Upload
others
View
1
Download
0
Embed Size (px)
Citation preview
Dr Wilbert Kreiss
COURS
DE
THEOLOGIE PASTORALE
© Centre de Documentation et d’Étude Chrétienne
Sherbrooke, 2010
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
2
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
3
COURS
DE
THEOLOGIE PASTORALE
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
4
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
5
Avertissement au lecteur:
Les pages qui suivent ne sont en aucune façon un manuel de théologie pastorale,
mais de simples notes servant de canevas aux cours. Qu'on veuille bien les
prendre pour cela et ne pas attendre d'elles une perfection dans l'exposé et dans
la rédaction à laquelle elles ne prétendent pas.
Sommaire
1
Introduction - Le pasteur en tant que personne - Le pasteur et sa famille - La
paroisse - La vocation - Le pasteur et le public - Le pasteur en chaire - Le pasteur à
l'autel - La liturgie.
2
L'administration du Baptême - L'administration de la Sainte Cène - L'éducation
chrétienne des enfants et la confirmation - Le mariage et problèmes
annexes - L'enterrement chrétien.
3
Les visites pastorales - La cure d'âme (multiples aspects) - L'accompagnement
pastoral des mourants.
4
L'évangélisation - La formation des laïcs à des responsabilités et des ministères dans
l'Eglise - Le culte paroissial - Les relations publiques de la paroisse - Le
stewardship - La diaconie et la bienfaisance.
5
Les biens de la paroisse - L'administration de la paroisse - Le pasteur et le Synode - Le
pasteur et son vicaire - Le pasteur et les arts.
Wilbert Kreiss
199O
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
6
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
7
INTRODUCTION
Le meilleur cours de théologie pastorale ne fera pas de l'étudiant un bon
pasteur. Il faut pour cela, selon la devise de Luther, "oratio, meditatio et
tentatio".
Au milieu de ses responsabilités, le pasteur peut se décharger sur Dieu (1 Pi
5:7) dont vient toute aptitude en général, et l'aptitude pour le ministère en
particulier (2 Cor 5.6). De même, il faut l'étude constante de la Parole de Dieu
(Ps 1A19:99; 2 Tim 3:14-17). Enfin, l'épreuve (Héb 12:6; 2 Cor 12:9). Luther a
beaucoup souffert; sans cela, il ne serait pas devenu le Réformateur qu'il a été
(2 Cor 1:3.4).
Cependant le cours de théologie pastorale n'est pas inutile. Il est même
nécessaire. Il expose certains principes bibliques et montre leur application
pratique qui tient compte de l'époque et du contexte. La théologie pastorale
est fondée sur la Bible et sur l'expérience pastorale vérifiée de nombreux
pasteurs éprouvés.
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
8
LE PASTEUR EN TANT QUE PERSONNE
(1 Tim 3:1)
Le Christ a institué le ministère de la Parole et des sacrements. Il a aussi dessiné dans
l'Ecriture le portrait de ceux qu'il appelle à son service. Nous en avons d'autre part des
exemples vivants en lui-même et dans les apôtres. Un mot sur les qualités les plus
importantes d'un pasteur, telles qu'elles sont présentées dans les textes bibliques qui
décrivent les serviteurs de Dieu (1 Tim 3:1-7; Tite 1:6-9):
Le pasteur doit être
a) humble:
Les pasteurs sont soumis aux mêmes tentations que les autres; surtout à l'orgueil. Ils
s'occupent en effet de choses saintes, prêchent aux autres leurs péchés et la repentance, sont
bergers de troupeaux, etc. Ils sont considérés comme des docteurs, des ambassadeurs du
Christ. Ils portent un titre, et jouissent traditionnellement de l'estime et du respect des gens.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
9
D'où la tentation, et donc la nécessité de l'introspection. Cf. l'humilité de Moïse et d'Esaïe
refusant la mission qui leur était confiée, de David priant Dieu de lui donner un coeur pur,
de Paul se considérant comme le grand des pécheurs. Il faut que cette humilité transparaisse
dans tout le ministère, en particulier dans la façon de prêcher et de faire de la cure d'âme. Il
faut que les gens s'approchent de nous avec la confiance avec laquelle ils allaient trouver le
Christ, même avec leurs péchés...
Le pasteur doit toujours être prêt à reconnaître ses fautes. Nous ne sommes pas infaillibles.
L'humilité, quant à elle, fait naître l'esprit de douceur si important dans l'exercice du
ministère pastoral, ainsi que le respect des opinions d'autrui.
b) fort dans la foi:
L'humilité ne suffit pas pour servir le Christ. Les pasteurs doivent être des croyants remplis
du Saint-Esprit. Il faut qu'ils aient fait l'expérience personnelle du salut par la foi en Christ. Il
leur faut cette sagesse qui découle de la foi.
Sans foi, nous sommes incapables de préparer un bon sermon, de consoler les malades,
d'avertir celui qui s'égare, de lutter contre Satan dans la paroisse, d'affermir le chrétien dans
la tribulation ou le désespoir, d'avoir une optique correcte du monde. Le christianisme n'est
pas une philosophie, un code éthique, une simple morale, mais un chemin de vie et de salut. Il
faut une foi vivante pour apporter aux hommes la réponse à la plus grande question qui soit.
c) un homme de cœur:
Nous alimenterons notre foi aux sources de la Parole de Dieu, dans une étude constante,
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
10
humble et croyante de la Bible, et dans la prière. Notre foi en grandira, et ainsi nous
deviendrons des hommes de cœur. Dans la famille (relations conjugales et parentales), dans
le monde (hommes de coeur devant les détresses du monde: famines, maladies, catastrophes,
incrédulité).
Et bien sûr, dans la paroisse: nous aurons un cœur pour les problèmes et difficultés de nos
paroissiens, des oreilles pour les entendre, de l'intérêt pour ce qui les préoccupe (souffrances
et joies). Nous ne céderons pas à l'amertume; nous ne nous comporterons pas en hommes
vexés, mais nous serons doux, patients... Nous nous contenterons de notre logement, de notre
salaire... Nous paierons nos dettes et serons honnêtes. Nous n'écouterons pas la médisance et
ne nous laisserons pas influencer par elle. Nous veillerons à l'harmonie entre notre vie privée
et notre ministère. Nous serons sincères et fidèles à la vérité.
Il s'agit aussi pour le pasteur de toujours être le même, à la maison, au bureau, en chaire,
dans la cure d'âme, au chevet du malade, en vacances, dans les réunions pastorales,
ecclésiales et sociales.
Il faut aussi qu'il garde le secret professionnel (les paroissiens ont bvesoin de cette
certitude). Politesse, courtoisie, affabilité, caractère sociable, homme aux relations faciles,
sans rudesse, impolitesse, sautes d'humeur, manquements à la bienséance, etc. Un pasteur ne
doit pas être un ours. Rien en nous ne doit empêcher les âmes d'accéder auprès du Christ.
Nous devons aussi ne jamais donner l'impression que le ministère est pour nous un métier
comme un autre, une façon de gagner notre vie. C'est une vocation, un sacerdoce!
d) capable d'enseigner:
On ne peut communiquer aux autres que ce qu'on sait soi-même. D'où la nécessité d'étudier
constamment. Avant tout l'Ecriture Sainte et les disciplines de la théologie, mais aussi des
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
11
disciplines d'intérêt général. Il ne faut pas que le pasteur soit un inculte ou que sa culture soit
médiocre. D'autre part, il faut qu'il grandisse aussi dans l'art de communiquer aux autres ce
qu'il a appris. Les hommes du monde ne devraient pas être de meilleurs pédagogues que
nous.
e) irréprochable:
Non pas sans péché, mais tel qu'on ne puisse l'accuser d'un péché particulier (1 Tim 3:7). Il
doit être en toutes choses le modèle de son troupeau. S'il a commis un grave péché, de
notoriété publique, il peut, même s'il s'en repent, être disqualifié pour le ministère. En tout
cas là où il a scandalisé. Un changement de poste s'avère alors nécessaire. En cas de récidive,
il faudra le suspendre définitivement de son ministère.
f) sobre:
Non seulement dans son alimentation, mais aussi par l'équilibre qu'il montre dans ses
jugements, émotions, impulsions.
g) vigilant:
Fidèle dans son enseignement et sa conduite (2 Tim 4:5), apte à discerner les dangers,
erreurs, etc.
h) tempéré:
Apte à contrôler et maîtriser ses instincts et appétits, notamment dans ses relations avec
autrui (1 Tim 5:2; 2 Tim 2:22).
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
12
i) ami des gens de bien:
Le terme est vaste. Sans se compromettre avec les incrédules et les faux docteurs, il s'agit de
ne pas ignorer ce qui est bien chez les autres. Par exemple, le dévouement de certaines
nonnes catholiques. En diffamant et en rejetant tout ce que font les autres, on ne fait
qu'élever des barrières et susciter l'incompréhension, la méfiance, voire l'hostilité des gens.
La justice civile existe!
k) hospitalier:
Dans les temps anciens, l'évêque devait recevoir beaucoup d'hôtes de passage. Les temps
ont changé, mais l'hospitalité reste capitale. Le presbytère doit être ouvert à quiconque y
frappe pour y trouver asile, conseil et aide.
Cf. aussi les qualités négatives énumérées dans 1 Tim 3:1-7; Tite 1:6-9 (pas cupide, pas
adonné au vin, pas coléreux, etc.).
Toutes les qualités requises des prédicateurs dans 1 Tim 3 et Tite 1, à l'exception de
l'aptitude à l'enseignement, sont exigées ailleurs dans la Bible de tous les chrétiens. Mais elles
doivent être présentes chez le pasteur à un degré supérieur. Les yeux sont tournés vers lui.
De sa conduite dépend l'image que beaucoup d'hommes se font de Dieu et donc de l'Eglise.
m) un connaisseur de l'homme:
Il faut connaître la psychologie humaine en général, plus précisément celle du Français
moderne qui est tributaire des circonstances familiales, politiques, économiques. D'où
nécessité d'entrer en contact avec lui, de connaître ses attitudes, ses intérêts, sa façon de
penser et de raisonner, ses habitudes. Jésus savait ce qui était dans le coeur de l'homme. C'est
pourquoi son ministère fut si efficace. Paul sut se faire tout à tous.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
13
Il faut donc être informé de l'actualité qui suscite les émotions et les réactions de gens et
détermine leur comportement. Ceci est vrai de tous les âges, et plus particulièrement de
l'adolescence. Malheur à celui qui s'imagine avoir appris durant ses 4 ou 5 ans de séminaire
tout ce qu'il faut savoir pour être un pasteur bon, utile et efficace!
Les gens sont plus cultivés à l'heure actuelle que jadis. Il faut donc que le pasteur veille
d'autant plus à sa propre culture. L'une des raisons pour lesquelles Paul semble avoir eu plus
de succès que les autres apôtres fut sans doute son niveau de culture.
n) en bonne santé:
Le ministère pastoral est éprouvant, quoi qu'en pensent les laïcs. Vie moderne très complexe,
stress, difficultés, déceptions, nécessité de faire face à bien des situations. Prêcher est
fatigant. La concentration dans la cure d'âme l'est aussi, ainsi que la direction des assemblées
paroissiales, la lutte contre Satan dans la paroisse, la recherche de paroissiens négligeants, le
passage en peu de temps d'un mariage à un enterrement, le changement souvent rapide de
situation, la diversité des caractères dans sa paroisse et parmi ses collaborateurs, etc.
D'où nécessité de soigner son corps et sa santé (alimentation, boissons, tabac, sommeil, repos
hebdomadaire, activités physiques). Danger du sédentarisme.
o) propre et soigné:
Les gens nous regardent comme des ministres du Christ. D'où la nécessité d'une bonne
présentation. Propreté, netteté (cols che chemises, cheveux, ongles, dents, pantalon repassé,
souliers cirés). Pas de laisser-aller sous prétexte qu'on veut être cool et dans l'espoir de
plaire aux jeunes!
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
14
LE PASTEUR ET SA FAMILLE
Le pasteur a un double devoir, familial et paroissial. Les presbytère sont une pierre de touche
pour le pasteur qui lui permet de vérifier son degré d'autodiscipline. Il doit pouvoir se
contrôler lui-même, avant de diriger sa famille et, pouvoir diriger sa famille avant de diriger
sa paroisse (1 Tim 3:4.5). Sa famille est donc le terrain où il peut exercer sa connaissance de
l'homme, sa compréhension des problèmes d'autrui et son tact pastoral.
Il doit prendre spirituellement soin de sa famille (culte familial, édification, instruction, etc.).
Il doit aussi se ménager des heures de détente qui constituent un tonique pour lui et les siens.
Sa maison doit être accueillante, hospitalière. Les paroissiens aussi bien que les étrangers
doivent s'y sentir les bienvenus et à l'aise. Il importe aussi que le pasteur sache se contrôler
aux heures difficiles de la vie de son foyer. La prière et le recours à la Parole de Dieu seront
son refuge.
Le pasteur et sa femme:
Prov 18:22; 19:14b. C'est ce qui dicte au pasteur le choix de son épouse. Il faut qu'elle soit
une femme de foi qui comprenne son ministère, l'épaule, le console, l'encourage. Elle doit par
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
15
ailleurs être humble, agréable, diligente, discrète, compréhensive... L'attitude et le
comportement du couple pastoral sont observés par la paroisse et par les gens du dehors.
D'où 1 Pi 3:7 et Eph 5:22. Les deux doivent inspirer le respect et l'affection par leur
comportement conjugal. Un foyer bien tenu, une famille solide, pieuse et bien organisée
témoignent de la foi, de l'autodiscipline, de l'équilibre du couple pastoral. Le pasteur et sa
femme doivent aussi pouvoir bien administrer les biens terrestres dont ils jouissent et leur
budget mensuel. Il faut qu'ils aient en cela une bonne réputation.
Femme du pasteur ou femme de pasteur? Elle est appelée certes à jouer un rôle dans la
paroisse, mais n'a pas d'autres fonctions que celles que la paroisse veut lui confier. Elle sera
avant tout un modèle d'épouse et de mère et assumera les responsabilités qu'on lui confiera
avec simplicité, humilité, discrétion, un esprit de foi et de prière.
Est-il normal ou légitime que la femme du pasteur exerce une activité professionnelle?
Arguments pour: mise au service de la collectivité des dons qu'elle possède (institutrice,
infirmière, etc.), apport financier utile et parfois nécessaire, épanouissement, surtout si les
enfants ont quitté le foyer, ce qui suscite généralement un grand vide dans la vie d'une
épouse. Arguments contre: le travail de la femme est souvent à l'origine de difficultés
conjugales et a déjà contribué à briser bien des foyers; le mari peut ressentir avec
douleur qu'il n'est pas capable de faire vivre sa famille, surtout si sa femme gagne plus que lui
(mais ces difficultés ne sont pas propres aux femmes de pasteurs); d'autre part, la femme du
pasteur doit aider son mari de bien des façons: répondre au téléphone, courrier, participer à
des activités paroissiales comme la chorale, l'école du dimanche, le cercle de dames, la
bienfaisance (on attend souvent d'elle qu'elle organise ces activités). Elle peut donner aussi
l'impression qu'elle travaille pour satisfaire des besoins coûteux, des exigences personnelles.
Enfin, elle risque de transformer son mari en baby-sitter chargé de la remplacer bien des fois,
et donc moins disponible pour son ministère.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
16
Enfin, le statut de femme de pasteur peut générer bien des frustrations: absences fréquentes
et prolongées du mari, soirées en solitaire, soucis du mari, budget modeste.
Le pasteur et ses enfants:
Le pasteur ne doit pas se décharger sur sa femme de ses obligations de père, sous prétexte
qu'il a beaucoup de travail (1 Tim 3:4; Eph 6:4).
Les enfants du pasteur grandissent souvent dans le complexe qu'ils sont enfants de pasteur,
et de ce fait différents des autres. Les gens y contribuent parfois, si bien que les enfants du
pasteur en souffrent. Le pasteur doit les assister en cela et les aider à croître dans la foi, les
rendre heureux et faire d'eux des chrétiens responsables.
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
17
LA PAROISSE CHRETIENNE
La paroisse est le principal champ d'activité du pasteur. Il doit donc en connaître la nature et
les responsabilités que Dieu a confiées à son Eglise.
1) Définition:
Groupe de chrétiens se réunissant régulièrement autour de la Parole de Dieu et des
sacrements. Tout groupe de chrétiens n'est donc pas une paroisse. "Ekklèsia": 1) tout groupe
d'hommes (Act 19:32.39.41); 2) "Una Sancta" (Eph 5:23-27; Mt 16:18; Eph 1:22.23); 3)
paroisse, Eglise locale (Mt 18:17; 1 Cor 1:2; Act 5:11). Les hypocrites en font partie
"secundum societatem externam".
L'Eglise locale, la paroisse, est d'institution divine (Mt 18:17; Act 2:41). Elle est servante du
Christ (Act 13:2). L'Eglise locale doit avoir un pasteur (Tite 1:5), ce qui prouve son institution
divine.
2) Appartenance à la paroisse:
Elle présuppose la confession de la foi chrétienne. Les enfants sont reçus dans l'Eglise par le
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
18
baptême; les adultes le sont d'une des façons suivantes:
- par baptême ou confirmation d'adulte (gens venant
d'Eglises hétérodoxes ou sans Eglise);
- lettre de transfert (adultes venant d'une autre paroisse
du Synode ou d'une Eglise sœur);
- par profession de foi de membres qui se sont
momentanément détournés de l'Eglise et veulent y revenir.
Le pasteur consciencieux doit les examiner. Il doit aussi vérifier
qu'ils n'ont pas été l'objet d'une excommunication.
Le pasteur recevant de nouveaux membres leur rappellera les privilèges de
l'appartenance à une paroisse et les exhortera à participer activement à la vie de
l'Eglise, à mettre leur temps, talents et dons à son service.
Il y a trois types d'appartenance à l'Eglise:
- les âmes (enfants et adultes appartenant à la paroisse
et qui relèvent de ses soins spirituels);
- communiants (confirmés);
- électeurs (traditionnellement les hommes ayant atteint
la majorité ou un âge défini et qui ont signé la constitution).
Certains affirment qu'on peut être chrétien sans appartenir à une paroisse.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
19
Mais 1) Jésus veut qu'on se rattache à une paroisse (Héb 10:25; 1 Jn 2:19; Lc
10:16; Col 3:16);
2) aucun chrétien ne peut accomplir tous ses devoirs de chrétien s'il reste
en dehors d'une paroisse;
3) le charbon sorti du feu s'éteint (1 Cor 12);
4) un membre du corps du Christ doit obligatoirement coopérer avec ceux
qu'il reconnaît comme ses frères dans la foi.
3) Privilèges de la paroisse:
Composée de prêtres et de rois (1 Pi 2:9; Apoc 5:10), la paroisse détient le sacerdoce
universel. Elle a le pouvoir de mettre en place le ministère de la Parole et des
sacrements (Mt 28:18-20; 1 Cor 12:28; Act 6:6; 13:2.3), d'édifier ses membres dans la
foi (Eph 4:11-16), d'administrer la Cène (1 Cor 11:23-25), de pardonner et de retenir les
péchés et, en cas de besoin, d'excommunier (Mt 18: 17.18; 1 Cor 5:7.13). Cf. Luther,
W2 XVII, 1074. L'Eglise locale possède donc l'autorité suprême, contrairement à ce
qu'affirme Rome qui soutient que cette autorité appartient à une hiérarchie divinement
instituée. Cf. Mt 18:17.18; 1 Cor 3:21-23.
4) Devoirs de la paroisse:
Les privilèges impliquent toujours des devoirs (Lc 12:48).
a) Devoirs en rapport avec la Parole:
Dieu a confié à l'Eglise sa Parole (2 Cor 5:19). Elle doit être prêchée (2 Thess 3:1). Tout
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
20
chrétien en a le pouvoir. Mais, pour que règne l'ordre (1 Cor 14:40), une paroisse doit
faire appel pour cela à un (ou plusieurs) pasteur(s) qui exerce le ministère au nom de
tous (1 Tim 3:1-7; Tite 1:5-9). La paroisse doit veiller aussi à la pureté de la doctrine
(Gal 5:1; Mt 7:15; Rom 16:17; 2 Jn 10.11). Cf. Luther, W2 XIX, 341; Articles de Smalcalde
(Triglotta, p. 519).
b) Devoirs envers les frères en la foi:
- Garder l'unité de l'Esprit (Eph 4:3), tout faire pour la promouvoir, éviter tout ce qui
pourrait la détruire. Se soucier du bien-être spirituel de chacun (Rom 12:15; 1 Thess
4:18; Rom 15:1).
- Prendre soin des pauvres (Gal 2:9.10).
-Sauver celui qui s'égare (erreur doctrinale ou vie impie) et qui détruit ainsi l'unité de
l'Esprit. D'où nécessité de la discipline ecclésiastique, qui a pour seul but le salut du
frère (1 Cor 5:5; Mt 18:15-20; Jac 5:20).
Faire ici une exégèse de Mt 18:15-20, en ajoutant les précisions suivantes:
- "De occultis Ecclesia non judicat!"
- On n'excommunie ni des enfants (sous l'autorité de leurs parents), ni des malades
mentaux (irresponsables).
- On ne peut excommunier que des gens qui se disent nos frères et sont membres de la
communauté (1 Cor 5:13).
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
21
-Il faut que l'intéressé ait commis un péché mortel (1 Cor 5:11; Gal 5:19-21) ou qu'il nie
un article fondamental de la foi chrétienne (2 Jn 10.11; Tite 3:10; Rom 16:17.18; Jn
8:42-46).
- On n'excommunie pas quelqu'un qui ne met plus les pieds à l'église.
- S'assurer que l'intéressé a bien commis ce qu'on lui
reproche (2 témoins), que les deux étapes préalables de Mt ont eu lieu (sauf en cas de
scandale public où on peut brûler ces étapes).
- Le vote d'excommunication doit être unanime. Si l'impénitence est manifeste, ceux qui
désapprouvent l'excommunication se rendent participant du péché de l'excommunié.
Bien exécutée, l'excommunication a lieu au nom du Christ (Mt 18:18). L'excommunié
n'est plus considéré comme un chrétien, un frère. Il perd ses droits et privilèges de
membre (Sainte Cène, parrainage, enterrement chrétien). Le ciel lui est fermé aussi
longtemps qu'il ne se repent pas (1 Cor 5:5; 1 Tim 1:20; Jn 20:22).
L'excommunication est une obligation divine (1 Cor 5; Apoc 2:14.20). En ne pas
excommuniant l'impénitent, on l'approuve (1 Cor 5:6) et on offense les autres membres
de la paroisse, les paroisses-sœurs et le Synode. C'est une mesure qui préserve la
paroisse de la déchéance spirituelle. Elle a un double but: la repentance et le salut de
l'intéressé, et la santé spirituelle de la paroisse qui doit se préserver de toute
contamination.
c) Devoirs envers le Synode:
Le Synode est un corps consultatif qui ne peut rien imposer à ses paroisses, ni les
déposséder de leurs privilèges, ni se substituer à elles. Il ne peut pas excommunier un
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
22
pasteur ou un laïc, baptiser ou administrer la Sainte Cène.
La paroisse a des devoirs envers le Synode... Elle ne rejettera pas ses résolutions dans
les adiaphora sans des motifs valables. Cf. le chapitre sur le Synode.
d) Devoirs envers les paroisses sœurs:
Liens d'estime et d'amour fraternels. Une paroisse ne cherche pas à attirer à elle les
membres d'une paroisse soeur, et ne refusera pas une lettre de transfert à un
membre désirant se rattacher à une paroisse soeur. Une paroisse respectera aussi la
mesure d'excommunication prise par une paroisse soeur. Elle ne recevra un
excommunié que s'il a fait amende honorable devant la paroisse qu'il a offensée. Une
paroisse soutiendra toujours les efforts missionnaires tendant à la création d'une
autre paroisse dans le voisinage.
e) Devoirs envers les autres Eglises:
- Devoir de fidélité doctrinale et de témoignage (Jude 6; Jn 8:31.32; Tite 1:9-11; 2:1).
- Se garder des faux prophètes, éprouver les esprits, se désolidariser de toute erreur (Mt
7:15; 16:6; Eph 4:14; Rom 16:17.18; 1 Jn 4:1; 2 Jn 9-11; 1 Tim 6:3-5.20.21; Tite 3:10).
- Devoir d'œuvrer et de prier pour l'union véritable, d'établir la vraie communion
partout où cela est possible (Act 8:14 s.; 11:22-24; Act 15).
- S'efforcer de rétablir l'unité de la foi avec ceux avec qui on n'est pas en
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
23
intercommunion (Eph 4:3; 1 Jn 1:3.
- Restaurer cette unité quand elle est menacée (Act 15: Gal 2:11 ss.). Ne pas agir ainsi
serait se rendre coupable de séparatisme.
- Pas d'unionisme ni d'œcuménisme! Pas de "communio in sacris" (culte, œuvre
missionnaire...) avec ceux avec qui la paroisse n'est pas unie dans la profession de foi.
C'est ainsi qu'un pasteur luthérien ne peut pas participer à des cultes œcuméniques,
offrir sa chaire à des pasteurs non orthodoxes, donner une lettre de transfert à
quiconque veut se rattacher à une Eglise hétérodoxe, encourager un fidèle à se rattacher
à une telle Eglise. Il instruira aussi consciencieusement toute personne provenant d'une
telle Eglise avant de la recevoir dans sa paroisse. Cela ne signifie pas que nous devions
fuir tout contact avec les autres Eglises. Il faut les traiter avec courtoisie et amour
chrétien, se réjouir des points communs qu'on peut avoir avec elles et se réjouir aussi
de ce qu'il y a chez elles des chrétiens, des membres de l'Una Sancta. Une coopération
est possible avec elles, mais seulement "in externis", notamment dans les œuvres de
charité. On recherchera aussi les occasions de témoigner. Le pasteur doit pour cela
s'assurer que la paroisse comprend que tel est le but de sa démarche.
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
24
LA VOCATION AU MINISTERE
Le ministère de la prédication a son fondement dans la volonté du Christ de sauver le
monde. C'est sa seule raison d'être. Il faut s'en souvenir dans l'étude des différentes
phases de la vocation (qualifications du candidat, désir d'un changement de paroisse,
champ de travail plus important, etc.).
C'est un ministère glorieux (2 Cor 3:4-11). Les apôtres l'ont mis en place ou fait mettre
en place dans les Eglises locales (Tite 1:5; Act 14:23). C'est de ces Eglises que les
prédicateurs doivent prendre soin (1 Tim 3:5; Act 20:28; 1 Pi 5:3).
En choisissant un pasteur, l'Eglise ne renonce à aucun de ses droits. Le pasteur n'est pas
pape et chef, mais serviteur (1 Cor 4:1; 2 Cor 4:5). Les femmes par ailleurs sont exclues
du ministère (1 Tim 2:11-14; 1 Cor 14:34.35). Cf. Luther, W2 XVI, 2280.
Le pasteur n'entre pas dans son ministère par une disposition d'une hiérarchie
ecclésiastique. Cf. la doctrine de l'ordination. Pas de succession apostolique autre que
doctrinale (Gal 1:8). La succession apostolique n'est pas une "nota" de l'Eglise. Seules
sont "notae" la prédication pure de l'Evangile et l'administration correcte des
sacrements (Confession d'Augsbourg, VII).
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
25
Est d'institution divine non seulement le ministère par "vocatio immediata", mais aussi
celui par "vocatio mediata". Des hommes font appel à un pasteur (Act 14:23; 1 Tim 4:14;
Tite 1:5), et pourtant celui-ci est ministre par la volonté de Dieu (Eph 4:11; 1 Cor 12:28;
Act 20:28). Paul, quoiqu'appelé par le Christ par "vocatio immediata", se situe au
même niveau que les ministres appelés par "vocatio mediata" ( Col 4:7; Phil 2:25; 1 Pi
5:1).
Il n'existe plus de vocation immédiate qui habilite à l'exercice du ministère de la
prédication.
La certitude de l'origine divine du ministère de la prédication est importante et contient
une leçon 1) pour le pasteur (exhortation et consolation) et 2) pour la paroisse
(exhortation et consolation).
La vocation valide ("vocatio rata"):
Pas d'exercice du ministère sans appel de la part de Dieu! Cf. Rom 10:15 et le "rite
vocatus" de la C.A. XIV.
La vocation est dite valide quand elle vient de ceux à qui Dieu a confié ce droit. Donc de
l'Eglise locale (sauf exceptions) à qui sont confiés les moyens de grâce et qui appelle
donc au ministère (Mt 18:18; Jn 20:22). Cf. le Tractatus de Potestate et Jurisdictione
Episcoporum de Mélanchthon, 67-72, et Apologie, Art. VII et VIII.
Signalons que certaines vocations sont adressées par des commissions spécialisées:
missionnaires, professeurs de théologie, ministères de production littéraire, ministères
par les médias, etc. Là aussi, ordination et installation sont requises.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
26
Si un homme peut prêcher l'Evangile à des païens sans autre vocation que l'appel
intérieur, il ne peut le faire à un groupe de chrétiens, à moins d'être mandaté par eux. La
vocation par une paroisse est d'origine divine (Act 20:28; Eph 4:11 s.; 1 Cor 12:28 ss.).
Pour la vocation des diacres, cf. Act 6:1-8; Tite 1:5.
La présence d'un pasteur ou d'un représentant du Synode, pour souhaitable qu'elle soit,
n'est pas nécessaire pour qu'une vocation soit valide. Elle est souhaitable non pour
rendre l'appel valide, mais parce que l'Eglise qui appelle a besoin de conseils.
Si l'ancien pasteur est là, la sagesse exige qu'il quitte au moins temporairement
l'assemblée, pour ne pas l'influencer et pour lui permettre de s'exprimer librement.
L'Eglise locale est dite représentée, quand elle adresse vocation ("Ecclesia
repraesentativa"). Elle l'est d'ordinaire par ses membres électeurs, mais peut l'être
aussi par son conseil presbytéral. Mais ceux qui adressent vocation le font toujours sur
la demande de l'Eglise locale, doivent agir en son nom et dans l'intérêt de la paroisse
tout entière. Une paroisse peut déléguer le droit de vocation à une instance (par
exemple, par l'envoi d'un bulletin blanc au "Board for Assignement" dans le Synode du
Missouri). Une telle vocation émane malgré tout de la paroisse. Cependant, une paroisse
ne devrait jamais renoncer par principe à son droit à la vocation.
Ethique de la vocation: Ecouter les conseils des représentants du Synode - Songer au
bien-être du Synode tout entier et du pasteur appelé - Renoncer éventuellement à un
pasteur sur place, si un pasteur du voisinage peut prendre la paroisse en charge, etc.
Le fait qu'il existe du désordre ou de la corruption dans une paroisse n'invalide pas son
appel. Celui-ci est valide en raison des vrais chrétiens qui s'y trouvent. Cf. C.F.W.
Walther, Pastoraltheologie, p. 32 s. Même la vocation d'une paroisse hétérodoxe est
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
27
valide, car elle émane de chrétiens et c'est à cause de cela et non de l'orthodoxie qu'elle
est valide.
Il faut distinguer entre la paroisse/Eglise de Dieu et la paroisse/association cultuelle
régie par la loi. Cette dernière n'est qu'une institution divine. Seule l'Eglise de Dieu
adresse vocation. C'est pourquoi le ministère est d'origine divine et ne peut pas prendre
la forme d'un contrat humain dont les clauses seraient fixées comme celles d'un contrat
d'entreprise.
Vocation légitime:
Pour être légitime, il faut que la vocation s'adresse à un homme susceptible d'en
recevoir une, c'est-à-dire qui remplit les conditions fixées par la Bible dans 1 Tim 3 et
Tite 1 et qui est attaché à la "saine doctrine", partageant la même foi que la paroisse qui
l'appelle. Il faut aussi qu'elle se soit déroulée dans de bonnes conditions, sans
manipulations d'aucune sorte. Celles-ci pourraient provenir de la paroisse qui appelle,
d'un groupe de la paroisse ou du candidat.
Un pasteur peut aspirer à un changement de paroisse pour des motifs divers. Certaines
raisons sont légitimes...., d'autres ne le sont pas... Cependant il ne doit jamais douter de
la divinité de son appel dans la paroisse qu'il dessert et en rechercher un autre. Ceci
n'empêche pas qu'un pasteur possédant des charismes particuliers puisse offrir ses
services pour un ministère précis (aumonerie d'hôpital ou de prison, mission dans
bidonville ou auprès de malades mentaux, d'handicapés ou de marginaux, etc.).
Des handicaps personnels peuvent justifier le désir d'un changement (âge avancé, santé
fragile, sentiment d'avoir fait son temps dans une paroisse, etc.).
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
28
Un pasteur a pu manoeuvrer pour obtenir un appel. Doit-il douter de la divinité de son
appel? Non! Par contre, il doit se repentir.
Une vocation ne peut être temporaire, a priori limitée dans le temps, à moins qu'il ne
s'agisse de la vocation à un ministère spécialisé qui exige des aptitudes tout à fait
particulières. Pourquoi? Parce que la vocation émane de Dieu (Act 20:28; Eph 4:11; 1
Cor 12:28; Act 1:24). Seul Dieu peut mettre fin au ministère qu'il a confié à un homme. Il
le fait par l'incapacité physique ou mentale, la mort ou en cas de fausse doctrine ou de
vie impie. Cf. Os 4:6; 1 Tim 3:7; 1 Cor 4:2. Dans ce dernier cas, Dieu se sert de l'Eglise
pour accomplir sa volonté (Mt 23:8; 2 Tim 4:2-5).
Un appel temporaire est aussi contraire au devoir de soumission et d'honneur qui est
celui de la paroisse à l'égard de son pasteur (Lc 10:16; 1 Tim 5:17; 1 Thess 5:12.13; 1
Cor 16:15.16; Héb 13:17). Limiter un appel dans le temps, c'est limiter le respect,
l'honneur ou la confiance dus au pasteur. Enfin, l'appel temporaire ouvre la porte à
l'arbitraire et au désordre.
Sont à exclure de ces considérations certaines tâches limitées dans le temps
(remplacement temporaire du pasteur titulaire, vicariat, accomplissement d'une tâche
telle que prospection missionnaire, etc.). Par ailleurs, un pasteur, bien que refusant un
appel temporaire, ne peut s'engager à rester toute sa vie dans une même paroisse. Ce
serait incompatible avec les desseins de Dieu que l'homme ne connaît pas et avec la
dignité et les fonctions du ministère.
Quand un pasteur est convaincu de l'origine divine d'un appel, il ne doit pas le décliner
pour des raisons de convenance personnelle ou en raison du sentiment de son
incapacité. Cf. l'exemple de Moïse (Ex 3).
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
29
Conditions qu'un pasteur peut poser:
- que la paroisse désire être desservie comme paroisse
Evangélique Luthérienne Confessionnelle;
- qu'elle accepte donc tout l'enseignement de l'Ecriture
et des Confessions Luthériennes;
- qu'elle lui permette de s'acquitter de son ministère
conformément à son vœu d'ordination, en toute bonne
conscience. Un pasteur peut accepter une vocation
d'une paroisse hétérodoxe à la seule condition défi-
nie ici. Un pasteur luthérien peut aussi accepter de
prêcher ou de donner une conférence occasionnelle dans
un Eglise hétérodoxe pour rendre témoignage (1 Pi 3:10),
mais à condition de ne compromettre en rien la vérité et
de consulter auparavant sa paroisse;
- qu'elle lui accorde des moyens de subsistance décents.
Dès qu'un pasteur a reçu vocation, il doit en accuser réception avec promesse d'y
réfléchir et d'y répondre dans un délai raisonnable.
Un pasteur ne peut exiger de la paroisse qui l'appelle qu'elle se conforme à toutes les
coutumes et cérémonies de l'Eglise Luthérienne. Cf. Confession d'Augsbourg, Art. VII et
Formule de Concorde, S.D. IX, 9.
Un pasteur ne peut tolérer du matériel littéraire (catéchismes, recueils de cantiques,
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
30
manuels d'instruction religieuse) contenant de fausses doctrines. Il sera cependant
patient et tâchera de convaincre. C'est une bonne occasion pour enseigner la vraie
doctrine. Il ne peut pas non plus exiger, avant d'accepter l'appel, que la paroisse s'affilie
à un Synode (adiaphoron), ni promettre à la paroisse que lui-même ne le fera jamais.
Le pasteur doit être rémunéré pour son travail:
Il doit recevoir ce que mérite son labeur (Mt 10:9.10; 1 Tim 5:18; 1 Cor 9:14; Gal 6:6). Il
faudrait donc que le pasteur puisse se consacrer entièrement à son ministère, sans avoir
à chercher des ressources ailleurs.
Echelle de salaires uniforme dans le Synode, ou salaires fixés par les paroisses?...
Cela dit, le pasteur doit savoir vivre dans le contentement (Phil 4:11-13). Il ne
revendiquera pas auprès de la paroisse, mais lui déploiera toutes les richesses de
l'Evangile et vivra une vie de consécration exemplaire. Ainsi, la paroisse ne manquera
pas de lui donner ce à quoi il a droit pour pouvoir vivre décemment.
Personne ne surveille les horaires de travail du pasteur. Il n'a pas à pointer le matin,
comme les ouvriers. Aucun patron n'est là pour le surveiller. Il fera donc bien de se
demander de temps en temps si son travail vaut le salaire qu'on lui verse.
Il n'y a en principe rien à objecter au versement de casuels, à condition toutefois qu'ils
ne soient pas assimilés à des pourboires. D'autre part, la solidarité avec ses frères dans
le ministère peut inciter un pasteur à les refuser. Par contre, il acceptera volontiers les
dons en nature qu'on pourra lui faire comme gages d'estime et de gratitude. Les casuels
ne sont pas dus au pasteur, car il est payé pour son ministère. Il va de soi qu'il ne les
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
31
sollicitera pas. il ne montrera pas davantage de la déception, si on ne lui en offre pas.
Il est évident que le pasteur a droit au remboursement de ses frais de fonctionnement
(téléphone, timbres, fournitures de bureau, frais de déplacements, etc.).
L'appel d'une paroisse dans une autre:
Le fait qu'un pasteur reçoive une vocation d'une autre paroisse ne signifie pas
nécessairement que Dieu veuille l'appeler ailleurs. Alors se pose l'une des plus graves
questions dans la vie d'un serviteur de Dieu: Quelle est la volonté de son Seigneur?
Il faut évoquer le pour et le contre. Le pasteur ne doit changer de poste que s'il est
convaincu que Dieu le souhaite et l'appelle ailleurs. La question vitale est la suivante:
Peut-il, avec les dons qu'il a reçus, servir mieux le Royaume de Dieu dans la paroisse qui
l'appelle? Et quelles seraient pour sa paroisse actuelle les conséquences de son départ?
Il ne doit pas partir en raison de difficultés qu'il rencontre dans sa paroisse présente. Il
est aussi le pasteur des fauteurs de troubles. Par contre, il fera bien d'accepter l'appel,
s'il a perdu la confiance de sa paroisse ou d'un grand nombre de fidèles.
Il fera appel aux conseils de frères expérimentés et se posera les questions suivantes:
- Quelle est la volonté de Dieu?
- Mon ministère actuel prospère-t-il?
- Ai-je les dons requis pour mon ministère actuel?
- Pourrais-je mieux utiliser mes dons ailleurs?
- Mon âge avancé pourra-t-il assumer les charges d'une
paroisse éventuellement plus grande?
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
32
- Ai-je l'expérience nécessaire pour un nouveau ministère?
- Je parle deux langues et les utilise dans ma paroisse actuelle. Ce don ne
sera-t-il pas enterré dans une nouvelle paroisse?
- Quel poids prend dans mes réflexions ma situation familiale
et financière?
- Où se situe l'intérêt du Synode?
Il pourra mieux répondre à ces questions en consultant des frères dans le ministère plus
expérimentés que lui. Il est bon aussi de consulter la paroisse actuelle, sans cependant
faire dépendre sa décision de son opinion. Parfois cependant il prendra sa décision sans
le faire, tout à fait indépendamment. Cependant, il ne mettra jamais sa paroisse devant
un fait accompli. Ce serait un affront fait à l'Eglise de Dieu.
Il doit chercher à obtenir une "firedliche Entlasung". S'il ne le peut en raison de
l'incompréhension et de l'entêtement de sa paroisse, il prendra sa décision et
l'assumera en son âme et conscience.
Inversement, il ne déclinera pas une vocation, parce que de plus grandes difficultés
l'attendraient dans la nouvelle paroisse, que le presbytère y serait moins confortable,
les gens moins sympathiques ou d'un standing plus modeste, ou encore le salaire plus
bas. La prise en considération des aspets financiers d'un appel est sans doute justifiée (1
Tim 5:8), mais elle ne devrait pas avoir plus de poids que ne l'autorise 1 Pi 5:2.
Pas de prédication test ni de matériel audiovisuel pour se faire connaître de la paroisse
vacante! Ce sont des méthodes publicitaires indignes du Royaume de Dieu.
Le vote doit-il être unanime? Non, car le choix d'n pasteur relève d'un jugement porté
sur lui, non seulement sur son enseignement et ses qualifications professionnelles, mais
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
33
aussi sur sa personnalité. C'est donc un adiaphoron. Mais ce serait un choc pour un
pasteur arrivant dans sa nouvelle paroisse que d'apprendre qu'une grande minorité
n'était pas pour lui. Donc sans doute pas de vote "einstimmig", mais un vote "einmütig":
tous doivent se rallier à l'avis de la majorité.
S'il y a opposition justifiée contre un pasteur (faux docteur, vie déréglée, manque de
qualifications scripturaires, inadéquation pour un ministère précis), elle doit se
manifester avant le vote, et non surgir après. Il ne faut faire figurer comme candidats
que des hommes qui ne soulèvent aucune objection valide.
Le pasteur ne doit obéir qu'à sa conscience. Il ne doit jamais agir dans le doute (Rom
14:23b). Il lui faut donc prier pour que Dieu l'éclaire sur sa volonté.
Dans la nouvelle paroisse:
Cérémonie d'installation dès que possible. Nous ne faisons pas de différence essentielle
entre ordination et installation. On a l'habitude d'appeler ordination l'installation d'un
pasteur dans son premier ministère. L'ordination, tout comme l'installation, ne doit pas
se faire avant l'acceptation d'une vocation.
La faculté ou le séminaire sont l'instance certifiant que le candidat a les qualifications
requises. Le président de district ou de région est celui qui procède à l'ordination et à
l'installation. Précisons qu'un pasteur ordonné n'est pasteur qu'aussi longtemps qu'il
exerce un ministère. Il n'est pas pasteur à vie, mais "pastorabilis"...
Le sermon d'installation prononcé par le pasteur installé développe la double vérité
suivante: Ce que la paroisse doit et peut attendre de son pasteur, et ce que le pasteur est
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
34
en droit d'attendre de sa paroisse. L'accent sera mis sur l'Evangile du salut et sur la
façon dont pasteur et paroisse sont appelés à glorifier le Seigneur.
Le nouveau pasteur doit aussitôt visiter tous ses paroissiens (Act 20:20.31; 1 Thess
2:11; Ez 34:16; 1 Tim 5:1-3), en particulier les malades et les affligés (Jac 5:14; Mt
25:36). Il doit leur faire sentir à tous qu'il a un coeur de pasteur.
Le pasteur doit impérativement respecter son prédécesseur. Si des changements sont
nécessaires dans la paroisse, il les fera sans passer de jugement sur le pasteur antérieur.
Il faut toujours faire preuve de beaucoup de tact, de sagesse et de patience dans une
nouvelle paroisse. Un nouveau pasteur ne doit jamais se présenter en réformateur,
innovateur ou iconoclaste.
Suspension du pasteur:
Elle n'est légitime que pour des raisons bibliques: fausse doctrine (Tite 1:9), mauvaise
conduite (1 Tim 3:1-7), négligence délibérée des devoirs du ministère (1 Cor 4:1.2).
Un pasteur qui a publiquement scandalisé n'est en principe plus habilité pour un
ministère, en tout cas pas dans la paroisse où il a causé scandale. Et ailleurs seulement,
s'il s'est repenti publiquement devant ceux qu'il a offensés par sa conduite. Une paroisse
qui a congédié son pasteur sans raisons bibliques ne pourra en obtenir de nouveau que
si elle a fait amende honorable, confessé son péché et demandé pardon à son ancien
berger.
