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Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence (2009) 57, 429—436 ARTICLE ORIGINAL Syndrome du bébé secoué : des lésions somatiques à la psychopathologie parentale Syndrome of the shaken child: Somatic lesions in the parental psychopathology E. de Becker a,, F. Weerts b a Service de psychiatrie infantojuvénile des cliniques universitaires Saint-Luc, université Catholique de Louvain, SSM Chapelle-aux-Champs, 10, avenue Hippocrate, boîte 2090, 1200 Bruxelles, Belgique b Service de psychiatrie infantojuvénile des cliniques universitaires Saint-Luc, 10, avenue Hippocrate, boîte 2090, 1200 Bruxelles, Belgique MOTS CLÉS Syndrome du bébé secoué; Maltraitance; Violence; Évaluation; Psychopathologie parentale Résumé Une forme particulière de maltraitance physique à l’égard des mineurs d’âge est représentée par le syndrome du bébé secoué (SBS). Ce tableau demande de la part des cliniciens de concevoir une intervention dans le réel et la réalité la moins nocive possible pour l’enfant et son entourage. L’article propose, après une description du syndrome, de parcourir les éléments clés de l’évaluation incontournable à réaliser. Pour mener à bien celle-ci, les auteurs s’appuient sur un canevas où le cadre et le contenu du travail sont définis pour permettre de sortir, tant que faire ce peut, de l’imbroglio qui entoure habituellement ces situations. Enfin, une place est réservée à la réflexion sur la psychopathologie parentale éventuelle. © 2009 Publi´ e par Elsevier Masson SAS. KEYWORDS Syndrome of the shaken child; Abuse; Violence; Evaluation; Parental psychopathology Summary The syndrome of the shaken child represents a particular form of physical abuse towards a main pool of minors. This situation demands, on behalf of clinicians, to conceive an intervention in the real and in the least damaging possible reality for the child and his/her family. The article offers, after a description of the syndrome, to go through the key elements of the inevitable evaluation to be accomplished. To support it, the authors lean on a metho- dology whereby the frame and the job contents are defined to come out of the mess which encircles these situations habitually. Finally, they reflect on the possible parental psychopatho- logy. © 2009 Published by Elsevier Masson SAS. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (E. de Becker). 0222-9617/$ — see front matter © 2009 Publi´ e par Elsevier Masson SAS. doi:10.1016/j.neurenf.2009.03.009

Syndrome du bébé secoué : des lésions somatiques à la psychopathologie parentale

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Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence (2009) 57, 429—436

ARTICLE ORIGINAL

Syndrome du bébé secoué : des lésions somatiquesà la psychopathologie parentale

Syndrome of the shaken child: Somatic lesions in the parentalpsychopathology

E. de Beckera,∗, F. Weertsb

a Service de psychiatrie infantojuvénile des cliniques universitaires Saint-Luc, universitéCatholique de Louvain, SSM Chapelle-aux-Champs, 10, avenue Hippocrate, boîte 2090,1200 Bruxelles, Belgiqueb Service de psychiatrie infantojuvénile des cliniques universitaires Saint-Luc,10, avenue Hippocrate, boîte 2090, 1200 Bruxelles, Belgique

MOTS CLÉSSyndrome du bébésecoué;Maltraitance;Violence;Évaluation;Psychopathologieparentale

Résumé Une forme particulière de maltraitance physique à l’égard des mineurs d’âge estreprésentée par le syndrome du bébé secoué (SBS). Ce tableau demande de la part des cliniciensde concevoir une intervention dans le réel et la réalité la moins nocive possible pour l’enfant etson entourage. L’article propose, après une description du syndrome, de parcourir les élémentsclés de l’évaluation incontournable à réaliser. Pour mener à bien celle-ci, les auteurs s’appuientsur un canevas où le cadre et le contenu du travail sont définis pour permettre de sortir, tantque faire ce peut, de l’imbroglio qui entoure habituellement ces situations. Enfin, une placeest réservée à la réflexion sur la psychopathologie parentale éventuelle.© 2009 Publie par Elsevier Masson SAS.

KEYWORDSSyndrome of theshaken child;

Summary The syndrome of the shaken child represents a particular form of physical abusetowards a main pool of minors. This situation demands, on behalf of clinicians, to conceivean intervention in the real and in the least damaging possible reality for the child and his/her

Abuse;Violence;Evaluation;Parentalpsychopathology

family. The article offers, after a description of the syndrome, to go through the key elementsof the inevitable evaluation to be accomplished. To support it, the authors lean on a metho-dology whereby the frame and the job contents are defined to come out of the mess whichencircles these situations habitually. Finally, they reflect on the possible parental psychopatho-logy.© 2009 Published by Elsevier Ma

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (E. de Becker).

