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Thèse de doctorat présentée à l’École nationale d’administration publique dans le cadre du programme de doctorat en administration publique pour l’obtention du grade de Philosophiæ Doctor (Ph. D.) Thèse intitulée L’encadrement de la coopération inter organisationnelle et de la coordination dans l’administration publique québécoise (1976-2003) : composants, évolution et analyse comparative avec sept pays de l’OCDE Présentée par André Bazinet Mars 2017 © André Bazinet, 2017

Thèse de doctorat présentée à l’École nationale d ...espace.enap.ca/150/1/031453078.pdf · messieurs Serge Belley, Christian Boudreau, Louis Demers et Yves-C. Gagnon. À mes

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  • Thse de doctorat

    prsente lcole nationale dadministration publique

    dans le cadre du programme de doctorat en administration publique

    pour lobtention du grade de Philosophi Doctor (Ph. D.)

    Thse intitule

    Lencadrement de la coopration inter organisationnelle et de la

    coordination dans ladministration publique qubcoise (1976-2003) :

    composants, volution et analyse comparative avec sept pays de lOCDE

    Prsente par Andr Bazinet

    Mars 2017

    Andr Bazinet, 2017

  • La thse intitule

    Lencadrement de la coopration inter organisationnelle et de la

    coordination dans ladministration publique qubcoise (1976-2003) :

    composants, volution et analyse comparative avec sept pays de lOCDE

    Prsente par

    Andr Bazinet

    Est value par les membres du jury de thse suivants :

    Grard Divay, professeur lENAP, prsident

    Louis Ct, professeur lENAP et directeur de thse

    Bachir Mazouz, professeur lENAP

    Iain Gow, professeur mrite, Universit de Montral et valuateur externe

  • tous mes proches,

    Rose-Blanche, Claudine, Mlanie, Vronique, Pierre-Emmanuel, Simon, Jules

    et Isabelle

  • iv

    Remerciements

    mon directeur de thse, M. Louis Ct, qui ma soutenu tout au long de ce projet et ma

    si judicieusement conseill, avec une disponibilit irrprochable. Je suis aussi trs

    reconnaissant aux membres du jury de thse pour leurs prcieux commentaires et

    suggestions, ainsi que pour leur dvouement en raison de la longueur du texte. Je remercie

    aussi M. Luc Bernier qui a agi comme membre du comit de proposition de thse.

    Avec beaucoup de gratitude, je remercie les personnes qui ont gracieusement et

    aimablement accept de commenter un ou plusieurs chapitres de ma thse :

    Monsieur Paul-mile Arsenault, Monsieur Louis Bernard, Monsieur Roch Bolduc, Monsieur Jean Larochelle, Madame Hlne Simard, Monsieur Franois Turenne, Monsieur Yves Turenne, Madame Diane Wilhelmy.

    tous mes ex-collgues de la fonction publique avec lesquels jai discut de ce projet et

    qui mont aid par leurs observations. mes professeurs de lENAP qui mont beaucoup

    appris : mesdames Michle Charbonneau, Nadine-Forget Dubois et Lucie Rouillard ;

    messieurs Serge Belley, Christian Boudreau, Louis Demers et Yves-C. Gagnon.

    mes collgues de lENAP, tudiants et professionnels, qui mont appuy de diffrentes

    faons dans cette recherche : Mathieu Carrier, Nicolas Charest, ric Dion, Luc Farinas,

    Daniel Francoeur, Constance Herrera, Thuy-Lan Lam, Richard Loiselle, Fabiana

    Machiavelli, Kaddour Mhiriz, Langis Michaud et Benot Rigaud.

    lensemble du personnel de la bibliothque de lENAP Qubec, notamment Jose

    Chabot, Maryse Cloutier, Alain Gagnon et Halima Yekhlef.

    toutes les personnes de mon entourage qui mont soutenu par leurs encouragements tout

    au long de ce parcours.

  • v

  • vii

    Rsum

    La perception de problmes lis une insuffisance de relations entre les organisations du

    gouvernement, leffet silo, merge dans les annes 1970. Les types dinstruments de

    coordination hirarchique ne suffisent plus; de nouveaux modes de relations inter

    organisationnelles (IO) sont requis. Une telle adaptation ne peut soprer sur une simple

    invitation, la coopration IO nallant pas de soi. Do la question centrale de notre

    recherche : Quelles formes prennent lencadrement et lvolution de la coopration IO

    dans ladministration publique qubcoise de 1976 au dbut des annes 2000? Nous

    accompagnons notre question de deux propositions vrifier : 1) les facteurs internes ont

    plus dinfluence que les facteurs externes et 2) les membres du gouvernement les plus

    impliqus dans la gouverne centrale de ltat jouent un rle plus dterminant dans le

    dclenchement des changements que les autres lus et les autorits administratives.

    De nombreuses recherches ont t consacres ces dernires dcennies aux relations entre

    les organisations : pas moins de 46 objets dtudes ont t rpertoris, mais les rapports de

    coopration IO lintrieur des administrations publiques ont t peu tudis. Les

    consensus nont pas encore merg, notamment sur une dfinition de la coopration IO.

    Parmi les cadres conceptuels et mthodologiques considrs, nous optons pour celui utilis

    par Bouckaert, Peters et Verhoest pour ltude de la coordination au sein de sept pays de

    lOCDE ( laide des mcanismes de type hirarchique, de march et de rseau) ; nous

    compltons cette analyse par lexamen des types de relations IO selon les axes vertical et

    horizontal. Notre univers de travail est ladministration publique qubcoise; pour

    comparer avec ltude de Bouckaert et al. (1980 2005) nous couvrons la squence de trois

    gouvernements de 1976-2003. Nous misons sur des sources documentaires et sur le regard

    de hauts fonctionnaires ayant exerc des fonctions stratgiques durant cette priode.

    Nos rsultats montrent quil est possible de discerner dans larrangement gnral de la

    coordination au sein de ltat qubcois, un encadrement ddi la coopration IO. Nous

    observons la fin de la priode tudie un encadrement coopratif transform, passant dun

    stade plutt embryonnaire un arrangement bien dploy, reposant sur un discours et des

    incitations soutenues en faveur dun partenariat IO et appuy par des dispositifs lgaux,

  • viii

    administratifs et de culture organisationnelle proposant des orientations et des moyens aux

    ministres et organismes pour sen acquitter. Cinq types dinstruments de type rseau

    sajoutent aux trois qui existaient en 1976. Lusage des instruments de rseau (surtout) et de

    march saccrot considrablement, alors que lusage des instruments hirarchiques se

    transforme. Vue sous langle des relations IO, lampleur des changements se confirme ; les

    types de relations IO de coopration passent de quatre douze, alors que les types de

    relations IO hirarchiques senrichissent de quatre pour passer quinze. Au total, nous

    comptons dix domaines de relations IO et 27 types de relations en 2003. laide de ces

    rsultats, nous proposons une dfinition de la coopration inter organisationnelle.

    Nos rsultats montrent une ressemblance avec ceux de Bouckaert et al., concluant un

    affaiblissement du mcanisme hirarchique dans les annes 1980 avec une monte des

    mcanismes de rseau et de march, suivie dans les annes 1990 dun usage plus rigoureux

    du mcanisme hirarchique. Contrairement la trajectoire en va-et-vient des quatre pays

    ayant le plus adopt le courant du nouveau management public, le Qubec a suivi un trac

    plus linaire, accordant plus de pouvoirs et de flexibilit ses organisations tout en rendant

    sa direction et son contrle plus stratgiques.

    En engendrant la coopration IO, le pouvoir hirarchique a amlior la capacit densemble

    de la coordination de ltat ; les modes de fonctionnement coopratifs sont devenus des

    complments au mcanisme hirarchique et non des concurrents, en comblant certaines de

    ses lacunes.

    Les rsultats contredisent notre formulation des deux propositions vrifier. Les facteurs

    externes ont pes plus lourd que les facteurs internes comme moteurs de changement. Le

    rle dterminant dans le dclenchement de ces changements revient aux dputs qui ne sont

    pas membres du gouvernement, bien que les ministres les plus impliqus dans la gouverne

    centrale de ltat et les hauts dirigeants administratifs jouent un rle essentiel dans la

    prparation et la ralisation de ces changements.

    Mots cls : ADMINISTRATION PUBLIQUE, COLLABORATION, COOPRATION,

    COORDINATION, ENCADREMENT, INTERMINISTRIEL, INSTRUMENT, INTER

    ORGANISATIONNEL, MCANISME, PARTENARIAT.

  • ix

    Abstract

    The perception of problems linked to insufficient interaction or relations between a

    governments organizationsthe silo effectemerged in the 1970s. Hierarchy-type

    coordination instruments no longer sufficed, and new modes of inter-organizational (IO)

    relations were needed. Such adaptation does not occur simply by invitation, and IO

    cooperation is far from self-evident. Hence, our main research question: What form did

    the framework for and evolution of IO cooperation take in the Qubec public

    administration from 1976 to the early 2000s?. In addition to this question, we formulated

    two assumptions to test: 1) internal factors are more influential as driving forces for change

    than external factors; 2) the government members most involved in the central governing

    process play a more decisive role in triggering change than other elected representatives

    and administrative authorities.

