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stratégie · PDF fileStar Wars, le géant étend son royaume en se diversifiant tous azimuts. LA GRANDE OFFENSIVE COMMERCIALE ... Los Angeles, Disney commence à se familia

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Page 1: stratégie · PDF fileStar Wars, le géant étend son royaume en se diversifiant tous azimuts. LA GRANDE OFFENSIVE COMMERCIALE ... Los Angeles, Disney commence à se familia

WWW.LEXPANSION.COM | DÉCEMBRE 2016 - JANVIER 2017 | 81

UN ORCHESTRE SYMPHONIQUE GÉANT,le pianiste Lang Lang auclavier pour revisiter le tubeplanétaire de La Reine desneiges, et l’ex-basketteurvedette de NBA Yao Mingqui galvanise les foules… Le

tout sur fond de show pyrotechnique époustou-flant, retransmis en direct à la télévision devant70 millions de téléspectateurs chinois fascinés :la cérémonie d’ouverture du parc Disneyland deShanghai, en juin dernier, n’avait pas grand-choseà envier aux fastueuses festivités qui ouvrent lesjeux Olympiques. Il faut dire que Mickey et sabande avaient bien mérité de faire la fête ! Aprèsquinze ans de travaux épiques pour aménager350 hectares de terrains – moyennant la baga-telle de 5,5 milliards de dollars –, le groupe Dis-ney a inauguré cet été son tout premier parc surle très prometteur marché chinois, hors Hong-kong. Déjà plus d’un million de personnes s’y

sont ruées, mais toutes n’ont pas osé se frotterau grand huit futuriste Tron Lightcycle PowerRun, l’attraction la plus rapide jamais créée parDisney (100 km/h en vitesse de pointe) ! Leshôtels affichent complet, et le potentiel esténorme : 330 millions de Chinois vivent à moinsde trois heures du parc en voiture ou en train…

UNE DOMINATION ÉCRASANTE SUR LE MARCHÉDES PRODUITS DÉRIVÉSLe géant Disney, qui possède déjà quatre descinq plus grands parcs d’attractions du monde,continue donc d’étendre son emprise sur la pla-nète du divertissement. « Le groupe vit lapériode la plus faste de son histoire », s’en-thousiasme Jean-François Camilleri, le patronde la filiale française. Outre sa mainmise surles parcs à thème, le studio créé en 1923 parWalt Disney n’en finit plus de pondre des block-busters, et domine de manière écrasante le mar-ché des produits dérivés, très loin devant WarnerBros. Résultat, en dix ans, les profits ont triplé,passant de 3,4 à 9,4 milliards de dollars. Legéant basé à Burbank, non loin de Hollywood,se targue d’une marge nette de 17%, à faire pâlirle champion du luxe LVMH et ses 10 %. Pasétonnant, donc, que les investisseurs se ruentsur l’action Mickey, qui a triplé depuis 2006.

stratégie

Avec l'ouverture de son premier parc d'attractions en Chine, sesblockbusters à succès, le rachat des franchises Marvel, Pixar et Star Wars, le géant étend son royaume en se diversifiant tous azimuts.

LA GRANDE OFFENSIVE COMMERCIALEDE L’EMPIRE DISNEY

�ENQUÊTES

Le groupe pèse désormais 150milliards de dol-lars en Bourse… davantage qu’un Total !Ces résultats mirobolants consacrent le busi-ness modelde la firme aux grandes oreilles, basésur les synergies entre les différentes activitésdu groupe. Ses blockbusters se déclinent ainsien produits dérivés, en attractions, en jeux vidéo,et même en croisières familiales. Autant desources de revenus additionnelles qui, au pas-sage, entretiennent l’enthousiasme du publicpour ses personnages et préparent le terrainpour de nouveaux volets de leurs aventures.« C’est un cas d’école. Disney a construit unmagnifique écosystème qui utilise tous les canauxpossibles pour maximiser la valeur de ses per-sonnages », commente Frédéric Fréry, profes-

seur de stratégie à l’ESCP Europe. L’épicentrede l’univers Disney, c’est sa puissance créative.Aucun concurrent n’est parvenu à construire unensemble aussi complet et intégré. Même passon rival le plus sérieux, Comcast, qui a pour-tant racheté les studios et parcs à thème Uni-versal (Jurassic Park, Fast and Furious) et lasociété DreamWorks (Shrek, Kung Fu Panda).Elle paraît loin, l’époque où le même Comcast

lançait une OPA hostile sur un Disney fragilisé !C’était en 2004, et les difficultés avaient com-mencé dix ans plus tôt, avec le départ de Jeffrey Katzenberg. Le talentueux directeur destudio, à l’origine des succès comme Aladdinet Le Roi Lion, claque la porte et crée, avec Steven Spielberg et David Geffen, le studio

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Fait méconnu, ce sont des chaînes câbléesaméricaines comme ABC qui contribuent le plus aux revenus du groupe Disney. Mais la pépite ESPN dédiée au sport, autrefois machine à cash, est chahutée par la concurrence des sites de streaming.