Si un pasteur n'est plus capable de bien assumer son ministère, la paroisse peut et doit
l'inviter à accepter un nouvel appel ou à prendre sa retraite. Mais elle le fera avec
beaucoup de sagesse, d'amour et de considération.
Un pasteur ne doit jamais renoncer au ministère, chercher un autre travail ou
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
35
revendiquer la retraire, s'il n'a pas pour cela des raisons évidentes et valides (1 Cor
9:16.17.22b).
Le diplôme de vocation:
Une vocation pourrait à la limite être adressée et acceptée oralement. Mais un
document écrit est une bonne chose. Il est un rappel constant des engagements pris par
la paroisse qui appelle et par le pasteur appelé. Ce diplome annonce qu'en réunion
paroissiale, la paroisse X a adressé vocation au pasteur Y. Elle le prie de considérer cette
vocation comme divine et de l'accepter. Elle lui demande de venir exercer le ministère
conformément à l'Ecriture Sainte et aux Confessions Luthériennes, par la prédication,
l'instruction religieuse et la cure d'âme. Elle assure le pasteur que la paroisse le recevra
comme le berger que Dieu lui donne et qu'elle se soumettra à son enseignement, en
utilisant avec ferveur les moyens de grâce qu'il administrera, en l'aimant, le respectant
et le soutenant par la prière. Enfin, le document dit comment la paroisse compte
subvenir à ses besoins matériels. Une lettre d'accompagnement peut donner des
précisions supplémentaires (dimensions de la paroisse, possibilités d'extension
missionnaire, accents particuliers à donner au ministère, projets de construction, etc.).
Cf. un exemplaire de lettre de vocation, in The Pastor at Work, p. 102, ou Fritz, Pastoral
Theology, p. 56.
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
36
LE PASTEUR ET LE PUBLIC
Une paroisse n'a pas le droit de garder l'Evangile pour elle. Elle est tenue de l'annoncer
à la collectivité dans laquelle elle vit. Ce devoir incombe plus particulièrement encore au
pasteur.
Dans ses rapports avec cette collectivité extérieure à sa paroisse, le pasteur doit
incarner au plus haut point les qualités d'âme et de coeur et les vertus que le Christ
attend de tous les chrétiens.
Il veillera aussi à des relations amicales et cordiales avec les autres dénominations
religieuses. Cependant il ne dépassera jamais les limites que lui imposent l'Ecriture et
son appartenance à son Synode. Ceci est nécessaire pour la bonne réputation dont son
ministère jouira aux yeux des membres d'autres Eglises.
Il en va de même pour les relations avec la communauté civile. Le pasteur représente
Jésus où qu'il aille. Des dettes impayées, de constantes amendes, un ton offensant dans
les conversations sont donc déplacés. Il convient aussi que sa paroisse prenne part à la
vie de la commune et prenne à coeur ses problèmes et ses soucis, qu'elle soutienne ses
efforts dans le domaine social, etc. L'abstentionnisme et l'ostracisme ne sont pas de
mise.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
37
La paroisse doit être consciente de sa mission au sein de la collectivité. Qu'elle se
demande donc quelle image elle donne d'elle-même. Son attitude envers sa mission
détermine l'opinion que la collectivité se fait d'elle et de son travail. Des luttes intestines
dans la paroisse, une mauvaise attitude envers son pasteur, la négligence dans
l'entretien des bâtiments, une attitude négative ou simplement passive concernant ce
qui fait dans son entourage sont autant de facteurs qui sautent aux yeux du public. Il est
des domaines où l'Eglise Luthérienne ne peut pas céder ni se conformer au monde
(doctrine et éthique). Il en est d'autres où elle peut s'accommoder à lui.
La paroisse recourra donc aux moyens qui sont à sa disposition pour se faire connaître
et pour faire rayonner l'Evangile: contacts personnels, courrier, téléphone, presse
locale, radio locale, panneaux d'affichage, cultes publics (culte du matin de Pâques dans
le cimetière, par exemple, cultes du souvenir, activités locales telles que fêtes enfantines
dans les écoles et les maisons des jeunes, distribution de tracts, dépôt de littérature
dans les librairies, les homes et les hôtels, vitrine paroissiale, cloches, concerts, mise à
disposition des organismes de bienfaisance des locaux paroissiaux, participation aux
collectes publiques, lettres aux représentants publics locaux pour les féliciter, les
critiquer ou les encourager, cartes postales représentant l'église, etc.
C'est à chaque paroisse de faire preuve d'initiative, de découvrir de nouvelles méthodes,
compte tenu du contexte, et de juger de leur valeur. Rien ne devrait être négligé dans ce
domaine.
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
38
LE PASTEUR EN CHAIRE
Le pasteur reste pasteur quand il prêche. Il ne change pas de peau, mais fait de la cure
d'âme en chaire.
Il paît son troupeau:
Le pasteur est un berger (Act 20:28). Il faut donc qu'il connaisse les besoins de ses
paroissiens, leurs lacunes, leurs faiblesses, qu'il les aide à en prendre conscience et à
accepter le remède de l'Evangile. La prédication n'est pas un monologue, mais un
messages qui répond aux questions des auditeurs, qui apporte des solutions à leurs
problèmes... Il n'y a donc pas de prédication authentique sans connaissance des
hommes auxquels on prêche, connaissance qui découle du contact avec eux, mais aussi
de ce que la Bible dit de l'homme.
Le prédicateur aime aussi son troupeau. Il ne se détourne pas de ses paroissiens en
constatant leurs lacunes, mais leur vient en aide, leur apporte l'amour de Dieu en Christ.
Le prédicateur aide son troupeau. Il le fait en lui annonçant la Loi sans laquelle il ne peut
recevoir l'Evangile... Il l'aide en lui prêchant l'Evangile, la mort et la résurrection du
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
39
Christ, en appliquant ces deux faits du salut à l'auditeur... Il l'aide enfin en lui apprenant
à vivre dans la sanctification...
Le sermon est un moyen d'édification publique, l'élément essentiel du culte, le message
que le pasteur invite chaque paroissien à emporter avec lui, la nourriture commune de
tout le troupeau. Cependant, la chaire n'est pas le lieu où le pasteur traite des problèmes
de cure d'âme.
Il prêche de façon à le paître:
Cf. le cours d'homilétique. Nous n'évoquerons ici que quelques aspects particuliers.
La prédication qui doit vraiment paître implique une technique. Il faut que le sermon
révèle l'amour que le pasteur porte à son troupeau, l'intérêt qu'il a pour sa paroisse. Le
pasteur doit se comporter en chaire comme ailleurs, qu'il soit celui que les paroissiens
connaissent tous les jours et qu'il ne joue pas un rôle. Pas de stykle oratoire, pas de
recherche d'effets. Le langage, le style et la prononciation seront les mêmes que chaque
jour dans la cure d'âme. Le pasteur en doit pas oublier son troupeau et son message
pour ne songer qu'à sa performance en chaire. Le prédicateur doit rester pareil à
lui-même. Eviter aussi la voix monocorde.
Le pasteur doit prêcher de façon à être compris, à ce qu'on n'oublie pas ce qu'il a
annoncé, mais l'applique à soi-même. On ne peut pas rendre l'incompréhensible
compréhensible, mais on peut l'exposer en un langage tel qu'il soit saisi par l'auditeur:
langage de tous les jours (éviter au maximum le patois de Canaan), illustrations simples
et claires tirées de la vie quotidienne. Jésus est en cela un modèle.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
40
Nécessité de la logique. Sermon agencé selon un plan rigoureux et fidèle à ce plan,
progressant pas à pas pour triompher petit à petit desz doutes ou de l'ignorance de
l'auditeur.
Nécessité de ne pas lire son sermon. Le prédicateur doit regarder ses auditeurs dans les
yeux, ne pas leur donner l'impression que son message est quelque chose d'étranger à
lui-même. D'où encore une fois la nécessité de la logique, de l'ordre, de la clarté et de la
simplicité. Le pasteur doit être lui-même sous l'emprise de son sermon, de façon à
susciter les émotions requises: crainte, respect, humilité, certitude, joie, gratitude,
espérance. Il doit les communiquer à ses auditeurs. Il faut donc que ceux-ci puissent
constater qu'il les éprouve lui-même. Il ne doit pas être de glace quand il annonce
l'amour divin, ni donner une apparence d'in-
certitude quand il proclame les grands faits de l'Evangile ou exhorte à l'espérance.
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
41
LE PASTEUR A L'AUTEL
Quand le pasteur est à l'autel, il est exposé aux regards de tous. C'est là qu'il donne
l'image de lui qui reste le plus facilement gravée dans les mémoires. Il doit donc tout
faire pour favoriser l'adoration, au lieu de l'empêcher. Il s'y prépare par la prière. Le
pasteur veillera à être propre, bien coiffé. Sa tenue vestimentaire sera irréprochable
(robe pastorale soignée, souliers cirés, etc.). Les vêtements dits liturgiques (robe
pastorale, étole, etc.) sont un adiaphoron. Leur coupe, leur présentation, leur utilisation
peuvent donc varier d'un lieu à un autre. On s'efforcera cependant de promouvoir une
certaine uniformité, de façon à ce que le culte luthérien conserve son identité.
Tout doit inspirer la dignité et le respect et éviter le désordre et le laisser-aller. Le
pasteur ne manifestera jamais publiquement son mécontentement à l'égard de
l'organiste, de la chorale ou dun bébé qui pleure.
Pour le reste, cf. le chapitre sur la liturgie.
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
42
LA LITURGIE
"Leitourgia", oeuvre commune, participation du peuple au culte par l'adoration, les
prières, la confession des péchés et de la foi, le chant.
I) Historique de la liturgie:
1) Le culte synagogal:
Confession de foi ("Schemah Israèl" de Deut 6:4-9)
Prières d'intercession (il faut avoir 13 ans pour pouvoir
la prononcer, et seuls les hommes y sont autorisés)
Lecture de la Thorah par un assistant (divisée en 154 sections, elle est lue en trois ans)
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
43
Lecture des prophètes (pas de péricopes, le lecteur pouvant choisir son texte et le
commenter. Cf. Lc 2:41 ss.; 4:16 ss.)
Prédication (par n'importe quel adulte mâle de la paroisse; généralement un
commentaire du texte prophétique
Bénédiction aaronique (Nomb 6:24-26) par le prêtre, l'assemblée répondant par Amen.
Il n'y avait pas dans la synagogue de vraie liturgie, mais un simple cadre pour le culte. La
liturgie proprement dite est née avec l'administration des sacrements.
2) L'Eglise apostolique:
L'Eglise chrétienne est une Eglise confessante et chantante. Elle l'était déjà à l'époque
apostolique. Courtes confessions de foi ("Jésus est le Seigneur", ou bien Phil 2:5 ss.) et
chants divers (Eph 5:19; Col 3:16). Dans Eph 5:19, l'expression "lalountes heautois"
pourrait indiquer que le chant était alterné.
3) L'Eglise postapostolique:
La 1 épître de Clément de Rome, ch. 34, mentionne la présence dans la liturgie de la
Préface et du Sanctus, les deux éléments les plus anciens de notre liturgie eucharistique.
Justin Martyr indique dans sa 1 Apologie le déroulement d'un culte de l'époque:
lecture du N.T. (évangiles et épîtres), prédication, prière (l'assemblée se tient debout),
présentation du pain et du vin (ainsi que de l'eau pour couper le vin), prière (Préface
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
44
avec l'Amen de l'assemblée, communion, offrandes pour les veuves et les nécessiteux.
"Tradition Apostolique" d'Hippolyte (3 siècle à Rome): salutation, "sursum corda",
"gratias agamus" (Louons le Seigneur notre Dieu), pas de Sanctus, prière d'actions de
grâces, paroles d'institution, anamnèse (commémoration de l'œuvre rédemptrice du
Christ), épiclèse (invocation du Saint-Esprit pour qu'il vienne sur les éléments et les
sanctifie. L'épiclèse était en fait la consécration des espèces, mais sans récitation des
paroles d'institution).
Seuls les baptisés peuvent assister aux cultes eucharistiques, à l'exclusion des
catéchumènes. Sévère discipline eucharistique.
4) Liturgie à l'époque constantinienne:
"Missa catechumenorum" (candidats au baptême): Quatre lectures (loi, prophètes,
épîtres, évangiles), salutation, sermon, congédiement de ceux qui ne sont pas admis à la
Table du Seigneur, avec intercessions et Kyrie chanté par l'assemblée.
"Missa fidelium": Prière ecclésiastique avec Kyrie chanté par l'assemblée, salutation et
baiser de paix, présentation du pain et du vin, liturgie eucharistique (comprenant la
"Salutatio", le "Sursum corda" le "Gratias agamus", le "Ceci est digne et juste",
l'Antesanctus (louange du Créateur), le Sanctus, le Postsanctus (louange du
Rédempteur), les paroles d'institution, l'anamnèse, l'épiclèse, les intercessions, le Notre
Père, la communion (avec doxologie et le chant de Ps 34:9), la prière d'actions de grâces
et la bénédiction.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
45
5) Le "Missale Romanum" de 1570:
Introduction:
Introït alterné entre le chœur et la paroisse,
Salutation,
Confession des péchés,
Kyrie eleison,
Gloria in excelsis Deo,
Collecte
Culte de la Parole:
Lecture de l'A.T.
Graduel (chant d'un psaume par un soliste et refrain par l'assemblée)
Lecture de l'épître
Alléluia
Lecture de l'évangile
Sermon
Credo (symbole de Nicée)
Prière générale
Célébration eucharistique:
Chant d'actions de grâces
Prière
Préface
Sanctus
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
46
Canon avec paroles d'institution
Notre Père
Agnus Dei
Prière de préparation à la communion (Mt 8:8)
Communion
Postcommunion (prière d'action de grâces)
Bénédiction
"Ite missa est" et "Deo gratias"
6) La Réforme:
a) "Von Ordnung des Gottesdienstes", Luther, Pentecôte 1523, et "Formula Missae et
Communionis", Luther, automne 1523:
Pas de culte des saints, de sacrifice de la messe et d'adoration des espèces consacrées.
Culte centré sur la Parole avec lectures bibliques, prières, paroles d'institution de la
Cène et Credo en allemand, le reste étant en latin.
b) "Deutsche Messe", Luther, 1526:
Introït (psaume ou choral allemand)
Kyrie
Gloria
Collecte
Epître
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
47
Graduel (cantique allemand)
Evangile
Credo (Cantique de Luther: "Wir glauben all an einen Gott")
Sermon
Paraphrase chantée du Notre Père
Exhortation eucharistique à la place de la Préface
Paroles d'institution (d'abord sur le pain qui est distribué, puis sur le vin distribué à son
tour). Pas de "Spendeformel" pendant la distribution, mais signe de la croix sur le pain
et le vin
Chant du cantique d'Es 6: "Jesaja dem Propheten das geschah"
Agnus Dei
Prière d'actions de grâces
Bénédiction
c) Zwingli et Calvin: Liturgie très pauvre, surtout chez Zwingli.
d) Liturgie de Strasbourg (1525), plus riche que la "Deutsche Messe" de Luther et pour
cette raison adoptée par la plupart des Eglises Luthériennes de l'époque:
Elle contenait les éléments suivants: Cantique, confession des péchés, promesses de
grâce, lecture d'un psaume, Gloria Patri, Kyrie eleison, grande doxologie, collecte, épître
avec commentaire, chant d'un psaume, sermon sur l'évangile, confession de foi ("Wir
glauben all an einen Gott"), "Rüstgebet", Sursum corda, prière, Notre Père, exhortation
eucharistique, paroles d'institution, invitation, distribution, chant du "Gott sei gelobet"
ou d'un psaume, bénédiction aaronique, cantique (Ps 67).
On notera que dans cette liturgie il n'y a ni Préface, ni Sanctus, ni Agnus Dei.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
48
Il y eut ensuite un déclin liturgique dû à l'influence réformée, au piétisme et au
rationalisme (plus d'aube, plus de chant du pasteur à l'autel ni de graduel, liturgie
eucharistique appauvrie). Le culte sans Sainte-Cène est considéré comme le culte
normal. La célébration de la Cène s'y ajoute comme une sorte d'appendice. Le sermon
devient de loin l'élément prépondérant du culte qui perd, de ce fait, sa dimension
sacramentelle.
II) Le cycle de l'année liturgique:
L'année liturgique se divise en deux parties: le semestre du Seigneur (de l'Avent à la
Trinité: proclamation des grands faits du salut acquis par le Seigneur) et le semestre de
l'Eglise (du 1 au dernier dimanche après la Trinité: appropriation du salut par l'Eglise
et vie de cette Eglise: justification, sanctification, accomplissement dans l'au-delà).
Le semestre du Seigneur est fait de trois cycles, avec chaque fois un temps de
préparation, la fête elle-même et une postfête.
a) Cycle de Noël:
Du 1 dimanche de l'Avent au dernier dimanche après l'Epiphanie. Préparation: (Avent,
temps à la fois de repentance et d'attente joyeuse), la fête (de Noël à l'Epiphanie qui est
le Noël des païens) et la postfête (dimanches après l'Epiphanie: révélation du Christ).
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
49
b) Cycle pascal:
De Septuagésime à la semaine entre Jubilate et Cantate. C'est le plus ancien cycle de
l'Eglise. Préparation (quarante jours, du Mercredi des Cendres à la veille du Dimanche
des Rameaux: méditation dans la repentance de la passion du Christ - Au Moyen-Age, ce
temps de repentance incluait les Dimanches Septuagésime, Sexagésime et
Quinquagésime), la fête proprement dite (du Dimanche des Rameaux au Dimanche
Quasimodo) et la postfête (du Dimanche Misericordias Domini au Dimanche Jubilate).
c) Cycle de la Pentecôte:
Deuxième cycle par son ancienneté. Du Dimanche Cantate à la Trinité, avec l'Ascension
et la Pentecôte. Le Dimanche de la Trinité clôt le semestre du Seigneur, en attribuant à la
Trinité, Père, Fils et Saint-Esprit, l'oeuvre du salut commémorée durant toute cette
période.
III) Les différents éléments de la liturgie:
L'Eglise célèbre ses cultes dans la joie et la certitude que son Seigneur est ressuscité.
Elle le fait donc le dimanche, jour du Seigneur commémorant sa résurrection
triomphante. Réunie en son nom, elle le sait au milieu d'elle, selon sa promesse.
Le culte ressemble à la procession d'un roi visitant son peuple. Il vient à lui dans la
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
50
prédication et le sacrement, et l'Eglise le salue par son adoration et ses louanges. Se
sachant unie par la foi et la confession à l'Eglise de Jésus-Christ de tous les temps,
l'Eglise Luthérienne utilise la liturgie qui s'est développée dans l'Eglise chrétienne au
cours des siècles, liturgie qu'épura la Réformation.
Voici le canevas du culte eucharistique luthérien tel qu'il est célébré dans la S.E.L.K.:
1) Introduction au culte:
"Rüstgebet": Prière silencieuse pour se préparer au culte (repentance, prière pour que
Dieu ouvre le cœur aux promesses de l'Evangile et qu'il prépare le communiant à la
Sainte-Cène).
1 ¨cantique
Introït: Psaume ou cantique pour accueillir le Seigneur. Ce chant débouche sur une
doxologie trinitaire ("Gloria Patri").
Kyrie eleison: C'est ainsi qu'on saluait jadis le roi à son entrée dans la ville. On invoquait
sa clémence et ses bienfaits. C'était le cri auquel on accueillait Jésus, quand on avait
besoin de lui (malades des évangiles). L'Eglise confesse que le Christ est son seul
Seigneur et Bienfaiteur.
"Gloria in excelsis": La prière du "Kyrie" devient louange et adoration. Le Rédempteur
vient au milieu de son peuple qui le salue donc aux accents de l'hymne chanté par les
anges à Noël.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
51
Collecte: "Prions Dieu": A vrai dire invitation à une prière silencieuse avant la collecte
proprement dite. Mais avant que l'officiant prie pour l'Eglise réunie, il la bénit
("Dominus vobiscum") et se laisse bénir par elle ("Tecum").
2) Le culte de la Parole:
Epître: Enseignement, exhortations, consolations apostoliques.
"Alléluia": "Louez Yahvé!" L'Eglise remercie Dieu pour le don dee sa Parole.
2 cantique ("Hauptlied" ou "Wochenlied"). Ce cantique est fixé pour chaque dimanche
de l'année et se réfère généralement à l'évangile du jour.
Evangile: Bonne nouvelle! Paroles du Christ lui-même ou récit de l'un de ses actes
salvifiques. D'où la salutation de l'assemblée: "Louange à toi, ô Christ!" L'évangile du
jour est ce qui donne au dimanche en question sa spécificité.
Credo: L'Eglise répond au message de l'évangile par une confession de foi. Symbole de
Nicée pour les cultes de Sainte-Cène, symbole des apôtres pour les autres cultes (rappel
du baptême). Le Credo met l'Eglise locale en communion avec l'Eglise universelle.
Sermon: Proclamation de la Parole même du Christ, dans la puissance du Saint-Esprit,
avec appel à la repentance, la foi et la sanctification.
Offrandes: Réponse reconnaissante de l'Eglise à la Parole de son Seigneur. C'est l'Amen
de l'Eglise, un sacrifice agréable à Dieu qui témoigne de l'amour de son peuple, de sa
responsabilité dans l'accomplissement de la mission qui lui a été confiée, et de sa
compassion pour les nécessiteux.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
52
Annonces: Informations qui feront souvent l'objet de l'intercession de l'Eglise dans la
prière qui suit.
Prière ecclésiastique: L'Eglise intercède a) pour elle-même et sa mission, b) pour les
institutions en place dans le monde et tous ceux qui exercent des responsabilités, c)
pour tous ceux qui souffrent (cf. le schéma du Notre Père).
3) La célébration eucharistique:
Grande fête, festin dans lequel le Roi du monde s'offre aux siens pour le pardon de leurs
péchés, le salut et la vie éternelle.
"Sursum corda" - "Nous les élevons vers le Seigneur" - "Louons le Seigneur, notre
Dieu!" - "Ceci est digne et juste": Chantés en alternance par l'officiant et l'assemblée. Ces
répons remontent à Hippolyte de Rome (# 220). Le pardon nous fait lever les yeux vers
Dieu. L'assemblée dit sa joie de pouvoir se tourner vers lui et de l'accueillir dans le
sacrement, et un tel Dieu est digne de louanges.
Préface: Adoration du Dieu majestueux, en union avec les anges et les bienheureux, avec
des textes différents pour les jours de fête. Les communiants se savent et se proclament
en communion avec l'Eglise universelle militante et triomphante. La Préface correspond
au Grand Hallel de la liturgie pascale juive. Elle remonte au II siècle, où elle était
cependant beaucoup plus longue qu’à l'heure actuelle.
Sanctus: Louange au Dieu trois fois saint. L'Eglise accueille son Roi et Rédempteur qui
vient à elle dans le sacrement, et le fait dans les termes dans lesquels il fut accueilli à son
entrée dans Jérusalem. Le Sanctus est un amalgame d'Es 6:3 (introduit dans la liturgie
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
53
en Afrique du Nord, vers l'an 200) et de Ps 118:25.26 (partie du Grand Hallel juif chanté
à la Pâque).
Epiclèse: Invocation du Saint-Esprit sur les communiants, qui généralement ne figure
pas dans les liturgies luthériennes.
Consécration des éléments: Au coeur de la célébration eucharistique figurent les paroles
d'institution du Christ (mises en musique par Luther, en 1526). Affirmation que l'Eglise
célèbre le sacrement institué par lui, confession de la présence réelle de son corps et de
son sang pour le pardon des péchés et mise à part du pain et du vin (consécration) pour
cet usage sacré. La paroisse est censée être à genoux pendant la récitation ou plutôt le
chant de ces paroles (geste d'adoration et de respect devant ce grand mystère d'amour).
Le signe de croix rappelle que toutes les bénédictions offertes dans le sacrement ont
leur fondement dans la mort rédemptrice du Christ.
Anamnèse: "Toutes les fois que vous..." (1 Cor 11:26). L'Eglise commémore dans
l'adoration la mort, la résurrection et l'ascension de son Seigneur et lui demande de
revenir bientôt, selon sa promesse, pour réunir les siens autour de son trône (Lc 22:18).
Amen: L'Eglise confesse, en disant "Amen", qu'elle attend avec foi le jour du grand festin
céleste dont la Cène est la préfiguration.
Notre Père: Préparation à la communion: le Royaume à venir du Christ, le pain de vie, le
pardon des péchés qui sont le contenu du Notre Père sont précisément les dons offerts
dans le sacrement. En usage dans le culte eucharistique dès la fin du I siècle (Didachè).
Luther en composa en 1526 une paraphrase chantée. Le Notre Père existe sous deux
formes: chanté par le pasteur avec la doxologie entonnée par l'assemblée tout entière,
ou bien chanté tout entier par l'assemblée.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
54
Souhait de paix: "La paix soit avec vous!" Invitation à vivre dans la paix par l'amour qui
pardonne, adressée à ceux qui vont communier.
"Agnus Dei": Nouvelle invocation et appel à la miséricorde de celui qui a réconcilié les
siens avec Dieu par son sacrifice. Adoration de l'Agneau immolé. Introduit à Rome vers
700, puis dans tout l'occident.
Distribution: Luther dit peu de temps avant de mourir: "Wir sind Bettler, das ist wahr".
Mais celui qui communie dans la foi aux promesses qui lui sont faites et se réjouit de
l'invitation de son Seigneur, est richement béni par le don du corps et du sang du Christ.
Les paroissiens qui ne communient pas intercèdent pour les communiants et célèbrent
par le chant de cantiques eucharistiques le Seigneur présent dans le sacrement.
"Nunc dimittis": Cantique de Siméon introduit à Strasbourg en 1525. Jésus offre aux
communiants la grâce accordée au vieux Siméon, celle de voir son Sauveur et de le
porter dans les bras.
4) Fin du culte ("Postcommunio"):
Collecte finale: La fin du culte est simple et sobre. Il ne convient plus de parler beaucoup
après la célébration du grand mystère qu'est l'eucharistie. La collecte remercie Dieu
pour son don et lui demande de bien vouloir le faire fructifier.
"Ite, missa est!" ("Entlassung"): "Allez en paix" ("Gehet hin im Frieden des Herrn!"). Il ne
s'agit pas simplement de renvoyer les communiants à leur vie privée, à l'issue du culte,
mais ils sont chargés de témoigner dans le monde de la paix de Dieu dont ils ont été
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
55
gratifiés dans la prédication et le sacrement. L'"Entlassung" est "missio", envoi en
mission.
Bénédiction: La bénédiction du Dieu trois fois saint est placée sur l'assemblée par le
signe de la croix.
Amen: L'Eglise reçoit cette bénédiction avec foi.
Dans sa "Deutsche Messe" de 1526, Luther, après la Préface, le Sanctus et le Notre Père,
fait figurer les paroles d'institution qui sont immédiatement suivies de la distribution. Il
tient à réunir étroitement les deux éléments essentiels du sacrement, les paroles
d'institution et la consommation des espèces. Rien, selon lui, ne doit séparer les deux,
pour bien montrer que le don qui nous est fait dans la Cène ne dépend pas de nos
prières, mais uniquement de la Parole et de la promesse du Christ.
L'officiant luthérien est censé porter des habits blancs et une étole à la couleur
liturgique correspondant au dimanche ou au jour de fête en question. Le blanc est la
couleur de la lumière, de la joie et du monde céleste de Dieu. C'est en soi la meilleure
couleur pour le culte, car celui-ci est joie à l'écoute de l'Evangile et dans la certitude de
la présence du Seigneur. Cf. Act 3:5; 4:4; 7:9. Quant à l'étole, elle symbolise le joug du
Christ, le ministère qu'il a confié à ceux qui sont les serviteurs de sa Parole et de ses
sacrements. Rappelons enfin que normalement, la confession des péchés et l'absolution
ont lieu dans un culte spécial qui sert à préparer les communiants à la célébration du
sacrement ("Beichtgottesdienst").
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
56
L'ADMINISTRATION DU BAPTEME
L'administration du baptême étant confiée à l'Eglise, elle doit avoir lieu en temps ordinaire
dans le cadre du culte paroissial. Elle sera donc brève, mais empreinte de dignité, chose très
importante, en particulier pour les gens de l'extérieur.
Le baptême est un moyen de grâce et de salut (Act 2:38; Gal 3:26.27; 1 Pi 3:21; Act 22:16;
Eph 5:26; Tite 3:5; Rom 6:3.4; Jn 3:5.6).
Le pédobaptisme n'est explicable qu'à partir du concept de moyen de grâce... Le baptême
prend la place de la circoncision (Col 2:11.12). Des familles entières ont été baptisées par les
apôtres (Act 11:14.16; 16:15.33; 1 Cor 1:16). Les enfants naissent dans le péché originel (Ps
51:5; Jn 3:5.6). Dieu veut qu'ils soient sauvés (Mc 10:13-16; Lc 18:15-17). Seul le baptême
peut le faire (Tite 3:5.6; 1 Pi 3:21; Col 2:11.12). Le baptême des enfants est attesté par les
Pères de l'Eglise primitive, en particulier Tertullien et Origène. Cf. le cours de dogmatique sur
le baptême.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
57
Quels enfants faut-il baptiser?
A l'exemple du Christ, l'Eglise Luthérienne baptise les enfants qui lui sont amenés par leurs
parents (Mc 10:13-16; Lc 18:15-17) ou par ceux qui exercent sur eux l'autorité parentale. Si
l'un des deux parents est un incroyant et qu'il ne s'oppose pas au baptême de son enfant,
l'Eglise agira selon 1 Cor 7:14 et 2 Tim 1:5. Le pasteur baptisera un enfant, quand il a bon
espoir de pouvoir l'instruire, la garantie en tout cas que les parents n'y mettront pas
d'obstacle. Le baptême d'un enfant dans les conditions indiquées ci-dessus peut aussi être la
porte d'entrée dans des foyers et donc un tremplin missionnaire.
Les enfants avancés en âge seront baptisés avant la confirmation, mais après une première
instruction sur le péché, la grâce du Christ et les effets du baptême.
Si des enfants de parents chrétiens meurent avant le baptême, on les consolera en faisant
appel à la miséricorde de Dieu qui n'est pas liée aux moyens de grâce (Lc 1:15). Dieu y lie son
Eglise, mais n'y est pas lui-même lié. Un pasteur doit exhorter en public et en privé à prier
pour les enfants avant leur naissance et à ne jamais retarder indûment la date d'un baptême.
Aucun chrétien ne doit douter de son baptême. En cas de doute justifié, on le rebaptisera.
Cela confirme la nécessité d'enregistrer avec soin les actes baptismaux dans les registres
paroissiaux. Il est bon aussi de remettre aux parents un certificat du baptême.
Le baptême d'urgence peut être administré par tout chrétien. Il faut alors l'attester
publiquement et l'inscrire dans les livres paroissiaux.
Il faut également savoir rester humble. Dieu ne nous a révélé au sujet du baptême que ce qu'il
nous faut savoir pour être sauvés. L'Ecriture ne répond pas à toutes les questions. Ainsi elle
ne nous dit pas pourquoi il n'existait dans l'A.T. qu'un moyen de grâce pour les garçons,
comment les filles étaient reçues dans le peuple de Dieu, ni comment il peut régénérer des
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
58
nourrissons ou ce qu'est une foi inconsciente et non réfléchie. Le pasteur doit s'en tenir à la
révélation biblique, sans faire état de ses hypothèses personnelles.
Parrains, marraines et témoins:
Dans l'Eglise ancienne, les catéchumènes adultes étaient parrainés par quelqu'un
garantissant que leur foi était sincère. Ceci pour éviter l'infiltration d'ennemis du
christianisme dans l'Eglise. Les enfants avaient des parrains prêts à prendre soin d'eux, au
cas où les parents mourraient au cours d'une persécution ou d'une autre façon.
Le parrainage est un aidaphoron, mais une coutume louable. Parrains et marraines doivent
attester que l'enfant a été baptisé, prier pour lui et veiller à son instruction religieuse. Seuls
des chrétiens luthériens peuvent sen acquitter de la façon dont cela leur est demandé le
jour du baptême. Des chrétiens d'autres Eglises et d'honorables personnes sans affiliation
religieuse ne peuvent être que témoins et doivent être considérés comme tels. Des
blasphémateurs, athées, excommuniés, ennemis du christianisme ne peuvent être admis
comme témoins. Si parrains et marraines ne peuvent assister au baptême, ils s'engagent
néanmoins. Leurs représentants seront de simples témoins de l'acte.
L'incrédulité personnelle de l'officiant n'invalide pas le baptême, car la validité de celui-ci ne
repose sur la foi de personne, mais se fonde exclusivement sur les promesses du Christ. Une
Eglise unitaire, par contre, n'administre pas le baptême institué par le Christ. "Accedit
Verbum ad elementum et fit sacramentum" (Augustin, Tract. 80 in Joh. cap. 5). Or dans une
Eglise unitaire, la Parole du Christ n'accède pas à l'élément. Il n'y a donc pas de sacrement!
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
59
L'acte baptismal:
Seule l'application de l'eau au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit constitue l'essence du
baptême. Cependant, puisque le baptême est promesse de l'Evangile rendue visible, l'Eglise
l'a entouré de certains actes, gestes et paroles qui en constituent la liturgie.
La matière en est l'eau, l'eau naturelle, quelle qu'en soit l'origine. L'emploi de tout autre
liquide est contraire à l'institution divine.
Quant à son application, elle divise la chrétienté. Les évangéliques revendiquent
généralement l'immersion, en se basant sur l'étymologie de verbe "baptizein" et sur le
symbolisme que cette immersion contient. Or "baptizein" a plusieurs sens dans le N.T.: laver
(Mc 7:3.4; 10:38), asperger (Héb 10:22; 12:24). D'autre part, le baptême ne symbolise pas
que la mort par noyade et l'ensevelissement (Rom 6:3.4), mais signifie aussi le lavage, la
purification du péché (Act 22:16), l'effusion du Saint-Esprit (Tite 3:5.6), l'aspersion du sang
du Christ (Héb 10:22; 12:24, comparé à Ex 24:8; Héb 9:19; 1 Cor 10:2). Les différents modes
d'application de l'eau symbolisent donc les différents aspects du baptême. D'autre part, la
purification du baptême ne dépend pas de la quantité d'eau utilisée, mais de la promesse liée
à cette eau (Jn 13:9.10).
L'aspersion peut se faire à la main ou avec un objet. C'est un adiaphoron. L'Eglise doit se
laisser guider par le principe de l'amour qui édifie. Il faut qu'il y ait aussi application réelle
d'eau, que celle-ci coule effectivement.
Le baptême est de l'eau unie à la Parole. L'ordre et la promesse sont contenus dans Mt 28:19,
où le terme "onoma" désigne l'essence même de Dieu ou Dieu lui-même tel qu'il s'est révélé.
Le texte affirme donc l'effet salvifique du baptême qui met le baptisé en communion avec
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
60
Dieu Père, Fils et Saint-Esprit. Il n'a pas d'action miraculeuse; il régénère, justifie et sauve non
pas "ex opere operato", mais par la foi qui s'approprie les promesses divines.
Le baptême est administré selon la formule de Mt 28:19, mais la récitation de ce texte ne fait
pas en soi le sacrement. Elle est requise non pour l'essence du baptême, mais pour la
certitude de foi et la consolation du baptisé. Toute autre formule apportant le même message
rendrait le baptême tout aussi valide. Cf. les expressions "epi tô onomati Ièsou Christou" (Act
2:38), "en tô onomati Kuriou" (Act 10:48), "eis to onoma tou Kuriou Ièsou Christou" (Act
8:16), "eis Christon" (Gal 3:27) "eis ton Christon" (Rom 6:3), qui ne sont pas à vrai dire des
formules baptismales, mais des tournures présentant le baptême administré par les apôtres
comme étant celui institué par le Christ. Il faut cependant éviter le doute et la confusion dans
l'esprit des gens.
La liturgie baptismale est la proclamation de la Parole de Dieu pour l'instruction et
l'édification. Elle doit donc annoncer la réalité du péché originel, la rédemption par le Christ
et le pardon offert dans le baptême.
Le signe de la croix sur le front et la poitrine n'a pas de vertu magique, mais symbolise la
rédemption du baptisé. La prière invoque les bénédictions de Dieu sur le baptisé. La lecture
de Mc 10:13-16 évoque les bénédictions que le Christ apporte aux enfants. Le "devotum
davidicum", la bénédiction davidique de Ps 121:8, se situe juste avant le baptême lui-même.
De même, la lecture des devoirs des parents et des parrains et marraines. Puis viennent
l'"abrenuntiatio", le renoncement à Satan et à ses oeuvres, et la confession de foi en le Dieu
trinitaire.
Le pasteur évitera toute lecture mécanique et monocorde de la liturgie. Il est bon aussi qu'il
ne se contente pas systématiquement de lire une méditation toute faite, mais qu'il en fasse
une personnelle.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
61
Dans le cas d'un baptême d'urgence, le pasteur abrégera la liturgie ou la supprimera tout
entière pour ne conserver que l'acte bapstismal lui-même.
L'imposition des mains ("cheirothesia"), coutume apostolique (Act 6:5.6; 8:14-17; 1 Tim
4:14; 2 Tim 1:6) reprise de l'A.T., signifie la transmission et l'application personnelles au
baptisé de la bénédiction divine.
L'exorcisme ("Sors, esprit impur, et cède la place au Saint-Esprit!", ou: "Je te conjure, esprit
impur, au nom de Dieu le Père, le Fils et le Saint-Esprit, de sortir de ce serviteur (cette
servante) de Jésus-Christ!") appliqué à l'origine aux personnes possédées d'un démon, fut
communément introduit au cours du IV siècle dans la liturgie baptismale pour attester la
grandeur de la corruption humaine et la puissance merveilleuse de la grâce. Il est tombé en
désuétude.
Parfois, le baptisé est revêtu, après le baptême et avant la bénédiction, du "chrisom",
vêtement blanc symbolisant la purification par le baptême.
Le nom de baptême que reçoit l'enfant lui rappelle son baptême, l'alliance de grâce de Dieu,
et le fait que son nom est inscrit dans le livre de la vie (Phil 4:3). On ne choisira donc pas de
nom notoirement païen ou antichrétien, et aucun nom soulevant la risée. Il ne faut pas non
plus que le nom donné à l'enfant constitue pour lui une gêne dans la vie.
Il est bon que le pasteur prononce une prière d'action de grâces, quand un enfant naît dans la
paroisse. Une belle coutume veut aussi que la mère et son enfant reçoivent la bénédiction de
la part du pasteur après le baptême ou lors du premier culte auquel ils assistent tous les
deux.
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
62
L'ADMINISTRATION DE LA SAINTE CENE
La Sainte Cène pouvant être reçue pour le jugement, l'Eglise a de bonne heure veillé à
l'administrer de façon scrupuleuse. Elle a mis en place le catéchuménat et la confession
privée. Cette dernière, dont les traces remontent au IV siècle (nous parlons uniquement de
la confession préalable à la communion), a donné lieu par la suite à bien des abus, dont la
doctrine de la justification par les oeuvres. Pour l'attitude de Luther à ce sujet, cf. W2 XX, 47 s.
Cf. aussi la C.A., Art. XXV, 12; Art. XI, 1 et l'Apologie, Art. VI, 6-8.
Après être devenue obligatoire après la mort de Luther, il fut décidé sous l'impulsion du
piétiste Caspar Schade de Berlin et sous l'initiative du prince électeur de Brandebourg de la
remplacer par un "Beichtgottesdienst", la veille de l'administration de la Cène. C'est ainsi que
la confession privée tomba en désuétude. Dans le Synode du Missouri, le "Beichtgottesdienst"
tomba lui aussi en désuétude dans les années 1940, souvent pour des raisons matérielles
(trop grandes paroisses, impossibilité de mobiliser les gens le samedi, etc.). Il ne fut pas non
plus possible de le célébrer le dimanche, du moins dans les paroisses ayant plusieurs cultes le
dimanche matin où là où le pasteur desservait plusieurs communautés.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
63
Qu'on puisse ou non restaurer la confession privée avant la Cène ou le "Beichtgottesdienst",
le pasteur doit veiller à ce que ses paroissiens communient de façon digne, c'est-à-dire dans
la repentance et la foi. Il doit donc, dans la prédication, le message eucharistique, l'instruction
religieuse, les études bibliques et la cure d'âme, enseigner la Loi et l'Evangile, l'essence et la
grâce de la Cène et la façon chrétienne de la célébrer.
Il ne doit pas se faire le juge des âmes (cf. la Préface au Petit Catéchisme). Seuls peuvent être
exclus les pécheurs notoires et les hétérodoxes (Mt 7:6; 1 Cor 11:28.29).
Il est bon qu'on observe ou introduise la pratique de l'annonce ("Anmeldung"): dans la
sacristie, à des heures fixes connues de tous, par carte (Missouri) ou par un
"Beichtgottesdienst". Le pasteur ne doit pas être légaliste et imopser un procédé particulier.
Il doit par ailleurs être disponible (et la paroisse doit le savoir) pour des entretiens de cure
d'âme et la confession privée. Nécessité d'observer le secret de la confession (même vis-à-vis
de la femme du pasteur et de ses collègues!).
Personnes non admises à la Sainte Cène: 1) les enfants, 2) les malades mentaux graves, 3) les
pécheurs notoires, 4) les gens ne partageant pas la confession de foi de l'Eglise Luthérienne...
Le pasteur ne peut en aucun cas excommunier lui-même. Par contre, la suspension provisoire
de la Communion fait partie de son ministère de surveillant des âmes.
Les éléments:
Pain azyme ou levé? C'est un adiaphoron. Il est d'usage cependant dans les Eglises
Luthériennes d'utiliser des hosties. Du vin, jus de vigne fermenté. Sont à proscrire le jus de
raisin et tout autre liquide.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
64
Les ustensiles:
Les ustensiles eucharistiques sont mis en place avant le culte. Ils doivent être propres. Il
s'agit du ciboire (boîtier contenant les hosties; veiller à ce qu'il y en ait asez), la patène, la
cruche (veiller à ce qu'il y ait assez de vin), la coupe ou le calice. Parfois aussi une cuillère
perforée pour ôter un corps étranger tombé dans le vin. Enfin, une serviette pour essuyer la
coupe. Certaines paroisses, dans certains pays, utilisent des verres individuels. C'est en soi un
adiaphoron, mais la coupe symbolise mieux la participation au même vin et la communion
qui unit les communiants. Des raisons d'hygiène peuvent cependant rendre l'utilisation de
verres individuels nécessaire. Il va de soi que les mains du pasteur doivent être propres (pas
de traces ni d'odeur de tabac, ongles propres).
La consécration:
Non pas transsubstantiation, mais mise à part des éléments pour cette utilisation sacrée.
L'Eglise Luthérienne se sert pour cela des paroles d'institution, sans rien y ajouter. Les
prononcer de façon à ce que toute l'assemblée les entende. Faire le signe de la croix sur les
éléments, sur toutes les hosties et sur tout le vin. Si élever les éléments est assimilé à la
transsubstantiation catholique et au sacrifice de la messe, il convient de ne pas faire ce geste.
Si les éléments venaient à manquer, en faire chercher d'autres et les consacrer à leur tour.
Distribution:
De préférence à genoux, mais aussi debout, là où la génuflexion n'est pas possible. Veiller en
particulier à ce que chacun reçoive du vin (inviter les fidèles à prendre la coupe en main et à
la diriger). Les communiants se présentent en un nombre et dans un ordre définis par la
paroisse. Pas de précipitation, pour ne pas faire tomber du pain et du vin à terre. Cependant
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
65
ce ne seraient pas pour autant le corps et le sang du Christ, en raison de l'axiome: "Nihil habet
rationem sacramenti extra usum a Christo insitutum". Dignité et esthétique naturelles. Un
paroissien pourra être désigné pour conduire les vieillards et les infirmes à l'autel, puis vers
leurs bancs.