    Much research has targeted relations between organizations: we identified no fewer than 46

    broad study themes on the topic. However, few researchers have studied IO cooperation

    relations within public administrations. Consensus does not even exist on the definition of

    IO cooperation. Among the conceptual and methodological frameworks considered, we

    opted for Bouckaert, Peters and Verhoest for studying coordination within seven OECD

    countries (using hierarchy-type, market-type and network-type mechanisms). We

    completed our analysis by examining IO relations (vertical and horizontal). Our working

    environment was the Qubec public administration. To compare with Bouckaert et al.

    (1980 to 2005), we covered the three-government sequence marking 1976-2003, focussing

    on documentary sources and senior public servants who held strategic positions during this

    time.

    Our findings show that, in the overall structure of coordination within the Qubec public

    administration, a framework dedicated to IO cooperation can be discerned. At the end of

    the period studied, we note that this cooperative framework has changed, moving from a

    relatively embryonic stage to a well-deployed structure, based on an ongoing discourse and

    incentives favouring IO partnerships supported by legal, administrative and organizational

    culture-related provisions proposing guidelines and means for government departments and

  • x

    public bodies to use to attain them. Five types of network-type instruments were added to

    the three that existed in 1976. The use of network (primarily) and market instruments rose

    substantially, while the use of hierarchical instruments changed. Seen from the viewpoint of

    IO relations, the scope of the changes was confirmed. The types of relations involving IO

    cooperation grew from 4 to 12, while IO hierarchy-type relations increased from 11 to 15.

    Overall, we counted 10 fields of IO relations and 27 types of relations for 2003. Using these

    results, we have proposed a definition of IO cooperation.

    Our findings resemble those of Bouckaert et al., concluding a weakening of the hierarchical

    mechanism in the 1980s with a rise in network-type and market-type mechanisms, followed

    by more rigorous use of the hierarchical mechanism in the 1990s. Unlike the saw tooth path

    taken by the four countries that most embraced the new public management trend,

    Qubecs progression was more linear, as it granted its organizations more powers and

    flexibility while making its leadership and control more strategic.

    By generating IO cooperation, the hierarchical powers improved the States overall

    coordination capacity; cooperative operating modes became complements to rather than

    competitors of the hierarchical mechanism by offsetting some of its shortcomings.

    Our findings, however, contradict our initial two assumptions. External factors weighed

    more heavily than internal ones as elements promoting change. The decisive role in

    bringing about these changes was played by MNAs who did not hold ministerial portfolios,

    although the Ministers most closely involved in the central governing process and senior

    managers played a key role in preparing and implementing these changes.

    Keywords: PUBLIC ADMINISTRATION, COLLABORATION, COOPERATION,

    COORDINATION, FRAMEWORK, INTERDEPARTMENTAL, INSTRUMENT,

    INTER-ORGANIZATIONAL, MECHANISM, PARTNERSHIP.

  • xi

  • xii

    Table des matires

    Introduction...............p. 1

    Chapitre 1 : Problmatique et question de recherche....p. 6

    1.1 La perception de la problmatique.... p. 6 1.2 La rponse anticipe cette recherche. p. 8 1.3 Les paramtres de la problmatique...p. 10

    1.3.1 Positionnement de lobjet de recherche.......................................p. 10 1.3.2 Repres situant lvolution de ladministration publique en gnral...................................................................................................p. 13 1.3.3 Repres situant lvolution de ladministration publique au Canada et au Qubec.........................................................................................p. 18 1.3.4 Repres situant lvolution de ladministration publique au regard des thories de lorganisation...............................................................p. 20 1.3.5 Repres situant la coopration IO dans la coordination..............p. 22

    1.4 La question de recherche............................................................................p. 26

    Chapitre 2 : Recension des crits... .p. 28

    2.1 Lunivers de recherche et les objets dtude..p. 28 2.2 Perspectives thoriques et disciplinaires....................................................p. 32 2.3 Le quoi (les dfinitions)......... p. 36 2.4 Le pourquoi la coopration.... p. 51 2.5 Le comment et le quand de la coopration.... p. 59

    2.5.1 La gouvernance des rapports IO..... p. 59 2.5.2 La confiance et le contrat... p. 67 2.5.3 Le leadership.. p. 74 2.5.4 Les caractristiques de nature organisationnelle.........................p. 79 2.5.5 Les caractristiques de nature individuelle. p. 90 2.5.6 La dimension spatio-temporelle p. 94 2.5.7 Le pouvoir p. 98 2.5.8 Les conflits p. 104

    2.6 Le qui et avec qui de la coopration............ p. 107 2.7 Les rsultats de la coopration.... p. 113 2.8 Conclusion gnrale du chapitre.. p. 119

    Chapitre 3 : Cadre thorique et mthodologie........... p. 125

    3.1 Cadre thorique et conceptuel..p. 125 3.1.1 Rappel de la recherche de Bouckaert, Peters et Verhoest.p. 126 3.1.2 Bnfices et limites de ce cadre conceptuel. p. 128 3.1.3 Complment au cadre conceptuel avec lanalyse des types de relations inter organisationnelles...p. 133 3.1.4 Posture pistmologique et ontologique....................................p. 136

  • xiii

    3.1.5 Dfinition des termes...............................................................,.p. 141 3.2 Mthodologiep. 144

    3.2.1 Technique de cueillette des donnes. p. 145 3.2.2 chantillonnage p. 145 3.2.3 Priode couverte par la recherche..p. 147 3.2.4 Considrations thiques.p. 148 3.2.5 Stratgie danalyse et dinterprtation des donnes et rsultats p. 148 3.2.6 Validation des donnes...p. 149 3.2.7 Outillage. p. 150

    Chapitre 4 : La coopration inter organisationnelle et la coordination au Qubec : situation en 1976 p. 151

    4.1 La situation de la spcialisation, de la coordination et de la coopration p.152 4.1.1 Aperu de ltat qubcois en 1976..........................................p. 152 4.1.2 La spcialisation et les mcanismes de coordination en 1976...p. 156

    4.1.2.1 Au niveau 1 : lappareil politique.......................................p. 156 4.1.2.2 Au niveau 2 : les ministres............................................... p. 161 4.1.2.3 Au niveau 3 : les organismes autonomes............................p. 171 4.1.2.4 Rforme en continu du gouvernement et de ladministration 176

    4.1.3 Les instruments et mcanismes de coordination en 1976...........p. 190 4.1.3.1 Classement des instruments et mcanismes de coordination..190 4.1.3.2 Mcanismes de coordination hirarchique..........................p. 193 4.1.3.3 Mcanismes de coordination par rseau..............................p. 194 4.1.3.4 Mcanismes de coordination de type march......................p. 198

    4.1.4 Conclusion quant la spcialisation, aux mcanismes de coordination et la coopration IO en 1976............................................................p. 199

    4.2 tat de situation quant aux relations inter organisationnelles en 1976......p. 203

    Chapitre 5 : La coopration inter organisationnelle et la coordination au Qubec : situation de 1976 1985 (priode 2)................................................p. 207

    5.1 La situation de la spcialisation, de la coordination et de la coopration.....207 5.1.1 Aperu de la situation de 1976 1985.......................................p. 207 5.1.2 tat de situation de la spcialisation et des mcanismes de coordination........................................................................................p. 210

    5.1.2.1 Changements au niveau 1 : lappareil politique.................p. 210 5.1.2.2 Changements au niveau 2 : les ministres..........................p. 247 5.1.2.3 Changements au niveau 3 : les organismes autonomes......p. 248 5.1.2.4 Changements dans la dynamique administrative................p. 256

    5.1.3 Les instruments et mcanismes de coordination en priode 2....p. 270 5.1.3.1 Classement des instruments et mcanismes de coordination 270 5.1.3.2 Mcanismes de coordination hirarchique..........................p. 273 5.1.3.3 Mcanismes de coordination par rseau..............................p. 275 5.1.3.4 Mcanismes de coordination de type march......................p. 279

    5.1.4 Conclusion quant la spcialisation, aux mcanismes de coordination et la coopration IO pour la priode 2 : 1976-1985......................... p. 281

  • xiv

    5.2 tat de situation quant aux relations inter organisationnelles en priode 2...285 5.3 Liens avec nos questions de recherche.......................................................p. 288

    Chapitre 6 : La coopration inter organisationnelle et la coordination au Qubec : situation de 1985 1994 (priode 3).................................................p. 291

    6.1 La situation de la spcialisation, de la coordination et de la coopration .p. 291 6.1.1 Aperu de la situation de 1985 1994........................................p. 291 6.1.2 tat de situation de la spcialisation et des mcanismes de coordination..........................................................................................p. 295

    6.1.2.1 Changements au niveau 1 : lappareil politique...................p. 295 6.1.2.2 Changements au niveau 2 : les ministres............................p. 331 6.1.2.3 Changements au niveau 3 : les organismes autonomes........p. 334 6.1.2.4 Changement dans la dynamique administrative...................p. 339

    6.1.3 Les instruments et mcanismes de coordination en priode 3.....p. 352 6.1.3.1 Classement des instruments et mcanismes de coordination 352 6.1.3.2 Mcanismes de coordination hirarchique...........................p. 355 6.1.3.3 Mcanismes de coordination par rseau..............................p. 357 6.1.3.4 Mcanismes de coordination de type march......................p. 360

