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marcus33
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On appelle « Béatus » les manuscrits espagnols des Xe siècle et XIe siècle, où sont copiés l'Apocalypse de Jean (traduction latine intégrale) et les Commentaires de ce texte rédigés au VIIIe siècle par le moine Béatus de Liébana. Ces manuscrits sur parchemin, étaient richement enluminés.
Béatus de Liébana était un moine du monastère de San Martín de Turieno (Région de Cantabrie en Espagne), il est mort en 798. Son commentaire de l'Apocalypse (en latin In Apocalypsin), (rédigé en 776, repris en 784 et terminé en 786) qu'on appelle le Béatus de Liébana fut ensuite abondamment copié par d’autres moines dans d’autres monastères espagnols (surtout en Castille et Léon) : ce sont les fameux Béatus, copies fidèles à l’original du moine de Liébana. Le manuscrit a eu à son époque un impact considérable dans l’Espagne du 8ème siècle (occupée par l’Islam), par sa portée théologique, mais aussi par sa dimension politique .Le Béatus, au départ était un texte méditatif destiné aux moines, puis il est devenu un texte de résistance chrétienne. Si le texte original de l’Apocalypse du nouveau testament visait Rome, la destruction de l’empire romain, les espagnols l’ont « adapté » à leur condition de pays occupé depuis 711, et où il était interdit de pratiquer leur religion (les églises étaient détruites, les cloches et processions interdites).Comme il était impossible de s’opposer ouvertement, tout y est codé, symbolisé , « la Bête » n’est plus Rome, mais le califat, Babylone n’est plus Rome mais Cordoue.L'Apocalypse, qui avait été interprétée comme une prophétie de la fin des persécutions romaines, devient l'annonce de la Reconquête (la Reconquista).
L’art des Béatus va s’étendre en Espagne * sur un peu plus d’un siècle à partir de 930 . Ce sont des moines qui reprennent le manuscrit intégral du Béatus de Liébana (l’Apocalyse et le commentaire). Au départ, les enluminures sont intégrées au texte, puis avec le Béatus de l’Escurial (vers 950), elles seront encadrées, devenant « indépendantes » du texte mais le renforçant encore plus . Vers 960, la couleur devient intense, vive, lumineuse et rayonnante ; On voit notamment apparaitre les bandes horizontales de couleur, qui sont une « marque de fabrique » des Béatus .
« C’est un art qui cherche à révéler une vérité d’ordre transcendantal, au-delà des apparences, et qui utilise des canons irréalistes; l’on ne représente pas la réalité sensible pour elle-même mais la représentation se veut être une explication ».
*(le Béatus de Saint Sever en France, sera le seul réalisé au nord des Pyrénées).
« Le plus beau , le plus abouti est peut être le Béatus de Facundus, plus tardif et daté de 1047. Il avait été commandé par le roi Ferdinand Ier et la reine Sanche. On y retrouve des procédés typiques, comme les yeux en amande, la tendance à représenter à la fois l’intérieur et l’extérieur d’un édifice, à montrer un objet simultanément sous plusieurs angles. Les personnages flottent dans un univers sans profondeur spatiale , leur visage est vu de face, comme plusieurs parties de leur corps, la vraisemblance anatomique cédant le pas au souci de projeter un plus grand nombre d’éléments sur la surface picturale. La saturation des couleurs, avec une dominance du rouge, de l’orange, du noir et du mauve, son intensité et son irréalité sont maximales. Il y a de légers changements dans le dessin, les personnages ont des lignes plus allongées, moins massives, et le trait est plus souple».
Les principaux Béatus
Béatus de San Millán de la Cogolla (vallée de l'Èbre). Vers 930. Béatus de San Millán. Vers 950 / 955. El Escorial. Béatus de San Miguel de Escalada (près de León. Vers 960.Béatus de San Salvador de Távara. Vers 968 / 970. Peint par Magius, terminé après sa mort par son élève Emétérius.Béatus de Valcavado. Vers 970. Valladolid. Peint par Oveco pour l'abbé Semporius.Béatus de Rioja ou León. Vers 975. Cathédrale de La Seu d'Urgell. Béatus de Távara. Vers 975. Cathédrale de Gérone. Peint par Emétérius (élève de Magius) et par la moniale Ende.Béatus de San Millán. 2e tiers du Xe siècle. Béatus de León. 1047. Peint par Facundus.Béatus. 1086. Cathédrale de El Burgo de Osma. Scribe : Petrus. Peintre : Martinus.Béatus de Saint-Sever (Landes). 1060 / 1070. Béatus de Santo Domingo de Silos. 1091 / 1109..
La Mappa Mundi (Mappemonde) de Béatus de Liébana est l'une des principales œuvres cartographiques du Haut Moyen Âge.Elle fut élaborée vers 780 par le moine lui-même, se basant sur les descriptions d'Isidore de Séville, de Ptolémée et des Saintes Écritures. Le manuscrit original a été perdu, il figurait dans le prologue du deuxième livre des Commentaires de l'Apocalypse de Béatus de Liébana. La fonction principale de la carte était l'illustration de la dispersion des Apôtres suite à la Pentecôte.Dans cette mappemonde, la terre se présente comme un disque entouré d'océans. La terre est divisée en trois continents : Asie (demi-cercle supérieur), Afrique (quart de cercle inférieur droit), Europe (quart de cercle inférieur gauche), qui correspondent respectivement aux territoires des descendants des trois fils de Noé : Sem, Cham et Japhet. les masses continentales sont séparées par des cours d'eau ou des mers intérieures comme la Mer Méditerranée, le Nil, le Bosphore. Au centre du monde se situait Jérusalem, la ville sacrée du judaïsme et du christianisme. Cette situation centrale de Jérusalem comme umbiculum mundi (nombril du monde) était usuelle dans la cosmogonie chrétienne médiévalela forme ovale de la terre est divisée en trois parties par la Méditerranée, le Nil (ou la Mer Rouge), le Bosphore (ou le Danube). L'Est (orient) est placé en haut de la carte.