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Sur l’organisation phytochimique de formations prairiales permanentes Philippe Lebreton, Bernard Jeangros, Christiane Gallet et Jan Scehovic Résumé : Les constituants organiques et minéraux de 18 dicotylédones de prairies permanentes ont été analysés. Après analyse multivariable, une bipolarisation apparaît entre un pool macromoléculaire (cellulose et lignine) et un pool d’éléments biogènes (potassium et phosphore, azote). Comme espèces caractéristiques, on peut citer, dans le premier cas, le Tragopogon pratensis L. (Composées) et le Galium mollugo L. (Rubiacées), et dans le second cas, l’Anthriscus sylvestris (L.) Hoffm. (Ombellifères) et le Geranium sylvaticum L. (Géraniacées). Au premier pôle correspondent les espèces les plus hélioxérothermophiles (Knautia arvensis (L. Coult) et Tragopogon pratensis), au second les espèces de milieux frais (comme l’Alchemilla xanthochlora Roth.), traduisant ainsi l’existence d’un déterminisme écophysiologique. En outre, des corrélations apparaissent entre cette organisation biochimique et écologique, et d’autres paramètres eux-mêmes liés, comme la sclérophyllie. Comparées à d’autres communautés végétales, ligneuses et sempervirentes, les formations prairiales sont déficitaires en composés phénoliques et en lignine, plus riches par contre en glucides et en éléments biogènes (potassium et phosphore), ce qui justifie leur valeur alimentaire. Pour cette communauté herbacée, le rapport C/N illustre le même équilibre général entre macromolécules pariétales et azote que pour deux autres communautés végétales (à dominante ligneuse) précédemmment étudiées, les différences observées traduisant des orientations distinctes à partir d’un schéma métabolique commun. Mots clés : communautés végétales dicotylédones, organisation biochimique, rapport C/N, écophysiologie. Abstract: Organic and mineral components have been analysed on 18 dicotyledonous species of permanent grassland communities. Multivariate analysis revealed an opposition between a macromolecular pool (cellulose and lignin) and a nutrient pool (potassium and phosphorus, nitrogen). The first pole is characterized by Tragopogon pratensis L. (Compo- sitae) and Galium mollugo L. (Rubiaceae), the second by Anthriscus sylvestris (L.) Hoffm. (Umbelliferae) and Gera- nium sylvaticum L. (Geraniaceae). The most thermo-helio-xerophilous species (Knautia arvensis (L.) Coult and Tragopogon pratensis) belong to the first group, whereas the second group includes the cool-environment species (like Alchemilla xanthochlora Roth.), which reveals an ecophysiological determinism. Moreover, correlations between the biochemical and ecological structure, and other interrelated parameters, including sclerophylly, have been shown. Com- pared to lignous and sempervirent plant communities, the grassland species have lower phenolic and lignin contents but higher glucide and nutrient (potassium and phosphorus) contents, which is in accordance with their food value. For this herbaceous community, the C/N ratio indicates the same general equilibrium between cell-wall macromolecules and ni- trogen than for two other plant communities (mainly ligneous) previously studied, with some differences revealing dis- tinct trends from the same general metabolic sheme. Key words: dicotyledonous plant communities, biochemical organization, C/N ratio, ecophysiology. Lebreton et al. 519 Introduction La biochimie des communautés végétales est un thème peu abordé, malgré l’existence d’une abondante littérature (d’ordre agronomique, pharmacologique, chimiotaxonomique) relative à la composition minérale et organique de nombreu- ses plantes. Cependant, la reconstitution de profils biochimi- ques phytocénotiques à partir de telles données serait entachée de deux défauts méthodologiques : l’hétérogénéité de l’échantillonnage (des points de vue biogéographique et écologique), l’hétérogénéité des analyses (sinon pour les élé- ments biogènes, du moins pour les macromolécules). Pour obtenir des résultats cohérents, il convient de comparer des végétaux non seulement prélevés dans le même contexte spatio-temporel, mais aussi analysés selon les mêmes proto- coles. Très peu de communautés végétales ont été envisagées dans un tel esprit. Gartlan et al. (1980) ont étudié la distribu- Can. J. Bot. 79: 510–519 (2001) © 2001 CNRC Canada 510 DOI: 10.1139/cjb-79-4-510 Reçu le 18 juillet 2000. Publié sur le site Web des Presses scientifiques du CRNC le 10 avril 2001. P. Lebreton. Laboratoire de biochimie végétale, Université Lyon-1, F 69622 Villeurbanne CEDEX, France. B. Jeangros et J. Scehovic. Station fédérale de recherches en production végétale de Changins, route de Duiller, CH-1260 Nyon 1, Suisse. C. Gallet 1 . Laboratoire de dynamique des écosystèmes d’altitude, Centre interdisciplinaire des sciences de la montagne, Université de Savoie, F-73376 Le Bourget-du-Lac CEDEX, France. 1. Auteur correspondant (courriel : [email protected]).

Sur l'organisation phytochimique de formations prairiales permanentes

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Page 1: Sur l'organisation phytochimique de formations prairiales permanentes

Sur l’organisation phytochimique de formationsprairiales permanentes

Philippe Lebreton, Bernard Jeangros, Christiane Gallet et Jan Scehovic

Résumé: Les constituants organiques et minéraux de 18 dicotylédones de prairies permanentes ont été analysés. Aprèsanalyse multivariable, une bipolarisation apparaît entre un pool macromoléculaire (cellulose et lignine) et un poold’éléments biogènes (potassium et phosphore, azote). Comme espèces caractéristiques, on peut citer, dans le premiercas, leTragopogon pratensisL. (Composées) et leGalium mollugoL. (Rubiacées), et dans le second cas, l’Anthriscussylvestris(L.) Hoffm. (Ombellifères) et leGeranium sylvaticumL. (Géraniacées). Au premier pôle correspondent lesespèces les plus hélioxérothermophiles (Knautia arvensis(L. Coult) et Tragopogon pratensis), au second les espèces demilieux frais (comme l’Alchemilla xanthochloraRoth.), traduisant ainsi l’existence d’un déterminismeécophysiologique. En outre, des corrélations apparaissent entre cette organisation biochimique et écologique, et d’autresparamètres eux-mêmes liés, comme la sclérophyllie. Comparées à d’autres communautés végétales, ligneuses etsempervirentes, les formations prairiales sont déficitaires en composés phénoliques et en lignine, plus riches par contreen glucides et en éléments biogènes (potassium et phosphore), ce qui justifie leur valeur alimentaire. Pour cettecommunauté herbacée, le rapport C/N illustre le même équilibre général entre macromolécules pariétales et azote quepour deux autres communautés végétales (à dominante ligneuse) précédemmment étudiées, les différences observéestraduisant des orientations distinctes à partir d’un schéma métabolique commun.

Mots clés: communautés végétales dicotylédones, organisation biochimique, rapport C/N, écophysiologie.

