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STÉVIA UNE DOUCEUR AU GOÛT AMER Commercialisation des édulcorants dérivés de la stévia – violations des droits des peuples autochtones, publicité mensongère et recours controversé à la biologie de synthèse

Stévia - une douceur au goût amer

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Publié en novembre 2015, le rapport de la Déclaration de Berne, Pro Stevia, CEIDRA et de l'Université de Hohenhem dénonce met en lumière l'arrière-goût amer du marché de la stévia. Il montre comment les géants de l’agroalimentaire dégagent d’énormes profits de ce juteux marché, en bafouant les droits des peuples guaranis qui ont découvert les propriétés édulcorantes de cette plante. En qualifiant leurs produits de «naturels», ils trompent également les consommateurs. Le rapport complet est désormais disponible en français.

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STÉVIAUNE DOUCEUR AU GOÛT AMER

Commercialisation des édulcorants dérivés de la stévia – violations des droits des peuples autochtones, publicité mensongère

et recours controversé à la biologie de synthèse

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MENTIONS DE PUBLICATION ÉDITEURS Déclaration de Berne, CEIRAD, France Libertés, Misereor, Pro Stevia Switzerland, SUNU, Université de Hohenheim | AUTEURS ET CONTRIBUTEURS François Meienberg (Déclaration de Berne), Laura Sommer (BD), Tamara Lebrecht (BD), Miguel Lovera (CEIDRA), Silvia González (CEIDRA), Benjamin Luig (Misereor), Volker von Bremen, Kurt Steiner (Pro Stevia Switzerland), Marcos Glauser (SUNU), Udo Kienle (Université de Hohenheim) | RÉDACTEUR Ronnie Hall | TRADUCTION Pascal Godart | PHOTOGRAPHIES DE COUVERTURE Fotolia, Keystone, Karin Hutter | MISE EN PAGE Karin Hutter | DATE Mars 2016 (traduction du rapport The bitter sweet taste of stevia publié en novembre 2015, également disponible en allemand, anglais et espagnol)

La DÉCLARATION DE BERNE (BD) est une association suisse forte de 25 000 membres, qui s’engage depuis 1986 pour des relations Nord-Sud plus équitables, durables et démocratiques.

Déclaration de BerneAvenue Charles-Dickens 4 | 1006 Lausanne | SuisseTéléphone +41 21 620 03 03 | Fax +41 21 620 03 00 [email protected] | www.ladb.ch

La FONDATION DANIELLE MITTERRAND – FRANCE LIBERTÉS, créée en 1986 par Danielle Mitterrand, entend défendre les droits humains et les biens communs du vivant. Ses actions s’organisent autour de deux programmes, l’un centré sur l’eau en tant que bien commun et l’autre focalisé sur les droits des peuples. Dans ce cadre, la Fondation est particulièrement active dans la défense des peuples autochtones cherchant à faire valoir et respecter leurs droits fondamentaux, en particulier leurs droits aux ressources naturelles, mais aussi à mettre en lumière leurs connaissances traditionnelles et modes de vie.

France Libertés – Fondation Danielle Mitterrand 5 Rue Blanche | 75009 Paris | FranceTéléphone +33 1 53 25 10 40 | Fax +33 1 53 25 10 [email protected] | www.france-libertes.org

MISEREOR est l’organisation allemande de l’épiscopat catholique pour la coopération et le développement. Depuis plus de 50 ans, nous sommes engagés dans la lutte contre la pauvreté en Afrique, en Asie et en Amérique latine. Notre mission consiste à accompagner les initiatives menées et gérées par les populations marginalisées et défavorisées elles-mêmes.

MisereorMozartstrasse 9 | 52064 Aachen | AllemagneTéléphone +49 241 442 512 | Fax +49 241 442 [email protected] | www.misereor.de

UNIVERSITÉ DE HOHENHEIM, ALEMANIALe département d’agronomie travaille depuis 1992 sous la super-vision du professeur Jungbluth sur une nouvelle culture de l’espèce végétale Stevia rebaudiana. C’est en 2005 qu’ont commencé nos premières actions sur le partage des avantages découlant de la stévia. Nous avons engagé quatre projets de recherche paneu-

ropéens relatifs à la stévia financés par la Commission Européenne, intégrant l’idée du partage des avantages. Nos pages d’information relatives à la stévia sur le web sont accessibles aux adresses : www.stevia.uni-hohenheim.de et www.go4stevia.eu

Université de HohenheimGarbenstrasse 9 | 70599 Stuttgart | AllemagneTéléphone +49 0711 459 22845 | Fax +49 0711 459 [email protected] | www.uni-hohenheim.de

CEIDRA – CENTRE D’ÉTUDES ET DE RECHERCHE SUR LA RÉGLEMENTATION RURALE ET LA RÉFORME AGRAIRE (DE L’UNIVERSITÉ CATHOLIQUE NOTRE-DAME DE L’ASOMPTION, ASUNCIÓN PARAGUAY)

Établi en 1973, le centre a pour activités principales l’étude et l’analyse de la législation nationale en termes de droit comparé, de réforme agraire et de droit environnemental. Spécialisé dans la recherche, il accompagne les projets des étudiants de l’université catholique, le développement de projets spécifiques dans les domaines mentionnés ci-dessus, mais aussi sur d’autres sujets comme le développement rural et la situation environnementale des habitats ruraux.

CeidraAlberdi No. 855 e | Asunción | ParaguayTéléphone/Fax +595 21 495 [email protected] | www.ceidra.org

SUNU est une association indépendante paraguayenne chargée de promouvoir, depuis 2000, des passerelles interculturelles entre les individus, les communautés et les organisations au niveau national et international.

SUNUVice Pte. Sanchez 692 casi Herrera | Asunción | ParaguayTéléphone +595 21 212 361 | http://gruposunu.org

PRO STEVIA SWITZERLAND est une plateforme d’information indépendante relative à la stévia, fondée en 2001.

PRO STEVIA SwitzerlandPostfach 1094 | 3000 Bern 23 | Suisse Téléphone +41 31 971 68 [email protected] | www.prostevia.ch

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AVANT-PROPOS

Le nombre et l’origine internationale des organisations et des institutions qui publient conjointement cette étude témoignent de l’étendue des problèmes liés à la production de glycosides de stéviol, puissants édulcorants utilisés aujourd’hui dans de nombreux produits alimentaires et boissons.

L’une des préoccupations principales tient au fait que la production des glycosides de stéviol résulte de la biopiraterie. Il s’agit d’un exemple patent d’appropriation inique d’une ressource génétique et des connaissances traditionnelles qui y sont associées.

Les propriétés édulcorantes de la stévia sont connues de longue date du peuple guarani, présent des deux côtés de la région frontalière qui sépare le Paraguay du Brésil. Cependant, ni les Guaranis, détenteurs de ce savoir traditionnel, ni le Paraguay ou le Brésil, pays d’origine de la plante, ne reçoivent la part juste et équitable des avantages résultant de la commercialisation des glycosides de stéviol.

En revanche, une poignée d’entreprises multinationales spécialisées dans les matières premières agrico-les, l’agroalimentaire et la biotechnologie utilisent les ressources génétiques et les connaissances traditionnelles associées pour réaliser des profits significatifs. Ces entreprises multinationales contrôlent le marché au moyen de brevets et parviennent à vendre les glycosides de stéviol comme l’édulcorant naturel du futur. Parallèlement, l’utilisation traditionnelle des feuilles de stévia comme édulcorant est, elle, interdite dans la plupart des pays industrialisés.

Cet état de fait pourrait même s’aggraver davantage. Il est aujourd’hui encore possible pour le Paraguay et d’autres pays en développement de bénéficier au moins d’une petite part des profits en produisant des plants de stévia utilisés comme matière première pour la production de glycosides de stéviol. Cependant, si les projets de commercialisation des glycosides de stéviol produits par biologie de synthè-se se concrétisent, le marché des feuilles de stévia pourrait disparaître. Seules quelques entreprises principalement basées dans l’hémisphère nord bénéficieraient alors de l’ensemble de la valeur ajoutée créée. Les Guaranis et les pays d’origine de la plante n’auront plus que leurs yeux pour pleurer.

Nous espérons donc que ce rapport contribuera à convaincre les producteurs de glycosides de stéviol d’engager des négociations avec le peuple guarani et les pays d’origine pour garantir un partage juste et équitable des avantages, conformément à la Convention des Nations unies sur la diversité biologique et au Protocole de Nagoya. Si ce partage ne doit pas nécessairement prendre une forme financière, il doit cependant répondre aux besoins exprimés par les Guaranis, par exemple leur besoin de terres.

Nous espérons en outre que les gouvernements adopteront une législation efficace afin d’assurer l’accès et le partage des avantages au niveau national, et qu’ils introduiront des dispositions plus strictes pour assurer que les entreprises qui commercialisent les produits contenant des glycosides de stéviol ne puissent pas les vendre comme étant « traditionnels », « issus des Guaranis » ou « naturels » alors que ce n’est manifestement pas le cas. Les glycosides de stéviol issus de la biologie de synthèse ne devraient pas être produits sans une évaluation indépendante d’impact socio-économique concluant à des résultats positifs, comme l’exigent les parties de la Convention sur la diversité biologique.

Il serait temps d’éliminer l’arrière-goût amer des glycosides de stéviol, afin qu’ils deviennent un exemple d’accès et de partage équitable des avantages plutôt que de biopiraterie.

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ABRÉVIATIONS

ALS Groupe de travail d’experts en chimie alimentaire des États fédérés et de l’office fédéral allemands pour la protection du consommateur et la sécurité alimentaire

APA Accès et partage des avantagesATM Accord de transfert de matérielBACN Bibliothèque et archives du congrès national

du ParaguayBMG Office fédéral allemand de la santé publiqueCA CanadaCBD Convention des Nations unies sur la diversité

biologiqueCCFA Comité du Codex sur les additifs alimentaires

(FAO et OMS)CIMI Conseil indigéniste missionnaireCOP Conférence des partiesDJA Dose journalière admissibleEC Commission européenne EFSA Autorité européenne de sécurité des alimentsEP Brevet européenETC Groupe d’action sur l’érosion, la technologie

et la concentrationFAO Organisation des Nations unies pour

l’alimentation et l’agricultureFDA US Food and Drug Administration – Agence

américaine des produits alimentaires et médicamenteux

FIAN Food First Information and Action NetworkFIFA Fédération Internationale de Football

AssociationFSA Food Standards AgencyGE AllemagneGIZ Association allemande pour la coopération

internationaleGRAS Désignation des substances généralement

reconnues comme inoffensives par la FDAIFST Institute of Food Science and TechnologyILA Association sur le droit internationalIPTA Institut paraguayen pour la technologie agricoleJECFA Comité mixte FAO-OMS d’experts des additifs

alimentairesMAG Ministère paraguayen de l’agriculture et de

l’élevageMAT Termes mutuellement convenusNZZ Quotidien suisse Neue Zürcher ZeitungOCDE Organisation de coopération et de

développement économiquesOFEV Office fédéral suisse de l’environnement

OFSP Office fédéral suisse de la santé publiqueOLG Oberlandesgericht – Cour d’appel provinciale

allemandeOMC Organisation mondiale du commerceOMPI Organisation mondiale de la propriété

intellectuelleOMS Organisation mondiale de la santéPIC Consentement préalable en connaissance

de causeREDIEX Réseau paraguayen pour l’investissement

et l’exportationSENAVE Service national paraguayen pour la qualité

et la santé des plantes et des semencesSMTA Accord type de transfert de matérielSynBio Biologie de synthèseTBT Institut Test BiotechTIRPGAA Traité international sur les ressources

phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture

UE Union européenneUK Royaume-UniUN Nations uniesUNDRIP Déclaration des Nations unies sur les droits

des peuples autochtonesUPOV Union pour la protection des obtentions

végétalesUS États-UnisZAR Rand sud-africain (monnaie)

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Mars 2016 // 5STÉVIA – UNE DOUCEUR AU GOÛT AMER

1 RÉSUMÉ 6

2 LES GUARANIS ET LA STÉVIA 9

3 STÉVIA : DÉVELOPPEMENT INDUSTRIEL ET PERSPECTIVES COMMERCIALES 113.1 Dissémination et utilisation des plantes de l’espèce stévia 113.2 Développement industriel mondial 113.3 Production de la stévia au Paraguay 123.4 Différence entre feuilles de stévia et glycosides de stéviol 133.5 Processus d’approbation des glycosides de stéviol 153.6 Refus des demandes d’approbation pour les feuilles de stévia 16

4 COMPÉTITION ENTRE EVOLVA, STEVIA FIRST ET DSM POUR LA COMMERCIALISATION DES GLYCOSIDES DE STÉVIOL ISSUS DE LA BIOLOGIE DE SYNTHÈSE 17

5 PROTECTION DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE ET MARKETING 215.1 Certificats d’obtenteurs sur les variétés de plantes stévia 215.2 Brevets relatifs à la stévia/aux glycosides de stéviol 215.3 Commercialisation des glycosides de stéviol comme « produits naturels » et « issus des connaissances traditionnelles » 225.4 Restrictions relatives à la publicité 24

6 LA STÉVIA ET LES RÈGLES RELATIVES À L’ACCÈS ET AU PARTAGE DES AVANTAGES 276.1 Stévia, Convention sur la diversité biologique et Protocole de Nagoya concernant l’accès et le partage des avantages 276.2 Autres accords et recommandations intergouvernementaux 29

7 CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS 31

8 RÉFÉRENCES 33

SOMMAIRE

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1 RÉSUMÉ

Depuis des millénaires, les êtres humains développent et partagent des connaissances traditionnelles concernant la culture et l’usage des plantes et des animaux pour pro-duire de la nourriture, des vêtements, des médicaments et bien d’autres objets utilitaires, culturels et spirituels. Ce-pendant, cette connaissance est de plus en plus appro-priée et même monopolisée par les entreprises.

Aujourd’hui, les gouvernements reconnaissent – no-tamment au travers de la Convention des Nations unies sur la diversité biologique (CBD) et de son Protocole de Nagoya – que les détenteurs des savoirs traditionnels ont le droit de bénéficier des connaissances qu’ils ont déve-loppé. De même, la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones (UNDRIP), adoptée pour l’assemblée générale des Nations unies en 2007, est égale-ment très pertinente puisqu’elle affirme les droits des peuples autochtones sur leurs territoires et leurs savoirs traditionnels.

Ces principes concernent de manière tout à fait perti-nente le peuple guarani, frappé par la pauvreté, au Para-guay et au Brésil, qui connait depuis des siècles les pro-priétés édulcorantes des feuilles de Stevia rebaudiana. C’est de ce savoir traditionnel que découlent toutes les commercialisations ultérieures de la stévia – sous la forme de glycosides de stéviol, « puissants édulcorants » utilisés pour édulcorer des produits tels que les boissons gazeuses allégées en sucre. En effet, du fait des problèmes crois-sants d’obésité et de diabète, la demande mondiale pour des produits naturels et sans sucre augmente rapidement, et la stévia est cultivée et commercialisée dans de nom-breux pays hors du Paraguay, en particulier en Chine. Ce-pendant, les droits du peuple guarani à bénéficier de son exploitation, conformément au Protocole de Nagoya de la Convention sur la diversité biologique, sont bafoués. Il s’agit ici d’un cas patent de biopiraterie.

