231
Dr Wilbert Kreiss COURS DE THEOLOGIE PASTORALE © Centre de Documentation et d’Étude Chrétienne Sherbrooke, 2010

THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

  • Upload
    others

  • View
    1

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Dr Wilbert Kreiss

COURS

DE

THEOLOGIE PASTORALE

© Centre de Documentation et d’Étude Chrétienne

Sherbrooke, 2010

Page 2: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

2

Page 3: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

3

COURS

DE

THEOLOGIE PASTORALE

Page 4: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

4

Page 5: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

5

Avertissement au lecteur:

Les pages qui suivent ne sont en aucune façon un manuel de théologie pastorale,

mais de simples notes servant de canevas aux cours. Qu'on veuille bien les

prendre pour cela et ne pas attendre d'elles une perfection dans l'exposé et dans

la rédaction à laquelle elles ne prétendent pas.

Sommaire

1

Introduction - Le pasteur en tant que personne - Le pasteur et sa famille - La

paroisse - La vocation - Le pasteur et le public - Le pasteur en chaire - Le pasteur à

l'autel - La liturgie.

2

L'administration du Baptême - L'administration de la Sainte Cène - L'éducation

chrétienne des enfants et la confirmation - Le mariage et problèmes

annexes - L'enterrement chrétien.

3

Les visites pastorales - La cure d'âme (multiples aspects) - L'accompagnement

pastoral des mourants.

4

L'évangélisation - La formation des laïcs à des responsabilités et des ministères dans

l'Eglise - Le culte paroissial - Les relations publiques de la paroisse - Le

stewardship - La diaconie et la bienfaisance.

5

Les biens de la paroisse - L'administration de la paroisse - Le pasteur et le Synode - Le

pasteur et son vicaire - Le pasteur et les arts.

Wilbert Kreiss

199O

Page 6: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

6

Page 7: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

7

INTRODUCTION

Le meilleur cours de théologie pastorale ne fera pas de l'étudiant un bon

pasteur. Il faut pour cela, selon la devise de Luther, "oratio, meditatio et

tentatio".

Au milieu de ses responsabilités, le pasteur peut se décharger sur Dieu (1 Pi

5:7) dont vient toute aptitude en général, et l'aptitude pour le ministère en

particulier (2 Cor 5.6). De même, il faut l'étude constante de la Parole de Dieu

(Ps 1A19:99; 2 Tim 3:14-17). Enfin, l'épreuve (Héb 12:6; 2 Cor 12:9). Luther a

beaucoup souffert; sans cela, il ne serait pas devenu le Réformateur qu'il a été

(2 Cor 1:3.4).

Cependant le cours de théologie pastorale n'est pas inutile. Il est même

nécessaire. Il expose certains principes bibliques et montre leur application

pratique qui tient compte de l'époque et du contexte. La théologie pastorale

est fondée sur la Bible et sur l'expérience pastorale vérifiée de nombreux

pasteurs éprouvés.

__________

Page 8: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

8

LE PASTEUR EN TANT QUE PERSONNE

(1 Tim 3:1)

Le Christ a institué le ministère de la Parole et des sacrements. Il a aussi dessiné dans

l'Ecriture le portrait de ceux qu'il appelle à son service. Nous en avons d'autre part des

exemples vivants en lui-même et dans les apôtres. Un mot sur les qualités les plus

importantes d'un pasteur, telles qu'elles sont présentées dans les textes bibliques qui

décrivent les serviteurs de Dieu (1 Tim 3:1-7; Tite 1:6-9):

Le pasteur doit être

a) humble:

Les pasteurs sont soumis aux mêmes tentations que les autres; surtout à l'orgueil. Ils

s'occupent en effet de choses saintes, prêchent aux autres leurs péchés et la repentance, sont

bergers de troupeaux, etc. Ils sont considérés comme des docteurs, des ambassadeurs du

Christ. Ils portent un titre, et jouissent traditionnellement de l'estime et du respect des gens.

Page 9: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

9

D'où la tentation, et donc la nécessité de l'introspection. Cf. l'humilité de Moïse et d'Esaïe

refusant la mission qui leur était confiée, de David priant Dieu de lui donner un coeur pur,

de Paul se considérant comme le grand des pécheurs. Il faut que cette humilité transparaisse

dans tout le ministère, en particulier dans la façon de prêcher et de faire de la cure d'âme. Il

faut que les gens s'approchent de nous avec la confiance avec laquelle ils allaient trouver le

Christ, même avec leurs péchés...

Le pasteur doit toujours être prêt à reconnaître ses fautes. Nous ne sommes pas infaillibles.

L'humilité, quant à elle, fait naître l'esprit de douceur si important dans l'exercice du

ministère pastoral, ainsi que le respect des opinions d'autrui.

b) fort dans la foi:

L'humilité ne suffit pas pour servir le Christ. Les pasteurs doivent être des croyants remplis

du Saint-Esprit. Il faut qu'ils aient fait l'expérience personnelle du salut par la foi en Christ. Il

leur faut cette sagesse qui découle de la foi.

Sans foi, nous sommes incapables de préparer un bon sermon, de consoler les malades,

d'avertir celui qui s'égare, de lutter contre Satan dans la paroisse, d'affermir le chrétien dans

la tribulation ou le désespoir, d'avoir une optique correcte du monde. Le christianisme n'est

pas une philosophie, un code éthique, une simple morale, mais un chemin de vie et de salut. Il

faut une foi vivante pour apporter aux hommes la réponse à la plus grande question qui soit.

c) un homme de cœur:

Nous alimenterons notre foi aux sources de la Parole de Dieu, dans une étude constante,

Page 10: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

10

humble et croyante de la Bible, et dans la prière. Notre foi en grandira, et ainsi nous

deviendrons des hommes de cœur. Dans la famille (relations conjugales et parentales), dans

le monde (hommes de coeur devant les détresses du monde: famines, maladies, catastrophes,

incrédulité).

Et bien sûr, dans la paroisse: nous aurons un cœur pour les problèmes et difficultés de nos

paroissiens, des oreilles pour les entendre, de l'intérêt pour ce qui les préoccupe (souffrances

et joies). Nous ne céderons pas à l'amertume; nous ne nous comporterons pas en hommes

vexés, mais nous serons doux, patients... Nous nous contenterons de notre logement, de notre

salaire... Nous paierons nos dettes et serons honnêtes. Nous n'écouterons pas la médisance et

ne nous laisserons pas influencer par elle. Nous veillerons à l'harmonie entre notre vie privée

et notre ministère. Nous serons sincères et fidèles à la vérité.

Il s'agit aussi pour le pasteur de toujours être le même, à la maison, au bureau, en chaire,

dans la cure d'âme, au chevet du malade, en vacances, dans les réunions pastorales,

ecclésiales et sociales.

Il faut aussi qu'il garde le secret professionnel (les paroissiens ont bvesoin de cette

certitude). Politesse, courtoisie, affabilité, caractère sociable, homme aux relations faciles,

sans rudesse, impolitesse, sautes d'humeur, manquements à la bienséance, etc. Un pasteur ne

doit pas être un ours. Rien en nous ne doit empêcher les âmes d'accéder auprès du Christ.

Nous devons aussi ne jamais donner l'impression que le ministère est pour nous un métier

comme un autre, une façon de gagner notre vie. C'est une vocation, un sacerdoce!

d) capable d'enseigner:

On ne peut communiquer aux autres que ce qu'on sait soi-même. D'où la nécessité d'étudier

constamment. Avant tout l'Ecriture Sainte et les disciplines de la théologie, mais aussi des

Page 11: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

11

disciplines d'intérêt général. Il ne faut pas que le pasteur soit un inculte ou que sa culture soit

médiocre. D'autre part, il faut qu'il grandisse aussi dans l'art de communiquer aux autres ce

qu'il a appris. Les hommes du monde ne devraient pas être de meilleurs pédagogues que

nous.

e) irréprochable:

Non pas sans péché, mais tel qu'on ne puisse l'accuser d'un péché particulier (1 Tim 3:7). Il

doit être en toutes choses le modèle de son troupeau. S'il a commis un grave péché, de

notoriété publique, il peut, même s'il s'en repent, être disqualifié pour le ministère. En tout

cas là où il a scandalisé. Un changement de poste s'avère alors nécessaire. En cas de récidive,

il faudra le suspendre définitivement de son ministère.

f) sobre:

Non seulement dans son alimentation, mais aussi par l'équilibre qu'il montre dans ses

jugements, émotions, impulsions.

g) vigilant:

Fidèle dans son enseignement et sa conduite (2 Tim 4:5), apte à discerner les dangers,

erreurs, etc.

h) tempéré:

Apte à contrôler et maîtriser ses instincts et appétits, notamment dans ses relations avec

autrui (1 Tim 5:2; 2 Tim 2:22).

Page 12: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

12

i) ami des gens de bien:

Le terme est vaste. Sans se compromettre avec les incrédules et les faux docteurs, il s'agit de

ne pas ignorer ce qui est bien chez les autres. Par exemple, le dévouement de certaines

nonnes catholiques. En diffamant et en rejetant tout ce que font les autres, on ne fait

qu'élever des barrières et susciter l'incompréhension, la méfiance, voire l'hostilité des gens.

La justice civile existe!

k) hospitalier:

Dans les temps anciens, l'évêque devait recevoir beaucoup d'hôtes de passage. Les temps

ont changé, mais l'hospitalité reste capitale. Le presbytère doit être ouvert à quiconque y

frappe pour y trouver asile, conseil et aide.

Cf. aussi les qualités négatives énumérées dans 1 Tim 3:1-7; Tite 1:6-9 (pas cupide, pas

adonné au vin, pas coléreux, etc.).

Toutes les qualités requises des prédicateurs dans 1 Tim 3 et Tite 1, à l'exception de

l'aptitude à l'enseignement, sont exigées ailleurs dans la Bible de tous les chrétiens. Mais elles

doivent être présentes chez le pasteur à un degré supérieur. Les yeux sont tournés vers lui.

De sa conduite dépend l'image que beaucoup d'hommes se font de Dieu et donc de l'Eglise.

m) un connaisseur de l'homme:

Il faut connaître la psychologie humaine en général, plus précisément celle du Français

moderne qui est tributaire des circonstances familiales, politiques, économiques. D'où

nécessité d'entrer en contact avec lui, de connaître ses attitudes, ses intérêts, sa façon de

penser et de raisonner, ses habitudes. Jésus savait ce qui était dans le coeur de l'homme. C'est

pourquoi son ministère fut si efficace. Paul sut se faire tout à tous.

Page 13: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

13

Il faut donc être informé de l'actualité qui suscite les émotions et les réactions de gens et

détermine leur comportement. Ceci est vrai de tous les âges, et plus particulièrement de

l'adolescence. Malheur à celui qui s'imagine avoir appris durant ses 4 ou 5 ans de séminaire

tout ce qu'il faut savoir pour être un pasteur bon, utile et efficace!

Les gens sont plus cultivés à l'heure actuelle que jadis. Il faut donc que le pasteur veille

d'autant plus à sa propre culture. L'une des raisons pour lesquelles Paul semble avoir eu plus

de succès que les autres apôtres fut sans doute son niveau de culture.

n) en bonne santé:

Le ministère pastoral est éprouvant, quoi qu'en pensent les laïcs. Vie moderne très complexe,

stress, difficultés, déceptions, nécessité de faire face à bien des situations. Prêcher est

fatigant. La concentration dans la cure d'âme l'est aussi, ainsi que la direction des assemblées

paroissiales, la lutte contre Satan dans la paroisse, la recherche de paroissiens négligeants, le

passage en peu de temps d'un mariage à un enterrement, le changement souvent rapide de

situation, la diversité des caractères dans sa paroisse et parmi ses collaborateurs, etc.

D'où nécessité de soigner son corps et sa santé (alimentation, boissons, tabac, sommeil, repos

hebdomadaire, activités physiques). Danger du sédentarisme.

o) propre et soigné:

Les gens nous regardent comme des ministres du Christ. D'où la nécessité d'une bonne

présentation. Propreté, netteté (cols che chemises, cheveux, ongles, dents, pantalon repassé,

souliers cirés). Pas de laisser-aller sous prétexte qu'on veut être cool et dans l'espoir de

plaire aux jeunes!

Page 14: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

14

LE PASTEUR ET SA FAMILLE

Le pasteur a un double devoir, familial et paroissial. Les presbytère sont une pierre de touche

pour le pasteur qui lui permet de vérifier son degré d'autodiscipline. Il doit pouvoir se

contrôler lui-même, avant de diriger sa famille et, pouvoir diriger sa famille avant de diriger

sa paroisse (1 Tim 3:4.5). Sa famille est donc le terrain où il peut exercer sa connaissance de

l'homme, sa compréhension des problèmes d'autrui et son tact pastoral.

Il doit prendre spirituellement soin de sa famille (culte familial, édification, instruction, etc.).

Il doit aussi se ménager des heures de détente qui constituent un tonique pour lui et les siens.

Sa maison doit être accueillante, hospitalière. Les paroissiens aussi bien que les étrangers

doivent s'y sentir les bienvenus et à l'aise. Il importe aussi que le pasteur sache se contrôler

aux heures difficiles de la vie de son foyer. La prière et le recours à la Parole de Dieu seront

son refuge.

Le pasteur et sa femme:

Prov 18:22; 19:14b. C'est ce qui dicte au pasteur le choix de son épouse. Il faut qu'elle soit

une femme de foi qui comprenne son ministère, l'épaule, le console, l'encourage. Elle doit par

Page 15: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

15

ailleurs être humble, agréable, diligente, discrète, compréhensive... L'attitude et le

comportement du couple pastoral sont observés par la paroisse et par les gens du dehors.

D'où 1 Pi 3:7 et Eph 5:22. Les deux doivent inspirer le respect et l'affection par leur

comportement conjugal. Un foyer bien tenu, une famille solide, pieuse et bien organisée

témoignent de la foi, de l'autodiscipline, de l'équilibre du couple pastoral. Le pasteur et sa

femme doivent aussi pouvoir bien administrer les biens terrestres dont ils jouissent et leur

budget mensuel. Il faut qu'ils aient en cela une bonne réputation.

Femme du pasteur ou femme de pasteur? Elle est appelée certes à jouer un rôle dans la

paroisse, mais n'a pas d'autres fonctions que celles que la paroisse veut lui confier. Elle sera

avant tout un modèle d'épouse et de mère et assumera les responsabilités qu'on lui confiera

avec simplicité, humilité, discrétion, un esprit de foi et de prière.

Est-il normal ou légitime que la femme du pasteur exerce une activité professionnelle?

Arguments pour: mise au service de la collectivité des dons qu'elle possède (institutrice,

infirmière, etc.), apport financier utile et parfois nécessaire, épanouissement, surtout si les

enfants ont quitté le foyer, ce qui suscite généralement un grand vide dans la vie d'une

épouse. Arguments contre: le travail de la femme est souvent à l'origine de difficultés

conjugales et a déjà contribué à briser bien des foyers; le mari peut ressentir avec

douleur qu'il n'est pas capable de faire vivre sa famille, surtout si sa femme gagne plus que lui

(mais ces difficultés ne sont pas propres aux femmes de pasteurs); d'autre part, la femme du

pasteur doit aider son mari de bien des façons: répondre au téléphone, courrier, participer à

des activités paroissiales comme la chorale, l'école du dimanche, le cercle de dames, la

bienfaisance (on attend souvent d'elle qu'elle organise ces activités). Elle peut donner aussi

l'impression qu'elle travaille pour satisfaire des besoins coûteux, des exigences personnelles.

Enfin, elle risque de transformer son mari en baby-sitter chargé de la remplacer bien des fois,

et donc moins disponible pour son ministère.

Page 16: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

16

Enfin, le statut de femme de pasteur peut générer bien des frustrations: absences fréquentes

et prolongées du mari, soirées en solitaire, soucis du mari, budget modeste.

Le pasteur et ses enfants:

Le pasteur ne doit pas se décharger sur sa femme de ses obligations de père, sous prétexte

qu'il a beaucoup de travail (1 Tim 3:4; Eph 6:4).

Les enfants du pasteur grandissent souvent dans le complexe qu'ils sont enfants de pasteur,

et de ce fait différents des autres. Les gens y contribuent parfois, si bien que les enfants du

pasteur en souffrent. Le pasteur doit les assister en cela et les aider à croître dans la foi, les

rendre heureux et faire d'eux des chrétiens responsables.

__________

Page 17: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

17

LA PAROISSE CHRETIENNE

La paroisse est le principal champ d'activité du pasteur. Il doit donc en connaître la nature et

les responsabilités que Dieu a confiées à son Eglise.

1) Définition:

Groupe de chrétiens se réunissant régulièrement autour de la Parole de Dieu et des

sacrements. Tout groupe de chrétiens n'est donc pas une paroisse. "Ekklèsia": 1) tout groupe

d'hommes (Act 19:32.39.41); 2) "Una Sancta" (Eph 5:23-27; Mt 16:18; Eph 1:22.23); 3)

paroisse, Eglise locale (Mt 18:17; 1 Cor 1:2; Act 5:11). Les hypocrites en font partie

"secundum societatem externam".

L'Eglise locale, la paroisse, est d'institution divine (Mt 18:17; Act 2:41). Elle est servante du

Christ (Act 13:2). L'Eglise locale doit avoir un pasteur (Tite 1:5), ce qui prouve son institution

divine.

2) Appartenance à la paroisse:

Elle présuppose la confession de la foi chrétienne. Les enfants sont reçus dans l'Eglise par le

Page 18: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

18

baptême; les adultes le sont d'une des façons suivantes:

- par baptême ou confirmation d'adulte (gens venant

d'Eglises hétérodoxes ou sans Eglise);

- lettre de transfert (adultes venant d'une autre paroisse

du Synode ou d'une Eglise sœur);

- par profession de foi de membres qui se sont

momentanément détournés de l'Eglise et veulent y revenir.

Le pasteur consciencieux doit les examiner. Il doit aussi vérifier

qu'ils n'ont pas été l'objet d'une excommunication.

Le pasteur recevant de nouveaux membres leur rappellera les privilèges de

l'appartenance à une paroisse et les exhortera à participer activement à la vie de

l'Eglise, à mettre leur temps, talents et dons à son service.

Il y a trois types d'appartenance à l'Eglise:

- les âmes (enfants et adultes appartenant à la paroisse

et qui relèvent de ses soins spirituels);

- communiants (confirmés);

- électeurs (traditionnellement les hommes ayant atteint

la majorité ou un âge défini et qui ont signé la constitution).

Certains affirment qu'on peut être chrétien sans appartenir à une paroisse.

Page 19: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

19

Mais 1) Jésus veut qu'on se rattache à une paroisse (Héb 10:25; 1 Jn 2:19; Lc

10:16; Col 3:16);

2) aucun chrétien ne peut accomplir tous ses devoirs de chrétien s'il reste

en dehors d'une paroisse;

3) le charbon sorti du feu s'éteint (1 Cor 12);

4) un membre du corps du Christ doit obligatoirement coopérer avec ceux

qu'il reconnaît comme ses frères dans la foi.

3) Privilèges de la paroisse:

Composée de prêtres et de rois (1 Pi 2:9; Apoc 5:10), la paroisse détient le sacerdoce

universel. Elle a le pouvoir de mettre en place le ministère de la Parole et des

sacrements (Mt 28:18-20; 1 Cor 12:28; Act 6:6; 13:2.3), d'édifier ses membres dans la

foi (Eph 4:11-16), d'administrer la Cène (1 Cor 11:23-25), de pardonner et de retenir les

péchés et, en cas de besoin, d'excommunier (Mt 18: 17.18; 1 Cor 5:7.13). Cf. Luther,

W2 XVII, 1074. L'Eglise locale possède donc l'autorité suprême, contrairement à ce

qu'affirme Rome qui soutient que cette autorité appartient à une hiérarchie divinement

instituée. Cf. Mt 18:17.18; 1 Cor 3:21-23.

4) Devoirs de la paroisse:

Les privilèges impliquent toujours des devoirs (Lc 12:48).

a) Devoirs en rapport avec la Parole:

Dieu a confié à l'Eglise sa Parole (2 Cor 5:19). Elle doit être prêchée (2 Thess 3:1). Tout

Page 20: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

20

chrétien en a le pouvoir. Mais, pour que règne l'ordre (1 Cor 14:40), une paroisse doit

faire appel pour cela à un (ou plusieurs) pasteur(s) qui exerce le ministère au nom de

tous (1 Tim 3:1-7; Tite 1:5-9). La paroisse doit veiller aussi à la pureté de la doctrine

(Gal 5:1; Mt 7:15; Rom 16:17; 2 Jn 10.11). Cf. Luther, W2 XIX, 341; Articles de Smalcalde

(Triglotta, p. 519).

b) Devoirs envers les frères en la foi:

- Garder l'unité de l'Esprit (Eph 4:3), tout faire pour la promouvoir, éviter tout ce qui

pourrait la détruire. Se soucier du bien-être spirituel de chacun (Rom 12:15; 1 Thess

4:18; Rom 15:1).

- Prendre soin des pauvres (Gal 2:9.10).

-Sauver celui qui s'égare (erreur doctrinale ou vie impie) et qui détruit ainsi l'unité de

l'Esprit. D'où nécessité de la discipline ecclésiastique, qui a pour seul but le salut du

frère (1 Cor 5:5; Mt 18:15-20; Jac 5:20).

Faire ici une exégèse de Mt 18:15-20, en ajoutant les précisions suivantes:

- "De occultis Ecclesia non judicat!"

- On n'excommunie ni des enfants (sous l'autorité de leurs parents), ni des malades

mentaux (irresponsables).

- On ne peut excommunier que des gens qui se disent nos frères et sont membres de la

communauté (1 Cor 5:13).

Page 21: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

21

-Il faut que l'intéressé ait commis un péché mortel (1 Cor 5:11; Gal 5:19-21) ou qu'il nie

un article fondamental de la foi chrétienne (2 Jn 10.11; Tite 3:10; Rom 16:17.18; Jn

8:42-46).

- On n'excommunie pas quelqu'un qui ne met plus les pieds à l'église.

- S'assurer que l'intéressé a bien commis ce qu'on lui

reproche (2 témoins), que les deux étapes préalables de Mt ont eu lieu (sauf en cas de

scandale public où on peut brûler ces étapes).

- Le vote d'excommunication doit être unanime. Si l'impénitence est manifeste, ceux qui

désapprouvent l'excommunication se rendent participant du péché de l'excommunié.

Bien exécutée, l'excommunication a lieu au nom du Christ (Mt 18:18). L'excommunié

n'est plus considéré comme un chrétien, un frère. Il perd ses droits et privilèges de

membre (Sainte Cène, parrainage, enterrement chrétien). Le ciel lui est fermé aussi

longtemps qu'il ne se repent pas (1 Cor 5:5; 1 Tim 1:20; Jn 20:22).

L'excommunication est une obligation divine (1 Cor 5; Apoc 2:14.20). En ne pas

excommuniant l'impénitent, on l'approuve (1 Cor 5:6) et on offense les autres membres

de la paroisse, les paroisses-sœurs et le Synode. C'est une mesure qui préserve la

paroisse de la déchéance spirituelle. Elle a un double but: la repentance et le salut de

l'intéressé, et la santé spirituelle de la paroisse qui doit se préserver de toute

contamination.

c) Devoirs envers le Synode:

Le Synode est un corps consultatif qui ne peut rien imposer à ses paroisses, ni les

déposséder de leurs privilèges, ni se substituer à elles. Il ne peut pas excommunier un

Page 22: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

22

pasteur ou un laïc, baptiser ou administrer la Sainte Cène.

La paroisse a des devoirs envers le Synode... Elle ne rejettera pas ses résolutions dans

les adiaphora sans des motifs valables. Cf. le chapitre sur le Synode.

d) Devoirs envers les paroisses sœurs:

Liens d'estime et d'amour fraternels. Une paroisse ne cherche pas à attirer à elle les

membres d'une paroisse soeur, et ne refusera pas une lettre de transfert à un

membre désirant se rattacher à une paroisse soeur. Une paroisse respectera aussi la

mesure d'excommunication prise par une paroisse soeur. Elle ne recevra un

excommunié que s'il a fait amende honorable devant la paroisse qu'il a offensée. Une

paroisse soutiendra toujours les efforts missionnaires tendant à la création d'une

autre paroisse dans le voisinage.

e) Devoirs envers les autres Eglises:

- Devoir de fidélité doctrinale et de témoignage (Jude 6; Jn 8:31.32; Tite 1:9-11; 2:1).

- Se garder des faux prophètes, éprouver les esprits, se désolidariser de toute erreur (Mt

7:15; 16:6; Eph 4:14; Rom 16:17.18; 1 Jn 4:1; 2 Jn 9-11; 1 Tim 6:3-5.20.21; Tite 3:10).

- Devoir d'œuvrer et de prier pour l'union véritable, d'établir la vraie communion

partout où cela est possible (Act 8:14 s.; 11:22-24; Act 15).

- S'efforcer de rétablir l'unité de la foi avec ceux avec qui on n'est pas en

Page 23: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

23

intercommunion (Eph 4:3; 1 Jn 1:3.

- Restaurer cette unité quand elle est menacée (Act 15: Gal 2:11 ss.). Ne pas agir ainsi

serait se rendre coupable de séparatisme.

- Pas d'unionisme ni d'œcuménisme! Pas de "communio in sacris" (culte, œuvre

missionnaire...) avec ceux avec qui la paroisse n'est pas unie dans la profession de foi.

C'est ainsi qu'un pasteur luthérien ne peut pas participer à des cultes œcuméniques,

offrir sa chaire à des pasteurs non orthodoxes, donner une lettre de transfert à

quiconque veut se rattacher à une Eglise hétérodoxe, encourager un fidèle à se rattacher

à une telle Eglise. Il instruira aussi consciencieusement toute personne provenant d'une

telle Eglise avant de la recevoir dans sa paroisse. Cela ne signifie pas que nous devions

fuir tout contact avec les autres Eglises. Il faut les traiter avec courtoisie et amour

chrétien, se réjouir des points communs qu'on peut avoir avec elles et se réjouir aussi

de ce qu'il y a chez elles des chrétiens, des membres de l'Una Sancta. Une coopération

est possible avec elles, mais seulement "in externis", notamment dans les œuvres de

charité. On recherchera aussi les occasions de témoigner. Le pasteur doit pour cela

s'assurer que la paroisse comprend que tel est le but de sa démarche.

__________

Page 24: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

24

LA VOCATION AU MINISTERE

Le ministère de la prédication a son fondement dans la volonté du Christ de sauver le

monde. C'est sa seule raison d'être. Il faut s'en souvenir dans l'étude des différentes

phases de la vocation (qualifications du candidat, désir d'un changement de paroisse,

champ de travail plus important, etc.).

C'est un ministère glorieux (2 Cor 3:4-11). Les apôtres l'ont mis en place ou fait mettre

en place dans les Eglises locales (Tite 1:5; Act 14:23). C'est de ces Eglises que les

prédicateurs doivent prendre soin (1 Tim 3:5; Act 20:28; 1 Pi 5:3).

En choisissant un pasteur, l'Eglise ne renonce à aucun de ses droits. Le pasteur n'est pas

pape et chef, mais serviteur (1 Cor 4:1; 2 Cor 4:5). Les femmes par ailleurs sont exclues

du ministère (1 Tim 2:11-14; 1 Cor 14:34.35). Cf. Luther, W2 XVI, 2280.

Le pasteur n'entre pas dans son ministère par une disposition d'une hiérarchie

ecclésiastique. Cf. la doctrine de l'ordination. Pas de succession apostolique autre que

doctrinale (Gal 1:8). La succession apostolique n'est pas une "nota" de l'Eglise. Seules

sont "notae" la prédication pure de l'Evangile et l'administration correcte des

sacrements (Confession d'Augsbourg, VII).

Page 25: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

25

Est d'institution divine non seulement le ministère par "vocatio immediata", mais aussi

celui par "vocatio mediata". Des hommes font appel à un pasteur (Act 14:23; 1 Tim 4:14;

Tite 1:5), et pourtant celui-ci est ministre par la volonté de Dieu (Eph 4:11; 1 Cor 12:28;

Act 20:28). Paul, quoiqu'appelé par le Christ par "vocatio immediata", se situe au

même niveau que les ministres appelés par "vocatio mediata" ( Col 4:7; Phil 2:25; 1 Pi

5:1).

Il n'existe plus de vocation immédiate qui habilite à l'exercice du ministère de la

prédication.

La certitude de l'origine divine du ministère de la prédication est importante et contient

une leçon 1) pour le pasteur (exhortation et consolation) et 2) pour la paroisse

(exhortation et consolation).

La vocation valide ("vocatio rata"):

Pas d'exercice du ministère sans appel de la part de Dieu! Cf. Rom 10:15 et le "rite

vocatus" de la C.A. XIV.

La vocation est dite valide quand elle vient de ceux à qui Dieu a confié ce droit. Donc de

l'Eglise locale (sauf exceptions) à qui sont confiés les moyens de grâce et qui appelle

donc au ministère (Mt 18:18; Jn 20:22). Cf. le Tractatus de Potestate et Jurisdictione

Episcoporum de Mélanchthon, 67-72, et Apologie, Art. VII et VIII.

Signalons que certaines vocations sont adressées par des commissions spécialisées:

missionnaires, professeurs de théologie, ministères de production littéraire, ministères

par les médias, etc. Là aussi, ordination et installation sont requises.

Page 26: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

26

Si un homme peut prêcher l'Evangile à des païens sans autre vocation que l'appel

intérieur, il ne peut le faire à un groupe de chrétiens, à moins d'être mandaté par eux. La

vocation par une paroisse est d'origine divine (Act 20:28; Eph 4:11 s.; 1 Cor 12:28 ss.).

Pour la vocation des diacres, cf. Act 6:1-8; Tite 1:5.

La présence d'un pasteur ou d'un représentant du Synode, pour souhaitable qu'elle soit,

n'est pas nécessaire pour qu'une vocation soit valide. Elle est souhaitable non pour

rendre l'appel valide, mais parce que l'Eglise qui appelle a besoin de conseils.

Si l'ancien pasteur est là, la sagesse exige qu'il quitte au moins temporairement

l'assemblée, pour ne pas l'influencer et pour lui permettre de s'exprimer librement.

L'Eglise locale est dite représentée, quand elle adresse vocation ("Ecclesia

repraesentativa"). Elle l'est d'ordinaire par ses membres électeurs, mais peut l'être

aussi par son conseil presbytéral. Mais ceux qui adressent vocation le font toujours sur

la demande de l'Eglise locale, doivent agir en son nom et dans l'intérêt de la paroisse

tout entière. Une paroisse peut déléguer le droit de vocation à une instance (par

exemple, par l'envoi d'un bulletin blanc au "Board for Assignement" dans le Synode du

Missouri). Une telle vocation émane malgré tout de la paroisse. Cependant, une paroisse

ne devrait jamais renoncer par principe à son droit à la vocation.

Ethique de la vocation: Ecouter les conseils des représentants du Synode - Songer au

bien-être du Synode tout entier et du pasteur appelé - Renoncer éventuellement à un

pasteur sur place, si un pasteur du voisinage peut prendre la paroisse en charge, etc.

Le fait qu'il existe du désordre ou de la corruption dans une paroisse n'invalide pas son

appel. Celui-ci est valide en raison des vrais chrétiens qui s'y trouvent. Cf. C.F.W.

Walther, Pastoraltheologie, p. 32 s. Même la vocation d'une paroisse hétérodoxe est

Page 27: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

27

valide, car elle émane de chrétiens et c'est à cause de cela et non de l'orthodoxie qu'elle

est valide.

Il faut distinguer entre la paroisse/Eglise de Dieu et la paroisse/association cultuelle

régie par la loi. Cette dernière n'est qu'une institution divine. Seule l'Eglise de Dieu

adresse vocation. C'est pourquoi le ministère est d'origine divine et ne peut pas prendre

la forme d'un contrat humain dont les clauses seraient fixées comme celles d'un contrat

d'entreprise.

Vocation légitime:

Pour être légitime, il faut que la vocation s'adresse à un homme susceptible d'en

recevoir une, c'est-à-dire qui remplit les conditions fixées par la Bible dans 1 Tim 3 et

Tite 1 et qui est attaché à la "saine doctrine", partageant la même foi que la paroisse qui

l'appelle. Il faut aussi qu'elle se soit déroulée dans de bonnes conditions, sans

manipulations d'aucune sorte. Celles-ci pourraient provenir de la paroisse qui appelle,

d'un groupe de la paroisse ou du candidat.

Un pasteur peut aspirer à un changement de paroisse pour des motifs divers. Certaines

raisons sont légitimes...., d'autres ne le sont pas... Cependant il ne doit jamais douter de

la divinité de son appel dans la paroisse qu'il dessert et en rechercher un autre. Ceci

n'empêche pas qu'un pasteur possédant des charismes particuliers puisse offrir ses

services pour un ministère précis (aumonerie d'hôpital ou de prison, mission dans

bidonville ou auprès de malades mentaux, d'handicapés ou de marginaux, etc.).

Des handicaps personnels peuvent justifier le désir d'un changement (âge avancé, santé

fragile, sentiment d'avoir fait son temps dans une paroisse, etc.).

Page 28: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

28

Un pasteur a pu manoeuvrer pour obtenir un appel. Doit-il douter de la divinité de son

appel? Non! Par contre, il doit se repentir.

Une vocation ne peut être temporaire, a priori limitée dans le temps, à moins qu'il ne

s'agisse de la vocation à un ministère spécialisé qui exige des aptitudes tout à fait

particulières. Pourquoi? Parce que la vocation émane de Dieu (Act 20:28; Eph 4:11; 1

Cor 12:28; Act 1:24). Seul Dieu peut mettre fin au ministère qu'il a confié à un homme. Il

le fait par l'incapacité physique ou mentale, la mort ou en cas de fausse doctrine ou de

vie impie. Cf. Os 4:6; 1 Tim 3:7; 1 Cor 4:2. Dans ce dernier cas, Dieu se sert de l'Eglise

pour accomplir sa volonté (Mt 23:8; 2 Tim 4:2-5).

Un appel temporaire est aussi contraire au devoir de soumission et d'honneur qui est

celui de la paroisse à l'égard de son pasteur (Lc 10:16; 1 Tim 5:17; 1 Thess 5:12.13; 1

Cor 16:15.16; Héb 13:17). Limiter un appel dans le temps, c'est limiter le respect,

l'honneur ou la confiance dus au pasteur. Enfin, l'appel temporaire ouvre la porte à

l'arbitraire et au désordre.

Sont à exclure de ces considérations certaines tâches limitées dans le temps

(remplacement temporaire du pasteur titulaire, vicariat, accomplissement d'une tâche

telle que prospection missionnaire, etc.). Par ailleurs, un pasteur, bien que refusant un

appel temporaire, ne peut s'engager à rester toute sa vie dans une même paroisse. Ce

serait incompatible avec les desseins de Dieu que l'homme ne connaît pas et avec la

dignité et les fonctions du ministère.

Quand un pasteur est convaincu de l'origine divine d'un appel, il ne doit pas le décliner

pour des raisons de convenance personnelle ou en raison du sentiment de son

incapacité. Cf. l'exemple de Moïse (Ex 3).

Page 29: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

29

Conditions qu'un pasteur peut poser:

- que la paroisse désire être desservie comme paroisse

Evangélique Luthérienne Confessionnelle;

- qu'elle accepte donc tout l'enseignement de l'Ecriture

et des Confessions Luthériennes;

- qu'elle lui permette de s'acquitter de son ministère

conformément à son vœu d'ordination, en toute bonne

conscience. Un pasteur peut accepter une vocation

d'une paroisse hétérodoxe à la seule condition défi-

nie ici. Un pasteur luthérien peut aussi accepter de

prêcher ou de donner une conférence occasionnelle dans

un Eglise hétérodoxe pour rendre témoignage (1 Pi 3:10),

mais à condition de ne compromettre en rien la vérité et

de consulter auparavant sa paroisse;

- qu'elle lui accorde des moyens de subsistance décents.

Dès qu'un pasteur a reçu vocation, il doit en accuser réception avec promesse d'y

réfléchir et d'y répondre dans un délai raisonnable.

Un pasteur ne peut exiger de la paroisse qui l'appelle qu'elle se conforme à toutes les

coutumes et cérémonies de l'Eglise Luthérienne. Cf. Confession d'Augsbourg, Art. VII et

Formule de Concorde, S.D. IX, 9.

Un pasteur ne peut tolérer du matériel littéraire (catéchismes, recueils de cantiques,

Page 30: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

30

manuels d'instruction religieuse) contenant de fausses doctrines. Il sera cependant

patient et tâchera de convaincre. C'est une bonne occasion pour enseigner la vraie

doctrine. Il ne peut pas non plus exiger, avant d'accepter l'appel, que la paroisse s'affilie

à un Synode (adiaphoron), ni promettre à la paroisse que lui-même ne le fera jamais.

Le pasteur doit être rémunéré pour son travail:

Il doit recevoir ce que mérite son labeur (Mt 10:9.10; 1 Tim 5:18; 1 Cor 9:14; Gal 6:6). Il

faudrait donc que le pasteur puisse se consacrer entièrement à son ministère, sans avoir

à chercher des ressources ailleurs.

Echelle de salaires uniforme dans le Synode, ou salaires fixés par les paroisses?...

Cela dit, le pasteur doit savoir vivre dans le contentement (Phil 4:11-13). Il ne

revendiquera pas auprès de la paroisse, mais lui déploiera toutes les richesses de

l'Evangile et vivra une vie de consécration exemplaire. Ainsi, la paroisse ne manquera

pas de lui donner ce à quoi il a droit pour pouvoir vivre décemment.

Personne ne surveille les horaires de travail du pasteur. Il n'a pas à pointer le matin,

comme les ouvriers. Aucun patron n'est là pour le surveiller. Il fera donc bien de se

demander de temps en temps si son travail vaut le salaire qu'on lui verse.

Il n'y a en principe rien à objecter au versement de casuels, à condition toutefois qu'ils

ne soient pas assimilés à des pourboires. D'autre part, la solidarité avec ses frères dans

le ministère peut inciter un pasteur à les refuser. Par contre, il acceptera volontiers les

dons en nature qu'on pourra lui faire comme gages d'estime et de gratitude. Les casuels

ne sont pas dus au pasteur, car il est payé pour son ministère. Il va de soi qu'il ne les

Page 31: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

31

sollicitera pas. il ne montrera pas davantage de la déception, si on ne lui en offre pas.

Il est évident que le pasteur a droit au remboursement de ses frais de fonctionnement

(téléphone, timbres, fournitures de bureau, frais de déplacements, etc.).

L'appel d'une paroisse dans une autre:

Le fait qu'un pasteur reçoive une vocation d'une autre paroisse ne signifie pas

nécessairement que Dieu veuille l'appeler ailleurs. Alors se pose l'une des plus graves

questions dans la vie d'un serviteur de Dieu: Quelle est la volonté de son Seigneur?

Il faut évoquer le pour et le contre. Le pasteur ne doit changer de poste que s'il est

convaincu que Dieu le souhaite et l'appelle ailleurs. La question vitale est la suivante:

Peut-il, avec les dons qu'il a reçus, servir mieux le Royaume de Dieu dans la paroisse qui

l'appelle? Et quelles seraient pour sa paroisse actuelle les conséquences de son départ?

Il ne doit pas partir en raison de difficultés qu'il rencontre dans sa paroisse présente. Il

est aussi le pasteur des fauteurs de troubles. Par contre, il fera bien d'accepter l'appel,

s'il a perdu la confiance de sa paroisse ou d'un grand nombre de fidèles.

Il fera appel aux conseils de frères expérimentés et se posera les questions suivantes:

- Quelle est la volonté de Dieu?

- Mon ministère actuel prospère-t-il?

- Ai-je les dons requis pour mon ministère actuel?

- Pourrais-je mieux utiliser mes dons ailleurs?

- Mon âge avancé pourra-t-il assumer les charges d'une

paroisse éventuellement plus grande?

Page 32: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

32

- Ai-je l'expérience nécessaire pour un nouveau ministère?

- Je parle deux langues et les utilise dans ma paroisse actuelle. Ce don ne

sera-t-il pas enterré dans une nouvelle paroisse?

- Quel poids prend dans mes réflexions ma situation familiale

et financière?

- Où se situe l'intérêt du Synode?

Il pourra mieux répondre à ces questions en consultant des frères dans le ministère plus

expérimentés que lui. Il est bon aussi de consulter la paroisse actuelle, sans cependant

faire dépendre sa décision de son opinion. Parfois cependant il prendra sa décision sans

le faire, tout à fait indépendamment. Cependant, il ne mettra jamais sa paroisse devant

un fait accompli. Ce serait un affront fait à l'Eglise de Dieu.

Il doit chercher à obtenir une "firedliche Entlasung". S'il ne le peut en raison de

l'incompréhension et de l'entêtement de sa paroisse, il prendra sa décision et

l'assumera en son âme et conscience.

Inversement, il ne déclinera pas une vocation, parce que de plus grandes difficultés

l'attendraient dans la nouvelle paroisse, que le presbytère y serait moins confortable,

les gens moins sympathiques ou d'un standing plus modeste, ou encore le salaire plus

bas. La prise en considération des aspets financiers d'un appel est sans doute justifiée (1

Tim 5:8), mais elle ne devrait pas avoir plus de poids que ne l'autorise 1 Pi 5:2.

Pas de prédication test ni de matériel audiovisuel pour se faire connaître de la paroisse

vacante! Ce sont des méthodes publicitaires indignes du Royaume de Dieu.

Le vote doit-il être unanime? Non, car le choix d'n pasteur relève d'un jugement porté

sur lui, non seulement sur son enseignement et ses qualifications professionnelles, mais

Page 33: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

33

aussi sur sa personnalité. C'est donc un adiaphoron. Mais ce serait un choc pour un

pasteur arrivant dans sa nouvelle paroisse que d'apprendre qu'une grande minorité

n'était pas pour lui. Donc sans doute pas de vote "einstimmig", mais un vote "einmütig":

tous doivent se rallier à l'avis de la majorité.

S'il y a opposition justifiée contre un pasteur (faux docteur, vie déréglée, manque de

qualifications scripturaires, inadéquation pour un ministère précis), elle doit se

manifester avant le vote, et non surgir après. Il ne faut faire figurer comme candidats

que des hommes qui ne soulèvent aucune objection valide.

Le pasteur ne doit obéir qu'à sa conscience. Il ne doit jamais agir dans le doute (Rom

14:23b). Il lui faut donc prier pour que Dieu l'éclaire sur sa volonté.

Dans la nouvelle paroisse:

Cérémonie d'installation dès que possible. Nous ne faisons pas de différence essentielle

entre ordination et installation. On a l'habitude d'appeler ordination l'installation d'un

pasteur dans son premier ministère. L'ordination, tout comme l'installation, ne doit pas

se faire avant l'acceptation d'une vocation.

La faculté ou le séminaire sont l'instance certifiant que le candidat a les qualifications

requises. Le président de district ou de région est celui qui procède à l'ordination et à

l'installation. Précisons qu'un pasteur ordonné n'est pasteur qu'aussi longtemps qu'il

exerce un ministère. Il n'est pas pasteur à vie, mais "pastorabilis"...

Le sermon d'installation prononcé par le pasteur installé développe la double vérité

suivante: Ce que la paroisse doit et peut attendre de son pasteur, et ce que le pasteur est

Page 34: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

34

en droit d'attendre de sa paroisse. L'accent sera mis sur l'Evangile du salut et sur la

façon dont pasteur et paroisse sont appelés à glorifier le Seigneur.

Le nouveau pasteur doit aussitôt visiter tous ses paroissiens (Act 20:20.31; 1 Thess

2:11; Ez 34:16; 1 Tim 5:1-3), en particulier les malades et les affligés (Jac 5:14; Mt

25:36). Il doit leur faire sentir à tous qu'il a un coeur de pasteur.

Le pasteur doit impérativement respecter son prédécesseur. Si des changements sont

nécessaires dans la paroisse, il les fera sans passer de jugement sur le pasteur antérieur.

Il faut toujours faire preuve de beaucoup de tact, de sagesse et de patience dans une

nouvelle paroisse. Un nouveau pasteur ne doit jamais se présenter en réformateur,

innovateur ou iconoclaste.

Suspension du pasteur:

Elle n'est légitime que pour des raisons bibliques: fausse doctrine (Tite 1:9), mauvaise

conduite (1 Tim 3:1-7), négligence délibérée des devoirs du ministère (1 Cor 4:1.2).

