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COUR DES COMPTES La sécurité des navires et de leurs équipages : des résultats inégaux, un contrôle inadapté Avertissement Synthèse du Rapport public thématique C ette synthèse est destinée à faciliter la lecture et l’utilisation du rapport de la Cour des comptes. Seul le rapport engage la Cour des comptes. Les réponses des administrations et des organismes concernés figurent à la suite du rapport. Décembre 2012

Synthèse du rapport public thématique La sécurité des navires et … · 2017. 6. 6. · COUR DES COMPTES La sécurité des navires et de leurs équipages : des résultats inégaux,

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  • COUR DES COMPTES

    La sécurité des navires etde leurs équipages :des résultats inégaux, un contrôle

    inadapté

    � Avertissement

    Synthèsedu Rapport public thématique

    Cette synthèse est destinée à faciliter la lecture et

    l’utilisation du rapport de la Cour des comptes.

    Seul le rapport engage la Cour des comptes.

    Les réponses des administrations et des organismes

    concernés figurent à la suite du rapport.

    Décembre 2012

  • Sommaire

    3

    Synthèse du R

    apport public thématique de la C

    our des comptes

    Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .5

    1 Les contrôles sur le pavillon national : des résultatscontrastés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .7

    2 Les contrôles de l’Etat du port : des résultats

    insuffisants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .13

    3 Un dispositif développé depuis 10 ans sans véritablestratégie et sans pilotage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .17

    4 Une logique de contrôle affaiblie au niveau local . .21

    5 Un dispositif de contrôle inadapté à revoir en profon-deur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .23

    Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .27

    Recommandations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .28

  • Introduction

    5

    Synthèse du R

    apport public thématique de la C

    our des comptes

    La sécurité des navires est une réalité qui fait partie d’un ensemble de notions voisines

    et étroitement liées :

    - la sécurité de la navigation maritime repose sur des actions de prévention et des

    actions curatives telles que des opérations de sauvetage et de lutte contre la pollution

    maritime ;

    - la sûreté maritime renvoie à la prévention et à la lutte contre tous les actes illicites

    comme le terrorisme ou la malveillance ;

    - la sécurité du navire proprement dite concerne à la fois le "flotteur" et ses équipements

    ainsi que les questions liées à la formation et aux conditions de vie et de travail de l’équipage.

    La politique de sécurité des navires, dans sa partie normative, est désormais largement

    négociée et déterminée au niveau international et européen. En revanche, les décisions politiques

    et administratives relatives aux dispositifs de contrôle restent du ressort des Etats.

    L’évaluation de la Cour, dont rend compte le présent rapport public thématique, a donc

    porté sur les performances et la pertinence du dispositif français de contrôle de la sécurité des

    navires.

    En effet, à la différence d’autres nations maritimes, qui ont délégué la plus grande par-

    tie de leurs compétences dans le domaine du contrôle, la France, forte d’une longue tradition

    administrative d’encadrement de sa flotte et de ses marins, a conservé une organisation structu-

    rée et hiérarchisée du niveau central aux échelons déconcentrés et opérationnels au niveau terri-

    torial.

    L’action de la France dans ce domaine s’exerce en répondant à trois types de missions :

    - celles conduites au titre d'Etat du pavillon à l’égard des navires battant pavillon natio-

    nal et soumis au droit français ; les contrôles s’exercent sur une flotte d’environ 18 200 navires

    se répartissant entre 5 400 se livrant à des activités de commerce et 12 800 à des activités de

    pêche et de conchyliculture ;

    - celles accomplies au titre de l'Etat du port à l’égard des navires étrangers faisant escale

    en France : environ 6 000 par an au cours des dernières années correspondant à 15 à 16 000

    escales ; ce type de contrôle créé par l'accord international dénommé Mémorandum d’entente de

    Paris, signé le 26 janvier 1982, est aussi désormais encadré par des directives européennes ;

    - celles, enfin, assurées au titre de l’Etat côtier à l’égard des navires en circulation dans

    les eaux placées sous la juridiction de l’Etat : 300 000 navires franchissent chaque année la

    Manche et fréquentent ainsi notre espace côtier dans cette zone.

  • 6

    Synthèse du R

    apport public thématique de la C

    our des comptes

    La démarche adoptée a été, pour l’essentiel, construite :- d’une part, à l’aide des techniques traditionnelles de contrôle de la gestion d’une struc-

    ture publique (analyses de textes et de données, questionnaires, tests sur des systèmes d’infor-

    mation, visites dans les services, comparaisons internationales, etc. ;

    - d’autre part, par la recherche, la plus méthodique possible, de l’avis des principaux

    acteurs et parties prenantes du système (contrôleurs, contrôlés et tiers intéressés) sur l’utilité, la

    qualité et l’efficacité des contrôles.

