inévitablement sa perception de l’entreprise.

Le propagandisme ouvriériste n’a pas d’avenir

Le dernier quart de siècle a donc fortement accru les disparités au sein dusalariat. Pas simplement en termes de revenu et de niveau de vie, mais aussitrès substantiellement en matière de contenu cognitif du travail. C’est mêmepeut-être sur ce point que les écarts se sont le plus creusés, pas seulement etloin s’en faut entre les catégories socio-professionnelles traditionnelles, maisau sein de chacune d’entre elles. Cette évolution est indépendante de celle dutravail taylorisé ou de la perception que chacun a de la taylorisation ou nonde son poste. On peut fort bien travailler dans un schéma taylorien (lean pro-duction par exemple dans l’industrie) et devoir investir beaucoup de connais-sances et de subjectivité pour dénouer diverses situations. On en connaîtd’ailleurs les conséquences : stress, angoisse, souffrance psychique succèdentà l’abrutissement, l’épuisement physique, pathologies typiques du travailindustriel des années 1960 et 1970.

Cette transformation a bien évidemment été portée par l’évolution financièredes entreprises, mais aussi par la sophistication des procédés, des procédureset des normes, pour partie due à l’évolution de la science, au contenu de plus

ACTUALITÉ

CT 1-PRESENTATION 28/06/12 23:18 Page21

Page 6: Réorganisation du capital et éclatement du salariat · complexe et très étendue de primes, segmentation des établissements, exter-nalisation juridique de certaines fonctions,

22

en plus complexe de l’activité humaine et de la division du travail. Le résultatest saisissant : selon les branches, les entreprises ou les activités, les écarts deprérequis scolaires puis de connaissances accumulées « sur le tas » se sontconsidérablement agrandis. Au sein des grandes classifications socio-profes-sionnelles et entre elles, mais aussi entre industrie et services, et énormémentau sein des services eux-mêmes, etc.

Du coup, beaucoup de postes nécessitant une formation universitaire pro-longée n’échappent pas dans l’entreprise à une gestion serrée de leurcontribution à la « création de valeur », selon les termes en vogue chez lesstratèges du capital. Là où il y a encore 25 ans ils auraient été considérés(toutes choses égales par ailleurs) comme des postes de surveillance et d’or-ganisation, ils sont clairement identifiés aujourd’hui par leur entreprise commedes postes opérationnels et productifs.

Indépendamment de la subordination et de l’exploitation – situation généraledu salariat à quelques exceptions près – cela accentue les différences de per-ception du rapport de chacun au travail, mais aussi de l’entreprise et toutbonnement du monde. Inutile de chercher, à ce propos, quels sont ceux etcelles qui dans cette évolution sont disposés à la meilleure « conscience declasse », car cela n’a rien à voir. Par contre, pas mal de structures syndicalesvont se lamenter longtemps encore pour n’être restées audibles que d’unefrange minoritaire du salariat de leur branche, ou pour n’avoir jamais su sim-plement s’adresser au second voire au troisième collège des élections profes-sionnelles. Sans parler d’autres impasses comme celles des femmes ou destravailleurs issus de l’immigration.

L’idée qu’il peut exister, au sein du salariat, un prolétariat plus révolté maissurtout plus conscient et plus à même d’adhérer à un anticapitalisme progressisteest une impasse. Non pas qu’il ne puisse pas y avoir parmi ces secteurs destravailleurs qui ont cette conscience, mais la focalisation propagandiste etquasi sémantique selon une certaine échelle de la paupérisation est un choixminorisant.

Sociologie de la désindustrialisation

La prolétarisation s’est étendue mais l’éventail des situations sociales etprofessionnelles, en son sein, s’est significativement élargi, et par conséquentles subjectivités afférentes.

Le débat médiatique parfois fumeux sur la « fracture » sociale, technologique,scolaire ou professionnelle renvoie à cette évolution économique et socialedes sociétés capitalistes. Cet étirement du spectre salarial ne repose pas quesur la différenciation des salaires, d’autant que la crise peut fort bien, demain,placer un nombre encore plus important de gens dans une situation de précarité.C’est l’ensemble de l’organisation du travail au sein des process de productionet des organisations opérationnelles qui a conduit à cette situation en l’espacede 25 ou 30 ans.