0222-9617/$ — see front matter © 2009 Publie par Elsevier Masson SAS.doi:10.1016/j.neurenf.2009.03.009

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dLdgraves (cécité, épilepsie rebelle, retard mental majeur. . .)et deux tiers « moyennes » (épilepsie contrôlée, déficitmoteur léger. . .). Les 20 % d’enfants, apparemment sainsdans le décours immédiat, vont présenter après quelques

1 Il y a lieu de différencier les deux mécanismes traumatiques quesont l’impact et l’impulsion. L’impact survient lorsque la tête frappe

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ntroduction

es maltraitances à l’égard des mineurs d’âge invitentégulièrement les professionnels à dépasser une positionuestionnante de type socratique ou interprétative de typereudienne pour concevoir une intervention dans le réelocial la plus efficace et, en même temps, la moins nociveour l’enfant et son entourage [20,43].

Une forme particulière de maltraitance physique esteprésentée par le syndrome du bébé secoué (SBS). Ici,ar définition, le rapport de force place la victime dea violence parentale dans l’impuissance et l’absence deéfenses réelles. Si le tout jeune enfant peut certes mobili-er ses premiers systèmes d’autorégulation, en faisant appelses propres ressources, il ne peut survivre psychiquement

ongtemps à l’inadéquation grave du parent. La situationevient plus dramatique encore si la destructivité portegalement sur son corps, à une période critique de vulnéra-ilité [11,50].

Cela étant dit, si, dans ces situations, agir c’est « bien »,l y a lieu de ne pas s’égarer dans la précipitationt de penser un accompagnement de qualité, en sui-ant comme fil rouge la protection première de l’enfant49].

Nous proposons une réflexion à deux voix, pédia-rique et pédopsychiatrique, à partir de l’expérience’une équipe pluridisciplinaire, composée d’assistantsociaux, de psychologues, de juriste et de médecins,yant pour mission essentielle l’évaluation et le traite-ent des enfants victimes de maltraitance et de leur

amille.

onsidérations générales

’est au début des années septante que les travaux de Caf-ey en Amérique du Nord, suivis par les publications deoussey en Europe, les médecins sensibilisent à ce tableauésionnel chez le jeune enfant [9,42]. Connu sous les appel-ations de Whiplash shaken infant syndrome (WSIS) ou dehaken baby syndrome (SBS), le SBS représente une propor-ion importante des traumatismes crâniens chez l’enfante moins d’un an. Touchant principalement les garconsntre un et 15 mois, l’atteinte varie d’un enfant à l’autre12].

Le tableau clinique complet se caractérise par la triadeuivante :les hémorragies intracrâniennes (hématome sous-ural, hémorragie sous- arachnoïdiennes) ;les hémorragiesétiniennes ;les lésions cérébrales (déchirures axonales,dème cérébral).S’y ajoutent parfois des ecchymoses et des fractures du

râne, des côtes ou de la métaphyse des os longs. Dansresque la moitié des cas, il n’y a aucun signe extérieurisible.

On préfère actuellement le terme plus universel de trau-atisme crânien infligé ou non accidentel [4—7,12].Son incidence est estimée à environ 25 cas sur

0 000 naissances. Il concerne le plus souvent des bébése moins d’un an mais peut se voir chez des plusrands.

Il survient lorsqu’un bébé, fermement maintenu par lesains d’un adulte au niveau du thorax ou des épaules, est

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E. de Becker, F. Weerts

ecoué violemment d’avant en arrière. Si un impact s’yjoute, les lésions seront plus importantes1.

Les symptômes varient en fonction de l’importance desésions neurologiques. Dans les cas graves, on note uneltération de l’état de conscience, des convulsions, desifficultés respiratoires, de l’hypotonie. Dans les formesoins graves, on retrouve des vomissements, une léthar-

ie, de l’irritabilité, de la fièvre. Quand le diagnostic estlus tardif, ce sont les signes d’hypertension intracrânienneue à l’hématome sous-dural qui attirent l’attention (aug-entation du périmètre crânien, vomissements chroniques,

onvulsions. . .).Le diagnostic se fait sur base des lésions observées

u scanner cérébral, à l’IRM cérébrale, au fond d’œil etux radiographies du squelette, confrontées à l’anamnèseétaillée (des circonstances de l’accident) et à l’examenlinique soigneux [28,40].

Le diagnostic différentiel est complexe. Il comprendssentiellement la recherche de cause accidentelle (acci-ent de voiture, chute importante [plus de 1 m 50 !], unccouchement difficile, des troubles de la coagulation etes maladies métaboliques rares [syndrome de Menkès etcidurie glutarique]).

Les simples accidents ne provoquent pas de telles lésions.es fractures des côtes ne sont que très rarement le résul-at d’un massage cardiaque, d’une chute ou d’une naissanceifficile. La plupart des bébés présentant un hématomeous-dural sont donc des enfants qui ont été secoués.l est cependant important d’exclure les autres causes’hématome avant de poser ce diagnostic précis.

