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Soutien aux programmes de pharmacovigilance dans les pays en développement Une approche systémique

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Soutien aux programmes de pharmacovigilance dans les pays en développement

Une approche systémique

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À propos de SPSLe Programme de Renforcement des Systèmes Pharmaceutiques (SPS) vise à renforcer les capacités des pays en voie de développement pour une gestion efficace de tous les aspects des systèmes et services pharmaceutiques. Les interventions de SPS sont centrées sur l’amélioration de la gouvernance dans le secteur pharmaceutique, le renforcement de systèmes de gestion pharmaceutique et les mécanismes financiers, l’endiguement de la résistance antimicrobienne, et la promotion de l’accès aux médicaments et de leur usage approprié.

Citation recommandée

Ce document peut être reproduit pourvu que SPS y soit mentionné. Veuillez utiliser la citation suivante.

Strengthening Pharmaceutical Systems (SPS). Soutien aux programmes de pharmacovigilance dans les pays en développement : Une approche systémique. Soumis à l’Agence des États-Unis pour le Développement International par le Programme SPS. Arlington, VA: Management Sciences for Health.

Imprimé en anglais : septembre 2009

Traduit en français : octobre 2009

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SoUTIen AUx PRogRAMMeS De PHARMACoVIgILAnCe DAnS LeS PAyS en DÉVeLoPPeMenT: Une APPRoCHe SySTÉMIqUe 1

Introduction

effet dévastateur de la pandémie du vIH/sIda a contribué à attirer l’attention sur le manque d’accès aux médicaments dans les régions aux ressources limitées, en particulier en afrique subsaharienne. en

réponse à cette situation, de nouvelles sources de financement comme le Plan présidentiel d’urgence de lutte contre le sIda, l’Initiative Présidentielle de lutte contre le paludisme et le fonds mondial de lutte contre le sIda, la tuberculose et le paludisme, ont rendu disponibles des sommes sans précédent pour l’achat de médicaments essentiels, notamment de nouveaux médicaments comme les antirétroviraux (arv) contre le vIH/sIda, les combinaisons thérapeutiques à base d’artémisinine (Cta) contre le paludisme, et les médicaments de deuxième ligne contre la tuberculose à bacilles multi résistants. Le fonds mondial, à lui seul, a accordé des subventions s’élevant à plus de 15,5 milliards de dollars américains, dont près de la moitié a été attribuée à l’approvisionnement en médicaments et produits médicaux (Global fund 2009).

L’augmentation de l’accès aux médicaments essentiels s’accompagne d’une nécessité plus grande de promouvoir et de veiller à l’innocuité et l’efficacité de ces médicaments. Cependant, peu de pays en développement possèdent les structures, systèmes ou ressources en place pour soutenir les activités liées à la sécurité des médicaments ; ces pays manquent également souvent de données factuelles et fiables pour guider les décisions thérapeutiques et promouvoir une utilisation rationnelle des médicaments, c’est-à-dire sûre, efficace et d’un bon rapport coût efficacité. de plus, un soutien financier durable des activités de pharmacovigilance et de sécurité des médicaments fait généralement défaut.

Le programme de renforcement des systèmes Pharmaceutiques (sPs) a élaboré un cadre conceptuel et une approche fonctionnelle pour renforcer les systèmes de pharmacovigilance. Bien que ce cadre et cette approche aient été conçus pour une application dans des environnements à ressources limitées, ils peuvent être utiles à tous ceux qui sont impliqués dans la promotion de l’accès aux médicaments essentiels et leur utilisation rationnelle, comme le personnel de l’agence des états-unis pour le développement international (usaId), les Ministères de la santé des pays en développement, les bailleurs internationaux, les agents de soins de santé, les décideurs en matière de santé et autres parties concernées qui reconnaissent la nécessité d’avoir des systèmes solides de pharmacovigilance.

Ce document n’aurait pas été possible sans le soutien de l’Agence des États-Unis pour le Développement International, selon les termes de l’Accord de Coopération numéro gHn-A-00-07-00002-00. Les opinions exprimées dans ce document sont propres à Management Sciences for Health et ne reflètent pas nécessairement celles de l’Agence des États-Unis pour le Développement International ni du gouvernement des États-Unis.

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2 Le PRogRAMMe RenfoRCeMenT DeS SySTèMeS PHARMACeUTIqUeS

Impact de la sécurité des médicaments

de nombreuses études ont révélé l’impact considérable sur les soins en général et sur la santé des patients en particulier, de produits de mauvaise qualité, des réactions adverses aux médicaments et des erreurs de médication ; cependant, la plupart des cas n’étant pas détectés, il est quasiment impossible d’évaluer l’ampleur réelle de ce problème. La plupart des preuves documentées disponibles sur la qualité des médicaments et leurs réactions adverses viennent des pays industrialisés ; par exemple, dans son influent rapport de 1999, l’Institut américain de Médecine estime que près de 98 000 personnes meurent chaque année dans les hôpitaux américains à la suite d’erreurs de médication, pour un coût pouvant atteindre 29 milliards de dollars par an (Kohn et al. 1999). Les auteurs d’une méta-analyse ont estimé que les réactions adverses à elles seules, à l’exclusion des erreurs de médication, ont été responsables du décès de plus de 100 000 personnes en 1994 et qu’ils constituaient entre la quatrième et la sixième cause principale de décès aux états-unis (Lazarou et al. 1998). selon les estimations d’une étude similaire, plus de 70 pour cent des réactions adverses entraînant une hospitalisation au royaume-uni auraient pu être évités (Pirmohamed et al. 2007). Les effets indésirables des médicaments sont également coûteux en termes de perte de confiance des patients dans le système de soins.

Les coûts en vies humaines et en charge financière sont importants dans les pays à revenus élevés, mais la situation est probablement plus alarmante dans les pays à revenus moyens et faibles, en raison de conditions plus précaires des infrastructures des systèmes de santé, du manque de fiabilité de l’approvisionnement et de la qualité des médicaments et de la carence en personnels de soins de santé correctement formés. de nombreux pays en développement reconnaissent à présent la nécessité de mettre en place des systèmes de surveillance de la sécurité des médicaments récemment introduits, comme les Cta et les arv, mais ils manquent souvent de ressources, notamment d’expertise locale, pour concevoir et instaurer de toutes pièces un système de pharmacovigilance. en prêtant à la pharmacovigilance l’attention qu’elle mérite, en tant que composante à part entière de la gestion rationnelle des produits pharmaceutiques, il est cependant possible de réduire considérablement de tels événements indésirables évitables et de contribuer à des évidences valables sur lesquelles peuvent se baser les évaluations risques/avantages.

qu’est-ce que la pharmacovigilance ?

de façon sommaire, la pharmacovigilance est un système de surveillance de l’innocuité et de l’efficacité des médicaments et autres produits pharmaceutiques. L’Organisation Mondiale de la santé (OMs) définit la pharmacovigilance comme « la science et les activités relatives à la détection, à l’évaluation, à la compréhension et à la prévention des effets indésirables ou de tout autre problème lié aux médicaments » (WHO 2002). un système de pharmacovigilance doit comprendre toutes les entités et ressources qui protègent le public des préjudices liés aux médicaments, qu’il s’agisse de soins personnels ou de services de santé publique. Le système de pharmacovigilance vise à atteindre cette protection grâce à l’identification, au recueil et à l’évaluation des effets indésirables de manière efficace et opportune et par la communication des avantages et des risques liés aux médicaments afin de faciliter la prise de décision à différents niveaux du système de santé.

