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Statut familial et inegalites face a la scolarisation aMadagascar
Valerie Delaunay • Benedicte Gastineau •
Frederique Andriamaro
� Springer Science+Business Media Dordrecht and UNESCO Institute for Lifelong Learning 2013
Resume Nous explorons ici, dans le contexte de l’acces generalise a la scolarisa-
tion primaire et de la parite entre filles et garcons, les inegalites en matiere de
scolarisation liees au statut de l’enfant dans la famille a travers l’analyse des donnees
de l’Enquete Demographique et de Sante (EDS) 2009 a Madagascar. Les resultats
confirment le role protecteur pour l’enfant de resider avec ses parents biologiques.
Les enfants confies sont defavorises, d’autant plus et de maniere croissante selon
qu’ils resident avec un oncle ou une tante, avec un parent eloigne ou avec un non-
parent. Par contre, les enfants qui resident chez un frere ou une sœur ne sont pas
defavorises, ce qui reflete le role des aınes dans les strategies familiales de scolari-
sation. Les grands-parents jouent un role plutot favorable a la scolarisation. Le deces
du pere intervient comme un facteur important d’abandon scolaire. Enfin, les enfants
dont le ou les parents n’occupent pas la place de chef de menage sont defavorises en
matiere de scolarisation par rapport aux enfants du chef de menage.
Mots-cles Scolarisation � Statut de l’enfant dans la famille � Madagascar � Genre
Abstract The impact of family status in Madagascar on inequalities in schooling –
In this article, in the context of generalised access to primary education and parity
V. Delaunay (&)
Laboratoire Population-Environnement-Developpement, UMR 151, Institut de Recherche pour le
developpement (IRD)/Aix-Marseille Universite (AMU), IRD, BP1386, Dakar, Senegal
e-mail: [email protected]
B. Gastineau
Laboratoire Population-Environnement-Developpement, Institut de Recherche pour le
developpement (IRD)/Aix-Marseille Universite (AMU), 08 BP 841, Cotonou, Benin
e-mail: [email protected]
F. Andriamaro
Universite Catholique de Madagascar, Ambatoroka, Antananarivo, Madagascar
e-mail: [email protected]
123
Int Rev Educ
DOI 10.1007/s11159-013-9388-7
between girls and boys, we analyse data from the Demographic and Health Survey
(DHS) 2009 in Madagascar to examine inequalities in schooling related to chil-
dren’s status in the family. The results confirm the protective benefit for children of
living with their biological parents. Fostered children are disadvantaged, especially
and increasingly so depending on whether they live with an uncle or aunt, with a
distant relative or a non-relative. Conversely, children who reside in the home of a
brother or sister are not disadvantaged, a result which reflects the role of elder
children in family education strategies. Grandparents play a moderately positive
role in schooling. The death of the father is an important factor in dropping out.
Finally, children whose parent or parents are not household heads are disadvantaged
in terms of schooling compared to children of household heads.
Keywords Education � Child’s living arrangements � Madagascar � Gender
Introduction
Il ne fait aucun doute que l’education est une condition necessaire a un
developpement social et economique durable (Pilon 2006). Partout dans les pays
en developpement, les programmes educatifs, appuyes par les organisations
internationales, donnent la priorite a l’acces a l’enseignement de base (primaire et
premier cycle du secondaire) et a la parite entre les filles et les garcons (Lange
2001). Si on enregistre une progression de la scolarisation dans la plupart des pays
(UNESCO 2011), la pauvrete reste un obstacle majeur a la scolarisation des enfants
(Filmer et Pritchett 1999). A Madagascar, la scolarisation primaire generalisee et la
parite entre filles et garcons dans l’acces a l’ecole ne doivent pas cacher d’autres
inegalites parmi lesquelles les differences de niveaux de vie. Les difficultes
economiques des familles sont les premieres causes d’abandon scolaire (Coury et
Rakoto-Tiana 2010).
Au-dela du facteur economique, on observe souvent des inegalites liees au statut
familial des enfants dans le menage (Kobiane 1999). Le statut familial de l’enfant se
definit en reference aux arrangements residentiels et au statut de ses parents dans le
menage. L’enfant reside ou non avec ses parents biologiques; ses parents sont eux-
memes chefs de menage ou sont heberges dans un menage; l’enfant reside avec un
seul de ses parents; celui-ci est marie, celibataire, divorce, ou remarie; l’enfant est
confie a l’un de ses grands-parents, un oncle ou une tante, un parent plus eloigne, ou
une personne non apparentee; il est confie pour etre scolarise ou contribuer aux
taches domestiques. Ces differents arrangements s’inscrivent dans des parcours de
vie qui repondent a des situations de rupture (rupture de vie, rupture d’union,
rupture economique) ou a des regles sociales de circulation des enfants (Bledsoe
1990; Jonckers 1997; Lallemand 1993; Madhavan 2004). Il en resulte differents
statuts de l’enfant dont vont dependre les attentions en matiere de soin, d’education
et de scolarisation de la part des adultes charges de s’occuper de lui.
L’objectif de cet article est de mesurer, a l’aide de donnees nationales, les liens
existant entre l’acces de l’enfant a la scolarisation et son statut familial dans le
menage a Madagascar. Apres une presentation du contexte malgache et de ses
V. Delaunay et al.
123
particularites en matiere de scolarisation, les hypotheses sur le lien entre le statut
familial de l’enfant et l’acces a la scolarisation sont testees.
Le contexte malgache : une double exception
Une scolarisation primaire generalisee
En 2000, les Etats africains se sont engages lors du Sommet de Dakar, puis en
signant les objectifs du Millenaire pour le developpement (OMD), a mettre en
œuvre des politiques favorables a la scolarisation. Les objectifs sont ambitieux : il
s’agit, d’ici 2015, de faire en sorte que tous les enfants aient acces a l’ecole
primaire. Depuis ces engagements, des progres ont ete constates, mais l’acces a
l’enseignement primaire est encore loin d’etre general, tout particulierement en
Afrique francophone. Le Burkina Faso (2008), la Republique centrafricaine (2008),
le Congo (2005) et le Niger (2005) sont les plus mauvais eleves avec des taux nets
de scolarisation inferieurs a 60% (UNESCO 2010). A l’oppose, Madagascar affiche
un taux proche de 100% : l’enseignement primaire y est presque universel
(UNESCO 2010; Coury et Rakoto-Tiana 2010), et ce, malgre une grande pauvrete et
plusieurs crises politiques depuis 2002. La Grande Ile se distingue clairement en
Afrique francophone.
Cette exception malgache n’est pas nouvelle : en 1960, au moment de l’indepen-
dance, Madagascar se situe deja parmi les pays d’Afrique ou les enfants sont les plus
scolarises. Le taux brut de scolarisation a l’ecole primaire y est de 56% (Lange 2000)
contre une moyenne d’environ 39% pour l’Afrique (Hugon 1976). Des les premiers
moments de son independance, l’Etat malgache affirme le droit a l’education pour tous
les enfants, la gratuite de l’ecole primaire et meme l’obligation scolaire. S’il est
difficile de faire appliquer ces principes, une politique ambitieuse permet neanmoins a
Madagascar d’augmenter ses taux de scolarisation et d’apparaıtre au milieu des
annees 1970 comme l’un des pays du Sud ou le systeme scolaire est le plus efficient
(Deleigne 2001). Comme beaucoup d’autres pays sur le continent africain, la periode
1985-1995 va etre marquee par un recul de la scolarisation primaire des enfants. La
crise economique limite les depenses publiques et la qualite de l’enseignement
regresse. L’offre scolaire diminue et se degrade (manque de classes, d’enseignants,
ecoles non entretenues), et la demande suit le meme chemin. En une decennie, le taux
brut de scolarisation recule de dix points. Il faut ensuite attendre 2010 pour retrouver
le niveau de 1985 (World Bank 1995; Coury et Rakoto-Tiana 2010; Lange 2000;
Mingat et Suchaut 2000; PNUD 2003).
