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Réalisé par Daniel VAXELAIRE Supplément gratuit du Journal de l’Ile de La Réunion du dimanche 15 novembre 2009 Grands témoins André Albany Saison 2 - Numero 43

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Réalisé par Daniel VAXELAIRE

Supplément gratuit du Journal de l’Ile de La Réunion du dimanche 15 novembre 2009

Grands témoinsAndré Albany

Saison 2 - Numero 43

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André Albany, à notre connais-sance, est le premier Réunionnais à avoir suivi les cours d’une école de photographie, la prestigieuse ETPC (Ecole technique de pho-tographie et de cinématographie) fondée par Léon Gaumont, Louis Lumière et Paul Montel.Fils d’un amateur inspiré, Emilien Albany, il va élever le nom au ni-veau de la légende : entre son re-tour, en 1929, et la fin des années

Son talent l’a distingué, il est parti à Paris, revenu enrichi d’un diplôme et de savoir, et pendant un demi-siècle, il a témoigné…

André Albany témoin de l’Histoire. En 1939, il a photographié ce défilé des troupes coloniales devant l’Hôtel de Ville de Saint-Denis, sous les yeux d’une foule chapeautée et casquée. Dans un an, la France va s’effondrer et La Réunion tomber (provisoirement) sous un régime pétainiste… à la mode tropicale.

soixante, il a fait des dizaines de milliers de clichés - et un film 35 mm, hélas perdu - qui témoignent des grands et petits événements. Nous ne donnons ici qu’un mo-deste aperçu de cet immense tré-sor (environ 15 000 photographies ont été conservées). Nos remer-ciements à Renée-Paule Albany, à Maryse Duchêne et l’association «réunion d’images» qui préserve ce fonds.

«Le garde-champêtre, Saint-Denis 1947». Le fonds Albany rassemble les images de trois générations, couvrant près d’un siècle : les photographies d’Emilien Albany (1861-1951), André Albany (1903-1992) et Gilbert Albany (1934-2004). Grand-père, fils, petit-fils, le plus prolifique ayant été André, dont le témoignage est un des plus riches de son époque : il a aussi bien photographié ses contemporains que les événements grands et petits…

Une histoireen images

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Son père était un touche-à-tout de génie.André a ajouté le savoir au savoir-faire…

Itinéraire d’unenfant passionné

Emilien Albany, né à Sainte-Su-zanne en 1861, avait d’abord vou-lu être charron : métier d’époque. Ses oncles le pilotèrent vers une branche plus rémunératrice et à l’avenir plus assuré : le commer-ce. Cela n’a pas empêché le jeune homme de se passionner pour de nombreuses activités manuelles : Emilien était à la fois fabricant de feux d’artifices (il faillit en mourir au début des années 30 et en perdit la vue), photographe amateur, fon-dateur d’un cinéma d’abord muet puis parlant à Saint-André…Rien d’étonnant à ce que le fils hérite de cette passion pour les bricolages en tout genre. A 12 ans, il fabrique lui-même un appareil photo, reproduisant fidèlement la chambre à plaques de verre de son père. Il se lance aussi dans une passion à la mode dans les années vingt : la TSF, construisant bobi-nages et postes amateurs à lampes, il fabrique même des instruments de musique !En 1925, André Albany a 22 ans. La colonie organise une grande exposition dans l’ancienne caserne d’infanterie (actuel RFO) et on dé-couvre avec admiration les belles photographies de ce jeune incon-nu. Le Conseil général lui accorde une bourse pour aller compléter sa formation à Paris : le voici dans la première palanquée de la presti-gieuse Ecole technique de photo-graphie et de cinématographie de Vaugirard où il apprend le portrait, la photographie d’architecture, la photogravure, le cinéma. Embau-ché par une agence de presse, il «couvre» les obsèques du maré-chal Foch, puis travaille dans un atelier de photo rapide (déjà…)En 1939, le Conseil général rap-pelle son talentueux boursier : il s’agit de réaliser un film sur La Réunion, destiné à l’Exposition universelle de Paris en 1931. Un film en 35 mm !