    L’évaluation, a, en outre, pris appui sur un groupe de quatre experts indépendants.

    6

    Introduction

  • 7

    Synthèse du R

    apport public thématique de la C

    our des comptes

    Cour des comptes

    1 Les contrôles sur lepavillon national : des résultats contrastés

    Le pavillon national englobedeux grandes catégories de flotte pourlesquelles les problématiques de sécu-rité sont différentes et les résultats trèscontrastés : la flotte de commercefrançaise et la flotte de pêche fran-çaise. La flotte de plaisance n’a pas ététraitée dans ce rapport.

    La flotte de commerce française ras-semble, au 1er juillet 2012, toutes acti-vités et tonnages confondus, plus de5 400 navires comprenant, outre ceuxà passagers et de charge, des avitail-leurs, plateformes, navires derecherche et d’exploration, câbliers,remorqueurs, yachts utilisés à des finscommerciales, vedettes diverses, dont3 000 petits navires destinés aux ser-vices publics.

    Au sein de cette flotte, oncompte 206 navires de plus de 100UMS (Universal MeasurementSystem) de jauge brute affectés auxtransports de navires ou de passagersse répartissant, au 1er juillet 2012,entre trois registres d’immatriculation :le registre international français ouRIF (91 navires), le registre métropoli-tain (75) et les registres d’outre-mer(40). En ajoutant aux 91 navires detransport, les navires de la flotte detravaux et services auxiliaires, 300navires sont immatriculés au RIF.

    Cette flotte, de taille réduitecomparée aux flottes marchandes denations voisines européennes, secaractérise par plusieurs facteurs favo-rables à la sécurité des navires et de lanavigation.

  • Les contrôles sur le pavillon

    national : des résultats contrastés

    8

    Synthèsedu R

    apport public thématique de la C

    our des comptes

  • Les contrôles sur le pavillon

    national : des résultats contrastés

    9

    Avec une moyenne d’âge de8 ans au 1er juillet 2012, la flotte decommerce international française sesitue parmi les plus jeunes, tant au seinde la flotte mondiale (moyenne :16,4 ans) que parmi celles des pays del’Union européenne (moyenne :12 ans). Elle est bien encadrée par unensemble de normes et de conven-tions internationales de plus en plusexigeantes et par le code internationalde gestion pour la sécurité de l’exploi-tation des navires et la prévention de lapollution. En outre, la prochaineentrée en vigueur (août 2013) de laconvention de l’Organisation interna-tionale du travail sur le travail maritimeva renforcer la protection de ses équi-pages. Enfin, les entreprises de trans-port et de services maritimes fran-çaises se sont engagées avec la

    « Charte bleue d’Armateurs deFrance », organisation professionnelleles regroupant, à promouvoir la sécu-rité maritime.

    La bonne qualité du pavillon de

    commerce français, qui résulte de cette

    série de facteurs favorables, est d’ailleurs

    reconnue tant dans les statistiques four-

    nies chaque année par la France à

    l’Organisation maritime internationale

    que par le classement des pavillons éta-

    bli par le secrétariat du Mémorandum de

    Paris à partir des données provenant des

    inspections effectuées par les Etats dans

    sa zone de compétence. Le pavillon

    français se situe régulièrement dans les

    premières places de la liste blanche qui

    regroupe les meilleures flottes.Synthèse du R

    apport public thématique de la C

    our des comptes

  • Les contrôles sur le pavillon

    national : des résultats contrastés

    La flotte de pêche française, à la diffé-rence de la flotte de commerce, notam-

    ment celle naviguant à l’international,

    est mal suivie et insuffisamment connue

    au niveau central.

    Faute de mise à jour régulière de la

    base de données d’immatriculation des

    navires, l’administration centrale des

    affaires maritimes est dans l’impossibi-

    lité de réconcilier les chiffres recensés

    auprès de ses services locaux avec ceux

    de l’INSEE et d’expliquer les écarts.

    La flotte de pêche française souf-

    fre de plusieurs handicaps défavorables

    à la sécurité des navires et des équipages.

    Elle apparaît d’abord comme une flotte

    vieillissante et de plus en plus inadaptée.

    La moyenne d’âge des navires de métro-

    pole est de 25 ans en 2010 et seuls 30 %

    des navires ont moins de 20 ans.