Au cours des cinquante dernieres annees, plusieurs politiques d’education ont
stimule la demande scolaire : de l’obligation scolaire en 1960 a la gratuite effective
de l’ecole primaire en 2002. Cette derniere a permis de generaliser la scolarisation,
surtout chez les populations les plus pauvres et en zone rurale, en permettant
de « desserrer la contrainte financiere » (Coury et Rakoto-Tiana 2010, p. 123). Les
inegalites entre les villes et les campagnes, entre les pauvres et les riches, et entre
les regions, ont regresse sans toutefois disparaıtre completement. Si tous les enfants
peuvent s’inscrire a l’ecole, les urbains et les plus aises ont un choix d’etabliss-
ements beaucoup plus large qui leur permet d’acceder a un enseignement de
Statut familial et inegalites face a la scolarisation a Madagascar
123
meilleure qualite. Les ecoles les plus isolees dans les zones rurales manquent
souvent d’enseignants et encore plus d’enseignants formes. Au niveau national, on
compte plus de 80 eleves pour un enseignant forme (UNESCO 2010). C’est sans
doute l’une des raisons pour lesquelles le passage des enfants par l’ecole primaire
est souvent bref. Les taux d’achevement entre l’entree en 1ere annee du primaire
(CP1) et l’entree en derniere annee (CM2) restent faibles. En 2010, il etait inferieur
a 50% (d’Aiglepierre 2012).
Si les taux de scolarisation a Madagascar sont relativement eleves c’est aussi
parce que les filles vont a l’ecole dans les memes proportions que les garcons. Cette
parite entre les sexes dans les etablissements scolaires observee depuis plus de 40
ans fait de la Grande Ile une exception sur le continent africain.
La parite entre filles et garcons : une exception malgache
Jusqu’a aujourd’hui, dans la quasi-totalite des pays francophones d’Afrique
subsaharienne, la scolarisation des filles est inferieure a celles des garcons. Le
Benin, la Cote d’Ivoire, le Mali, le Niger, la Republique centrafricaine et le Tchad
sont les pays ou les filles sont les moins representees dans les ecoles primaires
(UNESCO 2010). Madagascar se distingue, elle, par le respect de la parite entre les
sexes parmi les eleves depuis plus de 40 ans. Aujourd’hui, 49% des eleves du
primaire sont de sexe feminin. Cette parite est reelle a tous les niveaux d’etude du
primaire (MENRS 2010), et meme au niveau secondaire (college et lycee)
(UNESCO 2010) et a l’universite (Glick et Sahn 2000). Toutefois, au lycee, filles et
garcons ne sont pas orientes vers les memes filieres On compte davantage de filles
dans les classes litteraires (1,21 fille pour 1 garcon en terminale A) et davantage de
garcons dans les filieres scientifiques (0,50 fille pour 1 garcon en terminale C).
(MENRS 2008).
A l’ecole primaire, il faut preciser qu’a quelques exceptions pres, la parite entre
les sexes est respectee dans toutes les circonscriptions scolaires (CISCO), rurales ou
urbaines. Dans 77 CISCO sur un total de 111, le nombre de filles pour un garcon
accedant a l’ecole se situe entre 1,05 et 0,95. Vingt-trois CISCO ont un ratio
favorable aux garcons (avec un minimum de 0,85) et onze un ratio favorable aux
filles (avec un maximum de 1,29) (MENRS 2008).
La parite entre les sexes a l’ecole n’est pas un fait nouveau. Des les annees 1970,
filles et garcons frequentaient deja l’ecole primaire dans les memes proportions.
Comment expliquer cette specificite malgache sur un continent ou les discrimina-
tions envers les filles a l’ecole persistent, meme s’il est vrai que l’ecart de
scolarisation entre filles et garcons tend a diminuer (Knodel et Jones 1996; Lewis et
Lockheed 2008) ? Il est evidemment difficile de donner une reponse definitive, mais
nous souhaitons apporter quelques elements de reflexion. La litterature permet
d’identifier plusieurs facteurs de sous-scolarisation des filles en Afrique. La question
est alors de savoir pourquoi on ne retrouve pas ces facteurs a Madagascar.
Plusieurs auteurs mettent en exergue le fait qu’en Afrique, les parents sont
reticents a scolariser leurs filles car une fois mariees, celles-ci quittent le domicile
parental, s’installent chez leur belle-famille et les parents ne recoivent alors plus de
soutien de leur part (Diaz Olvera et al. 2010; Gerard 1999). L’investissement dans
V. Delaunay et al.
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l’education des filles paraıt vain. Il est plus rationnel de favoriser les garcons qui,
une fois adultes, devront contribuer au bien-etre de leurs parents, surtout lorsque
ceux-ci seront ages. De plus, en Afrique, l’acces au marche du travail, et donc aux
revenus, est inegal. Les hommes peuvent esperer des emplois plus stables et mieux
remuneres que les femmes. Le retour espere de l’investissement dans l’education
des garcons est alors plus important que dans celle des filles (Bennell 2002).
Pourquoi cet argument ne tient-il pas a Madagascar ? Il faut preciser tout d’abord
que sur l’ensemble du territoire malgache, le modele dominant est celui du menage
de type nucleaire (Delaunay et al. 2010; Andriamaro et Delaunay 2012). La
cohabitation entre plusieurs generations dans un meme menage est rare : les jeunes
couples vivent rapidement dans un logement independant de celui de leurs parents
(Razafindratsima 2005) et sont autonomes, y compris en zone rurale (Ottino 1998;
Bied-Charreton 1970; Bonnemaison 1970). La residence virilocale ou l’epouse
rejoint le village du mari (mais pas le menage des beaux-parents) a longtemps ete
consideree comme la norme, meme si dans la pratique certains couples derogeaient
a la regle. Ottino (1998) note qu’a partir des annees 1960, la residence uxorilocale
est de plus en plus frequente et de moins en moins stigmatisee. Le choix residentiel
des couples est determine par la disponibilite des terres, devenues rares dans un
contexte ou elles ont acquis une valeur marchande. Dans le meme temps, les regles
d’heritage se modifient et, presque partout, les femmes heritent des biens ancestraux
et non ancestraux au meme titre que les hommes. Il n’est meme par rare, selon
Ottino (ibid., p. 286), qu’elles soient avantagees car « les grands-parents et aussi les
parents se sentent dans l’ensemble plus proches de leur filles reputees plus
fiables » que de leurs fils. Les filles garantissent au meme titre que leurs freres la
continuite du patrimoine. Dans ce contexte, elles peuvent etre sollicitees comme les
fils pour epauler et soutenir leurs parents lorsque, ages, ils ne peuvent plus subvenir
seuls a leurs besoins. Dans ce contexte, la scolarisation des filles presente un interet,
au meme titre que celle des garcons.
