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1 Compte rendu du Séminaire N° 17 de Gastronomie Moléculaire Tenu le : 16 mai 2002, de 16 à 18 heures A : École supérieure de la cuisine française, Centre Jean Ferrandi (28 rue de l’Abbé Grégoire, 75006 Paris. Tel : 01 49 54 17 00. fax : 01 49 54 29 78) Déroulement : I. Introduction : Les thèmes des séminaires ont été décidés au mois de juin 2001. Le calendrier est maintenant : 20 juin 2002 : Comment maîtriser l’onctuosité des béchamels ? La réunion commence par une présentation des « Ateliers de gastronomie moléculaire », qui ont été animés au Lycée Jean Quarré, à Paris, par René Le Joncour. Depuis décembre 2001, plusieurs chefs de travaux ou professeurs de cuisine ou de sciences appliquées ont la volonté de créer de tels Ateliers dans leur établissement. Se pose la question des protocoles à mettre en œuvre. On convient que ces protocoles, qui seraient utilement mis en commun, peuvent être exécutés sur deux à quatre heures, selon les niveaux (Bac Pro, BEP, CAP). Les élèves de tous les niveaux pourraient être concernés. H. This signale que des professeurs lui ont demandé de mettre ces protocoles sur un site officiel : le site de l’INRA convient bien, puisque le Ministère de l’éducation nationale a signé le 14 mars 2002 une convention cadre de partenariat avec l’INRA sur ces questions de cuisine. A propos des Comptes rendus des Séminaires, il est signalé que les projets de comptes rendus sont considérés comme définitifs quand aucun participant ne demande de rectification. Les rectifications envoyées dans les trois jours sont prises en compte, et donnent lieu à l’émission d’un nouveau compte rendu, considéré comme définitif. II. Présentation de résultats relatifs aux questions posées lors des précédents séminaires. II.1 A propos du sel sur la viande Pas de nouvelles expériences. II.2. A propos de la cuisson du chou fleur Pas de nouvelles expériences. II.3. Les blancs battus en neige

Séminaire INRA de gastronomie moléculaire N°17

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    Compte rendu du Sminaire N 17 de Gastronomie Molculaire

    Tenu le : 16 mai 2002, de 16 18 heures A : cole suprieure de la cuisine franaise, Centre Jean Ferrandi (28 rue de lAbb Grgoire, 75006 Paris. Tel : 01 49 54 17 00. fax : 01 49 54 29 78) Droulement : I. Introduction : Les thmes des sminaires ont t dcids au mois de juin 2001. Le calendrier est maintenant : 20 juin 2002 : Comment matriser lonctuosit des bchamels ? La runion commence par une prsentation des Ateliers de gastronomie molculaire , qui ont t anims au Lyce Jean Quarr, Paris, par Ren Le Joncour. Depuis dcembre 2001, plusieurs chefs de travaux ou professeurs de cuisine ou de sciences appliques ont la volont de crer de tels Ateliers dans leur tablissement. Se pose la question des protocoles mettre en uvre. On convient que ces protocoles, qui seraient utilement mis en commun, peuvent tre excuts sur deux quatre heures, selon les niveaux (Bac Pro, BEP, CAP). Les lves de tous les niveaux pourraient tre concerns. H. This signale que des professeurs lui ont demand de mettre ces protocoles sur un site officiel : le site de lINRA convient bien, puisque le Ministre de lducation nationale a sign le 14 mars 2002 une convention cadre de partenariat avec lINRA sur ces questions de cuisine. A propos des Comptes rendus des Sminaires, il est signal que les projets de comptes rendus sont considrs comme dfinitifs quand aucun participant ne demande de rectification. Les rectifications envoyes dans les trois jours sont prises en compte, et donnent lieu lmission dun nouveau compte rendu, considr comme dfinitif. II. Prsentation de rsultats relatifs aux questions poses lors des prcdents sminaires. II.1 A propos du sel sur la viande Pas de nouvelles expriences. II.2. A propos de la cuisson du chou fleur Pas de nouvelles expriences. II.3. Les blancs battus en neige

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    II. 4 A propos des blancs battus sucrs (meringue) II.5 A propos de la cuisson des asperges Pas de nouvelles expriences. II.6 A propos de la cuisson de lartichaut Pas dexprience supplmentaire. II. 7 A propos de la cuisson des champignons sauvages Pas dexprience supplmentaire. II.8 A propos du saumurage et du salage : Pas de nouvelles expriences. II.9 A propos du battage de la viande