Un pasteur qui a publiquement scandalisé n'est en principe plus habilité pour un

ministère, en tout cas pas dans la paroisse où il a causé scandale. Et ailleurs seulement,

s'il s'est repenti publiquement devant ceux qu'il a offensés par sa conduite. Une paroisse

qui a congédié son pasteur sans raisons bibliques ne pourra en obtenir de nouveau que

si elle a fait amende honorable, confessé son péché et demandé pardon à son ancien

berger.

Si un pasteur n'est plus capable de bien assumer son ministère, la paroisse peut et doit

l'inviter à accepter un nouvel appel ou à prendre sa retraite. Mais elle le fera avec

beaucoup de sagesse, d'amour et de considération.

Un pasteur ne doit jamais renoncer au ministère, chercher un autre travail ou

Page 35: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

35

revendiquer la retraire, s'il n'a pas pour cela des raisons évidentes et valides (1 Cor

9:16.17.22b).

Le diplôme de vocation:

Une vocation pourrait à la limite être adressée et acceptée oralement. Mais un

document écrit est une bonne chose. Il est un rappel constant des engagements pris par

la paroisse qui appelle et par le pasteur appelé. Ce diplome annonce qu'en réunion

paroissiale, la paroisse X a adressé vocation au pasteur Y. Elle le prie de considérer cette

vocation comme divine et de l'accepter. Elle lui demande de venir exercer le ministère

conformément à l'Ecriture Sainte et aux Confessions Luthériennes, par la prédication,

l'instruction religieuse et la cure d'âme. Elle assure le pasteur que la paroisse le recevra

comme le berger que Dieu lui donne et qu'elle se soumettra à son enseignement, en

utilisant avec ferveur les moyens de grâce qu'il administrera, en l'aimant, le respectant

et le soutenant par la prière. Enfin, le document dit comment la paroisse compte

subvenir à ses besoins matériels. Une lettre d'accompagnement peut donner des

précisions supplémentaires (dimensions de la paroisse, possibilités d'extension

missionnaire, accents particuliers à donner au ministère, projets de construction, etc.).

Cf. un exemplaire de lettre de vocation, in The Pastor at Work, p. 102, ou Fritz, Pastoral

Theology, p. 56.

__________

Page 36: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

36

LE PASTEUR ET LE PUBLIC

Une paroisse n'a pas le droit de garder l'Evangile pour elle. Elle est tenue de l'annoncer

à la collectivité dans laquelle elle vit. Ce devoir incombe plus particulièrement encore au

pasteur.

Dans ses rapports avec cette collectivité extérieure à sa paroisse, le pasteur doit

incarner au plus haut point les qualités d'âme et de coeur et les vertus que le Christ

attend de tous les chrétiens.

Il veillera aussi à des relations amicales et cordiales avec les autres dénominations

religieuses. Cependant il ne dépassera jamais les limites que lui imposent l'Ecriture et

son appartenance à son Synode. Ceci est nécessaire pour la bonne réputation dont son

ministère jouira aux yeux des membres d'autres Eglises.

Il en va de même pour les relations avec la communauté civile. Le pasteur représente

Jésus où qu'il aille. Des dettes impayées, de constantes amendes, un ton offensant dans

les conversations sont donc déplacés. Il convient aussi que sa paroisse prenne part à la

vie de la commune et prenne à coeur ses problèmes et ses soucis, qu'elle soutienne ses

efforts dans le domaine social, etc. L'abstentionnisme et l'ostracisme ne sont pas de

mise.

Page 37: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

37

La paroisse doit être consciente de sa mission au sein de la collectivité. Qu'elle se

demande donc quelle image elle donne d'elle-même. Son attitude envers sa mission

détermine l'opinion que la collectivité se fait d'elle et de son travail. Des luttes intestines

dans la paroisse, une mauvaise attitude envers son pasteur, la négligence dans

l'entretien des bâtiments, une attitude négative ou simplement passive concernant ce

qui fait dans son entourage sont autant de facteurs qui sautent aux yeux du public. Il est

des domaines où l'Eglise Luthérienne ne peut pas céder ni se conformer au monde

(doctrine et éthique). Il en est d'autres où elle peut s'accommoder à lui.

La paroisse recourra donc aux moyens qui sont à sa disposition pour se faire connaître

et pour faire rayonner l'Evangile: contacts personnels, courrier, téléphone, presse

locale, radio locale, panneaux d'affichage, cultes publics (culte du matin de Pâques dans

le cimetière, par exemple, cultes du souvenir, activités locales telles que fêtes enfantines

dans les écoles et les maisons des jeunes, distribution de tracts, dépôt de littérature

dans les librairies, les homes et les hôtels, vitrine paroissiale, cloches, concerts, mise à

disposition des organismes de bienfaisance des locaux paroissiaux, participation aux

collectes publiques, lettres aux représentants publics locaux pour les féliciter, les

critiquer ou les encourager, cartes postales représentant l'église, etc.

C'est à chaque paroisse de faire preuve d'initiative, de découvrir de nouvelles méthodes,

compte tenu du contexte, et de juger de leur valeur. Rien ne devrait être négligé dans ce

domaine.

__________

Page 38: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

38

LE PASTEUR EN CHAIRE

Le pasteur reste pasteur quand il prêche. Il ne change pas de peau, mais fait de la cure

d'âme en chaire.

Il paît son troupeau:

Le pasteur est un berger (Act 20:28). Il faut donc qu'il connaisse les besoins de ses

paroissiens, leurs lacunes, leurs faiblesses, qu'il les aide à en prendre conscience et à

accepter le remède de l'Evangile. La prédication n'est pas un monologue, mais un

messages qui répond aux questions des auditeurs, qui apporte des solutions à leurs

problèmes... Il n'y a donc pas de prédication authentique sans connaissance des

hommes auxquels on prêche, connaissance qui découle du contact avec eux, mais aussi

de ce que la Bible dit de l'homme.

Le prédicateur aime aussi son troupeau. Il ne se détourne pas de ses paroissiens en

constatant leurs lacunes, mais leur vient en aide, leur apporte l'amour de Dieu en Christ.

Le prédicateur aide son troupeau. Il le fait en lui annonçant la Loi sans laquelle il ne peut

recevoir l'Evangile... Il l'aide en lui prêchant l'Evangile, la mort et la résurrection du

Page 39: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

39

Christ, en appliquant ces deux faits du salut à l'auditeur... Il l'aide enfin en lui apprenant

à vivre dans la sanctification...

Le sermon est un moyen d'édification publique, l'élément essentiel du culte, le message

que le pasteur invite chaque paroissien à emporter avec lui, la nourriture commune de

tout le troupeau. Cependant, la chaire n'est pas le lieu où le pasteur traite des problèmes

de cure d'âme.

Il prêche de façon à le paître:

Cf. le cours d'homilétique. Nous n'évoquerons ici que quelques aspects particuliers.

La prédication qui doit vraiment paître implique une technique. Il faut que le sermon

révèle l'amour que le pasteur porte à son troupeau, l'intérêt qu'il a pour sa paroisse. Le

pasteur doit se comporter en chaire comme ailleurs, qu'il soit celui que les paroissiens

connaissent tous les jours et qu'il ne joue pas un rôle. Pas de stykle oratoire, pas de

recherche d'effets. Le langage, le style et la prononciation seront les mêmes que chaque

jour dans la cure d'âme. Le pasteur en doit pas oublier son troupeau et son message

pour ne songer qu'à sa performance en chaire. Le prédicateur doit rester pareil à

lui-même. Eviter aussi la voix monocorde.

Le pasteur doit prêcher de façon à être compris, à ce qu'on n'oublie pas ce qu'il a

annoncé, mais l'applique à soi-même. On ne peut pas rendre l'incompréhensible

compréhensible, mais on peut l'exposer en un langage tel qu'il soit saisi par l'auditeur:

langage de tous les jours (éviter au maximum le patois de Canaan), illustrations simples

et claires tirées de la vie quotidienne. Jésus est en cela un modèle.

Page 40: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

40

Nécessité de la logique. Sermon agencé selon un plan rigoureux et fidèle à ce plan,

progressant pas à pas pour triompher petit à petit desz doutes ou de l'ignorance de

l'auditeur.

Nécessité de ne pas lire son sermon. Le prédicateur doit regarder ses auditeurs dans les

yeux, ne pas leur donner l'impression que son message est quelque chose d'étranger à

lui-même. D'où encore une fois la nécessité de la logique, de l'ordre, de la clarté et de la

simplicité. Le pasteur doit être lui-même sous l'emprise de son sermon, de façon à

susciter les émotions requises: crainte, respect, humilité, certitude, joie, gratitude,

espérance. Il doit les communiquer à ses auditeurs. Il faut donc que ceux-ci puissent

constater qu'il les éprouve lui-même. Il ne doit pas être de glace quand il annonce

l'amour divin, ni donner une apparence d'in-

certitude quand il proclame les grands faits de l'Evangile ou exhorte à l'espérance.

__________

Page 41: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

41

LE PASTEUR A L'AUTEL

Quand le pasteur est à l'autel, il est exposé aux regards de tous. C'est là qu'il donne

l'image de lui qui reste le plus facilement gravée dans les mémoires. Il doit donc tout

faire pour favoriser l'adoration, au lieu de l'empêcher. Il s'y prépare par la prière. Le

pasteur veillera à être propre, bien coiffé. Sa tenue vestimentaire sera irréprochable

(robe pastorale soignée, souliers cirés, etc.). Les vêtements dits liturgiques (robe

pastorale, étole, etc.) sont un adiaphoron. Leur coupe, leur présentation, leur utilisation

peuvent donc varier d'un lieu à un autre. On s'efforcera cependant de promouvoir une

certaine uniformité, de façon à ce que le culte luthérien conserve son identité.

Tout doit inspirer la dignité et le respect et éviter le désordre et le laisser-aller. Le

pasteur ne manifestera jamais publiquement son mécontentement à l'égard de

l'organiste, de la chorale ou dun bébé qui pleure.

Pour le reste, cf. le chapitre sur la liturgie.

__________

Page 42: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

42

LA LITURGIE

"Leitourgia", oeuvre commune, participation du peuple au culte par l'adoration, les

prières, la confession des péchés et de la foi, le chant.

I) Historique de la liturgie:

1) Le culte synagogal:

Confession de foi ("Schemah Israèl" de Deut 6:4-9)

Prières d'intercession (il faut avoir 13 ans pour pouvoir

la prononcer, et seuls les hommes y sont autorisés)

Lecture de la Thorah par un assistant (divisée en 154 sections, elle est lue en trois ans)

Page 43: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

43

Lecture des prophètes (pas de péricopes, le lecteur pouvant choisir son texte et le

commenter. Cf. Lc 2:41 ss.; 4:16 ss.)

Prédication (par n'importe quel adulte mâle de la paroisse; généralement un

commentaire du texte prophétique

Bénédiction aaronique (Nomb 6:24-26) par le prêtre, l'assemblée répondant par Amen.

Il n'y avait pas dans la synagogue de vraie liturgie, mais un simple cadre pour le culte. La

liturgie proprement dite est née avec l'administration des sacrements.

2) L'Eglise apostolique:

L'Eglise chrétienne est une Eglise confessante et chantante. Elle l'était déjà à l'époque

apostolique. Courtes confessions de foi ("Jésus est le Seigneur", ou bien Phil 2:5 ss.) et

chants divers (Eph 5:19; Col 3:16). Dans Eph 5:19, l'expression "lalountes heautois"

pourrait indiquer que le chant était alterné.

3) L'Eglise postapostolique:

La 1 épître de Clément de Rome, ch. 34, mentionne la présence dans la liturgie de la

Préface et du Sanctus, les deux éléments les plus anciens de notre liturgie eucharistique.

Justin Martyr indique dans sa 1 Apologie le déroulement d'un culte de l'époque:

lecture du N.T. (évangiles et épîtres), prédication, prière (l'assemblée se tient debout),

présentation du pain et du vin (ainsi que de l'eau pour couper le vin), prière (Préface

Page 44: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

44

avec l'Amen de l'assemblée, communion, offrandes pour les veuves et les nécessiteux.

"Tradition Apostolique" d'Hippolyte (3 siècle à Rome): salutation, "sursum corda",

"gratias agamus" (Louons le Seigneur notre Dieu), pas de Sanctus, prière d'actions de

grâces, paroles d'institution, anamnèse (commémoration de l'œuvre rédemptrice du

Christ), épiclèse (invocation du Saint-Esprit pour qu'il vienne sur les éléments et les

sanctifie. L'épiclèse était en fait la consécration des espèces, mais sans récitation des

paroles d'institution).

Seuls les baptisés peuvent assister aux cultes eucharistiques, à l'exclusion des

catéchumènes. Sévère discipline eucharistique.

4) Liturgie à l'époque constantinienne:

"Missa catechumenorum" (candidats au baptême): Quatre lectures (loi, prophètes,

épîtres, évangiles), salutation, sermon, congédiement de ceux qui ne sont pas admis à la

Table du Seigneur, avec intercessions et Kyrie chanté par l'assemblée.

"Missa fidelium": Prière ecclésiastique avec Kyrie chanté par l'assemblée, salutation et

baiser de paix, présentation du pain et du vin, liturgie eucharistique (comprenant la

"Salutatio", le "Sursum corda" le "Gratias agamus", le "Ceci est digne et juste",

l'Antesanctus (louange du Créateur), le Sanctus, le Postsanctus (louange du

Rédempteur), les paroles d'institution, l'anamnèse, l'épiclèse, les intercessions, le Notre

Père, la communion (avec doxologie et le chant de Ps 34:9), la prière d'actions de grâces

et la bénédiction.

Page 45: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

45

5) Le "Missale Romanum" de 1570:

Introduction:

Introït alterné entre le chœur et la paroisse,

Salutation,

Confession des péchés,

Kyrie eleison,

Gloria in excelsis Deo,

Collecte

Culte de la Parole:

Lecture de l'A.T.

Graduel (chant d'un psaume par un soliste et refrain par l'assemblée)

Lecture de l'épître

Alléluia

Lecture de l'évangile

Sermon

Credo (symbole de Nicée)

Prière générale

Célébration eucharistique:

Chant d'actions de grâces

Prière

Préface

Sanctus

Page 46: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

46

Canon avec paroles d'institution

Notre Père

Agnus Dei

Prière de préparation à la communion (Mt 8:8)

Communion

Postcommunion (prière d'action de grâces)

Bénédiction

"Ite missa est" et "Deo gratias"

6) La Réforme:

a) "Von Ordnung des Gottesdienstes", Luther, Pentecôte 1523, et "Formula Missae et

Communionis", Luther, automne 1523:

Pas de culte des saints, de sacrifice de la messe et d'adoration des espèces consacrées.

Culte centré sur la Parole avec lectures bibliques, prières, paroles d'institution de la

Cène et Credo en allemand, le reste étant en latin.

b) "Deutsche Messe", Luther, 1526:

Introït (psaume ou choral allemand)

Kyrie

Gloria

Collecte

Epître

Page 47: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

47

Graduel (cantique allemand)

Evangile

Credo (Cantique de Luther: "Wir glauben all an einen Gott")

Sermon

Paraphrase chantée du Notre Père

Exhortation eucharistique à la place de la Préface

Paroles d'institution (d'abord sur le pain qui est distribué, puis sur le vin distribué à son

tour). Pas de "Spendeformel" pendant la distribution, mais signe de la croix sur le pain

et le vin

Chant du cantique d'Es 6: "Jesaja dem Propheten das geschah"

Agnus Dei

Prière d'actions de grâces

Bénédiction

c) Zwingli et Calvin: Liturgie très pauvre, surtout chez Zwingli.

d) Liturgie de Strasbourg (1525), plus riche que la "Deutsche Messe" de Luther et pour

cette raison adoptée par la plupart des Eglises Luthériennes de l'époque:

Elle contenait les éléments suivants: Cantique, confession des péchés, promesses de

grâce, lecture d'un psaume, Gloria Patri, Kyrie eleison, grande doxologie, collecte, épître

avec commentaire, chant d'un psaume, sermon sur l'évangile, confession de foi ("Wir

glauben all an einen Gott"), "Rüstgebet", Sursum corda, prière, Notre Père, exhortation

eucharistique, paroles d'institution, invitation, distribution, chant du "Gott sei gelobet"

ou d'un psaume, bénédiction aaronique, cantique (Ps 67).

On notera que dans cette liturgie il n'y a ni Préface, ni Sanctus, ni Agnus Dei.

Page 48: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

48

Il y eut ensuite un déclin liturgique dû à l'influence réformée, au piétisme et au

rationalisme (plus d'aube, plus de chant du pasteur à l'autel ni de graduel, liturgie

eucharistique appauvrie). Le culte sans Sainte-Cène est considéré comme le culte

normal. La célébration de la Cène s'y ajoute comme une sorte d'appendice. Le sermon

devient de loin l'élément prépondérant du culte qui perd, de ce fait, sa dimension

sacramentelle.

II) Le cycle de l'année liturgique:

L'année liturgique se divise en deux parties: le semestre du Seigneur (de l'Avent à la

Trinité: proclamation des grands faits du salut acquis par le Seigneur) et le semestre de

l'Eglise (du 1 au dernier dimanche après la Trinité: appropriation du salut par l'Eglise

et vie de cette Eglise: justification, sanctification, accomplissement dans l'au-delà).

Le semestre du Seigneur est fait de trois cycles, avec chaque fois un temps de

préparation, la fête elle-même et une postfête.

a) Cycle de Noël:

Du 1 dimanche de l'Avent au dernier dimanche après l'Epiphanie. Préparation: (Avent,

temps à la fois de repentance et d'attente joyeuse), la fête (de Noël à l'Epiphanie qui est

le Noël des païens) et la postfête (dimanches après l'Epiphanie: révélation du Christ).

Page 49: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

49

b) Cycle pascal:

De Septuagésime à la semaine entre Jubilate et Cantate. C'est le plus ancien cycle de

l'Eglise. Préparation (quarante jours, du Mercredi des Cendres à la veille du Dimanche

des Rameaux: méditation dans la repentance de la passion du Christ - Au Moyen-Age, ce

temps de repentance incluait les Dimanches Septuagésime, Sexagésime et

Quinquagésime), la fête proprement dite (du Dimanche des Rameaux au Dimanche

Quasimodo) et la postfête (du Dimanche Misericordias Domini au Dimanche Jubilate).

c) Cycle de la Pentecôte:

Deuxième cycle par son ancienneté. Du Dimanche Cantate à la Trinité, avec l'Ascension

et la Pentecôte. Le Dimanche de la Trinité clôt le semestre du Seigneur, en attribuant à la

Trinité, Père, Fils et Saint-Esprit, l'oeuvre du salut commémorée durant toute cette

période.

III) Les différents éléments de la liturgie:

L'Eglise célèbre ses cultes dans la joie et la certitude que son Seigneur est ressuscité.

Elle le fait donc le dimanche, jour du Seigneur commémorant sa résurrection

triomphante. Réunie en son nom, elle le sait au milieu d'elle, selon sa promesse.

Le culte ressemble à la procession d'un roi visitant son peuple. Il vient à lui dans la

Page 50: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

50

prédication et le sacrement, et l'Eglise le salue par son adoration et ses louanges. Se

sachant unie par la foi et la confession à l'Eglise de Jésus-Christ de tous les temps,

l'Eglise Luthérienne utilise la liturgie qui s'est développée dans l'Eglise chrétienne au

cours des siècles, liturgie qu'épura la Réformation.

Voici le canevas du culte eucharistique luthérien tel qu'il est célébré dans la S.E.L.K.:

1) Introduction au culte:

"Rüstgebet": Prière silencieuse pour se préparer au culte (repentance, prière pour que

Dieu ouvre le cœur aux promesses de l'Evangile et qu'il prépare le communiant à la

Sainte-Cène).

1 ¨cantique

Introït: Psaume ou cantique pour accueillir le Seigneur. Ce chant débouche sur une

doxologie trinitaire ("Gloria Patri").

Kyrie eleison: C'est ainsi qu'on saluait jadis le roi à son entrée dans la ville. On invoquait

sa clémence et ses bienfaits. C'était le cri auquel on accueillait Jésus, quand on avait

besoin de lui (malades des évangiles). L'Eglise confesse que le Christ est son seul

Seigneur et Bienfaiteur.

"Gloria in excelsis": La prière du "Kyrie" devient louange et adoration. Le Rédempteur

vient au milieu de son peuple qui le salue donc aux accents de l'hymne chanté par les

anges à Noël.

Page 51: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

51

Collecte: "Prions Dieu": A vrai dire invitation à une prière silencieuse avant la collecte

proprement dite. Mais avant que l'officiant prie pour l'Eglise réunie, il la bénit

("Dominus vobiscum") et se laisse bénir par elle ("Tecum").

2) Le culte de la Parole:

Epître: Enseignement, exhortations, consolations apostoliques.

"Alléluia": "Louez Yahvé!" L'Eglise remercie Dieu pour le don dee sa Parole.

2 cantique ("Hauptlied" ou "Wochenlied"). Ce cantique est fixé pour chaque dimanche

de l'année et se réfère généralement à l'évangile du jour.

Evangile: Bonne nouvelle! Paroles du Christ lui-même ou récit de l'un de ses actes

salvifiques. D'où la salutation de l'assemblée: "Louange à toi, ô Christ!" L'évangile du

jour est ce qui donne au dimanche en question sa spécificité.

Credo: L'Eglise répond au message de l'évangile par une confession de foi. Symbole de

Nicée pour les cultes de Sainte-Cène, symbole des apôtres pour les autres cultes (rappel

du baptême). Le Credo met l'Eglise locale en communion avec l'Eglise universelle.

Sermon: Proclamation de la Parole même du Christ, dans la puissance du Saint-Esprit,

avec appel à la repentance, la foi et la sanctification.

Offrandes: Réponse reconnaissante de l'Eglise à la Parole de son Seigneur. C'est l'Amen

de l'Eglise, un sacrifice agréable à Dieu qui témoigne de l'amour de son peuple, de sa

responsabilité dans l'accomplissement de la mission qui lui a été confiée, et de sa

compassion pour les nécessiteux.

Page 52: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

52

Annonces: Informations qui feront souvent l'objet de l'intercession de l'Eglise dans la

prière qui suit.

Prière ecclésiastique: L'Eglise intercède a) pour elle-même et sa mission, b) pour les

institutions en place dans le monde et tous ceux qui exercent des responsabilités, c)

pour tous ceux qui souffrent (cf. le schéma du Notre Père).

3) La célébration eucharistique:

Grande fête, festin dans lequel le Roi du monde s'offre aux siens pour le pardon de leurs

péchés, le salut et la vie éternelle.

"Sursum corda" - "Nous les élevons vers le Seigneur" - "Louons le Seigneur, notre

Dieu!" - "Ceci est digne et juste": Chantés en alternance par l'officiant et l'assemblée. Ces

répons remontent à Hippolyte de Rome (# 220). Le pardon nous fait lever les yeux vers

Dieu. L'assemblée dit sa joie de pouvoir se tourner vers lui et de l'accueillir dans le

sacrement, et un tel Dieu est digne de louanges.

Préface: Adoration du Dieu majestueux, en union avec les anges et les bienheureux, avec

des textes différents pour les jours de fête. Les communiants se savent et se proclament

en communion avec l'Eglise universelle militante et triomphante. La Préface correspond

au Grand Hallel de la liturgie pascale juive. Elle remonte au II siècle, où elle était

cependant beaucoup plus longue qu’à l'heure actuelle.

Sanctus: Louange au Dieu trois fois saint. L'Eglise accueille son Roi et Rédempteur qui

vient à elle dans le sacrement, et le fait dans les termes dans lesquels il fut accueilli à son

entrée dans Jérusalem. Le Sanctus est un amalgame d'Es 6:3 (introduit dans la liturgie

Page 53: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

53

en Afrique du Nord, vers l'an 200) et de Ps 118:25.26 (partie du Grand Hallel juif chanté

à la Pâque).

Epiclèse: Invocation du Saint-Esprit sur les communiants, qui généralement ne figure

pas dans les liturgies luthériennes.

Consécration des éléments: Au coeur de la célébration eucharistique figurent les paroles

d'institution du Christ (mises en musique par Luther, en 1526). Affirmation que l'Eglise

célèbre le sacrement institué par lui, confession de la présence réelle de son corps et de

son sang pour le pardon des péchés et mise à part du pain et du vin (consécration) pour

cet usage sacré. La paroisse est censée être à genoux pendant la récitation ou plutôt le

chant de ces paroles (geste d'adoration et de respect devant ce grand mystère d'amour).

Le signe de croix rappelle que toutes les bénédictions offertes dans le sacrement ont

leur fondement dans la mort rédemptrice du Christ.

Anamnèse: "Toutes les fois que vous..." (1 Cor 11:26). L'Eglise commémore dans

l'adoration la mort, la résurrection et l'ascension de son Seigneur et lui demande de

revenir bientôt, selon sa promesse, pour réunir les siens autour de son trône (Lc 22:18).

Amen: L'Eglise confesse, en disant "Amen", qu'elle attend avec foi le jour du grand festin

céleste dont la Cène est la préfiguration.

Notre Père: Préparation à la communion: le Royaume à venir du Christ, le pain de vie, le

pardon des péchés qui sont le contenu du Notre Père sont précisément les dons offerts

dans le sacrement. En usage dans le culte eucharistique dès la fin du I siècle (Didachè).

Luther en composa en 1526 une paraphrase chantée. Le Notre Père existe sous deux

formes: chanté par le pasteur avec la doxologie entonnée par l'assemblée tout entière,

ou bien chanté tout entier par l'assemblée.

Page 54: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

54

Souhait de paix: "La paix soit avec vous!" Invitation à vivre dans la paix par l'amour qui

pardonne, adressée à ceux qui vont communier.

"Agnus Dei": Nouvelle invocation et appel à la miséricorde de celui qui a réconcilié les

siens avec Dieu par son sacrifice. Adoration de l'Agneau immolé. Introduit à Rome vers

700, puis dans tout l'occident.

Distribution: Luther dit peu de temps avant de mourir: "Wir sind Bettler, das ist wahr".

Mais celui qui communie dans la foi aux promesses qui lui sont faites et se réjouit de

l'invitation de son Seigneur, est richement béni par le don du corps et du sang du Christ.

Les paroissiens qui ne communient pas intercèdent pour les communiants et célèbrent

par le chant de cantiques eucharistiques le Seigneur présent dans le sacrement.

"Nunc dimittis": Cantique de Siméon introduit à Strasbourg en 1525. Jésus offre aux

communiants la grâce accordée au vieux Siméon, celle de voir son Sauveur et de le

porter dans les bras.

4) Fin du culte ("Postcommunio"):

Collecte finale: La fin du culte est simple et sobre. Il ne convient plus de parler beaucoup

après la célébration du grand mystère qu'est l'eucharistie. La collecte remercie Dieu

pour son don et lui demande de bien vouloir le faire fructifier.

"Ite, missa est!" ("Entlassung"): "Allez en paix" ("Gehet hin im Frieden des Herrn!"). Il ne

s'agit pas simplement de renvoyer les communiants à leur vie privée, à l'issue du culte,

mais ils sont chargés de témoigner dans le monde de la paix de Dieu dont ils ont été

Page 55: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

55

gratifiés dans la prédication et le sacrement. L'"Entlassung" est "missio", envoi en

mission.

Bénédiction: La bénédiction du Dieu trois fois saint est placée sur l'assemblée par le

signe de la croix.

Amen: L'Eglise reçoit cette bénédiction avec foi.

Dans sa "Deutsche Messe" de 1526, Luther, après la Préface, le Sanctus et le Notre Père,

fait figurer les paroles d'institution qui sont immédiatement suivies de la distribution. Il

tient à réunir étroitement les deux éléments essentiels du sacrement, les paroles

d'institution et la consommation des espèces. Rien, selon lui, ne doit séparer les deux,

pour bien montrer que le don qui nous est fait dans la Cène ne dépend pas de nos

prières, mais uniquement de la Parole et de la promesse du Christ.

L'officiant luthérien est censé porter des habits blancs et une étole à la couleur

liturgique correspondant au dimanche ou au jour de fête en question. Le blanc est la

couleur de la lumière, de la joie et du monde céleste de Dieu. C'est en soi la meilleure

couleur pour le culte, car celui-ci est joie à l'écoute de l'Evangile et dans la certitude de

la présence du Seigneur. Cf. Act 3:5; 4:4; 7:9. Quant à l'étole, elle symbolise le joug du

Christ, le ministère qu'il a confié à ceux qui sont les serviteurs de sa Parole et de ses

sacrements. Rappelons enfin que normalement, la confession des péchés et l'absolution

ont lieu dans un culte spécial qui sert à préparer les communiants à la célébration du

sacrement ("Beichtgottesdienst").

__________

Page 56: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

56

L'ADMINISTRATION DU BAPTEME

L'administration du baptême étant confiée à l'Eglise, elle doit avoir lieu en temps ordinaire

dans le cadre du culte paroissial. Elle sera donc brève, mais empreinte de dignité, chose très

importante, en particulier pour les gens de l'extérieur.

Le baptême est un moyen de grâce et de salut (Act 2:38; Gal 3:26.27; 1 Pi 3:21; Act 22:16;

Eph 5:26; Tite 3:5; Rom 6:3.4; Jn 3:5.6).

Le pédobaptisme n'est explicable qu'à partir du concept de moyen de grâce... Le baptême

prend la place de la circoncision (Col 2:11.12). Des familles entières ont été baptisées par les

apôtres (Act 11:14.16; 16:15.33; 1 Cor 1:16). Les enfants naissent dans le péché originel (Ps

51:5; Jn 3:5.6). Dieu veut qu'ils soient sauvés (Mc 10:13-16; Lc 18:15-17). Seul le baptême

peut le faire (Tite 3:5.6; 1 Pi 3:21; Col 2:11.12). Le baptême des enfants est attesté par les

Pères de l'Eglise primitive, en particulier Tertullien et Origène. Cf. le cours de dogmatique sur

le baptême.

Page 57: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

57

Quels enfants faut-il baptiser?

A l'exemple du Christ, l'Eglise Luthérienne baptise les enfants qui lui sont amenés par leurs

parents (Mc 10:13-16; Lc 18:15-17) ou par ceux qui exercent sur eux l'autorité parentale. Si

l'un des deux parents est un incroyant et qu'il ne s'oppose pas au baptême de son enfant,

l'Eglise agira selon 1 Cor 7:14 et 2 Tim 1:5. Le pasteur baptisera un enfant, quand il a bon

espoir de pouvoir l'instruire, la garantie en tout cas que les parents n'y mettront pas

d'obstacle. Le baptême d'un enfant dans les conditions indiquées ci-dessus peut aussi être la

porte d'entrée dans des foyers et donc un tremplin missionnaire.

Les enfants avancés en âge seront baptisés avant la confirmation, mais après une première

instruction sur le péché, la grâce du Christ et les effets du baptême.

Si des enfants de parents chrétiens meurent avant le baptême, on les consolera en faisant

appel à la miséricorde de Dieu qui n'est pas liée aux moyens de grâce (Lc 1:15). Dieu y lie son

Eglise, mais n'y est pas lui-même lié. Un pasteur doit exhorter en public et en privé à prier

pour les enfants avant leur naissance et à ne jamais retarder indûment la date d'un baptême.

Aucun chrétien ne doit douter de son baptême. En cas de doute justifié, on le rebaptisera.

Cela confirme la nécessité d'enregistrer avec soin les actes baptismaux dans les registres

paroissiaux. Il est bon aussi de remettre aux parents un certificat du baptême.

Le baptême d'urgence peut être administré par tout chrétien. Il faut alors l'attester

publiquement et l'inscrire dans les livres paroissiaux.

Il faut également savoir rester humble. Dieu ne nous a révélé au sujet du baptême que ce qu'il

nous faut savoir pour être sauvés. L'Ecriture ne répond pas à toutes les questions. Ainsi elle

ne nous dit pas pourquoi il n'existait dans l'A.T. qu'un moyen de grâce pour les garçons,

comment les filles étaient reçues dans le peuple de Dieu, ni comment il peut régénérer des

Page 58: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

58

nourrissons ou ce qu'est une foi inconsciente et non réfléchie. Le pasteur doit s'en tenir à la

révélation biblique, sans faire état de ses hypothèses personnelles.

Parrains, marraines et témoins:

Dans l'Eglise ancienne, les catéchumènes adultes étaient parrainés par quelqu'un

garantissant que leur foi était sincère. Ceci pour éviter l'infiltration d'ennemis du

christianisme dans l'Eglise. Les enfants avaient des parrains prêts à prendre soin d'eux, au

cas où les parents mourraient au cours d'une persécution ou d'une autre façon.

Le parrainage est un aidaphoron, mais une coutume louable. Parrains et marraines doivent

attester que l'enfant a été baptisé, prier pour lui et veiller à son instruction religieuse. Seuls

des chrétiens luthériens peuvent sen acquitter de la façon dont cela leur est demandé le

jour du baptême. Des chrétiens d'autres Eglises et d'honorables personnes sans affiliation

religieuse ne peuvent être que témoins et doivent être considérés comme tels. Des

blasphémateurs, athées, excommuniés, ennemis du christianisme ne peuvent être admis

comme témoins. Si parrains et marraines ne peuvent assister au baptême, ils s'engagent

néanmoins. Leurs représentants seront de simples témoins de l'acte.

L'incrédulité personnelle de l'officiant n'invalide pas le baptême, car la validité de celui-ci ne

repose sur la foi de personne, mais se fonde exclusivement sur les promesses du Christ. Une

Eglise unitaire, par contre, n'administre pas le baptême institué par le Christ. "Accedit

Verbum ad elementum et fit sacramentum" (Augustin, Tract. 80 in Joh. cap. 5). Or dans une

Eglise unitaire, la Parole du Christ n'accède pas à l'élément. Il n'y a donc pas de sacrement!

Page 59: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

59

L'acte baptismal:

Seule l'application de l'eau au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit constitue l'essence du

baptême. Cependant, puisque le baptême est promesse de l'Evangile rendue visible, l'Eglise

l'a entouré de certains actes, gestes et paroles qui en constituent la liturgie.

La matière en est l'eau, l'eau naturelle, quelle qu'en soit l'origine. L'emploi de tout autre

liquide est contraire à l'institution divine.

Quant à son application, elle divise la chrétienté. Les évangéliques revendiquent

généralement l'immersion, en se basant sur l'étymologie de verbe "baptizein" et sur le

symbolisme que cette immersion contient. Or "baptizein" a plusieurs sens dans le N.T.: laver

(Mc 7:3.4; 10:38), asperger (Héb 10:22; 12:24). D'autre part, le baptême ne symbolise pas

que la mort par noyade et l'ensevelissement (Rom 6:3.4), mais signifie aussi le lavage, la

purification du péché (Act 22:16), l'effusion du Saint-Esprit (Tite 3:5.6), l'aspersion du sang

du Christ (Héb 10:22; 12:24, comparé à Ex 24:8; Héb 9:19; 1 Cor 10:2). Les différents modes

d'application de l'eau symbolisent donc les différents aspects du baptême. D'autre part, la

purification du baptême ne dépend pas de la quantité d'eau utilisée, mais de la promesse liée

à cette eau (Jn 13:9.10).

L'aspersion peut se faire à la main ou avec un objet. C'est un adiaphoron. L'Eglise doit se

laisser guider par le principe de l'amour qui édifie. Il faut qu'il y ait aussi application réelle

d'eau, que celle-ci coule effectivement.

Le baptême est de l'eau unie à la Parole. L'ordre et la promesse sont contenus dans Mt 28:19,

où le terme "onoma" désigne l'essence même de Dieu ou Dieu lui-même tel qu'il s'est révélé.

Le texte affirme donc l'effet salvifique du baptême qui met le baptisé en communion avec

Page 60: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

60

Dieu Père, Fils et Saint-Esprit. Il n'a pas d'action miraculeuse; il régénère, justifie et sauve non

pas "ex opere operato", mais par la foi qui s'approprie les promesses divines.

Le baptême est administré selon la formule de Mt 28:19, mais la récitation de ce texte ne fait

pas en soi le sacrement. Elle est requise non pour l'essence du baptême, mais pour la

certitude de foi et la consolation du baptisé. Toute autre formule apportant le même message

rendrait le baptême tout aussi valide. Cf. les expressions "epi tô onomati Ièsou Christou" (Act

2:38), "en tô onomati Kuriou" (Act 10:48), "eis to onoma tou Kuriou Ièsou Christou" (Act

8:16), "eis Christon" (Gal 3:27) "eis ton Christon" (Rom 6:3), qui ne sont pas à vrai dire des

formules baptismales, mais des tournures présentant le baptême administré par les apôtres

comme étant celui institué par le Christ. Il faut cependant éviter le doute et la confusion dans

l'esprit des gens.

La liturgie baptismale est la proclamation de la Parole de Dieu pour l'instruction et

l'édification. Elle doit donc annoncer la réalité du péché originel, la rédemption par le Christ

et le pardon offert dans le baptême.

Le signe de la croix sur le front et la poitrine n'a pas de vertu magique, mais symbolise la

rédemption du baptisé. La prière invoque les bénédictions de Dieu sur le baptisé. La lecture

de Mc 10:13-16 évoque les bénédictions que le Christ apporte aux enfants. Le "devotum

davidicum", la bénédiction davidique de Ps 121:8, se situe juste avant le baptême lui-même.

De même, la lecture des devoirs des parents et des parrains et marraines. Puis viennent

l'"abrenuntiatio", le renoncement à Satan et à ses oeuvres, et la confession de foi en le Dieu

trinitaire.

Le pasteur évitera toute lecture mécanique et monocorde de la liturgie. Il est bon aussi qu'il

ne se contente pas systématiquement de lire une méditation toute faite, mais qu'il en fasse

une personnelle.

Page 61: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

61

Dans le cas d'un baptême d'urgence, le pasteur abrégera la liturgie ou la supprimera tout

entière pour ne conserver que l'acte bapstismal lui-même.

L'imposition des mains ("cheirothesia"), coutume apostolique (Act 6:5.6; 8:14-17; 1 Tim

4:14; 2 Tim 1:6) reprise de l'A.T., signifie la transmission et l'application personnelles au

baptisé de la bénédiction divine.

L'exorcisme ("Sors, esprit impur, et cède la place au Saint-Esprit!", ou: "Je te conjure, esprit

impur, au nom de Dieu le Père, le Fils et le Saint-Esprit, de sortir de ce serviteur (cette

servante) de Jésus-Christ!") appliqué à l'origine aux personnes possédées d'un démon, fut

communément introduit au cours du IV siècle dans la liturgie baptismale pour attester la

grandeur de la corruption humaine et la puissance merveilleuse de la grâce. Il est tombé en

désuétude.

Parfois, le baptisé est revêtu, après le baptême et avant la bénédiction, du "chrisom",

vêtement blanc symbolisant la purification par le baptême.

Le nom de baptême que reçoit l'enfant lui rappelle son baptême, l'alliance de grâce de Dieu,

et le fait que son nom est inscrit dans le livre de la vie (Phil 4:3). On ne choisira donc pas de

nom notoirement païen ou antichrétien, et aucun nom soulevant la risée. Il ne faut pas non

plus que le nom donné à l'enfant constitue pour lui une gêne dans la vie.

Il est bon que le pasteur prononce une prière d'action de grâces, quand un enfant naît dans la

paroisse. Une belle coutume veut aussi que la mère et son enfant reçoivent la bénédiction de

la part du pasteur après le baptême ou lors du premier culte auquel ils assistent tous les

deux.

__________

Page 62: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

62

L'ADMINISTRATION DE LA SAINTE CENE

La Sainte Cène pouvant être reçue pour le jugement, l'Eglise a de bonne heure veillé à

l'administrer de façon scrupuleuse. Elle a mis en place le catéchuménat et la confession

privée. Cette dernière, dont les traces remontent au IV siècle (nous parlons uniquement de

la confession préalable à la communion), a donné lieu par la suite à bien des abus, dont la

doctrine de la justification par les oeuvres. Pour l'attitude de Luther à ce sujet, cf. W2 XX, 47 s.

Cf. aussi la C.A., Art. XXV, 12; Art. XI, 1 et l'Apologie, Art. VI, 6-8.

Après être devenue obligatoire après la mort de Luther, il fut décidé sous l'impulsion du

piétiste Caspar Schade de Berlin et sous l'initiative du prince électeur de Brandebourg de la

remplacer par un "Beichtgottesdienst", la veille de l'administration de la Cène. C'est ainsi que

la confession privée tomba en désuétude. Dans le Synode du Missouri, le "Beichtgottesdienst"

tomba lui aussi en désuétude dans les années 1940, souvent pour des raisons matérielles

(trop grandes paroisses, impossibilité de mobiliser les gens le samedi, etc.). Il ne fut pas non

plus possible de le célébrer le dimanche, du moins dans les paroisses ayant plusieurs cultes le

dimanche matin où là où le pasteur desservait plusieurs communautés.

Page 63: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

63

Qu'on puisse ou non restaurer la confession privée avant la Cène ou le "Beichtgottesdienst",

le pasteur doit veiller à ce que ses paroissiens communient de façon digne, c'est-à-dire dans

la repentance et la foi. Il doit donc, dans la prédication, le message eucharistique, l'instruction

religieuse, les études bibliques et la cure d'âme, enseigner la Loi et l'Evangile, l'essence et la

grâce de la Cène et la façon chrétienne de la célébrer.

Il ne doit pas se faire le juge des âmes (cf. la Préface au Petit Catéchisme). Seuls peuvent être

exclus les pécheurs notoires et les hétérodoxes (Mt 7:6; 1 Cor 11:28.29).

Il est bon qu'on observe ou introduise la pratique de l'annonce ("Anmeldung"): dans la

sacristie, à des heures fixes connues de tous, par carte (Missouri) ou par un

"Beichtgottesdienst". Le pasteur ne doit pas être légaliste et imopser un procédé particulier.

Il doit par ailleurs être disponible (et la paroisse doit le savoir) pour des entretiens de cure

d'âme et la confession privée. Nécessité d'observer le secret de la confession (même vis-à-vis

de la femme du pasteur et de ses collègues!).

Personnes non admises à la Sainte Cène: 1) les enfants, 2) les malades mentaux graves, 3) les

pécheurs notoires, 4) les gens ne partageant pas la confession de foi de l'Eglise Luthérienne...

Le pasteur ne peut en aucun cas excommunier lui-même. Par contre, la suspension provisoire

de la Communion fait partie de son ministère de surveillant des âmes.

Les éléments:

Pain azyme ou levé? C'est un adiaphoron. Il est d'usage cependant dans les Eglises

Luthériennes d'utiliser des hosties. Du vin, jus de vigne fermenté. Sont à proscrire le jus de

raisin et tout autre liquide.

Page 64: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

64

Les ustensiles:

Les ustensiles eucharistiques sont mis en place avant le culte. Ils doivent être propres. Il

s'agit du ciboire (boîtier contenant les hosties; veiller à ce qu'il y en ait asez), la patène, la

cruche (veiller à ce qu'il y ait assez de vin), la coupe ou le calice. Parfois aussi une cuillère

perforée pour ôter un corps étranger tombé dans le vin. Enfin, une serviette pour essuyer la

coupe. Certaines paroisses, dans certains pays, utilisent des verres individuels. C'est en soi un

adiaphoron, mais la coupe symbolise mieux la participation au même vin et la communion

qui unit les communiants. Des raisons d'hygiène peuvent cependant rendre l'utilisation de

verres individuels nécessaire. Il va de soi que les mains du pasteur doivent être propres (pas

de traces ni d'odeur de tabac, ongles propres).

La consécration:

Non pas transsubstantiation, mais mise à part des éléments pour cette utilisation sacrée.

L'Eglise Luthérienne se sert pour cela des paroles d'institution, sans rien y ajouter. Les

prononcer de façon à ce que toute l'assemblée les entende. Faire le signe de la croix sur les

éléments, sur toutes les hosties et sur tout le vin. Si élever les éléments est assimilé à la

transsubstantiation catholique et au sacrifice de la messe, il convient de ne pas faire ce geste.

Si les éléments venaient à manquer, en faire chercher d'autres et les consacrer à leur tour.

Distribution:

De préférence à genoux, mais aussi debout, là où la génuflexion n'est pas possible. Veiller en

particulier à ce que chacun reçoive du vin (inviter les fidèles à prendre la coupe en main et à

la diriger). Les communiants se présentent en un nombre et dans un ordre définis par la

paroisse. Pas de précipitation, pour ne pas faire tomber du pain et du vin à terre. Cependant

Page 65: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

65

ce ne seraient pas pour autant le corps et le sang du Christ, en raison de l'axiome: "Nihil habet

rationem sacramenti extra usum a Christo insitutum". Dignité et esthétique naturelles. Un

paroissien pourra être désigné pour conduire les vieillards et les infirmes à l'autel, puis vers

leurs bancs.