Ceci est d’autant plus vrai que la participation de la population a l’activite
economique est elevee a Madagascar et que l’acces au marche du travail est presque
equilibre entre les hommes et les femmes (Nordman 2010). L’ecart salarial moyen
entre les sexes (pour les travailleurs salaries) est relativement faible et stable dans le
temps. La scolarisation des filles prend alors tout son sens : pour les hommes
comme pour les femmes, elle a un impact positif sur la probabilite d’acceder a la
fonction publique ou au salariat du secteur prive formel. L’education a meme un
impact beaucoup plus important pour les femmes, en particulier pour acceder au
secteur formel de l’economie (ibid.). La conjonction de ces deux faits – un acces
relativement egalitaire au marche du travail et une place importante des filles dans la
continuite patrimoniale – est un element important qui peut expliquer la forte
scolarisation des enfants des deux sexes sur la Grande Ile.
Un autre facteur limitant la scolarisation des filles en Afrique, et qui est
frequemment evoque dans la litterature, est la concurrence entre travail domestique
et scolarisation (Diaz Olvera et al. 2010). En Afrique, c’est sur les femmes et les
filles que repose l’essentiel des taches domestiques. Elles occupent une grande
partie de leur emploi du temps : corvees d’eau, corvees de bois, soins aux jeunes
enfants, cuisine, lessive, etc. A Madagascar, plusieurs etudes montrent que, dans
Statut familial et inegalites face a la scolarisation a Madagascar
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une certaine mesure, il est possible pour les filles de combiner les taches menageres
avec l’ecole (Briet 2007; Rakoto-Tiana 2011a). Contrairement a ce qui a ete observe
dans de nombreux pays, la presence d’enfants en bas-age par exemple n’est pas un
obstacle a la scolarisation des filles : ces dernieres peuvent s’occuper de leurs jeunes
freres et sœurs sans que cela ne modifie la probabilite qu’elles aillent a l’ecole
(Rakoto-Tiana 2011b). Comment expliquer ce particularisme ? Un element de
reponse reside dans le fait que les taches domestiques sont partagees plus
equitablement entre les femmes et les hommes a Madagascar que dans la majorite
des autres pays du continent africain. Ceci se verifie particulierement dans le monde
rural. En effet, la journee de travail – en incluant les taches domestiques – y est de
7 heures et 31 min pour les femmes contre 6 heures et 38 min pour les hommes,
soit un ecart de 13% (Enquete emploi du temps 2001 dans PNUD 2003) : cet ecart
est inferieur a celui qui prevaut dans la plupart des pays en developpement (20%
en Afrique du Sud par exemple) (PNUD 2003). Des enquetes dans la region rurale
des Hautes-Terres ont montre que meme si les travaux domestiques sont
majoritairement effectues par les femmes et les jeunes filles, il n’est pas rare de
voir des hommes faire la cuisine ou la lessive, ou prendre soin des enfants, meme en
bas-age (Gastineau 2005; Briet 2007). A l’age scolaire, les jeunes garcons sont
mobilises au meme titre que les filles pour de nombreuses taches menageres. Au
niveau national, les filles de 6–14 ans sont 81% a declarer avoir une activite
domestique, les garcons 77%. Les premieres y consacrent en moyenne 8 heures par
semaine contre un peu plus de 7 heures pour les garcons (EPM 2005 dans Rakoto-
Tiana 2011b). Il y a tres peu de differences selon les milieux de residence. A titre de
comparaison, a Bamako au Mali, une enquete avait montre que parmi les 8–14 ans,
97% des filles participaient aux taches menageres, contre seulement 25% des
garcons (Marcoux 1998). Ce partage plus equitable qu’ailleurs des taches
domestiques entre les sexes favorise particulierement la scolarisation des filles.
Sur le continent africain, Madagascar se distingue pour des taux de scolarisation
eleves a l’ecole primaire pour les filles comme pour les garcons. Toutefois, l’egalite
entre les sexes dans les effectifs scolaires ne doit pas faire oublier d’autres
discriminations : certains enfants restent non scolarises ou peu scolarises. Parmi les
facteurs de discrimination possibles, nous allons examiner le statut de l’enfant dans
son menage.
Statut familial et scolarisation des enfants : cadre de recherche
Hypotheses
On peut faire l’hypothese que le statut familial de l’enfant a Madagascar determine
sa scolarisation. En effet, les arrangements residentiels jouent potentiellement un
role sur la scolarisation. Resider avec ses parents biologiques est considere comme
protecteur pour l’enfant et donc comme favorable a la scolarisation. De nombreuses
analyses tiennent compte de la presence ou de l’absence de la mere et du pere dans
le menage (Wilcox et al. 2009; Coleman 1988). Inversement, un enfant vivant avec
l’un de ses parents qui est engage dans une nouvelle union est parfois victime de
negligence, voire de violence (Alexandre et al. 2010; Daly et Wilson 1985, 2008).
V. Delaunay et al.
123
La situation de residence dans un menage recompose peut alors etre consideree
comme un facteur potentiellement defavorable a la scolarisation. Les situations de
circulation des enfants sont variables dans leurs causes et leurs objectifs. Leurs
effets sur la scolarisation en dependent. Certains enfants sont places chez un parent
dans le but de lui procurer un meilleur acces a la scolarisation. D’autres sont places
dans le but de procurer une aide domestique ou agricole. Le statut de l’enfant confie
sera different selon que le confiage entre ou non dans le cadre des regles sociales de
circulation des enfants et selon le motif du confiage. La relation entre le confiage et
la scolarisation sera positive si l’enfant est confie pour etre scolarise (Akresh 2004;
Rakoto-Tiana 2011a); elle sera negative s’il est confie pour apporter une aide
domestique (Kobiane 1999). Enfin, l’enfant orphelin peut avoir un statut plus
defavorable du fait que ses parents ne sont plus la pour participer a une quelconque
forme d’echange, monetaire ou autre, pouvant aider a sa scolarisation (Ainsworth
et al. 2005; Ainsworth et Filmer 2002; Beegle et al. 2009; J. Kobiane et al. 2005;
Wakam 2002). D’autres enfants faisant l’objet d’une stigmatisation (comme les
enfants de meres celibataires) sont aussi exposes a des conditions qui peuvent etre
defavorables a leur scolarisation.
Le statut des parents dans le menage, c’est-a-dire la question de savoir si le ou les
parents sont eux-memes chef du menage ou s’ils y sont heberges, peut egalement
jouer un role dans la scolarisation de l’enfant. En effet, l’acces aux ressources
partagees est souvent tres different en fonction de ce statut. Ceci est particulier-
ement vrai a Madagascar, ou la norme residentielle repose sur le menage nucleaire
et ou la coresidence de noyaux parentaux n’est pas encouragee (Razafindratsima
2005; Gastineau 2005). La coresidence (temporaire ou definitive) de plusieurs
noyaux repond generalement a une situation de crise, et les relations d’entraide entre
les noyaux sont complexes (Razafindratsima 2005; Gastineau 2005). On peut donc
supposer que, pour ce qui est de l’acces a la scolarisation, les enfants issus de
noyaux secondaires (parents heberges dans le menage) sont en situation plus
defavorable que les enfants issus des noyaux primaires (parent chef de menage).