ACTUALITÉ

CT 1-PRESENTATION 28/06/12 23:18 Page22

Page 7: Réorganisation du capital et éclatement du salariat · complexe et très étendue de primes, segmentation des établissements, exter-nalisation juridique de certaines fonctions,

23

En période économiquement favorable à l’emploi et à la négociationsociale, cette évolution sociologique favoriserait les réponses réformistes et lesyndicalisme d’accompagnement. Ce qui n’enlèverait rien, faut-il le redire, àla tension objective du rapport salarial. Mais ces temps sont dépassés.Aujourd’hui le capitalisme ne pourrait même plus absorber les réformes socialespost-1981, et évidemment pas les nationalisations ! Très vite la « réforme »provoquerait et nécessiterait l’affrontement social.

Déjà, le tournant de 1983 du gouvernement Mauroy indiquait qui était levrai chef, le capital ! Dit autrement : dans le contexte actuel, il ne peut y avoird’adhésion populaire massive au PS et l’on doit noter au passage l’incapacitéde la CFDT à dépasser son seuil actuel de représentativité en dépit de ses pro-fessions de foi sur le syndicalisme de propositions. Une grande partie dusalariat (quelle que soit la réponse que les gens y apportent ensuite) ne croitpas à cette voie-là. Ils savent, confusément sans doute, que l’idée de simplecanalisation, domestication, encadrement du marché est une illusion.

Mais, symétriquement, la défaite politique est définitivement assurée àceux qui campent sur un pur propagandisme anticapitaliste mâtiné de quelquesrevendications sociales immédiates. Pensent-ils devoir s’adresser prioritairementà un « noyau dur » du prolétariat, au demeurant minoritaire ? Ou, croient-ilspouvoir emporter l’adhésion de millions de salariés, de jeunes, d’ancienssalariés, d’intellectuels, d’ingénieurs et de médecins, à coup de slogans quiavaient une fonction d’agitation il y a 40 ou 50 ans mais qui sont réduitsaujourd’hui à une mimique impuissante ? C’est hélas la marginalité socialede tout repli sur une propagande formellement « lutte de classe », sans rapportavec la formation sociale réelle et frisant du même coup le messianisme social.

L’approfondissement des différenciations au sein du salariat et de la sociététoute entière n’a pas conduit à la minorisation inexorable (et définitive ?) d’unprolétariat « réel », « authentique », noyé au milieu d’un salariat « petit-bourgeois », comme cela semble être la grille de lecture désespérée et déses-pérante des adresses de type « troisième période ». Il faut, au contraire, savoirregarder la réalité en face et saisir que la colère générale, qui aujourd’huianime cette société, exige une traduction politique non pas « réaliste » au sensdu renoncement mais crédible au sens de la complexité du réel, c’est-à-dire dela mondialisation financière. Cette colère, sourde, souvent peu prolétarienneselon les catégories anciennes, est un immense espoir.

Irrémédiable !

Tous ceux qui font croire aux ouvriers de certains secteurs qu’une « bonne »politique permettra de ramener de l’emploi industriel « comme avant » sontdes menteurs. Du Sarkozy des États généraux de l’Industrie en mars 2010 auPS de la présidentielle avec effets d’annonce sur les PME, en passant par« Achetons français » de Bayrou et le « vous allez voir ce que vous allez voir »de Montebourg, tous sont de fieffés bluffeurs. Car le vieux tissu industriel s’est

ACTUALITÉ

CT 1-PRESENTATION 28/06/12 23:18 Page23

Page 8: Réorganisation du capital et éclatement du salariat · complexe et très étendue de primes, segmentation des établissements, exter-nalisation juridique de certaines fonctions,

24

effiloché sous l’impact de plusieurs facteurs structurels débouchant sur unenouvelle division internationale du travail :

● le premier étant les gains de productivité et d’efficacité de l’industriemoderne,

● le second étant la réorganisation du maillage industriel des groupes ausein de périmètres élargis, européens, méditerranéens et mondiaux.

Les choses vont d’ailleurs en s’accélérant : dans un premier temps l’ouvertureeuropéenne a permis aux groupes industriels, du fait des impératifs de la com-pétition marchande, d’élargir leurs investissements vers l’Europe centrale. Puis,arrivés à une situation classique de sur-accumulation, ces groupes élaguentmaintenant leurs actifs, détruisent de la surcapacité productive, rationalisentleurs dispositifs. Ce faisant, ils poursuivent le mouvement de déconcentrationindustrielle, ils répartissent autrement leur actifs dans un espace désormaisplus vaste. Même l’Allemagne connaît ce processus.