Prononcer la formule de distribution à voix intelligible pour les communiants. Eviter d'en
improviser une. La formule en usage dans l'Eglise Luthérienne remonte au XVI siècle et
contient un beau message. Pendant la distribution, la paroisse peut chanter un cantique, ou
l'organiste jouer un intermède (en sourdine!). Les hosties restantes seront rangées, et le
vin restant jeté. Le tout dans la dignité. Quand on célèbre la communion dans les maisons, il
faut consacrer les éléments devant les malades.
Questions annexes:
1) Un laïc peut-il administrer la Cène?
Si un laïc peut baptiser en cas d'urgence, il peut aussi administrer la Cène. Cependant, ces cas
d'urgence sont plus rares que ceux concernant le baptême. Généralement, un mourant
pourra recevoir le sacrement des mains de son pasteur. Elle n'est pas plus que le baptême
d'une nécessité absolue pour le salut et revêt même un moindre caractère d'urgence que lui.
Il existe toutefois des situations exceptionnelles (guerres, épidémies, persécutions) où un laïc
peut être appelé par ses coreligionnaires à administrer le sacrement.
2) Un pasteur peut-il se donner la Sainte Cène?
Oui, s'il n'y a pas d'autre pasteur dans la paroisse pour la lui donner. Dans certains Eglises, les
pasteurs la prennent en conférences pastorales. Il est aussi tout à fait légitime de charger un
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
66
laïc de la lui donner, ou de la donner à la dernière rangée de communiants parmi lesquels se
trouve le pasteur.
3) Peut-on donner la Sainte Cène lors d'une bénédiction nuptiale?
Il vaut mieux ne pas le faire, car l'assemblée elle-même n'y participera sans doute pas.
D'autre part, il y a généralement parmi les invités des chrétiens non luthériens, voire des
incrédules.
4) Faut-il refuser la Sainte Cène à un inconnu qui se présente à l'autel?
Il vaut mieux éviter la chose par une exhortation appropriée, si des non paroissiens assistent
au culte. Si l'intéressé agit par ignorance ou faute d'avoir compris l'exhortation, il vaut sans
doute mieux la lui donner, sinon on risque de le détourner à jamais de l'Eglise.
La préparation à la communion:
"Bien préparé", "dignement": Attention à l'utilisation de ces mots! Le pécheur est toujours
intrinsèquement indigne. La dignité du communiant est celle du Christ qui le recouvre de son
pardon. Sa dignité personnelle ne concerne que la façon de manger et de boire. Cf. Formule
de Concorde, S.D. VII, 124.125.
La préparation à la communion doit être beaucoup plus que l'éveil d'un pieux sentiment de
ferveur; plus aussi que la prise de conscience de certains péchés...
Il faut éviter le sentiment que le Seigneur exige des communiants une perfection de fait,
sentiment qui ne ferait que détourner de la Cène et remplir de désespoir. L'auto-examen
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
67
porte sur la réalité et la sincérité de la repentance, la volonté de renoncer au mal, la
constatation que rien dans les rapports avec le prochain n'empêche de s'approcher de la
Table du Seigneur, et bien sûr la foi en la grâce surabondante du Christ qui couvre tous les
péchés.
Pour les dons de la Sainte Cène et les dispositions de celui qui veut communier (pardon,
humilité, foi, joie, esprit d'adoration, etc.), cf. Detlev Lehmann, Oberurseler Hefte.
Non-admission à la Sainte Cène:
Il faut distinguer entre la suspension provisoire demandée par le pasteur et
l'excommunication prononcée par la paroisse.
Exégèse de Mt 18:15-20.
Ni le pasteur ni l'Eglise n'ont le droit de juger les cœurs. Personne n'a donc le droit de douter
de la sincérité d'une personne qui confesse sa foi. Mais si l'impénitence est devenue
manifeste, le pasteur ne peut admettre à la Cène (1 Tim 5:22). C'est une façon évidente
d'annoncer la Loi. Si le pasteur connaît seul le péché de l'intéressé, il doit seul lui demander
de s'abstenir de communier. Si l'intéressé s'approche quand même, passer devant lui sans lui
donner le sacrement revient à le démasquer publiquement. Or, il ne faut faire cela que si son
péché est de notoriété publique. Péché public demande une repentance publique. Mais on ne
peut définir une fois pour toutes le degré de publicité que cette confession doit revêtir. Quel
est d'ailleurs le degré de publicité du péché en question? La confession publique ne lui
donnera-tr-elle pas plus de publicité qu'il n'en a? Il ne faut pas non plus donner l'impression
que la confession publique est une satisfaction nécessaire pour le péché qui rend digne de la
Cène.
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
68
L'EDUCATION CHRETIENNE DES ENFANTS
CONFIRMATION
Les enfants appartiennent à Dieu par la création (Gen 30:2; Ps 127:3), la rédemption (Jn 3:16;
Mt 18:10.11) et, pour les enfants chrétiens, par la sanctification (Act 2:38.39). Leur éducation
chrétienne (instruction religieuse, formation à la vie chrétienne) est donc nécessaire.
Ils sont confiés à leurs parents (Ps 128:3; 78:1-8; 1 Tim 5:8; Eph 6:1-4). C'est à eux
qu'incombe avant tout leur éducation chrétienne (Deut 4:9.10; Eph 6:4). Ils ne peuvent pas se
libérer de cette sainte obligation (exemple d'un couple uni, d'une vie sanctifiée, lecture e la
Parole de Dieu, prière, instruction, exhortations, etc.). L'Eglise chrétienne cependant est là
pour leur venir en aide. Aux USA, elle a pour cela des moyens considérables (écoles
paroissiales, collèges et universités appartenant aux Eglises). Cf. M. Luther, sur l'importance
des écoles chrétiennes (W2 X, 422.458).
L'Ecole du dimanche:
A l'origine, aux USA, elle durait tout le dimanche et était destinée aux enfants pauvres dont
personne ne se souciait.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
69
Contenu: étude d'une leçon d'histoire sainte et chant de cantiques, tout cela proportionné à
l'âge des enfants. Non pas trop de substance, mais un message à leur portée. Non pas "multa",
mais "multum".
La qualité d'une école du dimanche est toujours celle de ses moniteurs. Il faut donc les choisir
judicieusement, en fonction de leurs connaissances et de leurs aptitudes pédagogiques. Il faut
aussi que ce soient des personnes consacrées. Nécessité, pour le pasteur, de les former. Une
petite collecte est une chose excellente et habitue les enfants à ce geste fondamental de la
gratitude chrétienne.
Les moniteurs sont encouragés à rendre visite aux enfants absents, pour leur remettre le
matériel de la leçon qu'ils n'ont pas suivie et les exhorter à la régularité. C'est aussi une
bonne occasion pour parler avec les parents.
La confirmation:
Luther a rejeté le rite sacramentel catholique de la confirmation et ne l'a remplacé par rien
d'autre. Après 1539, différents territoires luthériens allemands introduisirent une cérémonie
appelée confirmation. Les uns mettaient l'accent sur l'instruction religieuse préalable à
l'admission à la Sainte Cène, les autres sur la prière et l'imposition des mains. D'autres
encore, sur les voeux de confirmation. Le piétisme, par la suite, alla jusqu'à parler de
renouvellement de l'alliance du baptême. Le rationalisme faisait de la confirmation la
réception des catéchumènes dans la communauté des chrétiens adultes. Beaucoup de
tendances et de déviations.
La confirmation n'est pas un sacrement institué par le Christ, mais une coutume
ecclésiastique belle et riche en bénédictions, si elle est bien préparée et accomplie. C'est un
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
70
rite dans lequel l'Eglise donne à des enfants ayant été instruits dans la foi la possibilité de la
confesser publiquement; elle prie aussi pour eux en leur faisant imposer les mains, et les
invite à participer à la Sainte Cène en chrétiens capables de s'examiner.
Elle n'est pas le renouvellement de l'alliance du baptême. Dieu n'a pas besoin de la
renouveler, et les chrétiens ne peuvent pas le faire. Ce serait laisser entendre aussi que les
enfants en sont déchus, qu'il faut donc la rétablir. Il est préférable aussi de ne pas parler de
renouvellement des voeux du baptême; l'expression peut être ambiguë. Le vœu de la
confirmation est l'intention exprimée de rester fidèle à Dieu. Cette intention est naturelle. On
ne peut pas confesser sa foi sans désirer y persévérer. Mais ce n'est pas un serment qui doit
garder l'enfant sur le droit chemin. La persévérance est l'oeuvre de Dieu et non de l'homme.
Utiliser ce serment pour obtenir de la part d'un jeune qu'il reste fidèle à Dieu et à l'Eglise et
l'accuser de parjure en cas d'infidélité, c'est agir de façon légaliste. Enfin, la confirmation
n'est pas un diplôme, un certificat de fin d'études. Une paroisse doit offrir aux jeunes
confirmés d'autres possibilités d'instruction religieuse.
L'enseignement du catéchisme sera un endoctrinement sérieux à la portée des enfants, et
authentiquement biblique. Ceci est conforme à l'ordre du Seigneur (Mt 28:19). Le minimum
le plus strict est l'aptitude à s'examiner soi-même. Pas de préparation superficielle et
précipitée! Ce n'est bon ni pour les enfants ni pour l'Eglise. Il faut qu'ils soient solidement
enracinés dans l'Ecriture et sachent distinguer la vérité de l'erreur. Même chose pour
l'histoire sainte et un choix de psaumes et de bons cantiques.
Cependant pas "multa", mais "multum". La quantité dépend de l'arrière-plan religieux de
l'enfant, de son intelligence et de ses capacités de mémorisation. De la compréhension et de
la récitation par coeur, la première est plus importante que la seconde. Tout enfant devrait
connaître par coeur les six points du Petit Catéchisme et une sélection des textes bibliques les
plus importants. Luther indique trois règles dans l'introduction au Petit Catéchisme: 1)
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
71
Enseigne le texte. 2) Enseignes-en le sens. 3) Mets l'accent sur les choses les plus
importantes. Le pasteur ne sera pas seulement un enseignant qui communique des
informations, mais aussi le berger des enfants. Commencer et terminer chaque séance de
catéchisme par une prière.
Il est préférable de faire l'audition le jour même de la confirmation, en raison de l'importance
de son contenu et de la profession de foi qu'elle constitue. Que l'audition soit digne, bien
compréhensible, simple, chaleureuse et vivante! Elle ne sera pas conçue comme un examen
plus ou moins bien réussi par les uns et les autres, mais comme une occasion de témoignage
donnée aux enfants. Donc, nécessité de la simplicité. Le pasteur donnera à chaque enfant la
possibilité de s'exprimer, en s'arrangeant pour qu'ils fassent tous bonne impression.
L'âge de la confirmation: Elle a lieu en règle générale à l'âge de 14 ans. Pa de légalisme en la
matière. En raison du manque de maturité de certains enfants, des problèmes liés à cet âge
(crise d'adolescence, problèmes de relations, doutes, contestations, etc.) des bonnes raisons
qu'il y aurait de leur faire poursuivre leur instruction religieuse, il serait sans doute bon de
dissocier l'admission à la Sainte Cène de la confirmation proprement dite. A étudier très
sérieusement!
La date de la confirmation devrait, dans la mesure du possible, être toujours la même.
Cependant, plutôt la retarder que bâcler la confirmation.
Donner aux vœux leur véritable portée (engagement, mais non serment légaliste). Don d'une
Bible et d'un document de confirmation. Eviter les fausses conceptions de la confirmation:
elle n'apporte rien à l'enfant qu'il n'ait déjà, ne l'élève pas à un degré supérieur, ne le
rapproche pas de Dieu. Elle ne doit pas non plus supplanter le baptême, ajouter quelque
chose à celui-ci. Loin de le minimiser, elle doit au contraire l'exalter. Enfin, la confirmation ne
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
72
doit pas être conçue comme l'aboutissement de l'éducation religieuse, comme une sorte de
Certificat d'Etudes religieux. Elle n'est qu'une étape dans une vie qui doit être une vie de
persévérance, de fidélité, de témoignage constant et de renouvellement incessant des voeux
du baptême. Autant de vérités qu'il faut annoncer aux confirmands dans leur préparation à la
confirmation.
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
73
LE MARIAGE ET PROBLEMES ANNEXES
Le mariage est un contrat civil. Il est inscrit dans le code civil, écrit ou oral, de toute société
humaine, à quelque race, ethnie, civilisation ou religion qu'elle appartienne. Il fait partie des
institutions de ce monde. Son essence, la façon dont il est conclu, les droits et devoirs des
époux, les éventuels empêchements ou obstacles a mariage, l'âge minimal requis, tout cela
est défini dans tout dictionnaire ou encyclopédie digne de ce nom. Le mariage n'a donc dans
son essence rien de spécifiquement chrétien. Il fait partie de l'ordre créationnel.
Mais le mariage est aussi d'institution divine. C'est à ce titre-là qu'il fait partie de
l'enseignement et de la cure d'âme d'un pasteur et qu'un chapitre lui est consacré dans la
théologie pastorale. Cela signifie que Dieu en est l'auteur (Gen 2:18-25; Mt 19:6). Il est pour
la vie entière (Mt 19:3 ss.) et revêt donc un caractère indissoluble (Mt 5:32; 19:6; Rom 7:2 s.,
1 Cor 7:39). Il est tributaire des bénédictions dont Dieu le couronne (Ps 127 et 128). Les
devoirs des époux sont définis dans la Bible (Eph 5:22 s.; 1 Cor 7:10 ss.). Il est conclu au nom
de Dieu, en invoquant sa bénédiction (1 Cor 7:39). Il est, comme tout, sanctifié par la Parole
de Dieu et la prière (1 Tim 4:5).
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
74
Le mariage est le lien qui unit un homme et une femme, lien dont l'essence est une
communion unique en son genre, instituée par Dieu et sanctionnée par la société. En tant que
mariage chrétien, il implique le consentement mutuel, l'amour, l'union sexuelle et la fidélité
envers le partenaire dans l'accomplissement des devoirs respectifs. Les principaux textes de
la Bible relatifs au mariage sont les suivants: Gen 1:27.28; 2:18-25; Mt 19:4-6; 1 cor
7:3-5.9.11.36.39; Eph 5:22.23; Col 3:18.19; Héb 13:4.
Le but du mariage est la communion d'amour et d'aide indispensable à l'épanouissement de
l'être humain (Gen 2:18 ss.), ainsi que la procréation et l'éducation chrétienne des enfants (1
Pi 3:7; Gen 9:1; Deut 6:3-9; Mt 18:5.6.10.14; Eph 6:1-4; Col 3:16.20.21). D'autre part, le
mariage constitue dans ce monde déchu un frein à l'impudicité (1 Cor 7:2).
Le pasteur s'appliquera donc à montrer le magnifique idéal du mariage chrétien qui est, dans
la Bible, l'illustration du lien intime et indissoluble qui unit Dieu ou le Christ à son peuple,
lien fait d'amour, de bonté, d'abnégation et de fidélité.
Les chrétiens ne peuvent pas exiger d'un gouvernement qu'il légifère selon les principes de la
Bible. Même Moïse dut tolérer le divorce en raison de la dureté de coeur de la plupart des
membres du peuple d'Israël. Cependant, le mariage étant d'institution divine, il est de
l'intérêt de tous et donc aussi de l'Eglise chrétienne que la société veille sur lui et le protège,
et donc qu'elle légifère à son sujet. Au moins autant que cela lui est possible. Les déviations et
licences tolérées, voire permises par la société sont à mettre sur le compte de la corruption
humaine et ne peuvent en aucun cas servir de critères aux chrétiens. Il ne suffit pas que
quelque chose soit permis par la société pour que cela soit bien, c'est-à-dire conforme à la
volonté de Dieu.
Inversement, un gouvernement peut être amené, pour des raisons sociales, à être plus strict
encore que la Bible. Consanguinité dans une tribu, par exemple; il existe des tribus où le
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
75
mariage exogamique est une obligation. L'autorité civile précise aussi à quel âge le mariage
est possible, et cet âge n'est pas nécessairement le même sous toutes les latitudes et à toutes
les époques. Il peut être défini en tenant compte de considérations sociales, morales,
professionnelles, etc.
On comprend donc qu'il est important qu'un pasteur connaisse à la fois l'enseignement de la
Bible sur le mariage et la législation du pays dans lequel il exerce son ministère.
Monogamie:
Dieu a institué le mariage monogame (Gen 1 et 2). Gen 2:24 ne peut du reste se réaliser que
dans le mariage monogame (Mt 9:5). Le fait que Jacob David, par exemple, aient été
polygames et que l'Ecriture ne dise pas explicitement que Dieu désapprouva cela, en change
rien à l'institution divine confirmée par le N.T. Dans nos pays occidentaux, la polygamie est
de toutes façons interdite par la loi, qui peut bien sûr être détournée de bien des façons,
divorces et remariages n'étant par exemple qu'une façon particulière de pratiquer la
polygamie. Le problème est plus délicat à traiter dans les civilisations orientales, où du reste
la polygamie est généralement en voie de régression pour des raisons économiques. Il doit
être abordé avec beaucoup de tact et de patience. Il est clair que le missionnaire ne peut pas
permettre à un chrétien de contracter après sa conversion des mariages multiples, donc de
pratiquer la polygamie. Mais comment traiter le cas de ceux qui sont polygames au moment
où ils se convertissent et désirent se rattacher à l'Eglise? Dans le temps on les admettait au
catéchuménat, mais refusait de les baptiser et de les recevoir à la Sainte Cène, à moins qu'ils
ne renoncent à la polygamie, en répudiant les femmes a qu’ils avaient en trop pour ne garder
que leur première épouse, tout en subvenant aux besoins matériels des autres. C'était
contraindre ces ex-épouses à une vie de célibat qu'elles n'avaient pas choisie et peut-être lez
pousser à l'impudicité, tout en les obligeant à une position sociale qui les couvrait souvent de
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
76
honte, faisant d'elles la risée de tous. Ces femmes avaient-elles la possibilité de se remarier?
L'expérience a montré aussi que beaucoup de ces femmes ont sombré dans la prostitution
pour pouvoir survivre, leurs ex-maris n'ayant pas tenu leurs engagements. D'autre part, une
telle pratique n'incitait-elle pas les maris à pratiquer en cachette ce qu'il ne leur était plus
officiellement permis de faire? Aussi vaut-il peut-être mieux prendre ces gens là où ils se
situent au moment où ils entendent l'Evangile, tolérer, comme Dieu le fit dans l'A.T., qu'ils
vivent dans la polygamie, tout en se livrant à un intense travail d'instruction dans lequel on
montre clairement que le mariage institué et voulu par Dieu est le mariage monogame, et que
c'est à ce mariage que sont liées de façon claire les promesses du Seigneur. Une bonne
instruction en milieu missionnaire devrait résoudre le problème de la polygamie en l'espace
d'une ou de deux générations.
Le fait que la polygamie soit pour ainsi dire toujours source de conflits dans une famille,
comme l'attestent même les récits de la vie des patriarches et de Salomon, montre à
l'évidence qu'elle constitue une anomalie et qu'elle ne correspond pas à la volonté de Dieu,
même si celui-ci ne l'assimile pas à un adultère.
Les obstacles à la bénédiction nuptiale et au mariage lui-même:
Le pasteur ne peut pas bénir de mariage interdit par la loi civile. D'autre part, il ne bénira
qu'une union sanctionnée par cette loi et exigera donc qu'on lui présente un certificat de
mariage.
Il bénit en règle générale l'union de gens qui font partie de sa paroisse (ou de
paroisses-soeurs, selon les coutumes locales ou à la demande des pasteurs concernés). Il
évitera de bénir un mariage, s'il ne connaît pas les familles des époux. Il est souhaitable que
l'un des deux partenaires au moins fasse partie de sa paroisse. La bénédiction nuptiale d'un
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
77
couple étranger à l'Eglise n'est possible que si des entretiens préalables ont permis de
constater que les motivations de ce couple sont légitimes et qu'il désire effectivement non
pas sacrifier à une sorte de rite folklorique, mais placer son union sous le regard de Dieu et
vivre des promesses de l'Evangile.
Un pasteur luthérien refusera une concélébration de caractère œcuménique, par exemple un
mariage religieux concélébré avec le ministre du culte d'une autre Eglise. L'administration
commune des moyens de grâce, en l'occurrence la proclamation commune de l'Evangile et la
bénédiction commune d'un mariage présupposent la communion de chaire et d'autel.
Il existe aussi des empêchements moraux au mariage qui peuvent contraindre un pasteur à
refuser la bénédiction nuptiale (mariage avec un voyou, un pécheur scandaleux, un athée et
blasphémateur notoire, mariage aux mobiles manifestement douteux entre un vieillard et
une jeune fille, refus légitime du consentement parental, etc.). Il existe par ailleurs des
remariages de divorcés qu'un pasteur ne peut pas bénir. Enfin il refusera de bénir une union,
si le couple relève du ministère d'un autre pasteur et que celui-ci n'a pas donné son accord
pour que la cérémonie soit célébrée par un confrère. Il ne faut en aucun cas empiéter sur le
ministère d'autrui.
Il est des obstacles qui empêchent de bénir un mariage, mais qui n'autorisent pas pour autant
à dissoudre un mariage existant. Une chrétienne ne devrait jamais épouser un
blasphémateur, mais elle n'est pas pour autant autorisée à dissoudre le mariage contracté.
Enfin, il existe des facteurs qui rendent le mariage nul: degré de consanguinité interdit par la
loi, mariage conclu sous la contrainte ou sous l'imposture (le fait, par exemple, d'avoir caché
à son conjoint qu'on était impuissant ou stérile, alors qu'on le savait parfaitement).
La Bible ne fixe pas d'âge. Le code civil, par contre, le fait. Il existe un âge en-dessous duquel
on ne peut pas se marier, et un autre où le consentement parental est légalement requis. Cela
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
78
dit, de jeunes chrétiens tiendront toujours à avoir le consentement et la bénédiction de leurs
parents. Seules des motivations illégitimes de la part des parents peuvent autoriser un
pasteur à bénir le mariage de deux jeunes dont les parents n'approuvent pas l'union. Dans ce
cas, le consentement du gouvernement remplace l'approbation refusée par les parents.
Des raisons de santé peuvent empêcher le mariage (maladie mentale grave et durable).
D'autres rendent un mariage nul (telle invalidité ou malformation empêchant sa
consommation et qu'on a cachée à son conjoint, ou une grave imposture comme le fait
d'avoir caché au conjoint qu'on était criblé de dettes ou recherché par la police). Par contre,
si le conjoint en a été informé et qu'il a accepté malgré tout le mariage, il n'a pas le droit
d'obtenir son annulation. Un tel mariage ne devrait cependant être conclu qu'en pleine
connaissance de cause. Il faut que les intéressés soient au courant des difficultés qu'ils
rencontreront, des frustrations que peut entraîner un amour purement platonique et des
tentations qui seront peut-être les leurs. Cela dit, aucun problème de santé surgissant après
la conclusion du mariage n'autorise à dissoudre celui-ci (à l'exception peut-être de la
démence incurable exigeant un internement définitif et rompant tout lien entre les époux, au
point que le malade ne reconnaît même plus son conjoint).
Le consentement requis pour le mariage doit être donné librement et dans l'état de lucidité.
Pas de consentement donné en état d'éthylisme ou sous l'emprise d'une drogue, ni de
consentement donné sous la contrainte (cf. le cas de Rébecca, dans Gen 24:58). Celui, par
contre, qui a été contraint au mariage et qui ensuite le consomme librement, est considéré
comme ayant donné un consentement tardif.
Il existe ce qu'on appelle les degrés prohibés du mariage pour consanguinité ou affinité. Les
stipulations varient d'un pays à l'autre. En France, par exemple, le mariage entre cousins
germains est permis. Dans l'état du Wisconsin aux USA, il ne l'était jadis que si la femme avait
au moins 55 ans (donc après la ménopause). Lév 18 contient toute une liste de degrés
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
79
prohibés du mariage. Leur valeur est-elle universelle et permanente (loi morale) ou limitée
au peuple d'Israël (théocratie vétérotestamentaire)? Le problème a été souvent débattu. Le
Synode du Missouri était traditionnellement convaincu de la valeur permanente de ces
prescriptions, tandis que le Synode du Wisconsin la limitait à Israël (Cf. A. Schuetze et I.
Habeck, The Shepherd und Christ, p. 270 s.). Parmi les arguments semblant militer contre la
valeur permanente et universelle de ces interdits, nous relèverons les suivants: 1) Comment
Dieu peut-il interdire pour des raisons morales le mariage avec un beau-frère, alors qu'il
prescrit le lévirat quand un homme meurt sans descendance? 2) Dans 1 Cor 5:1, Paul ne fait
pas appel à la loi mosaïque, mais à la connaissance naturelle de la loi (même les païens
réprouvent le genre de mariage incriminé). 3) Le N.T. ne donne aucune indication précise sur
les degrés prohibés du mariage pour la nouvelle alliance. Le plus sage est donc sans doute de
se conformer tout simplement à la loi civile de son pays.
Il va de soi que la différence de race et de culture n'est pas un empêchement au mariage. Il
convient cependant que le couple soit informé des difficultés particulières qu'il pourra
éventuellement rencontrer dans sa vie conjugale, dans la société et la famille. Ceci fera l'objet
de la cure d'âme prénuptiale.
Les mariages mixtes:
Il en existe de plusieurs types: mariage entre un chrétien et un incroyant (athée pratique),
mariage entre un chrétien et l'adepte d'une religion païenne, mariage entre conjoints
chrétiens, mais appartenant à des confessions différentes (catholique et protestant, par
exemple). Ces différents types de mariages mixtes ont leurs problèmes spécifiques et doivent
faire l'objet d'une cure d'âme appropriée.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
80
Une différence de religion n'est pas un obstacle absolu au mariage. Les interdictions de l'A.T.
faisaient partie de la législation théocratique en vigueur en Israël et n'avaient pas de valeur
permanente (Ex 34:16; Deut 7:2 s.; Néh 13:25). Cf. 1 Cor 7:13. Cependant le motif invoqué
pour ces interdictions garde toute sa valeur (danger d'idolâtrie, d'apostasie ou d'indifférence
religieuse). Les chrétiens doivent en tenir compte. Souvent le conjoint chrétien devient
négligent dans l'exercice de sa foi et peut même la perdre, parce qu'il ne peut pas la partager
avec son partenaire. La communion de foi est un élément indispensable au vrai bonjeur
conjugal. Le mariage chrétien soulève du reste des problèmes spécifiques (vie de foi à la
maison, prières, lecture de la Bible, éducation chrétienne des enfants) qui trouvent
difficilement une solution, si on ne partage pas la même foi.
D'autre part, l'Eglise Catholique ne bénit une union mixte que si le conjoint non catholique
fait la promesse, au moins verbale, qu'il autorisera l'instruction de ses enfants dans la foi
catholique. Un chrétien biblique peut-il avec une bonne conscience prendre un tel
engagement?
Si ne femme chrétienne peut être une source de bénédictions pour son mari incroyant (1 Colr
7:16; 1 Pi 3:1.2), il n'en est pas moins vrai que le mariage qui plaît à Dieu est celui qu'on
conclut en son nom (1 Cor 7:39).
Les temps prohibés:
Il n'existe aucune loi biblique à ce sujet. La tradition voulait cependant (et veut peut-être
encore ici et là) qu'aucun mariage ne soit célébré pendant l'Avent et le Carême, qui sont des
temps de repentance. On se pliera à cette coutume là où en l'enfreignant on risquerait de
causer scandale.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
81
Il n'existe pas non plus de prescription quant à la durée du deuil avant d'envisager un
nouveau mariage. Il convient cependant de ne pas montrer d'impatience ou de précipitation,
au risque d'être soupçonné d'avoir oublié bien vite son conjoint décédé!
L'essence du mariage:
"Concubitus facit matrimonium?" La cohabitation fait-elle le mariage? Certainement pas. Si
par l'union sexuelle on devient une seule chaire avec une prostituée (1 Cor 6:16), on ne
devient pas pour autant son mari. On ne devient même pas le mari de celle avec laquelle on
cohabite de façon durable (Jn 4:18). Le mariage est plus que la cohabitation.
"Consensus facit matrimonium?" Est-ce le consensus mutuel qui fait le mariage? Il est vrai
qu'il n'y a pas de mariage légitime sans consensus. Celui-ci est donc constitutif du mariage
(Gen 2:24; 24:58; Mt 19:6), mais le mariage est plus que le consensus. Et puis, quel
consensus? Celui de vivre ensemble? Dans ce cas, il n'y aurait ni cohabitants ni concubins,
mais tous les couples vivant ensemble parce qu'ils ont décidé de le faire, seraient de ce à
considérer comme mariés. Or ce n'est pas le cas. Ni pour la Bible (la Samaritaine de Jn 4 vivait
avec un homme dont Jésus dit qu'il n'était pas son mari), ni pour la société. Même des fiancés,
c'est-à-dire des gens qui ont normalement échangé des promesses d'amour et de fidélité, ne
sont pas mariés aux yeux de la loi. Le mariage est donc plus que le simple consentement.
Aux yeux de Dieu, les fiançailles, si elles reposent sur un consentement mutuel et des
promesses de fidélité, sont pour ainsi dire identiques au mariage. Cependant, ce dernier fait
partie de l'ordre de la création et conditionne la survie des peuples, d'où la nécessité de
protéger la cellule familiale, les époux, les parents, les enfants et leurs biens. Le mariage
tombe donc sous la juridiction de l'autorité mise en place par Dieu pour le bien-être des
hommes (ne se marie pas qui veut, âge minimum requis, degrés prohibés, consentement
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
82
parental pour les mineurs, publication des bans, responsabilité parentale, perte de la
puissance parentale ou paternelle, droit d'annulation de mariages illicites, contrat de mariage
ou communauté de biens, etc.). Le mariage n'est donc jamais une affaire personnelle réglée
entre deux jeunes gens. Dans aucun pays et aucune culture. En cela, il diffère
fondamentalement de nos fiançailles. Il est toujours et partout, en dépit des nuances propres
à chaque société, un acte social.
Aussi l'Ecriture Sainte "n'invente-t-elle" pas une définition du mariage qui lui soit propre, une
définition chrétienne, mais prend-elle le mariage pour ce qu'il est.
D'autre part, les fiançailles étaient dans l'Antiquité (Judaïsme, Grèce, Rome) quelque chose de
très précis, sanctionné et contrôlé par la société. Il n'en est plus ainsi. Notre code civil ne
légifère pas en matière de fiançailles. C'est pourquoi il ne protège pas une fiancée comme il
protège une épouse, ni un fiancé comme il protège un mari. Le fossé entre fiançailles et
mariage s'est considérablement creusé. Très souvent, il n'y a plus échange formel de
promesses, mais les jeunes gens glissent lentement de la naissance de leur amour dans le
mariage. Le mot fiançailles est devenu très souple. Généralement il signifie simplement qu'un
jeune homme et une jeune fille se fréquentent, fréquentation qui est censée conduire au
mariage, mais qui n'y conduit pas toujours, soit parce que le couple se brise, soit parce qu'il
s'installe dans une cohabitation durable. Dans un sens beaucoup plus précis et plus fort, qui
n'a sans doute cours que dans les milieux chrétiens (encore que tous les chrétiens ne
conçoivent pas les choses ainsi), les fiançailles impliquent une promesse de mariage, la
promesse qu'en temps opportun on se mariera. Or les chrétiens concevant le mariage comme
un état permanent fait de fidélité jusqu'à la mort, la promesse des fiançailles (la promesse
qu'on se mariera) implique au moins tacitement une promesse de fidélité jusqu'à la mort.
Cependant, du fait que les fiançailles, même au sens fort du terme, sont une affaire
personnelle ou tout au plus familiale dans laquelle la société n'a pas de part et ne légifère pas,
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
83
et que l'Eglise n'est plus guère sollicitée à publier les fiançailles, à officier auprès des fiancés
et à intercéder pour eux, on ne peut identifier sans plus fiançailles et mariage.
Le mariage en tant qu'acte social est donc plus que le consentement mutuel. Aussi la rupture
des fiançailles n'est-elle pas à considérer comme un adultère, les fiancés au sens moderne du
terme n'étant pas une seule chair devant Dieu et la société. Rompre les fiançailles, c'est
pécher contre le 8 commandement et non contre le 6 . On peut dire schématiquement
que les fiançailles de l'Antiquité équivalaient au mariage civil actuel, et le mariage de
l'Antiquité aux noces d'aujourd'hui (festin de famille, qui suit chez les chrétiens la
bénédiction nuptiale).
En quoi consiste alors le péché que constituent les relations sexuelles entre fiancés? La
réponse à cette question dépend de la définition donnée aux fiançailles. Si des fiancés sont
tout simplement des gens qui se fréquentent et songent au mariage (c'est sans doute la
définition la plus courante de nos jours), ces relations constituent une transgression du 6
commandement. S'ils ont par contre échangé des promesses formelles, connues ou non de la
société et de l'Eglise, les relations charnelles, si elles ne peuvent pas être considérées comme
de l'impudicité, constituent néanmoins une offense contre le bon ordre, la mise en pratique
d'un privilège réservé aux époux proprement dits. Il y a offense, voire imposture, Dieu et la
société (au moins celle de l'Eglise) réservant les relations sexuelles aux gens mariés et
attendant des futurs époux qu'ils restent chastes jusqu'à leur mariage. Il y a donc nécessité
d'amende publique et de repentance.
Signalons que les croyants d'Israéël n'avaient pas de relations sexuelles avant le mariage,
même quand il étaient fiancés (Gen 29:21-23; Lc 1:34; Mt 1:18.19). D'autre part, Jésus ne
considère pas l'homme avec qui vit la Samaritaine comme son mari (Jn 4:18).
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
84
Que penser du "mariage secret" (en allemand "Gewissensehe"), conclu par deux partenaires
en toute intimité, en l'absence à la fois de l'officier de l'état civil et du ministre du culte? Cf. à
ce sujet l'attitude de Luther, in Positions Luthériennes, 1989/4. Ce "mariage" est à proscrire
pour les raisons suivantes: Dieu ne veut pas que les chrétiens soient source d'offense et de
scandale pour leurs frères et sœurs dans la foi. L'existence de couples de ce genre a un effet
dissuasif sur le mariage, incite les jeunes à les imiter et finit par sonner le glas du mariage
religieux. Comment du reste savoir ce que pensent ces couples, comment ils vivent leur
union? Se considèrent-ils comme mariés pour la vie, comme menant un mariage à l'essai ou
comme vivant une union libre? Eux seuls savent comment ils envisagent leur union; la
société et l'Eglise ne peuvent pas du tout l'imaginer.
Si l'Eglise acceptait le "mariage secret", elle finirait pas l'identifier au mariage normal et
déprécierait le mariage religieux. Seuls les couples "en règle" recourraient encore à ce
dernier.
Pour accepter des "couples" de ce genre, il faudrait que le pasteur ait une déclaration (orale
ou écrite?) spécifiant qu'ils considèrent leur union comme une union pour la vie, donc
indissoluble. Et il faudrait que cette déclaration soit portée à la connaissance de la paroissee.
Il y aurait alors plusieurs types de couples dans l'Eglise: ceux mariés civilement et ceux qui
ne le sont pas, ceux mariés religieusement et ceux qui en le sont pas. Quel sens pourrait
encore revêtir dans l'Eglise la bénédiction nuptiale, si elle était accordée à certains
paroissiens et pas à d'autres? Et que se passerait-il en cas de dissolution d'un "mariage
secret"? Il faudrait que ce couple dissous se considère comme divorcé, puisqu'auparavant il
se considérait comme marié. Mais aux yeux de la loi et de la société, ils étaient célibataires ou
concubins, et s'ils changent de lieu et de paroisse, personne ne saura qu'ils se considéraient
auparavant comme mariés, qu'ils sont donc maintenant en fait des divorcés. Est-ce que tout
cela ne montre pas ce que ce genre de situation a d'équivoque? Quels problèmes compte-t-on
régler ou esquiver en contractant ce genre d'union? Est-ce que ce qu'on voulait pfaire passer
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
85
au départ pour un "mariage secret" ("Gewissensehe") n'est pas en réalité un mariage à
l'essai?
On comprend aisément à quel point il est important d'informer les jeunes sur l'essence du
mariage, les fiançailles, les règles civiles et surtout la volonté divine relatives à la sexualité et
au mariage, sur les rapports sexuels extra-conjugaux ou préconjugaux, la contraception,
l'avortement, etc. La cure d'âme est souvent très difficile dans ce domaine, et les problèmes à
résoudre peuvent être très délicats. Il est d'autant plus important d'agir de façon préventive,
par une instruction adéquate et authentiquement biblique.
La bénédiction nuptiale:
Elle n'est pas d'institution divine et ne fut sans doute pas pratiquée dans l'ancienne alliance
ni au début de l'ère chrétienne. Par la suite, le prêtre fit fonction à la fois d'officiant de l'Eglise
et d'officier d'état civil.
Elle est une bonne coutume par laquelle l'Eglise demande au pasteur de sanctifier
l'institution divine qu'est le mariage par la Parole de Dieu et la prière.. Il ne célébrera une
bénédiction nuptiale que dans le cadre de sa paroisse. Il faut donc qu'en principe l'un des
deux conjoints au moins soit membre de son troupeau. Le pasteur n'est pas l'employé d'une
institution de mariage qui sacrifie à la soif de folklore et de decorum des gens. Généralement
c'est le pasteur de l'épouse qui procède à la bénédiction nuptiale, mais ce n'est là qu'une
convention. Il ne bénit le mariage de gens rattachés à d'autres paroisses du Synode qu'
avec le consentement de leur pasteur. Il peut bien, sûr bénir, bénir le mariage de gens qui,
sans être des membres de l'Eglise, le lui demandent pour des motifs valables, mais il ne le
fera qu'au terme d'une série d'entretiens lui permettant de sonder les motivations des
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
86
candidats à la bénédiction nuptiale et de dispenser tout l'enseignement biblique relatif au
mariage.
La bénédiction nuptiale est toujours précédée d'entretiens prénuptiaux au cours desquels le
pasteur expliquera, textes bibliques à l'appui, ce qu'est le mariage, ce que sont les droits et les
devoirs des époux, comment le mariage est vécu dans la foi, quelles bénédictions y sont liées,
ce qu'il faut penser de la contraception et de l'avortement, etc.
Le mariage sera annoncé à la paroisse au moins deux dimanches à l'avance. Les paroisiens
seront invités à y assister pour entourer le couple de leurs prières et partager sa joie. On se
conformera aux coutumes locales, aussi longtemps qu'elles ne sont pas en contradiction avec
la Parole de Dieu (temps prohibés ou non, procession éventuelle, choix de la musique, haie
d'honneur, etc.). Les détails de la cérémonie seront mis au point avec le couple (formulaire
des engagements des époux, texte lu par le couple ou lu par le pasteur avec réponse du
couple, etc.). On n'opérera pas de changement dans la liturgie qui soit contraire à l'Ecriture
Sainte (par exemple, la suppression de la promesse de soumission de l'épouse, sous prétexte
qu'elle n'est plus de mise). On évitera aussi tout excès dans la décoration, le faste et le ballet
des photographes, toutes choses qui nuisent à la dignité de la cérémonie.
L'allocution de mariage est importante pour le couple et pour ceux qui assistent à la
cérémonie. Il y a des choses merveilleuses et très importantes à dire sur l'essence du
mariage, son indissolubilité, le devoir d'amour et de fidélité des époux, les enfants, la foi dans
le foyer, l'esprit du pardon, etc.
L'Eglise Luthérienne a de bonnes raisons de ne pas célébrer la Sainte Cène lors de
bénédictions nuptiales (ou de funérailles). Il s'agit d'un sacrement donné à l'Eglise, qui
requiert la participation de la paroisse. On risque aussi, en administrant la Cène, de faire de
cette administration un decorum, ou encore d'assimiler la cérémonie tout entière à un
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
87
sacrement comme dans l'Eglise Catholique. Enfin, bien des gens ont coutume d'assister à des
mariages religieux qui ne sont pas membres de l'Eglise. Il est difficile de les inviter à la
cérémonie tout en leur interdisant l'accès à la Table du Seigneur.
Les noces d'argent ou d'or sont une belle coutume par laquelle on sanctifie également par la
Parole de Dieu et la prière la vie conjugale d'époux chrétiens unis depuis longtemps par le
lien du mariage. C'est une occasion unique en son genre de remercier le Seigneur pour tous
ses bienfaits, d'implorer ses bénédictions pour l'avenir et de rappeler aussi la beauté d'un
mariage fondé sur un amour durable et fidèle.
Dissolution du mariage et divorce:
Dieu seul a le droit de dissoudre le mariage par la mort (Mt 19:6; Rom 7:2 s.; 1 Cor 7:39).
Toute dissolution du mariage par l'homme est coupable. Là où il y a divorce, il y a toujours
péché, d'une façon ou d'une autre, chez l'un des deux conjoints ou chez les deux à la fois.
L'Ecriture parle du divorce; elle s'exprime de façon normative dans un certain nombre de
textes auxquels il ne faut faire dire ni plus ni moins que ce qu'ils disent. Les voici:
Mt 5:32: "Moi je vous dis que celui qui répudie sa femme sauf pour cause d'infidélité ("pas
ho apoluôn tèn gunaika autou parektos logou porneias") l'expose à devenir adultère ("poiei
autèn moicheuthènai"), et que celui qui épouse une femme répudiée commet adultère
("moichatai")".
Mt 19:3-9: "Est-il permis à un homme de répudier sa femme pour un motif quelconque?...
L'homme quittera son père et sa mère et s'attachera à sa femme, et les deux deviendront une
seule chair. Ainsi, ils ne sont plus deux, mais ils sont une seule chair. Que l'homme donc ne
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
88
sépare pas ce que Dieu a joint. Pourquoi donc, dirent-ils, Moïse a-t-il prescrit de donner à la
femme une lettre de divorce et de la répudier? Il leur répondit: C'est à cause de la dureté de
votre coeur que Moïse a permis de répudier vos femmes; au commencement, il n'en était pas
ainsi. Mais je vous dis que celui qui répudie sa femme sauf pour infidélité et qui en épouse
une autre commet adultère ("mè epi porneia kai gamèsè allèn moichatai")".
Mc 10:11.12: "Celui qui répudie sa femme et qui en épouse une autre, commet un adultère à
son égard ("moichatai ep'autèn"). Et si une femme quitte son mari et en épouse un autre, elle
commet un adultère".
Lc 16:18: "Quiconque répudie sa femme et en épouse une autre commet un adultère, et
quiconque épouse une femme répudiée par son mari commet un adultère".
1 Cor 6:10-15: "A ceux qui sont mariés, j'ordonne, non pas moi, mais le Seigneur, que la
femme ne se sépare pas de son mari (si elle est séparée, qu'elle demeure sans se marier ou
qu'elle se réconcilie avec son mari) et que le mari ne répudie point sa femme... Si le
non-croyant se sépare, qu'il se sépare; le frère ou la soeur ne sont pas liés dans ces cas-là".
Les trois synoptiques s'accordent et font affirmer à Jésus que celui qui répudie sa femme et
en épouse une autre est coupable d'adultère. Le mariage est indissoluble. La répudiation du
partenaire n'est permise que si celui-ci s'est rendu coupable d'adultère. Dans ce cas, le lien
conjugal est déjà rompu et le mariage dissous; le divorce n'en est que l'officialisation. Seul
l'adultère du conjoint autorise à divorcer (Mt 5:32; 19:9). Le soupçon d'adultère ne suffit pas,
mais il faut que cet adultère soit patent, et un adultère par l'acte et non par la convoitise (Mt
5:28). Il va de soi que les relations homosexuelles que l'un des partenaires peut entretenir
avec autrui constituent aussi une dissolution du mariage, tout comme l'adultère.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
89
Jésus ne prescrit pas le divorce pour adultère, mais l'autorise. Le pasteur essaiera toujours
d'oeuvrer en vue de la réconciliation, sans cependant l'imposer à la conscience de la victime.
Il ne peut pas exiger que celle-ci accepte de rester unie à un conjoint qui lui est infidèle. Par
contre, si le coupable se repent et que la victime lui pardonne et consent à rester auprès de
lui, l'infidélité pardonnée ne peut plus être invoquée par la suite pour solliciter un divorce.
Paul interdit aussi la "desertio malitiosa" (1 Cor 7:10). Il demande à la femme qui a fui son
mari de se réconcilier avec lui ou d'assumer sa solitude en renonçant à un nouveau mariage.