Abstract: Organic and mineral components have been analysed on 18 dicotyledonous species of permanent grasslandcommunities. Multivariate analysis revealed an opposition between a macromolecular pool (cellulose and lignin) and anutrient pool (potassium and phosphorus, nitrogen). The first pole is characterized byTragopogon pratensisL. (Compo-sitae) andGalium mollugoL. (Rubiaceae), the second byAnthriscus sylvestris(L.) Hoffm. (Umbelliferae) andGera-nium sylvaticumL. (Geraniaceae). The most thermo-helio-xerophilous species (Knautia arvensis(L.) Coult andTragopogon pratensis) belong to the first group, whereas the second group includes the cool-environment species (likeAlchemilla xanthochloraRoth.), which reveals an ecophysiological determinism. Moreover, correlations between thebiochemical and ecological structure, and other interrelated parameters, including sclerophylly, have been shown. Com-pared to lignous and sempervirent plant communities, the grassland species have lower phenolic and lignin contents buthigher glucide and nutrient (potassium and phosphorus) contents, which is in accordance with their food value. For thisherbaceous community, the C/N ratio indicates the same general equilibrium between cell-wall macromolecules and ni-trogen than for two other plant communities (mainly ligneous) previously studied, with some differences revealing dis-tinct trends from the same general metabolic sheme.

Key words: dicotyledonous plant communities, biochemical organization, C/N ratio, ecophysiology.

Lebreton et al.519Introduction

La biochimie des communautés végétales est un thème peuabordé, malgré l’existence d’une abondante littérature(d’ordre agronomique, pharmacologique, chimiotaxonomique)relative à la composition minérale et organique de nombreu-ses plantes. Cependant, la reconstitution de profils biochimi-ques phytocénotiques à partir de telles données seraitentachée de deux défauts méthodologiques : l’hétérogénéité

de l’échantillonnage (des points de vue biogéographique etécologique), l’hétérogénéité des analyses (sinon pour les élé-ments biogènes, du moins pour les macromolécules). Pourobtenir des résultats cohérents, il convient de comparer desvégétaux non seulement prélevés dans le même contextespatio-temporel, mais aussi analysés selon les mêmes proto-coles.

Très peu de communautés végétales ont été envisagéesdans un tel esprit. Gartlan et al. (1980) ont étudié la distribu-

Can. J. Bot.79: 510–519 (2001) © 2001 CNRC Canada

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DOI: 10.1139/cjb-79-4-510

Reçu le 18 juillet 2000. Publié sur le site Web des Presses scientifiques du CRNC le 10 avril 2001.

P. Lebreton. Laboratoire de biochimie végétale, Université Lyon-1, F 69622 Villeurbanne CEDEX, France.B. Jeangros et J. Scehovic.Station fédérale de recherches en production végétale de Changins, route de Duiller, CH-1260 Nyon 1,Suisse.C. Gallet1. Laboratoire de dynamique des écosystèmes d’altitude, Centre interdisciplinaire des sciences de la montagne, Universitéde Savoie, F-73376 Le Bourget-du-Lac CEDEX, France.

1. Auteur correspondant (courriel : [email protected]).

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tion des phénols (dont les tanins) et des alcaloïdes chez 93espèces de deux forêts pluviales africaines; l’azote, le phos-phore, les cendres et les sucres solubles ont été égalementdéterminés, mais sans comparaison ou structuration des deuxformations. De même, lorsque l’objectif de telles études estde tester l’attractivité des différents feuillages sur des herbi-vores, l’analyse biochimique est souvent restreinte aux seulscomposés secondaires auxquels sont attribuées des proprié-tés répulsives ou toxiques (Jung et al. 1979; Glyphis etPuttick 1988). Seul Genin (1990), dans son étude del’influence de la composition chimique des plantes herba-cées et ligneuses sur le régime alimentaire de caprins, a as-socié aux classiques valeurs minérales et pariétales, lestanins condensés.

L’étude foliaire de deux formations végétales essentielle-ment ligneuses et sempervirentes, la lande subalpine (Galletet Lebreton 1988) et le matorral méditerranéen (Lebreton etal. 1997), a mis en évidence une même organisation phyto-chimique au sein de ces communautés : opposition entre unpool moléculaire (dont les tanins) et un pool élémentaire(dont l’azote). Corrélativement, le classique rapport C/N or-donne au premier chef ces formations, constat d’autant plusintéressant que cet indicateur biochimique simple est lui-même en relation fonctionnelle avec d’autres compartimentsde l’écosystème : sol (biodégradation des litières), herbivo-res (palatabilité et digestibilité de la biomasse). En revanche,aucune formation annuelle et herbacée ne semble avoir étéabordée de ce point de vue, les études disponibless’attachant plutôt à considérer globalement la qualité (no-tamment fourragère) d’un peuplement végétal, souvent dansson évolution saisonnière.

Il nous a donc paru opportun d’ajouter à la liste des com-munautés végétales précédemmment analysées un nouveautype bioécologique : les dicotylédones de milieu prairial per-manent mésophile, que ses caractères dominants (habitusherbacé, caducité foliaire, faible sclérophyllie) opposent plu-

tôt aux cas précédents. De tels peuplements présentent, enoutre, un grand intérêt fourrager (Scehovic 1988). Ainsisera-t-il éventuellement possible d’éprouver si le modèleprécédemment proposé (Gallet et Lebreton 1988) est généra-lisable dans le cadre d’une réflexion synécologique sur la« biochimie des peuplements végétaux » : comment, au seind’une communauté, les plantes procèdent-elles à l’allocationdes ressources matérielles et énergétiques issues de la photo-synthèse, pour assurer leur persistance dans un contexte decompétition et de consommation.

Matériel et méthodes

Échantillonnage botaniqueL’analyse porte sur 18 dicotylédones récoltées dans diverses

prairies permanentes de Suisse romande (tableaux 1 et 2). Les mo-nocotylédones ont été écartées pour éviter tout biais chimiosysté-matique. Ces prairies étaient toutes fauchées, au moins une fois parannée, et fertilisées par des engrais de ferme. Elles relevaient leplus souvent de l’alliance de l’Arrhenatherionou du Polygono-Trisetion (Jeangros et al. 1994a). Le type biologique (tableau 3)ainsi que les exigences écologiques de ces espèces à l’égard desparamètres humidité, lumière et température (échelle de 1 à 5d’après Landolt (1977)) et un indice empirique de sclérophyllie(échelle de 1 à 3)(tableau 4) ont également été attribués à chaqueespèce. Les caractères morphologiques, biologiques, écologiques etagronomiques des 18 espèces ont été fournis ailleurs (Jeangros etal. 1994a, 1994b, 1994c, 1995).