André Albany ne s’est jamais consolé de la perte de ce film, qui n’existait qu’à quelques exem-plaires : c’était un inestimable témoignage sur La Réunion de 1929-1930, montrant paysages, industries, scènes de vie…Après cette commande officielle, André Albany s’installe à son compte, assurant aussi bien les photos familiales (de la commu-nion à l’identité) que des repor-tages sur d’innombrables événe-ments historiques. L’atterrissage du premier avion en 1929 - et bien d’autres vols historiques ensuite - les éruptions volcaniques, les grandes rencontres sportives, les événements politiques, il a tout photographié, plus les paysages et les visages d’une île qu’il aimait profondément et qu’il a parcou-rue en tous sens. Ajoutons, pour l’avoir rencontré (pour le Mémo-rial), que c’était un homme mo-deste et d’une exquise courtoisie.

1929 : André Albany tournant son film avec sa caméra 35 mm Cinex à manivelle. Un travail colossal et un témoignage unique sur La Réunion, hélas perdu…

1924 : Emilien Albany et sa famille, posant dans et sur la Ford «Chipèque», modèle T…

Albany, artiste amoureux de son île : les environs du cap Champagne, à Saint-Gilles, vers 1950.

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1957 : André Albany, son fils Gilbert et son épouse Germaine.

Le magasin d’André Albany au 26 rue de la Compagnie à Saint-Denis en 1963.(actuel bâtiment de France Télécom).

Gilbert Albany a poursuivi les chemins de son père : il est sorti diplômé de l’Ecole des Arts Appliqués de Vevey en Suisse en 1960 et a rapporté notamment la technique des agrandissements muraux ou «découvertes». Son père et lui ont installé plusieurs de ces photos-montages géants, dans les années soixante-dix.

Encore deux images témoignant du tournage du film en 1930 : sous la houlette du guide M. Jasmin (à gauche) et avec l’aide de nombreux porteurs (il n’y a pas de route depuis la Plaine des Cafres !), le lourd matériel a été monté jusqu’à la Chapelle de Rosemont, où une séquence sera tournée. C’est l’occasion de voir cette bulle de lave dans son aspect d’il y a 80 ans…

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Petits, grands moments, scènes de vie, poses intimidées : Albany a tout photographié…

Témoinde son temps

Quand on est un photographe pas-sionné, on ne se contente pas des travaux de commande : on se pro-mène avec son appareil à la main et on mitraille… Investissement coû-teux, car les plaques et pellicules sont chères, mais investissement rentable, car ce qui semble banal en 1930, 1950… sera une curiosité

un demi-siècle plus tard. Qui sait ce que nos descendants penseront de notre cadre de vie actuel, dans cinquante ans ? Merci donc aux Albany, Blay, Le-gros, Colbe, Richard, Vélicitat et autres, qui ont travaillé, sans le savoir, pour le patrimoine collectif de La Réunion.

1960 : un quatuor d’enfants timides (et pas très habillés malgré la fraîcheur) à la Plaine des Cafres. Et dans le panier en vacoa, des pommes de terre ?

1946 : un DC-4 à Gillot. Le voyage Paris-Réunion prend trois jours, via de nombreuses escales et Tananarive, plate-forme aérienne pour la région.

1940 : l’île manquant de charbon, on a bricolé un camion Renault qui sert de «locotracteur» pour le train, roulant à un mélange essence + alcool de canne.

1940 : voyageurs attendant l’autocar devant la «boutique Chinois». Rue du Grand-Chemin, Saint-Denis.

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Le siège du pouvoir et son illustre occupant, après guerre : le «Gouvernement» avec ses aménagements de 1943, le grand salon et le gouverneur André Capagorry, Compagnon de la Libération, envoyé du général de Gaulle en novembre 1942 et dernier gouverneur de l’île.

1946 : un autorail en gare de Saint-André. Le chemin de fer de La Réunion s’est modernisé pour lutter (en vain) contre la concurrence des transports automobiles, grâce notamment à ces autorails fabriqués par Brissonneau et Lotz. Ils étaient profilés spécialement (haut plus étroit) pour pouvoir passer dans le tunnel entre Saint-Denis et La Possession et disposaient, luxe inouï, de toilettes !.

