5
Le Roman de Tristan et Iseut, Chapitre II. Le Roman de Tristan et Iseut 1 raconte les amours contrariées de Tristan, neveu du roi Marc, qui règne sur la Cornouailles, et de la belle Yseult, princesse irlandaise mariée à ce même roi Marc. Les faits narrés dans le passage ci-dessous se déroulent avant la rencontre des futurs amants. Le héros, Tristan, combat le terrible Morholt, qui demande une rançon monstrueuse à son oncle : trois cent jeunes gens et trois cents jeunes filles. Jaloux de l’influence du neveu sur l’oncle, les barons de Cornouailles incitent Tristan à affronter le Morholt. Ce dernier est, en outre, l’oncle d’Iseut la Blonde. Au jour dit, Tristan se plaça sur une courte- pointe de cendal 2 vermeil, et se fit armer pour la haute aventure. Il revêtit le haubert et le heaume d’acier bruni. Les barons pleuraient de pitié sur le preux et de honte sur eux-mêmes. « Ah ! Tris- 5 tan, se disaient-ils, hardi baron, belle jeunesse, que n’ai-je, plutôt que toi, entrepris cette ba- taille ! Ma mort jetterait un moindre deuil sur cette terre !… » Les cloches sonnent, et tous, ceux de la baronnie et ceux de la gent menue, vieil- 10 lards, enfants et femmes, pleurant et priant, es- cortent Tristan jusqu’au rivage. Ils espéraient encore, car l’espérance au cœur des hommes vit de chétive pâture. Tristan monta seul dans une barque et cingla 15 vers l’île Saint-Samson. Mais le Morholt avait tendu à son mât une voile de riche pourpre, et le premier il aborda dans l’île. Il attachait sa barque au rivage, quand Tristan, touchant terre à son tour, repoussa du pied la sienne vers la mer. 20 « Vassal 3 , que fais-tu ? dit le Morholt, et pourquoi n’as-tu pas retenu comme moi ta barque par une amarre ? - Vassal, à quoi bon ? répondit Tristan. L’un de nous reviendra seul vivant d’ici : une seule 25 barque ne lui suffit-elle pas ? » Et tous deux, s’excitant au combat par des pa- roles outrageuses, s’enfoncèrent dans l’île. Nul ne vit l’âpre bataille ; mais, par trois fois, il sembla que la brise de mer portait au rivage un 30 cri furieux. Alors, en signe de deuil, les femmes battaient leurs paumes en chœur, et les compa- gnons du Morholt, massés à l’écart devant leurs tentes, riaient. Enfin, vers l’heure de none 4 , on vit au loin se tendre la voile de pourpre ; la barque 35 de l’Irlandais se détacha de l’île, et une clameur de détresse retentit : « Le Morholt ! Le Mor- holt ! » Mais, comme la barque grandissait, sou- dain, au sommet d’une vague, elle montra un chevalier qui se dressait à la proue ; chacun de ses 40 poings tendait une épée brandie : c’était Tristan. Aussitôt vingt barques volèrent à sa rencontre et les jeunes hommes se jetaient à la nage. Le preux s’élança sur la grève et, tandis que les mères à genoux baisaient ses chausses de fer, il cria aux 45 compagnons du Morholt : « Seigneurs d’Irlande, le Morholt a bien com- battu. Voyez : mon épée est ébréchée, un frag- ment de la lame est resté enfoncé dans son crâne. Emportez ce morceau d’acier, seigneurs : c’est le 50 tribut de la Cornouailles ! » Alors il monta vers Tintagel 5 . Sur son passage, les enfants délivrés agitaient à grands cris des branches vertes, et de riches courtines se ten- daient aux fenêtres. Mais quand, parmi les chants 55 d’allégresse, aux bruits des cloches, des trompes et des buccines 6 , si retentissants qu’on n’eût pas ouï Dieu tonner, Tristan parvint au château, il s’affaissa entre les bras du roi Marc : et le sang ruisselait de ses blessures. 60 Le Roman de Tristan et Iseut, renouvelé par Joseph Bédier, 1900 1. Le manuscrit original (s’il a existé) du Roman de Tristan et Iseut s’est perdu. Il reste des fragments en octosyl- labes de récits mis en forme au XII e siècle par Thomas d’Angleterre et Béroul ; ces deux conteurs ont repris la légende à l’intention d’Aliénor d’Aquitaine et d’Henri Plantegenêt. Ils s’inspirent de la « matière de Bre- tagne », aux sources des aventures des chevaliers de la Table ronde, et de la civilisation courtoise. Chrétien de Troyes (XIIe s) a également produit une version qui a été perdue. Joseph Bédier, en 1900, réécrit une ver- sion complète à partir des différents fragments connus. 2. Couvre-lit en étoffe de soie 3. Sujet 4. Midi 5. Demeure du roi Marc 6. Trompettes Séquence 1 Texte 1

Séquence 1 – Texte 1 Le Roman de Tristan et Iseut Chapitre II. · PDF fileLe Roman de Tristan et Iseut, ... si retentissants qu’on n’eût pas ... Le Roman de Tristan et Iseut,

  • Upload
    dolien

  • View
    217

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Séquence 1 – Texte 1 Le Roman de Tristan et Iseut Chapitre II. · PDF fileLe Roman de Tristan et Iseut, ... si retentissants qu’on n’eût pas ... Le Roman de Tristan et Iseut,

Le Roman de Tristan et Iseut, Chapitre II.