    II. 9. 1 Reu de H. This : Renseignements pris auprs de Joseph Culioli (INRA Clermont-Ferrand Theix) et de

    Jean-Pierre Frensia, les tudes que nous envisagions nont pas t faites. II. 10. A propos de bisques : Pas de nouvelles expriences. II.11. A propos de tranchage de velouts crms : Pas de nouvelles expriences. II.12. A propos de lomelette de la mre Poulard :

    II. 12. 1. Reu de Herv Valdevit Extraits du livre Lhistoire table, par Andr Castelot, ditions Plon et Perrin. POULARD (mre) : Elle se nommait en ralit Annette Boutiaut et tait ne Nevers en 1851. Place comme femme de chambre chez douard Corroyer, architecte en chef des monuments historiques, elle laccompagna labbaye du Mont-Saint-Michel lorsque le gouvernement dcida de restaurer la clbre abbaye. Cest l quelle rencontra, en 1872, Victor Poulard, fils du boulanger du Mont, et elle lpousa le 14 janvier 1873, Saint-Philippe-du-Roule, Paris. Cest alors que le jeune mnage devint locataire de lauberge de Saint-Michel-Tte-dOr, situe dans la Grande Rue du Mont-Saint-Michel. Aprs la suppression, en 1865, de la prison installe dans les btiments mmes de labbaye, les plerins vinrent nombreux au Mont-Saint-Michel, mais la clbre digue ntait pas encore construite. Cest le plus souvent en bateau que lon se rendait lle. La jeune htelire tait perspicace , nous a racont J. GERMA. Pour organiser sa fortune, il semble quelle neut qu observer. Les pataches parvenaient au Mont quand elles pouvaient, selon les mares, le temps, le bon vouloir des cochers, ltat de la grve. Les servantes des auberges, laide de longues-vues, valuaient le contenu des voitures. Au dbarcadre, les goglus (varits de rabatteurs, pisteurs, bonimenteurs, etc.) craient un tumulte indescriptible ; grands renforts de cris, dappels, on empoignait les voyageurs. Tiraills, rsigns ou amuss, les visiteurs, finalement, se laissaient conduire. Mont-Saint-Michel-Tte-dOr, Mme Poulard, en manches et tablier de lustrine, les accueillait avec le plus gracieux sourire, qui donnait aux trangers limpression dtre en

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    famille, et sans dtours elle disait : Avez-vous fait un bon voyage ? Vous devez avoir faim ? Passez vite table, mangez bien, etc. Le problme tait que les voyageurs parvenaient au Mont, affams, nimporte quelle heure, quil fallait sans attendre leur donner un plat chaud ; en somme, il fallait improviser quelque chose. Mme Poulard comprit que lomelette seule pouvait convenir la solution de ces problmes. Et cest ainsi que la mre Poulard, grce son omelette, entra dans lhistoire. Il faut voir au restaurant de la mre Poulard la confection de lomelette pour en comprendre le secret qui rside principalement en lemploi dune pole long manche place sur un bon feu de bois. De ce fait, lomelette cuit de tous les cts. Que na-t-on pas racont sur ce triomphe de la mre Poulard ? On a parl de quelques blancs monts en neige et ajouts aux ufs entiers, on a prtendu aussi quelle mettait un verre de crme dans ses ufs. Pouvez-vous croire, dclarait Mme Poulard, que jaurais perdu tous ces blancs ! Quant la crme, pure invention. Ce qui est vrai, cest que nous avons le meilleur beurre du pays, et que nous ny regardons pas, nous ne le faisons pas roussir dans la pole et surtout nous nous gardons de trop cuire. Vous oprez donc de la manire suivante : Vous sortez vos ufs du rfrigrateur, deux trois heures auparavant afin quils ne soient pas glacs, vous les montez onctueux et mousseux. Vous faites fondre et non cuire du beurre sal, vous versez votre omelette que vous cuisez doucement. Vous la retirez du feu de temps en temps pour viter les coups de feu et la faire souffler. Dtachez bien les bords au cours de la cuisson, vous la faites glisser dans un plat comme un chausson et vous servez sans attendre.

    Terminons en prcisant quAnnette Poulard mourut le 7 mai 1931. Elle est enterre auprs de son poux, au petit cimetire du Mont.

    Alain Drouard signale une analogie entre la mre Poulard et les mres lyonnaises : ce sont toutes des femmes qui se sont installes leur compte, en raison dune mancipation des cuisinires bourgeoises.

    II. 13 A propos des ustensiles en cuisine : II. 13. 1. Suite du sminaire : H. This signale que la Socit Kitchen Aid veut rditer le Sminaire extraordinaire

    aux Etats-Unis, en partenariat avec le Culinary Institute of America. La date serait fixe prochainement, en octobre 2002. II. 13. 1. Reu de Vincent Bricout : Les tudes statistiques sur les dures des gestes culinaires sont en cours. Lquipe de

    six personnes qui est au travail a distingu quatre parties : prparation, avant cuisson, en cuisson, aprs cuisson.