Pour chaque espèce, nous avons réalisé une quinzaine de prélè-vements dans neuf stations (tableau 2), toujours sur la premièrepousse de l’année, en début de floraison; les valeurs présentéesconstituent donc des moyennes populationnelles minimisantd’éventuelles variabilités individuelles. Seules les parties situées3 cm au moins au-dessus du sol ont été retenues. Après séchage(55–60°C), les échantillons ont été moulus dans un moulin à mar-teau (grille de 1 cm) puis conservés à l’abri de la lumière. Enoutre, un second prélèvement a été conduit en parallèle et soumisaux mêmes analyses biochimiques, afin de déceler toute erreur ex-

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Lieu deprélèvement*

Altitude(m)

Type desol

pH dusol

Utilisationprincipale Alliance†

Richessefloristique Espèces principales

Nyon (VD) 400 Sol brun 6,0–6,5 Fauche AR 30–35 Dactylis glomerataL., Poa trivialis L.,Arrhenatherum elatius(L.) Beauv.

Genolier (VD) 500 Sol brun 6,0–6,5 Fauche AR 30–35 Poa pratensisL., Lolium perenneL.,Arrhenatherum elatius

Le Châtelard (FR) 950–1000 Sol brun 5,5–6,5 Fauche AR ou PT 20–30 Poa pratensis, Lolium perenne, TrifoliumrepensL.

Rougemont (VD) 1000 Sol brun 5,5 Fauche PT 20–25 Polygonum bistorta, Taraxacum officinaleWeber,Trifolium repens

Les Bayards (NE) 950–1150 Sol brun 6,0–7,0 Fauche PT 25–35 Poa pratensis, Taraxacum officinale,Trifolium repens

La Brévine (NE) 1050 Sol brun 5,5–6,0 Fauche PT 30–35 Alopecurus pratensisL., Taraxacumofficinale, Poa trivialis

Couvet (NE) 1150 Sol brun 5,5–6,0 Fauche PT 35–40 Dactylis glomerata, Trifolium repens,Alopecurus pratensis

Bullet (VD) 1200 Sol brun 5,5–6,0 Fauche PT 25–35 Taraxacum officinale, Agrostis capillarisL., Dactylis glomerata

Orsières (VS) 1200 Phaeozem 7,0–7,5 Fauche PT 35–45 Tristetum flavescens(L.) Beauv.,FestucapratensisHuds.,Dactylis glomerata

*Les données entre parenthèses sont les cantons : FR, Fribourg; NE, Neuchâtel; VD, Vaud; VS, Valais.†AR, Arrhenatherion; PT, Polygono-Trisetion.

Tableau 1. Localisation géographique et principales caractéristiques des lieux de prélèvement.

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périmentale. Les écarts constatés ne dépassaient pas l’ordre degrandeur de la reproductibilité des dosages (1–5% en valeur rela-tive pour les macromolécules et les éléments biogènes).

Analyses chimiques

Molécules organiquesLes composés glucidiques et phénoliques ont été analysés à la

Station fédérale de recherches en production végétale de Changins(Nyon, Vaud, CH) selon les méthodes décrites par Scehovic (1979,1990) pour la cellulose, la lignine et les phénols totaux solubles.La nature proanthocyanique ou ellagique des tanins a été déter-minée au Laboratoire de biochimie végétale de Lyon (Rhône,France), par spectrophotométrie et chromatographie sur papieraprès hydrolyse chlorhydrique.

Éléments minéraux

Métalloïdes.Le carbone et l’azote ont été dosés par le Centre demicroanalyse élémentaire, Centre national de la recherche scienti-fique, Solaize (Rhône, France), le premier par combustion sous O2à 850°C suivie de détection infrarouge du CO2 formé, le second

par combustion sous He et O2 puis réduction suivie de catharo-métrie de l’azote obtenu. Le phosphore a été analysé à la station deChangins par colorimétrie, après calcination puis solubilisation auHCl.

Métaux. Outre les cendres (Centre national de la recherche scienti-fique, Solaize), le potassium, le calcium et le magnésium ont étédosés à la station de Changins par absorption atomique, après cal-cination puis solubilisation au HCl.

Traitement des donnéesLes 11 variables biochimiques ainsi obtenues (tableau 4) pour

les 18 espèces ont permis de calculer d’autres variables secondai-res présentant un intérêt physiologique et (ou) écologique : rapportC/N, rapport P/Ca, rapport K/(Ca + Mg). Finalement, nous avonssélectionné huit variables actives (tableau 5), auxquelles s’ajoutentd’autres paramètres biochimiques ou écologiques traités en varia-bles supplémentaires, tels que C/N, cellulose + lignine et l’indiceHTL (température + lumière – humidité).

La matrice de données 18 lignes (= espèces végétales) × (8 + 7)colonnes (= caractères biochimiques ou écologiques) a été soumise

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512 Can. J. Bot. Vol. 79, 2001

Lieu deprélèvement Ami Axa Asy Cmo Gmo Gsy Hsp Kar Lvu Ovi Pla Pbi Rfr Rac Sdi Svu Tor Tpr

Nyon ++ + ++ +Genolier ++++ +++ + + ++++ ++++ ++ + ++ ++ ++Le Châtelard ++ + ++ ++ + + + +Rougemont ++ + +++ + +Les Bayards ++ ++ ++ ++ ++++ + + + +++ + ++ ++La Brévine + + + + + + + +Couvet + + + + + +Bullet ++ + + + ++ ++ ++ + ++ + ++ ++Orsières ++ + + + +

Nota : Les symboles des espèces sont définis au tableau 3.

Tableau 2. Répartition, selon les lieux de prélèvement, des 18 espèces prairiales étudiées.

Espèce* Famille Code† Type biologique‡

Achillea millefoliumL. stricto sensu Composées Amiu GEAlchemilla xanthochloraRoth. (A. vulgarisauct.) Rosacées Axat GEAnthriscus sylvestris(L.) Hoffm. Ombellifères Asyu HCCentaurea montanaL. Composées Cmou HCGalium mollugoL. stricto sensu Rubiacées Gmou GEGeranium sylvaticumL. Géraniacées Gsyt GEHeracleum sphondyliumL. stricto sensu Ombellifères Hspu GEKnautia arvensis(L.) Coult Dipsacacées Kara HCLeucanthemum vulgareLam. Composées Lvuc HCOnobrychis viciifoliaScop. Papillionacées Ovia HCPlantago lanceolataL. Plantaginacées Plau HCPolygonum bistortaL. Polygonacées Pbiu GERanunculus acrisL. subsp.friesianus(Jord.) Syme Renonculacées Rfru GERumex acetosaL. Polygonacées Racc HCSilene dioica(L.) Clairv. Caryophyllacées Sdit HCSilene vulgaris(Moench) Garcke stricto sensu Caryophyllacées Svuu GETragopogon pratensisL. subsp.orientalis (L.) Celak Composées Tora HCTrifolium pratenseL. stricto sensu Papillionacées Tprc HC

*Nomenclature selon Aeschimann et Heitz (1996).†Désignation des indices supérieurs :a, espèces particulières à l’Arrhenatherion; c, espèces communes aux deux alliances;t, espèces particulières au

Polygono-Trisetion; u, espèces ubiquistes.‡GE, géophyte; HC, hémicryptophyte.