Le Roman de Tristan et Iseut1 raconte les amours contrariées de Tristan, neveu du roi Marc, qui règne sur la Cornouailles, et de la belle Yseult, princesse irlandaise mariée à ce même roi Marc. Les faits narrés dans le passage ci-dessous se déroulent avant la rencontre des futurs amants. Le héros, Tristan, combat le terrible Morholt, qui demande une rançon monstrueuse à son oncle : trois cent jeunes gens et trois cents jeunes filles. Jaloux de l’influence du neveu sur l’oncle, les barons de Cornouailles incitent Tristan à affronter le Morholt. Ce dernier est, en outre, l’oncle d’Iseut la Blonde.

Au jour dit, Tristan se plaça sur une courte-

pointe de cendal2 vermeil, et se fit armer pour la haute aventure. Il revêtit le haubert et le heaume d’acier bruni. Les barons pleuraient de pitié sur le preux et de honte sur eux-mêmes. « Ah ! Tris-5

tan, se disaient-ils, hardi baron, belle jeunesse, que n’ai-je, plutôt que toi, entrepris cette ba-taille ! Ma mort jetterait un moindre deuil sur cette terre !… » Les cloches sonnent, et tous, ceux de la baronnie et ceux de la gent menue, vieil-10

lards, enfants et femmes, pleurant et priant, es-cortent Tristan jusqu’au rivage. Ils espéraient encore, car l’espérance au cœur des hommes vit de chétive pâture.

Tristan monta seul dans une barque et cingla 15

vers l’île Saint-Samson. Mais le Morholt avait tendu à son mât une voile de riche pourpre, et le premier il aborda dans l’île. Il attachait sa barque au rivage, quand Tristan, touchant terre à son tour, repoussa du pied la sienne vers la mer. 20

« Vassal3, que fais-tu ? dit le Morholt, et pourquoi n’as-tu pas retenu comme moi ta barque par une amarre ?

- Vassal, à quoi bon ? répondit Tristan. L’un de nous reviendra seul vivant d’ici : une seule 25

barque ne lui suffit-elle pas ? » Et tous deux, s’excitant au combat par des pa-

roles outrageuses, s’enfoncèrent dans l’île. Nul ne vit l’âpre bataille ; mais, par trois fois,

il sembla que la brise de mer portait au rivage un 30

cri furieux. Alors, en signe de deuil, les femmes battaient leurs paumes en chœur, et les compa-gnons du Morholt, massés à l’écart devant leurs tentes, riaient. Enfin, vers l’heure de none4, on vit au loin se tendre la voile de pourpre ; la barque 35

de l’Irlandais se détacha de l’île, et une clameur de détresse retentit : « Le Morholt ! Le Mor-holt ! » Mais, comme la barque grandissait, sou-dain, au sommet d’une vague, elle montra un chevalier qui se dressait à la proue ; chacun de ses 40

poings tendait une épée brandie : c’était Tristan. Aussitôt vingt barques volèrent à sa rencontre et les jeunes hommes se jetaient à la nage. Le preux s’élança sur la grève et, tandis que les mères à genoux baisaient ses chausses de fer, il cria aux 45

compagnons du Morholt : « Seigneurs d’Irlande, le Morholt a bien com-

battu. Voyez : mon épée est ébréchée, un frag-ment de la lame est resté enfoncé dans son crâne. Emportez ce morceau d’acier, seigneurs : c’est le 50

tribut de la Cornouailles ! » Alors il monta vers Tintagel5. Sur son passage,

les enfants délivrés agitaient à grands cris des branches vertes, et de riches courtines se ten-daient aux fenêtres. Mais quand, parmi les chants 55

d’allégresse, aux bruits des cloches, des trompes et des buccines6, si retentissants qu’on n’eût pas ouï Dieu tonner, Tristan parvint au château, il s’affaissa entre les bras du roi Marc : et le sang ruisselait de ses blessures. 60

Le Roman de Tristan et Iseut, renouvelé par Joseph Bédier, 1900

1. Le manuscrit original (s’il a existé) du Roman de Tristan et Iseut s’est perdu. Il reste des fragments en octosyl-

labes de récits mis en forme au XIIe siècle par Thomas d’Angleterre et Béroul ; ces deux conteurs ont repris la

légende à l’intention d’Aliénor d’Aquitaine et d’Henri Plantegenêt. Ils s’inspirent de la « matière de Bre-

tagne », aux sources des aventures des chevaliers de la Table ronde, et de la civilisation courtoise. Chrétien

de Troyes (XIIe s) a également produit une version qui a été perdue. Joseph Bédier, en 1900, réécrit une ver-

sion complète à partir des différents fragments connus.

