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Bulletin d’information Les éditions des JOURNAUX OFFICIELS Diffusion de jurisprudence, doctrine et communications N° 780 Publication bimensuelle 15 avril 2013

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Bulletind’information

Les éditions desJOURNAUX OFFICIELS

Diffusion de jurisprudence, doctrine et communications

Prix : 8,80 eISSN 0750-3865

Direction de l’informationlégale et administrative

accueil commercial :01 40 15 70 10

commande :Administration des ventes

23, rue d’Estrées, CS 10733 75345 Paris Cedex 07

télécopie : 01 40 15 68 00ladocumentationfrancaise.fr

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N° 780

Publication bimensuelle

15 avril2013

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intranet

Cour de cassation s’effectue par le sitel’accès au site intranet de la

intranet du ministère de la justice

Consultez le site intranet de la Cour de cassation. Accessible par l’intranet justice, les magistrats y trouveront notamment :• l’intégralité des arrêts de la Cour de cassation depuis 1990 ;• les arrêts publiés depuis 1960 ;• une sélection des décisions des cours d’appel et des tribunaux ;• des fiches méthodologiques en matière civile et en matière pénale ;• les listes d’experts établies par la Cour de cassation et par les cours d’appel.

Consultezsur

www.courdecassation.frle site de la Cour de cassation

internet

En refondant son portail, la Cour de cassation a souhaité :• se doter d’un site dynamique, lui permettant notamment de favoriser la remontée

en page d’accueil d’informations de premier plan ;• réorganiser les contenus, accessibles par un nombre limité de rubriques et

améliorer l’ergonomie du site pour favoriser l’accès à la jurisprudence et aux colloques organisés par la Cour ;

• faciliter la navigation sur le site par la mise en place d’un moteur de recherche ;• apporter des informations nouvelles : données statistiques, liens vers les sites

de cours suprêmes de l’Union européenne et du reste du monde, en plus des contenus presque tous repris de l’ancien site.

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Bulletind’information

Communi ca t i on s

Jur i sprudenc e

Doc t r in e

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2•

Bulletin d’informationEn quelques mots…

•15 avril 2013

En quelques mots…

Communications Jurisprudence

Le 13 décembre dernier, la deuxième chambre civile a jugé (infra, no 589) que « la

seule présence d’un véhicule sur les lieux d’un accident de

la circulation ne suffit pas à caractériser son implication au sens de l’article premier de la

loi no 85-677 du 5 juillet 1985 », cassant l’arrêt « se déterminant

par des motifs impropres à caractériser l’implication […] qui,

pour dire un véhicule impliqué dans un accident, énonce qu’il

se trouvait dans la file de voitures concernées par la manœuvre de

dépassement fautive et qu’il a été victime de cet accident pour

avoir reçu des projections de liquide de batterie provenant de

véhicules percutés et impliqués ». Dans son commentaire, Sandrine

Tisseyre (Gazette du Palais, 6-7 février 2013, p. 9 et s.) note

que cette solution « rompt avec la tradition d’acceptation extensive

de la notion d’implication », la Cour « se montr[ant]

plus exigeante quant à la démonstration d’une intervention,

certes à quelque titre que ce soit, mais néanmoins effective

du véhicule dans la réalisation de l’accident ».

La veille, la chambre sociale a jugé (infra, no 645)

qu’« il résulte de l’article L. 3261-2 du code du travail […],

qui impose aux employeurs la prise en charge partielle du prix des titres d’abonnements

souscrits par leurs salariés pour leurs déplacements accomplis

au moyen de transports publics entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail, qu’il n’y a pas lieu de distinguer selon la situation géographique de

cette résidence », approuvant « le conseil de prud’hommes

qui ne limite pas cette prise en charge aux seuls déplacements effectués dans la région Île-de-France ». Pour Olivier Giovenal, (JCP 2013, éd. S, no 1091), en

effet, « quels que soient les motifs qui guident le salarié dans le choix

de son domicile, ceux-ci n’ont aucune incidence sur l’obligation

de prise en charge [par] l’employeur des coûts afférents à ses déplacements entre son

domicile et son lieu de travail », et « l’accord de l’employeur

n’est pas davantage requis en cas de changement de domicile par le salarié […] peu important l’augmentation du montant des

frais de transports publics ».

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3•

15 avril 2013En quelques mots…

•Bulletin d’information

Doctrine

Ce même jour, la chambre sociale a également jugé (infra, no 610)

qu’« en l’absence de motif économique de licenciement,

le contrat de transition professionnelle n’a pas de cause

et l’employeur est alors tenu à l’obligation de préavis et des

congés payés afférents, sauf à tenir compte des sommes déjà versées », cassant « l’arrêt qui, pour débouter un salarié de sa

demande en paiement d’une indemnité compensatrice de préavis, retient que la totalité

de l’indemnité de préavis a été versée par l’employeur à

Pôle emploi, alors que seules les sommes versées par

l’employeur au salarié pouvaient être déduites de la créance au

titre de l’indemnité de préavis », solution qui, selon Jean-Marc

Albiol (JCP 2013, éd. S, no 1101), « bien que sévère, apparaît

logique dans la mesure où les effets de l’inexistence de la cause

de rupture entre l’employeur et le salarié, une fois constatée par

la juridiction du fond, peuvent difficilement s’étendre

aux rapports contractuels entre le salarié et Pôle emploi

dans la convention tripartite liant ces acteurs ».

Enfin, la Cour, réunie en assemblée plénière, a jugé,

le 15 février 2013, que, « selon l’article 53 de la loi du

29 juillet 1881, qui doit recevoir application devant la juridiction

civile, l’assignation doit, à peine de nullité, préciser et qualifier le fait incriminé et énoncer le

texte de loi applicable », et que « est nulle une assignation

retenant pour le même fait la double qualification d’injure et de diffamation », en concluant

que, « par suite, une cour d’appel, ayant constaté que des propos identiques ou quasiment identiques, même figurant pour

certains dans des commentaires publiés à des dates distinctes, se

trouvaient poursuivis sous deux qualifications différentes, en a

déduit à bon droit que ce cumul de qualifications étant de nature à créer pour les défenderesses

une incertitude préjudiciable à leur défense, l’assignation était nulle

en son entier. »

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4•

Bulletin d’informationTable des matières

•15 avril 2013

Table des matières

Jurisprudence

Droit européen Numéros

556 à 587

Cour de cassation (*)

I. - ARRÊT PUBLIÉ INTÉGRALEMENTArrêt du 15 février 2013 rendu par l’assemblée plénière Page

Presse 15

II. - ARRÊTS DES CHAMBRES STATUANT EN MATIÈRE DE QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITÉ Numéros

Question prioritaire de constitutionnalité 588

III. - TITRES ET SOMMAIRES D’ARRÊTS - ARRÊTS DES CHAMBRES Numéros

Accident de la circulation 589

Action civile 590

Alsace-Moselle 591

Appel correctionnel ou de police 592

Atteinte à l’autorité de l’État 593-594

Cassation 595 à 599

Chasse 600

Circulation routière 601

Compétence 602

Conflit de juridictions 603

Conflit de lois 648

Contrat de travail, exécution 604 à 607-611

Contrat de travail, formation 608

Contrat de travail, rupture 609 à 613

Crimes et délits flagrants 617

Élections professionnelles 614-615

Emploi 616

Garde à vue 617-618

Instruction 619

Jugements et arrêts par défaut 620

Juridictions correctionnelles 621

Lois et règlements 622

Mesures d’instruction 623

Postes et communications électroniques 624

Prescription 625-626

Procédure civile 627-628

Prud’hommes 629-630

Rapatrié 631

Réglementation économique 632

Responsabilité délictuelle ou quasi délictuelle 633

Responsabilité pénale 634

Rétention de sûreté et surveillance de sûreté 635

Saisie immobilière 636

Sécurité sociale, assurances sociales 637

Sécurité sociale, contentieux 638

* Les titres et sommaires des arrêts publiés dans le présent numéro paraissent, avec le texte de l’arrêt, dans leur rédaction définitive, au Bulletin des arrêts de la Cour de cassation du mois correspondant à la date du prononcé des décisions.

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5•

15 avril 2013Table des matières

•Bulletin d’information

Société 592

Sports 639

Statuts professionnels particuliers 640 à 642

Transaction 643

Travail réglementation, durée du travail 644

Travail réglementation, rémunération 645-646

Travail réglementation, santé sécurité 647

Union européenne 648

DÉCISIONS DES COMMISSIONS ET JURIDICTIONS INSTITUÉES AUPRÈS DE LA COUR DE CASSATION

Commission nationale de réparation des détentions

Réparation à raison d’une détention 649

Commission de réexamen d’une décision pénale consécutif au prononcé d’un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme

Réexamen 650

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6•

Bulletin d’informationDroit européen

•15 avril 2013

Jurisprudence

No 556

Convention européenne des droits de l’hommeArticle 5, § 3. - Garanties pour les personnes privées de liberté. - Droit à être jugé dans un délai raisonnable ou à être libéré pendant la procédure. - Motifs de maintien en détention provisoire : non-violation.

Dans son arrêt de chambre rendu dans l’affaire Rossi c/ France (requête no  60468/08), la Cour européenne des droits de l’homme décide que la détention provisoire prolongée d’un accusé dans le cadre d’une enquête complexe concernant des vols à main armée n’était pas injustifiée et qu’en conséquence, il n’y a pas eu violation de l’article 5, § 3, (droit à la liberté et à la sûreté) de la Convention européenne des droits de l’homme.

L’affaire concernait la détention provisoire de plus de quatre ans d’un homme mis en cause dans le cadre d’une enquête sur onze vols à main armée.

La Cour a retenu que le  maintien prolongé du requérant en détention provisoire avait été justifié par la nécessité de mener de très nombreux actes d’enquête, le risque de pression sur les témoins et le risque de fuite ou de réitération. La Cour a estimé que la longueur de la détention avait tenu à la complexité de l’affaire et, en partie, au comportement du requérant, qui a multiplié les demandes d’actes et de remises en liberté. Elle a rappelé que la célérité particulière à laquelle un accusé détenu a droit dans l’examen de son cas ne doit pas nuire aux efforts des magistrats pour accomplir leur tâche avec le soin voulu.

Chambre, arrêt du 18 octobre 2012, Rossi c/ France, requête no 60468/08.

No 557

Convention européenne des droits de l’hommeArticle 8. - Vie privée.  - Obligation faite aux avocats de déclarer leurs soupçons, révélés en dehors de leur mission de défense, relatifs aux activités illicites de blanchiment d’argent de leurs clients : non-violation.

Dans son arrêt de chambre rendu dans l’affaire Michaud c/ France (requête no 12323/11), la Cour européenne des droits

de l’homme décide que l’obligation de déclaration de soupçon incombant aux avocats dans le cadre de la lutte contre le blanchiment ne porte pas une atteinte disproportionnée au secret professionnel et qu’en conséquence, il n’y a pas eu violation de l’article  8 (droit au respect de la vie privée) de la Convention européenne des droits de l’homme.

L’affaire concerne l’obligation incombant aux avocats français de déclarer leurs « soupçons » relatifs aux éventuelles activités de blanchiment menées par leurs clients. Le requérant considérait notamment que cette obligation, qui résulte de la transposition de directives européennes, entrait en contradiction avec l’article  8 de la Convention, qui protège la confidentialité des échanges entre l’avocat et son client.

La Cour estime qu’il lui appartient de se prononcer sur cette question, la «  présomption de protection équivalente  » ne trouvant pas à s’appliquer en l’espèce.

La Cour souligne l’importance de la confidentialité des échanges entre les avocats et leurs clients ainsi que du secret professionnel des avocats. Elle estime cependant que l’obligation de déclaration de soupçon poursuit le but légitime de la défense de l’ordre et de la prévention des infractions pénales dès lors qu’elle vise à lutter contre le blanchiment de capitaux et les infractions pénales associées, et qu’elle est nécessaire pour atteindre ce but.

Sur ce dernier point, elle retient que, telle que mise en œuvre en France, l’obligation de déclaration de soupçon ne porte pas une atteinte disproportionnée au secret professionnel des avocats, puisque ceux-ci n’y sont pas astreints lorsqu’ils exercent leur mission de défense des justiciables et que la loi met en place un filtre protecteur du secret professionnel en prévoyant que les avocats ne communiquent pas directement leurs déclarations à l’administration, mais à leur bâtonnier.

Chambre, arrêt du 6  décembre  2012, Michaud c/  France, requête no 12323/11.

No 558

Convention européenne des droits de l’hommeArticle 10. - Liberté d’expression. - Restriction de l’accès à internet : violation.

Dans son arrêt de chambre rendu dans l’affaire Ahmet Yildirim c/ Turquie (requête no 3111/10), la Cour européenne des droits

Droit européen

I. - COUR EUROPÉENNE DES DROITS DE L’HOMME

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7•

15 avril 2013Droit européen

•Bulletin d’information

de l’homme décide qu’une mesure de restriction de l’accès à internet qui ne s’inscrit pas dans un cadre légal strict délimitant l’interdiction et offrant la garantie d’un contrôle juridictionnel contre d’éventuels abus constitue une violation de la liberté d’expression.

L’affaire concerne la décision d’un tribunal de bloquer l’accès à «  Google Sites  », qui hébergeait un site internet dont le propriétaire faisait l’objet d’une procédure pénale pour outrage à la mémoire d’Atatürk. Cette mesure de blocage avait pour effet de verrouiller également l’accès à tous les autres sites hébergés par le serveur.

Chambre, arrêt du 18 décembre 2012, Ahmet Yildirim c/ Turquie, requête no 3111/10.

No 559

Convention européenne des droits de l’hommeGuide sur la jurisprudence.

La Cour a lancé une nouvelle série d’études sur sa jurisprudence par article. La première publication de cette série porte sur l’article 5 (droit à la liberté et à la sûreté) de la Convention ; elle sera suivie prochainement par d’autres études, article par article.

26 novembre 2012.

II. - COUR DE JUSTICE ET TRIBUNAL DE L’UNION EUROPÉENNE

COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPÉENNE

No 560

Union européenneArticle 267 TFUE.  - Annulation d’une décision juridictionnelle.  - Renvoi à la juridiction concernée.  - Obligation de se conformer à la décision d’annulation. - Renvoi préjudiciel. - Possibilité.

Statuant sur une demande de décision préjudicielle au titre de l’article  267 TFUE, introduite par le Najvyšší súd Slovenskej republiky (Slovaquie), la Cour dit pour droit :

«  L’article  267 TFUE doit être interprété en ce sens qu’une juridiction nationale, telle que la juridiction de renvoi, a l’obligation de saisir d’office la Cour de justice de l’Union européenne d’une demande de décision préjudicielle, alors même qu’elle statue sur renvoi après la cassation de sa première décision par la juridiction constitutionnelle de l’État membre concerné et qu’une règle nationale lui impose de trancher le litige en suivant la position juridique exprimée par cette dernière juridiction ».

Grande chambre, arrêt du 15 janvier 2013, Krizan, C-416/10.

No 561

Union européenneConcurrence. - Article 101, paragraphe 1, TFUE. - Entente. - Caractère sensible d’une restriction.  - Règlement (CE) no  1/2003.  - Article 3, paragraphe 2.  - Autorité nationale de la concurrence.  - Pratique susceptible d’affecter le commerce entre États membres. - Poursuite et sanction. - Non-dépassement des seuils de parts de marché définis dans la communication de minimis. - Restrictions par objet.

Statuant sur une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Cour de cassation (France), la Cour dit pour droit :

« Les articles 101, paragraphe premier, TFUE et 3, paragraphe 2, du règlement (CE) no 1/2003 du Conseil du 16 décembre 2002 relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles  81 [CE] et 82 [CE] doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à ce qu’une autorité nationale de concurrence applique l’article  101, paragraphe premier, TFUE à un accord entre entreprises qui est susceptible d’affecter le commerce entre États membres, mais qui n’atteint pas les seuils fixés par la Commission européenne dans sa

communication concernant les accords d’importance mineure qui ne restreignent pas sensiblement le jeu de la concurrence au sens de l’article 81, paragraphe premier, [CE] (de minimis), pourvu que cet accord constitue une restriction sensible de la concurrence au sens de cette disposition ».

Deuxième chambre, arrêt du 13  décembre  2012, Expedia c/ Autorité de la concurrence, C-226/11.

No 562

Union européenneCoopération judiciaire en matière civile.  - Compétence judiciaire en matière civile et commerciale.  - Règlement (CE) no 44/2001. - Interprétation de l’article 23. - Clause attributive de juridiction figurant dans un contrat conclu entre le fabricant et l’acquéreur initial d’un bien. - Contrat s’inscrivant dans une chaîne de contrats translatifs de propriété.  - Opposabilité de cette clause à l’égard du sous-acquéreur du bien.

Statuant sur une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Cour de cassation (France), la Cour dit pour droit :

«  L’article  23 du règlement (CE) no  44/2001 du Conseil du 22  décembre  2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale doit être interprété en ce sens qu’une clause attributive de juridiction convenue dans le contrat conclu entre le fabricant d’un bien et l’acquéreur de celui-ci ne peut pas être opposée au tiers sous-acquéreur qui, au terme d’une succession de contrats translatifs de propriété conclus entre des parties établies dans différents États membres, a acquis ce bien et veut engager une action en responsabilité à l’encontre du fabricant, sauf s’il est établi que ce tiers a donné son consentement effectif à l’égard de ladite clause dans les conditions énoncées à cet article ».

Première chambre, arrêt du 7 février 2013, Refcomp, C-543/10.

No 563

Union européenneCoopération policière et judiciaire en matière pénale.  - Décision-cadre 2002/584/JAI. - Mandat d’arrêt européen

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8•

Bulletin d’informationDroit européen

•15 avril 2013

et procédures de remise entre États membres. - Mandat d’arrêt européen délivré aux fins de poursuites.  - Motifs de refus d’exécution.

Statuant sur une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Curtea de Apel Constanta (Roumanie), la Cour dit pour droit :

« La décision-cadre 2002/584/JAI du Conseil du 13 juin 2002 relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres, telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299/JAI du Conseil du 26  février  2009 doit être interprétée en ce sens que les autorités judiciaires d’exécution ne peuvent pas refuser d’exécuter un mandat d’arrêt européen émis aux fins de l’exercice de poursuites pénales au motif que la personne recherchée n’a pas été entendue dans l’État membre d’émission avant la délivrance de ce mandat d’arrêt ».

Grande chambre, arrêt du 29 janvier 2013, Radu, C-396/11.

No 564

Union européenneRèglement (CE) no 1896/2006. - Procédure européenne d’injonction de payer.  - Demande d’injonction ne remplissant pas les conditions formelles prévues par la législation nationale.  - Nature exhaustive des conditions que doit remplir la demande.  - Possibilité de réclamer les intérêts ayant couru jusqu’à la date de paiement du principal.

Statuant sur une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Sed Okragowy we Wroclawiu (Pologne), la Cour dit pour droit :

«  L’article  7 du règlement (CE) no  1896/2006 du Parlement européen et du Conseil du 12  décembre  2006 instituant une procédure européenne d’injonction de payer, doit être interprété en ce sens qu’il règle de manière exhaustive les conditions que doit remplir la demande d’injonction de payer européenne […].

Les articles  4 et 7, paragraphe 2, sous c, du règlement no  1896/2006 doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à ce que le demandeur réclame, dans le cadre de la demande d’injonction de payer européenne, les intérêts pour la période allant de la date de leur exigibilité à la date du paiement du principal ».

Première chambre, arrêt du 13  décembre  2012, Szyrocka, C-215/11.

No 565

Union européenneTransport aérien.  - Règlement (CE) no  261/2004.  - Notion de « circonstances extraordinaires ». - Obligation d’assistance aux passagers en cas d’annulation d’un vol du fait de «  circonstances extraordinaires  ».  - Éruption volcanique entraînant la fermeture de l’espace aérien.  - Éruption du volcan islandais Eyjafjallajökull.

Statuant sur une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Dublin Metropolitan District Court (Irlande), la Cour dit pour droit :

«  1o L’article  5 du règlement (CE) no  261/2004 du Parlement européen et du Conseil du 11  février  2004 établissant des règles communes en matière d’indemnisation et d’assistance des passagers en cas de refus d’embarquement et d’annulation ou de retard important d’un vol et abrogeant le règlement (CEE) no 295/91 doit être interprété en ce sens que des circonstances telles que la fermeture d’une partie de l’espace aérien européen à la suite de l’éruption du volcan Eyjafjallajökull constituent des circonstances extraordinaires au sens de ce règlement ne déliant pas les transporteurs aériens de leur obligation de prise en charge prévue aux articles 5, paragraphe 1, sous b, et 9 du règlement no 261/2004.

2o Les articles 5, paragraphe premier, sous b, et 9 du règlement no  261/2004 doivent être interprétés en ce sens que, en cas d’annulation d’un vol du fait de circonstances extraordinaires dont la durée est telle que celle en cause au principal, l’obligation de prise en charge des passagers aériens prévue à ces dispositions doit être remplie, sans que la validité desdites dispositions soit affectée.

Un passager aérien ne peut toutefois obtenir, à titre d’indemnisation du fait du non-respect par le transporteur aérien de son obligation de prise en charge visée aux articles 5, paragraphe premier, sous b, et 9 du règlement no 261/2004, que le remboursement des sommes qui, au vu des circonstances propres à chaque espèce, s’avéraient nécessaires, appropriées et raisonnables afin de suppléer la défaillance du transporteur aérien dans la prise en charge dudit passager, ce qu’il appartient au juge national d’apprécier ».

Troisième chambre, arrêt du 31  janvier  2013, McDonagh, C-12/11.

Sur la notion de « circonstances extraordinaires », à rapprocher :

Bundesgerichtshof, arrêt du 21 août 2012, X Z 138/11, publié dans cette rubrique, ci-dessous, IV-1.

III. - JURIDICTIONS FRANÇAISES

COUR DE CASSATION

No 566

Chambre de l’instructionDétention provisoire.  - Demande de mise en liberté.  - Détention subie par un accusé appelant d’une décision de cour d’assises. - Textes applicables. - Exclusion. - Article 5 § 3 de la Convention européenne des droits de l’homme.

L’accusé, appelant d’un arrêt de cour d’assises le condamnant à douze ans de réclusion criminelle, ne peut, dans l’attente

de la décision de la cour d’assises d’appel, bénéficier des dispositions de l’article  5, §  3, de la Convention européenne des droits de l’homme, qui ne concernent que les personnes détenues avant jugement.

Crim. ‑ 17 octobre 2012. REJET

No 12-85.139. - CA Versailles, 3 juillet 2012.

M.  Louvel, Pt.  - M.  Raybaud, Rap.  - M.  Gauthier, Av. Gén.  - SCP Gaschignard, Av.

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9•

15 avril 2013Droit européen

•Bulletin d’information

No 567

Conflit de juridictionsCompétence internationale.  - Convention de Bruxelles du 27  septembre  1968.  - Article 22.  - Connexité.  - Conditions. - Appréciation. - Moment. - Détermination.

Les dispositions identiques des articles  22 des Conventions de Bruxelles et de Lugano ayant pour objet d’assurer une meilleure coordination de l’exercice de la fonction juridictionnelle à l’intérieur de l’espace européen, le juge devant lequel est soulevé une exception de connexité, sur le fondement de ces dispositions, doit se placer à la date à laquelle il statue sur cette exception, et non à la date de l’introduction de la demande qui lui est soumise, pour examiner si une demande connexe est pendante devant une juridiction d’un autre État contractant.

1re Civ. ‑ 19 décembre 2012. REJET

No 09-17.440. - CA Paris, 21 octobre 2009.

M.  Charruault, Pt.  - Mme  Maitrepierre, Rap.  - Me  Foussard, SCP Richard, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, Av.

No 568

Conflit de loisProcédure collective.  - Loi applicable.  - Loi du lieu d’ouverture de la procédure collective.  - Domaine d’application. - Action en nullité des actes de la période suspecte.  - Limites.  - Délais pour agir en droit français (non).

En droit international privé commun, seul applicable à la procédure collective d’une société allemande ne relevant pas, en raison de son activité, du champ d’application du règlement (CE) no 1346/2000 du 29  mai  2000 relatif aux procédures d’insolvabilité, l’action qu’exercent les organes d’une procédure collective en annulation, révocation ou inopposabilité d’actes passés par le débiteur avant l’ouverture de celle-ci et estimés préjudiciables aux créanciers est, en raison de son lien avec la procédure, soumise au droit allemand de celle-ci, y compris en ce qui concerne les délais pour agir.

En conséquence, viole les articles  3 et 2221 du code civil la cour d’appel qui, déclarant prescrite l’action exercée par le syndic sur le fondement de l’article L. 137-2 du code français de la consommation, ne met pas en œuvre la loi allemande gouvernant la procédure collective, après en avoir vérifié la teneur, alors que le syndic, agissant en tant qu’organe d’une telle procédure, fondait son action sur cette loi, laquelle, selon lui, l’autorisait, sur une période suspecte pouvant remonter jusqu’à quatre années avant l’ouverture de la procédure, à recouvrer les bénéfices fictifs distribuées par la société débitrice.

Com. ‑ 2 octobre 2012. CASSATION PARTIELLE

No 10-18.005. - Juridiction de proximité Alès, 9 mars 2010.

M. Espel, Pt. - M. Rémery, Rap. - Mme Bonhomme, Av. Gén. - SCP Boré et Salve de Bruneton, Av.

No 569

Conflit de loisProcédure collective.  - Loi applicable.  - Loi du lieu d’ouverture de la procédure collective.  - Domaine d’application. - Action en nullité des actes de la période suspecte. - Limites. - Exequatur en France du jugement d’ouverture (non).

En droit international privé commun, seul applicable à la procédure collective d’une société allemande ne relevant pas, en raison de son activité, du champ d’application du règlement (CE) no 1346/2000 du 29  mai  2000 relatif aux procédures d’insolvabilité, l’annulation, la révocation ou l’inopposabilité, prononcées à la requête des organes d’une procédure collective, d’actes estimés préjudiciables aux créanciers et passés par la société débitrice avant l’ouverture de la procédure est une conséquence de celle-ci et relève, à ce titre, du domaine de la loi qui la régit, y compris après exequatur en France du jugement d’ouverture.

En conséquence, c’est à bon droit qu’une cour d’appel applique le droit allemand, après avoir constaté que le syndic agissait ès qualités en vue de reconstituer, dans l’intérêt de tous les créanciers, des actifs de la société dont celle-ci s’était privée indûment par le versement de plus-values fictives à certains clients pendant la période suspecte définie par le droit allemand de la procédure collective.

Com. ‑ 2 octobre 2012. REJET

No 11-14.406. - CA Colmar, 16 décembre 2010.

M. Espel, Pt. - M. Rémery, Rap. - Mme Bonhomme, Av. Gén. - SCP Didier et Pinet, SCP Boré et Salve de Bruneton, Av.

No 570

Convention européenne des droits de l’hommeArticle 6, §  1.  - Équité.  - Violation.  - Défaut.  - Cas.  - Document en langue étrangère. - Défaut de traduction. - Rejet comme élément de preuve.

Le  juge, sans violer l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, est fondé, dans l’exercice de son pouvoir souverain, à écarter comme élément de preuve un document écrit en langue étrangère, faute de production d’une traduction en langue française.

Com. ‑ 27 novembre 2012. REJET

No 11-17.185. - CA Paris, 8 décembre 2010.

M. Espel, Pt. - Mme Wallon, Rap. - M. Le Mesle, P. Av. Gén. - SCP Waquet, Farge et Hazan, SCP Boullez, Av.

No 571

1o Cour d’assisesArrêts. - Arrêt incident. - Arrêt statuant sur une demande de donné acte. - Objet. - Déposition d’un témoin. - Propos dont la mention au procès-verbal n’a pas été ordonnée (non).

2o Cour d’assisesArrêts. - Arrêt incident. - Arrêt statuant sur une demande de donné acte.  - Objet.  - Réserves concernant la composition de la cour d’assises (non).

3o Cour d’assisesDébats. - Évocation d’une infraction antérieure. - Atteinte aux droits de la défense (non).

4o Cour d’assisesComposition.  - Président.  - Incompatibilités.  - Magistrat ayant connu d’une autre poursuite contre le même accusé (non).

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10•

Bulletin d’informationDroit européen

•15 avril 2013

1o La cour d’assises ne peut, sans violer les dispositions de l’article 379 du code de procédure pénale, faire état, dans un arrêt incident, de propos tenus, lors de sa déposition, par un témoin acquis aux débats, dont le président n’avait pas ordonné qu’il soit fait mention au procès-verbal des débats.

C’est donc à bon droit qu’elle rejette la demande de la défense tendant à ce qu’il lui soit donné acte de tels propos.

2o La cour d’assises n’est tenue de donner acte que de faits précis, survenus à l’audience, constatés à cette occasion et susceptibles de porter atteinte aux droits de la défense.

C’est donc à bon droit qu’elle refuse de donner acte à l’accusé de ses réserves concernant la composition de la cour d’assises.

3o L’accusé ne saurait se faire un grief de ce qu’un précédent crime, commis par lui, ait pu être évoqué lors des débats, dès lors que la connaissance de cette infraction, de nature similaire aux faits de la cause, participe de la connaissance de sa personnalité, que la cour d’assises, par application de l’article  132-24 du code pénal, était tenue de prendre en considération pour la détermination de la peine, et que la condamnation définitive prononcée de ce chef constitue le premier terme de l’état de récidive, que vise expressément l’ordonnance de mise en accusation.

4o La circonstance que le magistrat présidant la cour d’assises ait eu, antérieurement, à se prononcer dans une autre poursuite contre le même accusé n’est pas contraire à l’exigence d’impartialité résultant des articles  6 de la Convention européenne des droits de l’homme et préliminaire du code de procédure pénale.

Crim. ‑ 17 octobre 2012. REJET

No  10-88.321.  - Cour d’assises de l’Ille-et-Vilaine, 3 novembre 2010.

M.  Louvel, Pt.  - M.  Laurent, Rap.  - M.  Gauthier, Av. Gén.  - SCP Piwnica et Molinié, Av.

No 572

Détention provisoireDemande de mise en liberté. - Rejet. - Motifs. - Traitement inhumain et dégradant.  - Caractérisation.  - Éléments propres à la personne concernée suffisamment graves pour mettre en danger sa santé physique ou mentale. - Défaut.

Saisie d’une demande de mise en liberté d’un mis en examen motivée, notamment, par l’atteinte portée à sa dignité par les conditions d’incarcération, une chambre de l’instruction a justifié sa décision de rejet, sans méconnaître l’article  3 de la Convention européenne des droits de l’homme, en retenant qu’il résultait d’une expertise médicale que la dégradation de l’état de santé de cette personne n’était pas la conséquence directe de ses conditions matérielles de détention, aucun autre élément propre à la personne, suffisamment grave pour mettre en danger sa santé physique ou mentale, n’étant par ailleurs allégué.

Crim. ‑ 3 octobre 2012. REJET

No 12-85.054. - CA Papeete, 4 juillet 2012.

M. Louvel, Pt. - M. Moreau, Rap. - M. Boccon-Gibod, Av. Gén. - SCP Potier de la Varde et Buk-Lament, Av.

No 573

Entreprise en difficulté (loi du 25 janvier 1985)Redressement judiciaire.  - Période d’observation.  - Créanciers.  - Déclaration des créances.  - Forclusion.  - Domaine d’application. - Créance de restitution d’une aide d’État jugée illégale par la Commission.

Par arrêt du 13 novembre 2008, la Cour de justice de l’Union européenne (C-214/07) a énoncé que si le délai de production des créances est expiré, les autorités nationales doivent, lorsqu’elle existe et se trouve encore ouverte, mettre en œuvre toute procédure de relevé de forclusion qui permettrait, dans des cas particuliers, la production hors délai d’une créance de restitution d’une aide d’État jugée illégale par la Commission.

La cour d’appel en a exactement déduit que le recouvrement de la créance de l’État était, en l’espèce, devenu manifestement impossible, en raison de l’irrecevabilité de la demande en relevé de forclusion présentée hors du délai préfix de l’article L. 621-46, alinéa 3, du code de commerce français, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26  juillet  2005 de sauvegarde des entreprises.

Com. ‑ 11 décembre 2012. REJET

No 11-28.053. - CA Lyon, 23 septembre 2011.

M. Espel, Pt.  - M. Rémery, Rap.  - Mme Pénichon, Av. Gén.  - Me Foussard, SCP Baraduc et Duhamel, Av.

No 574

ÉtrangerMesures d’éloignement.  - Rétention dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire.  - Prolongation de la rétention.  - Ordonnance du juge des libertés et de la détention.  - Assignation à résidence.  - Conditions.  - Circonstances exceptionnelles légitimant cette mesure (non).

Il résulte de la combinaison des paragraphes 1, 4 et 5 de l’article 15 de la Directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 du Parlement européen et du Conseil, qui est d’effet direct, que l’assignation à résidence ne peut jamais revêtir un caractère exceptionnel.

1re Civ. ‑ 24 octobre 2012. CASSATION SANS RENVOI

No 11-27.956. - CA Lyon, 10 octobre 2011.

M. Charruault, Pt. - M. Suquet, Rap. - Mme Petit, P. Av. Gén. - SCP Fabiani et Luc-Thaler, Av.

No 575

Expropriation pour cause d’utilité publiqueIndemnité. - Appel. - Mémoire d’appel. - Dépôt. - Délai. - Interruption. - Cas. - Demande d’aide juridictionnelle.

En application des dispositions de l’article  6, §  1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, relatives au procès équitable, une demande d’aide juridictionnelle interrompt les délais pour conclure impartis par l’article  R.  13-49 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, jusqu’à, en cas d’admission, la désignation de l’auxiliaire de justice si elle est plus tardive.

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15 avril 2013Droit européen

•Bulletin d’information

3e Civ. ‑ 7 novembre 2012. CASSATION

No 11-22.947. - CA Paris, 12 novembre 2009.