Ce mouvement de ré-allocation des actifs industriels au sein d’un périmètremondial mais surtout européen/bassin méditerranéen est irrémédiable parcequ’il contient – dans la quête de compétitivité marchande – une part (tout demême) de rationalité, celle qui renvoie au besoin qu’a le capitalismed’économiser (à sa manière !) des moyens et de rationaliser la chaîne productive.En effet, quelle pourrait être demain la vertu d’une industrie faisant le chemininverse et produisant à peu près les mêmes véhicules dans chaque pays ? Oudes produits alimentaires largement standardisés ? Ou des produits issus dela chimie, des médicaments, du textile ? Aucune.

ACTUALITÉ

CT 1-PRESENTATION 28/06/12 23:18 Page24

Page 9: Réorganisation du capital et éclatement du salariat · complexe et très étendue de primes, segmentation des établissements, exter-nalisation juridique de certaines fonctions,

25

Par contre, il reste deux critères que le capitalisme n’a ni l’intention réelleni la possibilité d’intégrer à ses calculs : l’arbitrage sur la trace carbone desflux physiques au travers du continent et du monde ; et la mise en œuvred’une politique économique permettant un développement harmonieux et éga-litaire de l’ensemble des territoires européens. La rupture ce sera aussi cela.C’est dans ce cadre que des industries pourraient être maintenues là où ellesexistent encore et que d’autres pourraient s’implanter. À moins de croire àune sorte de « révolution nationale » protectionniste et semi autarcique (cf. leFN). Mais cette révolution nous ferait revenir en-deçà de la part efficiente ducapitalisme. Elle serait ultra-régressive en matière d’économies de moyens.

Une fraction du prolétariat est donc en train de mourir, abandonnée, épar-pillée. Certains secteurs de la métallurgie, de la chimie, de l’agro-alimentaire,les derniers vestiges du textile, et certains métiers en leur sein, vont disparaîtred’ici dix à quinze ans, au terme d’un long processus qui aura commencé il ya trente ans par la décentralisation productive, la fin des très grandes concen-trations productives, la segmentation des conglomérats. Cela n’a rien à voiravec le fantasme de la disparition de l’industrie. Celle-ci continuera d’existersous forme de réseaux productifs transeuropéens qui, dans le cadre d’unetransition de rupture avec l’économie de marché, devra intégrer un contrôleex ante de l’efficience écologique distances/flux physiques. Elle continueraaussi à exister sous forme de sites dont l’activité et les débouchés auront unsens au niveau local ou régional. Les formes de relocalisation (y compris sousla contrainte politique) ne s’émanciperont pas pour autant d’une logique de« chaîne productive mondiale », de rendement énergétique, de contrôle destaux d’utilisation des capacités productives.

La conscience de certains secteurs ouvriers est modelée par cette réalité.Leur cri n’est pas seulement celui du désespoir, il est aussi celui de la luciditéC’est avoir 50 ans dans une fonderie dans le Nord, qui a perdu 70 % de seseffectifs en 15 ans, qui travaille pour des entreprises qui baissent drastiquementleurs commandes, avec la certitude que tout ça va fermer dans les 2 ans, quel’on ne retrouvera aucun travail et que ses enfants ont peu de chance de vivremieux que leurs parents… Voilà la situation réelle que ces personnes, aban-données par le système, ont intériorisée. Leur bataille est perdue, ils le saventbien mieux que quiconque.

Ils trouvent alors un dérivatif dans leur colère et même leur haine del’Europe, des Chinois, et finalement de tous les autres …ceux qui, croient-ils,leur volent « leur » industrie et leur travail. C’est une impasse interprétativedont la plupart ne sortiront plus maintenant, emmenant avec eux (on espèreconjoncturellement) une partie des jeunes de leur ville qui survivent de petitsboulots. Le vote à la présidentielle de mai 2012 à Hénin-Beaumont ou sur lebassin sidérurgique de Florange l’atteste quelque peu !

La manière dont le système lie le poste de travail à la personne fait qu’inexo-rablement l’absence d’anticipation sur les filières et les bassins d’emploismène les individus à cette désespérance. Comme pris les deux pieds dans le

ACTUALITÉ

CT 1-PRESENTATION 28/06/12 23:18 Page25

Page 10: Réorganisation du capital et éclatement du salariat · complexe et très étendue de primes, segmentation des établissements, exter-nalisation juridique de certaines fonctions,

26

béton de leur entreprise, ils coulent avec elle. Le capitalisme les broie en mêmetemps qu’il mute lui-même.