L'abandon délibéré et définitif du domicile conjugal constitue un motif légitime de divorce. Il
n'est pas question, bien sûr, d'une séparation momentanée due à des raisons
professionnelles ou de santé, ou à l'obligation de faire son service militaire.
L'emprisonnement n'est pas non plus assimilé à une désertion malicieuse. Pas plus qu'une
fugue à la suite d'une querelle de ménage. Il n'y a désertion malicieuse que s'il y a volonté de
rompre le lien conjugal. Celle-ci fait du reste l'objet d'une définition précise dans le code civil.
S'il y a mésentente entre conjoints, une séparation peut être judicieuse. Mais ce ne sera pas
une séparation durable et permanente comme la désertion malicieuse. La séparation qu'un
pasteur peut conseiller à un couple en difficulté n'est qu'une séparation temporaire devant
déboucher sur une réconciliation et une redécouverte. Le fait que le conjoint soit un
incroyant n'autorise pas le divorce. Si par contre l'incroyant abandonne son conjoint croyant,
celui-ci est libre de se remarier (1 Cor 7:15).
On assimile aussi à la désertion malicieuse le refus délibéré, durable et non justifié de
relations sexuelles. Le simple fait de ne pas pouvoir en avoir (guerre, emprisonnement,
hospitalisation, maladie, surmenage, blocage psychique, obligations professionnelles, etc.)
n'est pas suffisant. Le cas de la maladie rendant les rapports sexuels provisoirement ou
définitivement impossibles est particulièrement douloureux. C'est un lourd fardeau, qui exige
que l'intéressé cherche dans la Parole de Dieu et la prière les forces dont il a besoin.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
90
D'une façon générale, tout ce qui constitue une violation flagrante de la promesse faite le jour
du mariage est assimilable à la désertion malicieuse et constitue une rupture du pacte qui est
à la base du mariage (menaces permanentes, violences, coups et blessures, refus permanent
de faire vivre sa famille, etc.). La désertion malicieuse sous ses formes diverses ne doit
cependant pas être diagnostiquée à la légère, de façon précipitée et hâtive. Il faut qu'elle soit
flagrante et que son auteur refuse de se laisser exhorter et de changer de conduite.
L'incompatibilité d'humeur, le fait que l'un des conjoints (ou les deux à la fois) soit déçu par
son mariage, le fait de devoir renoncer à des rêves romantiques et chevaleresques ne peut
pas être invoqué. La désertion n'est pas une simple attitude du coeur, mais une action
permanente et méchante. Enfin, une séparation à l'amiable n'est pas assimilable à une
désertion malicieuse, mais celle-ci est toujours quelque chose qu'un conjoint impose à
l'autre.
La traduction "l'expose à devenir adultère" de l'expression "poiei autèn moicheuthènai" (Mt
5:32) n'est pas correcte. Jésus n'utilise pas un actif ni un moyen, mais un passif. La femme en
question ne commet pas d'adultère, n'est pas non plus "exposée à devenir adultère", mais
subit un adultère, en est la victime. Jésus emploie encore un passif, quand il ajoute: "Celui qui
épouse une femme répudiée "moichatai". Non pas: "commet un adultère" (sic Segond), mais:
"est victime d'un adultère". Cela signifie sans doute que celui qui épouse une femme qui a été
injustement répudiée par son mari devient victime d'un adultère en ce sens qu'il participe
sans le savoir à l'adultère de l'ex-mari. Par contre, dans Lc 16:18 Jésus utilise l'actif
"moicheuei". Il faut savoir que dans Mt 5 et 19 il s'en prend aux pharisiens. Le libéralisme
avec lequel ceux-ci parlaient de divorce et de remariage faisait que tous, y compris le
nouveau mari d'une femme innocemment répudiée, étaient impliqués dans une action
coupable. On se mariait, divorçait et se remariait sans le moindre scrupule. Il y a culpabilité
commune, collective, donc participation au péché d'autrui, lorsque des gens méprisent le
mariage, comme ils le faisaient à l'époque du Christ et le font dans la société actuelle, et
estiment qu'on peut le dissoudre quand on veut.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
91
Le remariage de divorcés:
L'Eglise Catholique n'autorise en aucun cas le remariage de divorcés, même s'ils sont
totalement innocents de leur divorce, en déclarant que le mariage est indissoluble non
seulement en droit, mais aussi dans les faits. Le divorce est dit rompre l'exercice du lien
marital, mais il ne le dissout pas. Le lien conjugal subsiste, même s'il n'y as plus de vie
conjugale. Aussi l'Eglise Catholique non seulement ne bénit-elle pas la nouvelle union
contractée par des divorcés, mais elle refuse aussi de les admettre à l'eucharistie.
L'Eglise protestante, de son côté, enseigne qu'un lien conjugal rompu est un lien
effectivement dissous par l'homme. Ce lien est du reste dissous non par le divorce, mais par
l'infidélité conjugale ou la séparation, le divorce n'étant que la sanction sociale et publique de
la dissolution de ce lien. Dès lors les divorcés peuvent-ils se remarier?
Cela va de soi pour le partenaire innocent qui ne porte pas la responsabilité de son divorce.
Encore faut-il que cette innocence soit manifeste et incontestable. Mais qu'en est-il de celui
qui, par sa conduite, porte la responsabilité de son divorce? A quelles conditions un pasteur
peut-il bénir son nouveau mariage? Il peut le faire 1) si le coupable reconnaît sincèrement
son péché et s'en repent, et que cette repentance porte des fruits visibles (désir de
réconciliation, volonté de subvenir aux besoins de l'ex-épouse et des enfants, etc.), 2) si
l'ex-époux ou l'ex-épouse est décédé, remarié ou qu'il ne désire pas reprendre la vie
conjugale avec son ancien partenaire. Si ces différentes conditions sont réunies, il paraît
difficile d'exiger du coupable repentant qu'il termine sa vie dans l'abstinence (cf. 1 Cor 7:2.9)
ou de lui refuser, en cas de remariage, la bénédiction nuptiale. Mais l'Eglise chrétienne
refusera sa bénédiction à toute personne responsable de son divorce pour adultère ou toute
forme de désertion malicieuse qui pourrait renouer les liens avec son ancien conjoint, mais
s'y refuse. Une telle attitude est incompatible avec la repentance et la foi chrétiennes, ce qui
signifie que Dieu ne peut pas bénir un tel homme ou une telle femme dans son nouveau
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
92
mariage. Et par voie de conséquence, l'Eglise chrétienne non plus. En cela comme en tout ce
qui touche au mariage et à la sexualité, le témoignage de l'Eglise chrtétienne doit être très
clair en cette époque de permissivité et dans ce monde dissolu. Il ne s'agit en aucun cas de se
conformer au monde et de l'imiter. Le mariage est un état saint parce qu'institué par Dieu, et
doit être honoré par les chrétiens. Cela n'est possible que s'ils mènent une vie exemplaire et
si le témoignage de l'Eglise est dénué de toute compromission.
L'instruction et la cure d'âme relatives à la sexualité et au mariage:
Le foyer est le premier centre de formation des enfants et des jeunes. L'Eglise ne peut pas
remplacer les parents et n'a pas à le faire. Elle doit cependant instruire tous ses membres,
parents, jeunes et enfants dans la volonté du Seigneur. Elle édifie les foyers qui deviennent à
leur tour des berceaux de formation chrétienne (prédication, cours bibliques, instruction
catéchétique, groupes de jeunes, camps de vacances, retraites). Le nombre grandissant des
difficultés dans les familles, l'érosion de la vie de famille, la courbe croissante des divorces
rendent indispensable la cure d'âme pour tout ce qui a trait au sexe et au mariage. Tous les
chrétiens qui en éprouvent le besoin doivent pouvoir avoir accès à une cure d'âme
appropriée et posséder en leur pasteur un berger compréhensif et compétent.
Enfin, il y a la cure d'âme prémaritale dont nous avons déjà parlé. Le pasteur y instruira les
futurs époux sur tout ce qui touche au mariage, à l'éducation des enfants et à la vie de famille.
Le futur couple se prêtera volontiers à cette cure d'âme, dont l'intérêt est aussi d'établir des
relations de confiance entre lui et le pasteur. La façon dont celui-ci prépare des jeunes au
mariage peut les influencer et les pousser à recourir à son aide en cas de difficulté. La Bible a
beaucoup à dire sur le mariage et la famille (rapports entre époux, droits et devoirs
respectifs, procréation, limitation des naissances, avortement, éducation des enfants,
relations parents/enfants, attitude à l'égard de l'argent, problèmes financiers, rapports avec
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
93
la belle-famille, culte de famille, culte dominical, modèle de vie chrétienne en cas d'épreuve,
difficultés pouvant provenir d'une approche différente de la sexualité de la part de la femme
et de l'homme, ou bien d'une origine sociale ou culturelle différente, etc.).
Combien de temps durera la cure d'âme prémaritale? On estime généralement que trois fois
une heure et demie est une bonne moyenne. Selon les cas, on pourra se contenter de moins
ou il en faudra plus. Dans les grandes paroisses on peut créer des groupes de préparation au
mariage ou bien animer un groupe permanent de jeunes couples. On n'oubliera pas d'utiliser,
en plus de la Bible, la littérature chrétienne spécialisée à laquelle on peut avoir accès.
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
94
L'ENTERREMENT CHRETIEN
En cas de décès dans la paroisse, le ministère du pasteur auprès de la famille du défunt
devient prioritaire. Toutes ses autres activités seront momentanément reléguées à
l'arrière-plan. Cf. ci-dessus, le chapitre sur l'accompagnement pastoral du mourant.
Il n'existe pas de sedes doctrinae de l'enterrement, mais des exemples bibliques. Les
patriarches furent pieusement enterrés par leurs enfants. Moïse fut enterré par Dieu (Deut
34:6), Jean-Baptiste par ses disciples (Mt 14:12) et Jésus par les siens. L'Eglise chrétienne se
conforme pour les funérailles comme pour la célébration des mariages à une coutume
sociale, mais lui donne un contenu chrétien. Elle sanctifie un enterrement par la Parole de
Dieu et la prière. Excellente occasion de confesser la foi et l'espérance chrétiennes.
Dès la nouvelle d'un décès, une visite du pasteur auprès de la famille s'impose. Elle sera
immédiate, s'il s'agit d'un décès subit désemparant la famille. On demande au pasteur une
consolation. Il consolera donc avec l'Ecriture et par une prière "ex corde". Il conseillera aussi
la famille concernant l'enterrement (date, heure, modalités) et le préparera avec elle. Si le
défunt est à son domicile et qu'il est de coutume que les parents, amis et voisins viennent le
voir une dernière fois et expriment leurs condoléances, on attend généralement du pasteur
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
95
qu'il vienne aussi. Ce sera sa deuxième visite. Pour les questions de détail (quand fermer la
bière, procession, pelletée de terre, etc.), on se conformera aux coutumes locales.
Le choix du texte et la préparation du sermon se feront en fonction d'éventuelles
circonstances particulières (enfant, adulte, vieillard, souffrances ou pas, mort lente ou subite,
voire accidentelle, etc.). Tout sermon d'enterrement montrera le chemin du salut et le
bonheur de celui qui meurt dans la foi, mais le thème et donc le centre de gravité du message
pourront différer (providence de Dieu, certitude de la mort, incertitude de la vie, parousie,
résurrection, repentance). On ne fera pas l'éloge du défunt dans la prédication, on ne le
diffamera pas non plus et on n'accablera pas sa famille de reproches éventuels. Souvent le
pasteur est tenté de profiter de l'occasion pour dire ses quatre vérités à des gens
qu'autrement il ne voit guère au culte. Il doit résister à ce désir et utilisera la cure d'âme
auprès de la famille pour lui prodiguer les exhortations jugées nécessaires.
L'enterrement est bien sûr une grande occasion missionnaire...
Curriculum vitae: description de la vie du défunt et témoignage rendu publiquement à son
appartenance à l'Eglise, à son dévouement et sa fidélité.
Inhumation: affirmation de la résurrection des morts. Le pasteur ne s'opposera pas
systématiquement à l'incinération, mais tentera d'en dissuader. Si par contre elle est
pratiquée couramment comme une expression de l'incrédulité et de la négation de la
résurrection des morts, il demandera à ses paroissiens d'y renoncer.
Il sera accessible aux vœux du défunt et de sa famille (choix du texte du sermon, choix des
cantiques).
Pas d'unionisme lors d'un enterrement! Aucun pasteur appartenant à une autre Eglise ne
sera invité à participer activement aux funérailles.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
96
La participation de l'armée, du corps de sapeurs pompiers, d'une délégation professionnelle
(enterrement d'un militaire, d'un pompier, d'un membre du corps enseignant ou d'un
artiste) sera tolérée, mais on renoncera à toute manifestation ou discours dans l'Eglise qui
soit incompatible avec la foi chrétienne.
Qui enterrer? D'une façon générale, un pasteur enterre ses paroissiens. Il n'est pas l'agent
d'une entreprise de pompes funèbres. Cependant il ne sera pas légaliste. Il peut enterrer
toute personne ayant fait profession de christianisme, qui a recouru à sa cure d'âme ou a été
un sympathisant régulier de sa paroisse. Mais pas d'unionisme! Un pasteur luthérien
n'enterrera pas un chrétien réformé pour des raisons de convenance. L'enterrement chrétien
est réservé à des chrétiens. L'Eglise doit garder toute sa crédibilité et ne pas enterrer
chrétiennement une personne n'ayant pas fait profession de foi chrétienne. Refuser un
enterrement peut être un puissant témoignage. En tout cas, un enterrement à l'Eglise est par
définition un enterrement chrétien. Un pasteur ne peut en aucun cas exprimer la certitude
que le défunt est chez le Seigneur et qu'il ressuscitera un jour pour la vie éternelle, s'il est
personnellement convaincu de son incrédulité. Un suicidé sera enterré chrétiennement, s'il a
été membre de l'Eglise et que son suicide est dû une maladie mentale, qu'il a donc agi dans
un état d'irresponsabilité.
Le pasteur ne recherche pas d'honoraires pour des casuels (1 Tim 3:3). Si son salaire lui
permet de vivre, les honoraires ne sont pas de mise. Par contre, il ne refusera pas un don,
mais fera bien de ne pas l'employer à des fins personnelles. Il l'utilisera pour l'exercice de son
ministère ou pour les besoins de sa paroisse.
Tout doit contribuer à la gloire de Dieu et à l'édification de son Eglise, y compris la pratique
de l'enterrement, pour que s'accomplisse la promesse du Seigneur: Mt 25:21.
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
97
LES VISITES PASTORALES
Le pasteur est responsable de son troupeau et de chaque brebis. La cure d'âme individuelle
est donc indispensable. Contact personnel, même quand il n'y a pas de problème particulier
(Jn 10:3.27; Act 20:20; 1 Thess 2:11).
Nécessité de bien connaître chaque paroissien et d'être bien connu de lui, pour créer un
climat de confiance.
Les gens changent. Un chrétien sans problème il y a quelques mois peut être en difficulté
aujourd'hui.
Souvent les gens ne viennent pas d'eux-mêmes chez le pasteur. Aller chez eux peut briser la
glace et délier la langue. Les visites périodiques du pasteur suscitent la confiance et font que
le paroissien désire lui parler, quand il en éprouve le besoin.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
98
En chaire, le pasteur s'adresse à un auditoire. Il s'exprime donc de façon relativement
générale. Dans la cure d'âme, il peut devenir plus précis, s'attarder sur une vérité
particulière... Les visites ne sont pas là pour remplacer, mais pour compléter les cultes.
L'assistance aux cultes croît, quand le pasteur en fait régulièrement.
Fréquence des visites? Pas de règle générale. Cela dépend de l'emploi du temps du pasteur et
de l'importance de sa paroisse. Deux fois par an dans chaque foyer (plus, bien sûr, les visites
qui s'imposent pour des raisons de cure d'âme) est certainement un minimum dans une
paroisse d'importance moyenne. Il faut évidemment en faire beaucoup plus, quand il y a
problème ou qu'on a affaire à des paroissiens irréguliers aux cultes.
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
99
LA CURE D'AME AUPRES DES MALADES
Causes de la maladie: Dieu en tant que cause première, Satan (Lc 13:16 et Job), le péché (Gen
3:16-19). Un péché particulier peut de plus être à l'origine d'une maladie particulière (Deut
28:21.22), mais il convient de ne pas généraliser (Jn 9:2.3). La maladie peut aussi être la
conséquence directe d'un mauvais comportement (impudicité, alcool, drogue, tabac).
Le pasteur fait partie d'une équipe qui soigne le malade. Il a son rôle spécifique dans
cette équipe, et ne doit pas se substituer au malade. Il est détenteur d'un message qui le
distingue de cette équipe de soignants.
Utiliser les moyens de grâce pour fortifier dans la foi le chrétien souffrant, pour l'inciter à
prier Dieu de lui venir en aide, à assumer sa maladie avec humilité et confiance, à surmonter
le désespoir qui constitue une barrière à la guérison, enfin à se préparer à la mort, quand
celle-ci est inéluctable.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
100
Prêcher la Loi, mais avec amour. Ne pas écraser le malade, sauf s'il persiste dans
l'impénitence. Ne pas donner au malade négligeant l'impression qu'on profite de sa maladie
pour lui tomber dessus. Ne jamais jouer le rôle du "plus saint que toi", de celui qu'il faut
imiter pour guérir.
Faire la différence entre le malade chrétien et le malade incrédule. Ne pas oublier que même
un chrétien peut redouter une opération ou craindre la mort.
Le diagnostic spirituel:
Le pasteur n'a pas à sa disposition les instruments qui permettent au médecin de faire son
diagnostic. Il ne peut qu'écouter ce que dit le malade pour déterminer s'il est croyant ou non,
si sa vie honnête et juste est la sanctification du chrétien ou la justice civile.
Il n'oubliera pas que le malade est souvent un introverti qui a perdu son équilibre intérieur,
que par ailleurs les médicaments altèrent son comportement ordinaire, qu'il cède davantage
à l'impatience que le bien-portant. D'où nécessité de prudence pour ne pas diagnostiquer de
l'incrédulité chez un malade qui a perdu plus ou moins le contrôle sur ses réactions.
Il peut être bon et utile, mais il n'est pas nécessaire que le pasteur connaisse le diagnostic
médical. Il doit prendre essentiellement soin de l'âme du malade, quel que soit le type de sa
maladie. Connaissant le diagnostic médical, il risque même de commettre des indiscrétions et
est en butte aux questions curieuses du patient. D'une façon générale, c'est au médecin et non
au pasteur de révéler au patient où il en est avec sa maladie, s'il a ou non des chances de
guérir. Il faut ne jamais lui donner de faux espoirs, minimiser sa maladie et ne pas la prendre
au sérieux, ou au contraire dramatiser la situation.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
101
Il est des circonstances où un pasteur doit s'abstenir de visiter un malade, quand le médecin
a de bonnes raisons de le lui demander. Il priera alors pour lui ou le fera avec sa famille. Il en
est d'autres où il enfreindra l'ordre du médecin.
Ne pas être un clown hilare et sans sérieux au chevet d'un malade, ni chercher à distraire son
attention en lui parlant du temps qu'il fait ou des événements de l'actualité. Ne pas faire
davantage une mine d'enterrement. Ne pas non plus jouer à l'inquisiteur...
Faire preuve de sagesse dans la fréquence et la durée des visites, dans le choix des thèmes et
dans la dimension des méditations (temps disponible sans déranger l'équipe hospitalière,
capacités d'attention du patient). Les visites seront régulières, de type pastoral, riches en
signification et en message. On encouragera les membres de la paroisse à rendre également
visite aux malades, mais avec sagesse et d'une façon qui les édifie et les console. On leur fera
parvenir aussi, s'ils sont capables d'en tirer profit, des sermons enregistrés sur cassettes.
Faire preuve de compréhension: s'identifier au malade pour comprendre ce qu'il resent à la
veille d'importantes analyses médicales, à la perspective d'une opération, d'une longue
convalescence, de l'invalidité, de la mort (empathie). Puis, après s'être identifié à lui, s'en
détacher pour trouver le jugement objectif qui permettra de lui apporter l'aide dont il a
besoin.
La cure d'âme auprès des femmes malades est généralement plus facile. Elles sont en général
plus accessibles à la religion que les hommes (je parle d'étrangers dans la salle), plus
ouvertes à parler de religion, moins prudes et réservées dans ce domaine. D'autre part, elles
parlent plus volontiers d'une façon générale et assument souvent leur maladie mieux que les
hommes.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
102
L'étude de l'Ecriture, la méditation quotidienne et la préparation des sermons fournissent au
pasteur une série de textes bibliques qui lui servent dans la cure d'âme. Eviter les lieux
communs, les stéréotypes, recourir à des messages qui répondent aux besoins des gens.
Nécessité de prier avec les malades. Prières brèves, qui répondent à leurs besoins, lues ou
prononcées "ex corde" selon les circonstances. En varier la forme.
Problèmes de morale:
Veiller à ne pas céder à l'émotionalisme.
Susciter la confiance en Dieu et dans le médecin. Ne jamais
dire du mal de ce dernier.
Comprendre le patient. Il y en a de nombreux types: certains
supportent mal la souffrance, d'autres non: certains coopèrent avec le médecin, d'autres
non...).
En aucun cas le pasteur ne pourra préconiser l'euthanasie acti-
ve, la vie étant un don de Dieu et restant entre ses mains.
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
103
LA CURE D'AME
AUPRES DES CHRETIENS EN DIFFICULTE
Job 14:1. Toute vie humaine est faite de troubles et de problèmes. Les chrétiens se tournent
alors vers leur pasteur. A travers lui, ils s'adressent à Dieu. Le pasteur sait cela. Il doit donc
être disponible et ne pas se contenter de prêcher l'Evangile "ex cathedra", du haut de sa
chaire. Il doit avoir le coeur requis pour la cure d'âme. Il faut donc qu'il soit un bon
théologien..., mais aussi un homme qui connaisse l'âme humaine et ses difficultés. D'où la
nécessité, en plus de la théologie, d'étudier les rudiments de la psychologie pour connaître
les forces qui ébranlent l'équilibre et le bonheur des individus et font naître les troubles
mentaux et émotionnels.
Cf. l'ouvrage de Paul Hoff, La cure d'âme.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
104
Cure d'âme par le dialogue:
Le pasteur en doit pas être prédicateur, quand il fait de la cure d'âme, parler "ex cathedra" en
réduisant son interlocuteur au silence. Il doit au contraire conseiller et aider par la voie du
dialogue. D'où nécessité de laisser son interlocuteur s'exprimer librement, sans le presser de
questions inquisitoires, épancher son coeur, sans le reprendre à tout moment. Savoir
attendre et écouter avec patience est l'A.B.C. de la cure d'âme. Le pasteur dirige l'entretien,
provoque l'épanchement du coeur, mais ne doit pas l'emprisonner dans un cadre... Nécessité
d'un climat de confiance et de compréhension. L'interlocuteur doit pouvoir sentir le coeur de
son pasteur vibrer d'amour et de bonté, de façon à ce que rien ne l'empêche de dire tout ce
qu'il a à dire.
C'est au chrétien en difficulté de venir spontanément trouver son pasteur. S'il ne le fait pas, le
pasteur informé de ses difficultés déploiera tout son tact pour l'encourager à faire ce pas.
Il est indispensable d'observer le secret professionnel. Il faut que le chrétien sache que son
pasteur restera discret en toutes circonstance. Nécessité donc de s'isoler avec lui, pour qu'il
puisse tout dire, même les choses les plus sordides et honteuses, sans que le pasteur exprime
surprise ou dégoût... Il faut que le chrétien sache que le pasteur l'accepte et l'aime tel qu'il est.
Le pasteur, de son côté, fera tout pour comprendre son interlocuteur, pour analyser ses
mobiles, découvrir l'origine de ses troubles, etc.
Confession et absolution:
Définition de la confession et de l'absolution...
Dans la plus stricte intimité. Le pasteur annoncera la Loi au pécheur impénitent, mais
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
105
renoncera à le faire devant le chrétien repentant à qui il proclamera une absolution
gratuite et totale au nom du Christ. Rien ne peut libérer une âme angoissée et la réjouir, la
réconforter davantage que cette application personnelle des promesses de l'Evangile. C'est
une thérapeutique merveilleuse que seul le pasteur peut appliquer.
Différents types de cure d'âme:
Cure d'âme
- rémaritale,
- familiale (prudence),
- adolescents (changement de structures sociales, accroissement des
loisirs, cherté de la vie, problèmes professionnels, nombreuses tentations. Nécessité
de bien connaître les jeunes et leurs problèmes et de leur venir en aide. Les jeunes sont
l'avenir d'une paroisse, d'où l'importance d'une telle cure d'âme.
- vieillards (cure d'âme particulière auprès d'eux et de ceux qui
prennent soin d'eux).
- malades (cf. le chapitre précédent).
- mourants et des personnes en deuil (cf. ci-dessous).
- malades mentaux (névroses, psychoses, notamment mélancolies,
débilités légères, moyennes et profondes). Le pasteur doit être initié aux mécanismes de
ces maladies, mais ne pas se substituer au psychiatre ou au psychothérapeute.
- alcooliques: Explications possibles (inadaptation au contexte, fuite du
moi, sentiment d'infériorité). Le tout engendre la culpabilité, la crainte, voire la haine
de Dieu. Auto dégradation de la personnalité. L'une des cures d'âme les plus difficiles.
Application de la Loi et de l'Evangile. Ne pas considérer que le symptôme (propension à
l'alcool), mais en analyser les causes et les soigner. Assistance du médecin nécessaire.
Cure de désintoxication. Aider la famille à assumer la présence d'un alcoolique au foyer
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
106
et lui montrer en quoi elle peut l'aider.
- couples en difficulté: Questions très intimes; nécessité d'avoir confiance
dans le pasteur. Deux périodes difficiles dans la vie d'un couple: la (ou les) première(s)
année(s) du mariage (devoir d'adaptation du couple) et la période qui suit les 20 ou 25
années de mariage (routine, ménopause, peur d'une grossesse tardive). Problèmes
inhérents aux mariages mixtes... Problèmes sexuels dus à des facteurs émotionnels ou
mentaux... Problèmes financiers du foyer... Réussite professionnelle de la femme (salaire
plus élevé que celui de son mari)...Problèmes de générations (cohabitation avec les
beaux-parents, difficultés avec les enfants, relations parents/enfants et
grands-parents/enfants)... Problèmes d'adolescents... Se méfier des raisons apparentes
(l'alcoolisme d'un mari peut n'être que le symptôme d'un mal plus profond, comme le
manque d'harmonie sexuelle ou un stress professionnel).
Mésententes et divorce sont dus à l'incapacité de résoudre les problèmes conjugaux.
Cette incapacité est due au fait que la Bible n'est pas dans ce cas un guide réel dans la vie
de tous les jours. Si le couple se laisse guider par la Parole de Dieu et vit dans la
volonté de pardon réciproque, les problèmes trouvent en général leur solution. L'échec
est souvent dû aussi à un manque de communication dans le couple (manque de
compréhension pour les problèmes du conjoint; ils n'ont plus rien à se dire; la rancune et
les griefs s'accumulent). Souvent aussi, il y a manque de maturité.
Le pasteur a besoin, pour conseiller, de beaucoup de agesse et d'expérience. Trop
souvent il a tendance à prendre parti pour l'un des deux conjoints. Demeurer objectif,
ne pas s'engager hâtivement, savoir écouter l'un puis l'autre, ensuite les deux à la fois.
Ne pas chercher à résoudre le problème au cours d'une seule entrevue. Multiplier les
rencontres; laisser le temps de réfléchir et prendre le temps de faire de même. Ne pas
jouer au psychologue. Laisser parler la Bible. Montrer amour et patience. Savoir qu'il y a
souvent torts des deux côtés.
- jeunes filles mères ou en voie de le devenir: la jeune fille et le jeune
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
107
homme ont besoin d'aide. Ne pas se montrer choqué et scandalisé, même si on l'est, car
on ne gagnera pas la confiance. Il ne s'agit pas de nier le péché, mais il faut être en
attitude d'accueil comme l'était Jésus. Rechercher la repentance et offrir le pardon.
Obtenir la réconciliation des deux avec leurs familles (Mt 5:23.24), et obtenir des
parents qu'ils pardonnent (Mt 6:14.15). Essayer de convaincre les deux de se marier,
mais ne pas les y contraindre d'office. S'il n'y a pas d'amour, le mariage n'est pas à
conseiller. Résoudre le problème de l'enfant, en montrant que les deux sont
responsables pour lui.
- drogués: actualité brûlante, surtout parmi la jeunesse. Eviter d'être
choqué et scandalisé, quand on est confronté à ce problème dans sa paroisse. Le recours
aux drogues a des raisons, comme celui à l'alcool: senti ment des jeunes de ne pas être
compris et aimés, insécurité, absence de relations affectueuses avec les pa rents,
déceptions...
Le pasteur ne peut aider le drogué que si celui-ci désire s'en sortir. Dévoiler les raisons
du recours aux drogues: quel problème le jeune tente-t-il de fuir ou de résoudre en
recourant aux drogues? Cure d'âme avec la famille du drogué, pour que celle-ci
devienne pour le drogué une source de secours. Ne pas oublier l'efficacité de la Parole de
Dieu et de la prière.
Le pasteur
- doit avoir certaines connaissances sur les drogues, savoir distinguer entre la
marijuana dont on peut guérir sans aide médicale, et l'héroïne ou la cocaïne qui
entraînent une dépendance qui nécessite absolument l'intervention de la médecine.
Connaître l'existence de centres de soins spécialisés pour pouvoir y aiguiller le malade.
- les homosexuels.
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
108
LE PASTEUR ET LE CHRETIEN QUI S'EGARE
L'exhortation fraternelle:
L'exhortation fraternelle est un devoir (Lév 19:17; Ez 3:16 ss.; Mt 18:15; Lc 17:3; Gal
1:6; Jac 5:19.20). C'est le devoir de tout chrétien, et surtout du pasteur, un élément
important de son ministère. Doit être exhorté tout frère qui s'égare (Mt 18:15), et pas
seulement quand il y a péché mortel. Le pasteur doit être inaccessible à la diffamation. Il
ne procède donc pas à l'exhortation sur la base de ce qu'on a pu lui raconter de
quelqu'un.
But de l'exhortation: la repentance et le salut du pécheur pour la seule gloire de Dieu.
D'où nécessité de témoigner de la bonté et de l'amour. Les moyens de cette exhortation
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
109
sont l'Ecriture et elle seule. Nécessité d'un bon jugement qui est une facette de l'amour
chrétien en action. Tenir compte du tempérament de l'interlocuteur, pour être aussi
efficace que possible. Ne pas critiquer et raboter sans cesse... Ne pas s'imposer à l'autre
(respecter, par exemple, son emploi du temps). Ne pas traiter comme un péché mortel
le péché dans lequel est le frère tombé par faiblesse.
La discipline ecclésiastique:
C'est l'aboutissement de l'exhortation fraternelle, si la chose est portée devant la
paroisse.
Exégèse de Mt 18:15 ss. et des différentes étapes de la discipline ecclésiastique. Celle-ci
n'est pas tant une mesure punitive qu'un moyen de pédagogie spirituelle.
"Un ou deux" comme témoins: Il n'est pas nécessaire qu'il s'agisse de témoins du péché
commis. Ce peuvent être simplement des frères qui assistent et participent à
l'exhortation, quand la première tentative a été un échec. Il est préférable que le pasteur
ne soit pas l'un de ces deux témoins. Ne faire appel à des témoins que si on peut prouver
le péché. S'il n'y a pas de preuve, la 1 étape peut être la dernière. L'affaire en restera là,
étant entendu que Dieu sait et agira (Lc 12:2).
Le péché regretté et confessé doit rester caché, s'il n'est pas connu. S'il est de notoriété
publique, on n'a plus besoin de passer par les deux premières étapes. Il peut cependant
être bon de le faire quand même.
En cas d'échec, c'est à l'Eglise d'agir. Elle le fera par l'assemblée des membres électeurs
ou du conseil presbytéral. La paroisse doit refuser de procéder à la discipline
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
110
ecclésiastique, si les deux premières étapes n'ont pas été franchies, et si la réalité du
péché n'est pas prouvée. Il peut être utile qu'avant de traiter le cas devant la paroisse, le
pasteur (s'il n'a pas déjà parlé avec l'intéressé dans la 2 étape), fasse une tentative
personnelle auprès de lui, avec ou sans l'un ou l'autre des conseillers presbytéraux.
Le seul but de la procédure est la repentance, et donc le salut du pécheur (2 Sam 12:13).
Devoir d'accepter la confession du pécheur comme sincère... Pas question de lui
imposer un temps probatoire avant de lui donner l'absolution ou de l'admettre à la
Cène. Le pardon que le Christ offre au pécheur repentant et croyant est instantané,
gratuit et total!
L'excommunication:
C'est la déclaration solennelle, au nom du Christ, que l'impénitent est "un païen et un
publicain" et n'est plus considéré comme membre de l'Eglise. Cf. Mt 18:17.18. N'étant
plus membre de l'Eglise "stircte dicta", il ne peut pas le rester de l'Eglise "late dicta". Ce
faisant, l'Eglise ne fait que proclamer le verdict divin. Elle agit au nom de Dieu, avec son
autorité.
Un dissensus à propos d'un adiaphoron ne peut jamais être objet d'excommunication.
Quand il y a dissensus doctrinal, le chrétien qui ne se laisse pas corriger ne peut être
excommunié au sens strict du terme, c'est-à-dire déclaré "païen et publicain", que si le
dissensus concerne une doctrine fondamentale. Dans les autres cas, la mesure
disciplinaire n'est pas une excommunication, mais une séparation: l'intéressé n'est plus
considéré comme un frère dans la foi, n'est donc plus dans la communion ecclésiale,
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
111
quoiqu'il puisse être un croyant.
Ce n'est pas le péché même, mais l'impénitence qui entraîne l'excommunication. Une
paroisse ayant procédé à une excommunication doit pouvoir justifier son action. D'autre
part, cette excommunication doit être reconnue par les paroisses-sœurs et le Synode
tout entier. Pas question qu'un membre excommunié soit reçu à la Sainte Cène dans une
autre paroisse du Synode!
C'est l'Eglise locale, investie du sacerdoce universel, qui agit. Le pasteur peut
momentanément suspendre un paroissien de la participation à la Sainte Cène, mails il
ne peut pas, à lui seul, prononcer une excommunication.
L'excommunication doit se faire à l'unanimité. Elle est la conviction de tous qu'il y a
impénitence. Tous doivent en être convaincus. Si quelqu'un ne l'est pas, il faut traiter
avec lui pour l'en convaincre. Au besoin, on le considérera lui-même comme objet de
discipline ecclésiastique. Si beaucoup de membres ne sont pas convaincus, il vaut mieux
renoncer à l'excommunication. Le pasteur remettra l'affaire entre les mains de Dieu et
se consolera à la pensée que le pécheur a entendu ce qu'il devait entendre pour sauver
son âme. S'il y a vice de forme, le pécheur ou d'autres membres peuvent faire appel. Le
refus de la part d'une paroisse d'annuler une excommunication non valide peut
entraîner de la part du Synode la suspension de la communion ecclésiale avec cette
paroisse et son pasteur.
L'excommunication doit être pour l'intéressé une prédication constante de la Loi qui
doit l'amener à la repentance. Dans ce cas, la réintégration dans la paroisse a lieu après
la confession publique du péché.
Un excommunié peut assister aux cultes, mais il est exclu de la Sainte Cène et disqualifié
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
112
comme parrain ou marraine. On lui refusera aussi un enterrement chrétien. On le
saluera et sera courtois avec lui, mais il ne sera plus traité en frère ou soeur dans la foi.
Si l'intéressé, invité par la paroisse, refuse de comparaître et qu'il s'agit d'un refus
délibéré, celui-ci sera considéré comme impénitence et entraînera son
excommunication. Celui qui s'excommunie lui-même et rompt les liens avec sa paroisse
ne peut pas être excommunié par une décision de l'Eglise. Il sera simplement radié sur
décision de la paroisse (par l'intermédiaire du conseil presbytéral), après les
exhortations d'usage, et cette radiation lui sera notifiée.
On fera de toute procédure de discipline ecclésiastique un procès-verbal minutieux
mettant fin à toute contestation.
C'est toujours le cœur très lourd qu'on procède à une excommunication, et avec l'ardent
désir que le pécheur se repente par la suite. On priera pour cela, et s'il se repent, il sera
reçu avec joie et sans arrière-pensées (Lc 15:7.10; 2 Cor 2:6-11).
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
113
L'ACCOMPAGNEMENT PASTORAL
DES
MOURANTS
La souffrance est le lot de tous les hommes dans l'économie actuelle de la chute. Tous
font notamment l'expérience de pertes et de déchirements, et il appartient au pasteur
de venir en aide à ceux de ses paroissiens qui passent par là. La cure d'âme auprès des
mourants revêt un double aspect: il s'agit d'aider celui qui est atteint d'une maladie
incurable et qui sait qu'il va mourir sous peu à assumer tous les sentiments et émotions
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
114
que sa situation génère et de le préparer à la mort, et en même temps de soutenir et de
consoler ses proches parents, à la fois dans la perspective de la mort prochaine et au
lendemain de celle-ci.
La cure d'âme auprès du mourant:
Venir en aide aux mourants est l'un des aspects les plus difficiles du ministère pastoral.
Il s'agit pour le patient et pour le pasteur de faire face au dernier ennemi, la mort.
Affronter la mort n'est pas facile. D'autant plus qu'on vit dans un monde qui évacue la
mort. Il le fait en exaltant la jeunesse et la beauté. Les techniques médicales modernes
permettent de repousser toujours davantage cette échéance. D'autre part, le spectacle
de la mort ne fait plus partie de l'expérience ordinaire de la vie. La plupart des vieillards
mènent une existence autonome et ne vivent pas sous le même toit que leurs enfants.
Les soins sont prodigués par les infirmières et les travailleurs sociaux. Par ailleurs, on
ne meurt plus guère chez soi, entouré des siens, mais en milieu hospitalier. Les gens ne
sont que rarement là pour assister à l'agonie de leurs parents.
Par ailleurs, les médecins qui vivent la mort comme un échec ne disent pas volontiers la
vérité à leurs malades. Beaucoup de patients redoutent d'être diminués, voire défigurés
par la maladie, de dépendre des soins constants d'autrui.
Il est particulièrement difficile de mourir quand on a le sentiment d'avoir gâché sa vie.
Inversement, quand la vie qu'on mène a un sens et un but, il est plus facile d'affronter la
mort quand elle s'annonce. Il est donc important pour le pasteur de montrer à ses
fidèles ce qu'est le vrai but de la vie, de les encourager à mener une vie qui leur
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
115
permette de s'épanouir pleinement, et cette vie-là est vécue en communion avec Dieu,
dans la foi en ses promesses et dans la soumission à sa volonté (Eccl 12:13; Mt
22:37.39). Le Dr. Elizabeth Kubler-Ross, grande spécialiste américaine de
l'accompagnement des mourants, estime qu'il est capital que les gens vivent de manière
à ce qu'ils n'aient pas, en regardant en arrière, à dire: "J'ai gâché mon existence".
Le pasteur doit aussi instruire ses fidèles sur la mort. En aidant les gens à comprendre
ce qu'elle est, on les aide à l'assumer. La souffrance devient insupportable, quand elle
n'a pas de sens. Il faut savoir que la mort fait partie du cycle de la vie. Dieu ne l'a pas
créée, mais elle est le salaire du péché (Rom 6:23). Cependant le Christ l'a vaincue. Le
chrétien ne subit donc pas un échec en mourant, mais la mort est pour lui le moyen de
déposer un corps souillé par le péché pour pouvoir vivre en présence de Dieu, en
attendant sa résurrection glorieuse. La mort est l'entrée glorieuse dans la vie éternelle.
Elle est donc pour le chrétien racheté un don de Dieu. Ce n'est que par la mort que nous
pouvons vivre en présence de Dieu. Le but de la vie du chrétien est donc de tout faire
pour mourir un jour dans la foi, afin que se réalisent pour lui les promesses qui lui sont
faites dans l'Ecriture. La mort du chrétien est une victoire et non un échec, une victoire
qu'il doit à celui qui l'a racheté en vainquant le péché, la mort et l'enfer.
Pour aider les gens à mourir, il faut bien les connaître. Des études spécialisées semblent
prouver qu'on meurt comme on a vécu, que l'homme aura face à la mort les réactions et
attitudes qui sont les siennes quand il fait face, dans la vie, à l'adversité, au stress, à
l'échec, à un défi ou une perte.
Enfin, pour pouvoir utilement préparer les autres à la mort, il faut que le pasteur
réfléchisse à sa propre attitude à cet égard. Plus il sera lucide au sujet de ce que la mort
lui inspire personnellement, plus il sera en mesure de comprendre les autres, et
notamment d'accepter qu'ils expriment librement leurs sentiments à cet égard.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
116
Quelques éléments de réflexion:
1) Dire la vérité à celui qui souffre d'une maladie incurable:
Les médecins ne disent pas toujours la vérité à leurs malades, soit parce que cela les
contraint d'avouer leur échec et que cela leur fait donc peur, soit qu'ils pensent que la
connaissance de la vérité pourrait les traumatiser inutilement et abréger leurs jours. Il
en va de même de bien des proches parents bien intentionnés. Ils veulent protéger le
malade d'une mauvaise "nouvelle". Le pasteur ne devrait pas encourager cette attitude.
La plupart des mourants interrogés par le Dr. Kubler-Ross ont déclaré qu'ils auraient
préféré savoir la vérité à temps. Rien ne semble plus mal accepté que le sentiment que
le médecin cache la vérité, qu'il fuit le malade et évite tout contact avec lui.
En cachant la vérité à un patient, on lui interdit de mener à bien une tâche qu'il n'a pas
encore accomplie, de prendre ses dernières dispositions en faveur de sa femme, de ses
enfants ou de son Eglise, de demander pardon à quelqu'un à qui il a fait du tort, de faire
ses adieux à ceux qu'il aime ou de se réconcilier avec Dieu. En cachant la vérité, on nuit
aussi au climat de confiance qui est si important à ce moment. Les grands malades le
sentent parfaitement, lorsqu'on leur dissimule quelque chose. C'est à éviter à tout prix.
2) Savoir écouter:
Dieu nous a donné deux oreilles, mais une seule bouche. Peut-être peut-on en tirer la
conclusion qu'il faut écouter deux fois plus qu'on ne parle. D'autant plus que Dieu nous
a donné la possibilité de fermer la bouche, mais pas les oreilles. C'est à ne pas oublier.
Trop souvent on croit pouvoir tout régler par l'abondance de paroles. Une chose est
certaine: on ne peut pas répondre à une question avant de la connaître. Kubler-Ross
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
117
signale que ce qui l'a toujours frappée, c'est que les membres du clergé se comportent
généralement comme si ouvrir une Bible ou un livre de prières était le seul moyen de
communiquer avec des patients, et qu'ils évitent trop souvent d'écouter ce qu'ils ont à
dire, fuyant peut-être des questions embarrassantes (Kubler-Ross, On Death and Dying,
1969, p. 226).
Le but du pasteur doit être d'aider les mourants à faire le nécessaire pour accepter
l'idée de la mort et partir en paix. Pour cela, il faut les écouter, détecter leurs besoins et
les aider à les satisfaire. Il n'est pas là pour leur dire ce qu'ils doivent ressentir ou ce
qu'ils ont à faire, encore moins pour leur imposer ses propres sentiments, mais pour les
aider à assumer les sentiments et les émotions qu'ils éprouvent.
3) Comprendre le patient:
Aider, c'est tout d'abord comprendre ce qu'éprouve l'autre. La plupart des mourants
passent par cinq phases: le déni, la colère, le marchandage, la dépression et
l'acceptation. Cette séquence cependant ne se vérifie pas toujours. Tous les mourants ne
passent pas nécessairement par ces cinq étapes. D'autre part, le temps qu'ils mettent à
les franchir varie considérablement de l'un à l'autre. Essayons de les analyser un peu.
a) Le déni:
La première réaction de celui qui réalise qu'il va mourir sous peu est le déni, comme le
montrent des réactions du genre: "Non, pas moi!", "Cela ne peut pas être vrai!" Il
s'efforcera de nier sa maladie ou sa gravité, mettra en doute le diagnostic, ou bien
laissera entendre que ce diagnostic ne lui fait pas peur. Il fera des plans tout à fait
utopiques pour l'avenir, désobéira à son médecin, fera preuve d'un optimisme irréaliste
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
118
concernant l'opération qu'il doit subir ou le traitement auquel il lui faut se soumettre,
etc.