M.  Terrier, Pt.  - Mme  Abgrall, Rap.  - Mme  Guilguet-Pauthe, Av. Gén.  - SCP  Célice, Blancpain et Soltner, SCP  Piwnica et Molinié, Av.

No 576

Impôts et taxesRedressement et vérifications (règles communes). - Visites domiciliaires (article L.  16 B).  - Autorisation judiciaire.  - Conditions. - Origine des pièces. - Obtention de manière licite.  - Facturations détaillées émises par un opérateur de téléphonie.

L’article L. 34-1, V, du code des postes et télécommunications n’interdit que la conservation des données relatives au contenu des communications et précise que, parmi les catégories de données à conserver, figurent celles portant sur l’identification des personnes utilisatrices du service  ; sans contrevenir aux dispositions de l’article  8 de la Convention européenne, ce texte autorise ainsi la conservation des données relatives aux personnes qui émettent une communication téléphonique et à celles qui en sont destinataires.

Ayant constaté que l’administration avait exercé son droit de communication sur le fondement de l’article  L.  85 du livre  des procédures fiscales, lequel lui permettait d’obtenir communication des livres  dont la tenue est obligatoire et des documents annexes, pièces de recettes et de dépenses, dont faisaient partie les facturations détaillées émises par l’opérateur de téléphonie, le premier président de la cour d’appel en a exactement déduit que ces dernières pièces avaient une origine licite.

Com. ‑ 4 décembre 2012. REJET

No 11-27.691. - CA Chambéry, 22 novembre 2011.

M.  Espel, Pt.  - Mme  Bregeon, Rap.  - M.  Mollard, Av. Gén.  - SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, Me Foussard, Av.

No 577

Impôts et taxesRedressement et vérifications (règles communes).  - Visites domiciliaires (article L. 16 B).  - Déroulement des opérations. - Contrôle par le juge des libertés. - Modalités de la saisine du juge.  - Obligation d’en informer les occupants des lieux (non).

Aucune disposition de l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales ne prévoit que les occupants des lieux doivent recevoir une information sur la possibilité qui leur est offerte de recourir au juge des libertés pour qu’il exerce son contrôle sur la régularité des mesures en cours et sur les modalités pratiques de la saisine de celui-ci, la faculté de contester le déroulement des opérations prévue par ce texte leur garantissant un contrôle juridictionnel effectif au sens de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Com. ‑ 4 décembre 2012. REJET

No 11-28.088. - CA Paris, 29 novembre 2011.

M.  Espel, Pt.  - Mme  Bregeon, Rap.  - M.  Mollard, Av. Gén.  - SCP Gadiou et Chevallier, Me Foussard, Av.

No 578

1o Procédure civileNotification.  - Signification.  - Personne.  - Personne morale. - Siège à l’étranger. - Signification à personne au représentant légal domicilié en France. - Validité.

2o Union européenneCoopération judiciaire en matière civile. - Règlement (CE) no 1393/2007 du 13 novembre 2007. - Article premier. - Champ d’application.  - Acte à transmettre d’un État membre à un autre.  - Cas.  - Exclusion.  - Acte signifié en France au représentant légal d’une société ayant son siège dans un autre État membre.

1o La délivrance d’une assignation destinée à une personne morale dont le siège est situé à Londres est régulière dès lors qu’elle est faite à la personne de son représentant légal domicilié en France.

2o C’est à bon droit qu’une cour d’appel a déduit du caractère régulier de l’assignation délivrée en France au représentant légal d’une société ayant son siège à Londres que n’étaient pas applicables les dispositions du Règlement (CE) no 1393/2007 du Parlement européen et du Conseil du 13 novembre 2007 relatif à la signification et à la notification dans les États membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale.

Com. ‑ 20 novembre 2012. REJET

No 11-17.653. - CA Rennes, 24 février 2011.

M.  Espel, Pt.  - M.  Grass, Rap.  - M.  Mollard, Av. Gén.  - SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Gatineau et Fattaccini, Av.

No 579

Propriété industrielleMarques.  - Eléments constitutifs.  - Exclusion.  - Signe portant atteinte à des droits antérieurs.  - Atteinte à une marque antérieurement enregistrée. - Cas. - Marque pour des boissons alcooliques entravant la libre utilisation d’une marque identique antérieure pour d’autres produits.

Justifie légalement sa décision la cour d’appel qui, ayant constaté qu’une société avait mis sur le marché sous sa marque éponyme divers produits autres que des boissons alcooliques et qu’une autre société faisait usage d’une marque identique postérieure pour commercialiser des boissons alcooliques, sans commettre la confusion entre la marque susceptible d’être déclarée nulle au visa de l’article 3, § 2, a, de la directive (CE) 89/104 du 21  décembre  1988 et la marque dont l’usage est susceptible d’être interdit en vertu de la loi Evin, ni méconnaître le principe de spécialité, en a exactement déduit, sans avoir à faire d’autres recherches, que le dépôt de la marque éponyme par la seconde société et la commercialisation de produits sous celle-ci créaient une entrave à la libre utilisation de la marque première.

Com. ‑ 20 novembre 2012. REJET

No 12-11.753. - CA Paris, 26 octobre 2011.

M.  Espel, Pt.  - Mme  Pezard, Rap.  - Mme  Batut, Av. Gén.  - SCP Bénabent, SCP Hémery et Thomas-Raquin, Av.

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Bulletin d’informationDroit européen

•15 avril 2013

No 580

Représentation des salariésComité d’entreprise.  - Représentant syndical.  - Désignation.  - Conditions.  - Obtention d’élus par l’organisation syndicale. - Dispositions de la loi no 2008-789 du 20 août 2008. - Conformité. - Convention européenne des droits de l’homme. - Appréciation. - Portée.

Les articles 11 et 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales laissent les États libres d’organiser leur système de manière à reconnaître, le cas échéant, un statut spécial à certains syndicats en fonction de la nature des prérogatives qui leur sont reconnues.

Il en résulte que le choix du législateur de réserver aux seules organisations syndicales ayant des élus la possibilité de désigner un représentant syndical au comité d’entreprise ne méconnaît pas les articles susvisés de la Convention.

Soc. ‑ 24 octobre 2012. CASSATION SANS RENVOI

Arrêt no 1 :

No 11-25.530. - TI Tours, 3 octobre 2011.

M.  Lacabarats, Pt.  - M.  Huglo, Rap.  - M.  Foerst, Av. Gén.  - SCP Gatineau et Fattaccini, Av.

Arrêt no 2 :

No 11-18.885. - TI Orléans, 23 mai 2011.

M.  Lacabarats, Pt.  - Mme  Pécaut-Rivolier, Rap.  - M.  Foerst, Av. Gén.  - SCP  Célice, Blancpain et Soltner, SCP  Lyon-Caen et Thiriez, Av.

No 581

Travail réglementation, durée du travailRepos et congés.  - Repos quotidien.  - Temps de pause. - Seuils et plafonds prévus par le droit de l’Union européenne. - Preuve. - Charge. - Détermination. - Portée.

Les dispositions de l’article  L.  3171-4 du code du travail, relatives à la répartition de la charge de la preuve des heures de travail effectuées entre l’employeur et le salarié, ne sont pas applicables à la preuve du respect des seuils et plafonds prévus par le droit de l’Union européenne, qui incombe à l’employeur.

Doit en conséquence être rejeté le moyen d’un employeur faisant grief à un arrêt de cour d’appel de le condamner au paiement de dommages-intérêts au motif qu’il n’établissait pas que les salariés auraient bénéficié d’un temps de pause durant leurs périodes de surveillance nocturne.

Soc. ‑ 17 octobre 2012. REJET

No 10-17.370. - CA Versailles, 24 février 2010.

M. Lacabarats, Pt. - M. Blatman, Rap. - M. Lalande, Av. Gén. - SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Waquet, Farge et Hazan, Av.

No 582

Union européenneCoopération judiciaire en matière civile.  - Compétence judiciaire, reconnaissance et exécution des décisions.  - Règlement (CE) no  44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000. - Article 27, point 2. - Litispendance. - Compétence du tribunal saisi en premier lieu.  - Interprétation.  - Renvoi à la Cour de justice de l’Union européenne.

S’agissant de l’interprétation des dispositions du Règlement (CE) no 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000, il convient de renvoyer à la Cour de justice de l’Union européenne aux fins de répondre à la question suivante :

L’article 27, point 2, du Règlement (CE) no 44/2001 du Conseil du 22  décembre  2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution de décisions en matière civile et commerciale doit-il être interprété en ce sens que la compétence du tribunal saisi en premier lieu est établie, dès lors que, soit aucune partie n’a soulevé son incompétence, soit ce tribunal a retenu sa compétence par une décision irrévocable pour quelque cause que ce soit, notamment l’épuisement des voies de recours ?

1re Civ. ‑ 19 décembre 2012. RENVOI DEVANT LA COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPÉENNE ET SURSIS À STATUER

No 11-19.516. - CA Douai, 14 avril 2011.

M.  Charruault, Pt.  - M.  Matet, Rap.  - M.  Sarcelet, Av. Gén.  - SCP  Roger et Sevaux, SCP  Delaporte, Briard et Trichet, SCP Waquet, Farge et Hazan, Av.

No 583

Union européenneCoopération judiciaire en matière civile. - Règlement (CE) no 1393/2007 du 13 novembre 2007.  - Article 8, § 1.  - Information du destinataire.  - Formalités.  - Défaut.  - Portée.

Il résulte de l’article 8 § 1 du règlement (CE) no 1393/2007 du Parlement européen et du Conseil du 13 novembre 2007 relatif à la signification et à la notification dans les États membres des actes judiciaires et extrajudiciaires que l’entité requise informe le destinataire, au moyen du formulaire type figurant à l’annexe II, qu’il peut refuser de recevoir l’acte à signifier ou à notifier, au moment de la signification ou de la notification, ou en lui retournant l’acte dans le délai d’une semaine, si celui-ci n’est pas rédigé ou accompagné d’une traduction dans une langue comprise du destinataire.

Méconnaît les dispositions de ce texte la cour d’appel qui dit régulière la notification à une société française d’un jugement rendu par une juridiction allemande en retenant que la notification émanait du tribunal lui-même, dont le jugement joint mentionnait l’adresse dans son en-tête, de sorte que la société, en ne réclamant pas une traduction et en laissant s’écouler le délai d’opposition sans accomplir aucune diligence, s’était exposée, par sa propre négligence, à la décision d’irrecevabilité qui a sanctionné la tardiveté de son opposition, alors que le formulaire destiné à informer la société de la possibilité de refuser l’acte en le retournant à l’entité requise n’avait pas été rempli et ne comportait pas l’indication de l’adresse à laquelle l’acte devait être renvoyé.

2e Civ. ‑ 18 octobre 2012. CASSATION SANS RENVOI

No 11-22.673. - CA Paris, 9 juin 2011.

M.  Boval, Pt (f.f.).  - M.  Pimoulle, Rap.  - SCP  Coutard et Munier-Apaire, Av.

No 584

UrbanismeDroit de préemption urbain. - Exercice. - Prix. - Fixation. - Fixation judiciaire. - Éléments d’appréciation. - Accès du propriétaire dont le bien est préempté aux informations publiées au fichier immobilier.

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15 avril 2013Droit européen

•Bulletin d’information

Viole l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et le principe de l’égalité des armes la cour d’appel qui confirme l’évaluation des premiers juges, tout en constatant que la société dont les biens avaient été préemptés s’était vu refuser l’exercice des droits résultant de l’article L. 135 B du livre des procédures fiscales, alors qu’il résulte de l’article L. 213-4 du code de l’urbanisme que le propriétaire dont les biens ont fait l’objet d’un droit de préemption dispose des droits ouverts par l’article L. 135 B et que la seule production d’actes notariés relatifs aux parcelles

que cette société avait pu identifier ne pouvait pallier le déséquilibre qui résultait de ce refus.

3e Civ. ‑ 7 novembre 2012. CASSATION

No 11-17.803. - CA Amiens, 16 mars 2011.

M.  Terrier, Pt.  - Mme  Andrich, Rap.  - Mme  Guilguet-Pauthe, Av.  Gén.  - SCP  Waquet, Farge et Hazan, SCP  Piwnica et Molinié, Av.

IV. - JURIDICTIONS NATIONALES EUROPÉENNES

IV. 1. - RÉSUMÉS D’ARRÊTS DE COURS SUPRÊMES EUROPÉENNES

Allemagne

No 585

Union européenneTransports.  - Transports aériens.  - Règlement (CE) no  261/2004.  - Indemnisation des passagers en cas d’annulation d’un vol.  - Exonération de l’obligation d’indemnisation en cas de «  circonstances extraordinaires  ».  - Portée.  - Appel à la grève par une association de pilotes.

Par un arrêt du 21 août 2012, le Bundesgerichtshof (Cour de justice fédérale allemande) s’est prononcé sur la possibilité, pour un transporteur aérien qui annule des vols afin d’adapter ses services aux répercussions d’une grève annoncée, de ne pas être soumis à l’obligation d’indemniser les passagers, issue du règlement no  261/2004 établissant des règles communes en matière d’indemnisation et d’assistance des passagers en cas de refus d’embarquement et d’annulation ou de retard important d’un vol.

La demanderesse avait réservé un vol aller/retour Düsseldorf-Miami, dont le retour était prévu le 22 février 2010. À la suite de l’appel à la grève lancé, le 17 février 2010, par un syndicat de pilotes pour la période du 22 au 25  février  2010, la défenderesse, un transporteur aérien, a annulé le vol retour et a transféré la demanderesse sur un vol ultérieur, si bien qu’elle est arrivée à destination trois jours après la date prévue. Aussi a-t-elle demandé l’indemnisation prévue à l’article  7 du règlement no 261/2004.

Le  Bundesgerichtshof a jugé que, dans une telle situation, le transporteur aérien pouvait être exonéré de l’obligation de verser l’indemnisation, l’annulation étant due à «  des circonstances extraordinaires  » au sens de l’article  5, paragraphe 3, du règlement. En effet, selon le Bundesgerichtshof, un appel à la grève des pilotes, déclaré dans le cadre d’un conflit social, peut entraîner de telles « circonstances extraordinaires » pour le transporteur aérien concerné. Même si un tel appel amène à la grève de ses propres pilotes, il affecte la société de l’extérieur et est étranger à l’exercice habituel de ses activités.

S’agissant d’un conflit tarifaire au sein de l’entreprise, la défenderesse aurait certes pu éviter la grève en cédant aux exigences du syndicat. Le  Bundesgerichtshof souligne néanmoins que cette possibilité n’exclut pas d’emblée que la défenderesse puisse s’exonérer de l’obligation d’indemnisation. Sinon, le transporteur aérien devrait renoncer à la liberté syndicale qui lui est reconnue par le droit de l’Union et assumer

le rôle de perdant lors de chaque conflit social. Ceci ne serait ni tolérable pour le transporteur aérien ni favorable, à long terme, à l’intérêt des passagers.

Le  Bundesgerichtshof n’a cependant pas pu statuer au fond sur l’indemnisation réclamée par la demanderesse,  mais a renvoyé l’affaire à la juridiction inférieure afin que celle-ci vérifie si la défenderesse a pris toutes les mesures appropriées pour éviter l’annulation du vol. À cet égard, le Bundesgerichtshof a précisé qu’il y a lieu d’accorder, en présence de circonstances extraordinaires, une certaine marge de manœuvre au transporteur aérien, lors de l’appréciation des mesures appropriées.

Notons, toutefois, que, dans l’affaire Finnair (CJUE, arrêt du 4 octobre 2012, C-22/11), la compagnie aérienne avait refusé d’embarquer le demandeur en raison de la réorganisation de son vol à la suite d’une grève survenue à l’aéroport deux jours auparavant. Cette grève avait entraîné l’annulation d’un vol. Pourtant, à la différence de la présente affaire, le demandeur n’avait pas de réservation sur le vol annulé,  mais pour un vol postérieur, ayant lieu à la date prévue. La Cour de justice a jugé que, dans une telle situation, un transporteur aérien ne peut pas se prévaloir de circonstances extraordinaires pour s’exonérer de l’indemnisation due en cas de refus d’embarquement.

Bundesgerichtshof, arrêt du 21août 2012, X Z 138/11.

Sur la notion de «  circonstances extraordinaires  », à rapprocher :

CJUE, arrêt du 31  janvier  2013, Mc Donagh, C-12/11, publié dans cette rubrique, ci-dessus, II.

Royaume‑Uni

No 586

Union européenneCoopération policière et judiciaire en matière pénale.  - Décision-cadre 2002/584 relative au mandat d’arrêt européen.  - Applicabilité au Royaume-Uni de la décision-cadre et de la jurisprudence de la Cour de justice portant sur celle-ci. - Limites. - Notion d’autorité judiciaire d’émission. - Procureur. - Inclusion.

Le  30  mai  2012, la Supreme Court a jugé, par cinq voix contre deux, qu’un mandat d’arrêt européen délivré par un procureur doit être considéré comme ayant été valablement émis au regard de la décision-cadre 2002/584. En statuant ainsi, la juridiction suprême a confirmé la décision de remise de M. Assange, fondateur de l’association WikiLeaks, aux autorités suédoises (…).

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Bulletin d’informationDroit européen

•15 avril 2013

Saisissant la Cour suprême en appel, le requérant a limité son pourvoi à la seule question de l’interprétation du terme « autorité judiciaire  ». Il a soutenu, à cet égard, que le parquet suédois ne pouvait pas être considéré comme indépendant, dans la mesure où celui-ci est un acteur du processus pénal dont il fait l’objet. Pour sa part, le parquet a plaidé en faveur d’une interprétation large et autonome de la notion (…).

Aux fins de l’interprétation de la notion d’autorité judiciaire, la plupart des juges ont estimé qu’il y avait lieu de recourir aux règles générales d’interprétation prévues à l’article  31 de la Convention de Vienne sur le droit des traités. Selon son paragraphe 3, sous b, il est permis de prendre en

considération la pratique ultérieurement suivie dans l’application de la décision-cadre. À cet égard, la Cour suprême a noté qu’un certain nombre d’États membres ont reconnu à leurs parquets le droit d’agir en tant qu’autorités judiciaires d’émission de mandats d’arrêt européens et que cette pratique n’avait pas donné lieu à des objections de la part d’autres États, lesquels ont désigné des juges en tant qu’autorités d’émission. Dès lors, la Cour suprême a jugé qu’un procureur peut être une autorité judiciaire et a conclu au rejet du recours du requérant.

Supreme Court, arrêt du 30  mai  2012, Assange c/Swedish Prosecution Authority [2012] 2 WLR. 1275.

IV. 2. - RÉSUMÉS D’ARRÊTS D’AUTRES JURIDICTIONS NATIONALES

Royaume‑Uni

No 587

Union européenneDroits conférés aux particuliers. - Obligation de réparation en cas de violation par une juridiction nationale.  - Caractère manifeste de la violation. - Critères. - Omission de saisir la Cour de justice à titre  préjudiciel.  - Faute excusable au vu de l’état du droit à l’époque.

Par un jugement du 12  mai  2010, la Court of Appeal s’est prononcée dans la première affaire portée devant les juridictions

du Royaume-Uni concernant la responsabilité des juridictions nationales pour une violation du droit de l’Union. En l’espèce, la violation a été jugée insuffisamment caractérisée pour engager la responsabilité de l’État sur la base des principes dégagés dans l’arrêt Köbler (arrêt du 30  septembre  2003, C-224/01, Rec. 2003, p. I-10239) (…).

Le  19  octobre  2010, la Cour suprême a refusé la demande d’autorisation d’appel présentée par le requérant.

Court of Appeal (Civil Division), arrêt du 12 mai 2010, Cooper c/Attorney General [2011] 2 WLR. 448.

Extrait de Reflets, no 3/2012, site Curia de la Cour de justice de l’Union européenne.

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15 avril 2013Arrêt publié intégralement

•Bulletin d’information

Cour de cassation

I. - ARRÊT PUBLIÉ INTÉGRALEMENT

ARRÊT DU 15 FÉVRIER 2013 RENDU PAR L’ASSEMBLÉE PLÉNIèRE

CommUniqUéPar un arrêt du 15 février 2013, l’assemblée plénière de la Cour de cassation a réaffirmé le principe selon lequel les dispositions de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse s’appliquent aux actions engagées devant la juridiction civile.

Suivant l’évolution jurisprudentielle initiée par la deuxième chambre civile en 1992, cette même assemblée avait consacré la prééminence de cette loi sur le régime de droit commun de la responsabilité civile en énonçant, par deux arrêts du 12  juillet  2000, que «  les abus de la liberté d’expression, prévus et réprimés par la loi du 29 juillet 1881, ne peuvent être poursuivis sur le fondement de l’article 1382 du code civil ».

Cette évolution avait conduit à l’unification des règles procédurales et à l’instauration d’un régime unique du procès de presse, quelle que soit la voie, pénale ou civile, choisie par la victime, qui était tenue notamment de se conformer aux formalités prévues par l’article  53 de la loi sous peine de nullité de la citation ou de l’assignation. Par un arrêt du 8 avril  2010, la première chambre civile a, dans une instance civile, assoupli les exigences de l’article 53 en écartant la nullité d’un acte introductif d’instance qui ne précisait pas ceux des faits qui constitueraient des injures et ceux qui constitueraient des diffamations.

Dans son arrêt du 15 février 2013, l’assemblée plénière a rejeté le pourvoi formé contre l’arrêt de la cour d’appel de Paris, qui, statuant sur renvoi, a, de nouveau, annulé l’assignation en son entier.

En affirmant que l’article 53 de la loi du 29  juillet 1881 devait recevoir application devant la juridiction civile et que des propos identiques ou quasiment identiques, même figurant dans des commentaires publiés à des dates différentes, ne pouvaient être poursuivis sous deux qualifications différentes, ce cumul de qualifications étant de nature à créer, pour les défenderesses, une incertitude préjudiciable à leur défense, et en approuvant la cour d’appel d’avoir annulé, en son entier, l’assignation comportant une telle irrégularité, la formation la plus solennelle de la Cour de cassation a ainsi entendu poursuivre dans la voie de l’uniformisation du régime du procès de presse.

Cet arrêt a été rendu sur avis conforme du procureur général.

PresseProcédure. ‑ Action en justice. ‑ Assignation. ‑ Validité. ‑ Conditions. ‑ Précision et qualification du

fait incriminé. ‑ Défaut. ‑ Cas. ‑ Fait doublement qualifié d’injure et de diffamation.

Selon l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881, qui doit recevoir application devant la juridiction civile, l’assignation doit, à peine de nullité, préciser et qualifier le fait incriminé et énoncer le texte de loi applicable.

Titres et sommaire Page 15

Communiqué Page 15

Arrêt Page 16

Rapport Page 18

Avis Page 28

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Bulletin d’informationArrêt publié intégralement

•15 avril 2013

Est nulle une assignation retenant pour le même fait la double qualification d’injure et de diffamation.

Par suite, une cour d’appel, ayant constaté que des propos identiques ou quasiment identiques, même figurant pour certains dans des commentaires publiés à des dates distinctes, se trouvaient poursuivis sous deux qualifications différentes, en a déduit à bon droit que ce cumul de qualifications étant de nature à créer pour les défenderesses une incertitude préjudiciable à leur défense, l’assignation était nulle en son entier.

ARRÊTLa cour de cassation, siégeant en assemblée plénière, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1o M. Dominique Y…, domicilié […], 75016 Paris,

2o la société Docteur Dominique Y…, société d’exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est […], 75016 Paris,

contre l’arrêt rendu le 15 février 2011 par la cour d’appel de Paris (pôle 1, chambre 3), dans le litige l’opposant :

1o à la société Auféminin.com, société anonyme, dont le siège est 78, avenue des Champs-Élysées, 75008 Paris,

2o à Mme  Sylvie X…, domiciliée […], 75019 Paris (aide juridictionnelle totale, décision du bureau d’aide juridictionnelle du 27 juin 2011),

défenderesses à la cassation ;

M. Y… et la société Dominique Y… se sont pourvus en cassation contre l’arrêt de la cour d’appel de Paris en date du 19 mars 2009 (onzième chambre civile, section B) ;

Cet arrêt a été cassé le 8 avril 2010 par la première chambre civile de la Cour de cassation ;

La cause et les parties ont été renvoyées devant la cour d’appel de Paris, autrement composée, qui, saisie de la même affaire, a statué par arrêt du 15 février 2011 ;

Un pourvoi ayant été formé contre l’arrêt du 15 février 2011, la première chambre civile de la Cour de cassation a, par arrêt du 29 mars 2012, décidé le renvoi de l’affaire devant l’assemblée plénière ;

Les demandeurs invoquent, devant l’assemblée plénière, le moyen de cassation annexé au présent arrêt ;

Ce moyen unique a été formulé dans un mémoire déposé au greffe de la Cour de cassation par Me Bouthors, avocat de M. Y… et de la SELARL Docteur Dominique Y… ;

Deux mémoires en défense ont été déposés au greffe de la Cour de cassation par la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Auféminin.com, et par la SCP Defrenois et Levis, avocat de Mme X… ;

Des observations complémentaires ont été déposées par la SCP Piwnica et Molinié ;

Le  rapport écrit de Mme  Feydeau, conseiller, et l’avis écrit de M.  Marin, procureur général, ont été mis à la disposition des parties ;

(…)

Sur le rapport de Mme Feydeau, conseiller, assistée de Mme Dibie, auditeur au service de documentation, des études et du rapport, et de Mme Gérard, greffier en chef au service de documentation, des études et du rapport, les observations de Me Bouthors et de la SCP Piwnica et Molinié - la SCP Defrenois et Levis, présente à la barre, s’en rapportant à ses observations écrites -, l’avis de M. Marin, procureur général, auquel les parties, invitées à le faire, n’ont pas souhaité répliquer, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 15  février  2011), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 8  avril  2010, pourvoi no 09-14.399), que Mme X… a fait diffuser sur le forum du site internet « Aufeminin.com » des propos faisant état de pratiques commerciales malhonnêtes imputées à M.  Y… ; que celui-ci et la société Docteur Dominique Y… (la société) ont fait assigner Mme X… et la société « Aufeminin.com SA » du chef de diffamation et d’injures en raison de passages déterminés de ces propos ; que, par ordonnance du 19 décembre 2007, le juge de la mise en état a annulé l’assignation en son ensemble en raison de son imprécision ;

Attendu que M. Y… et la société font grief à l’arrêt de confirmer l’ordonnance, alors, selon le moyen :

« 1° que satisfait aux prescriptions de l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881 la citation introductive d’instance qui indique exactement au défendeur les faits et les infractions qui lui sont reprochés et le met ainsi en mesure de préparer utilement sa défense sans qu’il soit nécessaire que la citation précise ceux des faits qui constitueraient des injures et ceux qui constitueraient des diffamations  ; qu’en présence de propos échelonnés sur la toile et liés par un même dessein, la citation introductive qui articulait les propos poursuivis et précisait les qualifications requises ne pouvait être déclarée imprécise ; qu’en se déterminant comme elle l’a fait, la cour de renvoi a violé les dispositions de l’article 53 de la loi du 29  juillet 1881, ensemble l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

2o que la régularité de l’acte introductif d’instance en matière de presse au regard de l’article  53 de la loi du 29 juillet 1881 s’apprécie de manière distributive sous le rapport de la précision des faits et de leur qualification ; qu’il suit de là que l’assignation ne peut être déclarée nulle dans son ensemble à raison de la double qualification retenue pour certaines imputations ; qu’en annulant pour ce motif l’assignation dans son ensemble sans établir que l’imprécision prétendue de certains griefs affecterait également les nombreux autres griefs articulés par les requérants, qu’elle n’a en conséquence pas examinés, la cour a violé le texte susvisé, ensemble les articles 6, 10 et 13 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

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15 avril 2013Arrêt publié intégralement

•Bulletin d’information

3o que le grief d’imprécision prétendu est lui-même déduit de motifs inopérants puisque les énonciations retenues comme identiques par la cour sous des qualifications différentes procédaient elles-mêmes d’itérations distinctes par leur date et leur contexte  ; qu’en identifiant à tort ces énonciations cependant distinctes, notamment par leur date d’apparition sur le forum, la cour s’est déterminée par des motifs inopérants, violant ainsi l’article 53 de la loi de 1881, ensemble les articles 6, 10 et 13 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales » ;

Mais attendu que selon l’article 53 de la loi du 29  juillet 1881, qui doit recevoir application devant la juridiction civile, l’assignation doit, à peine de nullité, préciser et qualifier le fait incriminé et énoncer le texte de loi applicable ; qu’est nulle une assignation retenant pour le même fait la double qualification d’injure et de diffamation ;

Et attendu qu’ayant constaté que des propos identiques ou quasiment identiques, même figurant pour certains dans des commentaires publiés à des dates distinctes, se trouvaient poursuivis sous deux qualifications différentes, la cour d’appel en a déduit à bon droit, sans encourir les griefs du moyen, que, ce cumul de qualifications étant de nature à créer pour les défenderesses une incertitude préjudiciable à leur défense, l’assignation était nulle en son entier ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES moTiFS :

REJETTE le pourvoi ;

Ass. plén. ‑ 15 février 2013. REJET

No 11-14.637. - CA Paris,15 février 2011.

M. Lamanda, P. Pt. - Mme Feydeau, Rap., assistée de Mme Dibie, auditeur, et de Mme Gérard, greffier en chef. - M. Marin, procureur général. - Me Bouthors, SCP Piwnica et Molinié, SCP Defrenois et Levis, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans La Semaine juridique, édition générale, no 9, 25 février 2013, Actualités, no 226, p. 408-409, note Emmanuel Derieux (« Particularités de procédure de la loi du 29 juillet 1881 »). Voir également le Recueil Dalloz, no 8, 28  février 2013, Actualité/droit pénal et procédure pénale, p. 507, note S. Lavric (« Injure et diffamation : formalisme de l’assignation devant le juge civil »).

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Bulletin d’informationArrêt publié intégralement

•15 avril 2013

1. ‑ Rappel des faits et de la procédure

Se plaignant, au visa des articles 23, 29 et 33 de la loi du 29 juillet 1881, de propos diffamatoires et injurieux à leur égard diffusés sur le forum de discussion internet « aufeminin.com », M. Y… et la société Docteur Y…, exploitant un centre spécialisé dans l’épilation au laser, ont assigné devant le tribunal de grande instance de Paris, le 14 juin 2007, Mme X…, auteur de messages dénonçant des pratiques commerciales malhonnêtes de ce médecin et de sa clinique, et la société « aufeminin.com », exploitant le site internet.

Par ordonnance du 19 décembre 2007 du juge de la mise en état, cette assignation a été annulée dans son ensemble comme ne répondant pas aux exigences de précision de l’article 53 de la loi du 29  juillet 1881, certains propos étant poursuivis sous la double qualification de diffamation et d’injure.

Cette ordonnance a été confirmée, le 19 mars 2009, par la cour d’appel de Paris, dont l’arrêt a été cassé, le 8 avril 2010 (pourvoi no 09-14.399, Bull. 2010, I, no 87), par la première chambre civile de la Cour de cassation, qui a jugé que :

« satisfait aux prescriptions de l’article 53 de la loi du 29  juillet 1881 la citation qui indique exactement au prévenu les faits et les infractions qui lui sont reprochés et le met en mesure de préparer utilement sa défense, sans qu’il soit nécessaire que la citation précise ceux des faits qui constitueraient des injures et ceux qui constitueraient des diffamations ».

Statuant sur renvoi, la cour d’appel de Paris a  maintenu la jurisprudence de l’arrêt cassé en confirmant, par décision du 15 février 2011, l’ordonnance du juge de la mise en état ayant annulé l’assignation en son ensemble.

La décision a été signifiée le 17 mars 2011, le pourvoi formalisé le 25 mars 2011. Le mémoire ampliatif a été déposé le 25 juillet 2011 (demande 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile).

Mme X…, admise au bénéfice de l’aide juridictionnelle par décision du 27 juin 2011, a déposé un mémoire en défense (demande 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en contrepartie de la renonciation par l’avocat aux Conseils à la perception de la somme correspondant à la part contributive de l’État, conformément à l’article 37 de la loi no 91-647 du 10 juillet 1991).

La société « aufeminin.com » a déposé un mémoire en défense le 26 septembre 2011 (demande 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile) et un mémoire complémentaire le 10 octobre 2011.

Le 29 mars 2012, la première chambre civile a décidé le renvoi devant l’assemblée plénière.

La procédure apparaît régulière et en état.

2. ‑ Analyse succincte des moyens

Le moyen unique en trois branches fait grief à l’arrêt d’annuler l’assignation du 14 juin 2007 à raison de son imprécision sur les faits qualifiés de diffamation et d’injures.

Selon la première branche, satisfait aux prescriptions de l’article  53 de la loi du 29  juillet  1881 la citation introductive d’instance qui indique exactement au défendeur les faits et les infractions qui lui sont reprochés et le met ainsi en mesure de préparer utilement sa défense, sans qu’il soit nécessaire que la citation précise ceux des faits qui constitueraient des injures et ceux qui constitueraient des diffamations.

Le moyen soutient qu’en présence de propos échelonnés sur la toile et liés par un même dessein, la citation, qui articulait les propos poursuivis et précisait les qualifications requises, ne pouvait être déclarée imprécise.

Il en déduit qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour de renvoi a violé l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881, ensemble l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

La deuxième branche soutient que la régularité de l’acte introductif d’instance en matière de presse au regard de l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881 s’apprécie de manière distributive sous le rapport de la précision des faits et de leur qualification.