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Lorsqu’on prend des médicaments, des réactions cliniques indésirables peuvent apparaitre, tels que des vertiges, céphalées, éruptions cutanées ou d’autres symptômes ; cependant ces effets indésirables ne sont pas tous dus aux médicaments ; certains peuvent résulter de la pathologie ou de la condition du patient, de facteurs génétiques ou environnementaux, du régime alimentaire ou d’autres causes. Les effets indésirables des médicaments sont directement liés à ceux-ci et peuvent résulter d’une mauvaise qualité du produit, d’une erreur de médication (au cours de la prescription, préparation, administration ou prise du médicament) ou de propriétés pharmacologiques, connues ou non (entraînant des effets indésirables) (figure 1). Parmi les effets indésirables qui ne sont pas des réactions adverses, mais qui résultent d’erreurs de médication ou de problèmes de qualité du produit, figurent le manque d’effet thérapeutique et la résistance antimicrobienne.

Les effets indésirables sont évitables lorsqu’ils sont la conséquence d’une erreur de médication ou peuvent être inévitables lorsque, par exemple, un patient souffre d’une allergie médicamenteuse inconnue. Il est important de documenter les effets indésirables et les réactions adverses aux médicaments, en particulier pour les nouveaux produits, car ces données, recueillies après la commercialisation, peuvent entraîner des modifications dans l’utilisation recommandée, le conditionnement, l’étiquetage, les recommandations thérapeutiques ou même le rappel d’un produit. Les erreurs de médication et les produits de mauvaise qualité n’entraînent pas toujours des effets indésirables ; cependant, il ne faut pas les ignorer. Il est utile d’identifier et de documenter des effets indésirables potentiels liés aux médicaments car ils permettent d’identifier des ensembles de problèmes qui pourraient êtrecorrigés avant l’apparition d’un préjudice ; il peut s’agir de problèmes de communication dans la formation sanitaire ou de deux étiquettes facilement confondues.

en conséquence, les programmes de pharmacovigilance doivent surveiller les effets qui peuvent être liés à la qualité d’un produit, aux erreurs de médication et aux réactions adverses aux médicaments préalablement connus ou non.

qualité d’un produit

Le monitorage de la qualité des produits disponibles sur le marché doit permettre d’identifier les produits qui sont défectueux, détériorés ou falsifiés en raison

figure 1.Causes de réactions adverses aux médicaments

adapté de Barker et al. 2002 ; ferner et aronson 2006 ; Nebeker et al. 2004

45 enfants deviennent handicapés à la suite d’injections mal administrées en Ouganda

120 personnes meurent après la prise d’un sirop falsifié contre la toux au Panama

Patients sous TAR présentent une anémie associée à la zidovudine en Namibie

Erreurs de médication

Réactions cliniques adverses

Réactions adverses aux médicaments

Contrefaçons ou produits

frelatés

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4 Le PRogRAMMe RenfoRCeMenT DeS SySTèMeS PHARMACeUTIqUeS

de mauvaises pratiques de fabrication, d’une distribution et d’un stockage inappropriés ou de falsification. Cette catégorie comporte, par exemple, les médicaments ayant perdu leur efficacité après un stockage à haute température ainsi que les produits contrefaits. de nombreuses études ont rapporté la circulation de médicaments contrefaits ou non conformes, en particulier des antipaludiques, dans les pays en développement (par ex. atemnkeng et al. 2007 ; Bate et al. 2008 ; Onwujekwe et al. 2009).

au milieu des années 90, un exemple a illustré l’impact de la qualité des médicaments en Haïti où près de 100 enfants sont décédés après avoir ingéré un sirop antalgique fabriqué localement, frelaté au diéthylène glycol. en 1998, dans la publication d’un rapport sur l’incident, O’Brien et ses collègues ont écrit : « Cette tragédie souligne les difficultés rencontrées dans les pays en développement où il peut ne pas exister de réglementation adéquate, d’application ou de mise en œuvre stricte des normes actuelles de bonnes pratiques de fabrication dans le secteur pharmaceutique. » Puis ils ont conclu que : « Il est probable que des catastrophes comme celle-ci surviendront, jusqu’à ce que les pays du monde entier adoptent et appliquent des normes qui assurent la sécurité des produits pharmaceutiques. » Malheureusement, ces paroles se révélèrent prémonitoires lorsqu’un incident étonnamment similaire, impliquant du diéthylène glycol dans un sirop contre la toux fabriqué localement, provoqua la mort de plus de 120 personnes au Panama environ 10 ans plus tard. une longue enquête a permis d’identifier un certain nombre de facteurs contributifs, notamment des problèmes d’ingrédients bruts frelatés, d’étiquetage, des contrôles insuffisants le long de la chaîne d’approvisionnement et une absence d’analyse par le laboratoire où le sirop était fabriqué (rentz et al. 2008). Le gouvernement avait accordé au laboratoire, qui ne respectait pas les bonnes pratiques de fabrication, une autorisation de fonctionnement et n’avait pas exigé l’enregistrement des médicaments du laboratoire, ce qui aurait entraîné des tests de contrôle de la qualité.

erreurs de médication

Le NCC MerP (National Coordinating Council for Medication Error Reporting and Prevention) définit l’erreur de médication comme « tout événement évitable qui peut entraîner une utilisation inappropriée des médicaments ou un préjudice pour le patient lorsque que le médicament est sous la responsabilité du professionnel de santé, du patient ou du consommateur » (NCC MerP 2009). Les erreurs peuvent être inoffensives ou néfastes pour le patient. une étude sur 36 établissements de santé aux états-unis a montré que environ une dose de médicaments sur cinq était prescrite par erreur et que 7 % des doses administrées étaient susceptibles d’être nocives pour le patient (Barker et al. 2002) ; l’Institut américain de Médecine a estimé en 2006 que plus d’1.5 million d’américains subissent chaque année des préjudices dus à des erreurs de médication évitables (aspden et al. 2006).

Les erreurs de médication sont la conséquence de l’insuffisance des systèmes, processus et conditions qui conduisent les gens à commettre des erreurs ou à ne pas pouvoir les éviter. Les problèmes peuvent avoir pour origine une écriture manuscrite illisible, l’utilisation d’abréviations dangereuses, l’absence de prise en compte des interactions avec d’autres médicaments, une mauvaise communication verbale et des médicaments dont le nom ou l’aspect se ressemble. Par exemple, récemment, nombre de préjudices et décès ayant eu un grand retentissement, ont

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impliqué l’administration de surdoses d’héparine chez les nourrissons en raison d’erreurs d’étiquettes, d’erreur de calcul au moment du mélange ou d’une erreur de vérification par un prestataire de soins de santé (IsMP 2008) ; en Ouganda, plus de 45 enfants sont devenus handicapés à la suite de lésions nerveuses dues à l’injection de façon incorrecte de quinine (agiro 2009). Par définition, les erreurs de médication doivent être prévenues par la formation et les systèmes de contrôle efficaces impliquant les pharmaciens, les prescripteurs, les personnels infirmiers, les administrateurs, les autorités de réglementation et les patients.

Réactions adverses aux médicaments

une réaction adverse aux médicaments est une réponse néfaste due au médicament après son administration au patient de la manière recommandée (dose, fréquence, voie et technique d’administration). Il s’agit par exemple de réactions allergiques, de conséquences de l’arrêt du traitement ou de réponses entraînées par des interactions avec d’autres médicaments. L’OMs définit une réaction adverse grave comme toute réaction fatale, mettant en jeu le pronostic vital, handicapant de manière importante ou permanente, entraînant ou prolongeant une hospitalisation ou en relation avec un abus d’utilisation ou une dépendance (WHO/uMC 2000).

un effet indésirable a pour cause soit le médicament lui-même, soit son utilisation inappropriée. en conséquence, une réaction adverse est toujours un effet indésirable, mais la catégorie des effets indésirables comporte aussi, par exemple, les conséquences d’un surdosage dû à une erreur de dispensation ou à une autre erreur survenant lorsque le patient prend le médicament (figure 1).