C’était l’Ermitage, vers 1950 : ces deux images montrent un Saint-Gilles bien modeste…

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Albany le reporter était là avec ses (gros) appareils photo, à chaque jour mémorable.

Témoindes grands événements

26 novembre 1929 : le premier avion que La Réunion ait jamais vu, le Farman de Goulette, se présente pour la troisième fois au-dessus du champ grossièrement dégagé de Gillot. Il est gêné par des banderoles mais finira tout de même par se poser. L’exploit technique du photographe est à souligner : il a saisi l’avion en plein vol, avec un appareil à plaques de plusieurs kilos !

10 novembre 1933 : «l’escadrille Samat» (Samat, Surtel, Hily) se prépare au décollage, pour le premier vol groupé sur Maurice.

Jean Hily a réussi plusieurs vols entre La Réunion et Maurice, dont les premiers vols commerciaux (avec passager unique, faute de place…). Il a disparu dans des conditions mystérieuses le 4 octobre 1934, au retour de Maurice. Le mystère de l’avion Hily reste entier, trois quarts de siècle après…

Une photo Albany couverte d’autographes, de timbres et de tampons : celle de l’avion de Laurent, Touge et Lénier qui ont assuré le 28 décembre 1936 la première liaison aéropostale France-Réunion et retour. Le vol aller avait pris 9 jours, celui du retour, en janvier 1937, en prit 17 ! Les rares courriers embarqués ce jour historique enchantent les collectionneurs.

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Janvier 1931 : le Volcan fait parler de lui, une fois de plus. Mais un photographe est là pour immortaliser l’événement. Les images d’André Albany, montrant la plongée de la lave dans la mer, de jour et de nuit, voyageront jusqu’à Paris : certaines paraîtront dans le journal «l’Illustration».

Autre événement mémorable : le cyclone du 26 janvier 1948, qui avec des vents estimés à 300 km/h a fait 165 morts et causé d’immenses dégâts. Parmi les photos faites par André Albany au lendemain de la catastrophe, cette spectaculaire image du pont de chemin de fer de la rivière des Galets, dont une pile a été emportée par les eaux.

On avait montré André Capagorry, dernier gouverneur, sur une page précédente. Voici son successeur : Paul Demange, le premier préfet, photographié par André Albany en 1947.

Un événement politique dont fort peu de photographies sont connues : la grande manifestation en faveur de la départementalisation de La Réunion, devant le Jardin de l’Etat, en 1946.

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Par plaisir ou sur commande, André Albanya photographié son île au labeur…

Témoindu travail

Comme ses contemporains André Blay ou Jean Legros, et plus tard Jean Colbe, André Albany, pho-tographe au talent reconnu, a été commandité par des entreprises, des institutions, pour des reporta-ges «de commande» sur le sucre, le port, les activités économiques. Mais les cadrages, la lumière, le jeu des perspectives montrent bien qu’il ne ‘agit pas là que de faire de la photo technique : l’artiste n’est jamais absent, qu’il s’agisse de photographier les dockers ou un

moulin de sucrerie.A ces travaux de commande s’ajoutent les centaines de clichés pris au fil des jours, et qui mon-trent les petits métiers, l’activité incessante d’une Réunion pauvre et laborieuse.Et puisqu’on parle de labeur, ren-dons hommage à celui des témoins de cette époque : nos appareils photo tiennent dans une poche, les leurs pesaient plusieurs kilos. Merci donc à ceux qui les ont trimballés, pour notre plaisir…

Dockers au Port, 1950.

Le grand marché de Saint-Denis en 1950. A cette époque, on y vendait des fruits et légumes.

Avant la cuite du géranium. 1950. Le toit de l’atelier de distillation est en paille de vétiver, comme beaucoup de toits de l’époque.

Fangourin artisanal, servant à la fabrication de rhum marron. Cette photo de 1930 est un témoignage exceptionnel sur la vie précaire de beaucoup de Réunionnais entre les deux guerres.

Pêcheur de bichiques, vers 1950.

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Deux images de La Mare, montrant une innovation technique : le déchargement des cannes sur un tapis roulant, destiné à économiser un peu de manutention. Des camions de plus en plus nombreux se pressent dans la cour de l’usine.