Elle en déduit que l’assignation ne peut être déclarée nulle dans son ensemble à raison de la double qualification retenue pour certaines imputations et que, en annulant pour ce motif l’assignation dans son ensemble, sans établir que l’imprécision prétendue de certains griefs affecterait également les nombreux autres griefs articulés, qu’elle n’a en conséquence pas examinés, la cour d’appel a violé le texte susvisé, ensemble les articles  6, 10 et 13 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

La troisième branche fait valoir qu’en identifiant à tort des énonciations cependant distinctes par leur date d’apparition sur le forum, la cour d’appel a violé l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881, ensemble les articles 6, 10 et 13 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Rapport de Mme FeydeauConseiller rapporteur

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15 avril 2013Arrêt publié intégralement

•Bulletin d’information

3. ‑ identification du ou des points de droit faisant difficulté à juger

Selon la première branche du moyen, qui reprend les termes de l’arrêt de cassation du 8 avril 2010, il suffit, pour que la citation devant la juridiction civile soit conforme aux prescriptions de l’article  53 de la loi du 29  juillet 1881, qu’elle indique exactement au défendeur les faits et infractions qui lui sont reprochés, sans qu’il soit nécessaire qu’elle précise ceux des faits qui constitueraient des injures et ceux qui constitueraient des diffamations.

L’arrêt attaqué énonce que le formalisme de l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881, applicable aux instances civiles, a pour finalité de permettre au défendeur de savoir quels faits lui étaient reprochés et leur qualification et de choisir les moyens de défense qui ne sont pas identiques suivant la qualification, l’article 55 l’autorisant à prouver la vérité des faits diffamatoires dans le délai de dix jours.

Selon les juges du fond, un même fait ne peut donc être poursuivi cumulativement sous une double qualification et, par conséquent, la citation doit préciser ceux des faits qui constitueraient des injures et ceux qui constitueraient une diffamation.

L’assemblée plénière devra dire comment doit être interprété l’article  53 lorsqu’il est appliqué dans les instances civiles.

La deuxième branche pose la question de savoir si la nullité encourue affecte l’assignation dans son ensemble ou si la régularité de l’acte s’apprécie de manière distributive, auquel cas le constat d’une éventuelle imprécision affectant tel chef de poursuite n’aurait pas pour conséquence d’invalider l’acte dans son ensemble.

La troisième branche nous invite à dire s’il était en réalité possible de distinguer les énonciations diffamatoires des injures en fonction de leur date d’apparition sur le forum.

4. ‑ Discussion citant les références de jurisprudence et de doctrine

L’examen du pourvoi nécessite de retracer préalablement l’évolution jurisprudentielle relative à l’application de la loi du 29 juillet 1881 à l’action portée devant la juridiction civile (4.1), avant de s’attacher à l’examen de chacune des branches du moyen (4.2).

4.1. L’application de la loi du 29 juillet 1881 devant le juge civil

Cette loi est marquée par un formalisme rigoureux.

Au nombre des règles de procédure qu’elle contient figurent les prescriptions de l’article 53 et celles relatives à l’offre de preuve, prévues par l’article 55.

Article 53 de la loi : « La citation précisera et qualifiera le fait incriminé, elle indiquera le texte applicable à la poursuite.Si la citation est à la requête du plaignant, elle contiendra élection de domicile dans la ville où siège la juridiction saisie et sera notifiée tant au prévenu qu’au ministère public. Toutes ces formalités seront observées à peine de nullité des poursuites ».

Article 55  : «  Si le prévenu veut être admis à prouver la vérité des faits diffamatoires conformément aux dispositions de l’article 35 de la loi, il doit, dans le délai de dix jours après la signification de la citation, faire signifier au ministère public et au plaignant au domicile élu par lui :

1o les faits articulés et qualifiés dans la citation, desquels il entend prouver la vérité ;

2o la copie des pièces ;

3o les noms, professions et demeures des témoins par lesquels il entend faire la preuve.

Cette signification contiendra élection de domicile près le tribunal correctionnel, le tout à peine d’être déchu du droit de faire la preuve ».

L’article  35 énonce les cas où la preuve de la vérité peut être apportée et la preuve contraire réservée et prévoit que si la preuve du fait diffamatoire est rapportée, le prévenu sera renvoyé des fins de la poursuite.

Pendant plus d’un siècle, il a été admis que l’action civile, exercée indépendamment de l’action publique devant les juridictions civiles, était régie par les règles du code de procédure civile, sauf à respecter le délai de prescription auquel l’article 65 soumet les deux actions. Ainsi, il était permis aux victimes des délits de presse de s’affranchir des contraintes procédurales de l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881 et le régime de la preuve devant la juridiction civile n’était pas celui prescrit par l’article 55 de la loi1.

Il a été mis fin à ce privilège, au terme d’une évolution initiée en 1992 par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, évolution ayant abouti à l’unification des règles procédurales et à l’instauration d’un modèle de procès unique, quelle que soit la voie, pénale ou civile, choisie par la victime.

L’arrêt du 8 avril 2010 de la première chambre civile a été lu par la doctrine comme marquant la volonté de restituer au procès civil sa spécificité et de rétablir une dualité de traitement des actions suivant la juridiction saisie.

Il sera retracé les étapes de l’évolution jurisprudentielle en la matière (4.1.1), avant d’analyser les appréciations tranchées de la doctrine (4.1.2) et examiner la question posée par le pourvoi à la lumière des décisions rendues par la Cour européenne des droits de l’homme lorsqu’est en jeu la liberté d’expression (4.1.3).

1 2e Civ., 31 mars 1978, pourvoi n° 76-14.175, Bull. 1978, II, n° 91.

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Bulletin d’informationArrêt publié intégralement

•15 avril 2013

4.1.1. L’évolution jurisprudentielle

La première étape de l’évolution de la jurisprudence vers une unification des règles du procès de presse remonte à un arrêt de la deuxième chambre civile du 5  février 1992, qui a imposé au juge des référés de respecter le délai de dix jours dont dispose la partie assignée en diffamation pour rapporter la preuve de la vérité des faits2.

Puis a été reconnue la possibilité de faire l’offre de preuve devant le juge civil par un arrêt posant le principe selon lequel « aucune disposition législative n’écarte l’application de [l’article 55 de la loi du 29  juillet 1881] dans le cas d’une action exercée séparément de l’action publique devant une juridiction civile »3.

Par la suite la Cour de cassation a :

- imposé l’obligation de préciser, dans l’assignation, le fait invoqué et la loi applicable en énonçant, au visa de l’article 53 de la loi, qu’une assignation ne respectant pas ces formalités n’avait pas interrompu le délai de prescription4 ;

- énoncé clairement l’application de l’article 55 en matière civile par un arrêt approuvant le rejet par les juges du fond d’une pièce offerte en preuve, non notifiée dans le délai de dix jours prévu à cet article5 ;

- écarté, au visa de l’article 53, la possibilité pour le juge de modifier la qualification des faits en énonçant que l’acte initial fixait définitivement la nature et l’étendue de la poursuite quant aux faits et à leur qualification ;

- imposé la mention de l’élection de domicile6 et la dénonciation de l’assignation au ministère public7 ;

- annulé un acte introductif dans lequel le demandeur, après avoir articulé les passages qu’il estimait diffamatoires au sens des articles 29 et 32 de la loi, a exclusivement visé, dans le dispositif de l’assignation, les dispositions de l’article 1382 du code civil, entretenant ainsi une équivoque sur le fondement juridique précis de ses demandes et une ambiguïté sur la qualification des faits8 ;

- étendu l’obligation de respecter l’article 53 de la loi aux assignations en référé9 ;

- fait primer, à propos de l’élection de domicile, les dispositions de l’article 53 sur celles des articles 751 et 752 du code de procédure civile10.

Suivant l’évolution ainsi tracée, le procès civil s’est progressivement calqué sur le procès pénal, au point que les juridictions du fond ont dû adapter leur pratique et concilier un texte de nature pénale avec la procédure civile11.

Ainsi, pour respecter la possibilité offerte aux parties par les articles  55 et 56 de la loi sur la liberté de la presse de faire entendre devant la juridiction de jugement les témoins de l’offre de preuve et de l’offre de preuve contraire, et se conformer au caractère oral et accusatoire de la procédure en matière de presse, qui laisse les parties totalement libres de déterminer les faits à prouver et les pièces et témoins par lesquels elles entendent apporter ou combattre cette preuve, que ce soit dans le cadre de l’exception de vérité ou au titre de la bonne foi, le juge civil a dû renoncer au caractère écrit de la procédure et aux règles de l’enquête civile, pour entendre, au cours d’une même audience, les témoins puis les plaidoiries des avocats tenant compte de ce qui venait d’être dit.

La régularité de cette pratique n’a jamais été soumise à l’appréciation de notre Cour et n’a même, semble-t-il, jamais été formellement approuvée par les juridictions d’appel, car elle a recueilli le consensus des avocats.

S’il reste des domaines où l’harmonisation n’est pas totale, on peut considérer que, sous l’impulsion de la Cour de cassation, le formalisme de l’acte introductif d’instance et les règles relatives à la preuve de la vérité ou de la bonne foi exonératoire ont été progressivement appliquées de manière uniforme par les juridictions civiles et pénales.

Parallèlement, en énonçant le principe selon lequel «  les abus de la liberté d’expression prévus et réprimés par la loi du 29  juillet  1881 ne peuvent être poursuivis sur le fondement de l’article  1382 du code civil  », l’assemblée plénière, par deux arrêts du 12  juillet  200012, a exclu, de manière radicale, que le régime de droit commun de la responsabilité civile puisse servir de fondement à la réparation d’un préjudice né d’une infraction à la loi sur la liberté de la presse.

Depuis lors, ce principe a été appliqué avec constance13.

Toutefois, sans revenir sur le principe de l’application de la loi du 29 juillet 1881, la dernière jurisprudence civile a assoupli l’application d’un certain nombre de règles.

2 2e Civ., 5 février 1992, pourvoi n° 90-16.022, Bull. 1992, II, n° 44.3 2e civ., 22 juin 1994, pourvoi no 92-19.460, Bull. 1994, II, no 1644 2e Civ., 19 février 1997, pourvoi n° 94-13.877, Bull. 1997, II, n° 44 ; 18 mars 1999, pourvoi n° 97-14.328, Bull. 1999, II, n° 52 ;

12 décembre 2002, pourvoi n° 00-20.770, Bull. 2002, II, n° 286.5 2e Civ., 14 janvier 1999, pourvoi n° 97-12.157, Bull. 1999, II, n° 9.6 2e Civ., 12 mai 1999, pourvoi n° 97-12.956, Bull. 1999, II, n° 90.7 2e Civ., 26 octobre 2000, pourvoi n° 98-19.291, Bull. 2000, II, n° 147 ; 22 janvier 2004, pourvoi n° 02-12.046, Bull. 2004, II, n° 22.8 2e Civ., 14 mars 2002, pourvoi n° 00-13.917, Bull. 2002, II, n° 45.9 2e Civ., 7 mai 2002, pourvoi n° 00-12.510, Bull. 2002, II, n° 91 ; 6 février 2003, pourvoi n° 00-22.697, Bull. 2003, II, no 30 ;

22 janvier 2004, pourvoi n° 01-11.887, Bull. 2004, II, n° 21.10 2e Civ., 10 juin 2004, pourvoi n° 02-21.515, Bull. 2004, II, n° 288.11 N. Bonnal, « Les règles processuelles de la loi de 1881 sont-elles toujours applicables devant le juge civil ? », Légipresse, n° 272,

mai 2010, p. 19.12 Assemblée plénière, 12 juin 2000, pourvois n° 98-11.155 et 98-10.160, Bull. 2000, Ass. plén., n° 8.13 1re Civ., 6 mai 2010, pourvoi n° 09-67.624, Bull. 2010, I, n° 103 ; 6 octobre 2011, pourvoi n° 10-18.142, Bull. 2011, I, n° 159 ;

3e  Civ., 1er octobre 2008, pourvoi n° 07-15.338, Bull.  2008, III, n°  144 ; 2e Civ., 25 janvier 2007, pourvoi n° 03-20.506, Bull. 2007, II, n° 19.

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15 avril 2013Arrêt publié intégralement

•Bulletin d’information

Ainsi, il a été jugé que :

- l’absence de mention du texte réprimant le délit (article 32) n’affecte pas la validité de l’assignation14 : « la seule omission dans l’assignation de la mention de la sanction pénale que la juridiction civile ne peut jamais prononcer n’est pas de nature à en affecter la validité » ;

- satisfait à l’obligation d’élection de domicile - « dans la ville où siège la juridiction saisie  » dit l’article 53 - l’assignation devant le tribunal de grande instance de Paris comportant constitution d’un avocat dont le domicile professionnel se trouve à Paris (en application de l’article premier de la loi du 31 décembre 1971, autorisant les avocats des barreaux des tribunaux de Paris et de sa périphérie à postuler auprès de chacune de ces juridictions)15 ;

- la constitution d’un avocat postulant devant le tribunal de grande instance saisi de l’action en diffamation vaut élection de domicile au sens de l’article 43 (peu important que le domicile professionnel de cet avocat ne soit pas situé dans cette ville)16 ;

- pour satisfaire aux prescriptions de l’article  53, il suffit que la citation indique exactement au défendeur les faits et infractions qui lui sont reprochés, sans qu’il soit nécessaire qu’elle précise ceux des faits qui constitueraient des injures et ceux qui constitueraient des diffamations17 ;

- contrairement à une jurisprudence antérieure18, la référence à l’article 1382 du code civil, à titre subsidiaire, n’affecte pas la validité de l’assignation si celle-ci comporte le visa de l’article 5319.

La doctrine a vu dans ces décisions une évolution marquante de la jurisprudence vers un assouplissement des règles appliquées au procès civil et le signe du retour à une conception dualiste du procès de presse. Reçue avec satisfaction par les auteurs qui dénonçaient comme hérétique l’application de règles de procédure pénale au procès civil et appelaient de leurs vœux la suppression des obstacles auxquels se heurte la victime d’un délit de presse, cette évolution a été sévèrement critiquée par les défenseurs de la liberté d’expression.

L’exposé des positions doctrinales éclairera l’assemblée plénière sur l’enjeu du pourvoi et permettra d’orienter sa réflexion sur l’objectif poursuivi par le législateur en posant ces exigences procédurales et sur l’opportunité de les exclure ou non en matière civile.

4.1.2. Les critiques doctrinales

Un auteur relève avec satisfaction20 « le mouvement de reflux » opéré par la première chambre civile. Tenant le formalisme de l’article 53 comme la contrepartie des sanctions pénales encourues mais totalement injustifié s’agissant de l’action en réparation engagée distinctement devant le juge civil, il dénonce l’uniformisation des règles aboutissant selon lui à une restriction du droit d’accès de la victime au juge civil, en violation de l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

À ses yeux, les décisions de la première chambre marquent une évolution salutaire dans le sens d’une application atténuée de la loi, mais il note néanmoins que, tout en admettant l’application de l’article 53 en matière civile, la Cour suprême, par l’interprétation qu’elle fait de ce texte, remet en cause l’unité des procès de presse. Selon lui, il faut aller plus loin et rétablir le droit civil dans son intégrité en renonçant à lui appliquer des règles qui ne le concernent pas.

Pour un autre21, les particularités de la loi de 1881 requièrent une grande expertise dans son maniement. Connues le plus souvent par les seuls spécialistes de ce droit, elles ne garantissent pas l’égalité des armes et favorisent l’impunité des médias poursuivis, les procès en la matière se gagnant ou se perdant sur le terrain de la procédure et la victime étant privée d’un débat de fond. Selon lui, répression pénale et mise en jeu de la responsabilité civile, répondant à des objectifs distincts, ne devraient pas être confondues, et se pose la question de savoir si l’unification des règles n’aboutirait pas à faire prévaloir la liberté d’expression, et même ses abus, sur le respect des personnes mises en cause22.

C’est donc «  l’hérésie » qui serait commise par l’application des règles pénales au procès civil et l’atteinte portée au droit d’accès au juge en raison des « pièges procéduraux  » qui s’imposent aux victimes et que dénoncent ces auteurs.

À l’opposé, l’unification des règles du procès de presse est ardemment défendue par un courant doctrinal contraire, au nom de la protection de la liberté de la presse et des garanties des moyens de défense des organes de presse. L’arrêt du 8  avril  2010 est considéré comme «  la remise en cause frontale des piliers indispensables à l’équilibre du procès et signe l’engagement de la Cour de cassation dans la voie d’une conception dualiste de la loi sur la presse »23.

Parmi les principaux arguments avancés on retient que :

- les règles de procédure prévues par cette loi constituent comme un « bloc de procédure » dont la spécificité ne tient pas au nombre d’exigences posées, mais à leur combinaison avec la prescription trimestrielle, qui donne à la nullité un effet de couperet. Il faut avoir une vision globale du procès et se garder de remettre en

14 1re Civ., 24 septembre 2009, pourvoi n° 08-17.315, Bull. 2009, I, n° 180.15 1re Civ., 24 septembre 2009, pourvoi n° 08-12.381, Bull. 2009, I, n° 179.16 1re Civ., 22 septembre 2011, pourvoi n° 10-15.445, Bull. 2011, I, n° 150.17 1re Civ., 8 avril 2010, pourvoi n° 09-14.399, Bull. 2010, I, n° 87.18 2e Civ., 14 mars 2002, pourvoi n° 00-13.917, Bull. 2002, II, n° 4519 1re Civ., 3 février 2011, pourvoi n° 09-71.711, Bull. 2011, I, n° 22.20 E. Dreyer, « Où va la Cour de cassation en matière de presse ? », JCP 2010, éd. G, 833 ; « L’accès au juge en matière de presse »,

Légipresse, février 2012, p. 83.21 E. Derieux, «  Responsabilité civile des médias. Exclusion de l’application de l’article 1382 du code civil aux faits constitutifs

d’infraction à la loi du 29 juillet 1881 », Communication Commerce électronique, février 2006, p. 14.22 « L’éclairage d’Emmanuel Derieux », Légipresse, octobre 2009, p. 217.23 C. Bigot, Dalloz 2010, p. 1673.

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cause telle ou telle disposition, au risque de nuire à l’équilibre du procès. C’est parce que la défense doit mettre en œuvre l’exception de vérité dans le très court délai de dix jours prévu à l’article 55 de la loi que le prévenu (ou le défendeur) doit être en mesure d’apprécier, au moment de l’assignation, quels sont les faits et les qualifications reprochés, afin de déterminer les moyens de défense qu’il doit invoquer. L’équité du procès exige qu’il n’y ait à ce stade aucune équivoque. Cette règle serait remise en cause si l’on admet « qu’il n’est pas nécessaire que la citation précise ceux des faits qui constitueraient des injures et ceux qui constitueraient des diffamations » ;

- la liberté d’information, qui a pour corollaire la nécessité de protéger les droits de la défense du journaliste, mérite égale protection au civil comme au pénal, la liberté en cause étant une liberté fondamentale constitutionnellement protégée, et ce, d’autant plus que les sanctions les plus gravement attentatoires à cette liberté (interdiction prononcée en référé ou publication judiciaire) peuvent être ordonnées par le juge civil ;

- la thèse selon laquelle la loi de 1881 est une loi de faveur au bénéfice de la presse et en défaveur des victimes ne repose sur aucun élément objectif. La loi tend au contraire à assurer l’équilibre et la proportionnalité du procès de presse selon les impératifs posés par l’article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, par la politique législative en faveur de la protection des sources journalistiques (loi no 2010-1 du 4 janvier 2010) et par le Conseil constitutionnel, qui, à l’occasion de l’examen de la loi dite Hadopi 1, le 10 juin 2009, a dit que « la liberté d’expression et de communication est d’autant plus précieuse que son exercice est une condition de la démocratie et l’une des garanties du respect des autres droits et libertés » ;

- l’équilibre global de la loi se traduit, d’un côté, par la présomption de mauvaise foi et le renversement de la charge de la preuve et, de l’autre, par des mécanismes de protection tenant à la prescription de trois mois et aux règles de procédure visant à protéger les droits de la défense, spécialement l’article 53 de la loi. Toucher à l’un de ces piliers revient à dénaturer la loi ;

- l’unification des règles applicables au procès de presse et l’application d’un régime particulier dérogeant au droit commun, avec des règles contraignantes renforçant les droits de la défense, ont pour objectif et pour effet de protéger la liberté d’expression24. Il ne peut être fait application du droit de la responsabilité civile comme un moyen d’éluder les obligations restrictives pour la victime mais protectrices de cette liberté fondamentale25.

On ne trouve pas de doctrine défendant un assouplissement des règles processuelles de la loi de 1881 devant les juridictions civiles. Tout au plus, le professeur Viney26, voyant, dans les décisions ayant abouti à l’élimination pure et simple de l’article 1382 en cas d’abus de la liberté d’expression envers les personnes27, la marque d’un recul de la protection des droits de la personnalité devant le respect de la liberté d’expression, souhaite-t-elle une réorientation du droit positif pour concilier équitablement le respect de ces deux droits. Elle suggère notamment de revenir sur les entraves apportées ces dernières années au système général de l’option entre voie civile et voie pénale, en limitant toutefois la responsabilité civile du journaliste à la faute lourde caractéristique d’un abus de la liberté d’expression. Les critères que propose l’auteur ne sont autres que ceux dégagés par la jurisprudence pour écarter le fait justificatif de la bonne foi28.

4.1.3. La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme

La liberté de la presse, corollaire de la liberté d’expression, constitue une liberté fondamentale, proclamée par l’article  11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26  août  1989. Protégée par l’article 10, § 1, de la Convention européenne, cette liberté n’est pas absolue et doit être conciliée avec des droits et libertés d’égale valeur. Aussi son exercice peut-il être soumis, selon l’article  10,  §  2, à certaines formalités, conditions, restrictions et sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la réalisation de certains buts légitimes, tels que la protection de la réputation ou des droits d’autrui.

Affirmant que la liberté d’expression constitue « la pierre angulaire de la démocratie et des droits de l’homme protégés par la Convention », la Cour européenne a, pendant un temps, privilégié la protection de la liberté de la presse29 dans le conflit l’opposant aux autres droits. Une nouvelle orientation, dans le sens de la responsabilité des journalistes, apparaît dans la jurisprudence la plus récente, qui va dans le sens d’un renforcement de la protection des droits et libertés individuels face à l’exercice de la liberté d’expression, soulignant l’obligation de déontologie du journaliste30 et l’obligation de respecter les droits de la personnalité31. Ainsi, dans plusieurs cas, la juridiction européenne a donné priorité à la protection du droit à la réputation face au droit de la presse en atténuant la notion d’intérêt général, s’agissant notamment d’accusations attentatoires à la présomption d’innocence32.

24 P. Guerder, Légipresse, n° 283, mai 2011, p. 296.25 Y. Mayaud, « Les abus de la presse ou la part restrictive des responsabilités pénale et civile », Rev. sc. crim. 1996, p. 120.26 G. Viney, « Le particularisme des relations entre le civil et le pénal en cas d’abus de la liberté d’expression », in Mélanges Bouloc,

Dalloz 2006, p. 1170.27 Assemblée plénière, 12 juin 2000, pourvois n° 98-11.155 et 98-10.160, Bull. 2000, Ass. plén., n° 8 ; 1re Civ., 27 septembre 2005,

pourvoi n° 03-13.622, Bull. 2005, I, n° 348.28 2e Civ., 14 mars 2002, pourvoi n° 99-19.239, Bull. 2002, II, n° 41.29 CEDH, 7 décembre 1976, Handyside c/ Royaume-Uni, série A, n° 24, § 49 ; CEDH, 23 septembre 1994, Jersild c/ Danemark,

série A, n° 298 ; CEDH, 23 septembre 1998, Lehideux et Isorni c/ France ; CEDH, 3 octobre 2000, n° 34000/96, Du Roy et Malaurie c/ France.

30 CEDH, 10 décembre 2007, n° 69698/01, Stoll c/ Suisse ; CEDH, 29 juillet 2008, n° 22824/04, Flux c/ Moldavie. 31 CEDH, 18 mai 2004, Sté Plon c/ France ; CEDH, 24 juin 2004, Von Hannover c/ Allemagne ; CEDH, 17 décembre 2004, Cumpana

Mazare c/ Roumanie ; CEDH, 17 décembre 2004, Pedersen Baadsgaard c/ Danemark ; CEDH, 30 mars 2004, Radio France c/ France.

32 CEDH, 29 juillet 2008, n° 22824/04, Flux c/ Moldavie ; CEDH, 14 octobre 2008, n° 78060/01, Petrina c/ Roumanie ; CEDH, 6 avril 2010, n° 45130/06, Ruokanen c/ Finlande.

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15 avril 2013Arrêt publié intégralement

•Bulletin d’information

Elle a en outre précisé les critères qui doivent guider les juridictions nationales dans l’appréciation du juste équilibre à assurer entre la liberté d’expression et les droits de la personne en insistant, dans ses dernières décisions, sur les devoirs et responsabilités du journaliste.

S’agissant du droit d’accès à un tribunal, garanti par l’article 6, § 1, de la Convention, il est de jurisprudence constante que « la réglementation relative à la procédure, et plus particulièrement aux formalités et aux délais à respecter pour former un recours, vise à assurer la bonne administration de la justice et le respect, en particulier, du principe de la sécurité juridique ». La Cour européenne admet que des limitations puissent être prévues au droit d’accès à un tribunal et laisse aux États membres une large marge d’appréciation, dans la limite cependant que celles-ci ne soient «  pas de nature à restreindre l’accès ouvert à l’individu d’une manière ou à un point tel que le droit s’en trouve atteint dans la substance  »33. Elle a été amenée, dans plusieurs décisions, à se prononcer sur la compatibilité des articles 65 et 53 de la loi du 29 juillet 1881 avec l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

S’agissant de la courte prescription de l’article 65 de la loi, après avoir constaté qu’il appartient, en vertu de la loi de 1881, « à la partie civile de se renseigner et de faire preuve de diligence pour s’assurer que la prescription ne viendra pas éteindre son action  », la Cour a considéré que «  la règle applicable ne présentait pas de complexité particulière, que la requérante, assistée d’un avocat, pouvait facilement avoir connaissance des appels interjetés par le ministère public et les prévenus, que les dispositions relatives à la procédure d’appel en matière d’infractions de presse étaient suffisamment claires et accessibles » et que «  les conséquences subies par la requérante du fait de l’application de ces règles étaient le résultat de sa propre négligence »34.

Plus particulièrement interrogés sur la clarté et la cohérence de l’interprétation que la Cour de cassation avait faite de l’article  65 de la loi de 1881 au sujet de la notion d’«  acte interruptif de prescription  », les juges européens ont estimé que « le délai de prescription particulièrement bref en matière de réparation des infractions à la presse vise à garantir la liberté d’expression de la presse » et considéré que, « contrairement à ce que soutiennent les requérants, l’interprétation que la Cour suprême française a fait de l’article 65 de la loi de 1881, dans son arrêt du 29 avril 2004, découle de l’application de règles procédurales et jurisprudentielles accessibles, que les requérants, assistés par un avocat tout au long des différents étapes de la procédure, se devaient de connaître et de respecter ». Ils ont relevé, là encore, que l’acquisition de la prescription était le résultat « de la propre négligence des requérants » pour en déduire que « les limitations appliquées n’avaient pas porté atteinte à la substance de leur droit d’accès à un tribunal et qu’elles se conciliaient avec les exigences de l’article 6, § 1, de la Convention »35.

S’agissant de l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881, la Cour européenne a rappelé que l’interprétation du droit interne, et en particulier des règles procédurales telles que les formes et délais d’introduction d’un recours, appartient au premier chef aux juridictions internes, auxquelles elle n’a pas pour tâche de se substituer36, et elle a rejeté le grief tiré de la méconnaissance des exigences de l’article 6, § 3, de la Convention par le non-respect des formalités de l’article 5337.

4.2. ‑ Examen du pourvoi

4.2.1. Sur la première branche du moyen

4.2.1.1. Sur l’application de l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881 par la chambre criminelle

La citation directe doit répondre aux exigences de l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881. Elle doit préciser et qualifier les faits incriminés.

Cette exigence, rappelée par la chambre criminelle à plusieurs reprises, vise à mettre le prévenu « en mesure de préparer utilement sa défense »38, dès lors que «  les points sur lesquels le prévenu aura à se défendre sont définitivement fixés par la citation et que le juge ne peut fonder une condamnation sur des faits autres que ceux qui sont ainsi précisés »39.

Dans un arrêt du 20 mai 1958, il a été ainsi rappelé que « le législateur a voulu seulement, dans l’intérêt de la défense, que l’objet de la prévention fût d’avance expressément déterminé »40.

Les qualifications cumulatives sont par principe écartées, de même qu’« une qualification alternative est jugée insuffisante »41.

On relève, dans les décisions de la chambre criminelle, qu’« un fait unique ne saurait être poursuivi, à la fois comme diffamation et comme injure »42 ou qu’« un fait unique ne saurait être poursuivi à la fois comme diffamation publique envers un particulier et diffamation publique envers un citoyen chargé d’un mandat

33 CEDH, 16 décembre 1997, Tejedor Garcia c/ Espagne ; CEDH, n° 38366/97, Miragall Escolano et autres c/ Espagne ; CEDH, 29 avril 2008, n° 24562/03, Clinique Sainte-Marie et autre c/ France ; CEDH, 6 octobre 2011, n° 52124/08, Staszkow c/ France (§§ 43 et 44).

34 CEDH, 29 avril 2008, n° 24562/03, Clinique Sainte-Marie et autre c/ France.35 CEDH,17 juin 2008, n° 39141/04, Vally et autre c/ France.36 CEDH, 6 mai 2010, n° 17265/05, Brunet-Lecomte et Lyon Mag' c/ France ; CEDH, 18 septembre 2008, n° 35916/04, Chalabi

c/ France.37 CEDH, 6 mai 2010, n° 17265/05, Brunet-Lecomte et Lyon Mag' c/ France.38 Crim., 18 juin 1985, pourvoi n° 83-91.345, Bull. crim. 1985, n° 235 ; Crim., 31 mars 2009, pourvoi n° 08-82.496, diffusé ; Crim.,

7 décembre 2010, pourvoi n° 10-81.984, Bull. crim. 2010, n° 197. 39 Crim., 8 novembre 1983, pourvoi n° 82-93.992, Bull. crim. 1983, n° 294.40 Crim., 20 mai 1958, pourvoi n° 93-97.687, Bull. crim. 1958, n° 410.41 Crim., 23 décembre 1959, pourvoi no 90-34.559, Bull. crim. 1959, no 578.42 Crim., 9 mars 1965, pourvoi no 64-92.810, Bull. crim. 1965, no 70 ; Crim., 2 mai 1972, pourvoi no 71-90.959, Bull. crim. 1972,

no 149 ; Crim., 16 janvier 1990, pourvoi no 89-81.349, Bull. crim. 1990, no 26.

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Bulletin d’informationArrêt publié intégralement

•15 avril 2013

public »43, ou encore, que « lorsqu’une allégation se réfère à un fait unique, elle ne saurait recevoir la double qualification de diffamation et d’injure sans créer une incertitude dans l’esprit du prévenu sur l’objet précis des poursuites dont il est l’objet »44.

Deux arrêts, du 30 mars 2005 et 28 novembre 2006, énoncent clairement qu’« est nulle une citation visant, pour un fait unique, les qualifications, de nature et de gravité différentes, de diffamation envers un citoyen chargé d’un mandat public, de diffamation envers un particulier et d’injure, de telles qualifications alternatives créant nécessairement dans l’esprit du prévenu une incertitude quant à l’objet de la poursuite », ou que «  les mêmes faits ne sauraient recevoir une double qualification sans créer d’incertitude dans l’esprit du prévenu »45.

Deux arrêts46 méritent d’être analysés pour en appréhender la portée au regard de la jurisprudence de la chambre criminelle, car l’arrêt du 8 avril 2010 de la chambre civile en reproduit textuellement le conclusif.

Dans l’affaire ayant donné lieu à la première décision, M. Philippe X… poursuivait le directeur de la publication d’un journal, pour injures publiques dirigées contre la mémoire d’un mort et pour injures publiques envers un particulier, à raison de propos figurant dans deux articles  distincts, publiés respectivement le 23 et le 29 mai 1973.

La cour d’appel avait annulé la citation aux motifs que « les textes incriminés s’analysent en des faits uniques et que, pour satisfaire aux prescriptions de l’article 53 de la loi du 29  juillet 1881, la partie civile aurait dû préciser, dans la citation, qu’elle entendait donner à des faits uniques la double qualification susvisée ; qu’en outre, la qualification d’injures envers un particulier, donnée à titre subsidiaire à des faits que la citation qualifie par ailleurs tout à la fois d’injures envers des personnes qualifiées et d’outrage à la mémoire d’un mort, impliquait une alternative qui ne pouvait qu’aggraver l’incertitude, déjà créée dans l’esprit du prévenu par cette qualification cumulative, sur l’objet précis des poursuites dirigées contre lui ».

La chambre criminelle a cassé l’arrêt, estimant que  : «  contrairement à l’appréciation de la cour d’appel, toutes les expressions outrageantes et les termes de mépris figurant dans les deux articles incriminés ne sauraient être confondus en une injure unique dirigée à la fois contre la mémoire du général… et contre son fils » ; que le premier article « ne met nullement en cause Philippe X… et le second contient une pluralité d’attaques distinctes, qui, alors même qu’elles sont mélangées, visent séparément, les unes, la mémoire du général X…, les autres, l’homme privé, en la personne de Philippe X… […] ».

Elle a énoncé en conséquence «  que la citation répondait aux exigences de l’article  53 de la loi du 29 juillet 1881, sans qu’il fût nécessaire qu’elle précisât ceux des passages des articles incriminés qui étaient relevés comme injurieux envers la mémoire du général X… et ceux qui étaient tenus comme injurieux envers un particulier ».

Dans la seconde affaire, des poursuites étaient exercées des chefs de diffamations et injures publiques envers un particulier à raison de propos tenus dans une lettre. La cour d’appel, au visa de l’article 53, avait annulé les citations aux motifs que le plaignant y indiquait les passages qu’il jugeait diffamatoires mais ne précisait pas ceux qu’il considérait comme injurieux.