Or, souvent on sait prévoir la dynamique d’une branche. Le tout est devouloir anticiper, de poser les problèmes, de distinguer l’avenir de ces emploiset l’avenir des gens qui les occupent, de mettre en place des politiques de trèsgrande ampleur en matière de reconversion, de maintien des salaires, etc.Toutes choses qui sont hors de portée et hors de question sous le capitalisme.

Contre le capitalisme, les notions de rupture et de transition systémiquedoivent intégrer cette nécessité d’anticipation sur le moyen terme, en donnantla priorité au développement humain. D’autant plus qu’un gouvernement « dela rupture » devra lui-même s’engager dans la destruction plus ou moins lentede dizaines de milliers d’emplois en raison de facteurs écologiques,d’irrationalité productive, de lutte contre l’inefficience bureaucratique, dedémantèlement d’une partie de l’industrie d’armement, etc. Il faudra doncbien séparer la suppression du poste de travail et le sort de la personne quil’occupe.

Le capitalisme, lui, se soucie comme d’une guigne de cette anticipation.Peu lui importe que des dizaines de milliers de salariés soient sous la menaced’évolution des métiers, des techniques, de modèles industriels ou commerciaux :« ils couleront avec leur emploi », voilà tout ! Mais on ne répond pas à celaen se contentant de dénoncer « la casse », en donnant pour seul horizon« les luttes » et l’interdiction magique des licenciements (voir L. Garrouste,M. Husson, C. Jacquin, H. Wilno, Supprimer les licenciements, Syllepse,2006).

Salaires et patrimoine

Le mécanisme d’exploitation, celui du détournement du travail au profitd’un accaparement privé, touche la moitié de la population de plus de 15ans. Il ne s’arrête pas aux seules catégories d’ouvriers et d’employés, loins’en faut. Mais la position professionnelle des personnes ne doit pas être leseul sujet de réflexion.

À l’hétérogénéité spectaculaire des savoirs, des technicités, desqualifications, des contenus cognitifs ou pas du travail, nonobstant les hiérarchiesformelles dans l’entreprise, s’ajoute une grande diversité des situations patri-moniales des individus, sans rapport avec les années 1960 et 1970.

L’étirement de la hiérarchie salariale (incluant l’intéressement salarié etplus modestement l’actionnariat salarié) a joué un rôle dans ce processus aucours des vingt dernières années. Mais l’affaire ne tient pas seulement à cela.Il y a eu aussi une sorte d’effet richesse, marginalement dû aux produitsfinanciers de placement, mais surtout lié à la valorisation de la propriétéimmobilière, y compris par effet d’héritage. Car les prix de l’immobilier ontprogressé de 120 % entre 2000 et 2010.

En 2009, 58 % des ménages étaient propriétaires (8 fois sur 10 de leurrésidence principale). Ce niveau, modeste par rapport à la moyenne

ACTUALITÉ

CT 1-PRESENTATION 28/06/12 23:18 Page26

Page 11: Réorganisation du capital et éclatement du salariat · complexe et très étendue de primes, segmentation des établissements, exter-nalisation juridique de certaines fonctions,

27

ACTUALITÉ

européenne, s’est stabilisé depuis dix ans ; il était de 54 % en 1987. Les 2/3des ménages concernés ont terminé le remboursement du crédit contracté.Aujourd’hui, si l’on s’en réfère aux statistiques avancées plus haut, près de40 % des salariés sont donc propriétaires d’un bien… valorisable par lemarché. Depuis 2003, dès le 4e décile de niveau de vie, plus de la moitié desménages sont propriétaires.

La valorisation des actifs immobiliers au cours du dernier quart de siècles’est ainsi ajoutée aux hiérarchies salariales sans forcément y correspondrecomplètement. L’effet richesse patrimoniale (relative) a légèrement diffracté lalecture purement salariale. D’autant qu’avec la croissance au cours des années1980 et 1990 du nombre de ménages disposant d’un actif immobilier, nousvoyons maintenant un effet de transmission par l’héritage. Il fut un temps oùêtre propriétaire c’était se faire gentiment taxer de capitaliste par son entourage.Plus aujourd’hui. À cela s’ajoutent parfois d’autres effets patrimoniaux commel’assurance-vie qui a pris une certaine place dans les modes d’épargne. Misbout à bout, il existe donc bien une partie du salariat dont l’épargne patrimonialeest désormais significative et dépend du marché pour sa valorisation.