Les entreprises qui produisent et commercialisent les glycosides de stéviol bénéficient également de différentes réglementations relatives à l’importation et à l’utilisation des feuilles de stévia et des glycosides de stéviol indus-triels. Celles-ci interdisent l’utilisation directe des feuilles de stévia comme édulcorant. À titre d’exemple, le comité mixte FAO/OMS d’experts des additifs alimentaires (JEC-FA) a conclu à l’innocuité de la consommation des glyco-sides de stéviol, mais seulement en quantités limitées, et a recommandé une dose journalière admissible (DJA), au-jourd’hui en vigueur en Europe et aux États-Unis. Mais parallèlement, il est impossible de commercialiser les feuilles de stévia sur les marchés américain, européen ou

suisse. Cela semble lié au fait qu’il n’existe que peu d’in-térêt commercial à mettre en œuvre des processus d’ap-probation coûteux pour les feuilles de stévia. Ainsi, les produits issus des grandes entreprises multinationales peuvent accéder au marché plus facilement que ceux ba-sés sur l’utilisation traditionnelle des feuilles de stévia entières.

Cependant, même si les feuilles de stévia ne peuvent être commercialisées aux États-Unis ou dans l’Union eu-ropéenne, et si les glycosides de stéviol sont substantielle-ment différents des feuilles de stévia, les grandes entre-prises telles que Coca-Cola trompent les consommateurs en s’appuyant sur les avantages associés à la plante dans son état naturel, et même sur les savoirs traditionnels des Guaranis. Pour prendre un exemple, Pepsi et Coca-Cola ont toutes deux lancé des boissons contenant des glyco-sides de stéviol, « Pepsi Next » et « Coca-Cola Life ». Et elles n’ont épargné aucun effort pour mettre en évidence le caractère « naturel » de ces boissons. Coca-Cola Life est également commercialisé en tant que moyen de lutter contre l’obésité et d’aider les consommateurs à adopter un mode de vie plus équilibré, même si le produit, au-delà des glycosides de stéviol, contient plus de quatre cuillères à thé de sucre par canette.

De surcroît, sous l’effet de « l’engouement » pour les glycosides de stéviol, la compétition fait rage pour breve-ter les procédés de production des glycosides de stéviol par biologie de synthèse, au lieu de les produire à partir des feuilles de stévia. Ce qui signifie que, dans un futur proche, les grandes entreprises qui commercialisent ou utilisent les glycosides de stéviol issus de la biologie de synthèse ne dépendront plus de la culture des plants de stévia ni des aléas de la météorologie, du climat et des échanges internationaux.

L’une des pionnières de cette démarche est l’entreprise suisse Evolva, qui collabore avec Cargill, une multinatio-nale basée aux États-Unis. Cargill est l’un des deux lea-ders mondiaux de la production et commercialisation des glycosides de stéviol, et Coca-Cola et PepsiCo sont deux de ses principaux clients. Deux autres entreprises sont en-gagées dans la compétition visant à « contrôler » le marché de la stévia produite par biologie de synthèse, dont Stevia First, petite entreprise de biotechnologie basée en Califor-nie, et DSM, géant de la chimie basé aux Pays-Bas, qui réalise un chiffre d’affaires de plusieurs milliards de dol-lars. Cependant, les conséquences de cette compétition ne seront pas limitées aux fabricants : si des glycosides de stéviol issus de la biologie de synthèse sont commerciali-

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sés, il y aura très probablement de graves impacts négatifs sur les petits exploitants agricoles qui cultivent la stévia au Paraguay et ailleurs.

Un débat relatif aux glycosides de stéviol produits par biologie de synthèse émerge également au sein du comité JECFA, qui a lancé une nouvelle évaluation pour per-mettre l’utilisation des glycosides Rebaudioside E et M de synthèse comme édulcorants principaux dans l’agroali-mentaire. Le gouvernement du Paraguay s’oppose à cette démarche, et demande qu’une méthodologie soit dévelop-pée pour différencier les glycosides de stéviol naturels et ceux obtenus par biologie de synthèse, et que soit approu-vée l’utilisation de glycosides de stéviol de pureté moindre. Si elle est couronnée de succès, la démarche du Paraguay pourrait avoir des conséquences importantes sur

l’étiquetage des produits obtenus à partir des feuilles de stévia.

Pour résoudre ce cas de biopiraterie, et pour promou-voir le développement rural pour les petits exploitants agricoles, les gouvernements, d’une manière générale, et les entreprises produisant ou utilisant les glycosides de stéviol, doivent adopter un certain nombre de mesures :

• Les producteurs et les utilisateurs de glycosides de stéviol doivent s’engager dans une négociation avec les Guaranis pour convenir de modalités conduisant au partage juste et équitable des avantages résultant de la commercialisation des glycosides de stéviol.

La majorité des Guaranis du Paraguay vivent dans des conditions économiques difficiles. © Keystone

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Cet aspect est particulièrement important dans un pays comme le Paraguay où il n’existe pas encore d’obligations légales effectives concernant l’accès et le partage des avantages. Ce partage ne doit pas nécessairement être fi-nancier, il peut également être réalisé par d’autres formes de contribution.

• Les gouvernements des pays utilisateurs et fournis-

seurs – y compris le gouvernement paraguayen – devraient appliquer de manière optimale le Proto-cole de Nagoya au niveau national à l’aide de lois nationales complètes et efficaces concernant l’accès et le partage des avantages.

Il devrait être impossible de réaliser des profits lorsque l’accès aux ressources génétiques et aux connaissances traditionnelles associées a été obtenu de manière illégale et sans partage des avantages.

• Les gouvernements et les entités qui commerciali-sent des produits contenant des glycosides de stéviol doivent mettre fin à toute publicité décrivant les glycosides de stéviol comme « traditionnels » ou « naturels ».

Les gouvernements et les entreprises des pays consom-mateurs doivent arrêter les publicités qui trompent déli-bérément les consommateurs en présentant les produits qui contiennent des glycosides de stéviol produits de ma-nière synthétique ou chimique comme « naturels » et « traditionnels ». Les publicités qui mettent en avant « l’aspect naturel » des glycosides de stéviol et l’héritage des Guaranis trompent de manière délibérée les consom-mateurs et posent problème. Ce type de publicité devrait être interdit.

• Le gouvernement du Paraguay et les autres pays doivent veiller à ce que la culture des plantes de stévia favorise les petits paysans et le développe-ment des zones rurales.

Tout programme de développement rural doit favoriser une production à petite échelle et écologiquement du-rable, et reconnaître les droits territoriaux des Guaranis. Il devrait également apporter un soutien aux petits pay-sans sous forme d’accès aux services de conseil et de vul-garisation, aux marchés et au crédit équitable, ainsi qu’à des plateformes d’échange entre paysans.

Le gouvernement paraguayen, qui développe déjà le secteur de la stévia au Paraguay, doit élargir son aide aux petits paysans et à l’industrie locale de transformation, qui est en plein essor.

• Enfin, les gouvernements doivent également veiller à ce que des glycosides de stéviol issus de la biologie de synthèse ne puissent pas être produits ou commercialisés en l’absence d’étude indépendante d’impact socio-économique mettant en évidence des retombées positives, comme l’exigent les parties de la Convention sur la diversité biologique.

La tendance à l’utilisation de glycosides de stéviol issus de la biologie de synthèse constitue une menace pour le fort potentiel de développement rural de la culture de la stévia dans des pays tels que le Paraguay. Elle conduit en effet à transférer la production des petites exploitations paysannes vers les laboratoires des grandes entreprises. Cependant, si des glycosides de stéviol produits par bio-logie de synthèse sont mis sur le marché, les gouverne-ments doivent veiller à ce que les entreprises qui com-mercialisent les produits finis soient contraintes de les signaler clairement en tant que tels par un étiquetage ap-proprié.

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Présent au Paraguay et au Brésil et frappé par la pauvreté, le peuple guarani connaît depuis des siècles les propriétés édulcorantes des feuilles de Stevia rebaudiana. Ces connaissances traditionnelles sont à l’origine de la commercialisation ultérieure de la stévia et des produits qui en sont dérivés. Malgré cela, les droits des Guaranis sur l’exploitation de la plante, établis par la Convention sur la diversité biologique et le Protocole de Nagoya, sont bafoués.

Baptisée Kaa he’e par le peuple guarani, la stévia a acquis sa notoriété hors du Paraguay après son obtention par le docteur Moises Santiago Bertoni, botaniste suisse, qui avait étudié ces espèces et leurs propriétés édulcorantes chez les Guaranis et les Mestizos en 1887. En 1894, il avait obtenu des feuilles et décrit et classifié la stévia dans la famille des tournesols (Asteraceae) en lui attribuant son nom scientifique.

En 1918, le docteur Bertoni décrit explicitement com-ment il s’est procuré des informations sur la plante auprès d’herboristes et d’autochtones du nord-est du Paraguay :

« [En] 1887, au cours de mes explorations des vastes fo-rêts de l’est du Paraguay, j’ai recueilli des témoignages à propos de cette plante auprès d’herboristes (yerbateros) du nord-est du pays et d’Indiens du Mondaih. Ces derniers connaissaient la plante par sa présence dans les prairies voisines du Mbaeverá et du Kaa Guasú »1 (Bertoni, 1918).

Il lui est clairement apparu que cette plante, utilisée tra-ditionnellement comme édulcorant naturel, pourrait per-mettre de remplacer des édulcorants artificiels comme la saccharine, qui était déjà commercialisée de son vivant en

tant qu’alternative saine pour les personnes atteintes de diabète. Il prédisait déjà la réussite de la commercialisation future de la plante stévia.

En outre, en se basant sur les connaissances tradition-nelles des Guaranis concernant l’utilisation des feuilles de stévia comme édulcorant naturel (ce qui fut plus tard encore étayé par les études du chimiste Ovidio Rebaudi), Bertoni pensait que la plante pouvait être consommée sans danger :

« La plante est dépourvue d’effet toxique et est, au contraire, saine, d’après la longue expérience de sa consommation et l’étude du docteur Rebaudi »2 (Bertoni, 1918).

De plus, une analyse de différentes sources historiques concernant l’utilisation des plantes médicinales par les In-diens guaranis a révélé l’utilisation de la Stevia rebaudia-na comme édulcorant (Noelli, 1998). Certaines études pa-raguayennes des années 1970 soutenaient l’idée de l’utilisation de la stévia pour traiter les diabètes (Soejarto et ass., 1983), et les feuilles et tiges étaient commerciali-sées à cet effet dans certaines pharmacies et sur certains marchés locaux du Paraguay. Ces connaissances tradition-nelles relatives à l’utilisation de la stévia comme produit édulcorant sont à l’origine de la commercialisation de la stévia et des produits qui en sont dérivés. Cependant, les droits du peuple guarani au partage des avantages de leurs connaissances traditionnelles, conformément à la Conven-tion sur la diversité biologique (CBD), sont bafoués.

À l’instar de nombreux autres peuples autochtones, les Guaranis souffrent depuis longtemps de l’exploitation et de la discrimination.

Aujourd’hui, ils vivent dans certaines parties du Brésil, du Paraguay, de la Bolivie et de l’Argentine. Les groupes guaranis qui ont utilisé la Stevia rebaudiana au cours des siècles sont les Guarani-Kaiowas au Brésil et les Pai Tavy-teras au Paraguay.

La population des Pai Tavyteras au Paraguay représente 15 097 habitants, répartis dans 61 communautés. Du fait de la spoliation et de la déforestation liées à l’expansion de la frontière agricole, les Pai Tavyteras n’utilisent au-jourd’hui qu’une petite partie de leur territoire tradition-nel. Autrefois basé sur la chasse, la pêche et la cueillette, leur système alimentaire dépend aujourd’hui de plus de la pratique de l’agriculture à petite échelle et du travail sala-

STEVIA REBAUDIANA BERTONI

Stevia rebaudiana Bertoni a été baptisée du nom du chimiste Ovidio Rebaudi, qui a analysé la plante à la demande de Bertoni (Rebaudi, 1900 ; Kienle et ass., 2008 ; MAG, 1991).La région d’origine de la Stevia rebaudiana se situe entre 22° et 24° de latitude sud, et entre 55° et 56° de longitude ouest. Cette région englobe la région montagneuse d’Amambay au Paraguay et les parties orientales du Mato Grosso do Sul (Katayama et ass., 1976).

2 LES GUARANIS ET LA STÉVIA

1 Traduction de l’espagnol vers le français par la Déclaration de Berne2 Traduction de l’espagnol vers le français par la Déclaration de Berne

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rié dans des ranchs (Glauser, 2011). Quatorze communau-tés ne disposent d’aucune terre. De plus, les actes de vio-lence des propriétaires des ranchs et des plantations qui entourent leurs territoires se multiplient dans une zone de plus en plus contrôlée par les barons de la drogue.

Selon des informations recueillies en 2010, près de 46 000 Guarani-Kaiowas vivaient du côté brésilien de la frontière, dans la région du Mato Grosso do Sul. Au cours du siècle dernier, ils ont perdu pratiquement tous leurs terri-toires dans cet État, alors essentiellement couvert de forêt. Aujourd’hui, ils vivent dans de petites réserves souvent sur-peuplées, entourées de pâturages pour l’élevage du bétail et de plantations de canne à sucre. La plupart des Kaiowas ne disposent d’aucune terre et vivent dans de petites tentes au bord des routes. De ce fait, les connaissances traditionnelles de l’usage de la stévia ont pratiquement disparu.

Au cours des dernières années, les conflits relatifs aux terres et la violence contre les Guaranis se sont considéra-blement intensifiés dans la région du Mato Grosso do Sul. En 2007, le gouvernement brésilien s’est engagé dans une action de délimitation de 36 territoires pour les Kaiowas, dans la partie sud du Mato Grosso do Sul. Cependant, ces délimitations de terres n’ont pas encore été appliquées, principalement du fait de l’opposition des grands proprié-taires terriens.

Les revendications légitimes des terres par les autoch-tones se heurtent aux investissements croissants effectués dans le secteur de la canne à sucre par des sociétés réunis-sant des grands propriétaires terriens et des multinationales spécialisées dans le commerce de matières premières agri-coles, en particulier parce que le Mato Grosso do Sul est l’une des régions les plus dynamiques pour ce qui concerne l’expansion de la canne à sucre au Brésil. Entre 2007 et 2012, les surfaces consacrées à la monoculture de la canne à sucre dans cet État ont triplé pour passer de 180 000 ha à 570 000 ha (Oxfam, 2013). Le territoire de Jatayvary dans la région de Dourados est un exemple notoire. Bien que le mi-nistère de la Justice du pays ait officiellement reconnu les

droits aux terres traditionnelles d’un groupe guarani, la raf-finerie Monteverde du groupe Bunge, spécialisée dans la production de sucre, a continué à acheter de la canne à sucre auprès de cinq plantations situées sur ces territoires et a refusé de résilier le contrat avant son terme. Bunge est en effet l’un des principaux fournisseurs de sucre pour Co-ca-Cola (Oxfam, 2013 ; Survival International, 2013).

Si les conflits violents relatifs aux terres existent de longue date dans la région du Mato Grosso do Sul, les at-taques menées contre les Guaranis se sont nettement inten-sifiées au cours des dernières années. En 2014, 25 membres des populations guaranis ont été assassinés dans ce seul État (CIMI, 2015). En août 2015, Victoria Tauli-Corpuz, Rapporteuse spéciale des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, a exprimé son extrême préoccupa-tion à propos d’informations indiquant que la police est poussée à expulser par la force les populations autochtones kaiowas de leurs « tekohas » (territoires traditionnels). Se-lon ses informations, près de 6 000 autochtones refusent de quitter leurs terres et ont averti de leur intention de résister à cette éviction « jusqu’à la mort ».