Tableau 3. Caractéristiques écologiques et floristiques des 18 espèces prairiales étudiées.

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à des traitements statistiques simples (corrélations linéaires dePearson, test de Mann–Whitney) et analyses multivariables (ana-lyse en composantes principales normée, logiciel Statitcf).

Résultats

Ordination généraleLa majorité de l’information matricielle est portée par les

deux premiers axes d’une analyse en composantesprincipales (respectivement, 42 et 18% de l’information); letroisième axe (12%) ne présente pas de signification biolo-gique particulière. Les figures 1 et 2 rendent respectivementcompte du positionnement relatif des caractères et des espè-ces dans le plan F1–F2. Le premier axe oppose un pool ma-cromoléculaire (cellulose,r = –0,86, et lignine,r = –0,73) àun pool élémentaire (azote,r = 0,65, et phosphore,r = 0,73)

Espèce C (%) C/N K/(Ca + Mg) P/Ca (×10) Glt (%) C+L (%) Scl Hum Lum Tem HTLAmi 41,3 28,5 1,91 2,04 36,8 29,6 2 2 4 3 5Axa 42,9 18,0 2,20 3,59 32,3 17,1 0 4 3 2 1Asy 41,8 13,2 2,76 3,36 31,5 20,5 1 3 3 3 3Cmo 41,9 18,7 2,39 2,66 31,8 21,0 1 3 3 2 2Gmo 42,4 25,7 1,61 2,64 35,7 33,1 2 3 3 4 4Gsy 42,2 17,7 1,78 5,55 21,4 17,9 1 3 3 2 2Hsp 39,6 14,9 2,01 3,03 32,6 20,0 1 3 3 3 3Kar 44,2 25,7 1,02 2,32 33,6 26,4 1 2 4 4 6Lvu 42,3 25,4 2,24 4,03 37,6 26,0 1 3 4 4 5Ovi 43,3 12,6 1,18 2,28 28,7 24,2 1 2 4 4 6Pla 42,2 20,1 1,43 2,28 33,7 20,0 0 2 3 3 4Pbi 42,8 13,0 3,04 6,56 27,8 22,5 1 4 3 3 2Rfr 41,6 28,9 1,48 3,91 42,0 26,4 1 3 3 3 3Rac 42,8 18,4 3,00 7,55 34,3 23,4 1 3 4 3 4Sdi 41,9 19,5 4,15 5,56 35,8 18,9 1 4 3 3 2Svu 41,9 20,7 3,26 4,59 29,6 23,9 2 2 3 3 4Tor 42,7 23,5 0,88 3,38 42,7 28,7 1 2 4 4 6Tpr 43,1 16,0 1,24 1,51 27,6 23,2 1 3 3 3 3

Moyenne 42,3 20,0 2,09 3,71 33,1 23,5Écart type 1,0 5,2 0,88 1,67 5,2 4,3

Nota : C+L, cellulose + lignine; Glt, glucides totaux (= sucres solubles + cellulose); HTL, température (Tem) + lumière (Lum) – humidité (Hum)(échelle de 1 à 5d’après Landolt (1977) pour Tem, Lum et Hum); Scl, indice de sclérophyllie (empirique, échelle de 1 à 3).

Tableau 4. Liste des 11 variables retenues (ou non) pour l’analyse en composantes principales normée (variables supplémentaires).

Espèce Phe (%) Cel (%) Lig (%) Suc (%) Azo (%) Pho (%) Pot (%) Cal (%)

Ami 3,3 (1,0) 19,7 (3,0) 9,9 (1,8) 17,1 (4,4) 1,45 (0,37) 0,22 (0,04) 2,45 (0,22) 1,08 (0,14)Axa 8,0 (0,9) 13,1 (1,3) 4,0 (1,1) 19,2 (1,4) 2,38 (0,29) 0,28 (0,05) 2,16 (0,16) 0,78 (0,21)Asy 3,3 (0,6) 14,8 (3,7) 5,7 (2,5) 16,7 (3,8) 3,17 (0,54) 0,38 (0,07) 3,76 (1,06) 1,13 (0,19)Cmo 3,7 (0,5) 15,6 (1,8) 5,4 (0,6) 16,2 (3,4) 2,24 (0,31) 0,25 (0,06) 2,84 (0,73) 0,94 (0,44)Gmo 2,3 (0,3) 21,7 (3,1) 11,4 (2,4) 14,0 (2,5) 1,65 (0,35) 0,24 (0,06) 1,75 (0,53) 0,91 (0,10)Gsy 12,7 (1,8) 13,6 (3,4) 4,3 (1,7) 7,8 (2,7) 2,38 (0,64) 0,70 (0,11) 2,63 (0,51) 1,26 (0,15)Hsp 2,8 (0,3) 14,7 (1,3) 5,3 (1,7) 17,9 (2,9) 2,66 (0,57) 0,40 (0,12) 3,39 (1,00) 1,32 (0,18)Kar 3,8 (0,4) 19,7 (2,6) 6,7 (1,8) 13,9 (2,4) 1,72 (0,33) 0,23 (0,07) 1,33 (0,50) 0,99 (0,18)Lvu 3,9 (0,6) 18,9 (3,2) 7,1 (2,2) 18,7 (3,5) 1,67 (0,18) 0,31 (0,02) 2,22 (0,71) 0,77 (0,11)Ovi 5,5 (0,5) 16,9 (1,6) 7,3 (1,0) 11,8 (1,5) 3,44 (0,32) 0,23 (0,04) 1,41 (0,24) 1,01 (0,20)Pla 5,6 (0,9) 13,8 (3,0) 6,2 (1,4) 19,9 (3,8) 2,10 (0,31) 0,33 (0,05) 2,28 (0,17) 1,45 (0,20)Pbi 6,0 (1,0) 15,3 (2,2) 7,2 (1,4) 12,5 (2,1) 3,29 (0,50) 0,40 (0,04) 2,89 (0,47) 0,61 (0,15)Rfr 2,5 (0,4) 19,6 (1,8) 6,8 (1,5) 22,4 (3,5) 1,44 (0,25) 0,36 (0,05) 1,69 (0,44) 0,92 (0,16)Rac 3,9 (1,3) 19,0 (3,6) 4,4 (2,2) 15,3 (3,9) 2,33 (0,52) 0,37 (0,08) 2,27 (0,44) 0,49 (0,17)Sdi 2,1 (0,4) 13,9 (3,0) 5,0 (2,0) 21,9 (2,5) 2,15 (0,67) 0,30 (0,08) 3,36 (0,85) 0,54 (0,14)Svu 2,4 (0,3) 18,4 (2,8) 5,5 (0,9) 11,2 (1,3) 2,03 (0,39) 0,34 (0,07) 3,42 (0,67) 0,74 (0,23)Tor 2,0 (0,4) 20,6 (3,0) 8,1 (2,4) 22,1 (3,6) 1,82 (0,36) 0,26 (0,05) 0,91 (0,59) 0,77 (0,16)Tpr 4,1 (1,0) 16,5 (2,5) 6,7 (1,8) 11,1 (2,8) 2,69 (0,37) 0,22 (0,03) 2,14 (0,58) 1,46 (0,21)

Moyenne 4,3 17,0 6,5 16,1 2,3 0,32 2,38 0,95Écart type 2,6 2,7 1,9 4,2 0,6 0,11 0,79 0,29

Nota : Azo, azote; Cal, calcium; Cel, cellulose; Lig, lignine; Phe, phénols totaux; Pho, phosphore; Pot, potassium; Suc, sucres solubles. La valeurmoyenne a été obtenue à partir d’une quinzaine de prélèvements; l’écart type est donné entre parenthèses.