Le déni est une chose à la fois bonne et mauvaise. Il est bon, car
il constitue un réflexe de défense permettant au malade de supporter le choc, en
attendant de trouver un mécanisme moins radical. Il ne faut donc pas renverser ces
murailles de protection. Il convient de respecter le besoin de nier du patient, du
moment qu'on ne triche pas avec lui.
Mais le déni est mauvais, si le patient refuse de sortir de ce stade. Dans ce cas, il faut
essayer de déterminer la part du patient et la responsabilité de son entourage. Le
patient en effet refuse souvent de franchir ce stade, quand il sent que le médecin et la
famille nient l'évidence et se complaisent eux-mêmes dans cette phase. Il dépend
entièrement de son environnement et a besoin de ceux qui l'entourent. Il nie donc sa
maladie, quand il estime que son entourage lui demande de le faire. Il suffit qu'il ait un
partenaire avec qui parler ouvertement, pour qu'il accepte de renoncer à cette attitude.
b) La colère:
La question "Pourquoi moi?" révèle que le patient en est au stade de la colère. Cette
colère, il la tourne contre son médecin dont il met en doute la compétence, contre les
infirmières qui le soignent, contra sa famille, son pasteur, voire Dieu lui-même. Il fait
alors preuve d'amertume et de rancune, se plaignant de tout et de rien, jalousant ceux
qui se portent bien ou qui vivent plus vieux. Parfois, la colère n'est qu'un appel à l'aide
lancé par quelqu'un qui souffre d'une grande solitude.
Il n'est pas facile de s'occuper de gens en colère. Suirtout quand cette colère se tourne
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
119
vers Dieu. Le pasteur étant son représentant, c'est généralement devant lui qu'elle se
répand. La colère contre Dieu est le plus souvent irrationnelle. Il faut le savoir et ne pas
faire preuve d'une inutile dureté. Qu'on permette au patient de l'exprimer.
Généralement il comprendra son erreur et demandera pardon à Dieu.
Très souvent le patient pose des questions: "Pourquoi moi?", "Qu'ai-je fait pour mériter
cela?" Le pasteur pense généralement qu'il doit y répondre, alors que le malade n'exige
pas toujours de réponse, mais que poser ces questions est souvent pour lui un moyen de
ventiler sa colère. Généralement, elles n'ont pas d'autre réponse que la vérité biblique
selon laquelle nous vivons dans l'économie de la chute. Ce qui satisfait ou ne satisfait
pas l'intéressé. Mais que le pasteur n'imagine pas qu'il doive prendre la défense de Dieu
et avoir une réponse à toutes les questions. Il y a des choses qui nous sont cachées. Qu'il
permette au malade de s'exprimer, sans lui tomber dessus, sachant que ce genre de
débordement fait partie, lui aussi, des mécanismes de défense et permet de trouver un
soulagement. Le pasteur peut toujours, par la suite, quand son malade s'est exprimé
librement, lui dire en toute simplicité et avec tout le calme voulu ce que son attitude a
d'irrationnel.
Il existe une forme de colère que le malade tourne contre lui-même et qui se manifeste
par un sentiment de culpabilité. Beaucoup de malades incurables ont le sentiment que
le Seigneur les châtie pour quelque péché particulier. Ce sentiment de culpabilité est, lui
aussi, la plupart du temps irrationnel. Il est sûr que nous sommes tous coupables devant
Dieu; mais il est sûr aussi que nous pouvons vivre de son pardon et nous en réjouir. Il
faut donc annoncer au chrétien mourant toutes les consolations de l'Evangile. S'il
souffre d'un sentiment légitime de culpabilité à l'égard d'un homme pour l'avoir offensé
et ne pas encore s'être réconcilié avec lui, le pasteur devra tout faire pour l'aider à le
surmonter par la repentance et la réconciliation.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
120
c) Le marchandage:
Le malade incurable cherche volontiers à marchander avec Dieu. Il est prêt à accepter sa
volonté, mais à condition que le Seigneur lui permette encore de vivre un certain temps,
pour qu'il puisse achever un travail, vivre encore quelques mois auprès de sa femme ou
de son mari, assister au mariage d'un enfant ou au baptême d'un petit-enfant.
Le marchandage est un moyen d'ajourner l'inéluctable. Le patient qui marchande le fait
généralement parce que Dieu n'a pas réagi à ses accès de colère. La colère ayant échoué,
on espère obtenir quelque chose en lui parlant sur un ton gentil et en lui proposant une
sorte de contrat.
L'exemple classique est celui du paroissien qui a négligé d'aller au culte. Il dira
volontiers à Dieu: "Seigneur, si tu me permets de vivre encore un peu, je te promets que
tu me verras tous les dimanches à l'Eglise". L'intéressé reconnaît son indifférence et sa
tiédeur passées, estime que sa maladie en est une conséquence et promet de se corriger
s'il en réchappe.
La phase du marchandage est utile, car elle montre que le patient a su faire un bilan. Il
convient donc de respecter le besoin de passer par elle. Il ne faut pas cependant qu'il
s'imagine pouvoir apaiser Dieu par des promesses. Dieu n'est réconcilié avec nous que
par la mort de son Fils et toutes les bénédictions passent par lui. Si Dieu accorde une
"rallonge" à un malade condamné par la médecine, il le fait par sa seule grâce et non en
vertu d'un marchandage. On se souviendra de l'exemple de David (2 Sam 12:15-23).
L'enfant que Bathscheba lui avait donné était mourant. Le roi s'imposa un jeûne sévère
dans l'espoir que Dieu l'épargnerait. Mais quand il mourut, David interrompit son jeûne,
comprenant qu'il n'avait plus de raison d'être.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
121
d) La dépression:
Beaucoup de malades incurables passent par elle. Elle revêt deux formes. Il y a tout
d'abord la dépression liée au passé: le malade se plaint de n'avoir pas pu faire un tas de
choses, d'avoir échoué en ceci ou en cela, d'avoir rompu des liens, commis de mauvaises
actions. Le pasteur peut offrir son aide de bien des façons, en consolant le malade à
propos de buts qu'il n'a pas atteints, ou bien en provoquant une réconciliation.
La dépression peut aussi s'orienter vers l'avenir: la perspective de devoir quitter les
siens ou de laisser une épouse poursuivre son chemin toute seule, l'éventualité d'une
déchéance physique, la peur d'être une charge pour la famille peuvent abattre le
malade. Il ne faut pas tenter de briser cette dépression avec des arguments faciles qui
risquent d'être peu acceptés. Elle est même nécessaire en ce qu'elle permet au mourant
de faire un "travail de deuil" indispensable. C'est ce travail de deuil qui permet de
passer à la phase de l'acceptation. Il faut savoir être présent et écouter, pour déterminer
les besoins physiques, spirituels ou psychiques réels du patient.
e) L'acceptation:
C'est le dernier stade, auquel tous cependant n'accèdent pas. On n'y parvient que si on a
pu achever certaines choses comme régler tel ou tel problème, se réconcilier avec tel ou
tel membre de la famille ou ami, et si on arrive à se soumettre à la volonté de Dieu et à
accueillir la mort. C'est à ce prix que celle-ci est non pas une défaite, mais une victoire et
qu'on quitte ce monde dans la paix avec Dieu, les autres et soi-même, en disant: "J'ai
combattu le bon combat, j'ai achevé la course, j'ai gardé la foi" (2 Tim 4:7).
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
122
Cette phase est à la fois réconfortante et frustrante pour l'entourage. Réconfortante
pour des raisons évidentes, frustrante parce que le malade, prêt à mourir, ne désire pas
toujours des visites et ne souhaite pas toujours parler. Il s'est détaché de ce monde,
souvent même de ceux qu'il a aimés. Alors ces derniers sont parfois choqués, parce
qu'ils ne comprennent pas ce qui se passe. D'autres veulent forcer le malade à continuer
à se battre pour vivre, alors qu'il ne désire plus qu'une chose, mourir. Il veut partir. Il
appartient donc à la famille de le laisser partir. Quand Jacob fut prêt à mourir, il
convoqua ses enfants, les bénit et leur fit ses adieux (Gen 49).
On ne confondra pas acceptation et résignation. Ce n'est pas la même chose. La
résignation est l'attitude de celui qui subit quelque chose sans y acquiescer, malgré lui.
L'acceptation au contraire traduit le consentement.
Quelques précisions supplémentaires:
Les mourants sont comme tout le monde: ils ne disent pas toujours ce qu'ils pensent et
ressentent. Ils s'expriment parfois de façon voilée. Un tel dira à son entourage ou à son
pasteur: "Cela fait quinze jours que je suis à l'hôpital et je n'ai fait aucun progrès" non
pas pour s'en plaindre, mais dans l'espoir d'obtenir des informations sur son état.
Les grands malades sont souvent hantés de peurs: peur de devoir mourir seuls, peur de
souffrir ou d'être asphyxiés, peur d'être défigurés par la maladie, peur de perdre son
indépendance ou de sombrer dans la folie, etc. A cela s'ajoutent des appréhensions de
toutes sortes, celle d'être à charge à autrui, l'anxiété qu'en-gendre la perspective de la
séparation, les soucis pour l'avenir de la femme ou des enfants, l'impression que la vie
n'a pas de sens maintenant que la mort est imminente.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
123
On se souviendra aussi que le mourant est encore un être vivant. Il apprécie donc qu'on
lui parle de sa famille, du travail, de tout ce qui l'a intéressé, voire passionné dans la vie.
On se gardera cependant de parler de futilités, de choses sans importance, car le patient
interprétera cela comme une inaptitude à faire face à la réalité qu'est la mort
imminente.
4) L'aide à la famille:
Assister un mourant, c'est aussi assister sa famille. Tâche difficile, mais nécessaire. La
proche famille éprouve souvent dans ce cas un profond sentiment de culpabilité. On se
reproche d'avoir mal agi, de n'avoir pas témoigné au mourant assez d'amour et de
compréhension. On se reproche aussi parfois de lui souhaiter une mort rapide et sans
souffrances. Le mieux que le pasteur ait à faire est de les écouter et de les aider à
assumer leurs sentiments.
Bien des familles ont des problèmes de communication, et ces problèmes s'intensifient
considérablement en cas de maladie incurable et de décès imminent. On veut protéger
le mourant et on se réfugie, pour ce faire, dans le silence. Il faut donc encourager les
gens à exprimer ouvertement et honnêtement leurs émotions, même quand celles-ci ont
le pouvoir de mettre mal à l'aise ou qu'elles sont ressenties comme saugrenues. Il faut
savoir accepter les sentiments d'autrui sans les juger. Quoi qu'il en soit, on ne peut aider
quelqu'un que si on sait exactement ce qu'il a dans le cœur et ce qu'il ressent au fond de
lui-même.
5) Les consolations de la Parole de Dieu:
Il faut apporter aux mourants le secours et le réconfort de la Parole de Dieu, en tenant
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
124
compte de leurs besoins particuliers. On trouvera des textes bibliques appropriés à
chaque situation. Le diagnostic d'une maladie incurable est un choc violent pour le
patient et les siens. On attend donc beaucouyp du pasteur. Là où le médecin ne peut plus
que retarder l'échéance, le pasteur est capable d'offrir une thérapie d'un autre ordre,
mais qui apporte une consolation certaine et transforme la mort, changeant la défaite en
une victoire. Pour ce faire, il faut qu'il soit honnête et qu'il encourage l'honnêteté, qu'il
accepte les sentiments tels qu'ils s'extériorisent devant lui, et qu'il applique la Parole de
Dieu avec compréhension et amour.
Le pasteur encouragera aussi d'autres, membres de l'Eglise ou conseillers presbytéraux,
à rendre visite au mourant. Parfois ces visites sont expressément souhaitées par le
patient. Il peut même arriver que la visite d'un certain paroissien apporte plus de
réconfort que celle du pasteur. Celui-ci n'en prendra pas ombrage. Un mourant a droit à
toutes les formes de consolation auxquelles il aspire.
L'aide à la famille e deuil:
Le décès de son conjoint est sans doute la perte la plus douloureuse qu'une personne
puisse subir. D'autres décès sont également particulièrement éprouvants.
L'accompagnement pastoral des familles en deuil est toujours difficile, mais il est
nécessaire et très apprécié. Les principes que nous avons énoncés pour la cure d'âme
auprès des mourants s'appliquent également ici.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
125
Le deuil fait partie de la vie, car la perte d'un être cher en fait partie. De même que
l'homme doit apprendre à bien vivre, de même il lui faut apprendre à bien assumer le
deuil. Ce n'est pas facile, car les occasions ne sont pas si nombreuses que cela. D'autre
part, les enfants sont souvent protégés contre le deuil par leurs parents. Des études
révèlent qu'un deuil mal assumé peut engendrer des maladies (troubles fonctionnels,
cancer, ulcère, maladies mentales, etc.). Bien des actes hostiles à la société et des
comportements délinquants sont le fait de gens qui ne sont pas parvenus à surmonter
leur deuil après un décès très mal vécu. Nombreux sont les jeunes délinquants qui ont
perdu un parent en bas âge et dont le comportement est une manifestation de colère
contre ce qu'ils perçoivent comme une injustice, contre des événements qui les ont
privés de sécurité et de bonheur.
La cure d'âme auprès de la famille en deuil est fonction de la nature et des circonstances
du décès, des sentiments et réactions des proches parents et, dans une certaine mesure
aussi, des relations que le pasteur entretient avec la famille.
On demande parfois au pasteur d'aller annoncer la nouvelle du décès à la famille du
défunt. Il ne faut pas qu'il se dérobe à cette mission dont on le charge un peu en raison
de son ministère ou de la confiance particulière qu'on a en lui. Il s'en acquittera d'une
façon simple, directe et calme, sans recourir à des formules ambiguës. Il faudra ensuite
qu'il accepte la réaction émotionnelle suscitée par la nouvelle du décès et qu'il apporte
un réconfort approprié.
Les funérailles devraient, partout où cela est possible, avoir lieu dans le cadre et donc
dans la chapelle de la paroisse. Elles sont à la fois un culte rendu à Dieu et une
confession de la foi et de l'espérance chrétiennes. Quand l'Eglise enterre ses fidèles, elle
affirme sa foi en la victoire sur le dernier ennemi, la mort. Celle-ci constitue la
prédication la plus éloquente de la Loi, car elle est selon l'enseignement de la Bible, le
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
126
salaire du péché. Son pouvoir sur les pécheurs est universel. Personne n'y échappe.
Quand la mort entre dans une maison, ceux qui portent le deuil songent à leur propre
mort et à leur destinée éternelle. Le moment est donc propice pour annoncer ce que la
Parole de Dieu révèle au sujet de la vie, de la mort et de l'au-delà. Les funérailles
chrétiennes sont le lieu privilégié pour cela. Elles sont aussi en particulier l'occasion
d'affirmer ce que croit et confesse l'Eglise et d'annoncer la nécessité pour chaque
homme de se repentir et de se convertir au Christ. Pour que l'Eglise soit crédible avec
son témoignage, le pasteur doit bien sûr éviter d'enterrer toute personne qui n'a pas
confessé la foi chrétienne de son vivant ou, à défaut, sur son lit de mort.
Le sermon d'enterrement doit toujours annoncer la Loi et l'Evangile, affirmer
l'universalité de la malédiction du péché et de la condamnation qu'il entraîne, et
proclamer le pardon des péchés et la victoire sur la mort et l'enfer par la foi en Christ.
Mourir pour un chrétien, c'est se séparer de ce corps corruptible pour aller chez le
Seigneur, et cela dans l'attente de la résurrection des morts.
Les gens qui portent le deuil éprouvent des sentiments divers au moment du décès et
après lui. Chacun le fait à sa façon en fonction des relations qu'il a entretenues avec le
défunt, de la nature et des circonstances du décès, de ses particularités émotionnelles et
d'expériences semblables vécues dans le passé.
Les différentes phases du deuil:
1) Le choc et le déni:
Apprendre le décès d'un être aimé suscite toujours le choc, que ce décès ait été
pressenti ou qu'il soit inattendu. La première réaction est souvent l'absence d'une
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
127
manifestation de sentiments, l'indifférence ou la négation. Il ne faut pas s'en offusquer.
C'est un mécanisme de protection temporaire destiné à absorber la souffrance causée
par le décès. En réagissant ainsi, on se donne le temps de "digérer" la mauvaise
nouvelle.
2) Les malaises physiques:
Ceux qui portent le deuil se plaignent souvent de malaises de toutes sortes (rhumes,
troubles fonctionnels et surtout digestifs, insomnies, difficultés à se concentrer, crises
de larmes, logorrhée, etc.). Cette phase est généralement assez courte, mais peut
cependant s'étendre sur des mois. Quelques bons conseils d'hygiène (diététique,
activités physiques) sont utiles. Il faut veiller en particulier à ce que ceux qui portent le
deuil ne se réfugient pas dans l'alcool ou la prise intempestive et anarchique de
médicaments.
3) La colère:
Ceux qui portent le deuil sont souvent amers, voire en colère contre le défunt,
eux-mêmes, le pasteur, la société en général et Dieu lui-même. Il convient de ne pas
dramatiser. C'est encore un réflexe de défense, une façon d'exprimer une frustration
parce qu'on a subi une perte, qu'on doit vivre une situation douloureuse qu'on n'a pas
pu contrôler.
4) Culpabilité:
C'est le sentiment le plus répandu chez ceux qui portent le deuil. Il s'exprime par des
phrases du genre: "Si j'avais fait ceci ou cela, il (ou elle) ne serait pas mort", "Je n'ai pas
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
128
fait mon devoir", "J'aurais dû lui témoigner plus de patience et d'amour". La mort
supprime toute possibilité de réconciliation. Le sentiment de culpabilité au moment
d'un décès est généralement irrationnel. Il peut aussi être légitime et fondé. Dans ce cas,
le pasteur sait ce qu'il a à faire pour aider les gens à le surmonter.
Quand l'agonie a été particulièrement longue et douloureuse, la famille éprouve un
soulagement le jour du décès. Ce sentiment de soulagement peut en générer un autre, le
sentiment de culpabilité. Cela se comprend, et il faut tout faire pour permettre aux gens
de le surmonter.
5) Dépression:
Les gens qui portent le deuil passent par une phase de déprime: crises de larmes,
sentiment de solitude, peur pour l'avenir, perte d'identité pour celui que la mort prive
de son rôle de mari, de femme ou de parent. On ne se sent plus nécessaire, désiré ou
utile. On se réfugie volontiers dans le sommeil, l'inactivité, quand ce n'est pas dans les
médicaments ou les drogues de toutes sortes. Certains ont des pensées suicidaires. Il
faut tenir compte de tout cela et apporter une aide faite d'affection et de
compréhension, en sachant que c'est là généralement une phase transitoire.
6) Réconciliation:
C'est la dernière phase: la perte de l'être aimé est acceptée, le chagrin est en grande
partie surmonté, l'intéressé a retrouvé un sens à la vie. On accepte finalement de vivre
sans l'être aimé qu'on a perdu. Le sourire et la bonne humeur sont revenus. On n'est
plus rivé au passé, mais on pense au présent et à l'avenir. La souffrance est là, mais la vie
continue.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
129
Le pasteur fera tout pour aider ceux qui portent le deuil à accéder aussi vite que
possible à cette dernière phase, sans pour autant sous-estimer leur chagrin et les faire
progresser à un rythme donné. Les liens qu'on entretenait avec le défunt doivent se
convertir progressivement d'une relation de présence en une relation du souvenir. Il
faut accéder à une nouvelle identité basée sur une vie sans le défunt et qui a une
signification nouvelle. Le temps y est pour beaucoup. A lui seul il guérit, quoi qu'on en
dise, beaucoup de plaies; il possède une vertu thérapeutique en soi. Mais il va de soi que
les promesses de l'Evangile concernant la vie éternelle et les retrouvailles dans le ciel
aident par-dessus tout le chrétien en deuil à accepter la perte de l'être aimé et à se
réconcilier avec ce qui lui est arrivé.
On pense de nos jours que le travail de deuil prend environ deux années. Le temps
requis dépend bien sûr de nombreux facteurs objectifs (nature et circonstances du
décès, situation familiale et sociale de celui que frappe le deuil) et subjectifs (liens avec
le défunt et constitution psychique). Il n'existe pas de normes à ce sujet, et chacun doit
vivre son deuil à sa façon. La période la plus critique est certainement le premier mois
après le décès; ensuite, les symptômes du deuil s'atténuent progressivement et mettent,
selon les individus, plus ou moins de temps à disparaitre.
Il existe des deuils aggravés, et deux facteurs y contribuent: le conditionnement social
qui nous enseigne à supprimer la souffrance et la douleur, et notre manque
d'expérience concernant le processus et les mécanismes du deuil. On distingue entre
quatre catégories de deuils aggravés:
a) L'absence de chagrin véritable due à une situation de choc et de déni
dont on n'arrive pas à sortir.
b) La distorsion du deuil par une colère ou un sentiment de culpabilité
insurmontables.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
130
c) La somatisation par des troubles durables qui n'ont pas d'origine
fonctionnelle.
d) Enfin, il y a le deuil chronique de celui qui s'efforce à tout prix de
maintenir le défunt en vie, en faisant une fixation sur sa personne et
sur les objets qui lui appartenaient. L'intéressé rumine son deuil, et le
fait parfois parce qu'il pense qu'il est tenu de le faire, pour montrer à
quel point il aimait le défunt.
C'est en général le refuge dans une phase particulière du deuil dont on refuse de sortir,
qui indique qu'on a affaire à un deuil aggravé. La tristesse qui envahit la personne en
deuil quand viennent des anniversaires ou des jours de fête, les crises de larmes à
l'église, le fait de parler excessivement du défunt ne sont pas en soi des symptômes de
deuil aggravé. Dans certains cas, le pasteur n'hésitera pas à orienter les intéressés vers
un psychothérapeute compétent. Rares sont en effet les pasteurs suffisamment formés
par leurs études et par leur expérience pastorale pour faire face à ce genre de situation.
La proclamation constante dans la paroisse de ce qu'enseigne la Bible au sujet de la
grâce divine, du pardon, de la mort, de la résurrection et de l'éternité est sans doute le
moyen par excel-lence pour préparer les chrétiens à faire face à leur propre mort et au
départ de ceux qu'ils aiment. C'est de la sorte qu'on fait grandir les chrétiens dans la
connaissance et dans la foi, qu'on les assure de la présence divine et qu'on les aide à
assumer leurs émotions et à contrôler leurs craintes et leurs appréhensions.
Le pasteur s'efforcera d'être aussi un ami attentionné, bénéficiant de la confiance de ses
paroissiens en détresse. Il invitera les membres de sa paroisse à faire de même, avec
tact et discrétion.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
131
Voici, pour terminer, quelques conseils tout à fait pratiques à l'usage du pasteur et des
paroissiens:
- Chercher le contact et le garder.
- Ecouter, avant de parler.
- Ecouter beaucoup et parler peu.
- Eviter les clichés et les réponses faciles.
- Etre authentique.
- Etre pratique, ponctuel et efficace (préparer un repas, nettoyer la
maison, faire des courses, en un mot, se rendre utile).
- Encourager d'autres à rendre visite aux personnes en deuil.
- Accepter le silence.
- Ne pas questionner inutilement sur les circonstances du décès.
- Consoler en particulier les enfants de la famille, qui sont
généralement les grands oubliés.
- Ne pas parler d'une façon anodine de tout et de rien. La personne
en deuil ressentirait cela comme la volonté délibérée de la détourner
de ce qui la préoccupe.
- Permettre à celui qui porte le deuil de faire son "travail de deuil"
à son rythme.
- Inviter, le moment voulu, la personne en deuil à sortir de sa
maison, à manger chez soi, à aller au spectacle. L'orienter vers
une activité nouvelle.
- Envoyer une carte, un petit cadeau.
- Lui remettre l'enregistrement d'un sermon ou d'un culte.
- Intercéder dans le culte pour ceux qui portent le deuil et inviter
les paroissiens à faire de même chez eux.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
132
Le pasteur, chargé dans son ministère de consoler ceux qui souffrent, fera bien de
réfléchir souvent à ces paroles de l'apôtre Paul: "Béni soit Dieu, le Père de notre
Seigneur Jésus-Christ, le Père des miséricordes et le Dieu de toute consolation, qui nous
console dans toutes nos afflictions, afin que, par la consolation dont nous sommes
l'objet de la part de Dieu, nous puissions consoler ceux qui se trouvent dans quelque
affliction! Car de même que les souffrances de Christ abondent en nous, de même notre
consolation abonde par Christ. Si nous sommes affligés, c'est pour votre consolation et
pour votre salut. Si nous sommes consolés, c'est pour votre consolation, qui se réalise
par la patience à supporter les mêmes souffrances que nous endurons. Et notre
espérance à votre égard est ferme, parce que nous savons que, si vous avez part aux
souffrances, vous avez part aussi à la consolation" (2 Cor 1:3-7).
La condition de l'homme dans ce monde requiert la souffrance. C'était vrai pour Paul.
Cela l'est aussi pour tous les pasteurs et pour tous les chrétiens. Mais Dieu console les
pasteurs, pour qu'ils puissent consoler à leur tour ceux qu'il a confiés à leurs soins.
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
133
L'EVANGELISATION
Le but de l'évangélisation est double:
1) sauver des hommes par la foi en Jésus-Christ,
2) les faire participer à toutes les bénédictions que Dieu veut leur offrir dans cette vie.
Les raisons de cela?
1) L'homme naît pécheur (Gen 5:3; Ps 51:5), vit dans le péché (Eccl 7:20; Rom 3:22.23), est
sous la condamnation de la loi (Ez 18:20; Gal 3:10), n'a aucune chance de salut après la mort
(Mt 25:41.46).
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
134
2) La rédemption fut promise (Gen 3:15; Es 53), accomplie en son temps (Gal 4:4; 1 Jn 1:7;
4:10; Jn 3:16), est là pour tous (Lc 2:10; 1 Jn 2:2).
3) Le salut est obtenu par la grâce seule (Eph 2:8.9), par la foi seule (Rom 3:28; Jn 3:16), et
est voulu par Dieu (1 Tim 2:4).
4) Dieu nous accompagne de sa présence (Mt 28:20; 1 Cor 3:9), envoie son Saint-Esprit pour
changer les cœurs par la Parole que nous annonçons (Es 55:10.11).
Les moyens de l'évangélisation sont la Parole de Dieu (2 Cor 5:19; Jn 17:20; 1 Cor 4:15; 1 Pi
1:23) et les sacrements (Tite 3:5; 1 Cor 11:25; Mt 28:19.20).
En quoi consiste l'évangélisation? En l'utilisation de ces moyens de grâce dans un esprit de
prière (Mt 5:16; Jn 16:23) (prière permanente de toute la paroisse pour l'évangélisation), et
dans la certitude que Dieu agit par la Parole et les sacrements (Rom 1:16; Es 55:11).
Le pasteur et l'évangélisation:
Le pasteur n'est pas seulement berger de son troupeau, mais aussi le leader choisi par Dieu
pour l'oeuvre d'évangélisation de sa paroisse. Il faut pour cela un vrai coeur de pasteur. Il
doit en effet gagner lui-même des âmes à Dieu et guider ses paroissiens et la paroisse tout
entière dans leur témoignage et leur mission.
Conscient de ses faiblesses, il mettra sa confiance dans les promesses de l'Evangile (Ps 121:2;
Act 1:8). Paul est en cela un modèle (1 Cor 9:22; Act 26:28). Pour sauver des âmes, il faut
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
135
avoir fait l'expérience personnelle du salut, être un chrétien rayonnant et consacré.
Tout pasteur doit programmer son emploi du temps de façon à pouvoir faire des visites
missionnaires. Mais il doit aussi édifier et équiper sa paroisse (Eph 4:12), pour que chaque
paroissien agisse en disciple du Christ et évangélise (Jn 1:37 ss.). L'Eglise locale à qui le Christ
a confié le ministère des clés doit être un véritable outil d'évangélisation. Pour réaliser cet
idéal, il est bon pour une paroisse de se doter d'un comité d'évangélisation qui l'aidera à
mener cette tâche à bien.
La tâche du comité d'évangélisation d'une paroisse:
1) Encourager la paroisse à utiliser Parole et sacrements, en lui rappelant que le Royaume du
Christ n'est édifié que par ces moyens. L'activisme, à lui seul, ne produit rien.
2) Recourir aus dons que Dieu a accordés à chaque paroissien (Rom 12:4-8; 1 Cor 12:7; 1 Pi
2:9; 4:10).
3) Avoir confiance dans le Seigneur et dans la puissance de son Esprit. Pas de récoltes sans
semailles. Il faut que la Parole de Dieu se répande par tous les moyens. Dieu bénit ce travail
en son temps et à sa façon.
Le comité d'évangélisation doit agir!
Il doit
1) veiller à ce que la paroisse contacte les habitants de la localité qui ne connaissent pas
encore le Christ (enfants, jeunes, adultes, vieillards chez eux ou en maison de retraite,
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
136
les hommes de toutes les races et couches sociales). Contacter aussi les chrétiens déracinés,
sans lien avec une paroisse;
2) veiller à ce que soient contactés les marginaux et les nouveaux membres et les intégrer à la
paroisse;
Programme d'action:
1) Visualiser sur une carte le champ d'action de la paroisse.
2) Encercler sur la carte les quartiers prioritaires.
3) Faire une enquête dans les quartiers en question et tenir un fichier de cette enquête.
4) Faire un séminaire sur l'évangélisation dans la paroisse.
Evangélisation en action:
Tout homme qui n'est pas membre de l'Eglise chrétienne est sur la liste de prospection de
Dieu. Il faut donc qu'il soit aussi sur la liste de prospection de la paroisse.
Les nouveaux venus dans une localité sont généralement plus faciles à gagner pour l'Eglise
que les anciens résidents. Contacter ceux qui viennent d'emménager dans une cité ou un
lotissement nouveau.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
137
Essayer d'inscrire les enfants à l'école du dimanche et au catéchisme par tracts et affichettes
lors de la rentrée scolaire.
Livre d'or ou cartes placées dans les bancs invitant les visituers à laisser leurs coordonnées.
Parents et amis de paroissiens.
Un dimanche où le pasteur prêche sur l'évangélisation, distribuer des cartes aux paroissiens
et les inviter à indiquer les noms et adresses de gens que pourrait intéresser l'Evangile. Les
nouveaux membres de la paroisse, en particulier, sont généralement heureux de pouvoir
communiquer quelques adresses de parents et amis.
Profiter des baptêmes, confirmations, mariages et enterrements pour faire circuler des cartes
à remplir.
Enquêtes systématiques dans la localité.
Etablir une liste de sympathisants ou de membres potentiels.
Garder des âmes est tout aussi important qu'en gagner. Pour cela, il faut une instruction
constante, et en particulier une instruction suffisante, avant de recevoir de nouveaux
membres dans l'Eglise.
Quand les gens se rattachent à l'Eglise, ils se rattachent à la plus importante organisation qui
existe au monde. Il faut donc les recevoir dans la paroisse d'une façon digne, par une
cérémonie qu'ils apprécient (voeux de fidélité, intercessions, action de grâces, photo du
groupe, cadeau, par exemple Bible, recueil de cantiques, un poster ou une brochure illustrée
de la paroisse).
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
138
Recruter des membres pour l'évangélisation, en sachant que tous les chrétiens n'ont pas les
mêmes dons. Tous ne sont pas des témoins éloquents. Définir sur une page le travail qu'on
attend d'eux et le temps requis pour l'accomplir. Ne pas demander des volontaires, mais
contacter les gens personnellement. Enrôler les gens pour une durée bien délimitée, étant
entendu qu'ils pourront être enrôlés à nouveau par la suite, s'ils le désirent. Partir du
principe que ce sont des chrétiens qui veulent servir le Christ et leur montrer qu'ils le font en
tant que ses témoins. Leur rappeler que Dieu a promis de les assister et qu'il le fera (Mt
28:20). Faire ce travail de recrutement en collaboration avec le pasteur qui connaît bien les
gens. Si on peut dire à quelqu'un: "Le comité d'évangélisation et le pasteur sont convaincus
que le Seigneur vous a accordé des dons particuliers pour le servir comme témoin", cela peut
motiver positivement et encourager.
Veiller aux relations publiques et à l'image que donne la paroisse. Il faut que cette image soit
bonne, de façon à ce que la paroisse inspire de la sympathie à ceux qui vivent autour d'elle.
C'est un point très important!
Nécessité d'engager les laïcs dans l'évangélisation:
Ils vivent en contact étroit avec les gens, sont par définition des témoins du Christ, sont plus
nombreux que les pasteurs. Cent laïcs font en une heure ce qu'un pasteur met cent heures à
faire. Quand le pasteur témoigne, on dit qu'il fait son métier. Quand ce sont les laïcs, on y est
plus attentif. On se demande: Pourquoi?
Il faut communiquer aux chrétiens l'amour du prochain et la pssion pour l'évangélisation,
leur apprendre à partager l'Evangile avec autrui. Pour cela, il faut les instruire dans les
vérités de la Bible et leur rappeler que Dieu bénira leur témoignage. Il faut aussi leur
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
139
enseigner certaines techniques d'évangélisation: comment entrer dans les maisons, établir
des relations amicales avec les gens, les écouter, entamer une conversation religieuse,
annoncer l'essentiel de l'Evangile de façon attrayante, simple et chaleureuse, répondre
correctement aux questions posées et réagir correctement à des situations spécifiques.
Nécessité d'organiser l'évangélisation. Jésus a organisé et programmé: choix des 12, envoi
des 70 en mission par groupes de deux (Lc 10:1); L'organisation est encore plus nécessaire
aujourd'hui où les gens ont des loisirs et bougent beaucoup plus que jadis. L'organisation est
aussi indispensable pour l'encouragement mutuel.
Calendrier d'une campagne par le porte-à-porte:
1 réunion: Méditation - Expliquer la mission des témoins: visiter les nouveaux venus dans
la commune, les membres en puissance, les nouveaux membres, les membres
marginaux - Montrer la nécessité de l'engagement des chrétiens, chiffres à l'appui (nombre
de gens sans Eglise dans la commune, nombre de marginaux dans la paroisse, etc.) - Leur
montrer l'amour du Christ pour les hommes et son désir de les sauver _ Calmer les
appréhensions des témoins. Seul celui qui ne fait rien ne commet pas d'erreur, si ce n'est la
plus grande, celle précisément de ne rien faire. Jésus a promis d'être avec eux - Les envoyer
deux par deux - Répartir les témoins en groupes qui alterneront d'une semaine à l'autre.
2 réunion: Méditation - Rapport sur les dernières visites faites - Petite instruction sur
l'évangélisation (pas plus de 15 minutes) - Détermination des endroits à visiter et répartition
du travail - 2 heures de visites.
Tenir des fichiers, une fiche par famille ou personne visitée (nom, prénom, adresse, date,
téléphone, nom du visiteur), avec appréciation de la personne visitée (intéressée, pas
intéressée, indifférente, hostile, souffre de tel ou tel problème, souhaite ou non une nouvelle
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
140
visite, éventuellement du pasteur). Pour les visites ultérieures aux personnes déjà
contactées, il est bon d'envoyer des hommes chez les hommes, des femmes chez les femmes
et des jeunes chez les jeunes. Munir les visiteurs de tracts d'évangélisation, de N.T.,
d'informations sur la paroisse. Indiquer aux visiteurs la date de reprise des catéchismes, des
études bibliques, des activités habituelles et extraordinaires de la paroisse. Envoyer les
visiteurs au travail avec prière et bénédiction.
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
141
LA FORMATION DE LAICS A DES
RESPONSABILITES ET DES MINISTERES
DANS L'EGLISE
1) Trois vérités préliminaires:
1) Les chrétiens sont le peuple de Dieu, le peuple des pécheurs rachetés et pardonnés qui
appartiennent à Dieu et non plus à eux-mêmes. Non plus des individus isolés, mais un peuple
dont les membres sont solidaires les uns des autres.
2) Les chrétiens sont le peuple de Dieu au travail. Dans le Royaume de Dieu on travaille. Dieu
a travaillé (Gen 2:2) et continue de le faire. Le Christ a travaillé (Jn 9:4). A nous de travailler à
notre tour. Le Christ nous réserve un joug et un fardeau (Mt 11:30) légers, mais réels. Le
travail qu'il confie à son Eglise est défini dans Mt 28:19.20.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
142
3) Ce travail, les chrétiens le font dans le cadre de l'Eglise. Le Christ veut se servir d'eux pour
faire des hommes ses disciples.
2) Description du travail:
a) C'est une mission bien précise que nous n'avons pas à définir ou délimiter, la proclamation
de l'oeuvre rédemptrice du Christ et l'appel à la foi (Lc 4:18.19).
b) C'est une mission immuable, toujours identique à elle-même (1 Tim 2:3.4), depuis Adam et
Eve jusqu'à la fin du monde.
c) L'objet de cette mission sont les hommes, et non des animaux ou des objets. Nous devons
partager avec eux ce que le Seigneur nous a accordé.
Nous précisons: tous les hommes. Toute discrimination raciale, sociale ou sexuelle dans cette
mission n'est pas seulement une offense à Dieu, mais une abomination.
d) Cette mission requiert l'engagement total du chrétien, et de tout chrétien. Les temps
pressent. Pas question d'être paresseux ou négligeant! Tous n'ont pas à faire exactement le
même travail, mais tous ont du travail à faire. En fonction des dons de chacun et de sa place
dans le corps du Christ. Cf. 1 Cor 12:1-20.
e) La mission concerne des besoins réels de l'homme. Avant tout ses besoins spirituels
(pardon, salut) que l'Eglise est seule à pouvoir satisfaire, mais aussi les autres (émotionnels,
mentaux, physiques). Cf. Mt 25:31-46. Des différents dons signalés dans ce texte, quels sont
ceux que l'Eglise s'efforce de satisfaire (misère dans le pays et ailleurs dans le monde,
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
143
famines, catastrophes, solitude de tant de vieillards, visite des malades, des prisonniers, etc.)?
3) Programmation du travail dans une paroisse du XX siècle:
Pyramide paroissiale par tranches d'âge:
Une telle pyramide est révélatrice. Elle indique par exemple qu'un club de jeunes est
indispensable dès maintenant, qu'il y aura une foule d'adolescents dans peu d'années. Par
contre, il y a assez peu de gens âgés. Un club du 3 âge ne paraît donc pas répondre aux
besoins ou aux souhaits de beaucoup de paroissiens. Par contre, beaucoup de gens entre 35
et 44 ans, d'adultes en pleine force qu'il faudrait mobiliser, en particulier aussi pour des
travaux manuels.
Il serait bon d'établir une pyramide de cette sorte pour sa propre paroisse, de se procurer si
possible une pyramide analogue pour la communauté civile où œuvre la paroisse et de
comparer les deux, pour voir si la paroisse est représentative de la population. Quels genres
de services peut-elle rendre à la communauté civile, en fonction de la composition de cette
dernière? Qu'est-ce que cette communauté civile est en droit d'attendre d'une paroisse
chrétienne?
Il est bon aussi d'acquérir un plan de ville et d'y fixer des épingles représentant les familles et
membres de la paroisse. On voit ainsi où les paroissiens sont concentrés, ce qui permet de
programmer des actions missionnaires, des études bibliques à domicile, etc.
Un pasteur accomplit six sortes de tâches: 1) il prêche, 2) il préside le culte, 3) il enseigne, 4)
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
144
il fait de la cure d'âme, 5) il fait du travail administratif, 6) il veille à la croissance de la
paroisse. Les points 4 et 5 lui prennent plus de temps aujourd'hui que jadis et le point 6
devrait lui en prendre plus. Aussi souffre-t-il de ne pas pouvoir consacrer assez de temps
aux points 1 à 3. C'est là qu'intervient le stewardship. Il a pour mission de décharger le
pasteur de tâches qui l'accaparent de trop. C'est à la paroisse de décharger son pasteur de
tâches que d'autres que lui peuvent faire (travail avec les jeunes, rédaction du bulletin
paroissial, responsabilités financières, matérielles et administratives).
4) Réalités du XXe siècle qui affectent la vie de l'Eglise:
1) Les gens sont en général plus aisés et disposent de moyens financiers qu'ils ont tendance à
n'investir que pour eux-mêmes. Il s'agit de canaliser ces moyens dans une autre direction,
d'apprendre aux gens à donner à l'Eglise, c'est-à-dire à Dieu, et de les y encourager, de faire
d'eux des gérants responsables et chrétiens des biens que Dieu leur confie.
2) Les besoins se sont accrus. On ne peut plus occuper un patronage avec un ballon ou un jeu
de société, ni instruire une classe de catéchisme avec des manuels démodés. Il y a aussi de
grands besoins d'assistance, de cure d'âme dans les différentes couches sociales (adolescents,
jeunes couples, adultes, vieillards).
3) La plupart des gens ont de l'instruction et des qualifications professionnelles. Il faut savoir
mobiliser cela.
4) Les femmes ne vivent plus recluses à la maison, mais participent à la vie de la société. Elles
ne demandent pas mieux que de mettre de leur temps et de leurs dons au service de l'Eglise.
Il faut les y inviter.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
145
5) Nous sommes dans une période de mutations où l'Eglise ne peut pas rester immobile et
inerte. Elle doit apprendre à distinguer entre l'immuable (Parole de Dieu, doctrine) et ce qui
peut changer (formes de cultes, de piété, de vie paroissiale). Il y a toujours des gens hostiles a
priori au changement, qui ont peur, qui ont le sentiment qu'en changeant quelque chose, on
rejette ce qui a eu lieu dans le passé. Il faut les ménager, mais les instruire avec patience. On
ne peut pas revenir à l'époque de Luther ou des apôtres. Ces hommes se sont efforcés d'être à
leur époque de fidèles serviteurs de Dieu et de son Eglise. Cette époque n'est plus là. Vivre
dans la nostalgie du passé et résister systématiquement au changement n'a pas de sens. Il
faut s'adapter. Les gens sont beaucoup plus mobiles aujourd'hui que jadis, leur niveau
d'instruction est plus élevé, les moyens de communications de sont simplifiés, les besoins
humains multipliés. Il faut savoir vivre avec cela et en tirer le meilleur parti. Il s'agit pour
nous d'être aussi fidèles que nos ancêtres, mais pas nécessairement de vivre, d'agir et de
réagir comme eux.
Consulter les statistiques paroissiales (nombre de membres communiants, baptisés,
assistance aux cultes, enfants en instruction, adultes reçus dans la paroisse, etc.).
Analyser ces chiffres des 10 dernières années: pourcentage d'assistance aux cultes, dons
pour la paroisse, l'évangélisation et la mission, voire la bienfaisance, et cela par membre
communiant ou ayant un revenu. Quels chiffres ont-ils crû? Lesquels ont-ils diminué?
Pourquoi?
Quelles étaient et quelles sont à présent les activités de la paroisse dans les domaines
suivants: a) culte (fréquence, Sainte-Cène, formes de cultes, cultes pour jeunes, etc.), b)
enseignement (comment, par exemple, instruit-on et confirme-t-on les enfants?), c)
témoignage (évangélisation, "outreach", méthodes utilisées, etc.), d) diaconie, e) communion
fraternelle (dimanches paroissiaux, excursions, repas communs, rencontres avec autres
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
146
paroisses, etc.).
Que n'a-t-on pas fait? Evangélisation, bulletin paroissial, réunions de jeunes, "follow up" de
ceux qui ont assisté une ou plusieurs fois aux cultes, accueil des visiteurs dans la chapelle, etc.
Se pourrait-il que les habitants de la commune ne s'intéressent pas à ce que fait l'Eglise? Se
pourrait-il aussi qu'ils s'intéressent à des choses que l'Eglise ne leur propose pas?
Il serait bon d'aller interroger les voisins et les notables de la commune et de leur demander
ce qu'ils savent de l'Eglise et comment ils la perçoivent.
6) Programmer l'avenir:
C'est absolument nécessaire, au risque de voir s'installer le mécontentement, les frustrations,
le découragement et le renoncement. Programmer, c'est répondre à trois questions: 1) Que
s'agit-il de faire? 2) Dans quel délai? 3) Qui le fera?
