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NOUVELLEs ROUMANIE SOMMAIRE A la Une Scandale de la viande chevaline Hackerville Actualité Vie Internationale Politique Actualité en images Moldavie Economie Société Evénements Faits divers Enseignement, Santé Religion Mode Insolite Sports Page photos Connaissance et découverte Salon du livre Littérature, Livres Cinéma Mémoire Humour Abonnement Coup de coeur Numéro 76 - mars - avril 2013 Lettre d’information bimestrielle Les de I l fallait s'y attendre. Le bouc émissaire du trafic européen de viande chevaline ne pouvait être que la Roumanie. Dès lors que son nom avait été avancé, sa mauvaise réputation en faisait un coupable idéal, permettant à toute la chaine d'escroquerie de l'agro-alimentaire de se dédouaner. Les xénophobes d'Outre-Manche n'en demandaient pas tant, ravis que cette histoi- re apporte de l'eau à leur moulin. "Une fois de plus, c'est de la faute des Roumains, c'est d'eux que viennent tous les maux du Royaume Uni" s'est exclamé un député conservateur britannique, rejoint par quelques voix sur le continent, soutenant que "ce pays n'aurait jamais dû être accepté dans l'UE". Et România libera, fataliste, de conclure : "L'ironie, et la tristesse, de cette histoi- re, c'est que même s'il s'avère que personne en Roumanie n'a commis de faute dans ce scandale, cela passera inaperçu. Alors que tout le monde s'est habitué à nous voir mentir et tricher, le fait que, pour une fois nous soyons accusés à tort, n'a aucune importance". Même innocente, la Roumanie paie ainsi l'image déplorable qu'elle s'est façonnée… et malheureusement souvent justifiée. Pourtant, il existe une autre Roumanie, qui nous réjouit. Celle que la France s'ap- prête à fêter fin mars au Palais des Expositions de Paris. Elle y sera l'invitée d'honneur du 23ème Salon du Livre, la plus grande manifestation mondiale dans le domaine, où le pavillon central lui est réservé. Une trentaine d'écrivains traduits en français, parmi les noms les plus prestigieux de la littérature roumaine d'aujourd'hui, y sont conviés. Ils seront accompagnés d'autant de confrères de renom, mais qui n'ont pas encore trou- vé d'éditeurs dans l'Hexagone, ainsi que par de nombreux artistes, intellectuels. En fait, c'est toute l'élite culturelle roumaine qui se donne rendez-vous dans la Ville Lumière pour des retrouvailles exceptionnelles avec la culture française. Une premiè- re que l'on est sans-doute pas près de revoir. Le Petit Paris rend visite à sa grande sœur latine, laquelle lui rend hommage. Comment oublier les Cioran, Ionesco, Eliade, Istrati, Enescu, Brancusi et bien d'aut- res, dont les noms ont contribué à la gloire littéraire ou artistique de la France des XIXème et XXème siècle… Mais aussi autant d'ombres tutélaires qui planeront sur ces nouveaux ambassadeurs de la Roumanie, leur faisant obligation de se montrer à la hauteur. Beaucoup ont déjà fait leurs preuves, acquérant une notoriété internationa- le. La jeune génération de cinéastes roumains est même devenue une référence mon- diale. Un défi particulier les attend cependant à Paris. Ce n'est pas seulement la Roumanie qui sera sous les projecteurs du Palais des Expositions mais, à travers ses hommes de lettres et de culture, ses artistes, la Francophonie ! Henri Gillet Rendez-vous avec la France 2 à 5 6 et 7 8 à 10 11 12 et 13 14 à 18 19 à 21 22 à 23 24 25 à 27 28 et 29 30 et 31 32 46 et 47 33 34 à 40 41 à 49 50 et 51 52 à 57 58 59 60

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Scandale de la viande chevaline Hackerville

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Salon du livreLittérature, LivresCinémaMémoireHumourAbonnementCoup de coeur

Numéro 76 - mars - avril 2013

Lettre d’information bimestrielle

Les

de

Il fallait s'y attendre. Le bouc émissaire du trafic européen de viande chevalinene pouvait être que la Roumanie. Dès lors que son nom avait été avancé, samauvaise réputation en faisait un coupable idéal, permettant à toute la chaine

d'escroquerie de l'agro-alimentaire de se dédouaner. Les xénophobes d'Outre-Manche n'en demandaient pas tant, ravis que cette histoi-

re apporte de l'eau à leur moulin. "Une fois de plus, c'est de la faute des Roumains,c'est d'eux que viennent tous les maux du Royaume Uni" s'est exclamé un députéconservateur britannique, rejoint par quelques voix sur le continent, soutenant que "cepays n'aurait jamais dû être accepté dans l'UE".

Et România libera, fataliste, de conclure : "L'ironie, et la tristesse, de cette histoi-re, c'est que même s'il s'avère que personne en Roumanie n'a commis de faute dans cescandale, cela passera inaperçu. Alors que tout le monde s'est habitué à nous voirmentir et tricher, le fait que, pour une fois nous soyons accusés à tort, n'a aucuneimportance". Même innocente, la Roumanie paie ainsi l'image déplorable qu'elle s'estfaçonnée… et malheureusement souvent justifiée.

Pourtant, il existe une autre Roumanie, qui nous réjouit. Celle que la France s'ap-prête à fêter fin mars au Palais des Expositions de Paris. Elle y sera l'invitée d'honneurdu 23ème Salon du Livre, la plus grande manifestation mondiale dans le domaine, oùle pavillon central lui est réservé. Une trentaine d'écrivains traduits en français, parmiles noms les plus prestigieux de la littérature roumaine d'aujourd'hui, y sont conviés.Ils seront accompagnés d'autant de confrères de renom, mais qui n'ont pas encore trou-vé d'éditeurs dans l'Hexagone, ainsi que par de nombreux artistes, intellectuels. Enfait, c'est toute l'élite culturelle roumaine qui se donne rendez-vous dans la VilleLumière pour des retrouvailles exceptionnelles avec la culture française. Une premiè-re que l'on est sans-doute pas près de revoir.

Le Petit Paris rend visite à sa grande sœur latine, laquelle lui rend hommage.Comment oublier les Cioran, Ionesco, Eliade, Istrati, Enescu, Brancusi et bien d'aut-res, dont les noms ont contribué à la gloire littéraire ou artistique de la France desXIXème et XXème siècle… Mais aussi autant d'ombres tutélaires qui planeront surces nouveaux ambassadeurs de la Roumanie, leur faisant obligation de se montrer à lahauteur. Beaucoup ont déjà fait leurs preuves, acquérant une notoriété internationa-le. La jeune génération de cinéastes roumains est même devenue une référence mon-diale. Un défi particulier les attend cependant à Paris. Ce n'est pas seulement laRoumanie qui sera sous les projecteurs du Palais des Expositions mais, à travers seshommes de lettres et de culture, ses artistes, la Francophonie !

Henri Gillet

Rendez-vous avec la France2 à 56 et 7

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Les NOUVELLES de ROUMANIE

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A la Une Les NOUVELLES de ROUMANIE A la Une

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Certes, la Roumanie - où précisons-le, on ne mange pas de cheval - est l'un desplus grands exportateurs de viande chevaline en Europe. Une viande qui reviendrait à2,2 € le kilo contre 3,7 € pour la viande de bœuf et que l'on mange dans certains res-taurants d'Europe de l'Ouest. Mais la plupart du temps, ce commerce est tout à fait légalet conforme à la législation européenne.

Rien ne disait que le fournisseur roumain incriminé soit coupable. Après tout,avant d'arriver dans les micro-ondes britanniques, ces lasagnes "au cheval" avaient étécuisinées - pardon - fabriquées et conditionnées à Chypre, aux Pays-Bas, auLuxembourg et en France.

La chaîne de fabrication et de distribution était suffisamment vaste et complexepour qu'une infraction, voire une simple erreur, ait pu être commise ailleurs. Bien sûr,rien ne disait non plus que le fournisseur roumain soit innocent. Cette fable que l'onpourrait intituler "Le cheval, le bœuf et le bouc (émissaire)" s'est écrite sous nos yeuxdans une Europe où le mot "roumain" est de plus en plus utilisé comme un synonymede "voleur", de "filou", "d'envahisseur"… et donc de coupable a priori!

Mehdi Chebana

et le bouc… émissaire

-Mais Seigneur, où est donc passé ton cheval ?Michel le Brave: Les Anglais l'ont mangé!

On savait peu de choses sur le fournisseur roumain accusé immédiatementpar la société française Spanghero d'avoir fourgué en douce de la viandede cheval en lieu et place de bœuf pour la fabrication de lasagnes surge-

lées. Aucune information sur son nom et l'emplacement des deux abattoirs dont pro-viendrait la viande chevaline. On ignorait également s'il avait falsifié des documentsavant d'exporter la marchandise où si d'autres intermédiaires des Pays-Bas à Chypreavaient pu eux-mêmes commettre une infraction de ce type.

Mais en attendant le résultat des enquêtes, la presse européenne avait déjà dési-gné, plus ou moins sciemment, son coupable: le méchant "fournisseur roumain". C'estainsi à Bucarest - pas à Chypre, ni aux Pays-Bas, ni au Luxembourg - que les équipesde télévision françaises et britanniques ont débarqué les unes après les autres sans tropsavoir par quel bout traiter l'affaire, ni où poser leurs caméras. D'autres médias,comme le tabloïd britannique The Sun, jouaient sur la peur des consommateurs ensoutenant que "les chevaux roumains sont souvent frappés par une maladie incurablequi correspondrait au sida chez les êtres humains". Une habitude de casser laRoumanie pour ce genre de journal dont les lecteurs d’Outre-Manche sont friands.

Coupable… bien sûr !

Il ne pouvait pas en être autre-ment. Dès que le nom de laRoumanie a été évoqué dans

l'affaire des hamburgers au cheval, leverdict est tombé: coupable ! Même sil'enquête l'a vite mise hors de cause. Ilest vrai qu'on ne prête… qu'aux pauvres! La Roumanie est une nouvelle foisvictime du “bashing”, où l'on s'acharnesur une personnalité ou un pays. Duverbe anglais "to bash: cogner, frapper,taper". Avant de changer de tête de turc,par lassitude. La Roumanie est habituéeà ces vagues de dénigrement qui s'abat-tent sur elle régulièrement.

Le cheval, le bœufAgro-alimentaire

Je ne connais rien à l'industrie agroalimentaire, rien àla Roumanie et pas grand chose au cheval. Je nerevendique donc pas le statut d'expert sur ces ques-

tions. J'ignore aussi si ce sont des Roumains ou d'autresvoyous qui ont délibérément choisi de faire passer de la vian-de de cheval pour du bœuf, peut-être qu'un jour une enquête par-viendra à le dire.

J'ai lu avec attention la tribu-ne de Jean-Marc Sylvestrepubliée sur son blog et reprise parÉconomie Matin le 12 février. Jepasserai sur le paragraphe pour lemoins méprisant sur le ministrede l'agro-alimentaire GuillaumeGarot. Je ferai de même sur laréalité du scandale qui ne tienteffectivement pas de l'alerte sani-taire mais d'une escroquerie enbande organisée, probablementde type mafieux. Pas plus quesur Findus qui pourrait hélas enpayer le prix, c'est une possibili-té parmi d'autres.

"Chaque roumain avait son cheval"

Ce qui m'attriste et qui m'oblige à réagir, c'est la troisiè-me partie, la troisième chose "qu'on a oublié de nous dire",pour reprendre le titre de la chronique. Pour M. Sylvestre, leschoses sont entendues avant même les résultats de l'enquête:cette viande de cheval vient de Roumanie et il nous démontrepourquoi. Pour résumer, les Roumains possédaient "des

millions de chevaux, presque autant que de roumains. Chaqueroumain avait son cheval". On a bien sûr tous en tête des ima-ges des campagnes roumaines, avec ces petits vieux, ou dumoins paraissent-ils l'être, édentés, le séant posé au bord d'unecharrette tirée par un cheval avec, en fond, une vieille moby-

lette et, au loin, une Dacia cons-truite sur base de Renault 12soulevant la poussière d'un che-min non bitumé.

Et puis le Roumain s'estlibéré du joug totalitaire. Etpuis il y a eu l'Europe. Grâceaux sous de l'homme occiden-tal, le Roumain a pu goudron-ner ses routes. Les charrettes,les mobylettes et les automobi-les soulevaient moins de pous-sière, mais le cheval dominaittoujours. Pensez donc, uncanasson par tête de pipe, ce quifait dans les 20 millions debourrins! On ne s'en débarrassepas comme ça.

Mais pourtant, un beau jour, la Roumanie a dit stop. "Onarrête le crottin qui embaume nos campagnes! Plus de che-vaux sur nos routes, nous sommes la risée des journalisteséconomiques de l'Europe de l'Ouest. Bref, du balais les char-rettes, place au Renault Logan pour tous. Et vos chevaux, ehbien faites en ce que vous voulez. Envoyez les à l'abattoir,mangez-les, vendez-les pour du bœuf". C'est un raccourci, biensûr, mais c'est comme cela que Jean-Marc Sylvestre nousraconte les choses car évidemment, c'est comme cela qu'ellesse sont passées. Sauf qu'il y a comme un petit problème…

Je ne connais rien au cheval, disais-je, ni même grandchose à la Roumanie. Mais comme J.M. Sylvestre, je suisjournaliste et par chance j'ai un cerveau que j'essaye fairefonctionner pour me figurer un peu les choses dans l'espace etle temps. Alors je me suis renseigné.

La Roumanie est un petit territoire, à peine la moitié de laFrance, de 240 000 km2 environ. Elle compte 23,5 millionsd'habitants, soit une densité moyenne de 91 habitants au km2.La France, avec 550 000 km2, possède une densité d'environ118 habitants au km2.

Ce n'est donc pas très différent. La France a en communavec la Roumanie, outre ses racines latines et sans doute biend'autres choses, une surface rurale très importante et une éco-nomie très liée à l'agriculture.

"En comparaison, en France il y aurait deux fois de chevaux que d'automobiles"

Selon Jean-Marc Sylvestre, il y aurait eu en Roumanie àpeu près un cheval par habitant. À ce stade, il faut se figurerce qu'est un cheval. En tout cas, c'est ce que j'ai fait. Un ani-mal d'environ 500 kilos qu'il faut nourrir quotidiennementavec 12 litres de céréales et une bonne dizaine de kilos defourrage. Sans oublier 20 à 60 litres d'eau. C'est comme ça uncheval. On peut lui donner moins, mais si on veut lui faire tirerdes charrettes, pas question de trop le rationner.

Et puis c'est un animal fragile, qui nécessite de nombreu-ses attentions et qui, par dessus le marché, a besoin de placepour évoluer. Bref, un animal encombrant et qui coûte cher.D'ailleurs, imaginons un instant qu'en France, on possède uncheval par habitant.

On ne pourrait simplement pas lever l'œil dans la campa-gne sans tomber sur un troupeau de chevaux. Il y aurait bienplus de chevaux que d'automobiles (deux fois plus à vrai dire,nous comptons 38 millions de véhicules sur notre territoire),ce qui peut vous donner une idée de la quantité et de l'encom-brement que cela peut représenter.

"Les Roumains auraient les moyens d'entretenirun cheval par habitant, et l'on n’en saurait rien ?

En Roumanie en revanche, on compte un peu moins de200 automobiles pour 1000 habitants. En 1990, 2,2 millions devoitures roulaient en Roumanie. En 2007, ce chiffre avait dou-blé: 4,5 millions d'automobiles évoluaient sur les routes frai-chement bitumées par les subventions directement puiséesdans nos poches, et celles de M. Sylvestre, bien entendu.

Ainsi, en Roumanie, il y aurait eu des chevaux partout, àne plus savoir quoi en faire? La réalité est bien différente. Etfranchement, les Roumains auraient les moyens d'entretenirun cheval par habitant, en l'on en n'aurait rien su ? Commentest-ce possible? L'information n'est pas facile à trouver, j'enconviens, et j'ai du me bagarrer avec Google pendant disons…trente minutes.

Trente minutes à trouver les bons mots clés pour extirperune statistique sur le nombre de chevaux en Roumanie. Ellen'est certes pas très récente, mais cela renforce d'autant ladémonstration: en 1995, à peine sortie de l'ère Ceausescu,selon un document intitulé "Rumäniens Pferde" et publié surle site de l'ESSA (Europen State Studs), la Roumanie comp-tait… 750 000 chevaux. Pas 7 millions, pas 23 millions, pas unpar habitant… 750 000. Soit à peine 32 chevaux pour 1000habitants. Certes, les statistiques admettent parfois une marged'erreur, mais vous conviendrez que de 32 pour 1000 à 1 pour1, il y a une légère différence.

Pour la petite histoire, nos haras nationaux nous appren-nent que, avec 900 000 équidés, la France est, en Europe, latroisième nation pour le nombre d'équidés. Pas derrière laRoumanie, mais derrière la Grande-Bretagne (950 000) etl'Allemagne (1 million). Et le territoire sur lequel on trouve leplus de chevaux par habitants en Europe serait l'Irlande.

Toujours pour la petite histoire, le cheval n'est guère plusconsommé en France qu'en Roumanie. Cela n'a rien à voiravec l'économie : c'est culturel.

Alexandre Lenoir (Economie Matin)

Il n’a pas fallu longtemps aux médias pour trouver un coupable auscandale de la viande bovine: la Roumanie était toute désignée !

Arrêtons les clichés sur la Roumanie ! Journaliste à Economie-Matin, Alexandre Lenoir met les pieds… dans le plat de lasagnes au cheval. Avec bon sens et

humour, il rappelle quelques évidences, dont la moindre n'est pas de voir la Roumanie toujours pointée du doigt lorsqueson nom apparaît dans une affaire médiatisée "même si c'est vraiment à l'insu de son plein gré"…

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Les NOUVELLES de ROUMANIE A la Une

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TULCEA

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CHISINAU

CLUJ

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La Roumanie, d'où vient la viande de cheval retrouvée dans les rayons desgrandes surfaces européennes dans des produits étiquetés 100 % bœuf, a été aucœur du scandale récent des "lasagnes" découverts en Grande Bretagne. "Cetteaffaire montre que le pays doit cesser de contourner les règles s'il veut obtenir laconfiance de l'UE", estime Dan Cristian Turturica dans les colonnes du le quotidienRomania Libera.

Le dernier scandale en date qui a éclaté entre la Roumanie et l'UnionEuropéenne - la viande de cheval que nos abattoirs auraient exportée pour dela viande de bœuf et qui aurait fini sur les tables britanniques dans des lasa-

gnes - devrait nous rappeler la raison principale de tous nos problèmes d'adaptationdepuis notre entrée dans le club de l'UE, en 2007. Problèmes mis en exergue, par exem-ple, par les contrariétés autour du budget communautaire alloué pour 2014-2020 ou parles conclusions cuisantes du dernier rapport du mécanisme de contrôle et vérification(MCV) sur la justice (pressions sur les institutions, manque de respect de l'indépendan-ce du système judiciaire, actes d'intimidation et même "campagnes médiatiques de har-cèlement" vis-à-vis des juges).

Une incapacité à respecter les règles

La cause primordiale est notre incapacité à respecter un ensemble minimal de règles,sans lequel nulle communauté ne peut fonctionner. Une incapacité qui découle en gran-

de partie d'unmanque d'expé-rience, parce queles institutionsroumaines ontété isolées pen-dant tant dedécennies (derri-ère le Rideau defer), mais surtoutd'un manqued'appétit pour ladiscipline etl'honnêteté de lapart de bon nom-bre de ceux qui

les dirigent. Notre élite politique et administrative, dans sa grande majorité, considère lerespect des règles comme un fardeau. Leur contournement représente un objectif qu'ilssont plus à même de comprendre, car il fait appel aux mêmes "qualités" qui les ont por-tés au pouvoir: obtenir des avantages en ignorant ou en violant des restrictions.

Malheureusement, l'ADN "hors-la-loi" de notre élite est particulièrement incompa-tible avec l'ADN de la discipline, de l'efficacité et de la rigueur de l'Union Européenne.Laquelle, avant de se donner ce nom, soit jusqu'en 1993, portait un titre qui reflétait bienmieux son essence : Communauté économique européenne (CEE). Le projet écono-mique unificateur ne pouvait exister sans un système uniforme de lois applicables danstous les pays membres. Ce système est le fondement du "marché commun" dont faitmaintenant également partie la Roumanie. Sans lui, une chaîne commerciale efficacen'aurait pas pu exister, permettant à un abattoir de Roumanie d'exporter de la viande versun grossiste chypriote, qui la vendrait à une société au Luxembourg, laquelle la céderaitensuite à une entreprise suédoise, qui elle-même la mettrait sur le marché britannique parle biais de sa filiale en France. De tels circuits de production et de commercialisationexistent partout dans le monde.

Des déchets pour blanchir de l'ar-gent sale. Au sens propre, la métho-de peut sembler paradoxale. C'estcelle qu'utiliserait le fils de Don Vito,l'un des mafieux siciliens les plusinfluents décédé il y a dix ans. Unedécharge de la périphérie deBucarest la plus vaste d'Europe ser-virait de société-écran à MassimoCiancimino. Un business apparem-ment très lucratif.

L'homme est au cœur d'uneenquête menée par la justice italien-ne: elle le soupçonne d'être le vérita-ble propriétaire de la société Ecorecqui gère la décharge.

Une activité légale qui lui permet-trait de recycler une partie du magotaccumulé par l'ancien maire dePalerme. Mais évidemment, il n'y aaucune connexion directe pour leprouver. Le gérant d'Ecorec, VictorDombrovschi, aurait un lien avecdes Italiens, les frères Pileri à la têted'une autre entreprise en Roumanie.Mais il ne s'agirait que de quelqueséléments d'une organisation plusvaste d'après le parquet de Palerme.

Depuis quelques années,Massimo Ciancimino donne des élé-ments sur le passé sulfureux de sonpère, mais nie toute allégation à sapropre encontre.

Quant aux enquêteurs italiens, ilsemble avoir bien des difficultés àcollaborer avec leurs homologuesroumains même si ces derniers affi-chent leur bonne volonté. En 2007,au détour de la vente présuméefrauduleuse de la société Ecorec,ces fonds qui seraient issus d'activi-tés souterraines ont une nouvellefois, échappé à la justice.

Argent sale blanchi…par les ordures

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Mais il n'y a que dans l'Union Européenne où la marchan-dise peut franchir les frontières avec un seul paraphe - énormeavantage d'un point de vue bureaucratique et qui entraîne deséconomies substantielles de temps et d'argent. Avantage qui,cependant, ne vaut que tant que tous les pays membres s'ac-quittent de leurs missions de manière responsable.

Une "chaîne de confiance" rompue

Lorsque la chaîne de confiance qui relie toutes les institu-tions et les pays européens est rompue, ne serait-ce que par lafaute d'un seul, c'est le fondement même du projet européenqui est atteint. C'est ce simple fait qui n'est pas compris parceux qui sont persuadés que l'Europe nous critique excessive-ment et nous traite comme des citoyens de seconde classe.

S'il s'avère que quelque chefaillon de quelque institutionroumaine a touché un pot-de-vin et mis un tampon de confor-mité là où il ne fallait pas, le scandale au niveau européen seraéléphantesque. Et apportera de l'eau au moulin non seulementdes xénophobes britanniques, mais aussi de tous ceux qui,

aujourd'hui encore, soutiennent que la Roumanie n'aurait pasdû être acceptée dans l'UE. Mais, même si le vacarme desaccusations contre la Roumanie est assourdissant, le problèmede fond est incomparablement plus insignifiant que celui rele-vé par le rapport sur la justice. Car avoir une institution quifonctionne de travers et fait manger aux Britanniques des lasa-gnes au cheval au lieu de lasagnes au bœuf est une chose ;avoir un système judiciaire dont le fonctionnement n'inspireaucune confiance en est une tout autre.

Le prix à payer est lourd

Si jamais la culpabilité des autorités sanitaires et vétérinai-res est confirmée, ce sont les entreprises exportatrices de pro-duits alimentaires qui seront atteintes. Personne ne pourra plusjurer à coup sûr que, dans les conteneurs "made in Romania",il n'y a pas du chat ou du lézard. Mais ce qui advient à causede la méfiance envers le système judiciaire nous coûte quoti-diennement incomparablement plus cher.

Dan Cristian Turturica (Romania Libera)

incompatible avec celui de l'UE""L'ADN "hors-la-loi" de notre élite estAgro-alimentaire

Pourquoi nous ne sommes pas dignes de confiance…

L'ADN était formel: "la tête momifiée, redécouverte en 2008, a le même patrimoine génétique que le sang séché de LouisXVI, recueilli sur un mouchoir le jour de sa décapitation en 1793", affirmait le communiqué de presse signé du DrPhilippe Charlier. Comment était-il parvenu à une telle conclusion? Deux échantillons ont été comparés: un morceau

de trachée prélevé sur la tête supposée d'Henri IV et des résidus de sang attribué à Louis XVI et contenu dans une fiole apparte-nant à une famille de l'aristocratie italienne. Une analyse du chromosome Y (transmis par le père) avait abouti à des résultats "com-patibles avec une relation paternelle directe sur sept générations", écrivait le méde-cin dans son livre. Un commentaire, déjà plus prudent que le communiqué, mais quirestait très contesté. Expert auprès de la Cour de cassation, président de l'Institut fran-çais des empreintes génétiques, le Dr Olivier Pascal jugeait que ces résultats scienti-fiques, pourtant publiés dans la revue Forensic Science International en décembre, "nesont pas probants". Le spécialiste relèvait ainsi qu'"on ne peut démontrer quoi que cesoit puisqu'on part du postulat que la tête est bien celle d'Henri IV et le sang celui deLouis XVI. De plus, les deux empreintes génétiques sont trop différentes. Je n'irai pasdevant une cour d'assises avec un dossier pareil!", concluait l'expert.

Et patatras! Une comparaison a été effectuée entre l'ADN mytochondrial (transmis par la mère) présenté comme étant celui duBon Roi et celui d'Anne de Roumanie, descendante des Bourbons, et femme du roi Michel. Auparavant, un arbre généalogiquedétaillé avait été dressé par un spécialiste qui a établi qu'Anne de Roumanie, 89 ans, descend en lignée féminine ininterrompue dela mère d'Henri IV. Or, les deux séquences génétiques ne correspondent absolument pas. "Les porteurs de ces ADN ne peuvent êtreapparentés", a dévoilé au Figaro le Pr Jean-Jacques Cassiman, spécialiste de la génétique à l'Université de Louvain en Belgiqueet qui a travaillé avec son confrère le Dr Olivier Pascal. Ainsi, selon cette contre-expertise et grâce à une princesse française et unpeu danoise, devenue reine de Roumanie, sauf substitution d'enfant dans la lignée royale, il a été établi que la tête retrouvée n'estpas celle du Vert galant.

L'ADN de la reine Anne de Roumanie se paie la tête de Henri IV

Shocking! De la viande de cheval dans mes lasagnes… et roumaine enplus! Pouah, je n'aurais jamais dû abandonner ma panse de brebis farcie!

Le service d'urgences médicalesroumain a été sollicité enmoyenne toutes les 2 minutes

en 2012, au lieu de 3 minutes en 2011,selon le secrétaire d'Etat au ministère de

la Santé et fondateur du SMURD, RaedArafat, soit 30% d'augmentation. Leséquipages de ce service d'urgence ont euà intervenir en moyenne 630 fois par joursur des cas plus ou moins graves, accor-

dant les premiers soins à non moins de216 00 adultes et 22 290 enfants. Enrevanche, les interventions du SMURDpour des accidents de la circulation ontdiminué de 5% par rapport à 2011.

Enigme

Le SMURD sollicité toutes les deux minutes

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SIBIU

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BRAILA

SUCEAVA

M. CIUC

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PLOIESTI

IASI

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Environ 10 000 informaticiens sor-tent tous les ans des universités rou-maines, et une bonne partie d'entreeux travaille actuellement dans lesmultinationales qui se sont installéesen Roumanie. "La masse des infor-

maticiens est très importante et le

risque de la criminalité cybernétique

est à la mesure, affirme Florin

Talpes, informaticien et fondateur de

la société Bitdefender. Les jeunes

sont les plus exposés".

"Quand j'ai démarré mon affaire

dans les années 1990, la cybercrimi-

nalité était un sport individuel, dit-il.Aujourd'hui, ces gens agissent en

groupe et sont organisés comme une

société commerciale. L'avance tech-

nologique qu'on a connue ces der-

nières années profite aussi à ceux

qui sont de l'autre côté du miroir, ce

monde obscur où le vol sur Internet

est devenu un vrai business".

Râmnicu Vâlcea est une plaquetournante de la criminalité informa-tique dont les ramifications s'éten-dent sur plusieurs continents. Lephénomène a commencé en 1996,et le succès d'une poignée de jeunesa fait boule de neige à l'échelle de laville. Ce n'est qu'en 2003, sous lapression des Etats-Unis, que laRoumanie a voté une loi permettantde combattre ce nouveau type de cri-minalité.

Un hackeur d'Ostroveni ne cachepas ses doutes. "Les cerveaux ont

quitté Hackeurville. Ils s'installent

ailleurs et se fondent dans le paysa-

ge aux USA, en Angleterre, en

France ou en Suisse. Ce sont des

fantômes super-friqués et très disc-

rets. Je ne pense pas qu'on les

aura".

Râmnicu Vâlcea, ville tranquille du centre de la Roumanie, est aussi la capi-tale mondiale du vol sur Internet. Les Américains sont la principale cible de ceshackeurs, au point que le FBI a décidé de faire le ménage à "Hackeurville". Lereportage sur place de Mirel Bran.

Pour le touriste pressé, Râmnicu Vâlcea est une ville tranquille et verdoyante.Située au pied des Carpates, elle ne laisse guère deviner le secret bien cachéde son quartier ouvrier, Ostroveni. Il faut quitter le grand boulevard qui tra-

verse la ville et s'engager dans les petites rues bordées d'HLM délabrées héritées de l'é-poque communiste pour comprendre que quelque chose ne tourne pas rond dans cettecité d'une centaine de milliers d'habitants.

Au pied de ces immeubles construits à la va-vite au temps de la dictature commu-niste se trouvent des voitures de luxe. Au volant, des jeunes de 20 à 30 ans, fiers d'af-ficher une richesse qui contraste avec l'environnement. Bienvenue dans le repaire deshackeurs! Ces jeunes ont trouvé sur la Toile des opportunités que la réalité roumaine nepeut leur offrir. Ramnicu Valcea, avec son quartier Ostroveni, est une ville bien connuede la presse américaine qui l'a surnommée "Hackeurville".

Comprendre: la capitale mondiale du vol sur Internet. Français, Britanniques,Allemands, Italiens, mais surtout des Américains, qui font leurs courses sur Internet,sont tombés dans le panneau des réseaux roumains du hacking. Selon la police roumai-ne, environ 80 % de leurs victimes se trouvent aux Etats-Unis. "L'année dernière, leshackeurs roumains ont volé un milliard de dollars aux Etats-Unis", affirme MarkGitenstein, l'ambassadeur américain à Bucarest.

"Il suffit d'embobiner quatre ou cinq types par semaine"

A Ostroveni, tout le monde est au courant, mais la loi du silence règne dans le quar-tier. L'un de ces hackeurs a toutefois accepté d'évoquer son "commerce", sous couvertd'anonymat. "Avec les Américains, c'est plus facile, explique-t-il. Ces types, même

quand ils veulentacheter du pain, ilsvont cliquer surInternet, ils ont l'ha-bitude de tout fairesur le Web." Il luiarrive, assure-t-il,d'"embobiner quatreou cinq types parsemaine, en leur sou-tirant des sommesallant de quelquescentaines à quelquesdizaines de milliersde dollars".

"Le monde estgrand et il est plein d'idiots prêts à acheter tout et n'importe quoi sur Internet, pour-suit-il. On vend des produits fictifs, on clone des sites et on pirate des cartes bancai-res. En Europe, pour récupérer l'argent, on envoie les "flèches", des types qui n'ont riend'autre à faire que de retirer l'argent envoyé sur un compte. Ils gardent dans les 30 %du magot, et le reste ils nous l'envoient via Western Union". Vu le nombre d'enseignesWestern Union qui ont poussé comme des champignons dans le centre-ville deRâmnicu Vâlcea, il semble que les affaires marchent bien. Mais sortir l'argent desEtats-Unis est plus complexe. "Nous avons trouvé une solution légale, indique notreinterlocuteur. J'achète une voiture de 120 000 dollars en cash. Rien de plus légal.

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CHISINAU

Je la fais venir en Roumanie où je la vends 80 000 dollars.C'est toujours légal. D'accord, j'ai perdu 40 000 dollars maisj'en ai blanchi 80 000. Le mec qui l'achète est content, car iléconomise 40 000 dollars. Maintenant, les gars viennentdirectement nous commander les modèles qu'ils veulent".

Les hackeurs roumains ont compris l'intérêt de travailleren réseau. C'est ce qui fait leur différence et leur force. Les"flèches" sont les plus exposées, raison pour laquelle leurspapiers d'identité sont souvent des faux. Ils sont initiés auxméandres d'Internet.

"On prenait des garçons à partir de 14 ans pour nous aider"

"On enchaînait les nuits blanches, scotchés devant lesordinateurs, se rappelle le hackeur d'Ostroveni. On prenaitdes garçons à partir de 14 ans pour nous aider. On emmenaitaussi des enfants de l'orphelinat eton leur apprenait les trucs pourqu'ils travaillent pour nous".

Le FBI, dont plusieurs spécia-listes de la criminalité informatiqueont pris leurs quartiers à Bucarest, aformé plus de 600 policiers rou-mains pour endiguer le fléau. Unebrigade d'enquête spécialisée dansle vol sur Internet dispose de 200policiers présents dans les 41 dépar-tements du pays.

"La criminalité informatiqueest transfrontalière, déclare VirgilSpiridon, le chef de cette brigadespéciale. Nous avons fait beaucoup de progrès ces dernièresannées. La Roumanie coordonne d’ailleurs actuellement unprogramme de lutte contre la criminalité cybernétique à l'é-chelle de l'Union Européenne avec Europol et la Commissioneuropéenne".

"Les p'tits cons ne savent pas effacer leurs traces"

La traque et les arrestations de hackeurs se sont accélé-rées. En 2011, la brigade roumaine a enregistré un millier d'en-quêtes, procédé à 500 arrestations et remis 150 dossiers auxjuges.

Côté FBI règne la plus grande discrétion. Retirés dans unimmeuble classé secret situé sur un des grands boulevards deBucarest, les officiers du Bureau fédéral d'investigation améri-cain sillonnent le monde virtuel pour trouver la trace des hac-keurs roumains. Ils s'inspirent des méthodes des hackeurs,créent des sites de vente où ils passent de petites annoncesappétissantes.

Victor Faur, nom de code SirVic, connaît bien le système.Il a été à la tête d'un des réseaux les plus performants de

Roumanie. "Mais j'ai toujours été un hackeur blanc , je neveux pas être confondu avec les petits cons qui volent surInternet, précise-t-il. Ça, tout le monde peut le faire. C'estpour cette raison que le FBI leur met la main dessus, ils nesavent pas effacer leurs traces".

Malgré ses prouesses, SirVic a été arrêté et condamné àsix mois de prison avec sursis, et 240 000 dollars d'amende. Ils'était amusé à attaquer les serveurs de l'agence spatiale amé-ricaine, la NASA, pour montrer aux Américains qu'il y avaitdes brèches dans leur système de sécurité. "Je les ai prévenuspour qu'ils règlent le problème, mais j'ai fait la connerie de mevanter de mon exploit sur un site dont ils avaient l'accès".

Tout est à vendre, cartes avec code, cartes vierges

Face à la répression policière, les hackeurs se sont faitstrès discrets mais ils croient tou-jours à leur bonne étoile. Le hac-king est-il difficile à apprendre?Pour Ice Man, le "prince noir" deshackeurs roumains, voler sur laToile est très simple. De son vrainom Robert Butyka, âgé de 26 ans,il précise d'un ton irrité qu'il ne fautpas confondre hackeur et voleur.Que lui ne s'intéresse qu'aux vraisdéfis d'Internet.

"Oui, voler sur Internet est uneaffaire simple", insiste-t-il néan-moins. "Il y a une centaine de bonsguides d'utilisation sur Internet

pour apprendre à devenir hackeur", explique-t-il.Démonstration en quelques clics: "Voilà, j'ai trouvé des typesqui proposent à la vente des cartes bancaires avec les codesassociés pour l'Italie, la France, les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et l'Espagne". Sur l'écran de l'ordinateur défilent despetites annonces. Tout est à vendre, cartes avec code, cartesvierges, listes d'e-mails extraits de messageries de grandesentreprises et toute une panoplie de programmes pour accéderà des serveurs.

"Il faut faire attention quand même, prévient-il. Une par-tie de ces annonces est rédigée par les agents du FBI ou de laCIA pour appâter. Si tu ne sais pas les éviter tu peux te faireavoir". C'est ce qui est arrivé au jeune Iulian Dolan qui, avectrois amis, avait mis la main sur les données de 80 000 cartesbancaires américaines et dérobé plusieurs millions de dollars.

Une femme agent de la CIA jouant le rôle de la fille quicherche une relation sur Internet a réussi à attirer le cybercri-minel roumain. Elle lui a proposé de lui payer un billet d'avionpour un séjour dans un casino à Hawaï. Armé d'une grosseboîte de préservatifs, Iulian Dolan a été menotté dès son atter-rissage à l'aéroport Logan de Boston.

Mirel Bran (Le Monde)

des hackeurs de 20 à 30 ans, fiers d'afficher leur richesse à Râmnicu Vâlcea

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ARAD

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Au volant de leurs voitures de luxe Internet

Une cybercriminalitéqui s'exporte

Ostroveni…

Les téléphones portables sont aussi la cible des hackeurs,comme les cartes bancaires et leurs codes, les listes d’e-mails extraites des messageries des entreprises.

quartier des pirates des Carpates

La Roumanie coordonne actuellement un programme de lutte contre la criminalité cybernétique à l'échelle de l'UE

avec Europol et la Commission européenne.