    6.1.4 Conclusion quant la spcialisation, aux mcanismes de coordination et la coopration IO pour la priode 3 : 1985-1994......................... p. 361

    6.2 tat de situation quant aux relations inter organisationnelles en priode 3... 369 6.3 Liens avec nos questions de recherche.......................................................p. 374

    Chapitre 7 : La coopration inter organisationnelle et la coordination au Qubec : situation de 1994 2003 (priode 4).................................................p. 376

    7.1 La situation de la spcialisation, de la coordination et de la coopration. p. 376 7.1.1 Aperu de la situation de 1994 2003........................................p. 376 7.1.2 tat de situation de la spcialisation et des mcanismes de coordination..........................................................................................p. 381

    7.1.2.1 Changements au niveau 1 : lappareil politique...................p. 381 7.1.2.2 Changements au niveau 2 : les ministres............................p. 414 7.1.2.3 Changements au niveau 3 : les organismes autonomes........p. 417 7.1.2.4 Changement dans la dynamique administrative...................p. 428

    7.1.3 Les instruments et mcanismes de coordination en priode 4.....p. 453 7.1.3.1 Classement des instruments et mcanismes de coordination 453 7.1.3.2 Mcanismes de coordination hirarchique...........................p. 457 7.1.3.3 Mcanismes de coordination par rseau...............................p. 459 7.1.3.4 Mcanismes de coordination de type march.......................p. 463

    7.1.4 Conclusion quant la spcialisation, aux mcanismes de coordination et la coopration IO pour la priode 4 : 1994-2003......................... p. 465

    7.2 tat de situation quant aux relations inter organisationnelles en priode 4... 471 7.3 Liens avec nos questions de recherche.......................................................p. 476

    Chapitre 8 : Analyse et discussion des rsultats......................................................... .p. 479 8.1 Les diffrentes dimensions de la coopration IO et les cadres thoriques

  • xv

    et mthodologiques pour lexaminer................................................................p. 480 8.2 Synthse des quatre priodes quant la coopration IO et la coordination......................................................................................................p. 480 8.3 La trajectoire de ltat qubcois en matire de coordination et de coopration IO et une comparaison avec sept pays de lOCDE.......................p. 489

    8.3.1 La situation de la coordination et de la coopration dans sept pays de lOCDE............................................................................p. 489 8.3.2 La situation de la coordination et de la coopration au Qubec......494 8.3.3 Comparaison de la trajectoire de la coordination et de la coopration IO au Qubec avec celle de certains pays de lOCDE.....p. 500

    8.4 Dfinition oprationnelle de la coopration inter organisationnelle..........p. 504 8.5 Lencadrement de la coopration IO dans ladministration publique qubcoise de 1976 2003...............................................................................p. 505 8.6 La proposition vrifier.............................................................................p. 527 8.6.1 Les facteurs internes ou externes comme moteurs de changement....p. 527 8.6.2 Les acteurs les plus dterminants dans le dclenchement des changements................................................................................................p. 531 8.7 Liens entre nos rsultats et dautres recherches ........................................p. 536 8.8 Contribution, limites et porte de notre recherche.....................................p. 542 8.9 Pistes pour dautres recherches...................................................................p. 548

    Conclusion....................................................................................................................p. 551 Bibliographie................................................................................................................p. 562

    Annexe I : Tableau des types de relations IO des MO de ladministration gouvernementale qubcoise : illustrations et rfrences (situation en 2012).................................p. 576

    Appendice I : Complments au chapitre 5...................................................................p. 583 Appendice II : Complments au chapitre 6..................................................................p. 607 Appendice III : Complments au chapitre 7 ................................................................p. 647

  • xvii

    Liste des tableaux

    Tableau 1 Objets dtude (dimensions et attributs) dans les recherches sur les rapports IO daprs le Handbook dOxford (2008) .. p. 29 Tableau 2 Exemples de facteurs de succs de la collaboration.p. 34 Tableau 3 Niveaux de coordination du plus haut au plus bas. p. 39 Tableau 4 Termes gnralement utiliss concernant les entits inter

    organisationnelles p. 41 Tableau 5 Facteurs favorisant ou gnant la collaboration p. 86 Tableau 6 Principes pour la rsolution de conflits de rseaux p. 92 Tableau 7 Paradoxes confrontant les managers publics collaboratifs p. 93 Tableau 8 Les dynamiques du pouvoir IO. p. 102 Tableau 9 Extraits des perspectives issues des recherches de Huxham et Vangen sur les relations IO... p. 117 Tableau 10 Typologie des mcanismes et types dinstruments de coordination selon Bouckaert et al. p. 130 Tableau 11 Les formes de la coordination selon les divers mcanismes. p. 131 Tableau 12 Types des relations IO entre des MO de ladministration publique qubcoise selon laxe de la relation : vertical et horizontal (tat de situation en 2012)...p. 135 Tableau 13 Fonctions exerces par les personnes ayant comment les projets de chapitres de rsultatsp. 149 Tableau 14 Classement des instruments de coordination dans la nomenclature des types dinstruments et des mcanismes de coordination de Bouckaert et al. : situation en 1976.......................................................................p. 190 Tableau 15 Budgets et effectifs du programme 3 du MCE de 1975-76 1985-86... 218 Tableau 16 Tableau des mouvements institutionnels : les ministres (1960-1985) 247 Tableau 17 Tableau des mouvements institutionnels : les organismes (1960-1985) 248 Tableau 18 Lensemble des organismes, anciens et existants, et les gouvernements qui les ont crs (au Qubec).................................................................p.249 Tableau 19 Classement des instruments de coordination dans la nomenclature des types dinstruments et des mcanismes de coordination de Bouckaert et al. : priode 1976-1985 au Qubec...................................................p. 270 Tableau 20 Les tudes, enqutes et consultations par priodes de gouvernement : 1960 1994...........................................................................................p. 299 Tableau 21 Les mesures administratives par priode de gouvernement : de 1960 1994...........................................................................................p. 299 Tableau 22 Tableau des mouvements institutionnels : ministres (1960-1994)......p. 333 Tableau 23 Tableau des mouvements institutionnels : organismes (1960-1994)....p. 334 Tableau 24 Classement des instruments de coordination dans la nomenclature des types dinstruments et des mcanismes de coordination de Bouckaert et al. : priode 1985-1994 au Qubec....................................................p. 352 Tableau 25 Tableau des mouvements institutionnels : ministres (1960-2003)......p. 414 Tableau 26 Tableau des mouvements institutionnels : organismes (1960-2003)....p. 417

  • xviii

    Tableau 27 Classement des instruments de coordination dans la nomenclature des types dinstruments et des mcanismes de coordination de Bouckaert et al. : priode 1994-2003 au Qubec...................................................p. 453 Tableau 28 Rseaux interministriels pour les titulaires demplois suprieurs la fin de la priode 3 (1994)................................................................. p. 633 Tableau 29 Rseaux interministriels pour les gestionnaires et les spcialistes la fin de la priode 3 (1994)...............................................................p. 641 Tableau 30 Types dinstruments de coordination et de coopration IO utiliss durant les

    quatre priodes (1976-2003).................................................................p. 481 Tableau 31 Principales caractristiques de la dynamique sur les thmes de ltat, des

    organes centraux, des rformes, des mcanismes de coordination et de coopration IO dans ladministration publique qubcoise (1976 2003).....................................................................................................p. 483

    Tableau 32 volution des domaines et types de relations IO des MO de ladministration gouvernementale qubcoise selon laxe de la relation, de 1976 (position initiale) 2003......................................................................................p. 487

  • xix

    Liste des figures et schmas

    Schma 1 Rapports IO simplifis entre MO lintrieur et lextrieur de ladministration publique.............................................................p. 11 Schma 2 Formes de relations lintrieur de ladministration publique (schma

    simplifi).......................................................................................p. 12 Schma 3 Spcialisation et coordination au Qubec : situation en 1976.... p. 158 Schma 4 Types de relations IO entre MO de ladministration gouvernementale

    qubcoise en 2012.....................................................................p. 203 Schma 5 Types de relations IO entre MO de ladministration gouvernementale

    qubcoise en 1976 sur la base du canevas de 2012....................p. 204 Schma 6 Spcialisation et coordination au Qubec : 1976-1985 P2..........p. 209 Schma 7 Types de relations IO entre MO de ladministration gouvernementale

    qubcoise en 1985 sur la base du canevas de 2012...................p. 287 Schma 8 Spcialisation et coordination au Qubec : 1985-1994 P3..........p. 293 Schma 9 Types de relations IO entre MO de ladministration gouvernementale

    qubcoise en 1994 sur la base du canevas de 2012...................p. 371 Schma 10 Spcialisation et coordination au Qubec : 1994-2003 P4..........p. 380 Schma 11 Types de relations IO entre MO de ladministration gouvernementale

    qubcoise en 2003 sur la base du canevas de 2012....................p. 473 Schma 12 Proportion des manifestations observes dinstruments de

    coordination hirarchique et de coopration (rseau et march) pour les quatre priodes (1976 2003).................................................p.480

    Schma 13 Les trajectoires des sept pays de lOCDE selon ltude de Bouckaert et al................................................................................................p.489