Les objectifs doivent être précis, réalisables et mesurables. Un objectif défini ainsi: "Annoncer
l'Evangile alentour" est louable, mais manque de précision et ne peut, comme tel, faire l'objet
d'un programme. Seul des objectifs précis et réalisables permettent d'évaluer les efforts
accomplis. Seuls ils incitent à l'action et mobilisent, empêchant qu'on se perde dans des
discussions interminables. Seuls ils encouragent au travail et convainquent les gens qu'ils
sont capables de les mener à bien. Seuls ils permettent de conserver le contrôle de ce q'on est
censé faire.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
147
Un exemple simple: S'il est évident que la paroisse aime la participation active des laïcs, un
objectif simple sera le suivant: Sélectionner et former trois personnes pour en faire des
lecteurs et leur confier à tour de rôle les lectures pendant un an. Ensuite, faire un bilan.
Une fois les objectifs choisis, il faut leur donner un ordre de priorité en fonction de deux
critères: leur importance respective et les délais requis (objectifs à longue ou à brève
échéance). Les objectifs à brève échéance, même s'ils sont parfois moins urgents que ceux à
longue échéance, sont souvent une étape nécessaire pour réaliser ces derniers. Exemple
d'objectif à longue échéance: Présenter aux enfants de l'école du dimanche l'ensemble de
l'histoire sainte durant un cycle de cinq ans. Objectif à brève échéance: Choisir le matériel
littéraire nécessaire pour parcourir ce cycle. Le premier objectif ne pourra être réalisé que si
on réalise au préalable le deuxième.
Les décisions de première importance seront prises par la paroisse. Toute la paroisse (et pas
seulement les membres électeurs) doit être engagée dans ce genre de projet. Les décisions
d'importance secondaire, par contre, seront confiées à un comité responsable. Par exemple,
si toute la paroisse décide que la chapelle doit être repeinte et accepte d'en assumer les frais,
on confiera à un comité le soin d'en régler les détails (style de peinture, couleur, etc.). Le
principe est le suivant: Que les grandes décisions soient prises par de grands groupes, et les
petites par de petits groupes. Les comités ad hoc créés pour la réalisation d'objectifs précis
seront dissous dès que ces objectifs auront été atteints.
Il faut rester ouvert au changement et à l'innovation. La capacité de changer est une grande
bénédiction. Il faut être ouvert aux idées nouvelles. Le changement ne fait souffrir un homme
que si celui-ci y résiste.
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
148
LE CULTE PAROISSIAL
Une réflexion permanente sur le déroulement, la dignité et la beauté du culte est nécessaire
de la part de la paroisse. Elle peut être plus spécialement confiée au conseil presbytéral ou à
un comité élu pour cela.
Voici différentes responsabilités s'inscrivant dans le cadre du culte:
a) Huissiers (en anglais "ushers"):
Ils assistent régulièrement aux cultes, sont initiés à leurs fonctions,
- veillent à ce que chacun ait une place adéquate pour le culte et dispose d'un
recueil de cantiques, du bulletin du dimanche et de la liturgie,
- sont responsables de l'éclairage, de la sonorisation, du chauffage et de
l'aération de la chapelle,
- procèdent aux offrandes, assistent les communiants, si nécessaire
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
149
(personnes âgées),
- distribuent un message à tous ceux qui ne sont pas appelés à communier,
remettent la chapelle en ordre après le culte,
- tiennent les registres d'assistance aux cultes et à la Sainte Cène,
- invitent les visiteurs à signer le livre d'or de la paroisse,
- font tout pour ne pas avoir une allure de policiers.
Les huissiers sont recrutés parmi les adultes et les jeunes, et formés pour cela. Ils assurent
leur service par alternance. Ce ministère devrait toujours faire l'objet d'un bilan régulier
(critique, autocritique: habillement, attitudes, dignité, sourires et amabilité, efficacité, etc.).
2) Les acolytes:
Ils préparent l'autel (draperies, fleurs, cierges, éclairage), le lutrin, la chaire, les fonts
baptismaux. Après le culte, ils éteignent les cierges et rangent le service de communion.
Ils disposent dans les bancs les recueils de cantiques et les bulletins.
Ils surveillent l'état des draperies et des cierges, renouvellent ces derniers en temps voulu.
Ils assistent le pasteur pendant l'administration du baptême, de la Sainte Cène, les
bénédictions nuptiales et les enterrements. Ils sont recrutés parmi les adultes et les jeunes et
formés pour leurs responsabilités (insistance sur la participation des laïcs aux cultes,
signification et déroulement de la liturgie, dignité du culte, etc.).
Les dames parmi les acolytes sont plus particulièrement responsables de la décoration
florale et de l'entretien des plantes de la chapelle.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
150
3) Les musiciens:
A) Organiste:
choisi par la paroisse parmi plusieurs candidats potentiels; installé dans ses fonctions; son
ministère sera reconnu par la paroisse et requiert, sinon une rémunération, du moins des
encouragements, de l'estime et de la gratitude (seul paroissien à devoir assister à tous les
cultes, et venir au moins 15 minutes plus tôt).
B) Chorale:
- stimule la paroisse et l'aide à chanter; possibilité de chant alterné;
- interprète les éléments liturgiques et les cantiques que la paroisse n'est pas préparée à
chanter;
- rehausse les cultes par des chants particuliers;
- doit tout faire pour faire progresser la paroisse dans son chant et pour progresser
elle-même (possibilité pour la chorale et/ou le chef de chorale de participer à des sessions de
perfectionnement); initiation à des musiques nouvelles;
- est l'agent vocal de la paroisse pour offrir à Dieu le parfum de l'adoration au nom et à la
place de la paroisse; toute paroisse devrait avoir une chorale, si modeste soit-elle;
- chercher la variété dans les répétitions, pour ne pas lasser.
Abandonner momentanément un morceau difficile et le reprendre ultérieurement, pour ne
pas décourager. Discipline, mais aussi quelques instants de détente. Stylos et surligneurs
pour annoter les partitions. Sélectionner de la musique dont les paroles soient belles et
agréables à chanter ; ne pas recruter les choristes à la légère. Il existe un minimum de
critères concernant la voix, le solfège et les exigences de temps (présence régulière aux
répétitions et aux cultes).
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
151
4) Assistants du pasteur:
Lecteurs:
Adultes et jeunes qualifiés et formés à cela. Nécessité de préparer les lectures et de le faire
dans la prière, sachant qu'ils accomplissent un ministère. Exercices de lecture à haute voix,
devant autrui ou en s'enregistrant. Critique d'autrui et autocritique. Techniques de
respiration. Tout faire pour éviter la monotonie, pour ne pas reter les yeux figés sur le texte,
pour donner l'intonation voulue. Eviter les gestes et attitudes négligés et incongrus.
Excellente école pour susciter le sens des responsabilités paroissiales et une participation
personnelle active au culte. Réunir les lecteurs pour faire des bilans. Instaurer une rotation
des lecteurs. Eventuellement, renouveler les lecteurs au bout d'un certain temps.
Assistants dans la distribution de la Sainte Cène:
Ministère confié par la paroisse à un homme particulièrement qualifié pour cela.
5) La paroisse:
Le culte est liturgie de la Parole et du sacrement célébrée en commun avec des frères et
sœurs dans la foi. Célébration des grands faits du salut. Rencontre régulière avec Dieu qui
bénit, pardonne, nourrit la foi, instruit et équipe les saints pour vivre dans le monde.
Il est bon et nécessaire d'instruire la paroisse sur la signification du culte, le déroulement de
la liturgie, l'histoire de cette liturgie, l'année ecclésiastique ou liturgique, la tradition
musicale de l'Eglise, le sens et le rôle de l'architecture, des vêtements pastoraux, des
symboles chrétiens et cultuels, etc.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
152
La paroisse doit être consciente d'être une communauté de rachetés qui se réunit avec foi et
joie pour adorer Dieu et utiliser les moyens de grâce. Elle doit savoir que le culte est un acte
communautaire dans lequel elle est appelée à s'engager tout entière.
6) Nécessité d'un bilan régulier du culte:
Sermons trop longs ou pas assez concrets; récurrence des thèmes; actualité, etc.
Etat des draperies, chandeliers, vêtements pastoraux, décoration florale, etc.
Ministère des lecteurs, huissiers et acolytes.
Chant paroissial: cantiques chantés trop souvent, tandis que d'autres ne le sont jamais. Chant
paroissial trop fort ou pas assez, trop rapide ou trop lent. Etat de l'orgue et des autres
instruments de musique. Jeu de l'organiste (trop fort ou trop doux, monotone ou varié,
ouvert ou non à des musiques nouvelles, etc.). Bruits divers avant, pendant ou après le culte.
Etat des recueils de cantiques, des liturgies, des bulletins dominicaux.
Etat de la chapelle, du mobilier, des cloches, des tapis ou moquettes, etc.
7) Le rôle de la musique dans le culte:
Triple rôle de la musique sacrée:
1) Présenter et proclamer la Parole de Dieu.
2) L'interpréter.
3) Exprimer les réactions à ce message.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
153
La Parole de Dieu est souveraine. La musique en est la servante. Pour cela, elle doit être à la
fois un vecteur fidèle de la Parole et esthétiquement belle. Les instruments et les voix doivent
être de qualité. Aucun instrument de qualité n'est en soi impropre au culte.
Quelques principes:
1) La musique doit être non seulement belle, mais propre à la louange et à
l'édification.
2) L'interprétation doit être de la meilleure qualité possible.
3) Les instruments ne doivent pas dominer sur la chorale et sur le chant paroissial.
Recherche d'équilibre. Pas de virtuosité au détriment de l'adoration!
4) Pas de mitraillage de décibels, bien que dans un culte de jeunes la musique puisse
être plus bruyante que dans un culte ordinaire.
5) Recherche de la variété (alternance paroisse/chorale, orgue/cuivres, interludes
entre les strophes, harmonies différentes pour l'accompagnement des différentes strophes).
8) Choix des cantiques:
Ce choix est fait par le pasteur ou, après entente avec le pasteur, par le responsable de la
musique paroissiale.
Les cantiques sont choisis en fonction du caractère du culte. Le 2 cantique en particulier fait
écho à l'évangile du jour. Le 3 a trait au thème du sermon ou prépare l'administration du
baptême ou de la Sainte Cène.
Veiller à la diversité. Ne pas se rabattre sur les mêmes cantiques sous prétexte qu'ils plaisent
au pasteur ou que la paroisse sait bien les chanter.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
154
Eviter les mauvais cantiques (paroles ou musique).
Ne pas éculer les bons cantiques en les faisant chanter trop souvent. Si un bon cantique n'est
pas connu, il faut l'introduire à tout prix en le chantant par exemple plusieurs dimanches de
suite ou en le faisant interpréter plusieurs fois par la chorale.
Pas de cantiques trop longs. Ne pas hésiter à sélectionner les strophes qu'on veut faire
chanter.
Encourager dans le bulletin dominical les paroissiens à faire connaissance avec un nouveau
cantique chanté pendant le culte, à méditer sur ses paroles et sa musique. Leur rappeler que
ce cantique a été composé par un poète ou musicien chrétien et que, s'il est proposé au chant
paroissial, c'est parce qu'il a été estimé utile à l'édification. Rappeler aussi aux paroissiens
qu'il y a dans la paroisse place pour des goûts divers (jeunes en particulier), et que chaque
chrétien est en droit d'exprimer sa foi selon ses goûts et son sens de l'esthétique. Les inviter à
ne pas condamner une liturgie nouvelle parce qu'ils n'arrivent pas encore à l'apprécier. Ils y
parviendront peut-être dans la suite.
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
155
RELATIONS PUBLIQUES DE LA PAROISSE
Les chrétiens sont des gens qui veulent communiquer l'Evangile à leur entourage et au
monde. Cette communication a lieu de différentes façons.
1) Communication vers l'extérieur:
a) Le comportement des membres de l'Eglise:
Montrent-ils que l'Evangile et leur paroisse ont de l'importance pour eux? En parlent-ils, et
en quels termes?
b) L'aspect des bâtiments:
Quelle impression donnent-ils? Que les membres de l'Eglise aiment leur paroisse ou qu'ils la
négligent?
c) Utilisation communautaire des locaux:
L'Eglise montre-t-elle qu'elle s'intéresse au monde et à son entourage immédiat, en prêtant
ses locaux à des organismes civiques ou humanitaires, ou les garde-t-elle jalousement pour
elle?
d) Recours à la presse locale:
Est-elle utilisée pour informer le public des activités de la paroisse? Avec de temps en temps
une photo?
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
156
e) Vitrine, panneau paroissial pour offrir informations et messages pour le public.
f) Panneaux indicateurs dans la ville ou le quartier.
g) Brochure sur la paroisse avec photos (historique, but, activités, nom et coordonnées
du pasteur, etc.).
h) Radios locales
pour annoncer l'existence et donner les coordonnées de la paroisse, inviter aux cultes,
informer sur les activités particulières (reprise des catéchismes, patronnage, fête des
missions, etc.), diffuser des messages ou des causeries spirfituelles ou morales d'intérêt
général.
i) Tracts missionnaires (messages) et paroissiaux (informations sur la paroisse).
k) Sondages et enquêtes sur la situation religieuse de la communauté.
l) Accueil des visiteurs:
Demander à des conseillers presbytéraux de s'occuper particulièrement d'eux (don d'un
N.T. ou d'une brochure sur la paroisse, faire signer le livre d'or, les inviter à revenir). Leur
souhaiter la bienvenue dans le bulletin dominical ou après le culte, pendant les annonces.
Le bulletin dominical doit leur faciliter la participation active aux cultes (numéros des
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
157
cantiques, références des lectures bibliques, etc.). Confection de petits paquets pour
visiteurs contenant le bulletin paroissial, NCQ, Le Luthérien, un N.T., une petite lettre de
bienvenue, une brochure sur la paroisse, etc.).
m) Information dans les hôtels, hôpitaux, gares, mairies, bureaux de Sécurité
Sociale, écoles (par exemple, pour la reprise des catéchismes ou l'ouverture d'un
patronage).
n) Encourager les membres de l'Eglise à avoir des activités et exercer des
responsabilités au niveau de la communauté civile, et à les assumer en témoins du
Christ, de façon à faire connaître l'existence de leur paroisse et surtout à agir en
lumière du monde et sel de la terre.
B) Communication vers l'intérieur:
a) Bulletin hebdomadaire ou dominical avec déroulement du culte, indication des
lectures bibliques et des cantiques, quand se lever, quand s'asseoir, etc. Avec une
belle image en couverture. Tout cela aide la participation au culte. La reproduction des
textes bibliques, permet aux gens de mieux suivre pendant la lecture. Donné aux
malades et aux isolés, il peut les édifier et les faire communier avec leurs frères et sœurs
qui assistent au culte. Le bulletin fournira des informations sur la paroisse (adresse et
N de téléphone du pasteur, activités paroissiales, naissances, baptêmes, confirmations,
mariages, décès, etc.). Mention des malades, invitation à l'intercession (proposer
éventuellement une courte prière). Partage des joies et des difficultés de la paroisse,
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
158
rapports financiers (sur feuille volante, car réservés aux paroissiens), encouragements
pour tel ou tel projet, remerciements pour tel ou tel travail accompli, mot de gratitude
pour la chorale ou l'organiste, présentation des nouveaux membres, etc. Informations
sur les activités régionales, synodales, sur la mission, sur d'autres paroisses, etc. Tout
cela est de nature à élargir l'horizon des paroissiens.
Il faut que l'impression du bulletin soit bonne et la lecture facile et agréable. Utiliser des
photos, images, schémas, etc. Présentation aérée. Solliciter des articles des paroissiens
(organiste, trésorier, jeunes, moniteurs de l'école du dimanche). Chercher des
volontaires pour aider à la rédaction, la mise en page, l'impression, la distribution ou
l'expédition. On peut aussi disposer le bulletin dans un casier sur le trottoir de la
paroisse et inviter les gens à se servir.
b) Cartes mises sur les bancs ou dans les recueils de cantiques, invitant les visiteurs à
laisser leurs coordonnées et dire s'ils souhaitent la visite du pasteur, invitant aussi les
paroissiens à faire des suggestions sur le choix des cantiques, les textes et thèmes des
sermons. Tout cela montre qu'on s'intéresse à ceux qui viennent et qu'on attache de
l'importance à leurs avis et sentiments.
Exemples de cartes:
d) Cartes paroissiales indiquant à l'aide d'épingles où habitent les fidèles, affichée bien
en vue. Les paroissiens se sentent alors bien intégrés dans leur Eglise. Une telle carte
peut aussi nouer des liens entre paroissiens d'un même quartier et inviter les gens à
faire des visites à tel ou tel paroissien malade, infirme, solitaire ou marginal.
e) Installer les gens dans leurs fonctions, éventuellement par un acte liturgique, les
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
159
remercier publiquement quand ils se sont bien acquittés de leur tâche.
f) Tableau donnant les noms des malades et invitant à intercéder pour eux.
g) Tableau identifiant les confirmands de l'année (avec photos, nom et prénoms,
adresse, date de naissance) et invitant à prier pour eux.
h) Anniversaire de la paroisse: Peut-être commémoré chaque année pour remercier
Dieu. Commémoration spéciale lors du 25 , 50 ou 100 anniversaire avec édition
d'une brochure spéciale.
i) Fête des missions annuelle
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
160
STEWARDSHIP
Cf. Wilbert Kreiss, Pierres vivantes et gérants fidèles (Cahier du C.E.T.) ; John Jeske,
Christian Stewardship is taking God at His Word, in Wisconsin Lutheran Quarterly, Vol.
92, Eté et Automne 1995, p. 198 ss.
Le stewardship est une notion nouvelle qui a surgi dans l'ecclésiologie de nombreuses
Eglises protestantes et évangéliques. C'est une prise de conscience nouvelle de ce qu'est
l'Eglise chrétienne, laquelle Eglise n'est plus seulement envisagée dans les rapports
verticaux qu'elle entretient avec son Chef, mais aussi dans ceux horizontaux qui
unissent ses membres entre eux. Non pas que ceux-ci aient été entièrement ignorés
dans le passé, mais l'ecclésiologie n'en a certainement pas tiré toutes les conclusions qui
s'imposaient sur la place que tient et le rôle qu'est appelé à jouer chacun de ses
membres au sein du peuple de Dieu. Le stewardhip enseigne ou rappelle à chaque
chrétien qu'il est une pierre vivante dans l'édifice de l'Eglise, une pierre dont le Christ a
besoin pour l'édification de son peuple, un membre dont le corps a besoin pour trouver
son harmonie, qui possède des particularités et des dons le qualifiant pour des tâches
auxquelles il est appelé par le Seigneur.
Trop souvent la notion de stewardship est associée de façon prioritaire, voire même
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
161
exclusive, à la gestion des biens matériels que Dieu accorde à ses enfants et, par eux, à
son Eglise. Or la vie tout entière du racheté est placée sous la seigneurie du Christ, et la
gestion des biens matériels n'en est qu'un élément parmi d'autres.
L'apôtre Paul, le plus grand missionnaire et bâtisseur d'Eglise de tous les temps, a
enseigné le stewardship. En cela aussi, il voulait être trouvé fidèle à celui à qui il allait un
jour rendre des comptes (1 Cor 4:2.4). Sa hantise n'étaient pas les statistiques, la
croissance numérique des paroisses fondées par lui et l'équilibre de leur budget. Il avait
ds motifs plus purs que cela:
"Ce n'est pas que je recherche les dons, mais je recherche le fruit qui
abonde pour votre compte" (Phil 4:17).
"Ce ne sont pas vos biens que je cherche, c'est vous-mêmes. Ce n'est
pas, en effet, aux enfants à amasser pour leurs parents, mais aux
parents pour leurs enfants" (2 Cor 12:14).
Il s'agissait non pas de vider les poches des Philippiens ou des Corinthiens, mais de
remplir leurs coeurs, non de leur soustraire quelque chose, mais de leur apporter une
bénédiction en leur faisant comprendre ce que signifie appartenir au Christ dans le
temps et dans l'éternité, en leur montrant comment, quand on lui appartient, on lui
consacre son temps, ses dons et ses biens, comment on s'offre tout entier à lui en
mettant sa vie à son service et à celle du prochain.
Les plus beaux fruits qui poussent sur l'arbre de la foi chrétienne sont des fruits
spirituels. Les membres qui s'investissent le plus dans la vie de leur Eglise sont ceux
qui recherchent avec ferveur les dons les meilleurs, ceux qui honorent le plus Dieu et
qui servent le mieux leur prochain. C'est pourquoi le culte de l'Eglise vient avant le
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
162
travail dans l'Eglise, les conversions viennent avant les contributions, et la prière avant
l'offrande.
Avant d'instruire les autres, il est indispensable que le pasteur s'instruise lui-même.
"Comprends ce que je dis, car le Seigneur te donnera de l'intelligence en toutes choses",
écrit Paul à Timothée (2 Tim 2:7). Une paroisse ne peut pas être plus ouverte au
stewardship que ne l'est son pasteur, et ce que le pasteur ne lui enseigne pas, la paroisse
ne peut pas le connaître. "Tel pasteur, telle paroisse!" Le pasteur doit en particulier
veiller à ne pas véhiculer de fausses idées à ce sujet. Il s'agit de générer dans la paroisse
des attitudes individuelles et collectives saines, d'engendrer chez les membres et dans
le groupe une vie spirituelle authentique et apte à l'édification de l'Eglise. Or le pasteur
ne peut donner que ce qu'il a reçu, et ce qu'il n'a peut-être pas reçu en matière de
stewardship pendant ses études de théologie, il lui faudra l'acquérir en cours de
ministère, en assistant à des séminaires appropriés ou, à défaut, par ses études
personnelles. Ensuite, ce qu'il a appris, le pasteur le transmettra à son troupeau dans un
enseignement régulier et continu (prédications, études bibliques, retraites paroissiales,
groupes de réflexion, bulletins paroissiaux, réunions de jeunes, etc.). Toute son
instruction obéira à l'injonction de l'apôtre: "Puisque vous aspirez aux dons spirituels,
que ce soit pour l'édification de l'Eglise que vous cherchiez à en posséder
abondamment" (1 Cor 14:12).
Tout chrétien est une pierre vivante dans l'édifice de l'Eglise, peuple des rachetés qui
constituent une race élue, un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple acquis (1 Pi
2:4.5.9). Tous sont appelés à s'offrir à Dieu en un sacrifice vivant, saint, agréable à Dieu,
ce que Paul appelle un culte raisonnable (Rom 12:1).
La vision organique de l'Eglise développée par l'apôtre Paul dans Rom 12 et 1 Cor 12
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
163
culmine dans l'affirmation que les chrétiens sont des membres dans le corps du Christ,
"chacun pour sa part" (1 Cor 12:27). Ils ont tous reçu de Dieu des dons (Rom 12:4-8).
Ces dons sont nombreux et divers (Rom 12:4.5; 1 Cor 12:4-6.14-18), et à chacun de ces
dons correspond une mission, une tâche confiée par le Christ. Ils sont aussi
complémentaires en ce que chaque membre a besoin des dons et services des autres.
Pour qu'un corps soit un ensemble harmonieux, il faut que chaque membre joue le rôle
qui est le sien, que les yeux, les oreilles, les mains, les pieds et tous les autres membres
soient au service les uns des autres (1 Cor 12:21-23). Le tout doit promouvoir l'unité
organique du corps (1 Cor 10:17; 12:12.13.24.25), unité qui est compromise quand les
membres de l'Eglise ne comprennent pas que tous les dons ont leur importance. Par
ailleurs, ces dons sont interdépendants. Ils dépendent étroitement les uns des autres, ce
qui fait que lorsqu'un membre souffre, tous souffrent avec lui, et si un membre est
honoré, tous se réjouissent avec lui (1 Cor 12:26). S'il y a carence, déficience chez l'un
des membres, les autres sont appelés à y suppléer dans un esprit d'amour et de
solidarité d'où est banni tout orgueil. Enfin, Dieu est souverain dans l'attribution de ses
dons (1 Cor 12:18; Eph 4:7). Tout cela signifie que de même que tous les membres d'un
corps ont leur fonction, si modeste soit-elle, et que tous ont été créés de manière à
pouvoir s'en acquitter, de même chaque chrétien à une mission, un tâche dans l'Eglise,
et a reçu du Seigneur les dons nécessaires à cela. Cf. dans le cours de Dogmatique sur
l'ecclésiologie, le chapitre sur la place et le rôle du chrétien dans l'Eglise.
Le stewardship est l'art de découvrir, rassembler, mettre en oeuvre et gérer les dons
impartis par Dieu à tous les membres de l'Eglise et à son peuple pour
l'accomplissement de sa mission. Tout chrétien est un steward, un intendant ou gérant
des biens d'un autre. Des biens de qui? De Dieu à qui appartiennent toutes choses, "la
terre et ce qu'elle renferme, le monde et ceux qui l'habitent" (Ps 24:1.2). Il doit le faire
en dispensateur responsable et fidèle (1 Cor 4:2; 9:17), sachant qu'il lui faudra rendre
des comptes (cf. la parabole des talents, Mt 25:14-30).
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
164
Dieu confie à chaque chrétien une part de ce qui lui appartient et lui demande de le
gérer. Cette vérité serait angoissante pour nous, si nous n'étions pas ses enfants
bien-aimés, assurés de sa grâce et de son pardon. La Bible enseigne que le Christ "est
mort pour tous, afin que ceux qui vivent ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour
celui qui est mort et ressuscité pour eux" (2 Cor 5:15), que les chrétiens ont été rachetés
à un grand prix, qu'ils sont le temple du Saint-Esprit. Ils sont donc appelés à glorifier
Dieu dans leur corps et dans leur esprit, qui tous les deux appartiennent à Dieu (1 Cor
6:19.20). Paul confesse qu'il ne vit plus pour lui-même, mais pour le Christ qui est mort
pour lui (Gal 2:20), et déclare ailleurs que les chrétiens vivent et meurent pour le
Seigneur, car, vivants ou morts, ils lui appartiennent (Rom 14:7.8). La paroisse a pour
tâche d'aider chacun de ses membres à réaliser ce magnifique idéal, à grandir dans la foi
et à devenir plus fidèle dans sa gestion des dons et des biens qui lui ont été confiés.
Il faut apprendre ou rappeler aux chrétiens que c'est un privilège merveilleux 1) d'être
membre du peuple et de la famille de Dieu, 2) de recevoir ses bénédictions dans sa
Parole et ses sacrements, 3) de participer à l'extension du Royaume du Christ sur terre
et à l'édification de son Eglise. Il s'agit donc pour eux d'utiliser à la gloire de Dieu les
divers talents qu'il leur a confiés (Mt 25:15; 1 Cor 12:7; 1 Pi 4:10).
On confrontera les paroissiens avec les questions suivantes: Désirons-nous apporter
plus de bénédictions à nos vies personnelles et dans la vie des autres? Sommes-nous
prêts à faire dans notre paroisse ce que nous n'avons pas pu faire jusqu'à présent?
Pensons-nous qu'il soit bon et nécessaire d'intensifier les activités de notre paroisse, et
souhaitons-nous tous y apporter notre part? Tout cela se fait de façon solidaire, car dans
le corps du Christ tous les membres ont besoin les uns des autres (Rom 12:5-8; Eph
4:11.12).
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
165
Le stewardship consiste à reconnaître que tous les dons, petits et grands, modestes ou
prestigieux, que possèdent les chrétiens leur ont été octroyés par le Seigneur. Qu'en fait,
ils leur ont été prêtés pour qu'ils le glorifient en les mettent au service de son Eglise et
du prochain. Il vise à diagnostiquer ces dons, à constater leur existence chez les
membres de l'Eglise, à les mettre en action, à solliciter et encourager les fidèles à les
utiliser pour le Seigneur eet son Eglise, à prier pour qu'ils soient mis en oeuvre d'une
façon sainte et agréable à Dieu, de manière à ce que celui-ci puisse les bénir dans sa
grâce. Faire du stewardship, c'est aussi inviter les chrétiens à rechercher d'autres dons
que le Seigneur voudra bien leur accorder, à lui demander de bien vouloir les multiplier
et d'accorder à ses enfants en toutes choses sagesse et fidélité, un coeur humble et pur
et la volonté d'être aussi efficaces que possible.
Le but que doit poursuivre toute Eglise locale est d'enrôler chacun de ses membres,
hommes, femmes, enfants, adultes et vieillards dans le Royaume de Dieu. Il n'existe pas
de chrétien qui ne puisse accomplir une oeuvre agréable à Dieu dans le cadre de sa
paroisse. L'assumer, c'est donner à sa vie de chrétien un sens, aller au-devant de cette
joie spirituelle qu'engendre pour l'enfant de Dieu la certitude qu'il a un rôle utile à jouer
dans l'Eglise, qu'il fait partie de la grande famille divine où chacun a besoin de l'autre.
Voici une liste non limitative d'activités susceptibles de faire grandir le chrétien dans ce
sentiment:
1) Mener une vie d'intercession. Pour ce faire, on affichera à la sortie de la chapelle ou
publiera dans le bulletin paroissial la liste des malades et de tous ceux qui vivent dans
l'épreuve. On indiquera aussi régulièrement les grands sujets de prière pour l'Eglise, le
monde, les peuples en détresse.
2) Prier pour le bon déroulement du culte (liturgie, prédication, administration des
sacrements, musique). Il est bon de faire figurer une telle prière dans le bulletin
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
166
dominical. C'est vrai d'une façon générale pour toutes les activités de la paroisse.
3) Prier pour les offrandes. "Pas de don sans prière", dit-on parfois. L'offrande
chrétienne est une partie intégrante du culte, quand on apprend a) à remercier le
Seigneur pour le privilège qu'on a de la lui apporter; b) qu'on reconnaît dans chaque
offrande qu'on lui apporte un cadeau qu'il nous fait en nous accordant la santé et le
travail; c) qu'on le loue d'avoir fait de nous des ouvriers et partenaires dans son
Royaume; d) qu'on lui demande de bien vouloir bénir le don qu'on lui fait; e) qu'on le
prie d'accorder sagesse et clairvoyance à ceux qui sont chargés par la paroisse
d'administrer les dons collectés.
4) Ecrire des lettres et envoyer des messages aux frères et soeurs dans la foi. (lettres de
condoléances, félicitations pour un heureux événement assorties d'un souhait de
bénédiction, encouragement, consolation). C'est le propre des chrétiens de pleurer avec
ceux qui pleurent et de se réjouir avec ceux qui sont dans la joie (Rom 12:15). Autant de
gestes qui peuvent être source de joie pour qui les accomplissent et qui constituent une
bénédiction pour l'Eglise.
5) Servir d'ambassadeur de bonne nouvelle en participant à l'embellissement et
l'enrichissement du culte (nettoyage et décoration de la chapelle, fleurs, musique,
atmosphère chaleureuse et heureuse, accueil des visiteurs, etc.).
6) Exercer dans la paroisse des responsabilités à la mesure des charismes qu'on a reçus
de Dieu, en acceptant d'être nommé dans tel ou tel comité, et tout faire pour les exercer
de façon consciencieuse. Accepter aussi de se laisser former, de manière à être plus
efficace. Il est cependant important pour le pasteur ou le conseil presbytéral de ne pas
se contenter de solliciter des volontaires, mais de définir avec précision la nature de la
tâche à accomplir (dons requis, temps à investir, objectifs à atteindre, etc.).
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
167
Quelques encouragements font parfois des merveilles. Beaucoup de chrétiens doutent
d'eux-mêmes et de leurs capacités. D'autres qui travaillent avec ardeur ont tendance à
se laisser décourager. Il n'est pas facile de travailler pour le Seigneur et son Eglise dans
un monde qui rame dans d'autres directions et qui n'a aucune antenne pour ce genre de
sacerdoce. Alors, il faut remercier, encourager, donner du coeur et de la joie à l'ouvrage,
parfois féliciter. Il faut dire aux chrétiens que tout ce qu'ils font pour l'Eglise est fait à la
gloire de Dieu et source de bénédiction pour son peuple. "Votre travail n'est pas vain
dans le Seigneur" (1 Cor 15:58). Il ne faut pas oublier non plus que les chrétiens portent
la chair en eux, que leurs motivations ne sont pas toujours pures, que le zèle et la fidélité
peuvent dégénérer en pharisaïsme ou susciter un esprit de compétition où on jalouse
ou méprise les autres, où on a vite fait de porter un jugement sur eux. "L'athlète n'est
pas couronné, s'il n'a pas combattu suivant les règles" (2 Tim 2:5). Pour pouvoir lutter
contre l'orgueil qui nous est inné, il faut nous rappeler cette parole du Christ: "Sans moi
vous ne pouvez rien faire" (Jn 15:5), et cette autre de l'apôtre: "Qu'as-tu que tu n'aies
reçu. Et si tu l'as reçu, pourquoi te glorifies-tu, comme si tu ne l'avais pas reçu?" (1 Cor
4:7).
Il existe aussi une intendance chrétienne du temps, une façon chrétienne d'utiliser le
temps que le Seigneur met à notre disposition. Gérer fidèlement son temps, c'est savoir
qu'il faut mourir, bien compter ses jours pour appliquer son coeur à la sagesse (Ps
90:10.12). C'est comprendre qu'il y a un temps pour tout, un temps pour naître et un
temps pour mourir, un temps pour pleurer et un temps pour rire, etc. (Eccl 3:1-8). C'est
ne pas différer ce qu'il importe de faire tout de suite, car demain il sera peut-être trop
tard. C'est comprendre que le "temps est court", que la "figure du monde passe" (1 Cor
7:29-31) et que la fin est proche. C'est comprendre, le cas échéant, que l'heure est venue
de se réveiller du sommeil (Rom 13:11.14). C'est "racheter le temps, car les jours sont
mauvais" (Eph 5:16), ne pas gaspiller le temps à faire des choses inutiles ou futiles: "Il
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
168
n'est pas de soldat qui s'embarrasse des choses de la vie, s'il veut plaire à celui qui l'a
enrôlé" (2 Tim 2:4). Nous ne pouvons pas créer le temps. il est un don de Dieu. A la
différence de l'argent qu'on peut placer en banque ou ailleurs, le temps s'écoule. Si nous
l'employons mal, il est perdu pour nous. C'est donc quelque chose d'infiniment précieux
et de fragile que le Seigneur met à la disposition de ses enfants. Il ne faut pas le gâcher.
Quand on sait ce que la Bible dit de l'éternité et qu'on a compris que cette éternité peut
être bienheureuse et glorieuse auprès du Seigneur, ou bien terrible et douloureuse loin
de sa face, on ne peut plus le dilapider. Racheter le temps, c'est trouver du temps pour
1) lire la Bible chaque jour, 2) mener une vie de prière fervente, 3) célébrer le culte de
famille quotidien, 4) assister au culte chaque dimanche et jour de fête, 5) être un témoin
du Christ auprès des autres, 6) être un gérant véritable et fidèle des dons reçus du
Seigneur. Faire du stewardship dans le cadre d'une paroisse, c'est donc instruire les
chrétiens quant à la bonne façon de gérer le temps que Dieu leur alloue. C'est les inviter
régulièrement à se demander ce qu'ils font de leur temps, combien ils en consacrent à
Dieu, au salut de leur âme et au service de l'Eglise.
Ce qui est vrai de tous les dons de Dieu en général, l'est plus particulièrement de
l'argent et des moyens financiers que Dieu met à notre disposition. Nous n'en sommes
pas les propriétaires, mais les gérants. Nous gérons les biens d'un autre, à la façon de
Joseph qui était l'intendant de Potiphar en Egypte. La vie ressemble un peu à un bateau
chargé d'une cargaison précieuse. Dieu en est le propriétaire, et le chrétien, le capitaine.
Celui-ci a une grande responsabilité: Il a la garde du navire et de son frêt et doit veiller à
ce qu'il parvienne à destination sain et sauf. Tout ce que nous possédons ici-bas, le
temps, les talents et les dons, les biens en argent et en nature, constituent une cargaison
qu'il faut mener à bon port. Quand nous serons au terme de notre voyage, nous aurons
des comptes à rendre à Dieu.
Celui qui a fait l'expérience du don de Dieu en Christ devient à son tour un donateur.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
169
Il vit et il donne, selon le mot d'ordre de l'apôtre: "Ce n'est plus moi qui vis, c'est Christ
qui vit en moi" (Gal 2:20). Récepteur de la grâce divine, il en est aussi l'agent. La gestion
de l'argent n'est qu'une facette du stewardship, mais elle est importante et essentielle.
L'argent n'échappe en aucun façon de la gestion au sens large que le Seigneur confie aux
siens. Le chrétien, pardonné, pardonne et donne. Cela fait partie de l'essence même de la
vie chrétienne. Il paraît que la Bible contient 1.5675 références au stewardship dont
beaucoup concernent le stewardship de l'argent, la façon de le gagner, de le gérer et
de le dépenser. C'est vrai aussi de la moitié des paraboles racontées par Jésus.
Voici quelques textes, parmi les plus importants:
"Celui qui sème peu moissonnera peu, et celui qui sème abondamment moissonnera
abondamment" (2 Cor 9:6). Aux yeux de Dieu, la cupidité est aussi grave que
l'adultère, l'impudicité, l'ivrognerie ou le vol (1 Cor 6:9.10). Il y a là toute une éducation
à faire. Dieu qui a dit: "L'argent est à moi et l'or est à moi, dit l'Eternel des armées"
(Aggée 2:8), a besoin d'argent pour sauver le monde, car il a besoin de son Eglise pour le
faire, et celle-ci ne peut pas le faire sans argent. "Honore l'Eternel avec tes biens et avec
les prémices de tout ton revenu" (Prov 3:9). D'où l'exhortation suivante: "Que chacun de
vous, le premier jour de la semaine, mette à part chez lui ce qu'il pourra, selon sa
prospérité, afin qu'on n'attende pas mon arrivée pour recueillir les dons" (1 Cor 16:2).
Ce texte est particulièrement important, car il énonce plusieurs règles de gestion, ce
qu'on a appelé les cinq "p": les dons des chrétiens doivent être périodiques (le premier
jour de la semaine), personnels (que chacun de vous), prévoyants (mette à part),
proportionnels aux ressources (selon sa prospérité), et préventifs (afin qu'on n'attende
pas mon arrivée pour recueillir les dons).
Combien donner? Que chacun donne "selon sa prospérité" (1 Cor 16:2), sachant qu'il
sera beaucoup demandé à celui qui a beaucoup reçu (Lc 12:48). C'est l'amour du Christ
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
170
qui motive le chrétien, en cela comme en toutes choses. C'est pourquoi il donne
spontanément, avec joie, libéralement, selon ses moyens et régulièrement. Ce qui
compte, ce n'est pas la quantité que nous donnons, mais la proportion entre ce que nous
donnons et ce que nous gardons ou dépensons autrement. C'est certainement aussi le
rapport entre ce que nous dépensons pour nos loisirs ou pour le superflu et ce que nous
réservons au Seigneur. La modeste pièce du pauvre, donnée avec amour et gratitude
vaut autant, aux yeux de Dieu, que le chèque du riche. Dieu ne regarde pas seulement au
don, mais aussi au donateur. Nos biens matériels sont propriété de Dieu. Nous aurons
donc à coeur d'honorer Dieu en toutes choses, y compris dans ce que nous lui réservons
pour la proclamation de l'Evangile et la bienfaisance auprès des nécessiteux. Et ce que
nous faisons en paroles et en actes, nous devons le faire à sa gloire (Col 3:17).
Revenons à la question: Combien? A chacun d'y répondre. Mais si les Juifs ont su donner
la dîme que leur imposait la Loi, sans pour cela souffrir de malnutrition, pourquoi les
chrétiens ne pourraient-ils en faire autant? Et s'ils hésitent à donner 10%, pour se
prouver qu'ils sont affranchis de ces éléments de la Loi mosaïque, rien ne les empêche
de donner 11% ou 15% ou davantage encore! A chacun de se fixer une règle. Mais les
chrétiens qui ont reçu encore davantage de grâces du Seigneur que les Juifs devraient
pouvoir faire au moins autant qu'eux, et le faire cette fois-ci spontanément, par amour.
L'expérience a montré que les paroisses où on s'est librement fixé comme règle de
donner la dîme de ses revenus ont fait un grand bond en avant, qu'elles sont devenues
financièrement autonomes ou bien qu'elles ont pu acquérir le matériel pédagogique
nécessaire à une bonne formation religieuse ou soutenir généreusement
l'évangélisation et la mission, et que, grandissant financièrement, elles ont su grandir
aussi numériquement et grandir en foi et en consécration.
Mais attention, nous ne sommes ni des Mormons ni des Adventistes. Pas de légalisme!
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
171
La dîme n'est pas l'exemple à suivre à tout prix, mais un exemple parmi d'autres. Elle ne
peut être qu'une référence et non une loi. Mais une référence utile et bénéfique, qui peut
pousser à l'introspection et interdire au chrétien de tricher et de tromper Dieu en se
trompant lui-même. Encore une fois, le problème de la quantité est une affaire
personnelle profondément imbriquée dans les relations que le chrétien entretient avec
son Dieu. Donner 10% de ses ressources à l'Eglise peut être un fardeau insupportable
pour un économiquement pauvre avec charge de famille, tandis que donner 20% peut
signifier pour un paroissien aisé donner de son superflu et rien que de lui, c'est-à-dire
donner beaucoup moins que la veuve de l'évangile. Celui qui doit vivre avec 3.000 F et
qui en donne 300 à l'Eglise donne beaucoup plus que celui qui cotise à 10% d'un salaire
de 30.000 F. Le premier donne dix fois moins que le second, et cependant beaucoup plus
que lui, et le Seigneur le sait.
Dieu sait encourager ses enfants et leur fait de belles promesses. "Heureux celui qui
s'intéresse au pauvre! Au jour du malheur, l'Eternel le délivre. L'Eternel le garde et lui
conserve la vie. Il est heureux sur la terre" (Ps 41:2.3). Et donner à l'Eglise non
seulement pour qu'elle puisse secourir les pauvres, mais aussi pour lui permettre
d'annoncer l'Evangile aux hommes et de leur apporter ainsi le salut, c'est aussi donner
aux pauvres. "Honore l'Eternel avec tes biens et avec les prémices de ton revenu.
Alors tes greniers seront remplis d'abondance et tes cuves regorgeront de moût" (Prov
3:9.10). Cf. encore Prov 121:24.25; Mal 3:10; Mt 19:29; Lc 6:38; 9:24; 2 Cor 9:6.7.
Les offrandes et cotisations des chrétiens ne plaisent au Seigneur que si elles sont le
produit de l'amour pour lui, son Evangile et son Eglise. Cet amour est entretenu dans le
coeur par l'Evangile du salut. Le comte de Zinzendorf disait, en contemplant un tableau
du Crucifié: "Tu m'as donné ta vie. Et moi, que t'ai-je donné en retour?" C'est par la
prédication de l'Evangile, à l'exclusion de toute contrainte de la Loi, qu'on aide les
chrétiens à grandir en toutes choses, y compris en cela. Le croyant sait que Dieu est son
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
172
Maître, son Berger, sa récompense et sa forteresse, sa perle de grand prix, son
Rédempteur et son Seigneur. Et lui, qu'est-il? La brebis de ce Berger, le racheté de ce
Rédempteur, l'enfant de ce Père, celui qui veut le servir dans la justice, l'innocence et la
félicité. C'est pourquoi il lui consacre et lui offre tout. En particulier aussi son argent. Il
désire que cet argent soit de "l'argent chrétien". Qu'est-ce que l'argent si ce n'est du
temps, du travail, des talents, de la fatigue cristallisés et rendus au Seigneur? L'argent
est une partie de nous-mêmes, de notre labeur, de notre existence que nous consacrons
à la cause de notre Dieu.