Prononcer la formule de distribution à voix intelligible pour les communiants. Eviter d'en

improviser une. La formule en usage dans l'Eglise Luthérienne remonte au XVI siècle et

contient un beau message. Pendant la distribution, la paroisse peut chanter un cantique, ou

l'organiste jouer un intermède (en sourdine!). Les hosties restantes seront rangées, et le

vin restant jeté. Le tout dans la dignité. Quand on célèbre la communion dans les maisons, il

faut consacrer les éléments devant les malades.

Questions annexes:

1) Un laïc peut-il administrer la Cène?

Si un laïc peut baptiser en cas d'urgence, il peut aussi administrer la Cène. Cependant, ces cas

d'urgence sont plus rares que ceux concernant le baptême. Généralement, un mourant

pourra recevoir le sacrement des mains de son pasteur. Elle n'est pas plus que le baptême

d'une nécessité absolue pour le salut et revêt même un moindre caractère d'urgence que lui.

Il existe toutefois des situations exceptionnelles (guerres, épidémies, persécutions) où un laïc

peut être appelé par ses coreligionnaires à administrer le sacrement.

2) Un pasteur peut-il se donner la Sainte Cène?

Oui, s'il n'y a pas d'autre pasteur dans la paroisse pour la lui donner. Dans certains Eglises, les

pasteurs la prennent en conférences pastorales. Il est aussi tout à fait légitime de charger un

Page 66: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

66

laïc de la lui donner, ou de la donner à la dernière rangée de communiants parmi lesquels se

trouve le pasteur.

3) Peut-on donner la Sainte Cène lors d'une bénédiction nuptiale?

Il vaut mieux ne pas le faire, car l'assemblée elle-même n'y participera sans doute pas.

D'autre part, il y a généralement parmi les invités des chrétiens non luthériens, voire des

incrédules.

4) Faut-il refuser la Sainte Cène à un inconnu qui se présente à l'autel?

Il vaut mieux éviter la chose par une exhortation appropriée, si des non paroissiens assistent

au culte. Si l'intéressé agit par ignorance ou faute d'avoir compris l'exhortation, il vaut sans

doute mieux la lui donner, sinon on risque de le détourner à jamais de l'Eglise.

La préparation à la communion:

"Bien préparé", "dignement": Attention à l'utilisation de ces mots! Le pécheur est toujours

intrinsèquement indigne. La dignité du communiant est celle du Christ qui le recouvre de son

pardon. Sa dignité personnelle ne concerne que la façon de manger et de boire. Cf. Formule

de Concorde, S.D. VII, 124.125.

La préparation à la communion doit être beaucoup plus que l'éveil d'un pieux sentiment de

ferveur; plus aussi que la prise de conscience de certains péchés...

Il faut éviter le sentiment que le Seigneur exige des communiants une perfection de fait,

sentiment qui ne ferait que détourner de la Cène et remplir de désespoir. L'auto-examen

Page 67: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

67

porte sur la réalité et la sincérité de la repentance, la volonté de renoncer au mal, la

constatation que rien dans les rapports avec le prochain n'empêche de s'approcher de la

Table du Seigneur, et bien sûr la foi en la grâce surabondante du Christ qui couvre tous les

péchés.

Pour les dons de la Sainte Cène et les dispositions de celui qui veut communier (pardon,

humilité, foi, joie, esprit d'adoration, etc.), cf. Detlev Lehmann, Oberurseler Hefte.

Non-admission à la Sainte Cène:

Il faut distinguer entre la suspension provisoire demandée par le pasteur et

l'excommunication prononcée par la paroisse.

Exégèse de Mt 18:15-20.

Ni le pasteur ni l'Eglise n'ont le droit de juger les cœurs. Personne n'a donc le droit de douter

de la sincérité d'une personne qui confesse sa foi. Mais si l'impénitence est devenue

manifeste, le pasteur ne peut admettre à la Cène (1 Tim 5:22). C'est une façon évidente

d'annoncer la Loi. Si le pasteur connaît seul le péché de l'intéressé, il doit seul lui demander

de s'abstenir de communier. Si l'intéressé s'approche quand même, passer devant lui sans lui

donner le sacrement revient à le démasquer publiquement. Or, il ne faut faire cela que si son

péché est de notoriété publique. Péché public demande une repentance publique. Mais on ne

peut définir une fois pour toutes le degré de publicité que cette confession doit revêtir. Quel

est d'ailleurs le degré de publicité du péché en question? La confession publique ne lui

donnera-tr-elle pas plus de publicité qu'il n'en a? Il ne faut pas non plus donner l'impression

que la confession publique est une satisfaction nécessaire pour le péché qui rend digne de la

Cène.

__________

Page 68: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

68

L'EDUCATION CHRETIENNE DES ENFANTS

CONFIRMATION

Les enfants appartiennent à Dieu par la création (Gen 30:2; Ps 127:3), la rédemption (Jn 3:16;

Mt 18:10.11) et, pour les enfants chrétiens, par la sanctification (Act 2:38.39). Leur éducation

chrétienne (instruction religieuse, formation à la vie chrétienne) est donc nécessaire.

Ils sont confiés à leurs parents (Ps 128:3; 78:1-8; 1 Tim 5:8; Eph 6:1-4). C'est à eux

qu'incombe avant tout leur éducation chrétienne (Deut 4:9.10; Eph 6:4). Ils ne peuvent pas se

libérer de cette sainte obligation (exemple d'un couple uni, d'une vie sanctifiée, lecture e la

Parole de Dieu, prière, instruction, exhortations, etc.). L'Eglise chrétienne cependant est là

pour leur venir en aide. Aux USA, elle a pour cela des moyens considérables (écoles

paroissiales, collèges et universités appartenant aux Eglises). Cf. M. Luther, sur l'importance

des écoles chrétiennes (W2 X, 422.458).

L'Ecole du dimanche:

A l'origine, aux USA, elle durait tout le dimanche et était destinée aux enfants pauvres dont

personne ne se souciait.

Page 69: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

69

Contenu: étude d'une leçon d'histoire sainte et chant de cantiques, tout cela proportionné à

l'âge des enfants. Non pas trop de substance, mais un message à leur portée. Non pas "multa",

mais "multum".

La qualité d'une école du dimanche est toujours celle de ses moniteurs. Il faut donc les choisir

judicieusement, en fonction de leurs connaissances et de leurs aptitudes pédagogiques. Il faut

aussi que ce soient des personnes consacrées. Nécessité, pour le pasteur, de les former. Une

petite collecte est une chose excellente et habitue les enfants à ce geste fondamental de la

gratitude chrétienne.

Les moniteurs sont encouragés à rendre visite aux enfants absents, pour leur remettre le

matériel de la leçon qu'ils n'ont pas suivie et les exhorter à la régularité. C'est aussi une

bonne occasion pour parler avec les parents.

La confirmation:

Luther a rejeté le rite sacramentel catholique de la confirmation et ne l'a remplacé par rien

d'autre. Après 1539, différents territoires luthériens allemands introduisirent une cérémonie

appelée confirmation. Les uns mettaient l'accent sur l'instruction religieuse préalable à

l'admission à la Sainte Cène, les autres sur la prière et l'imposition des mains. D'autres

encore, sur les voeux de confirmation. Le piétisme, par la suite, alla jusqu'à parler de

renouvellement de l'alliance du baptême. Le rationalisme faisait de la confirmation la

réception des catéchumènes dans la communauté des chrétiens adultes. Beaucoup de

tendances et de déviations.

La confirmation n'est pas un sacrement institué par le Christ, mais une coutume

ecclésiastique belle et riche en bénédictions, si elle est bien préparée et accomplie. C'est un

Page 70: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

70

rite dans lequel l'Eglise donne à des enfants ayant été instruits dans la foi la possibilité de la

confesser publiquement; elle prie aussi pour eux en leur faisant imposer les mains, et les

invite à participer à la Sainte Cène en chrétiens capables de s'examiner.

Elle n'est pas le renouvellement de l'alliance du baptême. Dieu n'a pas besoin de la

renouveler, et les chrétiens ne peuvent pas le faire. Ce serait laisser entendre aussi que les

enfants en sont déchus, qu'il faut donc la rétablir. Il est préférable aussi de ne pas parler de

renouvellement des voeux du baptême; l'expression peut être ambiguë. Le vœu de la

confirmation est l'intention exprimée de rester fidèle à Dieu. Cette intention est naturelle. On

ne peut pas confesser sa foi sans désirer y persévérer. Mais ce n'est pas un serment qui doit

garder l'enfant sur le droit chemin. La persévérance est l'oeuvre de Dieu et non de l'homme.

Utiliser ce serment pour obtenir de la part d'un jeune qu'il reste fidèle à Dieu et à l'Eglise et

l'accuser de parjure en cas d'infidélité, c'est agir de façon légaliste. Enfin, la confirmation

n'est pas un diplôme, un certificat de fin d'études. Une paroisse doit offrir aux jeunes

confirmés d'autres possibilités d'instruction religieuse.

L'enseignement du catéchisme sera un endoctrinement sérieux à la portée des enfants, et

authentiquement biblique. Ceci est conforme à l'ordre du Seigneur (Mt 28:19). Le minimum

le plus strict est l'aptitude à s'examiner soi-même. Pas de préparation superficielle et

précipitée! Ce n'est bon ni pour les enfants ni pour l'Eglise. Il faut qu'ils soient solidement

enracinés dans l'Ecriture et sachent distinguer la vérité de l'erreur. Même chose pour

l'histoire sainte et un choix de psaumes et de bons cantiques.

Cependant pas "multa", mais "multum". La quantité dépend de l'arrière-plan religieux de

l'enfant, de son intelligence et de ses capacités de mémorisation. De la compréhension et de

la récitation par coeur, la première est plus importante que la seconde. Tout enfant devrait

connaître par coeur les six points du Petit Catéchisme et une sélection des textes bibliques les

plus importants. Luther indique trois règles dans l'introduction au Petit Catéchisme: 1)

Page 71: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

71

Enseigne le texte. 2) Enseignes-en le sens. 3) Mets l'accent sur les choses les plus

importantes. Le pasteur ne sera pas seulement un enseignant qui communique des

informations, mais aussi le berger des enfants. Commencer et terminer chaque séance de

catéchisme par une prière.

Il est préférable de faire l'audition le jour même de la confirmation, en raison de l'importance

de son contenu et de la profession de foi qu'elle constitue. Que l'audition soit digne, bien

compréhensible, simple, chaleureuse et vivante! Elle ne sera pas conçue comme un examen

plus ou moins bien réussi par les uns et les autres, mais comme une occasion de témoignage

donnée aux enfants. Donc, nécessité de la simplicité. Le pasteur donnera à chaque enfant la

possibilité de s'exprimer, en s'arrangeant pour qu'ils fassent tous bonne impression.

L'âge de la confirmation: Elle a lieu en règle générale à l'âge de 14 ans. Pa de légalisme en la

matière. En raison du manque de maturité de certains enfants, des problèmes liés à cet âge

(crise d'adolescence, problèmes de relations, doutes, contestations, etc.) des bonnes raisons

qu'il y aurait de leur faire poursuivre leur instruction religieuse, il serait sans doute bon de

dissocier l'admission à la Sainte Cène de la confirmation proprement dite. A étudier très

sérieusement!

La date de la confirmation devrait, dans la mesure du possible, être toujours la même.

Cependant, plutôt la retarder que bâcler la confirmation.

Donner aux vœux leur véritable portée (engagement, mais non serment légaliste). Don d'une

Bible et d'un document de confirmation. Eviter les fausses conceptions de la confirmation:

elle n'apporte rien à l'enfant qu'il n'ait déjà, ne l'élève pas à un degré supérieur, ne le

rapproche pas de Dieu. Elle ne doit pas non plus supplanter le baptême, ajouter quelque

chose à celui-ci. Loin de le minimiser, elle doit au contraire l'exalter. Enfin, la confirmation ne

Page 72: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

72

doit pas être conçue comme l'aboutissement de l'éducation religieuse, comme une sorte de

Certificat d'Etudes religieux. Elle n'est qu'une étape dans une vie qui doit être une vie de

persévérance, de fidélité, de témoignage constant et de renouvellement incessant des voeux

du baptême. Autant de vérités qu'il faut annoncer aux confirmands dans leur préparation à la

confirmation.

__________

Page 73: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

73

LE MARIAGE ET PROBLEMES ANNEXES

Le mariage est un contrat civil. Il est inscrit dans le code civil, écrit ou oral, de toute société

humaine, à quelque race, ethnie, civilisation ou religion qu'elle appartienne. Il fait partie des

institutions de ce monde. Son essence, la façon dont il est conclu, les droits et devoirs des

époux, les éventuels empêchements ou obstacles a mariage, l'âge minimal requis, tout cela

est défini dans tout dictionnaire ou encyclopédie digne de ce nom. Le mariage n'a donc dans

son essence rien de spécifiquement chrétien. Il fait partie de l'ordre créationnel.

Mais le mariage est aussi d'institution divine. C'est à ce titre-là qu'il fait partie de

l'enseignement et de la cure d'âme d'un pasteur et qu'un chapitre lui est consacré dans la

théologie pastorale. Cela signifie que Dieu en est l'auteur (Gen 2:18-25; Mt 19:6). Il est pour

la vie entière (Mt 19:3 ss.) et revêt donc un caractère indissoluble (Mt 5:32; 19:6; Rom 7:2 s.,

1 Cor 7:39). Il est tributaire des bénédictions dont Dieu le couronne (Ps 127 et 128). Les

devoirs des époux sont définis dans la Bible (Eph 5:22 s.; 1 Cor 7:10 ss.). Il est conclu au nom

de Dieu, en invoquant sa bénédiction (1 Cor 7:39). Il est, comme tout, sanctifié par la Parole

de Dieu et la prière (1 Tim 4:5).

Page 74: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

74

Le mariage est le lien qui unit un homme et une femme, lien dont l'essence est une

communion unique en son genre, instituée par Dieu et sanctionnée par la société. En tant que

mariage chrétien, il implique le consentement mutuel, l'amour, l'union sexuelle et la fidélité

envers le partenaire dans l'accomplissement des devoirs respectifs. Les principaux textes de

la Bible relatifs au mariage sont les suivants: Gen 1:27.28; 2:18-25; Mt 19:4-6; 1 cor

7:3-5.9.11.36.39; Eph 5:22.23; Col 3:18.19; Héb 13:4.

Le but du mariage est la communion d'amour et d'aide indispensable à l'épanouissement de

l'être humain (Gen 2:18 ss.), ainsi que la procréation et l'éducation chrétienne des enfants (1

Pi 3:7; Gen 9:1; Deut 6:3-9; Mt 18:5.6.10.14; Eph 6:1-4; Col 3:16.20.21). D'autre part, le

mariage constitue dans ce monde déchu un frein à l'impudicité (1 Cor 7:2).

Le pasteur s'appliquera donc à montrer le magnifique idéal du mariage chrétien qui est, dans

la Bible, l'illustration du lien intime et indissoluble qui unit Dieu ou le Christ à son peuple,

lien fait d'amour, de bonté, d'abnégation et de fidélité.

Les chrétiens ne peuvent pas exiger d'un gouvernement qu'il légifère selon les principes de la

Bible. Même Moïse dut tolérer le divorce en raison de la dureté de coeur de la plupart des

membres du peuple d'Israël. Cependant, le mariage étant d'institution divine, il est de

l'intérêt de tous et donc aussi de l'Eglise chrétienne que la société veille sur lui et le protège,

et donc qu'elle légifère à son sujet. Au moins autant que cela lui est possible. Les déviations et

licences tolérées, voire permises par la société sont à mettre sur le compte de la corruption

humaine et ne peuvent en aucun cas servir de critères aux chrétiens. Il ne suffit pas que

quelque chose soit permis par la société pour que cela soit bien, c'est-à-dire conforme à la

volonté de Dieu.

Inversement, un gouvernement peut être amené, pour des raisons sociales, à être plus strict

encore que la Bible. Consanguinité dans une tribu, par exemple; il existe des tribus où le

Page 75: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

75

mariage exogamique est une obligation. L'autorité civile précise aussi à quel âge le mariage

est possible, et cet âge n'est pas nécessairement le même sous toutes les latitudes et à toutes

les époques. Il peut être défini en tenant compte de considérations sociales, morales,

professionnelles, etc.

On comprend donc qu'il est important qu'un pasteur connaisse à la fois l'enseignement de la

Bible sur le mariage et la législation du pays dans lequel il exerce son ministère.

Monogamie:

Dieu a institué le mariage monogame (Gen 1 et 2). Gen 2:24 ne peut du reste se réaliser que

dans le mariage monogame (Mt 9:5). Le fait que Jacob David, par exemple, aient été

polygames et que l'Ecriture ne dise pas explicitement que Dieu désapprouva cela, en change

rien à l'institution divine confirmée par le N.T. Dans nos pays occidentaux, la polygamie est

de toutes façons interdite par la loi, qui peut bien sûr être détournée de bien des façons,

divorces et remariages n'étant par exemple qu'une façon particulière de pratiquer la

polygamie. Le problème est plus délicat à traiter dans les civilisations orientales, où du reste

la polygamie est généralement en voie de régression pour des raisons économiques. Il doit

être abordé avec beaucoup de tact et de patience. Il est clair que le missionnaire ne peut pas

permettre à un chrétien de contracter après sa conversion des mariages multiples, donc de

pratiquer la polygamie. Mais comment traiter le cas de ceux qui sont polygames au moment

où ils se convertissent et désirent se rattacher à l'Eglise? Dans le temps on les admettait au

catéchuménat, mais refusait de les baptiser et de les recevoir à la Sainte Cène, à moins qu'ils

ne renoncent à la polygamie, en répudiant les femmes a qu’ils avaient en trop pour ne garder

que leur première épouse, tout en subvenant aux besoins matériels des autres. C'était

contraindre ces ex-épouses à une vie de célibat qu'elles n'avaient pas choisie et peut-être lez

pousser à l'impudicité, tout en les obligeant à une position sociale qui les couvrait souvent de

Page 76: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

76

honte, faisant d'elles la risée de tous. Ces femmes avaient-elles la possibilité de se remarier?

L'expérience a montré aussi que beaucoup de ces femmes ont sombré dans la prostitution

pour pouvoir survivre, leurs ex-maris n'ayant pas tenu leurs engagements. D'autre part, une

telle pratique n'incitait-elle pas les maris à pratiquer en cachette ce qu'il ne leur était plus

officiellement permis de faire? Aussi vaut-il peut-être mieux prendre ces gens là où ils se

situent au moment où ils entendent l'Evangile, tolérer, comme Dieu le fit dans l'A.T., qu'ils

vivent dans la polygamie, tout en se livrant à un intense travail d'instruction dans lequel on

montre clairement que le mariage institué et voulu par Dieu est le mariage monogame, et que

c'est à ce mariage que sont liées de façon claire les promesses du Seigneur. Une bonne

instruction en milieu missionnaire devrait résoudre le problème de la polygamie en l'espace

d'une ou de deux générations.

Le fait que la polygamie soit pour ainsi dire toujours source de conflits dans une famille,

comme l'attestent même les récits de la vie des patriarches et de Salomon, montre à

l'évidence qu'elle constitue une anomalie et qu'elle ne correspond pas à la volonté de Dieu,

même si celui-ci ne l'assimile pas à un adultère.

Les obstacles à la bénédiction nuptiale et au mariage lui-même:

Le pasteur ne peut pas bénir de mariage interdit par la loi civile. D'autre part, il ne bénira

qu'une union sanctionnée par cette loi et exigera donc qu'on lui présente un certificat de

mariage.

Il bénit en règle générale l'union de gens qui font partie de sa paroisse (ou de

paroisses-soeurs, selon les coutumes locales ou à la demande des pasteurs concernés). Il

évitera de bénir un mariage, s'il ne connaît pas les familles des époux. Il est souhaitable que

l'un des deux partenaires au moins fasse partie de sa paroisse. La bénédiction nuptiale d'un

Page 77: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

77

couple étranger à l'Eglise n'est possible que si des entretiens préalables ont permis de

constater que les motivations de ce couple sont légitimes et qu'il désire effectivement non

pas sacrifier à une sorte de rite folklorique, mais placer son union sous le regard de Dieu et

vivre des promesses de l'Evangile.

Un pasteur luthérien refusera une concélébration de caractère œcuménique, par exemple un

mariage religieux concélébré avec le ministre du culte d'une autre Eglise. L'administration

commune des moyens de grâce, en l'occurrence la proclamation commune de l'Evangile et la

bénédiction commune d'un mariage présupposent la communion de chaire et d'autel.

Il existe aussi des empêchements moraux au mariage qui peuvent contraindre un pasteur à

refuser la bénédiction nuptiale (mariage avec un voyou, un pécheur scandaleux, un athée et

blasphémateur notoire, mariage aux mobiles manifestement douteux entre un vieillard et

une jeune fille, refus légitime du consentement parental, etc.). Il existe par ailleurs des

remariages de divorcés qu'un pasteur ne peut pas bénir. Enfin il refusera de bénir une union,

si le couple relève du ministère d'un autre pasteur et que celui-ci n'a pas donné son accord

pour que la cérémonie soit célébrée par un confrère. Il ne faut en aucun cas empiéter sur le

ministère d'autrui.

Il est des obstacles qui empêchent de bénir un mariage, mais qui n'autorisent pas pour autant

à dissoudre un mariage existant. Une chrétienne ne devrait jamais épouser un

blasphémateur, mais elle n'est pas pour autant autorisée à dissoudre le mariage contracté.

Enfin, il existe des facteurs qui rendent le mariage nul: degré de consanguinité interdit par la

loi, mariage conclu sous la contrainte ou sous l'imposture (le fait, par exemple, d'avoir caché

à son conjoint qu'on était impuissant ou stérile, alors qu'on le savait parfaitement).

La Bible ne fixe pas d'âge. Le code civil, par contre, le fait. Il existe un âge en-dessous duquel

on ne peut pas se marier, et un autre où le consentement parental est légalement requis. Cela

Page 78: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

78

dit, de jeunes chrétiens tiendront toujours à avoir le consentement et la bénédiction de leurs

parents. Seules des motivations illégitimes de la part des parents peuvent autoriser un

pasteur à bénir le mariage de deux jeunes dont les parents n'approuvent pas l'union. Dans ce

cas, le consentement du gouvernement remplace l'approbation refusée par les parents.

Des raisons de santé peuvent empêcher le mariage (maladie mentale grave et durable).

D'autres rendent un mariage nul (telle invalidité ou malformation empêchant sa

consommation et qu'on a cachée à son conjoint, ou une grave imposture comme le fait

d'avoir caché au conjoint qu'on était criblé de dettes ou recherché par la police). Par contre,

si le conjoint en a été informé et qu'il a accepté malgré tout le mariage, il n'a pas le droit

d'obtenir son annulation. Un tel mariage ne devrait cependant être conclu qu'en pleine

connaissance de cause. Il faut que les intéressés soient au courant des difficultés qu'ils

rencontreront, des frustrations que peut entraîner un amour purement platonique et des

tentations qui seront peut-être les leurs. Cela dit, aucun problème de santé surgissant après

la conclusion du mariage n'autorise à dissoudre celui-ci (à l'exception peut-être de la

démence incurable exigeant un internement définitif et rompant tout lien entre les époux, au

point que le malade ne reconnaît même plus son conjoint).

Le consentement requis pour le mariage doit être donné librement et dans l'état de lucidité.

Pas de consentement donné en état d'éthylisme ou sous l'emprise d'une drogue, ni de

consentement donné sous la contrainte (cf. le cas de Rébecca, dans Gen 24:58). Celui, par

contre, qui a été contraint au mariage et qui ensuite le consomme librement, est considéré

comme ayant donné un consentement tardif.

Il existe ce qu'on appelle les degrés prohibés du mariage pour consanguinité ou affinité. Les

stipulations varient d'un pays à l'autre. En France, par exemple, le mariage entre cousins

germains est permis. Dans l'état du Wisconsin aux USA, il ne l'était jadis que si la femme avait

au moins 55 ans (donc après la ménopause). Lév 18 contient toute une liste de degrés

Page 79: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

79

prohibés du mariage. Leur valeur est-elle universelle et permanente (loi morale) ou limitée

au peuple d'Israël (théocratie vétérotestamentaire)? Le problème a été souvent débattu. Le

Synode du Missouri était traditionnellement convaincu de la valeur permanente de ces

prescriptions, tandis que le Synode du Wisconsin la limitait à Israël (Cf. A. Schuetze et I.

Habeck, The Shepherd und Christ, p. 270 s.). Parmi les arguments semblant militer contre la

valeur permanente et universelle de ces interdits, nous relèverons les suivants: 1) Comment

Dieu peut-il interdire pour des raisons morales le mariage avec un beau-frère, alors qu'il

prescrit le lévirat quand un homme meurt sans descendance? 2) Dans 1 Cor 5:1, Paul ne fait

pas appel à la loi mosaïque, mais à la connaissance naturelle de la loi (même les païens

réprouvent le genre de mariage incriminé). 3) Le N.T. ne donne aucune indication précise sur

les degrés prohibés du mariage pour la nouvelle alliance. Le plus sage est donc sans doute de

se conformer tout simplement à la loi civile de son pays.

Il va de soi que la différence de race et de culture n'est pas un empêchement au mariage. Il

convient cependant que le couple soit informé des difficultés particulières qu'il pourra

éventuellement rencontrer dans sa vie conjugale, dans la société et la famille. Ceci fera l'objet

de la cure d'âme prénuptiale.

Les mariages mixtes:

Il en existe de plusieurs types: mariage entre un chrétien et un incroyant (athée pratique),

mariage entre un chrétien et l'adepte d'une religion païenne, mariage entre conjoints

chrétiens, mais appartenant à des confessions différentes (catholique et protestant, par

exemple). Ces différents types de mariages mixtes ont leurs problèmes spécifiques et doivent

faire l'objet d'une cure d'âme appropriée.

Page 80: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

80

Une différence de religion n'est pas un obstacle absolu au mariage. Les interdictions de l'A.T.

faisaient partie de la législation théocratique en vigueur en Israël et n'avaient pas de valeur

permanente (Ex 34:16; Deut 7:2 s.; Néh 13:25). Cf. 1 Cor 7:13. Cependant le motif invoqué

pour ces interdictions garde toute sa valeur (danger d'idolâtrie, d'apostasie ou d'indifférence

religieuse). Les chrétiens doivent en tenir compte. Souvent le conjoint chrétien devient

négligent dans l'exercice de sa foi et peut même la perdre, parce qu'il ne peut pas la partager

avec son partenaire. La communion de foi est un élément indispensable au vrai bonjeur

conjugal. Le mariage chrétien soulève du reste des problèmes spécifiques (vie de foi à la

maison, prières, lecture de la Bible, éducation chrétienne des enfants) qui trouvent

difficilement une solution, si on ne partage pas la même foi.

D'autre part, l'Eglise Catholique ne bénit une union mixte que si le conjoint non catholique

fait la promesse, au moins verbale, qu'il autorisera l'instruction de ses enfants dans la foi

catholique. Un chrétien biblique peut-il avec une bonne conscience prendre un tel

engagement?

Si ne femme chrétienne peut être une source de bénédictions pour son mari incroyant (1 Colr

7:16; 1 Pi 3:1.2), il n'en est pas moins vrai que le mariage qui plaît à Dieu est celui qu'on

conclut en son nom (1 Cor 7:39).

Les temps prohibés:

Il n'existe aucune loi biblique à ce sujet. La tradition voulait cependant (et veut peut-être

encore ici et là) qu'aucun mariage ne soit célébré pendant l'Avent et le Carême, qui sont des

temps de repentance. On se pliera à cette coutume là où en l'enfreignant on risquerait de

causer scandale.

Page 81: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

81

Il n'existe pas non plus de prescription quant à la durée du deuil avant d'envisager un

nouveau mariage. Il convient cependant de ne pas montrer d'impatience ou de précipitation,

au risque d'être soupçonné d'avoir oublié bien vite son conjoint décédé!

L'essence du mariage:

"Concubitus facit matrimonium?" La cohabitation fait-elle le mariage? Certainement pas. Si

par l'union sexuelle on devient une seule chaire avec une prostituée (1 Cor 6:16), on ne

devient pas pour autant son mari. On ne devient même pas le mari de celle avec laquelle on

cohabite de façon durable (Jn 4:18). Le mariage est plus que la cohabitation.

"Consensus facit matrimonium?" Est-ce le consensus mutuel qui fait le mariage? Il est vrai

qu'il n'y a pas de mariage légitime sans consensus. Celui-ci est donc constitutif du mariage

(Gen 2:24; 24:58; Mt 19:6), mais le mariage est plus que le consensus. Et puis, quel

consensus? Celui de vivre ensemble? Dans ce cas, il n'y aurait ni cohabitants ni concubins,

mais tous les couples vivant ensemble parce qu'ils ont décidé de le faire, seraient de ce à

considérer comme mariés. Or ce n'est pas le cas. Ni pour la Bible (la Samaritaine de Jn 4 vivait

avec un homme dont Jésus dit qu'il n'était pas son mari), ni pour la société. Même des fiancés,

c'est-à-dire des gens qui ont normalement échangé des promesses d'amour et de fidélité, ne

sont pas mariés aux yeux de la loi. Le mariage est donc plus que le simple consentement.

Aux yeux de Dieu, les fiançailles, si elles reposent sur un consentement mutuel et des

promesses de fidélité, sont pour ainsi dire identiques au mariage. Cependant, ce dernier fait

partie de l'ordre de la création et conditionne la survie des peuples, d'où la nécessité de

protéger la cellule familiale, les époux, les parents, les enfants et leurs biens. Le mariage

tombe donc sous la juridiction de l'autorité mise en place par Dieu pour le bien-être des

hommes (ne se marie pas qui veut, âge minimum requis, degrés prohibés, consentement

Page 82: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

82

parental pour les mineurs, publication des bans, responsabilité parentale, perte de la

puissance parentale ou paternelle, droit d'annulation de mariages illicites, contrat de mariage

ou communauté de biens, etc.). Le mariage n'est donc jamais une affaire personnelle réglée

entre deux jeunes gens. Dans aucun pays et aucune culture. En cela, il diffère

fondamentalement de nos fiançailles. Il est toujours et partout, en dépit des nuances propres

à chaque société, un acte social.

Aussi l'Ecriture Sainte "n'invente-t-elle" pas une définition du mariage qui lui soit propre, une

définition chrétienne, mais prend-elle le mariage pour ce qu'il est.

D'autre part, les fiançailles étaient dans l'Antiquité (Judaïsme, Grèce, Rome) quelque chose de

très précis, sanctionné et contrôlé par la société. Il n'en est plus ainsi. Notre code civil ne

légifère pas en matière de fiançailles. C'est pourquoi il ne protège pas une fiancée comme il

protège une épouse, ni un fiancé comme il protège un mari. Le fossé entre fiançailles et

mariage s'est considérablement creusé. Très souvent, il n'y a plus échange formel de

promesses, mais les jeunes gens glissent lentement de la naissance de leur amour dans le

mariage. Le mot fiançailles est devenu très souple. Généralement il signifie simplement qu'un

jeune homme et une jeune fille se fréquentent, fréquentation qui est censée conduire au

mariage, mais qui n'y conduit pas toujours, soit parce que le couple se brise, soit parce qu'il

s'installe dans une cohabitation durable. Dans un sens beaucoup plus précis et plus fort, qui

n'a sans doute cours que dans les milieux chrétiens (encore que tous les chrétiens ne

conçoivent pas les choses ainsi), les fiançailles impliquent une promesse de mariage, la

promesse qu'en temps opportun on se mariera. Or les chrétiens concevant le mariage comme

un état permanent fait de fidélité jusqu'à la mort, la promesse des fiançailles (la promesse

qu'on se mariera) implique au moins tacitement une promesse de fidélité jusqu'à la mort.

Cependant, du fait que les fiançailles, même au sens fort du terme, sont une affaire

personnelle ou tout au plus familiale dans laquelle la société n'a pas de part et ne légifère pas,

Page 83: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

83

et que l'Eglise n'est plus guère sollicitée à publier les fiançailles, à officier auprès des fiancés

et à intercéder pour eux, on ne peut identifier sans plus fiançailles et mariage.

Le mariage en tant qu'acte social est donc plus que le consentement mutuel. Aussi la rupture

des fiançailles n'est-elle pas à considérer comme un adultère, les fiancés au sens moderne du

terme n'étant pas une seule chair devant Dieu et la société. Rompre les fiançailles, c'est

pécher contre le 8 commandement et non contre le 6 . On peut dire schématiquement

que les fiançailles de l'Antiquité équivalaient au mariage civil actuel, et le mariage de

l'Antiquité aux noces d'aujourd'hui (festin de famille, qui suit chez les chrétiens la

bénédiction nuptiale).

En quoi consiste alors le péché que constituent les relations sexuelles entre fiancés? La

réponse à cette question dépend de la définition donnée aux fiançailles. Si des fiancés sont

tout simplement des gens qui se fréquentent et songent au mariage (c'est sans doute la

définition la plus courante de nos jours), ces relations constituent une transgression du 6

commandement. S'ils ont par contre échangé des promesses formelles, connues ou non de la

société et de l'Eglise, les relations charnelles, si elles ne peuvent pas être considérées comme

de l'impudicité, constituent néanmoins une offense contre le bon ordre, la mise en pratique

d'un privilège réservé aux époux proprement dits. Il y a offense, voire imposture, Dieu et la

société (au moins celle de l'Eglise) réservant les relations sexuelles aux gens mariés et

attendant des futurs époux qu'ils restent chastes jusqu'à leur mariage. Il y a donc nécessité

d'amende publique et de repentance.

Signalons que les croyants d'Israéël n'avaient pas de relations sexuelles avant le mariage,

même quand il étaient fiancés (Gen 29:21-23; Lc 1:34; Mt 1:18.19). D'autre part, Jésus ne

considère pas l'homme avec qui vit la Samaritaine comme son mari (Jn 4:18).

Page 84: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

84

Que penser du "mariage secret" (en allemand "Gewissensehe"), conclu par deux partenaires

en toute intimité, en l'absence à la fois de l'officier de l'état civil et du ministre du culte? Cf. à

ce sujet l'attitude de Luther, in Positions Luthériennes, 1989/4. Ce "mariage" est à proscrire

pour les raisons suivantes: Dieu ne veut pas que les chrétiens soient source d'offense et de

scandale pour leurs frères et sœurs dans la foi. L'existence de couples de ce genre a un effet

dissuasif sur le mariage, incite les jeunes à les imiter et finit par sonner le glas du mariage

religieux. Comment du reste savoir ce que pensent ces couples, comment ils vivent leur

union? Se considèrent-ils comme mariés pour la vie, comme menant un mariage à l'essai ou

comme vivant une union libre? Eux seuls savent comment ils envisagent leur union; la

société et l'Eglise ne peuvent pas du tout l'imaginer.

Si l'Eglise acceptait le "mariage secret", elle finirait pas l'identifier au mariage normal et

déprécierait le mariage religieux. Seuls les couples "en règle" recourraient encore à ce

dernier.

Pour accepter des "couples" de ce genre, il faudrait que le pasteur ait une déclaration (orale

ou écrite?) spécifiant qu'ils considèrent leur union comme une union pour la vie, donc

indissoluble. Et il faudrait que cette déclaration soit portée à la connaissance de la paroissee.

Il y aurait alors plusieurs types de couples dans l'Eglise: ceux mariés civilement et ceux qui

ne le sont pas, ceux mariés religieusement et ceux qui en le sont pas. Quel sens pourrait

encore revêtir dans l'Eglise la bénédiction nuptiale, si elle était accordée à certains

paroissiens et pas à d'autres? Et que se passerait-il en cas de dissolution d'un "mariage

secret"? Il faudrait que ce couple dissous se considère comme divorcé, puisqu'auparavant il

se considérait comme marié. Mais aux yeux de la loi et de la société, ils étaient célibataires ou

concubins, et s'ils changent de lieu et de paroisse, personne ne saura qu'ils se considéraient

auparavant comme mariés, qu'ils sont donc maintenant en fait des divorcés. Est-ce que tout

cela ne montre pas ce que ce genre de situation a d'équivoque? Quels problèmes compte-t-on

régler ou esquiver en contractant ce genre d'union? Est-ce que ce qu'on voulait pfaire passer

Page 85: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

85

au départ pour un "mariage secret" ("Gewissensehe") n'est pas en réalité un mariage à

l'essai?

On comprend aisément à quel point il est important d'informer les jeunes sur l'essence du

mariage, les fiançailles, les règles civiles et surtout la volonté divine relatives à la sexualité et

au mariage, sur les rapports sexuels extra-conjugaux ou préconjugaux, la contraception,

l'avortement, etc. La cure d'âme est souvent très difficile dans ce domaine, et les problèmes à

résoudre peuvent être très délicats. Il est d'autant plus important d'agir de façon préventive,

par une instruction adéquate et authentiquement biblique.

La bénédiction nuptiale:

Elle n'est pas d'institution divine et ne fut sans doute pas pratiquée dans l'ancienne alliance

ni au début de l'ère chrétienne. Par la suite, le prêtre fit fonction à la fois d'officiant de l'Eglise

et d'officier d'état civil.

Elle est une bonne coutume par laquelle l'Eglise demande au pasteur de sanctifier

l'institution divine qu'est le mariage par la Parole de Dieu et la prière.. Il ne célébrera une

bénédiction nuptiale que dans le cadre de sa paroisse. Il faut donc qu'en principe l'un des

deux conjoints au moins soit membre de son troupeau. Le pasteur n'est pas l'employé d'une

institution de mariage qui sacrifie à la soif de folklore et de decorum des gens. Généralement

c'est le pasteur de l'épouse qui procède à la bénédiction nuptiale, mais ce n'est là qu'une

convention. Il ne bénit le mariage de gens rattachés à d'autres paroisses du Synode qu'

avec le consentement de leur pasteur. Il peut bien, sûr bénir, bénir le mariage de gens qui,

sans être des membres de l'Eglise, le lui demandent pour des motifs valables, mais il ne le

fera qu'au terme d'une série d'entretiens lui permettant de sonder les motivations des

Page 86: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

86

candidats à la bénédiction nuptiale et de dispenser tout l'enseignement biblique relatif au

mariage.

La bénédiction nuptiale est toujours précédée d'entretiens prénuptiaux au cours desquels le

pasteur expliquera, textes bibliques à l'appui, ce qu'est le mariage, ce que sont les droits et les

devoirs des époux, comment le mariage est vécu dans la foi, quelles bénédictions y sont liées,

ce qu'il faut penser de la contraception et de l'avortement, etc.

Le mariage sera annoncé à la paroisse au moins deux dimanches à l'avance. Les paroisiens

seront invités à y assister pour entourer le couple de leurs prières et partager sa joie. On se

conformera aux coutumes locales, aussi longtemps qu'elles ne sont pas en contradiction avec

la Parole de Dieu (temps prohibés ou non, procession éventuelle, choix de la musique, haie

d'honneur, etc.). Les détails de la cérémonie seront mis au point avec le couple (formulaire

des engagements des époux, texte lu par le couple ou lu par le pasteur avec réponse du

couple, etc.). On n'opérera pas de changement dans la liturgie qui soit contraire à l'Ecriture

Sainte (par exemple, la suppression de la promesse de soumission de l'épouse, sous prétexte

qu'elle n'est plus de mise). On évitera aussi tout excès dans la décoration, le faste et le ballet

des photographes, toutes choses qui nuisent à la dignité de la cérémonie.

L'allocution de mariage est importante pour le couple et pour ceux qui assistent à la

cérémonie. Il y a des choses merveilleuses et très importantes à dire sur l'essence du

mariage, son indissolubilité, le devoir d'amour et de fidélité des époux, les enfants, la foi dans

le foyer, l'esprit du pardon, etc.

L'Eglise Luthérienne a de bonnes raisons de ne pas célébrer la Sainte Cène lors de

bénédictions nuptiales (ou de funérailles). Il s'agit d'un sacrement donné à l'Eglise, qui

requiert la participation de la paroisse. On risque aussi, en administrant la Cène, de faire de

cette administration un decorum, ou encore d'assimiler la cérémonie tout entière à un

Page 87: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

87

sacrement comme dans l'Eglise Catholique. Enfin, bien des gens ont coutume d'assister à des

mariages religieux qui ne sont pas membres de l'Eglise. Il est difficile de les inviter à la

cérémonie tout en leur interdisant l'accès à la Table du Seigneur.

Les noces d'argent ou d'or sont une belle coutume par laquelle on sanctifie également par la

Parole de Dieu et la prière la vie conjugale d'époux chrétiens unis depuis longtemps par le

lien du mariage. C'est une occasion unique en son genre de remercier le Seigneur pour tous

ses bienfaits, d'implorer ses bénédictions pour l'avenir et de rappeler aussi la beauté d'un

mariage fondé sur un amour durable et fidèle.

Dissolution du mariage et divorce:

Dieu seul a le droit de dissoudre le mariage par la mort (Mt 19:6; Rom 7:2 s.; 1 Cor 7:39).

Toute dissolution du mariage par l'homme est coupable. Là où il y a divorce, il y a toujours

péché, d'une façon ou d'une autre, chez l'un des deux conjoints ou chez les deux à la fois.

L'Ecriture parle du divorce; elle s'exprime de façon normative dans un certain nombre de

textes auxquels il ne faut faire dire ni plus ni moins que ce qu'ils disent. Les voici:

Mt 5:32: "Moi je vous dis que celui qui répudie sa femme sauf pour cause d'infidélité ("pas

ho apoluôn tèn gunaika autou parektos logou porneias") l'expose à devenir adultère ("poiei

autèn moicheuthènai"), et que celui qui épouse une femme répudiée commet adultère

("moichatai")".

Mt 19:3-9: "Est-il permis à un homme de répudier sa femme pour un motif quelconque?...

L'homme quittera son père et sa mère et s'attachera à sa femme, et les deux deviendront une

seule chair. Ainsi, ils ne sont plus deux, mais ils sont une seule chair. Que l'homme donc ne

Page 88: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

88

sépare pas ce que Dieu a joint. Pourquoi donc, dirent-ils, Moïse a-t-il prescrit de donner à la

femme une lettre de divorce et de la répudier? Il leur répondit: C'est à cause de la dureté de

votre coeur que Moïse a permis de répudier vos femmes; au commencement, il n'en était pas

ainsi. Mais je vous dis que celui qui répudie sa femme sauf pour infidélité et qui en épouse

une autre commet adultère ("mè epi porneia kai gamèsè allèn moichatai")".

Mc 10:11.12: "Celui qui répudie sa femme et qui en épouse une autre, commet un adultère à

son égard ("moichatai ep'autèn"). Et si une femme quitte son mari et en épouse un autre, elle

commet un adultère".

Lc 16:18: "Quiconque répudie sa femme et en épouse une autre commet un adultère, et

quiconque épouse une femme répudiée par son mari commet un adultère".

1 Cor 6:10-15: "A ceux qui sont mariés, j'ordonne, non pas moi, mais le Seigneur, que la

femme ne se sépare pas de son mari (si elle est séparée, qu'elle demeure sans se marier ou

qu'elle se réconcilie avec son mari) et que le mari ne répudie point sa femme... Si le

non-croyant se sépare, qu'il se sépare; le frère ou la soeur ne sont pas liés dans ces cas-là".

Les trois synoptiques s'accordent et font affirmer à Jésus que celui qui répudie sa femme et

en épouse une autre est coupable d'adultère. Le mariage est indissoluble. La répudiation du

partenaire n'est permise que si celui-ci s'est rendu coupable d'adultère. Dans ce cas, le lien

conjugal est déjà rompu et le mariage dissous; le divorce n'en est que l'officialisation. Seul

l'adultère du conjoint autorise à divorcer (Mt 5:32; 19:9). Le soupçon d'adultère ne suffit pas,

mais il faut que cet adultère soit patent, et un adultère par l'acte et non par la convoitise (Mt

5:28). Il va de soi que les relations homosexuelles que l'un des partenaires peut entretenir

avec autrui constituent aussi une dissolution du mariage, tout comme l'adultère.

Page 89: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

89

Jésus ne prescrit pas le divorce pour adultère, mais l'autorise. Le pasteur essaiera toujours

d'oeuvrer en vue de la réconciliation, sans cependant l'imposer à la conscience de la victime.

Il ne peut pas exiger que celle-ci accepte de rester unie à un conjoint qui lui est infidèle. Par

contre, si le coupable se repent et que la victime lui pardonne et consent à rester auprès de

lui, l'infidélité pardonnée ne peut plus être invoquée par la suite pour solliciter un divorce.

Paul interdit aussi la "desertio malitiosa" (1 Cor 7:10). Il demande à la femme qui a fui son

mari de se réconcilier avec lui ou d'assumer sa solitude en renonçant à un nouveau mariage.