Lorsqu’un nouveau médicament est en cours de développement, il passe par plusieurs phases de test de son innocuité et de son efficacité, tout d’abord chez les animaux, puis chez des personnes volontaires. Cependant, lorsqu’un médicament est approuvé, il est possible qu’il n’ait été testé que chez un nombre limité de patients dont l’ordre de grandeur est inférieur à celui des patients susceptibles d’utiliser le médicament après son approbation. en conséquence, les études avant commercialisation génèrent des données incomplètes sur l’innocuité, comparativement au profil complet des utilisateurs probables, y compris les groupes sensibles que les essais cliniques n’incluent pas, comme les enfants, les femmes enceintes et les personnes âgées. Il s’ensuit que la surveillance après commercialisation est un outil essentiel pour compléter le profil d’innocuité et d’efficacité d’un nouveau médicament.

Pharmacovigilance : Une approche globale systémique

Certains professionnels de santé pensent encore à la pharmacovigilance strictement en termes d’identification et de notification des réactions adverses graves et inconnues en relation avec de nouveaux médicaments. Quoique de nombreux programmes nationaux de pharmacovigilance soient largement structurés autour de cette activité, un système global doit également prendre en compte la surveillance des erreurs de médication, l’inefficacité thérapeutique (liée à une mauvaise observance du traitement, une résistance antimicrobienne,

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des problèmes de qualité du médicament, l’utilisation inappropriée ou des interactions), les problèmes de qualité des produits ainsi que la communication de l’ensemble de ces informations aux professionnels de santé et aux consommateurs afin de permettre des prises de décision tenant compte du rapport avantages/risques. Par exemple, lorsqu’un système de pharmacovigilance se consolide, il peut passer d’un programme s’appuyant strictement sur une surveillance passive des effets indésirables, qui repose sur les notifications volontaires de prestataires de santé ou de consommateurs, à des méthodes de surveillance active visant à traiter des problèmes de sécurité prioritaire comme l’utilisation de registres, de sites sentinelles et le suivi de cohortes définies de patients. d’autres efforts d’expansion du système peuvent inclure l’établissement d’un lien entre l’assurance de la qualité pharmaceutique et la surveillance des réactions adverses ainsi que l’élaboration de mécanismes permettant de communiquer des données sur la sécurité des médicaments aux professionnels de santé et au public.

Le système de pharmacovigilance d’un pays devrait intégrer les activités et les ressources au niveau des établissements ainsi qu’au niveau national et international ; il doit également encourager la collaboration entre un large éventail de partenaires et d’organismes qui contribuent à assurer la sécurité des médicaments. La figure 2 présente les éléments d’un système de pharmacovigilance global et évolutif qui comporte des fonctions pour la surveillance, la détection, la notification, l’évaluation, la description des données d’innocuité des médicaments, l’intervention et le recueil de données auprès des informateurs (prescripteurs, agent de soins de santé, autres professionnels de santé et consommateurs) qui reçoivent également en retour des éléments de formation. une fois les données recueillies, des évaluateurs, tels que des épidémiologistes ou des pharmacologistes, doivent les analyser afin de déterminer la gravité des événements indésirables, leur causalité probable et s’ils peuvent être évités. un certain nombre de ressources sont utilisées pour cette analyse, comme par exemple l’algorithme de Naranjo pour l’analyse de causalité (Naranjo et al. 1981). des données pertinentes doivent être communiquées efficacement à une structure ou entité qui a le pouvoir d’entreprendre les actions appropriées tant au niveau de l’établissement qu’au niveau national ou même international. Cette entité peut être le Comité du Médicament et de traitement (CMt) d’un hôpital, le Centre national de pharmacovigilance, le cas échéant, ou le programme de l’OMs pour la surveillance internationale des médicaments. La dernière fonction du cadre est l’action adaptée. si des données sont recueillies, analysées et font l’objet de rapports mais que personne n’entreprend aucune action pour les exploiter, le système n’est pas pertinent. L’action visant à réduire le risque peut être réglementaire (retrait de l’aMM, rappel d’un médicament), managériale (révision du formulaire d’un hôpital, institution de contrôles de la distribution) ou éducative (enseigner aux prescripteurs les interactions médicamenteuses ou la manipulation adéquate des médicaments). Pour encourager les informateurs à poursuivre leur participation dans le processus, les interventions doivent leur être communiquées dans un cadre de réciprocité. Le recueil et l’analyse des données du suivi mesureront alors l’efficacité des interventions.

L’aboutissement d’un système de pharmacovigilance devrait être la diminution des problèmes liés aux médicaments avec comme conséquence finale la réduction de la morbidité et de la mortalité.

Lorsque les pays interviennent pour étendre le champ de leurs activités de pharmacovigilance et y inclure la surveillance des problèmes de qualité des

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produits et des effets indésirables liés à une utilisation inappropriée des médicaments, ils ont besoin d’établir de nouveaux mécanismes de coopération entre les parties impliquées et de développer les capacités du système. Par exemple, l’incorporation de la surveillance de la qualité des produits dans le système de notification des réactions adverses peut nécessiter des mises en relation entre l’entité responsable du recueil, de la compilation et de l’évaluation des notifications d’effets indésirables, le bureau national d’inspection des produits pharmaceutiques et le laboratoire du contrôle de la qualité.

Le recueil des données et la génération de rapports sur les trois sources potentielles d’événements indésirables (problèmes de qualité des produits, erreurs de médication et réactions adverses aux médicaments) doivent être intégrés dans le système de santé global depuis la formation sanitaire jusqu’au niveau national. Pour concevoir ce système d’information, il est nécessaire de répondre à quelques questions élémentaires : Le flux de données sera-t-il intégré pour chacune de ces sources potentielles ? Qui sera responsable du recueil des données et de la génération de rapports à chaque niveau du système de santé ? Comment le système de notification verticale du programme de santé publique sera-t-il intégré ? Par exemple, existe-t-il un CMt fonctionnel pour prendre la responsabilité de la pharmacovigilance au niveau de la formation sanitaire ? Comment les données de pharmacovigilance vont-elles orienter les décisions concernant la sélection du formulaire et les recommandations thérapeutiques, les modifications des politiques et consignes aux différents niveaux ainsi que l’approbation des produits et les réglementations pharmaceutiques ?

Le programme sPs collabore avec les pays pour répondre à ces questions et pour élaborer un plan en plusieurs étapes afin de mettre en œuvre un système intégré qui inclut les activités au niveau de la formation sanitaire ainsi qu’aux niveaux national et international et il établit des liens entre les parties impliquées.

figure 2.Le cadre conceptuel de pharmacovigilance : reliant les personnes concernées, les fonctions, les structures, les résultats et impacts attendus

PERSONNES

Informateurs

Médecins

Pharmaciens

Personnel infirmier

Autres agents de soins de santé

Consommateurs

Évaluateurs

Spécialistes médicaux

Pharmacologistes cliniques

Pharmaciens

Épidémiologistes

Notification (Détection et génération de rapports)

Notifier les effets secondaires et les effets indésirables suspectés

Prise de décision et d’action adequateModifications de la notice, avertissements,

programmation des modifications, gestion du risque, retrait du marché, rappel des produits, etc.