Recommandant aux Corinthiens l'offrande en faveur des chrétiens pauvres de la
Palestine, l'apôtre leur écrit: "De même que vous excellez en toutes choses, en foi, en
parole, en connaissance, en zèle à tous égards et dans votre amour pour nous, faisons en
sorte d'exceller aussi dans cette oeuvre de bienfaisance. Je ne dis pas cela pour donner
un ordre, mais pour éprouver, par l'exemple du zèle des autres, la sincérité de votre
amour" 2 Cor 8:7-9). La paroisse doit éduquer ses membres et leur apprendre à donner
avec générosité et selon leurs moyens, pour que l'oeuvre de Dieu avance. Qu'il s'agisse
de l'argent que le chrétien dépense opur lui-même et pour les siens ou de celui qu'il
donne à son Dieu en le confiant à l'Eglise, ce sont là des choses qui font partie intégrante
de la sanctification chrétienne. Et en cela, comme en toutes choses, le chrétien désire
faire la volonté de son Dieu. Et ce qui est vrai de l'argent l'est de tous les dons que Dieu
accorde aux siens (vie, temps, aptitudes de toutes sortes, etc.).
Rappelons-le: Au coeur du stewardship se trouve la conviction qu'en servant le
Seigneur et son Eglise, on ne fait que lui rendre ce qu'on a reçu de lui. Conformément
aux richesses de sa grâce, il considère ce qu'il a fait à travers nous comme quelque chose
que nous avons fait pour lui. Son amour nous fait l'aimer à notre tour d'un amour qui
s'exprime dans une vie consacrée à la gloire de son nom et au bien-être de son Eglise.
Cet amour lui fera dire un jour à tous ceux qui l'auront servi fidèlement: "C'est bien, bon
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
173
et fidèle serviteur. Tu as été fidèle en peu de chose, je te confierai beaucoup. Entre dans
la joie de ton maître" (Mt 25:21). "Venez, vous qui ête bénis de mon Père, prenez
possession du royaume qui vous a été préparé dès la fin du monde" (Mt 25:34).
Pour cela, il est bon que toute paroisse ait un comité de stewardship dont les membres
sont élus par elle ou par son conseil presbytéral, ou bien choisis au sein de ce conseil. Ce
comité se réunira régulièrement, de manière à faire le point.
Textes bibliques sur le stewardship chrétien à traiter dans les prédications et études
bibliques pour former et instruire la paroisse:
1) Dieu est le Créateur et propriétaire de toutes choses: Gen 1; Lév
25:13; Ps 24:1; 50:13; 95:1-6; 145:16; Jn 1:3; 1 Cor 4:7.
2) Dieu préserve toutes choses: Gen 8:22; Act 17:24.25.28; Col 1:17;
Héb 1:3.
3) Le Christ nous a rachetés, de telle sorte que nous lui appartenons: Es
53; Jn 1:29; 3:14-17; Rom 5:8; Gal 3:13; 4:4.5; 1 Pi 1:18; 2:24.
4) Le Christ est notre vie: Mt 16:24; Mc 8:34-38; Jn 15:1-8.16; Rom
6:121; 14:7.8; 1 Cor 3:9; 6:19.20; 2 Cor 4:11; 5:14.15.17; 8:5.8.9; Gal
2:20; Eph 2:10; Phil 1:21; Col 1:18; 3:4; 1 Pi 2:9.
5) Vivre à la gloire de Dieu: Es 60:21; 61:3; Mt 5:16; Jn 15:8; 17:10;
Rom 15:9; 1 Cor 16:20; 2 Thess 1:10.12; 1 Pi 4:11.14; Apoc 4:11.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
174
6) Nous devrons tous rendre des comptes: Mt 25:19; Lc 12:42 ss.;
19:15; Rom 14:12; 1 Cor 3:13; 4:2-4; 2 Cor 5:10.
7) Stewardship du temps: Gen 19:16; Ps 39:4; 90:10.12; Eccl 3:1; Mt
8:21.22; 16:3; 24:14.46; 25:1-3; Mc 13:34-37; Lc 9:61; 12:19.20; 19:44;
Act 24:25; 1 Cor 7:29-31; 2 Cor 6:2; Eph 5:16; 2 Tim 4:3; Jac 4:13-15; 1
Pi 4:7.
8) Stewardship des talents et des dons: Gen 18:32; Ex 4:10-15; 31:1-6;
Deut 8:17.18; Prov 11:30; Es 50:4; Jér 6: 6-10; Mt 9:38; 25:15.35.36;
Mc 14:8; Lc 10:34; 12:48; Jn 13:14; Act 4:34; 6:2; 9:36-42; Rom 12:1;
15:14; 1 Cor 1:5; 6:20; 12:1-31; 15:58; 2 Cor 8:7; Gal 6:2.10; Eh 4:11;
Col 1:4; 1 Tim 6:11.12.18; Jac 1:5.19.20
9) Stewardship de l'argent: Gen 4:4.5; 13:8.9; 28:20-22; Ex 36:5; Deut
16:17; 1 Rois 17:13; 1 Chron 29:9; Prov 3:9; Eccl 5:10; Mal 3:8; Mt
6:3.19.20; 10:8; 16:26; 22:21; 26:7; Mc 12:41-44; Lc 6:38; 12:15-31;
Act 11:29; 1 Cor 9:14; 16:2; 2 Cor 8:2-4.7.13.14; 9:1.6.7; 1 Tim 5:8.18;
6:17-19; Jac 5:3.
10) Stewardship et mission: Es 60; Mt 24:14; 28:19.20; Mc 16:15.16; Jn
4:35; 12:32; 20:21.31; Act 1:8; Rom 1:14; 1 Cor 9:16; 1 Tim 1:16; 2:1-4.
11) Stewardship et bienfaisance: Prov 25:21; Eccl 11:1; Es 58:7; Mt
5:42; 25:34-40; Lc 10:33.34; 19:8; Act 11:29; Gal 2:10; 6:10; 1 Jn 3:17.
12) De bons stewards sont l'oeuvre et un don de Dieu: Ez 36:27; Jn
15:4.5.7; Rom 10:17; 1 Cor 2:14; 12:3; 2 Cor 3:5; 9:8; Eph 2:8-10; Phil
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
175
1:6; 1 Pi 2:19.
13) La récompense de grâce qui les attend: Ps 1:3; Prov 3:1-10; 10:22;
11:24.25; Mal 3:10; Mt 6:33; 19:21.29; 25:14-30.34-46; Mc 10:28-30;
Lc 6:38; 9:24; 12:33; 19:17; Jn 10:10; 2 Cor 9:6.8; Phil 3:8.9; 1 Tim 4:8;
Jac 2:5; Apoc 21 et 22.
Tâches du comité de stewardship:
Se réunir avec le pasteur et en liaison avec le conseil presbytéral et les autres comités de
la paroisse,
1) pour faire le bilan sur les points suivants:
instruction de la paroisse dans les principes et la pratique du
stewardship;
appréciation du privilège d'être membre de l'Eglise chrétienne et des
responsabilités qui en découlent;
éducation dans la gestion de l'argent et le devoir du chrétien de donner
avec joie et selon ses moyens;
information sur les programmes de la paroisse et le devoir
de chaque chrétien de les soutenir par la prière, le don de son temps,
de ses talents et de son argent.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
176
2) pour mener à bien les actions suivantes:
répertorier les talents disponibles dans la paroisse et engager tous les
paroissiens dans la vie de l'Eglise;
visiter les nouveaux membres et les intégrer à la vie et aux activités de
la paroisse;
encourager les jeunes à se mettre au service de l'Eglise;
acquérir le matériel didactique apte à sensibiliser et éduquer les
chrétiens en ce qui concerne le stewardship, la mission et les
responsabilités de l'Eglise, et mettre ce matériel à la disposition de la
paroisse (livres, études, cassettes, films);
faire le point de la situation financière de la paroisse et trouver les
moyens de l'améliorer (cotisations mensuelles ou hebdomadaires,
offrandes spéciales, "pledges", information par bulletin paroissial ou
lettres spéciales, mise en place de graphiques clairs et éloquents, etc.);
informer la paroisse sur les activités régionales et synodales et
l'encourager à soutenir telle ou telle action ou projet d'une autre
paroisse, dans la région ou ailleurs
dans le synode;
motiver les membres à lire la littérature paroissiale et
synodale et à assister aux réunions organisées par la région et le
synode;
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
177
proposer à la paroisse la célébration d'un dimanche de la
mission, d'un dimanche du témoignage et du stewardship.
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
178
DIACONIE ET BIENFAISANCE
Importance et nécessité de la diaconie:
Bassine et serviette! Objets tout à fait ordinaires dans les mains d'un esclave de
l'Antiquité, mais qui revêtent un sens extraordinaire dans celles du Christ (Jn 13). Une
grande partie de son ministère fut un ministère social. Il donna à manger à des affamés,
guérit des malades physiques et mentaux, secourut des infirmes, sécha des larmes en
ressuscitant des morts. En un mot, il démontrait l'amour qu'il prêchait.
Il y a d'innombrables malades et infirmes de nos jours. Les lits des hôpitaux sont pleins.
Les homes de vieillards, qui ne sont souvent que des mouroirs, aussi. De même les
centres spécialisés et les prisons. Quelle est la part des chrétiens dans le soulagement de
toute cette misère?
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
179
La mission essentielle de l'Eglise est bien sûr la prédication de l'Evangile et
l'administration des sacrements. Sa mission seconde est la mise en pratique de l'amour
qu'elle prêche (Mt 25:35-40). Pour cela, elle doit
soutenir les institutions sociales qui œuvrent en son nom;
chercher les moyens d'en créer de nouvelles;
répondre positivement et avec générosité aux appels à l'aide
(catastrophes naturelles, famines, épidémies, lutte pour les droits de
l'homme et l'abolition de la torture, projets à long terme comme la
construction d'hôpitaux dans le Tiers-Monde, le forage de puits), envoi
de médicaments et de produits alimentaires de première nécessité,
parrainage d'une famille de réfugiés (Mt 25:35), aide aux alcooliques,
toxicomanes et délinquants. Quelques autres suggestions:
encourager les jeunes à se préparer pour des carrières sociales,
prêcher bien sûr sur la bienfaisance, informer sur la souffrance dans le
monde (tableaux, affiches, reportages), participer à la bienfaisance au
niveau de la commune (restaurants du coeur, don du sang, etc.), créer
un comité de bienfaisance à l'image de l'Eglise de Jérusalem (Act 6:1-7.
Le président de ce comité devrait être un homme rempli du
Saint-Esprit comme Etienne).
Le comité à l'action:
Recenser les besoins et détresses dans la paroisse et dans la commune (malades,
vieillards, parents isolés, jeunes en difficulté, chômeurs, malades mentaux, handicapés
moteurs, etc.). Définir le genre d'aide dont ces gens peuvent avoir besoin
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
180
(baby-sitting pour une jeune mère, faire les courses pour un vieillard ou tout
simplement lui rendre visite, procurer un poste ou un peu de travail à un chômeur,
réfection des papiers peints dans le logement d'un pauvre, compagnie et un peu de
lecture pour un isolé, invitation à des repas, etc.).
Exercer un ministère en faveur des alcooliques et des toxicomanes. Ces gens sont
victimes d'un péché, mais aussi des malades. Ils ont besoin de la Parole de Dieu
(repentance, pardon, délivrance), mais aussi d'amour et de compréhension. Souvent ils
ont été poussés dans leur vice par de réels problèmes (solitude, mariages malheureux,
stress au travail, chômage, problèmes affectifs ou financiers, frustrations pour n'avoir
pas pu réaliser leurs rêves, sentiment de culpabilité). Le pasteur et les responsables du
comité de bienfaisance doivent connaître ce genre de problèmes et les mécanismes qui
génèrent ce style de vie. Une instruction adéquate au niveau de la paroisse est
indispensable. Recours à des conférenciers, vidéocassettes, etc.
Lutter pour une vie paroissiale faite de bonté et de générosité contre toute forme de
discrimination raciale ou sociale. Etre, par l’accueil de l'étranger et de celui qui est
différent, un bon levain dans la communauté civile.
Prévenances à l'égard du 3 âge. A l'heure actuelle, 10% de la population dépassent 63
ans. En l'an 2000, ils seront près de 30%. Construire des locaux paroissiaux qui tiennent
compte des personnes âgées. Ne pas mettre les vieillards sur une voie de garage, mais
les garder intégrés à la paroisse (activités spéciales pour eux, responsabilités à leur
confier, club et repas 3 âge, etc.). Il faut qu'ils se sentent à l'aise et les bienvenus dans
leur paroisse. Il faut que la paroisse organise des activités qui leur permettent d'inviter
des amis de leur âge (conférences, travaux collectifs pour la paroisse ou la mission,
repas, activités ludiques, etc.).
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
181
Aide à apporter aux vieillards: Leur proposer de les chercher pour le culte et de les
reconduire - Les aider dans leur vie de tous les jours (visites, courses, travaux, lectures,
enregistrements de cultes) - Service téléphone (un appel journalier à une heure précise
de la part d'un membre de la paroisse chargé de cela (cela rassure le vieillard et lui
prouve qu'on pense à lui; cela permet aussi d'avoir des nouvelles de lui) - Encourager
les vieillards à exercer un ministère de la prière. Quelle joie pour un pasteur de savoir
que Mémé Unetelle ou Pépé Untel prient chaque jour pour lui!
Aide à apporter au chômeurs: Le chômage est source de nombreux problèmes et
conflits (alcoolisme, frustrations, suicide, sentiment d'inaptitude, divorce, etc.). On peut
aider les chômeurs à trouver du travail. Parfois, il y a des employeurs dans la paroisse.
Annoncer publiquement que des membres de la paroisse sont sans emploi. Demander
aux pasteurs du voisinage de l'annoncer chez eux. Organiser des dimanches pour les
chômeurs de la paroisse, compulser les annonces pour eux, téléphoner, s'informer pour
eux, etc. Tout cela est de la foi en action.
Prendre la défense des faibles, des malades, des pauvres et des opprimés. Parler pour
eux. A Dieu, dans une intercession constante, aux hommes en luttant pour les droits des
faibles, en protestant contre les violations des droits de l'homme dans le pays et ailleurs.
Les chrétiens doivent être la voix de ceux qui subissent de l'intolérance en raison de
leur race, de leur sexe, de leur âge, de leurs convictions politiques, de leurs origines
nationales, de leurs handicaps physiques ou mentaux, de leurs problèmes et conflits
personnels.
Une paroisse luthérienne des USA donne à ses membres la possibilité de faire de la
bienfaisance de la façon suivante: on dispose sur une table, à la sortie de l'église, des
papiers qui annoncent qu'un tel a besoin de quelqu'un pour le conduire à l'hôpital,
qu'un handicapé aurait besoin d'un fauteuil roulant ou de tel ou tel service, qu'un tel
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
182
autre aurait besoin d'un repas chaud par jour ou bien d'une visite de temps en temps,
etc. Un responsable du comité de bienfaisance se tient à côté de la table avec une liste de
demandes et y inscrit des volontaires. C'est encore une forme de foi en action (Jac 1:22).
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
183
LES BIENS DE LA PAROISSE 1) La paroisse et son argent:
On parle trop d'argent dans l'Eglise? C'est l'argent du Seigneur et il s'agit de le gérer
convenablement et de façon à éviter tout soupçon. Les exemples de malhonnêteté dans la
trésorerie paroissiale ne manquent pas!
On créera un comité des finances et élira des assesseurs du trésorier qui comptent avec lui
les offrandes, après chaque culte. Il faut laisser le pasteur en-dehors de cela. La paroisse doit
avoir un compte postal ou bancaire à son nom, avec comme fondé de pouvoir le trésorier et
un ou deux membres du comité des finances. Le trésorier inscrit les sommes en présence des
asesseurs dans le livre de comptes. L'argent ne doit pas rester dans les locaux paroissiaux ni
dans le logement du trésorier (à part une petite somme), mais doit être déposé en banque ou
à la poste dans les meilleurs délais. On gardera pendant au moins trois ans les talons et les
enveloppes sur lesquelles les paroissiens ou le trésorier ont noté le montant de l'offrande
avec la date. Le trésorier et les assesseurs sont tenus à la discrétion (pas de commentaires ni
de fuites!).
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
184
Nécessité d'établir un budget qui programme les recettes et dépenses de la paroisse.
Programmer les dépenses courantes et les dépenses imprévues. Faire faire des devis. Fixer
des ordres de priorité. Informer la paroisse. Solliciter des dons spéciaux. Evaluer les recettes
prévisibles par rapport aux années précédentes, en fonction de l'état de la paroisse
(augmentation ou perte de membres). Les responsabilités du comité des finances seront
assumées dans la prière et dans la confiance en Dieu et en ses enfants. Une bonne
information des fidèles et une présentation correcte des besoins de la paroisse suffisent
généralement à sensibiliser les gens.
Rapports financiers intérimaires (chaque trimestre, par exemple), pour faire le point des
recettes et des dépenses, lancer des appels, encourager, informer que telle dépense pourra
être faite ou pas, prévoir une dépense nouvelle si les recettes le permettent, remercier la
paroisse pour ses efforts ou au contraire l'exhorter et l'avertir d'un déficit probable. Un
budget bien fait, des recettes bien comptées et comptabilisées, des rapports clairs et objectifs
inspirent confiance à la paroisse et l'encouragent à traduire cette confiance en efforts
financiers soutenus.
Projets à longue échéance. Etablir une "liste de rêves", de projets nécessaires ou simplement
utiles, et les affecter d'un coefficient de priorité. Si le budget paroissial laisse entrevoir un
excédent en cours ou en fin d'année, choisir un élément dans la "liste de rêves" et l'intégrer
dans le programme de l'année. Solliciter pour ces "rêves" les suggestions du plus grand
nombre possible de paroissiens. Ils n'en seront que plus intéressés par le travail de la
paroisse et le soutiendront avec d'autant plus de ferveur.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
185
2) La paroisse et ses biens immobiliers et mobiliers:
Des bâtiments bien entretenus sont révélateurs des gens qui viennent y adorer Dieu. Pour
qu'ils le soient, il faut qu'ils se sentent directement responsables de leur entretien. Ce n'est
pas tellement de la compétence du pasteur. Il est donc bon d'élire un comité de gens qualifiés.
Ce comité fera appel à tous les artisans et techniciens en bâtiments qui peuvent faire partie
de la paroisse, pour qu'ils offrent leurs compétences.
Ne pas attendre qu'il y ait des dégâts pour procéder à des réparations, mais agir de façon
préventive. Un des investissements les plus rentables est l'isolation contre le froid et une
révision de la chaudière ou son remplacement par un équipement plus performant. Les
travaux de peinture devraient être effectués par les paroissiens à titre bénévole et se faire de
façon régulière, selon un programme échelonné sur plusieurs années. Tondre les pelouses de
façon régulière, désherber, tailler arbres et arbustes. Quelques fleurs ici et là.
Protéger les bâtiments contre les vols et effractions en fermant à clé tous les locaux
contenant du matériel recherché par les voleurs (machines à écrire, magnétophones,
instruments de musique, etc.). Renforcer les portes et apposer de bonnes serrures. Conserver
les factures du matériel acheté, réclamées par les compagnies d'assurance en cas de vol ou de
détérioration. Au besoin, laisser une pièce allumée pendant la nuit, éclairer les abords et
installer un système d'alarme.
Assurer les bâtiments (responsabilité civile) et leur mobilier (incendie, dégâts d'eau, vols et
effractions). Comparer les prix, car il y a parfois de grandes différences de tarifs d'une
compagnie à l'autre. Ne pas sous-estimer la valeur du matériel assuré; on risque des
déconvenues en cas d'accident ou de vol. Ne pas la surestimer non plus; les cotisations
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
186
risquent d'être prohibitives, et d'autre part il y a des biens qui n'ont pas besoin d'être
assurés, car ils ne risquent rien.
Le pasteur ne doit pas être le responsable de tout cela, mais il y participe personnellement. Il
est l'un de ceux qui motivent et suscitent l'intérêt et le sens des responsabilités. Les
paroissiens devraient être heureux de travailler ensemble dans leur paroisse, pour leur
Seigneur. Ce devrait être pour eux une source de joie. Il est bon de les en remercier et de les
récompenser (par exemple, par un repas en commun ou un pot de l'amitié). Motiver signifie
programmer, organiser, diriger et contrôler tout de façon à ce que les gens agissent de
manière efficace et réalisent les projets qu'on s'est fixés. Un vrai leader est un homme qui
obtient que les autres fassent ce qu'il veut et comme il le veut, parce qu'ils le veulent.
Anecdote: Un pasteur mettait de côté tous ses casuels pour récompenser les volontaires de sa
paroisse en finançant un barbecue par an. Le pasteur doit motiver aussi en participant
personnellement aux travaux. Il n'y a aucune raison pour qu'il ne prenne pas un pot de
peinture et un pinceau, sous prétexte qu'il est pasteur et qu'il n'a pas de talent de bricoleur.
D'autres dans la paroisse pourraient en dire autant.
Le comité veillera aussi à ce que tous ceux qui travaillent dans l'Eglise (pasteur, organiste,
moniteurs d'école du dimanche, bricoleurs, jardiniers) le fassent dans de bonnes conditions.
Il n'est pas normal qu'un pasteur travaille avec une machine à écrire vieille de 30 ans ou que
son bureau soit mal éclairé. Cela ne motive pas et ne rend pas heureux et dynamique.
Recourir aux gens et à leurs talents. Ne pas oublier les retraités qui ont appris un métier,
possèdent du talent, ont acquis de l'expérience, ont du temps à revendre et cherchent à
donner un sens à leur vie. Il y a dans toute paroisse des dons qui sommeillent, un potentiel
d'aptitudes et de temps, d'amour du Seigneur aussi et de volonté de servir qui n'est pas
utilisé.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
187
Un peu d'organisation peut produire des miracles. La chapelle est-elle à repeindre? Le dire
plusieurs dimanches de suite. Etablir une liste de volontaires disposés à offrir un samedi
après-midi. Préparer le matériel. Leur donner rendez-vous tel samedi, à telle heure. Si on en
trouve 20 et qu'ils travaillent 5 heures, on totalise 100 heures de travail. On termine sur un
bon barbecue. Si nécessaire, on recommence 15 jours plus tard. Cent heures de travail
peuvent transformer une chapelle et faire des miracles, et cinq heures de travail par
personne ne sont pas la mer à boire. Le fait de travailler ensemble à l'Eglise est à lui seul
gratifiant, et le barbecue constitue la récompense suprême. Pourquoi pas ne pas faire figurer
les noms des volontaires sur un tableau d'affichage en gage de gratitude pour les services
rendus?
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
188
L'ADMINISTRATION DE LA PAROISSE
Le rôle essentiel du pasteur est d'annoncer l'Evangile et d'aministrer les sacrements, de
dispenser donc les moyens de grâce. Cependant le contexte social dans lequel nous vivons est
tel qu'il est souvent appelé à être l'administrateur de sa paroisse, donc à exercer des activités
que ne connaissaient guère les pasteurs du passé (planifier, programmer, organiser les
activités paroissiales, etc.).
Jésus est un modèle à sa façon. Ce n'est pas lui qui paie l'impôt, mais il demande à Pierre de le
faire. Il charge Judas de gérer les finances du groupe. Il demande aux disciples de préparer la
Pâque. Il leur confie donc des tâches qui sont pour lui secondaires, pour avoir le temps de
faire ce qu'il considère comme primordial. Les apôtres feront de même en demandant à
l'Eglise de Jérusalem de choisir des diacres (Act 6).
Un pasteur doit agir de la même façon, confier des tâches aux laïcs et, s'il n'a pas de laïcs
compétents, les éduquer pour cela. L'Eglise locale est en quelque sorte une démocratie.
Investi du sacerdoce universel, chaque membre en est une pierre vivante, et tous ensemble
constituent un corps vivant dont le Christ est le chef. Son organisation doit donc être paisible,
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
189
harmonieuse et productive. Une paroisse doit procurer à ses membres la possibilité de servir
Dieu avec les dons qu'ils ont reçus de lui. Elle ne doit pas être l'Eglise d'un seul homme. Le
pasteur ne peut pas et ne doit pas accomplir toutes les tâches qui incombent à l'Eglise.
La constitution paroissiale:
Nécessité d'une bonne constitution, augmentée d'un règlement intérieur. Les deux seront
aussi simples que possible, aussi flexibles que possible pour permettre à la vie paroissiale de
se développer, et aussi complets que possible pour recouvrir toutes les activités de la
paroisse et les superviser.
Dans une première partie, la constitution fixe l'identité de la paroisse, son but, sa profession
de foi et son appartenance ecclésiale. La deuxième partie, plus mobile, définit son
administration. Dans l'administration même, le pasteur n'a pas plus d'autorité que n'importe
quel laïc. Il n'exerce d'autorité pastorale que dans l'administration des moyens de grâce et
n'a en matière de gestion que les responsabilités que la paroisse veut lui confier. Il sera
prudent et n'imposera pas de changement d'ordre administratif. Seule la paroisse tout
entière a le pouvoir de modifier son administration.
Membres de la paroisse:
On distingue entre membres baptisés, communiants et électeurs.
La création de comités est une chose bonne et nécessaire. Mais ces comités ne doivent pas
déposséder les membres électeurs de l'Eglise de leurs responsabilités. C'est à la paroisse de
prendre en la personne de ses membres électeurs les décisions qui concernent son existence
et ses activités (1 Cor 14:23.24; Mt 18:17; Eph 4:11; 1 Pi 2:9). Les comités (conseil
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
190
presbytéral, comité d'éducation chrétienne, comité d'évangélisation, de mission, de
stewardship, pour le travail parmi les jeunes, etc.) ne sont que les agents de la paroisse et
responsables devant elle de ce qu'ils font.
Conseil presbytéral: chrétiens mûrs (traditionnellement des hommes) ayant un bon
jugement, sagesse, consécration et humilité. Ils assistent le pasteur dans ses fonctions et le
conseillent. Ils sont particulièrement responsables de l'enseignement, de l'administration des
sacrements, du déroulement des cultes, donc de l'exercice du ministère pastoral et des
activités spécifiquement spirituelles.
Une paroisse doit savoir que c'est un privilège pour tout chrétien d'assumer une
responsabilité en son sein. Il sera bon d'installer officiellement au cours d'un culte tous ceux
qui exercent une responsabilité particulière.
Quant aux modalités de l'administration paroissiale, elles ne sont pas régies par l'Ecriture et
constituent des adiaphora.
Laïcs: Dans trop de paroisses, la majorité des membres laissent à un petit groupe de laïcs le
soin de veiller à la vie de l'Eglise. Or l'appartenance à une paroisse implique toujours le
service auprès du peuple de Dieu. Beaucoup s'y refusent, parce que convaincus de leur
incapacité. Le pasteur les aidera à surmonter ce sentiment en annonçant toujours à nouveau
que le Saint-Esprit peut équiper tout chrétien en vue de services dans le Royaume de Dieu.
D'autres sont convaincus que les activités qu'on leur propose ne méritent pas leur attention.
Un troisième facteur est le manque d'information. Nécessité d'y parer en informant
régulièrement sur la vie de la paroisse, du district, du Synode. Voici enfin un quatrième
facteur: le vieil homme dont Satan veut se servir pour inciter à l'inactivité et l'indifférence.
Il y a dans l'Eglise diversité de dons, mais 1) il y a une place et un rôle pour chaque chrétien,
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
191
2) Dieu confère et augmente les dons dont son Eglise a besoin, 3) nous devrons tous un jour
rendre des comptes.
Voici certains principes pour l'engagement des laïcs dans la vie de la paroisse (pour plus de
détails, cf. le chapitre sur l'engagement des fidèles dans la vie de la paroisse):
1) Etre raisonnable dans ses demandes. Ne rien imposer, ne pas
insister de trop, ne pas appeler à un service pour un temps
indéterminé, ce qui ferait reculer les gens.
2) Toujours être prêt à encourager. Le découragement et la lassitude
peuvent s'installer chez les meilleurs chrétiens. Il faut donc leur
remonter le moral.
3) Ne pas toujours critiquer, mais savoir aussi apprécier et le dire. Le
chrétien ne cherche pas d'éloges, mais le compliment peut
l'encourager. Paul ne manque pas de le faire dans ses épîtres.
4) Analyser avec soin les dons des gens et leur degré de
développement spirituel. Savoir confier à chacun le rôle et la
responsabilité qui correspondent à ses aptitudes est tout l'art d'un bon
pasteur. Un bon commerçant n'est pas nécessairement un bon
évangéliste, un bon banquier pas nécessairement un bon trésorier.
5) D'une façon générale, les gens sont plus efficaces quand ils
travaillent en groupes. On a alors plus de courage et d'entrain.
6) Pour certaines fonctions, il vaut mieux choisir les candidats que de
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
192
faire appel à des volontaires. La bonne volonté ne suffit pas toujours.
7) Décrire honnêtement la responsabilité qu'on demande à quelqu'un
d'endosser. Ne pas décourager en décrivant le long stage de formation
nécessaire. Ne pas minimiser non plus l'importance de ce qu'on
demande, le temps, les forces, les sacrifices et la consécration
nécessaires. En un mot, ne pas piéger les gens, sinon ils n'accepteront
plus de responsabilités à l'avenir.
8) Faire confiance à ceux qu'on enrôle. La confiance fait naître la
confiance. Laisser aux gens du temps, tant pis si au début ce n'est pas
fait aussi bien qu'on le voudrait, faute d'expérience et d'habitude. Ne
pas s'ingérer dans les fonctions des gens.
9) Pas de pression, mais un appel amical, cordial et chrétien à la
coopération. Ne contraindre personne. Ne pas montrer les gens du
doigt dans une assemblée pour leur demander d'accepter une fonction.
L'invitation en tête-à-tête est préférable. Qu'elle soit cordiale et montre
au candidat la satisfaction qu'il trouvera à exercer la fonction qu'on
désire lui confier.
10) Ne pas ignorer les nouveaux membres, quand on distribue des
fonctions. Ils s'attendent sans doute à pouvoir servir. Certaines
responsabilités cependant ne peuvent être confiées qu'à des membres
expérimentés.
Signalons qu'il est aussi nécessaire de tenir proprement à jour les registres paroissiaux
qui permettent une information rapide et aisée (membres baptisés, communiants,
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
193
électeurs, baptêmes, confirmations, mariages, enterrements, installations, ordinations,
mises à la retraite de pasteurs, fréquence et assistance à la Sainte Cène, cotisations,
offrandes, etc.). Faire un rapport régulier. Les registres et les procès-verbaux des
réunions paroissiales sont propriété de la paroisse et doivent le rester.
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
194
LE PASTEUR ET LE SYNODE
L'appartenance à un Synode constitue une unité ecclésiale nationale destinée à
promouvoir l'unité spirituelle en Christ. Le but en est la gloire de Dieu et le salut des
hommes (Eph 3:20.21; 1 Pi 4:11; 1 Tim 2:4). Nous proclamons la vérité. Nous savons
que là où elle est altérée, le Saint-Esprit peut encore agir et sauver, mais nous renonçons
à l'unionisme. Nous devons réexaminer toujours à nouveau notre position
confessionnelle et nous convaincre qu'elle est biblique.
Intercommunion:
Les paroisses apostoliques étaient en intercommunion. Elles échangeaient les épîtres
des apôtres, sa saluaient les unes les autres, exerçaient l'hospitalité fraternelle,
recevaient en frères dans la foi les chrétiens venus d'ailleurs.
Devoir pour un pasteur de reconnaître comme frères dans la foi ceux qui professent la
même vérité. Nécessité et obligation pour lui de pratiquer l'intercommunion.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
195
Relations personnelles:
Le pasteur doit avoir des relations fraternelles avec tous ses frères dans le ministère.
Les paroissiens savent fort bien s'il est en bons termes avec ses confrères ou non.
Cette fraternité doit se manifester et être sincère (rencontres, partage des problèmes,
communion dans la foi, échanges de chaires). Jamais il ne dira du mal d'un collègue en
présence de ses paroissiens. Il s'efforcera toujours de prendre sa défense.
Conférences pastorales:
C'est pour le pasteur une obligation d'y assister. Les bienfaits qu'il en tire: recyclage
théologique, édification mutuelle dans la foi et l'amour, progrès d'ordre professionnel
(homilétique, méthodes missionnaires, cure d'âme), intérêt pour les besoins et
problèmes au niveau régional et synodal. Nécessité d'élaborer un bon ordre du jour et
de l'exécuter, de prendre au sérieux les travaux qu'on vous confie, de coopérer dans la
participation active de ces conférences.
Assemblées Synodales:
Mêmes avantages que les conférences pastorales. Communion avec tous les délégués de
l'Eglise. Les Assemblées Synodales sont le lieu où on gère, programme, discute le travail
et les activités de l'Eglise. On y enregistre les progrès ou les reculs, bénéficie de
l'encouragement de tous, note les erreurs et les rectifie, élabore des programmes pour
un travail plus actif.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
196
Les objectifs d'un Synode sont: Proclamer en commun l'Evangile - Maintenir et défendre
la vérité - Evangéliser - Faire de la mission dans le Tiers-Monde - Former des pasteurs,
des missionnaires et des évangélistes - Editer du matériel d'instruction religieuse et
d'édification - Mobiliser et placer au service de la collectivité les multiples dons que le
Christ accorde aux uns et aux autres - Aider les paroisses à être plus actives et plus
efficaces aussi bien dans la proclamation de l'Evangile et l'évangélisation que dans la
bienfaisance - Se soutenir spirituellement les uns les autres - Soutenir financièrement
les paroisses qui ne sont pas autonomes ("self-supporting") - Promouvoir l'unité
confessionnelle dans l e monde.
Ce sont là autant de choses que des paroisses ne peuvent pas faire dans l'isolement.
D'où les bienfaits d'un Synode et la nécessité de faire preuve de loyauté à son égard.
Deux principes doivent toujours guider le Synode: 1) Préserver l'autorité souveraine de
la Parole de Dieu et agir en conformité avec elle. 2) Sauvegarder l'autonomie des
paroisses. Le Synode n'a pas de pouvoir exécutif ou législatif sur les paroisses. C'est un
corps consultatif. Par contre, il a le droit de fixer à ses membres un code doctrinal
(défini par l'Ecriture Sainte, divinement inspirée, et les Confessions de foi de l'Eglise
Luthérienne) et d'exiger la soumission à ce code. Une paroisse doit aussi soutenir le
combat du Synode contre l'erreur et le schisme. En ce qui concerne la doctrine, il n'est
donc pas un simple corps consultatif, mais son autorité est celle de l'Ecriture elle-même.
Droits du Synode:
Exiger la soumission à ses résolutions doctrinales. Pour toutes les autres résolutions, les
paroisses ont le droit de juger de leur bien-fondé. Elles ne doivent cependant pas le faire
de façon arbitraire, mais en conformité avec le principe biblique de l'amour chrétien.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
197
Les paroisses ayant contribué à élire les officiers du Synode reconnaîtront la validité et
le bien-fondé de leur ministère, dans l'intérêt de la gloire de Dieu et pour le bien-être et
l'édification de l'Eglise. Aussi le pasteur en particulier est-il tenu, de par son
appartenance au Synode, de coopérer avec lui et de mettre ses dons à sa disposition. Il
doit aussi permettre au Synode de superviser sa doctrine, sa pratique et
l'accomplissement des tâches de son ministère, et cela par les fonctionnaires du Synode
qui en ont reçu le mandat. Cela inclut aussi le pouvoir de suspension et
d'excommunication pour fausse doctrine ou mauvais comportement.
Cependant aucun fonctionnaire du Synode n'a le droit de régner sur les pasteurs et
leurs paroisses. Cf. Mt 23:8. Il est sage pour un pasteur et une paroisse de consulter les
officiers responsables en cas de vacance pastorale. Un pasteur et sa paroisse sont tenus
aussi d'accepter les visitations et d'écouter les exhortations, mises en garde et conseils
prodigués.
Obligations synodales du pasteur:
Assister aux Assemblées Synodales pour y représenter sa paroisse avec son ou ses
délégués laïcs et pour se tenir informé des activités de son Eglise et en assumer avec sa
paroisse la coresponsabilité. Se tenir informé aussi par la lecture des procès-verbaux et
bulletins synodaux.
Informer régulièrement sa paroisse des activités du Synode pour maintenir l'intérêt
éveillé, et éviter de critiquer devant elle le Synode et ses officiers.
Encourager la participation active de sa paroisse à la vie et aux activités synodales
(intercessions, dons à la caisse et aux œuvres synodales: évangélisation, mission,
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
198
formation théologique, littérature, bienfaisance, etc.).
Etre prêt à assumer les responsabilités que le Synode vodrait lui confier, à plein temps
ou à côté de son ministère paroissial.
Faire tout pour consolider l'unité synodale, en évitant en particulier tout esprit de
division et de faction (1 Cor 1:10).
Bienfaits que la paroisse tire de son appartenance au Synode:
Communion étroite avec des chrétiens et des paroisses qui partagent sa
foi - Participation à l'œuvre du Royaume de Dieu au-delà des limites de la
paroisse - Coresponsabilité dans la programmation et l'exécution du travail
synodal - Accès direct à l'aide et l'assistance spirituelle et financière du Synode - Accès à
un potentiel de pasteurs dûment formés par le Synode et fidèles à l'Ecriture
Sainte - Possibilité de réprimande et d'exhortation fraternelles, si la paroisse est en
danger spirituel.
Obligations synodales de la paroisse:
Envoyer des délégués en Assemblées Synodales - Fournir des candidats susceptibles
d'être élus dans les comités et organes synodaux - Accepter les décisions majoritaires
du Synode, à moins de raisons contraignantes - Prier pour le Synode et le soutenir
spirituellement et financièrement, non en grattant les fonds de tiroirs pour donner au
Synode son excédent de recettes, mais en se fixant des objectifs valables et en
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
199
s'efforçant de les atteindre - Encourager les jeunes gens au ministère pastoral - Montrer
de l'estime pour le Synode et les paroisses-sœurs - Permettre à son pasteur de
consacrer du temps aux tâches que le Synode lui a confiées - Rester informée du Synode
et de ses activités (joies, difficultés, etc.).
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
200
LE PASTEUR ET SON VICAIRE
Bien que la Bible ne connaisse pas le mot, le vicariat est une forme particulière du
ministère néotestamentaire. Ministère limité dans le temps et dans les responsabilités.
C'est un stage qui fait partie de la formation du futur pasteur. Le vicaire n'est pas le
pasteur assistant de la paroisse, mais un assistant du pasteur qui, chargé de ses
préparer au ministère, s'y initie sous la surveillance de ce dernier. Le pasteur reste
entièrement responsable de la vie et des activités de sa paroisse. Le vicaire n'a pas
d'initiatives à y prendre.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
201
Les éléments du vicariat:
Le vicariat est l'initiation au ministère pastoral que le vicaire exercera par la suite. Il
comprend les éléments suivants:
Prédications: A préparer sous la supervision du pasteur en des phases successives
réduisant progressivement l'intervention et le contrôle du pasteur.
Enseignement: Catéchismes, école du dimanche et formation de ses moniteurs, études
bibliques. Tout cela sous la surveillance du pasteur. Nécessité d'une préparation
sérieuse à ces activités.
Administration des sacrements: Elle relève du ministère pastoral ordonné. Cependant,
en vertu du sacerdoce universel, le vicaire peut participer à la distribution de la Cène et,
en cas de nécessité et avec l'accord de la paroisse (à condition qu'il n'y ait pas de
dissensus à ce sujet), à leur administration.
Visites: Visites en tout genre (malades, cure d'âme, visites missionnaires, etc.). Dans un
premier temps elles seront faites en compagnie du pasteur, puis par le vicaire seul.
Toutefois le pasteur se réservera toujours les visites revêtant un caractère
disciplinaire ou impliquant le secret professionnel.
Administration: Le vicaire sera invité aux réunions du conseil presbytéral et d'autres
comités paroissiaux, pour observer et apprendre. Il fera éventuellement la méditation
d'ouverture, mais, bien qu'il puisse exprimer son point de vue, ne s'ingérera pas dans
les débats.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
202
Réunions diverses: Groupes de jeunes, de dames, répétitions de chorales. Selon ses
aptitudes particulières, il assurera dans ce domaine des responsabilités diverses. Il
accompagnera aussi le pasteur à des conférences pastorales et meetings divers.
Secrétariat: Initiation à ce travail (rédaction du bulletin paroissial, de la correspondance
officielle, tenue des registres paroissiaux, etc.).
Problèmes afférents au vicariat:
De nombreux problèmes peuvent surgir dans les relations pasteur-doyen/vicaire.
Différences de dons, de méthodes et de caractères. Tel pasteur exige beaucoup, tel autre
moins. Beaucoup de vicaire se plaignent qu'on attende trop d'eux; d'autres voudraient
en faire plus. Que les premiers sachent que si leur vicariat est fait de beaucoup de
travail, leur ministère pastoral futur en exigera autant, si ce n'est plus (1 Tim 4:10).
Si plusieurs vicaires d'un même pasteur expriment auprès des autorités du séminaire
des plaintes justifiées, celles-ci pourront en aviser le président du Synode ou du district
qui s'en entretiendra avec le pasteur en question et prendra les initiatives qui
s'imposent. En cas de conflit de personnalités entre pasteur doyen et vicaire, c'est à ce
dernier, qui est le plus jeune, de céder (1 Pi 5:5).
Un vicaire peut avoir plus de dons que son pasteur-doyen (homilétique, contact social,
talent d'organisateur, etc.). Il combattra tout sentiment de supériorité (1 Cor 4:7). Qu'il
agisse aussi selon 1 Thess 513. Il y a toujours à apprendre chez un pasteur, ne serait-ce
qu'en vertu de son expérience pastorale. Le pasteur peut avoir par ailleurs besoin d'un
tel vicaire plus doué que lui.
Et si le vicaire découvre chez son pasteur-doyen de la négligence ou du laisser-aller? Il
lui faudra d'abord distinguer entre les critères qu'il s'est fixés lui-même et ceux exigés
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
203
par Dieu dans sa Parole. Cf 1 Tim 5:1. Le vicaire ne doit en aucun cas s'opposer au
pasteur, lui résister, dresser sa paroisse contre lui en le critiquant ouvertement. Si le
pasteur est réellement un ministre indigne, le vicaire ne pouvant travailler auprès de lui
demandera à ceux qui sont responsables de son vicariat de le relever de ses fonctions (1
Tim 5:22). Ce sont des cas d'exception bien rares. En général, on attend d'un vicaire
connaissant de telles difficultés qu'il consacre les quelques mois de son vicariat à servir
fidèlement la paroisse qui a requis ses services.
Que faire, si les paroissiens se plaignent devant lui de leur pasteur? Refuser de les
écouter, car les écouter en les approuvant serait une transgression du 8
commandement. Leur rappeler ce commandement et Mt 18:15 ss. Qu'ils parlent avec
leur pasteur et, si nécessaire, avec la paroisse et le président du district. Il faut
réprouver toute diffamation et prendre, autant que faire se peut, la défense du pasteur
selon les exigences du 8 commandement.
Dignité: C'en est fini avec la vie d'étudiant, avec ses excentricités et parfois son
laisser-aller. Le vicaire doit avoir le comportement pastoral que la paroisse attend de
lui. Eviter aussi l'autre extrême: l'orgueil et l'arrogance.
Le vicaire observera aussi la discrétion, voire le secret professionnel, si les paroissiens
lui font des confidences. Par contre, il n'est pas tenu à ce secret professionnel face au
pasteur qui porte la responsabilité de la paroisse.
Le pasteur-doyen:
Avoir un vicaire est un privilège et une responsabilité. Un vicaire occasionne du travail,
mais soulage aussi. On ne recevra pas un vicaire comme pasteur assistant, mais comme
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
204
un étudiant qui achève sa formation et se prépare au ministère. Il a besoin d'être guidé,
conseillé, instruit.
On élaborera avec lui un emploi du temps, lui donnera des tâches précises et exigera
qu'il s'en acquitte. On l'encouragera, l'exhortera, au besoin lui prodiguera des mises en
garde. Le tout avec amour et patience. On l'aidera dans l'exégèse des textes de sermons,
discutera avec lui ses plans de sermons, puis les sermons tout entiers, puis la façon dont
le vicaire les a prononcés. On le fera assister aux cours de catéchisme, études bibliques
et visites de paroissiens, puis lui demandera d'y prendre la parole, enfin d'en prendre
l'initiative, avec des bilans réguliers.
Le pasteur-doyen fera son rapport au séminaire et donnera son appréciation sur le
vicaire. Celui qui a déjà travaillé avec plusieurs vicaires est en mesure de déceler des
faiblesses et des lacunes dans la formation donnée au séminaire.