Tableau 5. Liste des huit variables biochimiques retenues pour l’analyse en composantes principales normée (variables actives).

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Fig. 1. Plan factoriel F1–F2 de l’analyse en composantes principales normée conduite sur huit variables actives (fléchées) et six vari-ables supplémentaires (non fléchées). A, macromolécules et caractères pariétaux; B, éléments biogènes. Voir la légende des tableaux 4et 5 pour les abréviations.

Fig. 2. Positionnement des 18 espèces prairiales sur le plan F1–F2 de l’analyse en composantes principales normée. A, Composées; B,Ombellifères; C, Papilionacées. Voir la légende du tableau 3 pour les abréviations.

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auxquels s’ajoutent les phénols (r = 0,74). De manière trèsinstructive, nombreuses sont les variables supplémentairess’inscrivant significativement sur cet axe à côté des macro-molécules pariétales : le rapport C/N (r = –0,74), les gluci-des totaux (sucres solubles et cellulose,r = –0,82) et l’indiceHTL (r = –0,62). La figure 3 rend compte des corrélationssignificatives entre diverses variables. Le deuxième axe n’estvraiment structuré que par les sucres solubles (r = 0,67).

Comparativement aux formations (ligneuses) précédem-ment étudiées, où la moitié des espèces étaient riches enphénols et même en tannins, seules, ici, trois espèces(Geranium sylvaticum, Polygonum bistortaet Alchemillaxanthochlora) possèdent des quantités de phénols totaux si-gnificatives, entre 6 et 13%. On peut néanmoins reconnaîtrela même dualité phytochimique entre deux pôles, l’un richeen éléments biogènes, l’autre en macromolécules pariétales(cellulose et lignine) et de rapport C/N élevé.

Aspects biochimiquesUne bonne part des équilibres biochimiques évoqués reste

à mieux formaliser, notamment en termes métaboliques,ainsi qu’à l’aide du rapport C/N, particulièrement efficacepour les autres phytocénoses.

Composition phénoliqueSur les 18 dicotylédones étudiées, les 3 espèces qui pré-

sentent une teneur importante en phénols totaux présententégalement un pouvoir tannant notable, corroboré pour 2d’entre elles par la présence de composés ellagiques (Gera-nium sylvaticum) ou de procyanidine (Polygonum bistorta).En ce qui concerne l’Alchemilla xanthochlora, deux espècescongénériques analysées par Bate-Smith (1962) contiennentdes dérivés de l’acide ellagique et de la procyanidine.Compte tenu de la situation très duale du paramètre tanins(valeurs extrêmes :Ranunculus acris, 0 mg g–1, et Geraniumsylvaticum, 47 mg g–1), nous avons préféré représenter lemétabolisme phénolique par la seule variable phénols totauxsolubles, mieux graduée (valeurs extrêmes :Tragopogonpratensis, 20 mg g–1, et Geranium sylvaticum, 127 mg g–1);les deux paramètres sont d’ailleurs extrêmement corrélés(r = 0,92;p < 0,001). Quant à la lignine, autre produit de la

voie phénolique, elle est certes corrélée négativement auxdeux variables phénoliques (ce qui peut témoigner d’uneconcurrence biogénétique à partir de précurseurs phényl-propanoïdes communs) mais la relation n’est pas assuréestatistiquement (r = –0,40;p = 0,10).

Comme autres métabolites (potentiellement répulsifs), oncitera également (non pris en compte directement dans notreanalyse) les terpènes, présents en forte teneur chez leCen-taurea montana(195 mg g–1) et chez leLeucanthemum vul-gare (78 mg g–1), mais pratiquement absents (<10 mg g–1)de la plupart des autres espèces (12 sur 18).

Composition glucidiqueLes sucres solubles sont présents en teneur moyenne

élevée (6,2%), tout comme la cellulose (17,0%); tous deuxsont affectés d’écart types plutôt faibles (4,0 et 2,7%, res-pectivement). Par le fait, la teneur en glucides totaux assimi-lables à terme par les herbivores est remarquablement élevéeet assez constante : 33,1% (écart type, 5,2%).

Composition minérale

Métaux.Le potassium est en moyenne plus abondant(2,38%) que le calcium (0,95%), d’où la corrélation du pre-mier avec les cendres (voir ci-dessous). Du coup, le rapportalcalins/alcalino-terreux K/(Ca + Mg) est élevé (2,09). Cesteneurs en calcium (valeurs extrêmes :Rumex acetosa,0,49%, etTrifolium pratense, 1,46%) sont d’ailleurs nette-ment inférieures à celles trouvées par Delpech et Denudt(1978) (Trifolium alpinum L., 0,75%, etLotus cornicula-tus L., 8,42%) pour des prairies d’alpage de Maurienne(1700–2350 m d’altitude) sur sols, il est vrai, souvent calcai-res, voire gypseux. La situation est d’ailleurs plus compa-rable pour le potassium (valeurs extrêmes : cette étude,Tragopogon pratensis, 0,91%, et Anthriscus sylvestris,3,76%, versusChaerophyllum hirsutumL., 0,51%, etLeon-todon hispidusL., 3,99%, en Maurienne). Quant aux cen-dres, elles évoluent (cette étude) entre 1,33% (Knautiaarvensiset 8,59% (Anthriscus sylvestris) contre 2,51% (Ca-rex humilis Leyss.) et 23,34% (Lotus corniculatus, surgypse) en Maurienne.

Métalloïdes.Les teneurs moyennes en azote et en phosphoresont élevées, respectivement 2,26 et 0,32%. Si nous compa-rons sept espèces soumises à fumure azotée à 11 espèces li-bres de cette influence, il n’y a pas de différencesignificative en ce qui concerne leur teneur (± écart type) enazote : 2,52 ± 0,62% versus 2,10 ± 0,57% (t = 1,39; p =0,18). Le rapport P/Ca est égal à 0,37; quant au rapport C/N,il s’inscrit en moyenne à 20,0 ± 5,1, valeur plutôt faible.