Collecte de données (Évaluation)Rassembler les données,

conduire une analyse initiale

Analyse de causalité et de détermination de risque

Établir la causalité ou déterminer si des études épidémiologiques supplémentaires sont

nécessaires pour établir l’association

FONCTIONS

Fabricants

Centre de pharmacovigilance

CMT

Comités consultatifs de la sécurité

Autorité de réglementation

Industrie

Services de santé

Associations professionnelles

Comités consultatifs

Médias

STRUCTURES

Réduction de la morbidité et de la mortalitéPrévention des probèmes liés aux médicaments

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Méthodes de pharmacovigilance

La notification spontanée ou passive des effets indésirables par les prestataires de soins de santé et les patients est utile à l’identification des effets indésirables rares et inattendus. Même si les points forts et les limites de cette approche de notification spontanée ont déjà été décrits, il est important de noter qu’il s’agit de l’approche la plus fréquemment utilisée pour détecter les problèmes de sécurité des médicaments mais qu’il est souvent nécessaire de la renforcer dans les environnements à ressources limitées.

La surveillance active implique une recherche méthodique des expositions ou événements dans des établissements de sites sentinelles en complément du suivi des patients qui ont été exposés aux médicaments concernés. Cette approche systématique permet de recueillir des données plus complètes sur les effets indésirables que celles obtenues par la surveillance passive ; mais elle est, bien évidemment, plus coûteuse que la notification spontanée. Les méthodes de surveillance active permettent aux analystes d’obtenir un dénominateur de personnes exposées au médicament concerné, qui permet le calcul du taux d’effets indésirables et met en évidence la sécurité du médicament parmi les populations vulnérables, comme les femmes en âge de procréer et les enfants. Comme exemple de surveillance active, on peut citer le monitorage d’une cohorte d’effets indésirables qui comporte le suivi de patients traités par un médicament donné et le recueil de données sur son impact. Quoique des modèles de monitorage de cohortes d’effets indésirables aient été élaborés il y a plus de 20 ans, cette méthodologie a connu récemment un regain d’intérêt.

un registre qui assure le suivi des patients présentant la ou les mêmes caractéristiques, appartient à la catégorie de surveillance active. Cette caractéristique peut être une pathologie (registre de pathologie), une exposition spécifique (registre de médicaments) ou un type d’exposition survenant au cours d’un événement particulier de la vie (registre d’exposition pendant la grossesse). Les registres comportent des données recueillies prospectivement à l’aide de questionnaires standardisés. L’utilisation d’un registre d’exposition pendant la grossesse est la méthode la plus couramment employée pour évaluer

dans 21 cours sur le CMt (y compris une session sur la prise en charge des effets indésirables) le Programme de gestion rationnelle des produits pharmaceutiques (rPM Plus), le programme sPs et leurs partenaires ont formé plus de 800 participants venant de 69 pays ; ceux-ci ont établi ou restructuré plus de 85 CMt et mis en place des centaines d’interventions liées au CMt dans des environnements à ressources limitées. en Namibie, le programme sPs a élaboré une stratégie pour renforcer cinq comités thérapeutiques régionaux afin qu’ils servent d’exemple pour d’autres régions du pays. en éthiopie, le programme sPs a également mené plusieurs séminaires de sensibilisation et de formation destinés aux pharmaciens, aux spécialistes

et aux directeurs médicaux portant sur la manière dont les CMt peuvent contribuer au fonctionnement d’un hôpital ; 80 nouveaux CMt fonctionnels ont vu le jour à l’issue de ces séminaires. de même, le rwanda a formé 165 professionnels de la santé sur la manière de mettre en place et de faire fonctionner des CMt. Le programme sPs offre aux hôpitaux un soutien continu pour favoriser l’institutionnalisation des comités. dans un hôpital du Kenya, la surveillance des effets indésirables liés aux médicaments a conduit le CMt à élaborer et mettre en œuvre des recommandations pour la prescription et la préparation de la vancomycine et à retirer les remèdes contre la toux et le rhume du formulaire de l’hôpital.

encadré 1. renforcement des capacités des cmt afin de promouvoir la sécurité des médicaments

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systématiquement l’innocuité d’un médicament pendant la grossesse, après sa commercialisation. Certains ont également suggéré l’utilisation de registres pour évaluer l’innocuité des médicaments antipaludiques (dellicour et al. 2007 ; Ward et al. 2007 ; WHO et MMv 2009).

Les études d’observation formelle identifient et quantifient le degré d’association entre l’exposition d’un médicament donné et le résultat indésirable pour la santé. Ces types d’études comportent des essais de cas témoin et de cohortes. Les laboratoires pharmaceutiques conduisent parfois des essais cliniques au cours de la période qui suit la commercialisation lorsque les essais cliniques avant l’aMM ont mis en évidence des risques significatifs. dans certains cas, des chercheurs peuvent également conduire des études pharmacodynamiques et pharmacocinétiques afin de déterminer si un schéma posologique particulier présente un risque plus élevé d’effets indésirables pour les patients.

La pharmacovigilance au niveau de la formation sanitaire

Même si le monitorage de l’innocuité du médicament joue un rôle important dans la qualité des soins, des effets indésirables surviennent dans d’autres cadres de soins de santé, comme les consultations, les maisons de retraite, les pharmacies et le domicile des patients. L’insuffisance de notification des effets indésirables est un problème crucial dans tous les environnements. La notification hospitalière des effets indésirables offre une contribution importante à l’expérience clinique et à une meilleure compréhension de la pharmacothérapie. de plus, l’évaluation des effets indésirables fournit aux établissements les informations nécessaires pour réduire les erreurs de médication et améliorer les soins de santé.

un réseau bien établi de CMt joue un rôle précieux dans la mise en œuvre d’activités de pharmacovigilance au sein de la formation sanitaire dans la zone sous sa juridiction ; il permet, par exemple, de prendre des mesures pour combattre l’utilisation irrationnelle des médicaments et prévenir les erreurs de médication au niveau local. Le programme sPs a largement travaillé avec les CMt afin de renforcer les capacités liées à la sécurité et à l’utilisation rationnelle des médicaments (encadré 1).

La pharmacovigilance au niveau national

Il incombe aux gouvernements nationaux de s’assurer que les médicaments vendus dans leur pays sont de bonne qualité, sûrs et efficaces. un système national de pharmacovigilance, soutenu par l’organe de réglementation pharmaceutique, est un élément essentiel de la capacité d’un pays à surveiller l’innocuité des médicaments. un programme national de pharmacovigilance peut être logé soit dans un centre national de pharmacovigilance, soit dans un hôpital tertiaire ou orienté vers la recherche. dans le modèle traditionnel, le système de pharmacovigilance est centralisé et se limite à un centre national qui recueille les notifications envoyées par les professionnels de santé de tout le pays. un grand nombre de pays s’orientent vers un système plus décentralisé comportant un centre national qui fonctionne comme un point de convergence des centres régionaux ou des centres implantés dans les établissements de santé (WHO/uMC 2000) ; le vietnam, par exemple, envisage d’établir trois centres régionaux coordonnés par un centre national de monitorage des réactions adverses aux médicaments et d’informations sur les médicaments. Par

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ailleurs, la Namibie a créé une synergie en mettant en place un centre national responsable à la fois de l’information sur les médicaments et des activités de pharmacovigilance (encadré 2).

La pharmacovigilance dans les programmes de santé publique

en fonction de l’organisation de leur système de santé publique, certains pays peuvent bénéficier d’initiatives de santé publique spécifiquement liées à certaines pathologies et qui fonctionnent séparément du système de santé publique principal (par exemple, pour le vIH/sIda, la tuberculose, le paludisme, les vaccinations). Les initiatives thérapeutiques verticales dépendent de bonnes pratiques de pharmacovigilance (WHO 2006) ; la surveillance des réactions adverses est particulièrement importante lorsque le traitement est en expansion, comme avec les tar dans le vIH/sIda, ou si les directives standardisées de traitement sont modifiées, comme avec l’adoption des Cta dans le paludisme.

une évaluation conduite en Namibie en 2003 a révélé que l’absence d’un centre national d’information sur les médicaments et d’un système de monitorage des réactions adverses constituait une lacune importante dans la délivrance de traitements antirétroviraux (tar) dans le pays. en collaboration avec le Ministère de la santé et des services sociaux (Msss), le programme sPs a intégré les activités de pharmacovigilance et d’information sur les médicaments afin de capitaliser sur les synergies potentielles entre ces deux domaines et tirer meilleur parti des maigres ressources. Le lancement du Centre de pharmacovigilance et d’informations thérapeutiques (Therapeutics Information and Pharmacovigilance Center ; tIPC) en 2008 a institué des services diversifiés d’information sur la sécurité des médicaments destinés aux prestataires de soins de santé et au public.