Cette perte de territoires a conduit les populations kaiowas à la pauvreté totale. Du fait des faibles disponibi-lités d’autres moyens de subsistance, la plupart d’entre eux travaillent dans les plantations de canne à sucre dans des conditions extrêmement précaires. En 2011, près de 10 000 hommes guaranis travaillaient dans les plantations – et entre 2004 et 2010, 2 600 travailleurs guarani-kaiowas ont été libérés de conditions de travail quasiment esclavagistes (FIAN, 2012). D’autres problèmes graves se posent, dont le manque d’installations médicales appropriées, avec pour conséquence un taux élevé de mortalité infantile, l’absence de soutien pour l’enseignement scolaire des enfants au-tochtones et, du fait des conditions de vie désastreuses, un niveau élevé de consommation d’alcool. Le nombre de sui-cides chez les Guaranis du Mato Grosso do Sul est très su-périeur à celui constaté dans d’autres États brésiliens. Entre 2000 et 2014, 707 cas ont été signalés (CIMI, 2015).

Les Guaranis ont perdu leurs terres ancestrales sur lesquelles se sont aujourd’hui implantées des plantations spécialisées dans la production de canne à sucre. © Misereor

Les feuilles de stévia sont utilisées traditionnellement comme produit édulcorant naturel, par exemple pour la consommation de maté. © Keystone

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STÉVIA – UNE DOUCEUR AU GOÛT AMER Mars 2016 // 11

3 STEVIA: DÉVELOPPEMENT INDUSTRIEL ET PERSPECTIVES COMMERCIALES

3.1 DISSÉMINATION ET UTILISATION DES PLANTES DE L’ESPÈCE STÉVIA

Bien que l’usage de feuilles de stévia par les Guaranis ait été découvert autour de la fin du XIXe siècle, c’est seulement au cours des années 1970 que la stévia a été véritablement commercialisée, au Japon. Aujourd’hui, sous l’effet des problèmes croissants d’obésité et de diabète, la demande mondiale de produits édulcorants naturels et sans sucre, tel que les glycosides de stéviol, se développe rapidement.

Les glycosides de stéviol, édulcorants purs dérivés de la plante stévia, sont commercialisés aujourd’hui sur les marchés, dans les supermarchés, les boutiques et les phar-macies partout dans le monde, et leur intérêt commercial se développe à l’échelle de la planète. Et pourtant, la plante stévia à l’état sauvage a quasiment disparu (MAG, 1991 ; Willi, 2006).

L’utilisation commerciale de la stévia, principalement sous la forme des glycosides de stéviol, n’a commencé qu’au début des années 1970 (Kienle et ass., 2008). C’est lorsque les édulcorants comme le cyclamate et le saccha-rine ont été suspectés d’être cancérigènes que la recherche d’un nouveau produit édulcorant a commencé et que les scientifiques japonais se sont intéressés à la plante stévia. Au cours de deux expéditions japonaises, près de 500 000 plantes sauvages ont été prélevées dans les régions d’ori-gine et ramenées au Japon. L’entreprise japonaise Morita Kagaku Kogyo Co., Ltd. est par la suite devenue la pre-mière à produire un édulcorant commercial à partir de la stévia, en 1971 (Morita Kagaku Kogyo Co., Ltd., 2007).

Alors que cette plante paraguayenne avait été quasiment oubliée, elle suscite aujourd’hui une activité majeure à l’échelle mondiale sous l’égide d’entreprises multinatio-nales telles que Cargill, Coca-Cola et PepsiCo. Les différentes molécules qui apportent leur saveur sucrée aux feuilles de stévia, collectivement baptisées glycosides de stéviol, font l’objet d’une demande croissante sur le marché alimentaire mondial comme édulcorants, substituts au sucre et complé-ments alimentaires. Ils deviennent donc une « alternative » d’importance croissante sur le marché mondial des édulco-rants toujours en développement (OCDE/FAO, 2013).

La demande en glycosides de stéviol et autres produits « naturels » et sans sucre est manifestement suscitée par

les préoccupations croissantes liées au développement de l’obésité et du diabète et l’intérêt grandissant pour une ali-mentation saine dans les sociétés occidentales. Les glyco-sides de stéviol sont acaloriques et possèdent un pouvoir édulcorant 300 fois plus élevé que la saccharose, ce qui en fait l’une des substances naturelles connues les plus édulcorantes (Nikolova, 2015 ; Lemus-Mondaca et ass., 2012 ; MAG, 1991).

En 2009, l’Organisation mondiale pour la santé (OMS) estimait que les glycosides de stéviol pourraient potentiel-lement remplacer 20 à 30 % de tous les édulcorants ali-mentaires au cours des années à venir (OMS, 2009). Les prévisions de chiffre d’affaires réalisé avec les aliments et les boissons contenant des édulcorants composés de glyco-sides de stéviol représentent 8 à 11 milliards de dollars US en 2015 (IndustryARC, 2014). Mintel indique également des chiffres pour le marché croissant des glycosides de stéviol eux-mêmes, estimant qu’il va doubler entre 2013 et 2017, passant de 110 millions de dollars US à 275 millions de dollars US (Mintel, 2014).

3.2 DÉVELOPPEMENT INDUSTRIEL MONDIAL

La plante stévia est également cultivée dans de nombreux pays hors du Paraguay, en particulier pour produire des glycosides de stéviol.

Selon l’entreprise SteviaOne, 80 % de la culture mondiale se situait en 2012 en Chine, 5 % au Paraguay, 3 % en Ar-gentine, 3 % au Brésil et 3 % en Colombie. La plante était

COMPOSITION DE L’INTERNATIONAL STEVIA COUNCIL3

Raffineurs (production conforme aux spécifications JECFA)CargillIngredionMoritaPure CircleReal SteviaSteviaOneVerdure Science

3 Composition de l’International Stevia Council – www.internationalsteviacouncil.org/index.php?id=7

Utilisateurs d’ingrédientsCoca-Cola CompanyNordzucker

Cultivateurs et producteurs de feuillesSweet Green Fields (production de feuilles aux États-Unis)

Membres associésDSM

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également cultivée en Inde, au Japon, au Kenya, en Corée du Sud, à Taiwan, au

Vietnam et aux États-Unis (SteviaOne, 2012 ; Gmuer, 2015). La Chine cultive une surface de 20 000 à 25 000 ha (Kienle, 2014) et, selon les estimations, 30 000 ha de plants de stévia étaient cultivés dans le monde en 2011 pour la production de glycosides de stéviol (Quelle santé, 2011).

Aujourd’hui, en particulier suite à la levée des restric-tions imposées aux États-Unis et en Europe (voir ci-des-sous pour de plus amples détails), les glycosides de stéviol sont présents dans des centaines de produits agroalimen-taires, dont des céréales, des thés, des jus, des laits aroma-tisés, des yogourts et des boissons gazeuses (Evolva, 2014). Par ailleurs, Coca-Cola et PepsiCo ont toutes deux lancé une boisson gazeuse contenant des glycosides de stéviol (respectivement Coca-Cola Life et Pepsi Next) (Coca-Cola, 2014 ; PepsiCo, 2015). Les marchés les plus porteurs sont les États-Unis, le Japon, la Chine et l’Union européenne (Gmuer, 2015).

Pour représenter les intérêts des entreprises concernées par la commercialisation des glycosides de stéviol, l’Inter-national Stevia Council, association professionnelle inter-nationale, a été créée en 2010. Ses membres sont des entre-prises qui produisent et raffinent les glycosides de stéviol de manière industrielle, et qui les commercialisent comme produits édulcorants naturels à base de stévia.

3.3 PRODUCTION DE LA STÉVIA AU PARAGUAY

Bien que la Chine soit le principal pays producteur et exportateur de feuilles de stévia, le Paraguay continue à produire et à exporter la plante cultivée, et le gouvernement paraguayen s’est engagé dans une action de promotion du secteur pour favoriser le développement rural. La stévia possède en effet un énorme potentiel pour contribuer à la viabilité de la petite paysannerie au Paraguay.

Il semble que, jusqu’en 2005, l’ensemble de la récolte de stévia au Paraguay était exportée vers le Brésil voisin. De-puis, les feuilles de stévia séchées ont cependant également été exportées vers d’autres pays, dont les États-Unis, le Ja-pon, l’Allemagne, l’Argentine, le Mexique, la France et même vers le principal producteur actuel, la Chine (GIZ, 2008).

Contrairement à la canne à sucre ou au maïs (matière première nécessaire à la production de sirop de maïs à haute teneur en fructose), la stévia est principalement pro-duite par de petits paysans, à la fois parce que sa produc-tion nécessite une importante main-d’œuvre et parce qu’il est possible de la cultiver au travers de systèmes de culture diversifiés. Au Paraguay, le producteur moyen d’une petite exploitation ne possède que 5 à 10 ha de terres arables, et cultive la stévia par rotation des cultures, en y associant le coton, le manioc, le sésame ou le soja. De manière simi-laire, en Chine, la stévia est généralement produite par des petits paysans sous contrat sur des parcelles d’une surface

de 1 mu, c’est-à-dire 667 m2 (Bamber et Fernandez-Stark, 2012 ; Kienle, 2011).

Les agriculteurs peuvent commencer à récolter dès la première année, avec la possibilité de réaliser quatre ré-coltes par an au Paraguay (Nikkei Asian Review, 2015). La production de stévia au Paraguay offre donc des avantages pour les petits exploitants, ainsi que la possibilité de proces-sus de transformation à valeur ajoutée à la fois pour les mar-chés domestiques et à l’exportation. Cependant, les paysans ont besoin d’aide concernant l’accès aux marchés, les ser-vices de conseil et les échanges d’informations entre pay-sans, et ils ne réussissent en général que s’ils collaborent avec d’autres producteurs et bénéficient d’un accès équi-table au financement (Bamber et Fernandez-Stark, 2012).

Le ministère de l’Agriculture et de l’Élevage (MAG) du Paraguay assure la promotion du secteur de la stévia dans le cadre de son Plan pour l’agriculture et le développement rural (OMC, 2005 ; MAG, 2006). Cependant, alors que la production se développe partout, y compris l’usage crois-sant des techniques de biologie de synthèse (« SynBio ») (voir le chapitre 4), le potentiel exceptionnel de dévelop-pement pour les paysans dans la « région d’origine » de la stévia pourrait se trouver bloqué.

D’une manière générale, les marchés liés aux feuilles de stévia et aux produits associés cultivés au Paraguay et ex-portés sont incertains. À titre d’exemple, en 2011, le Japon a cessé d’importer la stévia du fait du développement de la fièvre aphteuse au Paraguay. Conjuguée à l’effondrement du cours des feuilles de stévia, cette situation aurait, selon certaines informations, provoqué la chute des exportations du Paraguay, passant de 1,2 million de dollars US en 2011 à seulement 368 000 dollars US en 2014 (Nikkei Asian Re-view, 2015). Cependant, en février 2015, le gouvernement japonais a revu sa position et annoncé un accord dans le cadre duquel il achèterait l’ensemble des feuilles de stévia exportées par le Paraguay. Le Réseau paraguayen pour l’in-vestissement et l’exportation, organisme du ministère du Commerce et de l’industrie du Paraguay, indique par ail-leurs que les cours sont aujourd’hui stabilisés (REDIEX, 2015).

D’une manière générale, le gouvernement paraguayen est manifestement dans une dynamique visant à dévelop-per le secteur de la stévia au Paraguay. Son objectif est de capitaliser sur la connaissance croissante par les consom-mateurs du lien entre la stévia et le Paraguay, en tirant par-ti des stratégies marketing existantes des entreprises, avec pour finalité d’accroître de manière significative les expor-tations de feuilles de stévia et de glycosides de stéviol purs par le Paraguay. À cette fin, son objectif est de modifier les normes internationales définies par le comité mixte FAO/OMS d’experts des additifs alimentaires (JECFA) (et par extension, les normes nationales en vigueur aux États-Unis et dans l’Union européenne), pour qu’il n’existe plus au-cune discrimination en faveur des glycosides de stéviol chimiquement purifiés ou produits par biologie de syn-thèse, ce qui pourrait avoir un impact négatif significatif sur la production de feuilles de stévia au Paraguay.

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3.4 DIFFÉRENCE ENTRE FEUILLES DE STÉVIA ET GLYCOSIDES DE STÉVIOL

Bien que les entreprises engagées dans la commer-cialisation des produits utilisant des glycosides de stéviol tendent à les confondre, il existe des différences importantes entre les feuilles de stévia (le produit édulcorant traditionnel) et les glycosides de stéviol (l’édulcorant produit industriellement par des entre prises commerciales). Ces différences tiennent aux processus de production.

Les feuilles de la plante Stevia rebaudiana contiennent un certain nombre de molécules, collectivement baptisées gly-cosides de stéviol, qui lui confèrent ses propriétés édulco-rantes. Les feuilles de Stevia rebaudiana contiennent prin-cipalement le stévioside et le rébaudioside A, le rébaudioside C et le dulcoside A, ainsi que le rébaudioside D et le rébau-dioside E qui n’existent que sous forme de traces. Cepen-dant, celles qui possèdent le goût le plus agréable, notam-ment le rébaudioside D, ne sont présentes dans les feuilles qu’en très faibles quantités (Kinghorn, 2002). Par ailleurs, le rébaudioside M n’existe que dans certaines variétés très spécifiques (Ohta et ass., 2010).

Les manipulations génétiques sont utilisées pour ac-croître le nombre de glycosides de stéviol détectables dans les plantes stévia. À titre d’exemple, la variété Stevia rebau-diana Morita contient 21 glycosides, dont 10 nouveaux, y compris le rébaudioside M (Ohta et ass., 2010). Depuis une dizaine d’années, des cultures spécifiques ont été en parti-

culier menées pour améliorer la teneur en rébaudioside A, qui possède un bon profil de goût (certains autres donnent un arrière-goût amer) (IFST, 2015 ; Kusnesof, 2007).

Point important à noter, les glycosides de stéviol ne sont pas « naturels », comme l’affirment de nombreuses en-treprises dans leur publicité. De plus, différents produits chimiques sont utilisés pour purifier les glycosides de stéviol (Watson, 2012) et la plupart de ces processus de production sont protégés par des brevets (pour de plus amples informations, voir le chapitre 5).

Les glycosides de stéviol sont produits à partir des feuilles de Stevia rebaudiana Bertoni en utilisant de l’eau chaude, et l’extrait aqueux obtenu est précipité par l’addi-tion de sels (par exemple, Ca(OH)2, CaCO3, FeCl3 ou AlCl3). La solution précipitée est ensuite filtrée en appli-quant un traitement utilisant une résine à échange d’ions (anionique et cationique) pour éliminer les sels et les mo-lécules ioniques. Une décoloration partielle de la solution aqueuse est obtenue grâce au processus d’échange d’ions. Une décoloration effectuée avec des résines d’adsorption suit l’étape de traitement par échange d’ions. Il est ainsi possible d’obtenir un raffinat de glycosides de stéviol (FDA, 2008). Des résines d’adsorption spécifiques sont uti-lisées pour piéger les glycosides de stéviol. La résine est ensuite lavée avec un alcool solvant pour libérer les glyco-sides de stéviol et le produit est ensuite recristallisé à par-tir de méthanol ou d’éthanol aqueux, ce qui permet d’obte-nir des glycosides de stéviol extrêmement purs. Le produit final est ensuite déshydraté par atomisation (JECFA, 2010 ; EC, 2012).