Donnees et methode
Nous utilisons les donnees des Enquetes demographiques et de sante menees
en 2009 a Madagascar. La scolarisation est mesuree par le fait d’avoir ete scolarise
(enfants de 6 a 17 ans) et le fait d’avoir acheve le cycle primaire (enfants de
11 a 17 ans). Les caracteristiques de l’enfant (age et sexe), du chef de menage (age,
sexe, niveau scolaire), la situation economique du menage (mesuree par un indice
de richesse), le milieu de residence (capitale, autres villes, campagne) et la province
sont utilises comme variables de controle en raison de leur rapport avere avec la
scolarisation des enfants. Le noyau d’appartenance et le type de noyau sont
determines grace au lien de parente de chaque individu dans le menage, aux
informations sur la survie et la situation de residence du pere et de la mere, et aux
informations sur la situation de residence du conjoint, selon une methode
developpee par Christine Tichit (Tichit et Robette 2008). La survie des parents
est utilisee pour differencier le statut des enfants confies dans les menages. On teste
ici les liens entre la situation de residence de l’enfant au moment de l’enquete et le
Statut familial et inegalites face a la scolarisation a Madagascar
123
fait d’avoir ete scolarise, d’une part, et le fait d’avoir acheve le primaire, d’autre
part. La premiere association porte sur les enfants de 6 a 17 ans1; la seconde sur les
enfants de 11 a 17 ans.2 L’effet du type de noyau est mesure pour les enfants qui
resident avec au moins l’un des deux parents. L’effet de la survie des parents est
mesure pour les enfants confies.
Cette analyse suit une demarche exploratoire visant a identifier certaines
situations residentielles des enfants associees a une moindre scolarisation. Elle
presente certaines limites liees au fait que les indicateurs de scolarisation (avoir ete
scolarise; avoir acheve le cycle primaire) resultent d’une situation passee, tandis que
la situation de residence est relevee au moment de l’enquete. Il est donc difficile de
faire une veritable analyse de causalite. Neanmoins, les situations residentielles
associees a une scolarisation moindre donnent des indications strategiques a toute
action de developpement visant a mieux cibler les enfants sortis ou en passe de
sortir du systeme scolaire. Les associations entre deux etats (scolarisation passee et
residence) que l’on peut mettre en evidence devront evidemment etre explorees par
le biais d’autres enquetes de type qualitatif permettant de mieux cerner les relations
de causalite.
Statut familial et scolarisation des enfants : resultats
L’Enquete demographique et de sante de 2009 collecte dans les menages des
informations sur la scolarisation passee et actuelle des enfants de moins de 18 ans et
releve le niveau atteint. Ainsi, sur les 28 155 enfants ages de 6 a 17 ans, 86% ont
ete scolarises et sur les 13 920 enfants de 11 a 17 ans, 33% ont acheve le cycle
primaire (Tableau 1).
Indicateurs de scolarisation selon certaines caracteristiques du menage
Les filles sont plus scolarisees que les garcons (87% ont ete scolarisees et 36% ont
acheve le cycle primaire, contre respectivement 85% et 31%) (Tableau 1), ce qui
confirme la specificite de Madagascar en matiere de parite entre filles et garcons
(Gastineau et Ravaozanany 2011). La plus faible scolarisation des 6–10 ans (81%
ont ete scolarises contre 91% des 11–17 ans) reflete une entree tardive a l’ecole, deja
relevee dans d’autres etudes Coury et Rakoto-Tiana (2010). Ce retard est aussi
visible dans la plus faible proportion d’enfants de 11 a 14 ans ayant acheve le cycle
primaire (25%) par rapport aux enfants de 15 a 17 ans (50%).
On sait que certaines caracteristiques du menage (sexe, age, niveau de
scolarisation du chef de menage; niveau economique du menage; milieu et region
de residence) sont generalement determinantes pour la scolarisation des enfants et
ces differentes variables seront utilisees comme variables de controle pour mieux
evaluer l’effet du statut de l’enfant dans le menage.
En effet, les enfants de menages diriges par des femmes ont plus souvent acheve
le primaire (35% contre 33% des enfants residant dans des menages diriges par des
1 Les donnees portent sur les moins de 18 ans et la scolarisation demarre a 6 ans.2 Le primaire est acheve a partir de 11 ans.
V. Delaunay et al.
123
Tableau 1 Proportions d’enfants 6–17 ans deja scolarises et d’enfants 11–17 ans ayant acheve le cycle
primaire selon certaines caracteristiques
Enfants 6–17 ans deja
scolarises
Enfants 11–17 ans ayant acheve le
cycle primaire
% Chi2 effectif % Chi2 effectif
Sexe 0.000 0.000
garcon 85,0 14575 30,7 7230
fille 87,0 13581 36,3 6690
Age de l’enfant 0.000 0.000
6–10 ans 81,4 14235
11–14 ans 90,6 9386 25,4 9386
15–17 ans 90,7 4534 50,0 4534
Sexe du chef de menage 0.604 0.047
homme 86,0 22965 32,9 11197
femme 85,7 5190 35,3 2723
Age du chef de menage 0.000 0.000
\25 ans 84,4 878,6 58,2 533
25–34 ans 82,8 4850 21,7 1373
35–44 ans 87,7 9734 34,1 4858
45–54 ans 87,7 7210 34,7 4080
55 ans et ? 83,8 5483 31,5 3075
Scolarisation du chef de menage 0.000 0.000
Non scolarise 66,9 5803 12,6 2606
Primaire incomplet 87,8 12449 24,1 5937
Primaire complet 92,8 1802 36,9 900
Secondaire incomplet 95,5 6198 57,2 3381
Secondaire complet 97,6 430,7 72,7 252
Superieur 97,8 639 78,3 405
NSP 90,8 833,5 28,3 440
Niveau economique du menage 0.000 0.000
plus pauvre 66,1 5644 7,3 2309
pauvre 82,4 5793 14,3 2706
moyen 90,1 5818 25,9 2834
riche 94,7 5859 42,4 3127
plus riche 97,5 5041 69,0 2945
Milieu de residence 0.000 0.000
Capitale 97,0 1094 71,1 616
autre villes 96,5 2425 61,0 1334
Rural 84,5 24637 28,4 11970
Province 0.000 0.000
Antananarivo 93,3 8709 46,2 4535
Fianarantsoa 85,2 5526 22,8 2635
Toamasina 92,4 4714 35,0 2447
Mahajunga 83,9 3423 31,2 1666
Statut familial et inegalites face a la scolarisation a Madagascar
123
hommes). Quel que soit l’indicateur, la scolarisation est plus elevee quand le chef de
menage est tres jeune (moins de 25 ans) ou quand il a entre 35 et 44 ans. Elle
augmente fortement avec le niveau scolaire du chef de menage. La scolarisation est
favorisee par le niveau economique, mesure ici par l’indice de richesse : la
proportion d’enfants scolarises passe de 66% pour le quintile le plus pauvre a 97%
pour le quintile le plus riche; de meme, la proportion d’enfants ayant acheve le
primaire passe de 7% pour le quintile le plus pauvre a 69% pour le quintile le plus
riche. On observe aussi de fortes disparites selon le milieu de residence. Ainsi, en
milieu rural, 84% des enfants ont ete scolarises, mais seulement 28% ont acheve le
cycle primaire, alors qu’en milieu urbain, la scolarisation est plus intense et plus
durable avec 97% d’enfants ayant ete scolarises et 71% ayant acheve le cycle
primaire dans la capitale. On constate aussi une diversite regionale, avec une
meilleure scolarisation dans la province d’Antananarivo (ou est situee la capitale),
tandis que les scores les plus faibles sont enregistres dans la province de Toliara ou
seulement 62% des enfants ont ete scolarises et 16% ont acheve le cycle primaire.
Statut familial de l’enfant dans le menage
Le statut familial de l’enfant dans le menage est mesure a travers une typologie des
situations de residence etablie selon que l’enfant reside avec ses deux parents, l’un
des deux ou aucun, critere auquel on ajoute la situation matrimoniale du ou des
parents avec lequel l’enfant reside (Tableau 2). Ainsi, on distingue les situations ou
l’enfant reside avec ses deux parents, avec sa mere seule non mariee, avec sa mere
mariee vivant seule, avec son pere seul non marie, avec son pere marie vivant seul
(aucun enfant de cette categorie n’a ete trouve), avec sa mere en menage recompose
ou avec son pere en menage recompose.3 Parmi les enfants qui ne resident avec
aucun des parents, on distingue ceux qui resident avec leurs grands-parents, avec un
oncle ou une tante, avec un frere ou une sœur, avec un autre parent ou avec une
autre personne non apparentee.