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Actualité

En Roumanie, la grande corruption est la tare lamieux partagée. Longtemps mise à l'index pour sonincapacité à lutter contre le trafic d'influence, les

conflits d'intérêts ou les détournements de fonds publics, laRoumanie dispose cependant aujourd'hui d'un arsenal d'insti-tutions qui ont fait leurs preuves. Parmi celles-ci, la Directionnationale anticorruption (DNA), devenue le cauchemar des"élites" roumaines.

La DNA affiche un tableau de chasse impressionnant:4700 procès en six ans, concernant une quinzaine de ministres,une vingtaine de parlementaires, un demi-millier d'officiers depolice et même un ancien premier ministre, Adrian Nastase.Mentor de Victor Ponta, il a été condamné l'été dernier à deuxans de prison ferme, mais a bénéficié d'une libération antici-pée. Pour parvenir à de tels résultats, il aura fallu les pressionsrépétées de l'Union Européenne et un peu de volonté politique.

Reprise des hostilités dès la fin des élections

À la faveur de la crise économique et de la chute de popu-larité du président roumain, les mauvaises habitudes ont néan-moins repris le dessus. En juillet dernier, la coalition menéepar Victor Ponta avait vaine-ment tenté de renverser lechef de l'État, garant d'unejustice indépendante quimenaçait ses intérêts.

Les mises en garde deBruxelles et des États-Unisavaient permis de calmer lejeu. Jusqu'à ce que VictorPonta soit reconduit dans sesfonctions après la victoire desa formation aux législativesdu 9 décembre.

Le Parlement a aussitôtrouvert les hostilités en blo-quant les demandes de levée d'immunité de trois députés. Legouvernement de Victor Ponta est venu lui prêter main forte enproposant, fin janvier, d'amender le statut des élus de manièreà renforcer leur immunité. Bien que jugé "inopportun" par lasociété civile et certains élus, y compris de la majorité, le pro-jet a été aussitôt adopté. Désormais, le parquet pourra révoquerpar vote l'interpellation d'un élu pris en flagrant délit, s'il esti-me qu'une telle mesure "n'est pas justifiée".

Vingt-trois parlementaires sont actuellement poursuivispar la justice. Les ministres accusés de corruption dontBruxelles souhaitait la démission sont toujours en poste et c'est

l'ANI ('Agence nationale pour l'intégrité), chargée justementd'enquêter sur le sujet, qui est régulièrement et publiquementremise en question par la coalition gouvernementale, laquellereçoit le renfort de groupes de presse proches contrôlés par desoligarques, mettant en péril la liberté d'information.

Le bras de fer se joue à présent autour des postes clés deprocureur général et de chef de la DNA. Les candidats propo-sés par la ministre de la Justice, Mona Pivniceru, ont été jugésincompétents par le Conseil supérieur de la magistrature.Arguant d'un "manque de transparence dans le processus desélection organisé par le ministère de la Justice", le présidentBasescu a refusé de les nommer, déclenchant ainsi un nouveaubras de fer avec son ennemi juré.

L'entrée dans Schengen repoussée aux calendes grecques

La Roumanie, membre de l'UE et de l'OTAN, suscite donctoujours la méfiance des deux côtés de l'Atlantique, et lesconclusions du rapport de la Commission ne vont pas rassurerses partenaires. De nouvelles recommandations sont formuléeset une autre évaluation est prévue avant la fin de l'année. Mark

Gray, porte-parole du prési-dent Barroso, a déclaré queBucarest serait "sous sur-veillance" jusqu'à ce qu'elleremplisse ses obligations s'a-gissant des règles et desvaleurs européennes. Lestraités ne prévoient pas dedate butoir, même si laRoumanie et la Bulgarie sontsous la loupe depuis leuradhésion, en 2007.

Ce rapport critiquedevrait aussi avoir uneconséquence immédiate pour

les autorités roumaines. Bien que soutenues par laCommission européenne, elles ne pourront pas faire entrer àbrève échéance leur pays dans l'espace sans passeportSchengen.

Les Pays-Bas - derrière lesquels s'abritent prudemmentd'autres pays plus discrets - refusent cette adhésion tant quedeux rapports consécutifs du MCV n'auront pas pris acte deprogrès notoires dans le fonctionnement des institutions dupays. La Commission estime, pour sa part, que la Roumanieest "techniquement prête" pour un contrôle adéquat de sesfrontières qui deviendraient celles de l'UE à l'est.

Les NOUVELLES de ROUMANIE

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BUCAREST

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TIMISOARA

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TULCEA

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SUCEAVA

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CHISINAUSATU MARE

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Les Britanniques aux Roumains et Bulgares:

Alors que les entraves à la libre installation des ressortissants roumains et bul-gares au sein de l'UE devraient être levées en 2014, suite à la levée des restrictionsde visa avec l'Autriche, la Belgique, l'Allemagne, l'Irlande, le Luxembourg, Malte,les Pays-Bas, la France et le Royaume-Uni, certains ministres britanniques envisa-gent de lancer une campagne de spots télévisés dans ces deux pays pour éviter unevague d'immigration et dissuader leurs ressortissants à venir s'installer chez eux.

S'il vous plaît, ne venez pas, il pleut tout le temps et le peu d'emplois disponibleest mal payé!". La teneur des slogans publicitaires destinés à décourager lescandidats à l'immigration roumains ou bulgares à venir en Grande-Bretagne ne

laisse pas de place au doute: ils ne sont pas les bienvenus, malgré l'assouplissement desmesures d'immigration prévue l'année prochaine. Selon le Guardian, plusieurs ministèresont donc envisagé, parmi d'autres possibilités, une surprenante campagne de communica-tion négative. "Nous voulons corriger l'impression que les rues sont pavées d'or", a mêmedéclaré un ministre sous couvert d'anonymat. Et le quotidien britannique de noter l'ironiede voir le gouvernement britannique détruire volontairement sa propre image alors que,dans le même temps, des pays dépensent des millions d'euros auprès de consultantsanglais pour améliorer la leur. Le ministère de l'Intérieur britannique a même lancé voiciquelques mois un guide de "britannicité" pour les étrangers qui souhaiteraient devenircitoyens de la Couronne et qui commence par ces mots: "La Grande-Bretagne est unendroit fantastique pour vivre: une société moderne prospère".

Choqués, des eurodéputés roumains et bulgares ont écrit au président de laCommission européenne, José Manuel Barroso, pour dire que les droits de leurs conci-toyens étaient menacés. "Nous pensons que la vague de déclarations hostiles depuis ledébut de l'année vise à stigmatiser nos conmpatriotes comme des Européens de secondrang menaçant les systèmes sociaux au seul motif qu'ils veulent jouir de leur droit de tra-vailler et de circuler librement", protestent-ils.

Suivre l'exemple du Prince Charles

De son côté, le quotidien roumain Gandul arépliqué en publiant des publicités parodiques invi-tant les Britanniques à fuir leur pays qu'ils définis-sent eux-mêmes "d'aussi moche" pour venir goûterune nourriture "moins dégueulasse" et des bièresmoins chères et enfin fraîches, en rappelant que leprince Charles, qui possède une propriété en Transylvanie et en avait sans-doute "ras lebol" de la panse de brebis farcie et des pudding à la gélatine a déjà franchi le pas. "Nousaimerons peut-être moins l'Angleterre, mais vous… vous allez adorer la Roumanie!",assure le journal. "Pourquoi ne venez-vous pas?"

Les autorités britanniques n'ont pas dévoilé le nombre d'immigrants qui pourraients'installer Outre-Manche en provenance de Roumanie ou de Bulgarie, une fois les contrô-

les adoucis. Des estimations circulent. Selon certaines organisa-tions, quelque 250 000 personnes pourraient débarquer en cinqans. D'autres ont suggéré le chiffre de 425 000 en deux ans. Cesderniers chiffres auraient été, selon le Guardian, remis en causepar des spécialistes car ils auraient été extrapolés d'après d'ancien-nes statistiques. La base retenue pour ce calcul ne concernait quel'immigration de Polonais et de Tchèques en Grande-Bretagne en2004 qui s'y étaient précipités à une époque où ils ne pouvaientpas se rendre aussi aisément qu'aujourd'hui dans 25 pays de l'UEet où sa situation économique était bien meilleure.

Les autorités roumaines suscitent encore la méfiance de leurs alliés

“Nos demis de bière sont moins chers

que vos bouteilles d’eau”(campagne de presse des médias roumains)

TÂRGOVISTEl

Le président Traian Basescu aannoncé à son retour de Bruxellesoù se tenait début février le sommeteuropéen fixant les grandes lignesdu budget européen pour la période2014-2020 que la Roumanie avaitobtenu un financement de 40 milli-ards d'euros "soit une augmentation

en pourcentage de 18% par rapport

à la précédente période (2007-

2012)". Il a aussi indiqué qu'il avaitobtenu que les crédits attribués etnon sollicités pendant la périodeprécédente, soit 85 % du total,bénéficieraient d'un délai supplé-mentaire de 3 années pour leur uti-lisation. Pour le Premier ministre,Victor Ponta, qui n'était pas duvoyage à Bruxelles, s'étant vucontesté cette prérogative à songrand désappointement, "cette aug-

mentation aurait pu être plus impor-

tante si le président avait su mieux

négocier". A noter que pour la pre-mière fois, le budget européen aété revu à la baisse pour l'ensem-ble des pays membres de l'UE..

Vie internationale Vie internationale

Budget européen:Bucarest obtient une rallonge de 18 %

"Ne venez pas chez nous… c'est trop moche!"

Bucarest toujours sous surveillance européenneLe rapport de la Commission européenne (MCV) publié mercredi 30 janvier est sans surprise. "Le manque de respect

de l'indépendance de la justice demeure préoccupant en Roumanie", constate Bruxelles, en ajoutant qu'"il reste fort à fairepour atteindre les objectifs" fixés par l'Union Européenne. Six mois après la crise politique qui l'a opposé au présidentTraian Basescu, le premier ministre Victor Ponta assure avoir respecté ses promesses en matière de respect de l'État dedroit. Force est de constater pourtant qu'il n'a pas renoncé à mettre au pas des petits juges un peu trop zélés à son goût.

Chantier en travaux “La Roumanie de demain”, maître d’ouvrage USL:“Chef, il faut suspendre autre chose ou on peut rentrer à la maison ?”

“Charles a acheté une maison chez nous et le prince Harry

n’y a pas été photographié à poil par votre presse de caniveau”.

“Nos contrôleurs aériens ont déjàvu de la neige et n’ont pas besoin

de fermer nos aéroports commevous le faites au moindre flocon”.

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Actualité

Dan Voiculescu, magnat des médias et leader duParti conservateur de Roumanie - membre de lacoalition gouvernementale actuelle - a démission-

né une nouvelle fois du Sénat, fin janvier, pour fuir la HauteCour de Cassation et de Justice (HCCJ). Trois jours avantqu'elle ne traite son cas dans une affaire de corruption, sadémission permet de renvoyer à nouveau l'affaire devant leTribunal de Bucarest, un tribunald'instance inférieure.

L'été dernier, accusé de cor-ruption dans la privatisation del'Institut de recherche agro-ali-mentaire (ICA), Voiculescu, undes oligarques et affairistes lesplus corrompus du pays, avaitdéjà démissionné du Sénat afind'éviter une audience devant cettemême HCCJ. Cela ne l'a pourtantpas empêché de se représenter auSénat quatre mois plus tard et d'ê-tre réélu le 9 décembre dernier.

Son affaire judiciaire, quiavait déjà été transférée auTribunal de Bucarest une premiè-re fois, est alors aussitôt repasséeà la HCCJ, devant laquelle il devait se rendre le 31 janvier.Cette Cour, chargée de juger les responsables politiques, estréputée difficile; elle est d'ailleurs composée des mêmes jugesqui ont condamné l'ancien Premier ministre Adrian Nastasedans une autre affaire de corruption l'an dernier. Le présidentdu Tribunal de Bucarest se montre beaucoup plus conciliant,ayant déjà prononcé des relaxes dans d'autres affaires retentis-santes de corruption.

Au Sénat, Voiculescu a dit démissionner pour mettre unterme aux spéculations selon lesquelles son immunité parle-mentaire serait devenue un obstacle au travail de la justice. Enfait, cette manœuvre lui permet de gagner du temps - son affai-re ne sera jugée que dans un an et ses délits sont prescriptiblesen 2018 - espérer que la justice sera remise totalement soustutelle d'ici là, et que la loi sera aménagée dans un sens lui

étant favorable.

Lutte à mort avec Basescu

Outre ses anciennes respon-sabilités politiques, qui servent deparavent pour mener ses juteusesaffaires et protéger ses intérêts,Dan Voiculescu est également l'undes bussismen les plus importantsde Roumanie. Il a notammentcréé Intact Media Group, quicomprend entre autres les chaînesde télévision Antena et GSP, despublications telles que JurnalulNational et Gazeta Sporturilor,des stations de radio et des socié-tés de production audiovisuelle.

Son empire de presse a servi de fer de lance à l'offensive visantà destituer le président Basescu lors du référendum de juilletdernier, ce qui lui aurait alors garanti l'impunité devant lesjuges. Son échec - il avait été aussi à l'origine du premier réfé-rendum de destitution de Basescu, cinq ans auparavant - l'arendu inconsolable, ce qui ne l'a pas empêché de redemanderdans la foulée la mise en route d'une nouvelle procédure dedestitution, ses amis ayant du mal à calmer son impatience.

Les NOUVELLES de ROUMANIE

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Les NOUVELLES de ROUMANIEActualité

Roumanie, Italie, Grèce, Irlande, Portugal... Au total, 54 pays ont collabo-ré avec la CIA dans son programme de détention secrète et de tortures desuspects de terrorisme après les attentats du 11-Septembre, d'après un

rapport de l'organisation Open Society Justice Initiative publié mardi 5 février. Tousces gouvernement étaient impliqués à diverses échelles, qu'ils aient accueilli les pri-sons secrètes sur leur sol, aidé à la capture et au transport des détenus, interrogé ettorturé selon le programme d'interrogatoires renforcés, fourni des renseignements ouencore ouvert leur espace aérien pour permettre le transfert illégal de personnes d'unpays à un autre. Cinq des six prisonniers détenus dans des prisons secrètes enRoumanie faisaient partie d'un groupe de 14 principaux terroristes suspectés par lesEtats-Unis et transférés dans la prison de Guantanamo en 2006.

"En participant à ces opérations, ces gouvernements ont violé aussi le droit inté-rieur et international et ont sapé les règles contre la torture", qui est "non seulementillégale et immorale mais aussi inefficace pour réunir des renseignements fiables",dénonce ce rapport intitulé "De la mondialisation de la torture". Jusqu'à 25 paysd'Europe sont concernés, comme, outre la Roumanie, l'Autriche, la Bosnie-Herzégovine, la Croatie, la Finlande, l'Allemagne et le Royaume-Uni. L'Australie yest aussi mentionnée ainsi que l'Iran, qui a remis dix personnes aux Etats-Unis mal-gré ses mauvaises relations avec Washington.

Les prisons secrètes de la CIA, où sont passés notamment les cinq accusés du 11-Septembre encore détenus à Guantanamo, se trouvaient aussi en Thaïlande, Pologneet Lituanie. Les méthodes d'interrogatoire qui y étaient utilisées, et autorisées sousGeorge W. Bush, incluaient notamment la simulation de noyade, assimilée à de latorture.

Ces découvertes ne sont pas nouvelles puisque l'ONG Human Rights Watch fai-sait déjà état de ces centres de détention dans une liste noire publiée en novembre2005. Un rapport du Conseil européen de 2006 confirmait également l'existence"présupposée" d'installations secrètes de détention en Roumanie. Bucarest a toute-fois toujours nié ces accusations en se basant sur une enquête du Sénat qui affirmaitdans ses conclusions en 2008 que le pays n'avait jamais accueilli de centres de déten-tion de la CIA, ni facilité le transfert de prisonniers.

Cinq Roumains travaillant sur le sitede la raffinerie d'In Amenas dans ledésert algérien ont été pris en otage,avant d'être libérés, mais deux autresont été tués. Il s'agit de Ionut TiberiuCostache, un ingénieur de 36 ans,domicilié à Barcanesti près de Ploiesti,qui travaillait auparavant à la raffineriePetrobrazi de cette région pétrolifère.Marié, un enfant de 6 ans - sa femmeétant enceinte de 7 mois - il avaitaccepté un contrat de travail en Algériepour pouvoir payer sa maison.

Son collègue Mihail Bucur (40 ans),originaire de Ploiesti, également ingé-nieur, a aussi été tué. Orphelin, il avaitété élevé par ses grandes sœurs,réussissant brillamment ses études.Recherché ses compétences, il avaittravaillé pendant dix ans aux USA etau Moyen-Orient. Il était marié et avaitdeux enfants de 3 et 10 ans.

Otages roumainstués en Algérie

Monica Ridzi, Gigi Becali et Dan Voiculescu… autant d'oligarques véreux qui font des pieds et des mains

pour échapper à la justice : "Personne n'est au-dessus de la loi… nous travaillons à la statue de... notre liberté".

Dan Voiculescu se démène pour éviter de passer devant les juges

Les tribulations judiciaires d'un oligarqueTortures et prisons secrètes

de la CIA en Roumanie

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Vie internationale Politique

Appelés à répondre à la question de savoir si "laBulgarie doit développer son énergie nucléairepar la construction d'une

nouvelle centrale atomique ?", 61%des votants ont répondu "oui" lors duréférendum organisé le 27 janvier, lepremier dans ce pays depuis la chutedu communisme, voici 23 ans. Maisseuls 20% des inscrits s'étant mobili-sés, il n'a pas été validé (un seuil de60% de participation était nécessaire).La question portait sur la poursuite dela construction de la seconde centralenucléaire du pays, à Belene (Nord),dont les travaux ont été gelés en mars2012. Elle intéresse au premier chefles voisin roumains, riverains de cet équipement installé sur leDanube frontalier aux deux pays, près de Turnu-Magurele(Roumanie). Alors que promoteurs et opposants au projet seréjouissent du résultat de la consultation, Troud estime qu'il

s'agit d'"une défaite pour tout le monde": pour les citoyens, àcause du fiasco du premier vote de démocratie directe; pour

l'opposition de gauche, initiatrice dela consultation, parce qu'elle n'aurapas réussi à mobiliser davantage d'é-lecteurs; et pour la droite, opposée auprojet d'une nouvelle centrale, parceque ceux qui ont voté ont dit oui àBelene.

On est passé "à un doigt du fiascototal", renchérit Standart, qui note quele seuil des 20 % de participationayant été franchi, les initiateurs duréférendum obtiennent "au moins quela question de la construction d'uneseconde centrale soit débattue de nou-

veau au Parlement". Mais comment expliquer ce peu d'intérêtpour le sujet? Les médias bulgares dénoncent la "politisation"du référendum, largement perçu comme un prélude aux élec-tions législatives de l'été prochain.

Les Bulgares boudent le référendum sur le nucléaire

Une nouvelle loi prévoyantune médiation entre coupa-ble et victime dans les cas

relevant du pénal est entrée en vigueur le1er février dernier en Roumanie. Son but:réduire le nombre de procès, mais cetteprocédure préoccupe les défenseurs desvictimes de violences sexuelles.

Désormais, la justice roumaine n'ac-ceptera plus de porter une affaire devantles tribunaux si les plaignants ne fournis-sent pas au préalable la preuve de leurpassage devant un médiateur.

Concrètement, la justice demanderasystématiquement une confrontationentre le plaignant et le coupable présumé,en présence d'un médiateur assermenté,avant d'entamer une quelconque procédu-

re. Cela peut permettre de régler le litigeà l'amiable ou par un dédommagement.Cette démarche gratuite mais obligatoireconstituerait une preuve de la volonté dela victime et du suspect de trouver unesolution à l'amiable mais elle fait enragerles organisations non gouvernementalesféministes, qui craignent une diabolisa-tion des victimes, en particulier cellesayant subi un viol.

"Pourquoi les victimes d'un violdevraient-elles recevoir le conseil de par-donner à leur agresseur?" se demandeainsi România Libera. Si le quotidienfait remarquer que cette mesure peut êtreutile en cas de conflits mineurs entredeux parties, car elle désengorgerait lesinstances débordées par les procès…

"elle pose un grand problème dans cer-tains cas pénaux, car elle obligerait lesvictimes, parfois à la suite d'un viol oud'une agression domestique, à accepterque leur agresseur tente, moyennant del'argent, de les convaincre de ne pas por-ter plainte".

Un "problème" qui n'émeut pas l'ini-tiatrice de cette loi, la députée libéraleAlina Gorghiu: "La médiation peut sou-lager le système judiciaire roumain oubien les instances qui délibèrent parfoispendant de longues années avant qu'unedécision ne soit rendue. Elle peut aussipermettre de trouver une solution rapideà des conflits parfois simples à résoudre,comme certains divorces ou partages debiens".

Une réforme de la justice qui inquiète les victimes de viols

Démobilisation mais aussi contestation ont fortementcontribué à l’échec du référendum sur le nucléaire.

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Images d’actualitéLes NOUVELLES de ROUMANIE

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Les NOUVELLES de ROUMANIE Actualité

Symbole de la résistance lors de la chute de la dictature, en 1989, DoinaCornea s'est rapidement heurtée aux anciens communistes, revenus au pouvoir.Mais elle a fini par obtenir en partie gain de cause. Aujourd'hui, la vieille dame estoubliée par ses compatriotes, aussi bien que par l’opinion internationale.

C'est une modeste maison à proximité d'un pont, à la sortie de la ville de Cluj,située dans le nord-ouest de la Roumanie. La sonnette ne fonctionne plusdepuis longtemps et les visites sont rares. Doina Cornea reçoit peu. Son fils,

Leontin Iuhas, qu'elle a surnommé "Tintin" depuis sa plus tendre enfance, ouvre laporte et indique d'un geste rapide la direction du salon. Des livres de toutes sortes tapis-sent les murs, le bureau est rempli de dossiers et la photo du pape Jean Paul II trône surune étagère.Doina Cornea peine à se déplacer. Elle a 83 ans et se remet difficilementd'un accident vasculaire cérébral survenu il y a quelques années. Tintin lui prend le braset l'aide à s'asseoir sur une chaise. Elle sourit. De ses yeux clairs émane une lumièreintérieure dont elle a le secret. Dans les années 1980, cette femme frêle a fait tremblerune des pires dictatures du monde. A l'époque, le pays de Nicolae Ceausescu, le "géniedes Carpates", semblait condamné au silence. Mais, en 1982, une modeste professeu-re de français de l'université de Cluj élève publiquement la voix contre la dictature.

Répandant des tracts anticommunistes avec son fils "Tintin"

Doina Cornea envoie àRadio Free Europe, anticommu-niste et basée à Munich, une let-tre intitulée "A ceux qui n'ont pascessé de penser". La Securitate,la sinistre police politique durégime, s'en saisit immédiate-ment, mais la dissidente de Clujse débrouille pour envoyer à laradio une trentaine de messagespublics. "J'ai été convoquée parla Securitate, se souvient-elle.Au début, ils ont été courtoisavec moi, mais j'ai vite appris lesrègles. Il ne fallait jamais dire lavérité ou leur mentir, mais opterpour un mélange des deux.C'était comme un jeu d'échecs où

chacun avançait les pièces en fonction de l'autre".Surveillée en permanence, assignée à résidence à son domicile, arrêtée et empri-

sonnée en 1987, interrogée parfois jour et nuit, Doina Cornea résiste et continue sonaction. Son époux, l'avocat Leontin Cornel Iuhas, reste à ses côtés et la soutient dansson opposition à la dictature. Sa fille Ariadna est à l'abri en France, où elle s'est mariéeen 1976. Avec son fils Tintin, Doina répand des tracts anticommunistes et met dansl'embarras un régime qui se croyait infaillible. Ce n'est qu'en décembre 1989, après lafuite et l'exécution sommaire du "Conducator", que les Roumains découvriront à latélévision le visage de la femme devenue un symbole de la résistance anticommuniste.

Avec la chute du communisme, le calvaire de Doina Cornea était loin d'être termi-né. L'ancien apparatchik Ion Iliescu, tombeur de Ceausescu, et la vieille nomenklaturaavaient accaparé le pouvoir de la jeune démocratie roumaine. L'ex-dissidente continue-ra à gêner non seulement un pouvoir en quête de légitimité, mais aussi une société quirefusait encore de regarder son passé.

Mirel Bran (Le Monde)

"On ne fait rien si on ne sacrifie

pas un peu de soi-même, affirme

Doina Cornea. Un pays change

grâce aux petits gestes de tous les

jours. Ces petits sacrifices devraient

être un exercice quotidien". Mais laRoumanie n'était pas prête en 1989à faire un examen de conscience col-lectif. C'est seulement le 28 février2012, vingt-deux ans après la chutede la dictature, que leParlement roumain a votéune loi interdisant auxanciens membres de laSecuritate qui se sont livrésà des actes de torture d'ac-céder à la fonction publique.

"Cette loi est une honte

pour la Roumanie", avaitdéclaré l'ancien présidentIon Iliescu. "Elle arrive trop

tard", déplore Doina Cornea.Cette femme qui a sauvél'honneur de son pays s'estvu accorder plusieurs dis-tinctions: l'Etoile de laRoumanie en 2000, la plushaute distinction, l'ordre deSaint-Grégoire-le-Grandoffert par le pape JeanPaul II en 2003 et la croix de com-mandeur de la Légion d'honneur, quela France lui a remise en 2009.Doina Cornea n'en parle pas.

"A mon âge, on se rend compte à

quelle vitesse passe la vie, dit-elle.Trop vite, trop vite. Mais je suis tou-

jours joyeuse. En ce moment, je

m'intéresse beaucoup à la religion.

Je me demande s'il y a quelque

chose après la mort, quelle vie peut

m'attendre dans l'au-delà. Je vous

passerai un coup de téléphone pour

vous le dire..." M.B.

"Je vous passerai un

coup de téléphone…"

En janvier-févrierDoina Cornea, égérie oubliéede la révolution roumaine

n

BUCAREST

ORADEA

SATU MAREl

TIMISOARA

ARAD

lIASI

BRASOV

CONSTANTA

TARGUMURES

BRAILAl

l

l

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SUCEAVA

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PITESTI

l

TARGOVISTEl

VASLUIBACAU

CRAIOVA

TULCEA

l

l

l

l

GIURGIU l

l

l

Politique

Si certaines régions ontété relativement

épargnées par le froid,début janvier, le “général

hiver” a mené une terribleoffensive dans le centre et

à l’est du pays. Le thermomètre est

descendu en dessous de- 30 ° dans le secteur de

Miercurea Ciuc.

Comme chaque débutd’année, les Roumains

on dû faire la queue pendant des heures afin

de payer leurs impôts.

Doina Cornea entre Marius Oprea (à gauche), historien et chercheur sur le communisme et son fils.

L’élection présidentielle de fin 2014 se prépare déjà. Un congrèsdu PDL doit désigner prochainement son champion, Traian

Basescu ne cachant pas sa préférence pour Elena Udrea, “Lablonde du Président”, au détriment du poids lourd, Vasile Blaga.

L’ancien Premier ministre AdrianNastase a du payer une amendede 750 000 € pour sortir plus vitede prison où il croupit depuis juin.

En janvier, Bruxelles a fixé à l’élève Ponta la liste de ses devoirs: privatiser Oltchim, les chemins de fer, autoroutes, ports, aéroports,

faire entrer en bourse Tarom, éteindre la dette des arriérés...Une histoire de drapeau hongrois flottant sur la préfectrure du judet

magyar de Covasna a provoqué unevive tension entre Budapest et Bucarest.

En Roumanie, on aime les chevaux...mais pas dans les assiettes!

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Actualité

Russes. Bien sûr, il ne faut pas oublier le côté juridique, dansle même temps, mais de là à dire qu'on se sent roumain parceque l'on a le passeport roumain, c'est assez relatif.

L'offre généreuse mais rhétorique de la Roumanie

LB: Comment faire vivre ensemble Moldaves etRoumains?

NT: C'est une situation complexe, de toute façon. C'estexceptionnel. Ca va se clarifier avec le temps. Pour ce qui estde la citoyenneté roumaine pour les personnes originaires de lapartie orientale de la Moldavie, de la Bessarabie, à mon aviscette "naturalisation" (un concept français) des Roumains deMoldavie doit se faire dans le contexte d'une renégociation, ycompris de l'identité. Il faut que les Moldaves fassent un pas,les Roumains de Roumanie un pas, mais aussi que ces derniersreconnaissent la différence et la spécificité des Roumains deMoldavie de part leur vécu dans une république soviétique. S'iln'y a pas cette entente, cette compréhension qui ne peut êtreque le résultat d'une discussion, d'un débat ouvert, les chosess'annoncent mal pour l'avenir. C'est indispensable.Malheureusement, cela ne s'est pas fait encore.

D'un côté, il y a une offre généreuse de la part desRoumains, mais elle est rhétorique, bloquée par des considéra-tions nationalistes. On fait les choses vite fait et ce n'est pasforcément bien fait, il faut que cette discussion ait lieu. C'estdonc la rhétorique nationaliste qui empêche cette discussion.

LB: Que révèle, d'après vous, cette quête de"passeportroumain"?

NT: Ce phénomène est révélateur de la non-consistancede l'Etat moldave et de l'absence de légitimité, au sens fort duterme, mais aussi de sa situation incertaine. L'incertitude exis-te quant à la position géographique de ce pays condamné parses frontières, établies par l'URSS à la suite de la deuxièmeGuerre mondiale, mais aussi à cause de son contenu. Doncc'est un pays qui n'est pas viable d'emblée. Il aurait pu l'êtredans un contexte fédéral européen, comme cela a été possibledans le cadre de l'URSS, mais aujourd'hui ce n'est pas le cas.Et cela pour des tas de raisons. Il existe pourtant d'autres paysqui sont petits et viables, comme la Belgique, qui a d'ailleursla même taille que la République de Moldavie.

Bucarest a évité toute dérive

LB: Est-ce que cette "passeportisation" faite par laRoumanie est bienveillante, agressive, de conquête, dereconquête, irrédentiste?

NT: J'estime grosso modo que la politique des passeportsde la Roumanie après 89 a été plutôt attentiste et que laRoumanie n'a pas cédé aux provocations, évitant toute dérivequi aurait pu mener à une aventure et donc à un conflit. Celui-ci a été évité de justesse avec la Russie, malgré les griefs et

accusations réciproques. Le principal problème pour la Moldavie, c'est que l'Union

Européenne n'a pas pu ou n'a pas voulu aller très loin dans lesexigences du respect des promesses faites par les Ukrainiens etles Russes à Chisinau concernant la Transnistrie.

Le gouvernement roumain a alors adopté une politiqueplutôt "défensive" et cette histoire d'accorder des passeportsroumains a été un geste de compensation de la part du prési-dent Basescu. Mais en effet, La Roumanie n'a pas voulu jeterde l'huile sur le feu pour la simple raison qu'elle voulait se rap-procher de l'Ouest et donc ne pas lui compliquer les chosesavec la Russie.

"Il faut une génération pour devenir Français"

LB: Comment voyez-vous les Moldaves: comme desRoumains de Moldavie ou des Moldaves de Bessarabie?

NT: Non, pour moi ce sont des Européens en devenir, desgens riches, des gens pauvres, des paysans, des intellectuels,des mouchards, des gens sincères. Il y a de tout en Rpubliquede Moldavie. Je pense que de nos jours cela n'a plus tellementd'importance. Quand aux Bessarabiens, je n'aime pas telle-ment ce terme, héritage de l'empire des Tsars, parce que c'estune référence à un vocable trop ancien et parce que lesBessarabiens sont passés par le moule soviétique et donc qu'ilfaut en tenir compte. C'est pourquoi, pour moi, ce sont avanttout des citoyens de la Moldavie ex-soviétique avec une expé-rience historique différente, aussi bien au 19e qu'au 20e siècleet dont la langue est commune avec celle de la population deRoumanie. C'est ça la réalité de cette population.

Tout le problème c'est qu'il doit y avoir une renégociationdes rapports entre les Roumains de Roumanie et ceux de laMoldavie. Ils sont avant tout des citoyens moldaves, mais lefait de devenir Roumain en soi est un aspect juridique, ce n'estqu'un passeport. Et cela on le voit très bien dans un payscomme la France où ce n'est pas parce qu'on est naturaliséqu'on est d'office Français. Il faut attendre une génération pourdevenir Français. On a une expérience historique différente,qu'elle soit sentimentale, affective, etc. Il faut en tenir compte.Je n'accorde pas beaucoup d'importance au juridique.

Interview réalisée par Ludmila Bulgarpour "Cartier European"

Les NOUVELLES de ROUMANIE

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Les NOUVELLES de ROUMANIE Actualité

Selon Nicolas Trifon, le passeport roumain consolide la "roumanité" desMoldaves. Toutefois, une renégociation de la relation entre les Roumains deRoumanie et ceux de Moldavie lui paraît indispensable au niveau identitaire,entérinant les différences et spécificités.

L'historien répond aux questions de Ludmila Bulgar pour "CartierEuropean", blog d'actualité européenne sur la Moldavie qu'elle animedepuis Bruxelles.

Ludmila Bulgar: Quelles seront les conséquences à long terme de cette politiqueroumaine des passeports à l'égard des Moldaves de Bessarabie?

Nicolas Trifon: La première difficulté c'est d'établir la chose statistiquement et çac'est une difficulté qui provoque confusion et débat autour de cette question. Cela peutêtre 270 000, comme un million. De tous les côtés, il y a des tendances à l'exagérationou à la sous-estimation. Là, déjà c'est une guerre autourdu chiffre. Il y a aussi le problème de l'interprétation etc'est là que les choses se compliquent.

L'effet d'annonce de Basescu

LB: Qu'en est-il des conséquences à long termealors de cette "passeportisation"?

NT: D'abord cette histoire de Basescu, qui circu-lait sur YouTube et qui montrait sa position généreuse,c'est à dire, en substance, "pourquoi ne pas permettreaux jeunes Roumains de Moldavie de voyager, d'exis-ter en Europe si les jeunes Roumains de Roumaniepeuvent le faire?… il faut donc leur donner des passeports". Pourquoi pas? Il a eu uneposition courageuse, mais qui n'a pas été suivie parce que, déjà, le Premier ministre del'époque, Emil Boc, a atténué les choses en disant "enfin, non, on ne peut pas tout faire,etc.". Cela s'est donc limité à un effet d'annonce qui a été rectifié mais a provoqué bienévidemment des inquiétudes du côté de l'Union Européenne.

LB: Dans un sondage, les Bessarabiens au passeport roumain reconnaissent àprès de 60%, l'ouverture que leur a accordé le passeport roumain, en terme de cir-culation, d'études en Europe, d'amélioration de leurs chances de faire des affairesen Roumanie et en Europe, tout en confirmant au chapitre "identité" qu'il leur aconfirmé leur identité, celle de "roumain de Bessarabie", tout en rendant ce lien"juridique". Que pensez-vous de cette évolution?

NT: Il faut remettre les pendules à l'heure. En fait, la plupart des citoyens deTransnistrie ont des passeports russes. Donc nous avons une situation similaire desdeux côtés. Alors, est-ce qu'ils sont davantage Russes qu'ils n'étaient Moldaves aupa-ravant, c'est une chose compliquée.

Pour ce qui est des citoyens de la République de Moldavie, les conditions requisespour l'acquérir étaient d'avoir eu des grands-parents qui avaient été citoyens roumains,même si ces derniers étaient russophones. Dans ces conditions ils peuvent donc "retro-uver" la nationalité roumaine. Les russophones de Moldavie y sont donc aussi inclus.Et effectivement, il y a pas mal de russophones qui ont pris la nationalité roumainepour se rendre en Europe ou venir en Roumanie.

Il y a donc des Moldaves russophones en Roumanie qui parlent le roumain main-tenant, alors qu'à l'origine leur langue maternelle est le russe. Ils font des petits boulotsen Roumanie ou des affaires, etc. Pareil, il y en a qui viennent en France avec un pas-seport roumain alors qu'ils sont russophones., même s’ils sont une minorité. De toutefaçon, on est Moldave et Roumain un peu naturellement, vu la langue, la situation etvu les convergences actuelles qui ne sont pas seulement roumaines et moldaves, maisaussi dans un contexte européen, et le fait que ces gens-là ne se réclament plus comme

Pour l'historien Nicolas Trifon, dans les

Le sujet des passeports roumainscomme "sésame pour l'Europe" pourles citoyens moldaves a beaucoup étévéhiculé dans la presse européenneces dernières années. A ce propos, ladernière étude en date, dirigée parConstantin Iordachi (2012, EditionsCurtea Veche, Roumanie), présente lechiffre de près de 270 000 Moldavesqui auraient acquis la nationalité rou-maine à partir des années 90.Toutefois, dans une enquête effectuéeauprès des Moldaves au passeportroumain, les personnes interrogéesmontrent leur étonnement pas rapportà ce chiffre qui leur semble trop bas,disant qu'"il y en a sûrement plus".

Dans ce contexte, on s'interroge surla façon dont l'identité des citoyens deMoldavie se modèle sous l'influence duprocessus massif d'acquisition de lanationalité roumaine par le biais de lapolitique des passeports, pratiquée parla Roumanie à l'égard des citoyens deMoldavie, en particulier.

Nicolas Trifon, 63 ans, est un écri-vain-historien et éditeur né en 1949 àBucarest. Il vit en France depuis 1977et est titulaire d'une thèse de doctoraten linguistique (Paris, EHESS, 1983).Directeur de publication de Iztok :revue libertaire sur les pays de l'Est,entre 1983 et 1991, il collabore depuis2005 avec le portail francophone d'in-formation Le Courrier des Balkans.

Nicolas Trifon est l'auteur de plu-sieurs ouvrages sur Marx, lesAroumains, la Moldavie dont, en colla-boration avec Adrian Ciubotaru, "UnÉtat en quête de nation: LaRépublique de Moldavie", paru en2010 aux éditions "Non Lieu" de Paris.

270 000 passeports ou plutôt un million?

conditions actuelles, la Moldavie n'est pas viableMoldavie

des citoyens moldavesLa "passeportisation"

Nicolas Trifon est un spécialiste de la République de Moldavie.