Qu’elles soient de nature intentionnelle ou acciden-elle, les circonstances du secouement sont très variables.’expérience indique que la plupart des adultes qui secouenteur bébé ignorent la portée de leurs actes [3].

Trois grandes circonstances sont habituellement rappor-ées [27,29,35] :

l’énervement, lorsque le bébé n’arrête pas de pleurer. Lescris devenant insupportables, le parent, à bout de nerf,l’attrape et le secoue dans le but de le calmer ;la réanimation inappropriée, quand, devant un malaise dubébé, le parent, affolé, redoute la mort subite et, pani-qué, le secoue afin qu’il respire, revienne à lui, retrouveses couleurs ;la maltraitance proprement dite, où l’enfant est secouéintentionnellement.

Les conséquences de ce syndrome sont effroyables, cares séquelles sont présentes dans la majorité des cas.es chiffres sont éloquents : 10 à 20 % des enfants enécèdent, 60 % gardent des séquelles dont un tiers très

n objet ou lorsqu’elle est touchée par un objet en mouvement.’impulsion survient lorsque la tête subit une rotation à partir de’axe central. Dans le SBS, l’alternance de projections vers l’avantt vers l’arrière engendre des forces d’accélération—décélérationmenant le cerveau à heurter violemment le crâne.

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années des troubles du comportement, des déficits cognitifset des difficultés scolaires [38,42].

Le traitement en aigu est régi par l’état clinique del’enfant, mais sera toujours suivi d’une prise en chargemédico-psychosociale régulière et prolongée.

Ainsi, ce syndrome grave n’est jamais dû à un trauma-tisme banal, mais à un acte de violence infligé à l’enfant.Cet accident survient de manière brutale dans un contextede pleurs incessants de l’enfant ou de malaise générantun stress ingérable chez la personne qui s’en occupe[8,16,22,45].

Canevas de prise en charge

En parcourant la littérature ciblée sur le sujet et en nousappuyant sur notre expérience confrontée à celle de col-lègues, nous proposons un canevas de pris en charge [37,44].Ainsi, nous envisageons l’ensemble des situations de SBSde manière schématique, en les situant sur un continuum,avec, à l’extrémité gauche, des éléments qui ont tendanceà rassurer quant au statut de l’enfant et à son évolu-tion, et à l’extrémité droite la présence de facteurs dits« inquiétants » qui conduisent à la prudence quant aux atti-tudes à adopter, cela pour veiller à l’intégrité physique etpsychique de l’enfant. Plusieurs graphes peuvent se super-poser pour définir un canevas de conduites à tenir :• le premier graphe, défini de factuel, prend en considé-

ration l’état somatique de l’enfant et les éventuellesséquelles physiques à court et à plus long termes. Il estévident que plus le corps de l’enfant est blessé et lesconséquences invalidantes, plus la situation s’orienteravers la droite du continuum ; les professionnels adop-tant une attitude préventive des risques de récidive,n’envisagent pas aisément un retour de l’enfant au domi-cile ;

• le deuxième graphe concerne le champ phénoménolo-gique. Si, à l’extrémité gauche, on trouve l’accident,banal et dramatique à la fois, à droite on constate laviolence intentionnelle avec visée destructrice, incons-ciente et/ou consciente, de l’enfant. Bien évidemment,la plupart des cas de figure se présentent entre cesdeux extrémités, comme la négligence ou le débordementexplosif.

Dans l’hypothèse de l’accident, l’accompagnement sesitue essentiellement dans le soutien de la famille et desparents confrontés à la réalité du corps blessé et auxconséquences plus ou moins dommageables pour l’avenirde l’enfant. Dans l’absolu, cette aide rentre dans le cadredu traitement des traumatismes généraux et ne doit pasêtre assurée spécifiquement par une équipe spécialiséedans les situations de maltraitance. Dans un modèle idéal,l’accompagnement est réalisé par des intervenants de ter-rain, proches du domicile des parents, après un temps plusou moins long d’hospitalisation. Durant celle-ci, les clini-ciens d’une éventuelle unité de psychiatrie et de liaison

rencontrent parents et famille de manière régulière, puis,passent le relais aux collègues du réseau ambulatoire, ens’assurant d’une continuité de soins.

À l’autre extrême, nous trouvons les situations où laviolence parentale à l’égard de l’enfant a été, si non

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réméditée, intentionnelle, avec la présence de pulsionseurtrières de la part du parent.La phénoménologie concerne aussi la parole sur les faits.

insi, selon l’explication et l’établissement de causes ayantonduit au SBS, on place le curseur sur le continuum.oins les intervenants comprennent avec les membres de

a famille le décours de ce qui s’est passé et recueillent desxplications plausibles, plus on se dirige vers l’extrémitéui conduit à l’établissement de mesures protectionnellese l’enfant. Par ailleurs, plus l’adulte mis en cause recon-aît la responsabilité de ses actes et la portée de ceux-ci sur’enfant, plus une sortie de l’enfant de l’hôpital, avec cadree suivi ambulatoire bien défini, pourra être envisagée.