La majorite des enfants de 6 a 17 ans resident avec leurs deux parents (62%).
Plus d’un enfant sur cinq reside avec l’un des deux parents, marie ou non (20%) : il
s’agit pour la moitie d’enfants vivant avec leur mere non mariee et en situation
monoparentale (12%). Une partie des enfants vit dans un menage recompose (6%),
Tableau 1 continued
Enfants 6–17 ans deja
scolarises
Enfants 11–17 ans ayant acheve le
cycle primaire
% Chi2 effectif % Chi2 effectif
Toliara 62,1 3856 15,9 1719
Antsiranana 90,9 1927 32,7 919
Total 86,0 28155 33,4 13920
3 Le type de residence ne peut etre defini lorsque le lien de parente est inconnu. Ainsi, le type de
residence n’est connu que pour 28 030 enfants.
V. Delaunay et al.
123
le plus souvent avec le pere (3%). De nombreux enfants resident chez leurs grands-
parents (9%) ou chez des autres parents ou non-parents (4%). Une autre distinction
est faite entre les enfants qui appartiennent au noyau principal, c’est-a-dire au noyau
du chef de menage, et ceux qui appartiennent a un noyau secondaire. Une troisieme
categorie rassemble les enfants confies, c’est-a-dire les enfants dont ni le pere ni la
mere ne reside dans le menage.
En raison de la petite taille des menages et de leur structure simple
(predominance des menages nucleaires), plus des trois quart des enfants de
6 a 17 ans appartiennent au noyau parental principal du menage. Pres de 5% sont
rattaches a un noyau parental secondaire. La proportion d’enfants confies (qui ne
resident ni avec leur pere ni avec leur mere) est de 17%. Le lien de parente des
enfants confies ne peut etre percu qu’a travers leur lien de parente avec le chef de
menage. Ils se repartissent principalement dans les menages diriges par leurs
grands-parents (9%) et par un non-parent (6%). Madagascar fait partie des pays ou
l’on observe les plus faibles taux d’enfants confies en Afrique (Eloundou-Enyegue
et Kandiwa 2007). A Madagascar comme ailleurs sur le continent, le confiage d’un
enfant est une pratique ancienne qui visait initialement a resserrer des liens de
parente. Le confiage pouvait meme aller jusqu’a l’adoption des enfants pour leur
permettre ensuite d’avoir des droits sur le patrimoine de la famille d’accueil : c’est
notamment le cas des grands-parents qui voulaient transmettre leurs biens (materiels
et immateriels) a leurs petits-enfants. En Imerina, l’adoption par les grands-parents
du premier ou des deux premiers nes de leur fille etait frequente, de meme que les
couples sans enfants ont de tout temps accueilli des enfants de leurs freres et sœurs
(Ottino 1998). Si ces formes de confiage existent encore, les motifs de la circulation
des enfants se sont diversifies. De jeunes enfants peuvent notamment etre confies a
leurs grands-parents ages pour les aider dans les activites quotidiennes, d’autres
peuvent etre envoyes chez un oncle ou une tante pour etre scolarises en ville. Le
motif du depart de l’enfant et le lien de parente qui l’unit au menage d’accueil vont
determiner la probabilite qu’il soit scolarise.
Les proportions d’enfants de 6 a 17 ans ayant ete scolarises et d’enfants de
11 a 17 ans ayant acheve le cycle primaire selon le type de residence et de noyau
sont presentees dans le Tableau 3. Les enfants residant avec leurs deux parents
semblent avantages dans le fait d’avoir ete scolarises. Les enfants dont la mere
mariee eleve seule ses enfants sont proportionnellement plus nombreux a avoir
termine le primaire. Cela est probablement a mettre en relation avec le statut de
migrant du pere qui peut correspondre a l’acces a un revenu meilleur. Les enfants
residant chez leur frere ou leur sœur sont plus souvent et plus durablement
scolarises. Dans ces cas, la scolarisation est probablement le principal motif du
confiage. Ceci renvoie a une caracteristique des regles de solidarite qui veulent que
les aınes qui reussissent prennent en charge l’education des plus jeunes (Dahl 2006).
Par contre, les enfants confies a un non-parent sont les plus defavorises en matiere
de scolarisation. On trouve dans ce groupe les enfants domestiques qui constituent
une figure emblematique du travail des enfants a Madagascar (Ballet 2010), pour
lesquels le placement est purement economique et ne donne pas acces a la
scolarisation. Les enfants vivant avec leur pere dans un menage recompose
semblent quant a eux largement defavorises en matiere de scolarisation. A
Statut familial et inegalites face a la scolarisation a Madagascar
123
Madagascar, la place de l’enfant dans le menage recompose semble difficile. Il est
frequent que l’enfant soit confie a ses grands-parents lorsque la mere ou le pere se
remarie (Rakotoson 2010). Dans le cas contraire, il est souvent mal accepte par le
beau-parent, et est alors victime de stigmatisation et de differentiation, voire
maltraite ou neglige (Delaunay et Germain 2011). Il n’est donc pas etonnant de
constater que les enfants dans cette situation semblent defavorises en matiere de
scolarisation. Cependant, cette distinction est moins forte lorsque l’enfant vit dans le
menage recompose de la mere. On peut donc penser que celle-ci, lorsqu’elle
parvient a garder son enfant dans son nouveau menage, maintient un environnement
protecteur. Cela pourrait aussi signifier que les decisions de scolarisation seraient
plutot feminines et que les femmes privilegieraient leur(s) enfant(s) au detriment de
de ceux de leur nouveau conjoint. De meme, mais dans une moindre mesure, les
Tableau 2 Repartition des enfants selon le groupe d’age, la typologie de residence de l’enfant, le noyau
d’appartenance et la survie des parents
6–10 ans 11–14 ans 15–17 ans Total
% % % %
Type de residence
Pere et mere 66,1 59,5 55,0 62,1
Mere monoparentale non mariee 11,3 11,7 12,9 11,7
Mere monoparentale mariee 0,6 0,3 0,2 0,4
Pere monoparental non marie 2,4 2,9 3,0 2,7
Mere menage recompose 2,3 2,4 2,1 2,3
Pere menage recompose 3,1 3,7 4,4 3,5
Grands-parents 9,8 8,6 6,1 8,8
Oncle/tante 2,2 3,4 4,2 2,9
Frere/sœur 0,9 2,5 3,6 1,8
Autre parent 0,7 1,9 3,6 1,6
Non-parent 0,7 3,0 5,0 2,2
Total 100,0 100,0 100,0 100,0
Effectif 14295 9336 4429 28059
Type de noyau
Noyau principal 79,9 76,7 74,6 78,0
Noyau secondaire 5,8 3,5 2,9 4,6
Enfant confie 14,4 19,7 22,5 17,4
Total 100,0 100,0 100,0 100,0
Effectif 14313 9357 4429 28098
Survie des parents
Pere et mere en vie 91,9 87,2 81,4 88,7
Pere en vie, mere decedee ou inconnue 2,3 3,9 5,0 3,2
Mere en vie, pere decede ou inconnu 4,9 7,5 10,4 6,6
Pere et mere decedes et/ou inconnus 0,9 1,5 3,2 1,5
Total 100,0 100,0 100,0 100,0
Effectif 14313 9408 4544 28265
V. Delaunay et al.
123
enfants de noyaux secondaires sont defavorises. Les noyaux secondaires dans les
menages sont rares et constituent une deviance par rapport a la norme du menage
nucleaire. Chaque adulte est cense etre autonome. Les noyaux secondaires
correspondent a des situations de precarite qui conduisent le ou les adultes a
chercher un soutien temporaire aupres de la famille.4 Les enfants appartenant a ces
noyaux sont donc probablement defavorises du fait de cette precarite, parfois meme
avant d’etre accueillis et d’appartenir a un noyau secondaire.