Les feuilles de Stevia rebaudiana sont traditionnellement utilisées et commercialisées comme produit édulcorant naturel au Paraguay. © getty images

Les glycosides de stéviol sont produits par un procédé chimique/physique à partir de feuilles de stévia. Cette usine se trouve au Paraguay, mais la plupart des sites de production sont situés en dehors du pays. © getty images

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LÉGENDE

glycosides de stéviol

sous-produits

sels de précipitation

sels de précipitation liés à des sous-produits

colonne avec résine d’adsorption respective

feuilles de stévia

PRODUCTION COMMERCIALE

précipitation

filtration

désalinisation et décoloration par un processus d’échange d’ions

‰ alc.

l’alcool solvant libère les glycosidesde stéviol de la résine

purification par recristallisation à partir du méthanol ou de l’éthanol aqueux

sels de précipitationCa (OH)2, CaCO3,FeCI3 ou AICI3

sels de précipitationCa (OH)2, CaCO3,FeCI3 ou AICI3

déshydratation par atomisa-tion, glycosides de stéviol cristallisés avec un degré de pureté de 95 %

‰ alc.

résine d’adsorption pour piéger les glycosides de stéviol

UTILISATION TRADITIONNELLE

H2O

PRODUCTION DES GLYCOSIDES DE STÉVIOL PAR UN PROCÉDÉ CHIMIQUE/PHYSIQUE

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Point essentiel, certains de ces processus de produc-tion ne sont pas écologiques (Kienle, 2011 ; Watson, 2012). Par ailleurs, les glycosides de stéviol purifiés peuvent éga-lement contenir des produits spécifiques et des isomères qui se forment au cours du processus de purification chimique/physique (BAG, 2010).

3.5 PROCESSUS D’APPROBATION DES GLYCOSIDES DE STÉVIOL

Au Paraguay, la consommation et la vente de feuilles de stévia n’a jamais fait l’objet de restrictions (MAG, 1991), mais dans d’autres pays, des études approfon-dies de toxicologie à long terme sont exigées pour l’autorisation des produits alimentaires et des additifs, y compris pour la plante stévia et les glycosides de stéviol. Cependant, les pays appliquent différentes réglementations. Cette partie du rapport aborde de manière succincte les normes applicables à l’échelle mondiale et les processus d’approbation dans l’Union européenne et aux États-Unis, en particulier concernant les glycosides de stéviol.

Comité mixte FAO/OMS d’experts des additifs alimentaires (JECFA)Le JECFA est un comité scientifique international adminis-tré conjointement par l’organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et l’OMS. Il a la responsabilité d’évaluer la sécurité des additifs alimen-taires et d’évaluer les contaminants contenus dans les ali-ments (FAO et OMS, 2015).

Le comité JECFA propose des normes pour la produc-tion de glycosides de stéviol (JECFA, 2010 ; JECFA, 2010a). Il a évalué en 2009 les recherches relatives à la sécurité des glycosides de stéviol (principalement le stévioside et le ré-baudioside A), et a conclu qu’ils étaient tout à fait sûrs, mais seulement en quantités limitées, et a recommandé une dose journalière admissible (DJA) de stéviol de 0 à 4 mg/kg de masse corporelle, et un niveau de pureté exigé supérieur à 95 % (JECFA, 2009).4

Cependant, à la demande des gouvernements des États-Unis et de la Malaisie, le comité JECFA a aujourd’hui enta-mé une nouvelle évaluation pour permettre l’utilisation des rébaudiosides E et M de synthèse – qui ne proviennent pas de la plante stévia et ne peuvent pas être considérés comme des produits « naturels » (voir le chapitre 4 relatif à la biologie de synthèse) – comme glycosides de stéviol pour l’agroalimentaire. Une première décision devrait être adoptée au cours de la réunion du JECFA organisée en juin 2016.

Cette démarche suscite l’opposition du gouvernement du Paraguay qui exige qu’« une méthodologie analytique

soit prévue pour différencier les glycosides issus de la plante et ceux produits par la modification enzymatique ou la synthèse par des organismes génétiquement modi-fiés » (CCFA, 2015). Le Paraguay demande également l’extension de la dose journalière admissible (ou DJA) pour les glycosides de stéviol de plus faible pureté. Si elle est couronnée de succès, la demande du Paraguay auprès du comité JECFA de distinguer les différents processus de production pourrait avoir des conséquences importantes concernant l’étiquetage des produits à base de stévia.

L‘Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA)L’Autorité européenne de sécurité des aliments a recom-mandé l’utilisation des glycosides de stéviol comme addi-tifs édulcorants alimentaires en 2010, conformément aux conclusions du comité JECFA, et en préconisant la même DJA. Les glycosides de stéviol ont été ensuite autorisés à la consommation au sein de l’Union européenne (sous la forme de l’additif E960) en 2011 (EU, 2011).

Les délibérations ultérieures au sein de l’Union euro-péenne ont principalement porté sur la probabilité que les enfants consomment une quantité supérieure à la dose re-commandée (EFSA, 2011 ; EFSA, 2014) et sur une proposi-tion d’extension des utilisations autorisées des glycosides de stéviol, qui a été déposée par Tata Global Beverages GB Ltd. et pourrait conduire à un assouplissement des limites existantes (EFSA, 2015).

Agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux (FDA)Les États-Unis disposent de trois processus d’approbation. La FDA peut soit approuver un additif alimentaire soit le

PRODUCTION DES GLYCOSIDES DE STÉVIOL PAR UN PROCÉDÉ CHIMIQUE/PHYSIQUE

4 Cependant, conformément à la directive 453 de l‘OCDE, la DJA est basée exclusivement sur les résultats d‘une étude de deux ans menée sur des rats. L‘étude a établi l‘« absence de niveau d’effet observé » (NOEL) et la DJA est calculée en divisant ce chiffre par 100.

Bien que la commercialisation des glycosides de stéviol soit autorisée aux États-Unis, en Europe, en Suisse et dans d’autres pays, la vente des feuilles de stévia est interdite dans ces mêmes régions. © Fotolia

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lister et l’affirmer comme « généralement reconnu comme sûr » (generally recognized as safe, GRAS). Cependant, se-lon les lois fédérales en vigueur, certains ingrédients peuvent aujourd’hui être ajoutés aux aliments avec une mention GRAS établie indépendamment de la FDA (procé-dure de notification GRAS). D’une manière générale, la vi-gilance de la FDA concernant les additifs alimentaires semble se relâcher.5

Concernant les glycosides de stéviol, la FDA a accepté, en 2008, les deux premières notifications GRAS (numéros 252 et 253) concernant des édulcorants rébaudioside A, sur la base de l’évaluation effectuée par le comité JECFA (voir ci-dessus). Les entreprises peuvent donc aujourd’hui produire et commercialiser aux États-Unis des édulcorants constitués de glycosides de stéviol (FDA, 2015a).

3.6 REFUS DES DEMANDES D’APPROBATION POUR LES FEUILLES DE STÉVIA

En complète contraste avec la situation relative à l’autorisation des glycosides de stéviol, il est impossi-ble de commercialiser les feuilles de stévia sur les marchés américain, européen ou suisse. Cela semble lié au fait qu’il n’existe que peu d’intérêt commercial à mettre en œuvre des processus d’approbation coûteux pour les feuilles de stévia. En pratique, cela signifie que les produits des grandes entreprises multinationa-les peuvent accéder au marché plus facilement que ceux issus de la petite paysannerie qui se basent sur l’utilisation traditionnelle des feuilles de stévia.

Aux États-Unis, la FDA a émis une alerte d’importation exigeant le blocage des importations de feuilles de stévia utilisées comme additifs alimentaires6 (sauf si elles sont étiquetées comme compléments alimentaires7 ou réperto-riées à des fins spécifiques comme la recherche ou la trans-formation). Cette alerte précise :

« En ce qui concerne leur utilisation dans les aliments conventionnels, les feuilles de stévia ne constituent pas un additif alimentaire approuvé et ne bénéficient pas de la mention GRAS aux États-Unis du fait d’informations toxicologiques inappropriées. Les feuilles de stévia n’ont fait l’objet d’aucune notification GRAS. Concernant leur utilisation sous la forme de compléments alimentaires, les ingrédients alimentaires (y compris la stévia) ne sont pas soumis aux réglementations concernant les additifs alimentaires. » (FDA, 2015b).

De manière similaire, la commercialisation des feuilles de stévia n’est pas autorisée dans l’Union européenne (cela nécessiterait une autorisation en tant que nouvel aliment) (FSA, 2015). Un aliment nouveau est un aliment pour le-quel il n’existe pas d’historique significatif de consomma-tion au sein de l’Union européenne avant le 15 mai 1997. Une demande de commercialisation de plante vivante et de feuilles séchées, en tant qu’aliment nouveau, a été refu-sée dans l’Union européenne du fait de l’absence d’infor-mations adéquates. Parallèlement, une nouvelle demande a été présentée, mais elle est bloquée pour le moment car le dossier de sécurité est incomplet. En Suisse, les feuilles de stévia ne sont pas autorisées du fait du manque de preuves significatives concernant leur impact sur la santé (BAG, non daté). Seule une part de 2% de feuilles de stévia est autorisée dans les infusions.

5 www.washingtonpost.com/national/food-additives-on-the-rise-as-fda-scrutiny-wanes/2014/08/17/828e9bf8-1cb2-11e4-ab7b-696c295ddfd1_story.html6 Dans son sens le plus large, le terme « additif alimentaire » s’entend d’une « substance qui, ajoutée intentionnellement à un produit alimentaire, va

devenir, directement ou indirectement, un composant de l’aliment ou affecter les caractéristiques de celui-ci. » (FDA, 2014).7 « Un complément alimentaire est un produit absorbé par voie orale contenant un « ingrédient alimentaire » destiné à compléter le régime alimentaire. »

(FDA, 2015).

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Alors que « l’engouement » pour les glycosides de stéviol prend de l’ampleur, la compétition fait rage pour breveter les procédés de production des glycosides de stéviol par biologie de synthèse, au lieu de les produire à partir des feuilles de la plante. Ce qui signifie que dans un futur proche, les grandes entreprises qui commercialisent ou utilisent les glycosides de stéviol produits par biologie de synthè-se ne dépendront plus de la culture des plantes de stévia ni des aléas de la météorologie, du climat et des échanges internationaux.

Pionnier de cette recherche, l’entreprise suisse Evolva col-labore avec Cargill (Edison, 2015) pour exploiter les tech-niques de biologie de synthèse afin de synthétiser le rébau-dioside M (Reb M) et le rébaudioside D (Reb D), glycosides de stéviol les plus édulcorants et les moins amers. Actuel-lement, le rébaudioside A, le plus abondant, est mélangé avec du sucre dans la boisson Coca-Cola Life (Coca-Cola, 2015) et du sirop de maïs à haute teneur en fructose dans la boisson Pepsi Next, mais avec un arrière-goût légère-ment amer. Cependant, les feuilles de stévia ne contiennent les rébaudiosides D et M qu’en très faibles quantités (moins de 1 %), ce qui rend peu rentable leur production à partir des feuilles (Evolva, 2015).

Spécialisée dans la production de safran, de glycosides de stéviol et de vanilline par des processus de biologie de synthèse, Evolva a développé un processus de fermenta-tion à base de levures pour produire ces glycosides de stéviol, en utilisant des matières premières glucidiques à faible coût. Il est en effet possible d’adapter la proportion de chaque glycoside de stéviol produit par l’hôte en fonc-tion de la composition des gènes insérés dans la cellule de la levure, ce qui permet, en principe, de produire les gly-cosides de stéviol souhaités de manière continue et repro-ductible (EP 2575432 A1)8.

Evolva possède un portefeuille de propriété intellec-tuelle en développement permanent concernant les glyco-sides de stéviol (Evolva, 2014). Le premier brevet à large spectre (EP 2575432 A1) a été déposé en juin 2011 et concernait la production par recombinaison de stéviol et de glycosides de stéviol, tels que le rubusoside et le rébaudio-side A, à l’aide de microorganismes, de plantes ou de cel-lules de plantes servant à la recombinaison (Google, 2015).

En août 2014, Evolva et Cargill ont annoncé conjointement le dépôt auprès de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) d’une demande de brevet (WO 2014122227)9 relative à des procédés permettant d’amélio-rer la production du rébaudioside D et du rébaudioside M. Dans leur communication, les deux entreprises ont indiqué qu’« en produisant le Reb M grâce à la fermentation, Cargill et Evolva peuvent produire le degré édulcorant souhaité à une échelle et pour un coût hors de portée avec l’extraction du Reb M des feuilles de stévia » (Cargill, 2014).

En octobre 2015, Cargill a présenté son nouvel édulco-rant Eversweet, issu de la biologie de synthèse et de la fer-mentation, et développé par Evolva (Grundlehner, 2015). L’objectif de Cargill et Evolva est de lancer sur le marché en 2016 ce nouvel édulcorant contenant des glycosides de stéviol obtenus par fermentation (Swissinfo, 2015 ; Wat-son, 2015). Par ailleurs, une usine Cargill existante est ac-tuellement convertie en usine de fabrication à Blair, dans le Nebraska (Swissinfo, 2015 ; Evolva, 2015).

Evolva et Cargill se trouvent par ailleurs en concurrence avec Stevia First, petite entreprise de biotechnologie basée en Californie. Stevia First a également adopté une approche en terme de fermentation pour produire des glycosides de stéviol, et a déjà obtenu un brevet pour les générer par fer-mentation microbienne en août 2012 (pour un brevet dépo-sé en 2007). Au-delà de la biologie de synthèse, Stevia First revendique également le développement d’un processus enzymatique pour transformer le stévioside de faible quali-té en rébaudioside A (Watson, 2014a). Evolva et Stevia First sont aujourd’hui en concurrence pour déterminer la combi-naison idéale de gènes permettant de produire à moindre coût les glycosides les plus savoureux (Savrieno, 2014).

DSM, géant néerlandais de la chimie au chiffre d’af-faires de plusieurs milliards de dollars, s’est lancé dans l’arène en annonçant la production de glycosides de stéviol par biologie de synthèse. À cette fin, DSM a déposé de nombreuses demandes de brevets relatifs à la technologie de production synthétique de glycosides de stéviol. En outre, l’entreprise se prépare à obtenir des notifications GRAS aux États-Unis (voir ci-dessus), l’ensemble de la dé-marche ayant pour objectif de lancer, d’ici à fin 2015, ses glycosides de stéviol obtenus par biologie de synthèse (Da-niells, 2014). Cependant, il semble que ces demandes de notification GRAS n’ont pas encore été déposées (FDA,

4 COMPÉTITION ENTRE EVOLVA, STEVIA FIRST ET DSM POUR LA COMMERCIALISATION DES GLYCOSIDES DE STÉVIOL ISSUS DE LA BIOLOGIE DE SYNTHÈSE

8 EP 257 54 32 A1:Production de glycosides de stéviol par recombinaison – https://data.epo.org/gpi/ep2575432a1-recombinant-production-of-steviol glycosides9 WO 2014122227: Methods for improved production of rebaudioside D and rebaudioside M – https://patentscope.wipo.int/search/en/detail.jsf?docId=WO2014122227

Page 18: Stévia - une douceur au goût amer

STÉVIA – UNE DOUCEUR AU GOÛT AMER Mars 2016 // 18

LES MATIÈRES PREMIÈRES (GLUCOSE) sont introduites dans la cellule de levure génétiquement modifiée.

Reb M

Reb D

COO – Glucose – Glucose

Glucose

O – Glucose – Glucose

Glucose

COO – Glucose – Glucose

Glucose

O – Glucose – Glucose

LÉGENDE

Séquences de gènes nécessaires pour construire les enzymes respectives, chargées de convertir par exemple le sucre de canne ou le glucose en glycosides de stéviol rébaudioside D et M.

cellule de levure génétiquement modifiée

génome génétiquement modifié de la cellule de levure

enzymes nécessaires pour produire les rébaudiosides D et M

matière première (par exemple, sucre de canne ou glucose) pour la cellule de levure génétiquement modifiée

EN UTILISANT UNE PARTIE DU GÉNOME DE STEVIA REBAUDIANA ET D’AUTRES ORGA-NISMES (par exemple, maïs, algue bleue, arabidopsis thaliana, etc.), des gènes chimères sont synthétisés en laboratoire et insérés dans une cellule de levure. La cellule est donc ainsi génétique-ment modifiée.