Corrélations entre variablesPauvres en phénols (et en tanins) en tant qu’herbacées, les

espèces prairiales voient la variable phénols totaux solublesnettement opposée (r = –0,67;p = 0,003) à la variable gluci-des totaux, et liée positivement (r = 0,67;p = 0,003) à la va-riable phosphore. Même chimiquement sommaire,l’opposition entre cendres et carbone (r = –0,62;p < 0,01)symbolise bien la balance minérale–organique du premieraxe de l’analyse multivariable; les mêmes cendres sontd’ailleurs corrélées positivement, d’une part, au potassium(r = 0,84; p < 0,001), principal élément métallique présent,et négativement, d’autre part, à la cellulose (r = –0,59;p =

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Fig. 3. Corrélations linéaires significatives entre les principalesvariables structurant les formations prairiales permanentes (*p =0,06; **p < 0,05; ***p < 0,01).

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0,01) et à la somme pariétale cellulose + lignine (r = –0,52;p = 0,03).

L’azote est corrélé, négativement, aussi bien aux glucidestotaux (r = –0,65;p = 0,005) qu’à la cellulose (r = –0,58;p = 0,01) et à la somme cellulose + lignine (r = –0,53;p =0,03). En d’autres termes, il y a antagonisme entre métabo-lismes azoté et glucidique lato sensu. En fin de compte, lerapport C/N constitue également ici un excellent indicateurglobal de ces relations biochimiques : il est en effet corrélépositivement à la cellulose, à la lignine, aux glucides totauxet à la somme pariétale (r = 0,69, 0,51, 0,68 et 0,67, respec-tivement; 0,002 <p < 0,03) et négativement au potassium(r = –0,45;p = 0,06); rappelons qu’il est coextensif de l’axeF1 de l’analyse multivariable.

Aspects systématiques et anatomiquesBien que les caractères biochimiques retenus n’aient pour

la plupart que peu de valeur chimiotaxonomique (cellulose,calcium, etc.), on notera la proximité respective des deux lé-gumineuses, des deux ombellifères, des deux polygonacéeset des deux caryophyllacées et la localisation des quatrecomposées dans le même quadrant N.-O. (fig. 2); la seulegéraniacée étudiée est excentrée (quadrant S.-E.) en raisonde sa teneur phénolique élevée. Composées (+ Dipsacacées)et Ombellifères s’opposent à de nombreux titres par leurcomposition biochimique moyenne (tableau 6). Néanmoins,les différences minérales observées peuvent aussis’expliquer en partie par le fait que les ombellifères analy-sées proviennent de milieux plus fertilisés que les compo-sées issues de prairies plus extensives.

La sclérophyllie dépend à priori de la richesse en macro-molécules pariétales, lignine et (ou) cellulose. À noter queces deux macromolécules sont liées entre elles (r = 0,70;p <0,002), malgré des origines métaboliques bien distinctes; àplus forte raison leur somme est-elle corrélée à l’axe F1 del’analyse en composantes principales (r = 0,87; p < 0,001),opposant ainsi l’Alchemilla xanthochloraauGalium mollugo(cellulose + lignine = 17,1% versus 33,1%, respectivement).

Même appréciée sommairement (échelle à 3 niveaux), lesrésultats concernant la sclérophyllie confirment ceux déjàobtenus dans le contexte pourtant tout différent du matorral :alors que cellulose (r = 0,63;p = 0,005) et lignine (r = 0,58;p = 0,02) présentent chacune une certaine corrélation posi-tive avec la sclérophyllie, la corrélation est plus nette encoreavec leur somme, ou en régression à deux variables (r =0,66; p = 0,005; les deux macromolécules ont des contribu-tions voisines avec des coefficients respectifs de 0,088 et0,075). Regroupées, les valeurs ligno-cellulosiques des troisclasses de sclérophyllie sont assez distinctes (tableau 7),malgré les faibles effectifs des classes extrêmes. Dans leplan F1–F2 de l’analyse multivariable, on remarquera le posi-tionnement de la sclérophyllie (traitée en variable supplé-mentaire) entre cellulose et lignine (ainsi que la proximité dela lignine avec l’indice hélioxérothermique; voir ci-dessous).

Discussion

Approche écologique et écophysiologiqueIl est possible de relier chacun des paramètres écologiques

ou biologiques qualifiant les espèces végétales à certainesvariables biochimiques (tableau 8), mettant ainsi en évidence

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Cellulose +lignine (%) Azote (%) C/N K (%)

ComposéesAchillea millefolium 29,6 1,45 28,5 2,45Centaurea montana 21,0 2,24 18,7 2,84Leucanthemum vulgare 26,0 1,67 25,4 2,22Tragopogon pratensis 28,7 1,82 23,5 0,91DipsacacéesKnautia arvensis 26,4 1,72 25,7 1,33

Moyenne (Composées + Dipsacacées) 26,3 (3,3)a 1,78 (0,29)a 24,4 (3,6)a 1,95 (0,80)aOmbellifèresHeracleum sphondylium 20,5 2,66 14,9 3,39Anthriscus sylvestris 20,0 3,17 13,2 3,76

Moyenne 20,3 (0,3)b 2,92 (0,25)b 14,1 (0,9)b 3,58 (0,19)b

Nota : Les moyennes sont suivies des écarts types entre parenthèses. Pour chaque variable, la présence de lettres différentes indique unedifférence significative entre les moyennes de chacun des deux groupes (testU de Mann–Whitney,p = 0,03).

Tableau 6. Comparaison biochimique entre Composées (+ Dipsacacées) et Ombellifères.

Classe de sclérophyllie Cellulose (%) Lignine (%) Cellulose + lignine (%)

Classe 1, faible (n = 2) 13,5 (0,4)a 5,1 (1,1)a 18,6 (1,5)aClasse 2, moyenne (n = 13) 16,9 (2,4)b 6,2 (1,2)a 23,0 (3,3)aClasse 3, forte (n = 3) 19,9 (1,7)c 8,9 (3,1)a 28,9 (4,6)b

Nota : Les moyennes sont suivies des écarts types entre parenthèses. Pour chaque variable, la présence de lettresdifférentes indique une différence significative entre les moyennes des classes de sclérophyllie (testU de Mann–Whitney,p =0,05).

Tableau 7. Abondance des macromolécules pariétales en fonction des classes de sclérophyllie chez les 18espèces prairiales étudiées.

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diverses corrélations physiologiques. La cellulose, voire lepotassium, apparaissent ainsi comme des dénominateurscommuns d’un même déterminisme métabolique.