    La pression économique et finan-

    cière et les contraintes halieutiques

    pesant sur les exploitations, qui obligent

    à modifier les navires, renforcent l’ina-

    10

    Synthèse du R

    apport public thématique de la C

    our des comptes

  • Les contrôles sur le pavillon

    national : des résultats contrastés

    daptation de la flotte. Les navires sont

    moins sûrs et les conditions de travail

    dégradées. Le diagnostic a été notam-

    ment dressé par un groupe de travail

    animé par l’Institut maritime de préven-

    tion en 2008.

    Il en résulte que le monde de la

    pêche maritime est marqué par un nom-

    bre proportionnellement élevé de décès

    et d’accidents du travail comparé aux

    autres secteurs d’activité.

    Pour mieux faire face à ce défi par-

    ticulier, l’administration des affaires

    maritimes devrait s’attacher à renforcer

    son rôle dans l’organisation et le pilo-

    tage des programmes d’interventions en

    matière de sécurité des navires et des

    marins à la pêche. En outre, des objec-

    tifs de prévention et de réduction des

    accidents devraient être clairement

    énoncés dans le programme 205 « sécu-

    rité et affaires maritimes » de la loi de

    finances au même titre que ceux relatifs

    aux atteintes à l’environnement.

    11

    Synthèse du R

    apport public thématique de la C

    our des comptes

  • 13

    Synthèse du R

    apport public thématique de la C

    our des comptes

    Cour des comptes

    2 Les contrôles de l’Etat du port : des résultatsinsuffisants

    A la suite du naufrage de l’Erika et

    du sinistre qui s’en est suivi, l’Union

    européenne, notamment sous l’impul-

    sion de la France, a renforcé les

    contraintes imposées aux Etats, en par-

    ticulier dans le contrôle des navires

    étrangers faisant escale dans leurs ports.

    Toute une série de directives prises suc-

    cessivement sous l’appelation de

    paquets dits « Erika I, II et III » ont

    notamment abouti à la mise en place le

    1er janvier 2011, d’un nouveau régime

    de l’Etat du port.

    Un système d’information,

    dénommé THETIS, est géré et suivi par

    l’Agence européenne de la sécurité mari-

    time, « interfacé » avec diverses données

    concernant la sécurité des navires et ali-

    menté par les rapports d’inspection des

    contrôleurs des Etats membres. Il per-

    met de cibler les navires à contrôler en

    priorité en fonction de divers critères de

    risques.

    Le nouveau régime, comme le pré-

    cédent mis en place dans le cadre du

    Mémorandum de Paris de 1982, fixe,

    pour la France, un nombre global d’ins-

    pections qui, en 2011, n’était pas sensi-

    blement différent de celui de 2010. En

    revanche le nombre d’inspections obli-

    gatoires à effectuer augmente sensible-

    ment et les tolérances acceptées en

    matière de non-respect (ou manque) de

    ces inspections obligatoires diminue

    aussi significativement.

    Or la France, qui ne respectait déjà

    pas ses obligations de contrôle obliga-

    toire dans le précédent système, court

    désormais le risque de sanctions finan-

    cières plus fortes en cas de non-réalisa-

    tion des nouveaux objectifs qui lui sont

    assignés chaque année. En outre, ces

    déficiences de notre dispositif de

    contrôle de l’Etat du port n’ont pas été

    portées à la connaissance du Parlement

    dans toute la période de 2005 à 2010. En

    effet, était affiché, dans les projets et

    rapports annuels de performance, le seul

    indicateur du nombre global de

    contrôles effectués rapporté au nombre

    d’escales, donnant ainsi une vue partielle

    et partiale de la performance de notre

    système. Les objectifs de contrôle et leur

    taux de réalisation doivent figurer dans

    leur intégralité dans le rapport annuel de

    performance.

  • Les contrôles de l’Etat du port : desrésultats insuffisants

    14

    Synthèsedu R

    apport public thématique de la C

    our des comptes

  • 15

    Synthèse du R

    apport public thém

    atique de la C

    our des comptes

    Les contrôles de l’Etat du port : desrésultats insuffisants

  • 17

    Cour des comptes

    3Un dispositif développédepuis 10 ans sans véritable stratégie et sanspilotage

    Une absence de stratégie

    Après le naufrage de l’Erika, l’ob-

    jectif affiché a été de doubler le nombre

    d’inspecteurs des centres de sécurité des

    navires (CSN). Il a bien été atteint, mais

    au prix d’une gestion tâtonnante et

    incertaine des recrutements et des effec-

    tifs tout au long de la période. L’absence

    de ligne directrice dans le plan d’arme-

    ment des centres de sécurité des navires

    aboutit à une situation actuelle marquée

    par la diversité des statuts d’agents rem-

    plissant les mêmes fonctions (civils et

    militaires), source souvent d’interroga-

    tions et parfois de frustrations peu favo-

    rables à une évolution sereine, dyna-

    mique et efficace du réseau.