LA CELLULE DE LEVURE GÉNÉTIQUEMENT MODIFIÉE produit les enzymes nécessaires pour convertir les matières premières en glycosides de stéviol rébaudioside D et M.

LES ENZYMES TRANS-FORMENT LES MATIÈRES PREMIÈRES en glycosides de stéviol rébaudioside D et M.

PRODUCTION DE GLYCOSIDES DE STÉVIOL PAR UN PROCESSUS DE BIOLOGIE DE SYNTHÈSE

Page 19: Stévia - une douceur au goût amer

STÉVIA – UNE DOUCEUR AU GOÛT AMER Mars 2016 // 19

2015c). L’entreprise a également renforcé sa présence en Chine, le plus grand producteur de glycosides de stéviol au monde, avec une organisation commerciale locale dédiée et une nouvelle usine de mélange située à Yixing (DSM, 2014).

Si DSM semble être en tête en termes de lancement commercial, Stevia First mène la course aux brevets et Evolva a progressé de manière décisive en s’associant avec un partenaire commercial solide. Cargill a investi plus de 4,5 millions de dollars US dans la commercialisation et le développement conjoint de glycosides de stéviol obtenus par fermentation (Evolva, 2014), et la création et la mise en place d’une coentreprise semblent imminentes (Edison, 2015). Cargill est l’un des deux leaders mondiaux du mar-ché pour les glycosides de stéviol et compte Coca-Cola et PepsiCo parmi ses principaux clients, appelés à bénéficier

ainsi de l’accès aux glycosides de stéviol à moindre coût (Palm, 2013).

À l’évidence, si Cargill ne remporte pas la « compéti-tion » pour produire des glycosides de stéviol à moindre coût, elle risque de perdre deux de ses principaux clients au profit de son rival. Cargill a donc tout intérêt à collabo-rer avec Evolva.

Cette joute commerciale autour des glycosides de stéviol produits par biologie de synthèse n’aura pas seule-ment un impact sur les fabricants de glycosides de stéviol, mais il est probable qu’elle ait également des conséquences graves et négatives sur les petits paysans qui produisent la plante stévia ou qui sont encouragés à cultiver la stévia au Paraguay (dans le cadre du programme de développement rural national), et dans d’autres pays (OMC, 2005).

HISTORIQUE SUCCINCT DE LA BIOLOGIE DE SYNTHÈSE

La biologie de synthèse (également baptisée « SynBio ») consiste à réaliser la synthèse des briques de construction de la vie, en créant « des éléments, des dispositifs et des systèmes » nouveaux et artificiels et en modifiant « des systèmes biologiques naturels existants à d’autres fins ». CBD, 2014).

La biologie de synthèse est souvent considérée comme une forme extrême d’ingénierie génétique (Friends of the Earth, 2014 ; ETC, 2015). En effet, au lieu de transférer des gènes entre organismes, son objectif est de créer de nouvelles séquences d’ADN et de concevoir de nouveaux organismes (Friends of the Earth, 2014) capables de réaliser de nou-velles actions, comme par exemple produire des carburants biologiques (SynBio Project, 2015) ou des glycosides de stéviol (Transparenz Gentechnik, 2011). La biologie de synthèse permet également de construire des molécules en se basant sur le codage de l’ADN à partir de l’informatique, l’« évolution dirigée » et la mutagénèse spécifique à un site (c’est-à-dire les modifications intentionnelles de séquences d’ADN) (Friends of the Earth, 2014). La biologie de synthèse est commercialement attractive car elle possède le potentiel nécessaire pour mettre en œuvre des procédés plus rapides et plus puissants que l’ingénierie génétique « traditionnelle » (Friends of the Earth, 2014). Le premier organisme bénéficiant d’un génome totalement synthétique, et capable de s’auto-reproduire, a été dévelop-pé par l’entreprise Synthetic Genomics, dirigée par Craig Venter, en 2010 (The Guardian, 2010).

La biologie de synthèse s’applique à la médecine, à l’agriculture, à la production d’énergie ou aux additifs alimentaires. Les gènes ou séquences de gènes contiennent les informations dont ont besoin les enzymes pour produire des carburants, des produits chimiques, des matières plastiques, des vitamines, des arômes ou des parfums. Ces gènes sont ensuite insérés dans un hôte (par

exemple, des levures ou des bactéries E. coli) par les techniques d’ingénierie génétique, ce qui leur permet d’orienter la production du résultat recherché à partir de matières premières glucidiques comme, par exemple, la cellulose et les sucres issus de plantes.

Les principaux financements de la recherche en matière de biologie de synthèse proviennent à ce jour du gouverne-ment américain et de l’industrie du pétrole. Jusqu’ici, il n’existe pratiquement aucune réglementation ou mesure de contrôle concernant la biologie de synthèse, bien que ses conséquences soient très probablement tout à fait imprévisibles (Nature, 2010) et que les impacts sur la santé humaine et l’environnement n’aient fait l’objet d’aucune évaluation adéquate (Gen-ethisches Netzwerk, 2010 ; Friends of the Earth, 2011 ; TBT, 2010).

En plus de cela, la biologie de synthèse permet la « bio-piraterie numérique ». En effet, aucune matière n’est physiquement transférée depuis une communauté comme c’est le cas dans la biopiraterie « traditionnelle ». Une fois séquencé, l’ADN d’un organisme peut être numérisé, chargé sur Internet et synthétisé ailleurs dans un labora-toire. Cette démarche permet de contourner la nécessité d’un accord de transfert de matériel (ATM), généralement utilisé pour réglementer le transfert de matériel de recherche tangible entre deux institutions. Les entreprises peuvent ensuite breveter ces séquences d’ADN sous la forme d’inventions (Friends of the Earth, 2011). Cette approche pourrait également être utilisée pour contourner la nécessité d’un consentement préalable en connaissance de cause (PIC) et de termes mutuellement convenus (MAT), utilisés pour réglementer l’accès et l’utilisation des ressources génétiques et de leurs connaissances tradi-tionnelles associées au sens de la Convention des Nations unies sur la diversité biologique et du Protocole de Nagoya.

Page 20: Stévia - une douceur au goût amer

STÉVIA – UNE DOUCEUR AU GOÛT AMER Mars 2016 // 20

LA CONVENTION DES NATIONS UNIES SUR LA DIVERSITÉ BIOLOGIQUE ET LA BIOLOGIE DE SYNTHÈSE

Dans le cadre de leur onzième réunion (COP11 en 2012), les

parties de la Convention sur la diversité biologique ont

noté, en se basant sur le principe de précaution, la nécessité

de considérer les impacts positifs et négatifs possibles des

composants, des organismes et des produits résultant

des techniques de biologie de synthèse sur la conservation

et l’utilisation durable de la biodiversité (CBD, 2012). Cette

recommandation a été renouvelée lors de la COP12 en

2014 avec la décision suivante, conçue pour éviter les effets

négatifs possibles de l’utilisation de la biologie de synthèse :

« La Conférence des parties … exhorte les Parties et invite

les autres gouvernements à adopter une approche de

précaution… [et]… (d) à réaliser une évaluation scientifique

des organismes, composants et produits issus des tech-

niques de biologie synthétique sur leurs effets potentiels

sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité,

en tenant compte des risques pour la santé humaine

ainsi que des conséquences socio-économiques possibles,

dont la sécurité alimentaire et, selon qu’il convient,

avec la pleine participation des communautés autochtones

et locales, conformément à la législation nationale et/ou

régionale ; (e) à encourager le financement de la recherche

sur les méthodes d’évaluation des risques de la biologie

synthétique, ainsi que ses effets positifs et négatifs

sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité

biologique, et promouvoir la recherche interdisciplinaire qui

prend en compte les considérations socio-économiques

connexes » (CBD, 2014).

Des démarches sont donc en cours pour l’application

du principe de précaution à la biologie de synthèse. Des

considérations socio-économiques sont également

mentionnées, ainsi que la participation des communautés

autochtones et locales (mais notez la formulation selon

qu’il convient).

Page 21: Stévia - une douceur au goût amer

STÉVIA – UNE DOUCEUR AU GOÛT AMER Mars 2016 // 21

Dans de nombreux pays, les variétés de plantes sont protégées par des certificats d’obtention végétale (forme spécifique de propriété intellectuelle pour les variétés de plantes). En outre, dans de nombreuses juridictions, il est possible de déposer des brevets pour protéger la propriété intellectuelle sur des plantes, des variétés de plantes, des produits ou des processus.

5.1 CERTIFICATS D’OBTENTION VÉGÉTALE SUR LES DIFFÉRENTES VARIÉTÉS DE STÉVIA

La base de données de l’Union internationale pour la pro-tection des obtentions végétales (UPOV) montre que quelque 40 demandes mondiales de certificats d’obtention végétale (31) ou de brevets relatifs à des plantes (9) ont été déposées dans le monde concernant la stévia (UPOV, 2015).10

Des demandes de certificats d’obtention végétale ont été apparemment déposées pour dix variétés de stévia au Para-guay – une par l’Institut paraguayen pour la technologie agricole (IPTA) (ex-ministère de l’Agriculture paraguayen), une par la société « 3com Products », une par la coopérative agricole « Tabacalera Misiones » et sept par la société Pure Circle Company. Selon le témoignage oral reçu par les res-ponsables officiels du Service national paraguayen pour la

qualité et la santé des plantes et des semences en août 2015, ces demandes ont selon toute vraisemblance été accordées.

5.2 BREVETS RELATIFS À LA STÉVIA/AUX GLYCOSIDES DE STÉVIOL

Stevia rebaudiana et ses produits dérivés édulcorants – les glycosides de stéviol – font l’objet d’une intense activité en matière de brevets. Plus de 1000 demandes de brevets concernant la stévia avaient été déposées à la fin de l’année 2014. Si l’essentiel des demandes de brevet ont été déposées en Chine et au Japon, aucune ne l’a été au Paraguay, pays d’origine de la plante. Parmi ces 1000 brevets, près de 450, qui représentent 158 familles de brevets, concernent spéci-fiquement les glycosides de stéviol.11

Source : Lens, 2015

La première demande de brevet identifiable a été déposée en 1973 aux États-Unis pour un procédé de production de stéviosides (US 3723410 A13). Avec le lancement de la commercialisation des glycosides de stéviol au Japon, une augmentation des brevets publiés a été constatée autour

5 PROTECTION DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE ET MARKETING

CULTURE DE « VARIÉTÉS PROPRIÉTAIRES » DESTÉVIA AU PARAGUAY PAR PURE CIRCLE

Basée aux Bermudes et possédant un siège en Malaisie,

PureCircle est cotée à la bourse de Londres. Elle est

le second fournisseur après Cargill pour les glycosides de

stéviol auprès de Coca-Cola. L’entreprise travaille avec

des producteurs au Paraguay, au Kenya et en Chine, en

veillant à ce qu’ils utilisent des variétés de plantes dont elle

possède les droits. Elle indique qu’elle diversifie ses

sources de feuilles de stévia du fait de la demande crois-

sante des consommateurs et de l’augmentation des

coûts de production en Chine (Nikkei Asian Review, 2015).

10 Il est possible que certaines variétés soient identiques, mais protégées dans différents pays.11 Il est possible que certains brevets relatifs à cette étude n’incluent pas les processus de production de glycosides de stéviol, mais la simple utilisa-

tion de ces glycosides. Les données sont basées sur l’apparition du terme « glycosides de stéviol » dans les résumés de brevets sur le site Lens.org (consulté le 22 juillet 2015).

12 Terme recherché : « glycosides de stéviol » dans les résumés.13 US 3723410 A: Method of producing Stevioside – www.google.com/patents/US3723410

100

75

50

25

0

1982

1986

1990

1996

1998

2000

2002

2006

2008

2010

2012

2014

NOMBRE ANNUEL DE DEMANDES DE BREVETS DÉPOSÉES CONCERNANT LES GLYCOSIDES DE STÉVIOL ENTRE LE 1ER JANVIER 1979 ET LE 31 DÉCEMBRE 201412

Page 22: Stévia - une douceur au goût amer

STÉVIA – UNE DOUCEUR AU GOÛT AMER Mars 2016 // 22

de 1976. Dans l’Union européenne et aux États-Unis, le nombre de demandes de brevets pour les glycosides de stéviol n’a commencé à augmenter qu’après l’évaluation de la sécurité des glycosides de stéviol réalisée par le comité JECFA en 2008 (voir le chapitre ci-dessus relatif au comité JECFA).

Il est intéressant de noter qu’en Amérique du Sud, seuls trois brevets ont été publiés : un en Argentine (Sunto-ry Holdings Ltd), un au Brésil (PepsiCo) et un au Chili (Co-ca-Cola conjointement avec Pure Circle). De manière sur-prenante, aucun brevet n’a été déposé au Paraguay.

Source : Espacenet, 2013 – Office européen des brevets

L’analyse des informations à partir des données accessibles sur Espacenet indique également un nombre croissant de brevets portant sur la production de glycosides de stéviol plutôt que sur leur utilisation. Nous constatons de plus, parmi ces brevets, l’augmentation du pourcentage corres-pondant à la production de glycosides de stéviol par modi-fication génétique ou par biologie de synthèse. Cette ap-proche semble appelée à devenir, au cours des années qui viennent, la principale technique de production.

Source : Lens, 2015

L’analyse montre également que les huit entreprises ayant déposé l’essentiel des demandes de brevet l’ont fait pour 46 % des 158 familles de brevets. Ces entreprises sont Pure Circle, Pepsi Co, Coca-Cola, DMS, Evolva Sa, McNeil Nu-tritionals LLC, Suntory Holdings et Cargill (Lens, 2015). Grâce à leurs brevets, ces entreprises pourront contrôler le marché des glycosides de stéviol. Les 54 % restants prove-naient de différentes entreprises plus modestes, en parti-culier dans les pays asiatiques comme le Japon, la Chine et la Corée du Sud. L’essentiel des demandes de brevet des grandes entreprises multinationales concernent davantage les procédés de production que l’utilisation des glyco-sides. Il n’est pas surprenant qu’Evolva et DSM appa-raissent dans cette liste puisqu’elles envisagent de lancer à court terme leurs glycosides de stéviol produits par des technologies de synthèse (voir le chapitre relatif à la biolo-gie de synthèse).

Ce sont PepsiCo, McNeil Nutritionals et Cargill qui ont déposé le plus grand nombre de brevets relatifs à l’utilisa-tion des glycosides de stéviol, bien que le rythme des de-mandes ait diminué depuis 2008. Selon toute vraisem-blance, Cargill attend le lancement des glycosides de stéviol d’Evolva, qui seront utilisés pour l’édulcorant Eversweet de Cargill, ce qui pourrait conduire à de nouvelles demandes de brevets pour l’utilisation des produits.

5.3 COMMERCIALISATION DES GLYCOSIDES DE STÉVIOL COMME « PRODUITS NATURELS » ET « ISSUS DES CONNAISSANCES TRADITIONNELLES »

Même si la vente des feuilles de stévia est interdite aux États-Unis ou dans l’Union européenne et que les glycosides de stéviol sont significativement différents des feuilles de stévia, les grandes entreprises comme Coca-Cola jouent de plus en plus sur les avantages prêtés à la plante dans son état naturel, et même sur les connaissances traditionnelles des Guaranis.