2. Couvre-lit en étoffe de soie

3. Sujet

4. Midi

5. Demeure du roi Marc

6. Trompettes

Séquence 1 – Texte 1

Page 2: Séquence 1 – Texte 1 Le Roman de Tristan et Iseut Chapitre II. · PDF fileLe Roman de Tristan et Iseut, ... si retentissants qu’on n’eût pas ... Le Roman de Tristan et Iseut,

Honoré de Balzac, le Père Goriot, 1835

Eugène de Rastignac, jeune homme issu de la noblesse pauvre de province, est monté à Paris pour y étu-dier le droit et tenter de réussir dans le monde. Il se rend chez sa cousine, la vicomtesse de Bauséant. Celle-ci vient d’apprendre la trahison du duc d’Ajuda-Pinto, son amant, qui va la quitter pour se marier ; elle accepte cependant d’être pour Eugène une sorte de mentor, conseillère expérimentée et digne de confiance.

— Eh bien ! monsieur de Rastignac, traitez ce monde comme il mérite de l’être. Vous voulez parvenir, je vous aiderai. Vous sonderez combien est profonde la corruption féminine, vous toise-rez la largeur de la misérable vanité des hommes. 5

Quoique j’aie bien lu dans ce livre du monde, il y avait des pages qui cependant m’étaient incon-nues. Maintenant je sais tout. Plus froidement vous calculerez, plus avant vous irez. Frappez sans pitié, vous serez craint. N’acceptez les 10

hommes et les femmes que comme les chevaux de poste que vous laisserez crever à chaque relais, vous arriverez ainsi au faite de vos désirs. Voyez-vous, vous ne serez rien ici si vous n’avez pas une femme qui s’intéresse à vous. Il vous la faut jeune, 15

riche, élégante. Mais si vous avez un sentiment vrai, cachez-le comme un trésor ; ne le laissez jamais soupçonner, vous seriez perdu. Vous ne seriez plus le bourreau, vous deviendriez la vic-time. Si jamais vous aimiez, gardez bien votre 20

secret ! ne le livrez pas avant d’avoir bien su à qui vous ouvrirez votre cœur. Pour préserver par avance cet amour qui n’existe pas encore, appre-nez à vous méfier de ce monde-ci. Écoutez-moi, Miguel1... (Elle se trompait naïvement de nom 25

sans s’en apercevoir.) Il existe quelque chose de plus épouvantable que ne l’est l’abandon du père par ses deux filles2, qui le voudraient mort. C’est la rivalité des deux sœurs entre elles. Restaud a de la naissance, sa femme a été adoptée, elle a été 30

présentée3 ; mais sa sœur, sa riche sœur, la belle madame Delphine de Nucingen, femme d’un homme d’argent, meurt de chagrin ; la jalousie la dévore, elle est à cent lieues de sa sœur ; sa sœur n’est plus sa sœur ; ces deux femmes se renient 35

entre elles comme elles renient leur père. Aussi, madame de Nucingen laperait-elle toute la boue qu’il y a entre la rue Saint-Lazare et la rue de Grenelle pour entrer dans mon salon. Elle a cru que de Marsay la ferait arriver à son but, et elle 40

1 Prénom de son amant le duc d’Ajuda-Pinto

2 Le père Goriot a donné tout son argent à ses deux filles pour

les marier, l’une au comte de Restaud, l’autre au banquier

Nucingen. Mais elles ont honte de lui et le délaissent. 3 Acceptée par l’aristocratie

s’est faite l’esclave de de Marsay, elle assomme de Marsay. De Marsay se soucie fort peu d’elle. Si vous me la présentez, vous serez son Benjamin4, elle vous adorera.

Aimez-la si vous pouvez après, sinon servez-45

vous d’elle. Je la verrai une ou deux fois, en grande soirée, quand il y aura cohue ; mais je ne la recevrai jamais le matin. Je la saluerai, cela suffira. Vous vous êtes fermé la porte de la com-tesse pour avoir prononcé le nom du père Go-50

riot. Oui, mon cher, vous iriez vingt fois chez madame de Restaud, vingt fois vous la trouveriez absente. Vous avez été consigné. Eh bien ! que le père Goriot vous introduise près de madame Delphine de Nucingen. La belle madame de Nu-55

cingen sera pour vous une enseigne. Soyez l’homme qu’elle distingue, les femmes raffole-ront de vous. Ses rivales, ses amies, ses meilleures amies voudront vous enlever à elle. Il y a des femmes qui aiment l’homme déjà choisi par une 60