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ActualitéLes NOUVELLES de ROUMANIE

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Les NOUVELLES de ROUMANIE Actualité

En s'élargissant, l'Union Européenne remodèle l'espace et les identités.L'effet en est particulièrement sensible à ses frontières extérieures, où de nou-veaux rapports d'exclusion prennent forme, parfois à l'encontre des réalités his-toriques et culturelles et d'aspirations identitaires. Un exemple avec la ville deCahul, située en Moldavie, à quelques kilomètres de la Roumanie.

Depuis les élargissements de 2004 et de 2007, le processus d'intégrationeuropéenne a provoqué des changements majeurs pour les ressortissantsd'Europe centrale et orientale. Alors que la plupart des citoyens de l'Union

européenne (UE) vivent dans une Europe sans frontière, certains peuvent paraître blo-qués derrière un nouveau "Rideau de Fer", qui sépare les États membres qui ont plusrécemment adhéré à l'UE du reste du continent. De plus, depuis que plusieurs de cespays sont entrés ou envisagent d'entrer dans l'Espace Schengen, un processus de"rebordering" (nouvelles frontières) peut être observé et les citoyens installés au-delàde l'Europe élargie rencontrent de nouveaux obstacles pour se rendre dans des pays quileur étaient auparavant facilement accessibles. Cette situation est celle des Moldaves,traversant auparavant librement la frontière vers la Roumanie et qui se sont vu en effetimposer à partir de 2007 un visa pour traverser la frontière. Se penchant sur le cas deshabitants de la ville de Cahul, à cinq kilomètres de la frontière moldavo-roumaine,Julien Danero Iglesias et Cristina Stanculescu s'interrogent sur l'impact de cette ferme-ture des frontières sur les populations concernées.

Une ville plus russifiée que le reste du pays

La frontière entre la Roumanie et la Moldavie sépare unepopulation qui parle une même langue et partagent une partie dela même histoire. Cahul, environ 40 000 habitants, est la troisiè-me ville du pays et la principale ville du sud de la Moldavie. Dupoint de vue ethnique, la population est composée de 60% deMoldaves, 17,1% de Russes, 11% d'Ukrainiens, 6,66% deBulgares, et 3,26% de Gagaouzes (turcophones), entre autres. Sil'on compare cette répartition avec le reste de la Moldavie, leschiffres montrent que Cahul est plus "russe" que le reste du payset notamment que Chisinau, la capitale moldave. Cette situations'explique par l'histoire locale.

En effet, Cahul partage l'histoire de la Bessarabie, régionconstamment tiraillée entre la Russie et la Roumanie. En fonc-tion des époques et des dominations, la Bessarabie et ses popu-lations ont été l'objet de diverses politiques d'assimilation et denationalisation, transformant - ou au moins tentant de transfor-mer - la population moldave en fonction des intérêts des élitescentrales. Par exemple, à l'époque soviétique, une doctrine appe-lée "moldovénisme" a été mise en avant. Elle soutenait l'idée del'existence d'un "peuple moldave" différent des voisins rou-

mains. Cette doctrine linguistique et politique a permis de justifier l'inclusion de laBessarabie dans l'URSS et a été l'un des recours principaux de la politique moldaveaprès l'indépendance en 1991, particulièrement mise en exergue par le Parti des com-munistes de la République de Moldavie qui est resté au pouvoir entre 2001 et 2009.

Une petite berge tranquille… soudain bordée de fils barbelés

Dans ce contexte, Cahul a la particularité d'avoir été plus fortement russifiée quele reste du pays, à la suite d'un processus de colonisation commencé aux époques tsa-riste et développé sous l’ère soviétique.

facteur de démarcation entre Moldaves et Roumains

Chisinau va ouvrir une représen-tation diplomatique permanente auQatar, avec un siège à Doha, quisera la première ambassade molda-ve dans le golfe Persique. La déci-sion a été prise lors du récent voya-ge du Premier ministre Vlad Filatdans le riche émirat, à l'occasion dela signature de plusieurs contratsqui illustrent son intérêt pour investirsur le continent européen.

A première vue, il paraît étrangede voir deux des plus petits pays dela planète nouer desrelations plus ser-rées…. Mais les chiff-res aident à comprend-re cette démarche: laMoldavie (24 000 km2,3,6 millions d'habi-tants) est le pays euro-péen le plus pauvreavec un PNB de 7milliards d'euros, soitun revenu national brutde 3000 € par habi-tant. Le PNB du Qatar,2ème pays le plusriche du monde, deuxfois plus petit et deuxfois moins d'habitants(11 450 km2, 1,750million d'habitants) s'é-lève à 138 milliards d'euros avec unrevenu par habitant de 78 000 €,soit 26 fois plus, grâce à ses reve-nus pétroliers et gaziers. Si laMoldavie, qui voit fuir une partie desa population, dont les jeunes issusde ses universités, a besoin descapitaux et investissements duQatar, ce dernier manque de maind'œuvre, notamment formée.

La ville appartenait à la Principauté de Moldavie qui a étédémantelée à la fin du 18e siècle et est passée sous la domina-tion tsariste russe de 1812 à 1918, exception faite de la pério-de allant de 1856 à 1878 - après la guerre de Crimée- où ellea appartenu aux Principautés roumaines. Après la PremièreGuerre mondiale, Cahul, comme le reste de la Bessarabie, aété incluse dans la Grande Roumanie.

Mais, après la Seconde Guerre mondiale, la Bessarabie aréintégré l'Union Soviétique, la République SocialisteSoviétique Moldave a été créée et Cahul est restée une petiteville thermale tranquille. La berge moldave de la rivière Prout,marquant la frontière entre la Roumanie et la Bessarabie, aensuite été entourée d'un fil barbelé qui, au niveau national, n'aété retiré qu'en 2010. Mais à Cahul et dans le sud de laMoldavie, les barbelés avait déjà été supprimés en 1990 sousl'effet de la perestroïka.

Une humiliation renforcée aux frontières

Malgré la disparition des barbelés, la frontière semble s'ê-tre refermée depuis l'adhésion de la Roumanie à l'UE et elleapparaît comme une véritable ligne de séparation pour leshabitants de la ville. Comme le raconte une étudiante à l'uni-versité, "Cela ne change rien que tu sois étudiant, paysan outouriste, tu as toujours le même sentiment à la frontière. Ils tedéshabillent, ils te contrôlent. Ils te demandent ce que tu cher-ches… et il y a toujours cette impression que l'on va nous ren-voyer s'ils n'aiment pas tel cachet sur mon passeport ou s'il aexpiré et que je n'avais pas fait attention". La frontière appa-raît alors souvent comme une source de frustration, d'humilia-tion, d'attente et de stress, et le sentiment est d'autant plus pal-pable depuis 2007, comme l'explique un conseiller municipal:"Dès que l'UE a accepté la Roumanie, on a commencé à for-tifier la frontière. Et nous sommes entrés dans une période dedépression". La ligne paraît encore plus séparatrice quand leshabitants de Cahul voient les réparations et les améliorationsqui sont effectuées au poste-frontière roumain. Les évolutionsroumaines sont alors vues comme le résultat de l'adhésion etmontrent aux habitants de Cahul toute la distance qui peut lesséparer de l'UE. Certains misent alors sur une éventuelle adhé-sion de leur pays à l'Union et sur les avantages que cela leuroffrira en termes de liberté de mouvement.

Permis de "petit trafic"

Néanmoins, la frontière peut être franchie. Les citoyens deCahul ont en effet deux possibilités pour passer la frontière: ilspeuvent soit utiliser un "permis de petit trafic", soit demanderla citoyenneté roumaine. Depuis 2010, le "petit trafic" fronta-lier permet aux citoyens moldaves qui vivent au maximum à50 km de la frontière avec la Roumanie de se rendre sans res-triction dans une zone de 50 kilomètres de l'autre côté de lafrontière. Le permis est gratuit et a une validité de 2 à 5 ans.

Pour les habitants de Cahul, l'obtention de ce permis est

facilitée depuis que la Roumanie a ouvert en 2010 un consulatdans le centre-ville. Selon Gentiana Serbu, consul général deRoumanie à Cahul, en moyenne, 20% des demandes ne sontpas validées dans un contexte où moins de permis que prévuont été accordés à des ressortissants moldaves. En effet, pourle consul, le principal obstacle - et avant tout dans les zonesrurales - est que le passeport, document nécessaire pour effec-tuer la demande du permis, est payant et que de nombreuxcitoyens n'ont pas les moyens d'effectuer une telle dépense.

"Les Roumains sont bruyants…Ils font crunch crunch crunch"

Parallèlement, les Moldaves peuvent demander lacitoyenneté roumaine s'ils sont en mesure de prouver que l'unde leurs ancêtres était un citoyen de la Grande Roumanie entreles deux guerres mondiales. Beaucoup de personnes interro-gées reconnaissent ouvertement que demander la nationalitéroumaine est pour elles un moyen leur permettant d'aller de l'a-vant, car cette nationalité européenne est source d'espoir,comme pour cette employée d'une trentaine d'années: "Ici, j'ail'impression qu'on est dans un espace clos. (…) Obtenir lacitoyenneté roumaine est comme un espoir, car cela te permetde trouver un boulot. Tu obtiens la citoyenneté et cela t'ouvrede nouvelles perspectives. Mais dans ce pays, ici, tu restes…je ne vois pas l'intérêt, rien ne change jamais ici. En pire, oui.En mieux, non".

Pour une partie des citoyens de Cahul - en fait, la majori-té -, il apparaît que cette frontière de l'UE sépare deux pays,deux États indépendants dont les citoyens sont différents,même s'ils appartiennent à la même nation. Les Roumains sontainsi vus comme différents, et les appréciations positivescôtoient les appréciations négatives. Par exemple, une comé-dienne de Cahul raconte que lorsque les Roumains vont authéâtre, "ils sont bruyants, ils parlent pendant le spectacle…Ils causent, ils commentent directement ce qui se passe sur lascène (…), ils boivent, ils mangent du popcorn… crunchcrunch crunch". (lire la suite page 18)

Les Soviétiques ont annexé la Bessarabie au lendemain

de la Seconde Guerre mondiale.

Les frontières de l'UE

Ambassade au Qatar

des citoyens de plus en plus différents

Moldavie

Une même nation…

Marche pour la réunification de la Bessarabie avec la Roumanie à Cahul, à l'été 2010

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Actualité

Lors d'une cérémonie au Palais présidentiel de Cotroceni, début janvier,le Président Basescu a décoré de l'Ordre roumain du Mérite cinq diri-geants du groupe Dacia-Renault, dont deux cadres rattachés à la direc-

tion française et 3 Roumains. TraianBasescu a tenu à saluer vivementl'honnêteté de Renault dans le respectde l'engagement pris lors de soninstallation en Roumanie, soulignantle fait que le groupe y avait trouvéaussi son intérêt: "Le contrat de pri-vatisation de Dacia prévoyait lemaintien sur place de 14 000 emplois,aujourd'hui ses usines comptent19 000 salariés. Le groupe s'étaitengagé à investir 217 millions d'euros, il a injecté 2,1 milliards d'euros. Il avaitpromis que les Dacia seraient des voitures destinées à la Roumanie et aux paysémergents. Aujourd'hui, on les voit rouler aussi en France, Grande-Bretagne,Allemagne et elles occupent une place importante sur le marché européen.

Mieux même: Dacia-Renault a crée à Titu (près du siège des usines Dacia àPitesti) un centre d'ingénierie qui emploie 2700 de nos jeunes sortis de nos uni-versités polytechniques et a induit 150 000 emplois en Roumanie dans l'industriedes composants automobiles.

Voici 8 ans, le groupe s'était engagé à produire un modèle qui serait fabri-qué pendant 10 ans dans nos usines. L'an passé il y a lancé la fabrication de nou-veaux modèles, dont le Duster, qui rencontrent déjà un grand succès en Europeet a d'autres projets dans ses cartons qui concernent aussi la Roumanie, montrantainsi que l'unité de production qu'il a construite à Tanger n'est pas une menacepour l'activité de ses sites en Roumanie mais une complémentarité".

Les NOUVELLES de ROUMANIE

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Les NOUVELLES de ROUMANIE

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Actualité

Pour les Moldaves, toutes les représentations de l'Europe et de l'appartenancede la Roumanie à l'UE ne sont pas positives. Non seulement certains estimentque les Roumains ont dû souffrir pour arriver où ils se trouvent aujourd'hui,

mais l'Europe présente en outre certains inconvénients, comme le raconte une jeunemère de Cahul: "Ce qui vient d'Europe brise l'âme des gens. L'emphase n'est plus misesur une vie belle et spirituelle, sur la compréhension mutuelle. Beaucoup de mauvaiseschoses sont venues de là-bas, vers nous, vers les Moldaves. Nous avons un petit pays,qui semblait préservé. Maintenant… on ne connaît plus ses voisins; avant, c'était uneMoldavie dans laquelle tout le monde se connaissait".

L'Europe aurait donc amené en Moldavie certaines valeurs négatives, et il sembleque la frontière qui sépare la Moldavie peut aussi être entendue comme symbolique.Pour une partie des citoyens de Cahul, la frontière est une imposition des autorités

soviétiques et elle sépare artificiellement lesmembres d'une même nation, aux caractéris-tiques semblables: "Le Prout était un mur quinous séparait de nos frères… Des deux côtés dela frontière, on rencontre les mêmes traditions,la même langue, et nous sommes séparés en faitpar une rivière qui nous appartient… Maisl'histoire est comme elle est".

Shopping et McDonald's à Galati

Privatisations : le FMI pousse à la roue

Le combinat pétrochimique Oltchim, situé àRâmnicu Vâlcea (sud de la Roumanie), a accumulédes dettes qui s'élèvent aujourd'hui à 600 millions

d'euros. Selon le ministère de l'Economie, la seule optionactuellement pour sauver l'entreprise est de déclencher uneprocédure d'insolvabilité, ce qui la protégerait de ses créditeursen lui donnant un délai suffisant pour se restructurer pour debon. De leur côté, les syndicats ne souhaitent pas voir la com-pagnie suivre l'exemple d'Hidroelectrica l'an dernier, craignantune vague massive de licenciements. Selon la presse roumai-ne, l'insolvabilité permettrait en effet à la direction d'Oltchimde "se débarrasser" de quelque 1500 employés. Outre lescoûts de production élevés et le personnel excédentaire, lesdéboires financiers d'Oltchim proviennent également du grandnombre d'intermédiaires chargés de la commercialisation deses produits. A l'automne dernier, quelques semaines avant lesélections législatives, son processus de privatisation avait tour-né au fiasco, orchestré notamment par Dan Diaconescu, leaderd'un parti politique populiste et propriétaire d'OTV, chaîne de

télévision racoleuse aujourd'hui suspendue par le CSA rou-main pour d'innombrables amendes impayées.

L'énergie et les transports en priorité

Pour le reste des entreprises d'Etat dans le secteur énergé-tique, le gouvernement devrait prochainement coter en bourseles paquets majoritaires d'actions des sociétés Transgaz etNuclearElectrica. Les autres devraient être privatisées d'ici lepremier trimestre de l'année 2014. Dans les transports, la com-pagnie nationale de fret ferroviaire CFR Marfa et la compagnienationale aérienne Tarom ont six mois pour être privatisées.C'est la priorité absolue du ministère des Transports, qui cher-che à vendre dans un premier temps un paquet minoritaire de20% des actions de Tarom. Le ministère a également annoncéqu'il se donnait un mois et demi pour confier la gestion de tou-tes ses compagnies à des managers privés.

François Gaillard(www.lepetitjournal.com/Bucarest)

En partant d'une situation écono-mique peu florissante, les raisonspour faire la demande de citoyennetéroumaine sont nombreuses pour lesMoldaves: obtenir un meilleur emploi,de meilleurs soins de santé ou avoirdes billets d'avion moins chers, maisaussi rendre visite à la famille et àdes amis, ou voyager dans l'UE.

Une fois la frontière passée, lapremière grande ville roumaine,Galati, est vue comme une ported'entrée dans l'Europe. Les habitantsde Cahul racontent qu'aller à Galatiest une sorte de loisir, un lieu où l'onse rend pour faire du shopping etaller au McDonald's.

La ville a une image très positive,qui détonne avec celle qu'ils se fontde la dernière ville moldave avant lafrontière, Giurgiulesti: "La situation en

Moldavie est désastreuse. Il y a deux

semaines, je suis allé à Galati (…) et

ce qui m'a frappé, c'est que les gens

sont plus calmes, la vie y est plus

monotone, il n'y a pas d'agitation, il y

a rien d'aussi nerveux qu'ici. Ils sont

plus civilisés, et c'est beaucoup plus

propre. Les gens vont se promener le

week-end sur la falaise, ils vont dans

des bars, calmement, ils vont au

parc. Dès que tu as repassé la fron-

tière à Giurgiulesti, tu as l'impression

que tu as atterri sur un tas de

déchets, sur de la poussière. Les

gens sont agités, nerveux, tous

fâchés…", Galati leur montre unepremière image de la Roumanie et del'Europe, et les représentations sontpositives, donnant parfois l'impressiond'un rêve pour certains des habitantsrencontrés.

(suite de la page 17)

Vibrant hommage du Président Basescu au groupe Dacia-Renault

Le chef de la CIA, le généralPetraeus, a été contraint à ladémission à la suite d'un scan-

dale sexuel. Autre temps, autres mœurs.Certains ne cèdent pas à ce genre de chan-tage. Richard Cohen, l'un des éditorialis-tes du Washington Post, dans un articleécrit en défense du malheureux général,où il l'enjoint de "retourner au travail",raconte l'histoire d'un agent françaisapproché par un agent soviétique molda-ve, en Roumanie. Ce dernier possédaitdes photos compromettantes, une partie

de jambes en l'air du premier avec uneautre femme que son épouse légitime.Mais, loin de s'effondrer, notre Françaiss'exclama "Ah mais je ne les ai pas celles-là !" et, ravi, demanda à son maître-chan-teur interloqué, à pouvoir garder lesphotos pour sa collection personnelle.

"C'est une histoire connue", se sou-vient un de ses anciens collègues duSdece (le Service de documentation exté-rieure et de contre-espionnage). "Il mesemble que c'était à Bucarest, dans lesannées 80".

Tel est pris…

Les Moldaves sont des Roumains nuancés

Dès lors, en comparant les caractéristiques attribuées aux Roumains et celles attri-buées aux Moldaves, on perçoit l'existence d'une identité moldave particulière, uneidentité collective bessarabe: "La Moldavie s'est développée dans un espace différent(de la Roumanie) et cela nous rend probablement différents; je ne sais pas pourquoi,mais les gens pensent que Moldave signifie quelque chose à part et que Roumain estcomplètement différent. Nous sommes tous Roumains, nous ne devrions pas utiliser cenom "Moldave", peut-être, Moldave-Roumain". Ainsi, certains Moldaves se décriventcomme "des Roumains nuancés, des Roumains de Bessarabie".

De cette manière, la frontière qui sépare la Moldavie de la Roumanie et de l'UnionEuropéenne apparaît aujourd'hui comme un facteur de démarcation tant physique quesymbolique. La persistance de cette séparation montre une influence considérable surla manière dont se définissent les habitants de la ville de Cahul, partagés entre une iden-tification avec leurs voisins roumains et une préservation de leur identité propre.

Julien Danero Iglesias et Cristina StanculescuChercheurs au CEVIPOL de l'Université libre de Bruxelles

"L'UE apporte aussi des mauvaises choses"

Economie

Après un pic en 2007, où le mar-ché immobilier avait enregistré513 000 transactions, rapportant

360 M€ de taxes aux caisses de l'Etat, pourune valeur moyenne de 700 € l'unité, celui-ci s'est effondré en 2009 (352 000 transac-tions soit -31 %, 118 millions d'euros detaxes, valeur moyenne de 335 €, soit-52 %), non seulement le nombre mais enco-re plus le prix des acquisitions chutant.

Ces trois dernières années, le nombredes transactions s'est redressée (+23 %),mais la valeur moyenne des taxes a reculéencore de 5 %. Au total, depuis le début dela crise, en 2008, le nombre de transactionsa baissé de 15 % et la valeur moyenne destaxes de 63 %.

Le marché immobilier (3,3 milliardsd'euros en 2003, 485 000 transactions) agrimpé à 18 milliards en 2007 pour retomberà 5,6 milliards, l'an passé. Le prix moyend'un bien chutant de 35 000 € à 12 700 €. Ilfaut noter que le leu s'était fortement appré-cié de 2004 à 2007 (+20 %) pour chuter de30 % ensuite, ce qui explique aussi les évo-lutions des prix avec la forte tendance desacheteurs à se diriger vers des acquisitionsmeilleures marché.

Lors de sa dernière rencontre avec les délégations du FMI, de la Commission européenne et de la Banque mondiale àBucarest, fin janvier, le Premier ministre Victor Ponta a négocié le prolongement du programme de restructuration desentreprises à capital d'Etat pour une durée de deux mois. Si la privatisation de la plupart des compagnies nationales resteune priorité pour le gouvernement, l'insolvabilité semble inéluctable pour certaines d'entre elles, comme Oltchim.

Immobilier en forte baisseet en dents de scie

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ActualitéLes NOUVELLES de ROUMANIE

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Les NOUVELLES de ROUMANIE Actualité

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BUCAREST

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TIMISOARA

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SUCEAVA

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PITESTI

l

TARGOVISTEl

VASLUIBACAU

CRAIOVA

TULCEA

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l

GIURGIU l

Economie

Le budget 2013 comprend de nouvelles mesures fiscales entrées en vigueurle 1er février. Il s'agit d'aider les entreprises à faible chiffre d'affaires, de fis-caliser l'agriculture subventionnée par l'UE et de surtaxer l'énergie. Le gou-

vernement espère ainsi apporter 2,9 milliards de lei (environ 660 millions d'euros) sup-plémentaires à ses ressources. D'une part, l'imposition des entreprises dont le chiffred'affaires est inférieur à 65 000 € est revue à la baisse. D'autre part, des modifications- à minima - touchent les agriculteurs qui ont obtenu des subventions sans déclarer deprofits. Les compagnies énergétiques sont quant à elles soumises à des taxes supplé-mentaires, sur les revenus générés par la libéralisation du prix du gaz et sur le mono-pole appliqué aux distributeurs d'électricité et de gaz. Une taxe spéciale est égalementinstaurée sur l'exploitation des ressources naturelles, telles que l'or, le pétrole, ou enco-

re le gaz."Pour ce qui est de l'impôt agri-

cole, (…) il sera applicable au plusgrand nombre possible, en tout casparmi ceux qui cultivent plus de2 hectares et ceux qui possèdent uncertain nombre de bêtes (plus de6 porcs, 3 vaches ou dix moutons,ndlr), mais il ne touchera pas lesagriculteurs qui ne travaillent quepour leur propre consommation", aexpliqué le Premier ministre Victor

Ponta. Toutes ces mesures ont été discutées à Bucarest avec les représentants du FMI,de la Commission européenne et de la Banque mondiale, lors de leur mission d'éva-luation de l'accord préventif conclu avec la Roumanie. Le FMI a cependant prévenudu fait que l'intention de surtaxer les compagnies énergétiques pourrait provoquer unebaisse des investissements dans le secteur de l'énergie.

Economie

Ravitailleurs de plates-formes off Shore construits à Galati

Le groupenéerlandais Damena lancé le premiernavire ravitailleurde plates-formes(PSV) de la série3300, le vendredi18 janvier, sur sonchantier de Galati,en Roumanie. Le World Diamond est destiné à la compagnienorvégienne offshore World Wide Supply (WWS), qui doitrecevoir au total six navires de ce type. Le PSV 3300 est unnavire supply conçu pour assurer le ravitaillement des plates-formes offshore par tous les temps. Il mesure 80,10 mètres delong et 16,20 mètres de large pour environ 3 300 tonnes deport en lourd. Il a un équipage de 16 personnes et peuttransporter six passagers. Comme les cinq autres navires com-mandés par WWS, le World Diamond est construit et équipé àGalati en collaboration avec Damen Shipyards Gorinchem,aux Pays-Bas, qui a fourni le design, l'ingénierie et les princi-paux équipements. Le PSV 3300 peut transporter 400 tonnesde différentes cargaisons (fuel, eau potable, saumure, ciment,baryte, boue de forage, tubes de forage…). Il est équipé d'unsystème de positionnement dynamique de classe 2 et possèdedes capacités de lutte contre l'incendie. Il est livré avec unéquipement de récupération des hydrocarbures.

Des ponts frontaliers à problèmes

L'état des routes conduisant aux postes frontières entre laRoumanie et la Bulgarie est une véritable honte pour la pre-mière, alors que sa voisine veille à ce qu'il soit à la hauteur deson statut de pays membre de l'UE. Ainsi en va-t-il pour lecélèbre pont de l'Amitié sur le Danube menant, côté roumain,

de Giurgiu - à seulement 65 km de la capitale - à Ruse, en face.Alors que la chaussée bulgare est entretenue, Sofia ayantinvesti 5000 000 euros dans la rénovation de l'ouvrage, la par-tie roumaine est défoncée, malgré l'attribution de fonds euro-péens, les automobilistes devant faire du slalom entre lestrous. Cela n'empêche pas les autorités roumaines de taxer de6 € les automobiles et de 37 € les camions empruntant lepont, alors que les Bulgares se contentent respectivement de2 € et 12 €. L'ouverture récente du deuxième point de passa-ge sur le Danube entre Calafat et Vidin, subventionné en gran-de partie par l'UE, avait été retardée de plusieurs mois, les tra-vaux ayant traîné côté roumain, suite à l'évaporation du finan-cement, alors qu'ils étaient achevés côté bulgare.

Etudes… secondaires

Près de la moitié des entrepreneurs roumains n'ont pas ter-miné le lycée, alors qu'un tiers de ces derniers renonceraient àse lancer dans une nouvelle affaire en cas d'un premier échec,selon une étude de la société de consultance Ernst&Young."Aux Etats-Unis, 95,1% des petits entrepreneurs ont suivi desétudes supérieures alors qu'en Roumanie seulement 53,3% desentrepreneurs ont terminé le lycée ou une faculté", est-il indi-qué dans ce rapport. Les auteurs estiment que l'entrepreneuriatn'a pas la côte chez les jeunes roumains qui sortent des bancsde l'université, ceux-ci préférant pour leur carrière un emploistable dans une grande compagnie.

Chute continue des investissements étrangers

Selon la Banque Nationale de Roumanie, les investisse-ments directs étrangers en Roumanie ont totalisé 1,099 milli-ard d'euros en 2012, niveau le plus bas depuis 9 ans. Soit 11%de moins qu'en 2011, année qui avait enregistré 1,8 milliardd'euros d'investissements étrangers. Depuis 2008, les sommesinvesties par les étrangers dans le pays diminuent tous les ans.

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La Commission européenne aannoncé un nombre de mesures envi-ronnementale à prendre par les étatsmembres de l'UE d'ici 2020, concer-nant l'ouverture obligatoire de stationsservices permettant aux automobilistespossédant des voitures fonctionnant àl'énergie électrique, à hydrogène, etc.,de faire le plein. La Roumanie devraen posséder 10 000… Pour l'instantelle n'en dispose que d'une seule, toutcomme la Bulgarie, la Grèce en ayant3 et la Hongrie 7. L'Allemagne, laFrance, l'Italie, l'Espagne, le Portugal,sont en avance, les trois premierspays en ayant déjà de plus de 1000.Toutefois, ils devront en posséder 100000 à l'échéance fixée, tout comme laGrande Bretagne.

Stations pourvoitures électriques

Agriculteurs et énergietaxés davantage

Dans le cadre du budget de l'Etat récemment voté,trois ministères ont reçu 11 millions d'euros afinde poursuivre la construction du canal Siret-

Baragan. Un ouvrage plus que nécessaire notamment pour l'a-griculture, qui permettrait d'irriguer l'une des régions les plussèches de Roumanie. Commencé sous Ceausescu, ce canal de190 kilomètres devait traverser trois départements de l'est dupays: Vrancea, Buzau, et Ialomita. Mais depuis 26 ans, les tra-vaux sont arrêtés, faute de moyens. Pour le moment, seul lepremier tronçon, d'une longueur de 50 kilomètres, est entamé,dont 5,7 kilomètres sont fonctionnels.

Quant au deuxième tronçon de 140 kilomètres, tout resteà faire. Les ministères des Transports, de l'Environnement etde l'Agriculture sont désormais impliqués dans la finalisationdu canal; quant à l'Administration nationale des eaux roumai-nes (ANAR), elle est chargée de surveiller sa construction. Lesecrétaire d'Etat au ministère de l'Agriculture, DanielBotanoiu, soutient que ce canal est important pour deux rai-sons : la protection de l'environnement et l'irrigation des terres.

Mais les 11 millions d'euros accordés pour sa finalisation

sont loin decouvrir lem o n t a n ttotal des tra-vaux: la finalisation du premier tronçon nécessite environ350 millions d'euros, et pour le deuxième tronçon, la sommes'élève à 2,25 milliards d'euros. Selon certains experts, lavariante la plus réaliste serait de créer un partenariat public-privé. Déjà, l'été dernier, deux groupes d'investisseurs chinoiset américain se sont montrés intéressés par la réalisation ducanal. Mais ils restent perplexes quant à la façon d'amortirleurs frais.

Selon Vasile Pintilie, le directeur de l'ANAR, "lesAméricains désirent obtenir un financement afin de réaliserune étude de faisabilité du complexe". En plus de permettrel'irrigation de 500 000 à 700 000 hectares de champs, ce quibénéficierait à tous les fermiers de la région, le tourisme seraitaussi l'un des buts u canal, une fois achevé. En effet, les auto-rités envisagent d'y construire cinq ports, de manière à ce queFocsani soit pratiquement relié par voie fluviale à la capitale.

Depuis 26 ans les travaux sont arrêtés

Une goutte d'eau dans le financement du canal Siret-Baragan

Les Roumains doivent payer leur gaz plus cher

En Roumanie, pays producteur de gaz qui bénéficied'une relative autonomie énergétique, le prix du gazaugmentera progressivement à partir de cette

année. Au moment où le pays s'engageait auprès de l'Unioneuropéenne à libéraliser les prix, il a également manqué le ren-dez-vous des négociations avec les principaux pays fournis-seurs de gaz, en particulier la Russie. Les Roumains devrontdonc payer leur gaz de plus en plus cher, une tendance qui vaà l'inverse de celle que l'on peut observer dans les pays voisins

L'Autorité nationale de régulation de l'énergie (ANRE) adécidé l'été dernier d'augmenter le prix du gaz pour les foyersde 8% et l'augmentera à nouveau de 2% en octobre prochain,jusqu'à la fin 2014. Sur la période 2015 - 2018, le tarif devraitencore augmenter de 12% par an. Au contraire, dans laHongrie voisine, pour la première fois depuis des années, legouvernement applique une réduction du prix du gaz de 10%

et vient d'annoncer qu'il prévoit de nouvelles réductions pro-chainement. C'est notamment grâce à leur position sur le tracédu futur gazoduc Southstream, que des pays comme laBulgarie et la Hongrie ont pu renégocier les tarifs de leursimportations de gaz en provenance de Russie.

Selon Dumitru Chisalita, ancien directeur général de lacompagnie publique Romgaz, la Roumanie devrait s'en pren-dre à elle-même plutôt que de jalouser les autres. "Le manqued'efficacité entraînant le gaspillage est l'une des principalesraisons pour lesquelles les Roumains devront payer le gazplus cher que d'autres Européens depuis la libéralisation destarifs", a-t-il expliqué dans Adevarul. La Roumanie ne dépenddu gaz russe que pour 30% de ses approvisionnements (vial'Ukraine), tandis que la Hongrie en dépend à 82%. Les 70%restants de la consommation roumaine sont fournis par sa pro-duction nationale.

A savoir

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SociétéLes NOUVELLES de ROUMANIE

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SociétéLes NOUVELLES de ROUMANIE

Un ATR 72-500 de Carpatair, compagnie basée à Timisoara et opérant enItalie pour Alitalia a fait une sortie de piste le 2 février à l'aéroport de RomeFiumicino. Le bilan est de seize blessés dont deux dans un état jugé sérieux.Alitalia a suspendu tous les vols de Carpatair sur Pise et Bologne.

L'ATR 72-500 de Carpatair qui portait les couleurs d'Alitalia, car assurant unvol pour son compte, était parti de Pise pour Rome-Fiumicino avec 46 pas-sagers et 4 membres d'équipage. Le pilote a raté son atterrissage, l'avion

touchant violemment le sol à deux reprises. Le train d'atterrissage n'a pas résisté, l'a-vion s'affaissant et terminant largement hors piste. Les passagers ont été traumatiséspar la violence des chocs et ont vu leur dernière heure arriver, ce qui a provoqué undébut de panique et des hurlements dans la carlingue.

Alitalia a suspendu "tous les vols opérés par Carpatair sur Pise et Bologne". Ellea aussi demandé à effacer sa livrée et son logo sur les deux ATR de Carpatair qu'elleutilise depuis un an dans le but de réduire ses coûts d'exploitation, et qui sont revenus

aujourd'hui tout blanc.Des doutes sur la fiabilité de

Carpatair, compagnie aérienne rou-maine, basée à Timisoara, sont aujour-d'hui mis en avant par les spécialistes.

Ainsi Ivan Biglietti, porte-parolede syndicats représentant des pilotesitaliens, a indiqué que son organisationavait fait part au début du mois auxautorités de sécurité aérienne de sesinquiétudes sur les standards de sécuri-té de la compagnie roumaine au vu desnombreuses avaries et problèmesqu'elle a rencontrés ces derniers mois,bien qu'elle dispose de toutes les certi-fications nécessaires.

Trois incidents étaient déjà survenus en janvier. En 2009, un de ses appareils s'é-tait posée en catastrophe à Timisoara, après avoir épuisé le contenu de ses réservoirs,son train d'atterrissage ne s'ouvrant pas et la piste étant recouverte de mousse par lespompiers. En février 2012, un autre avait effectué une sortie de piste à Craiova, aprèsavoir dérapé sur la neige. Le 5 janvier dernier, un de ses avions a dû revenir se poser àAncône (Italie) après un problème de pressurisation, obligeant les passagers à utiliserleur masque à oxygène. Bis repetita à Ancône, le 22 janvier, avec un atterrissage d'ur-gence. Heureusement, ses incidents n'avaient pas provoqué de victimes… mais les pas-sagers qui achètent un billet d'Alitalia qui et se retrouvent sur un appareil de Carpatair,apprécient de moins en moins.

Le PDG lui-même aux commandes de ses avions

Carpatair a été créée en 1999 par un homme d'affaires d'origine soviétique, NicolaePetrov. Lui-même ancien pilote, que l'on peut toujours voir aux commandes des sesavions, il avait déjà participé à la naissance de la compagnie moldave MoldavianAirlines. Carpatair, basée à l'aéroport Traian Vuia de Timisoara, est aujourd'hui ladeuxième compagnie roumaine, après Tarom.

Elle dispose de 12 avions, opère dans 7 pays (Roumanie, Moldavie, Italie, Turquie,Allemagne, Hongrie, Ukraine), dessert 9 villes roumaines (Bacau, Bucarest, Cluj-Napoca, Constanta, Craiova, Iasi, Sibiu, Suceava, Timisoara) et 14 autres destinations,effectuant plus de 200 vols par semaine. La compagnie accumule les pertes depuis plu-sieurs années et est endettée.

La compagnie aérienne nationaleroumaine Tarom a été contrainted'annuler un vol en partance deLondres, le pilote de l'appareil étantapparemment en état d'ébriété. Lesresponsables de l'aéroportd'Heathrow ont interdit ledécollage de l'Airbus 318mercredi matin 6 février àdestination du Bucarest.

"Nous avons supprimé le

vol parce que l'un des

membres de l'équipage n'é-

tait pas physiquement en

mesure de faire son travail.

Son incapacité médicale a

été repérée à Londres lors

d'un contrôle de routine", aindiqué Tarom deux joursplus tard.

"Le pilote est rentré chez

lui jeudi et nous l'avons suspendu

de toute activité jusqu'à conclusion

de l'enquête. Si les résultats mont-

rent qu'il a pris de l'alcool, nous le

licencierons immédiatement", a pré-cisé la compagnie, dont 20% ducapital devrait être ouvert au privécet été.

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Evénement Incidents à répétition:Carpatair… çà craint!

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ALBA IULIA

Une moyenne de 15 tremblements de terre par mois en Roumanie, attendue en 2013

Tarom contrainte d'annuler un vol

La traditionnelle bataille du dernier jour de l'année quioppose à Ruginoasa, près de Iasi, des jeunes masqués etarmés de bâtons, descendant des collines ou surgissant de

la vallée n'a pas eu lieu cette fois-ci. Après des débordements répétés,commencés en 2007 et faisant 6 blessés dont 3 hospitalisés - 20 par-ticipants étant verbalisés - les autorités ont décidé de mettre le holà.Par le passé, le groupe remportant cette confrontation avait la charged'organiser le bal de la commune et d'y inviter les filles non mariées.

La fête ayant dégénéré, devenant prétexte à règlements de comp-tes entre les jeunes, un peloton de gendarmerie les attendait de pied

ferme le 31 décembre dernier, à l'aube. Dès 6 heures du matin, les deux groupes rivaux, forts d'une quarantaine de membres cha-cun, convergeaient vers la place centrale du village où deux cents supporters les attendaient. Ils durent cependant ronger leursfreins, les forces de l'ordre les empêchant d'en découdre et d'utiliser leurs bâtons. De guerre lasse, limités aux danses traditionnel-les, les protagonistes sont retournés chez eux sur les coups de 9 heures.

Evénement

Selon le directeur de l'Institut de géophysique rou-main, le pays devrait connaître une moyenne de15 tremblements de terre par mois en 2013, nombre

pouvant varier de 10 à 20, à rapprocher de celui de 2012 (unemoyenne de 10 par mois dans le judet de Vrancea-Focsani, leplus exposé, aucun ne dépassant toutefois l'intensité de 5 surl'échelle de Richter). Pour le géophysicien, il ne faut pas s'alar-mer outre-mesure de cette activité sismique soutenue, la terrese soulageant ainsi de son trop plein d'énergie au lieu de laconcentrer dans le silence et de la libérer d'une manière sou-

daine et violente. Toutefois, il n'a pu préciser si un tel cataclys-me était prévisible, que ce soit en 2013 ou 2020.