La chambre criminelle a jugé que «  les citations relèvent et reproduisent plusieurs passages de la lettre incriminée, en déclarant qu’ils constituent des diffamations et des injures envers un particulier et en visant les articles 32 et 33 de la loi du 29 juillet 1881 ; ces énonciations précisent sans équivoque l’objet du débat et permettent aux prévenus de discuter la qualification attribuée par la poursuite aux faits incriminés ; dès lors, elles répondent aux prescriptions de l’article 53 sans qu’il soit nécessaire qu’elles précisent ceux des faits qui constitueraient des injures et ceux qui constitueraient des diffamations ».

On retiendra de ces deux décisions, dont on ne retrouve cependant pas l’énoncé dans des décisions postérieures, qu’elles concernent des citations relevant une pluralité de faits, susceptibles d’être aisément distingués, et n’emportant aucune équivoque sur l’objet du débat.

Elles ne sont en rien contraires à la prohibition de la double qualification d’un fait unique.

Il convient ici de préciser qu’il est jugé que, «  nonobstant les dispositions de l’article  53 de la loi du 29 juillet 1881, un fait unique constituant un cumul idéal d’infractions47 peut recevoir plusieurs qualifications pénales différentes dès lors que ces qualifications ne sont pas inconciliables entre elles »48.

Il est en outre jugé de façon constante que lorsque des propos injurieux sont indivisibles d’une imputation diffamatoire, le délit d’injure est absorbé par celui de diffamation, de sorte que l’ensemble des propos doit être incriminé au titre du délit de diffamation et que le délit d’injure ne peut être relevé seul49, étant précisé

43 Crim., 19 mai 1987, pourvoi no 86-90.762, Bull. crim. 1987, no 205.44 Crim., 3 juin 1993, pourvoi n° 91-82.584, diffusé ; Crim., 31 janvier 1995, pourvoi n° 92-86.559, Bull. crim. 1995, n° 39.45 Crim., 30 mars 2005, pourvoi no 04-84.976, Bull. crim. 2005, no 111 ; Crim., 28 novembre 2006, pourvoi no 05-83.492, Bull. crim.

2006, no 301.46 Crim., 11 mars 1976, pourvoi n° 75-91.784, Bull. crim. 1976, n° 95 ; Crim., 21 décembre 1977, pourvoi n° 77-91.419, Bull. crim.

1977, n° 406.47 Le cumul idéal d’infractions est défini par le dictionnaire de vocabulaire juridique Gérard Cornu comme une « pluralité d’infractions

réalisées simultanément par un seul fait ». La doctrine l’assimile parfois au « concours idéal de qualifications », défini comme une « pluralité de textes d’incrimination semblant applicables à un fait unique ».

48 Crim., 11 mars 1976, pourvoi n°  75-81.785, Bull.  crim. 1976, n°  94, et Crim., 24 novembre 1987, pourvoi n°  87-81.379, Bull. crim. 1987, n° 428 ; voir aussi : Crim., 5 mai 1966, pourvoi n° 92-79.665, Bull. crim. 1966, n° 139 (diffamation et délit de fausse nouvelle), et Crim., 19 mars 1996, pourvoi n° 94-81.420, Bull.  crim. 1996, n° 117 (diffamation et infraction à la loi du 2 juillet 1931).

49 Crim., 15 mars 1994, pourvoi n° 93-81.060, Bull. crim. 1994, n° 99 ; Crim., 24 janvier 1995, pourvoi n° 93-84.701, Bull. crim. 1995, n° 33 ; Crim., 24 septembre 1996, pourvoi n° 94-84.909, diffusé ; Crim., 24 février 1998, pourvoi n°  97-81.283, diffusé ; Crim., 9 mai 2001, pourvoi n° 00-85.662, diffusé ; Crim., 13 septembre 2005, pourvoi n° 04-86.560, diffusé.

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qu’un texte peut contenir, à la fois, des termes diffamatoires et des termes injurieux, justifiant une double déclaration de culpabilité du chef de diffamation et du chef d’injure lorsqu’il résulte du contexte que les termes injurieux ne se réfèrent nullement aux faits visés par les imputations diffamatoires50.

4.2.1.2. Les propos poursuivis

Selon l’arrêt attaqué, les propos : « je dénonce les pratiques commerciales malhonnêtes » et « il faut mettre fin à ces abus commerciaux qui ne sont pas dignes d’un médecin qui n’est autre qu’un BUSINESS MAN » sont poursuivis comme diffamation pages 7 et 8 et comme injure page 9 ; que l’expression « … 55 av. […] : à fuir  !  !  !  ! » est poursuivie comme diffamation page 8, alors que celle « 55 av. […]  : des voleurs à fuir… » l’est comme injure page 9, et qu’il en est de même du propos : « rentabilisation business maximum », qualifié de diffamatoire page 8 et « USINE à FRIC et RENTABILITÉ BUSINESS MAXIMUM », qualifié d’injure dans la même page.

La cour d’appel a annulé cette assignation en retenant que des propos identiques ou quasiment identiques, même figurant dans des commentaires publiés à des dates distinctes, se trouvaient poursuivis sous deux qualifications différentes  ; que ce cumul de qualifications était de nature à créer une incertitude pour les défenderesses préjudiciable à leur défense et que ce vice affectait la validité de l’acte.

Nous devrons apprécier si elle a fait une juste application de l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881 et, selon la réponse que nous donnerons à la première branche du moyen, nous dirons si ce texte doit être appliqué dans toute sa rigueur ou s’il y a lieu d’en assouplir les règles dans le cadre du procès civil.

4.2.2. Sur la deuxième branche du moyen

L’article 53 de la loi du 29  juillet 1881 dispose, dans son dernier alinéa, que «  toutes ces formalités seront observées à peine de nullité de la procédure ».

La question qui nous est posée par cette branche porte sur l’étendue de la nullité. Le vice atteint-il l’assignation en son entier ou seulement certains passages ?

Le régime des nullités n’est pas identique au pénal et au civil.

4.2.2.1. En matière pénale

La chambre criminelle s’est prononcée sur l’articulation entre certaines règles de droit commun du code de procédure pénale et les règles spéciales édictées par la loi sur la presse.

Elle a jugé applicable à la poursuite des infractions à la loi sur la liberté de la presse l’article 385 du code de procédure pénale, qui dispose, dans son dernier alinéa, que « les exceptions de nullité doivent être présentées avant toute défense au fond »51, mais a écarté l’application de l’article 802 du code de procédure pénale52 en jugeant que « les dispositions exceptionnelles et impératives de l’article 53 de la loi précitée, qui tendent à garantir les droits de la défense et touchent à la protection de la liberté d’expression telle que la réglemente cette loi, n’ont été ni abrogées ni modifiées par l’article 802 du code de procédure pénale, dont l’application se trouve exclue en la matière »53.

A. - Sur le régime de la nullité

Selon la jurisprudence criminelle :

- «  les formalités prescrites par l’article  53 de la loi du 29  juillet  1881 sont substantielles aux droits de la défense - leur inobservation entraîne la nullité de la citation et de la poursuite »54 ;

- la nullité ne peut pas être relevée d’office par les juges du fond, cependant que la Cour de cassation, exerçant son contrôle sur les pièces de procédure, prononce la nullité de la citation qui a méconnu les dispositions de l’article 53, ayant omis de préciser et de qualifier le fait incriminé55 ;

- sans subordonner expressément le prononcé de la nullité de la citation à la preuve d’un grief, la chambre criminelle a, à plusieurs reprises, apprécié la validité de la citation au regard de l’éventuelle incertitude créée dans l’esprit du prévenu quant à l’objet de la poursuite, au préjudice des droits de la défense56  : «  la seule allégation contenue dans l’article et qui serait susceptible d’être incriminée au regard de la loi sur la presse se réfère [...] à un fait unique qui ne saurait recevoir la double qualification de diffamation et d’injures, sans créer une incertitude dans l’esprit des prévenus sur l’objet précis des poursuites dont ils sont l’objet et préjudicier ainsi aux droits de la défense ».

B. - Sur l’étendue de la nullité

- «  lorsque la poursuite embrasse une pluralité de faits susceptibles de qualifications différentes et que la citation précise ces faits en les qualifiant séparément et en indiquant pour chacun d’eux le texte de loi

50 Crim., 22 février 1966, pourvoi n° 65-90.518, Bull crim. 1966, n° 62.51 Crim., 21 mai 1985, pourvoi n° 84-92.240, Bull. crim. 1985, n° 196 ; Crim., 6 janvier 2009, pourvoi n° 08-80.826, Bull. crim. 2009,

n° 5.52 Article 802 du code de procédure pénale : « En cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d’inobservation

des formalités substantielles, toute juridiction, y compris la Cour de cassation, qui est saisie d’une demande d’annulation ou qui relève d’office une telle irrégularité ne peut prononcer la nullité que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de la partie qu’elle concerne. »

53 Crim., 17 mars 1981, pourvoi n° 79-94.121, Bull. crim. 1981, n° 96 (2).54 Crim., 26 juin 1984, pourvoi n° 83-91.283, Bull. crim. 1984, n° 244 (2).55 Crim., 6 janvier 2009, pourvoi n° 08-80.826, Bull. crim. 2009, n° 5.56 Crim., 9 mars 1965, pourvoi n° 64-92.810, Bull. crim. 1965, n° 70 ; Crim., 24 janvier 1995, pourvoi n° 93-84.701, Bull. crim. 1995,

n° 33 ; Crim., 30 mars 2005, pourvoi n° 04-84.976, Bull. crim. 2005, n° 111.

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applicable, la juridiction de jugement devant laquelle la citation est arguée de nullité sur la base de l’article 53, alinéa premier, est tenue d’examiner si, pour chacun des faits incriminés, les prescriptions de ce texte ont été respectées ; rien ne s’oppose alors, s’il y a lieu, à une annulation partielle de la citation »57 ;

- «  lorsqu’une citation introductive d’instance apparaît valable pour certains faits,  mais insuffisante pour d’autres, dans certaines hypothèses, la citation n’est pas globalement nulle et il appartient au juge saisi de trancher le fond pour les faits suffisamment qualifiés »58 ;

- « les faits d’injures et de diffamation peuvent faire l’objet de poursuites séparées dès lors que les passages incriminés sont divisibles et que la plainte articule chaque fait de manière précise, qualifie l’infraction et vise le texte réprimant celle-ci, ne laissant aucune équivoque dans l’esprit du prévenu sur l’infraction dont il a à répondre ; que tel est le cas en l’espèce »59 ;

- «  lorsque la poursuite concerne une pluralité de qualifications et que la citation précise ces faits en les qualifiant séparément et en indiquant pour chacun d’eux le texte de loi applicable, la juridiction de jugement devant laquelle la citation est arguée de nullité sur la base de l’article  53, alinéa  premier, de la loi du 29 juillet 1881 est tenue d’examiner si, pour chacun des faits incriminés, les prescriptions de ce texte ont été respectées et de statuer sur les faits dont elle est valablement saisie »60.

Si l’on suit la doctrine de la chambre criminelle, le vice relevé par l’arrêt attaqué n’entraînerait pas la nullité de l’assignation en son entier si des faits distincts, précisément et correctement qualifiés, étaient incriminés.

4.2.2.2. En matière civile

A. - Sur le régime de la nullité

Dès lors qu’il était décidé que l’article 53 s’appliquait aux actions exercées devant la juridiction civile, se posait la question du régime applicable à la nullité encourue pour l’inobservation des prescriptions de ce texte.

Dans un premier temps, la deuxième chambre civile, statuant au seul visa de l’article 53, a jugé que l’exception de nullité devait être accueillie « sans que la partie demanderesse à cette exception ait à justifier d’un grief »61.

Dans un second temps, cette même chambre, statuant au visa de l’article 114 du code de procédure civile62, a sanctionné une décision des juges du fond qui avait annulé partiellement une assignation en considérant que le grief relatif à la poursuite du chef de diffamation n’avait pas d’incidence sur la poursuite des injures63.

Par cette décision, la Cour de cassation a soumis clairement la nullité encourue pour violation de l’article 53 au régime des nullités pour vice de forme et à la nécessité pour celui qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité de l’assignation.

« Vu les articles 648, 653, 654 et 659 du nouveau code de procédure civile, ensemble l’article 114 du même code ;

Attendu qu’il résulte de ces textes que la nullité d’un acte de procédure pour vice de forme ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité ; que la constatation de l’existence d’un grief emporte la nullité de l’acte en son entier ;

Attendu que la cour d’appel, après avoir annulé l’assignation en ce qu’elle poursuivait des propos diffamatoires, a considéré que le grief relatif à ce chef de la poursuite n’avait pas eu d’incidence sur la poursuite des injures ;

Qu’en statuant ainsi, alors que l’irrégularité constatée affectait l’acte en totalité, la cour d’appel a violé les textes susvisés ».

Ce même arrêt précise, sur le deuxième moyen, la nature du grief causé : « La délivrance de l’assignation, [au siège de la société éditrice et non au domicile personnel de l’éditeur] était nécessairement de nature à porter atteinte, comme pour l’auteur, aux droits de la défense, en entravant l’exercice des droits reconnus à la personne poursuivie par l’article 55 de la loi du 29 juillet 1881 ».

B. - Sur l’étendue de la nullité

Par un arrêt du 23 septembre 200464, a été censurée, au visa de l’article 16 du code de procédure civile, la décision d’une cour d’appel ayant annulé en totalité l’acte introductif en se fondant sur l’indivisibilité de l’assignation, sans inviter les parties à s’expliquer sur ce moyen, soulevé d’office.

Le doyen Guerder, commentant cet arrêt de cassation65, observait : « L’arrêt ne prend pas parti sur l’indivisibilité de l’assignation introductive d’instance. Il relève seulement que celle-ci comportait des demandes différentes présentées sur des fondements distincts par plusieurs personnes, ce qui suggère une possibilité de scission des demandes, et l’éventualité d’un cantonnement de la nullité à une seule partie. La discussion étant permise, il est clair que la cour d’appel ne pouvait affirmer d’office l’indivisibilité de l’assignation sans avoir invité les parties à en débattre. Cette cassation laisse ouverte la question de fond ».

57 Crim., 11 mars 1976, pourvoi n° 75-81.785, Bull. crim. 1976, n° 94.58 Crim., 28 mai 1979, pourvoi n° 78-90.906, Bull. crim. 1979, n° 184.59 Crim., 19 décembre 2000, pourvoi n° 00-81.853, diffusé.60 Crim., 22 mai 2001, pourvoi n° 00-86.385, diffusé.61 2e Civ., 6 février 2003, pourvoi n° 00-22.697, Bull. 2003, II, n° 30 ; 22 janvier 2004, pourvoi n° 02-12.046, Bull. 2004, II, n° 22.62 2e Civ., 25 novembre 2004, pourvoi n° 02-12.829, Bull. 2004, II, n° 505.63 L’assignation délivrée à une adresse autre que le domicile avait privé l’auteur des propos poursuivis du chef de la diffamation de la

possibilité de faire une offre de preuve de la vérité des faits diffamatoires. En revanche, la poursuite visait aussi des faits d’injures et la cour d’appel avait estimé que, de ce chef, l’auteur ne justifiait d’aucun grief.

64 2e Civ., 23 septembre 2004, pourvoi n° 01-16.832, Bull. 2004, II, n° 425.65 P. Guerder, « Divisibilité ou indivisibilité de l’assignation introductive d’instance », Gaz. Pal., 7 janvier 2006, p. 24.

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Deux mois plus tard, par l’arrêt du 25  novembre  2004 déjà cité, la deuxième chambre civile a jugé que l’irrégularité constatée affectait l’acte en totalité, cassant un arrêt d’appel qui avait annulé partiellement l’assignation du chef de la diffamation.

Cette décision, sans se prononcer sur le caractère divisible ou non de l’acte, pose pour principe que la constatation de l’existence d’un grief emporte la nullité de l’acte en son entier. Doit-on en déduire que la question de la divisibilité ne se posait pas car un seul fait était poursuivi ?

Le doyen Guerder, commentant cet arrêt rendu sous sa présidence66, indique qu’il a le mérite de préciser et de nuancer l’arrêt du 23 septembre 2004 sur la divisibilité ou l’indivisibilité de l’assignation.

On peut comprendre, la précision n’étant pas explicite à cet égard, que la question de la divisibilité ou non de l’acte cède devant l’existence d’un grief, qui, à elle seule, emporte la nullité totale de l’assignation.

La jurisprudence civile ne paraît pas avoir évolué sur ce point. Toutefois, un arrêt de la première chambre civile67, qui a annulé une assignation visant l’atteinte à la réputation d’une société par l’utilisation de son image et a renvoyé l’affaire devant la cour d’appel autrement composée, a été interprété par un commentateur68 comme marquant l’annulation partielle de l’assignation, le renvoi étant justifié par la nécessité de débattre de l’éventuelle réparation à l’atteinte portée à l’image du bien, indépendamment de la diffamation.

L’évolution, si tant est que l’arrêt se prête à une telle interprétation, mériterait d’être clairement affirmée. Le présent pourvoi en fournit l’occasion à l’assemblée plénière.

Au terme de cette analyse, on peut retenir que, selon la chambre criminelle, la divisibilité de la citation est possible lorsque celle‑ci comporte l’articulation de faits distincts. La nullité ne porte que sur le chef de poursuite affecté par l’imprécision, mais laisse intact le ou les autres chefs correctement qualifiés. La nullité totale n’est encourue que si un fait unique est doublement qualifié. Selon la jurisprudence civile, suivie par l’arrêt attaqué, la constatation de l’existence d’un grief emporte la nullité de l’acte en son entier.

4.2.3. Sur la troisième branche du moyen

Les énonciations dont l’identité a été relevée pouvaient-elles être distinguées en fonction du contexte et de leur date de diffusion ?

À titre  d’exemple, les propos  : «  je dénonce des pratiques commerciales malhonnêtes  », qualifiés de diffamatoires à raison de leur diffusion le 12 février 2007, pouvaient-ils être distingués des mêmes propos : «  je dénonce les pratiques commerciales malhonnêtes  », qualifiés d’injurieux, à raison de leur diffusion le 15 mars 2007 ?

nombre de projets préparés : il est proposé à l’assemblée plénière trois projets.

66 P. Guerder, « L’étendue de la nullité d’une citation ou d’une assignation est-elle réductible à une partie de l’acte ? », Gaz. Pal., 7 janvier 2006, p. 36.

67 1re Civ., 30 mai 2006, pourvoi n° 04-18.520, Bull. 2006, I, n° 275.68 S. Lasfargeas, Gaz. Pal., 6 octobre 2007, p. 40.

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L’origine du litige

Mme  Sylvie X…, ayant eu recours au docteur Dominique Y… et à la SELARL éponyme qu’il a créée aux fins d’exercer au sein d’un centre d’épilation définitive au laser dénommé « Laser Étoile », a estimé que les pratiques de ce professionnel de la médecine et de ce centre étaient peu compatibles avec la déontologie des médecins.

Elle a en conséquence saisi d’une plainte l’ordre des médecins, décrivant ce qu’elle estimait être des comportements critiquables, et a, dans le même temps, diffusé cette plainte et des commentaires sur son expérience via un site qu’elle exploite sous le nom de « Au féminin.com ».

À la demande du docteur Y… et de la SELARL « Docteur Dominique Y… », deux constats d’huissier, en date des 2 et 6 avril 2007, ont acté le contenu des messages ainsi diffusés.

La procédure

Le  14  juin  2007, le docteur Y… et la SELARL «  Docteur Dominique Y…  » ont fait assigner Mme  X… et la société «  Au féminin.com  » des chefs de diffamation et d’injures à raison de certains passages de ces messages.

Le  juge de la mise en état a, par ordonnance en date du 19  décembre  2007, annulé l’ensemble de l’assignation délivrée aux défendeurs, motif pris de l’imprécision de celle-ci au regard des exigences posées par l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881.

Cette ordonnance a été confirmée par arrêt de la cour d’appel de Paris en date du 19 mars 2009, au même visa du non-respect des dispositions de l’article 53 de la loi de 1881.

Par arrêt en date du 8 avril 2010, la première chambre de la Cour a cassé l’arrêt de la cour d’appel de Paris dans ces termes :

«  Attendu que, pour confirmer l’ordonnance, la cour d’appel a énoncé que l’article  53 de la loi du 29 juillet 1881, applicable aux instances civiles, impose, à peine de nullité, que l’assignation précise et qualifie les faits incriminés et indique le texte de loi applicable, de telle sorte, notamment, que le défendeur puisse savoir quels passages sont considérés par le demandeur injurieux ou diffamatoires et puisse, le cas échéant, organiser sa défense et faire une offre de preuve de la vérité des faits diffamatoires dans le délai légal de dix jours ; que l’assignation doit qualifier les faits incriminés et permettre au défendeur de faire la distinction et de savoir en quoi les passages similaires sont susceptibles de caractériser soit l’imputation de faits précis contraires à l’honneur ou à la considération, soit des injures, et qu’à défaut, il en résulte une incertitude contraire aux exigences de la loi sur la presse et aux droits de la défense ».

« Qu’en statuant ainsi, quand satisfait aux prescriptions du texte précité la citation qui indique exactement au défendeur les faits et les infractions qui lui sont reprochés, et le met ainsi en mesure de préparer utilement sa défense sans qu’il soit nécessaire que la citation précise ceux des faits qui constitueraient des injures et ceux qui constitueraient des diffamations, la cour d’appel a violé ce texte ».

L’affaire ayant été renvoyée devant la même cour autrement composée, la cour d’appel de Paris a, se rebellant, confirmé, par arrêt en date du 15 février 2011, l’annulation de l’assignation objet de l’ordonnance du 14 juin 2007 par les considérations suivantes :

« Considérant [...] que des propos identiques ou quasiment identiques, même figurant pour certains dans des commentaires publiés à des dates distinctes, se trouvent poursuivis sous deux qualifications différentes ; que ce cumul de qualifications est de nature à créer une incertitude pour les défenderesses préjudiciable à leur défense ; que l’assignation ne répond dès lors pas aux exigences de l’article 53 susvisé ; que ce vice affecte l’assignation de l’acte en son entier... »

C’est l’arrêt attaqué.

Le pourvoi

Le moyen unique de cassation propose trois branches :

- l’assignation était suffisamment précise et permettait aux défenseurs de préparer leur défense sans qu’il soit nécessaire, dans la citation des passages incriminés, de préciser ceux qui constitueraient des injures et ceux qui constitueraient des diffamations ; son annulation viole donc les dispositions de l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881 ;

- la Cour aurait dû avoir une démarche distributive et ne pas annuler l’ensemble de l’assignation ;

- la circonstance que les mêmes propos soient publiés à des dates différentes et dans un contexte différent autorise-t-elle la considération qu’il s’agit d’un fait unique insusceptible de qualifications cumulatives ?

Avis de M. MarinProcureur général

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L’analyse

L’apparente limitation à un aspect purement procédural du moyen avancé à l’appui du pourvoi ne doit pas dissimuler les enjeux du débat soumis à la Cour de cassation après la rébellion de la cour d’appel de Paris.

D’ailleurs, la communauté des juristes, et notamment celle des spécialistes du droit de la presse, ne s’y est pas trompée.

En effet, les réactions doctrinales, favorables ou défavorables, aux termes de l’arrêt de la première chambre de la Cour en date du 8 avril 2010 sont le témoin d’enjeux bien plus importants, que sont celui, d’une part, juridique, du principe d’uniformisation, sous la bannière de la loi du 29  juillet  1881, du droit, notamment processuel, de la presse et celui, d’autre part, sociétal, de la protection de la liberté d’expression, qui relève de l’essence même de nos démocraties, l’un et l’autre étant intimement liés.

Il est d’ailleurs intéressant de constater que ni les tenants d’un droit unifié de la presse1 ni les défenseurs d’une autonomie de la procédure civile en ce domaine2 ne se satisfont de la solution dégagée par la première chambre civile de notre Cour dans son arrêt précité.

L’assouplissement des règles procédurales du procès civil dans le champ du droit de la presse, et notamment celles relatives à l’acte introductif d’instance, peut-il, comme certains ont pu l’écrire, aboutir à vider la protection de la liberté d’expression de toute effectivité ?

La détermination des règles procédurales applicables ne serait-elle qu’un cheval de Troie d’un mouvement plus profond de remise en cause de l’élaboration, au fil des arrêts rendus, y compris en assemblée plénière, par notre Cour, du principe de l’application des dispositions de la loi du 29 juillet 1881 en matière civile comme en matière criminelle ?

L’importance de la réponse qu’il conviendra d’apporter au moyen soulevé, essentiellement dans sa première branche, doit se mesurer à l’aune des principes fondamentaux que les règles relatives à l’assignation en matière de presse contribuent à protéger.

La liberté d’expression est indéfectiblement attachée aux principes fondateurs de notre démocratie

L’article  11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 dispose que «  la libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme ; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi », et Bertrand de Lamy relève que « non seulement la libre communication fait l’objet d’une affirmation spéciale, mais encore elle est seule expressément qualifiée de droit des plus précieux de l’homme »3.

Pour le Conseil constitutionnel, la liberté proclamée à l’article  11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen constitue une «  liberté fondamentale, d’autant plus précieuse que son exercice est l’une des garanties essentielles du respect des autres droits et libertés et de la souveraineté nationale »4, ajoutant, dans sa décision du 20 mai 2011, que cette liberté était une « condition de la démocratie »5.

Pour autant, cette liberté fondamentale ne saurait constituer une immunité absolue et les abus auxquels elle peut donner lieu doivent être réparés, voire sanctionnés, sous certaines conditions.

Dans le considérant 37 de sa décision du 11 octobre 1984 précitée, le Conseil constitutionnel consacre la compétence exclusive de la loi afin de limiter éventuellement l’exercice de cette liberté  : « …  la loi ne peut en réglementer l’exercice qu’en vue de le rendre plus effectif ou de le concilier avec celui d’autres règles ou principes de valeur constitutionnelle ».

Si ces considérations fondamentales sur l’essence même du principe de la liberté d’expression ne font pas, ne font plus, débat, tout aussi essentielle est la détermination des règles procédurales qui autoriseront une réelle effectivité de la protection de la liberté d’expression lors de la mise en œuvre d’instances tendant à la sanction des abus de droit éventuels.

En effet, si les conditions de cette mise en œuvre ne sont pas, elles-mêmes, enserrées dans un cadre suffisamment précis et contraint, la protection offerte par la loi ne se révélerait qu’incantatoire.

Cette exigence est d’autant plus prégnante que, par sa jurisprudence abondante relative aux dispositions de l’article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, la Cour de Strasbourg a développé une conception très extensive de la liberté d’expression, la qualifiant de « chien de garde de la démocratie »6, et érigeant la protection des sources journalistiques au rang de « pierre angulaire »7 de nos États de droit.

1 C. Bigot, « La Cour de cassation remet en cause l’uniformisation des procédures civiles et pénales en matière de presse », Dalloz 2010, p. 1673.

2 E. Dreyer, « Galimatias juridique en matière de presse », JCP 2011, éd. G, n° 52, 26 décembre 2011.3 B. de Lamy, « La Constitution et la liberté de la presse », Les nouveaux cahiers du Conseil constitutionnel, Dalloz 2012, no 36.4 Décision DC no 84-181 du 11 octobre 1984, loi visant à limiter la concentration et à assurer la transparence financière et le

pluralisme des entreprises de presse.5 Décision QPC n° 2011-131 du 20 mai 2011, décision DC n° 2012-647 du 28 février 2012.6 CEDH, Goodwin c/ Royaume-Uni, 27 mars 1996, § 39.7 CEDH, Handyside c/ Royaume Uni, 7 décembre 1976  ; jurisprudence constante, voir par ex. CEDH, July et SARL Libération

c/ France, 14 février 2008.

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Bulletin d’informationArrêt publié intégralement

•15 avril 2013

La Cour européenne considère, comme nos législateurs de la fin du XIXe siècle, qu’elle « ne se trouve pas devant un choix entre deux principes antinomiques mais devant un principe - la liberté d’expression - assorti d’exceptions qui appellent une interprétation étroite  »8, ajoutant  : «  …  la “nécessité” d’une quelconque restriction à l’exercice de la liberté d’expression doit être établie de manière convaincante »9.

Notre loi de 1881, pour Patrick Auvret, « correspond à l’esprit et à la lettre de la Convention européenne »10, relevant par ailleurs que « les règles de procédure, si décriées par certains, correspondent parfaitement aux exigences de l’article 6 de la Convention européenne ».

Cependant, la liberté de la presse n’a jamais été conçue comme un droit absolu affranchi de toute limite et ce pilier essentiel de nos systèmes démocratiques ne saurait efficacement s’exercer sans une nécessaire répression des abus auxquels elle peut donner lieu.

Le régime du droit de la presse est le fruit de ce compromis nécessaire, et les règles posées par le législateur en cette matière, ainsi que leur interprétation par la jurisprudence, s’insèrent entre un dispositif attentatoire aux droits de la personne par la protection offerte à la liberté d’expression et une censure restrictive de cette libre communication des idées et des pensées, protectrice de droits de la personne face à certains abus de cette liberté.

Conçue comme un « code complet de la matière »11, M. Pierre Guerder avance que «  la loi de 1881 a été voulue comme une loi de compromis. Elle a fixé des limites à la liberté de la presse, à travers l’incrimination des crimes et délits commis par certains moyens,  mais elle a compensé ces restrictions par un régime procédural dérogatoire au droit commun, très strict, multipliant les obstacles à la poursuite, au risque de fragiliser celle-ci, dans le but de privilégier les droits de la défense. Depuis 1881, la loi sur la liberté de la presse a subi des modifications et des ajouts qui n’en ont pas changé l’économie générale, ni altéré la valeur symbolique »12.

La protection de la liberté de communiquer ne peut, évidemment, être dissociée des moyens procéduraux permettant d’en sanctionner les abus.

Mais la loi de 1881, loi d’apparence répressive, s’est peu à peu affirmée comme le creuset de la responsabilité civile encourue à raison des incriminations contenues dans ce texte.

Le  principe est celui de la solidarité facultative des actions pénale et civile. L’action civile peut donc être exercée simultanément à l’action publique devant la juridiction répressive, ou indépendamment de l’action publique devant la juridiction civile.

Toutefois, la solidarité des actions peut être obligatoire dans certains cas. Ainsi, l’article 46 de la loi de 1881 subordonne l’action civile à l’action publique en cas de délits commis envers les cours et tribunaux, les armées, les corps constitués et les administrations publiques (article 30). Il est également interdit de poursuivre séparément de l’action publique l’action civile en réparation des délits commis envers les ministres, les élus, les fonctionnaires publics, les citoyens chargés d’un service public, les jurés et les témoins (article 31). Cette solidarité réserve donc à la juridiction répressive la compétence pour statuer sur l’ensemble des intérêts en cause.

La jurisprudence considère de longue date que la solidarité des actions pour les délits prévus aux articles 30 et 31 implique le contrôle de la qualification des faits par le juge civil. Celui-ci a l’obligation de contrôler la qualification légale des faits qui lui sont soumis et de se déclarer d’office incompétent si ces faits relèvent des infractions réprimées par les articles 30 et 3113.

La partie qui s’estime victime d’abus en ce domaine est donc soumise, sans discussion possible, au cadre procédural fixé par la loi de 1881.

Néanmoins, ces cas de solidarité obligatoire ou d’exclusion de solidarité des actions sont circonscrits. Pour la plupart des délits de presse, et notamment les deux plus usités, la diffamation publique envers un particulier (article 32) et l’injure publique envers un particulier (article 33), la partie lésée a le choix de la juridiction devant laquelle elle souhaite porter son action civile et ainsi obtenir réparation du délit dont elle estime qu’il lui a causé un préjudice.

Ce libre choix soulève la question des règles procédurales applicables devant les juridictions pénale et civile.

Pour Iehring, « les formes sont les servantes du droit », et s’il est un domaine où cette formule prend tout son sens, c’est sans aucun doute celui du droit de la presse.

Quels sont les termes du débat soumis à l’assemblée plénière de la Cour

Depuis la fin des années 1990, la deuxième chambre civile puis la première chambre civile de la Cour de cassation, à qui a été transféré le contentieux de la presse, ont étendu les exigences particulières de la loi de 1881, notamment telles qu’interprétées par la chambre criminelle, y compris en ce qui concerne les termes de l’acte introductif d’instance, aux procédures intentées en réparation devant le juge civil, position couronnée

8 CEDH, Handyside c/ Royaume-Uni, 7 décembre 1976.9 CEDH, Sunday Times c/ Royaume-Uni (n° 2), 26 novembre 1991, § 50.10 P. Auvret, «  La concordance entre la loi de 1881 et la Convention européenne des droits de l’homme  », Petites Affiches,

23 décembre 2003, n° 357, p. 13.11 M. Pierre Guerder, Rép. pén. Dalloz, § 8.12 M. Pierre Guerder, Rép. pén. Dalloz, § 12.13 Civ., 11 juin 1898, DP 1898, 1.510 ; Civ., 8 février 1909, DP 1909, 1.471, ou, plus récent, 2e Civ., 30 septembre 1998, pourvoi

n°  97-10.280, Bull.  1998, II, n°  249 : « Attendu que [...] l’action civile résultant du délit de diffamation publique envers une administration publique ne peut être poursuivie séparément de l’action publique et que cette prohibition d’ordre public impose au juge civil saisi d’une action de cette nature de la déclarer irrecevable ».

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par deux arrêts d’assemblée plénière de notre Cour en date du 12  juillet 2000 qui ont posé le principe de l’exclusivité des dispositions de la loi de 1881 comme support textuel de la réparation de toutes les atteintes par voie de presse.

Il était donc acquis qu’en vertu de cette uniformisation du droit applicable tant aux procédures civiles qu’aux procédures pénales, l’acte introductif d’instance en matière civile devait répondre aux exigences posées par l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881, qui dispose :

« La citation précisera et qualifiera le fait incriminé, elle indiquera le texte de loi applicable à la poursuite.