autre, comme il y a de pauvres bourgeoises qui, en prenant nos chapeaux, espèrent avoir nos ma-nières. Vous aurez des succès. A Paris, le succès est tout, c’est la clef du pouvoir. Si les femmes vous trouvent de l’esprit, du talent, les hommes 65

le croiront, si vous ne les détrompez pas. Vous pourrez alors tout vouloir, vous aurez le pied partout. Vous saurez alors ce qu’est le monde, une réunion de dupes et de fripons. Ne soyez ni parmi les uns ni parmi les autres. Je vous donne 70

mon nom comme un fil d’Ariane pour entrer dans ce labyrinthe. Ne le compromettez pas, dit-elle en recourbant son cou et jetant un regard de reine à l’étudiant, rendez-le-moi blanc. Allez, laissez-moi. Nous autres femmes, nous avons 75

aussi nos batailles à livrer. — S’il vous fallait un homme de bonne volon-

té pour aller mettre le feu à une mine ? dit Eu-gène en l’interrompant.

— Eh bien ? dit-elle. 80

Il se frappa le cœur, sourit au sourire de sa cousine, et sortit.

4 Son préféré

Séquence 1 – Texte 2

Page 3: Séquence 1 – Texte 1 Le Roman de Tristan et Iseut Chapitre II. · PDF fileLe Roman de Tristan et Iseut, ... si retentissants qu’on n’eût pas ... Le Roman de Tristan et Iseut,

Gustave Flaubert, L’Education sentimentale, partie II, chapitre 6, 1869.

L’Education sentimentale retrace l’histoire « morale » d’une génération, celle qui a vu la révolution de 1848. La narration entrelace les fils de deux intrigues, amoureuse et historique, pour mieux les dévaluer l’une et l’autre. Dans le texte suivant, le personnage principal, Frédéric Moreau, est désespéré parce que Mme Arnoux, son grand amour, n’est pas venue au rendez-vous fixé rue Tronchet. Il l’a attendue toute la journée, en vain. Pour se consoler, il va retrouver Rosanette, une femme de mœurs légères. Pendant ce temps, en ce 23 février 1848, le peuple français manifeste dans les rues de Paris. Le roi demande à son ministre, François Guizot, fort impopulaire, de démissionner. Les manifestants se rendent rue des Capucines pour se mo-quer de Guizot mais un coup de feu part et, sur un malentendu, une fusillade éclate : les soldats tirent sur la foule…La révolu-tion de 1848 commence.

- Mille pardons ! dit Frédéric, en lui saisissant la taille dans les deux mains. - Comment ? Que fais-tu ? balbutia la Maré-chale1, à la fois surprise et égayée par ces ma-nières. 5

Il répondit : - Je suis à la mode, je me réforme. Elle se laissa renverser sur le divan, et continuait à rire sous ses baisers. Ils passèrent l’après-midi à regarder, de leur fenêtre, le peuple dans la rue. 10

Puis il l’emmena dîner aux Trois-Frères-Provençaux.2 Le repas fut long, délicat. Ils s’en revinrent à pied, faute de voiture. A la nouvelle d’un changement de ministère, Paris avait changé. Tout le monde était en joie ; 15

des promeneurs circulaient, et des lampions à chaque étage faisaient une clarté comme en plein jour. Les soldats regagnaient lentement leur ca-serne, harassés, l’air triste. On les saluait, en criant : « Vive la ligne 3! » Ils continuaient sans 20

répondre. Dans la garde nationale4, au contraire, les officiers, rouges d’enthousiasme, brandissaient leur sabre en vociférant : « Vive la réforme ! » et ce mot-là, chaque fois, faisait rire les deux amants. Frédéric blaguait, était très gai. 25

Par la rue Duphot, ils atteignirent les boule-vards. Des lanternes vénitiennes, suspendues aux maisons, formaient des guirlandes de feux. Un fourmillement confus s’agitait en dessous ; au milieu de cette ombre, par endroits, brillaient des 30

blancheurs de baïonnettes. Un grand brouhaha s’élevait. La foule était trop compacte, le retour direct impossible ; et ils entraient dans la rue 1 La Maréchale : surnom de Rosanette

2 Trois-Frères-Provençaux : restaurant de luxe.

3 Ligne : armée régulière rangée en ligne.

4 Garde nationale : favorable au peuple.

Caumartin, quand, tout à coup, éclata derrière eux un bruit, pareil au craquement d’une im-35

mense pièce de soie que l’on déchire. C’était la fusillade du boulevard des Capucines. -Ah ! On casse quelques bourgeois, dit Frédé-ric tranquillement. Car il y a des situations où l’homme le moins cruel est si détaché des autres, 40

qu’il verrait périr le genre humain sans un bat-tement de cœur. La Maréchale, cramponnée à son bras, cla-quait des dents. Elle se déclara incapable de faire vingt pas de plus. Alors, par un raffinement de 45

haine, pour mieux outrager en son âme Mme Arnoux, il l’emmena jusqu’à l’hôtel de le rue Tronchet, dans le logement préparé pour l’autre. Les fleurs n’étaient pas flétries. La guipure5 s’étalait sur le lit. Il tira de l’armoire les petites 50

pantoufles. Rosanette trouva ces prévenances fort délicates. Vers une heure, elle fut réveillée par des rou-lements lointains ; et elle le vit qui sanglotait, la tête enfoncée dans l’oreiller. 55

-Qu’as-tu donc, cher amour ? -C’est un excès de bonheur, dit Frédéric. Il y avait trop longtemps que je te désirais.