    Les participants discutent longuement le protocole retenu. On voque notamment le problme des examens et concours, o les temps sont

    mesurs. Camille Duby signale que, pour une exploitation statistique facilite, chacun doit

    faire les gestes son rythme, avec mesure des temps.

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    Lindustrie a dtermin des temps lmentaires pour les diverses oprations, mais on observe que ces temps nont rien voir avec les temps domestiques : les mthodes, les objectifs, les conditions dexcution sont diffrents, de sorte que le travail voqu simpose.

    II. 14 A propos du flambage des vins de cuisson : II. 14. 1 Reu de Bertrand Simon : B. Simon et 12 de ses lves ont explor le flambage du vin, flamb ou non, dans

    une casserole vente, avec addition ou non de sel (vin sal) ou de sucre (poire au vin). Les tests nont pas montr de diffrence, mais la mthodologie triangulaire na pas

    t mise en uvre. Il est convenu quune prsentation de cette mthode des tests triangulaires sera

    prsente en une demi heure, lors du prochain sminaire, par Joseph Hossenlopp. II.14.2 Reu de Christophe Lavelle Lexprience qui a t faite visait connatre lappel dair qui est provoqu par le

    flambage : lchauffement d la flamme contribue-t-il augmenter lvaporation de lalcool et de la sauce flambe ?

    Premire exprience : 1. A temprature ambiante (23C), cet thanol (Prolabo, 95) svapore

    temprature ambiante : 25% dvaporation. 2. A temprature ambiante (23C), mais avec un ventilateur soufflant

    paralllement la surface, lvaporation (thanol Prolabo, 95) est suprieure : 90%.

    3. Flambage froid : la flamme (bleute) qui slve au-dessus dune surface tranquille (temprature pas mesure) conduit une vaporation complte (100%) de lthanol (Prolabo, 95, 4 ml) en 50 s.

    4. Flambage chaud : exprience sans rsultat, le bcher ayant clat. 5. Flambage de Metaxa (alcool grec) dans une casserole, sur une plaque

    lectrique stabilise (flux thermique non mesur) : 40 ml atteignent lbullition aprs 25s. Aprs flambage pendant 45 s, on rcupre 12 ml. Lexprience est rpte avec le mme rsultat. 70 % du liquide est vapor, le rsidu est de couleur marron

    6. Chauffage du mme Metaxa sans flamme : bullition pendant 45s, on rcupre 22 ml, soit seulement 50 % de liquide vapor, le rsidu est beige clair.

    II. 14. 3 Suite de la discussion : On voit que le flambage limine lalcool qui donne une impression dacidit en bouche, en mme temps quil acclre un peu lvaporation (pour les alcools) Depuis le sminaire, H. This a mesur la temprature la surface de lalcool qui

    flambe : elle est de lordre de 80C. H. Valdevit signale que le Larousse gastronomique indique que le flambage

    consiste mettre lalcool pralablement chauff sur une prparation . On sinterroge sur le chauffage pralable.

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    Yves Dumont signale que les Amricaines se font par flambage de carapace dtrilles ou de homard au Cognac.

    Un participant signale quune brochure conseillait de ne pas flamber dans les poles antiattachantes. Toutefois il est observ quaujourdhui, le Teflon est inject et cuit 1200C. On voit mal la raison de ce conseil.

    II. 15. A propos des crmes anglaises :

    II.15.1 Reu de Lucile Bigand Dans le classeur "Cuisine rflchie", ralis lAcadmie de Limoges, nous avions abord le thme des crmes anglaises, et les questions qui nous avaient parues les plus importantes traiter avec les lves pour les aider la comprhension des diffrents phnomnes phisico-chimiques taient les suivantes (fiche n 6) : - combien d'oeufs faut-il utiliser pour raliser une crme anglaise ? - quelle est l'influence de l'oeuf entier ou d'une partie de l'oeuf dans une prparation base de lait ? (expriences avec pot de crme -jaunes-, crme renverse -oeufs entiers-, et lait chaud + blanc d'oeuf, cuits au bain marie) - pourquoi est-il prfrable d'utiliser un lait riche en matire grasse pour raliser une crme anglaise ? Dautre part, mon collgue de ptisserie Benoit Macetti ne blanchit jamais les jaunes et le sucre, parce que le rsultat est le mme, dit-il (je ne vois pas de modification notoire moi non plus). Il me dit qu'il cuit la crme le plus "doucement" possible, en remuant de temps en temps la spatule pour obtenir une crme onctueuse et qui ne fasse pas trop de mousse ; d'aprs lui, la disparition de la mousse est un indicateur de cuisson. Personnellement, je cuis feu vif et au fouet puis je passe un coup de mixer. En questionnant autour de moi les diffrents enseignants, je peux rsumer en disant que leur pratique est diffrente chez eux et face aux lves : chez eux ils font comme moi, quelques variantes prs. Face aux lves ils appliquent les recettes traditionnelles, pas par conviction mais par peur des "reprsailles" des professionnels qui viendront jurifier pour les examens ! J'tais dj convaincue de la ncessit de faire voluer les mentalits, mais cette fois c'est vraiment trop rvlateur pour que je laisse passer cet exemple.