Si la citation est à la requête du plaignant, elle contiendra élection de domicile dans la ville où siège la juridiction saisie et sera notifiée tant au prévenu qu’au ministère public.

Toutes ces formalités seront observées à peine de nullité de la poursuite ».

L’interprétation des dispositions de l’article 53 par la chambre criminelle, sillon des exigences procédurales de mise en œuvre de l’action en sanction et réparation des abus ou de la protection en creux de la liberté d’expression

Ces prescriptions de l’article  53 sont le pendant de celles posées à l’article  50, concernant le réquisitoire introductif, sur l’application duquel la chambre criminelle a bâti une jurisprudence stable et ancienne.

Ainsi la chambre criminelle a-t-elle confirmé l’arrêt d’une cour d’appel qui annule la citation d’un prévenu du chef d’injures publiques et visant le texte d’incrimination de l’injure publique, mais aussi un texte relatif à la répression de la diffamation :

« Vu l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881 ; Attendu qu’en obligeant le demandeur à préciser et à qualifier le fait incriminé et à indiquer le texte de loi applicable à la poursuite, le législateur a voulu seulement, dans l’intérêt de la défense, que l’objet de la prévention fût d’avance expressément déterminé ».14

Comme pour l’article 50, la chambre criminelle considère que l’article 53, alinéa premier, « a pour rôle de fixer définitivement l’objet de la poursuite afin que le prévenu puisse connaître les faits dont il aura exclusivement à répondre »15.

Dans son arrêt en date du 7 décembre 2010, elle a tenu à préciser à nouveau :

« Pour constituer une diffamation, l’allégation ou l’imputation qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la victime doit se présenter sous la forme de l’articulation précise de faits imputables au plaignant de nature à être, sans difficulté, l’objet d’une preuve ou d’un débat contradictoire »16.

Ainsi que le relève un auteur, «  il s’agit d’une règle essentielle parce qu’elle est une garantie de la liberté d’expression. La notion de précision dans l’article 53 équivaut à la notion d’articulation dans l’article 50 »17.

Comme le réquisitoire introductif, la citation directe doit spécifier les passages et propos incriminés à l’intérieur d’un article, afin de permettre au prévenu de préparer utilement sa défense18.

S’agissant de la problématique plus particulière soumise à l’assemblée plénière, notamment par la première branche du moyen, la qualification d’un fait unique doit être unique. La jurisprudence de la chambre criminelle rappelle fréquemment cette prohibition des qualifications alternatives en matière d’injure et/ou de diffamation.

« En matière de presse, la citation doit, à peine de nullité, qualifier le fait et énoncer l’article de loi applicable ; une qualification alternative est insuffisante »19.

Par arrêt du 30 mars 2005, la chambre criminelle a cassé l’arrêt ayant rejeté l’exception de nullité de la citation tirée d’une qualification alternative :

« En matière de presse, la citation doit, à peine de nullité de la poursuite, qualifier le fait incriminé et énoncer le texte de loi applicable. Est nulle une citation visant, pour un fait unique, les qualifications, de nature et de gravité différentes, de diffamation envers citoyen chargé d’un mandat public, de diffamation envers particulier et d’injure, de telles qualifications alternatives créant nécessairement dans l’esprit du prévenu une incertitude quant à l’objet de la poursuite ».

«  Attendu qu’en statuant ainsi, alors que les qualifications alternatives employées en l’espèce (diffamation au principal, injure subsidiairement) pour un fait unique étaient nécessairement de nature à créer une telle incertitude, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision »20.

Une double qualification entache donc la citation de nullité21, quand bien même cette double qualification viendrait de poursuites exercées successivement :

«  Attendu qu’il résulte des dispositions de ce texte que les mêmes faits ne sauraient recevoir une double qualification sans créer une incertitude dans l’esprit du prévenu, et que, si des poursuites relatives aux mêmes imputations qualifiées différemment et visant des textes de loi distincts ont été engagées successivement devant la juridiction civile, puis pénale, la seconde se trouve frappée de nullité »22.

14 Crim., 20 mai 1958, Bull. crim. 1958, n° 410 (SDER).15 Jurisprudence constante, voir par ex. Crim., 8 novembre 1983, pourvoi no 82-93.992, Bull. crim. 1983, no 294.16 Crim., 7 décembre 2010, pourvoi no 10-81.984, Bull. crim. 2010, no 197 (SDER).17 Rép. pén. Dalloz, § 504.18 Jurisprudence constante, voir par ex. Crim., 27 mai 1999, pourvoi n° 98-83.943, diffusé.19 Crim., 23 décembre 1959, pourvoi no 90.345/59, Bull. crim. 1959, no 578 (SDER).20 Crim., 30 mars 2005, pourvoi no 04-84.976, Bull. crim. 2005, no 111.21 Crim., 9 mars 1965, pourvoi no 92.810/64 Bull. crim. 1965, no 70 ; Crim., 16 janvier 1990, pourvoi no 89-81.349, Bull. crim. 1990,

no 26 ; Crim., 1er mars 1994, pourvoi no 91-85.796, diffusé.22 Crim., 28 novembre 2006, pourvoi no 05-83.492, Bull. crim. 2006, no 301.

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Bulletin d’informationArrêt publié intégralement

•15 avril 2013

Cependant, la chambre criminelle privilégie une lecture téléologique des dispositions de la loi de 1881 en ce domaine, en rappelant que seule une incertitude quant à l’objet de la poursuite entache l’acte d’une irrégularité attentatoire aux droits de la défense.

Ainsi, lorsqu’un écrit contient plusieurs faits distincts susceptibles de qualifications différentes, la chambre criminelle a admis qu’il n’était pas toujours nécessaire que le réquisitoire introductif qualifie chaque chef de poursuite de manière distincte :

« ... que dès lors elles répondent aux prescriptions de l’article 50, sans qu’il soit nécessaire qu’elles précisent ceux des faits qui constituent des injures et ceux qui, au contraire, constituent des diffamations, ni dans quelle mesure ils concernent respectivement l’homme public et la personne privée ; d’où il suit que la cassation est encourue »23.

S’agissant des mentions exigées dans le cadre d’une action intentée par voie de citation directe, en cas de pluralité de faits distincts, et à l’exemple de la règle dégagée sur le fondement de l’article 50, la citation n’est pas entachée de nullité lorsque les faits qualifiés soit d’injurieux, soit de diffamatoires ne sont pas distinctement énoncés, pour autant que les propos les contenant figurent dans la citation et qu’une qualification juridique globale soit proposée.

En revanche, demeure intangible la règle selon laquelle un fait unique ne peut recevoir de qualifications cumulatives ou alternatives.

La circonstance qu’un propos unique ait pu être diffusé à des dates différentes n’influe en rien la rigueur de ce principe.

Conséquences, pour la chambre criminelle, de la violation des dispositions de l’article 53

Pour la chambre criminelle, les dispositions de l’article  802 relatives à l’existence d’un grief ne sont pas applicables en cas de violation des dispositions de l’article 53 de la loi du 29  juillet 188124 et les formalités prescrites par ce texte sont substantielles aux droits de la défense, leur inobservation ayant pour conséquence la nullité de la citation.25

En revanche, cette nullité n’entache pas nécessairement l’intégralité de la citation et il convient, en cas de faits distincts, que le juge examine, pour chacun des faits, l’existence ou non d’une violation de l’article 53 de la loi de 1881 :

« Attendu, d’autre part, que c’est vainement qu’il est allégué par les demandeurs que la cour d’appel aurait dû annuler la citation pour le tout  ; qu’en effet, lorsque, comme en l’espèce, la poursuite embrasse une pluralité de faits distincts susceptibles de qualifications différentes et que la citation précise ces faits en les qualifiant séparément et en indiquant pour chacun d’eux le texte de loi applicable, la juridiction de jugement devant laquelle la citation a été arguée de nullité, sur la base de l’article 53, alinéa premier, de la loi susvisée, est tenue d’examiner si pour chacun des faits incriminés les prescriptions de ce texte ont été respectées  ; que rien ne s’oppose alors, s’il y a lieu, à une annulation partielle de la citation, auquel cas les juges ont le devoir de statuer sur ceux des faits pour lesquels l’action publique a été régulièrement engagée et dont ils sont valablement saisis »26.

L’application de l’article 53 à l’acte introductif d’instance civile

Nous le savons, cette interprétation par la chambre criminelle des dispositions de la loi du 29 juillet 1881 a, jusque dans les années 1990, été cantonnée à la poursuite des infractions de presse par la voie pénale, la Cour de cassation considérant que les instances intentées pour diffamation par la seule voie civile ressortaient des dispositions générales définissant la responsabilité civile et des règles de la procédure civile, en dehors de celles relatives à la prescription abrégée.

Ainsi la Cour pouvait-elle énoncer que :

« Les dispositions de l’article 60 de la loi du 29 juillet 1881 prescrivant que la citation précisera et qualifiera le fait incriminé et indiquera le texte de loi applicable à la poursuite, le tout à peine de nullité, ne se rapportent, d’après leurs termes mêmes, qu’à la poursuite devant les tribunaux correctionnels ou de simple police ; que la nullité ainsi édictée ne saurait être étendue aux assignations devant les tribunaux civils, même pour réparation du préjudice résultant d’une diffamation par un journal »27.

Pour M. Dreyer, « les tribunaux civils développèrent ainsi leur propre conception de l’injure et de la diffamation “civiles” sanctionnées au visa de l’article  1382 du code civil en application des seules dispositions de procédure civile alors applicables »28.

Le mouvement d’uniformisation des procédures a notamment été initié par un arrêt en date du 5 février 1992, rendu aux conclusions de l’avocat général Dubois de Prisque, dans lequel la deuxième chambre civile a fait application de l’article 55 de la loi du 29 juillet 1881 au « référé-diffamation »29 :

«  Vu les articles  35 et 55 de la loi du 29  juillet  1881, ensemble les articles  6 §  1 et 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales » ;

23 Crim., 29 avril 1969, pourvoi no 67-90.412, Bull. crim. 1969, no 148.24 Crim., 17 mars 1981, pourvoi n° 79-94.121, Bull. crim. 1981, n° 96.25 Crim., 26 juin 1984, pourvoi n° 83-91.283, Bull. crim. 1984, n° 244.26 Crim., 11 mars 1976, pourvoi n° 75-81.785, Bull. crim. 1976, n° 94.27 Req., 8 avril 1895, DP 1895, 1, p. 360, conclusions Desjardins.28 E. Dreyer, « Qu’est devenue la responsabilité civile en matière de presse ? » Dalloz 2004, p. 590.29 2e Civ., 5 février 1992, pourvoi no 90-16.022, Bull. 1992, II, no 44.

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15 avril 2013Arrêt publié intégralement

•Bulletin d’information

Le juge des référés ne peut condamner un journaliste, auteur d’un article diffamatoire, à verser une provision à la victime, sans respecter le délai d’ordre public de dix jours, après la signification de l’assignation, dont dispose la partie assignée en diffamation qui veut être admise à prouver la vérité des faits diffamatoires ».

Jean-François Burgelin commentait alors cette décision en avançant que «  l’arrêt du 5  février 1992 n’a eu d’autre objet que de rappeler la prééminence de la loi sur la presse sur les textes réglementaires du nouveau code de procédure civile », pressentant déjà l’évolution à venir30.

Aux termes de l’article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958, « la loi fixe les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques » et il serait paradoxal que des textes de nature réglementaire viennent, de fait, limiter la partie de la proclamation solennelle contenue dans le préambule de la Constitution ainsi que le monopole de la loi dans le domaine de la protection des droits fondamentaux, qui sont de l’essence même de nos démocraties.

L’uniformisation de la procédure applicable en la matière semble consacrée avec l’arrêt du 19 février 1997, par lequel la deuxième chambre civile reconnaît applicable aux instances civiles l’intégralité des prescriptions de l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881 dans les termes suivants :

« Vu l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881 ;

Attendu qu’il résulte de ce texte que l’assignation doit préciser et qualifier le fait invoqué et indiquer la loi applicable à la demande ; [...]

Attendu que, pour décider que l’assignation avait interrompu la prescription, la cour d’appel a retenu que les écrits dénoncés étaient, dès l’acte introductif d’instance, qualifiés d’injures publiques et que l’action étant ainsi régulièrement intentée, le délai prévu par l’article 65 de la loi du 29 juillet 1881 avait été interrompu ;Qu’en statuant ainsi, alors que l’assignation n’indiquait pas la loi sur laquelle étaient fondées les prétentions du demandeur, la cour d’appel a violé le texte susvisé... »

Mais le mouvement d’harmonisation des procédures pénale et civile par l’application pleine et entière des dispositions de la loi de 1881 au procès civil de presse a trouvé sa consécration dans l’exclusion pure et simple de la responsabilité civile en matière d’infractions de presse.

Dès 1999, dans deux arrêts notamment, la deuxième chambre civile a posé le principe de l’exclusion d’une autonomie de l’action civile fondée sur l’article 1382 du code civil :

« Il appartient aux juges de restituer aux faits leur exacte qualification, sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée. Dès lors, c’est à bon droit qu’une cour d’appel, qui a constaté que la cause du dommage résidait dans la publication d’un article diffamatoire envers les plaignants et un de leurs auteurs décédés, a fait application de la prescription spéciale prévue par l’article 65 de la loi du 29 juillet 1881, bien que les parties eussent fondé leur action en dommages-intérêts sur l’article 1382 du code civil, dès lors que les éléments de la diffamation publique envers des particuliers et envers la mémoire d’un mort se trouvaient réunis, et que la publication incriminée était interdite par l’article 38 de la loi précitée »31.

Par deux arrêts de son assemblée plénière en date du 12  juillet  2000, déjà cités, la Cour de cassation a considéré que « les abus de la liberté d’expression prévus et réprimés par la loi du 29 juillet 1881 ne peuvent être réparés sur le fondement de l’article 1382 du code civil »32.

En consacrant ainsi l’autonomie et l’exclusivité de la loi de 1881 en matière de réparation des délits de presse, la Cour de cassation a reconnu la spécificité, voulue par le législateur, des règles qui doivent entourer l’exercice de la liberté d’expression.

Elle s’inscrit ainsi dans une démarche protectrice de cette liberté fondamentale, dont les abus ne peuvent être réparés sur le terrain de la responsabilité civile de droit commun.

Ces arrêts ont donné lieu à de nombreuses réactions doctrinales, positives ou critiques33.

Christophe Bigot n’hésite pas à présenter ces arrêts comme « l’éradication » de l’application de l’article 1382 du code civil en matière d’abus de presse, dans l’objectif d’éviter ainsi «  que les garanties de la liberté d’expression contenues dans la loi sur la presse soient contournées »34.

La deuxième chambre puis la première chambre civile35 ont, d’abord pour cette dernière, développé leur jurisprudence dans cette voie36.

La première chambre civile a même étendu l’application de ce principe d’exclusion totale de l’article 1382 du code civil en matière de droit des personnes, à l’occasion d’une action fondée sur l’article 9-1 du code civil37,  mais, face aux vives réactions doctrinales, elle est rapidement revenue sur sa position et s’en est ensuite tenue à la formulation contenue dans les arrêts d’assemblée plénière38.

30 J.-F. Burgelin, Dalloz 1992, p. 442, commentaire sous 2e Civ., 5 février 1997.31 2e Civ., 6 mai 1999, pourvoi no 95-18.883, Bull. 1999, II, no 79.32 Assemblée plénière, 12 juillet 2000, pourvois n° 98-10.160 et 98-11.155, Bull. 2000, Ass. plén., n° 8.33 E. Derieux s’exclame ainsi : « De l’exclusion de l’application de l’article 1382 du code civil, en arrivera-t-on à l’exclusion de toute

action civile autonome ? », Petites affiches, 18 mai 2001, n° 99, p. 21. Pour d'autres réactions, voir ci-après.34 C. Bigot, « La procédure en matière de presse en proie aux contradictions », Dalloz 2011, p. 1467.35 A laquelle le contentieux a été attribuée en 2007.36 2e Civ., 8 mars 2001, pourvoi n° 98-17.574, Bull. 2001, II, n° 47 ; 2e Civ., 14 mars 2002, pourvoi n° 00-13.917, Bull. 2002, II,

n° 45 ; 2e Civ., 11 décembre 2003, pourvoi n° 02-12.747, Bull. 2003, II, n° 384 ; 2e Civ., 25 janvier 2007, pourvoi n° 03-20.506, Bull. 2007, II, n° 19.

37 1re Civ., 27 septembre 2005, pourvoi n° 03-13.622, Bull. 2005, I, n° 348.38 1re Civ., 29 novembre 2005, pourvoi n° 04-16.508, Bull. 2005, I, n° 453 ; 1re Civ., 7 février 2006, pourvoi n° 05-10.309, Bull. 2006, I,

n° 57  ; 1re Civ., 12 décembre 2006, pourvoi n° 04-20.719, Bull. 2006, I, n° 551  ; 1re Civ., 6 mai 2010, pourvoi n° 09-67.624, Bull. 2010, I, n° 103.

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S’agissant des conséquences de cette uniformisation des procédures civiles et pénales sous la bannière de la loi du 29 juillet 1881, la deuxième chambre civile en a, s’agissant des conditions de fond relatives à l’acte introductif d’instance, tiré des conséquences similaires à celles dégagées par la chambre criminelle.

Ainsi, dans trois arrêts en date du 14 mars 2002, elle énonce notamment :

« Mais attendu que les abus de la liberté d’expression prévus par la loi du 29  juillet 1881 ne peuvent être poursuivis sur le fondement de l’article 1382 du code civil ; qu’il résulte de l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881 que l’assignation délivrée à la requête du plaignant doit non seulement préciser et qualifier le fait invoqué, mais encore indiquer le texte de cette loi qui édicte la peine applicable aux faits entrant dans la définition d’une infraction de presse, tels qu’ils sont qualifiés ;

Et attendu que l’arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que les exigences de l’article  53 répondent à la nécessité pour le défendeur de connaître sans équivoque, dès la lecture de l’assignation, l’objet de l’incrimination et la nature des moyens de défense qu’il peut y opposer dans les conditions strictement définies par la loi  ; que le demandeur ne peut, à peine de nullité de son acte introductif d’instance et donc de son assignation, recourir à des qualifications cumulatives des propos incriminés ; qu’il ne peut donc pas invoquer, tout à la fois et à titre principal, les dispositions spéciales de la loi sur la presse et l’article 1382 du code civil, relatif au droit commun de la responsabilité civile »39.

L’évolution récente de la jurisprudence de la première chambre civile

La première chambre civile a récemment, et en particulier depuis 2009, fait évoluer sa jurisprudence en se montrant plus souple sur les conséquences d’un non-respect strict de la loi de 1881 dans le cadre de procédures civiles en responsabilité du dommage causé par voie de presse, en faisant notamment prévaloir, s’agissant entre autres de l’assignation, certaines règles de procédure civile au détriment des règles spéciales posées par la loi de 1881.

Tout d’abord, par deux arrêts de cassation en date du 24 septembre 2009, publiés au Bulletin, la chambre a estimé que :

- la seule omission dans l’assignation de la mention de la sanction pénale, que la juridiction civile ne peut jamais prononcer, n’est pas de nature à en affecter la validité40 ;

- l’indication, dans l’assignation, de l’adresse d’un avocat parisien, pouvant exercer, en vertu de la règle de la multipostulation, applicable aux juridictions de Paris et de la petite couronne, les attributions autrefois dévolues aux avoués devant le tribunal de Nanterre, où siège la juridiction saisie, emporte valablement élection de domicile du demandeur au sens de l’article 53 de la loi41.

Déjà, dans un arrêt du 20  décembre  2007, elle avait considéré qu’en matière civile, la signification d’une simple copie de la citation au ministère public n’avait qu’une valeur informative et il importait donc peu qu’elle n’ait pas fait l’objet d’un acte séparé42.

Plus récemment, par deux arrêts de cassation en date du 8 avril 2010, la chambre a poursuivi sur la voie de l’assouplissement des exigences procédurales en considérant que constituait un acte interruptif de prescription, au sens de l’article 65 de la loi, la demande de report de l’ordonnance de clôture pour produire des pièces nouvelles, et en entrant en voie de cassation de l’arrêt qui avait retenu que la simple mention faite par le juge de la mise en état sur le bulletin de procédure fixant un nouveau calendrier ne manifestait pas, en l’absence de tout acte de procédure déposé par le demandeur, l’intention de celui-ci de poursuivre l’action et n’interrompait pas la prescription43.

Un auteur a pu relever à cette occasion que « c’est la notion même d’acte interruptif de prescription qui est remise en cause puisqu’il suffit, non plus d’un acte de procédure, mais d’une simple déclaration unilatérale, orale ou écrite, pour interrompre la prescription »44.

Dans son arrêt de cassation en date du 3  février  2011, la première chambre a, de manière inattendue, considéré qu’était valable une assignation aux fins de réparation, à titre principal, d’un préjudice tiré de propos diffamatoires et, subsidiairement, du préjudice tiré de la faute civile constituée par ces propos en ces termes :

«  Qu’en statuant ainsi, quand la citation est valable dès lors que, par le visa de l’article  53 de la loi du 29  juillet  1881 réprimant le délit imputé, elle ne laisse aucune incertitude sur son objet exact ni ne peut provoquer, dans l’esprit des intéressés, aucun doute sur les faits qui leur sont reprochés, peu important la référence à titre subsidiaire à l’article 1382 du code civil, la cour d’appel a violé le texte susvisé »45.

Ainsi, la chambre n’a pas été convaincue par le raisonnement, pourtant peu original, développé par la cour d’appel qui avait jugé que :

« ...même présenté sous cette forme subsidiaire, ce cumul d’actions soumises à des procédures radicalement différentes, qui ne permet pas à la partie poursuivie de connaître avec certitude les faits qui lui sont reprochés, ni d’organiser sa défense en conséquence, équivaut à une absence de qualification au sens de la loi précitée sur la liberté de la presse  ; qu’à cet égard, la circonstance que M. X… et la SCPE ont notifié une offre de preuve dans les formes de la loi sur la presse démontre seulement l’obligation que ceux-ci ont eue de se

39 2e Civ., 14 mars 2002, no 00-13.917, précité.40 1re Civ., 24 septembre 2009, pourvoi no 08-17.315, Bull. 2009, I, no 18.41 1re Civ., 24 septembre 2009, pourvoi n° 08-12.381, Bull. 2009, I, n° 179.42 1re Civ., 20 décembre 2007, pourvoi no 06-19.628, Bull. 2007, I, n° 394.43 1re Civ., 8 avril 2010, pourvoi n° 09-65.032, Bull. 2010, I, n° 88.44 C. Bigot, « La Cour de cassation remet en cause l’uniformisation des procédures civile et pénale en matière de presse »,

Dalloz 2010, p. 1673.45 1re Civ., 3 février 2011, pourvoi n° 09-71.711, Bull. 2011, I, n° 22.

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15 avril 2013Arrêt publié intégralement

•Bulletin d’information

défendre sur ce terrain, alors que cette procédure spécifique était inopérante dans le cadre d’une action qui était aussi fondée sur le droit commun de la responsabilité civile  ; que s’il est certain que cette obligation faite à la partie poursuivante dès le début de la procédure de donner aux faits leur exacte qualification risque, en cas d’erreur de sa part sur ce point, de la priver d’un recours effectif eu égard notamment au bref délai de la prescription en matière de presse, cette atteinte à ses droits est justifiée en l’espèce par les exigences tout aussi protégées de la liberté d’expression ; qu’enfin, contrairement à ce qui est allégué, les assignations contestées, qui visent à titre subsidiaire à engager la responsabilité civile des personnes défenderesses, ne comportent pas seulement le visa erroné ou surabondant de l’article 1382 du code civil ».

C’est face à ces variations et glissements que certains commentateurs46 ont pu qualifier de « grand écart » la jurisprudence de la Cour, M. Dreyer s’interrogeant dans ces termes :

«  Que penser d’une telle décision  ? La Cour de cassation donne le sentiment d’hésiter. Elle semble avoir perdu sa boussole en même temps que les principaux conseillers qui défendaient la position antérieure. Mais peut-on imaginer qu’une jurisprudence soit à ce point “l’affaire” d’une personne  ? On peine à l’imaginer. Reste donc un constat  : il n’apparaît pas acceptable, dans un souci de bonne administration de la justice, que les solutions évoluent aussi vite  : quinze mois seulement séparent les positions contraires arrêtées en 2009 et 2011  ! Précisément, parce que le droit de la presse définit les conditions d’exercice d’une liberté fondamentale, l’exigence de sécurité juridique devrait s’imposer aux magistrats avec plus de force qu’ailleurs. Ces changements à répétition devraient être exclus. En toute hypothèse, leurs effets dans le temps devraient être aménagés »47.

Cependant, la première chambre civile a réaffirmé sa position par un arrêt de cassation en date du 26 janvier 2012, en modifiant légèrement sa motivation conclusive48 :

« Vu l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881 ;

Attendu que, prétendant que des propos contenus dans l’article  intitulé “Petit bonhomme Rock Star” revêtaient à son égard le caractère d’injures publiques envers un particulier prévu par les articles 29, alinéa 2, et 33, alinéa 2, de la loi du 29 juillet 1881, subsidiairement d’une faute civile au sens de l’article 1382 du code civil, M. X… a assigné M. Z.., directeur de la publication du magazine sur le site internet duquel avait été mis en ligne cet article, en réparation de son préjudice ;

Attendu que, pour déclarer nulle l’assignation déposée par M. X… à l’encontre de M. Z…, la cour d’appel a énoncé que les abus de la liberté d’expression prévus et réprimés par la loi du 29  juillet 1881, tels que les propos litigieux, qualifiés dans l’assignation d’injures publiques envers un particulier, ne peuvent être poursuivis et réparés sur le fondement de l’article  1382 du code civil, que l’invocation de l’application de ce texte à ces propos, tantôt à titre subsidiaire, tantôt de façon cumulative, introduit une incertitude pour le défendeur quant à l’objet exact de la demande et lui interdit de connaître avec précision la nature des moyens de défense qu’il peut lui opposer et qui diffère selon que l’action est fondée sur les dispositions particulières de la loi du 29 juillet 1881 ou qu’elle obéit au régime de la responsabilité civile de droit commun ;

Qu’en statuant ainsi, quand la citation est valable dès lors que, par le visa de l’article de la loi du 29 juillet 1881 réprimant le délit imputé, elle ne laisse aucune incertitude sur son objet exact ni ne peut provoquer, dans l’esprit de l’intéressé, aucun doute sur les faits qui lui sont reprochés, peu important la référence à titre subsidiaire à l’article 1382 du code civil, la cour d’appel a violé le texte susvisé ».

Les conséquences de ces assouplissements sont plus que procédurales : en désapprouvant les juges du fond qui appliquent les solutions dégagées depuis près de quinze ans, ces arrêts peuvent laisser présager un retour larvé du droit civil en matière de presse, dès lors qu’elles dénient à la loi de 1881 toute vocation exclusive à régir la matière, ce qui constituerait une rupture évidente avec notre tradition juridique et la jurisprudence de Strasbourg.

Toutefois, il convient de relever que la chambre a fermement refusé de transmettre au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité relative à la prescription trimestrielle de l’action en réparation des abus de presse, et est revenue à cette occasion à une définition plus rigoureuse de l’acte interruptif de prescription49.

Comme l’énonce le professeur Christophe Bigot :

« Il était à craindre que, poursuivant dans sa logique, la première chambre civile soit tentée de poursuivre son travail de déconstruction à l’occasion d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur la prescription. Il n’en a rien été. Au contraire, la chambre affiche clairement sa volonté de conforter la prescription trimestrielle prévue pour les infractions à la loi du 29  juillet 1881 et, par là même, conforte la cohérence et les grands équilibres de cette loi. Une parenthèse malheureuse est-elle en train de se refermer ? On peut le penser, ou, à tout le moins, l’espérer »50.

La première chambre ne semble pas encore avoir franchi le pas en réassignant à la responsabilité civile de droit commun un rôle subsidiaire en matière de réparation des abus de presse, quoi qu’en disent certains auteurs51.

46 F. Fourment, commentaire sous 1re Civ., 3 février 2011, Gazette du Palais, 16 juin 2011, n° 167, p. 12.47 E. Dreyer, « Le droit de la presse entre douceur et fermeté », note sous 1re Civ., 3 février 2011, JCP 2011, éd. G, no 14, 4 avril

2011, n° 376.48 1re Civ., 26 janvier 2012, pourvoi n° 10-27.107, inédit.49 1re Civ., 5 avril 2012, pourvoi n° 11-25.290, précité.50 C. Bigot, « La cour de cassation conforte la prescription trimestrielle en matière de presse », Dalloz 2012, p. 1588.51 « La haute juridiction a restauré la fonction subsidiaire de la responsabilité civile  : elle a admis que d’autres abus de liberté

d’expression peuvent exister que ceux prévus et réprimés dans la loi de 1881 » : E. Dreyer, « Le procès civil de la presse entre douceur et fermeté », JCP 2011, éd. G, n° 14, 4 avril 2011, 376, commentaire sous 1re Civ., 3 février 2011.

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Bulletin d’informationArrêt publié intégralement

•15 avril 2013

Certes, des arrêts paraissent ouvrir à nouveau le droit de la presse aux règles du droit civil, mais ils restent encore peu nombreux et l’analyse de la jurisprudence de la première chambre civile ne permet pas encore de conclure au retour de l’application de l’article 1382 du code civil en matière de presse.

Au contraire, semble-t-il, par arrêt du 6  octobre  2011, publié au Bulletin, la chambre a tenu à réaffirmer l’autonomie et l’exclusivité de la loi du 29 juillet 1881 en matière d’abus de presse :

« Vu l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 ;

[...]

Attendu que, pour rejeter le moyen de défense de M.  X… tendant à l’application aux faits litigieux des dispositions de la loi du 29 juillet 1881, l’arrêt attaqué énonce que le contenu du blog de M. X…, qui a agi de façon anonyme et sous une présentation trompeuse, cherche effectivement à discréditer M. Y… auprès des électeurs, mais que cette entreprise ne repose que sur une présentation générale le tournant en ridicule à travers le prisme caricatural d’une vision orientée et partiale de sa politique locale ou de sa personnalité, sans imputer spécialement au maire, ou au candidat, de faits précis de nature à porter, par eux-mêmes, atteinte à son honneur ou à sa considération ;

Qu’en statuant ainsi alors que, dans son assignation, M. Y… reprochait à M. X… de l’avoir dénigré dans des termes de nature à lui causer un préjudice et que les abus de la liberté d’expression ne peuvent être réprimés que par la loi du 29 juillet 1881, la cour d’appel a violé le texte susvisé »52.

Mais réaffirmer le principe de la seule application des dispositions de la loi du 29 mai 1881 au fond du litige et assouplir dans le même temps de manière significative les règles procédurales relatives à la fixation des termes du litige ne constitue-t-il pas une incohérence ou, à tout le moins, un risque majeur de confusion sur l’application des règles essentielles à l’exercice d’une liberté fondamentale ?

L’arrêt de rébellion aujourd’hui soumis à la Cour témoigne du malaise ressenti à cet égard et ce pourvoi offre l’occasion de réaffirmer le principe essentiel de l’application unique et entière des dispositions de la loi du 29 juillet 1881 en matière d’abus de liberté d’expression.

Certes, il peut paraître choquant que le formalisme exigé par ce texte constitue une série d’obstacles redoutables pour la victime de tels abus, mais un pareil déséquilibre dans la situation des parties est justifié, selon un auteur, par le fait qu’«  il ne faut pas oublier que les poursuites en matière de presse constituent des dérogations au droit d’expression de la pensée  »53, même si, pour d’autres, «  La généralité de la faute constitue un progrès immense par rapport à l’énumération des délits civils romains et, de façon plus contemporaine, des “torts” britanniques [...] Comment expliquer qu’un dommage reste sans réparation alors qu’il ne résulte pas d’un cas de force majeure, du fait de la victime ou d’un tiers, mais bien d’un exercice illégitime de la liberté d’expression imputable à une personne clairement identifiée ?»54

Au détriment du respect des droits de la défense d’une liberté essentielle, la première chambre entend-elle réhabiliter la procédure civile et le droit civil dans le procès de presse  ? C’est ce que dénoncent certains auteurs, c’est ce que nous n’envisageons pas.

En admettant la validité subsidiaire du visa de l’article 1382 (arrêt du 3 février 2011) et en s’éloignant de la rigueur des prescriptions de l’article 53 de la loi, la première chambre est-elle en passe de « déconstruire » l’uniformisation du droit de la presse opérée depuis plus de vingt ans ?

Il ne nous semble pas que l’atteinte à la liberté d’expression, que protège et encadre la loi de 1881, soit réductible à un simple «  fait quelconque  », qui se verrait ainsi également sanctionné sur le fondement de l’article 1382 du code civil.

Sans avoir atteint l’apogée d’un principe fondamental reconnu par les lois de la République, les principes posés par loi de 1881 gravitent désormais dans une sphère constitutionnelle, ainsi qu’ont pu le démontrer les décisions du Conseil constitutionnel déjà citées.

Le poids du temps, la construction méthodique de jurisprudences au niveau national comme international, sont parvenus sinon à sacraliser la loi de 1881, au moins à conforter les équilibres posés.

On ne voudrait pas croire que le nouveau chemin dessiné par la première chambre civile ne porte subrepticement atteinte à cet équilibre par la recherche d’une simplification procédurale.

L’information précise de la personne citée (par l’exigence de qualification), le jeu des moyens de défenses spécifiques suivant la qualification des faits (provocatoire ou de bonne foi) comme les règles particulières de prescription s’expriment et se déclinent en une procédure organisée, elle-même garante d’un équilibre trouvé.

Il y a lieu de craindre que les évolutions imprimées par la jurisprudence de la première chambre civile ne conduisent à un alignement du contentieux sur le régime procédural civil de droit commun. Mais ni l’assignation de l’article 56 du code de procédure civile, ni l’exigence de présenter ses moyens et arguments, ni le temps d’une mise en état ne parviendront, mieux que la loi 1881, à maintenir l’équilibre entre liberté d’expression et répression de ces abus.