    Schma 14 Trajectoire effective de coordination du Qubec compare la trajectoire projete pour les sept pays de lOCDE.......................p. 501

  • xxi

    Liste des abrviations, sigles et acronymes

    ADICO Attributes, deontic, aims, conditions, or else (rgle) ADIC Attributes, deontic, aims, conditions (norme) AIC Attributes, aims, conditions (stratgie) ANQ Assemble nationale du Qubec BAPE Bureau daudiences publiques sur lenvironnement CAP Commission de ladministration publique CCGP Comit consultatif de la gestion du personnel CD Cdrom CE Conseil excutif CFP Commission de la fonction publique CLD Centre local de dveloppement CM Conseil des ministres CMOT Comit ministriel sur lorganisation du travail CRD Conseil rgional de dveloppement CSOT Comit sectoriel sur lorganisation du travail CSPQ Centre de services partags du Qubec CT Conseil du trsor CT Dcision du Conseil du trsor CTED Centre de traitement lectronique des donnes DDEP Dveloppement durable, environnement et parcs DRA Direction de la rforme administrative EIO Entits inter organisationnelles GIRES Systme de gestion intgre des ressources HTM Mcanismes de type hirarchique IAPC Institut dadministration publique du Canada ICC Interagency collaboration capacity IOC Interorganizational coordination IO Inter-organisationnel LAF Loi sur ladministration financire LAP Loi sur ladministration publique LFP Loi sur la fonction publique LRQ Lois refondues du Qubec MCE Ministre du Conseil excutif MO Ministres et organismes MTM Mcanismes de type march NTM Mcanismes de type rseau NMP Nouveau management public OBNL Organisme but non lucratif OCDE Organisation pour la coopration et le dveloppement conomique ONG Organismes non gouvernementaux ORH Office des ressources humaines ORSP Office du recrutement et de la slection du personnel

  • xxii

    PDG Prsident-directeur gnral PLQ Parti libral du Qubec PM Premier ministre PQ Parti qubcois RIO Relations inter organisationnelles SAGIP Systme automatis de gestion du personnel SAGIR Solutions daffaires en gestion intgre des ressources SAGMAI Secrtariat des activits gouvernementales en milieu amrindien et

    inuit. SCT Secrtariat du Conseil du trsor SES Secrtariat aux emplois suprieurs SM Sous-ministres SMDO Sous-ministres, dirigeants et dirigeantes dorganisme SQ Suret du Qubec SRAES Secrtariat la rforme administrative et aux emplois suprieurs SYGBEC Systme de gestion budgtaire et comptable TCE Transaction Cost Economics TIC Technologie de linformation et des communications VG Vrificateur gnral

    ......................

    N. B. : De plus, avec les schmas prsentant la situation de la spcialisation et de la coordination au Qubec au dbut des chapitres 4, 5, 6 et 7, nous prsentons une liste des sigles des ministres et organismes utiliss dans le chapitre.

  • 1

    Introduction

    Comme fonctionnaire dans ladministration publique qubcoise de 1972 2007, dont les

    27 dernires annes comme cadre, nous avons rgulirement t aux prises avec la

    complexit des relations entre units administratives de notre ministre ou organisme,

    surtout quand il sagissait de mettre des ressources en commun pour raliser un projet.

    Responsable de projets ou de la mise en uvre de programmes ou de dcisions

    gouvernementales en gestion des ressources humaines sappliquant lensemble des

    ministres et organismes, nous avons aussi observ des obstacles la collaboration entre

    ces entits alors que cette voie paraissait la plus indique pour diverses raisons (conomie

    et efficacit notamment). Nayant pas russi lucider cette problmatique des relations de

    coopration inter organisationnelle (IO) durant ces annes de pratique, nous avons pens y

    mettre le temps et les efforts requis au moment de la retraite.

    Cest pourquoi nous avons entrepris des tudes doctorales quelques annes avant de

    prendre notre retraite et de consacrer notre recherche doctorale cette problmatique, avec

    lespoir que les rsultats de cette dmarche puissent tre utiles aux praticiens et aux

    chercheurs. Tous ceux et celles qui nous avons fait part de notre projet ( lintrieur de

    ladministration, luniversit) ont trouv quil y avait l matire rflexion et plusieurs

    nous ont offert leur collaboration.

    Nous avons choisi initialement dexaminer les conditions de la coopration entre les

    ministres et organismes (MO) dune administration publique que nous connaissons bien.

    Aprs la recension des crits sur le sujet et les observations des membres du comit qui

    sest pench sur notre proposition de thse, nous avons vu la ncessit de rduire notre

    champ dinvestigation la toile de fond et larmature qui servent dassises la

    coopration entre les organisations dune administration publique, objet dtude que nous

    dsignerons par le concept englobant dencadrement de la coopration IO. Ltat de la

    connaissance dans le champ dtudes des relations IO nous a convaincu des nombreux

    obstacles une approche visant tablir avec solidit les conditions favorables et

    dfavorables la coopration IO, lexercice visant tablir des relations de causes effets

    comportant un haut coefficient de difficult.

  • 2

    De nombreuses recherches ont t consacres ces dernires dcennies aux relations entre

    les organisations : elles portaient sur la nature de la relation, les motivations, les modalits,

    le moment propice et aussi les rsultats obtenus. Pas moins de 46 objets dtudes ont t

    rpertoris, mais les rapports de coopration IO lintrieur des administrations publiques

    ont t peu tudis. Avec un tel foisonnement de perspectives thoriques, les consensus

    nont pas encore merg, notamment sur une dfinition de la coopration IO.

    Rares sont les recherches qui ont fait de la coopration IO entre organisations dune

    administration publique leur objet principal de recherche. Ceux qui sen rapprochent le plus

    abordent un aspect de la question, comme les stratgies de collaboration ou les facteurs qui

    influencent le partage de connaissances. Dautres recherches abordent la coopration IO

    travers ltude de la coordination gouvernementale, sans toutefois donner de dfinition

    prcise de la coopration IO, celle-ci tant prsente davantage comme un sous-ensemble

    de la coordination. Elles nous rvlent nanmoins que dautres formes de coordination ont

    t introduites dans les organisations publiques, surtout qualifies de forme de rseau et de

    march en complment et parfois en concurrence avec la forme dominante du modle

    bureaucratique, la coordination de type hirarchique et que ces formes se combinent tout en

    changeant de configuration.

    Dans ltat qubcois, la perception de problmes lis une insuffisance de relations entre

    les organisations de ladministration publique, leffet silo, merge dans les annes 1970.

    Ltat a alors bien investi la plupart de ses champs de comptence et sest donn des

    structures et un mode de fonctionnement de niveau comparable aux autres gouvernements

    du Canada, lui permettant dassumer ses missions. Ltat vit cependant une sorte de crise

    de croissance au niveau de la coordination centrale en raison de la quantit et de la vitesse

    des changements survenus depuis le dbut des annes 1960, avec une augmentation

    considrable de ses effectifs et lintroduction de la syndicalisation de centaines de milliers

    demploys. Les instruments de coordination hirarchique ne suffisent plus grer le flot

    des dcisions prendre et les limites du mcanisme se font jour. De nouveaux modes de

    relations IO sont requis. Pendant ce temps, un discours sarticule dans les pays de lOCDE,

    appuy par des courants de recherche, pour dcrier le modle bureaucratique et ses carences

  • 3

    et proposer son remplacement par des modes de gestion prsents comme plus performants,

    savoir le march et le rseau ; un autre discours propose de mixer ces diffrents modes de

    coordination et, en raison de louverture des dirigeants politiques et administratifs aux ides

    et pratiques venant de lextrieur, ces conceptions trouvent un cho au Qubec. Les crises

    conomiques et les dficits budgtaires qui se creusent augmentent leffet de

    questionnement sur le fonctionnement de ltat.

    Au milieu des annes 1970, au Qubec comme ailleurs, un constat se rpand sur la

    pertinence de retoucher le fonctionnement de ltat. De nouveaux modes de relations IO

    sont requis et comme lintroduction dinstruments de coopration nouveau genre ne va pas

    de soi dans une logique domine par les rapports hirarchiques, des changements devront

    tre apports aux structures et au fonctionnement de ltat, changements que nous avons

    choisi de retracer en examinant lencadrement de la coordination et au premier titre, celui

    qui concerne la coopration IO. Par encadrement nous rfrons tout lment pouvant

    influencer, orienter, guider, ou dicter la conduite des organisations ltude et des acteurs

    qui en font partie : ces lments proviennent de discours et de dispositions manant de

    textes mis ou convenus par les organismes de gouverne de ltat et les dirigeants des MO.

    Do la question centrale de notre recherche : Quelles formes prennent lencadrement et

    lvolution de la coopration inter organisationnelle dans ladministration publique

    qubcoise entre 1976 et le dbut des annes 2000 ? Nous aurions pu nous en tenir

    dresser un tat de situation un moment donn dans le temps, le plus rcent possible, mais

    comme les recherches le relatent et que notre exprience le confirme pour le Qubec, il y a

    de grandes diffrences entre le cadre de gestion gouvernementale des annes 1970 et celui

    des annes 2000 : nous pensons quune forme dtude longitudinale nous en apprend

    davantage en nous montrant lhistorique des changements et nous donne la possibilit de

    les comparer avec dautres administrations publiques.