De plus, non seulement les trois paramètres écologiqueshumidité, température et lumière attachés aux espèces végé-tales sont-ils corrélés à l’abscisse de celles-ci sur le premieraxe de l’analyse multivariée (humidité opposée à tempéra-ture et lumière, évidemment), mais ils le sont égalemententre eux (0,45 <r < 0,60; 0,06 >p > 0,01). Il est donc licitede résumer le contexte climatique prairial en sommant lesindices HTL, définissant ainsi un indicateur HTL global,gradué de 1 (Alchemilla xanthochlora, espèce mésohygro-phile d’environnement frais) à 6 (espèces hélioxérothermo-philes : Knautia arvensisou Tragopogon pratensis). Cetindice HTL est fortement corrélé à l’axe F1 (r = –0,67;p <0,01), sans corrélation avec l’axe F2. Alors que, prises sépa-rément, cellulose et lignine sont corrélées positivement à latempérature (voir tableau 8), l’indice HTL est lié, en corréla-tion double, à la paire cellulose + lignine (r = 0,70; p <0,01), la première pesant 5 fois plus que la seconde (coeffi-cients respectifs de 0,036 et 0,0069). On peut égalementcomparer le profil biochimique des deux sous-ensemblesrespectivement moins (HTL = 1–3; 9 espèces) et plus hé-lioxérothermophiles (HTL = 4–6; 9 espèces également) (ta-bleau 9).

En d’autres termes, un contexte hélioxérothermique favo-rise la présence d’espèces riches en macromolécules pariéta-les, par le fait sclérophylles; inversement, un environnementplus frais favorise l’assimilation minérale (potassium et mé-talloïdes biogènes). On saisit donc ici un déterminisme éco-logique de l’équilibre général organique ou inorganique.D’ailleurs, si nous comparons trois espèces de plaine del’ Arrhenatherion (Knautia arvensis, Onobrychis viciifolia,Tragopogon pratensis) à trois espèces montagnardes duTri-setion (Alchemilla xanthochlora, Geranium sylvaticum, Si-lene dioica), celles-ci diffèrent par leurs constituantsmacromoléculaires et par le potassium (mais ni par l’azoteni par les sucres solubles), les espèces communes aux deuxalliances présentant en outre des valeurs intermédiaires (ta-bleau 10).

En ce qui concerne les types biologiques (Raunkiaersensu), la comparaison peut être faite entre les 8 géophyteset les 10 hémicryptophytes étudiées. Aucune différence si-gnificative n’est ici observée en ce qui concerne leur teneur

(± écart type) en sucres solubles (14,9 ± 4,6% versus 16,8 ±3,9%), en cellulose (17,0 ± 3,2% versus 17,0 ± 2,5%), en li-gnine (6,8 ± 2,6% versus 6,3 ± 1,1%) ou en azote (2,16 ±0,65% versus 2,33 ± 0,60%); ce paramètre ne semble doncpas biochimiquement déterminant.

Comparaison généraleL’opposition observée ici entre lignine et éléments biogè-

nes sur le premier axe de l’ACP a été également observéelors d’études de régime alimentaire et dans des contextestrès différents, que ce soit dans des formations arbustivesd’Afrique du Sud (Cooper et al. 1988), en milieu méditerra-néen semi-aride mexicain (Genin 1990) ou dans les ozarksdu Missouri (Vangilder et al. 1982), et ceci, malgrél’hétérogénéité des méthodologies utilisées. Mais dans cesdeux derniers cas, les communautés végétales comprenaientà la fois herbacées et ligneux.

Or, sans préjuger ici d’une « modélisation » de la bio-chimie des peuplements végétaux, d’assez nettes différencesde composition chimique sont notables entre la formationprairiale et le matorral méditerranéen ou la lande subalpineprécédemment étudiés de façon similaire (Lebreton et al.1997; Gallet et Lebreton 1988) (tableau 11), différencesqu’il est possible de rapporter au premier chef à leurs natu-res respectivement herbacée (prairies) ou ligneuse (matorralet lande). La principale différence biochimique existant entrela communauté prairiale et les deux autres communautésprécédemment étudiées est en effet d’ordre pariétal, avecune moindre teneur (± écart type) en lignine (6,5 ± 1,9%contre environ 13%) et, inversement, une teneur en celluloseplus élevée (17,0 ± 2,7% contre environ 12%). Les espècesde prairie disposent donc, par compensation, d’un pool ma-cromoléculaire sensiblement égal, de l’ordre de 25% de lamasse sèche. La pauvreté phénolique prairiale est confirméepar la moindre fréquence des espèces tannifères (17% contre50 et 100% pour le matorral méditerranéen et la lande subal-pine, respectivement), comme par une plus faible teneur(± écart type) en phénols solubles totaux (43 ± 26 mg g–1

contre, en moyenne, 80 ± 34 mg g–1 et 125 ± 54 mg g–1

pour le matorral méditerranéen et la lande subalpine, respec-tivement.

La teneur en sucres solubles de la formation prairiale estsupérieure (16%) à celle des espèces forestières ou préfores-tières (environ 10%); elle s’ajoute à une teneur cellulosiqueégalement plus élevée, si bien que la somme sucres solubles+ cellulose est nettement plus élevée chez les espèces deprairies (33% contre 21 et 24% pous les espèces forestièreset préforestières, respectivement). Le rapport cellulose/li-gnine ou, mieux encore, glucides/lignine (5 contre, au maxi-mum, 2), est également intéressant à formuler, car il rendbien compte de l’aiguillage des produits de la photosynthèseentre deux grandes voies métaboliques essentielles pour levégétal.

En d’autres termes, alors que les produits immédiats de laphotosynthèse sont investis en molécules organiques géné-rées par voie métabolique simple chez les herbacées, leurtransformation plus complexe en direction des produits phé-noliques, tanins et lignine, est notable chez les ligneuses. Ence qui concerne l’azote, sa teneur (2,3% pour les herbacéescontre 1,6% pour les ligneuses) correspond sensiblement àune valeur protéique de 14%. Quant au rapport C/N, il dis-

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Corrélation

Paramètre écologique Variable biochimiquer pLumière Cellulose 0,569 0,02

Potassium –0,566 0,02Cendres –0,576 0,02

Température Phénols –0,517 0,03Cellulose 0,683 0,003Lignine 0,633 0,005Phosphore –0,465 0,05Potassium –0,523 0,03Cendres –0,486 0,05

Humidité Cellulose –0,480 0,05K/(Ca + Mg) 0,563 0,02

Tableau 8. Corrélations linéaires significatives entre les troisparamètres climatiques et les variables biochimiques.

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crimine bien herbacées et formations caducifoliées (C/N =20) des formations sempervirentes (C/N = 35 et 36 pour lalande subalpine et le matorral, respectivement), comme le

fait par ailleurs la teneur en phosphore (caducifoliées,0,32%, versus sempervirentes, 0,14 et 0,11% pour la landesubalpine et le matorral, respectivement), le rapport phos-

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Mésophile (n = 9) Xérophile (n = 9)

Cellulose (%) 15,6 (2,9)a < 18,7 (2,3)bLignine (%) 5,6 (1,1)a < 7,4 (2,2)bCellulose + lignine (%) 20,8 (2,9)a < 26,1 (3,9)bC/N 17,8 (4,8)a < 22,3 (4,9)bK (%) 2,76 (0,68)a > 2,00 (0,75)b

Nota : Les moyennes sont suivies des écarts types entre parenthèses. Pour chaque paramètre, laprésence de lettres différentes indique une différence significative entre les moyennes des deuxsous-ensembles (testU de Mann–Whitney;p < 0,01 pour cellulose et cellulos + lignine;p < 0,05pour les autres variables).