A Bucarest, où le dernier grand tremblement de terre estsurvenu le 4 mars 1977 (épicentre Vrancea, magnitude 7,2),faisant 1570 morts et 11 000 blessés, sur les 2500 immeublesclassés actuellement à risque, 26 seulement ont été consolidés,111, abritant 3189 appartements, sont considérés comme étantdes dangers publics, non seulement pour leurs occupants maisaussi pour le voisinage. Ils sont signalés à la population par desmarques en forme de ronds rouges sur les façades.

Effectuant une fouille avec undétecteur de métaux, un passionnéd'archéologie de Craiova a trouvé unmagot de 1400 pièces d'argent,pesant 1,8 kg, datant du milieu duXVIème siècle, enfoui à une profon-deur de 50 cm. Ce trésor, dont lavaleur n'a pas été encore évaluée aété confié au musée d'Olténie. Il pro-vient sans-doute d'un vol effectuélors des campagnes militairesmenées à l'époque par Mihai Viteazul(Michel le Brave), dans la région.

Trésor

Un atterrissage plus que délicat à l'aéroport de Rome Fiumicino

La bataille de Ruginoasa n'a pas eu lieu

Deux tragédies similairesconcernant des Roumainssont survenues coup sur

coup dans le sud de la France, début jan-vier. Un couple d'une trentaine d'annéeset leur fillette de 5 ans ont été écrasés parun train TER près d'une gare marseillaise

alors qu'ils circulaient à pied sur la voieferrée. Quelques jours auparavant unchômeur de 39 ans, marchant aussi surles rails avait été victime du mêmedrame, près de Béziers, le conducteur dela locomotive, lancée à plus de 100 km/h,l'apercevant au dernier moment et n'ayant

pas le temps d'arrêter son convoi. Des enquêtes sont en cours pour

déterminer les circonstances de ces acci-dents. Il n'est pas exclu qu'ils soient liésau vol et au trafic de fils de cuivre quiaffectent les réseaux ferrés français etbelges.

Tragédies ferroviaires dans le sud de la France

L'euro député, milliardaire, ancien berger et patron du SteauaBucarest, Gigi Becali, a été condamné ainsi que ses gardes ducorps à trois ans de prison avec sursis, suite la séquestration de

ceux qui avaient volé sa limousine. Les cinq juges de la Haute Cour de cas-sation et de justice ont également appliqué une sanction complémentaire àl'égard de Gigi Becali concernant la perte de ses droits électoraux.Cependant, cette dernière est suspendue pour une période d'essai, ce qui luipermet de garder sa place de député. Le président du Parti national libéral(PNL), Crin Antonescu, a précisé que Becali avait donné sa démission duPNL, mais qu'il poursuivra son mandat en tant que député indépendant.Selon les procureurs, dans la nuit du 26 au 27 janvier 2009, George Becaliavait sommé ses gardes du corps d'immobiliser et de violenter les trois personnes qui avaient volé sa limousine. Ces dernièresavaient été transportées contre leur volonté dans un local, puis séquestrées et abusées physiquement pendant deux heures.

Condamnation avec sursis pour Gigi Becali

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Société

L'incertitude aura régnéjusqu'au bout, lors del'élection, le jeudi 20

décembre, du nouveau bureau dela Conférence des présidents d'u-niversités (CPU). Cette instance,qui rassemble les 80 universitésfrançaises et 23 grands établisse-ments publics, est un interlocu-teur incontournable des pouvoirs

publics. C'est Jean-Loup Salzmann, 58 ans, président de l'uni-versité Paris-XIII, (Seine-Saint-Denis), qui en devient donc lepatron avec Gérard Blanchard, de La Rochelle, et KhaledBouabdallah, de Saint-Etienne, ses vice-présidents, le triol'ayant finalement emporté, par 56 voix contre 42.

Petit fils d'immigrés russe et roumain, Jean-LoupSalzmann, médecin de formation, est né en 1955. Son père,Charles, ingénieur et chef d'entreprise, et sa mère, Monique,traductrice d'italien, russe et français, ont été très proches deFrançois Mitterrand. Après sa médecine à la Pitié-Salpêtrière,il a opté pour la biologie cellulaire avant de débuter commepraticien hospitalier puis professeur de médecine. Se définis-sant comme un intellectuel de centre-gauche, sa personnalitéest loin de faire l'unanimité: "ambitieux et manœuvrier" pourses opposants, "séducteur, brillant et habile", rectifient sesamis. "Jean-Loup Salzmann sait ce qu'il veut et agit pouratteindre ses objectifs", estime Emmanuel Zemmour, prési-dent de l'UNEF, un de ses proches concluant "C'est un hommeprofondément politique, jusqu'au bout des ongles: il est nédans la politique".

Les NOUVELLES de ROUMANIE

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SociétéLes NOUVELLES de ROUMANIE

Trois Roumains soupçonnés d'être impliqués dans le spectaculaire vol de septtoiles de maîtres du musée Kunsthal de Rotterdam en octobre 2012, dont desœuvres de Picasso, Matisse, Gauguin et de Monet, ont été arrêtés en

Roumanie, à Macin (Judet de Tulcea), dont ils sont originaires et où ils étaient retournés.Aucun tableau n'a été retrouvé pour l'instant.

Pour fêter ses vingt ans, le musée expo-sait les 150 tableaux de la collection de laFondation Triton, d'une valeur "de millionset de millions de dollars". Les œuvres déro-bées étaient la "Tête d'Arlequin" de PabloPicasso, "La Liseuse en Blanc et Jaune"d'Henri Matisse (notre photo), le "WaterlooBridge" et le "Charing Cross Bridge" deLondres signés Claude Monet et "Femmedevant une fenêtre ouverte, dite la fiancée"

de Paul Gauguin. Dans le butin se trouvaient également "Autoportrait" de Meyer deHaan et "Woman with Eyes Closed" (femme aux yeux clos) de Lucian Freud. La valeurdu vol est estimée à une somme comprise entre 100 et 200 millions d'euros. Il s'agit duvol le plus important commis aux Pays-Bas depuis 1991 lorsque 20 tableaux avaient étédérobés au musée Van Gogh d'Amsterdam.

Les voleurs, qui n'ont toujours pas avoué leur forfait, semblent ne pas avoir eu cons-cience de la valeur des œuvres subtilisées… parlant aux éventuels receleurs, qui ont recu-lé devant l'énormité du butin à recaser, d'un "Gohgen"… et d'un "Matiz" (minuscule voi-ture Dawoo équivalente à la Fiat Panda!), ne sachant pas non plus quel prix demander.Pris de panique en découvrant qu'ils allaient avoir toutes les polices du monde sur le dos,ils ont retiré les cadres des tableaux et caché les toiles dans des sacs plastiques de super-marchés, pendant un mois. Elles sont toujours introuvables. Ils se seraient même apprê-tés à les brûler pour effacer toute trace compromettante quand la police roumaine leur amis la main dessus. Les enquêteurs se sont montrés admiratifs devant le talent des cam-brioleurs et leur audace. Le trio aurait réussi à neutraliser le système de protection laserultra-sophistiqué du musée, mais, conçu principalement pour détecter toute intrusionvenue de l'extérieur, laissant deux minutes de grâce et les portes ouvertes s'il était com-mandé de l'intérieur. Repérant cette faille majeure, il n'en a pas fallu plus aux troisRoumains pour faire main basse en un clin d'œil sur tout ce qu'ils trouvaient, délaissantles statuettes qu'ils avaient repérées au cours de leurs repérages et étaient leur objectifprioritaire. La justice hollandaise a demandé leur extradition.

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Le vol du musée de Rotterdam élucidéFaits divers

R. VÂLCEAl

Le président des universités françaises est d'origine roumaine

La mairie de Bucarest a l'inten-tion de construire un nouveau pas-sage piéton sous Piata Romana,afin notamment de réduire le nom-bre de passages piétons en surfa-ce traversant l'imposant boulevardMagheru, et donc de fluidifier letrafic automobile. Il sera composéd'un espace commercial et serarelié à la station de métro. Parailleurs, sera aménagé dans lazone de la place un espace vert de528 m2, avec une quarantained'arbres et un éclairage nocturne.Ce projet, lancé depuis décembre2006, était en débat public à lamairie de Bucarest jusqu'au21 février.

Les malades de cancer rou-mains ont lancé un cri d'alar-me lors de la journée interna-

tionale de lutte contre cette maladie,dénonçant la situation inhumaine qui lesprive d'accès aux thérapies récentes, laliste des médicaments remboursés par lasécurité sociale n'ayant pas été actualiséedepuis près de cinq ans, privant ainsi lesmalades d'un accès aux thérapies les plusrécentes et performantes.

A titre de comparaison, il suffit de 88jours en Autriche pour qu'un nouveaumédicament approuvé entre sur la listedes médicaments remboursés, ont indi-qué les associations de malades.

Il existe aujourd'hui une grande dif-férence entre les traitements disponiblespour les patients dans d'autres pays euro-péens et ceux accessibles aux patientsroumains, a souligné le président de la

Fédération des associations des maladesde cancer, Cezar Irimia, qui a lancé un crid’alarme, lors d'une conférence intitulée“Nous vivons en Europe mais nous noustraitons en Roumanie”.

Dans un pays où le salaire mensuelmoyen est de 350 euros, les Roumainssont traités avec de vieux médicamentsalors qu'il existe des thérapies plus effica-ces et moins dommageables pour l'orga-nisme. Grâce à des campagnes humani-taires, les patients les plus chanceux arri-vent à payer eux-mêmes des traitementsde nouvelle génération mais l'Etat devraitassurer un accès pour tous, a réclamé laFédération.

Le professeur universitaire AdelaRogojinaru a témoigné des énormes diffi-cultés rencontrées par les malades decancer en Roumanie. Sans l'aide de dona-teurs privés et de collègues, elle n'aurait

jamais pu bénéficier du traitement le plusadéquat contre son mélanome métasta-tique (cancer de la peau), qui coûte400 euros par jour.

“Je suis un cas heureux et rare. Vousvous rendez compte ce que cela auraitreprésenté s'il fallait attendre encore cinqans pour avoir accès au traitement dontj'ai besoin? Cela aurait été une condam-nation à mort”, a-t-elle expliqué.

“J'ai eu la chance inespérée de rece-voir par une collecte publique de l'argentpour six mois de traitement. Est-ce unmoyen de financement adéquat?Combien de collectes peut-on faire alorsque le nombre de malades de cancer aug-mente de manière alarmante?”, a-t-elleinsisté en plaidant pour que l'Etat s'enga-ge. Environ 75 000 Roumains sont dia-gnostiqués chaque année comme souf-frant d'un cancer.

Selon une étude de la FondationTineri pentru Tineri (Les Jeunespour les Jeunes), 62 % des jeunesRoumains ont commencé leur viesexuelle avant 18 ans. L'âgemoyen pour les filles est de 17 ans.Les deux tiers d'entre eux se sontprotégés lors du premier rapport.

Le nombre d'avortements desfilles de 15 à 19 ans était de 9731en 2010 sur un total de 101 271,chiffre sans commune mesure aveccelui enregistré en 1990 qui voisi-nait le million.

733 jeunes filles de moins de15 ans ont eu un enfant en 2010,21 225 entre 15 et 19 ans. 1500enfants ont été abandonnés cettemême année. Pauvreté, famillesdésunies, manque d'informations etabus sexuels sont les principalescauses de cet état de fait.

Vie sexuelle des jeunes

Selon une étude de marché réali-sée sur les personnes de plus de15 ans, 48,7% des Roumains ont

utilisé Internet en 2012, soit une hausse de8,4% par rapport à 2010. Hausse encoreplus significative en milieu rural (+11%).L'étude montre que 33% de la populationrurale s'est connectée à Internet l'an der-nier, contre 61% de la population urbaine,le plus fort taux de connections étant àBucarest (68%). L'augmentation des accèsà Internet est donc moins spectaculaire en

ville, avec 6,7% de plus qu'en 2010. Laproportion globale chez les femmes adépassé 47%, tandis que chez les hommes,elle a presque atteint 50%. Environ 83%des 15 - 24 ans utilisent Internet, contre71% des 25 - 34 ans, et 62% des 35 - 44ans. L'étude note toutefois que la plus fortehausse concerne la tranche d'âge 35 - 44ans (plus de 15% de plus qu'en 2010).Chez les 45 - 54 ans, l'augmentation dunombre des personnes connectées est luiaussi significatif, à hauteur de +8%.

Après les Roumains des villes les Roumains des "champs" se mettent à Internet

Enseignement

Cri de détresse des malades du cancer pour l'accès aux traitements

Deux minutes pour faire main basse surdes Matisse, Gauguin, Picasso, Monnet

Elève du Lycée Gheorghe Sincai de Cluj, Iulia Miron, 17 ans, a été élue présiden-te du Conseil national des élèves de Roumanie, lors de l'assemblée de son orga-nisation qui s'est tenue pendant trois jours, début février, à Galati, constituée des

représentants de chaque judet et qui fonctionne comme une structure consultative auprèsdu ministère de l'Education nationale. La jeune fille a obtenu 16 voix sur 45 votants, devan-çant ses deux concurrents, Calin Cocis (Sibiu) et Teodor Blidaru (RâmnicuVâlcea). Elle adéclaré vouloir mener à bien les discussions avec le ministère pour faire approuver un sta-tut de l'élève, préciser la mise en place du programme "Une école autrement" et faire adhé-rer son organisation à l'Union Européenne des Conseils d'élèves (OBESSU). "Aristote estmort, Platon est mort, moi-même je ne me sens pas très bien… alors pour être sûr de notredestin européen, il faut frapper à sa porte" a plaisanté la jeune présidente en conclusion.

Une lycéenne européenne

Santé

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SociétéLes NOUVELLES de ROUMANIE

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Les NOUVELLES de ROUMANIE Société

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L'histoire de l'homéopathie en Roumanie est intimement liée aux originesmême de cette pratique médicale, son père fondateur, l'Allemand Hahnemann,ayant séjourné à Sibiu à ses débuts, au 18ème siècle. Cette longue histoire ne s'estpas déroulée sans heurts, mais a connu sous Ceausescu un rebondissementimprévu.

Nous pouvons considérer que l'homéopathie a fait ses début en Roumaniedès 1777, lorsque le docteur Hahnemann est venu à Sibiu", relate IleanaRîndasu, secrétaire de la Société roumaine d'homéopathie, "et y vécut un

an et neuf mois, en tant que médecin et bibliothécaire du Baron von Brukenthal", gou-verneur de la Transylvanie. Hahnemann aurait alors trouvé matière à nourrir saréflexion, avant de publier son Organon, le livre de référence qui donna officiellementnaissance à l'homéopathie. Hahnemann fit par la suite un émule de renom, le docteurJohann Martin Honigberger, médecin saxon de Brasov, qui partit en Orient en 1835répandre sa bonne parole. Mircea Eliade en a fait le personnage d'un de ses romansécrit en 1940, Le secret du docteur Honigberger, traduit en français en 2012 (éditionsMercure de France).

Dans un pays rural où le soin par les plantes s'est toujours pratiqué, l'homéopathien'a guère eu de mal à se développer. Cette pratique médicale étant indissociable de laprescription de remèdes, les médecins qui la préconisaient étaient à l'origine d'embléepharmaciens. On en trouve des traces aussi bien à Sibiu qu'à Iasi, Brasov, Cluj ouBucarest au début du 19ème siècle. "La Vulturul negru" (A l'Aigle noir), "La IngeruI"(A l'Ange), "La Ursul" (A l'Ours), tels sont les noms de célèbres pharmacies qui, trèstôt, eurent une section d'homéopathie, ou s'y consacrèrent entièrement.

Incompatible avec le matérialisme marxiste-léniniste

Cette thérapie était donc tolérée, mais à condition qu'elle fût dispensée dans descabinets privés. Son ampleur devint telle qu'en 1947, une Société roumaine d'homéo-pathie a été créée. Pour être aussitôt interdite par le régime communiste d'obédiencesoviétique qui condamnait fermement cette "idéologie" incompatible avec le matéria-lisme marxiste-léniniste.

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En quantité modérée et de manièrerégulière - soit un dé à coudre de 3 clpar jour pour les femmes et de 5 clpour les hommes - la tsuica de prunepeut avoir des effets bienfaisants pourla santé. Elle serait efficace dans lecas de maladies du cœur, de l'esto-mac et de la bile, selon des cher-cheurs américains qui relèvent qu'ellecontient en quantité huit fois plusgrande l'enzyme utilisé habituellementpour les combattre, extraite du cactusKarroll viridis eroe et que l'on retrouvedans une centaine de médicamentsnaturistes… Avec un autre avantage:son prix est beaucoup plus abordable(une cure de cactus de 45 jours coûte140 dollars). De leur côté, des cher-cheurs allemands ont constaté qu'elleaccélère de 120 % la vitesse de repro-duction des globules rouges, tout enayant un contenu riche en fer… unecure de tsuica étant toutefois inopé-rante pour prévenir les risques d'ané-mie. Cette eau de vie permettrait éga-lement de réguler les fonctions hépa-tiques grâce à son contenu en vitami-nes A, B, C, D1, D2, non dégradablesthermiquement et facilement assimila-bles. Pour un résultat maximal, il estrecommandé de la consommer unquart d'heure avant le déjeuner (etpas le matin !) pour faciliter l'absorp-tion des aliments, en s'abstenant detoute autre boisson alcoolisée.

Pas question donc de suivrel'exemple de Bula auquel le médecinavait vivement conseillé de mangerune pomme chaque fois qu'il avaitenvie d'un petit verre, s'il voulait enco-re profiter de la vie… et qui s'étaitexclamé: "Mais Docteur, quarante

pommes par jour… ce n'est pas dan-

gereux pour la santé ?".

Tsuica: des vertusmédicales cachées

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Dans un pays rural, le soin par Santé

L'homéopathie a trouvé

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les plantes s'est toujours pratiqué

ses racines en RoumanieLes pharmacies ont été nationalisées, les cabinets médi-

caux privés fermés, et l'homéopathie roumaine est entrée dansl'ombre. Ce qui n'a pas empêché des médecins les plus allopa-thiques (prônant la médecine classique) de s'y intéresser. Ledocteur Geo Savulescu raconte: "j'ai fait des études de méde-cine classique. Mais en 1950, j'avais entendu parler d'homéo-pathie par un de mes amis. Je souffrais de calcul urinaireimpossible à soigner. " Dans son cabinet de Bucarest qu'aucu-ne enseigne n'indique, au milieu d'un désordre surréaliste, l'oc-togénaire sourit, "je dois reconnaître que ses prescriptions nem'ont pas guéri, mais cela m'a quand même donné envie dem'y intéresser. J'ai suivi par la suite une formation à l'homéo-pathie, et j'ai peu à peu éludé la médecine allopathique pourm'y consacrer entièrement. Cela fait donc plus de trente ansque je donne des consultations en utilisant l'homéopathie".

Retour en grâce… faute de sous

De fait, l'interdiction s'assouplit à la fin des années soixan-te. Mais le véritable tournant a lieu en 1980. Le docteur IoanTeleianu, président de la Société roumaine d'homéopathie de1992 jusqu'à sa mort en 2007, a donné sa version de l'histoire,lors de la 16ème Conférence nationale d'homéopathie qui eutlieu à Bucarest, début octobre 2000: "La Roumanie commen-

çait à avoir de gra-ves problèmes éco-nomiques et so-ciaux(...) l'Etat n'avaitplus de devises pourimporter des appa-reils modernes et desmédicaments, oupour acheter lesmatières premièresné-cessaires à l'in-dustrie pharmaceutique". Sollicité par un ministre de la Santéacculé, cet ancien expert à l'Organisation mondiale de la santéet directeur du Centre national de perfectionnement des méde-cins et des pharmaciens, profitera de l'occasion pour promou-voir l'homéopathie comme alternative.

La phytothérapie, la balnéothérapie ou l'acupuncturebénéficieront de même d'une reconnaissance officielle inéditeà cette époque, au plus haut niveau de l'Etat. "Cela a été unmoment historique pour l'homéopathie roumaine, et nous pou-vons dire que la Roumanie a de ce fait été précurseur dans cedomaine par rapport aux autres pays socialistes de la région",reconnaît Ileana Rindasu.

Béatrice Aguettant (Regard)

Le centre-ville de Sibiu pullulede musées, constitués à partirdes collections éclectiques du

Baron von Brukenthal. Parmi eux se trou-ve le Musée de la pharmacie, au bord dela pittoresque Piata Mica. Il occupe lesmurs de l'une des toutes premières phar-macies du pays, "la Ursul negru" ("Al'Ours noir"), fondée en 1600. La salleprincipale reproduit à l'identique une offi-cine du début du 20ème siècle, avec sescomptoirs en bois poli, ses rayonnagesremplis de bocaux en verre et en porcelai-ne, ses délicates balances et leur série depoids parfaitement alignés, ses innombra-bles tiroirs étiquetés en calligraphiegothique.

Une seconde salle représente le labo-

ratoire où les remèdes sont préparés,pilés, conditionnés. Pressoirs, distilla-teurs, alambiques de toutes formes, filtresen céramique, dégradé de casseroles encuivre accrochées au mur: une moultituded'objets s'y entasse, dont le plus ancienest un mortier en bronze datant de 1597.La dernière pièce est consacrée à l'ho-méopathie, et présente d'ancestrauxminuscules flacons encore remplis degranulés, disposés comme des bijouxdans des écrins sur mesure.

Ce tout petit musée bien achalandérevendique 6600 pièces au total, dontplus de 2900 dans sa collection consacréeà l'homéopathie - une partie seulementserait exposée. A croire que la moindregélule a été inventoriée...

La très grande collection du tout petit musée de la pharmacie

Vous êtes béni des dieux (...)Votre livre est un monument,il marquera le destin de la

médecine et de l'homéopathie. (...) Vousnous avez tracé le chemin pour une cen-taine d'années de travail"… Ces motsdithyrambiques, le professeur DumitruDobrescu (photo) les relit avec émotionsans doute pour la millième fois.

Ils lui ont été écrits par ChristianBoiron, directeur général des laboratoiresdu même nom, suite à la parution de son

livre Pharmacologie homéopathiquegénérale, en 2007.

Agé de 85 ans, ce professeur alerte,crinière blanche en auréole autour d'unvisage net, porte encore beau, et surtout,a toujours la passion pour ce à quoi il aconsacré sa vie: le médicament.

A l'origine pharmacien, il est devenuensuite médecin, et a occupé de hautesfonctions à l'Institut d'Etat de contrôledes médicaments et de recherche phar-maceutique, à la Commission du médica-ment du ministère de la Santé, au Réseaunational de pharmacovigilance dont il aété l'un des instigateurs, etc., sans jamaiscesser de consulter.

Observant les effets des médica-ments allopathiques à la fois d'un pointde vue global et pratique, il en perçoit leslimites, et se rappelle avoir lu et traduitlors de ses études dans les années 50, untraité d'homéopathie français. II s'yreplonge alors de nouveau, et se lance,pour en devenir l'un de ses plus ferventsdéfenseurs en Roumanie, jusqu'à intro-

duire en 1990 son enseignement à laFaculté de pharmacie.

"Je crois pouvoir dire, en toutemodestie, que j'ai fait des découvertesaussi cruciales pour l'histoire de l'ho-méopathie que celle d'Hahnemann". Desexpertises pointues et subtiles que le néo-phyte aura peine à comprendre, et quisemblent le laisser amer. Malgré de mul-tiples reconnaissances honorifiques -doyen de la Faculté de pharmacie deBucarest, membre de l'Académie dessciences médicales, de l 'Académie rou-maine, décoré de l'ordre du mérite"L'étoile de la Roumanie" en 2002 - leprofesseur Dobrescu a le sentiment den'être toujours pas entendu. "Cela fait desannées que je répète à tous les colloquesauxquels je suis invité la même chose,mais rien ne change. (...) Le but ultimeest que l'homéopathie soit un jour placéesur le même plan que l'allopathie. Maisce jour viendra, tôt ou tard"… Un espoirque renforcent les précieux mots deChristian Boiron. B.A.

L'hommage des laboratoires Boiron au professeur Dobrescu

"Vous nous avez tracé le chemin pour cent ans"

Le docteur Johann Martin Honigberger

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Société

Le projet grandiose de l'Église orthodoxe d'érigerune immense cathédrale à Bucarest choque biendes Roumains en période de vaches maigres, dès

lors qu'il s'appuie en grande partie sur l'argent de l'État.L'Église orthodoxe roumaine ne connaît pas la crise. Malgré lacure d'austérité imposéeau pays, elle rêve d'unecathédrale à nulle autrepareille et compte sur lesoutien financier de l'Étatpour le réaliser. Lancé audébut des années 2000par le patriarche Teoctist,décédé en 2007, le projetde cathédrale du Salut dela nation peine, à vraidire, à se concrétiser. Lestravaux n'ont pas dépasséle stade des fondations.Un énorme trou sur un terrain de onze hectares au cœur deBucarest, entre le pharaonique palais de Ceausescu, devenusiège du parlement, et un palace cinq étoiles. Haute de près de120 mètres, la future cathédrale, qui ambitionne d'accueillir5000 fidèles, devrait être complétée par une bibliothèque, unhôtel pour les pèlerins et la résidence du chef de l'Église ortho-doxe roumaine, le patriarche Daniel. Son coût, estimé audépart par l'Église à 400 millions d'euros; avant d'être revu à labaisse (110 millions), s'élèverait en réalité à près d'un milliardd'euros selon diverses ONG qui s'opposent au projet.

Dix fois plus de fonds publics que privés

En ces temps de vaches maigres, la cathédrale du Salut dela nation fait forcément jaser. "Ce qui nous choque n'est pas ceprojet, aussi exorbitant soit-il, mais le fait qu'il soit financé enmajeure partie par des fonds publics" explique Toma Patrascu,vice-président de l'Association laïque et humaniste deRoumanie. Un point de vue largement partagé. Un sondageréalisé en 2011 par la Fondation Soros révèle en effet que si61% des Roumains sont favorables à la construction d'unenouvelle cathédrale, 58% se disent hostiles à une participationfinancière de l'État.

En 2010, pour calmer les esprits, l'Église s'était engagée àsouscrire un prêt bancaire. Promesse qui a fait long feu. Alors,qui va payer? Le patriarcat se montre peu loquace sur ses sour-ces de financement. Et pour cause. Selon Toma Patrascu, lepatriarcat n'aurait collecté jusqu'ici qu'à peine 2 millions d'eu-ros de fonds privés, mais dix fois plus de fonds publics. Sanscompter le terrain lui-même, offert par l'État. Un pactoleexceptionnel qui faisait saliver les promoteurs immobiliers.

En Roumanie, les relations entre l'Église orthodoxe (89%de la population) et l'État ont toujours été ambiguës.Persécutée sous le communisme, l'Église orthodoxe ou dumoins ses dignitaires n'en ont pas moins collaboré étroitement

avec l'ancien régime. Depuis la chute du communisme, l'équi-voque n'a pas été levée.

Les activités économiques de l'Église sont exemptéesd'impôts et c'est l'État qui, bien que laïc selon la Constitution,finance les salaires des prêtres et des professeurs d'éducation

religieuse. En Roumaniecomme en Pologne, l'É-glise est un marqueuridentitaire et bien qu'ul-traconservatrice sur lesquestions de société (ellevient encore de souleverune violente polémiquepour avoir refusé d'ac-corder des obsèques reli-gieuses au cinéasteSergiu Nicolaescu parcequ'il s'est fait incinérer),elle a recouvré une

influence à laquelle la classe politique se montre sensible.Pour obtenir son soutien en période électorale, les partis poli-tiques, toutes couleurs confondues, rivalisent de générosité.

Des partis très généreux en période électorale

En novembre dernier, le patriarche Daniel a ainsi exprimésa gratitude aussi bien à l'ancien chef du gouvernement EmilBoc qu'à Victor Ponta, l'actuel premier ministre, pour leur sou-tien au projet de cathédrale. En juin 2011, à l'approche desélections municipales et alors que la récession battait sonplein, le maire de Bucarest, Sorin Oprescu, avait annoncé undon de deux millions d'euros. Royal cadeau qui faisait suite àcelui (du même montant) octroyé quelques mois plus tôt par legouvernement de l'époque. Ces prodigalités avaient suscitéune levée de boucliers au sein de la société civile. L'Église n'apas renoncé pour autant. La mairie du 5ème arrondissement deBucarest vient à son tour d'être mise à contribution et endécembre, le patriarcat a adressé des lettres aux conseillersgénéraux des quarante judets (préfectures) du pays pour récol-ter de nouveaux subsides. Arielle Thedrel (Le Figaro)

Les NOUVELLES de ROUMANIE

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Une décision irrévocable de la Cour d'appel de Ploiesti oblige les autorités loca-les à prendre en charge la démolition de la tour de 75 mètres de haut construite àmoins de dix mètres de la cathédrale catholique Saint Joseph au centre de Bucarest.

C'est sans doute la fin d'un marathon judiciaire qui aura tenu en haleine lescatholiques de Roumanie pendant plus de six ans. Le 23 janvier dernier, laCour d'appel de Ploiesti a rendu une décision irrévocable qui oblige les auto-

rités locales à démonter l'immense tour de 75 mètres de haut construite à moins de dixmètres de la cathédrale Saint Joseph de Bucarest. "La mairie avait l'obligation de détrui-re le bâtiment depuis que la construction de celui-ci avait été déclarée illégale par unedécision de la Cour d'appel de Suceava en 2010, mais comme rien n'a été fait, nousavons entamé ce nouveau procès, a expliqué l'avocat de l'archevêché, Ofelia Barsan.Désormais, le maire de Bucarest a trente jours pour mettre en application cette décisionde justice". La nouvelle a été reçue avec joie par l'archevêché. "L'impact juridique decette décision est extrêmement important car à partir de maintenant, il devient impossi-ble de rendre le bâtiment légal", a affirmé Mgr Ioan Robu dans un communiqué. Lacompagnie Millennium Building Development, promoteur du projet immobilier, ne s'a-voue pas vaincue pour autant. "Cette décision ne produira aucun effet puisque le pro-priétaire du bâtiment, Cathedral Plaza, n'a pas pris part au procès (…) et n'a pas pu sedéfendre", a indiqué de son côté l'avocat du promoteur,Robert Rosu, dans un communiqué.

Une démolition encore lointaine

"Techniquement parlant, la démolition est tout àfait possible. Il s'agit d'une structure métallique avecdes planchers de béton qui peut être démontée par unesociété spécialisée, assure l'architecte Dan Marin, quiconnaît bien le dossier. Mais le problème du coût estplus délicat car il est question de plusieurs millionsd'euros". Une question se pose donc: qui va payer? Lemaire de Bucarest, Sorin Oprescu, a promis qu'ilrespecterait la loi. Dans une émission de télévision finjanvier, il a toutefois dit vouloir attendre la motivationde la Cour. "Ce qui m'intéresse maintenant est de savoiroù je récupérerai l'argent pour cette démolition, car il s'agira de fonds publics", a-t-ilprécisé. Le chemin reste donc long jusqu'à la disparition définitive de la tour. Mais cettenouvelle victoire de l'archevêché est un soulagement pour les dirigeants de l'Eglisecatholique de Roumanie. "Après plus d'une quinzaine de procès depuis 2006, cette déci-sion prouve que les choses commencent à fonctionner normalement en Roumanie, notele porte-parole de l'archevêché, Francisc Dobos. Durant toutes ces années, la justice aété très influençable et nous avons failli perdre à plusieurs reprises".

Jonas Mercier (www.lepetitjournal.com/Bucarest)

La capacité des parcs solairesconstruits en Roumanie pourraitdépasser celle de la seule centralenucléaire du pays en 2016 si lerythme actuel de développementdu photovoltaïque est maintenu,selon des estimations officielles."Nous comptons sur une capacité

installée de 50 à 100 MW (méga-

watts) fin 2012, de 500 à 1000 MW

fin 2013 et de 1500 MW en 2016",a déclaré un responsable del'Autorité nationale de réglementa-tion dans l'énergie (ANRE), ZoltanNagy.

Les deux réacteurs de la centra-le nucléaire de Cernavoda (sud-est) produisent actuellement envi-ron 1400 MW, soit 18% desbesoins d'électricité du pays. LaRoumanie compte construire deuxréacteurs supplémentaires mais leprojet bute sur la difficulté de trou-ver des compagnies prêtes à yinvestir environ 4 milliards d'euros.

Après avoir attiré de nombreuxinvestisseurs dans l'éolien, laRoumanie a vu fleurir ces derniersmois les projets d'investissementdans l'énergie solaire. Le conglo-mérat sud-coréen Samsung prévoitainsi de construire deux parcssolaires d'une capacité de 45mégawatts dans le département deGiurgiu (sud). Selon un rapportréalisé par Ernst&Young en mai2012 et cité par le site spécialisédans l'énergie photovoltaïque PVRomania, la Roumanie occupe la6ème position en Europe en ter-mes d'attractivité pour l'investisse-ment dans l'énergie solaire.

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Religion La tour menaçant

Davantage d'énergie solaire que nucléaire en 2016

la cathédrale catholique Saint Josephde Bucarest devra être détruite

Son coût s'élèverait en réalité à près d'un milliard d'euros

Le Bon Dieu ne fait vraiment plus peur, si l'on encroit le geste de quelques villageois du village mol-dave de Herghesti, dans le judet de Vaslui qui ont

incendié la maison paroissiale du prêtre orthodoxe par ven-geance pour avoir appelé à voter en faveur du maire sortantlors des élections municipales de juin dernier. Dans un premiertemps, la police avait mis le sinistre sur le compte d'un court-circuit, puis se rappelant que le pope avait reçu des menacestéléphoniques à l'époque, elle a repris son enquête, remontantjusqu'aux coupables.

Deux frères, chargés par la communauté penticostale de leur commune, dansle sud du pays, d'acheter un terrain où a été construite ensuite son église sesont retrouvés les menottes aux poignet pour avoir trompé le notaire lors de

la signature de l'acte de vente, s'appropriant le bien grâce à un faux. Les fidèles, furieuxde ne pouvoir aller et venir comme ils l'entendaient dans leur lieu de culte avaient décou-vert le pot aux roses et averti a police.

Des fidèles qui ne s'en laissent pas compter

Religion

La cathédrale qui sème la discorde à Bucarest

Le Bon Dieu ne doit pas se mêler des affaires terrestres

Le patriarche Daniel et la hiérarchie de l'Eglise orthodoxe roumaine à l'endroit où doit être édifiée la future cathédrale, près du palais de Ceausescu.

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SociétéLes NOUVELLES de ROUMANIE

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SociétéLes NOUVELLES de ROUMANIE

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BUCAREST

ORADEA

BAIAMARE

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TIMISOARA

ARADSIBIU

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IASI

BRASOV

CONSTANTACRAIOVA

TARGUMURES

GALATI

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l BUZAU

SUCEAVA

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PITESTI

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“Je ne gagne que 400 euros par mois, mais je ne m'habille qu'avec des vête-ments de marque"… Nombre de jeunes Roumaines ne sont pas si différentes descomportements des Occidentales, à la nuance près que leurs salaires sont, avecceux des Bulgares, et de très loin, les plus bas de l'Union Européenne.

Anca, 32 ans, travaille dans une multinationale de Bucarest où elle gagne420 €. Elle vient de s'offrir un blouson superbe de 170 €, représentant40 % de son salaire. "Je me sens bien dans ce vêtement. Je me sens plus

forte, j'ai davantage confiance en moi et j'ai l'impression que mes collègues me consi-dèrent mieux", se justifie-t-elle en précisant qu'elle n'a ni e-phone, ni smart-phone.

Ionut, 22 ans, au chômage, n'en possède pas moins un e-phone 5 de dernière géné-ration, dont il n'a pourtant pas l'utilité. "Je suis fan d'Apple et ne pourrais pas vivresans son dernier modèle. Je sais que çà coûte cher mais mes copains pensent commemoi t'es nul si tu n'a pas le meilleur produit sur ce segment quand il entre sur le mar-

ché roumain". Le jeune homme oubliede préciser que l'acquisition a coûté unmois de salaire à chacun de ses parents.A ses yeux, les gadgets high-tech confè-rent un prestige social inégalable. Lesjeunes Roumains changent d'ailleursplus vite de téléphones portables et d'or-dinateurs que les Américains ou lesOccidentaux en général et sont devenusune cible privilégiée des fabricants.

Pour le sociologue Alfred Bulai,l'explication est simple: "Les Roumains

sont victimes du marketing agressif car, soumis aux restrictions pendant des décen-nies, ils sont des proies faciles de la société de consommation qui vient d'exploser. Ilsn'en ont aucune expérience et aucune défense".

Les jeunes Roumains pensent que la réussite c'est se montrer vis-à-vis des autres.Ainsi, on trouve des gamins de 10-12 ans faisant les fier à bras devant leur copains del'école en arborant leur portable de dernière génération… même si comme beaucoupd'adultes, ils ne savent utiliser que 10 % de leurs fonctions et ne peuvent s'offrir quequelques minutes mensuelles de conversation. On cite le cas de parents qui s'achètentun ordinateur haut de gamme, au vu de tous, de leurs voisins, brillent devant le ven-deur, épatent leur collègues de bureau… et continent à taper à la machine à écrire!

Il est de bon ton de se faire voir dans les endroits chics

On est dans la civilisation du bling-bling… autrefois, on parlait "d'épate". Elletouche principalement le milieu urbain en Roumanie: 31% des citadins avaient l'inten-tion de s'acheter des objets de luxe en 2012, les vêtements griffés (60 %) et les par-fums (46 %) venant en tête, suivis des alcools et des produits alimentaires (26 %).

A Bucarest, il est de bon ton de se faire voir dans les endroits chics… et chers.Iulia, 21 ans, étudiante, préfère se priver toute l'année pour se permettre un week-endà Mamaia ou une escapade à Poiana Brasov qu'elle racontera à ses amies. Pour lemême prix, elle passerait 15 jours dans une station moins huppée de la Mer Noire.