5 Guipure : dentelle.

Séquence 1 – Texte 3

Page 4: Séquence 1 – Texte 1 Le Roman de Tristan et Iseut Chapitre II. · PDF fileLe Roman de Tristan et Iseut, ... si retentissants qu’on n’eût pas ... Le Roman de Tristan et Iseut,

Louis Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit

(1932)

Avec Voyage au bout de la nuit, Céline dénonce les horreurs de la guerre, de la colonisation, de l’exploitation capitaliste. Adepte du « parler vrai », il s’attaque aux représentations idéalisées des combats et aux idéologies. Le protagoniste du roman, Ferdinand Bardamu, incarne, en effet, un individu très ordinaire, qui séduit par une parade militaire, s’engage dans l’armée sur un coup de tête. Il se retrouve confronté aux dures réalités des combats qui se déchaînent dans l’est de la France, durant la Première Guerre mondiale.

Serais-je donc le seul lâche sur la terre ? pensais-je. Et avec quel effroi ! … Perdu parmi deux millions de fous héroïques et déchaînés et armés jusqu’aux cheveux ? Avec casques, sans casques, sans chevaux, sur motos, hurlants, en 5

autos, sifflants, tirailleurs, comploteurs, volants, à genoux, creusant, se défilant, caracolant dans les sentiers, pétaradant, enfermés sur la terre comme dans un cabanon, pour y tout détruire, Alle-magne, France et Continents, tout ce qui respire, 10

détruire, plus enragés que les chiens, adorant leur rage (ce que les chiens ne font pas), cent, mille fois plus enragés que mille chiens et tellement plus vicieux ! Nous étions jolis ! Décidément, je le concevais, je m’étais embarqué dans une croisade 15

apocalyptique. On est puceau de l’Horreur comme on l’est de la volupté. Comment aurais-je pu me douter moi de cette horreur en quittant la place Clichy1 ? Qui aurait pu prévoir, avant d’entrer 20

vraiment dans la guerre, tout ce que contenait la sale âme héroïque et fainéante des hommes ? A présent, j’étais pris dans cette fuite en masse, vers le meurtre en commun, vers le feu…Ça venait des profondeurs et c’était arrivé. 25

Le colonel ne bronchait toujours pas, je le regardais recevoir, sur le talus, des petites lettres du général qu’il déchirait ensuite menu, les ayant lues sans hâte, entre les balles. Dans aucune d’elles, il n’y avait donc l’ordre d’arrêter net cette 30

abomination ? On ne lui disait donc pas d’en haut qu’il y avait méprise ? Abominable erreur ? Maldonne ? Qu’on s’était trompé ? Que c’était des manœuvres pour rire qu’on avait voulu faire, et pas des assassinats ! Mais non ! « Continuez, 35

colonel, vous êtes dans la bonne voie ! » Voilà sans doute ce que lui écrivait le général des En-

1 Place Clichy : Lieu à Paris, où Bardamu revient de façon pério-

dique.

trayes, de la division, notre chef à tous, dont il recevait une enveloppe chaque cinq minutes, par un agent de liaison, que la peur rendait chaque 40

fois un peu plus vert et foireux. J’en aurais fait mon frère peureux de ce garçon là ! Mais on n’avait pas le temps de fraterniser non plus. Donc pas d’erreur ? Ce qu’on faisait à se tirer dessus, comme ça, sans même se voir, n’était 45

pas défendu ! Cela faisait partie des choses qu’on peut faire sans mériter une bonne engueulade. C’était même reconnu, encouragé sans doute par les gens sérieux, comme le tirage au sort, les fian-çailles, la chasse à courre ! … Rien à dire. Je venais 50

de découvrir d’un coup la guerre tout entière. J’étais dépucelé. Faut être à peu près seul devant elle comme je l’étais à ce moment-là pour bien la voir la vache, en face et de profil. On venait d’allumer la guerre entre nous et ceux d’en face, 55

et à présent ça brûlait ! Comme le courant entre les deux charbons, dans la lampe à arc. Et il n’était pas près de s’éteindre le charbon ! On y passerait tous, le colonel comme les autres, tout mariole qu’il semblerait être, et sa carne ne ferait 60

pas plus de rôti que la mienne quand le courant d’en face lui passerait entre les deux épaules. Il y a bien des façons d’être condamné à mort. Ah ! combien n’aurais-je pas donné à ce moment-là pour être en prison au lieu d’être ici, 65

moi crétin ! Pour avoir, par exemple, quand c’était si facile, prévoyant, volé quelque chose, quelque part, quand il en était temps encore. On ne pense à rien ! De la prison, on en sort vivant, pas de la guerre. Tout le reste, c’est des mots. 70

Si seulement j’avais encore eu le temps, mais je ne l’avais plus ! Il n’y avait plus rien à voler !

