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Stéréotypes & préjugés, discrimination A u même titre que d’autres groupes vulnérables ou en marge de la société, les personnes handicapées sont l’objet de nombreux stéréotypes et préjugés. Quels sont-ils et d’où viennent-ils ? Comment apparaissent-ils ? Comment prendre conscience d’eux ? Comment les briser ? Comment les transformer ? THEMA 9

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Stéréotypes & préjugés, discrimination

Au même titre que d’autres groupes vulnérables ou en

marge de la société, les personnes handicapées sont l’objet

de nombreux stéréotypes et préjugés. Quels sont-ils et d’où

viennent-ils ? Comment apparaissent-ils ? Comment prendre

conscience d’eux ? Comment les briser ? Comment les

transformer ?

THEMA 9

LES CONCEPTS DE STEREOTYPE & PREJUGE, DISCRIMINATION

Un stéréotype est une « attitude, un regard général et simpliste à propos d’un groupe

de personnes. Les stéréotypes sont souvent, mais pas toujours, négatifs. Ils peuvent être

basés sur le préjugé ; ils peuvent également être le fruit d’un contact avec une personne

appartenant à un groupe, si du moins l’impression donnée par une personne est consi-

dérée comme étant vraie pour toute autre personne dans le groupe »1. Le stéréotype

simplifie la réalité et ne tient pas compte des différences individuelles.

Exemple :

« Les personnes pauvres sont fainéantes. »

Un préjugé est une « attitude ou une opinion personnelle, négative, adoptée par

rapport à une personne ou un groupe qui n’est pas nécessairement basée sur la con-

naissance de cette personne ou de ce groupe »2.

Porter un préjugé, c’est donc littéralement « juger avant », soit porter un jugement de

valeur sans (bien) connaître. Le préjugé se fonde souvent sur un stéréotype.

La discrimination est le fait de porter des préjugés sur un groupe de personnes, les

traiter différemment en raison de leurs « différences ».

On observe deux formes de discrimination :

La discrimination directe s’exerce lorsqu'une personne est traitée moins

favorablement qu'une autre dans une situation comparable en raison de sa couleur

de peau ou de son origine ethnique, de sa religion ou de ses convictions, de son

handicap, de son âge ou de son orientation sexuelle.

Exemple :

Une offre d'emploi qui précise que « les personnes handicapées ne doivent pas

postuler ».

La discrimination indirecte s’observe lorsqu’un critère, une disposition ou une

pratique apparemment neutre désavantage des personnes sur base de leur couleur de

peau ou de leur origine ethnique, de leur religion ou de leurs convictions, de leur handi-

cap, de leur âge ou de leur orientation sexuelle. A moins que cette disposition, ce critère

ou cette pratique puisse être objectivement justifié par un objectif légitime.

Exemple :

Exiger de toute personne qui postule pour un emploi donné de subir une

épreuve dans une langue particulière, même si cette connaissance linguistique

n'est pas nécessaire pour l'exécution de l'emploi vacant. Le test pourrait exclure

toutes les personnes qui ont une autre langue maternelle.

STEREOTYPES ET PREJUGES SUR LES PERSONNES HANDICAPEES

Aujourd’hui, nous vivons dans une société de l’image. En effet, nous baignons dans l’ère

du visuel : télévision, cinéma, publicité, etc. Ces différents moyens de communication

véhiculent des modèles auxquels chacun tente de se conformer.

Les médias ont un rôle très important

dans la construction de l ’image de la

personne handicapée. En tant que telle,

la quasi absence des personnes handi-

capées dans les médias laisse penser

qu’elles ont peu de valeur, ou une place

moins importante que les autres dans

la société. Lorsque les personnes

handicapées apparaissent à la télévi-

sion ou au cinéma, elles sont souvent

présentées soit comme des victimes

soit comme des êtres exceptionnels.

Elles sont rarement présentées dans

des situations courantes ou dans des

événements de la vie de tous les jours.

Elles sont donc marginalisées à l ’écran

et dans la vie. Les préjugés et les

représentations sociales véhiculées à

travers les médias expliquent en partie

les traitements discriminatoires auxquels les personnes handicapées peuvent être

confrontées. Les images présentées ont tendance à réduire la personne à son handi-

cap, à l ’assimiler à un enfant, etc.