    II.15.1 En cours de sminaire : On discute ltat microscopique de la crme anglaise. H. This signale que

    cest surtout une suspension, avant dtre une mulsion (photographies sur demande).

    D autre part, si lon a tudi le grumelage, on na pas regard ltat microscopique de crmes anglaises pour lesquelles on a fait ou non le ruban .

    On discute aussi le rsultat sensoriel de telles crmes et J. Hossenlopp propose dorganiser, pour le sminaire suivant, un test sensoriel triangulaire, en relation avec lESCF.

    On discute aussi la temprature ncessaire pour la cuisson des crmes anglaises. La temprature de 82C est classique, mais rien ne prouve quelle simpose.

    On prvoit des tests selon la temprature.

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    III. Thme du sminaire numro 17 : comment maitriser lonctuosit des bchamel

    III.1 Reu de Herv Valdevit : On discute lorthographe de la clbre sauce : doit-on dire bchamelle, comme au XVIIIe sicle, bchamel au masculin, alors quune sauce est fminine, ou bien encore bchameil, du nom de son inventeur, le marquis de Bchameil ?

    Ce dernier prte galement controverse : Bchameil cra-t-il la sauce de ses propres mains, ou doit-on lattribuer plus simplement son cuisinier ? Dans leur Guide Gourmand de la France, Henri Gault et Christian Millau penchent pour la seconde solution, et citent lappui de leur thse une phrase jalouse prte au duc dEscars :

    Javais fait servir des mincs de volaille la crme cuite depuis plus de vingt ans avant la naissance de ce petit Bchameil, et pourtant, je nai jamais eu le bonheur de donner mon nom la moindre sauce

    Qui tait ce marquis de Bchameil ? Ancien matre dhtel de Louis XIV, fort dans les affaires selon Saint-Simon, il passait pour avoir fait fortune sous la Fronde. Il fut galement surintendant de la Maison de Monsieur, et trs considr par ce dernier. Ses gots ne se portaient pas uniquement sur les ragots, comme on disait alors des plats en sauce. Gourmet, il ltait certainement, il faisait une chre dlicate et choisie en mets et en compagnie , dit encore Saint-Simon, mais il aimait aussi beaucoup les tableaux, pierreries, meubles, btiments et jardins , et il avait grandement contribu lamnagement du chteau de Saint-Cloud.

    Il ntait pas seulement fort riche, mais de plus il tait trs bel homme. Malheureusement il le savait, et se rendit ainsi dfinitivement ridicule par sa bizarre prtention de ressembler au duc de Gramont. Cela lui valut la msaventure conte encore par Saint-Simon dans ses mmoires : Le comte de Gramont le voyant un jour se promener aux Tuileries, voulez-vous parier, dit-il sa compagnie, que je vais donner un coup de pied au cul Bchameil, et quil men saura le meilleur gr du monde ? En effet, il lexcuta en plein. Bchameil, bien tonn, se retourna et le comte de Gramont se met lui faire de grandes excuses sur ce quil avait pris pour son neveu. Bchameil fut charm, et les deux compagnies encore bien davantage.

    Faite ou non par ce pre suppos, la sauce lorigine se prparait suivant la recette suivante, cite par Georges et Germaine Blond : Dans une casserole, mettez trois ou quatre pains de beurre avec un peu de persil, ciboules, chalotes haches, du sel, du poivre concass, un peu de muscade, de la farine pour lier, mouillez de bonne crme. Tournez sur le feu pour lui faire prendre consistance. Les herbes ont disparu, ensuite le lait a t ajout, pour donner la bchamel actuelle.

    Au XIXe sicle, on faisait encore pour le veau, les volailles et les poissons une bchamel maigre hrite du sicle prcdent, assez curieuse : Mettez dans la casserole un morceau de beurre frais, avec deux cuilleres bouche de farine. Dlayez ensemble. Mouillez deau. Ajoutez sel, clous de girofle, persil, deux oignons, grenouilles, dbris de carpe, de brochet, danguille ou de lotte, et faites cuire. La cuisson faite, passez au tamis. Joignez une demi-chopine de crme trs paisse.