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MILLIARDS DE DOLLARS

MILLIARDS DE DOLLARS9,4Les acquisitions successives des studios Pixar, Marvel et Lucasfilmont considérablement étoffé lapalette de personnages dont disposela « supermajor », qui tutoie les sommets au box-office. Elle compte lancer un Star Warspar an jusqu’à 2025.

Des livres (Cars) aux jouets (Iron Manet Hulk) en passant par les jeux vidéo (Star Wars) et les tee-shirts (La Reine des neiges), la multinationale décline ses personnages sous tous les formats. Disney collabore avec les meilleurs de chaque secteur : Electronic Arts dans les jeux vidéo, Lego, Mattel etHasbro dans les jouets.

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Après Tokyo, Paris et Hongkong,la filiale Disney Parks & Resortsétend son empire à l’international.La firme a ouvert un parc de350hectares à Shanghai. L’objectifest d’en faire le parc le plus rentable du groupe, au moment même où Disneyland Paris boit la tasse.

MILLIARDS DE DOLLARS5,5

Quatre galaxies dans l’univers de Mickey(en milliards de dollars de revenus en 2016).

MILLIARDS DE DOLLARS

PARCS D’ATTRACTIONS

PRODUITS DÉRIVÉSTÉLÉVISION

CINÉMA

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fois encensé par la critique et hyperrentable(plus d’un milliard de dollars de recettes au box-office). Surtout, la firme aux grandes oreilles vas’inspirer des méthodes de Pixar pour ressus-citer son propre studio d’animation 3D. Déjàdirecteur artistique de Pixar, John Lasseter sevoit offrir en plus le postede directeur créatif des stu-dios Disney. Il s’emploie àtransmettre aux équipes deLos Angeles le savoir-faire desa maison d’origine. « Achaque film, Pixar déve-loppe de nouveaux logi-ciels pour améliorer lerendu et le réalisme desimages. Ils ont mis cesressources et leur savoir-faireà la disposition de Disney »,précise Frédéric Nagorny, enseignant aux Gobelins. L’infusion fonctionne : Disney revientdans la course des films d’animation, avec dessuccès comme La Reine des Neiges en 2013 etZootopie en 2016.

UN PLAN DE SORTIE DES FILMS « STAR WARS »COURT JUSQU’EN 2025Le rachat de Marvel fonctionne lui aussi au-delà des espérances. L’avalanche de superhé-ros ne lasse pas le public qui, au contraire, enredemande. Quant à Lucasfilm, c’est carré-ment le jackpot. Une simple bande-annoncede Star Wars 7 en mars 2015 a immédiatementfait grimper la valorisation du groupe Disneyde 2 milliards de dollars ! Malgré un scénariorelativement banal, le film rapporte 5 milliardsde dollars en places de cinéma, jouets et pro-duits dérivés. Avec son approche typiquementindustrielle, Disney a déjà conçu un plan desorties des films Star Wars qui court jusqu’à2025. En parallèle, de nouvelles attractionsinspirées de La Guerre des étoiles sont enconstruction dans les parcs d’attractions, enFloride et en Californie. « Jamais le groupen’a été autant diversifié et n’a bénéficié d’unetelle visibilité sur l’avenir », s’enflamme lepatron de la filiale française.Mais derrière les paillettes, les shows laser et

les blockbusters, l’avenir de Disney n’est pas for-cément aussi rose et tracé que veulent bien leconter les dirigeants de la firme. Les chaînescâblées du groupe, une division méconnue mais

qui génère la moitié des bénéfices, soulèventainsi pas mal d’inquiétudes. La chaîne sportiveaméricaine ESPN, véritable machine à cash dela firme, voit ses parts de marché s’évaporer avecla concurrence de Netflix et du streaming. Alorsqu’elle se targuait de 100 millions d’abonnés en2011, elle n’en posséderait plus, selon l’institutNielsen, que 89 millions en 2016. « ESPN perddes abonnés alors qu’elle mise des sommes deplus en plus considérables pour acheter les droitssportifs », relève Vincent Teulade, spécialistedes médias chez PwC. Disney a certes investidans une plateforme concurrente, Hulu, et ainjecté un milliard de dollars dans la sociétéBAMTech, qui retransmet des événements spor-tifs en streaming. Mais ces plateformes font pâlefigure face à Netflix : moins de 10 millions d’abon-nés chacune, contre 75 millions pour le pro-ducteur de House of Cards.La division cinéma, quant à elle, doit se pré-