L'abandon délibéré et définitif du domicile conjugal constitue un motif légitime de divorce. Il

n'est pas question, bien sûr, d'une séparation momentanée due à des raisons

professionnelles ou de santé, ou à l'obligation de faire son service militaire.

L'emprisonnement n'est pas non plus assimilé à une désertion malicieuse. Pas plus qu'une

fugue à la suite d'une querelle de ménage. Il n'y a désertion malicieuse que s'il y a volonté de

rompre le lien conjugal. Celle-ci fait du reste l'objet d'une définition précise dans le code civil.

S'il y a mésentente entre conjoints, une séparation peut être judicieuse. Mais ce ne sera pas

une séparation durable et permanente comme la désertion malicieuse. La séparation qu'un

pasteur peut conseiller à un couple en difficulté n'est qu'une séparation temporaire devant

déboucher sur une réconciliation et une redécouverte. Le fait que le conjoint soit un

incroyant n'autorise pas le divorce. Si par contre l'incroyant abandonne son conjoint croyant,

celui-ci est libre de se remarier (1 Cor 7:15).

On assimile aussi à la désertion malicieuse le refus délibéré, durable et non justifié de

relations sexuelles. Le simple fait de ne pas pouvoir en avoir (guerre, emprisonnement,

hospitalisation, maladie, surmenage, blocage psychique, obligations professionnelles, etc.)

n'est pas suffisant. Le cas de la maladie rendant les rapports sexuels provisoirement ou

définitivement impossibles est particulièrement douloureux. C'est un lourd fardeau, qui exige

que l'intéressé cherche dans la Parole de Dieu et la prière les forces dont il a besoin.

Page 90: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

90

D'une façon générale, tout ce qui constitue une violation flagrante de la promesse faite le jour

du mariage est assimilable à la désertion malicieuse et constitue une rupture du pacte qui est

à la base du mariage (menaces permanentes, violences, coups et blessures, refus permanent

de faire vivre sa famille, etc.). La désertion malicieuse sous ses formes diverses ne doit

cependant pas être diagnostiquée à la légère, de façon précipitée et hâtive. Il faut qu'elle soit

flagrante et que son auteur refuse de se laisser exhorter et de changer de conduite.

L'incompatibilité d'humeur, le fait que l'un des conjoints (ou les deux à la fois) soit déçu par

son mariage, le fait de devoir renoncer à des rêves romantiques et chevaleresques ne peut

pas être invoqué. La désertion n'est pas une simple attitude du coeur, mais une action

permanente et méchante. Enfin, une séparation à l'amiable n'est pas assimilable à une

désertion malicieuse, mais celle-ci est toujours quelque chose qu'un conjoint impose à

l'autre.

La traduction "l'expose à devenir adultère" de l'expression "poiei autèn moicheuthènai" (Mt

5:32) n'est pas correcte. Jésus n'utilise pas un actif ni un moyen, mais un passif. La femme en

question ne commet pas d'adultère, n'est pas non plus "exposée à devenir adultère", mais

subit un adultère, en est la victime. Jésus emploie encore un passif, quand il ajoute: "Celui qui

épouse une femme répudiée "moichatai". Non pas: "commet un adultère" (sic Segond), mais:

"est victime d'un adultère". Cela signifie sans doute que celui qui épouse une femme qui a été

injustement répudiée par son mari devient victime d'un adultère en ce sens qu'il participe

sans le savoir à l'adultère de l'ex-mari. Par contre, dans Lc 16:18 Jésus utilise l'actif

"moicheuei". Il faut savoir que dans Mt 5 et 19 il s'en prend aux pharisiens. Le libéralisme

avec lequel ceux-ci parlaient de divorce et de remariage faisait que tous, y compris le

nouveau mari d'une femme innocemment répudiée, étaient impliqués dans une action

coupable. On se mariait, divorçait et se remariait sans le moindre scrupule. Il y a culpabilité

commune, collective, donc participation au péché d'autrui, lorsque des gens méprisent le

mariage, comme ils le faisaient à l'époque du Christ et le font dans la société actuelle, et

estiment qu'on peut le dissoudre quand on veut.

Page 91: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

91

Le remariage de divorcés:

L'Eglise Catholique n'autorise en aucun cas le remariage de divorcés, même s'ils sont

totalement innocents de leur divorce, en déclarant que le mariage est indissoluble non

seulement en droit, mais aussi dans les faits. Le divorce est dit rompre l'exercice du lien

marital, mais il ne le dissout pas. Le lien conjugal subsiste, même s'il n'y as plus de vie

conjugale. Aussi l'Eglise Catholique non seulement ne bénit-elle pas la nouvelle union

contractée par des divorcés, mais elle refuse aussi de les admettre à l'eucharistie.

L'Eglise protestante, de son côté, enseigne qu'un lien conjugal rompu est un lien

effectivement dissous par l'homme. Ce lien est du reste dissous non par le divorce, mais par

l'infidélité conjugale ou la séparation, le divorce n'étant que la sanction sociale et publique de

la dissolution de ce lien. Dès lors les divorcés peuvent-ils se remarier?

Cela va de soi pour le partenaire innocent qui ne porte pas la responsabilité de son divorce.

Encore faut-il que cette innocence soit manifeste et incontestable. Mais qu'en est-il de celui

qui, par sa conduite, porte la responsabilité de son divorce? A quelles conditions un pasteur

peut-il bénir son nouveau mariage? Il peut le faire 1) si le coupable reconnaît sincèrement

son péché et s'en repent, et que cette repentance porte des fruits visibles (désir de

réconciliation, volonté de subvenir aux besoins de l'ex-épouse et des enfants, etc.), 2) si

l'ex-époux ou l'ex-épouse est décédé, remarié ou qu'il ne désire pas reprendre la vie

conjugale avec son ancien partenaire. Si ces différentes conditions sont réunies, il paraît

difficile d'exiger du coupable repentant qu'il termine sa vie dans l'abstinence (cf. 1 Cor 7:2.9)

ou de lui refuser, en cas de remariage, la bénédiction nuptiale. Mais l'Eglise chrétienne

refusera sa bénédiction à toute personne responsable de son divorce pour adultère ou toute

forme de désertion malicieuse qui pourrait renouer les liens avec son ancien conjoint, mais

s'y refuse. Une telle attitude est incompatible avec la repentance et la foi chrétiennes, ce qui

signifie que Dieu ne peut pas bénir un tel homme ou une telle femme dans son nouveau

Page 92: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

92

mariage. Et par voie de conséquence, l'Eglise chrétienne non plus. En cela comme en tout ce

qui touche au mariage et à la sexualité, le témoignage de l'Eglise chrtétienne doit être très

clair en cette époque de permissivité et dans ce monde dissolu. Il ne s'agit en aucun cas de se

conformer au monde et de l'imiter. Le mariage est un état saint parce qu'institué par Dieu, et

doit être honoré par les chrétiens. Cela n'est possible que s'ils mènent une vie exemplaire et

si le témoignage de l'Eglise est dénué de toute compromission.

L'instruction et la cure d'âme relatives à la sexualité et au mariage:

Le foyer est le premier centre de formation des enfants et des jeunes. L'Eglise ne peut pas

remplacer les parents et n'a pas à le faire. Elle doit cependant instruire tous ses membres,

parents, jeunes et enfants dans la volonté du Seigneur. Elle édifie les foyers qui deviennent à

leur tour des berceaux de formation chrétienne (prédication, cours bibliques, instruction

catéchétique, groupes de jeunes, camps de vacances, retraites). Le nombre grandissant des

difficultés dans les familles, l'érosion de la vie de famille, la courbe croissante des divorces

rendent indispensable la cure d'âme pour tout ce qui a trait au sexe et au mariage. Tous les

chrétiens qui en éprouvent le besoin doivent pouvoir avoir accès à une cure d'âme

appropriée et posséder en leur pasteur un berger compréhensif et compétent.

Enfin, il y a la cure d'âme prémaritale dont nous avons déjà parlé. Le pasteur y instruira les

futurs époux sur tout ce qui touche au mariage, à l'éducation des enfants et à la vie de famille.

Le futur couple se prêtera volontiers à cette cure d'âme, dont l'intérêt est aussi d'établir des

relations de confiance entre lui et le pasteur. La façon dont celui-ci prépare des jeunes au

mariage peut les influencer et les pousser à recourir à son aide en cas de difficulté. La Bible a

beaucoup à dire sur le mariage et la famille (rapports entre époux, droits et devoirs

respectifs, procréation, limitation des naissances, avortement, éducation des enfants,

relations parents/enfants, attitude à l'égard de l'argent, problèmes financiers, rapports avec

Page 93: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

93

la belle-famille, culte de famille, culte dominical, modèle de vie chrétienne en cas d'épreuve,

difficultés pouvant provenir d'une approche différente de la sexualité de la part de la femme

et de l'homme, ou bien d'une origine sociale ou culturelle différente, etc.).

Combien de temps durera la cure d'âme prémaritale? On estime généralement que trois fois

une heure et demie est une bonne moyenne. Selon les cas, on pourra se contenter de moins

ou il en faudra plus. Dans les grandes paroisses on peut créer des groupes de préparation au

mariage ou bien animer un groupe permanent de jeunes couples. On n'oubliera pas d'utiliser,

en plus de la Bible, la littérature chrétienne spécialisée à laquelle on peut avoir accès.

__________

Page 94: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

94

L'ENTERREMENT CHRETIEN

En cas de décès dans la paroisse, le ministère du pasteur auprès de la famille du défunt

devient prioritaire. Toutes ses autres activités seront momentanément reléguées à

l'arrière-plan. Cf. ci-dessus, le chapitre sur l'accompagnement pastoral du mourant.

Il n'existe pas de sedes doctrinae de l'enterrement, mais des exemples bibliques. Les

patriarches furent pieusement enterrés par leurs enfants. Moïse fut enterré par Dieu (Deut

34:6), Jean-Baptiste par ses disciples (Mt 14:12) et Jésus par les siens. L'Eglise chrétienne se

conforme pour les funérailles comme pour la célébration des mariages à une coutume

sociale, mais lui donne un contenu chrétien. Elle sanctifie un enterrement par la Parole de

Dieu et la prière. Excellente occasion de confesser la foi et l'espérance chrétiennes.

Dès la nouvelle d'un décès, une visite du pasteur auprès de la famille s'impose. Elle sera

immédiate, s'il s'agit d'un décès subit désemparant la famille. On demande au pasteur une

consolation. Il consolera donc avec l'Ecriture et par une prière "ex corde". Il conseillera aussi

la famille concernant l'enterrement (date, heure, modalités) et le préparera avec elle. Si le

défunt est à son domicile et qu'il est de coutume que les parents, amis et voisins viennent le

voir une dernière fois et expriment leurs condoléances, on attend généralement du pasteur

Page 95: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

95

qu'il vienne aussi. Ce sera sa deuxième visite. Pour les questions de détail (quand fermer la

bière, procession, pelletée de terre, etc.), on se conformera aux coutumes locales.

Le choix du texte et la préparation du sermon se feront en fonction d'éventuelles

circonstances particulières (enfant, adulte, vieillard, souffrances ou pas, mort lente ou subite,

voire accidentelle, etc.). Tout sermon d'enterrement montrera le chemin du salut et le

bonheur de celui qui meurt dans la foi, mais le thème et donc le centre de gravité du message

pourront différer (providence de Dieu, certitude de la mort, incertitude de la vie, parousie,

résurrection, repentance). On ne fera pas l'éloge du défunt dans la prédication, on ne le

diffamera pas non plus et on n'accablera pas sa famille de reproches éventuels. Souvent le

pasteur est tenté de profiter de l'occasion pour dire ses quatre vérités à des gens

qu'autrement il ne voit guère au culte. Il doit résister à ce désir et utilisera la cure d'âme

auprès de la famille pour lui prodiguer les exhortations jugées nécessaires.

L'enterrement est bien sûr une grande occasion missionnaire...

Curriculum vitae: description de la vie du défunt et témoignage rendu publiquement à son

appartenance à l'Eglise, à son dévouement et sa fidélité.

Inhumation: affirmation de la résurrection des morts. Le pasteur ne s'opposera pas

systématiquement à l'incinération, mais tentera d'en dissuader. Si par contre elle est

pratiquée couramment comme une expression de l'incrédulité et de la négation de la

résurrection des morts, il demandera à ses paroissiens d'y renoncer.

Il sera accessible aux vœux du défunt et de sa famille (choix du texte du sermon, choix des

cantiques).

Pas d'unionisme lors d'un enterrement! Aucun pasteur appartenant à une autre Eglise ne

sera invité à participer activement aux funérailles.

Page 96: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

96

La participation de l'armée, du corps de sapeurs pompiers, d'une délégation professionnelle

(enterrement d'un militaire, d'un pompier, d'un membre du corps enseignant ou d'un

artiste) sera tolérée, mais on renoncera à toute manifestation ou discours dans l'Eglise qui

soit incompatible avec la foi chrétienne.

Qui enterrer? D'une façon générale, un pasteur enterre ses paroissiens. Il n'est pas l'agent

d'une entreprise de pompes funèbres. Cependant il ne sera pas légaliste. Il peut enterrer

toute personne ayant fait profession de christianisme, qui a recouru à sa cure d'âme ou a été

un sympathisant régulier de sa paroisse. Mais pas d'unionisme! Un pasteur luthérien

n'enterrera pas un chrétien réformé pour des raisons de convenance. L'enterrement chrétien

est réservé à des chrétiens. L'Eglise doit garder toute sa crédibilité et ne pas enterrer

chrétiennement une personne n'ayant pas fait profession de foi chrétienne. Refuser un

enterrement peut être un puissant témoignage. En tout cas, un enterrement à l'Eglise est par

définition un enterrement chrétien. Un pasteur ne peut en aucun cas exprimer la certitude

que le défunt est chez le Seigneur et qu'il ressuscitera un jour pour la vie éternelle, s'il est

personnellement convaincu de son incrédulité. Un suicidé sera enterré chrétiennement, s'il a

été membre de l'Eglise et que son suicide est dû une maladie mentale, qu'il a donc agi dans

un état d'irresponsabilité.

Le pasteur ne recherche pas d'honoraires pour des casuels (1 Tim 3:3). Si son salaire lui

permet de vivre, les honoraires ne sont pas de mise. Par contre, il ne refusera pas un don,

mais fera bien de ne pas l'employer à des fins personnelles. Il l'utilisera pour l'exercice de son

ministère ou pour les besoins de sa paroisse.

Tout doit contribuer à la gloire de Dieu et à l'édification de son Eglise, y compris la pratique

de l'enterrement, pour que s'accomplisse la promesse du Seigneur: Mt 25:21.

__________

Page 97: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

97

LES VISITES PASTORALES

Le pasteur est responsable de son troupeau et de chaque brebis. La cure d'âme individuelle

est donc indispensable. Contact personnel, même quand il n'y a pas de problème particulier

(Jn 10:3.27; Act 20:20; 1 Thess 2:11).

Nécessité de bien connaître chaque paroissien et d'être bien connu de lui, pour créer un

climat de confiance.

Les gens changent. Un chrétien sans problème il y a quelques mois peut être en difficulté

aujourd'hui.

Souvent les gens ne viennent pas d'eux-mêmes chez le pasteur. Aller chez eux peut briser la

glace et délier la langue. Les visites périodiques du pasteur suscitent la confiance et font que

le paroissien désire lui parler, quand il en éprouve le besoin.

Page 98: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

98

En chaire, le pasteur s'adresse à un auditoire. Il s'exprime donc de façon relativement

générale. Dans la cure d'âme, il peut devenir plus précis, s'attarder sur une vérité

particulière... Les visites ne sont pas là pour remplacer, mais pour compléter les cultes.

L'assistance aux cultes croît, quand le pasteur en fait régulièrement.

Fréquence des visites? Pas de règle générale. Cela dépend de l'emploi du temps du pasteur et

de l'importance de sa paroisse. Deux fois par an dans chaque foyer (plus, bien sûr, les visites

qui s'imposent pour des raisons de cure d'âme) est certainement un minimum dans une

paroisse d'importance moyenne. Il faut évidemment en faire beaucoup plus, quand il y a

problème ou qu'on a affaire à des paroissiens irréguliers aux cultes.

__________

Page 99: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

99

LA CURE D'AME AUPRES DES MALADES

Causes de la maladie: Dieu en tant que cause première, Satan (Lc 13:16 et Job), le péché (Gen

3:16-19). Un péché particulier peut de plus être à l'origine d'une maladie particulière (Deut

28:21.22), mais il convient de ne pas généraliser (Jn 9:2.3). La maladie peut aussi être la

conséquence directe d'un mauvais comportement (impudicité, alcool, drogue, tabac).

Le pasteur fait partie d'une équipe qui soigne le malade. Il a son rôle spécifique dans

cette équipe, et ne doit pas se substituer au malade. Il est détenteur d'un message qui le

distingue de cette équipe de soignants.

Utiliser les moyens de grâce pour fortifier dans la foi le chrétien souffrant, pour l'inciter à

prier Dieu de lui venir en aide, à assumer sa maladie avec humilité et confiance, à surmonter

le désespoir qui constitue une barrière à la guérison, enfin à se préparer à la mort, quand

celle-ci est inéluctable.

Page 100: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

100

Prêcher la Loi, mais avec amour. Ne pas écraser le malade, sauf s'il persiste dans

l'impénitence. Ne pas donner au malade négligeant l'impression qu'on profite de sa maladie

pour lui tomber dessus. Ne jamais jouer le rôle du "plus saint que toi", de celui qu'il faut

imiter pour guérir.

Faire la différence entre le malade chrétien et le malade incrédule. Ne pas oublier que même

un chrétien peut redouter une opération ou craindre la mort.

Le diagnostic spirituel:

Le pasteur n'a pas à sa disposition les instruments qui permettent au médecin de faire son

diagnostic. Il ne peut qu'écouter ce que dit le malade pour déterminer s'il est croyant ou non,

si sa vie honnête et juste est la sanctification du chrétien ou la justice civile.

Il n'oubliera pas que le malade est souvent un introverti qui a perdu son équilibre intérieur,

que par ailleurs les médicaments altèrent son comportement ordinaire, qu'il cède davantage

à l'impatience que le bien-portant. D'où nécessité de prudence pour ne pas diagnostiquer de

l'incrédulité chez un malade qui a perdu plus ou moins le contrôle sur ses réactions.

Il peut être bon et utile, mais il n'est pas nécessaire que le pasteur connaisse le diagnostic

médical. Il doit prendre essentiellement soin de l'âme du malade, quel que soit le type de sa

maladie. Connaissant le diagnostic médical, il risque même de commettre des indiscrétions et

est en butte aux questions curieuses du patient. D'une façon générale, c'est au médecin et non

au pasteur de révéler au patient où il en est avec sa maladie, s'il a ou non des chances de

guérir. Il faut ne jamais lui donner de faux espoirs, minimiser sa maladie et ne pas la prendre

au sérieux, ou au contraire dramatiser la situation.

Page 101: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

101

Il est des circonstances où un pasteur doit s'abstenir de visiter un malade, quand le médecin

a de bonnes raisons de le lui demander. Il priera alors pour lui ou le fera avec sa famille. Il en

est d'autres où il enfreindra l'ordre du médecin.

Ne pas être un clown hilare et sans sérieux au chevet d'un malade, ni chercher à distraire son

attention en lui parlant du temps qu'il fait ou des événements de l'actualité. Ne pas faire

davantage une mine d'enterrement. Ne pas non plus jouer à l'inquisiteur...

Faire preuve de sagesse dans la fréquence et la durée des visites, dans le choix des thèmes et

dans la dimension des méditations (temps disponible sans déranger l'équipe hospitalière,

capacités d'attention du patient). Les visites seront régulières, de type pastoral, riches en

signification et en message. On encouragera les membres de la paroisse à rendre également

visite aux malades, mais avec sagesse et d'une façon qui les édifie et les console. On leur fera

parvenir aussi, s'ils sont capables d'en tirer profit, des sermons enregistrés sur cassettes.

Faire preuve de compréhension: s'identifier au malade pour comprendre ce qu'il resent à la

veille d'importantes analyses médicales, à la perspective d'une opération, d'une longue

convalescence, de l'invalidité, de la mort (empathie). Puis, après s'être identifié à lui, s'en

détacher pour trouver le jugement objectif qui permettra de lui apporter l'aide dont il a

besoin.

La cure d'âme auprès des femmes malades est généralement plus facile. Elles sont en général

plus accessibles à la religion que les hommes (je parle d'étrangers dans la salle), plus

ouvertes à parler de religion, moins prudes et réservées dans ce domaine. D'autre part, elles

parlent plus volontiers d'une façon générale et assument souvent leur maladie mieux que les

hommes.

Page 102: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

102

L'étude de l'Ecriture, la méditation quotidienne et la préparation des sermons fournissent au

pasteur une série de textes bibliques qui lui servent dans la cure d'âme. Eviter les lieux

communs, les stéréotypes, recourir à des messages qui répondent aux besoins des gens.

Nécessité de prier avec les malades. Prières brèves, qui répondent à leurs besoins, lues ou

prononcées "ex corde" selon les circonstances. En varier la forme.

Problèmes de morale:

Veiller à ne pas céder à l'émotionalisme.

Susciter la confiance en Dieu et dans le médecin. Ne jamais

dire du mal de ce dernier.

Comprendre le patient. Il y en a de nombreux types: certains

supportent mal la souffrance, d'autres non: certains coopèrent avec le médecin, d'autres

non...).

En aucun cas le pasteur ne pourra préconiser l'euthanasie acti-

ve, la vie étant un don de Dieu et restant entre ses mains.

__________

Page 103: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

103

LA CURE D'AME

AUPRES DES CHRETIENS EN DIFFICULTE

Job 14:1. Toute vie humaine est faite de troubles et de problèmes. Les chrétiens se tournent

alors vers leur pasteur. A travers lui, ils s'adressent à Dieu. Le pasteur sait cela. Il doit donc

être disponible et ne pas se contenter de prêcher l'Evangile "ex cathedra", du haut de sa

chaire. Il doit avoir le coeur requis pour la cure d'âme. Il faut donc qu'il soit un bon

théologien..., mais aussi un homme qui connaisse l'âme humaine et ses difficultés. D'où la

nécessité, en plus de la théologie, d'étudier les rudiments de la psychologie pour connaître

les forces qui ébranlent l'équilibre et le bonheur des individus et font naître les troubles

mentaux et émotionnels.

Cf. l'ouvrage de Paul Hoff, La cure d'âme.

Page 104: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

104

Cure d'âme par le dialogue:

Le pasteur en doit pas être prédicateur, quand il fait de la cure d'âme, parler "ex cathedra" en

réduisant son interlocuteur au silence. Il doit au contraire conseiller et aider par la voie du

dialogue. D'où nécessité de laisser son interlocuteur s'exprimer librement, sans le presser de

questions inquisitoires, épancher son coeur, sans le reprendre à tout moment. Savoir

attendre et écouter avec patience est l'A.B.C. de la cure d'âme. Le pasteur dirige l'entretien,

provoque l'épanchement du coeur, mais ne doit pas l'emprisonner dans un cadre... Nécessité

d'un climat de confiance et de compréhension. L'interlocuteur doit pouvoir sentir le coeur de

son pasteur vibrer d'amour et de bonté, de façon à ce que rien ne l'empêche de dire tout ce

qu'il a à dire.

C'est au chrétien en difficulté de venir spontanément trouver son pasteur. S'il ne le fait pas, le

pasteur informé de ses difficultés déploiera tout son tact pour l'encourager à faire ce pas.

Il est indispensable d'observer le secret professionnel. Il faut que le chrétien sache que son

pasteur restera discret en toutes circonstance. Nécessité donc de s'isoler avec lui, pour qu'il

puisse tout dire, même les choses les plus sordides et honteuses, sans que le pasteur exprime

surprise ou dégoût... Il faut que le chrétien sache que le pasteur l'accepte et l'aime tel qu'il est.

Le pasteur, de son côté, fera tout pour comprendre son interlocuteur, pour analyser ses

mobiles, découvrir l'origine de ses troubles, etc.

Confession et absolution:

Définition de la confession et de l'absolution...

Dans la plus stricte intimité. Le pasteur annoncera la Loi au pécheur impénitent, mais

Page 105: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

105

renoncera à le faire devant le chrétien repentant à qui il proclamera une absolution

gratuite et totale au nom du Christ. Rien ne peut libérer une âme angoissée et la réjouir, la

réconforter davantage que cette application personnelle des promesses de l'Evangile. C'est

une thérapeutique merveilleuse que seul le pasteur peut appliquer.

Différents types de cure d'âme:

Cure d'âme

- rémaritale,

- familiale (prudence),

- adolescents (changement de structures sociales, accroissement des

loisirs, cherté de la vie, problèmes professionnels, nombreuses tentations. Nécessité

de bien connaître les jeunes et leurs problèmes et de leur venir en aide. Les jeunes sont

l'avenir d'une paroisse, d'où l'importance d'une telle cure d'âme.

- vieillards (cure d'âme particulière auprès d'eux et de ceux qui

prennent soin d'eux).

- malades (cf. le chapitre précédent).

- mourants et des personnes en deuil (cf. ci-dessous).

- malades mentaux (névroses, psychoses, notamment mélancolies,

débilités légères, moyennes et profondes). Le pasteur doit être initié aux mécanismes de

ces maladies, mais ne pas se substituer au psychiatre ou au psychothérapeute.

- alcooliques: Explications possibles (inadaptation au contexte, fuite du

moi, sentiment d'infériorité). Le tout engendre la culpabilité, la crainte, voire la haine

de Dieu. Auto dégradation de la personnalité. L'une des cures d'âme les plus difficiles.

Application de la Loi et de l'Evangile. Ne pas considérer que le symptôme (propension à

l'alcool), mais en analyser les causes et les soigner. Assistance du médecin nécessaire.

Cure de désintoxication. Aider la famille à assumer la présence d'un alcoolique au foyer

Page 106: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

106

et lui montrer en quoi elle peut l'aider.

- couples en difficulté: Questions très intimes; nécessité d'avoir confiance

dans le pasteur. Deux périodes difficiles dans la vie d'un couple: la (ou les) première(s)

année(s) du mariage (devoir d'adaptation du couple) et la période qui suit les 20 ou 25

années de mariage (routine, ménopause, peur d'une grossesse tardive). Problèmes

inhérents aux mariages mixtes... Problèmes sexuels dus à des facteurs émotionnels ou

mentaux... Problèmes financiers du foyer... Réussite professionnelle de la femme (salaire

plus élevé que celui de son mari)...Problèmes de générations (cohabitation avec les

beaux-parents, difficultés avec les enfants, relations parents/enfants et

grands-parents/enfants)... Problèmes d'adolescents... Se méfier des raisons apparentes

(l'alcoolisme d'un mari peut n'être que le symptôme d'un mal plus profond, comme le

manque d'harmonie sexuelle ou un stress professionnel).

Mésententes et divorce sont dus à l'incapacité de résoudre les problèmes conjugaux.

Cette incapacité est due au fait que la Bible n'est pas dans ce cas un guide réel dans la vie

de tous les jours. Si le couple se laisse guider par la Parole de Dieu et vit dans la

volonté de pardon réciproque, les problèmes trouvent en général leur solution. L'échec

est souvent dû aussi à un manque de communication dans le couple (manque de

compréhension pour les problèmes du conjoint; ils n'ont plus rien à se dire; la rancune et

les griefs s'accumulent). Souvent aussi, il y a manque de maturité.

Le pasteur a besoin, pour conseiller, de beaucoup de agesse et d'expérience. Trop

souvent il a tendance à prendre parti pour l'un des deux conjoints. Demeurer objectif,

ne pas s'engager hâtivement, savoir écouter l'un puis l'autre, ensuite les deux à la fois.

Ne pas chercher à résoudre le problème au cours d'une seule entrevue. Multiplier les

rencontres; laisser le temps de réfléchir et prendre le temps de faire de même. Ne pas

jouer au psychologue. Laisser parler la Bible. Montrer amour et patience. Savoir qu'il y a

souvent torts des deux côtés.

- jeunes filles mères ou en voie de le devenir: la jeune fille et le jeune

Page 107: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

107

homme ont besoin d'aide. Ne pas se montrer choqué et scandalisé, même si on l'est, car

on ne gagnera pas la confiance. Il ne s'agit pas de nier le péché, mais il faut être en

attitude d'accueil comme l'était Jésus. Rechercher la repentance et offrir le pardon.

Obtenir la réconciliation des deux avec leurs familles (Mt 5:23.24), et obtenir des

parents qu'ils pardonnent (Mt 6:14.15). Essayer de convaincre les deux de se marier,

mais ne pas les y contraindre d'office. S'il n'y a pas d'amour, le mariage n'est pas à

conseiller. Résoudre le problème de l'enfant, en montrant que les deux sont

responsables pour lui.

- drogués: actualité brûlante, surtout parmi la jeunesse. Eviter d'être

choqué et scandalisé, quand on est confronté à ce problème dans sa paroisse. Le recours

aux drogues a des raisons, comme celui à l'alcool: senti ment des jeunes de ne pas être

compris et aimés, insécurité, absence de relations affectueuses avec les pa rents,

déceptions...

Le pasteur ne peut aider le drogué que si celui-ci désire s'en sortir. Dévoiler les raisons

du recours aux drogues: quel problème le jeune tente-t-il de fuir ou de résoudre en

recourant aux drogues? Cure d'âme avec la famille du drogué, pour que celle-ci

devienne pour le drogué une source de secours. Ne pas oublier l'efficacité de la Parole de

Dieu et de la prière.

Le pasteur

- doit avoir certaines connaissances sur les drogues, savoir distinguer entre la

marijuana dont on peut guérir sans aide médicale, et l'héroïne ou la cocaïne qui

entraînent une dépendance qui nécessite absolument l'intervention de la médecine.

Connaître l'existence de centres de soins spécialisés pour pouvoir y aiguiller le malade.

- les homosexuels.

__________

Page 108: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

108

LE PASTEUR ET LE CHRETIEN QUI S'EGARE

L'exhortation fraternelle:

L'exhortation fraternelle est un devoir (Lév 19:17; Ez 3:16 ss.; Mt 18:15; Lc 17:3; Gal

1:6; Jac 5:19.20). C'est le devoir de tout chrétien, et surtout du pasteur, un élément

important de son ministère. Doit être exhorté tout frère qui s'égare (Mt 18:15), et pas

seulement quand il y a péché mortel. Le pasteur doit être inaccessible à la diffamation. Il

ne procède donc pas à l'exhortation sur la base de ce qu'on a pu lui raconter de

quelqu'un.

But de l'exhortation: la repentance et le salut du pécheur pour la seule gloire de Dieu.

D'où nécessité de témoigner de la bonté et de l'amour. Les moyens de cette exhortation

Page 109: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

109

sont l'Ecriture et elle seule. Nécessité d'un bon jugement qui est une facette de l'amour

chrétien en action. Tenir compte du tempérament de l'interlocuteur, pour être aussi

efficace que possible. Ne pas critiquer et raboter sans cesse... Ne pas s'imposer à l'autre

(respecter, par exemple, son emploi du temps). Ne pas traiter comme un péché mortel

le péché dans lequel est le frère tombé par faiblesse.

La discipline ecclésiastique:

C'est l'aboutissement de l'exhortation fraternelle, si la chose est portée devant la

paroisse.

Exégèse de Mt 18:15 ss. et des différentes étapes de la discipline ecclésiastique. Celle-ci

n'est pas tant une mesure punitive qu'un moyen de pédagogie spirituelle.

"Un ou deux" comme témoins: Il n'est pas nécessaire qu'il s'agisse de témoins du péché

commis. Ce peuvent être simplement des frères qui assistent et participent à

l'exhortation, quand la première tentative a été un échec. Il est préférable que le pasteur

ne soit pas l'un de ces deux témoins. Ne faire appel à des témoins que si on peut prouver

le péché. S'il n'y a pas de preuve, la 1 étape peut être la dernière. L'affaire en restera là,

étant entendu que Dieu sait et agira (Lc 12:2).

Le péché regretté et confessé doit rester caché, s'il n'est pas connu. S'il est de notoriété

publique, on n'a plus besoin de passer par les deux premières étapes. Il peut cependant

être bon de le faire quand même.

En cas d'échec, c'est à l'Eglise d'agir. Elle le fera par l'assemblée des membres électeurs

ou du conseil presbytéral. La paroisse doit refuser de procéder à la discipline

Page 110: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

110

ecclésiastique, si les deux premières étapes n'ont pas été franchies, et si la réalité du

péché n'est pas prouvée. Il peut être utile qu'avant de traiter le cas devant la paroisse, le

pasteur (s'il n'a pas déjà parlé avec l'intéressé dans la 2 étape), fasse une tentative

personnelle auprès de lui, avec ou sans l'un ou l'autre des conseillers presbytéraux.

Le seul but de la procédure est la repentance, et donc le salut du pécheur (2 Sam 12:13).

Devoir d'accepter la confession du pécheur comme sincère... Pas question de lui

imposer un temps probatoire avant de lui donner l'absolution ou de l'admettre à la

Cène. Le pardon que le Christ offre au pécheur repentant et croyant est instantané,

gratuit et total!

L'excommunication:

C'est la déclaration solennelle, au nom du Christ, que l'impénitent est "un païen et un

publicain" et n'est plus considéré comme membre de l'Eglise. Cf. Mt 18:17.18. N'étant

plus membre de l'Eglise "stircte dicta", il ne peut pas le rester de l'Eglise "late dicta". Ce

faisant, l'Eglise ne fait que proclamer le verdict divin. Elle agit au nom de Dieu, avec son

autorité.

Un dissensus à propos d'un adiaphoron ne peut jamais être objet d'excommunication.

Quand il y a dissensus doctrinal, le chrétien qui ne se laisse pas corriger ne peut être

excommunié au sens strict du terme, c'est-à-dire déclaré "païen et publicain", que si le

dissensus concerne une doctrine fondamentale. Dans les autres cas, la mesure

disciplinaire n'est pas une excommunication, mais une séparation: l'intéressé n'est plus

considéré comme un frère dans la foi, n'est donc plus dans la communion ecclésiale,

Page 111: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

111

quoiqu'il puisse être un croyant.

Ce n'est pas le péché même, mais l'impénitence qui entraîne l'excommunication. Une

paroisse ayant procédé à une excommunication doit pouvoir justifier son action. D'autre

part, cette excommunication doit être reconnue par les paroisses-sœurs et le Synode

tout entier. Pas question qu'un membre excommunié soit reçu à la Sainte Cène dans une

autre paroisse du Synode!

C'est l'Eglise locale, investie du sacerdoce universel, qui agit. Le pasteur peut

momentanément suspendre un paroissien de la participation à la Sainte Cène, mails il

ne peut pas, à lui seul, prononcer une excommunication.

L'excommunication doit se faire à l'unanimité. Elle est la conviction de tous qu'il y a

impénitence. Tous doivent en être convaincus. Si quelqu'un ne l'est pas, il faut traiter

avec lui pour l'en convaincre. Au besoin, on le considérera lui-même comme objet de

discipline ecclésiastique. Si beaucoup de membres ne sont pas convaincus, il vaut mieux

renoncer à l'excommunication. Le pasteur remettra l'affaire entre les mains de Dieu et

se consolera à la pensée que le pécheur a entendu ce qu'il devait entendre pour sauver

son âme. S'il y a vice de forme, le pécheur ou d'autres membres peuvent faire appel. Le

refus de la part d'une paroisse d'annuler une excommunication non valide peut

entraîner de la part du Synode la suspension de la communion ecclésiale avec cette

paroisse et son pasteur.

L'excommunication doit être pour l'intéressé une prédication constante de la Loi qui

doit l'amener à la repentance. Dans ce cas, la réintégration dans la paroisse a lieu après

la confession publique du péché.

Un excommunié peut assister aux cultes, mais il est exclu de la Sainte Cène et disqualifié

Page 112: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

112

comme parrain ou marraine. On lui refusera aussi un enterrement chrétien. On le

saluera et sera courtois avec lui, mais il ne sera plus traité en frère ou soeur dans la foi.

Si l'intéressé, invité par la paroisse, refuse de comparaître et qu'il s'agit d'un refus

délibéré, celui-ci sera considéré comme impénitence et entraînera son

excommunication. Celui qui s'excommunie lui-même et rompt les liens avec sa paroisse

ne peut pas être excommunié par une décision de l'Eglise. Il sera simplement radié sur

décision de la paroisse (par l'intermédiaire du conseil presbytéral), après les

exhortations d'usage, et cette radiation lui sera notifiée.

On fera de toute procédure de discipline ecclésiastique un procès-verbal minutieux

mettant fin à toute contestation.

C'est toujours le cœur très lourd qu'on procède à une excommunication, et avec l'ardent

désir que le pécheur se repente par la suite. On priera pour cela, et s'il se repent, il sera

reçu avec joie et sans arrière-pensées (Lc 15:7.10; 2 Cor 2:6-11).

__________

Page 113: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

113

L'ACCOMPAGNEMENT PASTORAL

DES

MOURANTS

La souffrance est le lot de tous les hommes dans l'économie actuelle de la chute. Tous

font notamment l'expérience de pertes et de déchirements, et il appartient au pasteur

de venir en aide à ceux de ses paroissiens qui passent par là. La cure d'âme auprès des

mourants revêt un double aspect: il s'agit d'aider celui qui est atteint d'une maladie

incurable et qui sait qu'il va mourir sous peu à assumer tous les sentiments et émotions

Page 114: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

114

que sa situation génère et de le préparer à la mort, et en même temps de soutenir et de

consoler ses proches parents, à la fois dans la perspective de la mort prochaine et au

lendemain de celle-ci.

La cure d'âme auprès du mourant:

Venir en aide aux mourants est l'un des aspects les plus difficiles du ministère pastoral.

Il s'agit pour le patient et pour le pasteur de faire face au dernier ennemi, la mort.

Affronter la mort n'est pas facile. D'autant plus qu'on vit dans un monde qui évacue la

mort. Il le fait en exaltant la jeunesse et la beauté. Les techniques médicales modernes

permettent de repousser toujours davantage cette échéance. D'autre part, le spectacle

de la mort ne fait plus partie de l'expérience ordinaire de la vie. La plupart des vieillards

mènent une existence autonome et ne vivent pas sous le même toit que leurs enfants.

Les soins sont prodigués par les infirmières et les travailleurs sociaux. Par ailleurs, on

ne meurt plus guère chez soi, entouré des siens, mais en milieu hospitalier. Les gens ne

sont que rarement là pour assister à l'agonie de leurs parents.

Par ailleurs, les médecins qui vivent la mort comme un échec ne disent pas volontiers la

vérité à leurs malades. Beaucoup de patients redoutent d'être diminués, voire défigurés

par la maladie, de dépendre des soins constants d'autrui.

Il est particulièrement difficile de mourir quand on a le sentiment d'avoir gâché sa vie.

Inversement, quand la vie qu'on mène a un sens et un but, il est plus facile d'affronter la

mort quand elle s'annonce. Il est donc important pour le pasteur de montrer à ses

fidèles ce qu'est le vrai but de la vie, de les encourager à mener une vie qui leur

Page 115: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

115

permette de s'épanouir pleinement, et cette vie-là est vécue en communion avec Dieu,

dans la foi en ses promesses et dans la soumission à sa volonté (Eccl 12:13; Mt

22:37.39). Le Dr. Elizabeth Kubler-Ross, grande spécialiste américaine de

l'accompagnement des mourants, estime qu'il est capital que les gens vivent de manière

à ce qu'ils n'aient pas, en regardant en arrière, à dire: "J'ai gâché mon existence".

Le pasteur doit aussi instruire ses fidèles sur la mort. En aidant les gens à comprendre

ce qu'elle est, on les aide à l'assumer. La souffrance devient insupportable, quand elle

n'a pas de sens. Il faut savoir que la mort fait partie du cycle de la vie. Dieu ne l'a pas

créée, mais elle est le salaire du péché (Rom 6:23). Cependant le Christ l'a vaincue. Le

chrétien ne subit donc pas un échec en mourant, mais la mort est pour lui le moyen de

déposer un corps souillé par le péché pour pouvoir vivre en présence de Dieu, en

attendant sa résurrection glorieuse. La mort est l'entrée glorieuse dans la vie éternelle.

Elle est donc pour le chrétien racheté un don de Dieu. Ce n'est que par la mort que nous

pouvons vivre en présence de Dieu. Le but de la vie du chrétien est donc de tout faire

pour mourir un jour dans la foi, afin que se réalisent pour lui les promesses qui lui sont

faites dans l'Ecriture. La mort du chrétien est une victoire et non un échec, une victoire

qu'il doit à celui qui l'a racheté en vainquant le péché, la mort et l'enfer.

Pour aider les gens à mourir, il faut bien les connaître. Des études spécialisées semblent

prouver qu'on meurt comme on a vécu, que l'homme aura face à la mort les réactions et

attitudes qui sont les siennes quand il fait face, dans la vie, à l'adversité, au stress, à

l'échec, à un défi ou une perte.

Enfin, pour pouvoir utilement préparer les autres à la mort, il faut que le pasteur

réfléchisse à sa propre attitude à cet égard. Plus il sera lucide au sujet de ce que la mort

lui inspire personnellement, plus il sera en mesure de comprendre les autres, et

notamment d'accepter qu'ils expriment librement leurs sentiments à cet égard.

Page 116: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

116

Quelques éléments de réflexion:

1) Dire la vérité à celui qui souffre d'une maladie incurable:

Les médecins ne disent pas toujours la vérité à leurs malades, soit parce que cela les

contraint d'avouer leur échec et que cela leur fait donc peur, soit qu'ils pensent que la

connaissance de la vérité pourrait les traumatiser inutilement et abréger leurs jours. Il

en va de même de bien des proches parents bien intentionnés. Ils veulent protéger le

malade d'une mauvaise "nouvelle". Le pasteur ne devrait pas encourager cette attitude.

La plupart des mourants interrogés par le Dr. Kubler-Ross ont déclaré qu'ils auraient

préféré savoir la vérité à temps. Rien ne semble plus mal accepté que le sentiment que

le médecin cache la vérité, qu'il fuit le malade et évite tout contact avec lui.

En cachant la vérité à un patient, on lui interdit de mener à bien une tâche qu'il n'a pas

encore accomplie, de prendre ses dernières dispositions en faveur de sa femme, de ses

enfants ou de son Eglise, de demander pardon à quelqu'un à qui il a fait du tort, de faire

ses adieux à ceux qu'il aime ou de se réconcilier avec Dieu. En cachant la vérité, on nuit

aussi au climat de confiance qui est si important à ce moment. Les grands malades le

sentent parfaitement, lorsqu'on leur dissimule quelque chose. C'est à éviter à tout prix.

2) Savoir écouter:

Dieu nous a donné deux oreilles, mais une seule bouche. Peut-être peut-on en tirer la

conclusion qu'il faut écouter deux fois plus qu'on ne parle. D'autant plus que Dieu nous

a donné la possibilité de fermer la bouche, mais pas les oreilles. C'est à ne pas oublier.

Trop souvent on croit pouvoir tout régler par l'abondance de paroles. Une chose est

certaine: on ne peut pas répondre à une question avant de la connaître. Kubler-Ross

Page 117: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

117

signale que ce qui l'a toujours frappée, c'est que les membres du clergé se comportent

généralement comme si ouvrir une Bible ou un livre de prières était le seul moyen de

communiquer avec des patients, et qu'ils évitent trop souvent d'écouter ce qu'ils ont à

dire, fuyant peut-être des questions embarrassantes (Kubler-Ross, On Death and Dying,

1969, p. 226).

Le but du pasteur doit être d'aider les mourants à faire le nécessaire pour accepter

l'idée de la mort et partir en paix. Pour cela, il faut les écouter, détecter leurs besoins et

les aider à les satisfaire. Il n'est pas là pour leur dire ce qu'ils doivent ressentir ou ce

qu'ils ont à faire, encore moins pour leur imposer ses propres sentiments, mais pour les

aider à assumer les sentiments et les émotions qu'ils éprouvent.

3) Comprendre le patient:

Aider, c'est tout d'abord comprendre ce qu'éprouve l'autre. La plupart des mourants

passent par cinq phases: le déni, la colère, le marchandage, la dépression et

l'acceptation. Cette séquence cependant ne se vérifie pas toujours. Tous les mourants ne

passent pas nécessairement par ces cinq étapes. D'autre part, le temps qu'ils mettent à

les franchir varie considérablement de l'un à l'autre. Essayons de les analyser un peu.

a) Le déni:

La première réaction de celui qui réalise qu'il va mourir sous peu est le déni, comme le

montrent des réactions du genre: "Non, pas moi!", "Cela ne peut pas être vrai!" Il

s'efforcera de nier sa maladie ou sa gravité, mettra en doute le diagnostic, ou bien

laissera entendre que ce diagnostic ne lui fait pas peur. Il fera des plans tout à fait

utopiques pour l'avenir, désobéira à son médecin, fera preuve d'un optimisme irréaliste

Page 118: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

118

concernant l'opération qu'il doit subir ou le traitement auquel il lui faut se soumettre,

etc.