En l’absence d’évolution de la jurisprudence européenne fragilisant l’édifice de la loi 1881, ou de questionnements contemporains sur le droit de la presse invitant à redéfinir les équilibres trouvés, la relecture

52 1re Civ., 6 octobre 2011, pourvoi no 10-18.142, Bull. 2011, I, no 159.53 Rép. pén. Dalloz, § 524.54 E. Dreyer, « Disparition de la responsabilité civile en matière de presse », Dalloz 2006, précité.

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15 avril 2013Arrêt publié intégralement

•Bulletin d’information

opérée par la première chambre civile de la jurisprudence de l’assemblée plénière de 2002 s’interprète plus comme la résurgence d’une position ancienne - et que nous redoutons - que comme la résultante d’exigences nouvelles.

La première chambre civile s’est engagée dans une « voie particulièrement aventureuse, consistant à maintenir formellement l’application des règles procédurales de la loi sur la presse devant la juridiction civile, tout en les vidant de leur substance, entérinant ainsi une protection des moyens de défense à deux vitesses, à rebours des décisions rendues pendant plus de quinze années tendant à l’uniformisation des pratiques pénales et civiles »55.

M.  Bigot relève la «  contradiction interne fondamentale  » du raisonnement de la chambre dans l’arrêt du 8 avril : la chambre ne peut « à la fois réaffirmer l’application de l’article 53 de la loi, rappeler que l’assignation doit mettre le défendeur en mesure de préparer utilement sa défense et, en même temps, admettre pour les mêmes faits une double qualification d’injure et de diffamation ».

Comme d’autres auteurs, M. Bigot espère que l’assemblée plénière mettra fin à « l’insécurité maximale » qui règne aujourd’hui sur les actions en réparation introduites devant les juridictions civiles. En outre, d’après lui, le « corpus de règles de procédure qui imprime à la loi de la presse son rigorisme n’est pas une montagne »56.

Il convient de relever que les juges du fond résistent aux soubresauts qui agitent actuellement la première chambre civile.

Par exemple, la cour d’appel de Paris, par un arrêt du 10 septembre 2010, a considéré que «  l’application aux mêmes faits d’une telle double qualification [ici articles  1382 et 29 loi 1881] en méconnaissance des prescriptions de l’article 53 de la loi du 29  juillet 1881, qui fait ainsi grief aux droits de la défense, doit être sanctionnée par la nullité de l’assignation »57.

L’occasion est donc offerte de donner un signal fort de lisibilité et de prévisibilité de notre droit de la presse à l’ensemble de la communauté des juristes et d’assurer notre démocratie du constant souci de la Cour de cassation de protéger l’exercice de nos libertés fondamentales.

Sous couvert d’une problématique purement procédurale, ce sont donc bien les garanties offertes par un État démocratique à l’exercice de la liberté de la presse qui sont en jeu.

L’abolition de certaines contraintes et exigences, s’agissant de l’acte introductif de l’instance civile, aboutit, certes indirectement mais incontestablement, à limiter l’exercice effectif de cette liberté, et ce, de manière non convaincante, pour reprendre la formule choisie par la Cour de Strasbourg.

En rejetant la première branche du moyen, l’assemblée plénière rétablira la prééminence de la loi protectrice du 29 juillet 1881 sur une de ses dispositions essentielles relative à l’acte introductif d’instance et à la prohibition pour des expressions uniques, même séparées dans le temps, de qualifications cumulatives ou alternatives.

Cette solution ne concerne pas l’argument avancé dans la deuxième branche, qui pourrait ouvrir la voie à une cassation partielle, la jurisprudence, tant pénale que civile, faisant obligation au juge d’apprécier la régularité de la citation ou de l’assignation à l’égard de chacun des faits articulés.

La question qui demeure en revanche est celle de l’indivisibilité de l’ensemble des propos critiqués, qui semble bien, au cas d’espèce, exister.

55 C. Bigot, « La Cour de cassation remet en cause l’uniformisation des procédures civile et pénale en matière de presse », Dalloz 2010, p. 1673.

56 C. Bigot, « La Cour de cassation remet en cause l’uniformisation […] », précité.57 CA Paris, 10 septembre 2010, RG no 09/23995.

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Bulletin d’informationQuestion prioritaire de constitutionnalité

•15 avril 2013

II. - ARRÊTS DES CHAMBRES STATUANT EN MATIÈRE DE QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITÉ

No 588

Question prioritaire de constitutionnalitéCode de la santé publique. - Article L. 4161-1. - Légalité pénale. - Article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789. - Article 34 de la Constitution de 1958. - Non-lieu à renvoi devant le Conseil constitutionnel. - Caractère sérieux. - Défaut.

Attendu que la question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :

«  L’article  L.  4161-1 du code de la santé publique porte-t-il atteinte aux droits et libertés garantis par I’article  34 de la Constitution, I’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et le principe de légalité des délits ? »

Attendu que la disposition contestée constitue le fondement des poursuites ;

Qu’elle n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel ;

Mais attendu que la question, ne portant pas sur l’interprétation d’une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n’aurait pas encore eu l’occasion de faire application, n’est pas nouvelle ;

Et attendu que la question posée ne présente pas, à l’évidence, un caractère sérieux, dès lors qu’en renvoyant, pour partie, sous le contrôle du juge pénal, la définition des actes médicaux réservés aux médecins à une liste fixée par un texte réglementaire, la disposition légale critiquée incrimine en termes clairs et précis les différents modes d’exercice illégal de la médecine ;

D’où il suit qu’il n’y a pas lieu de renvoyer la question au Conseil constitutionnel ;

Par ces motifs :

DIT N’Y AVOIR LIEU À RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité.

Crim. ‑ 4 décembre 2012. NON-LIEU À RENVOI AU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

No 12-90.059. - TGI Evry, 11 septembre 2012.

M. Louvel, Pt. - Mme Harel-Dutirou, Rap. - M. Salvat, Av. Gén. - SCP Gadiou et Chevallier, SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, Av.

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15 avril 2013Arrêts des chambres

•Bulletin d’information

III. - TITRES ET SOMMAIRES D’ARRÊTS

ARRÊTS DES CHAMBRES

No 589

Accident de la circulationVéhicule à moteur. - Implication. - Exclusion. - Cas.

La seule présence d’un véhicule sur les lieux d’un accident de la circulation ne suffit pas à caractériser son implication au sens de l’article premier de la loi no 85-677 du 5 juillet 1985.

Dès lors viole ce texte, en se déterminant par des motifs impropres à caractériser l’implication, la cour d’appel qui, pour dire un véhicule impliqué dans un accident, énonce qu’il se trouvait dans la file de voitures concernées par la manœuvre de dépassement fautive et qu’il a été victime de cet accident pour avoir reçu des projections de liquide de batterie provenant de véhicules percutés et impliqués.

2e Civ. ‑ 13 décembre 2012. CASSATION PARTIELLE

No 11-19.696. - CA Fort-de-France, 13 mai 2011.

Mme  Flise, Pt.  - Mme  Fontaine, Rap.  - M.  Lautru, Av. Gén.  - SCP Blanc et Rousseau, SCP Roger et Sevaux, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP  Potier de la Varde et Buk-Lament, Me Le Prado, Av.

Un commentaire de cette décision est paru au Recueil Dalloz, no  1, 10  janvier  2013, Actualité/droit civil, p.  12, note Inès Gallmeister («  Accident de la circulation  : implication du véhicule  »). Voir également la Gazette du Palais, no  37-38, 6-7  février  2013, Jurisprudence, p.  9 à 11, note Sandrine Tisseyre (« Vers un encadrement de la notion d’implication  »), cette même revue, no  44-45, 13-14  février  2013, Chronique de jurisprudence de droit de la responsabilité civile, p.  24, note Mustapha Mekki («  Être concerné sans être impliqué  »), et la Revue Lamy droit civil, no  101,  février  2013, Actualités, no 4973, p. 24-25, note Gaëlle Le Nestour Drelon (« De la notion d’implication des véhicules »).

No 590

Action civileRecevabilité. - Société. - Liquidateur judiciaire. - Abus de biens sociaux. - Qualité pour agir.

Les dispositions de l’article L. 641-9, II, du code de commerce ne font pas obstacle à l’exercice, par le liquidateur, des actions en dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant des infractions d’abus de biens sociaux commises par les dirigeants des personnes morales en liquidation judiciaire.

Crim. ‑ 5 décembre 2012. REJET

No 11-85.838. - CA Aix-en-Provence, 22 juin 2011.

M. Louvel, Pt. - Mme Ract-Madoux, Rap. - M. Liberge, Av. Gén. - SCP Piwnica et Molinié, Av.

Un commentaire de cette décision est paru au Recueil Dalloz, no 44, 27 décembre 2012, Actualité/droit des affaires, p. 2958 («  Liquidation judiciaire  : portée du dessaisissement sur les pouvoirs des dirigeants  »). Voir également la revue Droit des sociétés, no  2,  février  2013, commentaire no  36, p.  43 à 45, note Renaud Salomon («  Recevabilité de l’action civile du liquidateur  »), et la Revue des procédures collectives, no  1,  janvier-février  2013, Études, no  1, p.  7 à 9, note Florence Petit («  Actualité jurisprudentielle - 16  octobre - 15 décembre 2012 »), spéc. no 8, p. 8.

No 591

Alsace‑MoselleContrat de travail. - Repos et congés. - Repos dominical. - Inobservation par l’employeur.  - Procédure de référé de l’inspecteur du travail.  - Domaine d’application.  - Détermination. - Portée.

Aux termes de l’article L. 3134-15 du code du travail, disposition particulière aux départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, l’inspecteur du travail peut, nonobstant toutes poursuites pénales, saisir en référé le juge judiciaire pour voir ordonner toutes mesures propres à faire cesser, dans les établissements de vente au détail et de prestations de services au consommateur, l’emploi illicite de salariés en infraction aux articles L. 3134-10 à L. 3134-12.

Selon l’article L. 3134-11 du même code, lorsqu’il est interdit, en application des articles L. 3134-4 à L. 3134-9, d’employer des salariés dans les exploitations commerciales, il est également interdit, durant ces jours, de procéder à une exploitation industrielle, commerciale ou artisanale dans les lieux de vente au public.

Il en résulte que le pouvoir reconnu à l’inspecteur du travail peut s’exercer dans tous les cas où, alors que l’emploi dans l’établissement de salariés le dimanche est interdit, il est procédé néanmoins à une exploitation industrielle, commerciale ou artisanale dans les lieux de vente au public, quels que soient la taille de l’établissement ou le statut juridique des personnes qui y travaillent.

Viole les textes susvisés la cour d’appel qui, saisie par un inspecteur du travail d’Alsace-Moselle d’une demande de fermeture dominicale d’un magasin exploité le dimanche par

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Bulletin d’informationArrêts des chambres

•15 avril 2013

les cogérants d’une société en nom collectif, dit n’y avoir lieu à référé au motif inopérant tiré de l’absence de qualité de salarié de ces cogérants, alors qu’il résultait de ses propres constatations que l’établissement, où le travail dominical était interdit, était cependant ouvert tous les dimanches.

Soc. ‑ 12 décembre 2012. CASSATION

No 11-13.100. - CA Metz, 2 novembre 2010.

M. Bailly, Pt (f.f.). - M. Blatman, Rap. - M. Finielz, P. Av. Gén. - SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Boré et Salve de Bruneton, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans La Semaine juridique, édition sociale, no  6, 5  février  2013, Jurisprudence, no 1067, p. 22-23, note Mickaël d’Allende (« Interdiction du travail dominical et pouvoirs de l’inspecteur du travail »). Voir également la Revue de jurisprudence sociale, no 3/13, mars 2013, décision no 235, p. 197-198.

No 592

1o Appel correctionnel ou de policeAppel du prévenu. - Appel sur les intérêts civils. - Prévenu en liquidation judiciaire personnelle. - Dessaisissement du débiteur. - Étendue. - Détermination. - Nécessité.

2o SociétéSociété en général.  - Liquidation judiciaire (loi du 26 juillet 2005). - Jugement. - Déclaration des créances. - Délai. - Point de départ. - Détermination. - Créance née d’une infraction pénale. - Portée.

1o Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés, pendant toute la durée de la liquidation judiciaire, par le liquidateur.

Doit être cassé l’arrêt de la cour d’appel qui déclare recevable l’appel sur intérêts civils du prévenu en liquidation judiciaire, sans rechercher si l’appel d’un jugement statuant sur des intérêts patrimoniaux était exclu de la mission du liquidateur.

2o Le délai de déclaration, par une partie civile, des créances nées d’une infraction pénale court à compter de la date de la décision définitive qui en fixe le montant, lorsque cette décision intervient après la publication du jugement d’ouverture.

Doit être cassé l’arrêt qui, pour rejeter la demande de la partie civile, retient que celle-ci n’a pas procédé à une déclaration au moins provisionnelle alors que sa créance est née antérieurement à la publication du jugement de liquidation judiciaire du prévenu.

Crim. ‑ 4 décembre 2012. CASSATION

No 12-80.559. - CA Saint-Denis de la Réunion, 14 décembre 2011.

M.  Louvel, Pt.  - M.  Fossier, Rap.  - M.  Cordier, Av. Gén.  - SCP Monod et Colin, Av.

No 593

Atteinte à l’autorité de l’ÉtatAtteinte à l’administration publique commise par des personnes exerçant une fonction publique. - Manquement au devoir de probité.  - Détournement de fonds publics ou privés.  - Éléments constitutifs.  - Élément matériel.  - Utilisation de subventions à des fins étrangères à celles prévues.

Justifie sa décision la cour d’appel qui déclare coupable de détournement de fonds publics le  maire qui utilise à des fins étrangères à celles prévues des subventions destinées à

financer un projet de coopération en affectant ces dernières au paiement de biens ou de prestations de services qui n’ont pas été commandés pour les besoins dudit programme.

Crim. ‑ 19 décembre 2012. REJET

No 11-88.190. - CA Aix-en-Provence, 25 octobre 2011.

M. Louvel, Pt. - Mme Labrousse, Rap. - M. Gauthier, Av. Gén. - Me Spinosi, SCP Gaschignard, Av.

No 594

Atteinte à l’autorité de l’ÉtatAtteinte à la paix publique.  - Intrusion dans un établissement d’enseignement scolaire.  - Éléments constitutifs.  - Établissement d’enseignement scolaire.  - Définition. - Établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel (non).

L’article  431-22 du code pénal vise le fait de pénétrer ou de se maintenir dans l’enceinte d’un établissement d’enseignement scolaire sans y être habilité ou y avoir été autorisé par les autorités compétentes, dans le but de troubler la tranquillité ou le bon ordre de l’établissement.

Selon l’article  premier du décret no  2009-1533 du 10 décembre 2009 et l’article premier du décret no 2012-715 du 7 mai 2012, l’École normale supérieure de Lyon, établissement d’enseignement supérieur, constitue un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel au sens de l’article  L.  711-1 du code de l’éducation, et non un établissement scolaire au sens du livre IV dudit code.

En conséquence, encourt la cassation l’arrêt d’une cour d’appel qui, pour condamner du chef d’intrusion dans un établissement d’enseignement scolaire un prévenu ayant pénétré et s’étant maintenu indûment dans l’enceinte de l’École normale supérieure de Lyon, énonce que cette institution, même qualifiée sur le plan administratif d’établissement public à caractère scientifique et culturel, n’en demeure pas moins un établissement scolaire (arrêts no 1 et 2).

Crim. ‑ 11 décembre 2012. CASSATION

Arrêt no 1 :

No 11-88.431. - CA Lyon, 18 octobre 2011.

M. Louvel, Pt. - Mme Divialle, Rap. - M. Berkani, Av. Gén.

Un commentaire de cette décision est paru dans la revue Droit pénal, no 2, février 2013, commentaire no 19, p. 34, note Michel Véron (« Les étudiants ne sont pas des élèves »).

Arrêt no 2 :

No 11-84.304. - CA Lyon, 15 novembre 2010.

M. Louvel, Pt. - M. Finidori, Rap. - M. Mathon, Av. Gén.

No 595

CassationDécisions susceptibles.  - Saisie immobilière.  - Adjudication.  - Jugement.  - Jugement ne statuant sur aucun incident. - Conditions. - Excès de pouvoir.

Le  pourvoi en cassation restant ouvert, en cas d’excès de pouvoir, contre le jugement d’adjudication, celui-ci ne peut faire l’objet d’un appel pour excès de pouvoir.

2e Civ. ‑ 6 décembre 2012. CASSATION SANS RENVOI

No 11-24.028. - CA Aix-en-Provence, 27 mai 2011.

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15 avril 2013Arrêts des chambres

•Bulletin d’information

Mme  Flise, Pt.  - M.  Liénard, Rap.  - M.  Mucchielli, Av. Gén.  - SCP Potier de la Varde et Buk-Lament, SCP Laugier et Caston, Av.

No 596

CassationPourvoi.  - Mémoire.  - Mémoire personnel.  - Détention provisoire. - Mémoire ne visant aucun texte et ne donnant à juger aucun moyen de droit. - Sanction. - Déchéance.

Équivaut à un défaut de présentation de mémoire dans le délai d’un mois de la réception du dossier par la Cour de cassation, sanctionné par la déchéance prévue par l’article 567-2 du code de procédure pénale, la production, par le demandeur qui s’est pourvu contre un arrêt rendu en matière de détention provisoire, d’un mémoire ne visant aucun texte de loi et n’offrant à juger aucun moyen de droit.

Crim. ‑ 11 décembre 2012. DÉCHÉANCE

No 12-86.576. - CA Paris, 14 septembre 2012.

M. Louvel, Pt. - M. Straehli, Rap. - M. Boccon-Gibod, P. Av. Gén.

No 597

CassationPourvoi. - Ouverture. - Exclusion. - Cas. - Décision du juge de l’exécution refusant de constater la vente amiable et ordonnant la poursuite de la procédure.

N’est pas susceptible de pourvoi le jugement par lequel le juge de l’exécution, qui avait précédemment autorisé la vente amiable, refuse de constater celle-ci et ordonne la poursuite de la procédure.

2e Civ. ‑ 6 décembre 2012. IRRECEVABILITÉ

No 11-26.683. - TGI Rodez, 17 juin 2011.

Mme  Flise, Pt.  - Mme  Leroy-Gissinger, Rap.  - M.  Mucchielli, Av. Gén. - Me Blondel, SCP Vincent et Ohl, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans la revue Procédures, no  2,  février  2013, commentaire no  42, p.  14-15, note Roger Perrot («  Jugement refusant de valider une vente amiable  »). Voir également la revue Droit et procédures, no  2,  février  2013, Jurisprudence commentée, p.  43 à 46, note Anne Leborgne, et le Recueil Dalloz, no 9, 7 mars 2013, Chroniques/Cour de cassation - deuxième chambre civile, p.  599 à 614, spéc. no  9, p.  608 à 610, note Lise Leroy-Gissinger et Fabienne Renault-Malignac (« Saisie immobilière  : vente amiable, quelles voies de recours ? »).

No 598

CassationPourvoi.  - Ouverture.  - Exclusion.  - Cas.  - Décision par défaut qualifiée à tort de contradictoire à signifier (non).

Est irrecevable le pourvoi formé contre un arrêt à tort qualifié de contradictoire à signifier, alors que le prévenu, non appelant, n’ayant pas eu connaissance de la citation à comparaître devant la juridiction du second degré, la décision a été rendue par défaut.

Dans ce cas, le délai d’opposition contre l’arrêt attaqué ne commence à courir qu’à compter de la date de notification de l’arrêt de la Cour de cassation.

Crim. ‑ 4 décembre 2012. IRRECEVABILITÉ

No 12-80.615. - CA Nîmes, 29 septembre 2011.

M.  Louvel, Pt.  - M.  Fossier, Rap.  - M.  Cordier, Av. Gén.  - Me Blondel, Av.

No 599

CassationPourvoi.  - Pourvoi devenu sans objet.  - Non-lieu à statuer. - Cas.

Devient sans objet, en application de l’article 606 du code de procédure pénale, le pourvoi formé à l’encontre de l’arrêt de la cour d’appel confirmant un jugement du tribunal correctionnel ayant renvoyé l’affaire et prolongé la détention du prévenu, dès lors que, postérieurement, le tribunal a à nouveau renvoyé l’affaire et renouvelé, dans les mêmes conditions, la prolongation de sa détention.

Crim. ‑ 4 décembre 2012. NON LIEU À STATUER

No 12-86.529. - CA Dijon, 26 septembre 2012.

M.  Louvel, Pt.  - Mme  Mirguet, Rap.  - M.  Cordier, Av. Gén.  - Me Bouthors, Av.

No 600

ChasseGibier.  - Dégâts causés aux récoltes.  - Sangliers ou grands gibiers.  - Régime spécial de responsabilité et d’indemnisation.  - Portée générale.  - Domaine d’application.  - Action en réparation des dommages de toute nature.

Le  régime spécial de responsabilité et d’indemnisation des dégâts matériels causés aux cultures et aux récoltes par un gibier quelconque et aux dommages qui en découlent, institué et organisé par les articles  L.  426-1 à L.  426-8 du code de l’environnement, a une portée générale et s’applique à toute action en réparation des dommages de toute nature, y compris celle fondée sur les articles 1382 et 1383 du code civil et celle fondée sur l’article 544 du même code, ainsi que sur le principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage.

2e Civ. ‑ 13 décembre 2012. CASSATION SANS RENVOI

No 11-27.538. - CA Pau, 9 septembre 2011.

Mme  Flise, Pt.  - M.  Grellier, Rap.  - M.  Lautru, Av. Gén.  - SCP Waquet, Farge et Hazan, Me Balat, Av.

No 601

Circulation routièreTitulaire du certificat d’immatriculation redevable pécuniairement. - Titulaire personne morale. - Représentant légal seul redevable.

En application de l’article L. 121-3, alinéa 3, du code de la route, lorsque le certificat d’immatriculation du véhicule est établi au nom d’une personne morale, la responsabilité pécuniaire prévue au premier alinéa de cet article  incombe au représentant légal de cette personne morale.

En conséquence, la citation doit être délivrée à la seule personne physique qui était, au moment des faits, le représentant légal de la personne morale titulaire du certificat d’immatriculation et qui, à ce titre, est pécuniairement redevable de l’amende encourue (arrêts no 1 et 2).

Crim. ‑ 19 décembre 2012. REJET

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42•

Bulletin d’informationArrêts des chambres

•15 avril 2013

Arrêt no 1 :

No  12-80.861.  - Juridiction de proximité de Perpignan, 9 janvier 2012.

M.  Louvel, Pt.  - Mme  Radenne, Rap.  - M.  Raysséguier, P. Av. Gén.

Arrêt no 2 :

No  12-81.607.  - Juridiction de proximité de Perpignan, 13 février 2012.

M. Louvel, Pt. - M. Finidori, Rap. - M. Raysséguier, P. Av. Gén.

Un commentaire de cette décision est paru dans la revue Droit pénal, no  2,  février  2013, commentaire no  24, p.  38-39, note Jacques-Henri Robert (« Distinction procédurale de la personne morale et de la personne de son dirigeant »).

No 602CompétenceDécision sur la compétence. - Contredit. - Voie de l’appel seule ouverte.  - Contredit formé à tort.  - Application des règles de l’appel.  - Respect des modalités et délai prescrits à l’article  82 du code de procédure civile.  - Nécessité.

La règle, édictée à l’article 91 du code de procédure civile, selon laquelle lorsqu’une cour d’appel est saisie à tort d’un contredit formé contre une ordonnance de référé, elle n’en demeure pas moins saisie, l’affaire étant alors instruite et jugée selon les règles applicables à l’appel, ne s’applique qu’à la condition que le contredit ait été formé selon les modalités et dans le délai prescrits à l’article 82 du même code.

2e Civ. ‑ 6 décembre 2012. CASSATION SANS RENVOI

No 11-24.743. - CA Aix-en-Provence, 9 juin 2011.

Mme Flise, Pt. - Mme Nicolle, Rap. - M. Mucchielli, Av. Gén. - SCP Vincent et Ohl, SCP de Nervo et Poupet, Av.

No 603

Conflit de juridictionsCompétence internationale. - Règlement (CE) no 44/2001 du 22 décembre 2000. - Article 19, § 2. - Compétence en matière de contrats individuels de travail.  - Règles applicables.  - Détermination.  - Critère.  - Lieu habituel d’exécution du travail.

Une cour d’appel, ayant constaté que l’employeur gère un programme de propriété partagée d’une quinzaine d’avions d’affaires immatriculés au Luxembourg, dont il assure l’exploitation et l’entretien et qu’il met à la disposition des copropriétaires avec des pilotes, afin de les amener à la destination de leur choix en Europe, ou en dehors de l’Europe, que les carnets de vol produits par le salarié font apparaître un nombre extrêmement réduit de vols à destination, ou en partance, du Luxembourg et, en revanche, un nombre majoritaire de vols en lien avec le territoire français, que les bulletins de paye révèlent que le salarié a toujours été domicilié en France, que l’employeur reconnaît d’ailleurs, de manière générale, que, parmi les vingt aéroports les plus fréquentés, la part du Luxembourg n’a représenté que 1,25 % des vols de ses avions, alors que celle de la France a atteint 45,50 %, le reste des vols ayant été répartis entre la Suisse (27,65  %), l’Italie (2,84 %), la Belgique (2,17 %) et la Grande-Bretagne (2,14 %), a, en retenant la compétence de la juridiction française, fait une exacte application des dispositions de l’article 19 du règlement (CE) no  44/2001 telles qu’interprétées par la Cour de justice de l’Union européenne, selon laquelle, lorsque l’obligation du salarié d’effectuer les activités convenues s’exerce dans plus

d’un État contractant, le lieu où il accomplit habituellement son travail est l’endroit où, ou à partir duquel, compte tenu des circonstances du cas d’espèce, il s’acquitte en fait de l’essentiel de ses obligations à l’égard de son employeur.

Soc. ‑ 4 décembre 2012. REJET

No 11-27.302. - CA Paris, 29 septembre 2011.

M. Lacabarats, Pt. - M. Huglo, Rap. - M. Weissmann, Av. Gén. - SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans la Revue de droit du travail, no  1,  janvier  2013, Actualités, p. 7 («  Conflit de juridictions  : notion de lieu d’accomplissement habituel du travail  »). Voir également la Revue de jurisprudence sociale, no 2/13, février 2013, décision no 161, p. 136 à 138.

No 604

Contrat de travail, exécutionEmployeur.  - Pouvoir de direction.  - Étendue.  - Tenue vestimentaire des salariés. - Port obligatoire d’une tenue de travail. - Entretien du vêtement de travail. - Charge. - Limites. - Détermination. - Portée.

Si la cour d’appel, qui a relevé que l’employeur imposait le port de tenues de travail aux salariés, en a déduit à bon droit qu’il devait assurer l’entretien de ces tenues, elle ne pouvait pour autant lui prescrire de mettre en place un système de ramassage, de lavage et de repassage, chaque semaine, des tenues sales et de remise à disposition, la semaine suivante, des tenues propres dans des casiers prévus à cet effet, sans porter atteinte à son pouvoir de direction.

Soc. ‑ 12 décembre 2012. CASSATION PARTIELLE SANS RENVOI

No 11-26.585. - CA Pau, 29 septembre 2011.

M. Bailly, Pt (f.f.). - Mme Mariette, Rap. - M. Finielz, P. Av. Gén. - SCP  Célice, Blancpain et Soltner, SCP  Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans la Revue de jurisprudence sociale, no  2/13, février  2013, décision no  124, p.  112. Voir également La Semaine juridique, édition sociale, no 8, 19  février 2013, Jurisprudence, no 1089, p. 27 à 29, note Catherine Puigelier (« Entretien des tenues de travail  : obligation de prise en charge des frais par l’employeur  mais liberté d’organisation »), et la Revue de droit du travail, no 2, février 2013, Actualités, p. 75, note Frédéric Guiomard (« Remboursement des frais professionnels »).

No 605

Contrat de travail, exécutionEmployeur.  - Pouvoir disciplinaire.  - Mise à pied.  - Mise à pied conservatoire.  - Procédure de licenciement.  - Simultanéité.  - Défaut.  - Cas.  - Faits reprochés au salarié donnant lieu à l’exercice de poursuites pénales. - Conditions. - Détermination. - Portée.

Il résulte des articles  L.  1332-3 et L.  1332-4 du code du travail que, lorsque les faits reprochés au salarié donnent lieu à l’exercice de poursuites pénales, l’employeur peut, sans engager immédiatement une procédure de licenciement, prendre une mesure de mise à pied conservatoire si les faits le justifient.

Soc. ‑ 4 décembre 2012. CASSATION

No 11-27.508. - CA Metz, 4 octobre 2011.

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15 avril 2013Arrêts des chambres

•Bulletin d’information

M. Lacabarats, Pt. - M. Maron, Rap. - M. Weissmann, Av. Gén. - SCP Didier et Pinet, Me Foussard, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans la Revue de droit du travail, no 1, janvier 2013, Actualités, p. 7 (« Poursuites pénales et mise à pied conservatoire »). Voir également la Revue de jurisprudence sociale, no 2/13, février 2013, décision no 119, p.  110, la revue Droit social, no  2,  février  2013, Actualités, p. 181 à 183, note Jean Mouly (« La mise à pied conservatoire prononcée à l’occasion de poursuites pénales est-elle une mise à pied comme les autres  ?  »), et La Semaine juridique, édition sociale, no 9, 26  février 2013, Jurisprudence, no 1100, p.  30 à 32, note Véronique Cohen-Donsimoni («  Mise à pied conservatoire et poursuites pénales : un régime particulier »).

No 606

Contrat de travail, exécutionMaladie.  - Maladie ou accident non professionnel.  - Inaptitude au travail.  - Inaptitude consécutive à la maladie.  - Reclassement du salarié.  - Obligation de l’employeur. - Exécution. - Loyauté. - Manquement. - Cas.

Manque à son devoir d’exécution loyale de l’obligation de reclassement l’employeur qui offre au salarié déclaré inapte au poste de footballeur professionnel deux emplois dont la rémunération est inférieure au SMIC.

Soc. ‑ 5 décembre 2012. CASSATION

No 11-21.849. - CA Rennes, 24 mai 2011.

M.  Lacabarats, Pt.  - M.  Flores, Rap.  - M.  Foerst, Av. Gén.  - SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP Waquet, Farge et Hazan, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans la Revue de jurisprudence sociale, no  2/13,  février  2013, décision no  110, p. 104-105.

No 607

Contrat de travail, exécutionMaladie du salarié.  - Accident du travail ou maladie professionnelle.  - Inaptitude au travail.  - Obligation de reclassement.  - Délai d’un mois.  - Absence de reclassement et de licenciement.  - Sanction.  - Reprise du paiement du salaire.  - Limites.  - Cas.  - Période non travaillée et non rémunérée d’un contrat à temps partiel annualisé. - Portée.

Si l’employeur reste tenu de rechercher un reclassement au salarié à son poste de travail après expiration du délai d’un mois suivant la constatation de l’inaptitude, il n’a pas à verser le salaire correspondant à l’emploi occupé par le salarié pendant la période non travaillée et non rémunérée d’un contrat à temps partiel annualisé.

Soc. ‑ 12 décembre 2012. CASSATION PARTIELLE SANS RENVOI

No 11-23.998. - CA Bastia, 29 juin 2011.

M. Lacabarats, Pt. - Mme Brinet, Rap. - M. Aldigé, Av. Gén. - SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Lyon-Caen et Thiriez, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans la Revue de jurisprudence sociale, no  2/13,  février  2013, décision no  112, p. 106.

No 608

Contrat de travail, formationDéfinition. - Contrat de travail apparent. - Caractérisation. - Appréciation. - Applications diverses. - Délivrance d’une déclaration unique d’embauche. - Portée.

En présence d’un contrat de travail apparent, il incombe à celui qui invoque son caractère fictif d’en rapporter la preuve.

La délivrance de la déclaration unique d’embauche, prévue par l’article  R.  1221-1 du code du travail, crée l’apparence d’un contrat de travail.

En conséquence, justifie légalement sa décision le conseil de prud’hommes qui, ayant constaté que le salarié avait produit aux débats la déclaration unique d’embauche établie à son profit par la société, décide que celle-ci, n’ayant pas établi le caractère fictif du contrat de travail apparent, a la qualité d’employeur.

Soc. ‑ 5 décembre 2012. CASSATION PARTIELLE

No 11-22.769. - CPH Saint-Germain-en-Laye, 27 mai 2011.

M. Lacabarats, Pt. - Mme Ducloz, Rap. - M. Foerst, Av. Gén. - SCP Coutard et Munier-Apaire, SCP Bouzidi et Bouhanna, Av.

Un commentaire de cette décision est paru au Recueil Dalloz, no 2, 17 janvier 2013, Chroniques/Cour de cassation - chambre sociale, p.  114 à 123, spéc. no  3, p.  118-119, note Fanélie Ducloz (« Contrat de travail apparent  : déclaration unique d’embauche »). Voir également la Revue de jurisprudence sociale, no 2/13, février 2013, décision no 91, p. 95-96.

No 609

Contrat de travail, ruptureLicenciement. - Cause. - Cause réelle et sérieuse. - Motifs invoqués par l’employeur.  - Appréciation.  - Énonciation des motifs dans la lettre de licenciement. - Exception. - Inaptitude consécutive à une maladie ou un accident non professionnel.  - Licenciement pour autre cause.  - Détermination. - Portée.

A légalement justifié sa décision la cour d’appel qui, après avoir constaté que l’employeur, sans demander l’organisation d’une seconde visite médicale devant le médecin du travail qui avait déclaré le salarié inapte à son poste à l’issue d’une première visite, avait licencié l’intéressé pour un motif autre que l’inaptitude, a, tirant les conséquences légales de cette méconnaissance des dispositions d’ordre public des articles  L.  1226-2 et R.  4624-31 du code du travail, excluant de s’en tenir aux motifs énoncés par la lettre de licenciement, déclaré le licenciement du salarié sans cause réelle et sérieuse.