Ce sont donc des images misérabilistes qui sont véhiculées la plupart du temps et qui

contribuent à la construction de préjugés. Les personnes handicapées sont souvent

victimes de préjugés et de stéréotypes paternalistes au sujet de leur qualité de vie et

de leur capacité de contribuer à la vie sociale et économique de la société. Ces

attitudes négatives sont largement attribuables au fait que nous voyons les personnes

handicapées comme des personnes présentant un défaut, une dysfonction, une

anomalie ou une déficience. Ce point de vue découle d’une conception biologique

du handicap, appelée le modèle médical3. Ce modèle s’attache à « corriger » les défi-

ciences des personnes handicapées pour qu’elles fonctionnent « normalement » dans

la société. Un corollaire à cette perception médicalisée de la déficience est la croyance

selon laquelle les personnes handicapées auront invariablement une dépendance

sociale et économique et que le traitement de leur trouble imposera un fardeau aux

ressources publiques4.

1 S. FOUNTAIN, Education pour le développement, un outil pour un apprentissage global, De Boeck, Bruxelles, 1996, p. 83

2 Idem, p.83

Madagascar, le Dia Manga , manifestation organisée en faveur

du respect des droits des personnes handicapées

© M. Seth - Handicap International

3 Voir fiche thématique « 2. Généralités sur le handicap »

4 Association canadienne pour l'intégration communautaire, Immigration et incapacité, Mémoire présenté au Comité permanent de la

citoyenneté et de l’immigration, Canada, avril 2005, p. 2

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discrimination

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Les mythes et préjugés entretenus au sujet des personnes ayant des déficiences phy-

siques engendrent des comportements inadéquats qui peuvent devenir des obstacles

de taille pour ces personnes, en limitant leurs opportunités de développement et

d'épanouissement. Parfois même, les préjugés sont de plus gros obstacles que la défi-

cience elle-même.

Il est primordial de veiller à s’informer de

façon juste et adéquate sur les défi-

ciences avec lesquelles certaines personnes

vivent. C’est en effet généralement le

manque de connaissance qui entraîne

des préjugés et attitudes discriminantes.

Notons également que même les profes-

sionnels du secteur peuvent être vecteurs

de préjugés. Le handicap physique

évoque souvent courage et injustice mais

aussi volonté pour eux, alors que la

déficience intellectuelle n’inspire souvent

que pitié et compassion. On retrouve

donc ici, chez des professionnels, les

mêmes représentations qu’auprès du

grand public.

Comment reconnaître un préjugé ?

Les critères suivants peuvent vous aider à reconnaître les attitudes et les gestes qui

engendrent la discrimination des personnes handicapées. Demandez-vous si ce que

vous entendez :

généralise l ’ensemble des personnes présentant une certaine déficience,

c’est-à-dire présume qu'elles sont toutes pareilles plutôt que de les considérer indi-

viduellement

banalise ou amoindrit la déficience elle-même ou les personnes qui en présentent

blesse les personnes déficientes en les insultant

traite les personnes déficientes avec condescendance, comme si elles étaient

inférieures aux autres

Voici quelques idées reçues souvent entendues sur les personnes handicapées qui peu-

vent être déconstruites:

Les personnes malvoyantes ou aveugles vivent dans le noir

En fait, très peu de personnes aveugles vivent dans le noir total. Plus de 80% d'entre

elles ont ce qu'on appelle un résidu visuel. Certaines distinguent le contour des

objets, d’autres perçoivent un faisceau de lumière.

Les personnes sourdes sont « stupides »

La surdité ne remet pas en cause les capacités intellectuelles. Les personnes présen-

tant une déficience auditive possèdent divers degrés d'incapacité à entendre les

sons et le fait que certaines d'entre elles préfèrent communiquer par le langage

gestuel plutôt que par la parole n'est en rien lié à une déficience intellectuelle.

Les personnes atteintes de paralysie cérébrale sont retardées mentalement

Si la paralysie cérébrale peut être causée par une blessure ou un dommage au

cerveau, elle n'est pas pour autant associée à une déficience intellectuelle. La

paralysie cérébrale entraîne des problèmes de coordination des mouvements,

puisque le cerveau n'envoie pas les bons ordres aux muscles. Les conséquences

physiques varient selon la gravité de la déficience et la localisation des lésions. Les

conséquences les plus communes sont une difficulté de contrôle musculaire, un

manque de coordination, de la spasticité ou des tremblements, des problèmes

d'élocution, d'audition ou de vision.