Pour établir le tIPC, le programme sPs a tout d’abord précisé les éléments indispensables pour renforcer la capacité institutionnelle à surveiller l’innocuité des médicaments, notamment les rôles et responsabilités des structures, les systèmes et parties concernés, les compétences du personnel, l’infrastructure et les outils. Par exemple, la Namibie a institutionnalisé le tIPC en le plaçant sous l’égide de son Conseil de réglementation pharmaceutique. des comités d’experts nouvellement établis, comme le Comité clinique et les CMt, servent respectivement de conseil consultatif et d’unités décentralisées du tIPC. Cette structure organisationnelle favorise la pérennisation du centre. Le programme sPs a également élaboré des recommandations et des procédures opérationnelles standard nationales pour le centre, il a fourni un

accès à des bases de données d’information sur les médicaments et autres ressources et il a lancé la publication du bulletin du centre, The Namibia Medicine Watch.

Le programme sPs a aidé le Msss à renforcer ses capacités dans le domaine de l’information et de la sécurité des médicaments : entre son lancement en mai 2008 et avril 2009, le centre a traité 98 cas signalés de réactions adverses (49 rapports par million de personnes par an, 86 % d’entre eux concernant les arv), mené 107 enquêtes thérapeutiques et formé environ 150 agents de soins de santé sur la sécurité des médicaments. récemment, le Msss a identifié l’anémie associée à la prise de zidovudine comme problème prioritaire de sécurité des médicaments pour le programme de tar et il a demandé au programme sPs de soutenir une surveillance active de l’utilisation de la zidovudine. La Namibie est à présent un membre officiel du programme de surveillance internationale des médicaments de l’OMs et elle poursuit ses efforts pour adhérer à l’International Society of Drug Bulletins. Le tIPC comble désormais une lacune en offrant des services précieux au système de santé. Les agents de soins de santé, les responsables de programmes de santé publique et les patients bénéficient maintenant d’un point d’information fiable pour améliorer le traitement et les résultats, les comités d’experts disposent d’une ressource pour la révision des recommandations thérapeutiques et des listes de médicaments essentiels, et le Conseil de réglementation pharmaceutique de Namibie a désormais accès à des données de sécurité qui permettent de prendre des décisions réglementaires éclairées.

encadré 2. développer les capacités relatives à la sécurité des médicaments – le centre de pharmacovigilance et d’informations thérapeutiques de namibie

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Les principaux objectifs de la pharmacovigilance dans les initiatives de santé publique sont identiques à ceux du système de pharmacovigilance national. La structure et l’organisation des systèmes nationaux existants permettent de déterminer comment concevoir et intégrer les efforts de pharmacovigilance du programme de santé publique. dans certains cas, le pays ne possède pas de système de pharmacovigilance national, auquel cas le système du programme de santé publique revêt une importance accrue et peut servir d’exemple pour l’éventuel établissement d’un système national. au Kenya, le programme sPs a permis aux programmes de tar individuels d’instaurer un système de monitorage des réactions adverses sur les sites concernés au moment de l’expansion de leurs programmes de traitement ; le Ministère de la santé a reconnu l’importance d’une coordination au niveau national et a inclus la pharmacovigilance dans ses responsabilités. Il s’agit là d’un bel exemple d’approche ascendante pour l’incorporation de la pharmacovigilance dans le système de santé.

La pharmacovigilance au niveau international

au niveau international, l’OMs, par l’intermédiaire de sa collaboration avec le Centre de surveillance d’uppsala, a créé un réseau mondial destiné aux échanges de données et d’informations concernant les avantages et les risques des produits pharmaceutiques. Ce réseau comporte une base de données commune, à laquelle les membres participants peuvent contribuer, sur la sécurité des médicaments, notamment les effets indésirables. Ce réseau compte désormais près de 100 pays membres, y compris de nombreux pays en développement.

Renforcement des capacités pour la pharmacovigilance

Le programme sPs coopère avec les pays pour renforcer leurs capacités internes à instaurer un système de pharmacovigilance à l’aide du cadre conceptuel de la figure 3. Ce cadre montre la nécessité de prendre en compte les structures,

figure 3.renforcement des capacités pour la pharmacovigilance

adapté de Potter et Brough 2004

Capacités de performance

Capacités du personnel

Capacités de charge de travail

Capacités de surveillance

Capacités de l’établissement

Capacités de soutien des services

Capacitéstructurelle

Capacitésystémique

Capacitéfonctionnelle

Outils

Compétences

Personnel et infrastructure

Structures, systèmes et fonctions

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systèmes et fonctions, l’infrastructure et le personnel, les compétences et les outils du système de santé afin d’offrir des services efficaces dans le domaine de la sécurité des médicaments. L’encadré 3 en offre un exemple.

Le renforcement des capacités dans le cadre d’un système de pharmacovigilance intégré comporte :

■ Le développement d’une structure organisationnelle et réglementaire fonctionnelle et viable, d’un plan opérationnel et de recommandations pour la pharmacovigilance et le monitorage de l’innocuité des médicaments ;

■ une définition claire des rôles et responsabilités des comités consultatifs d’experts, des CMt, des programmes de santé publique, des hôpitaux et structures sanitaires, des prestataires de soins de santé et des associations professionnelles, des institutions universitaires, des laboratoires pharmaceutiques, des importateurs, des grossistes et des revendeurs, des consommateurs et des médias ;

■ L’assurance que les besoins en infrastructure et personnel sont pourvus (en commençant par le centre de pharmacovigilance national) ;

À la demande de la direction des services pharmaceutiques de KwaZulu Natal (KZN), le programme sPs a aidé la province à élaborer un cadre de travail pour mettre en œuvre un programme de monitorage et de notification des réactions adverses concernant les arv et les médicaments associés. Le programme rPM Plus a évalué les besoins en infrastructures et en données des agents de soins de santé pour la réalisation du programme et a aidé le personnel de la province à élaborer un formulaire de notification, des outils de recueil des données et un système automatisé de gestion et d’évaluation des données.

avec l’aide de plusieurs partenaires, KZN a rédigé un projet de demande de subvention au fonds mondial, projet qui a été accepté, afin de conduire un programme de surveillance active des arv comprenant un programme de surveillance de sites sentinelles et un programme de surveillance de cohortes d’effets indésirables. KZN a demandé au programme sPs de l’aider à élaborer et mettre en œuvre le programme sur 14 sites sentinelles et 8 sites de cohortes ; ce projet comporte l’élaboration du protocole de l’étude et de son manuel, la mise en œuvre d’un système de gestion de données et d’outils de notification, la formation des investigateurs de l’étude et du personnel des sites ainsi que l’établissement d’un système d’analyse des données. au total, 280 personnes sur l’ensemble des 22 sites ont été formées. Le programme sPs participe également à un comité de pilotage de la pharmacovigilance au niveau de la province qui favorise la mise en œuvre du projet sur les sites d’étude.