Certes, il existe des jeunes Roumains qui n'ont que faire de ce souci de paraître,s'habillent n'importe comment... un peu trop parfois, passent leurs vacances en cam-pant sur la plage naturiste de Vama Veche, randonnent dans les monts Fagaras ou par-tent à l'aventure dans le monde, y travaillant l'été pour s'offrir un bout de sa découver-te. Ils ressemblent bigrement aux jeunes occidentaux les plus ouverts, ne cherchentpas à les singer et, avec eux, forment la vraie élite de demain.

Trois associations roumaines ontvivement condamné l'appel d'un grou-puscule extrémiste du Banat enfaveur de la stérilisation des femmesRom. Le groupe nationaliste et extré-miste NAT88 de Timisoara qui reven-dique quelques dizaines de membres,a annoncé sur son site internet qu'il"offrira une récompense de 300 lei

(68 euros) à chaque femme tsigane

de la région qui présente un acte

médical prouvant qu'elle s'est soumise

volontairement à une opération de

stérilisation en 2013". Le groupe justi-fie cette action en accusant des mem-bres de la communauté rom "d'at-

taques violentes" et soutient que cesstérilisations seraient "absolument

volontaires".

"Nous condamnons la recrudes-

cence du phénomène extrémiste", ontréagi les trois organismes, dénonçantdes propos du groupe qui se proposede "résoudre rapidement le problème

tsigane" et de supprimer l'Holocaustedes manuels d'histoire. La Slovaquiea été condamnée en 2011 par la Coureuropéenne des droits de l'Homme(CEDH) pour la stérilisation d'unefemme de la minorité rom, statuantqu'elle n'était pas en état de réaliserles implications de cette opération.

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Avec Sylvain Puij, directeur de H Model Manage-ment près du Louvre, la jeune mannequin roumai-ne va découvrir son programme de castings du

jour, précieux sésames à l'issue desquels elle décrochera peut-être le gros lot: un défilé pour un grand couturier ou une sériede photos pour un magazine.

Dehors l'air est glacial, le ciel bleu.Accompagnée de ses jeunes acolytes de 16ans qui découvrent avec de grands yeux lacapitale de la mode, Ioana marche à longuesenjambées. A l'aube, elle a avalé "des céréa-les, un yaourt et une orange, de la vitamineA pour la peau ". Elle mangera quand elleaura fini, "de tout mais pas trop de sucre, nide pain". Entre temps, "pommes, jus, café"feront l'affaire. Longiligne dans sa combinai-son-short, son léger manteau et ses bottes decuir noir, elle attire les regards. Plan de Parisen main elle s'engouffre dans le métro. Il y aquelques heures encore, elle était à Cluj-Napoca en Roumanie,son pays natal où vivent ses parents, juriste et libraire, sa sœuret son petit ami, et où elle étudie les relations publiques à l'u-niversité parallèlement à son métier de mannequin.

Découverte lors d'un concours de beauté

"Je me souviens de mes débuts, il y a trois ans. J'avaispeur, je me mordais les lèvres. Depuis j'ai acquis de l'expérien-ce, beaucoup voyagé, travaillé au Japon, en Europe, en Chine.Aujourd'hui j'ai confiance en moi", explique-t-elle en anglais,dans un sourire qui illumine son pâle visage et ses yeux saphir.

Tokyo, Shenzhen, Séoul, Milan, Berlin... Avec son 1,77 met ses mensurations - 83 (poitrine), 60 (taille), 88 (hanches) -Ioana a séduit nombre de professionnels, défilant notammentpour Chanel, Vivienne Westwood, Roberto Cavalli. Mais pouren arriver là "il faut travailler dur", explique Giani Portmann,chercheuse de talents depuis plus de 20 ans et "deuxièmemaman" de la jeune femme, découverte lors d'un concours de

beauté à Bucarest, en 2008. Car contrairement à quelques "topmodels" hébergés dans des palaces et qui ne se déplacent pasà moins de plusieurs milliers d'euros la journée, Ioana commela très grande majorité de ses consœurs ne sait pas à l'avancesi elle décrochera un contrat: quelques centaines d'euros pour

un "shooting" (photos) ou "des milliers"pour une campagne publicitaire. Il se peutqu'elle rentre bredouille et doive rembourserson agence des frais avancés. "Elle devra detoute façon lui reverser 20% de ses gains,payer des impôts à l'Etat français et cotiser,sans pour autant bénéficier du régimesocial", déplore Giani Portmann.

"H Model Management" est une des 50agences parisiennes. Ce matin on dirait uneruche, remplie de créatures filiformes dontles "composites" (cartes de visite avecphotos et mensurations) sont affichés auxmurs. Installés derrière des ordinateurs, une

dizaine de "bookers" (agents artistiques) briefent les filles.Ioana a trois castings dont un rendez-vous avec "La" photogra-phe de mode Ellen von Unwerth, qui officie notamment pourVogue.

L'étudiante de Cluj croit en elle

Le marathon commence: studio EVU dans le 15e arron-dissement, atelier de Gustavo Lins dans le Marais, grandmagazine de mode près de la Bourse. Des heures de trajet enmétro et d'attente parfois pour une entrevue de quelques minu-tes à peine. Mais Ioana est "contente": Ellen von Unwerth l'aphotographiée et elle a essayé une robe du créateur brésilienqui l'a pourtant trouvée "trop petite" et "trop brune".

"Restons lucides. Tout le monde ne peut pas m'aimer. Moije m'accepte comme je suis et je crois en moi", commente lajeune femme, qui rêve de dessiner un jour sa "propre collec-tion de vêtements".

Sandra Lacut (AFP)

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CHISINAU

BÂRLAD

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T. SEVERINl

VASLUI l

Mode "Je ne m'habille qu'avec

des vêtements de marque"

Stérilisation des femmes Rom

Une journée à Paris dans la loterie des castingsavec Ioana, mannequin et étudiante à Cluj

Bling-bling à la roumaine

Mode

PARIS - 9H30, bd Saint-Martin mi-janvier. Les défilés Haute Couture vont bientôt commencer. Installée sur le canapéd'un appartement qu'elle partage avec cinq Lituaniennes, Ioana Timoce, 19 ans, secoue sa longue chevelure châtain et avaleune gorgée d'eau. Dans quelques minutes, elle a rendez-vous avec son agent.

Le Conseil du département deVaslui , a donné son feu vert àla société américaine Chevron

pour faire les travaux d'aménagement etde forage nécessaires à la prospection degaz de schiste. Les autorités ont déclaréqu'elles n'avaient aucune raison de refu-ser cette autorisation , d'autant plus que,selon les experts, l'exploitation du gaz de

schiste permettrait de réduire le coût dugaz pour les Roumains. Aujourd'hui, prèsde la moitié du gaz consommé enRoumanie est importé.

Cette décision intervient huit moisaprès l'instauration d'un moratoire contrel'exploitation du gaz de schiste enRoumanie et malgré les manifestationsqui ont alerté les responsables politiques

sur les risques de contamination de l'eau.En février 2011, Chevron avait fait l'ac-quisition de la concession de Barlad, quicouvre 6350 km².

En mars 2012, elle a obtenu desconcessions pour les périmètres 17, 18 et19, situés près du littoral roumain de laMer Noire et de la frontière bulgare, dansla région de la Dobrogea.

Les Roumains constituent toujoursla première communauté étrangèreinstallée en Italie avec 997 000 per-sonnes recensées, soir 21 % du totaldes étrangers. 819 000 ressortissantsroumains ont un travail et 38 000 yont créé leur propre affaire.

Un million deRoumains en Italie

Gaz de schiste: feu vert pour Chevron à Vaslui

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SociétéLes NOUVELLES de ROUMANIE

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SociétéLes NOUVELLES de ROUMANIE

Insolite Les mille et une manières de recourir aux services d'un tueur

Ala suite d'un assassinat sur commande à PiatraNeamt, Romania TV a enquêté sur les tarifs quedemandaient habituellement les tueurs profession-

nels en Roumanie. Leur coût se situerait entre 8000 et15 000 € suivant les services exigés et la qualité des prestatai-res. La difficulté réside pour les usagers qui n'ont aucuneconnaissance du milieu interlope à entrer en contact avec lui,ce qui oblige à trouver un intermédiaire qui assurera la liaisonet la négociation. Bine sûr, ils n'auront jamais l'occasion derencontrer le tueur. Avant de faire affaire, l'honnêteté, la solva-bilité et le sérieux du demandeur seront examinés, vérifiés dis-crètement auprès de relations dans la police. Si le client sou-haite que le travail soit effectué proprement et discrètement,mieux vaut avoir recours au haut de gamme qu'à un exécuteurpoussé par les circonstances, dont un besoin pressant d'argent,que ses maladresses risquent de faire vite découvrir.

Le client n'est toutefois pas obligé de recourir aux mesu-

res les plus radicales vis-à-vis de celui dont il veut se débarras-ser. Il peut se contenter d'un avertissement en faisant incendiersa voiture, briser une jambe ou un bras. Les prix sont plusaccessibles alors, entre 2000 et 5000 €.

Une méthode plus économique est de faire l'affaire soi-même. Se procurer une bonne arme (Glock, Berreta,Smith&Wesson) revient au maximum à 1000 €, y compris lesmunitions… encore faut-il trouver un intermédiaire pour se laprocurer. Un Makarov ne coûte que 300-400 €. Mais là, c'estcomme réussir un beurre blanc… il vaut mieux se faire la mainpour être sûr du résultat.

Une chose est sûre cependant: quelque soit le moyen utili-sé, cela vous coûtera beaucoup moins cher en Roumanie qu'enFrance, Belgique ou Suisse. Et puis, ce serait une manière élé-gante pour vous de convier votre victime à son dernier voyageen l'invitant à faire un petit détour par les bords de la MerNoire ou sur les flots du beau Danube bleu…

Afin d'éviter les défaillances, les autoritésmunicipales de Braila ont exigé des candi-dats s'inscrivant pour récupérer la croix

jetée par le pope dans les eaux glacées du Danube, lejour de Boboteaza, de présenter un certificat médicalattestant qu'ils ne souffraient pas d'affections car-diaques… accompagné d'un électrocardiogrammerécent. Une centaine de gendarmes étaient présents surles lieux pour canaliser la foule des curieux, lançantdes appels à se méfier des pickpockets, à éviter de met-tre en évidence des objets de valeur, à cacher leurs télé-phones portables et documents. Le Bon Dieu ne peutpas avoir l'œil à tout. Par ailleurs, afin d'éviter lesqueues de plusieurs heures des fidèles venant faireconsacrer leurs seaux ou bouteilles d'eau, les popesavaient pris la précaution de bénir les grosses citernesapportées par les pompiers et installer quelques 70 000grosses bouteilles déjà remplies, chacun pouvant se ser-vir gratuitement, mais étant libre de faire une offrande.

Bénédiction et électrocardiogramme

Radu Vicol, 9 ans, élève dans une école primaire de Iasi, étaittout heureux d'avoir gagné un prix de dessin, dans le cadred'un concours organisé par une firme commerciale, qui lui

avait rapporté la somme de 30 lei (7 euros). Qu'elle ne fut pas la surpri-se de son père, quelques semaines plus tard, en ouvrant un courrier des-tiné au gamin, contenant un avis d'imposition de deux euros et luidemandant de venir d'urgence compléter ses coordonnées fiscales, souspeine de pénalités. Saisie, l'administration a indiqué qu'elle avait sans-doute oublié de mettre un filtre d'âge dans son avis qu'elle a finalementannulé ainsi que les sanctions encourues. Une bonne nouvelle pour Raduet son père qui n'ont pas eu finalement à s'exiler en Belgique.

Fisc confiscatoire Les chiens errants de Bucarest sont devenusun allié de la police roumaine pour fairebaisser le grand nombre d'accidents impli-

quant des piétons. Filmés en train de traverser sage-ment sur les passages piétons, ils donnent un exemplecrucial dans un nouveau spot de prévention. "Si euxpeuvent le faire, tout le monde peut le faire aussi.Traversez sur les passages piétons", lance ce spot dif-fusé sur les télévisions. Toutes les scènes du court-métrage sont réelles et ont été filmées dans la capitaleet dans d'autres villes de Roumanie. "C'est un messa-ge extraordinaire, on voit que les animaux sont capa-bles de respecter des règles de prudence très impor-tantes", a déclaré le chef de la police routière deRoumanie, le commissaire Lucian Dinita.

"Si eux peuvent le faire…"

Les Roumains se debrouillent...

Le PatriarcheDaniel semble

s’amuser comme un fou

en bénissant lespoliciers chargés

de le protéger.

Une Daciatous usages... ici, cabine d’essayage

sur un marché de

Roumanie !

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Connaissance et découverte

Le Salon du livre de Paris attire bon an-mal an 190 000visiteurs et 35 000 professionnels. 45 pays y sont représentésregroupant quelques 2000 auteurs. Cet événement est organi-sé en partenariat avec le Centre national du livre (CNL),l'Institut Français et, cette année, l'Institut Culturel Roumain(ICR). L'ICR avait préfiguré les lettres roumaines à l'honneuren organisant un colloque Cioran en 2011, et de beaux vaga-bondages littéraires autour de la figure du romancier PanaitIstrati.

Le pavillon central réservé à la Roumanie

Le pavillon central de 400 m² réservé à la Roumanie, com-prenant une librairie et un espace rencontres, permettra dedécouvrir de nombreuses œuvres de littérature roumaine (en

langue française et en langue roumaine). On pourra y vision-ner des courts métrages sur les personnalités littéraires rou-maines marquantes, y admirer des œuvres d'artistes roumainsou s'asseoir confortablement pour profiter des livres dans leboudoir littéraire. Sur les scènes du pavillon et du Salon, lesécrivains invités d'honneur échangeront avec le public sur lalittérature passée et actuelle de leur pays. Sur le plan des ren-contres professionnelles, l'ICR organisera la venue à Paris d'é-diteurs roumains, en partenariat avec l'Institut Français deBucarest. Dans le but de faire découvrir un univers littérairegéographiquement proche mais singulièrement méconnu,l'ICR organisera également le déplacement à Paris d'écrivainsencore non traduits en français. Plusieurs événementsconnexes se dérouleront dans le Salon ou dans Paris, commedes expositions, des concerts ou un défilé de mode.

Les NOUVELLES de ROUMANIE

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Connaissance et découverteLes NOUVELLES de ROUMANIE

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BUCAREST

ORADEA

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TIMISOARA

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SIBIU

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lBRAILA

SUCEAVA

FOCSANI

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lR. VÂLCEA

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Vingt sept auteurs feront

Pour sa 33e édition, le Salon du livre de Paris (22 au 25 mars à Paris - PorteVersailles) met à l'honneur les lettres roumaines: les visiteurs du Salon vien-dront à la rencontre d'une délégation prestigieuse de 27 auteurs, dont 83 œuv-

res ont été traduites en français, où se mêleront toutes les générations de la littérature rou-maine, et où tous les genres seront représentés - du roman à la bande dessinée en passantpar la poésie, le théâtre et l'essai. De son côté, Barcelone est la troisième ville invitée parle salon, après Buenos Aires et Moscou.

Romans: Gabriela Adamesteanu, Radu Aldulescu, Savatie Bastovoi, MirceaCartarescu, Petru Cimpoesu, Florina Ilis, Dan Lungu, Norman Manea, Marius DanielPopescu, Razvan Radulescu, Adina Rosetti, Bogdan Suceava, Lucian Dan Teodorovici,Dumitru Tsepeneag, Eugen Uricaru, Varujan Vosganian.

Poésie: Ana Blandiana, Doina Ioanid.Théâtre: Nicoleta Esinencu, Alina Nelega, (Rép. de Moldavie), Matei Visniec.Essais : Lucian Boia, Gabriel Liiceanu, Andrei Oisteanu, Andrei Plesu.Bande dessinée: Ileana Surducan, Alex Tamba.

Des auteurs roumains de premierplan dont l'œuvre n'a pas encoreété traduite en langue françaiseseront aussi présents au Salon dulivre:Constantin AbalutaHoria BadescuGeorge BalaitaNicolae BrebanAugustin BuzuraAlexandru CalinescuMagda CârneciPaul CernatGabriel ChifuNeagu DjuvaraIoana DraganRodica DraghincescuTeodor DunaIleana MalancioiuNicolae ManolescuSolomon MarcusMircea MartinBujor NedelcoviciValentin NicolauMarta PetreuIoan Es. PopEugen SimionRiri Sylvia ManorStelian TanaseDanut UngureanuDaniela Zeca Buzura

Salon du livre: 22 au 25 mars2013 de Paris - Parc des exposi-tions de la Porte de Versailles (sta-tion de métro : Porte de Versailles)

Horaires:Vendredi 22 mars : 10h - 20hSamedi 23 mars : 10h - 20hDimanche 24 mars : 10h - 19hLundi 25 mars : 13h - 19hTarifs : 10 €/jour, gratuit pour les

moins de 18 ans et les étudiants(avec pré-inscription).

d'honneur du Salon du Livre

Les auteurs invitésnon publiés en français

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A. IULIA

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BUZAU l

Salon du Livre

est interné sur demande d'un de ses enseignants, dans un hôpi-tal psychiatrique où il écrit les poèmes du recueil Un Valiumpour Dieu qui le consacre comme poète. À partir de 1993, ilpublie de la poésie, des récits, dans les revues littéraires lesplus importantes de Roumanie et de Moldavie. Entre les années 1996 et 1998, il est étudiant de la Faculté dePhilosophie de Timisoara, cursus qu'il abandonne. En 1999, ilreçoit la tonsure monacale et prend le nom de Savatie. En2000, il est ordonné diacre puis, en 2002, prêtre.

Stefan Savatie Bastovoi vit aujourd'hui au Monastère de laNativité du Christ de la paroisse Edinet et Briceni, situé dansla région sécessionniste de Transnistrie. Il a publié plusieursouvrages ouvrant un dialogue entre la spiritualité orthodoxe etla laïcité postmoderne.

Les Lapins ne meurent pas, traduit par Laure Hinckel,éditions Jacqueline Chambon, 2012.

Mircea Cartarescu Né en 1956, Mircea Cartarescu

est l'auteur d'une œuvre traduite en denombreuses langues. Son principalroman, la célèbre trilogie Orbitor -L'Aile gauche, Le Corps et L'Ailedroite, récompensée par des prixprestigieux dans plusieurs pays estpublié sous trois titres différents en français : Orbitor, L'œil enFeu et L'Aile tatouée. . Ce livre-monde est une recherche, dudouble à travers le personnage du jumeau fantasmé, de la Villeà travers les promenades hallucinées, de l'accomplissement àtravers l'œuvre.

L'auteur qualifie son roman de "fractale", donnant uneparfaite idée d'une écriture qui se déploie puis se rétracte et l'é-trange impression de lire un objet qui respire. Le symbole tuté-laire du papillon, que l'on retrouve dans le titre de la trilogie,évoque également la palpitation, le battement, et surtout, ren-voie à la perception grecque de l'immortalité de l'âme. En tant

que théoricien du postmodernisme en littérature, il a été invitéà enseigner dans des universités étrangères.

L'Aile tatouée, trad. par Laure Hinckel, éd. Denoël, 2009.Pourquoi nous aimons les femmes, recueil de nouvelles,

traduit par Laure Hinckel, éd. Denoël, 2008.L'Oeil en feu, traduit par Alain Paruit, éd. Denoël, 2005.Orbitor, traduit par Alain Paruit,

éd. Denoël, 1999.Lulu, traduit par Hélène Lenz, éd.

Austral, 1995.Le rêve, traduit par Hélène Lenz,

éd. Climats, 1992.

Petru Cimpoesu Avec Petru Cimpoesu, ce roman-

cier né en 1952 à Vaslui, on découvrele portrait de la société roumaine contemporaine... vue depuisun ascenseur. La vie dans un immeuble comme les autres bas-cule le jour où le cordonnier s'installe dans cet équipement col-lectif. La guérison miraculeuse qu'il opère sur un des voisinsconduit tous les autres à voir en lui une sorte de saint, un sty-lite à la mode actuelle : du jour au lendemain, l'homme est sur-nommé Saint Siméon l'Ascenseurite. Par effet d'entraînement,l'homme enchaîne les prophéties. Une légende se construit…Cinquième roman de l'auteur qui débuta en 1983 et a publiéUn royaume pour une mouche en 1995 et Le récit du grandbrigand en 2000, Saint Siméon l'Ascenseurite est son pre-mier ouvrage traduit en français. Mais il a déjà conquis d'aut-res pays européens.

Les Tchèques lui ont accordé leur grand prix de littératuredès 2007. L'ingénieur de l'extraction du pétrole roumain deve-nu enseignant en lycée professionnel puis journaliste culturelest aujourd'hui directeur dans un service régional de la cultureet il se consacre largement à la rédaction de ses romans.

Saint Siméon l'Ascenseuriste, traduit par DominiqueIlea, éd. Gingko, 2013.

La Roumanie invitée

le voyage à Paris, fin mars

ROMANS

Gabriela Adamesteanu Née en 1942 à Târgu Ocna, Gabriela Adamesteanu vit et

travaille à Bucarest où elle se partage entre écriture romanesqueet activité journalistique. Elle débute en 1975 avec Vienne lejour, un roman publié en 2009 en traduction française. Ce pre-mier roman réaliste sur la jeunesse scrutée jusque dans sesmoindres détails est un roman sans âge, celui d'une adolescen-ce universelle. En 1983, paraît le grand roman social dont le personnage principal, la cou-turière Vica a marqué les esprits : Une matinée perdue publié en France en 2005 retracecent ans d'histoire roumaine familiale. En 2013 paraît son troisième grand roman qui estcelui du couple dans le totalitarisme et la chronique d'une intimité impossible.

Situation provisoire, traduit par Nicolas Cavaillès, éditions Gallimard, 2013.Vienne le jour, traduit par Marily Le Nir, éditions Gallimard, 2009.Une Matinée perdue, traduit par Alain Paruit, éditions Gallimard, 2005.

Radu Aldulescu Né en 1954 à Bucarest, Radu Aldulescu ne publie rien durant

toute la période communiste et devient ensuite un auteur proli-fique. Depuis son premier roman, Sonate pour accordéon publiéen 1993, l'auteur a publié sept autres romans au titre évocateur etau style marqué par une belle oralité sur un fond réaliste et cru. Sondeuxième roman, Amantul colvaresei, publié en Roumanie en1996, est le premier à être traduit et il est publié en France sous le

titre L'Amant de la veuve, en 2013. En dépit de ses succès d'estime, l'auteur a continuéjusqu'à récemment à travailler à l'usine ou sur des chantiers. Radu Aldulescu est considé-ré comme l'un des écrivains les plus importants depuis 1990.

L'Amant de la veuve, traduit par Dominique Ilea, éd. desSyrtes, 2013.

Stefan Savatie BastovoiStefan Savatie Bastovoi est né en 1976 à Chisinau. Son père

est professeur de philosophie et surtout, propagandiste de l'a-théisme scientifique. Jusqu'à son entrée dans les ordres, le jeuneauteur a été ancré dans les conceptions de son père. Au lycée, il

Tous les genres littéraires conviés à la grande fête du Livre

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Connaissance et découverteLes NOUVELLES de ROUMANIE

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Connaissance et découverteLes NOUVELLES de ROUMANIE

Florina Ilis Née en 1968, Florina Ilis vit à

Cluj, et est l'auteur d'une fresque roma-nesque de la Roumanie contemporaine: La Croisade des enfants. Elle débu-te dans son pays avec deux romanspubliés en 2006, Cinq nuages coloréset La Descente de la croix avant de

publier, en 2008 La Croisade…. Son quatrième roman a étépublié, toujours aux éditions Cartea Româneasca, fin 2012.Les Vies parallèles reconstitue de manière romanesque unmythe littéraire, celui du poète national Mihai Eminescu.

La Croisade des enfants, traduit par Marily Le Nir, éd.des Syrtes, 2010.

Dan Lungu Né en 1969 à Botosani, dans une

famille d'ouvriers, Dan Lungu achaussé les lunettes de l'humour et dela tendresse pour donner vie à ses per-sonnages. Très fin observateur de sesconcitoyens, il les met en scène dansdes romans à la fois et réalistes et drô-les. Le paradis des poules en 2004 explorait les relations devoisinage dans une rue des faubourgs du nord à l'heure du pas-sage à la démocratie et à l'économie de marché. Je suis unevieille coco! en 2007 voyait s'affronter avec humour deuxgénérations de femmes aux opinions politiques différentes.

Avec Dan Lungu, le lecteur français découvrait ainsi dès2008 le concept de "nostalgie paradoxale". Dans son troisiè-me roman, en 2009, l'écrivain auscultait les relations amoureu-ses dans Comment oublier une femme. Auteur prolifique etparfait francophone, il enseigne également à la Faculté deSociologie de l'université de Iasi. Lauréat de nombreux prixparmi lesquels le premier prix du concours "Rue des poètes" àLille en 2003.

Comment oublier une femme, traduit par Laure Hinckel,éd. Jacqueline Chambon, 2010.

Je suis une vieille coco!, traduit par Laure Hinckel, éd.Jacqueline Chambon, 2007.

Paradis des poules, traduit par Laure Hinckel, éd.Jacqueline Chambon, 2005.

Norman Manea Norman Manea est né en 1936 à

Suceava en Bucovine. Rarement unlieu et une date de naissance auront étéplus définitoires de l'œuvre à venir.Écrivain de la Shoah dont il a miracu-leusement réchappé après une déporta-tion en Transnistrie par les troupes rou-maines fascistes alliées à l'Allemagne

nazie, Norman Manea est également le chroniqueur attentif etprécis de l'exil - celui qu'il vit aux États-Unis. Des nouvellespubliées en 1969, un roman en 1970, un deuxième roman en1977. Son troisième roman, intitulé L'Enveloppe noire estcelui qui le conduit à l'exil forcé. Norman Manea y traite lesdeux grands thèmes qui parcourent toute son œuvre. Le père

du narrateur reçoit, sous le régime fasciste des Légionnaires,une enveloppe noire dont on ne saura jamais ce qu'ellecontient. Il disparaît, on ne retrouve jamais son corps. Ceroman qui mettait la Roumanie face à son passé narrait aussiles difficultés des Roumains sous le communisme: des thèmestrop inconfortables au regard des idéologues du Parti.

Dans La Tanière, Norman Manea tend le miroir de l'hu-mour à ses concitoyens roumains exilés aux États-Unis. Onvoit aussi passer dans ces pages, marquées par des réflexionssur la vie et le destin, l'ombre d'un autre destin extraordinaire,celui de Mircea Eliade. Norman Manea est aujourd'hui profes-seur de culture européenne et écrivain en résidence au BardCollege, dans l'État de New-York.

La Cinquième impossibilité, essais, traduit par OdileSerre et Marily Le Nir, Seuil, 2013.

La Tanière, roman, traduit par Marily Le Nir, Seuil, 2011.L'Enveloppe noire, roman, traduit par Marily Le Nir,

Seuil, 2009.Les Clowns: Le dictateur et l'artiste, traduit par Marily

Le Nir et Odile Serre, Le Seuil, 2009.Le Retour du hooligan: une vie, traduit par Nicolas

Véron, Seuil 2006.Prix Médicis étranger en 2006Le Bonheur obligatoire: nouvelles, traduit par Alain

Paruit et André Vornic, Albin Michel, 1991.Le Thé de Proust: et autres nouvelles, traduit par Marie-

France Ionesco, Alain Paruit et André Vornic, Albin Michel,1990.

Marius Daniel Popescu Marius Daniel Popescu, né en

1963 à Craiova, est établi à Lausannedepuis 1990, où il gagne sa vie enqualité de chauffeur de trolleybus. Ilfait partie de ces écrivains qui enri-chissent le patrimoine littéraire fran-çais. José Corti a publié ses deux romans: la langue exception-nelle de ce romancier est ce qui frappe de prime abord. On estensuite happé par les galeries de personnages de La sympho-nie du loup. Le traumatisme de la mort accidentelle du père,la chronique d'une Roumanie à l'époque du Parti unique ne ser-vent que de cadre à une expressivité tout à fait particulière. LesCouleurs de l'hirondelle, qui a reçu en 2012 le Prix del'Inaperçu est tout aussi autobiographique. Le récit s'enrouleautour du corps de la mère décédée, autour du corps de lafemme et explore tout l'univers avec une sensibilité tactile.Animal littéraire tout à fait hors du commun, cet auteur exilédans une autre langue donne à lire la Roumanie autrement.

Les Couleurs de l'hirondelle, roman,éd José Corti, 2012.La Symphonie du loup, roman, éd. José Corti, 2007.Arrêts déplacés, Lausanne, Éditions Antipodes, 2004.4x4 poèmes tout-terrains, Lausanne, éd Antipodes, 1995.

Razvan RadulescuRazvan Radulescu, né en 1969, on le connaît sans le

connaître: son nom figure au générique de nombreux filmsde la nouvelle vague du cinéma roumain. L'étudiant en lettresdevenu romancier est aussi le scénariste, avec Cristi Puiu, du

film La Mort de Dante Lazarescu.Il a fait partie, également, de l'équipedu film Palme d'or 4 mois, 3 semai-nes, 2 jours. La Vie et lesAgissements d'Ilie Cazane (1997) amarqué son entrée dans la littératureroumaine. Vif et amusant, ce romann'en offre pas moins une vision de laRoumanie d'avant 1989 avec saSecuritate, ses records de production et son fantastique jaillis-sant du quotidien opprimé. Dans son second roman, Teodosiele Petit, l'auteur se révèle encore plus fantaisiste.

La Vie et les agissements d'Ilie Cazane, roman, traduitpar Philippe Loubière, éd. Zulma, 2013.

Adina Rosetti Née en 1979, Adina Rosetti fit

d'abord des études dont le but était debien s'intégrer dans une Roumaniemondialisée, démocratique et c'estfinalement vers sa vocation première,l'écriture, qu'elle s'est tournée. Certes,il y a eu le passage par la presse, maisce qu'elle voulait, c'est écrire des

romans. Avec Deadline, paru à Bucarest en 2010 et presqueaussitôt traduit, c'est chose faite. Pour la première fois, onévoque le travail qui tue. Son héroïne est trouvée morte chezelle d'avoir trop travaillé. Trop esseulée, dans une société ultra-capitaliste et américanisée. Elle vit entre son chat et son ordi-nateur. La romancière utilise le contrepoint d'un autre fait-divers, celui mettant en scène un SDF artiste, un génie de l'artpop...

Deadline, traduit par Fanny Chartres, éd. Mercure deFrance, 2013.

Bogdan Suceava Né en 1969, Bogdan Suceava est

un écrivain mathématicien. Il passe undoctorat à la Michigan StateUniversity en 2002 et est conférencierà la California State University. Unrecueil de nouvelles en 1990, uneintense activité dans la presse culturel-le et quelques romans plus tard,Bogdan Suceava voit son deuxième roman, Venu du tempsdièse, traduit en français. Un héros nommé Vespasien Moïse,né avec la carte de Bucarest imprimée sur son torse et quidevient gourou dit beaucoup sur les errances d'une société enrecherche de repères. Son troisième roman, Miruna, une his-toire est un conte pour adultes, une jolie traversée de l'imagi-naire collectif roumain. Quant à Vincent l'Immortel, c'est unthriller d'anticipation qui reflète nos préoccupations sur le cli-mat, la surpopulation et les recherches sur la mémoire.

Venu du temps dièse, traduit par Dominique Ilea, éditionsGingko, 2012.

Lucian Dan TeodoroviciNé en 1975 à Radauti, Lucian Dan Teodorovici nous invi-

te à faire connaissance en 2013 avec lamarionnette Vasilacke, troublant alterego du personnage principal de sondernier roman qui est également lepremier à être traduit en français.Lucian Dan Teodorovici déborde d'é-nergie créative et littéraire. Il est déjàl'auteur de trois romans, d'autant derecueils de nouvelles et l'on pouvaits'attendre, finalement, à l'apparition dans son œuvre d'un pen-sionnaire aussi étonnant. Écrivain à la plume tantôt ironique,burlesque ou pleine d'humour, Teodorovici est aussi, dans ceroman, au plus près du réel. L'Histoire de Bruno Matei ungrand roman sur la vie concentrationnaire, sur l'amnésie et surla terrible expérience de la construction de l'Homme Nouveau.Il s'organise autour de trois personnages principaux mer-veilleusement campés…. Trois personnages, plus une marion-nette.

L'Histoire de Bruno Matei, traduit par Laure Hinckel,éd. Gaia, 2013.

Dumitru TsepeneagNé à Bucarest en 1937,

Dumitru Tsepeneag est l'un de cesécrivains dont le talent permet d'in-nover aussi bien dans leur languematernelle que dans la langue d'a-doption, le français. Son roman LeMot sablier en apporta la preuveformelle. Il est, dans la Roumaniedes années 1960 et 1970, avec le

poète Leonid Dimov, le chef de file de l'onirisme, le seul cou-rant littéraire à s'opposer alors au réalisme socialiste. En 1975,pendant un séjour à Paris, il est déchu de sa nationalité parCeausescu et contraint à l'exil. Dans les années 80, il se met àécrire directement en français. La chute du mur de Berlin leramène à la langue maternelle, sans pour autant qu'il renonceà sa langue d'adoption. Il fonde et dirige à Paris de célèbresrevues comme les Cahiers de l'Est puis Seine et Danube.Dumitru Tsepeneag est également un grand traducteur. Dès lesannées 60, il traduit en roumain Malraux, Gérard de Nerval,Alain Robbe-Grillet, etc. Et plus récemment MauriceBlanchot, Alexandre Kojève et Jacques Derrida.

Le camion bulgare, P.O.L., 2011.La Belle Roumaine, P.O.L. 2006.Attente, P.O.L. 2003.Au pays du Maramures, P.O.L. 2001.Pont des Arts, P.O.L. 1998.Hôtel Europa, P.O.L. 1996.Quinze poètes roumains (recueil), éd. Belin, 1990.Pigeon vole, P.O.L. 1989, sous le pseudonyme Ed

Pastenague.Roman de gare, P.O.L. 1985.Le Mot sablier, P.O.L. 1984.La Défense Alekhine, éd. Garnier, 1983.Les Noces nécessaires, éd. Flammarion, 1977.Arpièges, éd. Flammarion, 1973.Exercices d'attente, éd. Flammarion, 1972.

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Connaissance et découverteLes NOUVELLES de ROUMANIE

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Connaissance et découverteLes NOUVELLES de ROUMANIE

Eugen Uricaru Né en 1946, Eugen Uricaru diri-

gea à Cluj, dans les années 1970, larevue "Echinox" dont l'activité lit-téraire apolitique permit de réunirdes centaines de contributions. Larevue comptait des pages en hon-grois et en allemand. Cette expérien-

ce qui dura plus de quarante ans demeure un repère dans l'his-toire des lettres roumaines du XXème siècle. Chargé d'affairesculturelles dans différents ministères, Eugen Uricaru est unromancier prolifique auteur de onze romans publiés entre 1977et 2008. Ils arrivent, les barbares ! (1981), traduit en 2009chez Noir sur blanc, est un roman historique dans lequel ladescription de la guerre de 1914-1918 peut être vue commeune allusion à l'histoire de la Roumanie communiste (occupa-tion soviétique, rationnement alimentaire, ruine du pays…).

La Soumission, traduit par Marily Le Nir, éd. Noir surBlanc, 2013.

Ils arrivent, les barbares! traduit par Marily Le Nir, éd.Noir sur Blanc, 2009.

Varujan Vosganian Né en 1958 à Craiova, dans une

famille d'origine arménienne, VarujanVosganian est certes un homme poli-tique mais c'est surtout un conteur. Ilportait en lui les récits empreints desagesse et de couleurs des vieuxArméniens écoutés dans son enfance. Illes confie aux lecteurs français dans

son premier roman, Le Livre des chuchotements. Vibranthommage à la figure des deux grands-pères, Garabet et Sétrak,ce livre se lit comme on déguste de la confiture de roses,comme on boit du café: à l'ombre de l'abricotier, dans la courde la maison familiale des Vosganian, à Focsani.

Le Livre des chuchotements, traduit par Marily le Nir etLaure Hinckel, éd. des Syrtes, 2013.

POESIE

Ana Blandiana Née en 1942 près de Timisoara,

Ana Blandiana est la poétesseemblématique d'une Roumanie entreoppression et créativité. Auteur d'uneœuvre délicate presque totalement méconnue en français endépit de sa notoriété de femme engagée auprès de la sociétécivile, Ana Blandiana est aussi l'auteur d'un roman polypho-nique sur les conditions de la création littéraire dans une socié-té fermée et totalitaire. Après la publication de son premierpoème paru sous le pseudonyme d'Ana Blandiana, elle futdénoncée comme "fille d'un ennemi du peuple" et se vit empê-chée de s'inscrire à la Faculté pendant quatre années. Après cefaux départ imposé par le régime communiste, elle se réinscriten 1963 à la Faculté de philologie de Cluj et publie, en 1964,son premier recueil de poèmes au titre annonciateur de sesengagements futurs: La Première personne du pluriel. Ana

Blandiana crée en 1990 l'Alliance civique, maillon essentieldans la vie de la "polis" après la chute de la dictature. Ellefonde également le Mémorial des Victimes du Communismeet de la Résistance, à Sighet (nord de la Roumanie). Elle a ététraduite dans de nombreuses langues.

Autrefois les arbres avaient des yeux, poèmes traduitspar Luiza Palanciuc, éd. Librairie Bleue, Troyes, 2005.

Clair de mort, poèmes, traduits par Gérard Bayo, éd.Librairie Bleue, Troyes, 1996.

L'Architecture des vagues, poèmes traduits par HélèneLenz, éd. Les ateliers du Tayrac, Saint-Jean-de-Bruel, 1995.

Étoile de proie, poèmes traduits par Hélène Lenz, éd. Lesateliers du Tayrac, Saint-Jean-de-Bruel, 1991.