Le déni est une chose à la fois bonne et mauvaise. Il est bon, car

il constitue un réflexe de défense permettant au malade de supporter le choc, en

attendant de trouver un mécanisme moins radical. Il ne faut donc pas renverser ces

murailles de protection. Il convient de respecter le besoin de nier du patient, du

moment qu'on ne triche pas avec lui.

Mais le déni est mauvais, si le patient refuse de sortir de ce stade. Dans ce cas, il faut

essayer de déterminer la part du patient et la responsabilité de son entourage. Le

patient en effet refuse souvent de franchir ce stade, quand il sent que le médecin et la

famille nient l'évidence et se complaisent eux-mêmes dans cette phase. Il dépend

entièrement de son environnement et a besoin de ceux qui l'entourent. Il nie donc sa

maladie, quand il estime que son entourage lui demande de le faire. Il suffit qu'il ait un

partenaire avec qui parler ouvertement, pour qu'il accepte de renoncer à cette attitude.

b) La colère:

La question "Pourquoi moi?" révèle que le patient en est au stade de la colère. Cette

colère, il la tourne contre son médecin dont il met en doute la compétence, contre les

infirmières qui le soignent, contra sa famille, son pasteur, voire Dieu lui-même. Il fait

alors preuve d'amertume et de rancune, se plaignant de tout et de rien, jalousant ceux

qui se portent bien ou qui vivent plus vieux. Parfois, la colère n'est qu'un appel à l'aide

lancé par quelqu'un qui souffre d'une grande solitude.

Il n'est pas facile de s'occuper de gens en colère. Suirtout quand cette colère se tourne

Page 119: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

119

vers Dieu. Le pasteur étant son représentant, c'est généralement devant lui qu'elle se

répand. La colère contre Dieu est le plus souvent irrationnelle. Il faut le savoir et ne pas

faire preuve d'une inutile dureté. Qu'on permette au patient de l'exprimer.

Généralement il comprendra son erreur et demandera pardon à Dieu.

Très souvent le patient pose des questions: "Pourquoi moi?", "Qu'ai-je fait pour mériter

cela?" Le pasteur pense généralement qu'il doit y répondre, alors que le malade n'exige

pas toujours de réponse, mais que poser ces questions est souvent pour lui un moyen de

ventiler sa colère. Généralement, elles n'ont pas d'autre réponse que la vérité biblique

selon laquelle nous vivons dans l'économie de la chute. Ce qui satisfait ou ne satisfait

pas l'intéressé. Mais que le pasteur n'imagine pas qu'il doive prendre la défense de Dieu

et avoir une réponse à toutes les questions. Il y a des choses qui nous sont cachées. Qu'il

permette au malade de s'exprimer, sans lui tomber dessus, sachant que ce genre de

débordement fait partie, lui aussi, des mécanismes de défense et permet de trouver un

soulagement. Le pasteur peut toujours, par la suite, quand son malade s'est exprimé

librement, lui dire en toute simplicité et avec tout le calme voulu ce que son attitude a

d'irrationnel.

Il existe une forme de colère que le malade tourne contre lui-même et qui se manifeste

par un sentiment de culpabilité. Beaucoup de malades incurables ont le sentiment que

le Seigneur les châtie pour quelque péché particulier. Ce sentiment de culpabilité est, lui

aussi, la plupart du temps irrationnel. Il est sûr que nous sommes tous coupables devant

Dieu; mais il est sûr aussi que nous pouvons vivre de son pardon et nous en réjouir. Il

faut donc annoncer au chrétien mourant toutes les consolations de l'Evangile. S'il

souffre d'un sentiment légitime de culpabilité à l'égard d'un homme pour l'avoir offensé

et ne pas encore s'être réconcilié avec lui, le pasteur devra tout faire pour l'aider à le

surmonter par la repentance et la réconciliation.

Page 120: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

120

c) Le marchandage:

Le malade incurable cherche volontiers à marchander avec Dieu. Il est prêt à accepter sa

volonté, mais à condition que le Seigneur lui permette encore de vivre un certain temps,

pour qu'il puisse achever un travail, vivre encore quelques mois auprès de sa femme ou

de son mari, assister au mariage d'un enfant ou au baptême d'un petit-enfant.

Le marchandage est un moyen d'ajourner l'inéluctable. Le patient qui marchande le fait

généralement parce que Dieu n'a pas réagi à ses accès de colère. La colère ayant échoué,

on espère obtenir quelque chose en lui parlant sur un ton gentil et en lui proposant une

sorte de contrat.

L'exemple classique est celui du paroissien qui a négligé d'aller au culte. Il dira

volontiers à Dieu: "Seigneur, si tu me permets de vivre encore un peu, je te promets que

tu me verras tous les dimanches à l'Eglise". L'intéressé reconnaît son indifférence et sa

tiédeur passées, estime que sa maladie en est une conséquence et promet de se corriger

s'il en réchappe.

La phase du marchandage est utile, car elle montre que le patient a su faire un bilan. Il

convient donc de respecter le besoin de passer par elle. Il ne faut pas cependant qu'il

s'imagine pouvoir apaiser Dieu par des promesses. Dieu n'est réconcilié avec nous que

par la mort de son Fils et toutes les bénédictions passent par lui. Si Dieu accorde une

"rallonge" à un malade condamné par la médecine, il le fait par sa seule grâce et non en

vertu d'un marchandage. On se souviendra de l'exemple de David (2 Sam 12:15-23).

L'enfant que Bathscheba lui avait donné était mourant. Le roi s'imposa un jeûne sévère

dans l'espoir que Dieu l'épargnerait. Mais quand il mourut, David interrompit son jeûne,

comprenant qu'il n'avait plus de raison d'être.

Page 121: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

121

d) La dépression:

Beaucoup de malades incurables passent par elle. Elle revêt deux formes. Il y a tout

d'abord la dépression liée au passé: le malade se plaint de n'avoir pas pu faire un tas de

choses, d'avoir échoué en ceci ou en cela, d'avoir rompu des liens, commis de mauvaises

actions. Le pasteur peut offrir son aide de bien des façons, en consolant le malade à

propos de buts qu'il n'a pas atteints, ou bien en provoquant une réconciliation.

La dépression peut aussi s'orienter vers l'avenir: la perspective de devoir quitter les

siens ou de laisser une épouse poursuivre son chemin toute seule, l'éventualité d'une

déchéance physique, la peur d'être une charge pour la famille peuvent abattre le

malade. Il ne faut pas tenter de briser cette dépression avec des arguments faciles qui

risquent d'être peu acceptés. Elle est même nécessaire en ce qu'elle permet au mourant

de faire un "travail de deuil" indispensable. C'est ce travail de deuil qui permet de

passer à la phase de l'acceptation. Il faut savoir être présent et écouter, pour déterminer

les besoins physiques, spirituels ou psychiques réels du patient.

e) L'acceptation:

C'est le dernier stade, auquel tous cependant n'accèdent pas. On n'y parvient que si on a

pu achever certaines choses comme régler tel ou tel problème, se réconcilier avec tel ou

tel membre de la famille ou ami, et si on arrive à se soumettre à la volonté de Dieu et à

accueillir la mort. C'est à ce prix que celle-ci est non pas une défaite, mais une victoire et

qu'on quitte ce monde dans la paix avec Dieu, les autres et soi-même, en disant: "J'ai

combattu le bon combat, j'ai achevé la course, j'ai gardé la foi" (2 Tim 4:7).

Page 122: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

122

Cette phase est à la fois réconfortante et frustrante pour l'entourage. Réconfortante

pour des raisons évidentes, frustrante parce que le malade, prêt à mourir, ne désire pas

toujours des visites et ne souhaite pas toujours parler. Il s'est détaché de ce monde,

souvent même de ceux qu'il a aimés. Alors ces derniers sont parfois choqués, parce

qu'ils ne comprennent pas ce qui se passe. D'autres veulent forcer le malade à continuer

à se battre pour vivre, alors qu'il ne désire plus qu'une chose, mourir. Il veut partir. Il

appartient donc à la famille de le laisser partir. Quand Jacob fut prêt à mourir, il

convoqua ses enfants, les bénit et leur fit ses adieux (Gen 49).

On ne confondra pas acceptation et résignation. Ce n'est pas la même chose. La

résignation est l'attitude de celui qui subit quelque chose sans y acquiescer, malgré lui.

L'acceptation au contraire traduit le consentement.

Quelques précisions supplémentaires:

Les mourants sont comme tout le monde: ils ne disent pas toujours ce qu'ils pensent et

ressentent. Ils s'expriment parfois de façon voilée. Un tel dira à son entourage ou à son

pasteur: "Cela fait quinze jours que je suis à l'hôpital et je n'ai fait aucun progrès" non

pas pour s'en plaindre, mais dans l'espoir d'obtenir des informations sur son état.

Les grands malades sont souvent hantés de peurs: peur de devoir mourir seuls, peur de

souffrir ou d'être asphyxiés, peur d'être défigurés par la maladie, peur de perdre son

indépendance ou de sombrer dans la folie, etc. A cela s'ajoutent des appréhensions de

toutes sortes, celle d'être à charge à autrui, l'anxiété qu'en-gendre la perspective de la

séparation, les soucis pour l'avenir de la femme ou des enfants, l'impression que la vie

n'a pas de sens maintenant que la mort est imminente.

Page 123: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

123

On se souviendra aussi que le mourant est encore un être vivant. Il apprécie donc qu'on

lui parle de sa famille, du travail, de tout ce qui l'a intéressé, voire passionné dans la vie.

On se gardera cependant de parler de futilités, de choses sans importance, car le patient

interprétera cela comme une inaptitude à faire face à la réalité qu'est la mort

imminente.

4) L'aide à la famille:

Assister un mourant, c'est aussi assister sa famille. Tâche difficile, mais nécessaire. La

proche famille éprouve souvent dans ce cas un profond sentiment de culpabilité. On se

reproche d'avoir mal agi, de n'avoir pas témoigné au mourant assez d'amour et de

compréhension. On se reproche aussi parfois de lui souhaiter une mort rapide et sans

souffrances. Le mieux que le pasteur ait à faire est de les écouter et de les aider à

assumer leurs sentiments.

Bien des familles ont des problèmes de communication, et ces problèmes s'intensifient

considérablement en cas de maladie incurable et de décès imminent. On veut protéger

le mourant et on se réfugie, pour ce faire, dans le silence. Il faut donc encourager les

gens à exprimer ouvertement et honnêtement leurs émotions, même quand celles-ci ont

le pouvoir de mettre mal à l'aise ou qu'elles sont ressenties comme saugrenues. Il faut

savoir accepter les sentiments d'autrui sans les juger. Quoi qu'il en soit, on ne peut aider

quelqu'un que si on sait exactement ce qu'il a dans le cœur et ce qu'il ressent au fond de

lui-même.

5) Les consolations de la Parole de Dieu:

Il faut apporter aux mourants le secours et le réconfort de la Parole de Dieu, en tenant

Page 124: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

124

compte de leurs besoins particuliers. On trouvera des textes bibliques appropriés à

chaque situation. Le diagnostic d'une maladie incurable est un choc violent pour le

patient et les siens. On attend donc beaucouyp du pasteur. Là où le médecin ne peut plus

que retarder l'échéance, le pasteur est capable d'offrir une thérapie d'un autre ordre,

mais qui apporte une consolation certaine et transforme la mort, changeant la défaite en

une victoire. Pour ce faire, il faut qu'il soit honnête et qu'il encourage l'honnêteté, qu'il

accepte les sentiments tels qu'ils s'extériorisent devant lui, et qu'il applique la Parole de

Dieu avec compréhension et amour.

Le pasteur encouragera aussi d'autres, membres de l'Eglise ou conseillers presbytéraux,

à rendre visite au mourant. Parfois ces visites sont expressément souhaitées par le

patient. Il peut même arriver que la visite d'un certain paroissien apporte plus de

réconfort que celle du pasteur. Celui-ci n'en prendra pas ombrage. Un mourant a droit à

toutes les formes de consolation auxquelles il aspire.

L'aide à la famille e deuil:

Le décès de son conjoint est sans doute la perte la plus douloureuse qu'une personne

puisse subir. D'autres décès sont également particulièrement éprouvants.

L'accompagnement pastoral des familles en deuil est toujours difficile, mais il est

nécessaire et très apprécié. Les principes que nous avons énoncés pour la cure d'âme

auprès des mourants s'appliquent également ici.

Page 125: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

125

Le deuil fait partie de la vie, car la perte d'un être cher en fait partie. De même que

l'homme doit apprendre à bien vivre, de même il lui faut apprendre à bien assumer le

deuil. Ce n'est pas facile, car les occasions ne sont pas si nombreuses que cela. D'autre

part, les enfants sont souvent protégés contre le deuil par leurs parents. Des études

révèlent qu'un deuil mal assumé peut engendrer des maladies (troubles fonctionnels,

cancer, ulcère, maladies mentales, etc.). Bien des actes hostiles à la société et des

comportements délinquants sont le fait de gens qui ne sont pas parvenus à surmonter

leur deuil après un décès très mal vécu. Nombreux sont les jeunes délinquants qui ont

perdu un parent en bas âge et dont le comportement est une manifestation de colère

contre ce qu'ils perçoivent comme une injustice, contre des événements qui les ont

privés de sécurité et de bonheur.

La cure d'âme auprès de la famille en deuil est fonction de la nature et des circonstances

du décès, des sentiments et réactions des proches parents et, dans une certaine mesure

aussi, des relations que le pasteur entretient avec la famille.

On demande parfois au pasteur d'aller annoncer la nouvelle du décès à la famille du

défunt. Il ne faut pas qu'il se dérobe à cette mission dont on le charge un peu en raison

de son ministère ou de la confiance particulière qu'on a en lui. Il s'en acquittera d'une

façon simple, directe et calme, sans recourir à des formules ambiguës. Il faudra ensuite

qu'il accepte la réaction émotionnelle suscitée par la nouvelle du décès et qu'il apporte

un réconfort approprié.

Les funérailles devraient, partout où cela est possible, avoir lieu dans le cadre et donc

dans la chapelle de la paroisse. Elles sont à la fois un culte rendu à Dieu et une

confession de la foi et de l'espérance chrétiennes. Quand l'Eglise enterre ses fidèles, elle

affirme sa foi en la victoire sur le dernier ennemi, la mort. Celle-ci constitue la

prédication la plus éloquente de la Loi, car elle est selon l'enseignement de la Bible, le

Page 126: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

126

salaire du péché. Son pouvoir sur les pécheurs est universel. Personne n'y échappe.

Quand la mort entre dans une maison, ceux qui portent le deuil songent à leur propre

mort et à leur destinée éternelle. Le moment est donc propice pour annoncer ce que la

Parole de Dieu révèle au sujet de la vie, de la mort et de l'au-delà. Les funérailles

chrétiennes sont le lieu privilégié pour cela. Elles sont aussi en particulier l'occasion

d'affirmer ce que croit et confesse l'Eglise et d'annoncer la nécessité pour chaque

homme de se repentir et de se convertir au Christ. Pour que l'Eglise soit crédible avec

son témoignage, le pasteur doit bien sûr éviter d'enterrer toute personne qui n'a pas

confessé la foi chrétienne de son vivant ou, à défaut, sur son lit de mort.

Le sermon d'enterrement doit toujours annoncer la Loi et l'Evangile, affirmer

l'universalité de la malédiction du péché et de la condamnation qu'il entraîne, et

proclamer le pardon des péchés et la victoire sur la mort et l'enfer par la foi en Christ.

Mourir pour un chrétien, c'est se séparer de ce corps corruptible pour aller chez le

Seigneur, et cela dans l'attente de la résurrection des morts.

Les gens qui portent le deuil éprouvent des sentiments divers au moment du décès et

après lui. Chacun le fait à sa façon en fonction des relations qu'il a entretenues avec le

défunt, de la nature et des circonstances du décès, de ses particularités émotionnelles et

d'expériences semblables vécues dans le passé.

Les différentes phases du deuil:

1) Le choc et le déni:

Apprendre le décès d'un être aimé suscite toujours le choc, que ce décès ait été

pressenti ou qu'il soit inattendu. La première réaction est souvent l'absence d'une

Page 127: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

127

manifestation de sentiments, l'indifférence ou la négation. Il ne faut pas s'en offusquer.

C'est un mécanisme de protection temporaire destiné à absorber la souffrance causée

par le décès. En réagissant ainsi, on se donne le temps de "digérer" la mauvaise

nouvelle.

2) Les malaises physiques:

Ceux qui portent le deuil se plaignent souvent de malaises de toutes sortes (rhumes,

troubles fonctionnels et surtout digestifs, insomnies, difficultés à se concentrer, crises

de larmes, logorrhée, etc.). Cette phase est généralement assez courte, mais peut

cependant s'étendre sur des mois. Quelques bons conseils d'hygiène (diététique,

activités physiques) sont utiles. Il faut veiller en particulier à ce que ceux qui portent le

deuil ne se réfugient pas dans l'alcool ou la prise intempestive et anarchique de

médicaments.

3) La colère:

Ceux qui portent le deuil sont souvent amers, voire en colère contre le défunt,

eux-mêmes, le pasteur, la société en général et Dieu lui-même. Il convient de ne pas

dramatiser. C'est encore un réflexe de défense, une façon d'exprimer une frustration

parce qu'on a subi une perte, qu'on doit vivre une situation douloureuse qu'on n'a pas

pu contrôler.

4) Culpabilité:

C'est le sentiment le plus répandu chez ceux qui portent le deuil. Il s'exprime par des

phrases du genre: "Si j'avais fait ceci ou cela, il (ou elle) ne serait pas mort", "Je n'ai pas

Page 128: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

128

fait mon devoir", "J'aurais dû lui témoigner plus de patience et d'amour". La mort

supprime toute possibilité de réconciliation. Le sentiment de culpabilité au moment

d'un décès est généralement irrationnel. Il peut aussi être légitime et fondé. Dans ce cas,

le pasteur sait ce qu'il a à faire pour aider les gens à le surmonter.

Quand l'agonie a été particulièrement longue et douloureuse, la famille éprouve un

soulagement le jour du décès. Ce sentiment de soulagement peut en générer un autre, le

sentiment de culpabilité. Cela se comprend, et il faut tout faire pour permettre aux gens

de le surmonter.

5) Dépression:

Les gens qui portent le deuil passent par une phase de déprime: crises de larmes,

sentiment de solitude, peur pour l'avenir, perte d'identité pour celui que la mort prive

de son rôle de mari, de femme ou de parent. On ne se sent plus nécessaire, désiré ou

utile. On se réfugie volontiers dans le sommeil, l'inactivité, quand ce n'est pas dans les

médicaments ou les drogues de toutes sortes. Certains ont des pensées suicidaires. Il

faut tenir compte de tout cela et apporter une aide faite d'affection et de

compréhension, en sachant que c'est là généralement une phase transitoire.

6) Réconciliation:

C'est la dernière phase: la perte de l'être aimé est acceptée, le chagrin est en grande

partie surmonté, l'intéressé a retrouvé un sens à la vie. On accepte finalement de vivre

sans l'être aimé qu'on a perdu. Le sourire et la bonne humeur sont revenus. On n'est

plus rivé au passé, mais on pense au présent et à l'avenir. La souffrance est là, mais la vie

continue.

Page 129: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

129

Le pasteur fera tout pour aider ceux qui portent le deuil à accéder aussi vite que

possible à cette dernière phase, sans pour autant sous-estimer leur chagrin et les faire

progresser à un rythme donné. Les liens qu'on entretenait avec le défunt doivent se

convertir progressivement d'une relation de présence en une relation du souvenir. Il

faut accéder à une nouvelle identité basée sur une vie sans le défunt et qui a une

signification nouvelle. Le temps y est pour beaucoup. A lui seul il guérit, quoi qu'on en

dise, beaucoup de plaies; il possède une vertu thérapeutique en soi. Mais il va de soi que

les promesses de l'Evangile concernant la vie éternelle et les retrouvailles dans le ciel

aident par-dessus tout le chrétien en deuil à accepter la perte de l'être aimé et à se

réconcilier avec ce qui lui est arrivé.

On pense de nos jours que le travail de deuil prend environ deux années. Le temps

requis dépend bien sûr de nombreux facteurs objectifs (nature et circonstances du

décès, situation familiale et sociale de celui que frappe le deuil) et subjectifs (liens avec

le défunt et constitution psychique). Il n'existe pas de normes à ce sujet, et chacun doit

vivre son deuil à sa façon. La période la plus critique est certainement le premier mois

après le décès; ensuite, les symptômes du deuil s'atténuent progressivement et mettent,

selon les individus, plus ou moins de temps à disparaitre.

Il existe des deuils aggravés, et deux facteurs y contribuent: le conditionnement social

qui nous enseigne à supprimer la souffrance et la douleur, et notre manque

d'expérience concernant le processus et les mécanismes du deuil. On distingue entre

quatre catégories de deuils aggravés:

a) L'absence de chagrin véritable due à une situation de choc et de déni

dont on n'arrive pas à sortir.

b) La distorsion du deuil par une colère ou un sentiment de culpabilité

insurmontables.

Page 130: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

130

c) La somatisation par des troubles durables qui n'ont pas d'origine

fonctionnelle.

d) Enfin, il y a le deuil chronique de celui qui s'efforce à tout prix de

maintenir le défunt en vie, en faisant une fixation sur sa personne et

sur les objets qui lui appartenaient. L'intéressé rumine son deuil, et le

fait parfois parce qu'il pense qu'il est tenu de le faire, pour montrer à

quel point il aimait le défunt.

C'est en général le refuge dans une phase particulière du deuil dont on refuse de sortir,

qui indique qu'on a affaire à un deuil aggravé. La tristesse qui envahit la personne en

deuil quand viennent des anniversaires ou des jours de fête, les crises de larmes à

l'église, le fait de parler excessivement du défunt ne sont pas en soi des symptômes de

deuil aggravé. Dans certains cas, le pasteur n'hésitera pas à orienter les intéressés vers

un psychothérapeute compétent. Rares sont en effet les pasteurs suffisamment formés

par leurs études et par leur expérience pastorale pour faire face à ce genre de situation.

La proclamation constante dans la paroisse de ce qu'enseigne la Bible au sujet de la

grâce divine, du pardon, de la mort, de la résurrection et de l'éternité est sans doute le

moyen par excel-lence pour préparer les chrétiens à faire face à leur propre mort et au

départ de ceux qu'ils aiment. C'est de la sorte qu'on fait grandir les chrétiens dans la

connaissance et dans la foi, qu'on les assure de la présence divine et qu'on les aide à

assumer leurs émotions et à contrôler leurs craintes et leurs appréhensions.

Le pasteur s'efforcera d'être aussi un ami attentionné, bénéficiant de la confiance de ses

paroissiens en détresse. Il invitera les membres de sa paroisse à faire de même, avec

tact et discrétion.

Page 131: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

131

Voici, pour terminer, quelques conseils tout à fait pratiques à l'usage du pasteur et des

paroissiens:

- Chercher le contact et le garder.

- Ecouter, avant de parler.

- Ecouter beaucoup et parler peu.

- Eviter les clichés et les réponses faciles.

- Etre authentique.

- Etre pratique, ponctuel et efficace (préparer un repas, nettoyer la

maison, faire des courses, en un mot, se rendre utile).

- Encourager d'autres à rendre visite aux personnes en deuil.

- Accepter le silence.

- Ne pas questionner inutilement sur les circonstances du décès.

- Consoler en particulier les enfants de la famille, qui sont

généralement les grands oubliés.

- Ne pas parler d'une façon anodine de tout et de rien. La personne

en deuil ressentirait cela comme la volonté délibérée de la détourner

de ce qui la préoccupe.

- Permettre à celui qui porte le deuil de faire son "travail de deuil"

à son rythme.

- Inviter, le moment voulu, la personne en deuil à sortir de sa

maison, à manger chez soi, à aller au spectacle. L'orienter vers

une activité nouvelle.

- Envoyer une carte, un petit cadeau.

- Lui remettre l'enregistrement d'un sermon ou d'un culte.

- Intercéder dans le culte pour ceux qui portent le deuil et inviter

les paroissiens à faire de même chez eux.

Page 132: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

132

Le pasteur, chargé dans son ministère de consoler ceux qui souffrent, fera bien de

réfléchir souvent à ces paroles de l'apôtre Paul: "Béni soit Dieu, le Père de notre

Seigneur Jésus-Christ, le Père des miséricordes et le Dieu de toute consolation, qui nous

console dans toutes nos afflictions, afin que, par la consolation dont nous sommes

l'objet de la part de Dieu, nous puissions consoler ceux qui se trouvent dans quelque

affliction! Car de même que les souffrances de Christ abondent en nous, de même notre

consolation abonde par Christ. Si nous sommes affligés, c'est pour votre consolation et

pour votre salut. Si nous sommes consolés, c'est pour votre consolation, qui se réalise

par la patience à supporter les mêmes souffrances que nous endurons. Et notre

espérance à votre égard est ferme, parce que nous savons que, si vous avez part aux

souffrances, vous avez part aussi à la consolation" (2 Cor 1:3-7).

La condition de l'homme dans ce monde requiert la souffrance. C'était vrai pour Paul.

Cela l'est aussi pour tous les pasteurs et pour tous les chrétiens. Mais Dieu console les

pasteurs, pour qu'ils puissent consoler à leur tour ceux qu'il a confiés à leurs soins.

__________

Page 133: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

133

L'EVANGELISATION

Le but de l'évangélisation est double:

1) sauver des hommes par la foi en Jésus-Christ,

2) les faire participer à toutes les bénédictions que Dieu veut leur offrir dans cette vie.

Les raisons de cela?

1) L'homme naît pécheur (Gen 5:3; Ps 51:5), vit dans le péché (Eccl 7:20; Rom 3:22.23), est

sous la condamnation de la loi (Ez 18:20; Gal 3:10), n'a aucune chance de salut après la mort

(Mt 25:41.46).

Page 134: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

134

2) La rédemption fut promise (Gen 3:15; Es 53), accomplie en son temps (Gal 4:4; 1 Jn 1:7;

4:10; Jn 3:16), est là pour tous (Lc 2:10; 1 Jn 2:2).

3) Le salut est obtenu par la grâce seule (Eph 2:8.9), par la foi seule (Rom 3:28; Jn 3:16), et

est voulu par Dieu (1 Tim 2:4).

4) Dieu nous accompagne de sa présence (Mt 28:20; 1 Cor 3:9), envoie son Saint-Esprit pour

changer les cœurs par la Parole que nous annonçons (Es 55:10.11).

Les moyens de l'évangélisation sont la Parole de Dieu (2 Cor 5:19; Jn 17:20; 1 Cor 4:15; 1 Pi

1:23) et les sacrements (Tite 3:5; 1 Cor 11:25; Mt 28:19.20).

En quoi consiste l'évangélisation? En l'utilisation de ces moyens de grâce dans un esprit de

prière (Mt 5:16; Jn 16:23) (prière permanente de toute la paroisse pour l'évangélisation), et

dans la certitude que Dieu agit par la Parole et les sacrements (Rom 1:16; Es 55:11).

Le pasteur et l'évangélisation:

Le pasteur n'est pas seulement berger de son troupeau, mais aussi le leader choisi par Dieu

pour l'oeuvre d'évangélisation de sa paroisse. Il faut pour cela un vrai coeur de pasteur. Il

doit en effet gagner lui-même des âmes à Dieu et guider ses paroissiens et la paroisse tout

entière dans leur témoignage et leur mission.

Conscient de ses faiblesses, il mettra sa confiance dans les promesses de l'Evangile (Ps 121:2;

Act 1:8). Paul est en cela un modèle (1 Cor 9:22; Act 26:28). Pour sauver des âmes, il faut

Page 135: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

135

avoir fait l'expérience personnelle du salut, être un chrétien rayonnant et consacré.

Tout pasteur doit programmer son emploi du temps de façon à pouvoir faire des visites

missionnaires. Mais il doit aussi édifier et équiper sa paroisse (Eph 4:12), pour que chaque

paroissien agisse en disciple du Christ et évangélise (Jn 1:37 ss.). L'Eglise locale à qui le Christ

a confié le ministère des clés doit être un véritable outil d'évangélisation. Pour réaliser cet

idéal, il est bon pour une paroisse de se doter d'un comité d'évangélisation qui l'aidera à

mener cette tâche à bien.

La tâche du comité d'évangélisation d'une paroisse:

1) Encourager la paroisse à utiliser Parole et sacrements, en lui rappelant que le Royaume du

Christ n'est édifié que par ces moyens. L'activisme, à lui seul, ne produit rien.

2) Recourir aus dons que Dieu a accordés à chaque paroissien (Rom 12:4-8; 1 Cor 12:7; 1 Pi

2:9; 4:10).

3) Avoir confiance dans le Seigneur et dans la puissance de son Esprit. Pas de récoltes sans

semailles. Il faut que la Parole de Dieu se répande par tous les moyens. Dieu bénit ce travail

en son temps et à sa façon.

Le comité d'évangélisation doit agir!

Il doit

1) veiller à ce que la paroisse contacte les habitants de la localité qui ne connaissent pas

encore le Christ (enfants, jeunes, adultes, vieillards chez eux ou en maison de retraite,

Page 136: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

136

les hommes de toutes les races et couches sociales). Contacter aussi les chrétiens déracinés,

sans lien avec une paroisse;

2) veiller à ce que soient contactés les marginaux et les nouveaux membres et les intégrer à la

paroisse;

Programme d'action:

1) Visualiser sur une carte le champ d'action de la paroisse.

2) Encercler sur la carte les quartiers prioritaires.

3) Faire une enquête dans les quartiers en question et tenir un fichier de cette enquête.

4) Faire un séminaire sur l'évangélisation dans la paroisse.

Evangélisation en action:

Tout homme qui n'est pas membre de l'Eglise chrétienne est sur la liste de prospection de

Dieu. Il faut donc qu'il soit aussi sur la liste de prospection de la paroisse.

Les nouveaux venus dans une localité sont généralement plus faciles à gagner pour l'Eglise

que les anciens résidents. Contacter ceux qui viennent d'emménager dans une cité ou un

lotissement nouveau.

Page 137: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

137

Essayer d'inscrire les enfants à l'école du dimanche et au catéchisme par tracts et affichettes

lors de la rentrée scolaire.

Livre d'or ou cartes placées dans les bancs invitant les visituers à laisser leurs coordonnées.

Parents et amis de paroissiens.

Un dimanche où le pasteur prêche sur l'évangélisation, distribuer des cartes aux paroissiens

et les inviter à indiquer les noms et adresses de gens que pourrait intéresser l'Evangile. Les

nouveaux membres de la paroisse, en particulier, sont généralement heureux de pouvoir

communiquer quelques adresses de parents et amis.

Profiter des baptêmes, confirmations, mariages et enterrements pour faire circuler des cartes

à remplir.

Enquêtes systématiques dans la localité.

Etablir une liste de sympathisants ou de membres potentiels.

Garder des âmes est tout aussi important qu'en gagner. Pour cela, il faut une instruction

constante, et en particulier une instruction suffisante, avant de recevoir de nouveaux

membres dans l'Eglise.

Quand les gens se rattachent à l'Eglise, ils se rattachent à la plus importante organisation qui

existe au monde. Il faut donc les recevoir dans la paroisse d'une façon digne, par une

cérémonie qu'ils apprécient (voeux de fidélité, intercessions, action de grâces, photo du

groupe, cadeau, par exemple Bible, recueil de cantiques, un poster ou une brochure illustrée

de la paroisse).

Page 138: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

138

Recruter des membres pour l'évangélisation, en sachant que tous les chrétiens n'ont pas les

mêmes dons. Tous ne sont pas des témoins éloquents. Définir sur une page le travail qu'on

attend d'eux et le temps requis pour l'accomplir. Ne pas demander des volontaires, mais

contacter les gens personnellement. Enrôler les gens pour une durée bien délimitée, étant

entendu qu'ils pourront être enrôlés à nouveau par la suite, s'ils le désirent. Partir du

principe que ce sont des chrétiens qui veulent servir le Christ et leur montrer qu'ils le font en

tant que ses témoins. Leur rappeler que Dieu a promis de les assister et qu'il le fera (Mt

28:20). Faire ce travail de recrutement en collaboration avec le pasteur qui connaît bien les

gens. Si on peut dire à quelqu'un: "Le comité d'évangélisation et le pasteur sont convaincus

que le Seigneur vous a accordé des dons particuliers pour le servir comme témoin", cela peut

motiver positivement et encourager.

Veiller aux relations publiques et à l'image que donne la paroisse. Il faut que cette image soit

bonne, de façon à ce que la paroisse inspire de la sympathie à ceux qui vivent autour d'elle.

C'est un point très important!

Nécessité d'engager les laïcs dans l'évangélisation:

Ils vivent en contact étroit avec les gens, sont par définition des témoins du Christ, sont plus

nombreux que les pasteurs. Cent laïcs font en une heure ce qu'un pasteur met cent heures à

faire. Quand le pasteur témoigne, on dit qu'il fait son métier. Quand ce sont les laïcs, on y est

plus attentif. On se demande: Pourquoi?

Il faut communiquer aux chrétiens l'amour du prochain et la pssion pour l'évangélisation,

leur apprendre à partager l'Evangile avec autrui. Pour cela, il faut les instruire dans les

vérités de la Bible et leur rappeler que Dieu bénira leur témoignage. Il faut aussi leur

Page 139: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

139

enseigner certaines techniques d'évangélisation: comment entrer dans les maisons, établir

des relations amicales avec les gens, les écouter, entamer une conversation religieuse,

annoncer l'essentiel de l'Evangile de façon attrayante, simple et chaleureuse, répondre

correctement aux questions posées et réagir correctement à des situations spécifiques.

Nécessité d'organiser l'évangélisation. Jésus a organisé et programmé: choix des 12, envoi

des 70 en mission par groupes de deux (Lc 10:1); L'organisation est encore plus nécessaire

aujourd'hui où les gens ont des loisirs et bougent beaucoup plus que jadis. L'organisation est

aussi indispensable pour l'encouragement mutuel.

Calendrier d'une campagne par le porte-à-porte:

1 réunion: Méditation - Expliquer la mission des témoins: visiter les nouveaux venus dans

la commune, les membres en puissance, les nouveaux membres, les membres

marginaux - Montrer la nécessité de l'engagement des chrétiens, chiffres à l'appui (nombre

de gens sans Eglise dans la commune, nombre de marginaux dans la paroisse, etc.) - Leur

montrer l'amour du Christ pour les hommes et son désir de les sauver _ Calmer les

appréhensions des témoins. Seul celui qui ne fait rien ne commet pas d'erreur, si ce n'est la

plus grande, celle précisément de ne rien faire. Jésus a promis d'être avec eux - Les envoyer

deux par deux - Répartir les témoins en groupes qui alterneront d'une semaine à l'autre.

2 réunion: Méditation - Rapport sur les dernières visites faites - Petite instruction sur

l'évangélisation (pas plus de 15 minutes) - Détermination des endroits à visiter et répartition

du travail - 2 heures de visites.

Tenir des fichiers, une fiche par famille ou personne visitée (nom, prénom, adresse, date,

téléphone, nom du visiteur), avec appréciation de la personne visitée (intéressée, pas

intéressée, indifférente, hostile, souffre de tel ou tel problème, souhaite ou non une nouvelle

Page 140: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

140

visite, éventuellement du pasteur). Pour les visites ultérieures aux personnes déjà

contactées, il est bon d'envoyer des hommes chez les hommes, des femmes chez les femmes

et des jeunes chez les jeunes. Munir les visiteurs de tracts d'évangélisation, de N.T.,

d'informations sur la paroisse. Indiquer aux visiteurs la date de reprise des catéchismes, des

études bibliques, des activités habituelles et extraordinaires de la paroisse. Envoyer les

visiteurs au travail avec prière et bénédiction.

__________

Page 141: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

141

LA FORMATION DE LAICS A DES

RESPONSABILITES ET DES MINISTERES

DANS L'EGLISE

1) Trois vérités préliminaires:

1) Les chrétiens sont le peuple de Dieu, le peuple des pécheurs rachetés et pardonnés qui

appartiennent à Dieu et non plus à eux-mêmes. Non plus des individus isolés, mais un peuple

dont les membres sont solidaires les uns des autres.

2) Les chrétiens sont le peuple de Dieu au travail. Dans le Royaume de Dieu on travaille. Dieu

a travaillé (Gen 2:2) et continue de le faire. Le Christ a travaillé (Jn 9:4). A nous de travailler à

notre tour. Le Christ nous réserve un joug et un fardeau (Mt 11:30) légers, mais réels. Le

travail qu'il confie à son Eglise est défini dans Mt 28:19.20.

Page 142: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

142

3) Ce travail, les chrétiens le font dans le cadre de l'Eglise. Le Christ veut se servir d'eux pour

faire des hommes ses disciples.

2) Description du travail:

a) C'est une mission bien précise que nous n'avons pas à définir ou délimiter, la proclamation

de l'oeuvre rédemptrice du Christ et l'appel à la foi (Lc 4:18.19).

b) C'est une mission immuable, toujours identique à elle-même (1 Tim 2:3.4), depuis Adam et

Eve jusqu'à la fin du monde.

c) L'objet de cette mission sont les hommes, et non des animaux ou des objets. Nous devons

partager avec eux ce que le Seigneur nous a accordé.

Nous précisons: tous les hommes. Toute discrimination raciale, sociale ou sexuelle dans cette

mission n'est pas seulement une offense à Dieu, mais une abomination.

d) Cette mission requiert l'engagement total du chrétien, et de tout chrétien. Les temps

pressent. Pas question d'être paresseux ou négligeant! Tous n'ont pas à faire exactement le

même travail, mais tous ont du travail à faire. En fonction des dons de chacun et de sa place

dans le corps du Christ. Cf. 1 Cor 12:1-20.

e) La mission concerne des besoins réels de l'homme. Avant tout ses besoins spirituels

(pardon, salut) que l'Eglise est seule à pouvoir satisfaire, mais aussi les autres (émotionnels,

mentaux, physiques). Cf. Mt 25:31-46. Des différents dons signalés dans ce texte, quels sont

ceux que l'Eglise s'efforce de satisfaire (misère dans le pays et ailleurs dans le monde,

Page 143: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

143

famines, catastrophes, solitude de tant de vieillards, visite des malades, des prisonniers, etc.)?

3) Programmation du travail dans une paroisse du XX siècle:

Pyramide paroissiale par tranches d'âge:

Une telle pyramide est révélatrice. Elle indique par exemple qu'un club de jeunes est

indispensable dès maintenant, qu'il y aura une foule d'adolescents dans peu d'années. Par

contre, il y a assez peu de gens âgés. Un club du 3 âge ne paraît donc pas répondre aux

besoins ou aux souhaits de beaucoup de paroissiens. Par contre, beaucoup de gens entre 35

et 44 ans, d'adultes en pleine force qu'il faudrait mobiliser, en particulier aussi pour des

travaux manuels.

Il serait bon d'établir une pyramide de cette sorte pour sa propre paroisse, de se procurer si

possible une pyramide analogue pour la communauté civile où œuvre la paroisse et de

comparer les deux, pour voir si la paroisse est représentative de la population. Quels genres

de services peut-elle rendre à la communauté civile, en fonction de la composition de cette

dernière? Qu'est-ce que cette communauté civile est en droit d'attendre d'une paroisse

chrétienne?

Il est bon aussi d'acquérir un plan de ville et d'y fixer des épingles représentant les familles et

membres de la paroisse. On voit ainsi où les paroissiens sont concentrés, ce qui permet de

programmer des actions missionnaires, des études bibliques à domicile, etc.

Un pasteur accomplit six sortes de tâches: 1) il prêche, 2) il préside le culte, 3) il enseigne, 4)

Page 144: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

144

il fait de la cure d'âme, 5) il fait du travail administratif, 6) il veille à la croissance de la

paroisse. Les points 4 et 5 lui prennent plus de temps aujourd'hui que jadis et le point 6

devrait lui en prendre plus. Aussi souffre-t-il de ne pas pouvoir consacrer assez de temps

aux points 1 à 3. C'est là qu'intervient le stewardship. Il a pour mission de décharger le

pasteur de tâches qui l'accaparent de trop. C'est à la paroisse de décharger son pasteur de

tâches que d'autres que lui peuvent faire (travail avec les jeunes, rédaction du bulletin

paroissial, responsabilités financières, matérielles et administratives).

4) Réalités du XXe siècle qui affectent la vie de l'Eglise:

1) Les gens sont en général plus aisés et disposent de moyens financiers qu'ils ont tendance à

n'investir que pour eux-mêmes. Il s'agit de canaliser ces moyens dans une autre direction,

d'apprendre aux gens à donner à l'Eglise, c'est-à-dire à Dieu, et de les y encourager, de faire

d'eux des gérants responsables et chrétiens des biens que Dieu leur confie.

2) Les besoins se sont accrus. On ne peut plus occuper un patronage avec un ballon ou un jeu

de société, ni instruire une classe de catéchisme avec des manuels démodés. Il y a aussi de

grands besoins d'assistance, de cure d'âme dans les différentes couches sociales (adolescents,

jeunes couples, adultes, vieillards).

3) La plupart des gens ont de l'instruction et des qualifications professionnelles. Il faut savoir

mobiliser cela.

4) Les femmes ne vivent plus recluses à la maison, mais participent à la vie de la société. Elles

ne demandent pas mieux que de mettre de leur temps et de leurs dons au service de l'Eglise.

Il faut les y inviter.

Page 145: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

145

5) Nous sommes dans une période de mutations où l'Eglise ne peut pas rester immobile et

inerte. Elle doit apprendre à distinguer entre l'immuable (Parole de Dieu, doctrine) et ce qui

peut changer (formes de cultes, de piété, de vie paroissiale). Il y a toujours des gens hostiles a

priori au changement, qui ont peur, qui ont le sentiment qu'en changeant quelque chose, on

rejette ce qui a eu lieu dans le passé. Il faut les ménager, mais les instruire avec patience. On

ne peut pas revenir à l'époque de Luther ou des apôtres. Ces hommes se sont efforcés d'être à

leur époque de fidèles serviteurs de Dieu et de son Eglise. Cette époque n'est plus là. Vivre

dans la nostalgie du passé et résister systématiquement au changement n'a pas de sens. Il

faut s'adapter. Les gens sont beaucoup plus mobiles aujourd'hui que jadis, leur niveau

d'instruction est plus élevé, les moyens de communications de sont simplifiés, les besoins

humains multipliés. Il faut savoir vivre avec cela et en tirer le meilleur parti. Il s'agit pour

nous d'être aussi fidèles que nos ancêtres, mais pas nécessairement de vivre, d'agir et de

réagir comme eux.

Consulter les statistiques paroissiales (nombre de membres communiants, baptisés,

assistance aux cultes, enfants en instruction, adultes reçus dans la paroisse, etc.).

Analyser ces chiffres des 10 dernières années: pourcentage d'assistance aux cultes, dons

pour la paroisse, l'évangélisation et la mission, voire la bienfaisance, et cela par membre

communiant ou ayant un revenu. Quels chiffres ont-ils crû? Lesquels ont-ils diminué?

Pourquoi?

Quelles étaient et quelles sont à présent les activités de la paroisse dans les domaines

suivants: a) culte (fréquence, Sainte-Cène, formes de cultes, cultes pour jeunes, etc.), b)

enseignement (comment, par exemple, instruit-on et confirme-t-on les enfants?), c)

témoignage (évangélisation, "outreach", méthodes utilisées, etc.), d) diaconie, e) communion

fraternelle (dimanches paroissiaux, excursions, repas communs, rencontres avec autres

Page 146: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

146

paroisses, etc.).

Que n'a-t-on pas fait? Evangélisation, bulletin paroissial, réunions de jeunes, "follow up" de

ceux qui ont assisté une ou plusieurs fois aux cultes, accueil des visiteurs dans la chapelle, etc.

Se pourrait-il que les habitants de la commune ne s'intéressent pas à ce que fait l'Eglise? Se

pourrait-il aussi qu'ils s'intéressent à des choses que l'Eglise ne leur propose pas?

Il serait bon d'aller interroger les voisins et les notables de la commune et de leur demander

ce qu'ils savent de l'Eglise et comment ils la perçoivent.

6) Programmer l'avenir:

C'est absolument nécessaire, au risque de voir s'installer le mécontentement, les frustrations,

le découragement et le renoncement. Programmer, c'est répondre à trois questions: 1) Que

s'agit-il de faire? 2) Dans quel délai? 3) Qui le fera?