14 Inclut des brevets relatifs au processus de production de glycosides de stéviol et à leur utilisation.

300

250

200

150

100

50

0

DOMAINE D’APPLICATION DES DEMANDES DEBREVETS CONCERNANT LA STÉVIA / LES GLYCOSIDES DE STÉVIOL

Ap

plic

atio

ns

alim

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Pro

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9621

5

4741 39

11 14 2

50

82

1 10 14

39

2009–2013

1998–2008

1988–1997

1973–1987

Nombre total de demandes de brevets

258

74 68

23 2527

62

13 15

103

0 5 10 15 20 25 30 35

Pure Circle

Pepsi Co

Coca-Cola

DSM

Evolva Sa

McNeil

Nutritionals LLCSuntory Holdings

Cargill

5

5

6

6

3

3

12

NOMBRE DE FAMILLES DE BREVETS RELATIVES AUX GLYCOSIDES DE STÉVIOL PAR DEMANDEUR14

33

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STÉVIA – UNE DOUCEUR AU GOÛT AMER Mars 2016 // 23

Le Paraguay et le peuple guarani autochtone, origine et dé-tenteurs des connaissances traditionnelles sur les effets édulcorants de la plante stévia, ne tirent aucun profit de leurs connaissances et ne reçoivent pas la part juste et équitable des avantages qui leur est due en vertu de la Convention sur la diversité biologique et du Protocole de Nagoya. Pepsi et Coca-Cola ont toutes deux lancé des sodas contenant des glycosides de stéviol, « Pepsi Next » et « Coca-Cola Life ». « Pepsi Next » a été lancé en 2012 aux États-Unis et en Australie (Herbison, 2015). « Coca-Cola Life » a été pour sa part lancé comme produit pilote par Coca-Cola Company, d’abord en Argentine et au Chili en

2013, puis aux États-Unis et au Royaume-Uni en 2014, et enfin, dans d’autres pays européens, dont la Suisse et l’Allemagne, en 2015.

L’industrie tend à suggérer que les feuilles de stévia et les glycosides de stéviol sont une seule et même chose, car les additifs alimentaires ont généralement une image négative, alors que la plante stévia et le concept d’utiliser des plantes dans leur état naturel est bien perçu par des consommateurs soucieux de leur san-té. « Pepsi Next » a même utilisé l’expression « Stevia Leaf Extract » (extrait de feuille de stévia), ce qui est tout à fait mensonger, compte tenu des différences entre la

COCA-COLA ET LA STÉVIA COMMERCIALISATION DES GLYCOSIDES DE STÉVIOLEN AUTRICHE, EN ALLEMAGNE ET EN SUISSE

Au Royaume-Uni, Coca-Cola dit de la stévia qu’« elle est cultivée, récoltée et utilisée par les peuples autochtones depuis des siècles » (Davies, 2015).

Coca-Cola Allemagne présente même un « entretien » avec une plante de stévia sur son site web (voir page 22) : « Les Guaranis utilisent mes feuilles pour leur maté et comme médicament, par exemple, contre les maux d’esto-mac et les problèmes de digestion, mais aussi les éruptions cutanées, les inflammations dentaires, et pour réduire la pression sanguine. Je suis également utilisée au Paraguay pour sucrer le thé et pour la production de friandises. Car nous, Paraguayens, nous adorons le goût sucré ! Nous vivons en harmonie avec la nature et nous n’avons pas à nous cacher. Ce qui explique peut-être pourquoi nous nous considérons nous-mêmes, selon les sondages, comme le peuple le plus heureux de la planète » (Coca-Cola GE, 2015 ; publicité pour Coca-Cola Life, traduite de l’allemand).

Coca-Cola Company et la Fédération Internationale de Football Association (FIFA) ont également utilisé des images de Guaranis pour promouvoir les boissons Coca-Cola au cours de la coupe du monde 2014 au Brésil (voir page 22).

Il est particulièrement tragique de noter le cynisme de ces campagnes marketing alors que, selon d’autres sources, les Guaranis font face au taux de suicide le plus élevé du monde, vivent souvent dans la misère suite à la perte de leurs moyens de subsistance, de leurs villages et de leurs terres pour l’élevage du bétail et les plantations de soja et de canne à sucre. Le cas de Jatyavary est absurde, mais probablement pas unique : « Ce territoire a été pris aux Guaranis, puis utilisé pour cultiver la canne à sucre pour Bunge, géant du négoce de matières premières agricoles, et important fournisseur de sucre pour Coca-Cola Company. L’ensemble de la main-d’œuvre nécessaire au secteur du sucre dans le Mato Grosso do Sul est constituée de Guaranis. Les conditions de travail sont extrêmement précaires, et de nombreux rapports publiés au cours des dernières années font état de conditions de travail quasiment esclavagistes (voir chapitre 2).

Au cours de l’été 2013, l’université de Hohenheim en Allemagne a entrepris une étude de marché pour analyser de quelle manière les entreprises lançaient et commercialisaient les produits contenant des glycosides de stéviol en Autriche, en Allemagne et en Suisse.

L’étude a identifié au total 82 entreprises fabriquant des produits contenant des glycosides de stéviol pour les commercialiser dans les supermarchés (l’étude ne concernait pas les entreprises commercialisant les produits exclusive-ment via Internet). Toutes ces entreprises utilisaient le terme « stévia » pour promouvoir l’effet édulcorant de l’additif alimentaire glycoside de stéviol (E960) et la moitié d’entre elles liaient les produits à un savoir traditionnel dans leurs étiquetages ou leurs publicités.

Près de 41 % des entreprises employaient l’expression « utilisé depuis des siècles… » pour susciter chez le consom-mateur la confiance dans la sécurité du produit. Près de 34 % mentionnaient que la stévia provient d’Amérique du Sud, et 33 % mentionnaient qu’elle provient du Paraguay. Près de 17 % d’entre elles mentionnaient que la stévia était utilisée par les « autochtones » ou les « Indiens » et 11 % faisaient le lien entre la stévia est les communautés guaranis comme détentrices du savoir-faire d’origine relatif à Stevia rebaudiana et ses propriétés édulcorantes. Certaines déclarations erronées ont été faites, comme par exemple la mention « utilisé/connu des Indiens d’Amazonie ».

Dans une autre étude de marché réalisée en Allemagne en juillet 2015, il ressort que des étiquetages mensongers continuent d’apparaître sur 88 % des produits proposés aux consommateurs. En outre, 7 % des produits ne sont pas du tout conformes aux lois de l’Union européenne relatives aux produits alimentaires. Seuls 5 % des produits étaient correctement étiquetés. Il semble que les entreprises qui utilisent les glycosides de stéviol ne souhaitent pas appliquer correctement les lois de l’Union européenne relatives à l’alimentation.

Page 24: Stévia - une douceur au goût amer

STÉVIA – UNE DOUCEUR AU GOÛT AMER Mars 2016 // 24

plante stévia et les glycosides de stéviol obtenus par pu-rification chimique.

Les nouvelles boissons font l’objet de promotions as-sorties de slogans mentionnant des « arômes naturels », des « édulcorants issus de sources naturelles », des « extraits provenant d’une source naturelle » ou un produit « natu-rellement édulcoré » (Coca-Cola GB, 2014 ; PepsiCo CA, 2014). De nombreuses initiatives ont été menées pour mettre en valeur le nouvel aspect « naturel » de ces bois-sons. En outre, la couleur et le design des emballages des deux produits suggèrent qu’ils sont sains et écologiques.

Coca-Cola Life est également commercialisé comme un moyen de remédier à l’obésité et d’aider les consom-mateurs à adopter un mode de vie équilibré. Au Royaume-Uni, par exemple, Coca-Cola a signé avec le gouverne-ment un accord de responsabilisation (Responsibility Deal) controversé, dont l’objectif est d’améliorer la santé publique, en s’engageant à réduire l’apport calorique moyen des produits (The Guardian, 2014). Cependant, même si Coca-Cola Life possède un pouvoir calorique et une quantité de sucre de 36 % inférieurs au Coca-Cola standard, il contient tout de même l’équivalent de plus de quatre cuillères à café (total de 22 g) de sucre par ca-nette de 330 ml, ce qui constitue 25 % de la dose journa-lière maximale pour un enfant (The Guardian, 2014 ; Daily Mail, 2014). Pour sa part, Pepsi Next, qui a rempla-cé 30 % du sucre par des glycosides de stéviol, possède une teneur en sucre encore plus élevée (26 g par canette de 335 ml) (PepsiCo CA, 2014).

Source: Breitenstein et al., 2013

Parmi d’autres exemples figure Cavelier, chocolatier belge, qui affiche la mention « contenant des édulcorants issus d’une source naturelle, la stévia » sur fond vert. En réalité, ce chocolat utilise des sucres provenant d’additifs alimen-

taires contenant des glycosides de stéviol et de l’érythritol, mais aussi de l’oligofructose (Cavelier, 2014).

Autre exemple, Assugrin Stevia Sweet Crystal, qui uti-lise des illustrations de feuilles de stévia sur ses embal-lages et dans ses publicités, même si ses produits contiennent des édulcorants associant les glycosides de stéviol et l’érythritol. Cependant, le rapport de concentra-tion entre les glycosides de stéviol et l’érythritol est de un pour 50. L’érythritol est un substitut du sucre, produit par la fermentation effectuée par des cellules de levures et ne peut pas être métabolisé par le corps humain. Le marketing de ce produit est donc délibérément mensonger. Le choco-latier suisse Bernrain commercialise même un « chocolat stévia », dont les emballages sont illustrés de feuilles de stévia et portent la mention « extraits de stévia » en grands caractères. Ici encore, le produit contient des édulcorants constitués de glycosides de stéviol.

Le 2 juillet 2015, la Déclaration de Berne a interrogé Co-ca-Cola et PepsiCo sur leur intention d’utiliser dans le futur les glycosides de stéviol de synthèse dans leurs aliments et leurs boissons, et si tel était le cas, s’ils modifieraient les mentions sur les emballages et dans les publicités, ainsi que leur stratégie de communication. PepsiCo n’a pas don-né suite, et Coca-Cola a répondu de la manière suivante :

« Pour des motifs d’ordre commercial et de confidentiali-té, notre entreprise ne fait aucun commentaire (ni confir-mation ni démenti) concernant ce type de question. »

« Concernant la réponse ci-dessus, Coca-Cola Company n’a aucun commentaire à ajouter, à l’exception du fait que l’entreprise est en conformité avec l’ensemble des exi-gences d’étiquetage locales concernées. »

Après la présentation par Cargill, en octobre 2015, de son édulcorant Eversweet qui utilise la fermentation et la bio-logie de synthèse, Neil Goldsmith, PDG d’Evolva, a égale-ment refusé de répondre à la question de savoir si Cargill avait, dans le futur, l’intention d’utiliser les glycosides de stéviol obtenus par biologie de synthèse de Cargill (c’est-à-dire le produit Evolva) dans ses boissons (Grundlehner, 2015).

5.4 RESTRICTIONS RELATIVES À LA PUBLICITÉ

Cette publicité mensongère a déjà été signalée dans un certain nombre de pays, et de nombreux gouvernements ont établi des réglementations destinées à empêcher ce type de supercherie.

En Suisse, par exemple, il est interdit de déclarer comme « naturels » les glycosides de stéviol ou d’utiliser des illus-trations représentant des feuilles de stévia. Des expressions comme « contenant des extraits de stévia », « sucré avec de la stévia » ou « les glycosides de stéviol sont présents de manière naturelle dans les feuilles de stévia » sont égale-ment interdites. Le mot « stévia » ne peut être utilisé que

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ARGUMENTS MARKETING POUR LES ALIMENTS ET LES BOISSONS SUCRÉES AVEC DES GLYCOSIDESDE STÉVIOL SE RÉFÉRANT À L’ORIGINE ET AUXCONNAISSANCES TRADITIONNELLES

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dans les publicités utilisant clairement des expressions analogues à celle-ci : « les glycosides de stéviol sont pro-duits à partir des feuilles de stévia ». Il est également inter-dit d’utiliser l’expression « connu des peuples autochtones depuis des siècles », puisque ces peuples utilisaient la plante stévia, et non les glycosides de stéviol (BAG, 2010).

L’Autriche a également publié des recommandations précisant comment étiqueter correctement des produits contenant des glycosides de stéviol. Ces recommandations sont plus générales que la réglementation suisse. Des ex-pressions telles que « glycosides de stéviol issus d’une source végétale », « glycosides de stéviol dérivés de compo-sants végétaux issus de la stévia ou de plants de stévia » ou « glycosides de stéviol dérivés d’une source naturelle » sont

autorisées, mais les expressions comme « goût sucré issu d’une source naturelle » sont interdites. De même, les men-tions « édulcoré de manière naturelle » et« extrait de stévia » ainsi que les représentations visuelles ou les symboles re-présentant des plants de stévia sont considérés comme mensongers. Les images ne sont autorisées que si des infor-mations relatives à l’additif alimentaire E960, constitué de glycosides de stéviol, sont mentionnées à proximité et avec une visibilité comparable à ces symboles (BMG, 2012).

En Allemagne, tout étiquetage mettant en avant le carac-tère naturel des glycosides de stéviol est interdit. En effet, l’additif peut contenir des résidus de résines d’échange d’ions utilisées lors de la fabrication. En outre, des nou-veaux glycosides de stéviol, qui n’existent pas dans la

Les produits sont fréquemment de couleur verte, ce qui suggère qu’ils contiennent des ingrédients contenant de la stévia « naturelle ». Cependant, tous les produits contiennent des glycosides de stéviol chimiquement ou physiquement purifiés. Certains d’entre eux (le chocolat Cavelier et les produits Assugrin) utilisent même des édulcorants artificiels tels que l’érythritol. © K. Hutter

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plante à l’état naturel, résultent de la fabrication, sous la forme de sous-produits (ALS, 2013 ; EU, 2012).

En Allemagne, le débat relatif à la véracité des publici-tés des glycosides de stéviol s’est en fait ouvert en 2013 avec une action en justice. En avril 2013, le tribunal de grande instance de Constance a décidé que l’étiquetage d’une boisson contenant des glycosides de stéviol avec les mentions « steevia-fluid » et « feuilles de stévia » et illus-trant le produit d’une feuille de stévia était mensonger (Az : 7 O 32/12 KfH). Cependant, en octobre 2013, la plus haute instance juridique de Karlsruhe a décidé que l’essentiel des ordonnances de cessation et d’abstention prononcées par le tribunal de grande instance de Constance n’étaient pas va-lables. Ces déclarations ont ensuite été considérées comme valables s’il existait par ailleurs une mention indiquant que le produit contenait des glycosides de stéviol ou l’additif alimentaire E960. L’expression « feuilles de stévia » a été également acceptée en considérant que les glycosides de stéviol sont produits à partir des feuilles de stévia. Seule l’expression « extrait de stévia » a été jugée comme non va-lable. Le défendeur a ensuite signé une déclaration de ces-sation et d’abstention (OLG Karlsruhe, 2013).

En 2013, le groupe de travail d’experts en chimie ali-mentaire des États fédérés et de l’Office fédéral allemand (ALS) a publié une décision indiquant que les représenta-tions figuratives de plants ou de feuilles de stévia étaient considérées comme trompeuses si l’étiquetage n’était pas accompagné d’une déclaration précisant que l’effet édulco-rant est obtenu à partir de l’additif alimentaire glycoside de stéviol. Cette déclaration doit être placée à proximité de l’illustration, de façon à être tout aussi visible (ALS, 2013).