On trouve enfin le troisième graphe des dimensionssychologiques et psychopathologiques. Ainsi, plus les per-onnalités des adultes présentent des failles narcissiques où’enfant n’est pas respecté dans sa place de sujet, aveca présence de perturbations du lien parent—enfant et desroubles de l’attachement, moins on pourra concevoir uneide ambulatoire avec le retour de l’enfant au domicile.ous allons approfondir plus loin cet axe.

Dès lors, en superposant les différents graphes, on peuttablir un canevas qui définit un cadre d’intervention. Plusa situation cumule des facteurs orientant la situation versa gauche, plus on se dirige vers un programme d’aide et deoins négociés à l’amiable. En revanche, plus les élémentsn présence amènent à situer la situation vers la droite,lus l’établissement d’une protection judiciaire de l’enfant’impose, c’est-à-dire une interpellation par les clinicienses autorités protectionnelles.

Certes, ce schéma a une portée synchronique.’évaluation réalisée dans le hic et nunc, faillible paréfinition, doit pouvoir définir ou du moins approcher,es capacités de changement d’une famille, estimer sonegré de collaboration et d’implication à un processushérapeutique.

D’un autre côté, dès l’accueil de l’enfant se présentantour un tableau traumatique où rapidement un diagnostic deBS est évoqué, nous préconisons d’établir une « enveloppeartenariale », impliquant spécialistes somatiques et spécia-istes de la prise en charge des situations de maltraitance

enfants [39]. Mis à part les cas avérés et reconnus’accidents, où tous les indicateurs quant aux facteurs deausalité et aux fonctionnements psychique et relationnelont rassurants, toutes les autres situations méritent à toute moins un temps d’intervision (qu’on peut appeler dis-ussion de cas), pour examiner les tenants et aboutissants’une situation singulière. Lors de ces temps de rencontrentre professionnels uniquement, l’équipe soignante soma-ique faisant état des éléments recueillis aussi sur le planumain, aborde avec les spécialistes de la maltraitance lesodalités de poursuite de l’évaluation.Si l’on décide de continuer l’évaluation sur les plans

ontractuels et psychoaffectifs, il est souhaitable que lesédiatres et les professionnels médico-psychosociaux spé-ialisés dans les maltraitances rencontrent ensemble laamille et évoquent clairement la nécessité du travail àéaliser.

Et puis, dans un nombre de cas non négligeables,’interrogation et le doute se porteront vers un adulte exté-ieur au cercle familial. Ici, il est opportun d’interpeller lesutorités judiciaires compétentes, pour qu’elles réalisent

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eur travail d’enquête. Il y va de la responsabilité des pro-essionnels et des risques encourus pour d’éventuels autreseunes enfants.

Toutefois, demeurera la question de la méthodolo-ie de la procédure : quel est le professionnel qui doitjudiciariser » ? Et, en corollaire, qui en a la responsabilité ?

’évaluation parasomatique

réambule

l est évident que, devant toute situation de SBS (oue suspicion), une évaluation soignée doit porter priori-airement sur les aspects somatiques et l’estimation deséquelles. D’autres champs sont à prendre en considéra-ion, aussi bien du côté des adultes que du côté de l’enfantui-même, ainsi que du réseau et du contexte de vie.ette évaluation inclut, in fine, une visée diachronique,’est-à-dire qu’elle considère les processus, les tenants etboutissants, avec l’incontournable question des risques deécidive. Disposer d’une équipe pluridisciplinaire, composée’intervenants de disciplines différentes et complémen-aires, pour mener à bien ce travail s’avère très utile [24].i on peut investiguer en profondeur du côté de chacun deseux protagonistes principaux, c’est-à-dire le(s) parent(s) ete bébé2, la dimension primordiale à prendre en compte est,

nos yeux, la qualité du lien qui relie l’adulte et l’enfant47,48].

entrons-nous donc sur l’attachement, lesnteractions parent—enfant, et, en corollaire,la parentalité

e nombreux auteurs, comme Delion, Godelier et Houzel,e sont intéressés à cette dernière notion [13—15,23,25,26].lusieurs niveaux composent la parentalité, niveaux qui seuperposent et se complètent. Le premier correspond àa dimension symbolique de l’exercice d’être parent. Il arait aux droits et devoirs qui définissent la structure et’organisation du groupe familial, en lui donnant une portéeistorique, traduite par la filiation et les héritages trans-t intergénérationnels. Le deuxième niveau est concrétiséar l’expérience subjective d’être parent dans ce qu’elleéhicule d’imaginaire, avec son cortège de multiples repré-entations issues des processus conscients et inconscients.nfin, le troisième niveau concerne les tâches effectivesiées à la pratique d’être parent, dans le réel du quotidien,e l’éducation et de tout ce qui constitue les interactionsomportementales.