Soc. ‑ 5 décembre 2012. REJET

No 11-17.913. - CA Aix-en-Provence, 17 mars 2011.

M. Lacabarats, Pt. - Mme Wurtz, Rap. - M. Foerst, Av. Gén. - SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, Me Spinosi, Av.

Un commentaire de cette décision est paru au Recueil Dalloz, no 2, 17 janvier 2013, Chroniques/Cour de cassation - chambre sociale, p. 114 à 123, spéc. no 7, p. 122-123, note Emmanuelle Wurtz («  Rupture du contrat de travail entre deux visites de reprise  »). Voir également la Revue de jurisprudence sociale, no 2/13, février 2013, décision no 108, p. 102 à 104.

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Bulletin d’informationArrêts des chambres

•15 avril 2013

No 610

Contrat de travail, ruptureLicenciement économique.  - Cause.  - Cause réelle et sérieuse. - Motif économique. - Défaut. - Effets. - Contrat de transition professionnelle.  - Absence de cause.  - Portée.

En l’absence de motif économique de licenciement, le contrat de transition professionnelle n’a pas de cause et l’employeur est alors tenu à l’obligation de préavis et des congés payés afférents, sauf à tenir compte des sommes déjà versées.

Encourt la cassation l’arrêt qui, pour débouter un salarié de sa demande en paiement d’une indemnité compensatrice de préavis, retient que la totalité de l’indemnité de préavis a été versée par l’employeur à Pôle emploi, alors que seules les sommes versées par l’employeur au salarié pouvaient être déduites de la créance au titre de l’indemnité de préavis.

Soc. ‑ 12 décembre 2012. CASSATION PARTIELLE

No 11-23.421. - CA Nancy, 10 décembre 2010.

M.  Bailly, Pt (f.f.).  - M.  Flores, Rap.  - M.  Finielz, P.  Av.  Gén.  - Me Haas, SCP Boré et Salve de Bruneton, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans la Revue de jurisprudence sociale, no  2/13, février 2013, décision no 179, p. 149-150. Voir également La Semaine juridique, édition sociale, no  9, 26  février  2013, Jurisprudence, no  1101, p.  32 à 34, note Jean-Marc Albiol («  Licenciement pour motif économique : variations sur l’inexistence »).

No 611

1o Contrat de travail, ruptureLicenciement économique.  - Licenciement collectif.  - Plan de sauvegarde de l’emploi.  - Contenu.  - Mesures réservées à certains salariés.  - Avantage.  - Égalité de traitement. - Appréciation. - Office du juge. - Portée.

2o Contrat de travail, exécutionMaladie.  - Maladie ou accident non professionnel.  - Inaptitude au travail.  - Inaptitude consécutive à la maladie.  - Reclassement du salarié.  - Obligation de l’employeur. - Moment. - Détermination. - Portée.

1o Une cour d’appel, ayant retenu que les salariés qui bénéficient d’une pré-retraite ou d’une pension d’invalidité se trouvent, après leur licenciement, dans une situation de précarité moindre que les salariés en activité, qui perdent, après la rupture de leur contrat de travail, l’intégralité de leur salaire et donc l’essentiel de leurs revenus, a pu décider que la différence de traitement quant à l’attribution d’une indemnité additionnelle de licenciement était justifiée.

2o Dès lors qu’il a connaissance du classement en invalidité deuxième catégorie d’un salarié au moment d’engager la procédure de licenciement pour motif économique ou pendant son déroulement, l’employeur est tenu, après avoir fait procéder à une visite de reprise, de lui proposer une offre de reclassement qui prenne en compte les préconisations du médecin du travail exprimées à l’issue de cette visite.

Une cour d’appel, constatant que, bien qu’ayant connaissance du classement du salarié en invalidité deuxième catégorie, l’employeur lui avait proposé une offre de reclassement sans que le médecin du travail, sollicité par le salarié, ait pu se prononcer définitivement sur son aptitude, en a déduit à bon droit qu’il avait ainsi manqué à ses obligations.

Soc. ‑ 5 décembre 2012. REJET

No 10-24.204 et 10-24.219. - CA Aix-en-Provence, 1er juillet 2010.

M.  Lacabarats, Pt.  - M.  Contamine, Rap.  - M.  Weissmann, Av. Gén.  - SCP  Gatineau et Fattaccini, SCP  Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans la Revue de droit du travail, no 1, janvier 2013, Actualités, p. 6, note Caroline Dechristé (« Exclusion d’une catégorie de salariés du bénéfice d’une indemnité additionnelle de licenciement »). Voir également la Revue de jurisprudence sociale, no 2/13, février 2013, décision no 103, p. 99-100.

No 612

Contrat de travail, ruptureLicenciement économique.  - Mesures d’accompagnement.  - Convention de reclassement personnalisé.  - Adhésion du salarié.  - Effets.  - Rupture du contrat de travail.  - Date.  - Expiration du délai de réflexion. - Exception. - Salarié protégé. - Prise d’effet de la rupture après autorisation par l’inspecteur du travail du licenciement. - Portée.

L’employeur est tenu de proposer au salarié qu’il envisage de licencier pour motif économique une convention de reclassement personnalisé.

Lorsque le salarié qui accepte cette convention bénéficie d’une protection, en raison du mandat qu’il exerce, la rupture du contrat de travail résultant de cette acceptation prend effet après que l’inspecteur du travail a autorisé le licenciement.

Soc. ‑ 4 décembre 2012. REJET

No 11-11.299. - CA Lyon, 26 novembre 2010.

M. Lacabarats, Pt. - Mme Lambremon, Rap. - M. Weissmann, Av. Gén.  - SCP  Coutard et Munier-Apaire, SCP  Gatineau et Fattaccini, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans la Revue de droit du travail, no  1,  janvier  2013, Actualités, p. 7, note Alain Moulinier (« CRP acceptée par un salarié protégé et chronologie des procédures  »). Voir également La Semaine juridique, édition entreprise et affaires, no  5, 31  janvier  2012, Études et commentaires, no  1082, p.  49-50, note Stéphae Béal et Cécile Terrenoire (« Proposition d’un CSP à un salarié protégé : aspects procéduraux  »), et la Revue de jurisprudence sociale, no 2/13, février 2013, décision no 144, p. 127-128.

No 613

Contrat de travail, rupturePrise d’acte de la rupture. - Prise d’acte par le salarié. - Prise d’acte par un salarié victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle. - Prise d’acte au cours d’une période de suspension du contrat de travail.  - Cause.  - Manquements reprochés à l’employeur.  - Manquements suffisament graves. - Nécessité. - Portée.

Ayant estimé que l’employeur d’un salarié avait commis des manquements suffisamment graves, une cour d’appel en a exactement déduit que la prise d’acte de la rupture de son contrat de travail par ce salarié, intervenue au cours d’une période de suspension consécutive à un accident du travail, produisait les effets d’un licenciement nul.

Soc. ‑ 12 décembre 2012. REJET

No 10-26.324. - CA Versailles, 2 septembre 2010.

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45•

15 avril 2013Arrêts des chambres

•Bulletin d’information

M. Lacabarats, Pt.  - Mme Vallée, Rap. - M. Aldigé, Av. Gén.  - SCP  Lyon-Caen et Thiriez, SCP  Peignot, Garreau et Bauer- Violas, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans la Revue de jurisprudence sociale, no  2/13,  février  2013, décision no  111, p. 105.

No 614

Élections professionnellesComité d’entreprise et délégué du personnel. - Candidat. - Liste de candidatures.  - Présentation au premier tour.  - Personne habilitée.  - Union syndicale.  - Union agissant pour un syndicat. - Conditions. - Adhésion du syndicat. - Adhésion conforme aux statuts. - Défaut. - Portée.

Ayant constaté que l’adhésion d’un syndicat, créé depuis moins de deux années, à une union syndicale devait, selon les statuts de cette dernière, être décidée par le collectif d’animation réuni en assemblée générale ou le congrès de l’union et alors qu’il n’était pas contesté qu’aucune de ces décisions n’était intervenue, viole les articles L. 2142-1, L. 2142-1-1 du code du travail, ensemble l’article 1134 du code civil, le tribunal qui valide le dépôt d’une liste de candidats aux élections professionnelles dans une entreprise et la nomination d’un représentant de la section  syndicale opérés par l’union en raison de l’adhésion d’un syndicat dont elle prétend exercer les prérogatives.

Soc. ‑ 5 décembre 2012. CASSATION PARTIELLE SANS RENVOI

No 12-14.366. - TI Dijon, 7 février 2012.

M. Bailly, Pt (f.f.).  - M. Béraud, Rap.  - Mme Lesueur de Givry, Av. Gén. - Me Balat, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans la Revue de jurisprudence sociale, no  2/13,  février  2013, décision no  139, p.  124-125. Voir également La Semaine juridique, édition sociale, no 10, 5 mars 2013, Jurisprudence, no 1116, p. 43-44, note Bernard Gauriau (« Conditions d’adhésion d’un syndicat à une union »).

No 615

Élections professionnellesComité d’entreprise et délégués du personnel. - Délégation unique du personnel.  - Candidat.  - Travailleurs mis à la disposition de l’entreprise.  - Conditions.  - Éligibilité en qualité de délégué du personnel. - Portée.

Aux termes de l’article L. 2326-1 du code du travail, dans les entreprises de moins de deux cents salariés, l’employeur peut décider que les délégués du personnel constituent la délégation unique du personnel au comité d’entreprise.

Il en résulte que les travailleurs mis à disposition d’une entreprise, qui remplissent les conditions fixées par l’article L. 2314-18-1 du code du travail pour être éligibles en qualité de délégué du personnel, peuvent, à ce même titre, en l’absence de dispositions légales y faisant obstacle, être candidats à la délégation unique du personnel.

Soc. ‑ 5 décembre 2012. CASSATION

No 12-13.828. - TI Paris 1er, 2 février 2012.

M. Bailly, Pt (f.f.).  - Mme Pécaut-Rivolier, Rap.  - Mme Lesueur de Givry Av. Gén. - SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Célice, Blancpain et Soltner, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans la Gazette du Palais, no  11-12, 11-12  janvier  2013, Chronique de jurisprudence de droit du travail et de la protection sociale,

p. 23-24, note Pierre Le Cohu (« Les salariés mis à disposition peuvent être éligibles à la délégation unique du personnel de l’entreprise utilisatrice  »). Voir également La Semaine juridique, édition sociale, no 4, 22  janvier 2013, Jurisprudence, no 1049, p. 31-32, note Emeric Jeansen (« Délégation unique du personnel : éligibilité des salariés mis à disposition »), la Revue de jurisprudence sociale, no 2/13, février 2013, décision no 149, p. 131-132, et la revue Droit social, no 3, mars 2013, Actualités, p. 279 à 281, note Daniel Boulmier (« Salarié mis à disposition : éligibilité aux élections de la délégation du personnel »).

No 616

EmploiTravailleurs privés d’emploi.  - Garantie de ressources.  - Allocation d’assurance. - Paiement. - Débiteur. - Employeur unique. - Caractérisation. - Portée.

C’est à bon droit que la cour d’appel, ayant constaté que le salarié avait eu un seul employeur, a retenu que sa situation ne relevait pas du champ d’application des articles  L.  5424-4 et R. 5424-2 du code du travail, dont les dispositions ne concernent que les hypothèses où le salarié privé d’emploi a été employé, pendant la période de référence visée par ces textes, par plusieurs employeurs.

Soc. ‑ 4 décembre 2012. REJET

No 11-23.498. - CA Lyon, 30 juin 2011.

M. Lacabarats, Pt. - Mme Terrier-Mareuil, Rap. - M. Weissmann, Av. Gén. - SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Boullez, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans la Revue de jurisprudence sociale, no  2/13,  février  2013, décision no  155, p. 134-135.

No 617

1o Garde à vueDroits de la personne gardée à vue.  - Assistance de l’avocat.  - Communication de certaines pièces de la procédure. - Défaut. - Sanction. - Nullité. - Exception. - Absence de demande expresse de l’avocat.

2o Crimes et délits flagrantsFlagrance.  - Définition.  - Indice apparent d’un comportement délictueux révélant l’existence d’infractions répondant à la définition de l’article  53 du code de procédure pénale. - Constatations suffisantes.

1o Justifie sa décision la chambre de l’instruction qui, après avoir relevé le refus de communication de l’intégralité de la procédure formulée par l’avocat d’une personne en garde à vue, retient qu’à défaut de demande subsidiaire, cette dernière ne peut ensuite présenter une demande d’annulation en faisant valoir qu’elle pouvait au moins prétendre à la communication des pièces de la procédure énumérées à l’article  63-4-1 du code de procédure pénale, dès lors qu’il appartient à l’avocat de la personne gardée à vue, qui peut consulter lesdites pièces, d’en faire la demande expresse.

2o Justifie sa décision la chambre de l’instruction qui, après avoir constaté que le mis en examen avait été trouvé par les agents des douanes détenteur de plusieurs kilogrammes de cannabis, énonce que la procédure ne pouvait alors qu’être suivie en flagrance, peu important que l’intéressé ou d’autres personnes mises en cause aient pu, préalablement, faire l’objet d’une surveillance policière.

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46•

Bulletin d’informationArrêts des chambres

•15 avril 2013

L’état de flagrance est en effet caractérisé dès lors qu’ont été relevés des indices apparents d’un comportement délicteux révélant l’existence d’une infraction répondant à la définition de l’article 53 du code de procédure pénale.

Crim. ‑ 18 décembre 2012. REJET

No 12-85.735. - CA Fort-de-France, 24 juillet 2012.

M.  Louvel, Pt.  - M.  Guérin, Rap.  - M.  Mathon, Av. Gén.  - SCP Le Bret-Desaché, Av.

Un commentaire de cette décision est paru au Recueil Dalloz, no  2, 17  janvier  2013, Actualité/droit pénal et procédure pénale, p. 90 (« Garde à vue : demande de communication de l’intégralité du dossier  »). Voir également la revue Procédures, no  3,  mars  2013, commentaire no  79, p.  24-25, note Anne-Sophie Chavent-Leclère («  Moyens de nullité  : approche rigoriste de la Cour de cassation »).

No 618Garde à vueDroits de la personne gardée à vue.  - Assistance de l’avocat.  - Défaut.  - Déclaration de culpabilité.  - Valeur probante des déclarations de la personne gardée à vue.  - Article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme.  - Compatibilité.  - Cas.  - Motifs fondés ni exclusivement ni même essentiellement sur les déclarations recueillies au cours des gardes à vue.

L’arrêt d’une cour d’assises qui déclare l’accusé coupable échappe à la critique dès lors que la motivation annexée à la feuille de questions ne se fonde ni exclusivement ni essentiellement sur les déclarations faites par l’intéressé en garde à vue sans l’assistance effective d’un avocat et sans avoir reçu notification du droit de se taire.

Crim. ‑ 12 décembre 2012. REJET

No 12-80.788. - Cour d’assises de la Loire, 13 janvier 2012.

M.  Louvel, Pt.  - M.  Castel, Rap.  - M.  Sassoust, Av. Gén.  - Me Spinosi, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans la revue Droit pénal, no 2,  février 2013, commentaire no 29, p. 45 à 48, note Albert Maron et Marion Haas (« Motifs et bouche cousue »). Voir également la revue Procédures, no 3, mars 2013, commentaire no 78, p. 23-24, note Anne-Sophie Chavent-Leclère (« Le pouvoir de consignation du président : entre bonne administration de la justice et manifestation d’opinion sur la culpabilité »).

No 619

InstructionPartie civile. - Plainte avec constitution. - Obligation pour le juge d’informer.  - Refus d’informer.  - Conditions.  - Détermination.

Les juridictions d’instruction qualifient librement les faits dont elles sont saisies et au regard desquels elles ont l’obligation d’informer.

Encourt dès lors la censure l’arrêt qui, pour dire n’y avoir lieu à informer sur la plainte avec constitution de partie civile, portée, contre personne non dénommée, du chef de favoritisme, contestant la légalité d’une convention de prestation de services signée par le directeur de cabinet du Président de la République et une société commerciale, retient, notamment, que le statut pénal du Chef de l’État s’oppose à toute investigation et que le délit de recel n’entre pas dans la saisine du juge d’instruction.

Crim. ‑ 19 décembre 2012. CASSATION SANS RENVOI

No 12-81.043. - CA Paris, 7 novembre 2011.

M. Louvel, Pt. - M. Rognon, Rap. - M. Boccon-Gibod, Av. Gén. - SCP Masse -Dessen et Thouvenin, Av.

Un commentaire de cette décision est paru au Recueil Dalloz, no  2, 17  janvier  2013, Actualité/droit pénal et procédure pénale, p. 89 («  Immunité du Président de la République : pas d’extension au directeur de cabinet »). Voir également le Recueil Dalloz, no 8, 28  février 2013, Études et commentaires, p. 551 à 555, note Olivier Décima et Stéphane Detraz («  Instruction préparatoire : refus d’informer »).

No 620

Jugements et arrêts par défautDéfaut.  - Partie civile non comparante et régulièrement citée.

L’article 410 du code de procédure pénale n’étant pas applicable à la partie civile, il doit, par application de l’article  487 du même code, être statué par défaut à l’égard de la partie civile régulièrement citée qui ne comparaît pas.

Crim. ‑ 18 décembre 2012. IRRECEVABILITÉ

No 12-80.292. - CA Paris, 15 novembre 2011.

M. Louvel, Pt.  - Mme Radenne, Rap.  - M. Berkani, Av. Gén.  - SCP Thouin-Palat et Boucard, Av.

No 621

Juridictions correctionnellesSaisine. - Convocation par procès-verbal. - Dessaisissement. - Renvoi du ministère public à mieux se pourvoir. - Décision définitive. - Reprise des poursuites. - Possibilité.

Lorsque, par un jugement définitif, le tribunal correctionnel s’est, même à tort, dessaisi sans statuer sur l’action publique en renvoyant le ministère public à mieux se pourvoir, le procureur de la République a la possibilité de reprendre les poursuites en ouvrant une information.

Crim. ‑ 12 décembre 2012. CASSATION SANS RENVOI

No 12-82.905. - CA Bordeaux, 20 mars 2012.

M. Louvel, Pt. - M. Castel, Rap. - M. Sassoust, Av. Gén.

Un commentaire de cette décision est paru dans la revue Droit pénal, no  2,  février  2013, commentaire no  30, p.  48-49, note Albert Maron et Marion Haas (« Cassation pour bien jugé »). Voir également la revue Procédures, no 3, mars 2013, commentaire no  79, p.  25-26, note Anne-Sophie Chavent-Leclère (« Quand la chose mal jugée rivalise avec l’irrévocabilité du choix du Parquet »).

No 622

Lois et règlementsActe administratif. - Annulation par le juge administratif. - Effet.

L’annulation par la juridiction administrative d’un acte administratif implique que cet acte est réputé n’avoir jamais existé et prive de base légale la poursuite engagée pour violation de cet acte.

Dès lors, l’annulation par une cour administrative d’appel d’une décision du ministre de l’intérieur enjoignant à une personne de restituer son permis de conduire, en raison de la perte de la totalité des points, a pour conséquence d’enlever toute

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47•

15 avril 2013Arrêts des chambres

•Bulletin d’information

base légale à la poursuite et à la condamnation intervenues pour conduite d’un véhicule malgré l’invalidation du permis de conduire.

Crim. ‑ 12 décembre 2012. ANNULATION PARTIELLE SANS RENVOI

No 12-82.919. - CA Colmar, 12 janvier 2012.

M. Louvel, Pt. - Mme Caron, Rap. - M. Liberge, Av. Gén.

No 623

Mesures d’instructionSauvegarde de la preuve avant tout procès.  - Mesure admissible. - Motif légitime. - Relations entre l’employeur et le salarié. - Documents dont seul l’employeur dispose. - Documents nécessaires à la protection des droits des salariés. - Communication. - Conditions. - Détermination.

Le  respect de la vie personnelle du salarié et le secret des affaires ne constituent pas en eux-mêmes un obstacle à l’application des dispositions de l’article  145 du code de procédure civile, dès lors que le juge constate que les mesures demandées procèdent d’un motif légitime et sont nécessaires à la protection des droits de la partie qui les a sollicitées.

La procédure prévue par l’article 145 du code de procédure civile n’étant pas limitée à la conservation des preuves et pouvant aussi tendre à leur établissement, c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain qu’une cour d’appel a retenu que les salariés justifiaient d’un motif légitime à obtenir la communication de documents nécessaires à la protection de leurs droits, dont seul l’employeur disposait et qu’il refusait de communiquer.

Soc. ‑ 19 décembre 2012. REJET

No 10-20.526 et 10-20.528. - CA Paris, 20 mai 2010.

M. Lacabarats, Pt. - M. Blatman, Rap. - M. Richard de la Tour, Av. Gén. - SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Lyon-Caen et Thiriez, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans la revue Légipresse, no  301,  janvier  2013, Synthèse - Droits de la personnalité,  janvier  2012 -  décembre  2012, p.  61-62, note Grégoire Loiseau («  Les restrictions à la protection des droits de la personnalité  »). Voir également la Revue de droit du travail, no  2,  février  2013, Actualités, p. 74, note Frédéric Guiomard («  Mesures d’instruction in futurum  »), et la Revue de jurisprudence sociale, no 3/13, mars 2013, décision no 191, p. 170-171.

No 624

1o Postes et communications électroniquesLa Poste.  - Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT). - Délégation du personnel. - Désignation.  - Contestation.  - Compétence du juge judiciaire. - Portée.

2o Postes et communications électroniquesLa Poste.  - Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT). - Délégation du personnel. - Désignation.  - Attribution des sièges.  - Modalités.  - Détermination. - Applications diverses. - Liste commune établie par les organisations syndicales aux élections des comités techniques. - Portée.

1o L’article  premier du décret no  2011-619 du 31  mai  2011 relatif à la santé et à la sécurité au travail à La Poste dispose

que, sous réserve des dispositions spécifiques qu’il prévoit, les dispositions applicables en matière de santé, de sécurité au travail, de contrôle ainsi que de médecine du travail dans les services de La Poste sont celles définies par la quatrième partie du code du travail.

Aucun texte spécifique n’y dérogeant, sont dès lors applicables aux litiges relatifs à la désignation des membres des CHSCT de La Poste les dispositions de l’article  L.  4613-3 du code du travail, aux termes duquel les contestations relatives à la délégation des représentants du personnel au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail sont de la compétence du juge judiciaire.

2o En cas de présentation d’une liste commune par des organisations syndicales aux élections des comités techniques de La Poste, c’est au vu du résultat obtenu par la liste qu’il convient de déterminer le nombre de représentants du personnel que ce regroupement syndical peut désigner au sein des CHSCT.

Doit dès lors être cassé le jugement d’un tribunal d’instance qui, pour annuler la désignation d’un représentant du personnel au sein d’un CHSCT de La Poste opérée par un regroupement de deux syndicats, retient que le score obtenu par la liste commune présentée par ces syndicats lors des élections du comité technique doit être réparti entre les syndicats colistiers, de sorte qu’il est insuffisant pour permettre à l’un comme à l’autre de procéder à la désignation litigieuse.

Soc. ‑ 5 décembre 2012. CASSATION PARTIELLE SANS RENVOI

No 12-15.135. - TI Lyon, 28 février 2012.

M. Bailly, Pt (f.f.).  - M. Béraud, Rap.  - Mme Lesueur de Givry, Av. Gén. - SCP Boré et Salve de Bruneton, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans La Semaine juridique, édition sociale, no  6, 5  février  2013, Jurisprudence, no  1071, p.  29 à 31, note Henri Guyot («  La Poste  : entre droit commun et droit spécial  »). Voir également la Revue de jurisprudence sociale, no  2/13,  février  2013, décision no  171, p. 144.

No 625

PrescriptionAction publique. - Interruption. - Acte d’instruction ou de poursuite. - Acte du procureur de la République tendant à la recherche et à la poursuite des infractions à la loi pénale. - Cas.

Interrompt le cours de la prescription tout acte du procureur de la République tendant à la recherche et à la poursuite des infractions à la loi pénale.

Il en est ainsi d’une demande adressée à une administration pour solliciter son avis.

En revanche, l’avis rendu par l’administration ne constitue pas un acte d’instruction ou de poursuite susceptible d’interrompre la prescription de l’action publique.

Crim. ‑ 12 décembre 2012. CASSATION PARTIELLE PAR VOIE DE RETRANCHEMENT SANS RENVOI

No 12-80.707. - CA Reims, 24 novembre 2011.

M. Louvel, Pt. - Mme Carbonaro, Rap. - M. Liberge, Av. Gén. - Me Balat, Av.

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48•

Bulletin d’informationArrêts des chambres

•15 avril 2013

No 626PrescriptionAction publique.  - Interruption.  - Acte d’instruction ou de poursuite. - Réquisitions adressées au fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG) aux fins d’inscription d’un ADN destinée à identifier l’auteur d’une infraction.

La réquisition, adressée par un officier de police judiciaire au FNAEG, destinée à établir, aux fins d’identification de l’auteur d’un crime, une comparaison entre les profils génétiques figurant dans ce fichier et celui déterminé à partir du prélèvement effectué sur le vêtement de la victime d’un viol constitue un acte d’instruction, interruptif de la prescription, au sens des articles 7 et 8 du code de procédure pénale.

Crim. ‑ 12 décembre 2012. REJET

No 12-85.274. - CA Rennes, 29 juin 2012.

M. Louvel, Pt. - Mme Caron, Rap. - M. Liberge, Av. Gén.

No 627

Procédure civileÉléments du débat.  - Décision fondée sur des faits non compris dans le débat.

Il résulte de l’article 7 du code de procédure civile que le juge ne peut fonder sa décision sur des faits qui ne sont pas dans le débat.

Doit en conséquence être cassé le jugement qui, pour fixer la somme due au salarié pour l’entretien de ses vêtements professionnels, se fonde, après avoir relevé que l’intéressé ne justifiait pas des frais qu’il avait réellement exposés, sur une recherche réalisée à partir de différents sites internet, alors que les éléments résultant de cette recherche n’étaient pas dans le débat.

Soc. ‑ 5 décembre 2012. CASSATION

No 11-21.113. - CPH Thionville, 16 mai 2011.

M. Lacabarats, Pt. - Mme Mariette, Rap. - M. Foerst, Av. Gén. - Me Balat, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans la Revue de jurisprudence sociale, no  2/13,  février  2013, décision no  125, p.  112-113. Voir également La Semaine juridique, édition sociale, no 8, 19 février 2013, Jurisprudence, no 1090, p. 29-30, note Laurent Drai (« Une prime “d’habillement”, contrepartie des temps d’habillage et de déshabillage, ne couvre pas la prise en charge des frais d’entretien des tenues de travail »).

No 628Procédure civileProcédure orale. - Conclusions. - Conclusions déposées et soutenues à l’audience à laquelle la radiation a été prononcée. - Portée.

En matière orale, la cour d’appel demeure saisie des écritures dont elle constate qu’elles ont été déposées et soutenues à l’audience à laquelle la radiation a été prononcée.

2e Civ. ‑ 6 décembre 2012. CASSATION

No 10-24.721. - CA Chambéry, 13 juillet 2010.

Mme Flise, Pt. - Mme Nicolle, Rap. - M. Mucchielli, Av. Gén. - SCP Thouin-Palat et Boucard, SCP Fabiani et Luc-Thaler, Av.

No 629

Prud’hommesProcédure. - Instance. - Unicité de l’instance. - Domaine d’application. - Exclusion. - Cas.

La régularisation de congés payés indus à laquelle procède l’employeur ne constitue pas une demande en justice soumise au principe de l’unicité d’instance.

Soc. ‑ 18 décembre 2012. CASSATION PARTIELLE

No 11-13.813. - CA Besançon, 17 décembre 2010.

M. Lacabarats, Pt.  - M. Huglo, Rap.  - Mme Lesueur de Givry, Av. Gén. - SCP Didier et Pinet, SCP Gatineau et Fattaccini, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans la Revue de jurisprudence sociale, no  3/13,  mars  2013, décision no  225, p.  189 à 191. Voir également la revue Droit social, no 3, mars 2013, Actualités, p. 290-291, note Vincent Orif (« La règle de l’unicité de l’instance suppose une demande formée devant le juge prud’homal »).

No 630

Prud’hommesProcédure.  - Préliminaire de conciliation.  - Clause de contrat instituant un préalable de conciliation. - Mise en œuvre.  - Obligation (non).  - Effets.  - Saisine directe du juge prud’homal. - Possibilité. - Portée.

En raison de l’existence, en matière prud’homale, d’une procédure de conciliation préliminaire et obligatoire, une clause du contrat de travail qui institue une procédure de conciliation préalable en cas de litige survenant à l’occasion de ce contrat n’empêche pas les parties de saisir directement le juge prud’homal de leur différend.

Soc. ‑ 5 décembre 2012. CASSATION

No 11-20.004. - CA Lyon, 22 avril 2011.

M. Lacabarats, Pt. - Mme Corbel, Rap. - M. Lalande, Av. Gén. - Me Georges, SCP Célice, Blancpain et Soltner, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans La Semaine juridique, édition générale, no  52, 24  décembre  2012, Actualités, no  1406, p.  2363, note Nathalie Dedessus-Le-Moustier («  Efficacité de la clause de conciliation préalable  »). Voir également cette même revue, no  10, 4  mars  2013, Jurisprudence, no  272, p.  483 à 486, note Olivier Cuperlier («  Quel avenir pour la médiation conventionnelle en matière sociale ? »), le Recueil Dalloz, no 2, 17 janvier 2013, Chroniques/Cour de cassation - chambre sociale, p.  114 à 123, spéc. no  6, p.  121-122, note Pierre Bailly («  Clause de conciliation obligatoire et saisine directe du conseil de prud’hommes  »), la Revue de droit du travail, no 1,  janvier 2013, Actualités, p. 7 (« Clause de conciliation préalable et contrat de travail »), cette même revue, no  2,  février  2013, Chroniques, p. 124 à 128, note Evelyne Serverin (« La mission conciliatoire du bureau de conciliation prud’homal dans tous ses états  »), La Semaine juridique, édition sociale, no  6, 5  février  2013, Jurisprudence, no 1075, p. 37 à 40, note Gwennhaël François (« L’inefficacité des clauses de conciliation précontentieuse insérées dans le contrat de travail  »), également publiée dans La Semaine juridique, édition entreprise et affaires, no  8, 21  février  2013, Études et commentaires, no  1127, p.  44 à 47, la Revue de jurisprudence sociale, no  2/13,  février  2013, décision no  162, p. 138-139, et la revue Droit social, no 2, février 2013, Actualités, p. 178 à 181, note Daniel Boulmier (« Clause contractuelle de conciliation préalable à la saisine du juge »).

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49•

15 avril 2013Arrêts des chambres

•Bulletin d’information

note sous Soc., 5 décembre 2012, no 630 ci‑dessus

Par un arrêt rendu en chambre mixte le 14 février 2003 (pourvoi no 00-19.423, Bull. 2003, Ch. mixte, no 1), la Cour de cassation a posé le principe selon lequel une clause d’un contrat instituant une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge est licite, son non-respect constituant une fin de non-recevoir qui s’impose au juge si les parties l’invoquent.

Le commentaire de cet arrêt au Rapport annuel 2003 (p. 473) révélait les raisons ayant conduit à l’adoption de cette solution, qui fait prévaloir la force obligatoire du contrat et le souci de favoriser le règlement amiable des litiges, mais concluait « qu’il restera à dire si la validité de principe de la clause de conciliation préalable ainsi reconnue s’applique en toute matière ».

Cette question devait nécessairement se poser pour les procédures prud’homales, compte tenu de la spécificité de la matière traitée, mais aussi de la procédure applicable devant les conseils de prud’hommes.

En effet, le droit du travail est un droit qui, tenant compte du déséquilibre existant entre les parties au contrat, comporte des règles impératives de protection de la partie la plus faible. Or, ce déséquilibre existant dès la conclusion du contrat, il est à craindre que les clauses de conciliation préalable obligatoire qui pourraient y être stipulées ne soient pas librement consenties par le salarié, de même que le choix du ou des conciliateur(s) soit dicté par le seul employeur. En l’absence de garantie quant à la façon dont pourrait se dérouler la phase de conciliation amiable, notamment quant à l’assistance du salarié, il existe un risque que celui-ci renonce à ses droits sans en être pleinement informé. C’est précisément pour éviter un tel écueil que, par exemple, les ruptures conventionnelles prévues aux articles L. 1237-11 et suivants du code du travail sont entourées de modalités spécifiques et que la transaction n’est possible qu’une fois le contrat de travail rompu.

Mais le fond du droit n’est pas la seule raison qui conduit à adopter une solution particulière pour le règlement des différends survenant à l’occasion d’un contrat de travail. L’existence en matière prud’homale d’une procédure de conciliation préliminaire et obligatoire prévue à l’article L. 1411-1 du code du travail ménage déjà la possibilité de rapprocher les parties. Chaque section  comporte un bureau de conciliation composé de façon paritaire. Admettre que les parties soient tenues de se soumettre à une autre tentative de conciliation reviendrait, en cas d’échec de celle-ci, à voir se succéder deux phases de conciliation avant de pouvoir accéder au juge. Le délai qui s’écoulerait ainsi pourrait ne plus être raisonnable, surtout pour les contentieux qui présentent très souvent un caractère alimentaire.

Dans l’arrêt ici commenté, la chambre sociale considère donc que si une clause du contrat de travail qui institue une procédure de conciliation préalable n’est pas nulle et que les parties ont le choix de la mettre en œuvre, elle ne pouvait néanmoins pas leur interdire de saisir directement le juge prud’homal de leur différend survenant à l’occasion du contrat.