Les objectifs doivent être précis, réalisables et mesurables. Un objectif défini ainsi: "Annoncer

l'Evangile alentour" est louable, mais manque de précision et ne peut, comme tel, faire l'objet

d'un programme. Seul des objectifs précis et réalisables permettent d'évaluer les efforts

accomplis. Seuls ils incitent à l'action et mobilisent, empêchant qu'on se perde dans des

discussions interminables. Seuls ils encouragent au travail et convainquent les gens qu'ils

sont capables de les mener à bien. Seuls ils permettent de conserver le contrôle de ce q'on est

censé faire.

Page 147: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

147

Un exemple simple: S'il est évident que la paroisse aime la participation active des laïcs, un

objectif simple sera le suivant: Sélectionner et former trois personnes pour en faire des

lecteurs et leur confier à tour de rôle les lectures pendant un an. Ensuite, faire un bilan.

Une fois les objectifs choisis, il faut leur donner un ordre de priorité en fonction de deux

critères: leur importance respective et les délais requis (objectifs à longue ou à brève

échéance). Les objectifs à brève échéance, même s'ils sont parfois moins urgents que ceux à

longue échéance, sont souvent une étape nécessaire pour réaliser ces derniers. Exemple

d'objectif à longue échéance: Présenter aux enfants de l'école du dimanche l'ensemble de

l'histoire sainte durant un cycle de cinq ans. Objectif à brève échéance: Choisir le matériel

littéraire nécessaire pour parcourir ce cycle. Le premier objectif ne pourra être réalisé que si

on réalise au préalable le deuxième.

Les décisions de première importance seront prises par la paroisse. Toute la paroisse (et pas

seulement les membres électeurs) doit être engagée dans ce genre de projet. Les décisions

d'importance secondaire, par contre, seront confiées à un comité responsable. Par exemple,

si toute la paroisse décide que la chapelle doit être repeinte et accepte d'en assumer les frais,

on confiera à un comité le soin d'en régler les détails (style de peinture, couleur, etc.). Le

principe est le suivant: Que les grandes décisions soient prises par de grands groupes, et les

petites par de petits groupes. Les comités ad hoc créés pour la réalisation d'objectifs précis

seront dissous dès que ces objectifs auront été atteints.

Il faut rester ouvert au changement et à l'innovation. La capacité de changer est une grande

bénédiction. Il faut être ouvert aux idées nouvelles. Le changement ne fait souffrir un homme

que si celui-ci y résiste.

__________

Page 148: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

148

LE CULTE PAROISSIAL

Une réflexion permanente sur le déroulement, la dignité et la beauté du culte est nécessaire

de la part de la paroisse. Elle peut être plus spécialement confiée au conseil presbytéral ou à

un comité élu pour cela.

Voici différentes responsabilités s'inscrivant dans le cadre du culte:

a) Huissiers (en anglais "ushers"):

Ils assistent régulièrement aux cultes, sont initiés à leurs fonctions,

- veillent à ce que chacun ait une place adéquate pour le culte et dispose d'un

recueil de cantiques, du bulletin du dimanche et de la liturgie,

- sont responsables de l'éclairage, de la sonorisation, du chauffage et de

l'aération de la chapelle,

- procèdent aux offrandes, assistent les communiants, si nécessaire

Page 149: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

149

(personnes âgées),

- distribuent un message à tous ceux qui ne sont pas appelés à communier,

remettent la chapelle en ordre après le culte,

- tiennent les registres d'assistance aux cultes et à la Sainte Cène,

- invitent les visiteurs à signer le livre d'or de la paroisse,

- font tout pour ne pas avoir une allure de policiers.

Les huissiers sont recrutés parmi les adultes et les jeunes, et formés pour cela. Ils assurent

leur service par alternance. Ce ministère devrait toujours faire l'objet d'un bilan régulier

(critique, autocritique: habillement, attitudes, dignité, sourires et amabilité, efficacité, etc.).

2) Les acolytes:

Ils préparent l'autel (draperies, fleurs, cierges, éclairage), le lutrin, la chaire, les fonts

baptismaux. Après le culte, ils éteignent les cierges et rangent le service de communion.

Ils disposent dans les bancs les recueils de cantiques et les bulletins.

Ils surveillent l'état des draperies et des cierges, renouvellent ces derniers en temps voulu.

Ils assistent le pasteur pendant l'administration du baptême, de la Sainte Cène, les

bénédictions nuptiales et les enterrements. Ils sont recrutés parmi les adultes et les jeunes et

formés pour leurs responsabilités (insistance sur la participation des laïcs aux cultes,

signification et déroulement de la liturgie, dignité du culte, etc.).

Les dames parmi les acolytes sont plus particulièrement responsables de la décoration

florale et de l'entretien des plantes de la chapelle.

Page 150: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

150

3) Les musiciens:

A) Organiste:

choisi par la paroisse parmi plusieurs candidats potentiels; installé dans ses fonctions; son

ministère sera reconnu par la paroisse et requiert, sinon une rémunération, du moins des

encouragements, de l'estime et de la gratitude (seul paroissien à devoir assister à tous les

cultes, et venir au moins 15 minutes plus tôt).

B) Chorale:

- stimule la paroisse et l'aide à chanter; possibilité de chant alterné;

- interprète les éléments liturgiques et les cantiques que la paroisse n'est pas préparée à

chanter;

- rehausse les cultes par des chants particuliers;

- doit tout faire pour faire progresser la paroisse dans son chant et pour progresser

elle-même (possibilité pour la chorale et/ou le chef de chorale de participer à des sessions de

perfectionnement); initiation à des musiques nouvelles;

- est l'agent vocal de la paroisse pour offrir à Dieu le parfum de l'adoration au nom et à la

place de la paroisse; toute paroisse devrait avoir une chorale, si modeste soit-elle;

- chercher la variété dans les répétitions, pour ne pas lasser.

Abandonner momentanément un morceau difficile et le reprendre ultérieurement, pour ne

pas décourager. Discipline, mais aussi quelques instants de détente. Stylos et surligneurs

pour annoter les partitions. Sélectionner de la musique dont les paroles soient belles et

agréables à chanter ; ne pas recruter les choristes à la légère. Il existe un minimum de

critères concernant la voix, le solfège et les exigences de temps (présence régulière aux

répétitions et aux cultes).

Page 151: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

151

4) Assistants du pasteur:

Lecteurs:

Adultes et jeunes qualifiés et formés à cela. Nécessité de préparer les lectures et de le faire

dans la prière, sachant qu'ils accomplissent un ministère. Exercices de lecture à haute voix,

devant autrui ou en s'enregistrant. Critique d'autrui et autocritique. Techniques de

respiration. Tout faire pour éviter la monotonie, pour ne pas reter les yeux figés sur le texte,

pour donner l'intonation voulue. Eviter les gestes et attitudes négligés et incongrus.

Excellente école pour susciter le sens des responsabilités paroissiales et une participation

personnelle active au culte. Réunir les lecteurs pour faire des bilans. Instaurer une rotation

des lecteurs. Eventuellement, renouveler les lecteurs au bout d'un certain temps.

Assistants dans la distribution de la Sainte Cène:

Ministère confié par la paroisse à un homme particulièrement qualifié pour cela.

5) La paroisse:

Le culte est liturgie de la Parole et du sacrement célébrée en commun avec des frères et

sœurs dans la foi. Célébration des grands faits du salut. Rencontre régulière avec Dieu qui

bénit, pardonne, nourrit la foi, instruit et équipe les saints pour vivre dans le monde.

Il est bon et nécessaire d'instruire la paroisse sur la signification du culte, le déroulement de

la liturgie, l'histoire de cette liturgie, l'année ecclésiastique ou liturgique, la tradition

musicale de l'Eglise, le sens et le rôle de l'architecture, des vêtements pastoraux, des

symboles chrétiens et cultuels, etc.

Page 152: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

152

La paroisse doit être consciente d'être une communauté de rachetés qui se réunit avec foi et

joie pour adorer Dieu et utiliser les moyens de grâce. Elle doit savoir que le culte est un acte

communautaire dans lequel elle est appelée à s'engager tout entière.

6) Nécessité d'un bilan régulier du culte:

Sermons trop longs ou pas assez concrets; récurrence des thèmes; actualité, etc.

Etat des draperies, chandeliers, vêtements pastoraux, décoration florale, etc.

Ministère des lecteurs, huissiers et acolytes.

Chant paroissial: cantiques chantés trop souvent, tandis que d'autres ne le sont jamais. Chant

paroissial trop fort ou pas assez, trop rapide ou trop lent. Etat de l'orgue et des autres

instruments de musique. Jeu de l'organiste (trop fort ou trop doux, monotone ou varié,

ouvert ou non à des musiques nouvelles, etc.). Bruits divers avant, pendant ou après le culte.

Etat des recueils de cantiques, des liturgies, des bulletins dominicaux.

Etat de la chapelle, du mobilier, des cloches, des tapis ou moquettes, etc.

7) Le rôle de la musique dans le culte:

Triple rôle de la musique sacrée:

1) Présenter et proclamer la Parole de Dieu.

2) L'interpréter.

3) Exprimer les réactions à ce message.

Page 153: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

153

La Parole de Dieu est souveraine. La musique en est la servante. Pour cela, elle doit être à la

fois un vecteur fidèle de la Parole et esthétiquement belle. Les instruments et les voix doivent

être de qualité. Aucun instrument de qualité n'est en soi impropre au culte.

Quelques principes:

1) La musique doit être non seulement belle, mais propre à la louange et à

l'édification.

2) L'interprétation doit être de la meilleure qualité possible.

3) Les instruments ne doivent pas dominer sur la chorale et sur le chant paroissial.

Recherche d'équilibre. Pas de virtuosité au détriment de l'adoration!

4) Pas de mitraillage de décibels, bien que dans un culte de jeunes la musique puisse

être plus bruyante que dans un culte ordinaire.

5) Recherche de la variété (alternance paroisse/chorale, orgue/cuivres, interludes

entre les strophes, harmonies différentes pour l'accompagnement des différentes strophes).

8) Choix des cantiques:

Ce choix est fait par le pasteur ou, après entente avec le pasteur, par le responsable de la

musique paroissiale.

Les cantiques sont choisis en fonction du caractère du culte. Le 2 cantique en particulier fait

écho à l'évangile du jour. Le 3 a trait au thème du sermon ou prépare l'administration du

baptême ou de la Sainte Cène.

Veiller à la diversité. Ne pas se rabattre sur les mêmes cantiques sous prétexte qu'ils plaisent

au pasteur ou que la paroisse sait bien les chanter.

Page 154: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

154

Eviter les mauvais cantiques (paroles ou musique).

Ne pas éculer les bons cantiques en les faisant chanter trop souvent. Si un bon cantique n'est

pas connu, il faut l'introduire à tout prix en le chantant par exemple plusieurs dimanches de

suite ou en le faisant interpréter plusieurs fois par la chorale.

Pas de cantiques trop longs. Ne pas hésiter à sélectionner les strophes qu'on veut faire

chanter.

Encourager dans le bulletin dominical les paroissiens à faire connaissance avec un nouveau

cantique chanté pendant le culte, à méditer sur ses paroles et sa musique. Leur rappeler que

ce cantique a été composé par un poète ou musicien chrétien et que, s'il est proposé au chant

paroissial, c'est parce qu'il a été estimé utile à l'édification. Rappeler aussi aux paroissiens

qu'il y a dans la paroisse place pour des goûts divers (jeunes en particulier), et que chaque

chrétien est en droit d'exprimer sa foi selon ses goûts et son sens de l'esthétique. Les inviter à

ne pas condamner une liturgie nouvelle parce qu'ils n'arrivent pas encore à l'apprécier. Ils y

parviendront peut-être dans la suite.

__________

Page 155: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

155

RELATIONS PUBLIQUES DE LA PAROISSE

Les chrétiens sont des gens qui veulent communiquer l'Evangile à leur entourage et au

monde. Cette communication a lieu de différentes façons.

1) Communication vers l'extérieur:

a) Le comportement des membres de l'Eglise:

Montrent-ils que l'Evangile et leur paroisse ont de l'importance pour eux? En parlent-ils, et

en quels termes?

b) L'aspect des bâtiments:

Quelle impression donnent-ils? Que les membres de l'Eglise aiment leur paroisse ou qu'ils la

négligent?

c) Utilisation communautaire des locaux:

L'Eglise montre-t-elle qu'elle s'intéresse au monde et à son entourage immédiat, en prêtant

ses locaux à des organismes civiques ou humanitaires, ou les garde-t-elle jalousement pour

elle?

d) Recours à la presse locale:

Est-elle utilisée pour informer le public des activités de la paroisse? Avec de temps en temps

une photo?

Page 156: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

156

e) Vitrine, panneau paroissial pour offrir informations et messages pour le public.

f) Panneaux indicateurs dans la ville ou le quartier.

g) Brochure sur la paroisse avec photos (historique, but, activités, nom et coordonnées

du pasteur, etc.).

h) Radios locales

pour annoncer l'existence et donner les coordonnées de la paroisse, inviter aux cultes,

informer sur les activités particulières (reprise des catéchismes, patronnage, fête des

missions, etc.), diffuser des messages ou des causeries spirfituelles ou morales d'intérêt

général.

i) Tracts missionnaires (messages) et paroissiaux (informations sur la paroisse).

k) Sondages et enquêtes sur la situation religieuse de la communauté.

l) Accueil des visiteurs:

Demander à des conseillers presbytéraux de s'occuper particulièrement d'eux (don d'un

N.T. ou d'une brochure sur la paroisse, faire signer le livre d'or, les inviter à revenir). Leur

souhaiter la bienvenue dans le bulletin dominical ou après le culte, pendant les annonces.

Le bulletin dominical doit leur faciliter la participation active aux cultes (numéros des

Page 157: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

157

cantiques, références des lectures bibliques, etc.). Confection de petits paquets pour

visiteurs contenant le bulletin paroissial, NCQ, Le Luthérien, un N.T., une petite lettre de

bienvenue, une brochure sur la paroisse, etc.).

m) Information dans les hôtels, hôpitaux, gares, mairies, bureaux de Sécurité

Sociale, écoles (par exemple, pour la reprise des catéchismes ou l'ouverture d'un

patronage).

n) Encourager les membres de l'Eglise à avoir des activités et exercer des

responsabilités au niveau de la communauté civile, et à les assumer en témoins du

Christ, de façon à faire connaître l'existence de leur paroisse et surtout à agir en

lumière du monde et sel de la terre.

B) Communication vers l'intérieur:

a) Bulletin hebdomadaire ou dominical avec déroulement du culte, indication des

lectures bibliques et des cantiques, quand se lever, quand s'asseoir, etc. Avec une

belle image en couverture. Tout cela aide la participation au culte. La reproduction des

textes bibliques, permet aux gens de mieux suivre pendant la lecture. Donné aux

malades et aux isolés, il peut les édifier et les faire communier avec leurs frères et sœurs

qui assistent au culte. Le bulletin fournira des informations sur la paroisse (adresse et

N de téléphone du pasteur, activités paroissiales, naissances, baptêmes, confirmations,

mariages, décès, etc.). Mention des malades, invitation à l'intercession (proposer

éventuellement une courte prière). Partage des joies et des difficultés de la paroisse,

Page 158: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

158

rapports financiers (sur feuille volante, car réservés aux paroissiens), encouragements

pour tel ou tel projet, remerciements pour tel ou tel travail accompli, mot de gratitude

pour la chorale ou l'organiste, présentation des nouveaux membres, etc. Informations

sur les activités régionales, synodales, sur la mission, sur d'autres paroisses, etc. Tout

cela est de nature à élargir l'horizon des paroissiens.

Il faut que l'impression du bulletin soit bonne et la lecture facile et agréable. Utiliser des

photos, images, schémas, etc. Présentation aérée. Solliciter des articles des paroissiens

(organiste, trésorier, jeunes, moniteurs de l'école du dimanche). Chercher des

volontaires pour aider à la rédaction, la mise en page, l'impression, la distribution ou

l'expédition. On peut aussi disposer le bulletin dans un casier sur le trottoir de la

paroisse et inviter les gens à se servir.

b) Cartes mises sur les bancs ou dans les recueils de cantiques, invitant les visiteurs à

laisser leurs coordonnées et dire s'ils souhaitent la visite du pasteur, invitant aussi les

paroissiens à faire des suggestions sur le choix des cantiques, les textes et thèmes des

sermons. Tout cela montre qu'on s'intéresse à ceux qui viennent et qu'on attache de

l'importance à leurs avis et sentiments.

Exemples de cartes:

d) Cartes paroissiales indiquant à l'aide d'épingles où habitent les fidèles, affichée bien

en vue. Les paroissiens se sentent alors bien intégrés dans leur Eglise. Une telle carte

peut aussi nouer des liens entre paroissiens d'un même quartier et inviter les gens à

faire des visites à tel ou tel paroissien malade, infirme, solitaire ou marginal.

e) Installer les gens dans leurs fonctions, éventuellement par un acte liturgique, les

Page 159: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

159

remercier publiquement quand ils se sont bien acquittés de leur tâche.

f) Tableau donnant les noms des malades et invitant à intercéder pour eux.

g) Tableau identifiant les confirmands de l'année (avec photos, nom et prénoms,

adresse, date de naissance) et invitant à prier pour eux.

h) Anniversaire de la paroisse: Peut-être commémoré chaque année pour remercier

Dieu. Commémoration spéciale lors du 25 , 50 ou 100 anniversaire avec édition

d'une brochure spéciale.

i) Fête des missions annuelle

__________

Page 160: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

160

STEWARDSHIP

Cf. Wilbert Kreiss, Pierres vivantes et gérants fidèles (Cahier du C.E.T.) ; John Jeske,

Christian Stewardship is taking God at His Word, in Wisconsin Lutheran Quarterly, Vol.

92, Eté et Automne 1995, p. 198 ss.

Le stewardship est une notion nouvelle qui a surgi dans l'ecclésiologie de nombreuses

Eglises protestantes et évangéliques. C'est une prise de conscience nouvelle de ce qu'est

l'Eglise chrétienne, laquelle Eglise n'est plus seulement envisagée dans les rapports

verticaux qu'elle entretient avec son Chef, mais aussi dans ceux horizontaux qui

unissent ses membres entre eux. Non pas que ceux-ci aient été entièrement ignorés

dans le passé, mais l'ecclésiologie n'en a certainement pas tiré toutes les conclusions qui

s'imposaient sur la place que tient et le rôle qu'est appelé à jouer chacun de ses

membres au sein du peuple de Dieu. Le stewardhip enseigne ou rappelle à chaque

chrétien qu'il est une pierre vivante dans l'édifice de l'Eglise, une pierre dont le Christ a

besoin pour l'édification de son peuple, un membre dont le corps a besoin pour trouver

son harmonie, qui possède des particularités et des dons le qualifiant pour des tâches

auxquelles il est appelé par le Seigneur.

Trop souvent la notion de stewardship est associée de façon prioritaire, voire même

Page 161: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

161

exclusive, à la gestion des biens matériels que Dieu accorde à ses enfants et, par eux, à

son Eglise. Or la vie tout entière du racheté est placée sous la seigneurie du Christ, et la

gestion des biens matériels n'en est qu'un élément parmi d'autres.

L'apôtre Paul, le plus grand missionnaire et bâtisseur d'Eglise de tous les temps, a

enseigné le stewardship. En cela aussi, il voulait être trouvé fidèle à celui à qui il allait un

jour rendre des comptes (1 Cor 4:2.4). Sa hantise n'étaient pas les statistiques, la

croissance numérique des paroisses fondées par lui et l'équilibre de leur budget. Il avait

ds motifs plus purs que cela:

"Ce n'est pas que je recherche les dons, mais je recherche le fruit qui

abonde pour votre compte" (Phil 4:17).

"Ce ne sont pas vos biens que je cherche, c'est vous-mêmes. Ce n'est

pas, en effet, aux enfants à amasser pour leurs parents, mais aux

parents pour leurs enfants" (2 Cor 12:14).

Il s'agissait non pas de vider les poches des Philippiens ou des Corinthiens, mais de

remplir leurs coeurs, non de leur soustraire quelque chose, mais de leur apporter une

bénédiction en leur faisant comprendre ce que signifie appartenir au Christ dans le

temps et dans l'éternité, en leur montrant comment, quand on lui appartient, on lui

consacre son temps, ses dons et ses biens, comment on s'offre tout entier à lui en

mettant sa vie à son service et à celle du prochain.

Les plus beaux fruits qui poussent sur l'arbre de la foi chrétienne sont des fruits

spirituels. Les membres qui s'investissent le plus dans la vie de leur Eglise sont ceux

qui recherchent avec ferveur les dons les meilleurs, ceux qui honorent le plus Dieu et

qui servent le mieux leur prochain. C'est pourquoi le culte de l'Eglise vient avant le

Page 162: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

162

travail dans l'Eglise, les conversions viennent avant les contributions, et la prière avant

l'offrande.

Avant d'instruire les autres, il est indispensable que le pasteur s'instruise lui-même.

"Comprends ce que je dis, car le Seigneur te donnera de l'intelligence en toutes choses",

écrit Paul à Timothée (2 Tim 2:7). Une paroisse ne peut pas être plus ouverte au

stewardship que ne l'est son pasteur, et ce que le pasteur ne lui enseigne pas, la paroisse

ne peut pas le connaître. "Tel pasteur, telle paroisse!" Le pasteur doit en particulier

veiller à ne pas véhiculer de fausses idées à ce sujet. Il s'agit de générer dans la paroisse

des attitudes individuelles et collectives saines, d'engendrer chez les membres et dans

le groupe une vie spirituelle authentique et apte à l'édification de l'Eglise. Or le pasteur

ne peut donner que ce qu'il a reçu, et ce qu'il n'a peut-être pas reçu en matière de

stewardship pendant ses études de théologie, il lui faudra l'acquérir en cours de

ministère, en assistant à des séminaires appropriés ou, à défaut, par ses études

personnelles. Ensuite, ce qu'il a appris, le pasteur le transmettra à son troupeau dans un

enseignement régulier et continu (prédications, études bibliques, retraites paroissiales,

groupes de réflexion, bulletins paroissiaux, réunions de jeunes, etc.). Toute son

instruction obéira à l'injonction de l'apôtre: "Puisque vous aspirez aux dons spirituels,

que ce soit pour l'édification de l'Eglise que vous cherchiez à en posséder

abondamment" (1 Cor 14:12).

Tout chrétien est une pierre vivante dans l'édifice de l'Eglise, peuple des rachetés qui

constituent une race élue, un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple acquis (1 Pi

2:4.5.9). Tous sont appelés à s'offrir à Dieu en un sacrifice vivant, saint, agréable à Dieu,

ce que Paul appelle un culte raisonnable (Rom 12:1).

La vision organique de l'Eglise développée par l'apôtre Paul dans Rom 12 et 1 Cor 12

Page 163: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

163

culmine dans l'affirmation que les chrétiens sont des membres dans le corps du Christ,

"chacun pour sa part" (1 Cor 12:27). Ils ont tous reçu de Dieu des dons (Rom 12:4-8).

Ces dons sont nombreux et divers (Rom 12:4.5; 1 Cor 12:4-6.14-18), et à chacun de ces

dons correspond une mission, une tâche confiée par le Christ. Ils sont aussi

complémentaires en ce que chaque membre a besoin des dons et services des autres.

Pour qu'un corps soit un ensemble harmonieux, il faut que chaque membre joue le rôle

qui est le sien, que les yeux, les oreilles, les mains, les pieds et tous les autres membres

soient au service les uns des autres (1 Cor 12:21-23). Le tout doit promouvoir l'unité

organique du corps (1 Cor 10:17; 12:12.13.24.25), unité qui est compromise quand les

membres de l'Eglise ne comprennent pas que tous les dons ont leur importance. Par

ailleurs, ces dons sont interdépendants. Ils dépendent étroitement les uns des autres, ce

qui fait que lorsqu'un membre souffre, tous souffrent avec lui, et si un membre est

honoré, tous se réjouissent avec lui (1 Cor 12:26). S'il y a carence, déficience chez l'un

des membres, les autres sont appelés à y suppléer dans un esprit d'amour et de

solidarité d'où est banni tout orgueil. Enfin, Dieu est souverain dans l'attribution de ses

dons (1 Cor 12:18; Eph 4:7). Tout cela signifie que de même que tous les membres d'un

corps ont leur fonction, si modeste soit-elle, et que tous ont été créés de manière à

pouvoir s'en acquitter, de même chaque chrétien à une mission, un tâche dans l'Eglise,

et a reçu du Seigneur les dons nécessaires à cela. Cf. dans le cours de Dogmatique sur

l'ecclésiologie, le chapitre sur la place et le rôle du chrétien dans l'Eglise.

Le stewardship est l'art de découvrir, rassembler, mettre en oeuvre et gérer les dons

impartis par Dieu à tous les membres de l'Eglise et à son peuple pour

l'accomplissement de sa mission. Tout chrétien est un steward, un intendant ou gérant

des biens d'un autre. Des biens de qui? De Dieu à qui appartiennent toutes choses, "la

terre et ce qu'elle renferme, le monde et ceux qui l'habitent" (Ps 24:1.2). Il doit le faire

en dispensateur responsable et fidèle (1 Cor 4:2; 9:17), sachant qu'il lui faudra rendre

des comptes (cf. la parabole des talents, Mt 25:14-30).

Page 164: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

164

Dieu confie à chaque chrétien une part de ce qui lui appartient et lui demande de le

gérer. Cette vérité serait angoissante pour nous, si nous n'étions pas ses enfants

bien-aimés, assurés de sa grâce et de son pardon. La Bible enseigne que le Christ "est

mort pour tous, afin que ceux qui vivent ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour

celui qui est mort et ressuscité pour eux" (2 Cor 5:15), que les chrétiens ont été rachetés

à un grand prix, qu'ils sont le temple du Saint-Esprit. Ils sont donc appelés à glorifier

Dieu dans leur corps et dans leur esprit, qui tous les deux appartiennent à Dieu (1 Cor

6:19.20). Paul confesse qu'il ne vit plus pour lui-même, mais pour le Christ qui est mort

pour lui (Gal 2:20), et déclare ailleurs que les chrétiens vivent et meurent pour le

Seigneur, car, vivants ou morts, ils lui appartiennent (Rom 14:7.8). La paroisse a pour

tâche d'aider chacun de ses membres à réaliser ce magnifique idéal, à grandir dans la foi

et à devenir plus fidèle dans sa gestion des dons et des biens qui lui ont été confiés.

Il faut apprendre ou rappeler aux chrétiens que c'est un privilège merveilleux 1) d'être

membre du peuple et de la famille de Dieu, 2) de recevoir ses bénédictions dans sa

Parole et ses sacrements, 3) de participer à l'extension du Royaume du Christ sur terre

et à l'édification de son Eglise. Il s'agit donc pour eux d'utiliser à la gloire de Dieu les

divers talents qu'il leur a confiés (Mt 25:15; 1 Cor 12:7; 1 Pi 4:10).

On confrontera les paroissiens avec les questions suivantes: Désirons-nous apporter

plus de bénédictions à nos vies personnelles et dans la vie des autres? Sommes-nous

prêts à faire dans notre paroisse ce que nous n'avons pas pu faire jusqu'à présent?

Pensons-nous qu'il soit bon et nécessaire d'intensifier les activités de notre paroisse, et

souhaitons-nous tous y apporter notre part? Tout cela se fait de façon solidaire, car dans

le corps du Christ tous les membres ont besoin les uns des autres (Rom 12:5-8; Eph

4:11.12).

Page 165: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

165

Le stewardship consiste à reconnaître que tous les dons, petits et grands, modestes ou

prestigieux, que possèdent les chrétiens leur ont été octroyés par le Seigneur. Qu'en fait,

ils leur ont été prêtés pour qu'ils le glorifient en les mettent au service de son Eglise et

du prochain. Il vise à diagnostiquer ces dons, à constater leur existence chez les

membres de l'Eglise, à les mettre en action, à solliciter et encourager les fidèles à les

utiliser pour le Seigneur eet son Eglise, à prier pour qu'ils soient mis en oeuvre d'une

façon sainte et agréable à Dieu, de manière à ce que celui-ci puisse les bénir dans sa

grâce. Faire du stewardship, c'est aussi inviter les chrétiens à rechercher d'autres dons

que le Seigneur voudra bien leur accorder, à lui demander de bien vouloir les multiplier

et d'accorder à ses enfants en toutes choses sagesse et fidélité, un coeur humble et pur

et la volonté d'être aussi efficaces que possible.

Le but que doit poursuivre toute Eglise locale est d'enrôler chacun de ses membres,

hommes, femmes, enfants, adultes et vieillards dans le Royaume de Dieu. Il n'existe pas

de chrétien qui ne puisse accomplir une oeuvre agréable à Dieu dans le cadre de sa

paroisse. L'assumer, c'est donner à sa vie de chrétien un sens, aller au-devant de cette

joie spirituelle qu'engendre pour l'enfant de Dieu la certitude qu'il a un rôle utile à jouer

dans l'Eglise, qu'il fait partie de la grande famille divine où chacun a besoin de l'autre.

Voici une liste non limitative d'activités susceptibles de faire grandir le chrétien dans ce

sentiment:

1) Mener une vie d'intercession. Pour ce faire, on affichera à la sortie de la chapelle ou

publiera dans le bulletin paroissial la liste des malades et de tous ceux qui vivent dans

l'épreuve. On indiquera aussi régulièrement les grands sujets de prière pour l'Eglise, le

monde, les peuples en détresse.

2) Prier pour le bon déroulement du culte (liturgie, prédication, administration des

sacrements, musique). Il est bon de faire figurer une telle prière dans le bulletin

Page 166: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

166

dominical. C'est vrai d'une façon générale pour toutes les activités de la paroisse.

3) Prier pour les offrandes. "Pas de don sans prière", dit-on parfois. L'offrande

chrétienne est une partie intégrante du culte, quand on apprend a) à remercier le

Seigneur pour le privilège qu'on a de la lui apporter; b) qu'on reconnaît dans chaque

offrande qu'on lui apporte un cadeau qu'il nous fait en nous accordant la santé et le

travail; c) qu'on le loue d'avoir fait de nous des ouvriers et partenaires dans son

Royaume; d) qu'on lui demande de bien vouloir bénir le don qu'on lui fait; e) qu'on le

prie d'accorder sagesse et clairvoyance à ceux qui sont chargés par la paroisse

d'administrer les dons collectés.

4) Ecrire des lettres et envoyer des messages aux frères et soeurs dans la foi. (lettres de

condoléances, félicitations pour un heureux événement assorties d'un souhait de

bénédiction, encouragement, consolation). C'est le propre des chrétiens de pleurer avec

ceux qui pleurent et de se réjouir avec ceux qui sont dans la joie (Rom 12:15). Autant de

gestes qui peuvent être source de joie pour qui les accomplissent et qui constituent une

bénédiction pour l'Eglise.

5) Servir d'ambassadeur de bonne nouvelle en participant à l'embellissement et

l'enrichissement du culte (nettoyage et décoration de la chapelle, fleurs, musique,

atmosphère chaleureuse et heureuse, accueil des visiteurs, etc.).

6) Exercer dans la paroisse des responsabilités à la mesure des charismes qu'on a reçus

de Dieu, en acceptant d'être nommé dans tel ou tel comité, et tout faire pour les exercer

de façon consciencieuse. Accepter aussi de se laisser former, de manière à être plus

efficace. Il est cependant important pour le pasteur ou le conseil presbytéral de ne pas

se contenter de solliciter des volontaires, mais de définir avec précision la nature de la

tâche à accomplir (dons requis, temps à investir, objectifs à atteindre, etc.).

Page 167: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

167

Quelques encouragements font parfois des merveilles. Beaucoup de chrétiens doutent

d'eux-mêmes et de leurs capacités. D'autres qui travaillent avec ardeur ont tendance à

se laisser décourager. Il n'est pas facile de travailler pour le Seigneur et son Eglise dans

un monde qui rame dans d'autres directions et qui n'a aucune antenne pour ce genre de

sacerdoce. Alors, il faut remercier, encourager, donner du coeur et de la joie à l'ouvrage,

parfois féliciter. Il faut dire aux chrétiens que tout ce qu'ils font pour l'Eglise est fait à la

gloire de Dieu et source de bénédiction pour son peuple. "Votre travail n'est pas vain

dans le Seigneur" (1 Cor 15:58). Il ne faut pas oublier non plus que les chrétiens portent

la chair en eux, que leurs motivations ne sont pas toujours pures, que le zèle et la fidélité

peuvent dégénérer en pharisaïsme ou susciter un esprit de compétition où on jalouse

ou méprise les autres, où on a vite fait de porter un jugement sur eux. "L'athlète n'est

pas couronné, s'il n'a pas combattu suivant les règles" (2 Tim 2:5). Pour pouvoir lutter

contre l'orgueil qui nous est inné, il faut nous rappeler cette parole du Christ: "Sans moi

vous ne pouvez rien faire" (Jn 15:5), et cette autre de l'apôtre: "Qu'as-tu que tu n'aies

reçu. Et si tu l'as reçu, pourquoi te glorifies-tu, comme si tu ne l'avais pas reçu?" (1 Cor

4:7).

Il existe aussi une intendance chrétienne du temps, une façon chrétienne d'utiliser le

temps que le Seigneur met à notre disposition. Gérer fidèlement son temps, c'est savoir

qu'il faut mourir, bien compter ses jours pour appliquer son coeur à la sagesse (Ps

90:10.12). C'est comprendre qu'il y a un temps pour tout, un temps pour naître et un

temps pour mourir, un temps pour pleurer et un temps pour rire, etc. (Eccl 3:1-8). C'est

ne pas différer ce qu'il importe de faire tout de suite, car demain il sera peut-être trop

tard. C'est comprendre que le "temps est court", que la "figure du monde passe" (1 Cor

7:29-31) et que la fin est proche. C'est comprendre, le cas échéant, que l'heure est venue

de se réveiller du sommeil (Rom 13:11.14). C'est "racheter le temps, car les jours sont

mauvais" (Eph 5:16), ne pas gaspiller le temps à faire des choses inutiles ou futiles: "Il

Page 168: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

168

n'est pas de soldat qui s'embarrasse des choses de la vie, s'il veut plaire à celui qui l'a

enrôlé" (2 Tim 2:4). Nous ne pouvons pas créer le temps. il est un don de Dieu. A la

différence de l'argent qu'on peut placer en banque ou ailleurs, le temps s'écoule. Si nous

l'employons mal, il est perdu pour nous. C'est donc quelque chose d'infiniment précieux

et de fragile que le Seigneur met à la disposition de ses enfants. Il ne faut pas le gâcher.

Quand on sait ce que la Bible dit de l'éternité et qu'on a compris que cette éternité peut

être bienheureuse et glorieuse auprès du Seigneur, ou bien terrible et douloureuse loin

de sa face, on ne peut plus le dilapider. Racheter le temps, c'est trouver du temps pour

1) lire la Bible chaque jour, 2) mener une vie de prière fervente, 3) célébrer le culte de

famille quotidien, 4) assister au culte chaque dimanche et jour de fête, 5) être un témoin

du Christ auprès des autres, 6) être un gérant véritable et fidèle des dons reçus du

Seigneur. Faire du stewardship dans le cadre d'une paroisse, c'est donc instruire les

chrétiens quant à la bonne façon de gérer le temps que Dieu leur alloue. C'est les inviter

régulièrement à se demander ce qu'ils font de leur temps, combien ils en consacrent à

Dieu, au salut de leur âme et au service de l'Eglise.

Ce qui est vrai de tous les dons de Dieu en général, l'est plus particulièrement de

l'argent et des moyens financiers que Dieu met à notre disposition. Nous n'en sommes

pas les propriétaires, mais les gérants. Nous gérons les biens d'un autre, à la façon de

Joseph qui était l'intendant de Potiphar en Egypte. La vie ressemble un peu à un bateau

chargé d'une cargaison précieuse. Dieu en est le propriétaire, et le chrétien, le capitaine.

Celui-ci a une grande responsabilité: Il a la garde du navire et de son frêt et doit veiller à

ce qu'il parvienne à destination sain et sauf. Tout ce que nous possédons ici-bas, le

temps, les talents et les dons, les biens en argent et en nature, constituent une cargaison

qu'il faut mener à bon port. Quand nous serons au terme de notre voyage, nous aurons

des comptes à rendre à Dieu.

Celui qui a fait l'expérience du don de Dieu en Christ devient à son tour un donateur.

Page 169: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

169

Il vit et il donne, selon le mot d'ordre de l'apôtre: "Ce n'est plus moi qui vis, c'est Christ

qui vit en moi" (Gal 2:20). Récepteur de la grâce divine, il en est aussi l'agent. La gestion

de l'argent n'est qu'une facette du stewardship, mais elle est importante et essentielle.

L'argent n'échappe en aucun façon de la gestion au sens large que le Seigneur confie aux

siens. Le chrétien, pardonné, pardonne et donne. Cela fait partie de l'essence même de la

vie chrétienne. Il paraît que la Bible contient 1.5675 références au stewardship dont

beaucoup concernent le stewardship de l'argent, la façon de le gagner, de le gérer et

de le dépenser. C'est vrai aussi de la moitié des paraboles racontées par Jésus.

Voici quelques textes, parmi les plus importants:

"Celui qui sème peu moissonnera peu, et celui qui sème abondamment moissonnera

abondamment" (2 Cor 9:6). Aux yeux de Dieu, la cupidité est aussi grave que

l'adultère, l'impudicité, l'ivrognerie ou le vol (1 Cor 6:9.10). Il y a là toute une éducation

à faire. Dieu qui a dit: "L'argent est à moi et l'or est à moi, dit l'Eternel des armées"

(Aggée 2:8), a besoin d'argent pour sauver le monde, car il a besoin de son Eglise pour le

faire, et celle-ci ne peut pas le faire sans argent. "Honore l'Eternel avec tes biens et avec

les prémices de tout ton revenu" (Prov 3:9). D'où l'exhortation suivante: "Que chacun de

vous, le premier jour de la semaine, mette à part chez lui ce qu'il pourra, selon sa

prospérité, afin qu'on n'attende pas mon arrivée pour recueillir les dons" (1 Cor 16:2).

Ce texte est particulièrement important, car il énonce plusieurs règles de gestion, ce

qu'on a appelé les cinq "p": les dons des chrétiens doivent être périodiques (le premier

jour de la semaine), personnels (que chacun de vous), prévoyants (mette à part),

proportionnels aux ressources (selon sa prospérité), et préventifs (afin qu'on n'attende

pas mon arrivée pour recueillir les dons).

Combien donner? Que chacun donne "selon sa prospérité" (1 Cor 16:2), sachant qu'il

sera beaucoup demandé à celui qui a beaucoup reçu (Lc 12:48). C'est l'amour du Christ

Page 170: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

170

qui motive le chrétien, en cela comme en toutes choses. C'est pourquoi il donne

spontanément, avec joie, libéralement, selon ses moyens et régulièrement. Ce qui

compte, ce n'est pas la quantité que nous donnons, mais la proportion entre ce que nous

donnons et ce que nous gardons ou dépensons autrement. C'est certainement aussi le

rapport entre ce que nous dépensons pour nos loisirs ou pour le superflu et ce que nous

réservons au Seigneur. La modeste pièce du pauvre, donnée avec amour et gratitude

vaut autant, aux yeux de Dieu, que le chèque du riche. Dieu ne regarde pas seulement au

don, mais aussi au donateur. Nos biens matériels sont propriété de Dieu. Nous aurons

donc à coeur d'honorer Dieu en toutes choses, y compris dans ce que nous lui réservons

pour la proclamation de l'Evangile et la bienfaisance auprès des nécessiteux. Et ce que

nous faisons en paroles et en actes, nous devons le faire à sa gloire (Col 3:17).

Revenons à la question: Combien? A chacun d'y répondre. Mais si les Juifs ont su donner

la dîme que leur imposait la Loi, sans pour cela souffrir de malnutrition, pourquoi les

chrétiens ne pourraient-ils en faire autant? Et s'ils hésitent à donner 10%, pour se

prouver qu'ils sont affranchis de ces éléments de la Loi mosaïque, rien ne les empêche

de donner 11% ou 15% ou davantage encore! A chacun de se fixer une règle. Mais les

chrétiens qui ont reçu encore davantage de grâces du Seigneur que les Juifs devraient

pouvoir faire au moins autant qu'eux, et le faire cette fois-ci spontanément, par amour.

L'expérience a montré que les paroisses où on s'est librement fixé comme règle de

donner la dîme de ses revenus ont fait un grand bond en avant, qu'elles sont devenues

financièrement autonomes ou bien qu'elles ont pu acquérir le matériel pédagogique

nécessaire à une bonne formation religieuse ou soutenir généreusement

l'évangélisation et la mission, et que, grandissant financièrement, elles ont su grandir

aussi numériquement et grandir en foi et en consécration.

Mais attention, nous ne sommes ni des Mormons ni des Adventistes. Pas de légalisme!

Page 171: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

171

La dîme n'est pas l'exemple à suivre à tout prix, mais un exemple parmi d'autres. Elle ne

peut être qu'une référence et non une loi. Mais une référence utile et bénéfique, qui peut

pousser à l'introspection et interdire au chrétien de tricher et de tromper Dieu en se

trompant lui-même. Encore une fois, le problème de la quantité est une affaire

personnelle profondément imbriquée dans les relations que le chrétien entretient avec

son Dieu. Donner 10% de ses ressources à l'Eglise peut être un fardeau insupportable

pour un économiquement pauvre avec charge de famille, tandis que donner 20% peut

signifier pour un paroissien aisé donner de son superflu et rien que de lui, c'est-à-dire

donner beaucoup moins que la veuve de l'évangile. Celui qui doit vivre avec 3.000 F et

qui en donne 300 à l'Eglise donne beaucoup plus que celui qui cotise à 10% d'un salaire

de 30.000 F. Le premier donne dix fois moins que le second, et cependant beaucoup plus

que lui, et le Seigneur le sait.

Dieu sait encourager ses enfants et leur fait de belles promesses. "Heureux celui qui

s'intéresse au pauvre! Au jour du malheur, l'Eternel le délivre. L'Eternel le garde et lui

conserve la vie. Il est heureux sur la terre" (Ps 41:2.3). Et donner à l'Eglise non

seulement pour qu'elle puisse secourir les pauvres, mais aussi pour lui permettre

d'annoncer l'Evangile aux hommes et de leur apporter ainsi le salut, c'est aussi donner

aux pauvres. "Honore l'Eternel avec tes biens et avec les prémices de ton revenu.

Alors tes greniers seront remplis d'abondance et tes cuves regorgeront de moût" (Prov

3:9.10). Cf. encore Prov 121:24.25; Mal 3:10; Mt 19:29; Lc 6:38; 9:24; 2 Cor 9:6.7.

Les offrandes et cotisations des chrétiens ne plaisent au Seigneur que si elles sont le

produit de l'amour pour lui, son Evangile et son Eglise. Cet amour est entretenu dans le

coeur par l'Evangile du salut. Le comte de Zinzendorf disait, en contemplant un tableau

du Crucifié: "Tu m'as donné ta vie. Et moi, que t'ai-je donné en retour?" C'est par la

prédication de l'Evangile, à l'exclusion de toute contrainte de la Loi, qu'on aide les

chrétiens à grandir en toutes choses, y compris en cela. Le croyant sait que Dieu est son

Page 172: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

172

Maître, son Berger, sa récompense et sa forteresse, sa perle de grand prix, son

Rédempteur et son Seigneur. Et lui, qu'est-il? La brebis de ce Berger, le racheté de ce

Rédempteur, l'enfant de ce Père, celui qui veut le servir dans la justice, l'innocence et la

félicité. C'est pourquoi il lui consacre et lui offre tout. En particulier aussi son argent. Il

désire que cet argent soit de "l'argent chrétien". Qu'est-ce que l'argent si ce n'est du

temps, du travail, des talents, de la fatigue cristallisés et rendus au Seigneur? L'argent

est une partie de nous-mêmes, de notre labeur, de notre existence que nous consacrons

à la cause de notre Dieu.