parer aux prochaines ruptures technologiques.Dans sa « pouponnière » de start-up basée àLos Angeles, Disney commence à se familia-riser à la réalité augmentée et aux contenusholographiques. La firme a produit quelquesextraits vidéo en réalité virtuelle, qui se limi-tent pour l’instant à des teasers promotion-nels. Suffisant pour rassurer les investisseursquant à la pérennité du groupe ? Pas gagné.L’action a perdu 17% entre novembre 2015 etnovembre 2016. Les marchés spéculent sur laprochaine acquisition du groupe : Lego ? Spo-tify ? Netflix ? « Pourquoi pas un éditeur dejeux vidéo ? Il y aurait des synergies intéres-santes à trouver », suggère Jérôme Barthé-lemy, professeur de stratégie à l’Essec. L’autreinconnue, et de taille, c’est le nom du succes-seur du talentueux Bob Iger, dont le mandats’achève en octobre 2018. Le prétendant aurafort à faire pour être à la hauteur de son bilan.Que la Force soit avec lui ! � THOMAS LESTAVEL

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DreamWorks, qui va ringardiser les dessins ani-més Disney, notamment avec son antihéros Shrek.« A l’époque, la créativité des studios est en panne,et ils ont raté le virage de l’animation sur ordina-teur, relate Frédéric Leroy, professeur en straté-gie à HEC Paris Executive Education. Ils sortentFrère des Ours la même année que Le Monde deNemo (Pixar) : le contraste est accablant. » Pourne rien arranger, le groupe s’est endetté pour rache-ter la chaîne de télévision ABC, à une époque mar-quée par de folles mégafusions dans le multimédia(Vivendi-Universal, AOL-Time Warner).Alarmés par la situation du groupe, les action-naires remercient Michael Eisner et le rempla-cent par Bob Iger, en 2005. Bonne pioche. Lacréativité est en panne ? Le sixième PDG de laWalt Disney Company va la trouver ailleurs, enrachetant ses concurrents, quitte à mettre le prixfort. Après d’âpres discussions, Bob Iger finit

par convaincre Steve Jobs de lui ven-dre son joyau Pixar, en 2006. Il met 7,4milliards de dollars sur la table – unesomme considérable pour un studio quisort alors tout juste un film par an. Ilmet la main sur Marvel en 2009 puissur Lucasfilm, en 2012. Deux gros coupsà 4 milliards de dollars chacun. Avec saforce de frappe commerciale, la Disneyva parvenir à tirer le meilleur de cesacquisitions. Pourtant, le rachat de Pixartenait plus du coup de poker que du pla-cement de bon père de famille. Il y avaitun vrai risque que les créatifs du studio

démissionnent, de peur d’être écrasés par lagrosse machine Disney, laissant une coquillevide payée à prix d’or. Sa liberté conservée, lestudio de San Francisco poursuit sur sa dyna-mique de succès, à l’image d’un Toy Story 3, à la

stratégie�

ENQUÊTES

Une année record pour les studios Disney« 2016 est une annéehistorique pour nousau cinéma », confie à L’Expansion Jean-François Camilleri. Le président de WaltDisney France a de quoi se réjouir. La firme aux grandesoreilles truste les quatre premièresplaces du box-officemondial avec CaptainAmerica : Civil War, Le Monde de Dory,Zootopie et Le Livre dela jungle *. Ce dernier,un remake du dessinanimé des années 60sous forme de film, a été salué par

la critique pour sa narration émouvanteet ses effets spéciaux bluffants. Une illustra-tion de la formidablecapacité du groupe à exploiter ses héroset à décliner ses histoires sous toutesles formes possibles.Encore une fois, la politique d’acquisitions menéepar Disney ces dernières annéesporte ses fruits.Le leader du box-officevient des studiosMarvel, tandis queson dauphin a étéréalisé par Pixar.

Et l’année est loind’être terminée. Unautre Marvel, DoctorStrange, est sorti finoctobre. Surtout, lepremier spin-off de La Guerre des étoiles,Rogue One : A Star

Wars Story, dont l’histoire se situe entre les troisième et quatrième épisodesde la saga, promet de remplir les salles àpartir du 14 décembre.Et entre-temps, lesstudios Disney sortentle film d’animationVaiana, la légende du bout du monde.Difficile de lutter face

Mythique. La saga deGeorge Lucas auraitgénéré 9 milliards de dollars en produitsdérivés. Rogue Onedevrait battre les records.

« Disney utilise tous les canaux possibles pour maximiser la valeur de ses personnages. » Frédéric Fréry, professeur de stratégie à l’ESCP Europe.

Créativité. Avec lesuccès de Zootopie en2016, Disney revientdans la course desfilms d’animation.

à une telle armada defranchises à succès.Mickey tient sa revanche face à Universal, qui avaitosé lui ravir la première place du box-office l’an dernier,grâce aux cartons deJurassic World et deFast and Furious 7. �(*) Classement au 17 novembre 2016.Source : Boxofficemojo.com

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150 milliards de dollars,c’est ce que vaut la firme aux grandesoreilles en Bourse,alors que l’action a triplé depuis 2006.