CT 1-PRESENTATION 28/06/12 23:18 Page27

Page 12: Réorganisation du capital et éclatement du salariat · complexe et très étendue de primes, segmentation des établissements, exter-nalisation juridique de certaines fonctions,

La prise en compte du patrimoine est devenue nécessaire pour mesurer lesinégalités au sein même du salariat. Cet effet étend les inégalités et modifiequelque peu la simple hiérarchie salariale (Voir Économie et Statistiques,no 414, Alexandre Baclet et Émilie Raynaud, 2008). Cela ne condamne pas40 % des gens aux affres de la compromission petite-bourgeoise, mais creusequelque peu les distances de perception.

La détestation de la cupidité spéculative et des grandes sociétés arrogantesest très répandue et sans doute majoritaire dans le salariat en général. Toutautre chose est le rapport à la propriété, à l’épargne transformée en patrimoinepuis léguée, à l’hédonisme apparent des choix de consommation, à la singularitéde chacun et de chacune en toutes choses, à l’opposé d’une croyance en unbloc social objectivé par le seul rapport salarial.

Alors le marché dans tout cela ? Expropriation des patrons ? Socialisationdes moyens de production ? Voilà que même les plus « radicaux » se mettentà proférer des attentions particulières envers les artisans et les petites entreprises.Serait-ce parce que le marché résisterait longtemps aux coups de boutoir dela révolution ? Il est donc préférable de trouver quelques formules généralesqui indiquent une trajectoire plutôt qu’un schéma dogmatique que seul unmouvement social subversif pourra clarifier. Par exemple dire qu’il faut quel’ensemble des besoins sociaux fondamentaux (alimentation de base, santé,éducation, grands transports, grande communication…) échappent à la mar-chandisation ; que le marché doit cohabiter certes, mais qu’il soit placé ensituation de subordination.

Cela suffira pour être entendu et compris aujourd’hui, et cela éviterad’émettre des avis hasardeux qui auraient ce léger parfum d’économie stali-nienne, de « planification » omnipotente et d’immobilisme bureaucratique.Cela ne règle pas tout, notamment quant aux processus d’accumulationinhérents à la propriété privée, mais donne tout de même un point de référenceà la notion de rupture systémique. Cela indique un cap, une dynamique, toutà fait suffisants dans l’état actuel des mobilisations et de notre « science de latransition ».

Proposer une rupture démocratique radicale

La crise de tout le mouvement syndical (et de l’extrême-gauche) combineune crise de représentation de la diversité du salariat et une crise pro-grammatique à la hauteur de la mondialisation financière. Les deux chosesétant liées en partie. C’est la résultante des défaites du dernier quart de siècle(réorganisation productive du capitalisme et tyrannie des actionnaires) et duretard pris dans le simple diagnostic des changements d’organisation ducapital.

S’adresser au plus grande nombre et tenter de convaincre, c’est doncaussi élaborer l’épure d’institutions alternatives tant au niveau local des quartiersqu’au niveau national et européen. Il n’est pas possible de ne pas rattacher

28

ACTUALITÉ

CT 1-PRESENTATION 28/06/12 23:18 Page28

Page 13: Réorganisation du capital et éclatement du salariat · complexe et très étendue de primes, segmentation des établissements, exter-nalisation juridique de certaines fonctions,

un projet socio-économique à un projet démocratique radical… Projet qui sedoit néanmoins d’être intelligible et crédible après un siècle de parlementarismeet d’illusion sur celui-ci.

La fin de la fonction présidentielle et la république des conseils n’est sansdoute pas l’équation immédiate la plus convaincante dans l’agitation quoti-dienne ! Or, il faut aussi avancer des solutions de rupture dans le domaineinstitutionnel au même titre que dans le domaine économique. Autant direque dans les deux cas le niveau européen est aujourd’hui d’une grande impor-tance, si ce n’est le principal. Pas simple en effet ! Mais faire l’économie decette élaboration, ou penser qu’il y aurait nécessairement une dose deréformisme et de compromission lorsqu’on avance des revendications démo-cratiques, conduit là aussi à la marginalité politique.

Mai 2012

29

ACTUALITÉ

CT 1-PRESENTATION 28/06/12 23:18 Page29

Page 14: Réorganisation du capital et éclatement du salariat · complexe et très étendue de primes, segmentation des établissements, exter-nalisation juridique de certaines fonctions,

CT 1-PRESENTATION 28/06/12 23:18 Page30