Analyse multi-variee
Afin de mieux comprendre les relations entre le statut de l’enfant et la scolarisation
et de controler les effets conjugues des differentes variables, nous utilisons une
methode d’analyse multi-variee pour expliquer la scolarisation des enfants. Nous
avons construit deux modeles de regression logistique, l’un pour le fait d’avoir ete
scolarise, l’autre pour le fait d’avoir acheve le cycle primaire (Tableau 4).
Le type de noyau n’est pas utilise dans ces analyses car il est correle au type de
residence de l’enfant : l’appartenance a un noyau principal ou secondaire ne concerne
que les enfants residant avec un des deux parents; le fait d’etre un enfant confie ne
concerne que les enfants qui ne resident avec aucun des deux parents. De meme, le
statut d’orphelin ou d’enfant abandonne est aussi fortement correle au type de
residence : un enfant dont les parents sont decedes ou inconnus ne reside pas avec eux.
Ces deux variables sont utilisees plus loin dans des modeles specifiques applicables
aux enfants residant avec l’un des parents ou les deux et aux enfants confies.
Le premier modele confirme que resider avec le pere et la mere est une situation
fortement avantageuse en termes de scolarisation par rapport aux autres situations
de residence. Seule la situation ou la mere est mariee mais vit seule est distincte
mais pas significativement differente. On retrouve dans ce groupe les femmes dont
le mari a migre pour des raisons professionnelles et cette situation s’apparente a
celle des couples en coresidence pour ce qui est de la scolarisation de l’enfant.
Toutes les autres situations semblent defavorables a l’acces de l’enfant a la
scolarisation. Le second modele porte sur l’achevement du cycle primaire parmi les
11–17 ans et confirme que resider avec la mere dans un menage recompose est
defavorable a la scolarisation de l’enfant. Habiter avec un des parents remarie
semble bien constituer un obstacle a la scolarisation. Les enfants vivant avec l’un
des parents remarie ont moins souvent acheve le cycle primaire que ceux qui vivent
avec leurs deux parents. La recomposition familiale suite au deces d’un des parents
ou a une separation constituerait donc bien un facteur important d’abandon scolaire.
Les enfants dont au moins un des parents est decede sont moins scolarises que ceux
dont les deux parents sont en vie. D’une maniere generale, on voit que les enfants
confies sont defavorises en termes de scolarisation. Ils le sont plus fortement et de
maniere croissante selon qu’ils sont confies a un oncle ou une tante, a un autre
parent ou a une personne non apparentee. Les enfants confies a un frere ou une sœur
ne sont par contre pas defavorises pour l’achevement du primaire, ce qui confirme le
4 Dans cette enquete, 70% des noyaux secondaires sont des femmes seules avec enfants.
Statut familial et inegalites face a la scolarisation a Madagascar
123
role des aınes dans la scolarisation des cadets. On verra plus loin comment il est
possible de distinguer les differentes situations en fonction de la survie des parents.
Ces relations sont controlees par l’effet des autres variables utilisees qui revelent
le role joue par les caracteristiques de l’enfant, du chef de menage et du menage. On
observe un effet lie au sexe de l’enfant, qui est favorable aux filles. Sur ce point, nos
resultats confirment que les filles ne sont pas desavantagees par rapport aux garcons
en matiere de scolarisation primaire. Les enfants les plus jeunes sont moins
scolarises, ce qui temoigne d’un retard observe dans la scolarisation. Les menages
diriges par des femmes ont une propension plus forte a avoir des enfants deja
scolarises, mais cette distinction ne s’observe pas sur le fait d’avoir termine le cycle
primaire complet. Les enfants residant dans des menages diriges par des personnes
plus agees ou tres jeunes sont davantage scolarises. Les chances de scolarisation
sont d’autant plus elevees que le niveau de scolarisation du chef de menage est
Tableau 3 Proportions d’enfants 6–17 ans deja scolarises et d’enfants 11–17 ans ayant acheve le cycle
primaire selon le type de residence, le type de noyau et la survie des parents
Enfants 6–17 ans deja
scolarises
Enfants 11–17 ans ayant acheve
le cycle primaire
% Chi2 effectif % Chi2 effectif
Type de residence 0,000 0,000
Pere et mere 87,6 17396 35,1 7979
Mere monoparentale non mariee 84,5 3258 32,0 1657
Mere monoparentale mariee 82,5 118 49,3 40
Pere monoparental non marie 84,3 740 29,4 398
Mere menage recompose 84,0 644 24,5 315
Pere menage recompose 79,0 977 20,5 537
Grands-parents 83,2 2452 26,7 1075
Oncle/tante 82,6 821 32,8 506
Frere/sœur 86,9 524 50,0 398
Autre parent 82,4 455 36,1 357
Non-parent 80,0 624 22,8 511
Total 86,0 28008 33,1 13773
Type de noyau 0,000 0,031
Noyau principal 86,9 21858 33,7 10466
noyau secondaire 81,5 1274 27,9 460
enfants confies 83,1 4857 31,6 2827
Total 86,0 27988 33,4 13920
Survie des parents 0,003 0,000
Pere et mere en vie 86,3 24971 34,3 11880
Pere en vie, mere decedee ou inconnue 85,1 914 28,9 591
Mere en vie, pere decede ou inconnu 83,3 1865 27,4 1172
Pere et mere decedes et/ou inconnus 82,9 405 29,3 278
Total 86,0 28155 33,4 13920
V. Delaunay et al.
123
Tableau 4 Modeles de regression logistique sur le fait d’avoir ete scolarise (enfants 6–17 ans) et d’avoir
acheve le cycle primaire (enfants 11–17 ans)
Avoir ete scolarise Avoir acheve le cycle primaire
Coef. Coef.
Type de residence
Pere et mere - -
Mere monoparentale non mariee -0,388 -0,178 (ns)
Mere monoparentale mariee -0,112 (ns) 0,400 (ns)
Pere monoparental non marie -0,270 -0,094 (ns)
Mere menage recompose -0,325 -0,437
Pere menage recompose -0,294 -0,474
Grands-parents -0,196 -0,325
Oncle/tante -0,816 -0,737
Frere/sœur -0,491 -0,174 (ns)
Autre parent -1,224 -1,119
Non-parent -1,817 -2,212
Sexe de l’enfant
Garcon - -
Fille 0,205 0,286
Age de l’enfant
6–10 ans -0,707
11–14 ans 0,085 (ns) -1,316
15–17 ans - -
Sexe du chef de menage
homme - -
femme 0,366 0,177
Age du chef de menage
\ 25 ans -0,120 (ns) 0,997
25–34 ans -0,054 (ns) -0,351
35–44 ans - -
45–54 ans 0,192 0,195
[ 55 ans 0,056 (ns) 0,268
Scolarisation du chef de menage
non scolarise -0,736 -0,256
primaire incomplet - -
primaire complet 0,479 0,360
secondaire incomplet 0,654 0,995
secondaire complet 0,887 1,498
Superieur 0,698 1,391
NSP 0,102 (ns) -0,075 (ns)
Niveau economique
plus pauvre - -
Pauvre 0,475 0,549
Moyen 0,951 1,139
Statut familial et inegalites face a la scolarisation a Madagascar
123
important et que le niveau economique du menage est eleve. Les enfants residant en
ville sont davantage scolarises qu’en milieu rural. Toutes choses egales par ailleurs,
les enfants sont moins scolarises dans les provinces de Mahajunga, Toliara (a
l’ouest) et Fianarantsoa (au centre) pour le primaire complet et plus scolarises dans
les provinces de Toamasina (a l’est) et Antsiranana (au nord) pour ce qui est d’avoir
ete scolarises.