Séquence 1 – Texte 4

Page 5: Séquence 1 – Texte 1 Le Roman de Tristan et Iseut Chapitre II. · PDF fileLe Roman de Tristan et Iseut, ... si retentissants qu’on n’eût pas ... Le Roman de Tristan et Iseut,

Et

dès

qu’i

ls s

e fu

ren

t re

nco

ntr

és,

le g

ran

d H

ektô

r au

cas

que

mo

uva

nt

par

la a

insi

le

pre

mie

r :

— J

e n

e te

fuir

ai p

as p

lus

lon

gtem

ps,

fil

s d

e P

èleu

s. J

e t’

ai f

ui

tro

is f

ois

auto

ur

de

la

gran

de

vill

e d

e P

riam

os

et j

e n

’ai

po

int

osé

att

end

re t

on

att

aque

; m

ais

voic

i q

ue

mon

ur

me

po

uss

e à

te t

enir

têt

e. J

e tu

erai

ou j

e se

rai

tué.

Mai

s at

test

on

s le

s d

ieux,

et

qu’i

ls s

oie

nt

les

fid

èles

tém

oin

s et

les

gar

die

ns

de

no

s p

acte

s. J

e n

e t’

outr

ager

ai p

oin

t cr

uel

lem

ent,

si

Zeu

s m

e d

on

ne

la v

icto

ire

et s

i je

t’a

rrac

he

l’âm

e ;

mai

s, A

kh

ille

us,

ap

rès

t’av

oir

dép

ouil

lé d

e te

s b

elle

s ar

mes

, je

ren

dra

i to

n c

adav

re a

ux

Ak

hai

ens.

Fai

s d

e m

ême,

et

pro

met

s-le

. E

t A

kh

ille

us

aux

pie

ds

rap

ides

, le

reg

ard

ant

d’u

n œ

il s

om

bre

, lu

i ré

po

nd

it :

— H

ektô

r, l

e p

lus

exéc

rable

des

ho

mm

es,

ne

me

par

le p

oin

t d

e p

acte

s. D

e m

ême

qu’i

l n

’y a

po

int

d’a

llia

nce

s en

tre

les

lio

ns

et l

es h

om

mes

, et

que

les

loup

s et

les

ag

nea

ux,

lo

in d

e s’

acco

rder

, se

haï

ssen

t to

ujo

urs

; d

e m

ême

il m

’est

im

po

ssib

le d

e n

e p

as t

e h

aïr,

et

il n

’y a

ura

po

int

de

pac

tes

entr

e n

ous

avan

t q

u’u

n d

es d

eux

ne

tom

be,

ra

ssas

ian

t d

e so

n sa

ng

le te

rrib

le gu

erri

er A

rès.

R

app

elle

to

ut

ton

co

ura

ge.

C’e

st

mai

nte

nan

t q

ue

tu v

as a

voir

bes

oin

de

toute

to

n a

dre

sse

et d

e to

ute

ta

vigu

eur,

car

tu

n’a

s p

lus

de

refu

ge,

et v

oic

i q

ue

Pal

las

Ath

ènè

va t

e d

om

pte

r p

ar m

a la

nce

, et

qu

e tu

ex

pie

ras

en u

ne

fois

les

mau

x d

e m

es c

om

pag

no

ns

que

tu a

s tu

és d

ans

ta f

ure

ur

! Il

par

la a

insi

, et

, bra

nd

issa

nt

sa l

on

gue

piq

ue,

il

la l

ança

; m

ais

l’il

lust

re H

ektô

r la

vi

t et

l’é

vita

; e

t la

piq

ue

d’a

irai

n, p

assa

nt

au-d

essu

s d

e lu

i, s

’en

fon

ça e

n t

erre

. E

t P

alla

s A

thèn

è, l

’aya

nt

arra

chée

, la

ren

dit

à A

kh

ille

us,

san

s q

ue

le p

rin

ce d

es p

eup

les,

Hek

tôr,

s’

en a

per

çût.

Et

le P

riam

ide

dit

au b

rave

Pèl

éid

e :

— T

u m

’as

man

qué,

ô

A

kh

ille

us

sem

bla

ble

au

x d

ieu

x !

Zeu

s n

e t’

avai

t p

oin

t en

seig

ma

des

tin

ée,

com

me

tu l

e d

isai

s ;

mai

s ce

n’é

taie

nt

que

des

par

ole

s va

ines

et

rusé

es,

afin

de

m’e

ffra

yer

et d

e m

e fa

ire

oubli

er m

a fo

rce

et m

on

co

ura

ge.