    Parmi les cadres conceptuels que nous avons considrs, nous optons pour celui utilis par

    Boukaert, Peters et Verhoest pour ltude de la coordination au sein de sept pays de

    lOCDE, avec une approche qui mise sur les mcanismes et instruments de type

    hirarchique, de type march et de type rseau. Comme cette approche ne va pas aussi loin

  • 4

    que nous le souhaitons sur lexamen des types de relations IO, nous compltons cette

    analyse en utilisant une grille que nous avons mise au point pour lexamen des types de

    relations IO selon laxe vertical (hirarchique) et laxe horizontal (coopratif), avec laide

    dauteurs tels Metcalfe et J. Bourgault.

    Comme les rsultats de la recherche de Bouckaert et al. indiquent que certains pays de

    lOCDE ont t fortement influencs par les ides du courant du nouveau management

    public (NMP) dans leur rvision du rle et du fonctionnement de ltat, nous accorderons

    une attention particulire lorigine des facteurs (externes/internes) qui influenceront le

    plus les changements. De plus, comme les leaders occupent une place importante dans un

    grand nombre de recherches sur les relations IO et que notre objet de recherche vise

    lencadrement de la coopration IO, nous serons aussi attentifs aux donnes nous

    renseignant sur les rles jous par les autorits politiques et administratives, en prenant bien

    soin de distinguer la contribution des lus qui font partie du gouvernement de ceux qui nen

    font partie et qui consacrent lessentiel de leur travail la fonction lgislative. Nous

    traduirons ces interrogations complmentaires dans une proposition vrifier.

    Pour guider notre dmarche, nous tenterons de rpondre quatre sous-questions qui nous

    mnerons la question principale et la proposition vrifier. La premire vise cerner ce

    que les recherches antrieures nous apprennent sur les diffrentes dimensions de la

    coopration IO et les cadres thoriques et mthodologiques pour en faire lexamen. La

    deuxime a trait la qualification de la trajectoire suivie par ltat qubcois en matire de

    coordination et de coopration IO, alors que la troisime concerne la comparaison avec les

    trajectoires suivies par sept pays de lOCDE. La quatrime question mne la proposition

    dune dfinition oprationnelle de la coopration IO valable pour ladministration publique

    qubcoise qui pourra aussi tre adapte pour servir de dfinition gnrale dautres

    recherches.

    Notre univers de travail est constitu des ministres et organismes de ladministration

    publique qubcoise. Le laps de temps couvert va de 1976 2003 : suivant en cela le mode

    de dcoupage suivi par Bouckaert et al., nous procderons lanalyse en suivant les

    priodes de gouvernement. Dans le cas du Qubec, deux partis politiques ont altern durant

  • 5

    cet intervalle, le Parti libral ayant exerc le pouvoir de 1970 1976, puis de 1985 1994,

    relay par le Parti qubcois de 1976 1985 et de 1994 2003, des priodes gales de 9 ans

    partir de 1976. Nous pourrons donc examiner lvolution de la situation en quatre temps

    partir de ltat des lieux prvalant en 1976 et comparer avec ltude de Bouckaert et al.

    (1980 2005). Nous misons sur des sources documentaires pour rassembler notre matriel

    et sur le regard de hauts fonctionnaires et de cadres ayant exerc des fonctions stratgiques

    durant cette priode pour valider nos chapitres empiriques.

    Le plan de travail1

    Les trois premiers chapitres jetteront les bases pour lexploration de notre objet de

    recherche : il sagit du chapitre qui expose la problmatique et la question de recherche, du

    chapitre sur la recension des crits et du chapitre consacr au cadre thorique et la

    mthodologie.

    La prsentation des rsultats viendra dans les quatre chapitres suivants qui exposent et

    analysent lencadrement de la coopration IO, ltat de la spcialisation, de la coordination

    et de coopration IO au sein de ltat qubcois, les mcanismes et types dinstruments de

    coopration IO et de coordination en usage, ainsi que les types de relations IO luvre

    pour chaque priode allant de 1976 2003 : le premier chapitre dresse ltat de situation en

    1976 et les trois chapitres suivants prsentent la situation correspondant aux trois

    gouvernements qui se sont succd, tout en faisant le lien avec les priodes antrieures.

    Le chapitre 8 sera consacr lanalyse et linterprtation de lensemble des rsultats en

    reprenant nos sous-questions, notre question principale et notre proposition, suivies dun

    expos des liens que nous pouvons faire entre nos rsultats et ceux dautres chercheurs.

    Pour dbuter ce chapitre, nous prsenterons une synthse des rsultats des chapitres

    empiriques. Pour le complter, nous exposerons la contribution, les limites et la porte de

    notre recherche aux plans thorique et empirique et nous indiquerons certaines pistes pour

    dautres recherches.

    1 Le genre masculin est parfois utilis dans le prsent document afin dviter dalourdi le texte.

  • 6

    CHAPITRE 1 : PROBLMATIQUE ET QUESTION DE RECHERCHE

    1.1 La perception de la problmatique

    Jusque dans les annes 1970, les relations entre ministres et organismes ne paraissent pas tre

    un enjeu reconnu pour la ralisation des missions gouvernementales. Cet enjeu (il faudra le

    vrifier) a merg avec la perception de problmes attribus une insuffisance de relations entre

    les organisations du gouvernement, phnomne identifi communment sous lexpression de

    travail en silo (ou chemine) , les organisations tant pointes du doigt pour ne pas se

    proccuper adquatement des consquences de leurs dcisions et actions sur la mission des

    autres organisations ; au plan de la gestion des ressources, il y a le constat de projets similaires se

    ralisant dans plusieurs organisations signorant mutuellement, entranant pour le gouvernement

    des cots plus levs que requis, premire vue.

    Pour faire face ce nouvel enjeu, de nouveaux types de relations paraissaient requis, allant au-

    del des mcanismes de coordination fonds sur un rapport hirarchique entre les instances

    centrales du gouvernement et les composantes de ladministration (le vertical), pour se

    dvelopper dans un rapport plus partenarial, plus galitaire (lhorizontal) entre organisations

    nayant pas le pouvoir de contraindre l'action des autres. Cest cette dimension horizontale des

    relations inter organisationnelles, nous la qualifions de coopration inter organisationnelle ,

    que nous voulons examiner dans cette recherche. Cette dmarche nous parat justifie aprs la

    recension des crits sur la question, car il y a un consensus des chercheurs, malgr les nombreux

    textes publis, sur la ncessit dexplorer un champ peine effleur. De plus, cest notre

    intuition, il pourrait sagir du courant ayant le plus grand potentiel de transformation de ltat et

    de son administration publique. En effet, si les ressources alloues aux ministres et organismes

    sont plus souvent stables ou en dclin quen augmentation relle, le potentiel dont disposent deux

    organisations ou plus mettant en commun des ressources pour raliser des projets parat

    considrable au strict plan de la capacit dagir; mais cette coopration apparat plus

    fondamentale encore lorsquelle est indispensable la prvention ou la rsolution de

    problmatiques tatiques.

    Considrant que la coopration a une connotation positive, si la coopration inter

    organisationnelle allait de soi, il suffirait que les dirigeants en souhaitent la pratique pour quelle

    se concrtise. Or, nous constatons que plusieurs tudes et dcisions gouvernementales ont suivi

  • 7

    le constat du cloisonnement entre ministres et organismes (MO) et que les mesures mises en

    uvre nont pas toutes t menes terme, des annes plus tard. Et premire vue, les

    modifications en cours ont des consquences importantes sur la gestion gouvernementale et celle

    de chaque MO.

    En considrant les tudes, les dcisions et le discours officiel entourant cet enjeu, nous observons

    que ladministration publique nest pas seule en cause. Les institutions politiques, tant le

    lgislateur que le gouvernement, sont intervenues pour reconnatre une problmatique et

    participer des solutions. Sachant que certaines dcisions exigent plusieurs mois, des annes

    parfois, avant dtre mises en uvre, nous nous emploierons en retracer lvolution.

    Pour comprendre la coopration IO dans ladministration publique qubcoise, nous pensons

    quil peut tre clairant de mettre au jour lencadrement touchant ce type de relations entre les

    ministres et organismes en assumant quil constitue la toile de fond et fournit larmature

    pouvant habiliter, faciliter ou contraindre les rapports coopratifs entre ces entits.

    Les relations IO ont fait lobjet de plusieurs recherches. Mais sur un aspect des relations IO, la

    coopration, sur les thmes de la nature de la relation, sur sa pratique, sur lvaluation des

    rsultats et des effets et quant au type dorganisation examine (le secteur public), le constat

    gnralis dbouche sur un appel dautres recherches. Beaucoup dcrits scientifiques sur les

    rapports IO dans diffrents contextes (priv, public, priv/public) offrent un ventail de thories

    et de propositions sur les diffrentes facettes de ces rapports, cependant, aux dires des

    chercheurs, elles en sont aux premiers stades de lexprimentation et par ailleurs, bien peu nous

    clairent sur lunivers particulier de la coopration IO dans ladministration publique. Et lune

    des difficults majeures que lon rencontre dentre de jeu concerne la dfinition de la

    coopration IO, les termes coordination, collaboration, coopration tant souvent utiliss lun

    pour lautre dans les recherches et la pratique. Pourtant, disposer dune dfinition oprationnelle

    de la coopration IO entre les entits dune administration publique et pouvoir y associer

    lencadrement de son exercice constitueraient des apports thorique et pratique significatifs pour

    la comprhension et lamlioration du management public.

    notre connaissance, il ny a pas de recherche en tout point comparable la ntre sur

    ladministration publique qubcoise; nous nen avons pas trouv non plus sur dautres

  • 8

    administrations publiques qui exploraient la mme question avec la mme perspective, bien que

    certaines sen rapprochent et nous les exploiterons.