    La perte progressive de la res-

    source et de l’expertise qu’apportaient

    les anciens navigants dans les centres,

    constitue un handicap pour la qualité

    des contrôles que ne peuvent totalement

    compenser les recrutements universi-

    taires et la montée en puissance du

    corps des inspecteurs des affaires mari-

    times. De surcroît, les perspectives

    d’évolution et de progression dans la

    carrière de ces personnels diplômés

    vont se réduire progressivement,

    compte tenu des forts recrutements du

    début des années 2000. Le risque est

    grand de voir le dispositif se figer pro-

    gressivement si rien n’est entrepris pour

    instaurer davantage de mobilité.

    Dans les missions de contrôle du

    pavillon et notamment des plus petits

    navires de la flotte de pêche, certains

    centres bénéficient normalement du

    renfort d’agents affectés dans des unités

    littorales des affaires maritimes

    (ULAM). Celles-ci dépendent des délé-

    gations à la mer et au littoral (DML) au

    sein des nouvelles directions territoires

    et de la mer créées lors de la réorganisa-

    tion territoriale des services déconcen-

    trés de l’Etat. Il s’agit toutefois de forces

    d’appoint incertaines et souvent éloi-

    gnées des chefs de centre dont elles

    Synthèse du R

    apport public thém

    atique de la C

    our des comptes

  • Un dispositif développé depuis10 ans sans véritable stratégie etsans pilotage

    18

    Synthèsedu R

    apport public thématique de la C

    our des comptes

    dépendent. En outre, partagées entre

    leurs missions de surveillance et de

    contrôles des pêches, souvent jugées

    prioritaires par leur hiérarchie locale, et

    leurs tâches d’inspection et de vérifica-

    tion de la sécurité des flotteurs, elles

    courent le risque d’une perte d’expertise

    dans ce dernier domaine chez les plus

    jeunes. Pour toutes ces raisons, ce sys-

    tème, au demeurant assis sur la base juri-

    dique incertaine de conventions, sou-

    vent incomplètes et rarement mises à

    jour, doit disparaître pour laisser la place

    à une réallocation de ressources consti-

    tuées d’agents de catégorie B et C au

    profit de certains centres de sécurité des

    navires.

    Un manque de pilo-tage

    Construit sans anticipation des

    évolutions à venir dans le domaine de la

    sécurité maritime, le système souffre

    aussi d’un manque de pilotage. Il n’ap-

    paraît d’abord pas que l’administration

    centrale ait cherché à imposer une doc-

    trine et des bonnes pratiques dans les

    centres, porteuses d’unité et d’égalité

    des contrôles à l’égard des contrôlés sur

    l’ensemble du territoire national.

    Les lacunes du pilotage central se

    découvrent sur le terrain dans la diver-

    sité et l’autonomie des centres. Les

    modalités de gestion interne des centres,

    notamment dans l’organisation du tra-

    vail et la répartition des tâches entre ins-

    pecteurs, en fournissent une illustration

    frappante par la diversité qui règne d’un

    centre à l’autre. Cet aspect prend une

    dimension encore plus sensible lorsqu’il

    s’agit d’établir les règles qui doivent pré-

    sider à l’organisation des relations entre

    inspecteurs et armateurs dans la durée.

    L’administration centrale devrait claire-

    ment afficher qu’une rotation régulière

    des inspecteurs constitue un facteur

    important de qualité.

    La difficulté, voire l’incapacité de

    la direction des affaires maritimes à

    développer et à imposer depuis plu-

    sieurs années un système d’information

    nationale fiable concernant la flotte sous

    pavillon national, constitue un lourd

    handicap tant pour le suivi de celle-ci

    que pour la vérification d’une bonne

    allocation des ressources et des moyens

    au sein du dispositif.

    Après une succession d’échecs,

    une nouvelle application informatique

    dite GINA a été déployée dans tous les

    centres, pourvoyeurs d’informations à

  • 19

    Synthèse du R

    apport public thém

    atique de la C

    our des comptes

    Un dispositif développé depuis 10 ans sans véritable stratégie

    et sans pilotage

    partir des contrôles, ainsi que dans les

    services déconcentrés de l’administra-

    tion des affaires maritimes. Toutefois

    son taux d’utilisation est insuffisant. Il

    est donc indispensable que l’administra-

    tion centrale impose une pratique

    homogène et exhaustive de l’outil à tous

    les centres. De même, diverses autres

    voies d’amélioration de l’application et

    de ses performances doivent être

    recherchées notamment par une meil-

    leure interopérabilité avec d’autres sys-

    tèmes détenant des informations utiles

    aux contrôles. A cet égard le rapproche-

    ment avec la base NAVPRO d’immatri-

    culation des navires est fondamental,

    sous réserve bien sûr de la fiabilité de

    cette base, situation qui reste à atteindre.