Doina Ioanid Doina Ioanid est née en 1968 à

Bucarest. Professeur de français, tra-ductrice, journaliste littéraire, elleconstruit avec persévérance son uni-vers poétique. Parfois écrits en prose,ses textes explore l'individualité fémi-nine tout en tendresse, rythmes et for-

mules initiatiques. Ses recueils de vers ont été salués par la cri-tique. Ils ont régulièrement figuré parmi les meilleurs ouvra-ges dans les classements établis par les revues littéraires: Lademoiselle de Massepain en 2000, Le temps des bijoux en2001, Le livre des ventres et de la solitude en 2003, Poèmesde passage en 2005. Rythmes pour apprivoiser la hérisson-ne en 2010. En 2007, Doina Ioanid a obtenu de la part del'Institut Culturel roumain de Paris une bourse de création dansle cadre du projet Mon Paris à moi. En mai 2009, Doina Ioanida été invitée au Festival International de Poésie d'Istanbul, quia réuni 39 poètes du monde entier.

La Demoiselle de Massepain, poèmes, traduit par Jan H.Mysjkin, éd. Atelier de l'agneau, 2013.

Rythmes pour apprivoiser la hérissonne, traduit par JanH. Mysjkin.

L'Arbre à paroles, 2013.Poèmes de passage, poèmes, traduit par Jan H. Mysjkin

et Monica Salvan, 2012.

THEATRE

Nicoleta Esinencu Née en 1978 en Moldavie, Nicoleta

Esinencu représente un courant drama-turgique très manifeste en Europe del'Est où des auteurs jeunes s'exprimantdans une société en mutation n'ont plus besoin de dissimuler cequ'ils ont à dire. Ils sont en rupture avec leurs aînés.Désillusionnés, ils refusent à la fois la société de consomma-tion et les idéologies démonétisées qui ont enfermé leursparents dans les pièges du totalitarisme. Ils sont à la recherchede nouveaux repères. Nicoleta Esinencu a vu son pays passeren peu d'années par plusieurs régimes. Elle en trace le portraitintime et saisissant, à travers le récit d'un voyage à la MerNoire, lequel est rendu toujours plus compliqué par la poli-tique: c'est le texte intitulé 7 km, publié dans Odessa Transfer.

Les œuvres de Nicoleta Esinencu sont jouées en Europe. Ellea été titulaire d'une bourse d'études à Stuttgart en 2003 puis en2005. Elle a été invitée en résidence d'auteur en 2006 auCentre International d'Accueil et d'Échanges des Récollets.

Fuck you Eu.ro.pa! traduit par Mirella Patureau, éd.L'Espace d'un instant, 2007.

Le Septième Kafana (co-auteurs: Dumitru Crudu etMihai Fusu), traduit par Danny Aude Rossel, éd. L'Espace d'unInstant, 2004.

Alina Nelega Alina Nelega, née en 1960, est

dramaturge et romancière. Elle estl'auteur d'un étonnant "Monologuepour personnage féminin, en un acteet 8 séquences" (ou "respirations"),intitulé Amalia, respire profondé-ment, monté en 2007 en Roumanie etjoué à l'automne 2012 à Paris, àl'Institut culturel roumain. Pourquoi Amalia doit-elle "respirerprofondément" ? C'est l'effort qu'elle doit faire pour se suppor-ter dans un contexte idéologique asphyxiant. Ses pièces ont ététraduites et jouées en Roumanie, à Londres, Zurich, Berlin,Heidelberg et New York. Aujourd'hui, Alina Nelega maintientla tradition du théâtre radiophonique. Elle publie égalementdes récits pour les enfants, également radiodiffusés. Amalia…fait partie d'un ensemble de monologues et monodrames pouracteurs et actrices: Projet XX, Egos, Décalogue selon Hess,Kamikazes.

Amalia respire profondément, traduit par MirellaPatureau, avec une préface de Iulia Popovici, Éditions d'uninstant, 2012.

Matei Visniec Né en 1956 dans le nord de la

Roumanie, Matei Visniec a ses raci-nes en Roumanie et les ailes enFrance, selon sa propre expression. Ilest le dramaturge dont les pièces por-tent des titres coup de poing et res-tent aisément dans les mémoiresavant de toucher le cœur et l'esprit

par leur contenu décapant et tonifiant. Le mot progrès dans labouche de ma mère sonnait terriblement faux, L'Histoire ducommunisme racontée aux malades mentaux, Petit boulotpour vieux clown ou La Femme comme champ de bataillen'en sont que quelques exemples. Auteur interdit de créationdans son pays pendant des années, il demande asile politique àla France en 1987. Il choisit la langue française et se consacreà l'écriture dramatique. Il est aujourd'hui journaliste à RFI etune trentaine de ses pièces écrites en français sont éditées. Ilest l'un des auteurs les plus joués au Festival d'Avignon (off),avec une quarantaine de créations. En Roumanie, depuis lachute du communisme, Matéi Visniec est devenu l'auteur dra-matique vivant le plus joué. Les lecteurs français découvrentégalement en 2012 l'auteur de romans… qu'il écrit dans sa lan-gue maternelle, le roumain. Syndrome de panique dans laVille Lumière est consacré aux fantasmes… sur Paris.

Monsieur K. libéré, roman, traduit par Faustine Véga, éd.Non Lieu, 2013.

Syndrome de panique dans la Ville lumière, roman, tra-duit par Nicolas Cavaillès, éd. Non Lieu, 2012.

Les Détours Cioran ou Mansarde à Paris avec vue surla mort, théâtre, postface Gilles Losseroy, éd. Lansman, 2007

Attention aux vieilles dames rongées par la solitude,théâtre, éd. Lansman, 2004.

Du Pain plein les poches et autres pièces courtes, éd.Actes Sud - Papiers, 2004.

Petit boulot pour vieux clown, Suivi de: L'Histoire desours, éd. Actes Sud - Papiers, 1998.

ESSAIS

Lucian Boia Né en 1944, Lucian Boia est un

historien des idées et de l'imaginaire,un essayiste roumain dont l'œuvre estabondante, écrite directement en fran-çais ou bien en roumain, chez l'éditeurde référence en matière de sciences humaines, Humanitas. ABucarest, il dirige le Centre d'Histoire de l'Imaginaire. Sesrecherches concernent l'histoire des idées et de l'imaginaire. Ilmène des investigations poussées sur une large variété demythes contemporains, de la vie extraterrestre à la fin dumonde; du communisme au nationalisme et à la démocratie.

Les Pièges de l'Histoire - Les élites intellectuelles rou-maines entre 1930 et 1950, traduit par Laure Hinckel, LesBelles Lettres, 2013.

Quand les centenaires seront jeunes : L'imaginaire dela longévité de l'Antiquité à nos jours, Les Belles Lettres,Paris, 2006.

Jules Verne: Les paradoxes d'un mythe, Les BellesLettres, Paris, 2005.

L'homme face au climat: l'imaginaire de la pluie et dubeau temps, Les Belles Lettres, Paris, 2004.

Le Mythe de la démocratie, Belles Lettres, Paris, 2002.La Mythologie scientifique du communisme, Les Belles

Lettres, 2000.Pour une histoire de l'imaginaire, Les Belles Lettres,

Paris, 1998.Entre l'ange et la bête: le mythe de l'homme différent

de l'Antiquité à nos jours, Plon, Paris, 1995.La Fin du monde, une histoire sans fin, La Découverte,

1989.L'Exploration imaginaire de l'espace, La Découverte,

1987.

Gabriel Liiceanu Né en 1942 à Râmnicu-Vâlcea,

Gabriel Liiceanu est l'une des plusimportantes personnalités de la vieintellectuelle roumaine et l'un des por-tes parole d'une conscience civique àreconstruire, au lendemain de la chutede la dictature. Fondateur des éditionsHumanitas, il est en Roumanie l'éditeur

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Connaissance et découverteLes NOUVELLES de ROUMANIE

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Connaissance et découverteLes NOUVELLES de ROUMANIE

de Cioran. Formé auprès de Constantin Noica, il diffusa dansun très beau et stimulant Journal de Paltinis un modèle de for-mation rigoureux et attaché à la perfection intellectuelle. Decette époque datent ses premières traductions de Platon puis deHeidegger. Après 1990, Gabriel Liiceanu enseigne la philoso-phie, dirige sa maison d'édition et écrit. De la limite, petit trai-té à l'intention des orgueilleux paraît en français. De nombreuxautres ouvrages sont encore non traduits. Avec sa série Dumensonge, De la haine et De la séduction, Gabriel Liiceanuinaugure un discours d'essayiste en prise avec la vie de la cité.Il est également un mémorialiste à la plume raffinée.

Itinéraires d'une vie, E.M. Cioran - Suivi de Les conti-nents de l'insomnie: entretien avec E.M. Cioran - Suivi deLa mort de Cioran, éd. Michalon, 2007.

Journal de Paltinis récit d'une formation spirituelle etphilosophique, traduit par Marie-France Ionesco, éd. La Dé-couverte, 1999.

De la limite: petit traité à l'usage des orgueilleux, essaitraduit par Alexandra Laignel-Lavastine, éd. Michalon, 1997.

Andrei Oisteanu Né en 1948, Andrei Oisteanu est

historien des religions et des mentali-tés, ethnologue, anthropologue cultu-rel, critique littéraire et romancier.Après trois ouvrages dédiés auxmythes dans la culture roumaine(1980, 1989 et 1997), un roman en1995, Andrei Oisteanu publie en 2001une étude monumentale consacrée àl'image du Juif dans la culture roumaine, un travail salué parl'ensemble de la communauté intellectuelle. Par l'ampleur dela réflexion sur la construction de la représentation sociale desJuifs, ce travail dépasse largement les frontières de son pays.

L'Image du Juif dans la culture roumaine, traduit parPompiliu Stefanescu, éd. Non Lieu, 2013.

Andrei PlesuAndrei Plesu, né en 1948, est une

conscience, une voix entre toutesreconnaissable et, sans doute, l'exem-ple de ce que la culture européenneproduit de plus beau dans le domainede la pensée. Andrei Plesu s'intéresse àla place de l'homme dans la société.Vaste programme qu'il prend à bras le

corps dès son quatrième ouvrage publié en 1988 à Bucarest.Minima Moralia - éléments pour une éthique de l'intervallepublié en français sous le titre Éthique de Robinson pointe lefait que nous vivons une "inflation baroque de la compétencemorale” Le grand désordre du monde viendrait alors du faitque tous nous sentons moralement parfaits. Si l'enfer c'est lesautres, alors, le paradis, c'est nous-mêmes? Andrei Plesu ques-tionne. Essayiste prolifique il est également un homme enga-gé aux côtés de la société civile. Il fait partie de ces intellec-tuels d'Europe de l'Est qui ont accepté d'assumer des chargespolitiques dans leur pays en voie de démocratisation. Il estdoué d'un humour qui fit sans doute des merveilles lorsqu'il

était à la tête de la diplomatie de son pays entre 1997 et 1999.Ce même humour est teinté de critique dans L'Obscénitépublique en 2004 ou dans Visages et masques de la transi-tion dès 1996. De la joie à l'Est et à l'Ouest et autres essaisest tout aussi révélateur d'une pensée roumaine tournée vers lemonde.

Pittoresque et Mélancolie: analyse du sentiment de lanature dans la culture européenne, éd. Somogy, 2007.

Actualité des anges, traduit par Laure Hinckel, éd.Buchet-Castel, 2005.

Éthique de Robinson, traduit par Grazyna Klewek etThomas Bazin, éd. De L'Herne, 1990.

BANDE DESSINEE

Ileana Surducan Née en 1987, Ileana Surducan

est la plus jeune créatrice de la sélec-tion roumaine. A 20 ans à peine,Ileana Surducan eut l'occasiond'illustrer quelques albums jeunesseécrits par des auteurs français chezdes éditeurs comme Caïman (L'Amiinterdit). Les éditions Makaka la repèrent lors d'un concoursen ligne et éditent aujourd'hui son travail. Son album LeCirque - Journal d'un dompteur de chaises met en scène Manu,un homme rêvant d'être dompteur de chaises car il sait qu'ellessont vivantes et il connaît leur personnalité hors du commun.Mais dans une ville sous dictature qui glorifie les sciences etla raison, son espoir semble vain. Au-delà des frontières de lacité, à l'intérieur de laquelle les habitants sont enfermés, setrouve Le Cirque, un univers mystérieux où tous les songessont permis… D'une grande beauté, ses planches composentavec délicatesse un monde poétique, tendre et chargé de sens.On peut retrouver Ileana Surducan sur son blog http://ileana-surducan-fr.blogspot.fr/ et sur le site http://30joursdebd.com/

Le Cirque - Journal d'un dompteur de chaises, album,éd. Makaka, 2012.

Alex Tamba Né en 1980, Alex Talamba,

qui signe Alex Tamba, fut remar-qué par un éditeur à Angoulême.Le dessin à la ligne forte et auxcouleurs sombres, immédiatementreconnaissable, séduit par l'auteurfrançais qui travaille avec lui surl'album Sidi Bouzid Kids. L'uni-

vers graphique d'Alex Talamba, qui vient de la publicité, aégalement intéressé la maison roumaine Mandragora qui selance avec lui dans le roman graphique. En Roumanie, cegenre n'avait jusqu'à présent intéressé personne. Le jeune des-sinateur a ainsi publié deux albums: Mila 23, sur la vie, dansle delta du Danube, d'un futur champion du monde de canoë-kayak. Elabuga est un journal du goulag par un soldat alle-mand prisonnier de l'armée rouge.

Sidi Bouzid kids, album, scénario Éric Borg, dessin AlexTalamba, Casterman, 2012.

Roumains bénéficient des libertés de circulation,d'information et d'expression, mais ils restent pri-sonniers de leur mépris de leur langue et de leur

culture. Et cela ne fait qu'alimenter l'analphabétisme, dénonceOvidiu Pecica, un écrivain et historien, dans les colonnes deRomania Libera. Nul besoin d'avoir un doctorat pour saisir laportée de l'information suivante: en 2011, la Roumanie avendu moins de livres que la Hongrie, son voisin moins peu-plé les ventes de livres en Roumanie n'ont généré que60 millions d'euros de chiffre d'affaires, contre 180 millionspour la Hongrie.

Aujourd'hui, dans notre contrée, l'analphabétisme progres-se, alors qu'il avait été en grande partie éradiqué dans lesannées du début du communisme, vers 1950: 6% de la popula-tion est concernée, et 40% des adolescents de moins de 15 ansn'ont pas les compétences de base en lecture et en écriture.

"Les traductions ne font pas une littérature"

Nul besoin d'être affilié à un parti politique pour compren-dre que, dans leur entreprise de négligence et de dénigrementde la culture nationale, les gouvernements roumains, - quelleque soit leur couleur - sont glorieusement secondés par lesgrandes maisons d'éditionpost-communistes, avides degagner de l'argent avec lestraductions et très méprisan-tes, pour la plupart, de la cul-ture roumaine. Ceux qui n'ycroient pas peuvent, à titre dedémonstration, se reporter àla proportion de livres rou-mains que comporte l'ensem-ble des livres publiés.

Il est à nouveau tempsque quelqu'un soutienne que"les traductions ne font pasune littérature", qu'elles nepeuvent, ni ne doivent, sesubstituer à la production ori-ginale libre, dans la languedu pays et au nom d'un ethosqui nous est propre. Il est à nouveau temps - n'est-ce point las-sant de répéter l'histoire - qu'arrive un Mihail Kogalniceanu(politicien libéral, Premier ministre et homme de culture duXIXème siècle) pour décrier les écrits venus des rives dePotomac, de Saint-Petersbourg ou de Tokyo. Ceux-ci, aussiexcitants et intéressants soient-ils, et quelles que soient lesvaleurs universelles qu'ils véhiculent, ne reflètent pas nos joieset nos peines autant que le plus frugal récit de vie du marchéd'Obor, du canal de Bega, ou des montagnes Apuseni.

On ne peut blâmer quiconque de vouloir, dans sa courtevie, s'enrichir comme il le peut. Pour nous, les autres, il nous

restera toujours la joie de lire les pages - inutiles?! - de IonGhica, Ion Creanga ou Mihail Sadoveanu, nos grands écri-vains intraduisibles [des écrivains des XIXe et XXe siècles]...Je ne crois pas que notre évolution culturelle passe par l'éradi-cation de notre culture nationale et de notre langue dans nospublications.

Un mimétisme servile

Il se trouve que nous vivons une époque riche en créativi-té, où des voix de grande valeur s'expriment. C'est, en quelquesorte, l'aboutissement de plus de 20 ans de liberté de circula-tion, d'information et d'expression en Roumanie, le résultatde contacts avec l'atmosphère stimulante de l'Occident et dureste du monde. Nous avons respiré, à grandes bouffées, l'airdu large, et nous en sommes arrivés à écrire, peindre, compo-ser librement, même si nous demeurons timides économique-ment.

Mais ne nous faisons pas d'illusions: l'analphabétisme pro-gresse, la qualité de l'enseignement recule, les problèmes de laprincipale minorité - les Roms - sont loin d'être résolus, neserait-ce qu'en ce qui concerne la scolarisation. Quant à lapopulation de la Roumanie... elle décline. Qu'attendons-nous

donc pour ériger la dignitéd'un peuple et d'une cultureau niveau de leurs aspirationsd'antan ?

Quiconque peut-il ima-giner que nous puissions,sans éducation et sans uneidentité parfaitement mise àjour, être partenaires d'unecommunauté européenne à lapointe de la technologie?Nous demandons auxMagyars de Roumanie des'exprimer dans un roumaincorrect alors que nous nesommes même pas disposésnous-mêmes à donner unquelconque crédit culturel ànotre propre langue?

Cet éternel travestissement, ce mimétisme servile de lalangue hégémonique du moment, ne peut pas être une solutionparce qu'il nous retire toute crédibilité. Tant que nous conti-nuerons à discréditer la libre initiative culturelle, tant que l'é-ducation demeurera un intérêt secondaire, nous ne produironsque des citoyens désœuvrés, une main-d'œuvre non-qualifiéecorvéable à bas prix par les multinationales planétaires, et nousserons traités comme des figurants de l'Histoire.

Le destin roumain aujourd'hui? Etre des métèques dansnotre propre maison...

Ovidiu Pecican (Romania Libera)

Pauvre littérature nationale !

En 2011, la Roumanie a vendu trois fois moins de livres que la Hongrie… deux fois moins peuplée

Littérature

Sous le communisme, non seulement l’anaphabétisme avait été presque éradiqué, mais la lecture était devenue un sport national

pour les enfants et les jeunes. La situation a bien changé aujourd’hui.

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Connaissance et découverteLes NOUVELLES de ROUMANIE

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Connaissance et découverteLes NOUVELLES de ROUMANIE

Littérature

n

BUCAREST

ORADEA

BAIAMARE

l

TIMISOARA

ARAD

SIBIU

l

l

IASI

BRASOV

CONSTANTACRAIOVA

TARGUMURES

GALATI

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ll

TULCEABRAILA

SUCEAVA

BACAUl

l

PITESTI

l

Son chantier est en panne depuis 1989

Après plus de 25 années de patience, voilà que la Bibliothèque nationalede Roumanie a ouvert ses portes. Un nouvel espace pour l'accès auxœuvres et à la lecture, bien entendu, mais qui affiche un étrange panneau,

visible de loin et valorisant... la société Samsung. Un accord financier lie en effet leministère de la Culture roumain et le fabricant, à la hauteur de 300 000 €sur deux années. Pourtant, avec cette pancarte publicitaire gigantesque,on en oublierait presque qu'il s'agit bien là de la bibliothèque nationale dupays. Débutée en 1986, sous le règne de Ceausescu, l'élaboration du bâti-ment a été arrêtée après la chute du communisme en 1989, et n'avait pasété reprise depuis 2009. Avec 13 millions de documents dans ses archiveset seuls 2,5 millions accessibles dans le catalogue numérique, pour unmillion disponible sur le site, l'établissement avait besoin d'une aide degrande envergure. Et que le rêve devienne réalité.

Pour le moment, une seule personne travaille à la numérisation desdocuments de l'établissement, avec une mission dont Nicoleta Rahme,chef du développement des collections, se demandait déjà, en septembredernier, comment elle pourrait être mise en œuvre. Actuellement, l'éta-

blissement ne peut même pas offrir un accès à distance aux collections numérisées.En outre, les quelque 240 employés sont manifestement mal préparés à leurs mis-sions, estime Nicoleta Rahme.

La seule chose qui comp-te, c'est l'engagement avecSamsung, et l'incidence quepourra avoir la fin de ce finan-cement sur le devenir de labibliothèque et de son person-nel. Impossible de savoir dequoi l'avenir sera fait. L'unedes solutions, actuellement envigueur, est d'utiliser l'espacedisponible pour faire de lalocation de salles à des organi-sations non gouvernementa-les. "Cependant, la mission de la bibliothèque nationale est de permettre l'accès à sescollections et pas de devenir une agence immobilière", assure Nicoleta Rahme.

2000 nouveaux titres par an

La directrice de l'établissement, Elena Tîrziman, explique qu'il s'agit bien d'unpartenariat entre le ministère de la Culture et Samsung. " Ils ont accepté de parrainerles programmations inaugurales, en nous offrant les derniers dispositifs technolo-giques, des appareils à écran tactile et des systèmes sonores. Nous avons fourni desconseils pour utiliser ces appareils afin de valoriser la culture. Nous avons égalementdes projets de collaborations futures. En contrepartie de cela, nous avons voulu lesremercier en assurant la promotion de la marque".

Pour l'heure, son principal problème est de continuer à travailler avec les édi-teurs, attendu que la Bibliothèque est chargée de recevoir les dépôts légaux de toutesles œuvres publiées dans le pays. Sept copies doivent être versées, conformément àla législation de 1995, mais tous les éditeurs ne jouent pas le jeu: avec quelque 2000nouveaux titres par an reçus par la bibliothèque, c'est un reflet moindre de la réalitééditoriale du pays. Or, l'établissement ne dispose pas de mécanisme légal permettantde faire respecter la loi par les éditeurs qui contreviennent.

Voici le programme des conférencesdu printemps 2013 de la Maison rou-maine. Il peut être aussi consulté sur lesite: lamaisonroumaine.org. Cesconférences auront lieu dans la salleRainbeaux - Darboy des Apprentisd'Auteuil, 40, rue Jean de la Fontaine,75016 Paris, les samedis à 16h30.

- 16 mars 2013Bernard Camboulives (historien, pro-

fesseur à Belfort): " La littérature rou-maine en France"

- 13 avril 2013 Angelo Mitchievici (philologue, mait-

re de conférences à l'Université Ovidius,Constanta): "La cinématographie rou-maine après 1989 : continuité et rup-ture"

- 25 mai 2013Lucian Boia (historien, professeur à

l'Université de Bucarest) : "L'élite intel-lectuelle roumaine entre 1930 et1950"

- 29 juin 2013Yves François Le Coadic (ingénieur,

professeur honoraire au ConservatoireNational des Arts et Métiers, Paris) :"La science de l'information et saplace en Roumanie " (cette conférencepourrait être renvoyée à l'automne).

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CHISINAU

CLUJ

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Le programme de la Maison roumaine de Paris

GHERLAl

"Sous Ceausescu, nous ignorions tout… Je le paie maintenant"

La Bibliothèque nationale financée par Samsung

J'ai terminé mes études en obtenant mon baccalauréaten 2000 puis, je me suis mise au travail dans diffé-rents secteurs dont la vente. Arrivant en Belgique, je

me suis constituée un cercle d'amis, jeunes garçons et filles demon âge et pratiquement de même formation, c'est-à-dire nonuniversitaire.

J'ai constaté alors, lors de discussions, d'échanges et sor-ties avec eux, que leur culture générale était nettement supé-rieure à la mienne : je ne savais pratiquement rien des pays del'Union Européenne à part le nom de leur capitale, et enco-re…; je ne savais pas si c'étaient des royaumes, des répu-bliques ou des confédérations….. ! ! !

Je tremblais lorsqu'on me proposait une partie de "TrivialPursuit" car, à part l'une ou l'autre question sur le cinéma, jerestais toujours muette, surtout dans les branches Histoire etGéographie. Je me posais alors la question : cette faiblesseétait-elle uniquement due à la pauvreté de mes études ? Jepense que mon appartenance à une famille plus que modeste(cinq enfants et un divorce) a fait en sorte que notre priorité asurtout été de pouvoir trouver de quoi nourrir et vêtir décem-ment tous ce petit monde.

"A côté des autres priorités de la vie la culture faisait piètre figure"

La culture, à côté des ces priorités là, faisait piètre figure.Jamais je n'ai assisté à un concert, quel qu'il soit, jamais je nesuis allé au théâtre, jamais je n'ai assisté à un événement cul-turel quelconque. Mes frères, ma maman et moi-même, étionsplus souvent occupés à travailler pour un peu d'argent afin d'a-méliorer le minimum de confort de la maison.

Bien sûr, il y avait des familles plus pauvres que nous,vivant dans des conditions pires que les nôtres et je crois quec'est cela qui nous a donné la force de subsister. Grâce au cielet à certaines personnes forts charitables, nous avons toujourseu au moins une tranche de pain à manger chaque jour (le painétant, en Roumanie, un aliment des plus importants). Nousignorions tout d'une "autre culture", la période Ceausescu aévidemment fort contribué à cela : il y avait tant d'interdictionset tout contact avec l'étranger était étroitement surveillé.

J'avais 7 ans lorsque cela a pris fin et j'étais dans les der-nières générations à utiliser encore l'ancien système d'ensei-gnement scolaire. Lorsque plus tard, j'aidais mon petit frère àfaire ses devoirs, j'avais du mal à comprendre toutes ces cho-

ses dont je n'avais jamais entendu parler.

"Je souffre de mon manque de connaissances"

L'arrivée de la télévision dans notre famille, et surtout deschaînes étrangères, nous a toutefois permis d'avoir une autreidée au sujet du "reste du monde" parfois si étrangement décritdans nos manuels scolaires. Je ne sais pas si des collègues delycée, placés dans les mêmes circonstances, ressentaient lemême malaise, mais j'aurais été curieuse de le savoir.

Dans les années suivantes, j'ai dû gagner ma vie en tra-vaillant plus de 8 heures par jour si je voulais vivre dans desconditions "acceptables" car, même en Belgique, la vie n'estpas toujours facile et, à nouveau, j'ai laissé de côté le plan cul-turel, sauf quelques trop rares concerts (gratuits) et pièces dethéâtre.

Je vis donc aujourd'hui avec ce manque évident de cultu-re générale et j'en souffre. Je constate qu'il m'a fallu deux foisplus de travail pour m'intégrer parmi les jeunes de mon âge. Ily a tellement de matières où je me suis sentie "analphabète" sion peut dire cela !

Je regrette que l'enseignement de mon pays ne m'aitdavantage ouvert l'esprit sur le monde extérieur, un monde queje découvre à présent que j'ai 27 ans et j'ai tant de nouvelleschoses à connaître, à faire, à récupérer !

"Je constate avec bonheur que mes jeunes frères sont plus éveillés"

De retour en Roumanie, j'ai pu constater avec bonheur quemes plus jeunes frères étaient davantage éveillés par cesmatières : les livres scolaires ont été modifiés et la télévisionapporte plus d'informations qu'elles soient nationales ou inter-nationales.

Je souhaite de tout cœur que la génération suivante neconnaisse pas le problème que j'ai vécu mais, à présent, je metourne vers l'avenir et j'essaie de trouver chaque jour le coura-ge d'avancer et j'espère un jour pouvoir être fière d'avoir purécupérer tant d'années perdues ! Je n'aurais jamais osé rêverqu'un jour je pourrais simplement visiter un pays étranger etpourtant, voilà plusieurs années que je suis en Belgique et jeme dis que les rêves les plus fous et les plus impossibles peu-vent devenir un jour réalité".

Rodica Sabau-Cosmin

Les complexes de Rodicaconfrontée aux jeunes Occidentaux

Libre propos

Les résultats médiocres obtenus par les candidats au baccalauréat ces deux dernières années, dus aux conditions plusexigeantes de surveillance de l'examen, illustrent la dégradation du système éducatif roumain mais aussi l'amoindrissementdu niveau de connaissance des élèves. Alors qu'autrefois parents et enseignants montraient avec fierté les diplômes obtenuspar leurs enfants ou protégés, ils doutent aujourd'hui de leurs valeurs. Mais le problème est-il si nouveau ? Rodica, 27 ans,vit en Belgique. Originaire de Cluj-Napoca, elle se rend compte au contact de jeunes européens que sa culture générale,acquise en Roumanie au lendemain de la "Révolution", encore formatée par l'ère Ceausescu, présentait déjà à l’époque biendes lacunes.

L’ancienne (en haut à gauche) et la nouvelle bibliothèque nationale

Page 23: ROUMANIE 76

Connaissance et découverte

La Véritable tragédie de Panaït Istrati offre justementun témoignage important sur ce voyage. La compagne et futu-re épouse de Kazantzakis, Éléni Samios (1903-2004), le rédi-gea en français peu après la mort d'Istrati, en 1935. Une tra-duction espagnole fut publiée en 1938 à Santiago du Chili parles éditions Ercilla qui avaient déjà publié son livre surGandhi, un livre de Kazantzakis (Le Jardin des rochers) etDestin d'une révolution de Victor Serge. Il n'a jamais étérepublié. L'original français est resté inédit.

Cet ouvrage, qui se lit d'abord comme un récit, rédigéd'une plume enjouée, spontanée et alerte, a ainsi été rédigé enhommage à Istrati. Il relate de façon très vivante les différen-tes étapes d'un voyage de plus de 7000 km dans la Russiesoviétique, notamment en sa partie centre-orientale (après unpassage par Moscou: Kazan, Astrakan, l'Arménie et laGéorgie), où l'éloignement du pouvoir central rend possiblel'expression des cultures locales, et patent le dysfonctionne-ment des réformes engagées par l'État central. On y découvreun Istrati fébrile, déjà malade, mais animé par la volonté farou-che de déceler, derrière les apparences et les discours parti-sans, la réalité d'une révolution à l'issue encore incertaine,quelques années après la grande famine de 1921-1922 - dontle souvenir est alors encore très vif -, la mort de Lénine (1924),et alors que la contre-révolution stalinienne n'est pas encoreachevée.

Intraitable car révolutionnaire dans l'âme

Au fil du texte, le désaccord entre les deux écrivains etamis s'aggrave, bien que leur amitié demeure solide. Certainesde leurs conversations, rapportées par Eleni Samios-Kazantzakis témoignent de l'interrogation sincère d'Istrati sur

sa capacité à rendre compte de la réalité "de terrain", sans pourautant abandonner sa confiance dans la révolution. Encoredavantage peut-être, du violent conflit intérieur résultant de sadouble volonté, en partie contradictoire : celle de rendre comp-te de la réalité - fut-ce contre la révolution -, afin d'en sauverle cours. Ce conflit fut tranché par la parution, dès 1929, dupremier volume de son ouvrage Vers l'autre flamme (dont lesvolumes II et III furent rédigés par Victor Serge et BorisSouvarine). Considéré comme une attaque contre les intérêtsde la révolution russe, cet ouvrage suffit à ternir durablementla réputation de son auteur, dont les œuvres sont longtempsrestées dans l'oubli.

La véritable tragédie de Panaït Istrati par EleniSamios-Kazantzakis, Éditions Lignes; 352 pages, 23,00 €.

Les NOUVELLES de ROUMANIE

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Connaissance et découverteLes NOUVELLES de ROUMANIE

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Entre 1927 et 1929, Nikos Kazantzakis, Panaït Istrati et leurs compagnesrespectives - Eleni Samios et Bilili - entreprennent un long voyage en URSS, afin detémoigner favorablement de l'avancée de la révolution soviétique. Inédit en fran-çais, venant de sortir en librairie sous le titre La véritable tragédie de Panaït Istrati,le récit d'Eleni Samios-Kazantzakis est celui de l'aventure qui conduisit les quatrejeunes gens épris de découverte - et révolutionnaires dans l'âme - depuis Moscoujusqu'aux confins centre-orientaux de l'URSS. À l'occasion de ce voyage, PanaïtIstrati, d'abord enthousiaste partisan de la révolution, dut brutalement déchanter,ayant constaté les dérives et les abus de la bureaucratie soviétique encore naissante.

Née à Athènes en 1903, Eleni Samios-Kazantzakis (1903-2004) rencontre l'é-crivain grec Nikos Kazantzakis, l'auteur de Zorba le Grec et de nombreuxautres romans, en 1920, puis devient son épouse en 1945. Ensemble, ils se

lient d'amitié avec Panaït Istrati et sa propre compagne, Bibili, en 1927, lors de la célé-bration en Russie du 10e anniversaire de la révolution. Débute alors le voyage qu'Elenirédigea pour rendre justice à son ami, dont le présent récit retrace les étapes.

Sept ans avant le Retour d'URSS de Gide

Romancier roumain de langue française, né à Braïla et mort à Bucarest, après avoirséjourné en France, Panaït Istrati (1884-1935) a découvert les œuvres de Romain Rollandaprès la première Guerre mondiale. Il lui adresse alors son premier roman et se lie d'ami-tié avec lui. Dans les années vingt, il se passionne pour la révolution russe et devientcompagnon de route du parti communiste. Accueilli et fêté en URSS lors du 10e anniver-saire de la révolution, il y séjourne à plusieurs reprises. Son engouement affiché pour larévolution lui vaut de pouvoir voyager sans escorte.

Parmi les tout premiers, il devine alors, dès 1927-1929, la réalité de la dictature sta-linienne. Son destin et sa réputation basculent lorsqu'il fait paraître Vers l'autre flamme,confession pour vaincus, dans lequel, sept ans avant le Retour d'URSS d'André Gide, ildénonce avec une grande virulence l'arbitraire du régime soviétique.

L'ouvrage, en trois volumes, est en réalité co-écrit avec Boris Souvarine et VictorSerge. Victime d'une violente campagne de dénigrement de la part des communistes,Istrati se retire en Roumanie, où il meurt de tuberculose à Bucarest en 1935, à l'âge de 51ans, vilipendé tant par les communistes qui le traitent de "fasciste" que par les fascistesqui le traitent de "cosmopolite". Panait Istrati tombe alors dans un oubli quasi completpendant plusieurs décennies ; son œuvre est interdite en France durant la guerre, et enRoumanie durant le régime communiste. Elle est peu à peu rééditée en France à partir desannées 1960, à l'initiative de l'Association des amis de Panait Istrati, située à Valence,dans la Drôme, puis en Roumanie à partir de 1990. Aujourd'hui, Panaït Istrati continue àêtre un auteur très lu - ses œuvres littéraires complètes ont été republiées récemment parPhébus en trois volumes.

Une volonté farouche de déceler la réalité de la révolution soviétique

Panaï Istrati a donc l'immense mérite d'avoir été - avec Victor Serge, dont, il étaitproche - l'un des tout premiers critiques "de gauche" de la contre-révolution stalinienneen URSS avec Vers l'autre flamme (1929), qui lui a valu une campagne de calomniesde la part des staliniens. Dans ce livre, plusieurs fois réédité, il relate notamment les seizemois passés en URSS entre 1927-1929 avec l'écrivain grec Nikos Kazantzakis et leurscompagnes respectives, Bilili et Eleni Samios. La rencontre avec Victor Serge fut alorsdécisive pour ouvrir les yeux des voyageurs sur la réalité de l'URSS. Cependant, NikosKazantzakis ne partage pas immédiatement la réaction virulente de Panaït Istrati, et lesdeux amis se quittent sur un désaccord. Ils reprirent contact par lettre quelques annéesplus tard, jusqu'à la mort d'Istrati.

"Hier au Luxembourg, je relisaisdes textes de Nikos Kazantzakis quime bouleversent toujours tellementils sont beaux… Et je suis tombésur un passage où, à la fin desannées 1920, il visite la Russiecommuniste en compagnie dePanaït Istrati. Après Kiev etLeningrad, il arrive à Vladivostok etraconte qu'il avait convenu avec sescorrespondants que, dans ses lett-res, toute phrase commençant par"toutefois je vous assure" avait lesens exactement contraire à cequ'elle exprimait. C'est ainsi qu'ilécrit: "Toutefois je vous assure qu'il

y a ici une grande profusion de thé,

de beurre, de tout ce qu'on désire et

surtout le pain ! Je vous assure

aussi que si je pouvais, j'y resterai à

jamais"… J'adore ce code destiné àdéjouer la censure !

Vous je ne sais pas, mais moi, deplus en plus, quand j'écoute lesnouvelles à la radio, j'ai l'impressiond'entendre cette formule qui fait dingà mon oreille et, comme une petiteclochette, met mon cerveau enéveil. Quand j'entends les journalis-tes ou les hommes politiques dire :"Et c'est la raison pour laquelle il a

été décidé"…. ou "Ecoutez, je puis

vous assurer que …" je pense à laformule de Nikos Kazantzakis àVladivostok et je ne crois plus untraître mot de ce qui vient après !Peut-être je ne suis pas le seul: hierj'ai entendu cette blague: 100 jour-nalistes sont dans un bateau; lebateau coule. Que reste-t-il? Unimmense espoir! Je ne sais plus sile mot exact était "journalistes" ou"ministres"…

Switchie (Blog)

"Toutefois,

je vous assure…"

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CHISINAU

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LittératureLe romancier francophone de Braïla refusait

La véritable tragédie

de tricher en cachant les horreurs stalinien-

SAPÂNTA l

Extrait 1 : "Un homme sera lehéros de ce livre, un hommefrisant la cinquantaine, hâve, à

la poitrine creuse, aux bons yeux inquietset avides, aux gestes brusques, à l'âmevaste, toujours en ébullition, semblableau pays qu'il tentait de connaître. Unhomme sera mon héros, cependant je par-lerai encore d'un autre homme, son frère-et-compagnon-de-route en ces temps-là,ainsi qu'il aimait à l'appeler. Et je parleraiaussi de la très douce Bilili, Bilili la silen-cieuse, aux yeux sévères de madonebyzantine, la compagne de ces jours fer-tiles en bonheur, en évènements tristes,en nobles idées… Et je me vois encoreobligée d'esquisser - très légèrement - laquatrième figure de ce quatuor vagabond,une jeune grecque qui a ouvert son cœur,

ses yeux et ses oreilles et ne pourra plusoublier ce qu'elle a vécu pendant cetteannée soviétique. Voici donc ces êtresdonquichottesques en marche vers Nijni-Novgorod et sa fameuse Yarmarka".