Recommandant aux Corinthiens l'offrande en faveur des chrétiens pauvres de la

Palestine, l'apôtre leur écrit: "De même que vous excellez en toutes choses, en foi, en

parole, en connaissance, en zèle à tous égards et dans votre amour pour nous, faisons en

sorte d'exceller aussi dans cette oeuvre de bienfaisance. Je ne dis pas cela pour donner

un ordre, mais pour éprouver, par l'exemple du zèle des autres, la sincérité de votre

amour" 2 Cor 8:7-9). La paroisse doit éduquer ses membres et leur apprendre à donner

avec générosité et selon leurs moyens, pour que l'oeuvre de Dieu avance. Qu'il s'agisse

de l'argent que le chrétien dépense opur lui-même et pour les siens ou de celui qu'il

donne à son Dieu en le confiant à l'Eglise, ce sont là des choses qui font partie intégrante

de la sanctification chrétienne. Et en cela, comme en toutes choses, le chrétien désire

faire la volonté de son Dieu. Et ce qui est vrai de l'argent l'est de tous les dons que Dieu

accorde aux siens (vie, temps, aptitudes de toutes sortes, etc.).

Rappelons-le: Au coeur du stewardship se trouve la conviction qu'en servant le

Seigneur et son Eglise, on ne fait que lui rendre ce qu'on a reçu de lui. Conformément

aux richesses de sa grâce, il considère ce qu'il a fait à travers nous comme quelque chose

que nous avons fait pour lui. Son amour nous fait l'aimer à notre tour d'un amour qui

s'exprime dans une vie consacrée à la gloire de son nom et au bien-être de son Eglise.

Cet amour lui fera dire un jour à tous ceux qui l'auront servi fidèlement: "C'est bien, bon

Page 173: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

173

et fidèle serviteur. Tu as été fidèle en peu de chose, je te confierai beaucoup. Entre dans

la joie de ton maître" (Mt 25:21). "Venez, vous qui ête bénis de mon Père, prenez

possession du royaume qui vous a été préparé dès la fin du monde" (Mt 25:34).

Pour cela, il est bon que toute paroisse ait un comité de stewardship dont les membres

sont élus par elle ou par son conseil presbytéral, ou bien choisis au sein de ce conseil. Ce

comité se réunira régulièrement, de manière à faire le point.

Textes bibliques sur le stewardship chrétien à traiter dans les prédications et études

bibliques pour former et instruire la paroisse:

1) Dieu est le Créateur et propriétaire de toutes choses: Gen 1; Lév

25:13; Ps 24:1; 50:13; 95:1-6; 145:16; Jn 1:3; 1 Cor 4:7.

2) Dieu préserve toutes choses: Gen 8:22; Act 17:24.25.28; Col 1:17;

Héb 1:3.

3) Le Christ nous a rachetés, de telle sorte que nous lui appartenons: Es

53; Jn 1:29; 3:14-17; Rom 5:8; Gal 3:13; 4:4.5; 1 Pi 1:18; 2:24.

4) Le Christ est notre vie: Mt 16:24; Mc 8:34-38; Jn 15:1-8.16; Rom

6:121; 14:7.8; 1 Cor 3:9; 6:19.20; 2 Cor 4:11; 5:14.15.17; 8:5.8.9; Gal

2:20; Eph 2:10; Phil 1:21; Col 1:18; 3:4; 1 Pi 2:9.

5) Vivre à la gloire de Dieu: Es 60:21; 61:3; Mt 5:16; Jn 15:8; 17:10;

Rom 15:9; 1 Cor 16:20; 2 Thess 1:10.12; 1 Pi 4:11.14; Apoc 4:11.

Page 174: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

174

6) Nous devrons tous rendre des comptes: Mt 25:19; Lc 12:42 ss.;

19:15; Rom 14:12; 1 Cor 3:13; 4:2-4; 2 Cor 5:10.

7) Stewardship du temps: Gen 19:16; Ps 39:4; 90:10.12; Eccl 3:1; Mt

8:21.22; 16:3; 24:14.46; 25:1-3; Mc 13:34-37; Lc 9:61; 12:19.20; 19:44;

Act 24:25; 1 Cor 7:29-31; 2 Cor 6:2; Eph 5:16; 2 Tim 4:3; Jac 4:13-15; 1

Pi 4:7.

8) Stewardship des talents et des dons: Gen 18:32; Ex 4:10-15; 31:1-6;

Deut 8:17.18; Prov 11:30; Es 50:4; Jér 6: 6-10; Mt 9:38; 25:15.35.36;

Mc 14:8; Lc 10:34; 12:48; Jn 13:14; Act 4:34; 6:2; 9:36-42; Rom 12:1;

15:14; 1 Cor 1:5; 6:20; 12:1-31; 15:58; 2 Cor 8:7; Gal 6:2.10; Eh 4:11;

Col 1:4; 1 Tim 6:11.12.18; Jac 1:5.19.20

9) Stewardship de l'argent: Gen 4:4.5; 13:8.9; 28:20-22; Ex 36:5; Deut

16:17; 1 Rois 17:13; 1 Chron 29:9; Prov 3:9; Eccl 5:10; Mal 3:8; Mt

6:3.19.20; 10:8; 16:26; 22:21; 26:7; Mc 12:41-44; Lc 6:38; 12:15-31;

Act 11:29; 1 Cor 9:14; 16:2; 2 Cor 8:2-4.7.13.14; 9:1.6.7; 1 Tim 5:8.18;

6:17-19; Jac 5:3.

10) Stewardship et mission: Es 60; Mt 24:14; 28:19.20; Mc 16:15.16; Jn

4:35; 12:32; 20:21.31; Act 1:8; Rom 1:14; 1 Cor 9:16; 1 Tim 1:16; 2:1-4.

11) Stewardship et bienfaisance: Prov 25:21; Eccl 11:1; Es 58:7; Mt

5:42; 25:34-40; Lc 10:33.34; 19:8; Act 11:29; Gal 2:10; 6:10; 1 Jn 3:17.

12) De bons stewards sont l'oeuvre et un don de Dieu: Ez 36:27; Jn

15:4.5.7; Rom 10:17; 1 Cor 2:14; 12:3; 2 Cor 3:5; 9:8; Eph 2:8-10; Phil

Page 175: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

175

1:6; 1 Pi 2:19.

13) La récompense de grâce qui les attend: Ps 1:3; Prov 3:1-10; 10:22;

11:24.25; Mal 3:10; Mt 6:33; 19:21.29; 25:14-30.34-46; Mc 10:28-30;

Lc 6:38; 9:24; 12:33; 19:17; Jn 10:10; 2 Cor 9:6.8; Phil 3:8.9; 1 Tim 4:8;

Jac 2:5; Apoc 21 et 22.

Tâches du comité de stewardship:

Se réunir avec le pasteur et en liaison avec le conseil presbytéral et les autres comités de

la paroisse,

1) pour faire le bilan sur les points suivants:

instruction de la paroisse dans les principes et la pratique du

stewardship;

appréciation du privilège d'être membre de l'Eglise chrétienne et des

responsabilités qui en découlent;

éducation dans la gestion de l'argent et le devoir du chrétien de donner

avec joie et selon ses moyens;

information sur les programmes de la paroisse et le devoir

de chaque chrétien de les soutenir par la prière, le don de son temps,

de ses talents et de son argent.

Page 176: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

176

2) pour mener à bien les actions suivantes:

répertorier les talents disponibles dans la paroisse et engager tous les

paroissiens dans la vie de l'Eglise;

visiter les nouveaux membres et les intégrer à la vie et aux activités de

la paroisse;

encourager les jeunes à se mettre au service de l'Eglise;

acquérir le matériel didactique apte à sensibiliser et éduquer les

chrétiens en ce qui concerne le stewardship, la mission et les

responsabilités de l'Eglise, et mettre ce matériel à la disposition de la

paroisse (livres, études, cassettes, films);

faire le point de la situation financière de la paroisse et trouver les

moyens de l'améliorer (cotisations mensuelles ou hebdomadaires,

offrandes spéciales, "pledges", information par bulletin paroissial ou

lettres spéciales, mise en place de graphiques clairs et éloquents, etc.);

informer la paroisse sur les activités régionales et synodales et

l'encourager à soutenir telle ou telle action ou projet d'une autre

paroisse, dans la région ou ailleurs

dans le synode;

motiver les membres à lire la littérature paroissiale et

synodale et à assister aux réunions organisées par la région et le

synode;

Page 177: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

177

proposer à la paroisse la célébration d'un dimanche de la

mission, d'un dimanche du témoignage et du stewardship.

__________

Page 178: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

178

DIACONIE ET BIENFAISANCE

Importance et nécessité de la diaconie:

Bassine et serviette! Objets tout à fait ordinaires dans les mains d'un esclave de

l'Antiquité, mais qui revêtent un sens extraordinaire dans celles du Christ (Jn 13). Une

grande partie de son ministère fut un ministère social. Il donna à manger à des affamés,

guérit des malades physiques et mentaux, secourut des infirmes, sécha des larmes en

ressuscitant des morts. En un mot, il démontrait l'amour qu'il prêchait.

Il y a d'innombrables malades et infirmes de nos jours. Les lits des hôpitaux sont pleins.

Les homes de vieillards, qui ne sont souvent que des mouroirs, aussi. De même les

centres spécialisés et les prisons. Quelle est la part des chrétiens dans le soulagement de

toute cette misère?

Page 179: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

179

La mission essentielle de l'Eglise est bien sûr la prédication de l'Evangile et

l'administration des sacrements. Sa mission seconde est la mise en pratique de l'amour

qu'elle prêche (Mt 25:35-40). Pour cela, elle doit

soutenir les institutions sociales qui œuvrent en son nom;

chercher les moyens d'en créer de nouvelles;

répondre positivement et avec générosité aux appels à l'aide

(catastrophes naturelles, famines, épidémies, lutte pour les droits de

l'homme et l'abolition de la torture, projets à long terme comme la

construction d'hôpitaux dans le Tiers-Monde, le forage de puits), envoi

de médicaments et de produits alimentaires de première nécessité,

parrainage d'une famille de réfugiés (Mt 25:35), aide aux alcooliques,

toxicomanes et délinquants. Quelques autres suggestions:

encourager les jeunes à se préparer pour des carrières sociales,

prêcher bien sûr sur la bienfaisance, informer sur la souffrance dans le

monde (tableaux, affiches, reportages), participer à la bienfaisance au

niveau de la commune (restaurants du coeur, don du sang, etc.), créer

un comité de bienfaisance à l'image de l'Eglise de Jérusalem (Act 6:1-7.

Le président de ce comité devrait être un homme rempli du

Saint-Esprit comme Etienne).

Le comité à l'action:

Recenser les besoins et détresses dans la paroisse et dans la commune (malades,

vieillards, parents isolés, jeunes en difficulté, chômeurs, malades mentaux, handicapés

moteurs, etc.). Définir le genre d'aide dont ces gens peuvent avoir besoin

Page 180: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

180

(baby-sitting pour une jeune mère, faire les courses pour un vieillard ou tout

simplement lui rendre visite, procurer un poste ou un peu de travail à un chômeur,

réfection des papiers peints dans le logement d'un pauvre, compagnie et un peu de

lecture pour un isolé, invitation à des repas, etc.).

Exercer un ministère en faveur des alcooliques et des toxicomanes. Ces gens sont

victimes d'un péché, mais aussi des malades. Ils ont besoin de la Parole de Dieu

(repentance, pardon, délivrance), mais aussi d'amour et de compréhension. Souvent ils

ont été poussés dans leur vice par de réels problèmes (solitude, mariages malheureux,

stress au travail, chômage, problèmes affectifs ou financiers, frustrations pour n'avoir

pas pu réaliser leurs rêves, sentiment de culpabilité). Le pasteur et les responsables du

comité de bienfaisance doivent connaître ce genre de problèmes et les mécanismes qui

génèrent ce style de vie. Une instruction adéquate au niveau de la paroisse est

indispensable. Recours à des conférenciers, vidéocassettes, etc.

Lutter pour une vie paroissiale faite de bonté et de générosité contre toute forme de

discrimination raciale ou sociale. Etre, par l’accueil de l'étranger et de celui qui est

différent, un bon levain dans la communauté civile.

Prévenances à l'égard du 3 âge. A l'heure actuelle, 10% de la population dépassent 63

ans. En l'an 2000, ils seront près de 30%. Construire des locaux paroissiaux qui tiennent

compte des personnes âgées. Ne pas mettre les vieillards sur une voie de garage, mais

les garder intégrés à la paroisse (activités spéciales pour eux, responsabilités à leur

confier, club et repas 3 âge, etc.). Il faut qu'ils se sentent à l'aise et les bienvenus dans

leur paroisse. Il faut que la paroisse organise des activités qui leur permettent d'inviter

des amis de leur âge (conférences, travaux collectifs pour la paroisse ou la mission,

repas, activités ludiques, etc.).

Page 181: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

181

Aide à apporter aux vieillards: Leur proposer de les chercher pour le culte et de les

reconduire - Les aider dans leur vie de tous les jours (visites, courses, travaux, lectures,

enregistrements de cultes) - Service téléphone (un appel journalier à une heure précise

de la part d'un membre de la paroisse chargé de cela (cela rassure le vieillard et lui

prouve qu'on pense à lui; cela permet aussi d'avoir des nouvelles de lui) - Encourager

les vieillards à exercer un ministère de la prière. Quelle joie pour un pasteur de savoir

que Mémé Unetelle ou Pépé Untel prient chaque jour pour lui!

Aide à apporter au chômeurs: Le chômage est source de nombreux problèmes et

conflits (alcoolisme, frustrations, suicide, sentiment d'inaptitude, divorce, etc.). On peut

aider les chômeurs à trouver du travail. Parfois, il y a des employeurs dans la paroisse.

Annoncer publiquement que des membres de la paroisse sont sans emploi. Demander

aux pasteurs du voisinage de l'annoncer chez eux. Organiser des dimanches pour les

chômeurs de la paroisse, compulser les annonces pour eux, téléphoner, s'informer pour

eux, etc. Tout cela est de la foi en action.

Prendre la défense des faibles, des malades, des pauvres et des opprimés. Parler pour

eux. A Dieu, dans une intercession constante, aux hommes en luttant pour les droits des

faibles, en protestant contre les violations des droits de l'homme dans le pays et ailleurs.

Les chrétiens doivent être la voix de ceux qui subissent de l'intolérance en raison de

leur race, de leur sexe, de leur âge, de leurs convictions politiques, de leurs origines

nationales, de leurs handicaps physiques ou mentaux, de leurs problèmes et conflits

personnels.

Une paroisse luthérienne des USA donne à ses membres la possibilité de faire de la

bienfaisance de la façon suivante: on dispose sur une table, à la sortie de l'église, des

papiers qui annoncent qu'un tel a besoin de quelqu'un pour le conduire à l'hôpital,

qu'un handicapé aurait besoin d'un fauteuil roulant ou de tel ou tel service, qu'un tel

Page 182: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

182

autre aurait besoin d'un repas chaud par jour ou bien d'une visite de temps en temps,

etc. Un responsable du comité de bienfaisance se tient à côté de la table avec une liste de

demandes et y inscrit des volontaires. C'est encore une forme de foi en action (Jac 1:22).

__________

Page 183: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

183

LES BIENS DE LA PAROISSE 1) La paroisse et son argent:

On parle trop d'argent dans l'Eglise? C'est l'argent du Seigneur et il s'agit de le gérer

convenablement et de façon à éviter tout soupçon. Les exemples de malhonnêteté dans la

trésorerie paroissiale ne manquent pas!

On créera un comité des finances et élira des assesseurs du trésorier qui comptent avec lui

les offrandes, après chaque culte. Il faut laisser le pasteur en-dehors de cela. La paroisse doit

avoir un compte postal ou bancaire à son nom, avec comme fondé de pouvoir le trésorier et

un ou deux membres du comité des finances. Le trésorier inscrit les sommes en présence des

asesseurs dans le livre de comptes. L'argent ne doit pas rester dans les locaux paroissiaux ni

dans le logement du trésorier (à part une petite somme), mais doit être déposé en banque ou

à la poste dans les meilleurs délais. On gardera pendant au moins trois ans les talons et les

enveloppes sur lesquelles les paroissiens ou le trésorier ont noté le montant de l'offrande

avec la date. Le trésorier et les assesseurs sont tenus à la discrétion (pas de commentaires ni

de fuites!).

Page 184: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

184

Nécessité d'établir un budget qui programme les recettes et dépenses de la paroisse.

Programmer les dépenses courantes et les dépenses imprévues. Faire faire des devis. Fixer

des ordres de priorité. Informer la paroisse. Solliciter des dons spéciaux. Evaluer les recettes

prévisibles par rapport aux années précédentes, en fonction de l'état de la paroisse

(augmentation ou perte de membres). Les responsabilités du comité des finances seront

assumées dans la prière et dans la confiance en Dieu et en ses enfants. Une bonne

information des fidèles et une présentation correcte des besoins de la paroisse suffisent

généralement à sensibiliser les gens.

Rapports financiers intérimaires (chaque trimestre, par exemple), pour faire le point des

recettes et des dépenses, lancer des appels, encourager, informer que telle dépense pourra

être faite ou pas, prévoir une dépense nouvelle si les recettes le permettent, remercier la

paroisse pour ses efforts ou au contraire l'exhorter et l'avertir d'un déficit probable. Un

budget bien fait, des recettes bien comptées et comptabilisées, des rapports clairs et objectifs

inspirent confiance à la paroisse et l'encouragent à traduire cette confiance en efforts

financiers soutenus.

Projets à longue échéance. Etablir une "liste de rêves", de projets nécessaires ou simplement

utiles, et les affecter d'un coefficient de priorité. Si le budget paroissial laisse entrevoir un

excédent en cours ou en fin d'année, choisir un élément dans la "liste de rêves" et l'intégrer

dans le programme de l'année. Solliciter pour ces "rêves" les suggestions du plus grand

nombre possible de paroissiens. Ils n'en seront que plus intéressés par le travail de la

paroisse et le soutiendront avec d'autant plus de ferveur.

Page 185: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

185

2) La paroisse et ses biens immobiliers et mobiliers:

Des bâtiments bien entretenus sont révélateurs des gens qui viennent y adorer Dieu. Pour

qu'ils le soient, il faut qu'ils se sentent directement responsables de leur entretien. Ce n'est

pas tellement de la compétence du pasteur. Il est donc bon d'élire un comité de gens qualifiés.

Ce comité fera appel à tous les artisans et techniciens en bâtiments qui peuvent faire partie

de la paroisse, pour qu'ils offrent leurs compétences.

Ne pas attendre qu'il y ait des dégâts pour procéder à des réparations, mais agir de façon

préventive. Un des investissements les plus rentables est l'isolation contre le froid et une

révision de la chaudière ou son remplacement par un équipement plus performant. Les

travaux de peinture devraient être effectués par les paroissiens à titre bénévole et se faire de

façon régulière, selon un programme échelonné sur plusieurs années. Tondre les pelouses de

façon régulière, désherber, tailler arbres et arbustes. Quelques fleurs ici et là.

Protéger les bâtiments contre les vols et effractions en fermant à clé tous les locaux

contenant du matériel recherché par les voleurs (machines à écrire, magnétophones,

instruments de musique, etc.). Renforcer les portes et apposer de bonnes serrures. Conserver

les factures du matériel acheté, réclamées par les compagnies d'assurance en cas de vol ou de

détérioration. Au besoin, laisser une pièce allumée pendant la nuit, éclairer les abords et

installer un système d'alarme.

Assurer les bâtiments (responsabilité civile) et leur mobilier (incendie, dégâts d'eau, vols et

effractions). Comparer les prix, car il y a parfois de grandes différences de tarifs d'une

compagnie à l'autre. Ne pas sous-estimer la valeur du matériel assuré; on risque des

déconvenues en cas d'accident ou de vol. Ne pas la surestimer non plus; les cotisations

Page 186: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

186

risquent d'être prohibitives, et d'autre part il y a des biens qui n'ont pas besoin d'être

assurés, car ils ne risquent rien.

Le pasteur ne doit pas être le responsable de tout cela, mais il y participe personnellement. Il

est l'un de ceux qui motivent et suscitent l'intérêt et le sens des responsabilités. Les

paroissiens devraient être heureux de travailler ensemble dans leur paroisse, pour leur

Seigneur. Ce devrait être pour eux une source de joie. Il est bon de les en remercier et de les

récompenser (par exemple, par un repas en commun ou un pot de l'amitié). Motiver signifie

programmer, organiser, diriger et contrôler tout de façon à ce que les gens agissent de

manière efficace et réalisent les projets qu'on s'est fixés. Un vrai leader est un homme qui

obtient que les autres fassent ce qu'il veut et comme il le veut, parce qu'ils le veulent.

Anecdote: Un pasteur mettait de côté tous ses casuels pour récompenser les volontaires de sa

paroisse en finançant un barbecue par an. Le pasteur doit motiver aussi en participant

personnellement aux travaux. Il n'y a aucune raison pour qu'il ne prenne pas un pot de

peinture et un pinceau, sous prétexte qu'il est pasteur et qu'il n'a pas de talent de bricoleur.

D'autres dans la paroisse pourraient en dire autant.

Le comité veillera aussi à ce que tous ceux qui travaillent dans l'Eglise (pasteur, organiste,

moniteurs d'école du dimanche, bricoleurs, jardiniers) le fassent dans de bonnes conditions.

Il n'est pas normal qu'un pasteur travaille avec une machine à écrire vieille de 30 ans ou que

son bureau soit mal éclairé. Cela ne motive pas et ne rend pas heureux et dynamique.

Recourir aux gens et à leurs talents. Ne pas oublier les retraités qui ont appris un métier,

possèdent du talent, ont acquis de l'expérience, ont du temps à revendre et cherchent à

donner un sens à leur vie. Il y a dans toute paroisse des dons qui sommeillent, un potentiel

d'aptitudes et de temps, d'amour du Seigneur aussi et de volonté de servir qui n'est pas

utilisé.

Page 187: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

187

Un peu d'organisation peut produire des miracles. La chapelle est-elle à repeindre? Le dire

plusieurs dimanches de suite. Etablir une liste de volontaires disposés à offrir un samedi

après-midi. Préparer le matériel. Leur donner rendez-vous tel samedi, à telle heure. Si on en

trouve 20 et qu'ils travaillent 5 heures, on totalise 100 heures de travail. On termine sur un

bon barbecue. Si nécessaire, on recommence 15 jours plus tard. Cent heures de travail

peuvent transformer une chapelle et faire des miracles, et cinq heures de travail par

personne ne sont pas la mer à boire. Le fait de travailler ensemble à l'Eglise est à lui seul

gratifiant, et le barbecue constitue la récompense suprême. Pourquoi pas ne pas faire figurer

les noms des volontaires sur un tableau d'affichage en gage de gratitude pour les services

rendus?

__________

Page 188: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

188

L'ADMINISTRATION DE LA PAROISSE

Le rôle essentiel du pasteur est d'annoncer l'Evangile et d'aministrer les sacrements, de

dispenser donc les moyens de grâce. Cependant le contexte social dans lequel nous vivons est

tel qu'il est souvent appelé à être l'administrateur de sa paroisse, donc à exercer des activités

que ne connaissaient guère les pasteurs du passé (planifier, programmer, organiser les

activités paroissiales, etc.).

Jésus est un modèle à sa façon. Ce n'est pas lui qui paie l'impôt, mais il demande à Pierre de le

faire. Il charge Judas de gérer les finances du groupe. Il demande aux disciples de préparer la

Pâque. Il leur confie donc des tâches qui sont pour lui secondaires, pour avoir le temps de

faire ce qu'il considère comme primordial. Les apôtres feront de même en demandant à

l'Eglise de Jérusalem de choisir des diacres (Act 6).

Un pasteur doit agir de la même façon, confier des tâches aux laïcs et, s'il n'a pas de laïcs

compétents, les éduquer pour cela. L'Eglise locale est en quelque sorte une démocratie.

Investi du sacerdoce universel, chaque membre en est une pierre vivante, et tous ensemble

constituent un corps vivant dont le Christ est le chef. Son organisation doit donc être paisible,

Page 189: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

189

harmonieuse et productive. Une paroisse doit procurer à ses membres la possibilité de servir

Dieu avec les dons qu'ils ont reçus de lui. Elle ne doit pas être l'Eglise d'un seul homme. Le

pasteur ne peut pas et ne doit pas accomplir toutes les tâches qui incombent à l'Eglise.

La constitution paroissiale:

Nécessité d'une bonne constitution, augmentée d'un règlement intérieur. Les deux seront

aussi simples que possible, aussi flexibles que possible pour permettre à la vie paroissiale de

se développer, et aussi complets que possible pour recouvrir toutes les activités de la

paroisse et les superviser.

Dans une première partie, la constitution fixe l'identité de la paroisse, son but, sa profession

de foi et son appartenance ecclésiale. La deuxième partie, plus mobile, définit son

administration. Dans l'administration même, le pasteur n'a pas plus d'autorité que n'importe

quel laïc. Il n'exerce d'autorité pastorale que dans l'administration des moyens de grâce et

n'a en matière de gestion que les responsabilités que la paroisse veut lui confier. Il sera

prudent et n'imposera pas de changement d'ordre administratif. Seule la paroisse tout

entière a le pouvoir de modifier son administration.

Membres de la paroisse:

On distingue entre membres baptisés, communiants et électeurs.

La création de comités est une chose bonne et nécessaire. Mais ces comités ne doivent pas

déposséder les membres électeurs de l'Eglise de leurs responsabilités. C'est à la paroisse de

prendre en la personne de ses membres électeurs les décisions qui concernent son existence

et ses activités (1 Cor 14:23.24; Mt 18:17; Eph 4:11; 1 Pi 2:9). Les comités (conseil

Page 190: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

190

presbytéral, comité d'éducation chrétienne, comité d'évangélisation, de mission, de

stewardship, pour le travail parmi les jeunes, etc.) ne sont que les agents de la paroisse et

responsables devant elle de ce qu'ils font.

Conseil presbytéral: chrétiens mûrs (traditionnellement des hommes) ayant un bon

jugement, sagesse, consécration et humilité. Ils assistent le pasteur dans ses fonctions et le

conseillent. Ils sont particulièrement responsables de l'enseignement, de l'administration des

sacrements, du déroulement des cultes, donc de l'exercice du ministère pastoral et des

activités spécifiquement spirituelles.

Une paroisse doit savoir que c'est un privilège pour tout chrétien d'assumer une

responsabilité en son sein. Il sera bon d'installer officiellement au cours d'un culte tous ceux

qui exercent une responsabilité particulière.

Quant aux modalités de l'administration paroissiale, elles ne sont pas régies par l'Ecriture et

constituent des adiaphora.

Laïcs: Dans trop de paroisses, la majorité des membres laissent à un petit groupe de laïcs le

soin de veiller à la vie de l'Eglise. Or l'appartenance à une paroisse implique toujours le

service auprès du peuple de Dieu. Beaucoup s'y refusent, parce que convaincus de leur

incapacité. Le pasteur les aidera à surmonter ce sentiment en annonçant toujours à nouveau

que le Saint-Esprit peut équiper tout chrétien en vue de services dans le Royaume de Dieu.

D'autres sont convaincus que les activités qu'on leur propose ne méritent pas leur attention.

Un troisième facteur est le manque d'information. Nécessité d'y parer en informant

régulièrement sur la vie de la paroisse, du district, du Synode. Voici enfin un quatrième

facteur: le vieil homme dont Satan veut se servir pour inciter à l'inactivité et l'indifférence.

Il y a dans l'Eglise diversité de dons, mais 1) il y a une place et un rôle pour chaque chrétien,

Page 191: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

191

2) Dieu confère et augmente les dons dont son Eglise a besoin, 3) nous devrons tous un jour

rendre des comptes.

Voici certains principes pour l'engagement des laïcs dans la vie de la paroisse (pour plus de

détails, cf. le chapitre sur l'engagement des fidèles dans la vie de la paroisse):

1) Etre raisonnable dans ses demandes. Ne rien imposer, ne pas

insister de trop, ne pas appeler à un service pour un temps

indéterminé, ce qui ferait reculer les gens.

2) Toujours être prêt à encourager. Le découragement et la lassitude

peuvent s'installer chez les meilleurs chrétiens. Il faut donc leur

remonter le moral.

3) Ne pas toujours critiquer, mais savoir aussi apprécier et le dire. Le

chrétien ne cherche pas d'éloges, mais le compliment peut

l'encourager. Paul ne manque pas de le faire dans ses épîtres.

4) Analyser avec soin les dons des gens et leur degré de

développement spirituel. Savoir confier à chacun le rôle et la

responsabilité qui correspondent à ses aptitudes est tout l'art d'un bon

pasteur. Un bon commerçant n'est pas nécessairement un bon

évangéliste, un bon banquier pas nécessairement un bon trésorier.

5) D'une façon générale, les gens sont plus efficaces quand ils

travaillent en groupes. On a alors plus de courage et d'entrain.

6) Pour certaines fonctions, il vaut mieux choisir les candidats que de

Page 192: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

192

faire appel à des volontaires. La bonne volonté ne suffit pas toujours.

7) Décrire honnêtement la responsabilité qu'on demande à quelqu'un

d'endosser. Ne pas décourager en décrivant le long stage de formation

nécessaire. Ne pas minimiser non plus l'importance de ce qu'on

demande, le temps, les forces, les sacrifices et la consécration

nécessaires. En un mot, ne pas piéger les gens, sinon ils n'accepteront

plus de responsabilités à l'avenir.

8) Faire confiance à ceux qu'on enrôle. La confiance fait naître la

confiance. Laisser aux gens du temps, tant pis si au début ce n'est pas

fait aussi bien qu'on le voudrait, faute d'expérience et d'habitude. Ne

pas s'ingérer dans les fonctions des gens.

9) Pas de pression, mais un appel amical, cordial et chrétien à la

coopération. Ne contraindre personne. Ne pas montrer les gens du

doigt dans une assemblée pour leur demander d'accepter une fonction.

L'invitation en tête-à-tête est préférable. Qu'elle soit cordiale et montre

au candidat la satisfaction qu'il trouvera à exercer la fonction qu'on

désire lui confier.

10) Ne pas ignorer les nouveaux membres, quand on distribue des

fonctions. Ils s'attendent sans doute à pouvoir servir. Certaines

responsabilités cependant ne peuvent être confiées qu'à des membres

expérimentés.

Signalons qu'il est aussi nécessaire de tenir proprement à jour les registres paroissiaux

qui permettent une information rapide et aisée (membres baptisés, communiants,

Page 193: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

193

électeurs, baptêmes, confirmations, mariages, enterrements, installations, ordinations,

mises à la retraite de pasteurs, fréquence et assistance à la Sainte Cène, cotisations,

offrandes, etc.). Faire un rapport régulier. Les registres et les procès-verbaux des

réunions paroissiales sont propriété de la paroisse et doivent le rester.

__________

Page 194: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

194

LE PASTEUR ET LE SYNODE

L'appartenance à un Synode constitue une unité ecclésiale nationale destinée à

promouvoir l'unité spirituelle en Christ. Le but en est la gloire de Dieu et le salut des

hommes (Eph 3:20.21; 1 Pi 4:11; 1 Tim 2:4). Nous proclamons la vérité. Nous savons

que là où elle est altérée, le Saint-Esprit peut encore agir et sauver, mais nous renonçons

à l'unionisme. Nous devons réexaminer toujours à nouveau notre position

confessionnelle et nous convaincre qu'elle est biblique.

Intercommunion:

Les paroisses apostoliques étaient en intercommunion. Elles échangeaient les épîtres

des apôtres, sa saluaient les unes les autres, exerçaient l'hospitalité fraternelle,

recevaient en frères dans la foi les chrétiens venus d'ailleurs.

Devoir pour un pasteur de reconnaître comme frères dans la foi ceux qui professent la

même vérité. Nécessité et obligation pour lui de pratiquer l'intercommunion.

Page 195: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

195

Relations personnelles:

Le pasteur doit avoir des relations fraternelles avec tous ses frères dans le ministère.

Les paroissiens savent fort bien s'il est en bons termes avec ses confrères ou non.

Cette fraternité doit se manifester et être sincère (rencontres, partage des problèmes,

communion dans la foi, échanges de chaires). Jamais il ne dira du mal d'un collègue en

présence de ses paroissiens. Il s'efforcera toujours de prendre sa défense.

Conférences pastorales:

C'est pour le pasteur une obligation d'y assister. Les bienfaits qu'il en tire: recyclage

théologique, édification mutuelle dans la foi et l'amour, progrès d'ordre professionnel

(homilétique, méthodes missionnaires, cure d'âme), intérêt pour les besoins et

problèmes au niveau régional et synodal. Nécessité d'élaborer un bon ordre du jour et

de l'exécuter, de prendre au sérieux les travaux qu'on vous confie, de coopérer dans la

participation active de ces conférences.

Assemblées Synodales:

Mêmes avantages que les conférences pastorales. Communion avec tous les délégués de

l'Eglise. Les Assemblées Synodales sont le lieu où on gère, programme, discute le travail

et les activités de l'Eglise. On y enregistre les progrès ou les reculs, bénéficie de

l'encouragement de tous, note les erreurs et les rectifie, élabore des programmes pour

un travail plus actif.

Page 196: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

196

Les objectifs d'un Synode sont: Proclamer en commun l'Evangile - Maintenir et défendre

la vérité - Evangéliser - Faire de la mission dans le Tiers-Monde - Former des pasteurs,

des missionnaires et des évangélistes - Editer du matériel d'instruction religieuse et

d'édification - Mobiliser et placer au service de la collectivité les multiples dons que le

Christ accorde aux uns et aux autres - Aider les paroisses à être plus actives et plus

efficaces aussi bien dans la proclamation de l'Evangile et l'évangélisation que dans la

bienfaisance - Se soutenir spirituellement les uns les autres - Soutenir financièrement

les paroisses qui ne sont pas autonomes ("self-supporting") - Promouvoir l'unité

confessionnelle dans l e monde.

Ce sont là autant de choses que des paroisses ne peuvent pas faire dans l'isolement.

D'où les bienfaits d'un Synode et la nécessité de faire preuve de loyauté à son égard.

Deux principes doivent toujours guider le Synode: 1) Préserver l'autorité souveraine de

la Parole de Dieu et agir en conformité avec elle. 2) Sauvegarder l'autonomie des

paroisses. Le Synode n'a pas de pouvoir exécutif ou législatif sur les paroisses. C'est un

corps consultatif. Par contre, il a le droit de fixer à ses membres un code doctrinal

(défini par l'Ecriture Sainte, divinement inspirée, et les Confessions de foi de l'Eglise

Luthérienne) et d'exiger la soumission à ce code. Une paroisse doit aussi soutenir le

combat du Synode contre l'erreur et le schisme. En ce qui concerne la doctrine, il n'est

donc pas un simple corps consultatif, mais son autorité est celle de l'Ecriture elle-même.

Droits du Synode:

Exiger la soumission à ses résolutions doctrinales. Pour toutes les autres résolutions, les

paroisses ont le droit de juger de leur bien-fondé. Elles ne doivent cependant pas le faire

de façon arbitraire, mais en conformité avec le principe biblique de l'amour chrétien.

Page 197: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

197

Les paroisses ayant contribué à élire les officiers du Synode reconnaîtront la validité et

le bien-fondé de leur ministère, dans l'intérêt de la gloire de Dieu et pour le bien-être et

l'édification de l'Eglise. Aussi le pasteur en particulier est-il tenu, de par son

appartenance au Synode, de coopérer avec lui et de mettre ses dons à sa disposition. Il

doit aussi permettre au Synode de superviser sa doctrine, sa pratique et

l'accomplissement des tâches de son ministère, et cela par les fonctionnaires du Synode

qui en ont reçu le mandat. Cela inclut aussi le pouvoir de suspension et

d'excommunication pour fausse doctrine ou mauvais comportement.

Cependant aucun fonctionnaire du Synode n'a le droit de régner sur les pasteurs et

leurs paroisses. Cf. Mt 23:8. Il est sage pour un pasteur et une paroisse de consulter les

officiers responsables en cas de vacance pastorale. Un pasteur et sa paroisse sont tenus

aussi d'accepter les visitations et d'écouter les exhortations, mises en garde et conseils

prodigués.

Obligations synodales du pasteur:

Assister aux Assemblées Synodales pour y représenter sa paroisse avec son ou ses

délégués laïcs et pour se tenir informé des activités de son Eglise et en assumer avec sa

paroisse la coresponsabilité. Se tenir informé aussi par la lecture des procès-verbaux et

bulletins synodaux.

Informer régulièrement sa paroisse des activités du Synode pour maintenir l'intérêt

éveillé, et éviter de critiquer devant elle le Synode et ses officiers.

Encourager la participation active de sa paroisse à la vie et aux activités synodales

(intercessions, dons à la caisse et aux œuvres synodales: évangélisation, mission,

Page 198: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

198

formation théologique, littérature, bienfaisance, etc.).

Etre prêt à assumer les responsabilités que le Synode vodrait lui confier, à plein temps

ou à côté de son ministère paroissial.

Faire tout pour consolider l'unité synodale, en évitant en particulier tout esprit de

division et de faction (1 Cor 1:10).

Bienfaits que la paroisse tire de son appartenance au Synode:

Communion étroite avec des chrétiens et des paroisses qui partagent sa

foi - Participation à l'œuvre du Royaume de Dieu au-delà des limites de la

paroisse - Coresponsabilité dans la programmation et l'exécution du travail

synodal - Accès direct à l'aide et l'assistance spirituelle et financière du Synode - Accès à

un potentiel de pasteurs dûment formés par le Synode et fidèles à l'Ecriture

Sainte - Possibilité de réprimande et d'exhortation fraternelles, si la paroisse est en

danger spirituel.

Obligations synodales de la paroisse:

Envoyer des délégués en Assemblées Synodales - Fournir des candidats susceptibles

d'être élus dans les comités et organes synodaux - Accepter les décisions majoritaires

du Synode, à moins de raisons contraignantes - Prier pour le Synode et le soutenir

spirituellement et financièrement, non en grattant les fonds de tiroirs pour donner au

Synode son excédent de recettes, mais en se fixant des objectifs valables et en

Page 199: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

199

s'efforçant de les atteindre - Encourager les jeunes gens au ministère pastoral - Montrer

de l'estime pour le Synode et les paroisses-sœurs - Permettre à son pasteur de

consacrer du temps aux tâches que le Synode lui a confiées - Rester informée du Synode

et de ses activités (joies, difficultés, etc.).

__________

Page 200: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

200

LE PASTEUR ET SON VICAIRE

Bien que la Bible ne connaisse pas le mot, le vicariat est une forme particulière du

ministère néotestamentaire. Ministère limité dans le temps et dans les responsabilités.

C'est un stage qui fait partie de la formation du futur pasteur. Le vicaire n'est pas le

pasteur assistant de la paroisse, mais un assistant du pasteur qui, chargé de ses

préparer au ministère, s'y initie sous la surveillance de ce dernier. Le pasteur reste

entièrement responsable de la vie et des activités de sa paroisse. Le vicaire n'a pas

d'initiatives à y prendre.

Page 201: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

201

Les éléments du vicariat:

Le vicariat est l'initiation au ministère pastoral que le vicaire exercera par la suite. Il

comprend les éléments suivants:

Prédications: A préparer sous la supervision du pasteur en des phases successives

réduisant progressivement l'intervention et le contrôle du pasteur.

Enseignement: Catéchismes, école du dimanche et formation de ses moniteurs, études

bibliques. Tout cela sous la surveillance du pasteur. Nécessité d'une préparation

sérieuse à ces activités.

Administration des sacrements: Elle relève du ministère pastoral ordonné. Cependant,

en vertu du sacerdoce universel, le vicaire peut participer à la distribution de la Cène et,

en cas de nécessité et avec l'accord de la paroisse (à condition qu'il n'y ait pas de

dissensus à ce sujet), à leur administration.

Visites: Visites en tout genre (malades, cure d'âme, visites missionnaires, etc.). Dans un

premier temps elles seront faites en compagnie du pasteur, puis par le vicaire seul.

Toutefois le pasteur se réservera toujours les visites revêtant un caractère

disciplinaire ou impliquant le secret professionnel.

Administration: Le vicaire sera invité aux réunions du conseil presbytéral et d'autres

comités paroissiaux, pour observer et apprendre. Il fera éventuellement la méditation

d'ouverture, mais, bien qu'il puisse exprimer son point de vue, ne s'ingérera pas dans

les débats.

Page 202: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

202

Réunions diverses: Groupes de jeunes, de dames, répétitions de chorales. Selon ses

aptitudes particulières, il assurera dans ce domaine des responsabilités diverses. Il

accompagnera aussi le pasteur à des conférences pastorales et meetings divers.

Secrétariat: Initiation à ce travail (rédaction du bulletin paroissial, de la correspondance

officielle, tenue des registres paroissiaux, etc.).

Problèmes afférents au vicariat:

De nombreux problèmes peuvent surgir dans les relations pasteur-doyen/vicaire.

Différences de dons, de méthodes et de caractères. Tel pasteur exige beaucoup, tel autre

moins. Beaucoup de vicaire se plaignent qu'on attende trop d'eux; d'autres voudraient

en faire plus. Que les premiers sachent que si leur vicariat est fait de beaucoup de

travail, leur ministère pastoral futur en exigera autant, si ce n'est plus (1 Tim 4:10).

Si plusieurs vicaires d'un même pasteur expriment auprès des autorités du séminaire

des plaintes justifiées, celles-ci pourront en aviser le président du Synode ou du district

qui s'en entretiendra avec le pasteur en question et prendra les initiatives qui

s'imposent. En cas de conflit de personnalités entre pasteur doyen et vicaire, c'est à ce

dernier, qui est le plus jeune, de céder (1 Pi 5:5).

Un vicaire peut avoir plus de dons que son pasteur-doyen (homilétique, contact social,

talent d'organisateur, etc.). Il combattra tout sentiment de supériorité (1 Cor 4:7). Qu'il

agisse aussi selon 1 Thess 513. Il y a toujours à apprendre chez un pasteur, ne serait-ce

qu'en vertu de son expérience pastorale. Le pasteur peut avoir par ailleurs besoin d'un

tel vicaire plus doué que lui.

Et si le vicaire découvre chez son pasteur-doyen de la négligence ou du laisser-aller? Il

lui faudra d'abord distinguer entre les critères qu'il s'est fixés lui-même et ceux exigés

Page 203: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

203

par Dieu dans sa Parole. Cf 1 Tim 5:1. Le vicaire ne doit en aucun cas s'opposer au

pasteur, lui résister, dresser sa paroisse contre lui en le critiquant ouvertement. Si le

pasteur est réellement un ministre indigne, le vicaire ne pouvant travailler auprès de lui

demandera à ceux qui sont responsables de son vicariat de le relever de ses fonctions (1

Tim 5:22). Ce sont des cas d'exception bien rares. En général, on attend d'un vicaire

connaissant de telles difficultés qu'il consacre les quelques mois de son vicariat à servir

fidèlement la paroisse qui a requis ses services.

Que faire, si les paroissiens se plaignent devant lui de leur pasteur? Refuser de les

écouter, car les écouter en les approuvant serait une transgression du 8

commandement. Leur rappeler ce commandement et Mt 18:15 ss. Qu'ils parlent avec

leur pasteur et, si nécessaire, avec la paroisse et le président du district. Il faut

réprouver toute diffamation et prendre, autant que faire se peut, la défense du pasteur

selon les exigences du 8 commandement.

Dignité: C'en est fini avec la vie d'étudiant, avec ses excentricités et parfois son

laisser-aller. Le vicaire doit avoir le comportement pastoral que la paroisse attend de

lui. Eviter aussi l'autre extrême: l'orgueil et l'arrogance.

Le vicaire observera aussi la discrétion, voire le secret professionnel, si les paroissiens

lui font des confidences. Par contre, il n'est pas tenu à ce secret professionnel face au

pasteur qui porte la responsabilité de la paroisse.

Le pasteur-doyen:

Avoir un vicaire est un privilège et une responsabilité. Un vicaire occasionne du travail,

mais soulage aussi. On ne recevra pas un vicaire comme pasteur assistant, mais comme

Page 204: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

204

un étudiant qui achève sa formation et se prépare au ministère. Il a besoin d'être guidé,

conseillé, instruit.

On élaborera avec lui un emploi du temps, lui donnera des tâches précises et exigera

qu'il s'en acquitte. On l'encouragera, l'exhortera, au besoin lui prodiguera des mises en

garde. Le tout avec amour et patience. On l'aidera dans l'exégèse des textes de sermons,

discutera avec lui ses plans de sermons, puis les sermons tout entiers, puis la façon dont

le vicaire les a prononcés. On le fera assister aux cours de catéchisme, études bibliques

et visites de paroissiens, puis lui demandera d'y prendre la parole, enfin d'en prendre

l'initiative, avec des bilans réguliers.

Le pasteur-doyen fera son rapport au séminaire et donnera son appréciation sur le

vicaire. Celui qui a déjà travaillé avec plusieurs vicaires est en mesure de déceler des

faiblesses et des lacunes dans la formation donnée au séminaire.