Les étudiants handicapés profitent de leur déficience pour se la couler douce

Dans les hautes écoles et les universités, les services responsables de l’intégration

des étudiants handicapés veillent à ce que les accommodations demandées pour

un étudiant en situation de handicap ne constituent en aucun cas un privilège par

rapport aux autres étudiants. Il faut savoir que certaines déficiences sont invisibles

en apparence et cela constitue souvent un obstacle supplémentaire pour les

personnes qui en sont atteintes. En plus de devoir fonctionner différemment des

autres, elles doivent convaincre leur entourage de la réalité de leur handicap. C'est

souvent le cas, par exemple, pour les personnes ayant un trouble d'apprentissage

ou un déficit d'attention officiellement reconnu, une basse vision qui ne nécessite

pas une canne, un chien guide ou des verres correcteurs très présents, mais pour

qui lire ou écrire est difficile et fatigant.

Les personnes ayant un trouble d'apprentissage ne peuvent pas réussir

d'études supérieures

Certaines personnes ayant un trouble d’apprentissage ont une intelligence égale et

parfois même supérieure à la moyenne. Elles ont donc autant de chance que

n’importe quel autre étudiant de réussir des études de niveau supérieur, à condition

que certaines accommodations

leurs soient octroyées. En effet, le handi-

cap est en relation avec les obstacles

rencontrés dans l'environnement. Ces

personnes ont droit à des accommoda-

tions appropriées au même titre que, par

exemple, une personne malvoyante. Les

accommodations les plus souvent

utilisées sont : l'enregistrement de docu-

ments scolaires leur permettant, par

exemple, de contourner les « tours » que

leur joue leur cerveau lors de la lecture ;

du temps supplémentaire lors de la passa-

tion d'examens, puisque ces personnes

doivent redoubler d'attention en écrivant ;

un local vide de toutes distractions

pendant les examens. Le contexte

particulier des études est souvent

différent de celui du monde profes

sionnel, comme les délais très courts demandés lors des examens ou remise de travaux

et dans toutes les situations d’évaluation scolaire.

France, Nice, Boîte de nuit, Gregory et Ingrid dansent la salsa

© Jérôme Deya

France, Juliette, étudiante en faculté à l ’université

© Jérôme Deya

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discrimination

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DETRUISONS LES STEREOTYPES ET PREJUGES A L’EGARD DES PERSONNES HANDICAPEESCes quelques exemples de mythes créent des obstacles aux personnes handicapées

dans leur vie de tous les jours. Pour limiter ceux-ci et changer la perception des gens

sur les personnes présentant une déficience, il est important de diffuser une informa-

tion adéquate sur le handicap. Une attitude et une image positive véhiculée notam-

ment à travers les médias peuvent avoir des effets sur les comportements discrimina-

toires des gens et les préjugés ancrés dans la société.

I l faut donc être attentif à présenter des images de personnes handicapées non misé-

rabilistes, qui ne réduisent pas la personne à sa déficience. A ce titre, il est important

de souligner que les termes « handicapé » ou « déficient » sont des adjectifs et non

des substantifs. I l faut donc dire « une personne ayant une déficience » ou une «

personne handicapée » plutôt qu’ « handicapé » qui est un terme pouvant susciter la

gêne ou la pitié. Certaines associations spécialisées luttent dans ce sens pour que l’on

supprime le mot « handicap » qu’elles jugent péjoratif. Notons également que les

expressions telles que « souffre de », « atteint de » ou encore « frappé de » traduisent

une douleur constante, un désespoir, un aspect systématiquement négatif. S’il est vrai

que certains individus peuvent éprouver de tels sentiments, une déficience est un

état, elle n’est pas nécessairement source de souffrance et ne requiert pas toujours

des traitements médicaux.

Cambodge, enfant scolarisé dans une classe « ordinaire »

© Isabelle Lesser - pour Handicap International

VOIR FICHES THEMATIQUES - 2. Généralités sur le handicap

- 14. Genre

- 20. Culture

VOIR ACTIVITES - 2. Un pas en avant !

- 3. Ne coupons pas les ponts !

- 5. Qui est derrière moi ?

- 7. Photo-langage

- 8. Médias-débat

- 11. Contes

La raison, le jugement, viennentlentement, les préjugés accourent en foule

“”Jean-Jacques Rousseau

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