A droite, images extraites d’un reportage fait en 1930 à Saint-André sur la préparation de la vanille : l’échaudage (ou «mortification») des gousses vertes, l’enroulement des gousses dans des couvertures pour maturation, et l’emballage par bottes des plus belles gousses destinées à l’exportation. A cette époque, La Réunion produisait plusieurs dizaines de tonnes de vanille par an, considérée comme la meilleure du monde.

En bas, le modeste moulin à cannes de l’usine de Stella Matutina en 1947. Il existe toujours, dans l’usine transformée en musée. A comparer avec les moulins géants du Gol ou de Bois-Rouge.

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Il n’y a pas de télé,mais cela n’empêche pas de s’amuser…

Joursde détente

Parce qu’il y participait, André Albany a aussi photographié La Réunion des jours de loisir : bai-gnades, randonnées pour le côté

nature, bals, courses et fêtes di-verses pour le côté mondain. Sans oublier les modestes loisirs des petites gens…

Excursion au Volcan, à pied et à cheval, 1950.

Baignade à Saint-Gilles, en 1936. On est encore loin du monokini…

Trois images d’un dimanche de courses, vers 1930 : la foule des gens modestes qui se précipite vers la Redoute, le parking de ceux qui ont eu les moyens de venir en voiture, et l’arrivée triomphale, devant les tribunes, d’un «crack». parfois, il n’y avait que trois ou quatre chevaux engagés, ce qui réduisait quelque peu les paris…

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Le phare de Sainte-Suzanne, en 1947.

La fameuse «boucle» de la route de Cilaos, à son ouverture en 1932.

Sur la route de Salazie, 1930.

Une des premières stations-service, vers 1950.

Loisir bon marché, durant la pause : joueurs de cartes à Saint-Gilles en 1950.

Pêcheur de langoustes à la Saline-les-Bains, 1947.

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Une facette moins connue

Les albany éditeursEmilien Albany, puis son fils André, ont publié, de 1915 aux alentours de 1940, une soixantaine de cartes postales qui font le bonheur des collectionneurs.

Nous vous en offrons ici quelques-unes. Certaines commémorent des événements historiques, comme l’arrivée de l’avion Goulette, la Foire-exposition de 1938 ou la consécration de l’église de Piton Saint-Leu (page de droite), d’autres montrent paysages et personnages.

Nos remerciements à Younouss Patel qui les a extraites de sa collection.

Le fonds Albany est actuellement en cours d’inventaire et de numérisation. Une partie des images sera mise en igne courant 2010.Par ailleurs, ce fonds sera abrité à Saint-Paul, dans les locaux de la maison Serveaux, Chaussée Royale, dès que celle-ci aura été rénovée.

Pour toute information, s’adresser à l’association réunion d’images, 14 chemin Floriant, Tan Rouge, 97435 Saint-Gilles-les-Hauts.

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Supplément gratuit du Journal de l’Ile de La Réunion.Edité et imprimé par la SAS Le Journal de l’Ile de La Réunion, BP 40019 - 97491 Sainte- Clotilde Cedex. Tél : 0262 48 66 00.

Directeur Général : Jean-Baptiste Mariotti. Président et directeur de la publication : Abdul Cadjee. Rédacteur en chef : Yves Mont-Rouge.Directeur commercial : Alain Vaujany. Publicité : 0262 48 66 48. Directeur des ventes : Serge Robert.

Rédaction : Daniel Vaxelaire, [email protected]. Maquette : Frédéric Vaxelaire, Dixit974, [email protected] 72116 - ISSN 0395-8886. Impression : SRIC.

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La semaine prochaine : Hier et aujourd’hui...Saint-Denis sur mer

Nous Nous sommes livrés à uN jeu bieN classique : celui d’aller sur place refaire les mêmes images que les lithographies vieilles d’uN siècle et demi ou les cartes postales ceNteNaires.première étape de cette promeNade comparative : le bas de la ville de saiNt-deNis.persoNNe Ne s’étoNNera si oN vous dit qu’il a uN peu chaNgé…

Réalisé par Daniel VAXELAIRE

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Hier et aujourd’hui...Saint-Denis sur mer

Saison 2 - Numero 44

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