No 631

RapatriéMesures de protection juridique. - Suspension provisoire des poursuites (article 100 de la loi du 30 décembre 1997, complété par l’article 25 de la loi du 30 décembre 1998). - Abrogation de la disposition appliquée à la suite d’une question prioritaire de constitutionnalité. - Portée.

Par décision no  2011-213 QPC du 27  janvier  2012, publiée le 28  janvier  2012, le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution l’article  100 de la loi no  97-1269 du 30  décembre  1997 de finances pour 1998, dans sa rédaction postérieure à l’article  25 de la loi no  98-1267 du 30 décembre 1998 de finances rectificative pour 1998.

Il s’ensuit que doit être annulé, pour perte de fondement juridique, un arrêt, non irrévocable à la date du 28 janvier 2012, ayant statué au regard de ce texte.

2e Civ. ‑ 6 décembre 2012. ANNULATION SANS RENVOI

No 11-26.549. - CA Riom, 14 septembre 2011.

Mme  Flise, Pt.  - M.  André, Rap.  - M.  Mucchielli, Av. Gén.  - SCP  Piwnica et Molinié, SCP  Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans la revue Procédures, no  2,  février  2013, commentaire no  49, p.  22, note Blandine Rolland («  Application de l’inconstitutionnalité du dispositif d’aide aux rapatriés  »). Voir également la Revue des procédures collectives, no  1,  janvier-février  2013, Études, no 1, p. 7 à 9, note Florence Petit (« Actualité jurisprudentielle - 16 octobre - 15 décembre 2012 »), spéc. no 16, p. 9.

No 632

Réglementation économiqueConcurrence.  - Opérations de visite et de saisie.  - Déroulement des opérations.  - Ordonnance du premier président de la cour d’appel.  - Pourvoi.  - Procédure applicable. - Point de départ du délai de pourvoi. - Acte de notification de l’ordonnance comportant une indication erronée. - Portée.

Aux termes de l’article  L.  450-4 du code de commerce, le pourvoi en cassation contre l’ordonnance du premier président de la cour d’appel statuant sur la validité d’une ordonnance du juge des libertés et de la détention autorisant des opérations de visite et saisie en vue de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles est soumis aux dispositions du code de procédure pénale.

Il s’ensuit que, lorsque la décision est rendue après débat contradictoire et que les parties ont été informées de la date à laquelle elle serait prononcée, le délai de cinq jours francs prévu par l’article 568 de ce code court du jour de ce prononcé.

Cependant, lorsque l’acte de notification de l’arrêt comporte une indication erronée quant au point de départ du délai de pourvoi, cette notification ouvre un nouveau délai de recours (arrêt no 1).

Tel n’est pas le cas lorsque la notification est postérieure à l’expiration du délai ayant commencé à courir au jour du prononcé de l’arrêt (arrêt no 2).

Arrêt no 1 :

Crim. ‑ 19 décembre 2012. REJET

No 11-88.472. - CA Orléans, 8 novembre 2011.

M. Louvel, Pt. - Mme Desgrange, Rap. - M. Gauthier, Av. Gén. - SCP Waquet, Farge et Hazan, Me Ricard, Av.

Arrêt no 2 :

Crim. ‑ 19 décembre 2012. IRRECEVABILITÉ

No 12-81.350. - CA Metz, 25 novembre 2011.

M.  Louvel, Pt.  - M.  Soulard, Rap.  - M.  Bonnet, Av. Gén.  - Me Ricard, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, Av.

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50•

Bulletin d’informationArrêts des chambres

•15 avril 2013

No 633

Responsabilité délictuelle ou quasi délictuelleChoses dont on a la garde. - Fait de la chose. - Chose instrument du dommage.  - Exclusion.  - Applications diverses.  - Tige métallique en position normale servant de tuteur à un arbuste.

N’était pas en position anormale et n’a pas constitué l’instrument du dommage une tige métallique plantée verticalement dans le sol au milieu d’un bosquet pour servir de tuteur à un arbuste et sur laquelle s’est empalée la victime, âgée de 17 ans, qui a chuté après avoir escaladé un muret pour atteindre la toiture de l’abri d’une piscine d’où elle voulait plonger.

2e Civ. ‑ 13 décembre 2012. REJET

No 11-22.582. - CA Nîmes, 10 mai 2011.

Mme  Flise, Pt.  - M.  Taillefer, Rap.  - M.  Lautru, Av. Gén.  - Me Le Prado, SCP Célice, Blancpain et Soltner, Av.

Un commentaire de cette décision est paru au Recueil Dalloz, no  1, 10  janvier  2013, Actualité/droit civil, p.  11, note Inès Gallmeister («  Responsabilité du fait des choses  : rôle actif d’une tige de fer  »). Voir également la Revue Lamy droit civil, no  101,  février  2013, Actualités, no  4971, p.  23, note Gaëlle Le  Nestour Drelon («  Rappel des conditions d’application de l’article 1384, alinéa premier, en présence d’une chose inerte »).

No 634

Responsabilité pénalePersonne morale.  - Conditions.  - Commission d’une infraction pour le compte de la société par l’un de ses organes ou représentants.  - Applications diverses.  - Accident du travail subi par un salarié et causé par l’imprudence d’un conducteur de travaux.

Il résulte de l’article  121-2 du code pénal que les personnes morales ne peuvent être déclarées pénalement responsables que s’il est établi qu’une infraction a été commise, pour leur compte, par leurs organes ou représentants.

Est justifiée au regard de ce texte la décision d’une cour d’appel qui retient la responsabilité pénale d’une société, du fait d’un de ses représentants, à la suite de l’accident du travail subi par un salarié et causé par l’imprudence d’un conducteur de travaux désigné par le plan particulier de sécurité et de protection de la santé comme responsable de la sécurité sur le chantier qui, présent sur les lieux de l’accident, a ordonné l’exécution d’une opération de décâblage sans s’opposer à l’utilisation d’un outil inadapté pour la réaliser.

Crim. ‑ 11 décembre 2012. REJET

No 11-87.421. - CA Chambéry, 7 avril 2011.

M.  Louvel, Pt.  - Mme  Guirimand, Rap.  - M.  Boccon-Gibod, P. Av. Gén. - SCP Waquet, Farge et Hazan, Av.

No 635

Rétention de sûreté et surveillance de sûretéJuridiction nationale de la rétention de sûreté. - Décision. - Recours.  - Pourvoi en cassation.  - Déclaration.  - Recevabilité. - Conditions. - Application des articles 576 et 577 du code de procédure pénale.

Les articles  706-53-15 et R.  53-8-43 du code de procédure pénale, relatifs à la procédure applicable à la juridiction nationale de la rétention de sûreté, ne dérogent pas aux conditions de recevabilité du pourvoi en cassation fixées par les articles 576 et 577 du code de procédure pénale.

Dès lors, est irrecevable le pourvoi en cassation formé par lettre adressée à la Cour de cassation.

Crim. ‑ 12 décembre 2012. IRRECEVABILITÉ

No 12-83.240. - Juridiction nationale de la rétention de sûreté, 11 avril 2012.

M. Louvel, Pt. - Mme Caron, Rap. - M. Liberge, Av. Gén.

No 636

1o Saisie immobilièreProcédure. - Voies de recours. - Décisions susceptibles. - Jugement constatant la vente amiable.

2o Saisie immobilièreProcédure.  - Consignation du prix de vente.  - Loi ordonnant une consignation sans en indiquer le lieu.  - Consignataire. - Détermination. - Portée.

1o Le  jugement par lequel le juge de l’exécution constate la vente amiable, après avoir contrôlé la conformité de l’acte notarié aux conditions fixées par le jugement qui l’a autorisée et la consignation du prix de vente, constitue une décision juridictionnelle susceptible de tierce opposition.

2o Il résulte des articles 2-14° de l’ordonnance du 3 juillet 1816 et L.  518-19 du code monétaire et financier que, lorsque la loi ordonne une consignation sans en indiquer le lieu, comme dans le cas de l’article 2203 du code civil, applicable au litige, les juridictions ne peuvent autoriser de consignation auprès d’organismes autres que la Caisse des dépôts et consignations, de sorte que le juge de l’exécution constatant la vente amiable d’un bien à l’occasion d’une procédure de saisie immobilière ne peut ordonner la consignation du prix de vente à la caisse des règlements pécuniaires des avocats.

2e Civ. ‑ 6 décembre 2012. CASSATION PARTIELLE

No 11-24.443. - TGI Valence, 26 mai 2011.

Mme Flise, Pt. - Mme Leroy-Gissinger, Rap. - M. Mucchielli, Av. Gén.  - SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, SCP Blanc et Rousseau, SCP Célice, Blancpain et Soltner, Me Le Prado, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans La Semaine juridique, édition notariale et immobilière, no  51-52, 21  décembre  2012, Actualités, no  1098, p.  7 («  Précisions sur la consignation du prix dans le cadre de la vente amiable sur autorisation judiciaire  »). Voir également le Recueil Dalloz, no  44, 27  décembre  2012, Actualité/procédure civile et voie d’exécution, p.  2976, note Valérie Avena-Robardet («  Vente amiable de l’immeuble  : consignation du prix  »), cette même revue, no  9, 7  mars  2013, Chroniques/Cour de cassation - deuxième chambre civile, p.  599 à 614, spéc. no  10, p.  610-611, note Lise Leroy-Gissinger et Fabienne Renault-Malignac («  Saisie immobilière  : vente amiable et lieu de consignation du prix  »), et la revue Droit et procédures, no  2,  février  2013, Jurisprudence commentée, p. 43 à 46, note Anne Leborgne.

No 637

Sécurité sociale, assurances socialesMaladie.  - Indemnité journalière.  - Durée de travail.  - Conditions.  - Dispositions particulières pour certaines catégories d’assurés sociaux.  - Abrogation

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51•

15 avril 2013Arrêts des chambres

•Bulletin d’information

de l’article  97,  §  2, du décret no  45-0179 du 29 décembre 1945.  - Arrêté ministériel du 21  juin 1968 modifié ne recevant plus application. - Portée.

Selon l’article  R.  313-3 du code de la sécurité sociale, pour avoir droit aux indemnités journalières de l’assurance maladie pendant les six premiers mois d’interruption de travail, l’assuré social doit justifier, aux dates de référence prévues aux 2° et 3° de l’article R.  313-1 du même code, soit que le montant des cotisations dues au titre  des assurances maladie, maternité, invalidité et décès assises sur les rémunérations qu’il a perçues pendant les six mois civils précédents est au moins égal au montant des mêmes cotisations dues pour un salaire égal à 1  015 fois la valeur du salaire minimum de croissance au premier jour de la période de référence, soit avoir effectué au moins 200 heures de travail salarié ou assimilé au cours des trois mois civils ou des quatre-vingt-dix jours précédents.

Viole ce texte la cour d’appel qui se fonde, pour faire droit à la demande de l’assuré, sur les dispositions de l’arrêté du 21 juin modifié, dès lors que l’article 97, § 2, du décret no 45-0179 du 29 décembre 1945 modifié, qui renvoyait à un arrêté ministériel la fixation des équivalences en heures de travail du montant des cotisations versées en ce qui concerne les assurés dont les conditions de travail ne permettaient pas la production de pièces justificatives précisant la durée du travail, a été abrogé, ce dont il résulte que l’arrêté ministériel du 21 juin 1968 modifié ne peut plus recevoir application.

2e Civ. ‑ 20 décembre 2012. CASSATION

No 11-26.676. - CA Paris, 22 septembre 2011.

Mme  Flise, Pt.  - M.  Prétot, Rap.  - Mme  Lapasset, Av. Gén.  - SCP Gatineau et Fattaccini, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans La Semaine juridique, édition sociale, no  10, 5  mars  2013, Jurisprudence, no 1117, p. 45-46, note Thierry Tauran (« Travailleurs à domicile : conditions d’ouverture des droits aux indemnités journalières d’assurance maladie »).

No 638

Sécurité sociale, contentieuxContentieux général. - Procédure. - Procédure gracieuse préalable. - Commission de recours amiable. - Saisine. - Conditions.  - Réclamation contre une décision d’un organisme de sécurité sociale.  - Défaut.  - Applications diverses.  - Exception d’inopposabilité par l’employeur d’une décision de la caisse.

Le  fait pour un employeur de solliciter l’inopposabilité à son égard de la décision prise par la caisse ne constitue pas une réclamation contre une décision prise par un organisme de sécurité sociale au sens de l’article  R.  142-1 du code de la sécurité sociale, de sorte que cet employeur n’est pas tenu de saisir préalablement la commission de recours amiable de cette réclamation.

2e Civ. ‑ 20 décembre 2012. REJET

No 11-26.621. - CA Paris, 15 septembre 2011.

Mme  Flise, Pt.  - M.  Salomon, Rap.  - SCP  Baraduc et Duhamel, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans La Semaine juridique, édition sociale, no 9, 26  février 2013, Jurisprudence, no  1104, p.  41-42, note Marlie Michalletz («  La saisine de la commission de recours amiable ou l’allégorie de la caverne  »). Voir également la Revue de jurisprudence sociale, no 3/13, mars 2013, décision no 233, p. 195-196.

No 639

SportsRèglement. - Football. - Charte du football professionnel. - Joueurs professionnels.  - Définition.  - Détermination.  - Portée.

Il résulte des dispositions de l’article 500 de la charte du football professionnel, qui a valeur de convention collective, que le footballeur qui est employé pour exercer, à titre  exclusif ou principal, son activité en vue des compétitions est un footballeur professionnel.

Soc. ‑ 12 décembre 2012. CASSATION

No 11-14.823. - CA Paris, 26 octobre 2010.

M.  Lacabarats, Pt.  - M.  Flores, Rap.  - M.  Aldigé, Av. Gén.  - SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, Me Le Prado, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans la Revue de jurisprudence sociale, no  3/13,  mars  2013, décision no  221, p. 188.

No 640

Statuts professionnels particuliersEmplois domestiques.  - Concierges et employés d’immeubles à usage d’habitation. - Concierges rattachés au régime dérogatoire de la catégorie B.  - Contrat de travail.  - Accessoire.  - Logement de fonction.  - Attribution.  - Obligation du propriétaire ou du principal locataire. - Portée.

Selon l’article  L.  771-1, devenu L.  7211-2, du code du travail, auquel se réfère l’article  18 de la convention collective nationale des gardiens, concierges et employés d’immeubles du 11  décembre  1979, dans sa rédaction alors applicable, sont considérées comme concierges, employés d’immeubles ou femmes de ménage d’immeubles à usage d’habitation toutes personnes salariées par le propriétaire ou par le principal locataire et qui, logeant dans l’immeuble au titre  d’accessoire du contrat de travail, sont chargées d’assurer sa garde, sa surveillance et son entretien ou une partie de ces fonctions.

Il en résulte que le salarié engagé au titre du régime légal des concierges et rattaché au régime dérogatoire de la catégorie B, excluant toute référence à un horaire précis, doit être logé au titre d’accessoire à son contrat de travail dans l’immeuble où il exerce ses fonctions, ce qui implique l’attribution d’un logement de fonction.

Soc. ‑ 12 décembre 2012. CASSATION PARTIELLE

No 11-20.653. - CA Aix-en-Provence, 9 mai 2011.

M.  Lacabarats, Pt.  - M.  Ludet, Rap.  - M.  Aldigé, Av. Gén.  - SCP  Waquet, Farge et Hazan, SCP  Coutard et Munier- Apaire, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans la Revue de jurisprudence sociale, no 3/13, mars 2013, décision no 238, p. 200.

No 641

1o Statuts professionnels particuliersGérant de succursale. - Travailleur visé à l’article L. 7321-2 du code du travail. - Activité du distributeur de produits au service du fournisseur.  - Relation d’exclusivité ou de quasi-exclusivité.  - Appréciation.  - Contrôle du juge.  - Principe de sécurité juridique. - Compatibilité. - Portée.

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52•

Bulletin d’informationArrêts des chambres

•15 avril 2013

2o Statuts professionnels particuliersGérant de succursale. - Travailleur visé à l’article L. 7321-2 du code du travail.  - Qualité de salarié.  - Cumul.  - Conditions. - Détermination. - Portée.

1o Ne constitue pas une atteinte à la sécurité juridique le fait que les juridictions apprécient dans chaque cas l’importance, prépondérante ou non, de l’activité consacrée par un distributeur de produits au service du fournisseur, le contrôle juridictionnel constituant au contraire une garantie de sécurité pour ce dernier.

Une cour d’appel en déduit à bon droit que les dispositions de l’article L. 7321-2 du code du travail ne sont pas contraires à l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

2o La qualité de salarié n’exclut pas l’application de l’article L. 7321-2 du code du travail, dès lors que les conditions cumulatives posées par ce texte sont réunies.

Soc. ‑ 5 décembre 2012. REJET ET CASSATION PARTIELLE

No 11-20.460 et 11-21.278. - CA Versailles, 17 mai 2011.

M.  Lacabarats, Pt.  - M.  Linden, Rap.  - M.  Foerst, Av. Gén.  - SCP Piwnica et Molinié, SCP Boré et Salve de Bruneton, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans la Revue de droit du travail, no  1, janvier  2013, Actualités, p. 6, note Caroline Dechristé («  Requalification d’un contrat de commission  »). Voir également la Revue de jurisprudence sociale, no 3/13, mars 2013, décision no 241, p. 202-203.

No 642

Statuts professionnels particuliersGérant de succursale.  - Travailleur visé à l’article L.  7321-2 du code du travail.  - Clauses du contrat de location-gérance. - Inopposabilité. - Portée.

Les clauses du contrat liant le fournisseur à la société chargée de la distribution des produits ne peuvent être opposées au gérant agissant sur le fondement de l’article L. 7321-2 du code du travail.

Doit en conséquence être cassé l’arrêt qui rejette des demandes d’indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en retenant que le contrat de location-gérance était à durée déterminée.

Soc. ‑ 5 décembre 2012. REJET ET CASSATION PARTIELLE

No 11-22.168 et 11-22.365. - CA Versailles, 7 juin 2011.

M.  Lacabarats, Pt.  - M.  Linden, Rap.  - M.  Foerst, Av. Gén.  - SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Piwnica et Molinié, Av.

Un commentaire de cette décision est paru au Recueil Dalloz, no 44, 27 décembre 2012, Actualité/droit du travail et sécurité sociale, p.  2970 («  Gérant de station-service  : application du code du travail  »). Voir également la Revue de droit du travail, no  1,  janvier  2013, Actualités, p. 6, note Caroline Dechristé («  Requalification d’un contrat de commission  »), et cette même revue, no  2,  février  2013, Chroniques, no  101, p. 101 à 103, note Gilles Auzero («  Application du statut de gérant de succursale et interposition d’une personne morale  »), et la Revue de jurisprudence sociale, no 3/13, mars 2013, décision no 241, p. 202-203.

No 643

TransactionObjet. - Détermination. - Étendue. - Limites. - Rupture du contrat de travail. - Portée.

Une transaction ne peut avoir pour objet de mettre fin à un contrat de travail.

Doit en conséquence être cassé l’arrêt qui déclare valable un acte ayant pour double objet de rompre le contrat de travail et de transiger.

Soc. ‑ 5 décembre 2012. CASSATION

No 11-15.471. - CA Poitiers, 28 septembre 2010.

M. Lacabarats, Pt. - M. Linden, Rap. - M. Finielz, P. Av. Gén. - SCP  Tiffreau, Corlay et Marlange, SCP  Célice, Blancpain et Soltner, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans la Revue de jurisprudence sociale, no  2/13,  février  2013, décision no  116, p. 107-108.

No 644

Travail réglementation, durée du travailTravail effectif.  - Temps assimilé à du travail effectif.  - Exclusion. - Temps passé à la douche. - Temps nécessaire aux opérations d’habillage et de déshabillage.  - Assimilation. - Critères. - Moment. - Portée.

Il résulte de l’article 3, paragraphe 3.1, de l’accord d’entreprise Sanest du 10  novembre  1999 que la rémunération du temps passé à la douche en fin de service, en application des dispositions de l’article R. 232-2-4, devenu R. 3121-2, du code du travail, ne peut valoir contrepartie au temps d’habillage nécessaire lors de la prise de poste pour revêtir la tenue dont le port est obligatoire.

Doit en conséquence être approuvé l’arrêt qui, après avoir estimé le temps nécessaire à la douche prise en fin de service, habillage et déshabillage compris, ainsi que celui consacré aux opérations de déshabillage et d’habillage afin de revêtir, en début de service, la tenue de travail obligatoire, a fixé la contrepartie financière du temps d’habillage et de déshabillage à l’arrivée sur le lieu de travail, que l’employeur avait refusé de payer en l’intégrant dans la rémunération du temps de douche.

Soc. ‑ 12 décembre 2012. REJET

No 11-22.884. - CA Colmar, 23 juin 2011.

M. Gosselin, Pt (f.f.). - Mme Mariette, Rap. - SCP Defrenois et Levis, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans la Revue de jurisprudence sociale, no  2/13,  février  2013, décision no  129, p.  116-117. Voir également La Semaine juridique, édition sociale, no 9, 26 février 2013, Jurisprudence, no 1098, p. 26-27, note Alexandre Barège («  Déshabillage, douche, habillage  : quelle rémunération ? »).

No 645

Travail réglementation, rémunérationSalaire. - Frais professionnels. - Frais de transport. - Frais de transports publics. - Prise en charge par l’employeur. - Conditions. - Détermination. - Portée.

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53•

15 avril 2013Arrêts des chambres

•Bulletin d’information

Il résulte de l’article  L.  3261-2 du code du travail, dans sa rédaction issue de l’article  20 de la loi no  2008-1330 du 17  décembre  2008, qui impose aux employeurs la prise en charge partielle du prix des titres d’abonnements souscrits par leurs salariés pour leurs déplacements accomplis au moyen de transports publics entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail, qu’il n’y a pas lieu de distinguer selon la situation géographique de cette résidence.

Justifie légalement sa décision le conseil de prud’hommes qui ne limite pas cette prise en charge aux seuls déplacements effectués dans la région Île-de-France.

Soc. ‑ 12 décembre 2012. REJET

No 11-25.089. - CPH Paris, 17 décembre 2010.

M. Bailly, Pt (f.f.). - M. Ballouhey, Rap. - M. Finielz, P. Av. Gén. - SCP Piwnica et Molinié, SCP Boré et Salve de Bruneton, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans La Semaine juridique, édition générale, no 1-2, 7 janvier 2013, Actualités, no 28, p. 35-36, note Carole Lefranc-Hamoniaux (« Remboursement des frais de transport collectif : pas de limitation géographique »). Voir également la Revue de jurisprudence sociale, no 2/13, février 2013, décision no  123, p.  111-112, et La Semaine juridique, édition sociale, no 8, 19 février 2013, Jurisprudence, no 1091, p. 31 à 33, note Olivier Giovenal (« Incidence du changement de domicile du salarié sur la prise en charge des frais de transports publics par l’employeur »).

No 646

Travail réglementation, rémunérationSalaire. - Indemnités. - Indemnité d’occupation du domicile du salarié à des fins professionnelles.  - Bénéfice.  - Conditions. - Absence de mise à disposition effective d’un local professionnel. - Portée.

Le salarié peut prétendre à une indemnité au titre de l’occupation de son domicile à des fins professionnelles dès lors qu’un local professionnel n’est pas mis effectivement à sa disposition.

Soc. ‑ 12 décembre 2012. REJET

No 11-20.502. - CA Paris, 5 mai 2011.

M.  Lacabarats, Pt.  - Mme  Goasguen, Rap.  - M.  Aldigé, Av. Gén. - SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans La Semaine juridique, édition générale, no  1-2, 7  janvier  2013, Actualités, no 27, p. 35, note Gilles Dedessus-Le-Moustier (« Octroi d’une indemnité d’occupation du domicile à des fins professionnelles »). Voir également la Revue de jurisprudence sociale, no  2/13, février 2013, décision no 176, p. 147-148.

No 647

Travail réglementation, santé et sécuritéEmployeur.  - Obligations.  - Sécurité des salariés.  - Obligation de résultat.  - Manquement.  - Préjudice.  - Préjudice spécifique d’anxiété.  - Caractérisation.  - Soumission du salarié à un suivi médical régulier.  - Nécessité (non).

La cour d’appel qui a constaté que le salarié, qui avait travaillé dans l’un des établissements mentionnés à l’article  41 de la loi no  98-1194 du 23 décembre 1998 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel pendant une période où y étaient

fabriqués ou traités l’amiante ou des matériaux contenant de l’amiante, se trouvait, de par le fait de l’employeur, dans une situation d’inquiétude permanente face au risque de déclaration à tout moment d’une maladie liée à l’amiante, qu’il se soumette ou non à des contrôles et examens médicaux réguliers, a ainsi caractérisé l’existence d’un préjudice spécifique d’anxiété.

Soc. ‑ 4 décembre 2012. REJET

No 11-26.294. - CA Caen, 9 septembre 2011.

M.  Lacabarats, Pt.  - Mme  Salomon, Rap.  - M.  Weissmann, Av.  Gén.  - Me  Spinosi, SCP  Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, Av.

Un commentaire de cette décision est paru dans La Semaine juridique, édition sociale, no 51-52, 18 décembre 2012, Actualités, no 549, p. 9 (« Le préjudice d’anxiété dû à l’exposition à l’amiante n’a pas à être prouvé »). Voir également cette même revue, no 4, 22 janvier 2013, Jurisprudence, no 1042, p. 21-22, note Philippe Plichon (« Réparation du préjudice d’anxiété »), le Recueil Dalloz, no 44, 27 décembre 2012, Actualité/droit du travail et sécurité sociale, p.  2973 («  Amiante  : caractérisation du préjudice d’anxiété  »), la Revue de droit du travail, no  1,  janvier  2013, Actualités, p. 7 (« Amiante et préjudice d’anxiété »), La Semaine juridique, édition entreprise et affaires, no  4, 24  janvier  2013, Études et commentaires, no 1061, p. 47 à 49, note Marcel Voxeur (« Le préjudice d’anxiété de salariés exposés à l’amiante n’a pas à être prouvé  : en sera-t-il de même pour d’autres préjudices récemment invoqués  ?  »), la Revue de jurisprudence sociale, no 2/13, février 2013, décision no 132, p. 118-119, la Gazette du Palais, no 44-45, 13-14 février 2013, Chronique de jurisprudence de droit de la responsabilité civile, p. 19 à 21, note Mustapha Mekki («  Préjudice spécifique de contamination, préjudice d’anxiété ou la part de l’angoisse dans le droit contemporain »), et cette même revue, no 46-47, 15-16  février 2013, Chronique de jurisprudence de droit du dommage corporel, p.  38, note Daphné Tapinos (« La reconnaissance du préjudice d’angoisse n’exige pas la preuve d’un suivi médical »).

No 648

1o Union européenneTravail.  - Insolvabilité de l’employeur.  - Directive 2002/74/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 septembre 2002. - Article 8 bis. - Garantie. - Institution compétente. - Détermination.

2o Conflit de loisContrats. - Contrat de travail. - Loi applicable. - Loi choisie par les parties.  - Détermination.  - Circonstances de la cause.  - Applications diverses.  - Contrat de travail  régi par la Convention de Rome du 19  juin 1980.  - Rupture du contrat de travail. - Portée.

1o L’article  8 bis de la directive 2002/74/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 septembre 2002, devenu l’article 9 de la directive 2008/94/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2008, prévoyant que, lorsqu’une entreprise ayant des activités sur le territoire d’au moins deux États membres se trouve en état d’insolvabilité, l’institution compétente pour le paiement des créances impayées des travailleurs est celle de l’État membre sur le territoire duquel ils exercent ou exerçaient habituellement leur travail, ne s’oppose pas à ce qu’une législation nationale prévoie qu’un travailleur puisse se prévaloir de la garantie salariale, plus favorable, de l’institution nationale, conformément au droit de cet État membre.

L’article L. 3253-6 du code du travail imposant à tout employeur de droit privé d’assurer ses salariés, y compris ceux détachés à l’étranger ou expatriés, contre le risque de non-paiement des sommes qui leur sont dues en cas de liquidation judiciaire, c’est

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54•

Bulletin d’informationArrêts des chambres

•15 avril 2013

à bon droit qu’une cour d’appel retient que la garantie de l’AGS peut être invoquée par un salarié engagé en France, par une société qui y a son siège social, pour travailler sur des chantiers situés en Allemagne.

2o L’article 3 de la Convention de Rome du 19  juin 1980, telle qu’applicable aux faits, prévoyant que le contrat est régi par la loi choisie par les parties et que ce choix, qui peut être exprès ou résulter de façon certaine des circonstances de la cause, peut porter sur l’ensemble du contrat ou sur une partie seulement et intervenir ou être modifié à tout moment de la vie du contrat, une cour d’appel, ayant relevé que l’employeur avait engagé la procédure de licenciement économique selon les règles du droit français et avait déterminé les droits du salarié licencié par application de ce même droit, ce que le salarié avait accepté en revendiquant cette même application, a pu décider qu’il résultait de façon certaine des circonstances de la cause que les parties avaient choisi de soumettre la rupture de leur contrat de travail aux règles du droit français, peu important que ce contrat fût en principe régi par le droit allemand en tant que loi du lieu d’accomplissement du travail.

Soc. ‑ 4 décembre 2012. REJET

No 11-22.166. - CA Colmar, 9 juin 2011.

M.  Lacabarats, Pt.  - M.  Béraud, Rap.  - M.  Weissmann, Av.  Gén.  - SCP  Piwnica et Molinié, SCP  Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Waquet, Farge et Hazan, Av.

L’avis de l’avocat général est paru dans la Revue de jurisprudence sociale, no  2/13, février  2013, p.  90 à 94 («  Travail dans un pays de l’Union européenne  »). Un commentaire de cette décision est paru dans ce même numéro, décision no  127, p.  113 à 115. Voir également le Recueil Dalloz, no 44, 27  décembre  2012, Actualité/droit du travail et sécurité sociale, p.  2971 («  Contrat de travail international : garantie de l’AGS et loi applicable »), la Revue de droit du travail, no  1,  janvier  2013, Actualités, p.  7, note Frédéric Guiomard («  Loi applicable au contrat de travail  : application volontaire du droit du licenciement »), La Semaine juridique, édition sociale, no 5, 29 janvier 2013, Jurisprudence, no 1060, p. 32 à 34, note Gérard Vachet («  Insolvabilité d’un employeur établi dans un autre État membre de l’Union européenne et garantie des créances salariales »), et la Revue des procédures collectives, no 1, janvier-février 2013, Études, no 1, p. 7 à 9, note Florence Petit (« Actualité jurisprudentielle - 16 octobre - 15 décembre 2012 »), spéc. no 15, p. 9.

Commission nationale de réparation des détentions

No 649

1o Réparation à raison d’une détentionPréjudice. - Préjudice matériel. - Réparation. - Préjudice économique.  - Frais exposés par les membres de la famille pour des visites en détention.

2o Réparation à raison d’une détentionRéparation du préjudice causé par la condamnation.  - Préjudice.  - Préjudice matériel.  - Frais d’avocat.  - Frais engagés par un tiers contre promesse nominative de remboursement du détenu.

1o Les frais exposés pour les visites faites par le fils majeur du détenu, économiquement dépendant de son père, chez qui il résidait, et dont il est justifié par des documents pénitentiaires, ouvrent au demandeur le droit d’être remboursé du coût des trajets de son visiteur. En l’absence d’autre élément, ce coût peut être calculé par référence au barème fiscal des frais kilométriques pour un véhicule de faible cylindrée.

2o La circonstance que les factures d’avocat, relatives à des prestations directement liées à la privation de liberté, soient libellées au nom de la sœur du demandeur, qui les a payées en raison de l’impécuniosité de son frère, ne justifie pas d’en écarter l’indemnisation, dès lors que le demandeur a expressément souscrit une promesse nominative de remboursement, produite aux débats.

17 décembre 2012. ACCUEIL PARTIEL DU RECOURS

No 12-CRD.022. - CA Montpellier, 26 avril 2012.

M. Straehli, Pt. - M. Cadiot, Rap. - Mme Valdès-Boulouque, Av. Gén. - Me Couturier-Heller, Me de Caunes, Av.

Commission de réexamen d’une décision pénale consécutif à un arrêt de la cour européenne des droits de l’homme

No 650

1o RéexamenConditions.  - Violation constatée entraînant des conséquences dommageables par sa nature et sa gravité. - Applications diverses.

2o RéexamenConditions. - Délai. - Point de départ. - Détermination.

1o Entre dans les prévisions de l’article  626-1 du code de procédure pénale la demande de réexamen, formée par une personne condamnée pour dénonciation calomnieuse, fondée sur une décision de la Cour européenne des droits de l’homme ayant jugé qu’elle n’avait bénéficié ni d’un procès équitable ni de la présomption d’innocence, en violation des prescriptions des paragraphes 1 et 2 de l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, dans la mesure où, en application de l’article  226-10 du code pénal, dans sa rédaction en vigueur à l’époque, elle avait été privée de la possibilité de contester la fausseté des faits dénoncés, celle-ci résultant nécessairement de l’ordonnance du juge d’instruction déclarant que la réalité des faits n’était pas établie.

2o Le  délai d’un an de l’article  626-3, alinéa  2, du code de procédure pénale pour saisir la Commission de réexamen d’une décision pénale consécutif au prononcé d’un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme court à compter, non pas de la date du prononcé de l’arrêt, mais de la date à laquelle cet arrêt devient définitif dans les conditions prévues par l’article 44 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

20 décembre 2012. ACCUEIL DE LA DEMANDE

No 12-RDH.002. - CA Paris, 5 janvier 2001.

M.  Castel, Pt et Rap.  - M.  Le  Baut, Av. Gén.  - Me  Potentier, SCP Monod et Colin, Av.

DéCiSionS DES CommiSSionS ET JURiDiCTionS inSTiTUéES AUPRÈS DE LA CoUR DE CASSATion

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