L’effet du noyau de residence des enfants sur la scolarisation
Parmi les enfants qui resident avec au moins un des parents, nous avons voulu
mesurer l’effet des situations de residence selon le type de noyau d’appartenance.
En d’autres termes, on cherche a savoir si le fait d’appartenir a un noyau secondaire
est defavorable pour la scolarisation de l’enfant.
Nous avons construit deux modeles de regression logistique, cette fois pour
l’ensemble des enfants residant avec au moins un des parents. Dans les deux
modeles, l’appartenance au noyau secondaire apparaıt defavorable a la scolarisation
de l’enfant, et cela quelles que soient la situation de residence et les caracteristiques
de l’enfant ou du menage (Tableau 5). Cette situation, bien que marginale a
Madagascar, apparaıt alors comme une situation de vulnerabilite par rapport a la
scolarisation. On retrouve la les memes effets du niveau d’education du chef de
menage, du niveau economique du menage et du milieu de residence. Les enfants
confies vivant dans les provinces de Toliara et Fianarantsoa semblent defavorises
pour ce qui est de terminer le cycle primaire complet.
Tableau 4 continued
Avoir ete scolarise Avoir acheve le cycle primaire
Coef. Coef.
Riche 1,390 1,778
plus riche 1,992 2,705
Milieu de residence
capitale -0,197 (ns) 0,016 (ns)
autre villes 0,312 0,180
rural - -
Province
Antananarivo - -
Fianarantsoa -0,054 (ns) -0,392
Toamasina 0,460 -0,077 (ns)
Mahajunga -0,236 -0,096 (ns)
Toliara -1,064 -0,839
Antsiranana 0,273 -0,106 (ns)
_cons 1,748 -1,588
Effectifs 28008 13773
Tous les coefficients sont significatifs sauf ceux marques (ns)
V. Delaunay et al.
123
L’effet du type de gardien et de la survie des parents sur la scolarisation
Resider chez les grands-parents semble favorable a la scolarisation de l’enfant par
rapport a la situation de residence chez un oncle ou une tante, un frere ou une sœur
et encore plus chez un autre parent ou un non-parent. Ces deux dernieres categories
apparaissent comme defavorables pour ce qui est de l’achevement du cycle
primaire.
Le statut d’orphelin est etabli selon que le pere et la mere sont declares en vie ou
decedes. Dans certains cas, l’information est declaree manquante. Le parent ne
reside pas dans le menage et on ne sait pas s’il est en vie ou non. Nous considerons
alors l’enfant comme pratiquement orphelin. Ainsi, on compare une situation ou
l’enfant a deux parents en vie a une situation ou il n’a que son pere, que sa mere, ou
ni l’un ni l’autre (Tableau 6).
La survie des parents n’intervient pas dans le fait que les enfants aient ou non ete
scolarises, mais elle est fortement determinante du fait d’avoir acheve le primaire.
En outre, c’est le fait que le pere soit decede ou inconnu qui importe dans la
scolarisation des enfants confies. La relation n’est pas significative pour le groupe
d’enfants orphelins de pere et de mere dont l’effectif est faible (259 enfants de
11 a 17 ans).
Les enfants confies vivant dans des menages diriges par des femmes sont
davantage scolarises et ont plus souvent acheve le cycle primaire. Ici aussi, on
retrouve les memes effets du niveau d’education du chef de menage, du niveau
economique du menage et du milieu de residence. Seuls les enfants confies vivant
dans la province de Toliara semblent defavorises pour ce qui est de terminer le cycle
primaire complet.
Conclusion
Sur le continent africain, Madagascar est souvent citee en exemple pour ses taux de
scolarisation eleves a l’ecole primaire et le respect de la parite entre les sexes a tous
les niveaux d’enseignement. Il est certes difficile d’expliquer le fait que, sur la
Grande Ile, les filles aillent autant a l’ecole que les garcons. Nous avons toutefois
tente de proposer quelques hypotheses en mettant en exergue des particularismes
malgaches dans l’organisation sociale, familiale et dans les normes de genre :
partage des taches domestiques plus equitable que dans beaucoup d’autres pays,
autonomie conjugale, menages mononucleaires dominants, etc. L’egalite entre filles
et garcons dans les effectifs scolaires ne doit pas faire oublier pour autant d’autres
inegalites. L’analyse des donnees de l’Enquete demographique et de sante permet
de mettre en evidence des categories d’enfants discrimines dans l’acces a la
scolarisation. Nous avons examine les relations entre le statut de l’enfant dans la
famille et la scolarisation. Il semble en effet que le statut familial de l’enfant soit
determinant a la fois pour le fait qu’il aille a l’ecole et le fait qu’il acheve ou non le
cycle primaire.
Cette etude confirme donc le role protecteur pour l’enfant de resider avec ses
parents biologiques, un phenomene observe dans d’autres pays du continent africain
Statut familial et inegalites face a la scolarisation a Madagascar
123
Tableau 5 Modeles de regression logistique sur le fait d’avoir ete scolarise (enfants 6–17 ans) et d’avoir
acheve le cycle primaire (enfants 11–17 ans) – enfants residant avec au moins un des deux parents
Avoir ete scolarise Avoir acheve le cycle primaire
Coef. Coef.
Type de residence
Pere et mere - -
Mere monoparentale non mariee -0,303 0,104 (ns)
Mere monoparentale mariee 0,181 (ns) 0,821
Pere monoparental non marie -0,240 -0,012 (ns)
Mere menage recompose -0,314 -0,356
Pere menage recompose -0,305 -0,453
Type de noyau
Principal - -
Secondaire -0,263 -0,367
Sexe de l’enfant
Garcon - -
Fille 0,230 0,282
Age de l’enfant
6–10 ans -0,804
11–14 ans 0,130 (ns) -1,335
15–17 ans - -
Sexe du chef de menage
homme - -
femme 0,352 -0,035 (ns)
Age du chef de menage
\ 25 ans -0,537 -0,949 (ns)
25–34 ans -0,049 (ns) -0,395
35–44 ans - -
45–54 ans 0,202 0,233
[ 55 ans 0,068 (ns) 0,325
Scolarisation du chef de menage
non scolarise -0,772 -0,330
primaire incomplet - -
primaire complet 0,466 0,251
secondaire incomplet 0,673 1,040
secondaire complet 0,695 (ns) 1,784
Superieur 0,315 (ns) 1,624
NSP 0,182 (ns) -0,200 (ns)
Niveau economique
plus pauvre
Pauvre 0,484 0,559
Moyen 0,998 1,113
Riche 1,429 1,788
plus riche 2,395 2,821
V. Delaunay et al.
123
(Case et al. 2004). La situation de residence avec les deux parents reste le garant
d’une scolarisation plus elevee et plus durable de l’enfant. Compares a cette
situation, toutes les autres situations de residence sont desavantageuses. Les
differentes situations de rupture qui conduisent l’enfant a resider dans un menage
monoparental ou recompose, ou avec une personne autre que ses parents, sont toutes
associees a une scolarisation moindre. Les enfants confies sont defavorises, d’autant
plus et de maniere croissante selon qu’ils resident avec un oncle ou une tante, avec
un parent eloigne ou avec un non-parent. La situation ou l’enfant reside avec une
personne non apparentee semble etre la plus defavorable. C’est probablement la
situation ou l’on trouve le plus d’enfants places pour des raisons economiques et
non scolaires, et notamment les enfants domestiques (Ballet 2010; Delaunay 2013).