Extrait 2: "Par l'intermédiaire deLounatcharski et de la très serviable OlgaKameneva, nous recevons chacun deuxpetites cartes nous permettant le libre par-cours sur tous les chemins de fer et lesbateaux soviétiques. Heureux, nous ser-rons nos bricoles et commençons lefameux pèlerinage qui devrait durer deuxans et finir par un chant d'apothéose sur laRussie soviétique. Malheureusement, etsans crier gare, l'affaire Roussakov sedressa devant nous comme une hydre àmille têtes et nous brisa les reins".

Note sur l'affaire Roussakov: "Le1er février 1929, Victor Serge commu-nique à Panaït Istrati un article de laPravda de Leningrad accusant son beau-père, A. I. Roussakov, d'être un koulak,un nepman…

Ce tissu de diffamations se terminaitpar une comparaison entre Roussakov etun assassin récemment fusillé. Le fait quecette famille occupe à Saint-Pétersbourgun grand appartement est l'alibi de cettediatribe (en fait neuf personnes dormentdans quatre chambres!).

La famille est connue pour sa dissi-dence, d'autre part une virago intriguepour déloger les Roussakov du logement.Il en fallait beaucoup plus pour intimiderces fortes personnalités forgées par l'op-position".

"Ces êtres donquichottesques en marche vers Nijni-Novgorod"

de Panaït Istrati

Panaït Istrati (à gauche) et Nikos Kazantzakis, auteur de Zorba le Grec

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Connaissance et découverteLes NOUVELLES de ROUMANIE

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Procureur à Nuremberg, Benjamin Ferencz narre avec passion sa vie au servi-ce de la justice internationale. Un Roumain d'origine hongroise a ainsi joué un rôleimportant dans le plus grand procès de l'Histoire, avant d'émigrer en Amérique etcontinuer sa carrière pour la Défense des droits de l'Homme.

Il a beaucoup d'humour. Et une rage intacte, bien que maintenant nonagénaire,pour combattre l'impunité des tyrans et tortionnaires. Petit juif misérable d'ori-gine hongroise né dans les montagnes de Transylvanie, en Roumanie - "là où il

ne fait pas bon être juif ou tzigane" -, émigré tout gosse dans les bas-fonds de New Yorkavant d'être sauvé par l'école et d'intégrer la prestigieuse faculté de droit de Harvard,Benjamin Ferencz a eu une vie étonnante qu'il raconte avec beaucoup d'auto-ironie, sanspour autant perdre de vue sa passion pour le droit et la justice pénale internationale, dontil fut l'un des grands précurseurs.

Face à face avec le chouchou d'Heydrich

A 27 ans, en 1947, le jeune homme fut procureur à Nuremberg lors du procès cont-re les chefs des Einsatzgruppen, les escouades de policiers, encadrés par les SS, quimenèrent la "Shoah par balle", ces exécutions de masse des juifs au fur et à mesure del'avancée des troupes nazies. Grâce aux 150 tonnes d'archives accablantes retrouvéesdans les ruines de Berlin, il obtint la condamnation à mort de 14 des 24 accusés (4 serontfinalement exécutés). Parmi eux, le sinistre général SS Ohlendorf, dont l'unité fut l'unedes plus sanguinaires.

Benjamin Ferencz alla le voir dans sa cellule peu après le verdict. Plein de morgue,le chouchou d'Heydrich lui lança:"Les Juifs d'Amérique vont souffrir pour ce que vousavez fait". Dans son réquisitoire, le jeune procureur avait martelé: "L'affaire que nousjugeons est un appel de l'humanité à la loi." Des mots qui seront repris tel quel - en hom-mage - un demi-siècle plus tard par Antonio Cassese, le président du Tribunal péna-linternational (TPI) pour l'ex-Yougoslavie. Avant d'en arriver là, Benjamin Ferenczconnut pas mal d'aventures. A Harvard, il avait commencé à travailler sur la notion decrime contre l'humanité, alors à peine ébauchée dans le droit international, mais fut inté-gré dans l'armée comme simple artilleur. Et ses références "harvardiennes" lui valurentsurtout des brimades. Puis il fut muté dans un petit groupe de juristes chargés de menerles enquêtes sur les lynchages dont avaient été victimes les aviateurs anglais et améri-cains abattus au-dessus de l'Allemagne.

“Mère-vieille racontait" est la"chronique d'une mort annoncée" -

celle d'un hameau perdu deTransylvanie - qu'une "ancienne"

s'efforce de retarder en ressuscitantles vieilles histoires, les vieux mys-tères…

Un étranger, visiteur de passage,se trouvera pris dans les rets de cemonde en marge du réel -d'autantplus que, devenue sur le tard unelectrice férue de grande littérature,"Mère-vieille" mâtine les véritablessouvenirs d'indémêlables échos deBoulgakov, d'Italo Calvino, et debien d'autres.

Cet homme, alias le narrateur etl'auteur lui-même, se fera le déposi-taire, puis le transmetteur de cethéritage, après la mort de la conteu-se. La plupart des protagonistes deMère-vieille racontait ont bel etbien vécu ou vivent encore…

Évoquer Gabriel García Márquezn'est pas fortuit: le roman de RaduTuculescu dégage le même air à lafois local et universel. Il dépeint unmonde rude aux lois ancestrales, unmonde des hommes, en apparence,mais de fait subtilement gouvernépar le principe féminin.

Né en 1949 à Târgu-Mures, enTransylvanie, membre de l'Uniondes écrivains de Roumanie, RaduTuculescu est un artiste polyvalent:violoniste, réalisateur radio et télé,chroniqueur de théâtre, dramaturge,traducteur, poète, essayiste, nouvel-liste et l'auteur de sept romans.

Mère vieille racontait, de RaduTuculescu, traduit du roumain parDominique Ilea, collection "Lettres

d'ailleurs", 21e, www.ginkgo-edi-teur.fr

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CHISINAU

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Le petit procureur des Carpates a fait

Benjamin Ferencz au service Livres condamner à mort 14 criminels nazis

Il était aussi à Buchenwald peu après la libération du camp et sonunité commença à travailler sur les crimes nazis. A la fin de laguerre, l'armée lui proposa de rempiler comme procureur - avecrang de général - pour mener les investigations et les procès, dontcelui des sinistres Einsatzgruppen.

Cheville ouvrière de la Cour Pénale Internationale

Juriste précis et passionné, parfait polyglotte parlant le yid-dish, le hongrois, l'anglais, le français et l'allemand, BenjaminFerencz n'a cessé d'œuvrer sur le terrain de la justice pénale inter-nationale. Après avoir quitté la magistrature militaire, il travaillacomme avocat des associations juives qui veulent obtenir réparation pour les persécutions, confiscations, exterminations menéespar le régime nazi. Il s'engagea ensuite dans la bataille pour une justice pénale internationale qui vit la naissance du TPI pour l'ex-Yougoslavie, puis celui pour le Rwanda. Leur succès permit la création de la Cour pénale internationale, une instance permanen-te pour juger les auteurs de génocides, crimes contre l'humanité, crimes de guerre… A ceux que cette Cour encore bien lente à s'af-firmer laisse sceptique, il dit: "Les criminels responsables de telles horreurs savent désormais qu'ils risquent de faire face auxjuges." Marc Semo (Libération)

Mémoires de Ben, de Benjamin Ferencz, Editions Michalon, 288 pp., 23 €.

Mère-vieille racontait

Originaire de Soultz (à côté de Guebwiller), Ralflo, alias Raphaël Wehrlen, est devenu une véritable popstar enRoumanie où il vit depuis quatre ans. La chanson Mi-e sete de tine (J'ai soif de toi) qu'il interprète (et a coécrite) avecle groupe Alb Negru a été le tube de l'été dernier et est resté n°1 plusieurs mois au hit-parade roumain. Les différents

clips du morceau totalisent près de 15 millions de vues sur les différents sites d'hébergement de vidéos en ligne (essentiellementYoutube). Après avoir tenté sa chance en France, aux États-Unis et en Suisse, l'Alsacien a rencontré le succès à 36 ans.

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CAMPULUNG M.

Un Alsacien popstar

de la justice internationale

Des ouvrages d'Eminescu ontété réédités à 20 reprises en2012, chacun à une moyenne

de 3000 exemplaires. Vendus au prixmoyen de 10 lei (2 euros), ils ont rappor-té au total 130 000 euros aux éditeurs.Leur tirage est en augmentation de 5 à10 % car le poète national figure au pro-gramme du baccalauréat depuis deuxans… Mais à contrario, du fait de sa lec-

ture obligatoire, son œuvre est devenuerébarbative aux yeux de nombreuxRoumains et les livres réimprimés étanttoujours les mêmes, ils en donnent unevision réduite.

La poésie est tombée en désuétude enRoumanie, les jeunes lecteurs se conten-tant de feuilleter les volumes et recueilsqu'ils trouvent dans les rangements -bibliothèques de leurs parents. Le cri-

tique littéraire Lucian Pricop a calculéque si Eminescu vivait de nos jours, sesdroits d'auteur de 7 % ne lui assureraientqu'un revenu de 800 € par mois. L'auteurle plus publié de toute l'histoire roumaineest aujourd'hui largement dépassé en ter-mes de ventes par des écrivains commeMircea Cartarescu, Andrei Plesu etNeagu Djuvara, les seuls pratiquement àpouvoir vivre aujourd'hui de leur œuvre.

Eminescu vivrait avec 800 euros par mois

Du 18 au 23 juillet prochain, la 11ème édition dufestival Peninsula aura lieu non plus à TârguMures, mais dans la nature luxuriante de la vallée

Garbului, près de Cluj-Napoca. L'événement déménage pourapporter son soutien à la plus grande ville de Transylvanie,Cluj, qui sera capitale européenne de la jeunesse en 2015. Lefestival de musique électronique Delahoya sera égalementdélocalisé au même endroit le 14 juin prochain.

Le festival Peninsula est aussi couramment appeléFélsziget en hongrois, dû à sa filiation avec l'institutionSziget, véritable "machine" à créer des festivals en Hongrie et

dans les territoires à forte minorité magyare, comme laTransylvanie. Sa programmation, presque exclusivement hon-groise les premières années, a peu à peu intégré des groupesroumains.

Le succès sans cesse croissant du festival (20 000 visi-teurs en 2003, près de 80 000 visiteurs en 2012) a ensuite per-mis aux organisateurs d'inviter des têtes d'affiche internationa-les, de varier considérablement les styles musicaux sur plu-sieurs scènes différentes et de multiplier les activités propo-sées aux festivaliers. Depuis plusieurs années, le Peninsula estincontestablement le plus grand festival de Roumanie.

Le festival Peninsula déménage à Cluj

Même prisonnier dans l'Allemagne défaite de 1945, le SS fit encore preuvede morgue. Lui, un colonel interrogé par un simple sergent de l'US Army?Juif qui plus est? Il ne répondrait qu'aux questions d'un gradé de son

rang". Alors j'ai dégainé mon revolver et lui ai pointé en plein milieu du visage: 'Écou-te, sale fils de pute! Ou tu me réponds ou je t'explose la cervelle!' Mon index mouraitd'envie d'appuyer sur la détente mais une voix en moi disait: 'Ne fais pas ça, Benny!' J'aiécouté cette voix. J'ai ordonné à l'Allemand de se foutre à poil, je l'ai laissé tout seul puisje suis revenu. Le mec a fini par se mettre à table et à tout me raconter".

Un petit homme de 1,60 m raconte la scène. Sa voix s'est faite brutalement autori-taire, son index droit a pointé un adversaire invisible, son visage s'est métamorphosé.Tour à tour soldat libérateur de l'Europe nazie, débarquant sur les plages de Normandiejusqu'au nid d'aigle d'Hitler, procureur au procès de Nuremberg à 27 ans, avocat des Juifsspoliés, inventeur du concept de justice internationale, Benjamin Ferencz, 92 ans, est untrès vieux monsieur drôle comme tout mais intimidant, pétant la forme, qui raconte savie grandiose dans un livre de Mémoires publié cette semaine en France). Une vie qu'ilrésume en cinq mots: "Le droit, pas la guerre." (Extrait du JDD)

"Le droit, pas la guerre"

Ben Ferencz et la juriste auprès du TPI, Leila Sadat

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Connaissance et découverte

Francophones sans frontières"est une nouvelle plateformeInternet qui a été mise en place

par les jeunes francophones des paysd'Europe centrale et orientale, lors d'unséminaire en avril 2012, en Macédoine.Ce réseau a pour but de promouvoir lalangue française dans ces pays mais ausside servir de point d'échanges d'informa-tions pour une meilleure coopération desjeunes francophones, ainsi que de sensi-biliser ces personnes à la mobilité euro-péenne. Ce projet est soutenu financière-ment par l'Organisation internationale dela francophonie (OIF).

Plus d'infos sur http://reseau-fran-cophonie.org/Pagedaccueil.aspx.

En Roumanie, le réseau est présentpar l'intermédiaire de l'Association desÉtudiants Francophones de Iasi (AEFI)qui s'est constituée en novembre 2001,suite à l'initiative de plusieurs étudiantsde différentes facultés, originaires de plu-sieurs pays (le Congo, la France, leMaroc, le Portugal, la République deMoldavie, la Roumanie, la Tunisie, etc.),unis autour d'une langue - le français, etautour d'une conception de vie en com-mun - la francophonie. Elle vise à dyna-miser et à faire la promotion, parmi lesjeunes, les étudiants de Iasi, des valeursde la francophonie : la langue française,la diversité culturelle et linguistique, lapaix, la démocratie et les droits de l'hom-

me, le volontariat, le dialogue multicultu-rel. Son slogan est "Sois différent!Implique-toi!".

L'Association compte 130 membres,regroupés en 5 départements: relationsexternes, projets, ressources humaines,marketing et collecte de fonds. Depuisseptembre 2007, l'AEFI est membre del'Alliance Nationale des Organisationsdes Étudiants de Roumanie (ANOSR), laplus grande fédération étudiante repré-sentative au niveau national.

Contacts: Téléphone: 004 0748 918450, Courriel: [email protected]. Lesiège de l'AEFI se trouve à l'InstitutFrançais Iasi, 26 bd. Carol Ier, BP 207OF PTTR 1, 700750, Iasi, Roumanie.

Les NOUVELLES de ROUMANIE

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Connaissance et découverteLes NOUVELLES de ROUMANIE

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Débuté en 1943, enterré et enfin exhumé, le roman de Dinu Pillat, "En atten-dant l'heure d'après" met en scène de jeunes fascistes roumains. C'est un livre quin'aurait jamais dû être publié.

Enterré dans les archives de la Securitate, la police politique, "En attendantl'heure d'après" était toujours considéré comme disparu même quand ellesfurent ouvertes après le renversement du régime communiste. "Le plus éton-

nant dans le cas de ce roman, c'est sa biographie qui entretient une étrange relation avecle titre lui-même", résume dans la postface le philosophe et ancien dissident GabrielLiiceanu, qui l'a publié dans sa maison d'édition Humanitas, juste après qu'un chercheurait retrouvé par hasard le dossier avec l'une des deux copies dactylographiées du manus-crit. "Il a son heure d'après, celle où il ressuscite après que le temps de l'histoire, qui l'a-vait fait naître puis l'avait condamné à mort, atteint son terme", écrit le philosophe, quine cache pas son émotion face à ce qu'il considère être "la plus bouleversante biogra-phie de livre de toute l'histoire du roman roumain".

Roman psychologique mais aussi roman politique, ce livre au destin mouvementé aété commencé en 1943 par un jeune et prometteur intellectuel de bonne famille, DinuPillat. Il le continua clandestinement pendant les années les plus noires du communismeet l'acheva en 1955, sans aucun espoir de le voir un jour publié.

Des "messagers" fascinés par un terrorisme purificateur

Son thème sentait pour le moins le soufre: il met en scène une certaine jeunesse rou-maine de l'entre-deux-guerres qui, par rejet du vieux monde bourgeois, milita dans l'or-ganisation fasciste "Légionnaire" fondée sur la mystique d'une violence rédemptrice etun antisémitisme virulent. Elle rêvait d'une "transfiguration de la Roumanie", selon letitre d'un ouvrage d'Emil Cioran, fasciné comme nombre d'autres jeunes intellectuels del'époque, dont Mircea Eliade, par ce mouvement qui mena plusieurs attentats retentis-sants avant d'être finalement écrasé par le maréchal Antonescu, dictateur allié du Reichhitlérien, qui les trouvait trop extrémistes et gênaient sa politique.

Comment et pourquoi devient-on un fanatique de l'antiliberté ? Cette question étaitdéjà au cœur du roman de Mihail Sebastian Depuis deux mille ans, où ce jeune écrivain

juif roumain tentait de com-prendre les raisons du bascu-lement de ses amis dans ceque Ionesco, nourri de lamême expérience, appela "larhinocérite".

Dans des séquences biendécoupées, au rythme pres-que cinématographique,DinuPillat raconte la Roumanierongée par la corruption etl'injustice sociale où une jeu-nesse désespérée et révoltéese laissait séduire par ceuxqu'il appelle dans le livre "lesmessagers".

Il y a là Rodaru, l'étu-diant en médecine qui va de village en village susciter la révolte et les attaques contreles Juifs, Vassia, le fils de paysans hébétés par une misère séculaire, Stefanuca, le fils degrand bourgeois qui, par fidélité à son christianisme, hésite à tuer, etc. Autant de person-nages écœurés par les éternels arrangements et compromis "de ce pays roumain à lapériphérie de l'Orient" et que fascine un terrorisme purificateur.

Récit féroce et jubilatoire dugouffre identitaire et culturel où l'ef-fondrement de "l'Utopie" a précipi-té la société roumaine, Venu dutemps dièse, épopée parodique etamère, est un roman et aussi untémoignage documenté sur le post-communisme en Roumanie.L’auteur, Bogdan Suceava , d'uneplume acérée, plonge le lecteur aucœur de cet invraisemblable maré-cage dans lesquels ses sontengouffrées toutes les dérives spiri-tuelles que l'on peut rencontrer:pseudo-sciences, sectes diverses,charlatanismes et messianismes entous genres.

Elles font le lit, la richesse et lemalheur de tous ceux qui s'y enli-sent ou y prospèrent: nationalismesmystiques, millénarismes, savantsfarfelus, ex-agents de la Securitateet nouveaux mouchards, jeunesilluminés manipulables, marginaux,exclus, mythomanes insatisfaits,prélats dépassés, politiciens cor-rompus, médias dilettantes, nou-veaux riches désœuvrés…

Venu du temps dièse a déjàété traduit en Hongrie, Bulgarie etaux Etats-Unis.

L'auteur, Bogdan Suceava, 44ans, est né à Curtea de Arges en1969 et est membre de l'Union desécrivains de Roumanie. Egalementmathématicien, il enseigne à laCalifornia State Université deFullerton, aux Etats-Unis. Il seraprésent au salon du Livre de Paris,fin mars.

Venu du temps dièse deBogdan Suceava, traduit du rou-main par Dominique Ilea, Gingkoéditeur, collection "Lettres

d'ailleurs", 318 pages, 21 €.

Venu du temps dièse

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CHISINAU

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de jeunes fascistes roumainsDinu Pillat met en scène Livres

"En attendant l'heure d'après"

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Dinu Pillat et sa soeur, Pia. L’écrivain resta dans le collimateur de la police politique jusqu’à sa mort, en 1975.

Fin janvier, le Conseil général de Bucarest a approuvé un projet du ministère des Affaires étrangères roumain qui consis-te à baptiser "Place de la Francophonie" l'intersection du boulevard Libertatii et de Calea 13 Septembrie, dans le 5èmearrondissement de Bucarest. La "Place de la Francophonie" sera inaugurée le 20 mars prochain, à l'occasion de la célé-

bration des 20 ans d'adhésion de la Roumanie à l'Organisation internationale de la francophonie (OIF) en tant que pays membre.

De nombreuses expressionsfrançaises et roumaines trou-vent une concordance dans

l'autre langue, notamment celles emprun-tées aux animaux. Dans ses précieux dic-tionnaires franco-roumain (et inverse),publiés aux éditions Teora ou Corint,Elena Gorunescu en donnent de multiplesexemples.

Ainsi "être le dindon de la farce"devient en roumain "a iesi pacalit" (se

faire avoir). On peut aussi "a se umfla înpene ca curcanul" (gonfler ses plumescomme un dindon), soit "se pavanercomme un dindon". Quand à être traitéede "gâsculita" (petite oie) ou "petitedinde"… çà ne fait jamais plaisir. Et cen'est pas mieux si c'est "curca plouata"…dinde ("poule mouillée"). A en donner "lachair de poule" ("a se face pielea degaina"). Ce n'est pas une raison pour "astrica orzul pe gâste" (gaspiller de l'orge

pour des oies), autrement dit "donner dela confiture aux cochons"! De toutesfaçons, les oies ne sont bonnes à rien,sauf à "laisser entrer le loup dans la ber-gerie" ("când gâstele pazesc sratul, putinramene gradinarului"… “quand les oiesgardent le jardin, il ne reste pas grand-chose au jardinier”).

Enfin, n’oublions pas que nos chers“poulets” (gendarmes ou flics) devien-nent “curcani”, dindons en Roumanie !

Une "Place de la Francophonie" à Bucarest

Un défi ouvert au pouvoir communiste

Raconter sans complaisance mais aussi sans anathèmeidéologique cette jeunesse perdue dans le mouvement légion-naire représentait un défi ouvert au pouvoir communiste. DinuPillat fut arrêté en 1959, et son manuscrit saisi. Les phrasesprononcées par les protagonistes du roman servent à nourrirl'acte d'accusation sur ses prétendues "sympathies avec le mou-vement légionnaire". Il fut jugé en même temps que le philo-sophe Constantin Noica, Nicolae Steinhardt et d'autres écri-vains dans l'un des plus retentissants procès mené par les com-munistes contre les intellectuels.

Condamné à vingt-cinq ans de travaux forcés, il sortira

finalement quatre ans plus tard. Interdit de toute publication, ilresta dans le collimateur de la police politique jusqu'à sa mort,en 1975. Ses premiers livres - Journal d'un adolescent, EtrangeJeunesse, la Mort quotidienne -, publiés avant la prise du pou-voir par les communistes, étaient ressortis dès la fin des années90. Il manquait ce qu'il considérait être son meilleur roman. "Ilreste maintenant à la critique littéraire la mission de dire laplace de ce livre troublant dans l'histoire de la littérature rou-maine, après cinquante années perdues par l'Histoire", écritGabriel Liiceanu.

Marc Semo (Libération)En attendant l'heure d'après, Dinu Pillat, Traduit du

roumain par Marily Le Nir. Edition des Syrtes, 222 pp., 21 €.

Francophones sans frontièresFrancophonie

Une poule mouillée en France… une dinde en Roumanie

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Connaissance et découverteLes NOUVELLES de ROUMANIE

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Connaissance et découverteLes NOUVELLES de ROUMANIE

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Le "Comissaire Navarro" roumain est mort. A 82 ans, Sergiu Nicolaescu - réali-sateur, acteur et scénariste à grand succès - a succombé le 3 janvier dernier à un arrêtcardiaque, à Bucarest. Né le 13 avril 1930 à Târgu Jiu, il avait grandi à Timisoara,avant de suivre des études d'ingénieur à l'Ecole polytechnique de Bucarest, et de sefaire embaucher par le studio de cinéma Sahia de la capitale comme opérateur. Unexploit et une chance inouïs, les studios de cinéma roumains étant équipés à l'époqued'installations dernier cri et affichant de grandes ambitions.

Jeune ingénieur devenu cinéaste, Sergiu Nicolaescu a fait ses débuts en 1959, à 29ans. Son court-métrage La Mémoire de la rose lui valut une sélection à Cannes etun voyage en France, où il établit des contacts dans le monde de la production.

En 1966, il réalisait son premier long-métrage, Les Daces (l'équivalent en Roumanie desGaulois en France), une co-production roumano-française, avec Marie-José Nat etRichard Harris dans les rôles principaux, qui inaugurait une série de films historiques trèsen phase avec la propagande communiste, matinée du nationalisme de l'époque.

Des grandes fresques historiques orientées

La première, qui eut lieu en 1967 surles Champs-Elysées, en face du Fouquet's,inaugurait la carrière du jeune réalisateurroumain. "J'avais 37 ans, et j'éprouvais uneimmense satisfaction, déclarait-il dans uneinterview publiée peu avant sa mort. C'étaitle début de ma carrière internationale". En1967, il assistait le réalisateur américainRobert Siodmak dans la réalisation du long-métrage La Bataille pour Rome, avecOrson Welles dans le rôle principal.

Trois ans plus tard, le metteur en scèneentreprenait sa deuxième grande fresquehistorique, Mihai Viteazul (Michel leBrave) consacrée au premier personnagequi réussit en 1601 à unir pour la premièrefois tout le pays. Nicolaescu souhaitaitconfier la production de ce film aux studioshollywoodiens et engager des stars mondia-

les, dont Orson Welles, Elizabeth Taylor, Richard Burton, Charlton Heston (Ben Hur)étant pressenti pour le rôle principal. Ceausescu coupa court à son ambition, l'obligeant àtourner dans un studio communiste tchécoslovaque et en Turquie, ainsi que d'avoir recoursà des acteurs roumains. Finalement, cette décision permit à des artistes roumains de faireconnaître leurs talents, souvent immenses, comme ce fut le cas d'Amza Pellea qui incarnasuperbement le héros national.

Nicolaescu prit alors l'habitude de tourner avec tous les grands noms du cinéma rou-main, malheureusement connus uniquement à l'intérieur des frontières : Florin Piersic,Septimiu Sever, Ilarion Ciobanu, Mircea Albulescu, Ion Besoiu, Olga Tudorache,Gheorghe Dinica, Stefan Mihailescu-Braila, Jean Constantin, Sebastien Papaiani, ColeaRautu, Gina Patrichi, Octvavina Cotescu, Iurei Darie, Ernest Maftei…

Un commissaire communiste en lutte contre les méchants capitalistes

Parallèlement, le réalisateur, à la belle prestance et au visage empreint de dignité,interpréta lui-même des rôles phare de l'histoire roumaine qu'il mettait en scène et enexergue, Mircea cel Batrin (Mircea le Vieux), le maréchal Averescu, grande figure de la

La décision du réalisateur rou-main Sergiu Nicolaescu, décédé àl'âge de 82 ans, de se faire inciné-rer a provoqué un tollé enRoumanie: l'Eglise orthodoxe arefusé de célébrer des obsèquesreligieuses tandis que des télévi-sions diffusaient en boucle desdébats à ce sujet. Pendant que sadépouille recevait les honneursmilitaires dans un cimetière deBucarest, l'épouse du réalisateur,35 ans, de 47 ans plus jeune etavec laquelle il s'était marié alorsqu'elle avait 19 ans et lui 66, aégalement été prise à partie, sonmanteau de couleur blanche cho-quant certains admirateurs ducinéaste. Des dizaines d'entre euxl'attendaient à la sortie de la céré-monie et l'ont huée en criant"Honte à toi". Plusieurs se sontplaints de n'avoir pu voir le corpsdu cinéaste, critiquant vertement lafamille, le cercueil étant fermé,contrairement à la coutume enRoumanie. Plusieurs ont mêmeavancé qu'il ne s'y trouvait pas,aucune fumée n'en étant sortie lorsde la crémation.

"Pourquoi on ne l'a pas enterré?

Il fait partie du patrimoine national,

le Premier ministre aurait dû inter-

venir", a lancé une femme. L'Égliseorthodoxe roumaine, estimant que"l'incinération est une pratique non-

chrétienne", l'Archidiocèse deBucarest avait demandé en vain àla famille du réalisateur de l'enter-rer selon la tradition religieuse "afin

de garder le renom de Sergiu

Nicolaescu intact dans la conscien-

ce du peuple roumain, orthodoxe à

88 %".

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Une incinérationcontroversée

Première Guerre mondiale mais qui avait aussi durementréprimé la révolte de la faim des paysans en 1907 (Rascoala),le maréchal Antonescu, qu'il tenta de réhabiliter malgré sapolitique antisémite, le roi Carol 1er. Sergiu Nicolaescu seconsacra aussi a développer les à-côté du cinéma roumain,ouvrant dans les années 70 la premières école de cascadeurs etde costumières.

Mais sa grande histoire d'amour avec le public roumaindébuta en 1972, lorsqu'il commença à réaliser une série où iltient aussi le rôle du commissaire Moldovan, personnagedevenu célèbre chez ses compatriotes. C'est l'époque oùCeausescu instaurait le culte de la personnalité, qui débouche-ra sur une des pires dictatures communistes. La propagandebattait son plein et Sergiu Nicolaescu sut donner chair à uncommissaire communiste en lutte contre les méchants capita-listes. En dépit de l'idéologie du Parti communiste qui impré-gnait ces films, le commissaire Moldovan devint très vite aussipopulaire que, plus tard, le "Commissaire Navarro" interprétépar Roger Hanin en France.

"J'avais acheté une carabine à Paris pour régler son compte à Ceausescu"

En cinquante ans de carrière, Sergiu Nicolaescu aura réali-sé, écrit plus de soixante films et joué dans une trentaine d'en-tre eux. S'il fut adulé du public, les critiques se montrèrent réti-cents à l'égard de ce réalisateur obsédé par les grandesfresques historiques dont il tenait à jouer les héros. "Dans sesfantaisies, il était toujours le roi, King Kong si possible: ungéant qui survit à tout", affirme Andrei Gorzo, critique decinéma. Cependant, le réalisateur resta très populaire dans sonpays, même après la chute du régime communiste en 1989,lorsqu'il retourna sa veste et se prétendit révolutionnaire, écri-vant plusieurs livres dans la foulée pour justifier son attitudeet le déroulement des évènements qui venaient de se produire.

Nicolaescu laissa même courir le bruit, sans le démentir,qu'il se préparait à liquider Ceausescu: "J'avais acheté à Paris

une carabine 22 long rifle avec lunette de visée et silencieux,une arme similaire à celle qui avait tué Kennedy. Dans monfor intérieur, je me disais qu'il pourrait bien arriver la mêmechose à Ceausescu". Après la "Révolution", le réalisateur sedéfendit alors comme un beau diable d'avoir jamais pactiséavec Ceausescu: "Je ne l'ai rencontré que trois fois dans mavie" plaidait-il, "mon père avait été déporté au Canal par lescommunistes, je ne pouvais aimer ce régime mais je m'en suisservi. J'ai ainsi pu filmer pour la première fois une église,montrer des enfants chantant des colinde".

Sénateur privilégié pour toucher des subventions

Thuriféraire de l'apparatchik Ion Iliescu, le tombeur ducouple Ceausescu, il fut élu sénateur PSD de 1990 à 2012. Soninfluence politique lui permit en particulier d'avoir un accèsprivilégié aux fonds du Centre national du cinéma, alors que lanouvelle génération de cinéastes roumains était systématique-ment privée de subventions.

Serge Nicolaescu balayait toutes ses critiques d'un reversde main, rappelant que 135 millions de téléspectateurs et spec-tateurs en Roumanie avaient vu ses films et plus d'un milliarddans le monde. Le 6 décembre dernier, alors que sa santédéclinait très vite, Târgu Jiu, sa ville natale, le faisait citoyend'honneur lors de l'inauguration d'un nouveau cinéma qui pre-nait son nom.

l SIGHISOARA

Sergiu Nicolaescu dans l’un de ses derniers rôles : Le roi Carol 1er

CinémaSergiu Nicolaescu aura réalisé plus

Serviteur du régime

de soixante films et joué dans une trentaine

pour la survie de son art

Pozitia Copilului" (Child's Pose), du réalisateur roumain Calin Peter Netzer a remporté, samedi 16 février, l'Ours d'orrécompensant le meilleur film à la 63e Berlinale. Film minimaliste et tourné en majeure partie dans des appartementsprivés, il raconte l'histoire d'une mère de famille faisant partie des nouveaux riches qui cherche à protéger son fils

responsable d'un accident de la route mortel. Luminita Gheorghiu incarne cette femme ultra-possessive, qui se sert de ses relationset de son argent pour éviter la prison à son enfant immature.

Le film, qui traite d'abord d'une relation pathologique mère-enfant, offre une vision sans concession de la Roumanie post-com-muniste et de la corruption qui règne dans les institutions et certains milieux. Outre les lieux de tournage très confinés, la camérane quitte presque jamais les deux principaux protagonistes, renforçant le côté étouffant de la relation, inspirée par celle que le réali-sateur entretenait avec sa propre mère. Le film faisait partie des favoris pour la distinction suprême, parmi une sélection fortementancrée à l'Est et marquée par des portraits de femmes mûres, à l'image de l'héroïne de "Gloria" (Paulina Garcia, ours d'argent,meilleure interprète féminine) ou encore de celle de la production française "Elle s'en va", d'Emmanuelle Bercot, incarnée parCatherine Deneuve.

Le succès de Netser, qui apporte le premier Ours d'or à son pays, illustre une nouvelle fois les remarquables performancesréalisées par le cinéma roumain dans les grands festivals européens.

L'Ours d'or pour le film roumain "Pozitia Copilului" à Berlin

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Connaissance et découverte

Paul Goma n'en crut pas ses yeux: "Comment la pressefrançaise a-t-elle pu écrire des choses pareilles. Si c'étaitL'Humanité, d'accord puisque nous savons nous autres,Roumains, que L'Humanité est écrite à Moscou et traduite àParis". Mais ce sont des coupures du Figaro! Goma estconvaincu que ces "articles" ont été fabriqués par la Securitateet le dit, en face, à son inquisiteur qui lui réplique: "Cette fois-ci, si tu veux le savoir, on n'a même pas falsifié une virgule !".

Admirateur inconditionnel du dictateur roumain

Thierry Wolton apporte les éclaircissements suivants,extraits des pages de son livre: "Ce témoignage du plus célèb-re des dissidents roumains nécessite quelques commentaires. Ilest vrai que contrairement au reste de la presse française, LeFigaro a publié de nombreux articles vantant la liberté, lebien-être dont bénéficieraient les Roumains et pour faire l'élo-ge de la politique de Nicolae Ceausescu. Ces articles ont tou-jours été écrits par un même journaliste bien introduit àBucarest: Michel P. Hamelet.

Auteur d'ouvrages fort complaisants sur ce pays dont Lavraie Roumanie de Ceausescu -gracieusement distribué parl'ambassade roumaine de Paris à ses visiteurs de marque -Michel P. Hamelet séjourne très fréquemment à Bucarestcomme le signale à chaque fois Scînteia (lire ci-contre). Grâceà lui, le quotidien parisien de droite a ainsi pu obtenir uneinterview "exclusive" de Ceausescu pour le quarantième anni-versaire de la libération de la Roumanie (Le Figaro du 19 août1984).

Sous-marin du Parti Communiste… en passant par les Croix de feu, Vichy et les socialistes ?

Le journaliste a parfaitement le droit d'être un admirateurinconditionnel du président roumain. Mais pourquoi ne décrit-il pas l'autre réalité de ce pays qui connaît une terreur compa-rable aux heures noires du stalinisme? Pourquoi ne parle-t-ilpas des terribles conditions de vie faites à ce peuple, le pluspauvre d'Europe après les Albanais?

Comment un journaliste peut-il devenir le simple hagio-graphe d'un despote? Il est impossible de répondre clairementà ces questions. Notons simplement que l'engagement deMichel P. Hamelet pour la cause roumaine s'ajoute à un passépour le moins original.

Hamelet a en effet mené une carrière journalistique peubanale. Sous le pseudonyme de Pierre Forest, il a été avant-

guerre collaborateur du Petit journal appartenant au colonel deLa Rocque, ancien président des Croix-de-Feu et fondateur duparti social français (P.S.F.) qui rallia Pétain en 1940. Pendantla guerre, il a dirigé à Vichy Radio-Travail et créa l'Associationde la presse sociale regroupant des journalistes qui s'intéres-saient aux questions corporatives. Après la guerre, il a militéau parti socialiste".

Ce parcours sinueux est confirmé par André Marty, anciendirigeant du parti communiste français exclu en 1952 qui, dansun livre consacré à son exclusion du PCF, l'accuse d'avoir jouéun rôle de provocateur pour faciliter son renvoi. Une affaireténébreuse dont Hamelet a été l'un des acteurs. Voici commentAndré Marty parle de lui:

"Qui est ce journaliste Hamelet? Un rédacteur du Figaro,mais adhérent au Parti communiste français en 1937, sectionde Levallois (Seine); il s'appelle Daniel Marius, né à LaCiotat. Il s'appelait aussi parfois Pierre Forest avant et aprèsla guerre. A la veille de la guerre, il était un ami intime d'HenriRaynaud membre du comité central du P.C.F. et dirigeant de laC.G.T (…). Dès la Libération, il affichait son amitié avecHenri Raynaud, se présentant comme un "syndicaliste" ;comme tel, il participait à des réunions de communistes mem-bres du cabinet du ministre communiste du Travail. Pendant 3ans, il prenait ses repas au ministère avec les membres duCabinet".

Et André Marty ajoute: "Naturellement, le secrétariat àl'organisation (du PCF) et sa section des cadres cachèrentl'adhésion au parti d'Hamelet-Daniel et sa collaboration avecles communistes du ministère du Travail au lendemain de laLibération".

(à suivre page 54)

(*) CSCE: Conférence sur la sécurité et la coopération enEurope Celle-ci comprenait 35 participants dont les États-Unis, l'URSS, le Canada et tous les pays européens (incluant laYougoslavie), sauf l'Albanie. La première session de la confé-rence s'acheva le 1er août 1975 par la signature des "accordsd'Helsinki", qui n'étaient pas un traité au sens juridique duterme, mais plutôt des engagements politiques, fixant entre lesÉtats une série de principes et de règles de conduite. Par lasuite, la CSCE fut remplacée par l'Organisation pour la sécuri-té et la coopération en Europe (OSCE). Il s'agit là de l'une desorganisations internationales les plus importantes œuvrant enfaveur des droits de l'homme. Sa mission est définie dansl'Acte final de cette conférence, que l'on a appelé "les accordsd'Helsinki".