    1.2 La rponse anticipe cette recherche

    Pour clairer le lecteur sur notre comprhension de la problmatique et nous servir de guide dans

    lvolution de la recherche, nous avons rsum dans le passage suivant ce que nous anticipons

    dcouvrir au terme de notre investigation, notre vision de dpart de la trajectoire suivie par ltat

    qubcois en ce qui a trait aux relations IO et plus particulirement la coopration IO.

    La recherche pourrait dmontrer que la question de la coopration entre MO occupe une place

    marginale dans le discours sur la gestion de ltat qubcois, mais que dans la partie qui lui est

    consacre, la mise au point dun encadrement consquent est au cur des discours et des actions

    des acteurs politiques et administratifs du Qubec depuis que la problmatique des silos et du

    besoin de travailler ensemble a merg au cours des annes 1970.

    Cette prise de conscience du problme et de sa solution sinscrit dans une trajectoire combine

    des acteurs politiques et administratifs visant la fois liminer le patronage, assurer une

    meilleure reprsentativit de la population dans la fonction publique, augmenter lefficacit de

    ladministration, rduire les cots, amliorer les services aux citoyens, assurer la cohrence

    de laction gouvernementale et rendre les acteurs administratifs imputables de leur gestion

    devant le politique.

    Pour les acteurs de l'administration, labondance et la rigidit des rgles ainsi que labsence de

    dispositions facilitatrices sont, de faon continue et insistante, au cur des dolances sur les

    difficults remplir la mission confie par le lgislateur et le gouvernement ainsi que des

    revendications pour amliorer la performance de ladministration. La question des frontires

    ( silos ) et de la coopration entre les organisations proccupe surtout les organismes centraux

    de gouverne et des lus, alors que les ministres et organismes recherchent plus de marges de

    manuvre et de moyens pour accomplir leur mission, la question de la coopration savrant

    accessoire (un moyen daction parmi dautres et pas le plus simple) par rapport la ralisation de

    la mission de lorganisation.

    Pour les acteurs politiques, les problmatiques relies la gestion de ladministration publique

    suscitent un niveau dintrt bas et pisodique. Les gouvernements sy intressent lorsquils

    peroivent un gain possible pour les citoyens et les entreprises, pour la diminution des dpenses

  • 9

    ou pour lamlioration du contrle. Lintervention du lgislateur et des gouvernements se

    manifeste alors principalement par des changements aux dispositions qui affectent la gestion des

    ministres et organismes. Ces changements vont largement dans le sens souhait par les

    dirigeants de ladministration publique. Le gouvernement sest dailleurs progressivement donn

    des moyens pour consulter son administration et les reprsentants du personnel sur la gestion de

    ladministration publique (syndicats et associations). Pour le politique, la problmatique des

    silos et la coopration inter organisationnelle tiennent une place marginale dans le discours et

    au sein du gouvernement, ces questions proccupent principalement les ministres la tte

    dorganismes centraux et de ministres rseaux, alors que les autres ministres sont

    particulirement sensibles leurs obligations en vertu du principe et de la pratique de la

    responsabilit ministrielle.

    Parmi les pisodes importants de lintervention politique dans la gestion de ladministration

    publique, la cration de Services Qubec et du Centre de services partags du Qubec en 2005

    peut tre vue comme un moyen pour forcer une coopration qui ne prenait pas forme avec les

    moyens mis en place par le cadre de gestion de 2000 (Loi sur ladministration publique [LAP],

    Loi sur ladministration financire [LAF]), malgr les appels du gouvernement du Parti libral

    lu en 2003 pour une amlioration du service et des conomies dchelle, ainsi que les travaux

    mens sous les gouvernements du Parti qubcois prcdents sur des projets qui touchaient la

    problmatique des silos et le potentiel de la coopration IO. Parmi ces projets rvlateurs,

    mentionnons les dclarations de services aux citoyens, les ententes de services entre ministres et

    organismes, les units autonomes de service et la filire lectronique (autoroute de linformation,

    changement dadresse, systmes intgrs de gestion des ressources (les projets GIRES

    [ systme de gestion intgre des ressources ] et SAGIR [ Solutions daffaires en gestion

    intgre des ressources ]), gouvernement lectronique).

    Une tendance lourde depuis les annes 1980 a t daccrotre la marge de manuvre et

    lautonomie des ministres et organismes et les obligations de reddition de comptes, avec pour

    effet douvrir une fentre la coopration volontaire entre ministres et organismes.

    Paradoxalement, elle a eu aussi pour consquence daccrotre leffet silo (effet non

    intentionnel) du fait de laccentuation de la visibilit de la responsabilit ministrielle,

    complexifie par le partage de la reddition de comptes entre le ministre et le sous-ministre ou

    dirigeant dorganisme.

  • 10

    Or, lencadrement de la gestion de ladministration publique a t conu pour une action guide

    par des rgles et une autorit hirarchique et les changements apports au cadre de gestion en

    2000 ont eu en partie pour effet de consolider cet arrangement. Par contre, les invitations la

    coopration inter organisationnelle nont t appuyes que progressivement de changements

    consquents cet encadrement, puis de faon plus articule en 2000 (possibilit dententes de

    services, de facturation, de cration de fonds, de report de crdits sur une autre anne, de

    facilitations dans le transfert deffectifs et de budgets entre organisations). Devant les rsultats

    mitigs par rapport aux attentes des organismes centraux, des dispositifs ont t crs ou

    modifis pour inciter et, en partie, forcer la coopration. Nous constaterons que la nouvelle

    instrumentation se met en place progressivement (linvitation la coopration lamiable tant

    dabord privilgie) et que des dispositions plus contraignantes et facilitantes viennent sajouter

    devant les progrs jugs insuffisants.

    1.3 Les paramtres de la problmatique

    1.3.1 Positionnement de lobjet de recherche

    Le cur de notre questionnement se situe donc dans laxe des relations horizontales entre les

    ministres et organismes engages sur une base galitaire, lintrieur de lunivers de travail que

    constitue ladministration publique qubcoise. Pour y parvenir, nous devrons aussi considrer

    laxe des relations verticales entre les MO bases sur des rapports hirarchiques dans le mme

    univers de travail, car la distinction entre ces types de rapports nest pas simple et fait partie de la

    recherche, mais aussi afin de bien situer la place de ces rapports coopratifs dans le dispositif

    gnral de coordination de ltat. Ce faisant, afin de mieux circonscrire notre objet de recherche,

    nous ne viserons pas lexamen des relations horizontales avec lextrieur de lunivers de travail,

    relations qui peuvent seffectuer avec les administrations rgionales et locales, la socit civile et

    le priv, les autres gouvernements et les institutions internationales ; ce qui ne nous empchera

    pas de les considrer au besoin pour mieux clairer lanalyse et des fins de comparaison avec

    dautres administrations. Illustrons notre positionnement dans le schma suivant, inspir des

    travaux de Christensen et Laegreid (2008) :

  • 11

    Schma 1

    Rapports IO simplifis entre MO lintrieur et lextrieur de ladministration publique

    National/International EXTERNE

    Administration locale/ Socit civile/priv ADMINISTRATION PUBLIQU National/ International

    EXTERNE Administration locale/ Socit civile/priv

    Le champ central de notre investigation est illustr par la ligne horizontale reprsentant les

    rapports entre les ministres et organismes lintrieur de ladministration publique, rapports qui

    seffectuent sur une base galitaire, la diffrence des rapports illustrs par la ligne verticale qui

    se ralisent sur la base de lautorit hirarchique.

    Pour enrichir la comprhension de notre approche cette problmatique, nous pouvons

    considrer le schma simplifi suivant illustrant petite chelle les principales formes de

    relations lintrieur de ladministration publique.

    ADMINISTRATION INTERNE

  • 12

    Schma 2

    Formes de relations lintrieur de ladministration publique (schma simplifi)

    Rapports hirarchiques

    Rapports coopratifs

    Rapports informels

    Ce schma est simplifi de deux manires : quant au nombre de MO qui seraient davantage au

    nombre de 220 au tournant des annes 2000 au Qubec et quant aux formes de rapports qui

    pourraient tre nuances au-del des trois formes considres et qui justifieraient un tel nombre

    de lignes pour reflter la ralit que les ovales disparaitraient sous les faisceaux. Les rapports

    hirarchiques sont illustrs par une ligne pleine sens unique dirige vers le bas, la forme la plus

    lmentaire de lautorit hirarchique qui sexerce lintrieur des MO, mais aussi en

    provenance des instances de gouverne sur les MO. Une flche pointille double sens sert

    montrer les rapports informels, voquant les multiples rapports dentraide et dajustement mutuel

    se ralisant lintrieur de chaque MO, mais aussi entre titulaires de diffrents MO. La cible

    prioritaire dans notre recherche prend la forme dune flche pleine lhorizontale, double sens,

    reliant les MO entre eux dans un mode coopratif, qui nest pas fond sur lexercice de lautorit

    hirarchique et qui prend une configuration formelle la diffrence des rapports informels.