Il sera procédé à la présentation du vicaire à la paroisse. Cette présentation s'impose du
fait que le vicaire y exerce un ministère, même s'il est limité dans le temps. Au cours de
la cérémonie, on lui rappellera ce qu'on attend de lui, la paroisse sera témoin de ses
promesses et le pasteur expliquera à cette dernière quelles sont ses obligations à son
égard. Cf. un formulaire de présentation de vicaire in A. Schuetze, The Shepherd under
Christ, p. 386.
Il ne faut pas que, face aux talents et dons du pasteur-doyen, le vicaire fasse un
complexe d'infériorité et se considère comme inapte au ministère. Dieu peut utiliser les
plus humbles de ses serviteurs, comme il sait accorder les dons qu'on lui demande dans
la prière.
Le vicaire ne modèlera pas non plus sa première paroisse à l'image de celle où il a fait
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
205
son vicariat (par exemple par la création hâtive et précipitée de tous les comités, le
lancement intempestif de toutes les activités qu'il y a connues). Mais il faut d'abord faire
connaissance avec cette paroisse et ses possibilités, et ensuite essayer progressivement
de lui donner plus d'organisation et de dynamisme. Il ne faut pas non plus céder à un
sentiment de frustration, si la paroisse de l'ancien vicaire est plus petite, plus humble,
plus pauvre que celle dans laquelle le vicariat a été effectué. Il faut y faire une œuvre
utile et féconde avec les moyens dont on dispose.
Le vicariat est une époque très importante dans la vie d'un futur pasteur: privilège
d'annoncer la Parole de Dieu (Eph 3:8), possibilité de seconder utilement un pasteur
(Eph 2:10), initiation à la cure d'âme, prise de contact avec les multiples aspects du
ministère pastoral, possibilité d'apprendre beaucoup auprès d'un pasteur expérimenté,
etc.
Il est nécessaire d'orienter le vicaire en lui présentant et décrivant la paroisse (histoire,
situation présente, particularités, problèmes spécifiques, etc.). Procéder aussi à une
répartition des tâches, en lui confiant par exemple la responsabilité de l'école du
dimanche, du groupe de jeunes. Lui préciser dans quelle mesure il secondera le pasteur
dans les autres activités.
On fera avec le vicaire un certain nombre de visites de type différent (malades,
marginaux, chrétiens en difficulté), pour l'initier de façon pratique, avant de lui laisser le
soin de faire des visites tout seul, à la place du pasteur.
Consultations fréquentes entre le pasteur-doyen et son vicaire. Tenir compte du fait
qu'un vicaire a besoin, au début tout au moins, de beaucoup de temps de préparation
(sermons, visites, catéchismes). Donc, ne pas lui demander de trop, être progressif dans
sa mise au travail. Le vicaire utilisera ces entretiens pour parler avec le pasteur des
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
206
expériences faites, des difficultés rencontrées, des échecs essuyés. Le pasteur les
utilisera pour conseiller son vicaire, l'encourager, corriger ses défauts. Mais ne pas
tenter de modeler le vicaire selon sa propre image. Créer un climat de confiance, pour
que le vicaire n'hésite pas à consulter son pasteur-doyen et à se décharger devant lui de
ses fardeaux et soucis. Etre bon et compréhensif comme Jésus le fut avec ses disciples,
l'apôtre Paul avec Timothée et Tite. Donner au vicaire un bon exemple, en étant un
modèle de serviteur du Christ.
Il peut arriver qu'un étudiant entame son vicariat sans être encore sûr de devenir
pasteur. Cette incertitude n'est pas coupable en soi. Le vicariat doit l'aider à la
surmonter. Il n'est pas question toutefois que le pasteur exerce une pression dans ce
sens, mais il l'exhortera à bien s'acquitter de ses charges pastorales, pour que le vicaire
réalise le grand privilège que constitue la possibilité de prêcher l'Evangile, d'instruire
dans la foi chrétienne, de consoler les malades, les chrétiens en difficulté et les
mourants, etc. C'est la seule façon de fortifier le désir d'un jeune homme de devenir
pasteur (1 Tim 3:1). L'exemple donné par le pasteur est déterminant. S'il se plaint
toujours de son ministère, ou si sa femme s'en plaint toujours, si ses relations avec sa
paroisse ne sont pas bonnes, il n'encouragera certainement pas le vicaire à devenir
pasteur. Par contre, l'exemple d'un ministère fécond, consacré, exercé dans la foi en
Dieu et ses promesses peut être déterminant.
Ne pas exiger du vicaire qu'il soit parfait, un prédicateur modèle et le berger idéal. C'est
un débutant. Etre bon et patient, en se souvenant non seulement de ses lacunes
personnelles, mais aussi de ses propres débuts. Ne pas le reprendre en public, à moins
que cela ne s'impose. Si le vicaire a de graves lacunes, l'exhorter à les combler par le
travail, l'étude et l'application. S'il est franchement incompétent, en référer au
séminaire. S'il se rend durant son vicariat coupable d'une grave faute publique, la
paroisse peut être amenée, par l'intermédiaire du conseil presbytéral ou de l'assemblée
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
207
paroissiale (en cas d'impénitence, ce sera même impératif) à se défaire de lui. Au
besoin, dans la mesure où le vicaire est membre en titre de la paroisse, il faudra
l'excommunier.
A la fin du vicariat, procéder à un bilan avec le vicaire. Lui montrer les progrès
accomplis dans tel ou tel domaine, lui révéler les lacunes qui subsistent, l'inviter à
exploiter tel ou tel don particulier. Cette mise au point peut l'encourager; elle est
toujours utile et salutaire. Faire un rapport de vicariat au séminaire. Son contenu est
confidentiel et ne sera pas nécessairement communiqué au vicaire.
Le vicariat est une excellente institution. Il profite
au vicaire lui-même: initiation au ministère, maturation du futur
pasteur, expériences fécondes;
au pasteur: un vicaire cause du travail, mais décharge aussi; sa
présence donne la possibilité de coopérer et de partager les
expériences;
la paroisse: elle peut en tirer un profit considérable, surtout si son
pasteur est surchargé ou s'il n'a pas de don particulier pour tel aspect
du ministère, par exemple le travail avec les jeunes;
au séminaire: ses étudiants mûrissent. D'autre part, la lecture des
rapports de vicariat lui est très profitable, en ce qu'elle lui permet
d'améliorer la formation des jeunes au ministère pastoral.
_________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
208
LE PASTEUR ET LES ARTS
Il est souhaitable que le pasteur ait de bonnes notions artistiques, capables de lui
assurer un bon goût et de dosner une dimension eshétique à son ministère. On songe
plus particulièrement à l'art oratoire, à celui de la composition littéraire et au sens pour
l'architecture, la peinture et la musique.
Concernant les arts, l'Eglise eut à surmonter deux obstacles: le judaïsme rigide façonné
par le pharisaïsme qui avait proscrit du culte toute image et tout objet artistique quel
qu'il fût, ce qui n'était pas le cas à l'époque des rois (cf. les 12 bêtes qui portaient le
bassin dans le temple, les fleurs de lis, le grand-voile séparant le Saint des saints du lieu
saint et sur lequel étaient tissés des chérubins. Cf. 2 Chron 3:7-17; 4:2-5.13; 5:7.8;
9:18.19. Les judéo-chrétiens de l'époque apostolique n'étaient donc pas habitués à l'art
cultuel. Quant aux pagano-chrétiens, habitués aux statues et à l'art sacré de leur
environnement, ils eurent tendance à les bannir comme impies par définition, quand ils
se tournèrent vers le christianisme.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
209
Enfin les persécutions des chrétiens dans l'empire romain rendirent l'expression
artistique impossible. Pourtant la cryptographie se développa de bonne heure au sein
de la chrétienté sous forme de représentations symboliques. On adjoignit au Christ et
aux douze apôtres des signes symboliques destinés à les identifier. Par la suite, la
vénération des martyrs amplifia cet art. Tandis que dans le Calvinisme on bannit toute
représentation picturale et le jeu des instruments de musique, la Réformation
luthérienne se contenta de libérer l'art cultuel de l'époque de tout ce qu'il avait
d'idolâtre et de contraire à l'Ecriture Sainte.
Quelques indications sommaires sur le mobilier de l'église:
Autel: Placé dans un chœur, aussi grand que possible et de préférence en pierre, il
rappelle que l'Eglise du Christ est fermement établie sur le fondement des apôtres et
des prophètes dont le Christ est la pierre angulaire.
Chaire: Occupant une place de choix dans l'église, elle sera si possible surélevée par
rapport à l'auditoire. Normalement à droite de l'autel quand on entre dans l'église (du
côté du lutrin qui sert à la lecture de l'Evangile), elle affirme par sa position même
qu'elle sert à la proclamation de la bonne nouvelle du salut en Christ. Placée à gauche
(du côté du lutrin de l'épître), elle symbolise la fonction didactique de l'Eglise. Il faut
qu'elle puisse être vue de partout et que sa localisation réponde aux règles de
l'acoustique.
Baptistère: Il n'est pas un simple meuble, mais occupe une place privilégiée, à un
endroit bien en vue, et devrait être de bonne taille, de manière à rappeler l'importance
du baptême dans la vie de l'Eglise et du croyant.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
210
Orgue: Instrument privilégié destiné à célébrer les louanges de Dieu. Il doit être de
qualité et apte à susciter le recueillement.
Bancs: Veiller à leur bonne disposition et à un minimum de confort. Prévoir, si possible,
la possibilité pour la paroisse de se mettre à genoux.
Eclairage: Suffisant et fonctionnel, il ne doit pas gêner les yeux. Pas d'exagération quant
aux lustres et aux chandeliers.
Couleurs liturgiques: Elles sont au nombre de cinq et correspondent aux différentes
périodes de l'année liturgique (vert, rouge, blanc, violet et noir). Quant aux couleurs de
la robe pastorale, on se conformera aux usages de sa paroisse, sans rien lui imposer,
conscient de ce qu'il s'agit d'un adiaphoron (Confession d'Augsbourg, Arft.VII, et
Formule de Concorde, Art. X).
Croix, crucifix, chandeliers, ustensiles eucharistiques, fleurs: Ce ne sont pas de simples
objets de décoration, mais ils constituent l'expression de l'amour et de la vénération des
chrétiens. Veiller à leur dignité et éviter toute surcharge.
Bibles d'autel et de chaire, recueils de cantiques et autres ouvrages: Ils doivent être
propres et en bon état. De même les troncs ou bourses, le cachet officiel de la
paroisse, le comptoir de livres, etc.
Cloches: Très importantes pour l'Eglise et son entourage, elles doivent donner un son
clair et beau, symbole de la voix de l'Evangile. Eviter les carillons électroniques.
Bulletins paroissiaux, certificats de baptême et de mariage, registres paroissiaux: Ils
doivent être propres et bien tenus.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
211
Locaux paroissiaux: Bien entretenus et décorés convenablement. Ne pas oublier de
belles images religieuses, porteuses d'un message pour les yeux et le coeur. Le
presbytère a en cela valeur d'exemple pour les demeures des paroissiens.
Hymnologie: Le pasteur doit être initié à l'hymnologie luthérienne, de manière à
apprécier ce trésor à sa juste valeur et à pouvoir éduquer sa paroisse et l'en faire
profiter.
__________
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
212
L'ACCOMPAGNEMENT PASTORAL
DES
MOURANTS
La souffrance est le lot de tous les hommes dans l'économie actuelle de la chute. Tous font
notamment l'expérience de pertes et de déchirements, et il appartient au pasteur de venir en
aide à ceux de ses paroissiens qui passent par là. La cure d'âme auprès des mourants revêt un
double aspect: il s'agit d'aider celui qui est atteint d'une maladie incurable et qui sait qu'il va
mourir sous peu à assumer tous les sentiments et émotions que sa situa-tion génère et de le
préparer à la mort, et en même temps de soutenir et de consoler ses proches parents, à la fois
dans la perspective de la mort prochaine et au lendemain de celle-ci.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
213
L'AIDE AU MOURANT
Venir en aide aux mourants est l'un des aspects les plus difficiles du ministère pastoral. Il
s'agit pour le patient et pour le pasteur de faire face au dernier ennemi, la mort.
Affronter la mort n'est pas facile. D'autant plus qu'on vit dans un monde qui évacue la mort. Il
le fait en exaltant la jeunesse et la beauté. Les techniques médicales modernes permettent de
repousser toujours davantage cette échéance. D'autre part, le spectacle de la mort ne fait plus
partie de l'expérience ordinaire de la vie. La plupart des vieillards mènent une existence
autonome et ne vivent pas sous le même toit que leurs enfants. Les soins sont prodigués par
les infirmières et les travailleurs sociaux. Par ailleurs, on ne meurt plus guère chez soi,
entouré des siens, mais en milieu hospitalier. Les gens ne sont que rarement là pour assister
à l'agonie de leurs parents.
Par ailleurs, les médecins qui vivent la mort comme un échec ne disent pas volontiers la
vérité à leurs malades. Beaucoup de patients redoutent d'être diminués, voire défigurés par
la maladie, de dépendre des soins constants d'autrui.
Il est particulièrement difficile de mourir quand on a le sentiment d'avoir gâché sa vie.
Inversement, quand la vie qu'on mène a un sens et un but, il est plus facile d'affronter la mort
quand elle s'annonce. Il est donc important pour le pasteur de montrer à ses fidèles ce qu'est
le vrai but de la vie, de les encourager à mener une vie qui leur permette de s'épanouir
pleinement, et cette vie-là est vécue en communion avec Dieu, dans la foi en ses promesses et
dans la soumission à sa volonté (Eccl 12:13; Mt 22:37.39). Le Dr. Elizabeth Kubler-Ross,
grande spécialiste américaine de l'accompagnement des mourants, estime qu'il est capital
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
214
que les gens vivent de manière à ce qu'ils n'aient pas, en regardant en arrière, à dire: "J'ai
gâché mon existence".
Le pasteur doit aussi instruire ses fidèles sur la mort. En aidant les gens à comprendre ce
qu'elle est, on les aide à l'assumer. La souffrance devient insupportable, quand elle n'a pas de
sens. Il faut savoir que la mort fait partie du cycle de la vie. Dieu ne l'a pas créée, mais elle est
le salaire du péché (Rom 6:23). Cependant le Christ l'a vaincue. Le chrétien ne subit donc pas
un échec en mourant, mais la mort est pour lui le moyen de déposer un corps souillé par le
péché pour pouvoir vivre en présence de Dieu, en attendant sa résurrection glorieuse. La
mort est l'entrée glorieuse dans la vie éternelle. Elle est donc pour le chrétien racheté un don
de Dieu. Ce n'est que par la mort que nous pouvons vivre en présence de Dieu. Le but de la
vie du chrétien est donc de tout faire pour mourir un jour dans la foi, afin que se réalisent
pour lui les promesses qui lui sont faites dans l'Ecriture. La mort du chrétien est une victoire
et non un échec, une victoire qu'il doit à celui qui l'a racheté en vainquant le péché, la mort et
l'enfer.
Pour aider les gens à mourir, il faut bien les connaître. Des études spécialisées semblent
prouver qu'on meurt comme on a vécu, que l'homme aura face à la mort les réactions et
attitudes qui sont les siennes quand il fait face, dans la vie, à l'adversité, au stress, à l'échec, à
un défi ou une perte.
Enfin, pour pouvoir utilement préparer les autres à la mort, il faut que le pasteur réfléchisse à
sa propre attitude à cet égard. Plus il sera lucide au sujet de ce que la mort lui inspire
personnellement, plus il sera en mesure de comprendre les autres, et notamment d'accepter
qu'ils expriment librement leurs sentiments à cet égard.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
215
Quelques éléments de réflexion:
1) Dire la vérité à celui qui souffre d'une maladie incurable:
Les médecins ne disent pas toujours la vérité à leurs malades, soit parce que cela les
contraint d'avouer leur échec et que cela leur fait donc peur, soit qu'ils pensent que la
connaissance de la vérité pourrait les traumatiser inutilement et abréger leurs jours. Il en va
de même de bien des proches parents bien intentionnés. Ils veulent protéger le malade d'une
mauvaise "nouvelle". Le pasteur ne devrait pas encourager cette attitude. La plupart des
mourants interrogés par le Dr. Kubler-Ross ont déclaré qu'ils auraient préféré savoir la vérité
à temps. Rien ne semble plus mal accepté que le sentiment que le médecin cache la vérité,
qu'il fuit le malade et évite tout contact avec lui.
En cachant la vérité à un patient, on lui interdit de mener à bien une tâche qu'il n'a pas
encore accomplie, de prendre ses dernières dispositions en faveur de sa femme, de ses
enfants ou de son Eglise, de demander pardon à quelqu'un à qui il a fait du tort, de faire ses
adieux à ceux qu'il aime ou de se réconcilier avec Dieu. En cachant la vérité, on nuit aussi au
climat de confiance qui est si important à ce moment. Les grands malades le sentent
parfaitement, lorsqu'on leur dissimule quelque chose. C'est à éviter à tout prix.
2) Savoir écouter:
Dieu nous a donné deux oreilles, mais une seule bouche. Peut-être peut-on en tirer la
conclusion qu'il faut écouter deux fois plus qu'on ne parle. D'autant plus que Dieu nous a
donné la possibilité de fermer la bouche, mais pas les oreilles. C'est à ne pas oublier. Trop
souvent on croit pouvoir tout régler par l'abondance de paroles. Une chose est certaine: on
ne peut pas répondre à une question avant de la connaître. Kubler-Ross signale que ce qui l'a
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
216
toujours frappée, c'est que les membres du clergé se comportent généralement comme si
ouvrir une Bible ou un livre de prières était le seul moyen de communiquer avec des patients,
et qu'ils évitent trop souvent d'écouter ce qu'ils ont à dire, fuyant peut-être des questions
embarrassantes (Kubler-Ross, On Death and Dying, 1969, p. 226).
Le but du pasteur doit être d'aider les mourants à faire le nécessaire pour accepter l'idée de
la mort et partir en paix. Pour cela, il faut les écouter, détecter leurs besoins et les aider à les
satisfaire. Il n'est pas là pour leur dire ce qu'ils doivent ressentir ou ce qu'ils ont à faire,
encore moins pour leur imposer ses propres sentiments, mais pour les aider à assumer les
sentiments et les émotions qu'ils éprouvent.
3) Comprendre le patient:
Aider, c'est tout d'abord comprendre ce qu'éprouve l'autre. La plupart des mourants passent
par cinq phases: le déni, la colère, le marchandage, la dépression et l'acceptation. Cette
séquence cependant ne se vérifie pas toujours. Tous les mourants ne passent pas
nécessairement par ces cinq étapes. D'autre part, le temps qu'ils mettent à les franchir varie
considérablement de l'un à l'autre. Essayons de les analyser un peu.
a) Le déni:
La première réaction de celui qui réalise qu'il va mourir sous peu est le déni, comme le
montrent des réactions du genre: "Non, pas moi!", "Cela ne peut pas être vrai!" Il s'efforcera
de nier sa maladie ou sa gravité, mettra en doute le diagnostic, ou bien laissera entendre que
ce diagnostic ne lui fait pas peur. Il fera des plans tout à fait utopiques pour l'avenir,
désobéira à son médecin, fera preuve d'un optimisme irréaliste concernant l'opération qu'il
doit subir ou le traitement auquel il lui faut se soumettre, etc.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
217
Le déni est une chose à la fois bonne et mauvaise. Il est bon, car
il constitue un réflexe de défense permettant au malade de supporter le choc, en attendant de
trouver un mécanisme moins radical. Il ne faut donc pas renverser ces murailles de
protection. Il convient de respecter le besoin de nier du patient, du moment qu'on ne triche
pas avec lui.
Mais le déni est mauvais, si le patient refuse de sortir de ce stade. Dans ce cas, il faut essayer
de déterminer la part du patient et la responsabilité de son entourage. Le patient en effet
refuse souvent de franchir ce stade, quand il sent que le médecin et la famille nient l'évidence
et se complaisent eux-mêmes dans cette phase. Il dépend entièrement de son environnement
et a besoin de ceux qui l'entourent. Il nie donc sa maladie, quand il estime que son entourage
lui demande de le faire. Il suffit qu'il ait un partenaire avec qui parler ouvertement, pour qu'il
accepte de renoncer à cette attitude.
b) La colère:
La question "Pourquoi moi?" révèle que le patient en est au stade de la colère. Cette colère, il
la tourne contre son médecin dont il met en doute la compétence, contre les infirmières qui le
soignent, contra sa famille, son pasteur, voire Dieu lui-même. Il fait alors preuve d'amertume
et de rancune, se plaignant de tout et de rien, jalousant ceux qui se portent bien ou qui vivent
plus vieux. Parfois, la colère n'est qu'un appel à l'aide lancé par quelqu'un qui souffre d'une
grande solitude.
Il n'est pas facile de s'occuper de gens en colère. Suirtout quand cette colère se tourne vers
Dieu. Le pasteur étant son représentant, c'est généralement devant lui qu'elle se répand. La
colère contre Dieu est le plus souvent irrationnelle. Il faut le savoir et ne pas faire preuve
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
218
d'une inutile dureté. Qu'on permette au patient de l'exprimer. Généralement il comprendra
son erreur et demandera pardon à Dieu.
Très souvent le patient pose des questions: "Pourquoi moi?", "Qu'ai-je fait pour mériter
cela?" Le pasteur pense généralement qu'il doit y répondre, alors que le malade n'exige pas
toujours de réponse, mais que poser ces questions est souvent pour lui un moyen de ventiler
sa colère. Généralement, elles n'ont pas d'autre réponse que la vérité biblique selon laquelle
nous vivons dans l'économie de la chute. Ce qui satisfait ou ne satisfait pas l'intéressé. Mais
que le pasteur n'imagine pas qu'il doive prendre la défense de Dieu et avoir une réponse à
toutes les questions. Il y a des choses qui nous sont cachées. Qu'il permette au malade de
s'exprimer, sans lui tomber dessus, sachant que ce genre de débordement fait partie, lui
aussi, des mécanismes de défense et permet de trouver un soulagement. Le pasteur peut
toujours, par la suite, quand son malade s'est exprimé librement, lui dire en toute simplicité
et avec tout le calme voulu ce que son attitude a d'irrationnel.
Il existe une forme de colère que le malade tourne contre lui-même et qui se manifeste par un
sentiment de culpabilité. Beaucoup de malades incurables ont le sentiment que le Seigneur
les châtie pour quelque péché particulier. Ce sentiment de culpabilité est, lui aussi, la plupart
du temps irrationnel. Il est sûr que nous sommes tous coupables devant Dieu; mais il est sûr
aussi que nous pouvons vivre de son pardon et nous en réjouir. Il faut donc annoncer au
chrétien mourant toutes les consolations de l'Evangile. S'il souffre d'un sentiment légitime de
culpabilité à l'égard d'un homme pour l'avoir offensé et ne pas encore s'être réconcilié avec
lui, le pasteur devra tout faire pour l'aider à le surmonter par la repentance et la
réconciliation.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
219
c) Le marchandage:
Le malade incurable cherche volontiers à marchander avec Dieu. Il est prêt à accepter sa
volonté, mais à condition que le Seigneur lui permette encore de vivre un certain temps, pour
qu'il puisse achever un travail, vivre encore quelques mois auprès de sa femme ou de son
mari, assister au mariage d'un enfant ou au baptême d'un petit-enfant.
Le marchandage est un moyen d'ajourner l'inéluctable. Le patient qui marchande le fait
généralement parce que Dieu n'a pas réagi à ses accès de colère. La colère ayant échoué, on
espère obtenir quelque chose en lui parlant sur un ton gentil et en lui proposant une sorte de
contrat.
L'exemple classique est celui du paroissien qui a négligé d'aller au culte. Il dira volontiers à
Dieu: "Seigneur, si tu me permets de vivre encore un peu, je te promets que tu me verras tous
les dimanches à l'Eglise". L'intéressé reconnaît son indifférence et sa tiédeur passées, estime
que sa maladie en est une conséquence et promet de se corriger s'il en réchappe.
La phase du marchandage est utile, car elle montre que le patient a su faire un bilan. Il
convient donc de respecter le besoin de passer par elle. Il ne faut pas cependant qu'il
s'imagine pouvoir apaiser Dieu par des promesses. Dieu n'est réconcilié avec nous que par la
mort de son Fils et toutes les bénédictions passent par lui. Si Dieu accorde une "rallonge" à un
malade condamné par la médecine, il le fait par sa seule grâce et non en vertu d'un
marchandage. On se souviendra de l'exemple de David (2 Sam 12:15-23). L'enfant que
Bathscheba lui avait donné était mourant. Le roi s'imposa un jeûne sévère dans l'espoir que
Dieu l'épargnerait. Mais quand il mourut, David interrompit son jeûne, comprenant qu'il
n'avait plus de raison d'être.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
220
d) La dépression:
Beaucoup de malades incurables passent par elle. Elle revêt deux formes. Il y a tout d'abord
la dépression liée au passé: le malade se plaint de n'avoir pas pu faire un tas de choses,
d'avoir échoué en ceci ou en cela, d'avoir rompu des liens, commis de mauvaises actions. Le
pasteur peut offrir son aide de bien des façons, en consolant le malade à propos de buts qu'il
n'a pas atteints, ou bien en provoquant une réconciliation.
La dépression peut aussi s'orienter vers l'avenir: la perspective de devoir quitter les siens ou
de laisser une épouse poursuivre son chemin toute seule, l'éventualité d'une déchéance
physique, la peur d'être une charge pour la famille peuvent abattre le malade. Il ne faut pas
tenter de briser cette dépression avec des argu-ments faciles qui risquent d'être peu
acceptés. Elle est même nécessaire en ce qu'elle permet au mourant de faire un "travail de
deuil" indispensable. C'est ce travail de deuil qui permet de passer à la phase de l'acceptation.
Il faut savoir être présent et écouter, pour déterminer les besoins physiques, spirituels ou
psychiques réels du patient.
e) L'acceptation:
C'est le dernier stade, auquel tous cependant n'accèdent pas. On n'y parvient que si on a pu
achever certaines choses comme régler tel ou tel problème, se réconcilier avec tel ou tel
membre de la famille ou ami, et si on arrive à se soumettre à la volonté de Dieu et à accueillir
la mort. C'est à ce prix que celle-ci est non pas une défaite, mais une victoire et qu'on quitte
ce monde dans la paix avec Dieu, les autres et soi-même, en disant: "J'ai combattu le bon
combat, j'ai achevé la course, j'ai gardé la foi" (2 Tim 4:7).
Cette phase est à la fois réconfortante et frustrante pour l'entourage. Réconfortante pour des
raisons évidentes, frustrante parce que le malade, prêt à mourir, ne désire pas toujours des
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
221
visites et ne souhaite pas toujours parler. Il s'est détaché de ce monde, souvent même de ceux
qu'il a aimés. Alors ces derniers sont parfois choqués, parce qu'ils ne comprennent pas ce qui
se passe. D'autres veulent forcer le malade à continuer à se battre pour vivre, alors qu'il ne
désire plus qu'une chose, mourir. Il veut partir. Il appartient donc à la famille de le laisser
partir. Quand Jacob fut prêt à mourir, il convoqua ses enfants, les bénit et leur fit ses adieux
(Gen 49).
On ne confondra pas acceptation et résignation. Ce n'est pas la même chose. La résignation
est l'attitude de celui qui subit quelque chose sans y acquiescer, malgré lui. L'acceptation au
contraire traduit le consentement.
Quelques précisions supplémentaires:
Les mourants sont comme tout le monde: ils ne disent pas toujours ce qu'ils pensent et
ressentent. Ils s'expriment parfois de façon voilée. Un tel dira à son entourage ou à son
pasteur: "Cela fait quinze jours que je suis à l'hôpital et je n'ai fait aucun progrès" non pas
pour s'en plaindre, mais dans l'espoir d'obtenir des informations sur son état.
Les grands malades sont souvent hantés de peurs: peur de devoir mourir seuls, peur de
souffrir ou d'être asphyxiés, peur d'être défigurés par la maladie, peur de perdre son
indépendance ou de sombrer dans la folie, etc. A cela s'ajoutent des appréhensions de toutes
sortes, celle d'être à charge à autrui, l'anxiété qu'engendre la perspective de la séparation, les
soucis pour l'avenir de la femme ou des enfants, l'impression que la vie n'a pas de sens
maintenant que la mort est imminente.
On se souviendra aussi que le mourant est encore un être vivant. Il apprécie donc qu'on lui
parle de sa famille, du travail, de tout ce qui l'a intéressé, voire passionné dans la vie. On se
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
222
gardera cependant de parler de futilités, de choses sans importance, car le patient
interprétera cela comme une inaptitude à faire face à la réalité qu'est la mort imminente.
4) L'aide à la famille:
Assister un mourant, c'est aussi assister sa famille. Tâche difficile, mais nécessaire. La proche
famille éprouve souvent dans ce cas un profond sentiment de culpabilité. On se reproche
d'avoir mal agi, de n'avoir pas témoigné au mourant assez d'amour et de compréhension. On
se reproche aussi parfois de lui souhaiter une mort rapide et sans souffrances. Le mieux que
le pasteur ait à faire est de les écouter et de les aider à assumer leurs sentiments.
Bien des familles ont des problèmes de communication, et ces problèmes s'intensifient
considérablement en cas de maladie incurable et de décès imminent. On veut protéger le
mourant et on se réfugie, pour ce faire, dans le silence. Il faut donc encourager les gens à
exprimer ouvertement et honnêtement leurs émotions, même quand celles-ci ont le pouvoir
de mettre mal à l'aise ou qu'elles sont ressenties comme saugrenues. Il faut savoir accepter
les sentiments d'autrui sans les juger. Quoi qu'il en soit, on ne peut aider quelqu'un que si on
sait exactement ce qu'il a dans le coeur et ce qu'il ressent au fond de lui-même.
5) Les consolations de la Parole de Dieu:
Il faut apporter aux mourants le secours et le réconfort de la Parole de Dieu, en tenant
compte de leurs besoins particuliers. On trouvera des textes bibliques appropriés à chaque
situation. Le diagnostic d'une maladie incurable est un choc violent pour le patient et les
siens. On attend donc beaucoup du pasteur. Là où le médecin ne peut plus que retarder
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
223
l'échéance, le pasteur est capable d'offrir une thérapie d'un autre ordre, mais qui apporte une
consolation certaine et transforme la mort, changeant la défaite en une victoire. Pour ce faire,
il faut qu'il soit honnête et qu'il encourage l'honnêteté, qu'il accepte les sentiments tels qu'ils
s'extériorisent devant lui, et qu'il applique la Parole de Dieu avec compréhension et amour.
Le pasteur encouragera aussi d'autres, membres de l'Eglise ou conseillers presbytéraux, à
rendre visite au mourant. Parfois ces visites sont expressément souhaitées par le patient. Il
peut même arriver que la visite d'un certain paroissien apporte plus de réconfort que celle
du pasteur. Celui-ci n'en prendra pas ombrage. Un mourant a droit à toutes les formes de
consolation auxquelles il aspire.
L'AIDE A LA FAMILLE EN DEUIL
Le décès de son conjoint est sans doute la perte la plus douloureuse qu'une personne puisse
subir. D'autres décès sont également particulièrement éprouvants. L'accompagnement
pastoral des familles en deuil est toujours difficile, mais il est nécessaire et très apprécié. Les
principes que nous avons énoncés pour la cure d'âme auprès des mourants s'appliquent
également ici.
Le deuil fait partie de la vie, car la perte d'un être cher en fait partie. De même que l'homme
doit apprendre à bien vivre, de même il lui faut apprendre à bien assumer le deuil. Ce n'est
pas facile, car les occasions ne sont pas si nombreuses que cela. D'autre part, les enfants sont
souvent protégés contre le deuil par leurs parents. Des études révèlent qu'un deuil mal
assumé peut engendrer des maladies (troubles fonctionnels, cancer, ulcère, maladies
mentales, etc.). Bien des actes hostiles à la société et des comportements délinquants sont le
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
224
fait de gens qui ne sont pas parvenus à surmonter leur deuil après un décès très mal vécu.
Nombreux sont les jeunes délinquants qui ont perdu un parent en bas âge et dont le
comportement est une manifestation de colère contre ce qu'ils perçoivent comme une
injustice, contre des événements qui les ont privés de sécurité et de bonheur.
La cure d'âme auprès de la famille en deuil est fonction de la nature et des circonstances du
décès, des sentiments et réactions des proches parents et, dans une certaine mesure aussi,
des relations que le pasteur entretient avec la famille.
On demande parfois au pasteur d'aller annoncer la nouvelle du décès à la famille du défunt. Il
ne faut pas qu'il se dérobe à cette mission dont on le charge un peu en raison de son
ministère ou de la confiance particulière qu'on a en lui. Il s'en acquittera d'une façon simple,
directe et calme, sans recourir à des formules ambiguës. Il faudra ensuite qu'il accepte la
réaction émotionnelle suscitée par la nouvelle du décès et qu'il apporte un réconfort
approprié.
Les funérailles devraient, partout où cela est possible, avoir lieu dans le cadre et donc dans
la chapelle de la paroisse. Elles sont à la fois un culte rendu à Dieu et une confession de la
foi et de l'espérance chrétiennes. Quand l'Eglise enterre ses fidèles, elle affirme sa foi en la
victoire sur le dernier ennemi, la mort. Celle-ci constitue la prédication la plus éloquente de la
Loi, car elle est selon l'enseignement de la Bible, le salaire du péché. Son pouvoir sur les
pécheurs est universel. Personne n'y échappe. Quand la mort entre dans une maison, ceux
qui portent le deuil songent à leur propre mort et à leur destinée éternelle. Le moment est
donc propice pour annoncer ce que la Parole de Dieu révèle au sujet de la vie, de la mort et de
l'au-delà. Les funérailles chrétiennes sont le lieu privilégié pour cela. Elles sont aussi en
particulier l'occasion d'affirmer ce que croit et confesse l'Eglise et d'annoncer la nécessité
pour chaque homme de se repentir et de se convertir au Christ. Pour que l'Eglise soit crédible
avec son témoignage, le pasteur doit bien sûr éviter d'enterrer toute personne qui n'a pas
confessé la foi chrétienne de son vivant ou, à défaut, sur son lit de mort.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
225
Le sermon d'enterrement doit toujours annoncer la Loi et l'Evangile, affirmer l'universalité
de la malédiction du péché et de la condamnation qu'il entraîne, et proclamer le pardon des
péchés et la victoire sur la mort et l'enfer par la foi en Christ. Mourir pour un chrétien, c'est se
séparer de ce corps corruptible pour aller chez le Seigneur, et cela dans l'attente de la
résurrection des morts.
Les gens qui portent le deuil éprouvent des sentiments divers au moment du décès et après
lui. Chacun le fait à sa façon en fonction des relations qu'il a entretenues avec le défunt, de la
nature et des circonstances du décès, de ses particularités émotionnelles et d'expériences
semblables vécues dans le passé.
Les différentes phases du deuil:
1) Le choc et le déni:
Apprendre le décès d'un être aimé suscite toujours le choc, que ce décès ait été pressenti ou
qu'il soit inattendu. La première réaction est souvent l'absence d'une manifestation de
sentiments, l'indifférence ou la négation. Il ne faut pas s'en offusquer. C'est un mécanisme de
protection temporaire destiné à absorber la souffrance causée par le décès. En réagissant
ainsi, on se donne le temps de "digérer" la mauvaise nouvelle.
2) Les malaises physiques:
Ceux qui portent le deuil se plaignent souvent de malaises de toutes sortes (rhumes, troubles
fonctionnels et surtout digestifs, insomnies, difficultés à se concentrer, crises de larmes,
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
226
logorrhée, etc.). Cette phase est généralement assez courte, mais peut cependant s'étendre
sur des mois. Quelques bons conseils d'hygiène (diététique, activités physiques) sont utiles. Il
faut veiller en particulier à ce que ceux qui portent le deuil ne se réfugient pas dans l'alcool
ou la prise intempestive et anarchique de médicaments.
3) La colère:
Ceux qui portent le deuil sont souvent amers, voire en colère contre le défunt, eux-mêmes, le
pasteur, la société en général et Dieu lui-même. Il convient de ne pas dramatiser. C'est encore
un réflexe de défense, une façon d'exprimer une frustration parce qu'on a subi une perte,
qu'on doit vivre une situation douloureuse qu'on n'a pas pu contrôler.
4) Culpabilité:
C'est le sentiment le plus répandu chez ceux qui portent le deuil. Il s'exprime par des phrases
du genre: "Si j'avais fait ceci ou cela, il (ou elle) ne serait pas mort", "Je n'ai pas fait mon
devoir", "J'aurais dû lui témoigner plus de patience et d'amour". La mort supprime toute
possibilité de réconciliation. Le sentiment de culpabilité au moment d'un décès est
généralement irrationnel. Il peut aussi être légitime et fondé. Dans ce cas, le pasteur sait ce
qu'il a à faire pour aider les gens à le surmonter.
Quand l'agonie a été particulièrement longue et douloureuse, la famille éprouve un
soulagement le jour du décès. Ce sentiment de soulagement peut en générer un autre, le
sentiment de culpabilité. Cela se comprend, et il faut tout faire pour permettre aux gens de le
surmonter.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
227
5) Dépression:
Les gens qui portent le deuil passent par une phase de déprime: crises de larmes, sentiment
de solitude, peur pour l'avenir, perte d'identité pour celui que la mort prive de son rôle de
mari, de femme ou de parent. On ne se sent plus nécessaire, désiré ou utile. On se réfugie
volontiers dans le sommeil, l'inactivité, quand ce n'est pas dans les médicaments ou les
drogues de toutes sortes. Certains ont des pensées suicidaires. Il faut tenir compte de tout
cela et apporter une aide faite d'affection et de compréhension, en sachant que c'est là
généralement une phase transitoire.
6) Réconciliation:
C'est la dernière phase: la perte de l'être aimé est acceptée, le chagrin est en grande partie
surmonté, l'intéressé a retrouvé un sens à la vie. On accepte finalement de vivre sans l'être
aimé qu'on a perdu. Le sourire et la bonne humeur sont revenus. On n'est plus rivé au passé,
mais on pense au présent et à l'avenir. La souffrance est là, mais la vie continue.
Le pasteur fera tout pour aider ceux qui portent le deuil à accéder aussi vite que possible à
cette dernière phase, sans pour autant sous-estimer leur chagrin et les faire progresser à un
rythme donné. Les liens qu'on entretenait avec le défunt doivent se convertir
progressivement d'une relation de présence en une relation du souvenir. Il faut accéder à une
nouvelle identité basée sur une vie sans le défunt et qui a une signification nouvelle. Le temps
y est pour beaucoup. A lui seul il guérit, quoi qu'on en dise, beaucoup de plaies; il possède
une vertu thérapeutique en soi. Mais il va de soi que les promesses de l'Evangile concernant
la vie éternelle et les retrouvailles dans le ciel aident par-dessus tout le chrétien en deuil à
accepter la perte de l'être aimé et à se réconcilier avec ce qui lui est arrivé.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
228
On pense de nos jours que le travail de deuil prend environ deux années. Le temps requis
dépend bien sûr de nombreux facteurs objectifs (nature et circonstances du décès, situation
familiale et sociale de celui que frappe le deuil) et subjectifs (liens avec le défunt et
constitution psychique). Il n'existe pas de normes à ce sujet, et chacun doit vivre son deuil à
sa façon. La période la plus critique est certainement le premier mois après le décès; ensuite,
les symptômes du deuil s'atténuent progressivement et mettent, selon les individus, plus ou
moins de temps à disparaître.
Il existe des deuils aggravés, et deux facteurs y contribuent: le conditionnement social qui
nous enseigne à supprimer la souffrance et la douleur, et notre manque d'expérience
concernant le processus et les mécanismes du deuil. On distingue entre quatre catégories de
deuils aggravés:
a) L'absence de chagrin véritable due à une situation de choc et de déni dont on n'arrive pas à
sortir.
b) La distorsion du deuil par une colère ou un sentiment de culpabilité insurmontables.
c) La somatisation par des troubles durables qui n'ont pas d'origine fonctionnelle.
d) Enfin, il y a le deuil chronique de celui qui s'efforce à tout prix de maintenir le défunt en
vie, en faisant une fixation sur sa personne et sur les objets qui lui appartenaient. L'intéressé
rumine son deuil, et le fait parfois parce qu'il pense qu'il est tenu de le faire, pour montrer à
quel point il aimait le défunt.
C'est en général le refuge dans une phase particulière du deuil dont on refuse de sortir, qui
indique qu'on a affaire à un deuil aggravé. La tristesse qui envahit la personne en deuil quand
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
229
viennent des anniversaires ou des jours de fête, les crises de larmes à l'église, le fait de parler
excessivement du défunt ne sont pas en soi des symptômes de deuil aggravé. Dans certains
cas, le pasteur n'hésitera pas à orienter les intéressés vers un psychothérapeute compétent.
Rares sont en effet les pasteurs suffisamment formés par leurs études et par leur expérience
pastorale pour faire face à ce genre de situation.
La proclamation constante dans la paroisse de ce qu'enseigne la Bible au sujet de la grâce
divine, du pardon, de la mort, de la résurrection et de l'éternité est sans doute le moyen par
excellence pour préparer les chrétiens à faire face à leur propre mort et au départ de ceux
qu'ils aiment. C'est de la sorte qu'on fait grandir les chrétiens dans la connaissance et dans la
foi, qu'on les assure de la présence divine et qu'on les aide à assumer leurs émotions et à
contrôler leurs craintes et leurs appréhensions.
Le pasteur s'efforcera d'être aussi un ami attentionné, bénéfi-ciant de la confiance de ses
paroissiens en détresse. Il invitera les membres de sa paroisse à faire de même, avec tact et
discrétion.
Voici, pour terminer, quelques conseils tout à fait pratiques à l'usage du pasteur et des
paroissiens:
- Chercher le contact et le garder.
- Ecouter, avant de parler.
- Ecouter beaucoup et parler peu.
- Eviter les clichés et les réponses faciles.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
230
- Etre authentique.
- Etre pratique, ponctuel et efficace (préparer un repas,
nettoyer la maison, faire des courses, en un mot, se rendre utile).
- Encourager d'autres à rendre visite aux personnes en deuil.
- Accepter le silence.
- Ne pas questionner inutilement sur les circonstances du décès.
- Consoler en particulier les enfants de la famille, qui sont
généralement les grands oubliés.
- Ne pas parler d'une façon anodine de tout et de rien. La personne
en deuil ressentirait cela comme la volonté délibérée de la détourner
de ce qui la préoccupe.
- Permettre à celui qui porte le deuil de faire son "travail de deuil" à
son rythme.
- Inviter, le moment voulu, la personne en deuil à sortir de sa
maison, à manger chez soi, à aller au spectacle. L'orienter vers une
activité nouvelle.
- Envoyer une carte, un petit cadeau.
- Lui remettre l'enregistrement d'un sermon ou d'un culte.
Théologie Pastorale, Dr Wilbert Ktreiss
231
- Intercéder dans le culte pour ceux qui portent le deuil et inviter les
paroissiens à faire de même chez eux.
Le pasteur, chargé dans son ministère de consoler ceux qui souffrent, fera bien de
réfléchir souvent à ces paroles de l'apôtre Paul: "Béni soit Dieu, le Père de notre
Seigneur Jésus-Christ, le Père des miséricordes et le Dieu de toute consolation, qui nous
console dans toutes nos afflictions, afin que, par la consolation dont nous sommes
l'objet de la part de Dieu, nous puissions consoler ceux qui se trouvent dans quelque
affliction! Car de même que les souffrances de Christ abondent en nous, de même notre
consolation abonde par Christ. Si nous sommes affligés, c'est pour votre consolation et
pour votre salut. Si nous sommes consolés, c'est pour votre consolation, qui se réalise
par la patience à supporter les mêmes souffrances que nous endurons. Et notre
espérance à votre égard est ferme, parce que nous savons que, si vous avez part aux
souffrances, vous avez part aussi à la consolation" (2 Cor 1:3-7).
La condition de l'homme dans ce monde requiert la souffrance. C'était vrai pour Paul.
Cela l'est aussi pour tous les pasteurs et pour tous les chrétiens. Mais Dieu console les
pasteurs, pour qu'ils puissent consoler à leur tour ceux qu'il a confiés à leurs soins.
__________