Ce

ne

sera

p

oin

t d

ans

le d

os

que

tu m

e p

erce

ras

de

ta l

ance

, ca

r je

co

urs

dro

it à

to

i. F

rap

pe

do

nc

ma

po

itri

ne,

si

un

die

u t

e l’

acco

rde,

et

ten

te m

ain

ten

ant

d’é

vite

r m

a la

nce

d’a

irai

n.

Plû

t au

x d

ieux

que

tu l

a re

çuss

es t

out

enti

ère

dan

s le

co

rps

! La

guer

re s

erai

t p

lus

faci

le

aux

Tro

ien

s si

je

te t

uai

s, c

ar t

u e

s le

ur

pir

e fl

éau.

Il p

arla

ain

si e

n b

ran

dis

san

t sa

lo

ngu

e p

ique,

et

il l

a la

nça

; e

t el

le f

rap

pa,

san

s d

évie

r, l

e m

ilie

u d

u b

oucl

ier

du P

èléi

de

; m

ais

le b

ou

clie

r la

rep

ouss

a au

lo

in.

Et

Hek

tôr,

irr

ité

qu’u

n t

rait

in

uti

le s

e fû

t éc

hap

de

sa m

ain

, re

sta

ple

in d

e tr

ouble

, ca

r il

n’a

vait

que

cett

e la

nce

. E

t il

ap

pel

a à

gran

ds

cris

Dèi

ph

obo

s au

bo

ucl

ier

bri

llan

t, e

t il

lui

dem

and

a un

e au

tre

lan

ce ; m

ais,

Dèi

ph

obo

s ay

ant

dis

par

u,

Hek

tôr,

dan

s so

n

esp

rit,

co

nn

ut

sa d

esti

née

, et

il

dit

: —

Mal

heu

r à

mo

i !

voic

i que

les

die

ux

m’a

pp

elle

nt

à la

mo

rt.

Je c

roya

is q

ue

le

hér

os

Dèi

ph

obo

s ét

ait

aup

rès

de

mo

i ; m

ais

il e

st d

ans

no

s m

urs

. C

’est

Ath

ènè

qui

m’a

tr

om

pé.

L

a m

auva

ise

mo

rt es

t p

roch

e ;

la vo

ilà,

p

lus

de

refu

ge.

Cec

i p

lais

ait

dès

lo

ngt

emp

s à

Zeu

s et

au f

ils

de

Zeu

s, A

po

llô

n,

qui

tous

deu

x ce

pen

dan

t m

’éta

ien

t bie

nve

illa

nts

. E

t vo

ici

que

la m

oir

e va

m

e sa

isir

! M

ais,

ce

rtes

, je

n

e m

ourr

ai n

i lâ

chem

ent,

n

i sa

ns

glo

ire,

et

j’ac

com

pli

rai

un

e gr

and

e ac

tio

n

qu’a

pp

ren

dro

nt

les

ho

mm

es f

utu

rs.

Il p

arla

ain

si,

et,

tira

nt

l’ép

ée a

iguë

qui

pen

dai

t, g

ran

de

et l

ourd

e, s

ur

son

fla

nc,

il

se j

eta

sur

Ak

hil

leu

s, s

embla

ble

à l

’aig

le q

ui, p

lan

ant

dan

s le

s h

aute

urs

, d

esce

nd

dan

s la

pla

ine

à tr

aver

s le

s n

uée

s o

bsc

ure

s, a

fin

d’e

nle

ver

la f

aible

bre

bis

ou l

e li

èvre

tim

ide.

A

insi

se

ruai

t H

ektô

r, e

n b

ran

dis

san

t l’

épée

aig

uë.

Et

Ak

hil

leus,

em

pli

ssan

t so

n c

œur

d’u

ne

rage

fér

oce

, se

rua

auss

i su

r le

Pri

amid

e. E

t il

po

rtai

t so

n b

eau b

oucl

ier

dev

ant

sa p

oit

rin

e, e

t il

se

couai

t so

n c

asq

ue

écla

tan

t au

x q

uat

re c

ôn

es et

aux

sple

nd

ides

cr

iniè

res

d’o

r m

ouva

nte

s q

ue

Hèp

hai

sto

s av

ait

fixé

es a

u s

om

met

. C

om

me

Hes

pér

os,

la

plu

s bel

le

des

ét

oil

es

oura

nie

nn

es,

se

lève

au

m

ilie

u

des

as

tres

d

e la

n

uit

, ai

nsi

re

sple

nd

issa

it l

’écl

air

de

la p

oin

te d

’air

ain

que

le P

èléi

de

bra

nd

issa

it,

po

ur

la p

erte

de

Hek

tôr,

ch

erch

ant

sur

son

bea

u co

rps

la p

lace

o

ù il

fr

app

erai

t. L

es bel

les

arm

es

d’a

irai

n q

ue

le P

riam

ide

avai

t ar

rach

ées

au c

adav

re d

e P

atro

klo

s le

co

uvr

aien

t en

en

tier

, sa

uf

à la

jo

intu

re d

u c

ou e

t d

e l’