    Organes dcisionnels et de coordination

    Ministre Ministre Ministre

    Organisme Organisme Organisme

    Organisme

    Organisme

  • 13

    Il aurait t possible dexaminer cet objet de recherche en tenant compte de ltat de situation

    un moment donn dans le temps, de constater les dispositifs alors en place et leurs

    caractristiques et de remonter dans le temps pour trouver lorigine de chacun ainsi que les

    motifs lappui de ces changements. Nous avons prfr suivre le cours du temps pour pouvoir

    mieux situer ces dispositifs de coopration dans leur contexte et analyser la dynamique de ces

    changements en les situant dans le cadre de coordination densemble de ltat qui sen trouve

    probablement modifi.

    Mais dans quel genre dadministration publique amorons-nous notre recherche si nous la

    dbutons dans les annes 1970? Quelques repres gnraux nous seront utiles pour camper notre

    problmatique sachant quun chapitre subsquent nous permettra de dfinir avec prcision ltat

    des lieux de ltat qubcois et son administration publique en 1976. Nous prsentons dabord

    quelques repres situant lvolution de ladministration publique en gnral, puis des repres

    concernant ladministration publique du Canada et du Qubec; par la suite, nous exposons des

    repres situant lvolution de ladministration publique au regard des thories de lorganisation,

    puis dautres situant la coopration IO dans la coordination densemble de ltat pour dboucher

    sur lnonc de notre question de recherche et de la proposition vrifier.

    1.3.2 Repres situant lvolution de ladministration publique en gnral

    Le modle type de bureaucratie trac par Max Weber au dbut du XXe sicle semble bien rigide

    et lmentaire quand on le compare la pratique dans nos administrations publiques

    contemporaines. Nanmoins, certaines de ces grandes caractristiques constituent encore

    larmature des organisations publiques actuelles. Prsente comme un produit parallle de

    lavnement de la dmocratie, la bureaucratie comporte toute une srie de caractristiques et de

    pratiques qui dfinissent et rduisent ses relations avec le politique par rapport aux modes de

    fonctionnement sous les empires et la royaut (Weber, 1968, p. 69).

    Si le rle des lus semble se confiner au cycle de dfinition des dispositions lgales dans sa

    relation avec ladministration, laction des dirigeants bureaucratiques apparat trs balise,

    spare du politique et comporter peu de marge de manuvre. Ils oprent dans un contexte o

    les aires dintervention ( jurisdictional ) sont fixes et officiellement dfinies par lois ou rgles

    administratives. Les activits rgulires sont attribues de manire dfinitive comme des tches

    officielles; lautorit hirarchique est strictement dfinie par des rgles et des dispositions

  • 14

    mthodologiques sont fournies pour lexcution des tches et lapplication des droits

    correspondants (idem : 66). Une fois tablie, le schma tend se perptuer bureaucracy is

    among those social structures which are the hardest to destroy (idem, p. 75) . Le personnel

    supervis apprend, applique et se conforme des rgles crites. Leur loyaut, en retour dune

    scurit de travail, ne va pas une personne, mais des buts impersonnels et fonctionnels, do

    les valeurs ne sont cependant pas absentes (idem, p. 69). Et parmi les travers de ce modle

    rationnel lgal, Weber signale notamment la routine oppressante et la rigidit. Tout en concevant

    que cette machine ne peut tre arrte sans risquer le chaos, il indique nanmoins que le sommet

    de la hirarchie ( the very top ) peut (lui seul) arrter ou faire dmarrer le mcanisme (idem, p.

    75), reconnaissant une certaine mallabilit au modle.

    Lide de rapports coopratifs IO formels lintrieur de ladministration publique napparat

    pas dans les grands principes de Weber. Au premier regard, deux piliers majeurs de la

    bureaucratie paraissent particulirement touchs par lintroduction de ce type de rapports :

    lautorit hirarchique et la dfinition de zones de responsabilits fixes par des lois et rgles

    administratives. Dans une perspective historique, nous percevons que la manifestation de

    rapports coopratifs formels dans lorganisation publique constitue une mutation importante des

    caractristiques du modle original et, ce qui pourrait tre peru comme paradoxal, mane de

    lautorit hirarchique qui introduit des amendements la dfinition des zones de responsabilits

    des diverses composantes de ltat. Nous pouvons concevoir que cette transformation sest

    tale sur une longue priode la lumire des changements de missions et de rgles, ainsi que

    des analyses produites par des praticiens et des chercheurs scrutant cette volution.

    Henri Fayol dcrit plus finement le fonctionnement de lorganisation avec ses six fonctions et ses

    quatorze principes gnraux dadministration. Il accorde une grande importance la fonction

    administrative qui comprend laction de coordonner (en plus de prvoir, organiser, commander et

    contrler). Avec le principe de hirarchie destin assurer la communication, la transmission par

    lunit de commandement, une forme de collaboration entre les units administratives doit

    prendre le dtour de la voie hirarchique pour pouvoir seffectuer : il considre toutefois lemploi

    de passerelles entre units pour concilier le respect du principe et lobligation daller plus

    vite, se basant sur un constat de fait qui ... comporte lhabitude dune certaine initiative tous

    les degrs de lchelle. (Fayol, 1916, p. 38-39)

  • 15

    Bien avant la conscration du phnomne, Fayol dcrivait leffet silo et la faon dy

    remdier. Concevant quil nest pas facile dans ltat davoir une ide nette de lintrt gnral,

    il dcrit ainsi la faon de contrer la force centrifuge rduisant lintrt gnral lchelle de la

    plus petite unit :

    Sil nest pas sans cesse raviv par lautorit suprieure, le sentiment de lintrt gnral sestompe, saffaiblit et chaque service tend se considrer comme tant lui-mme son but et sa fin ; il oublie quil nest quun rouage dune grande machine dont toutes les parties doivent marcher daccord ; il sisole, se cloisonne et ne connat plus que la voie hirarchique (Fayol, 1916, p. 39).

    Il considre que les services de ltat utilisent souvent des pratiques hirarchiques aussi

    ridicules que funestes , alors que lutilisation de la passerelle serait indique pour une plus

    grande efficacit. Plus que la crainte des responsabilits, cause gnralement voque lpoque

    en cette matire, il met en cause linsuffisante capacit administrative des dirigeants . Il

    suggre que si le chef suprme exigeait de ses collaborateurs (...) lemploi de la passerelle et

    les dterminait limposer leurs subordonns (...), lhabitude et le courage des responsabilits

    stabliraient en mme temps que lusage du plus court chemin. (Ibid., p. 40-41) Sil nemploie

    pas le concept de coopration, Fayol utilise celui de collaboration dans le cadre du principe de

    coordination qui consiste, notamment, ... mettre de lharmonie entre tous les actes dune

    entreprise de manire en faciliter le fonctionnement et le succs ; (ibid., p. 128).

    Dfinissant trois grandes conditions pour une entreprise bien coordonne2, il soutient que lun

    des meilleurs moyens dy parvenir passe par une confrence hebdomadaire des chefs de service

    (ibid., p. 129). Mme dans la trs grande entreprise compose dtablissements distincts et plus

    ou moins loigns les uns des autres, o la coordination est assure par laction combine de la

    direction gnrale et des directions locales aucun procd nest suprieur la confrence pour

    assurer lunit de direction et la convergence des efforts, pour entraner une collaboration

    spontane les divers chefs de service appels poursuivre un but commun. (Ibid., p. 132-133)

    lchelle de ladministration publique qubcoise ce serait la runion frquente des dirigeants

    des organismes centraux de ltat et ceux des MO quil faudrait considrer cet gard.

    2 a) Chaque service marche daccord avec les autres... b) Dans chaque service, les divisions et subdivisions sont exactement renseignes sur la part quelles ont prendre dans luvre commune et sur laide mutuelle quelles doivent se prter. c) Le programme de marche des divers services et des subdivisions de chaque service est constamment tenu en harmonie avec les circonstances. (Ibid., p. 129)

  • 16

    Dans leur prsentation des auteurs majeurs en administration publique, Shafritz et Hyde

    dsignent Chester I. Barnard comme ayant pos les fondements thoriques pour une analyse

    empirique de la communication et de la coopration avec les employs dans un chapitre de son

    livre The Functions of the Executive consacr aux organisations informelles et leurs relations

    avec les organisations formelles (dans Shafritz, Hyde, 8e d., p. 86). En nonant que Barnard

    voit lorganisation comme des systmes de coopration o la fonction des dirigeants est de

    maintenir lquilibre dynamique entre les besoins de lorganisation et les besoins de ses

    employs (p. 86), ils attirent notre attention sur les six noncs autour desquels sarticule la

    pense de lauteur. Les quatre derniers paraissent plus pertinents notre dmarche, que nous

    rsumons et traduisons ainsi : 3) que les organisations informelles donnent lieu la formation

    dorganisations formelles et que les organisations formelles sont ncessaires toute grande

    organisation informelle ou socitale; 4) que les organisations formelles rendent explicites

    beaucoup dattitudes, dtat desprit et dinstitutions qui se dveloppent directement travers les

    organisations informelles (); 5) que les organisations formelles, une fois tablies, leur tour

    crent aussi des organisations informelles et 6) que les organisations informelles sont ncessaires

    lopration des organisations formelles comme moyen de communications, de cohsion et de

    protection de lintgrit de lindividu (Barnard, 1938, p. 123). Pour les fins de notre recherche,

    nous dcodons de ces noncs que les organisations informelles et formelles se nourrissent et

    sappuient mutuellement, mais que lauteur ne va pas aussi loin quaffirmer que toutes les

    organisations formelles manent des organisations informelles.