Le programme de surveillance des sites sentinelles complète le système existant de notification des réactions adverses à KZN pour les patients sous tar ; il met l’accent sur la surveillance et la notification des interactions médicamenteuses, des interactions avec les médicaments traditionnels, des erreurs médicamenteuses et d’autres toxicités liées aux médicaments, qui n’étaient pas surveillées jusqu’à présent. Le programme de monitorage de cohortes d’effets indésirables de la province a pour objectif de recueillir des données à long terme sur la sécurité et les résultats thérapeutiques des patients sous tar. Le programme sPs permet également d’analyser et d’évaluer les notifications de réactions adverses liées aux changements de schémas thérapeutiques de tar sur tous les sites de la province. Cette base de données sur les réactions adverses fournit des informations importantes sur les changements de traitements liés à la toxicité ; elle est unique car elle comporte des données recueillies de manière systématique sur tous les changements de schémas thérapeutiques de la province. À la suite de cette intervention, l’OMs a invité KZN à collaborer à son programme de monitorage de cohortes d’effets indésirables.

Le programme sPs aide également le Programme national de lutte contre la tuberculose à élaborer un cadre de surveillance spécifique des réactions adverses liées au traitement de la tuberculose multi résistante et ultra résistante sur des sites sentinelles de plusieurs provinces.

encadré 3. soutien à la pharmacovigilance en afrique du sud

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■ L’appui au personnel s’occupant de pharmacovigilance pour l’acquisition de nouvelles connaissances et compétences (par ex. pharmacie clinique, méthodes de surveillance active) ;

■ L’institutionnalisation des outils appropriés (par ex. procédures opérationnelles standard, formulaires de notification et de communication, supports d’information) afin d’améliorer le recueil et l’analyse des données ainsi que la notification.

Développement de la capacité structurelle

Le rôle primordial de l’autorité de réglementation pharmaceutique consiste à encadrer la collaboration entre les différents partenaires intervenant dans la pharmacovigilance et s’assurer que la réciprocité fonctionne dans les échanges d’informations. La surveillance des performances et la création d’une culture de la responsabilité au sein du système constituent une fonction de coordination importante ; grâce à celles-ci chaque partenaire connaît son rôle et les objectifs attendus.

Comme mentionné plus haut, les partenaires impliqués dans la pharmacovigilance peuvent comprendre les responsables de l’approvisionnement pharmaceutique, les organisations professionnelles, les médias d’information, les associations de défense de patients et d’accompagnants et les responsables de programmes de santé publique, auxquels il faut ajouter les responsables de santé au niveau de l’établissement, du district, de la région et du pays. La mise en place de liens et la large dissémination des informations concernant la sécurité des médicaments renforce les capacités décisionnaires comme le montre l’exemple de la Namibie (encadré 4).

L’intégration des activités de pharmacovigilance des programmes de santé publique, comme le traitement du vIH/sIda et la vaccination des enfants, dans le système national de pharmacovigilance est également un élément essentiel de l’élaboration d’un système solide. de multiples structures de notification des réactions adverses ont tendance à se développer lorsque des programmes verticaux de santé publique fonctionnent dans un pays ; cependant, une telle fragmentation peut finalement fragiliser le système. Inversement, un programme de santé publique qui possède une structure bien installée de recueil et de notification des réactions adverses peut servir de modèle et de point de départ pour la mise en place d’un système national, s’il n’en existe pas encore.

Développement des capacités du personnel

La sécurité des médicaments est un concept compris par tout le monde. L’essentiel est de faire réaliser à tous, des autorités de réglementation aux prestataires de soins de santé et consommateurs, que chacun a un rôle à jouer pour aider à rendre les médicaments plus sûrs. Les sujets de pharmacovigilance devraient faire partie du programme de formation des professionnels de santé, tant en formation initiale qu’en formation continue, et les autorités de réglementation pharmaceutique doivent s’assurer que les documents de formation en pharmacovigilance sont harmonisés dans tout le pays (encadré 5).

tous les prestataires de soins de santé, y compris les médecins, les pharmaciens, le personnel infirmier, les dentistes et d’autres encore, devraient réaliser que la

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notification des réactions adverses et des erreurs de médication fait partie de leurs responsabilités professionnelles. La notification volontaire des réactions adverses et des erreurs de médication nécessite que les prestataires de soins de santé soient des participants actifs dans une culture de sécurité. Même lorsque les programmes s’appuyant uniquement sur des méthodes de notification spontanée et volontaire ne révèlent que le sommet de l’iceberg, la notification volontaire doit toujours être encouragée parce qu’elle permet d’établir une approche d’équipe pour améliorer les soins au patient et réduire les risques. Néanmoins, la notification insuffisante est une difficulté courante dans tous les systèmes de pharmacovigilance au niveau de la formation sanitaire, de la région ou du pays. Les obstacles à la notification des réactions adverses aux autorités de réglementation pharmaceutique ou au Centre national de pharmacovigilance sont les suivants :

■ Manque de prise de conscience par les professionnels de santé de l’importance de la notification des réactions adverses ;

■ faible pourcentage du personnel formé à la pharmacovigilance ; ■ absence de cadre de priorité au sein des autorités de réglementation pharmaceutique et des programmes de santé publique – la pharmacovigilance n’est pas suffisamment mise en avant ;

■ Manque de ressources techniques et financières au niveau de la formation sanitaire pour le recueil et l’analyse des données ;

■ faiblesse de la structure organisationnelle de l’autorité de réglementation pharmaceutique, entraînant une distribution et un recueil irréguliers des formulaires de notification des réactions adverses auprès des établissements de santé ;

■ absence de supervision et de suivi régulier par le coordinateur de la pharmacovigilance au sein de l’autorité de réglementation pharmaceutique.

Les visites de supervision, qui renforcent les méthodes appropriées, et la réciprocité, qui assure que les prestataires de soins de santé savent que leurs efforts sont utiles et pris en compte, accroissent le niveau de notification dans un système de pharmacovigilance. Les informateurs qui transmettent les données ont besoin de sentir que les notifications ne terniront pas l’image de leurs établissements et qu’ils sont importants, même s’ils ont certains doutes sur le rôle de causalité du médicament en question.

L’autorité de réglementation pharmaceutique et le centre de pharmacovigilance peuvent renforcer la prise de conscience des différentes parties impliquées

en 2007, la Namibie a changé la stavudine, élément principal du tar recommandé dans la première ligne, pour la zidovudine, en raison de problèmes de neuropathie périphérique ; mais le pays manquait de données locales concernant la sécurité du produit pour étayer sa décision. en 2008, la surveillance effectuée par le tIPC national nouvellement mis en place a montré que l’anémie associée à la zidovudine représentait l’effet indésirable le plus fréquemment signalé pour les arv (64 %). de tels résultats constituent une

preuve objective des avantages et des risques associés aux schémas thérapeutiques actuels pour étayer les décisions futures concernant les recommandations de tar. ainsi, il s’est avéré impératif d’établir une communication régulière entre le tIPC et le Conseil national de lutte contre le sIda afin de faciliter l’utilisation des données de pharmacovigilance locale ; ces données doivent être utilisées pour élaborer et mettre à jour les recommandations thérapeutiques pour que la population locale puisse en bénéficier.

encadré 4. mise en place de liens pour la prise de décision en namibie

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de l’importance de l’enjeu, par le biais de la formation et de la sensibilisation. Les activités de sensibilisation peuvent comprendre la communication avec des groupes professionnels (par ex. bulletins d’information d’organisations professionnelles), les prestataires de santé sur leur lieu de travail (par ex. séminaire à l’heure du déjeuner) et le public (par ex. affiches présentant les dangers de médicaments contrefaits). L’implication des médias est un bon moyen d’atteindre tous ceux qui lisent un journal ou écoutent la radio, parmi lesquels les prestataires de soins de santé, les décideurs et les patients.