épau

le,

là o

ù l

a fu

ite

de

l’âm

e es

t la

plu

s p

rom

pte

. C

’est

que

le d

ivin

Ak

hil

leu

s en

fon

ça s

a la

nce

, d

on

t la

po

inte

tra

vers

a le

co

u d

e H

ektô

r ;

mai

s la

lo

urd

e la

nce

d’a

irai

n n

e tr

anch

a p

oin

t le

go

sier

, et

il

po

uva

it

enco

re p

arle

r. I

l to

mba

dan

s la

po

uss

ière

, et

le

div

in A

kh

ille

us

se g

lori

fia

ain

si :

— H

ektô

r, t

u p

ensa

is p

eut-

être

, ap

rès

avo

ir t

Pat

rok

los,

n’a

voir

plu

s ri

en à

cr

ain

dre

? T

u n

e so

nge

ais

po

int

à m

oi

qui

étai

s ab

sen

t. I

nse

nsé

! un

ven

geur

plu

s fo

rt

lui

rest

ait

sur

les

nef

s cr

euse

s, e

t c’

étai

t m

oi

qui

ai r

om

pu t

es g

eno

ux

! Va

! les

ch

ien

s et

le

s o

isea

ux

te d

éch

irer

on

t h

on

teuse

men

t, e

t le

s A

kh

aien

s en

seve

liro

nt

Pat

rok

los

! E

t H

ektô

r au

cas

que

mo

uva

nt

lui

rép

on

dit

, p

arla

nt

à p

ein

e :

— J

e te

sup

pli

e p

ar t

on

âm

e, p

ar t

es g

eno

ux,

par

tes

par

ents

, n

e la

isse

pas

les

ch

ien

s m

e d

éch

irer

aup

rès

des

nef

s A

kh

aien

nes

. A

ccep

te l

’or

et l

’air

ain

que

te d

on

ner

on

t m

on

pèr

e et

ma

mèr

e vé

nér

able

. R

envo

ie m

on

co

rps

dan

s m

es d

emeu

res,

afi

n q

ue

les

Tro

ien

s et

les

Tro

ien

nes

me

dép

ose

nt

avec

ho

nn

eur

sur

le b

ûch

er.

Et

Ak

hil

leus

aux

pie

ds

rap

ides

, le

reg

ard

ant

d’u

n œ

il s

om

bre

, lu

i d

it :

— C

hie

n !

ne

me

sup

pli

e n

i p

ar m

es g

eno

ux,

ni

par

mes

par

ents

. P

lût

aux

die

ux

que

j’eu

sse

la f

orc

e d

e m

ange

r ta

ch

air

crue,

po

ur

le m

al q

ue

tu m

’as

fait

! R

ien

ne

sauve

ra

ta t

ête

des

ch

ien

s, q

uan

d m

ême

on

m’a

pp

ort

erai

t d

ix e

t vi

ngt

fo

is t

on

pri

x, e

t n

ull

e au

tres

pré

sen

ts ; q

uan

d m

ême

le D

ard

anid

e P

riam

os

voud

rait

te

rach

eter

to

n p

oid

s d

’or

! Jam

ais

la m

ère

vén

érab

le q

ui

t’a

enfa

nté

ne

te p

leu

rera

co

uch

é su

r un

lit

fun

èbre

. L

es c

hie

ns

et l

es o

isea

ux

te d

éch

irer

on

t to

ut

enti

er !

Et

Hek

tôr

au c

asq

ue

mo

uva

nt

lui

rép

on

dit

en

mo

ura

nt

: —

Cer

tes,

je

pré

voya

is,

te c

on

nai

ssan

t bie

n,

qu

e je

ne

te f

léch

irai

s p

oin

t, c

ar t

on

ur

est

de

fer.

So

uvi

ens-

toi

que

les

die

ux

me

ven

gero

nt

le j

our

où P

âris

et

Pho

ibos

Ap

oll

ôn

te

tuer

on

t, m

algr

é to

n c

oura

ge, d

evan

t le

s p

ort

es S

kai

es.

Et

la m

ort

l’a

yan

t in

terr

om

pu, so

n â

me

s’en

vola

de

son

co

rps

chez

Aid

ès, p

leu

ran

t sa

des

tin

ée m

auva

ise,

sa

vigu

eur

et s

a je

un

esse

. E

t A

kh

ille

us

dit

à s

on

cad

avre

:

— M

eurs

! Je

subir

ai m

a d

esti

née

quan

d Z

eus

et l

es a

utr

es d

ieux

le v

oud

ron

t.

Ho

re, L’Illiade

, ch

an

t X

XII

, e

ntr

e 8

50

et

75

0 a

v J

C

qu

en

ce 5

– T

ex

te c

om

plé

me

nta

ire