Tableau 9. Comparaison biochimique des sous-ensembles écologiques prairiaux mésophile etxérophile.

Espèces propres àl’ Arrhenatherion(n = 3)

Espèces propresau Polygono-Trisetion (n = 3)

Espèces communes auxdeux faciès (n = 3)

Paramètres distinctsCellulose (%) 19,1 (1,9)a 13,5 (4,0)b 18,6 (1,6)aLignine (%) 7,4 (0,7)a 4,4 (0,5)b 6,7 (1,2)abCellulose + lignine (%) 26,4 (2,3)a 18,0 (0,9)b 24,2 (1,6)aK (%) 1,22 (0,27)a 2,72 (0,60)b 2,21 (0,66)bParamètres non distinctsSucres solubles (%) 15,9 (5,4) 16,3 (7,5) 15,0 (3,8)N (%) 2,33 (0,97) 2,30 (0,13) 2,23 (0,52)C/N 20,6 (7,0) 18,4 (1,0) 20,3 (5,4)

Nota : Pour chaque paramètre, la présence de lettres différentes indique une différence significative entre lesmoyennes des faciès (testU de Mann–Whitney,p = 0,05).

Tableau 10.Comparaison phytochimique des deux faciès prairiaux étudiés.

Matorralméditerranéen*

Landesubalpine†

Prairiepermanente

Nombre d’espèces 37 13 18Phénols (mg g–1) 80 (34) 125 (54) 43 (26)Tanins (fréquence spéciale, %) 51 100 17Lignine (%) 13,4 (6,7) 12,6 (4,4) 6,5 (1,9)Cellulose (%) 11,4 (4,8) 12,4 (3,4) 17,0 (2,7)Cellulose/lignine 0,85 0,98 2,62Cellulose + lignine (%) 24,8 (8,5) 25,1 (5,6) 23,5 (4,2)Sucres solubles (%) 9,7 (4,9) 11,8 (3,5) 16,1 (4,2)Somme glucidique (%) 21,1 (5,6) 24,2 (5,5) 33,1 (5,2)Somme glucidique/lignine 1,57 1,92 5,09C (%) 46,4 (3,0) 48,6 (2,2) 42,3 (1,0)N (%) 1,64 (0,82) 1,67 (0,81) 2,26 (0,59)Rapport C/N 36,0 (18,4) 35,4 (15,1) 20,0 (5,2)P (%) 0,11 (0,07) 0,14 (0,05) 0,32 (0,11)Ca (%) 1,62 (0,81) 0,80 (0,27) 0,95 (0,29)Mg (%) 0,22 (0,13) 0,19 (0,10) 0,24 (0,06)K (%) 0,99 (0,52) 0,73 (0,18) 2,38 (0,79)P/Ca (×102) 8 (6) 19 (7) 37 (17)K/(Ca + Mg) 0,62 (0,43) 0,75 (0,23) 2,09 (0,88)Cendres (%) 7,0 (2,4) 4,3 (1,3) 5,7 (1,8)

Nota : L’écart type est indiqué entre parenthèses.*Lebreton et al. (1997).†Gallet et Lebreton (1988).

Tableau 11.Comparaison biochimique globale de trois communautés végétales.

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phocalcique étant particulièrement élevé (caducifoliées, 37 ×10–2, versus sempervirentes, 8 × 10–2 et 19 × 10–2 pour lalande et le matorral, respectivement).

Outre leur supériorité glucidique, les herbacées prairialesont également une plus grande richesse minérale en potas-sium comparativement aux formations ligneuses (2,4%contre 0,7–1%). Ainsi la somme glucides + protides + cen-dres dépasse-t-elle ici la moitié de la masse de la matièresèche (environ 53%, chez les herbacées, contre 39% chez lesligneuses), ce qui souligne la forte valeur alimentaire desherbacées prairiales.

Conclusion

Ce que nous savons du métabolisme végétal peut être traduiten termes d’allocation matérielle et énergétique : issus de laphotosynthèse, les sucres simples peuvent emprunter trois voiesprincipales : le stockage en l’état (avec ou sans polymérisa-tion), l’utilisation de leur pouvoir réducteur pour l’absorptionactive et l’assimilation de l’azote et autres éléments biogènes,la transformation en substances phénoliques (sans, ou avec po-lymérisation : tanins, lignine) par la voie du shikimate.

Alors que dans la lande subalpine ou dans le matorral mé-diterranéen (milieux contraignants), la voie phénolique estplutôt favorisée au détriment des sucres et de l’azote,l’inverse est la règle pour la formation prairiale mésophile,laquelle maximise glucides et protides. Mais le même jeu debalance est partout noté entre métabolismes organique (iciglucides, ailleurs tanins) et minéral; malgré cela, plusqu’opposées, cellulose et lignine, macromolécules à fonctionpariétale, sont liées entre elles, dans la prairie comme dansle matorral.

Outre les déterminismes d’ordre génétique (relevant de lacomposition systématique de la communauté végétale),l’environnement n’est pas étranger à l’affaire, puisque qu’aubipôle phytochimique (et botanique) observé, correspond unnon moins net bipôle écologique : les faciès secs, lumineuxet chauds accueillent les plantes les plus sclérophylles (pôleorganique), les faciès frais (dans tous les sens du qualificatif,y compris la notion de prairie grasse) abritent les espèces àplus forte teneur minérale.

Ainsi la prairie permanente, comme la lande ou le matorral,n’est-elle pas un milieu « biochimiquement désordonné », oualéatoire, car sa composition résulte de compensations entrediverses fonctions et divers métabolismes corrélés. De touteévidence, un végétal ne peut ni maximiser, ni minimiser si-multanément la production ou l’accumulation de sucres et delignine, de tanins et de protéines, de cellulose et d’élémentsbiogènes. En caricaturant pour conclure, on peut écrire queles espèces végétales pouvant peupler les mêmes milieuxs’inscrivent donc, par tolérances mutuelles, sur un axe orga-nique ou minéral dont l’indicateur le plus simple et le plusefficace est, une fois encore, le classique rapport C/N.

Faisant la synthèse des divers cas particuliers disponibles, trai-tés selon la même méthodologie, un travail ultérieur s’attachera àprésenter un modèle écophysiologique et biochimique plus éla-boré, rendant compte de l’organisation et du fonctionnement descommunautés végétales à de tels niveaux biologiques.

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