En d’autres termes, la parentalité est cette capacité deépondre aux différents besoins de l’enfant, sur les plansorporels, affectifs et psychologiques. La parentalité, qui

st un processus évolutif, dépasse donc la notion d’amour,e qui sous-tend que des parents maltraitants peuvent aimereur enfant tout en étant défaillants, et également êtreimés par lui.

2 Ainsi des tests fiables comme le Brunet-Lezine ou le Bayleyeuvent déjà être réalisés à quelques mois de vie de l’enfant [36].

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E. de Becker, F. Weerts

uels sont les axes dont il faut tenir compte auiveau de la parentalité ?

’une manière générale, on observe le comportement duarent par rapport à la perception des signaux de l’enfant,e leur déchiffrage et de la réponse plus ou moins adéquateui y sont apportés. D’autres formulations se concoiventomme : le parent assure-t-il une présence physique et psy-hique à l’enfant ? Constitue-t-il un lieu d’adresse et deéponse pour l’enfant ? Le parent est-il dans la certitude àropos de l’enfant ? A-t-il développé une capacité à supposerhez l’enfant un savoir qu’il ignore ?. . .

En ce qui concerne les besoins de l’enfant, les parents ennt des représentations ainsi qu’une reconnaissance et, enonséquence, une adéquation des réactions plus ou moinsuste [31—34].

Un axe concerne la qualité des soins corporels. En effet,ertains parents présentent de grandes difficultés à prendreoin du corps de leur enfant. Ils manifestent de l’angoisse à’idée d’un rapprochement physique ; de même, si l’enfantst serré contre l’adulte, l’ajustement tonicopostural estarfois absent. On peut également observer la présenceventuelle de discontinuités, dans les séquences interac-ives, entre autres sur le plan visuel (comment l’adulte et’enfant se regardent-ils ?).

Il est important de s’enquérir de la manière dont learent gère les rythmes qui ritualisent et organisent la vieamiliale et le quotidien du bébé. Soulignons que l’enfant,ui ne bénéficie que de repères temporels, rencontreraes défauts d’anticipation, étant donné l’état permanent’insécurité, d’« hypervigilance », qui se marque parfoisur son visage. Le corps ouvre par ailleurs aux ques-ions d’alimentation et d’ambiance relationnelle inhérente

cette dimension ; nombre d’interrogations étayent cetspect : dans quelles conditions et préoccupations le parentépond-il aux besoins de base de l’enfant ? Communique-t-ilvec son enfant ? Quelle attitude développe-t-il envers luit ses initiatives ?. . .

Une autre facon d’approcher la qualité interactivest d’envisager la capacité empathique du parent envers’enfant. Le clinicien porte alors son attention sur les mani-estations de tendresse de l’adulte à l’égard de l’enfant ou,contrario, les éventuels mouvements agressifs à son égard :

e parent est-il présent sur le plan émotionnel à l’enfantt peut-il lui prêter des émotions ? Met-on en évidence uneventuelle discordance entre les émotions du bébé et lesomportements parentaux ?

À côté du réel et de la réalité, on doit s’enquérir de la viesychique du parent, avec ses représentations, ses mondesmaginaires et symboliques. Ici, le clinicien est invité àxplorer le bébé imaginaire, celui qui a été attendu pares parents et à interroger la fonction de l’enfant dans unandat transgénérationnel ainsi que les intentions prêtées

u bébé et son statut dans le psychisme du parent [17]. Ilaura lieu ensuite de confronter ce bébé imaginaire avec

e bébé réel : quel écart existe-t-il entre ces deux bébés ?ar ailleurs, veillons à investiguer comment le parent se

eprésente en tant que parent, c’est-à-dire au niveau imagi-aire et s’il existe un écart entre le parent réel et le parentmaginaire.

En parcourant ces axes d’investigations, le clinicienecueille nombre d’éléments qui vont l’aider à estimer la

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Syndrome du bébé secoué : des lésions somatiques à la psyc

qualité de l’attachement entre l’enfant et le parent, et si,pas la compréhension pleine et entière des causes du SBS,au moins certains des facteurs pronostiques.

La situation (et donc l’évaluation) se complexifie si deséléments psychopathologiques chez le parent émergent. Eneffet, parentalité et psychopathologie parentale ne font pasnécessairement bon ménage ! Soyons toutefois attentifs à nepas tomber dans l’arbitraire de certains clichés. Ainsi, cer-taines personnes psychiquement perturbées assument avecefficacité, c’est-à-dire respect, adéquation, leur fonctionparentale, alors que d’autres, masquant leurs failles psycho-logiques, se révèleront des parents destructeurs [18,19].