    En outre, la direction des affaires mari-times et les nouvelles directions interré-gionales de la mer ne disposent pasd’outils de gestions modernes leur per-mettant d’exercer un contrôle de suiviefficace de l’activité des centres et des’assurer de la bonne adéquation deseffectifs à leur charges réelles de travail.La démarche qualité entreprise, qui vientd’aboutir à la certificationNF ISO 9001 : 2008 de la direction desaffaires maritimes pour les procéduresde délivrance des titres de sécurité et deprévention de la pollution, notammentest certes utile, mais elle ne suffit paspour pallier la sérieuse lacune résultantde l’absence de « reporting » des centreset d’un système efficace de contrôle degestion piloté par l’administration cen-trale.

  • Un dispositif développé depuis10 ans sans véritable stratégie etsans pilotage

    Synthèsedu R

    apport public thématique de la C

    our des comptes

    20

  • 21

    Synthèse du R

    apport public thématique de la C

    our des comptes

    Cour des comptes

    4 Une logique de contrôleaffaiblie au niveau local

    Traditionnellement, le système de

    contrôle de la sécurité des navires sous

    pavillon national, mis en œuvre par l’ad-

    ministration des affaires maritimes, avait

    été conçu de façon que puisse être porté

    un regard, sinon unique, à tout le moins

    conjoint, par des acteurs administratifs

    proches sur l’ensemble, navire et équi-

    page, qui forme un tout.

    Cette approche cohérente et inté-

    grée de la sécurité avait déjà été battue

    en brèche lors de la disparition des quar-

    tiers des affaires maritimes et la création

    des directions départementales des

    affaires maritimes (DDAM). La récente

    réorganisation territoriale de l’Etat et de

    ses services déconcentrés est venue

    entériner un processus de séparation

    dans lequel, désormais, le contrôle de la

    sécurité du flotteur et les vérifications

    afférentes à la qualité et l’aptitude des

    équipages à le conduire dépendent de

    services, non seulement différents, mais

    placés dans des chaînes hiérarchiques

    distinctes.

    Le contrôle de la sécurité des

    navires en service est réalisé notamment

    annuellement à l’occasion de visites

    aboutissant à la délivrance ou au renou-

    vellement du permis de navigation, spé-

    cificité française qui peut prendre un

    caractère formel et déresponsabilisant. Il

    est conduit par les inspecteurs de la

    sécurité des navires et de la prévention

    des risques professionnels maritimes

    affectés dans les centres de sécurité des

    navires placés sous l’autorité organique

    des nouveaux directeurs inter-régionaux

    de la mer (DIRM). En revanche, le

    contrôle et le suivi des équipages, que ce

    soit au niveau de la formation des

    marins, des décisions d’effectifs et des

    rôles d’équipage, pour autant qu’ils don-

    nent lieu à des vérifications effectives,

    sont assurés par les services des nou-

    velles délégations à la mer et au littoral

    (DML) rattachés à la chaîne territoriale

    des services de l’Etat sous l’autorité des

    préfets de département. Ils échappent

    ainsi au pilotage direct des directions

  • Une logique de contrôle affaiblie auniveau local

    22

    Synthèsedu R

    apport public thématique de la C

    our des comptes

    interrégionales de la mer.

    Les inconvénients de cette réorga-

    nisation, profondément ressentis par le

    monde des gens de mer, sont par ailleurs

    loin d’être atténués par les systèmes

    d’information, dont le caractère peu fia-

    ble et faiblement opérationnel (GINA)

    ne facilitent pas la communication entre

    des services qui s’éloignent de plus en

    plus les uns des autres.

    En définitive, le risque est grand

    qu’entre d’une part des contrôles des

    centres de sécurité des navires sur les

    flotteurs, parfois jugés trop administra-

    tifs et tatillons par les parties prenantes

    interrogées, notamment les navigants, et

    d’autre part, des vérifications sur les

    équipages exécutées purement sur

    pièces, la dimension humaine de la sécu-

    rité, pourtant fondamentale, soit peu à

    peu délaissée.

  • 23

    Synthèse du R

    apport public thématique de la C

    our des comptes

    Cour des comptes

    5 Un dispositif de contrôleinadapté à revoir en profondeur

    Le dispositif actuel est non seule-

    ment inadapté pour répondre aux nou-

    veaux enjeux créés par le renforcement

    des obligations imposées par l’Union

    européenne, mais il souffre d’une mau-

    vaise répartition des moyens entre cen-

    tres de sécurité des navires au regard de

    leurs charges de travail respectives.