Les NOUVELLES de ROUMANIE

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La publication en 1983 d'un livre au titre alléchant "La vraie Roumanie deCeausescu" pouvait faire penser, à ce moment-là, que cet ouvrage révèlerait tout ceque la propagande officielle du régime occultait. D'autant plus que son auteur,Michel P. Hamelet, ne pouvait être sujet à caution: il était journaliste au Figaro,journal dont la ligne politique se démarquait nettement de celle de l'Humanité. Etpourtant! Le titre cachait bien son jeu. La lecture de ce livre n'apportait aucun éclai-rage nouveau sur la Roumanie communiste. Au contraire, ses 180 pages noyaient lelecteur dans un surprenant éloge du régime en place et un panégyrique duConducator digne de ses meilleurs thuriféraires.

J'ai pris connaissance avec un très grand intérêt de l'enquête si documentée réali-sée par Michel P. Hamelet sur La Roumanie de Ceausescu et le sérieux, la diver-sité de la recherche, l'abondance des éléments d'informations rassemblés, me

paraissent faire, dès à présent, de cet ouvrage, un ouvrage de référence".Ainsi commence la préface dudit ouvrage, rédigée par Alain Poher, alors président du

Sénat, centriste et européen convaincu. Et celui-cipoursuit: "Mais il y a plus, cette étude d'un journa-liste occidental est d'autant plus digne d'être remar-quée qu'elle a reçu l'aval de la plus haute autoritéde l'Etat roumain, le président Ceausescu qui, enaccordant, à son auteur la longue interview qui latermine, a bien voulu, par ce geste, en faire siennesles conclusions… Cette convergence me paraîtconstituer un gage précieux d'authenticité dont jene saurais trop me réjouir". Le président Poher s'estréjoui trop vite ou bien il a rédigé cette préface sanslire le livre. Car sa lecture était complètement ahu-rissante pour qui connaissait déjà la Roumanie desannées 80.

Où était le précieux "gage d'authenticité" quifaisait de ce livre "un ouvrage de référence"? Il yavait de quoi s'abîmer dans un océan de perplexitéquant aux desseins de l'auteur, Michel P. Hamelet.

Des journalistes approchés par l'ambassade de Roumanie

La réponse est venue quelques années plus tard avec la publication, en 1986, du livreLe KGB en France écrit par Thierry Wolton, journaliste à Libération et l'un des grandsspécialistes mondiaux du communisme avec Nicolas Werth et Stéphane Courtois. Ilraconte notamment comment il fut approché en 1977 par un secrétaire de l'ambassade deRoumanie, chargé des relations avec la presse. Celui-ci lui proposa de réaliser un repor-tage en Roumanie avec une interview exclusive de Nicolae Ceausescu. Et - pourquoi pas?- de l'accompagner d'un article rédigé par le président roumain lui-même, analysant l'im-portance de la conférence de Belgrade qui devait faire un premier bilan des accordsd'Helsinki signés en 1975 dans le cadre de la CSCE*. Thierry Wolton posa une condition:il ne voulait pas donner le seul point de vue des autorités roumaines. Il exigea d'avoir uneentière liberté de mouvement et demanda donc à rencontrer tous ceux qui se battaientpour les droits de l'homme, notamment le célèbre dissident Paul Goma, maintenu en iso-lement total… Il n'eût plus jamais de nouvelles de l'ambassade de Roumanie.

Mais s'interroge Thierry Wolton: "Ce que Libération a refusé, d'autres journaux (etjournalistes français) l'ont-ils accepté ?Oui, apparemment, si l'on se rapporte au témoi-gnage de Paul Goma sur cette époque précise, alors qu'il était isolé du reste du mondepar la police roumaine".

Dans son livre Chassé croisé, l'écrivain raconte avoir vu dans son dossier d'accusa-tion, au cours d'une entrevue avec l'un de ses persécuteurs, des coupures d'un journal fran-çais, chacune accompagnée de sa traduction en roumain.

Les NOUVELLES de ROUMANIE Connaissance et découverte

Le 15 mars 1983, Scînteia l'or-gane central du P.C. roumain rap-portait, l'une des visites du journa-liste français du quotidien LeFigaro Michel P. Hamelet enRoumanie en ces termes, dignesde la meilleure langue de bois etpropres au régime communiste:

"Le président de la RépubliqueSocialiste de Roumanie, le cama-rade Nicolae Ceausescu a reçu,lundi après-midi, le publiciste fran-çais Michel P. Hamelet, en visitedans notre pays (…).

L'hôte a adressé ses vifsremerciements pour la manièredont il a été reçu et a transmis aucamarade Nicolae Ceausescu sesvœux les plus chaleureux pourl'anniversaire de cinquante ansd'activité révolutionnaire au servi-ce des intérêts du peuple roumain,de ses aspirations au progrès etau bien-être, à la paix, à l'amitié età la collaboration avec tous lespeuples.

A cette occasion, le camaradeNicolae Ceausescu a accordé uneinterview au publiciste français quiservira de préface à un nouveauvolume qui doit paraître enFrance, volume consacré à notrepays, à sa politique intérieure etextérieure, à l'infatigable activitédu chef de l'Etat roumain pour laconstruction de la nouvelle sociétéde Roumanie ainsi qu'à sa richeactivité internationale dans l'intérêtde la paix, de la détente, de labonne entente dans le monde, del'accomplissement des idéaux deprogrès et de prospérité de tousles peuples".

Salué par le PC roumain

les louanges de Ceausescu !

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Mémoire Quand Le Figaro chantait

L'ouvrage de Hamelet consacré aux discours de Ceausescu

Les Nouvelles de Roumanie disposent désormais d'un site internet www.lesnouvellesderoumanie.eu sur lequel vous pou-vez consulter sans exception tous les numéros parus depuis le premier (septembre 2000), sauf ceux datant de moins d'un an, réser-vés aux abonnés, dont les internautes peuvent cependant retrouver la présentation.

Les articles parus dans nos colonnes peuvent être repris librement, sous réserve d'être ni dénaturés, ni utilisés dans un senspartisan ou à des fins commerciales, et en précisant bien leur source.

Nous voulons ainsi répondre aux sollicitations de lecteurs, d'associations, de comités de jumelage, de chercheurs, d'étudiants,etc., qui souhaitent se servir de cette base de données pour leurs travaux, leurs bulletins, etc, et que nous mettons volontiers àleur disposition.

Les Nouvelles de Roumanie sur Internet !

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Connaissance et découverteLes NOUVELLES de ROUMANIE

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Connaissance et découverteLes NOUVELLES de ROUMANIE

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En recevant en visite officielle le Général De Gaulle, du 4 au 18 mai 1968,Ceausescu, aux commandes de la Roumanie depuis trois ans, faisait sa premièreapparition marquante sur la scène internationale, qui sera suivie de rencontresavec les plus grandes personnalités de la planète, de Nixon à la reine d'Angleterre.Paradoxalement, il s'agira du dernier voyage important de l'illustre homme d'Etatfrançais, à l'exception d'un déplacement en Turquie à l'automne de la même année.Au cours de son séjour, De Gaulle décorera son hôte de la Grande Croix de laLégion d'Honneur, la plus haute distinction française.

En pleine tourmente de mai 68, le Général De Gaulle n'avait pas voulu ajour-ner ce déplacement qui était le troisième étage de sa fusée visant au rappro-chement est-ouest et à la dissolution des deux blocs antagonistes. En 1966,

après avoir annoncé la ferme intention de la France de quitter l'OTAN, il avait entreprisune mémorable tournée en URSS, la première d'un chef d'Etat occidental dans l'antre del'"Ogre soviétique", histoire de déminer le terrain, provoquant le courroux deWashington et la réprobation de ses féaux de Londres et Bonn.

De Gaulle espérait que ce geste debonne volonté en direction de l'Est seraitsuivi de signes d'ouverture de l'autre côtédu Rideau de Fer. Son périple en Pologne,l'année suivante, devait le faire déchanter.Dans ce pays traditionnellement franco-phone, le Secrétaire général du Parti com-muniste et dirigeant Gomulka, revenu auxplus belles heures de la glaciation, lui fai-sait clairement entendre qu'il n'avait nulle-ment l'intention de quitter le giron deMoscou.

Le président français espérait bien seremettre de cette déconvenue un an plustard, en entreprenant une visite dans uneautre terre francophile, la Roumanie, dontle nouveau leader montrait des velléitésd'émancipation vis-à-vis du "Grand frère"

soviétique. En fait, le voyage aurait dû avoir lieu dès 1967, mais le déclenchement de laGuerre des Six jours entre Israël et ses voisins avait entraîné son report.

"Votre Ceausescu ce n'est qu'un rustre roué et menteur"

L'idée de ce déplacement trottait dans la tête du Général depuis 1963, voici exacte-ment un demi-siècle, date à laquelle les relations diplomatiques entre les deux paysavaient été élevées au niveau d'ambassades. Il avait été préparé par la réception duPremier ministre roumain, Ion Gheorghe Maurer, à l'été 1964, déjà la première d'un chefde gouvernement d'une "démocratie populaire" dans un pays occidental. D'ascendancefrançaise par sa mère - le Quai d'Orsay suggéra de ne pas le rappeler dans les toasts debienvenue… afin de ne pas le mettre en porte à faux vis-à-vis des Soviétiques - Maurer,homme jovial et ouvert, eut un très bon contact avec De Gaulle et racontera des annéesplus tard que sa rencontre avec le "Grand homme" avait été un des moments les plusmarquants de sa vie.

Cette avancée de la Roumanie vers une diplomatie plus autonome était rendue pos-sible par la brouille survenue entre Moscou et Pékin et la surenchère que se livraient dés-ormais les deux églises du monde communiste auprès de leurs ouailles pour s'assurer deleur fidélité. Toutefois, avant l'arrivée du Général, Bucarest avait jugé bon d'envoyerune délégation de haut rang auprès de Brejnev pour le rassurer sur ses intentions.

Mémoire Quand De Gaulle décorait

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Si le voyage du Général De Gaulle en Roumanierevêt un caractère histo-rique, il n'est cependant

pas le seul président français à avoirfait le déplacement pour aller saluerCeausescu. Valéry Giscard d'Estaingy effectua une visite officielle enmars 1979, précédée d'une autre entemps que ministre de Finances en1965 et de parties de chasse à l'oursdont il était friand, à l'invitation du"Conducator".

Jacques Chirac et sa femmeavaient rencontré le coupleCeausescu, de façon également offi-cielle, alors qu'il était Premier minis-tre de Giscard, en 1975 (notre photo). Les Ceausescu luiavaient rendu sa visite à Paris, alors qu'il en était le maire, enjuillet 1980, et il en avait profité pour complimenter son invi-

té, lui déclarant : "Vous avez résolument engagé votre pays surla voie de l'industrialisation et duprogrès social"… ce qui était allédroit au cœur des Roumains, faisantla queue dès deux heures du matindevant leurs magasins.

François Mitterrand avait annu-lé son déplacement à Bucarest, audébut des années 80, à la suite destentatives d'assassinats effectuées enFrance par la Securitate sur les écri-vains Paul Goma et Virgil Tanase oùils bénéficiaient du statut de réfugiépolitique. Ce ne sera que partieremise pour le Chef de l'Etat fran-çais qui sera le premier dirigeant

occidental à venir saluer Ion Iliescu en avril 1991, méconten-tant les démocrates roumains, toujours très exigeants sur lesmessages envoyés par la France.

Parties de chasse, compliments et tentatives d'assassinats

Cette situation surprenante s'ex-plique. L'enquête de Thierry Woltonrévèle que les services roumains dedésinformation ont toujours préféréagir par journaux de droite, voired'extrême droite,interposés. Lesagents de Bucarestse sentaient parfaite-ment à l'aise dans cesmilieux. "Ce n'est

guère étonnant, écrit-

il. Seuls des naïfs

peuvent encore croire

que communisme,

racisme et même fas-

cisme sont antino-

miques. (…) Le KGB

manipulait la plupart

des groupes néo-

nazis européens. A

une moindre échelle,

la Securitate a réussi

à infiltrer des organisations et des

revues d'extrême-droite occidenta-

les, souvent à leur insu".

Michel P. Hamelet avait aussipublié en 1971 un recueil des tex-tes essentiels de NicolaeCeausescu et, en 1987, un livre desouvenirs intitulé Un prolétaire auFigaro. Il était resté particulière-ment discret après la chute de ladictature communiste. Il fut porté àla présidence du conseil de sur-veillance du Figaro en 1993.

Il est mort en septembre 2000 àl'âge de 92 ans sans qu'une seuleréponse ait été apportée aux ques-tions engendrées par l'ambiguïté deson engagement au service de cau-ses indéfendables.

Yves Lelong

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Les journaux de droitebien vus à Bucarest

De Gaulle se rendra d'ailleurs vite compte de leurs réali-tés. Il se heurtera tout de suite à un mur quand il expliquera àCeausescu sa politique vis-à-vis de l'Amérique - une amie etune alliée mais aux tendances hégémoniques qu'il faut endi-guer - l'invitant à en faire de même à l'égard de l'URSS.Ceausescu dévoilera alors son double langage: des mots sur lavoie indépendante de la Roumanie pour la galerie et sa popu-larité intérieure mais un ancrage inflexi-ble à l'Est. Recevant Maurer en audienceprivée à l'ambassade de France, leGénéral lui confiera: "Votre Ceausescuce n'est qu'un rustre roué et menteur"…Ce qui ne l'empêchera pas de lui remett-re la plus haute décoration française.

Le "Conducator" se lâche

L'accueil réservé à De Gaulle dès sadescente d'avion fut indescriptible. Unevague d'enthousiasme spontané emportala foule massée sur les trottoirs qui agitaient les petits dra-peaux des deux pays que les autorités avaient fournis et desbouquets de fleurs. "Les Roumains fêtaient la visite de laFrance en la personne du Général De Gaulle" se souvenaitdes années plus tard son interprète et écrivaine dissidente réfu-giée en France, Sanda Stolojan. Cette ferveur dura tout au longdu voyage qui conduisit la délégation française jusqu'àCraiova.

Ceausescu lui-même paraissait transporté. Peu habitué àimprovisé ses discours, il se lançait dans des déclarationsenflammées, ses feuillets à la main, scandant avec son accentde paysan oltène "Ieuropa, Ieuropa", reprenant l'hymne à l'in-

dépendance de l'Europe que De Gaulle tentait d'insuffler dansces terres hostiles. Bien sûr sans lendemain…

Elena et les mauvaises langues

Cette visite était aussi un examen de passage pour ElenaCeausescu qui faisait ses premiers pas sur la scène internatio-

nale et entendait bien rivaliser avec ces"Parisiennes arrogantes" qui s'imaginentécraser le monde entier avec leurs maniè-res de bourgeoises. A savoir "TanteYvonne" ( !), et les femmes de Couve deMurville, ministre des Affaires étrangèreset de Bernard Tricot, Secrétaire généralde l'Elysée. Elle se fit confectionner undeux-pièces teinte pastel, arbora une coif-fure moderne et jeune, cheveux coupésdroit sous les oreilles et teints en châtainclair… une apparence qu'elle conserverapar la suite. Sanda Stolojan, elle, n'a que

le souvenir d'une femme insipide, mal maquillée, répondantpar monosyllabes, passant son temps à décrier les autres, tota-lement éclipsée par le charme de l'épouse de Maurer. La gran-de chimiste de "réputation internationale", spécialiste despolymères, n'arrêtait pas de déblatérer sur "ces Françaises quis'habillent avec du tergal bon marché". Comme les femmessont charitables par nature, ces dernières se vengeront à leurretour à Paris. Sanda Stolojan rapporte que dans les conversa-tions du XVIème, on ne parlait que "des manières de paysansdes Ceausescu" essuyant leurs couteaux sur le bord des assiet-tes ou dormant en famille dans une même pièce, les garçonsdans le lit de leur père, la fille dans celui de sa mère!

Ceausescu de la Grande Croix de la Légion d'Honneur

(suite de la page 53)

Le Général misait sur la Roumanie pour mettre fin à la division de l'Europe

Jacques et Bernadette Chirac reçus par le couple Ceasusescu

La cérémonie du pain et du sel, à Craiova, quiréserva au Général un accueil très chaleureux.

Le général De gaulle fut le premier chef d’état occidental à êtreaccueilli dans un pays communiste. Mais en plein mois de mai

1968, sa visite fut complètement ignorée par les Français.

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Connaissance et découverte

Construit en écartement large (de type russe, soit 1 524mm), le tronçon entre l'ancienne capitale de la Moldavie et leposte frontière d'Ungheni a été partiellement modifié pourfaciliter le passage par la Roumanie des armées tsaristes enga-gées dans des opérations militaires contre les Turcs, sur le ter-ritoire actuel de la Bulgarie. De l'autre côté de la rivière, lestroupes roumaines ont quant à elles établi une ligne à écarte-ment européen standard (1 435 millimètres).

En 1918, après la proclamation de la réunion de laBessarabie (partie de la Moldavie jusqu'alors contrôlée par laRussie) avec la Roumanie, l'intégralité de la voie ferrée Iasi-Chisinau fut refaite selon l'écartement standard.

En 1940, la Bessarabie, de nouveau annexée par l'URSS etdevenant la Moldavie soviétique, le réseau ferroviaire revientalors à l'écartement large. Lequel changea une fois encore àpartir de juin 1941 pour permettre le passage des troupes del'Axe dans leur offensive contre l'armée Rouge. Plus tard, en1944, lorsque, après un bref retour dans le giron de laRoumanie, entre 1941-1944, la Moldavie fut réintégrée dansl'URSS, seul le tronçon situé sur le territoire roumain revint àl'écartement standard. Aujourd'hui, l'écartement large est tou-jours en vigueur dans les chemins de fer moldaves, ce quiexplique, avec les changements de locomotives, l'interminabledurée du trajet entre Iasi et Chisinau.

Les NOUVELLES de ROUMANIE

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Les NOUVELLES de ROUMANIE

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Le pont sur la rivière Prout qui relie les villes de Iasi (en Roumanie) et d'Ungheni(en Moldavie) est un monument protégé par l'Etat. "Nous l'appelons la tour Eiffelcouchée. Bien qu'il soit d'une rare beauté, il ne peut être admiré par les touristes, caril est situé sur la frontière", explique Alexandru Ambros, le maire d'Ungheni.

Les occasions de visiter le pont frontière entre la Roumanie et la Moldavie sontrares. En 2012, il a été ouvert au public à deux reprises, le 27 avril, à l'occa-sion du 135e anniversaire de sa mise en service et, le 1er septembre, pour les

"jours d'Ungheni". La première voie ferrée à avoir traversé le Prout, frontière naturelleséparant les deux parties de l'ancienne Moldavie, aujourd'hui divisée entre la Roumanieet la république de Moldavie, a une histoire bien à elle. Entrée en fonction en 1876 (dutemps où la Moldavie faisait partie de la Roumanie), la ligne Iasi-Chisinau-Ungheni a étévoulue à la fois par la jeune principauté roumaine, qui cherchait à ouvrir une nouvelleroute vers le port ukrainien d'Odessa, et par l'Empire tsariste, qui avait des vues sur lasphère d'influence géopolitique de l'Empire austro-hongrois, [auquel appartenait, entre1868-1918, la partie centrale de la Roumanie.

Rencontre au sommet entre le tsar Alexandre II et Carol 1er de Roumanie

A l'issue de négociations engagées en 1869 après une rencontre entre le tsarAlexandre II et le prince Carol Ier de Roumanie, les deux pays décidèrent de créer un nou-veau passage frontalier au niveau d'Ungheni. Commencée au printemps 1871, la construc-tion de la ligne de chemin de fer progressa relativement vite, et le 28 avril 1873, la Sociétérusse de navigation et de commerce inaugurait les 72 kilomètres du premier tronçon, réali-sés par la société Lidkowski. Au début de la même année, la première entreprise privéede construction ferroviaire de Rouma-nie, dirigée par l'ingénieur Grigore Heliad, lança lechantier des 21 kilomètres reliant Iasi à Ungheni, du côté roumain, tronçon officiellementmis en service en août 1874. Toutefois, la nouvelle jonction transfrontalière entre la

Roumanie etl ' E m p i r erusse ne s'ef-fectua que le12 février1876, avecle passagedu premiertrain au-des-sus du Prout.Construit audépart touten bois, lepont n'étaitpas assez sûr

pour résister à de fréquentes traversées. Or la détérioration rapide de la situation géopoli-tique dans les Balkans nécessita la mise en œuvre d'une version définitive, qui fut conçueet construite par le célèbre ingénieur français Gustave Eiffel.

Ecartement des rails variant au gré des guerres et mésententes

Inauguré le 14 mars 1877 et très utilisé pendant la guerre russo-turque de 1877-1878,ce pont métallique est toujours en fonction aujourd'hui. Les trains de voyageurs et de mar-chandises qui transitent entre la Roumanie et la république de Moldavie l'empruntent quo-tidiennement. L'un des aspects les plus intéressants de l'exploitation de ce chemin de fertient aux changements périodiques de l'écartement des rails, qui se sont succédé au gré desguerres et mésententes qui ont rythmé les relations russo-roumaines.

Le pont sur la rivière

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2013 comptera au total 12jours fériés, dont 8 seulementtombant pendant la semaine, lesquatre autres se situant pendantle week-end:

Fête du travail : mercredi 1ermai

Pâques orthodoxes: diman-che et lundi 5-6 mai

Pentecôte : dimanche et lundi23 et 24 juin

Assomption : jeudi 15 aoûtFête Nationale et de l'apôtre

André (Saint patron de l'Egliseorthodoxe roumaine) : dimanche1er décembre

Noël : mercredi et jeudi 25-26décembre

Nouvel an : mercredi et jeudi1er et 2 janvier 2014

Il est à prévoir que les Rou-mains profiteront de la proximitédu 1er mai et de Pâques pourfaire le pont du mardi soir 30 avrilau mardi matin 7 mai, la Rouma-nie vivant au ralenti pendant cettetrêve. A noter que Pâques enOccident se célébrera cinq semai-nes plus tôt, les dimanche-lundi31 mars et 1er avril.

La date très tardive de laPentecôte, les 23-24 juin, offrel'opportunité exceptionnelle d'as-sister en plein solstice d'été auxtraditionnelles et pittoresque céré-monies religieuses et festives quise déroulent alors dans leMaramures. Une occasion qui nese représentera pas avant desannées. Il faudra attendre 2016(1er mai), 2021 (2 mai) ou 2024 (5mai).

Douze jours fériés en 2013

Prout… de Gustave Eiffel

"Nous l'appelons la tour Eiffel couchée. Bien qu'il soit d'une rare beauté, il ne peut être admiré par les touristes, car il est situé sur la frontière".

Seulement deux des cinq musées roumains les plus visités se situent dansla capitale alors que la Transylvanie compte les trois autres. Sibiu est lachampionne nationale en la matière, après avoir été capitale européen-

ne de la culture en 2007. C'est le célèbre château de Bran qui tient le haut du clas-sement avec 546 000 visiteurs l'année dernière. Selon les gérants du moment, 60%d'entre eux seraient roumains et 40% étrangers. En deuxième position se trouve lecomplexe muséal Astra de Sibiu. Composé de quatre musées ethnographiques etde culture populaire ainsi que d'un studio de film dans lequel est organisé le fes-tival du film Astra, il a attiré en 2012 près de 410 000 visiteurs.

C'est en troisième position qu'apparaît le premier musée bucarestois. Il s'agitdu musée d'histoire naturelle Antipa, entièrement modernisé en 2011, et qui avendu environ 395 000 billets l'année dernière. Avec près de 380 000 visiteurs,pour la collection permanente mais aussi pour les expositions organisées à l'exté-rieur du palais de Brukhental, le musée national d'art de Sibiu prend la quatrièmeplace. Enfin, c'est le musée du village de Bucarest qui referme ce classement avecplus de 320 000 billets vendus en 2012.

Gérard Depardieu devrait inter-préter le rôle d'un viticulteurfrançais s'investissant dans le

vignoble moldave d'après le scénario d'unfilm écrit par le dramaturge russo-azerbad-janais Rustam , qui lui a été proposé parl'Union des cinéastes moldaves et danslequel il interprèterait le rôle principal. Laréalisation serait confiée au metteur enscène moldave Sergiu Prodan et l'acteurfrançais, lui-même propriétaire d'un vigno-ble dans le Val de Loire, serait entouré decomédiens moldaves. La production espèretrouver les 1,5 millions d'euros nécessairesau tournage d'ici la fin de l'année.

Depardieu viticulteur en Moldavie

Sibiu mémoire de la culture

S'inscrivant dans la longue liste des affrontements entre l'Empirerusse et l'empire ottoman, la guerre russo-turque de 1877-1878,conflit oublié fit naître (ou renaître) deux pays, la Roumanie et la

Bulgarie, et bouleversa la carte géopolitique des Balkans. Dans les années1870, l'Empire ottoman est ébranlé par une succession de soulèvementsdans ses possessions européennes, d'abord en Herzégovine (1875), puis enBulgarie (1876). Dépassées, les autorités turques, manquant d'effectifs,firent appel à des unités irrégulières, les bachi-bouzouks, qui se livrèrent àde terribles atrocités en Bulgarie. Dans le même temps, la Serbie tenta dedéclencher les hostilités contre les Ottomans, mais, mal préparée, sonarmée fut malmenée. Prétextant de la menace qui pesait sur ses frères ortho-doxes, la Russie entra alors en guerre contre la Turquie.

En avril 1877, des troupes russes pénétrèrent sur le territoire de la prin-cipauté de Roumanie, qui n'avait acquis son autonomie vis-à-vis de la Turquie qu'en 1859. Bucarest choisit alors de s'allier àMoscou, et leurs forces conjointes lancèrent une offensive contre les Ottomans en Bulgarie. Epaulés par des volontaires bulgares,les Russes et les Roumains durent livrer de violents combats pour réussir à repousser l'armée turque. Le point culminant du conflitfut le siège de la citadelle de Plevna, puissamment fortifiée par les Turcs, qui dura de juillet à décembre 1877.

Les hostilités prirent fin en mars 1878. Elles coutèrent la vie à plus de 30 000 alliés et à autant de Turcs. De plus, la maladiefit des ravages parmi les troupes (au moins 80 000 morts de part et d'autre). Ce carnage a toutefois permis à la Bulgarie d'acqué-rir son autonomie en tant que principauté vassale de l'Empire ottoman et à la Roumanie de proclamer son indépendance, devenantdu même coup une monarchie. Un conflit sanglant, inconnu en Occident et pourtant fondateur pour une grande partie des Balkans.

La guerre russo-turque de 1877-1878, fondatricede la Roumanie et de la Bulgarie modernes

Le point culminant du conflit fut le siège de Plevna.

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Connaissance et découverteLes NOUVELLES de ROUMANIE

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Connaissance et découverteLes NOUVELLES de ROUMANIE

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Evidence

Le chef entre dans le bureau et explo-se:

-Je vous ai déjà dit qu'il ne fallait pasfumer pendant le travail !

-Mais chef… qui est-ce qui travaille?

Un homme

Quand un homme est face à une déci-sion grave, il ferme les yeux, se prend latête entre les mains, interroge sa cons-cience, réfléchit intensément, respire pro-fondément et, décidé, se tourne vers safemme:

-Chérie, qu'est-ce que je dois faire ?

"Banc" suisse

Un Roumain entre dans une banquesuisse:

-Je peux ouvrir un compte ?-Bien sûr, Monsieur, nous avons de

nombreux clients de votre pays. Combienvoulez-vous déposer ?

-Trois millions d'euros.-Vous pouvez parler à voix haute.

Dans notre établissement, la pauvretén'est pas considérée comme un défaut.

Ordonnance

-Grand-Père, comment tu te soignes?-Oh, ben, quand j'ai attrapé froid je

me verse une grande rasade de tsuica, sije sens que ma tension est trop forte, jeprends un verre de Cognac et si çà la faitbaisser je bois un verre de vin rouge.Autrement, quand je n'ai pas d'appétit, jeme sers un verre de vin blanc, mais pourla digestion je termine toujours par unevodka !

-Mais tu ne bois jamais d'eau ?-Ah ben çà, c'est pour les maladies

graves… mais grâce à Dieu, çà ne m'estjamais arrivé !

Procès d'intention

Un policier arrête une voiture quizig-zague sur la route. Il sort son stylo etson carnet de PV et demande au chauf-feur:

-Qu'est-ce que vous avez bu ?-T'as qu'à marquer 7-8 bières…

parce que j'suis pas sûr que tu sais écrirechampagne.

Droit de réponse

A la vue de son carnet de notes, lepère de Bula explose:

-T'as pas honte ! A ton âge, Napoléonne ramenait que des bonnes notes !

-Et toi? A ton âge Napoléon était déjàempereur!

Tsuica miracle

Bula est tout recroquevillé dans lefauteuil du dentiste, serrant dur commefer ses mâchoires.

-Allons Bula, ne tremble pas commeçà. Tiens, j'ai une bonne tsuica. Prends enun coup, çà va te faire du bien.

Après deux trois verres, Bula se ras-soit tout ragaillardi.

-Alors Bula, j'peux commencer…T'as retrouvé ton courage ?

-Ah çà oui… J'peux te dire que lepremier qui s'approche de ma mâchoire,je lui casse la gu…!

Accueil

De Gaulle est reçu par Ceausescuavec tous les honneurs réservés à sonrang, son arrivée étant saluée par descoups de canon que l'on entend dans toutele pays. Une vieille paysanne qui allaitfaire ses courses se signe, s'arrêtant net àla première salve. Un officier qui passaitpar là lui dit de ne pas s'inquiéter: c'étaitjuste pour l'arrivée de De Gaulle. Ausecond coup, la vieille femme se signe denouveau. Enervé, l'officier lui répète sonexplication.

-J'avais bien compris, dit la vieille,mais j'ai pensé qu'ils l'avaient manqué.

Petits bourgeois

Trois prisonniers du goulag discu-tent.

- Pourquoi t'es là toi ? - Je suis arrivé en retard à l'usine et

j'ai été condamné pour sabotage indus-triel au profit des puissances ennemies.

- Et toi ? - Oh moi ! Je suis arrivé en avance au

travail et j'ai été condamné pour espion-

nage au profit des puissances ennemies. - Et toi, camarade ? - Ben moi, je suis arrivé à l'heure... - Ah bon ! Et alors ? - J'ai été condamné pour conformis-

me petit bourgeois...

Discipline

-Cher Député, puisque tu es nouveau,je te conseille de demander l'avis de tonparti et de moi-même, ton chef de groupeparlementaire, avant de prendre la parole.Tu as bien compris ?

-Oui Papa !

Mal du pays

Un ouvrier roumain, exilé depuis desannées, promène toujours avec lui unportrait de Ceausescu. Les passants luidemandent pourquoi: "C'est contre le maldu pays…".

Logique

Ça se passe sous Ceausescu. Lecamarade Nelu a été autorisé à se rendreaux USA dans le cadre d'un échange. Ilest hébergé chez Bill, ouvrier de laGénéral Motors.

Bill: Ah mon ami, vous arrivez dansle pays de la planète où il y a le plus deliberté. La Preuve? Je peux aller àWashington, devant la Maison Blanche etcrier à tue-tête: "Le président Reagan estun con", personne ne me dira rien et lapolice ne me fera aucun ennui!"

Nelu : Et alors, moi aussi… Je peuxaller à Bucarest et crier "Le présidentReagan est un con" et il ne m'arriverarien non plus.

Au secours !

Un mari téléphone aux pompiers:-Venez vite, ma femme veut sauter de

l’appartement ?-Mais quel est au juste le problème?-Elle n’arrive pas à ouvrir la fenêtre.

Evident

- Pourquoi tu te maries en blanc ?- Ben, ce n’est pas la couleur des

appareils électro-ménagers ?.

Blagues à la roumaineHumourCHANGE*

(en nouveaux lei, RON**)

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(1 € = 293 forints)*Au 23/02/2013 ** 1 RON = 10 000 anciens lei

Les NOUVELLES

de ROUMANIENuméro 76, mars-avril 2013

Lettre d'information bimestrielle surabonnement éditée par ADICA(Association pour le DéveloppementInternational, la Culture et l’Amitié)association loi 1901Siège social, rédaction : 8 Chemin de la Sécherie44 300 Nantes, FranceTel. : 02 40 49 79 94E-mail : [email protected] de la publicationHenri GilletRédactrice en chefDolores Sîrbu-Ghiran

Ont participé à ce numéro :Yves Lelong, Laurent CoudercJonas Mercier, Mirel BranJulia Beurq, Béatrice AguettantFrançois Gaillard, Mehdi ChebanaDan Cristian Turturica, Alexandre Lenoir, Ludmila BulgarJulien Danero Iglesias, Marcel PohlCristina Stanculescu, Sandra LacutOvidiu Pecican, Marc SemoRodica Sabau-Cosmin, SwitchieVali, Gazdaru, Christo KomarAutres sources: agences de presse etpresse roumaines, françaises, lepetit-journal.com, télévisions roumaines, Roumanie.com, LeCourrier des Balkans, sites internet. Impression: Helio Graphic2 rue Gutenberg ZAC du Moulin des Landes44 981 Sainte-Luce sur Loire CedexNuméro de Commission paritaire:1117 G 80172; ISSN 1624-4699Dépôt légal: à parution

Prochain numéro: mai 2013

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Les NOUVELLES de ROUMANIE

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La Bretagne au cœuret bras grands ouverts

Vous, les Français, vous êtres très forts en paro-les, mais beaucoup moins en actions"… Sous l'outrage, Pierre Méhaignerie n'a pasbronché. Pourtant, jusqu'ici, personne n'avait osé traiter le très courtois et affable pré-

sident du Conseil général d'Ille et Vilaine, futur Garde des Sceaux, de… "fort en gueule"! La scène se passait en juillet 1989 et l'insolent se permettant cette effronterie n'était autre

que Lech Walesa. Le leader de Solidarnosc avait été bien mal inspiré de s'en prendre à la Bretagne où l'on n'est certes pas du genre"Embrassons nous, Folleville!" et où on reprocherait plutôt à ses habitants une certaine réserve, voire froideur, cachant mal leurgrand cœur et la solidité de leurs amitiés. N'importe… Piqués au vif, par cette sortie déplacée, le maire de Rennes de l'époque,Edmond Hervé, ministre de la Santé, et le quotidien Ouest France avaient réagi de la meilleure façon, en créant dans la foulée l'as-sociation Bretagne-Pologne, histoire de montrer aux Polonais, sortis à peine du grand froid communiste, que le mot solidarité se

déclinait aussi sur les rivages de l'Atlantique.En Ille et Vilaine, on a le sens de l'histoire, car

quelques mois plus tard, début janvier 1990, une qua-rantaine de Rennais volaient au secours des Roumainsen train de se libérer du joug de Ceausescu, donnantnaissance par la suite à Solidarité 35 - Roumanie.Deux ans plus tôt, ne pouvant encore tendre la mainaux pays de l'Est, les Bretons s'étaient tournés vers leMali, décidés à bien aider ce pays en souffrance,créant Ille et Vilaine - Mopti, région jouxtant le fleu-ve Niger et Tombouctou.

Mali-Pologne-Roumanie… cela donne aujourd'-hui MAPOROU, association qui a vu le jour en 2010,faisant le lien entre ces trois initiatives. Chacune a sulargement s'employer au cours de ces deux dernièresdécennies. Ille et Vilaine - Mopti intervient dans unsecteur de 80 000 km2, aux portes du désert, théâtrerécent des combats menés par les troupes franco-mal-

iennes, pour le libérer de l'emprise des groupes islamistes. Le département breton y a fait creuser des puits, donne des coups depouce dans les domaines de la pêche, de l'agriculture, de l'élevage, de l'artisanat. Il apporte surtout une aide multiforme pour aiderce pays dans sa marche vers la démocratie, aidant à la formation de ses cadres, à l'éducation, à l'alphabétisation. Une vingtaine d'é-coles d'Ille et Vilaine entretiennent des relations régulières avec des établissements maliens.

En Pologne, l'engagement des Bretons s'est concentré sur la ville de Poznan où une Maison de la Bretagne a été ouverte dès1993. Formation et accueil d'élus locaux, professeurs, médecins, agriculteurs, sportifs, s'en sont suivi. Plus de 15 000 jeunes desdeux pays ont été concernés par des programmes d'échanges, 35 partenariats inter-communaux entamés, 15 étant toujours actifs.

La Roumanie n'a pas été en reste. Une maison de l'Ille et Vilaine a vu le jour à Sibiu. A peu près tous les domaines imagina-bles d'activités et d'échanges ont été concernés - santé, éducation avec la mise en place de CDI (Centres de Documentation etd'Information), enfance, culture, tourisme, agriculture, environnement et développement durable, sports… ce qui signifie quequelques milliers de Roumains on fait le voyage dans ce département en flèche dans son action tournée vers la Roumanie.

La fête nationale roumaine célébrée chaque 1er décembre

Certes, les engagements des uns et des autres ont tendance à s'essouffler, mais la ténacité est une vertu bretonne. Rennes mon-tre l'exemple en organisant chaque année une Journée de l'Europe, un Marché du monde, un forum citoyen, une semaine roumai-ne, célébrant aussi la fête nationale de ce pays, chaque 1er décembre. Le samedi 6 avril prochain, le premier "festival multi-cou-leurs" consacrera cette ouverture au monde. Musique traditionnelle, folklorique, moderne, danse…chacune des trois composantesde MAPOROU mettra en valeur ses richesses culturelles, la Bretagne participant aussi. Des ateliers seront organisés : peinture surœufs pour la Roumanie, sur bois pour la Pologne, sur bogolan (toile en coton, teinte par une mixture de terre et végétaux) pour leMali. Cette première se déroulera à Chartres de Bretagne, à quelques kilomètres de Rennes, qui symbolise MAPOROU à elle touteseule, ayant tissé des liens avec Tendeli au Mali entretenus par l'association Teria (amitié en langue malienne bambara), Lwoweken Pologne et Calarasi-Sarata, près de Craiova en Roumanie. Tout comme sa voisine Vitré, elle aussi en relation avec les trois pays,la petite cité de 7000 habitants montre qu'elle a le sens de l'autre puisqu'elle est également jumelée avec des villes d'Allemagne,d'Angleterre et Saint Anthème en Auvergne.