Quoi qu’il en soit, l’expérience indique que, face à unemère psychotique délirante, se manifestant de manièrechaotique, absente ou figée, exprimant ses besoins demanière régressive, le nourrisson est attentif aux mouve-ments parentaux (le visage tendu, le regard inquiet). Auniveau de l’ajustement, le bébé se conforme aux attentesde l’adulte. On utilise le terme d’« hyperadaptation » pré-coce de l’enfant, donnant écho à son « hypervigilance ». Iln’est pas rare que ce tableau conduise, s’il est maintenu, àla mise en place d’une « hypermaturation » que l’on constatechez les enfants plus âgés. Très vite apparaîtra une inver-sion du rapport parent—enfant, qui amène au processus deparentification chez le plus jeune des deux partenaires [30].

Au-delà du champ somatique et du premiercercle constitué par l’enfant et le parentconcerné, il y a lieu d’examiner le contextesociofamilial

Le maillage sociofamilial inclut un entourage, qui peut êtreextrêmement réduit, limité à quelques simples contacts,être diffus, chaotique ou en revanche contenant, stable etstructuré. En première intention, on pense d’abord à l’autreparent, dans les cas où le premier est l’auteur de maltrai-tances ou suspecté l’être. Cet autre parent existe-t-il ausens propre comme au sens figuré ? Une autre dimension estreprésentée par l’éventuelle fratrie et la famille élargie,comme les générations précédentes. Selon les situations,nous devons toujours considérer leur possible implicationdans les disfonctionnements de la famille en question. Pen-dant la crise, il s’avère habituellement délicat de faire appelaux membres de la famille d’origine pour accueillir l’enfant.

Plus loin, il y aura lieu de s’enquérir de l’existenced’un environnement professionnel autour de l’enfant et duparent concerné. Il peut être judicieux d’entrer en contactavec tel professionnel, tel thérapeute, non pas dans unedémarche d’« en savoir », mais pour connaître et distinguerles démarches professionnelles qui ont porté des fruits decelles qui n’ont rien apporté. L’histoire des services repré-sente une valeur ajoutée par l’éclairage sur les compétencesparentales et en conséquence sur les propositions d’aide etde soins à retenir, ainsi que sur l’aptitude de la famille à

pouvoir profiter de celles-ci [10]. Ici encore, la prudences’impose ! Car il y a lieu de faire la part des choses entrece qui s’est passé en réalité et ce qui est teinté des projec-tions, des représentations certes du parent inadéquat, maiségalement des professionnels intervenus, avec en corollaireleur contre-transfert parfois très massif.

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thologie parentale 433

sychopathologie parentale

u premier abord, le parent qui secoue son enfant ressemblelutôt à la « moyenne des gens », ni plus ou moins mau-ais dans la plupart des cas. Le SBS s’observe dans touses groupes socioéconomiques et toutes les cultures. Pre-ons les situations qui se situent davantage du côté droitu continuum décrit dans le canevas. Certains facteurs deisque très hétérogènes existent comme l’isolement socialabsence de tiers, de relais), les antécédents de maltrai-ance, de négligence et de carence affective, les conduitesddictives. Certains auteurs estiment que la fréquence duyndrome augmente si le parent est jeune, qu’il a rompuvec la génération précédente, qu’il s’agit d’un premiernfant, qu’il connaît des difficultés financières, matérielles.es éléments contextuels peuvent favoriser l’apparition duBS comme le stress, la fatigue, la reprise du travail aprèsn congé de maternité [41].

D’un point de vue clinique, et en fonction du degrée gravité, des traits psychopathologiques peuvent êtredentifiés. L’hétérogénéité apparente de ces traits n’estas incompatible avec une certaine articulation entre eux.ertains parents développent une mosaïque de troublesui se situent à différents niveaux, dont une personna-ité à la socialisation bien adaptée mais organisée autour’un noyau traumatique. Apparaissent aussi, parfois der-ière une pseudonormalité, des signes d’anxiété, voire deépression, une pauvre estime de soi, une difficulté à éla-orer et à exprimer le niveau émotionnel, une rigidité, de’immaturité, de l’impulsivité, un manque de contrôle de’agressivité.

Ces parents ont à l’égard du monde extérieur desttentes irréalistes, idéalistes, régulièrement décues,onduisant à l’adoption d’attitudes de retrait paranoïde.eu ou pas soutenus par les familles d’origine, ces jeunesdultes ne parviennent pas à investir l’enfant ou neomprennent pas son comportement, ses manifestationsxpressives, le ressentant comme peu gratifiant, tropemandeur et donc persécuteur.

Quand on se penche sur le fonctionnement psychique deertains parents, plusieurs mécanismes défensifs peuventtre retrouvés au cours de l’évaluation.