De manière similaire, une action civile menée aux États-Unis contre Cargill a conclu que l’édulcorant de table Truvia a été commercialisé de façon trompeuse comme « naturel » alors qu’il contient des glycosides de stéviol transformés de manière massivement chimique :

« Selon la plaignante Denise Howerton, si le Reb-A est ob-tenu à partir d’une source naturelle (la feuille de stévia), les procédés d’extraction et de transformation conduisent un consommateur raisonnable à ne plus le considérer comme un produit « naturel ». […] Elle estime qu’un consommateur raisonnable considère qu’un produit natu-rel ne contient aucun ingrédient de synthèse artificiel, ne fait pas l’objet de processus chimiques agressifs et ne su-bit que des transformations minimales. » (Watson, 2014).

Fin 2014, Cargill a accepté un règlement et a donné son accord pour la constitution d’un fonds de 6,1 millions de dollars de dommages sous forme de remboursements en numéraires ou de bons d’achat pour les consommateurs qui avaient acheté le produit Truvia. L’entreprise a égale-ment accepté de modifier l’étiquetage et les mentions com-merciales du produit (Gmuer, 2015 ; Watson, 2014). Pour son nouvel édulcorant, Eversweet, produit par biologie de synthèse et lancé d’ici à 2016, Cargill ne sera pas autorisée à utiliser la mention « naturel » sur son emballage (Grund-lehner, 2015).

En outre, une réclamation déposée auprès de l’Adverti-sing Standards Authority au Royaume-Uni a également conduit au retrait par British Sugar d’une publicité pour le produit Truvia au Royaume-Uni (Michail, 2015).

Publicités mensongères : une plante de stévia s’exprimant sur ses propriétés édulcorantes sur le site web de Coca-Cola Allemagne, un minibus Volkswagen couvert de feuilles de stévia suggérant le caractère « naturel » de la boisson Coca-Cola Life et un Guarani utilisé pour promouvoir les boissons Coca-Cola lors de la coupe du monde de la FIFA au Brésil en 2014. © Coca-Cola Deutschland | K. Steiner | Survival International

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6.1 LA STÉVIA, LA CONVENTION SUR LA DIVERSITÉ BIOLOGIQUE ET LE PROTOCOLE DE NAGOYA CON-CERNANT L’ACCÈS ET LE PARTAGE DES AVANTAGES

Les ressources génétiques sont cruciales pour assurer notre survie. Depuis des millénaires, les êtres humains développent et partagent des connaissances traditionnelles concernant la culture et l’usage des plantes et des animaux pour produire de la nourriture, des vêtements, des médicaments et bien d’autres objets utilitaires, culturels et spirituels. Cependant, cette connaissance est de plus en plus accaparée par les entreprises qui la commercialisent et en tirent profit. Aujourd’hui, les gouvernements reconnaissent – notamment au travers de la Convention des Nations unies sur la diversité biologique (CBD) et de son Protocole de Nagoya – que les détenteurs des savoirs traditionnels ont le droit de bénéficier des connaissan-ces qu’ils ont développées au cours des siècles.

Ce rapport, qui analyse une problématique spécifique rela-tive à l’accès et au partage des avantages – en relation avec les connaissances traditionnelles relatives à la stévia – dé-montre la nécessité pressante pour les gouvernements de combattre effectivement la biopiraterie en mettant en œuvre de manière optimale le Protocole de Nagoya au ni-veau national. Il devrait être impossible de réaliser des profits lorsque l’accès aux ressources génétiques ou aux connaissances traditionnelles a été obtenu de manière illé-gale et les avantages ne sont pas partagés.

Pour commencer, le Protocole de Nagoya n’a jusqu’ici été signé que par 92 États et n’a que 62 parties (à compa-rer à l’ensemble des 196 parties concernées par la Conven-tion). Ce qui crée une situation complexe, dont témoigne le cas de la stévia, car elle conduit à des situations juri-diques différentes selon les pays, et en particulier les pays d’origine.

Le périmètre d’application du Protocole de Nagoya sus-cite différentes opinions. Pour de nombreux pays en déve-loppement, il concerne toute nouvelle15 utilisation d’une ressource génétique. Mais pour la plupart des pays déve-loppés, le Protocole de Nagoya ne concerne que les res-sources génétiques pour lesquelles un accès a eu lieu dans le pays d’origine après l’entrée en vigueur du Protocole. Ce

qui réduit significativement dans les faits le périmètre d’application du Protocole.16

Les modalités d’application du mécanisme actuel de l’APA à l’utilisation spécifique de Stevia rebaudiana (Ber-toni) constituent par ailleurs une question complexe. Tout d’abord, il existe plusieurs pays d’origine et de nombreux pays utilisateurs, mais la situation juridique diffère pour chacun d’eux (CBD, 2015a ; CBD, 2015b) :

• Le Paraguay a à la fois signé et ratifié la CBD, mais ne l’a pas encore traduite dans son droit national. Toutefois, il n’a ni signé ni ratifié le Protocole de Nagoya.

• Le Brésil, autre pays d’origine, a signé et ratifié la CBD et a mis en place une réglementation nationale précise concernant l’accès et le partage des avantages. Il a égale-ment signé le Protocole de Nagoya, mais sans l’avoir ra-tifié jusqu’ici.

• Les États-Unis, principaux utilisateurs des glycosides de stéviol, ont signé la CBD, mais sans la ratifier, et n’ont ni signé ni ratifié le Protocole de Nagoya.

• L’Union européenne et la Suisse ont signé et ratifié à la fois la CBD et le Protocole de Nagoya.

Paraguay Brésil États-Unis

Union euro-

péenneSuisse

CBD ratifiée 5 5 5 5

Loi APA mise en place 5 5 5

Nagoya signé 5 5 5

Nagoya ratifié 5 5

Les principes de la CBD et du Protocole de Nagoya sont clairs. Les Guaranis ont le droit de définir l’accès à leurs connaissances traditionnelles et de bénéficier des avantages résultant d’une commercialisation. Mais étant donné les in-terprétations limitées et étroites du Protocole de Nagoya et

6 LA STÉVIA ET LES RÈGLES RELATIVES À L‘ACCÈS ET AU PARTAGE DES AVANTAGES

15 « Nouvelle » signifie ayant commencé au moment où la réglementation APA nationale est entrée en vigueur.16 Pour une analyse plus détaillée de la réglementation européenne et des différences concernant les lois des pays en développement, voir : Natural

Justice and Berne Declaration, 2013.

SITUATION CONCERNANT LA RÉGLEMENTATION RELATIVE À L’ACCÈS ET AU PARTAGE DES AVANTAGES DANS DIFFÉRENTS PAYS

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les différents degrés de sa mise en œuvre au niveau national, il semble aujourd’hui difficile d’imposer juridiquement une demande de partage des avantages concernant la stévia dans les pays utilisateurs – en particulier lorsque les pays d’ori-gine eux-mêmes n’ont pas ratifié le Protocole de Nagoya.

Cependant, il est important de noter qu’il y a des précé-dents pour la résolution de ce type de problème, comme le démontre une situation rencontrée en Afrique du Sud, qui concerne Cargill, acteur clé du secteur de la stévia. Deux communautés Limpopo devraient recevoir la somme de 2,6 millions de rands sud-africains (environ 187 000 euros)

pour leur contribution au développement d’un édulcorant non glucidique basé sur une plante locale appelée Molomo monate (Schlerochiton ilicifolius). Le Conseil sud-africain pour la recherche scientifique et industrielle a signé en 2004 un contrat de licence avec la multinationale Cargill et a reçu des paiements échelonnés en 2004, 2006 et 2013, qui peuvent être aujourd’hui partagés avec les différentes communautés identifiées (News24, 2015). Dans le cas de la stévia, un processus similaire pourrait être appliqué aux détenteurs des connaissances traditionnelles. Cependant, le partage des avantages pourrait prendre différentes

17 Sources : « An Activists’ Guide to the Convention on Biological Diversity » (Hall, 2014) et texte du Protocole de Nagoya (CBD, 2015).18 L’article 2 de la CBD définit la biotechnologie de la manière suivante : la « biotechnologie » s’entend de toute application technologique qui utilise des

systèmes biologiques, des organismes vivants ou des dérivés de ceux-ci pour réaliser ou modifier des produits ou des procédés à usage spécifique.

LA CONVENTION SUR LA DIVERSITÉ BIOLOGIQUE (CBD) ET LE PROTOCOLE DE NAGOYA CONCERNANT L’ACCÈS ET LE PARTAGE DES AVANTAGES (APA)17

La Convention sur la diversité biologique (CBD) est entrée en vigueur en 1993. Cette convention accorde à chaque État des droits souverains sur ses ressources génétiques et a pour objectif de stopper la biopiraterie. La plupart des États (195 pays et l’Union européenne) sont parties de la CBD, mais les États-Unis, le Saint-Siège et la Corée du Nord ne le sont pas. La CBD contient des obligations claires pour les parties de mettre en œuvre des lois relatives à l’accès et au partage des avantages (APA) : en effet, l’application des principes de l’APA constitue l’un des trois objectifs de la CBD. Cependant, l’application de la Convention étant insuffisante, des négociations au sujet d’un autre instrument relevant de la CBD ont été conduites pendant plusieurs années.

Ces négociations ont abouti au Protocole de Nagoya sur l’accès aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation (en bref, le Protocole de Nagoya), qui a été adopté en 2010 et est entré en vigueur en octobre 2014.

Le Protocole de Nagoya est supposé répondre à l’épineuse question de comment assurer le partage juste et équitable des avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques et des connaissances traditionnelles associées. En d’autres termes, pour beaucoup l’attente était qu’il permettrait d’éviter la biopiraterie – c’est-à-dire l’utilisation à des fins commerciales des ressources génétiques et des connaissances traditionnelles associées, sans le consente-ment préalable en connaissance de cause des peuples et des pays qui sont les détenteurs légitimes de cette biodiversité.

Bien que le Protocole de Nagoya ait pour finalité d’établir un cadre clair, transparent et juridiquement contraignant (Europa, 2015), le résultat obtenu est en fait bien plus vague qu’initialement prévu. Premièrement, parce que le Protocole de Nagoya lui-même comporte certaines ambiguïtés (qui ont été considérées comme intentionnelles [Union for Ethical Biotrade, 2010]), et en second lieu parce que le Protocole de Nagoya est interprété de manière différente selon les parties concernées (Déclaration de Berne, 2013 ; Déclaration de

Berne, 2013a). « Dans les faits, le système international des brevets, et plus particulièrement la protection des variétés de plantes, a un impact plus important sur la gestion des ressources génétiques que la CBD, et décide dans les faits de leur sort. » (GIZ, 2008). La mise en œuvre d’une législation nationale efficace et complète pour mettre en œuvre l’APA, comme le prévoit le développement du Protocole de Nagoya, demeure une priorité absolue :

« Conformément à son droit interne, chaque partie prend, selon qu’il convient, les mesures appropriées pour faire en sorte que l’accès aux connaissances traditionnelles asso-ciées aux ressources génétiques détenues par les commu-nautés autochtones et locales soit soumis au consentement préalable, donné en connaissance de cause, ou à l’accord et à la participation de ces communautés autochtones et locales, et que des conditions convenues d’un commun accord soient établies. » (Protocole de Nagoya, article 7).

« Chaque partie prend les mesures législatives, administra-tives ou de politique générale, selon qu’il convient, afin que les avantages découlant de l’utilisation des connais-sances traditionnelles associées aux ressources génétiques soient partagés de manière juste et équitable avec les communautés autochtones et locales détentrices de ces connaissances. Ce partage s’effectue selon des conditions convenues d’un commun accord. » (Protocole de Nagoya, article 5.5).

Il est également important de noter que le Protocole de Nagoya définit l’« utilisation des ressources génétiques » dans son article 2 par « les activités de recherche et de développement sur la composition génétique et/ou biochimique de ressources génétiques, notamment par l’application de la biotechnologie, conformément à la définition fournie à l’article 2 de la Convention18 […] ». Cette précision semble exclure l’utilisation directe des feuilles de stévia comme édulcorant, mais concerne les glycosides de stéviol produits par les processus d’extraction ou la biologie de synthèse.

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formes selon les demandes et les besoins des Guaranis. Il semble évident que, dans le cas présent, les Guaranis qui vivent dans la région d’origine (les montagnes de la région d’Amambay au nord-est du Paraguay et la région fronta-lière du Brésil) devraient être les premiers concernés. En outre, il est crucial que ces Guaranis puissent déterminer leurs intérêts et exigences dans le cadre d’une négociation appropriée et équitable.

6.2 AUTRES ACCORDS ET DIRECTIVES INTERGOUVERNEMENTAUX

Concernant la stévia, il existe d’autres accords et direc-tives intergouvernementaux s’appliquant à l’accès et au partage des avantages.

Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones (UNDRIP)La déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones (UNDRIP), adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies en 2007, est également tout à fait perti-nente, puisqu’elle concerne les droits des peuples autoch-tones relatifs à leurs territoires et à leurs connaissances traditionnelles.

La déclaration UNDRIP stipule sans équivoque que « les peuples autochtones ont le droit de préserver, de contrôler, de protéger et de développer leur patrimoine culturel, leur savoir traditionnel et leurs expressions culturelles tradition-nelles, ainsi que les manifestations de leurs sciences, tech-niques et culture, y compris leurs ressources humaines et génétiques, leurs semences, leur pharmacopée, leur connais-sance des propriétés de la faune et de la flore, leurs traditions orales, leur littérature, leur esthétique, leur sport et leurs jeux traditionnels et leurs arts visuels et du spectacle. Ils ont également le droit de préserver, de contrôler, de protéger et de développer leur propriété intellectuelle collective de ce patrimoine culturel, de ce savoir traditionnel et de ces ex-pressions culturelles traditionnelles. » (Article 31.1).

Il est important de noter la position de l’International Law Association à propos du statut légal de la déclaration UNDRIP : « Point essentiel, […] l’adoption de la déclara-tion UNDRIP, après plus de vingt ans de négociations, confirme que la communauté internationale est parvenue à un consensus reconnaissant que les peuples autochtones constituent une question du droit international. Ce qui se traduit par l’existence de règles coutumières dont l’appli-cation est contraignante pour les États, indépendamment du fait qu’ils aient ou non ratifié les traités concernés (qui, pour leur part et considérés dans leur ensemble, engagent tous les pays du monde). » (ILA, 2010). Ce principe vient appuyer la question de l’accès et du partage des avantages concernant le peuple guarani et la stévia.

Traité international de la FAO sur les ressources phyto-génétiques pour l‘alimentation et l‘agriculture (TIRPGAA)Le traité TIRPGAA concerne également la biodiversité, en se focalisant sur la biodiversité agricole, les droits des pe-tits agriculteurs et des peuples autochtones qui en sont les garants, et l’accès et le partage des avantages (GIZ, 2008). Les droits des agriculteurs doivent être mis en œuvre au travers des lois nationales, ce qui est effectué de différentes manières par les parties concernées. Par ailleurs, les ques-tions relatives à l’accès et au partage des avantages sont traitées séparément dans le cadre des articles du traité concernant le système multilatéral (qui prennent effet à tra-vers l’Accord standard de transfert de matériel du traité).

Stevia rebaudiana ne fait pas actuellement partie de la liste des plantes cultivées entrant dans le champ d’applica-tion du système multilatéral d’accès et de partage des avan-tages du traité.19 Tant que cela reste le cas, l’accès et le par-tage des avantages concernant Stevia rebaudiana doivent être gérés dans le cadre de la CBD et du Protocole de Nagoya.