Approche opérationnelle du programme SPS

Quoique les activités de pharmacovigilance se déroulent souvent sur une échelle limitée, impliquant par exemple un seul programme de santé publique comportant uniquement la notification volontaire des effets indésirables, le programme sPs insiste sur l’importance d’une approche globale et systémique de la pharmacovigilance. Le programme sPs travaille avec les pays pour élaborer une stratégie opérationnelle qui englobe tous les aspects de la sécurité des médicaments – qualité des produits, réactions adverses et erreurs de médication – en s’appuyant sur un choix de méthodes de surveillance, notamment la surveillance active. Les pays peuvent alors mettre en œuvre le système par étapes, au fur et à mesure qu’ils développent les capacités et mettent en place les ressources nécessaires. une stratégie qui permet à différents partenaires du processus de développement de fournir le soutien technique ou financier pour renforcer la capacité d’éléments individuels du système national de pharmacovigilance peut être une approche pour avancer. Le travail du programme sPs avec le gouvernement du vietnam offre de bons exemples de cette approche (encadré 6).

La responsabilité de la pharmacovigilance devrait être partagée entre de nombreuses parties impliquées, notamment les autorités de réglementation pharmaceutique, l’industrie pharmaceutique, l’OMs, les programmes de santé publique, les chercheurs universitaires, les organismes bailleurs, le secteur de la délivrance de soins de santé ainsi que le public et les patients (Pirmohamed

au milieu de l’année 2007, l’autorité de réglementation pharmaceutique du Kenya, le Pharmacy and Poisons Board (PPB), a lancé un programme de pharmacovigilance qui a institué la notification volontaire des réactions adverses à tous les médicaments. Le gouvernement a élaboré des recommandations nationales et des outils de notification et conduit un atelier national de sensibilisation destiné aux pharmaciens, techniciens pharmaceutiques, médecins, officiers de santé et personnel infirmier de toutes les provinces du pays. Les parties impliquées du secteur de la santé ont mis l’accent sur la nécessité de créer une approche standard de la formation des agents de soins de santé et des outils pour garantir la communication uniforme des

messages clés. en outre, le Ministère de la santé a adopté le principe d’un cursus standardisé pour une grande variété de programmes de santé publique, y compris le Programme national de lutte contre le sIda et les Ist, la division de la santé de la reproduction et la division de la lutte contre le paludisme.

dans le cadre du déploiement du programme national de pharmacovigilance, le PPB a proposé l’élaboration d’un cursus standard pour la formation des agents de soins de santé sur la pharmacovigilance. Le programme sPs a travaillé avec le PPB à l’élaboration d’un cursus et d’outils standardisés dans le cadre d’une série d’ateliers réunissant les parties impliquées, qui se sont tenus en juillet et août 2008.

encadré 5. le programme sps travaille conjointement avec le pharmacy and poisons board pour élaborer des documents de formation standardisés

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et al. 2007). en pratique, de telles interactions entre les parties impliquées ont été limitées et fragmentées. L’un des domaines clés de l’assistance technique du programme sPs consiste à aider les pays à identifier l’ensemble des rôles et responsabilités des parties impliquées du système et à les réunir pour qu’elles abordent la pharmacovigilance en tant que préoccupation commune. Cette approche collaborative crée une synergie et une meilleure coordination afin de mettre en place et d’assurer la pérennité d’une campagne de sensibilisation et d’actions de soutien de la pharmacovigilance. Le processus d’élaboration d’un cadre visant à établir ou renforcer un système de pharmacovigilance peut en lui-même également favoriser la coordination entre les parties impliquées. dans le cadre de l’effort de collaboration, les partenaires peuvent identifier les lacunes, les actions qui font double emploi, les réussites et les points forts sur lesquels s’appuyer ainsi que les possibilités d’organiser et d’harmoniser les rôles et responsabilités.

Le gouvernement du vietnam reconnaît la nécessité et l’importance d’un système national fonctionnel pour la surveillance et l’adoption de mesures visant à prévenir les réactions adverses et pour la communication d’informations pharmaceutiques aux décideurs, aux prestataires de soins de santé et aux consommateurs. selon la loi, les professionnels, les établissements de santé, les fabricants et les distributeurs sont tenus de signaler les réactions adverses aux responsables de leur organisme ainsi qu’aux autorités de réglementation pharmaceutique. d’autre part, le Ministère de la santé est responsable de l’organisation de systèmes qui fournissent des informations pharmaceutiques et se chargent de la surveillance des réactions adverses pour assurer une utilisation sûre et efficace des médicaments.

Le gouvernement a attribué au service de l’administration des médicaments du Ministère de la santé et à l’université de pharmacie d’Hanoï la responsabilité de mettre en place le Centre national de surveillance des réactions adverses et des informations sur le médicament qui sert de carrefour ou d’unité centrale pour le système de pharmacovigilance du vietnam. Pendant que les deux partenaires travaillent à la mise en place du Centre national de surveillance des réactions adverses et des informations sur le médicament et de trois autres centres régionaux proposés au nord, au centre et au sud du vietnam, le programme sPs collabore avec les parties impliquées pour étudier l’étendue des activités de pharmacovigilance existantes, identifier les priorités en adoptant une approche globale et élaborer un consensus sur le rôle que doivent jouer les parties impliquées et la manière de mettre en place un système de pharmacovigilance totalement fonctionnel.

au vietnam, les activités de pharmacovigilance ont historiquement été menées selon une approche passive, s’appuyant sur les doutes des agents de soins de santé

et la notification des réactions adverses potentielles aux médicaments. L’expérience acquise dans d’autres pays suggère que les approches actives et les méthodes d’études formelles sont également nécessaires pour évaluer les problèmes potentiels et fournir des mesures du degré du risque encouru. Le programme sPs a recommandé que le système de pharmacovigilance intègre des méthodes de surveillance active, notamment l’utilisation de registres et de sites sentinelles ainsi que le suivi de cohortes de patients. Il a également suggéré que les notifications envoyées au nouveau centre d’information sur les médicaments et les réactions adverses portent non seulement sur ceux-ci, mais également sur les défauts des produits pharmaceutiques et les erreurs de médication.

La construction d’un système de pharmacovigilance fonctionnel, efficace et pérenne sur le long terme nécessitera probablement une mise en œuvre par étapes sur un certain nombre d’années, en raison des contraintes financières et de capacité. de plus, il sera nécessaire qu’un certain nombre de partenaires au développement contribuent aux ressources techniques et financières en complément des ressources existantes et prévues, fournies par le gouvernement du vietnam. en fonction de leurs domaines d’intérêt, les partenaires au développement peuvent choisir de soutenir soit des activités de pharmacovigilance spécifique, comme par exemple la qualité des produits, soit des organismes partenaires individuels, comme par exemple le Centre de surveillance des réactions adverses et des informations sur le médicament, ou encore une pathologie, un programme ou une catégorie de médicaments spécifiques comme par exemple les arv. Le gouvernement du vietnam envisage également de déposer une demande de subvention auprès du fonds mondial afin d’aider au renforcement du système de pharmacovigilance pour un certain nombre d’éléments clés.

encadré 6. une expansion par étapes :système de pharmacovigilance du vietnam

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Pour atteindre les objectifs d’un système de pharmacovigilance, l’approche fonctionnelle du programme sPs comporte les étapes suivantes :

■ Évaluation du système de pharmacovigilance existant : travailler avec des partenaires pour évaluer l’état des systèmes de pharmacovigilance et diagnostiquer les points forts, les points faibles et les lacunes, à l’aide d’une méthode d’évaluation de la pharmacovigilance. L’évaluation couvre tous les aspects du cadre de la pharmacovigilance : les personnes, les fonctions et les structures.