Le déni correspond au refus de reconnaître la réalitées faits, et leurs conséquences traumatiques sur l’enfant,insi qu’à l’incapacité d’associer les difficultés actuellesson histoire personnelle antérieure. Dès lors, le parent

ssume difficilement sa responsabilité dans ce qui toucheujourd’hui le corps du bébé. Souvent de pair au déni, onetrouve le clivage centré sur l’enfant. Celui-ci est, tour àour, idéalisé ou rejeté et maltraité. Quant à la projection,’enfant sert de surface de tous les affects négatifs vécus par’adulte, en lien avec son passé traumatique. L’aspect délé-ère de ces mécanismes est lié à leur non-reconnaissancet qui conduit le sujet à interpréter tout mouvement de’enfant comme une attaque dirigée contre lui. Une failleelationnelle s’installe quand les parents interprètent deanière persécutoire les attitudes du bébé : « Il fait exprès

e crier la nuit pour me réveiller, il me rejette du regardu du corps. . . ». Le parent est en mal d’utiliser d’autresoyens d’extériorisation des tensions internes, que le pas-

age à l’acte violent à l’égard de l’image persécutrice queeprésente l’enfant. Quand celui-ci ne cesse de pleurer et

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étemporalité d’une tiercéité. Expliquons-nous. Sur le terrain,on rencontre des soignants qui optent pour l’établissementd’un temps diagnostique rigoureux avant de s’adjoindre,éventuellement, des cliniciens spécialisés dans ces zones

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e crier, il active avec force l’ensemble de ces mécanismeséfensifs chez le parent.

D’après la typologie proposée par Barudy, nombre dearents qui secouent leur enfant présentent une enfancearquée par la rigidité de l’éducation et des carences au

iveau de la fonction maternelle [2]. En effet, ils mani-estent un besoin énorme d’être confirmés dans leur identitét leur valeur personnelle. De la sorte, ces adultes deve-us parents attendent très souvent de leur enfant qu’ilomble (totalement ou partiellement) les carences anté-ieures. Il existe ici un risque de « chosification » de l’enfant,tant donné qu’il est fantasmé comme objet de répara-ion par rapport à ce passé ; il attend (inconsciemment)e cet enfant, disponibilité et approbation qui lui ont tel-ement manqué durant sa propre histoire. Et en mêmeemps, l’adulte souhaite que l’enfant ne vive pas ce qu’ilconnu, voulant lui épargner les souffrances qu’il a rencon-

rées dans son enfance. Le risque existe de voir l’adulte’approprier l’enfant dans ses velléités de se réaliser àravers lui. On peut considérer que l’enfant est, d’uneertaine manière, utilisé comme objet transitionnel par’adulte. Le danger existe de voir apparaître des troublesraves du processus de différenciation de l’enfant ainsi quee risque de dérapage par l’adulte de l’appropriation duorps de l’enfant. Un moment critique dans ce type deroblématique se produit quand l’arrivée de l’enfant (saéalité, dans ce qu’il montre et exprime. . .) se heurte à’imaginaire parental. De plus, en tant que sujet dépen-ant, il exige de la part du parent des soins que celui-ci’est pas prêt à dispenser. Le parent nourrit alors leentiment d’avoir été une fois de plus (!) trompé ; sa frus-ration est grande et elle va alors s’exprimer par lesecouements. . .

Si l’enfant est parfois désiré comme un nouvel espoire recommencement (de « nouveau départ »), quoique saenue soit source également d’angoisses, il n’est pas rareu’il corresponde au prolongement du mauvais objet quee parent a le sentiment de représenter pour lui-même. Leébé secoué occupe alors la fonction symbolique de « doublearcissique », c’est-à-dire qu’il assure deux mandats, celuie l’enfant confronté à des parents maltraitants, et celui duarent qui a maltraité dans le passé.

À la suite de Concordet et Bonnaure, on peut penserue l’atteinte cérébrale a une portée symbolique dans leens qu’elle affecte le psychisme dans sa capacité d’entrern relation avec l’environnement [13]. Le traumatisme de’enfant est équivalent à une mise en acte des expériencesépétées de discontinuité, de perte et de carence, vécuesar l’adulte. Il révèle, d’une certaine facon, les expériencesassées et présentes, malheureusement et habituellementiées par le parent. Le passage à l’acte peut être un momentù le parent ne pense plus ; il met l’enfant en dangeromme, par exemple, quand il le laisse tomber aux sensropre et figuré. Il peut également s’agir de gestes méca-iques, automatiques, voire violents, où l’enfant n’a pluse statut de sujet, ni ressenti comme un être vivant, doté’émotions.

Dans cette perspective, le traumatisme physique, toutn étant révélateur des expériences de carences anciennes,eut être l’occasion de l’amorce d’une réparation socioaf-ective par l’accompagnement thérapeutique que celangendre. À

E. de Becker, F. Weerts

onclusions

appelons, à la suite de Baracco, qu’il n’est pas suffisant’avoir souhaité un bébé pour savoir être parent [1,31—34].a menace d’un bébé, quelque fois, ce n’est pas l’espoir dea vie qui est apportée, mais la menace sur la vie. Si tous lesrofils psychopathologiques individuels se rencontrent, il enst de même des constellations de familles et de couples...oute cette vulnérabilité du début de la vie et de la paren-alité est le creuset de troubles qui s’inscrivent dans deschanges d’où émergera la vie psychique du bébé. Dès lorsa maltraitance s’inscrira dans un contexte de disfonction-ement des premières interactions, quand cette rencontrentre l’enfant et l’adulte ne se fait pas de manière har-onieuse. Dans les SBS, la parentalité est mise à mal ; la

apacité à ressentir la fragilité du jeune enfant est émous-ée, voire abrasée.