Guide de la FAO et de l’OCDE pour des chaînes d’approvisionnement agricoles responsables (en anglais – version préliminaire)Bien que le texte ne soit pas encore adopté, un guide pour des chaînes d’approvisionnement agricoles responsables (Guidance for Responsible Agricultural Supply Chains) est développé par la FAO et par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) (OCDE, 2015). Ce texte est destiné à aider les entreprises à appliquer des stan-dards pour la conduite responsable de leurs activités et à mener des audits préalables sur les chaînes d’approvisionne-ment agricoles, en particulier sur les « marchés émergents bénéficiant d’une gouvernance insuffisante et de droits sur les terres non sécurisés » (OCDE, 2015). Les principes en cours de définition concernent les secteurs en amont et en aval, depuis l’approvisionnement des matières premières jusqu’à la production, la manipulation après récolte, la transformation, le transport, le marketing, la distribution et la vente. Ils s’appliquent donc aux acteurs de la chaîne d’ap-provisionnement de la stévia, notamment Evolva, Cargill et Coca-Cola. Sa finalisation est prévue pour 2015.

Concernant l’accès et le partage des avantages, le texte préliminaire indique aujourd’hui que « nous devons veiller à ce que nos activités contribuent au développement rural pé-renne et inclusif, notamment, le cas échéant, en assurant la promotion d’un partage juste et équitable des avantages pour les communautés concernées, par exemple, lors de l’utilisa-tion de ressources génétiques dans l’alimentation et l’agri-culture. »20 (OCDE, 2015).

Cela a une implication certaine pour le partage des avantages dans le cadre d’une conduite responsable des ac-tivités, même, et tout particulièrement, en l’absence d’obli-gations légales.

19 Cette liste est accessible à l’adresse suivante : www.planttreaty.org/content/article-xiv20 Ce document de la FAO et de l’OCDE fait référence à plusieurs autres documents de recommandations, dans lesquels les principes du partage des

avantages ont également été entérinés, notamment Principles for Responsible Investment in Agriculture and Food Systems (CFS-RAI Principles) 2.iv-vii et 7.i et iii ; Principles for Responsible Agricultural Investment that Respects Rights, Livelihoods and Resources (PRAI Principles) 5-6 ; CBD Akwé: Kon Guidelines, 46 ; et IFC Performance Standard 7, par. 14 et 17-20 et Standard 8, par. 16.

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MESURES SPÉCIFIQUES CONCERNANT L’ACCÈS ET LE PARTAGE DES AVANTAGES MIS EN ŒUVRE POUR PROTÉGER LES RESSOURCES GÉNÉTIQUES ET LES CONNAISSANCES TRADITIONNELLES EN GÉNÉRAL OU LA PLANTE STEVIA REBAUDIANA EN PARTICULIER

PARAGUAY : en octobre 2006, le gouvernement du Paraguay a promulgué un décret (Decreto Nr. 8392) (MAG, 2006a) reconnaissant la plante Stevia rebaudiana (Bertoni)/Bertoni Ka’a He’e comme originaire du Paraguay. Il a aussi déclaré l’intérêt agricole de Stevia rebaudiana, avec pour objectif de diversifier la production. Dans son texte explicatif, le décret précise que Stevia rebaudiana a été placée dans la liste taxonomique de la flore endémique du Paraguay et qu’au niveau mondial, Stevia rebaudiana est toujours reliée au Paraguay. Le décret mentionne également que Stevia rebaudiana a été répertoriée dans la catégorie des espèces en danger critique d’extinction au Paraguay. En février 2013, le texte du décret a été transposé dans la loi (BACN, 2013). Bien que ce texte ne puisse pas être considéré, au sens strict, comme une loi relative à l’accès et au partage des avantages, il est évident en revanche que le Paraguay revendique la propriété de la plante. Il est extrêmement problématique, cependant, que les Guaranis, détenteurs autochtones des connaissances traditionnelles associées à Stevia rebaudiana, ne soient pas mentionnés une seule fois dans le décret ou dans la loi – montrant ainsi l’absence de reconnaissance des droits des peuples autochtones par le gouvernement national.

BRÉSIL : sachant que la Stevia rebaudiana provient de la région frontalière du Paraguay et du Brésil et que les Guaranis, détenteurs des connaissances traditionnelles, sont aussi très présents au Brésil, il est également pertinent d’évaluer la réglementation concernant l’accès et le partage des avantages au Brésil.

Le 20 mai 2015, la Présidente brésilienne Dilma Roussef a signé la nouvelle loi brésilienne relative à la biodiversité (Planalto, 2015). Dans le cadre de cette loi, toute entreprise utilisant des ressources génétiques ou des connaissances traditionnelles qui y sont associées, ou exploitant un produit qui en est dérivé (à la date du 30 juin 2000), a pour obligation de se conformer aux dispositions de cette loi (article 37). Les avantages résultant de l’exploitation économique d’un produit final ou d’un matériel de reproduction basé sur l’accès aux ressources génétiques d’espèces trouvées in situ, ou les connaissances traditionnelles qui y sont associées, doivent faire l’objet d’un partage juste et équitable, même si la plante a été cultivée et le produit fabriqué hors du pays (article 17). Le partage des avantages peut être financier ou non. Dans le cas où le partage des avantages est financier, il doit représenter 1 % du chiffre d’affaires annuel net généré par l’exploitation économique du produit final. Ce pourcen-tage peut être ramené à 0,1 % dans des cas particuliers (article 20). En outre, lorsque le produit final ou le matériel de reproduction résulte de l’accès à des connaissances tradition-nelles dont l’origine est identifiable, le fournisseur de ces connaissances traditionnelles est en droit de recevoir des avantages, qui font l’objet de négociations bilatérales entre la communauté (le détenteur des connaissances traditionnelles)

et l’entreprise (l’utilisateur) (article 24). Outre le partage des avantages convenu avec la communauté, l’utilisateur devra verser 0,5 % du chiffre d’affaires annuel net dans le fonds national de partage des avantages.

Dans la loi brésilienne, le terme « ressources génétiques » n’est pas utilisé, au profit du terme « patrimoine génétique ». Cette définition est un peu plus large que les simples res-sources génétiques. Le patrimoine génétique consiste en toute forme d’information résultant de ressources génétiques. Il peut également inclure l’utilisation d’informations géné-tiques sans pour autant avoir accès à la ressource génétique elle-même. L’une des motivations de cette définition était d’éviter le contournement des obligations relatives à l’accès et au partage des avantages en utilisant la biologie de synthèse.

La nouvelle loi brésilienne constitue un outil puissant pour revendiquer le partage des avantages liés à l’exploita-tion des ressources génétiques et des connaissances traditionnelles associées à partir du 30 juin 2000 (même si la ressource était connue plusieurs années auparavant). Si Stevia rebaudiana, ou au moins les connaissances traditionnelles qui y sont liées, est considérée comme étant également originaire du Brésil, la loi brésilienne pourrait être appliquée dans ce cas.

UNION EUROPÉENNE : bien que l’Union européenne ait signé et ratifié le Protocole de Nagoya, il est peu probable que les droits des pays d’origine et des détenteurs des connais-sances traditionnelles relatives à Stevia rebaudiana puissent être revendiqués en Europe, même s’il s’agit d’un marché essentiel pour les glycosides de stéviol. Cette situation résulte du fait que la réglementation européenne interprète le Protocole de Nagoya (EU, 2014) de manière manifestement inappropriée : il ne s’applique qu’aux ressources génétiques et aux connaissances traditionnelles associées pour lesquelles un accès a eu lieu après son entrée en vigueur. En outre, l’« accès » est défini comme l’acquisition de ressources génétiques ou de connaissances traditionnelles auprès d’une partie au Protocole de Nagoya – ce qui disqualifie, dans ce cas, à la fois le Paraguay et le Brésil. Il semble improbable que le Protocole de Nagoya puisse être utilisé pour appliquer les droits liés à la stévia au sein de l’Union européenne.

SUISSE : le périmètre d’application de la loi suisse (qui pourrait parfaitement s’appliquer puisqu’Evolva est basée en Suisse et que les glycosides de stéviol sont également commercialisés dans le pays) est similaire à celui de l’Union européenne. Cependant, le projet de décret contient une clause potentiellement importante concernant l’accès et le partage des avantages dans le cas de la stévia : l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) encourage les utilisateurs, même en l’absence d’obligation légale, à partager de manière volontaire les avantages résultant de l’exploitation de ressources génétiques, de manière équilibrée et équitable.

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STÉVIA – UNE DOUCEUR AU GOÛT AMER Mars 2016 // 31

À l’évidence, la production de glycosides de stéviol est un secteur en pleine expansion, qui puise dans les connais-sances traditionnelles du peuple guarani présent au Para-guay et au Brésil. Il est également évident que, dans la si-tuation actuelle, les Guaranis ne profiteront probablement pas des avantages financiers considérables générés – même si leurs connaissances traditionnelles sur la stévia et le ca-ractère « naturel » des édulcorants basés sur la plante stévia sont au cœur des stratégies marketing des entreprises par-tout dans le monde. La production des glycosides de stéviol à partir des feuilles de stévia est donc un cas mani-feste de biopiraterie.

Pour pouvoir résoudre cette situation de biopiraterie, et pour promouvoir davantage le développement rural pour les petits paysans, un certain nombre de mesures doivent être mises en place par les gou ver-nements en général et par les compagnies produisant ou utilisant les glycosides de stéviol :

• Les producteurs et les utilisateurs de glycosides de stéviol doivent s’engager dans une négociation avec les Guaranis pour convenir de modalités conduisant au partage juste et équitable des avantages résultant de la commercialisation des glycosides de stéviol.Les utilisateurs des connaissances traditionnelles rela-tives à Stevia rebaudiana – les producteurs de glyco-sides de stéviol et les entreprises multinationales spécia-lisées dans l’agroalimentaire qui génèrent et/ou anticipent des profits considérables liés à la commercia-lisation des produits à base de stévia – doivent s’engager dans des discussions concrètes pour la mise en œuvre de l’accès et du partage des avantages relatifs à la stévia, avec les Guaranis et les gouvernements des pays d’ori-gine, afin de convenir des conditions relatives à l’exploi-tation et aux avantages acquis résultant des connais-sances traditionnelles des Guaranis. Cet aspect est particulièrement important dans un pays tel que le Para-guay, où il n’existe encore aucune obligation légale effec-tive concernant l’accès et le partage des avantages. Ce partage n’est pas nécessairement financier, il peut égale-ment être concrétisé au travers d’autres formes d’aide. À titre d’exemple, la principale préoccupation des Guara-ni-Kaiowas dans la région du Mato Grosso Do Sul, au Brésil, est l’accès aux terres.

• Les gouvernements des pays utilisateurs et fournis-seurs – y compris le gouvernement paraguayen – devraient mettre en oeuvre de manière optimale le Protocole de Nagoya au niveau national grâce à des lois nationales complètes et efficaces concernant l’accès et le partage des avantages.Il devrait être impossible de réaliser des profits dans le cas où des ressources génétiques et leurs connaissances traditionnelles associées ont fait l’objet d’un accès illé-gal et où les avantages ne sont pas partagés. Les Guaranis sont pleinement en droit de

bénéficier d’une rétribution pour leur contribution au « boum » de la stévia, au sens des principes déjà conve-nus par les gouvernements dans le cadre d’accords inter-gouvernementaux, en particulier la CBD et la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. La stévia offre une opportunité pour les gouvernements de démontrer comment leurs belles paroles peuvent être mises en pratique dans les faits, avec pour objectif de transformer la situation d’un peuple autochtone souffrant de discrimination et de marginalisation.

La question centrale consiste à savoir comment s’as-surer que les principes soient suivis d’effets étant donné (1) les intérêts économiques liés à la maximisation des profits réalisés avec les glycosides de stéviol, et (2) la situation juridique complexe résultant du Protocole de Nagoya de la CBD relatif à l’accès et au partage des avan-tages. Le point central est que le secteur des boissons gazeuses, qui réalise des milliards de dollars de chiffre d’affaires (et qui est le principal acheteur d’édulco-rants), et les autres producteurs et utilisateurs de ces produits édulcorants, ne partageront probablement pas leurs profits, sauf s’ils y sont contraints par des lois na-tionales ou internationales, ou sous la pression de l’opi-nion publique.

Le partage des avantages peut également prendre des formes autres que financières. Ces démarches doivent être adoptées en fonction des intérêts et des besoins des populations guaranis concernées. Les gouvernements doivent s’assurer que les Guaranis bénéficient d’une part des avantages résultant de la commercialisation de la stévia, comme le prévoit le Protocole de Nagoya. Plus important encore, ils doivent reconnaître le besoin ur-gent d’améliorer la mise en oeuvre du Protocole de Na-goya en veillant à la promulgation d’une législation na-tionale complète et effective concernant l’accès et le partage des avantages.

7 CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS

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• Les gouvernements et les distributeurs des produits contenant des glycosides de stéviol doivent mettre fin aux publicités décrivant ces produits comme « traditionnels » ou « naturels ».Les gouvernements et les entreprises des pays consom-mateurs doivent arrêter les publicités qui trompent déli-bérément les consommateurs en présentant les produits qui contiennent des glycosides de stéviol produits de manière synthétique ou chimique comme « naturels » et « traditionnels ». Les publicités qui mettent en avant « l’aspect naturel » des glycosides de stéviol et l’héritage des Guaranis trompent de manière délibérée les consom-mateurs et posent problème. Ce type de publicité doit être interdit.

• Le gouvernement du Paraguay et les autres gouver-nements doivent veiller à ce que la production des plants de stévia profite aux petits exploitants agricoles et favorise le développement rural.Tout programme de développement rural doit contribuer à une production à petite échelle et écologiquement pé-renne, et veiller à ce que les droits sur les terres et les territoires des Guaranis, ainsi que leurs droits au partage des avantages soient explicitement reconnus. Un tel pro-gramme doit également assurer une aide sous la forme d’un accès aux services de conseil et de vulgarisation, aux marchés et au crédit équitable, et à des échanges entre agriculteurs. Les produits à base de stévia naturelle pourraient par ailleurs être protégés par une indication d’« origine géographique » (utilisée pour la protection des produits, comme c’est le cas par exemple pour le thé Darjeeling).

Le gouvernement paraguayen, qui développe le sec-teur de la stévia au Paraguay, doit donner la priorité aux besoins des peuples guaranis ainsi que des petits pay-sans et de l’industrie de transformation domestique en plein essor.

• Les gouvernements doivent veiller à ce que les producteurs ne puissent pas produire ou commercia-liser des glycosides de stéviol obtenus à partir de la biologie de synthèse en l’absence d’une évalua-tion d’impact socio-économique indépendante, concluant à des résultats positifs, comme l’exigent les parties de la Convention sur la diversité bio logique.La tendance à l’utilisation des glycosides de stéviol pro-duits par biologie de synthèse menace l’énorme potentiel de la culture de la stévia pour le développement rural dans des pays comme le Paraguay. En effet, elle conduit à transférer les activités de production depuis les petits paysans vers les laboratoires des grandes entreprises. Ce-pendant, si les glycosides de stéviol produits par biologie de synthèse sont mis sur le marché, les gouvernements doivent veiller à ce que les entreprises qui commercia-lisent les produits finis soient contraintes de l’indiquer clairement sur leurs étiquettes.

Concernant les produits issus de la biologie de syn-thèse, une évaluation du risque doit être basée sur le principe de précaution et doit intégrer des considérations relatives aux effets socio-économiques, en particulier pour les glycosides de stéviol produits par biologie de synthèse.

Les droits des Guaranis sont bafoués du fait de la commer-cialisation d’édulcorants dérivés de la stévia par des entreprises multinationales de l’hémisphère nord. © Misereor

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