    En premier lieu, la permanence du

    régime d’inspections des navires étran-

    gers en escale en fin de semaine et les

    jours fériés n’était pas assurée. Cette

    lacune était source de nombreux

    défauts de contrôles obligatoires depuis

    plus de cinq ans et plusieurs années

    d’atermoiements administratifs sur la

    mise en place d’un système efficace de

    permanence n’avaient pas réussi à la

    combler. Elle vient, au moins sur le

    papier, de recevoir un premier traite-

    ment avec la mise en place d’indemnités

    journalières pour les interventions effec-

    tuées durant ces périodes.

    Au-delà de l’absence d’outil de

    gestion permettant de suivre l’activité

    des centres de sécurité des navires et la

    répartition de la charge de travail entre

    leurs différentes missions, plusieurs élé-

    ments relevés lors de l’enquête conver-

    gent pour démontrer l’inadéquate allo-

    cation actuelle des ressources humaines

    aux centres. L’entrée en vigueur du nou-

    veau régime de l’Etat du port vient, de

    surcroît, renforcer les risques de distor-

    sion entre moyens et activités. Certains

    centres, tels St Nazaire, Caen, St Malo et

    Brest sont particulièrement touchés par

    la baisse de navires éligibles aux

    contrôles de l’Etat du port. D’autres tels

    Marseille, Le Havre, Dunkerque, Rouen

    et La Rochelle voient en revanche leur

    activité croître ou se maintenir.

    La nécessaire transposition des

    dispositions du paquet « Erika III » et

    notamment de celles relatives au nou-

    veau régime d’inspection de l’Etat du

    port dans la réglementation nationale

    aurait pu offrir l’opportunité d’une

    réforme en profondeur du système et

    surtout d’une réorganisation du réseau

    des centres de sécurité des navires dans

    le sens d’une meilleure adaptation aux

    nouveaux enjeux nationaux et euro-

    péens. Une telle occasion n’a pas été sai-

    sie.

  • Un dispositif de contrôle inadapté àrevoir en profondeur

    24

    Synthèsedu R

    apport public thématique de la C

    our des comptes

    En effet, la transposition des

    textes du paquet « Erika III » dans la

    réglementation nationale offrait la possi-

    bilité d’entreprendre une réforme en

    profondeur du dispositif. Il s'agissait de

    le rendre apte à faire face non seulement

    au surcroit de contrôles et d’obligations

    réclamé par l’entrée en vigueur du nou-

    veau régime de l’Etat du port mais aussi

    par celle de la convention dite MLC

    (Maritime Labour Convention) 2006

    étendant les contrôles aux conditions de

    travail des équipages.

    Dans les faits, l’administration des

    affaires maritimes et ses responsables,

    au niveau européen, ont conduit une

    action volontariste en faveur du renfor-

    cement des contrôles et des mesures de

    sécurité, mais ils ont faiblement anticipé

    l’impact de ces décisions sur la réforme

    de l’organisation qu’elles rendaient

    nécessaire. C’est une réforme a minima

    du système qui a été entreprise, comme

    en témoigne la faible étude d’impact qui

    la présente et se contente de proposer,

    pour l’essentiel, d’alléger les charges des

    centres de sécurité des navires par des

    mesures de délégation accrue aux socié-

    tés de classification de la délivrance et

    du renouvellement des titres de sécurité

    des plus gros navires de charge navigant

    à l’international et d’espacer les visites

    de renouvellement des permis de navi-

    gation pour les navires de pêche de

    moins de 12 mètres selon des critères de

    ciblage définis par arrêté.

    L’administration des affaires mari-

    times a trop longtemps négligé le pilo-

    tage opérationnel des centres de sécurité

    des navires, qu'il s'agisse de suivre leur

    activité, de répartir de façon adéquate,

    quantitativement et qualitativement, les

    moyens, et de donner une impulsion

    dans le management de leurs moyenshumains.

    Le redéploiement des effectifs ou

    la réorganisation du réseau et des

    méthodes de travail permettant une

    meilleur adéquation du dispositif d’en-

    semble des centres de sécurité des

    navires aux charges réelles de travail n’a

    jamais constitué une priorité. Il a man-

    qué une volonté forte, politique ou

    administrative, dans un environnement

    soumis par ailleurs aux rigidités du statut

    de la fonction publique, rendues plus

    apparentes avec la nouvelle politique de

    recrutement suivie à partir du début des

    années 2000.