Depuis des années, des programmes de prévention ontté lancés pour « conscientiser » familles et professionnelse l’enfance, étant donné les conséquences dramatiques deuelques instants de « débordements ». À ce propos, commeous l’avons vu, toutes les situations de SBS ne rentrent pasans la catégorie des violences intentionnelles à l’égard de’enfant. Loin de là ! Pouvons-nous alors parler de maltrai-ance ?

Selon la définition de l’OMS, la maltraitance de l’enfantomprend toutes les formes de mauvais traitementshysiques et/ou psychoaffectifs, de sévices sexuels, deégligences ou d’exploitations commerciales ou autres,ntraînant un préjudice réel ou potentiel pour la santé de’enfant, sa survie, son développement ou sa dignité dansn contexte d’une relation de responsabilité, de confianceu de pouvoir » [20,44,46].

Ainsi, le SBS est inclut dans les formes de maltrai-ances physiques, étant donné que tout acte entraînantn préjudice pour la santé de l’enfant est une maltrai-ance. Néanmoins, si l’on peut qualifier l’acte, on doite garder de taxer le parent « secoueur » ipso facto dearent « maltraitant ». Une proportion non négligeable dees parents ne désiraient pas intimement faire du mal à leurébé ; pour les autres, l’ambivalence est présente quand ce’est pas des traits psychopathologiques.

Il reste aussi au terme de l’évaluation une part impor-ante de situations de SBS sans étiologie précise, où leoute ronge non pas tant les professionnels confrontés à uneorme d’impuissance que les parents eux-mêmes. Ici, touteses hypothèses demeurent ouvertes. . . Et plus on tenterae savoir, plus la tension montera avec, en corollaire, desmpressions cliniques vagues. . . et très subjectives. D’aucunsréconisent alors de faire appel au tiers, c’est-à-dire auxutorités sociales (SAJ) ou judiciaires (TJ) 3.

Un sujet de controverse toujours présent dans leschanges entre professionnels consiste dans la modalité et la

3 Les abréviations utilisées renvoient d’une part au service d’Aide--La-Jeunesse, et d’autre part au Tribunal de la jeunesse.

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Syndrome du bébé secoué : des lésions somatiques à la psyc

complexes de l’inadéquation et de la violence, lorsque ontété exclues toutes les autres hypothèses. Ces mêmes soi-gnants peuvent adopter l’attitude similaire à l’égard desautorités judiciaires ou sociales et « passer la main » qu’encas extrêmes.

D’autres, de plus en plus nombreux, concoivent une col-laboration, au moins sur le plan, des idées, reconnaissantl’apport et la complémentarité de disciplines différentes(ouverture au tiers), ainsi que leur limite lorsque la notionde loi humaine et sociale est transgressée et/ou inexistantedans le chef des parents.

Dans le texte, l’accent a été mis sur le temps del’évaluation ; il est clair que dans les situations où le parentreconnaît une part de violence à l’égard de l’enfant et sedit prêt à questionner ce qui sous-tend l’inadéquation, unephase (psycho)thérapeutique est proposée. Dans les situa-tions de maltraitance, on encourage certes l’émergenceau changement. Toutefois, face aux familles à transactionmaltraitante, le risque en voulant s’allier à la perspectivefamiliale est de légitimer la violence et d’entrer dans uneforme de collusion justifiant le recours au passage à l’acte.L’autre risque est d’adopter une contre-position visant laprotection absolue de l’enfant, basée sur la répression et leprincipe de légitimité destructrice [21].

Lors des premiers entretiens, la famille teste les théra-peutes et les confronte à ces deux risques : d’un côté lalégitimation ou de l’autre le jugement. La seule attitude quiporte un effet thérapeutique de changement, est de parlerde ces deux risques très rapidement avec les membres dela famille, en évoquant les dénis et clivages suscités par lesfonctionnement familiaux [44].

Quoiqu’il en soit, dans la plupart des situations de SBS,à défaut d’une implication psychothérapeutique des per-sonnes concernées, l’on veillera à observer une vigilancecontinuée dans le temps. Celle-ci s’appuie sur un suivimédical au long court de l’enfant et des rencontres deparole à visée orthopédagogique avec les parents. C’est ainsiqu’aborder, par exemple, la gestion du stress, la fonction-nalité du couple parental (rôle de chacun, relais de l’unà l’autre, réactions lors de certaines circonstances. . .) ren-contre in fine les préoccupations de nombre de parents.

La mise en place d’une forme « d’école des parents »recouvre alors les perspectives d’une prévention efficace.

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