■ Élaboration d’un modèle personnalisé d’amélioration du système : en utilisant les résultats des évaluations, le programme sPs travaille avec les parties impliquées du pays pour identifier et analyser les différentes options et élaborer des approches pertinentes, réalisables et pérennes adaptées aux capacités et priorités réglementaires, aux lacunes et à la disponibilité des ressources du pays. Le programme sPs collabore également avec les partenaires nationaux pour identifier les interventions adéquates à mettre en œuvre aux différents niveaux, comme par exemple au niveau de la formation sanitaire, du programme de santé publique, au niveau national et même éventuellement au niveau régional par une collaboration entre plusieurs pays.

■ Aide à la mise en œuvre des interventions identifiées : Le programme sPs travaille avec les parties impliquées du pays, les partenaires qui collaborent au projet et aux autres projets financés par l’usaId pour aider à les classer par ordre de priorité et à mener à bien les interventions identifiées.

■ Suivi et évaluation des activités de sécurité des médicaments : Le programme sPs offre une assistance technique aux partenaires du pays afin d’élaborer et de mettre en œuvre un programme de suivi de leur système de pharmacovigilance s’appuyant sur des indicateurs.

Contrairement à l’expérience du vietnam qui partait d’un système existant, le travail du programme sPs au rwanda offre un bon exemple des défis rencontrés au cours de la création de toutes pièces d’un système de pharmacovigilance (encadré 7).

en résumé, l’utilisation des produits pharmaceutiques implique un compromis entre leurs avantages et leur nocivité potentielle. La pharmacovigilance peut aider à minimiser le risque de nocivité en s’assurant que des médicaments de bonne qualité sont utilisés de manière adéquate et que les prestataires de soins de santé et les consommateurs bénéficient des informations dont ils ont besoin pour prendre des décisions éclairées au sujet du traitement. Les pays peuvent créer un système global de sécurité des médicaments grâce à une planification stratégique soigneuse qui englobe tous les aspects de la pharmacovigilance, tout en ayant recours à une mise en œuvre par étapes et un soutien technique et financier efficacement coordonné pour atteindre des objectifs à long terme.

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Le programme sPs a travaillé avec le Pharmacy Task Force (Ptf ; groupe de travail sur le médicament) du rwanda et d’autres parties impliquées pour élaborer un système diversifié de sécurité des médicaments, comprenant la mise en place d’un Centre national de pharmacovigilance et d’information du médicament. Les parties impliquées ont défini les fonctions du système global prévu dans un document, « Strategic Approach for the Establishment of a Pharmacovigilance System in Rwanda » (approche stratégique pour la mise en place d’un système de pharmacovigilance au rwanda) :

■ surveillance de l’innocuité des médicaments utilisés au rwanda ;

■ Quantification et description de la fréquence des réactions adverses précédemment reconnues au rwanda ;

■ Conduite et coordination de la notification spontanée et des activités de surveillance active ;

■ détermination de l’efficacité sur le terrain des médicaments utilisés au rwanda ;

■ fourniture d’informations fiables sur les médicaments aux agents de soins de santé et aux consommateurs ;

■ surveillance de la promotion et de la publicité de tous les produits de santé ;

■ amélioration de l’utilisation rationnelle des médicaments ;

■ amélioration de la sécurité des patients ; ■ élaboration d’interventions visant à réduire la

morbidité et la mortalité liées aux médicaments.

L’un des plus grands défis est de trouver un local administratif approprié pour le système de pharmacovigilance ; cette responsabilité est souvent prise par l’autorité de réglementation pharmaceutique du pays, mais le rwanda ne dispose pas d’une telle autorité. Le Ptf est le candidat le plus probable, mais en raison de ses capacités limitées, des programmes de santé publique comme ceux concernant le vIH/sIda, la tuberculose et le paludisme devront apporter leur soutien. La stratégie attribue également aux CMt un rôle clé dans la décentralisation du système de pharmacovigilance du rwanda. depuis 2007, le programme sPs a aidé le Ptf à mettre en place des CMt dans environ 18 hôpitaux de district afin d’améliorer l’utilisation des médicaments. Le sPs continue d’œuvrer avec le Ptf pour créer un CMt national afin de superviser la mise à jour des directives standardisées de traitement, du formulaire national et de la liste des médicaments essentiels et de coordonner les activités des CMt au niveau de l’hôpital.

Pour faire avancer les choses au rwanda, le programme sPs a entrepris les étapes suivantes :

■ Organisation et conduite d’un atelier avec les parties impliquées afin de promouvoir la mise en place d’un système de pharmacovigilance au rwanda. au cours de l’atelier :

• Mise en place d’un groupe de travail technique pour suivre les recommandations des parties concernées

• Conception du système de pharmacovigilance et ébauche d’un calendrier de travail sur une période d’un an

■ élaboration de documents et d’outils techniques pour mettre en place et faire fonctionner le système, y compris des recommandations, un cadre de référence, un formulaire de notification des réactions adverses, une fiche d’alerte pour les patients, un formulaire de demande d’informations sur le médicament et un formulaire de notification des réactions adverses testé sur le terrain à tous les niveaux du système de santé

■ élaboration d’un programme de formation en pharmacovigilance, incluant des composantes de formation des formateurs, afin de mettre en place un plan de formation en cascade

■ Prises de contact avec le Centre de surveillance d’uppsala au sujet de l’adhésion du rwanda au réseau international de sécurité du médicament

■ formation en pharmacovigilance du personnel local par le Ptf, l’université nationale du rwanda et le programme sPs

Les étapes suivantes concerneront le lancement du Centre national de pharmacovigilance et d’information sur les médicaments, l’organisation de formations pour les formateurs, les représentants des CMt et le personnel des hôpitaux et des centres de santé, la diffusion de recommandations et d’outils aux personnes chargées de la mise en œuvre à tous les niveaux, l’instauration d’activités de rapport et de notification des réactions adverses et de certaines activités de surveillance active en partenariat avec le Centre de traitement et de recherche sur le sIda et le Programme de santé maternelle et infantile et enfin la mise en place d’un système d’information médicale au sein du Centre national de pharmacovigilance et d’information sur les médicaments.

encadré 7. en commençant par le début : mise en place d’un système de pharmacovigilance et d’information sur le médicament au rwanda

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SoUTIen AUx PRogRAMMeS De PHARMACoVIgILAnCe DAnS LeS PAyS en DÉVeLoPPeMenT: Une APPRoCHe SySTÉMIqUe 19

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20 Le PRogRAMMe RenfoRCeMenT DeS SySTèMeS PHARMACeUTIqUeS

Remerciements

Collaborateurs

shabir Banoo, Programme sPs, afrique du sudMartha embrey, Centre pour la gestion des médicaments, états-unisMohan Joshi, Programme sPs, états-unisdouglas Keene, Programme sPs, états-unisdavid Lee, Centre pour la gestion des médicaments, états-unisJude Nwokike, Programme sPs, états-unis

Catherine Corbell, université de Washington, états-unisandy stergachis, université de Washington, états-unis

alexander dodoo, Centre for tropical Clinical Pharmacology & Therapeutics, Ghana

Réviseurs

Niranjan Konduri, Centre pour la gestion des médicaments, états-unisNegussu Mekonnen, Programme sPs, éthiopiesue Putter, Programme sPs, afrique du sudrima shretta, Programme sPs, états-unisHelena Walkowiak, Programme sPs, états-unis

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Strengthening Pharmaceutical SystemsCentro para la gestión farmacéutica

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facsímile: 703.524.7898e-mail: [email protected]

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Management Sciences for Health, an international nonprofit organization, uses proven approaches developed over four decades to help leaders, health managers, and communities in developing nations build stronger health systems for greater health impact.