    C’est donc à une indispensable

    réorganisation du dispositif qu’invite la

    Cour au terme de son évaluation fondée

    sur deux préalables : la fixation d’objec-

    tifs clairs en matière de contrôle du

  • Un dispositif de contrôle inadapté àrevoir en profondeur

    25

    Synthèse du R

    apport public thém

    atique de la C

    our des comptes

    pavillon, seule variable d’ajustement

    compte tenu des obligations incontour-

    nables pour les contrôles de l’Etat du

    port, et l’amélioration rapide des perfor-

    mances du système d’information

    GINA qui doit contribuer à la mise en

    place d’un contrôle de gestion moderne

    permettant de suivre l’activité réelle des

    centres.

    L’administration des affaires mari-

    times devrait alors être en mesure de

    procéder aux redéploiements de res-

    sources au sein du dispositif existant et,

    le cas échéant, à des regroupements de

    centres en répondant à deux impératifs

    de la politique publique de sécurité des

    navires :

    - un impératif d’efficience et de

    bon emploi des moyens publics avec

    l’affectation d’inspecteurs de catégorie B

    au lieu d’inspecteurs de catégorie A

    chaque fois que la nature de la flotte

    administrée, notamment dans le

    domaine des plus petits navires de

    pêche, le justifie, les agents de catégorie

    A devant être affectés uniquement à des

    tâches correspondant à leur niveau de

    formation et d’expertise ;

    - un impératif d’efficacité avec un

    redéploiement et une nouvelle organisa-

    tion du dispositif qui doivent viser trois

    objectifs stratégiques : la permanence et

    l’exhaustivité des inspections de l’Etat

    du port ; un effort de diminution sensi-

    ble des taux d’accidents et des risques

    dans le domaine de la pêche ; le réexa-

    men de l’architecture du système de

    contrôle de la flotte de commerce natio-

    nale, notamment celle pratiquant la navi-

    gation internationale.

    Il conviendrait de se rapprocher

    des dispositifs britanniques ou d’autres

    nations performantes dans le domaine

    de la sécurité maritime, qui, tout en délé-

    guant davantage de contrôles de premier

    niveau aux sociétés de classification, pri-

    vilégient les contrôles et inspections de

    second niveau, le cas échéant, inopinés,

    tant sur les navires de leur pavillon que

    sur les sociétés de classification exerçant

    des compétences statutaires.

    C’est seulement au prix d’un tel

    effort de rationalisation et de moderni-

    sation que l’administration peut redon-

    ner cohérence et pertinence au disposi-

    tif national de contrôle de la sécurité des

    navires.

  • Un dispositif de contrôle inadaptéà revoir en profondeur

    Synthèsedu R

    apport public thématique de la C

    our des comptes

    26

  • Conclusion

    27

    Synthèse du R

    apport public thém

    atique de la C

    our des comptes

    Partie du constat que les résultats obtenus par le système national de contrôle de la sécurité

    des navires, qu’ils battent pavillon national ou naviguent sous pavillons étrangers et fré-

    quentent les eaux territoriales et les ports français, ne sont pas à la hauteur des enjeux

    actuels, la Cour parvient, au terme de son évaluation, à la conclusion que le dispositif existant n’est

    plus adapté aux priorités de la sécurité maritime de la France.

    Les performances insuffisantes du dispositif mettent en cause la pertinence de son organisa-

    tion.

    Les risques d’accidents, que courent les marins-pêcheurs français du fait des conditions

    actuelles de transformation ou de construction des navires et de leur exploitation, ou les risques envi-

    ronnementaux qui pèsent sur nos côtes lorsque sont mal remplies nos obligations européennes, ne

    sont pas suffisamment pris en compte par ce dispositif.

    Conçu dans un contexte de crise et dans l’urgence des mesures à prendre pour satisfaire l’opi-

    nion publique et la représentation nationale, à juste titre choquées par les conséquences de graves

    sinistres maritimes sur notre environnement côtier, le réseau d’inspections et de contrôles s’est déve-

    loppé, depuis plus d’une décennie, sans stratégie ni ligne directrice anticipant l’avenir. Il est dès lors

    aujourd’hui figé, tant dans ses implantations géographiques que dans les perspectives d’avenir

    offertes à ses plus jeunes agents civils.

    La faiblesse, pour ne pas dire l’absence de tout pilotage des centres de sécurité des navires par

    l’administration centrale et ses services déconcentrés, se traduisent aussi par l’impossibilité de dispo-

    ser avec précision des données et statistiques indispensables pour connaître les flottes administrées,

    mesurer ses véritables performances et apprécier l’adéquation de ses moyens à ses missions.