Il sera procédé à la présentation du vicaire à la paroisse. Cette présentation s'impose du

fait que le vicaire y exerce un ministère, même s'il est limité dans le temps. Au cours de

la cérémonie, on lui rappellera ce qu'on attend de lui, la paroisse sera témoin de ses

promesses et le pasteur expliquera à cette dernière quelles sont ses obligations à son

égard. Cf. un formulaire de présentation de vicaire in A. Schuetze, The Shepherd under

Christ, p. 386.

Il ne faut pas que, face aux talents et dons du pasteur-doyen, le vicaire fasse un

complexe d'infériorité et se considère comme inapte au ministère. Dieu peut utiliser les

plus humbles de ses serviteurs, comme il sait accorder les dons qu'on lui demande dans

la prière.

Le vicaire ne modèlera pas non plus sa première paroisse à l'image de celle où il a fait

Page 205: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

205

son vicariat (par exemple par la création hâtive et précipitée de tous les comités, le

lancement intempestif de toutes les activités qu'il y a connues). Mais il faut d'abord faire

connaissance avec cette paroisse et ses possibilités, et ensuite essayer progressivement

de lui donner plus d'organisation et de dynamisme. Il ne faut pas non plus céder à un

sentiment de frustration, si la paroisse de l'ancien vicaire est plus petite, plus humble,

plus pauvre que celle dans laquelle le vicariat a été effectué. Il faut y faire une œuvre

utile et féconde avec les moyens dont on dispose.

Le vicariat est une époque très importante dans la vie d'un futur pasteur: privilège

d'annoncer la Parole de Dieu (Eph 3:8), possibilité de seconder utilement un pasteur

(Eph 2:10), initiation à la cure d'âme, prise de contact avec les multiples aspects du

ministère pastoral, possibilité d'apprendre beaucoup auprès d'un pasteur expérimenté,

etc.

Il est nécessaire d'orienter le vicaire en lui présentant et décrivant la paroisse (histoire,

situation présente, particularités, problèmes spécifiques, etc.). Procéder aussi à une

répartition des tâches, en lui confiant par exemple la responsabilité de l'école du

dimanche, du groupe de jeunes. Lui préciser dans quelle mesure il secondera le pasteur

dans les autres activités.

On fera avec le vicaire un certain nombre de visites de type différent (malades,

marginaux, chrétiens en difficulté), pour l'initier de façon pratique, avant de lui laisser le

soin de faire des visites tout seul, à la place du pasteur.

Consultations fréquentes entre le pasteur-doyen et son vicaire. Tenir compte du fait

qu'un vicaire a besoin, au début tout au moins, de beaucoup de temps de préparation

(sermons, visites, catéchismes). Donc, ne pas lui demander de trop, être progressif dans

sa mise au travail. Le vicaire utilisera ces entretiens pour parler avec le pasteur des

Page 206: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

206

expériences faites, des difficultés rencontrées, des échecs essuyés. Le pasteur les

utilisera pour conseiller son vicaire, l'encourager, corriger ses défauts. Mais ne pas

tenter de modeler le vicaire selon sa propre image. Créer un climat de confiance, pour

que le vicaire n'hésite pas à consulter son pasteur-doyen et à se décharger devant lui de

ses fardeaux et soucis. Etre bon et compréhensif comme Jésus le fut avec ses disciples,

l'apôtre Paul avec Timothée et Tite. Donner au vicaire un bon exemple, en étant un

modèle de serviteur du Christ.

Il peut arriver qu'un étudiant entame son vicariat sans être encore sûr de devenir

pasteur. Cette incertitude n'est pas coupable en soi. Le vicariat doit l'aider à la

surmonter. Il n'est pas question toutefois que le pasteur exerce une pression dans ce

sens, mais il l'exhortera à bien s'acquitter de ses charges pastorales, pour que le vicaire

réalise le grand privilège que constitue la possibilité de prêcher l'Evangile, d'instruire

dans la foi chrétienne, de consoler les malades, les chrétiens en difficulté et les

mourants, etc. C'est la seule façon de fortifier le désir d'un jeune homme de devenir

pasteur (1 Tim 3:1). L'exemple donné par le pasteur est déterminant. S'il se plaint

toujours de son ministère, ou si sa femme s'en plaint toujours, si ses relations avec sa

paroisse ne sont pas bonnes, il n'encouragera certainement pas le vicaire à devenir

pasteur. Par contre, l'exemple d'un ministère fécond, consacré, exercé dans la foi en

Dieu et ses promesses peut être déterminant.

Ne pas exiger du vicaire qu'il soit parfait, un prédicateur modèle et le berger idéal. C'est

un débutant. Etre bon et patient, en se souvenant non seulement de ses lacunes

personnelles, mais aussi de ses propres débuts. Ne pas le reprendre en public, à moins

que cela ne s'impose. Si le vicaire a de graves lacunes, l'exhorter à les combler par le

travail, l'étude et l'application. S'il est franchement incompétent, en référer au

séminaire. S'il se rend durant son vicariat coupable d'une grave faute publique, la

paroisse peut être amenée, par l'intermédiaire du conseil presbytéral ou de l'assemblée

Page 207: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

207

paroissiale (en cas d'impénitence, ce sera même impératif) à se défaire de lui. Au

besoin, dans la mesure où le vicaire est membre en titre de la paroisse, il faudra

l'excommunier.

A la fin du vicariat, procéder à un bilan avec le vicaire. Lui montrer les progrès

accomplis dans tel ou tel domaine, lui révéler les lacunes qui subsistent, l'inviter à

exploiter tel ou tel don particulier. Cette mise au point peut l'encourager; elle est

toujours utile et salutaire. Faire un rapport de vicariat au séminaire. Son contenu est

confidentiel et ne sera pas nécessairement communiqué au vicaire.

Le vicariat est une excellente institution. Il profite

au vicaire lui-même: initiation au ministère, maturation du futur

pasteur, expériences fécondes;

au pasteur: un vicaire cause du travail, mais décharge aussi; sa

présence donne la possibilité de coopérer et de partager les

expériences;

la paroisse: elle peut en tirer un profit considérable, surtout si son

pasteur est surchargé ou s'il n'a pas de don particulier pour tel aspect

du ministère, par exemple le travail avec les jeunes;

au séminaire: ses étudiants mûrissent. D'autre part, la lecture des

rapports de vicariat lui est très profitable, en ce qu'elle lui permet

d'améliorer la formation des jeunes au ministère pastoral.

_________

Page 208: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

208

LE PASTEUR ET LES ARTS

Il est souhaitable que le pasteur ait de bonnes notions artistiques, capables de lui

assurer un bon goût et de dosner une dimension eshétique à son ministère. On songe

plus particulièrement à l'art oratoire, à celui de la composition littéraire et au sens pour

l'architecture, la peinture et la musique.

Concernant les arts, l'Eglise eut à surmonter deux obstacles: le judaïsme rigide façonné

par le pharisaïsme qui avait proscrit du culte toute image et tout objet artistique quel

qu'il fût, ce qui n'était pas le cas à l'époque des rois (cf. les 12 bêtes qui portaient le

bassin dans le temple, les fleurs de lis, le grand-voile séparant le Saint des saints du lieu

saint et sur lequel étaient tissés des chérubins. Cf. 2 Chron 3:7-17; 4:2-5.13; 5:7.8;

9:18.19. Les judéo-chrétiens de l'époque apostolique n'étaient donc pas habitués à l'art

cultuel. Quant aux pagano-chrétiens, habitués aux statues et à l'art sacré de leur

environnement, ils eurent tendance à les bannir comme impies par définition, quand ils

se tournèrent vers le christianisme.

Page 209: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

209

Enfin les persécutions des chrétiens dans l'empire romain rendirent l'expression

artistique impossible. Pourtant la cryptographie se développa de bonne heure au sein

de la chrétienté sous forme de représentations symboliques. On adjoignit au Christ et

aux douze apôtres des signes symboliques destinés à les identifier. Par la suite, la

vénération des martyrs amplifia cet art. Tandis que dans le Calvinisme on bannit toute

représentation picturale et le jeu des instruments de musique, la Réformation

luthérienne se contenta de libérer l'art cultuel de l'époque de tout ce qu'il avait

d'idolâtre et de contraire à l'Ecriture Sainte.

Quelques indications sommaires sur le mobilier de l'église:

Autel: Placé dans un chœur, aussi grand que possible et de préférence en pierre, il

rappelle que l'Eglise du Christ est fermement établie sur le fondement des apôtres et

des prophètes dont le Christ est la pierre angulaire.

Chaire: Occupant une place de choix dans l'église, elle sera si possible surélevée par

rapport à l'auditoire. Normalement à droite de l'autel quand on entre dans l'église (du

côté du lutrin qui sert à la lecture de l'Evangile), elle affirme par sa position même

qu'elle sert à la proclamation de la bonne nouvelle du salut en Christ. Placée à gauche

(du côté du lutrin de l'épître), elle symbolise la fonction didactique de l'Eglise. Il faut

qu'elle puisse être vue de partout et que sa localisation réponde aux règles de

l'acoustique.

Baptistère: Il n'est pas un simple meuble, mais occupe une place privilégiée, à un

endroit bien en vue, et devrait être de bonne taille, de manière à rappeler l'importance

du baptême dans la vie de l'Eglise et du croyant.

Page 210: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

210

Orgue: Instrument privilégié destiné à célébrer les louanges de Dieu. Il doit être de

qualité et apte à susciter le recueillement.

Bancs: Veiller à leur bonne disposition et à un minimum de confort. Prévoir, si possible,

la possibilité pour la paroisse de se mettre à genoux.

Eclairage: Suffisant et fonctionnel, il ne doit pas gêner les yeux. Pas d'exagération quant

aux lustres et aux chandeliers.

Couleurs liturgiques: Elles sont au nombre de cinq et correspondent aux différentes

périodes de l'année liturgique (vert, rouge, blanc, violet et noir). Quant aux couleurs de

la robe pastorale, on se conformera aux usages de sa paroisse, sans rien lui imposer,

conscient de ce qu'il s'agit d'un adiaphoron (Confession d'Augsbourg, Arft.VII, et

Formule de Concorde, Art. X).

Croix, crucifix, chandeliers, ustensiles eucharistiques, fleurs: Ce ne sont pas de simples

objets de décoration, mais ils constituent l'expression de l'amour et de la vénération des

chrétiens. Veiller à leur dignité et éviter toute surcharge.

Bibles d'autel et de chaire, recueils de cantiques et autres ouvrages: Ils doivent être

propres et en bon état. De même les troncs ou bourses, le cachet officiel de la

paroisse, le comptoir de livres, etc.

Cloches: Très importantes pour l'Eglise et son entourage, elles doivent donner un son

clair et beau, symbole de la voix de l'Evangile. Eviter les carillons électroniques.

Bulletins paroissiaux, certificats de baptême et de mariage, registres paroissiaux: Ils

doivent être propres et bien tenus.

Page 211: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

211

Locaux paroissiaux: Bien entretenus et décorés convenablement. Ne pas oublier de

belles images religieuses, porteuses d'un message pour les yeux et le coeur. Le

presbytère a en cela valeur d'exemple pour les demeures des paroissiens.

Hymnologie: Le pasteur doit être initié à l'hymnologie luthérienne, de manière à

apprécier ce trésor à sa juste valeur et à pouvoir éduquer sa paroisse et l'en faire

profiter.

__________

Page 212: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

212

L'ACCOMPAGNEMENT PASTORAL

DES

MOURANTS

La souffrance est le lot de tous les hommes dans l'économie actuelle de la chute. Tous font

notamment l'expérience de pertes et de déchirements, et il appartient au pasteur de venir en

aide à ceux de ses paroissiens qui passent par là. La cure d'âme auprès des mourants revêt un

double aspect: il s'agit d'aider celui qui est atteint d'une maladie incurable et qui sait qu'il va

mourir sous peu à assumer tous les sentiments et émotions que sa situa-tion génère et de le

préparer à la mort, et en même temps de soutenir et de consoler ses proches parents, à la fois

dans la perspective de la mort prochaine et au lendemain de celle-ci.

Page 213: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

213

L'AIDE AU MOURANT

Venir en aide aux mourants est l'un des aspects les plus difficiles du ministère pastoral. Il

s'agit pour le patient et pour le pasteur de faire face au dernier ennemi, la mort.

Affronter la mort n'est pas facile. D'autant plus qu'on vit dans un monde qui évacue la mort. Il

le fait en exaltant la jeunesse et la beauté. Les techniques médicales modernes permettent de

repousser toujours davantage cette échéance. D'autre part, le spectacle de la mort ne fait plus

partie de l'expérience ordinaire de la vie. La plupart des vieillards mènent une existence

autonome et ne vivent pas sous le même toit que leurs enfants. Les soins sont prodigués par

les infirmières et les travailleurs sociaux. Par ailleurs, on ne meurt plus guère chez soi,

entouré des siens, mais en milieu hospitalier. Les gens ne sont que rarement là pour assister

à l'agonie de leurs parents.

Par ailleurs, les médecins qui vivent la mort comme un échec ne disent pas volontiers la

vérité à leurs malades. Beaucoup de patients redoutent d'être diminués, voire défigurés par

la maladie, de dépendre des soins constants d'autrui.

Il est particulièrement difficile de mourir quand on a le sentiment d'avoir gâché sa vie.

Inversement, quand la vie qu'on mène a un sens et un but, il est plus facile d'affronter la mort

quand elle s'annonce. Il est donc important pour le pasteur de montrer à ses fidèles ce qu'est

le vrai but de la vie, de les encourager à mener une vie qui leur permette de s'épanouir

pleinement, et cette vie-là est vécue en communion avec Dieu, dans la foi en ses promesses et

dans la soumission à sa volonté (Eccl 12:13; Mt 22:37.39). Le Dr. Elizabeth Kubler-Ross,

grande spécialiste américaine de l'accompagnement des mourants, estime qu'il est capital

Page 214: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

214

que les gens vivent de manière à ce qu'ils n'aient pas, en regardant en arrière, à dire: "J'ai

gâché mon existence".

Le pasteur doit aussi instruire ses fidèles sur la mort. En aidant les gens à comprendre ce

qu'elle est, on les aide à l'assumer. La souffrance devient insupportable, quand elle n'a pas de

sens. Il faut savoir que la mort fait partie du cycle de la vie. Dieu ne l'a pas créée, mais elle est

le salaire du péché (Rom 6:23). Cependant le Christ l'a vaincue. Le chrétien ne subit donc pas

un échec en mourant, mais la mort est pour lui le moyen de déposer un corps souillé par le

péché pour pouvoir vivre en présence de Dieu, en attendant sa résurrection glorieuse. La

mort est l'entrée glorieuse dans la vie éternelle. Elle est donc pour le chrétien racheté un don

de Dieu. Ce n'est que par la mort que nous pouvons vivre en présence de Dieu. Le but de la

vie du chrétien est donc de tout faire pour mourir un jour dans la foi, afin que se réalisent

pour lui les promesses qui lui sont faites dans l'Ecriture. La mort du chrétien est une victoire

et non un échec, une victoire qu'il doit à celui qui l'a racheté en vainquant le péché, la mort et

l'enfer.

Pour aider les gens à mourir, il faut bien les connaître. Des études spécialisées semblent

prouver qu'on meurt comme on a vécu, que l'homme aura face à la mort les réactions et

attitudes qui sont les siennes quand il fait face, dans la vie, à l'adversité, au stress, à l'échec, à

un défi ou une perte.

Enfin, pour pouvoir utilement préparer les autres à la mort, il faut que le pasteur réfléchisse à

sa propre attitude à cet égard. Plus il sera lucide au sujet de ce que la mort lui inspire

personnellement, plus il sera en mesure de comprendre les autres, et notamment d'accepter

qu'ils expriment librement leurs sentiments à cet égard.

Page 215: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

215

Quelques éléments de réflexion:

1) Dire la vérité à celui qui souffre d'une maladie incurable:

Les médecins ne disent pas toujours la vérité à leurs malades, soit parce que cela les

contraint d'avouer leur échec et que cela leur fait donc peur, soit qu'ils pensent que la

connaissance de la vérité pourrait les traumatiser inutilement et abréger leurs jours. Il en va

de même de bien des proches parents bien intentionnés. Ils veulent protéger le malade d'une

mauvaise "nouvelle". Le pasteur ne devrait pas encourager cette attitude. La plupart des

mourants interrogés par le Dr. Kubler-Ross ont déclaré qu'ils auraient préféré savoir la vérité

à temps. Rien ne semble plus mal accepté que le sentiment que le médecin cache la vérité,

qu'il fuit le malade et évite tout contact avec lui.

En cachant la vérité à un patient, on lui interdit de mener à bien une tâche qu'il n'a pas

encore accomplie, de prendre ses dernières dispositions en faveur de sa femme, de ses

enfants ou de son Eglise, de demander pardon à quelqu'un à qui il a fait du tort, de faire ses

adieux à ceux qu'il aime ou de se réconcilier avec Dieu. En cachant la vérité, on nuit aussi au

climat de confiance qui est si important à ce moment. Les grands malades le sentent

parfaitement, lorsqu'on leur dissimule quelque chose. C'est à éviter à tout prix.

2) Savoir écouter:

Dieu nous a donné deux oreilles, mais une seule bouche. Peut-être peut-on en tirer la

conclusion qu'il faut écouter deux fois plus qu'on ne parle. D'autant plus que Dieu nous a

donné la possibilité de fermer la bouche, mais pas les oreilles. C'est à ne pas oublier. Trop

souvent on croit pouvoir tout régler par l'abondance de paroles. Une chose est certaine: on

ne peut pas répondre à une question avant de la connaître. Kubler-Ross signale que ce qui l'a

Page 216: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

216

toujours frappée, c'est que les membres du clergé se comportent généralement comme si

ouvrir une Bible ou un livre de prières était le seul moyen de communiquer avec des patients,

et qu'ils évitent trop souvent d'écouter ce qu'ils ont à dire, fuyant peut-être des questions

embarrassantes (Kubler-Ross, On Death and Dying, 1969, p. 226).

Le but du pasteur doit être d'aider les mourants à faire le nécessaire pour accepter l'idée de

la mort et partir en paix. Pour cela, il faut les écouter, détecter leurs besoins et les aider à les

satisfaire. Il n'est pas là pour leur dire ce qu'ils doivent ressentir ou ce qu'ils ont à faire,

encore moins pour leur imposer ses propres sentiments, mais pour les aider à assumer les

sentiments et les émotions qu'ils éprouvent.

3) Comprendre le patient:

Aider, c'est tout d'abord comprendre ce qu'éprouve l'autre. La plupart des mourants passent

par cinq phases: le déni, la colère, le marchandage, la dépression et l'acceptation. Cette

séquence cependant ne se vérifie pas toujours. Tous les mourants ne passent pas

nécessairement par ces cinq étapes. D'autre part, le temps qu'ils mettent à les franchir varie

considérablement de l'un à l'autre. Essayons de les analyser un peu.

a) Le déni:

La première réaction de celui qui réalise qu'il va mourir sous peu est le déni, comme le

montrent des réactions du genre: "Non, pas moi!", "Cela ne peut pas être vrai!" Il s'efforcera

de nier sa maladie ou sa gravité, mettra en doute le diagnostic, ou bien laissera entendre que

ce diagnostic ne lui fait pas peur. Il fera des plans tout à fait utopiques pour l'avenir,

désobéira à son médecin, fera preuve d'un optimisme irréaliste concernant l'opération qu'il

doit subir ou le traitement auquel il lui faut se soumettre, etc.

Page 217: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

217

Le déni est une chose à la fois bonne et mauvaise. Il est bon, car

il constitue un réflexe de défense permettant au malade de supporter le choc, en attendant de

trouver un mécanisme moins radical. Il ne faut donc pas renverser ces murailles de

protection. Il convient de respecter le besoin de nier du patient, du moment qu'on ne triche

pas avec lui.

Mais le déni est mauvais, si le patient refuse de sortir de ce stade. Dans ce cas, il faut essayer

de déterminer la part du patient et la responsabilité de son entourage. Le patient en effet

refuse souvent de franchir ce stade, quand il sent que le médecin et la famille nient l'évidence

et se complaisent eux-mêmes dans cette phase. Il dépend entièrement de son environnement

et a besoin de ceux qui l'entourent. Il nie donc sa maladie, quand il estime que son entourage

lui demande de le faire. Il suffit qu'il ait un partenaire avec qui parler ouvertement, pour qu'il

accepte de renoncer à cette attitude.

b) La colère:

La question "Pourquoi moi?" révèle que le patient en est au stade de la colère. Cette colère, il

la tourne contre son médecin dont il met en doute la compétence, contre les infirmières qui le

soignent, contra sa famille, son pasteur, voire Dieu lui-même. Il fait alors preuve d'amertume

et de rancune, se plaignant de tout et de rien, jalousant ceux qui se portent bien ou qui vivent

plus vieux. Parfois, la colère n'est qu'un appel à l'aide lancé par quelqu'un qui souffre d'une

grande solitude.

Il n'est pas facile de s'occuper de gens en colère. Suirtout quand cette colère se tourne vers

Dieu. Le pasteur étant son représentant, c'est généralement devant lui qu'elle se répand. La

colère contre Dieu est le plus souvent irrationnelle. Il faut le savoir et ne pas faire preuve

Page 218: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

218

d'une inutile dureté. Qu'on permette au patient de l'exprimer. Généralement il comprendra

son erreur et demandera pardon à Dieu.

Très souvent le patient pose des questions: "Pourquoi moi?", "Qu'ai-je fait pour mériter

cela?" Le pasteur pense généralement qu'il doit y répondre, alors que le malade n'exige pas

toujours de réponse, mais que poser ces questions est souvent pour lui un moyen de ventiler

sa colère. Généralement, elles n'ont pas d'autre réponse que la vérité biblique selon laquelle

nous vivons dans l'économie de la chute. Ce qui satisfait ou ne satisfait pas l'intéressé. Mais

que le pasteur n'imagine pas qu'il doive prendre la défense de Dieu et avoir une réponse à

toutes les questions. Il y a des choses qui nous sont cachées. Qu'il permette au malade de

s'exprimer, sans lui tomber dessus, sachant que ce genre de débordement fait partie, lui

aussi, des mécanismes de défense et permet de trouver un soulagement. Le pasteur peut

toujours, par la suite, quand son malade s'est exprimé librement, lui dire en toute simplicité

et avec tout le calme voulu ce que son attitude a d'irrationnel.

Il existe une forme de colère que le malade tourne contre lui-même et qui se manifeste par un

sentiment de culpabilité. Beaucoup de malades incurables ont le sentiment que le Seigneur

les châtie pour quelque péché particulier. Ce sentiment de culpabilité est, lui aussi, la plupart

du temps irrationnel. Il est sûr que nous sommes tous coupables devant Dieu; mais il est sûr

aussi que nous pouvons vivre de son pardon et nous en réjouir. Il faut donc annoncer au

chrétien mourant toutes les consolations de l'Evangile. S'il souffre d'un sentiment légitime de

culpabilité à l'égard d'un homme pour l'avoir offensé et ne pas encore s'être réconcilié avec

lui, le pasteur devra tout faire pour l'aider à le surmonter par la repentance et la

réconciliation.

Page 219: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

219

c) Le marchandage:

Le malade incurable cherche volontiers à marchander avec Dieu. Il est prêt à accepter sa

volonté, mais à condition que le Seigneur lui permette encore de vivre un certain temps, pour

qu'il puisse achever un travail, vivre encore quelques mois auprès de sa femme ou de son

mari, assister au mariage d'un enfant ou au baptême d'un petit-enfant.

Le marchandage est un moyen d'ajourner l'inéluctable. Le patient qui marchande le fait

généralement parce que Dieu n'a pas réagi à ses accès de colère. La colère ayant échoué, on

espère obtenir quelque chose en lui parlant sur un ton gentil et en lui proposant une sorte de

contrat.

L'exemple classique est celui du paroissien qui a négligé d'aller au culte. Il dira volontiers à

Dieu: "Seigneur, si tu me permets de vivre encore un peu, je te promets que tu me verras tous

les dimanches à l'Eglise". L'intéressé reconnaît son indifférence et sa tiédeur passées, estime

que sa maladie en est une conséquence et promet de se corriger s'il en réchappe.

La phase du marchandage est utile, car elle montre que le patient a su faire un bilan. Il

convient donc de respecter le besoin de passer par elle. Il ne faut pas cependant qu'il

s'imagine pouvoir apaiser Dieu par des promesses. Dieu n'est réconcilié avec nous que par la

mort de son Fils et toutes les bénédictions passent par lui. Si Dieu accorde une "rallonge" à un

malade condamné par la médecine, il le fait par sa seule grâce et non en vertu d'un

marchandage. On se souviendra de l'exemple de David (2 Sam 12:15-23). L'enfant que

Bathscheba lui avait donné était mourant. Le roi s'imposa un jeûne sévère dans l'espoir que

Dieu l'épargnerait. Mais quand il mourut, David interrompit son jeûne, comprenant qu'il

n'avait plus de raison d'être.

Page 220: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

220

d) La dépression:

Beaucoup de malades incurables passent par elle. Elle revêt deux formes. Il y a tout d'abord

la dépression liée au passé: le malade se plaint de n'avoir pas pu faire un tas de choses,

d'avoir échoué en ceci ou en cela, d'avoir rompu des liens, commis de mauvaises actions. Le

pasteur peut offrir son aide de bien des façons, en consolant le malade à propos de buts qu'il

n'a pas atteints, ou bien en provoquant une réconciliation.

La dépression peut aussi s'orienter vers l'avenir: la perspective de devoir quitter les siens ou

de laisser une épouse poursuivre son chemin toute seule, l'éventualité d'une déchéance

physique, la peur d'être une charge pour la famille peuvent abattre le malade. Il ne faut pas

tenter de briser cette dépression avec des argu-ments faciles qui risquent d'être peu

acceptés. Elle est même nécessaire en ce qu'elle permet au mourant de faire un "travail de

deuil" indispensable. C'est ce travail de deuil qui permet de passer à la phase de l'acceptation.

Il faut savoir être présent et écouter, pour déterminer les besoins physiques, spirituels ou

psychiques réels du patient.

e) L'acceptation:

C'est le dernier stade, auquel tous cependant n'accèdent pas. On n'y parvient que si on a pu

achever certaines choses comme régler tel ou tel problème, se réconcilier avec tel ou tel

membre de la famille ou ami, et si on arrive à se soumettre à la volonté de Dieu et à accueillir

la mort. C'est à ce prix que celle-ci est non pas une défaite, mais une victoire et qu'on quitte

ce monde dans la paix avec Dieu, les autres et soi-même, en disant: "J'ai combattu le bon

combat, j'ai achevé la course, j'ai gardé la foi" (2 Tim 4:7).

Cette phase est à la fois réconfortante et frustrante pour l'entourage. Réconfortante pour des

raisons évidentes, frustrante parce que le malade, prêt à mourir, ne désire pas toujours des

Page 221: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

221

visites et ne souhaite pas toujours parler. Il s'est détaché de ce monde, souvent même de ceux

qu'il a aimés. Alors ces derniers sont parfois choqués, parce qu'ils ne comprennent pas ce qui

se passe. D'autres veulent forcer le malade à continuer à se battre pour vivre, alors qu'il ne

désire plus qu'une chose, mourir. Il veut partir. Il appartient donc à la famille de le laisser

partir. Quand Jacob fut prêt à mourir, il convoqua ses enfants, les bénit et leur fit ses adieux

(Gen 49).

On ne confondra pas acceptation et résignation. Ce n'est pas la même chose. La résignation

est l'attitude de celui qui subit quelque chose sans y acquiescer, malgré lui. L'acceptation au

contraire traduit le consentement.

Quelques précisions supplémentaires:

Les mourants sont comme tout le monde: ils ne disent pas toujours ce qu'ils pensent et

ressentent. Ils s'expriment parfois de façon voilée. Un tel dira à son entourage ou à son

pasteur: "Cela fait quinze jours que je suis à l'hôpital et je n'ai fait aucun progrès" non pas

pour s'en plaindre, mais dans l'espoir d'obtenir des informations sur son état.

Les grands malades sont souvent hantés de peurs: peur de devoir mourir seuls, peur de

souffrir ou d'être asphyxiés, peur d'être défigurés par la maladie, peur de perdre son

indépendance ou de sombrer dans la folie, etc. A cela s'ajoutent des appréhensions de toutes

sortes, celle d'être à charge à autrui, l'anxiété qu'engendre la perspective de la séparation, les

soucis pour l'avenir de la femme ou des enfants, l'impression que la vie n'a pas de sens

maintenant que la mort est imminente.

On se souviendra aussi que le mourant est encore un être vivant. Il apprécie donc qu'on lui

parle de sa famille, du travail, de tout ce qui l'a intéressé, voire passionné dans la vie. On se

Page 222: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

222

gardera cependant de parler de futilités, de choses sans importance, car le patient

interprétera cela comme une inaptitude à faire face à la réalité qu'est la mort imminente.

4) L'aide à la famille:

Assister un mourant, c'est aussi assister sa famille. Tâche difficile, mais nécessaire. La proche

famille éprouve souvent dans ce cas un profond sentiment de culpabilité. On se reproche

d'avoir mal agi, de n'avoir pas témoigné au mourant assez d'amour et de compréhension. On

se reproche aussi parfois de lui souhaiter une mort rapide et sans souffrances. Le mieux que

le pasteur ait à faire est de les écouter et de les aider à assumer leurs sentiments.

Bien des familles ont des problèmes de communication, et ces problèmes s'intensifient

considérablement en cas de maladie incurable et de décès imminent. On veut protéger le

mourant et on se réfugie, pour ce faire, dans le silence. Il faut donc encourager les gens à

exprimer ouvertement et honnêtement leurs émotions, même quand celles-ci ont le pouvoir

de mettre mal à l'aise ou qu'elles sont ressenties comme saugrenues. Il faut savoir accepter

les sentiments d'autrui sans les juger. Quoi qu'il en soit, on ne peut aider quelqu'un que si on

sait exactement ce qu'il a dans le coeur et ce qu'il ressent au fond de lui-même.

5) Les consolations de la Parole de Dieu:

Il faut apporter aux mourants le secours et le réconfort de la Parole de Dieu, en tenant

compte de leurs besoins particuliers. On trouvera des textes bibliques appropriés à chaque

situation. Le diagnostic d'une maladie incurable est un choc violent pour le patient et les

siens. On attend donc beaucoup du pasteur. Là où le médecin ne peut plus que retarder

Page 223: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

223

l'échéance, le pasteur est capable d'offrir une thérapie d'un autre ordre, mais qui apporte une

consolation certaine et transforme la mort, changeant la défaite en une victoire. Pour ce faire,

il faut qu'il soit honnête et qu'il encourage l'honnêteté, qu'il accepte les sentiments tels qu'ils

s'extériorisent devant lui, et qu'il applique la Parole de Dieu avec compréhension et amour.

Le pasteur encouragera aussi d'autres, membres de l'Eglise ou conseillers presbytéraux, à

rendre visite au mourant. Parfois ces visites sont expressément souhaitées par le patient. Il

peut même arriver que la visite d'un certain paroissien apporte plus de réconfort que celle

du pasteur. Celui-ci n'en prendra pas ombrage. Un mourant a droit à toutes les formes de

consolation auxquelles il aspire.

L'AIDE A LA FAMILLE EN DEUIL

Le décès de son conjoint est sans doute la perte la plus douloureuse qu'une personne puisse

subir. D'autres décès sont également particulièrement éprouvants. L'accompagnement

pastoral des familles en deuil est toujours difficile, mais il est nécessaire et très apprécié. Les

principes que nous avons énoncés pour la cure d'âme auprès des mourants s'appliquent

également ici.

Le deuil fait partie de la vie, car la perte d'un être cher en fait partie. De même que l'homme

doit apprendre à bien vivre, de même il lui faut apprendre à bien assumer le deuil. Ce n'est

pas facile, car les occasions ne sont pas si nombreuses que cela. D'autre part, les enfants sont

souvent protégés contre le deuil par leurs parents. Des études révèlent qu'un deuil mal

assumé peut engendrer des maladies (troubles fonctionnels, cancer, ulcère, maladies

mentales, etc.). Bien des actes hostiles à la société et des comportements délinquants sont le

Page 224: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

224

fait de gens qui ne sont pas parvenus à surmonter leur deuil après un décès très mal vécu.

Nombreux sont les jeunes délinquants qui ont perdu un parent en bas âge et dont le

comportement est une manifestation de colère contre ce qu'ils perçoivent comme une

injustice, contre des événements qui les ont privés de sécurité et de bonheur.

La cure d'âme auprès de la famille en deuil est fonction de la nature et des circonstances du

décès, des sentiments et réactions des proches parents et, dans une certaine mesure aussi,

des relations que le pasteur entretient avec la famille.

On demande parfois au pasteur d'aller annoncer la nouvelle du décès à la famille du défunt. Il

ne faut pas qu'il se dérobe à cette mission dont on le charge un peu en raison de son

ministère ou de la confiance particulière qu'on a en lui. Il s'en acquittera d'une façon simple,

directe et calme, sans recourir à des formules ambiguës. Il faudra ensuite qu'il accepte la

réaction émotionnelle suscitée par la nouvelle du décès et qu'il apporte un réconfort

approprié.

Les funérailles devraient, partout où cela est possible, avoir lieu dans le cadre et donc dans

la chapelle de la paroisse. Elles sont à la fois un culte rendu à Dieu et une confession de la

foi et de l'espérance chrétiennes. Quand l'Eglise enterre ses fidèles, elle affirme sa foi en la

victoire sur le dernier ennemi, la mort. Celle-ci constitue la prédication la plus éloquente de la

Loi, car elle est selon l'enseignement de la Bible, le salaire du péché. Son pouvoir sur les

pécheurs est universel. Personne n'y échappe. Quand la mort entre dans une maison, ceux

qui portent le deuil songent à leur propre mort et à leur destinée éternelle. Le moment est

donc propice pour annoncer ce que la Parole de Dieu révèle au sujet de la vie, de la mort et de

l'au-delà. Les funérailles chrétiennes sont le lieu privilégié pour cela. Elles sont aussi en

particulier l'occasion d'affirmer ce que croit et confesse l'Eglise et d'annoncer la nécessité

pour chaque homme de se repentir et de se convertir au Christ. Pour que l'Eglise soit crédible

avec son témoignage, le pasteur doit bien sûr éviter d'enterrer toute personne qui n'a pas

confessé la foi chrétienne de son vivant ou, à défaut, sur son lit de mort.

Page 225: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

225

Le sermon d'enterrement doit toujours annoncer la Loi et l'Evangile, affirmer l'universalité

de la malédiction du péché et de la condamnation qu'il entraîne, et proclamer le pardon des

péchés et la victoire sur la mort et l'enfer par la foi en Christ. Mourir pour un chrétien, c'est se

séparer de ce corps corruptible pour aller chez le Seigneur, et cela dans l'attente de la

résurrection des morts.

Les gens qui portent le deuil éprouvent des sentiments divers au moment du décès et après

lui. Chacun le fait à sa façon en fonction des relations qu'il a entretenues avec le défunt, de la

nature et des circonstances du décès, de ses particularités émotionnelles et d'expériences

semblables vécues dans le passé.

Les différentes phases du deuil:

1) Le choc et le déni:

Apprendre le décès d'un être aimé suscite toujours le choc, que ce décès ait été pressenti ou

qu'il soit inattendu. La première réaction est souvent l'absence d'une manifestation de

sentiments, l'indifférence ou la négation. Il ne faut pas s'en offusquer. C'est un mécanisme de

protection temporaire destiné à absorber la souffrance causée par le décès. En réagissant

ainsi, on se donne le temps de "digérer" la mauvaise nouvelle.

2) Les malaises physiques:

Ceux qui portent le deuil se plaignent souvent de malaises de toutes sortes (rhumes, troubles

fonctionnels et surtout digestifs, insomnies, difficultés à se concentrer, crises de larmes,

Page 226: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

226

logorrhée, etc.). Cette phase est généralement assez courte, mais peut cependant s'étendre

sur des mois. Quelques bons conseils d'hygiène (diététique, activités physiques) sont utiles. Il

faut veiller en particulier à ce que ceux qui portent le deuil ne se réfugient pas dans l'alcool

ou la prise intempestive et anarchique de médicaments.

3) La colère:

Ceux qui portent le deuil sont souvent amers, voire en colère contre le défunt, eux-mêmes, le

pasteur, la société en général et Dieu lui-même. Il convient de ne pas dramatiser. C'est encore

un réflexe de défense, une façon d'exprimer une frustration parce qu'on a subi une perte,

qu'on doit vivre une situation douloureuse qu'on n'a pas pu contrôler.

4) Culpabilité:

C'est le sentiment le plus répandu chez ceux qui portent le deuil. Il s'exprime par des phrases

du genre: "Si j'avais fait ceci ou cela, il (ou elle) ne serait pas mort", "Je n'ai pas fait mon

devoir", "J'aurais dû lui témoigner plus de patience et d'amour". La mort supprime toute

possibilité de réconciliation. Le sentiment de culpabilité au moment d'un décès est

généralement irrationnel. Il peut aussi être légitime et fondé. Dans ce cas, le pasteur sait ce

qu'il a à faire pour aider les gens à le surmonter.

Quand l'agonie a été particulièrement longue et douloureuse, la famille éprouve un

soulagement le jour du décès. Ce sentiment de soulagement peut en générer un autre, le

sentiment de culpabilité. Cela se comprend, et il faut tout faire pour permettre aux gens de le

surmonter.

Page 227: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

227

5) Dépression:

Les gens qui portent le deuil passent par une phase de déprime: crises de larmes, sentiment

de solitude, peur pour l'avenir, perte d'identité pour celui que la mort prive de son rôle de

mari, de femme ou de parent. On ne se sent plus nécessaire, désiré ou utile. On se réfugie

volontiers dans le sommeil, l'inactivité, quand ce n'est pas dans les médicaments ou les

drogues de toutes sortes. Certains ont des pensées suicidaires. Il faut tenir compte de tout

cela et apporter une aide faite d'affection et de compréhension, en sachant que c'est là

généralement une phase transitoire.

6) Réconciliation:

C'est la dernière phase: la perte de l'être aimé est acceptée, le chagrin est en grande partie

surmonté, l'intéressé a retrouvé un sens à la vie. On accepte finalement de vivre sans l'être

aimé qu'on a perdu. Le sourire et la bonne humeur sont revenus. On n'est plus rivé au passé,

mais on pense au présent et à l'avenir. La souffrance est là, mais la vie continue.

Le pasteur fera tout pour aider ceux qui portent le deuil à accéder aussi vite que possible à

cette dernière phase, sans pour autant sous-estimer leur chagrin et les faire progresser à un

rythme donné. Les liens qu'on entretenait avec le défunt doivent se convertir

progressivement d'une relation de présence en une relation du souvenir. Il faut accéder à une

nouvelle identité basée sur une vie sans le défunt et qui a une signification nouvelle. Le temps

y est pour beaucoup. A lui seul il guérit, quoi qu'on en dise, beaucoup de plaies; il possède

une vertu thérapeutique en soi. Mais il va de soi que les promesses de l'Evangile concernant

la vie éternelle et les retrouvailles dans le ciel aident par-dessus tout le chrétien en deuil à

accepter la perte de l'être aimé et à se réconcilier avec ce qui lui est arrivé.

Page 228: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

228

On pense de nos jours que le travail de deuil prend environ deux années. Le temps requis

dépend bien sûr de nombreux facteurs objectifs (nature et circonstances du décès, situation

familiale et sociale de celui que frappe le deuil) et subjectifs (liens avec le défunt et

constitution psychique). Il n'existe pas de normes à ce sujet, et chacun doit vivre son deuil à

sa façon. La période la plus critique est certainement le premier mois après le décès; ensuite,

les symptômes du deuil s'atténuent progressivement et mettent, selon les individus, plus ou

moins de temps à disparaître.

Il existe des deuils aggravés, et deux facteurs y contribuent: le conditionnement social qui

nous enseigne à supprimer la souffrance et la douleur, et notre manque d'expérience

concernant le processus et les mécanismes du deuil. On distingue entre quatre catégories de

deuils aggravés:

a) L'absence de chagrin véritable due à une situation de choc et de déni dont on n'arrive pas à

sortir.

b) La distorsion du deuil par une colère ou un sentiment de culpabilité insurmontables.

c) La somatisation par des troubles durables qui n'ont pas d'origine fonctionnelle.

d) Enfin, il y a le deuil chronique de celui qui s'efforce à tout prix de maintenir le défunt en

vie, en faisant une fixation sur sa personne et sur les objets qui lui appartenaient. L'intéressé

rumine son deuil, et le fait parfois parce qu'il pense qu'il est tenu de le faire, pour montrer à

quel point il aimait le défunt.

C'est en général le refuge dans une phase particulière du deuil dont on refuse de sortir, qui

indique qu'on a affaire à un deuil aggravé. La tristesse qui envahit la personne en deuil quand

Page 229: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

229

viennent des anniversaires ou des jours de fête, les crises de larmes à l'église, le fait de parler

excessivement du défunt ne sont pas en soi des symptômes de deuil aggravé. Dans certains

cas, le pasteur n'hésitera pas à orienter les intéressés vers un psychothérapeute compétent.

Rares sont en effet les pasteurs suffisamment formés par leurs études et par leur expérience

pastorale pour faire face à ce genre de situation.

La proclamation constante dans la paroisse de ce qu'enseigne la Bible au sujet de la grâce

divine, du pardon, de la mort, de la résurrection et de l'éternité est sans doute le moyen par

excellence pour préparer les chrétiens à faire face à leur propre mort et au départ de ceux

qu'ils aiment. C'est de la sorte qu'on fait grandir les chrétiens dans la connaissance et dans la

foi, qu'on les assure de la présence divine et qu'on les aide à assumer leurs émotions et à

contrôler leurs craintes et leurs appréhensions.

Le pasteur s'efforcera d'être aussi un ami attentionné, bénéfi-ciant de la confiance de ses

paroissiens en détresse. Il invitera les membres de sa paroisse à faire de même, avec tact et

discrétion.

Voici, pour terminer, quelques conseils tout à fait pratiques à l'usage du pasteur et des

paroissiens:

- Chercher le contact et le garder.

- Ecouter, avant de parler.

- Ecouter beaucoup et parler peu.

- Eviter les clichés et les réponses faciles.

Page 230: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

230

- Etre authentique.

- Etre pratique, ponctuel et efficace (préparer un repas,

nettoyer la maison, faire des courses, en un mot, se rendre utile).

- Encourager d'autres à rendre visite aux personnes en deuil.

- Accepter le silence.

- Ne pas questionner inutilement sur les circonstances du décès.

- Consoler en particulier les enfants de la famille, qui sont

généralement les grands oubliés.

- Ne pas parler d'une façon anodine de tout et de rien. La personne

en deuil ressentirait cela comme la volonté délibérée de la détourner

de ce qui la préoccupe.

- Permettre à celui qui porte le deuil de faire son "travail de deuil" à

son rythme.

- Inviter, le moment voulu, la personne en deuil à sortir de sa

maison, à manger chez soi, à aller au spectacle. L'orienter vers une

activité nouvelle.

- Envoyer une carte, un petit cadeau.

- Lui remettre l'enregistrement d'un sermon ou d'un culte.

Page 231: THEOLOGIE PASTORALEpresencelutherienne.org/blog/wp-content/uploads/2012/06/...Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss 5 Avertissement au lecteur: Les pages qui suivent ne sont en

Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss

231

- Intercéder dans le culte pour ceux qui portent le deuil et inviter les

paroissiens à faire de même chez eux.

Le pasteur, chargé dans son ministère de consoler ceux qui souffrent, fera bien de

réfléchir souvent à ces paroles de l'apôtre Paul: "Béni soit Dieu, le Père de notre

Seigneur Jésus-Christ, le Père des miséricordes et le Dieu de toute consolation, qui nous

console dans toutes nos afflictions, afin que, par la consolation dont nous sommes

l'objet de la part de Dieu, nous puissions consoler ceux qui se trouvent dans quelque

affliction! Car de même que les souffrances de Christ abondent en nous, de même notre

consolation abonde par Christ. Si nous sommes affligés, c'est pour votre consolation et

pour votre salut. Si nous sommes consolés, c'est pour votre consolation, qui se réalise

par la patience à supporter les mêmes souffrances que nous endurons. Et notre

espérance à votre égard est ferme, parce que nous savons que, si vous avez part aux

souffrances, vous avez part aussi à la consolation" (2 Cor 1:3-7).

La condition de l'homme dans ce monde requiert la souffrance. C'était vrai pour Paul.

Cela l'est aussi pour tous les pasteurs et pour tous les chrétiens. Mais Dieu console les

pasteurs, pour qu'ils puissent consoler à leur tour ceux qu'il a confiés à leurs soins.

__________