Par contre, ceux qui resident chez un frere ou une sœur ne sont pas defavorises par
rapport a ceux qui resident avec leurs deux parents. Ce resultat confirme le role des
aınes dans les strategies familiales de scolarisation. Parmi les situations de confiage,
les grands-parents semblent jouer un role plutot favorable a la scolarisation. Les
enfants orphelins (ou pratiquement orphelins) de pere sont les plus defavorises.
Le role du pere est probablement important dans le financement de la
scolarisation et son deces intervient alors comme un facteur important d’abandon
scolaire. Des resultats similaires sont decrits par Case et al. (2004) pour d’autres
pays d’Afrique. Toutefois, la direction et l’intensite de la relation entre la
scolarisation et le fait d’etre orphelin varient considerablement d’un contexte a
l’autre. Certaines etudes concluent par exemple que le statut d’orphelin n’a aucun
impact en Afrique car la famille etendue supplee generalement aux parents. En
effet, dans des contextes de grandes epidemies de sida, des orphelins sont issus de
categories sociales favorisees (comme les instituteurs, les militaires, des categories
tres touchees par le sida), ce qui favorise une continuite dans la scolarisation (Evans
Tableau 5 continued
Avoir ete scolarise Avoir acheve le cycle primaire
Coef. Coef.
Milieu de residence
capitale -0,475 -0,025 (ns)
autre villes 0,168 (ns) 0,062 (ns)
rural - -
Province
Antananarivo - -
Fianarantsoa 0,073 (ns) -0,411
Toamasina 0,647 -0,127 (ns)
Mahajunga -0,164 (ns) -0,171 (ns)
Toliara -0,999 -0,886
Antsiranana 0,396 -0,033 (ns)
_cons 1,706 -1,578
Effectifs 23131 10926
Tous les coefficients sont significatifs sauf ceux marques (ns)
Statut familial et inegalites face a la scolarisation a Madagascar
123
Tableau 6 Modeles de regression logistique sur le fait d’avoir ete scolarise (enfants 6–17 ans) et d’avoir
acheve le cycle primaire (enfants 11–17 ans) – enfants confies
Avoir ete scolarise Avoir acheve le cycle primaire
Coef. Coef.
Type de residence
Grands-parents - -
Oncle/tante -0,463 -0,201 (ns)
Frere/sœur -0,401 (ns) 0,034 (ns)
Autre parent -0,783 -0,594
Non parent -1,322 -1,465
Survie des parents
Pere et mere en vie - -
Pere en vie, mere decedee ou inconnue -0,245 (ns) -0,095 (ns)
Mere en vie, pere decede ou inconnu -0,087 (ns) -0,372
Pere et mere decedes et/ou inconnus 0,140 (ns) -0,309 (ns)
Sexe de l’enfant
Garcon - -
Fille 0,096 (ns) 0,351
Age de l’enfant
6–10 ans -0,264 (ns)
11–14 ans -0,051 (ns) -1,307
15–17 ans - -
Sexe du chef de menage
homme - -
femme 0,251 0,307
Age du chef de menage
\ 25 ans 0,553 1,341
25–34 ans 0,223 (ns) -0,100 (ns)
35–44 ans - -
45–54 ans 0,234 (ns) -0,064 (ns)
[ 55 ans 0,271 (ns) 0,268 (ns)
Scolarisation du chef de menage
non scolarise -0,587 -0,050 (ns)
primaire incomplet - -
primaire complet 0,392 (ns) 0,824
secondaire incomplet 0,591 0,768
secondaire complet 1,351 0,832
Superieur 1,328 0,921
NSP -0,065 (ns) 0,336 (ns)
Niveau economique
plus pauvre - -
Pauvre 0,424 0,313 (ns)
Moyen 0,822 1,221
Riche 1,280 1,522
V. Delaunay et al.
123
et Miguel 2007). Enfin, les enfants dont le ou les parents ne sont pas chefs de
menage (noyau secondaire) sont defavorises en matiere de scolarisation par rapport
aux enfants du chef de menage. Ceci revele sans doute une fragilite des noyaux
secondaires dans les menages malgaches.
Ces resultats doivent etre nuances en raison des limites des donnees, lesquelles ne
permettent pas d’etablir de causalite entre la non scolarisation ou l’abandon scolaire,
d’une part, et le confiage ou la situation actuelle de residence, d’autre part. Par
exemple, le confiage peut aussi bien etre la consequence de la non scolarisation
qu’en etre la cause. La relation existe neanmoins et connaıtre les situations relevees
ici comme etant les plus defavorables (residence en menage monoparental,
recompose ou hors de la parente) peut guider les acteurs des programmes nationaux
ou de la societe civile qui œuvrent dans les domaines de la protection de l’enfance et
de la prevention de l’abandon scolaire.
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Tableau 6 continued
Avoir ete scolarise Avoir acheve le cycle primaire
Coef. Coef.
plus riche 1,334 2,231
Milieu de residence
capitale 0,308 (ns) 0,118 (ns)
autre villes 0,754 0,496
rural - -
Province
Antananarivo - -
Fianarantsoa -0,725 -0,182 (ns)
Toamasina -0,371 (ns) 0,142 (ns)
Mahajunga -0,776 0,183 (ns)
Toliara -1,557 -0,658
Antsiranana -0,366 (ns) -0,196 (ns)
_cons 1,779 -1,933
Effectifs 4801 2789
Tous les coefficients sont significatifs sauf ceux marques (ns)
Statut familial et inegalites face a la scolarisation a Madagascar
123
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The authors
Valerie Delaunay Docteur en demographie, est chercheure a l’Institut de Recherche pour le
Developpement, au sein du laboratoire Population Environnement Developpement. Ses questions
scientifiques portent sur l’evolution de la famille en Afrique, les modeles de prise en charge des enfants et
leurs implications sur le bien-etre et l’evolution de l’enfant. Elle a passe 4 annees a l’Universite
Catholique de Madagascar ou elle a initie un projet de recherche sur la famille et la prise en charge des
enfants.
Benedicte Gastineau est demographe a l’Institut de Recherche pour le Developpement (IRD). L’essentiel
de ses travaux portent sur l’evolution de la fecondite en Afrique dans des contextes de contraintes
economiques ou environnementales. Les questions de genre et de scolarisation des enfants sont au centre
de sa reflexion. Apres un doctorat en Tunisie, elle a passe 5 ans a l’Universite Catholique de Madagascar
pour y faire de la recherche et de l’enseignement. Aujourd’hui elle est en poste au Centre de Formation et
de Recherche en matiere de Population (CEFORP) a Cotonou au Benin.
Frederique Andriamaro Docteur en demographie, est enseignante-chercheure a l’Universite Catholique
de Madagascar. Elle y est responsable du departement des sciences sociales appliquees au developp-
ement. Elle est aussi chargee de cours a l’Universite d’Antananarivo. Ses travaux de recherche portent sur
la prise en charge de l’enfant dans la famille et le role des relations intergenerationnelles.
V. Delaunay et al.
123