    Dans un contexte de grandes tensions budgétaires c’est à une profonde réforme et à une réor-

    ganisation du système, à moyens constants, qu’appelle la Cour.

    Elle doit s’inspirer des réalisations de pays maritimes étrangers comparables qui ont réussi à

    alléger et réorienter leurs dispositifs de contrôles sur leur pavillon national, sans dégrader la qua-

    lité de leur flotte notamment celle naviguant à l’international, souvent en croissance comparée à celle

    de la France. Elle doit, en revanche, chercher à concevoir un dispositif littoral permettant de mieux

    cibler et traiter les secteurs à risques et les enjeux financiers et humains prioritaires.

    C’est à la réalisation de cet objectif pour les cinq ans à venir que la Cour invite les pouvoirs

    publics et en particulier l’administration des affaires maritimes à s’atteler dès maintenant.

  • Recommandations

    28

    Synthèsedu R

    apport public thématique de la C

    our des comptes

    1) Améliorer le pilotage stratégiquede la politique de sécurité desnavires sous pavillon français en :

    - mettant à jour la base de donnéesd’immatriculation des navires (NAV-PRO) pour disposer d’une source sta-tistique unique et fiable rendantcompte avec précision de la réalité desflottes de commerce et de pêche ;- rassemblant dans un documentunique les données concernant lasécurité et les accidents dans le secteurde la pêche ;- fixant quelques objectifs et indica-teurs à afficher dans le programme205 de la loi de finances et dans unplan stratégique pluriannuel et des rap-ports d’activité de la direction desaffaires maritimes permettant de défi-nir et suivre une politique d’améliora-tion de la performance dans ce secteur(baisse des accidents dans le secteur dela pêche).

    2) Fixer dans le programme de laloi de finances traitant de la sécu-rité et la sûreté maritime un (oudes) objectif(s) et indicateur(s)pertinent(s) permettant de rendrecompte des résultats et perfor-mances de notre système decontrôle des navires étrangers dansle cadre de nos obligations euro-péennes au titre de l’État du port.

    3) Définir pour les 10 ans à venirune politique de ressourceshumaines cohérente avec les objec-tifs stratégiques de la politique desécurité des navires en :

    - homogénéisant les statuts et modali-tés de gestion des inspecteurs de lasécurité des navires et de la préventiondes risques professionnels maritimes ;- supprimant la mission de contrôle dela sécurité des navires dans les déléga-tions à la mer et au littoral et dans lesunités littorales des affaires maritimespour ne la confier qu’aux seuls centresde sécurité des navires à renforcer enagents de catégorie B correspondantmieux à la nature de leurs missions surune grande partie de la flotte de pêche.

    4) Améliorer et fiabiliser les basesde données et systèmes d’informa-tion gérés par l’administration desaffaires maritimes pour renforcer laqualité et l’efficacité des contrôlesen :

    - imposant l’enregistrement des don-nées en mode complet dans GINAdans tous les centres puis en dévelop-pant de nouvelles fonctionnalités per-mettant le suivi régulier de l’activité decontrôle du pavillon ;

  • Recommandations

    29

    Synthèse du R

    apport public thém

    atique de la C

    our des comptes

    - développant l’interopérabilité entreles systèmes existants (suivi desnavires, des marins, des évènements demer et des inspections de l’État duport sur les navires français).

    5) Renforcer le rôle moteur desdirections interrégionales de la merdans la nouvelle organisationadministrative relative à la sécuritémaritime en :

    - les dotant de contrats d’objectifs etde lettres de mission formulant desobjectifs et des indicateurs de perfor-mance cohérents avec ceux définis auniveau national ;- veillant à ce que chacune d’entre ellessoit dotée d’un projet de service défi-nissant des stratégies de zone dansleurs missions de contrôle de la sécu-rité applicable tant aux centres desécurité des navires qu’aux délégationsà la mer et au littoral de leur ressort ;

    - incitant les délégations à la mer et aulittoral, services départementaux deproximité, à effectuer des visites surplace et à développer des actions decontact auprès des armateurs etmarins à l’occasion des procédures devisa des décisions d’effectifs et decontrôle et suivi des rôles d’équipage.

    6) Procéder à la réorganisation duréseau des centres et aux réalloca-tions de moyens permettant unemeilleure adéquation du dispositifaux charges réelles et prioritésrésultant des enjeux européens(État du port) et nationaux (sec-teur de la pêche) en :

    - dotant la direction des affaires mari-times et les directions interrégionalesde la mer d’un outil permettant lerecueil d’informations précises sur leuractivité par nature de missions ;- mettant en place un système de« reporting » centralisé alimentant unsystème de contrôle de gestionmoderne et performant.