    Les premiers dbats portant sur la responsabilit administrative, les considrations

    dontologiques et la reddition de comptes apparurent vers le milieu du XXe sicle. Carl Friedrich

    estimait que lenjeu de la responsabilit administrative passait par la voie interne, sagissant de

    matires trop spcialises pour le politique, alors quHerman Finer prnait au contraire la voie

    externe par le contrle lgislatif et populaire (Shafritz, Hyde, 8e d., p. 86, 91).

    Le modle bureaucratique fait lobjet de nombreuses remises en question dans la deuxime partie

    du XXe sicle. La critique de la bureaucratie porte dabord sur linefficacit, le cot

    prohibitif, les rigidits doprations et de structure pour se transformer, fin des annes 1970, en

    une critique du rle de ladministration publique, de la pertinence et la possibilit pour ltat de

    modeler la socit, de lquilibre des pouvoirs entre les institutions et les acteurs, de la

  • 17

    pertinence et de lutilit des frontires juridictionnelles . La faon traditionnelle de

    gouverner la socit ne conviendrait plus aux tches et circonstances et un changement de

    paradigme est prescrit pour passer dune faon de gouverner et dadministrer par les

    bureaucraties et hirarchies aux marchs comptitifs et la coopration par rseaux. Les

    rformes suggres incluent privatisation, drglementation, march comptitif et

    commercialisation. Ladministration publique y est vue comme un supermarch offrant une

    grande varit de services publics o le management par contrat et rsultat remplace celui fond

    sur le commandement, les citoyens sont considrs comme des consommateurs et la lgitimit

    vient de la performance et des cots bas plutt que du respect des rgles et procdures. (Olsen,

    2005, p. 6)

    Rsumant la critique de la thorie du rseau lgard de la bureaucratie, Olsen y dcle des

    enjeux dautorit et de pouvoir. Elle prescrit la collaboration et le consensus dans des

    organisations plus flexibles et aplaties, incluant des rseaux inter organisationnels partageant du

    pouvoir. Ladministration publique est renforce et discipline par la contribution des citoyens et

    les partenariats sociaux. Les acteurs publics et privs interdpendants ont besoin de cooprer, de

    persuader, de ngocier et de btir la confiance, tout en ayant galement besoin de mettre en

    commun lautorit lgale, les ressources budgtaires, lexpertise et leur organisation pour obtenir

    de meilleurs rsultats. (Ibid., p. 7)

    voquant la difficult de la mesure visant attribuer des relations de causes effets entre les

    caractristiques organisationnelles et les comportements des acteurs, Olsen estime que les faits

    ne permettent pas de conclure la ncessit historique dun changement de paradigme. Ses

    analyses le mnent plutt conclure que la bureaucratie nest pas le modle dpass quon

    prtend, mais une forme qui se combine dautres (rseau, march) dans lorganisation

    daujourdhui; lorganisation bureaucratique est une part du rpertoire de formes qui se

    chevauchent, se compltent et saffrontent dans les dmocraties contemporaines (ibid., p. 1).

    Dans les socits aussi complexes que les ntres, il ne voit pas la possibilit dorganiser

    ladministration uniquement sur la base de lune de ces formes (ibid., p, 16).

    Le mouvement de la rinvention du gouvernement est prsent comme une raction aux

    rformes inspires du NMP en vue dun meilleur gouvernement et non de moins de

    gouvernement , une sorte de troisime voie entre la bureaucratie et le march, ltat soutenant

  • 18

    la socit et les marchs plutt que les conduire (ibid., p. 15). Pour compenser les effets du

    courant antrieur minant la coordination et la coopration au sein de ltat en raison de la

    spcialisation et de la fragmentation, ces initiatives mettent laccent sur la collaboration

    horizontale et intgre la livraison de service entre organisations publiques et niveaux de

    gouvernement, tout comme la fusion de dpartements ainsi que la rintgration et standardisation

    des agences3.

    1.3.3 Repres situant lvolution de ladministration publique au Canada et au Qubec

    Examinant le nouveau management public sous langle dun possible paradigme, M. Gow et

    Mme Dufour dcrivent les grandes lignes du prcdent paradigme que Charif et Rouillard4

    appellent ladministration publique traditionnelle en indiquant quil tait proche du modle

    bureaucratique de Max Weber et quau Canada il paraissait bien appropri en raison de sa

    correspondance la version canadienne du gouvernement de Westminster5. Ils observent que la

    version canadienne du modle existait peine avant de rencontrer des difficults avec les

    pouvoirs discrtionnaires des ministres et des hauts fonctionnaires; puis avec larrive de la

    ngociation collective dans les annes 1960 qui affectait des aspects du modle bureaucratique

    par la remise en question de la neutralit de la fonction publique, la politisation de la gestion, la

    dvalorisation de la Commission de la fonction publique, tout en ajoutant la bureaucratisation

    par lajout des conventions collectives aux documents directeurs existants (ibid., p. 693). Le

    systme du mrite en vigueur fut contest et ... le ralisme des doctrines de la responsabilit

    3 Qui prend la forme dinitiatives comme joined-up government ou whole-of-government , horizontalism , reviewing the centre (Christensen et Laegreid (2006) cits par Bouckaert et al, 2010, p. 4-5). 4 CHARIH, Mohamed et Lucie Rouillard (1997), The New Public Management . In Charih & Daniels 1997, p. 31 (tableau comparatif des lments constitutifs de ladministration publique traditionnelle et du nouveau management public). 5 Lautorit politique tait concentre entre les mains du ministre et de son cabinet, une fonction publique neutre et indpendante conseillait fidlement les responsables lus et excutait la politique publique. Des rgles juridiques spciales rgissaient la prestation des services publics et la bureaucratie tant avant tout une administration fonde sur le droit (Dimock, 1952). Ladministration tant cense tre impartiale et impersonnelle, vitant ainsi la fois les maux du clientlisme, de ladministration partisane et de la discrimination entre les diffrentes composantes de la communaut. Tout ce qui comptait, ctait le mrite, le mrite de lindividu tel que rvl par les examens et ladjudication des contrats, et les mrites dautres cas la lumire du droit et de la politique. Politiquement, les fonctionnaires devaient rendre des comptes aux ministres qui, leur tour, devaient rendre des comptes au parlement. En change de lautonomie et de la scurit, ils acceptaient lanonymat, la confidentialit et des droits limits en tant que citoyens. Ce modle, comme celui de Weber lui-mme, tait la fois positif et normatif : il dcrivait la faon dont les choses fonctionnaient et disait quil tait la fois bon et invitable quelles fonctionnent de cette faon. (Gow et Dufour, ..., p. 692-693).

  • 19

    ministrielle et du contrle parlementaire des dpenses publiques tait srieusement mis en doute

    (Kernaghan 1979 ; rapport Lambert 1979). Les auteurs en dduisent que le point commun

    tous ces lments est que lvolution de ltat a cr des conditions qui ont remis en question le

    paradigme dominant. (Ibid., p. 693-694)

    Par ailleurs, en dressant ltat des recherches en administration publique publies au Qubec

    entre 1965 et 1992, M. Gow donne un aperu des problmatiques et des vnements dune partie

    de la priode qui nous intresse en tentant de faire le lien entre la recherche et les contextes

    politique, conomique et social6. Subdivisant la priode tudie en trois segments, il qualifie la

    sous-priode 1965-1973 dapoge de la planification, ... celle du plus grand optimisme quant

    la possibilit de planifier rationnellement les activits de ltat. Lauteur indique quaprs une

    dcennie intense en production de rapports de grandes commissions denqute tant au fdral

    quau Qubec, ... aprs une priode dextension considrable des droits individuels et

    collectifs, le Qubec semblait prt continuer sur cette lance, la suite de llection en 1970 de

    celui que lon prsentait alors comme un jeune technocrate , Robert Bourassa (p. 72-73).

    Il situe les annes 1974-1981 sous le signe des annes de contestations et rvaluations qui

    samorcent avec un ralentissement des lans rformistes du gouvernement Bourassa et un style

    de gestion par exception. Il voit dans llection du gouvernement du Parti qubcois en 1976 la

    reprise des interventions tatiques ayant caractrises la Rvolution tranquille [priode de grands

    changements au sein de la socit qubcoise et de son tat] et le ramnagement des structures

    et pratiques de ltat, une poque o se ... manifeste le souci grandissant dun contrle

    politique de ladministration (p. 76) . M. Gow qualifie la troisime sous-priode (1982-1992) de

    remise en question de ltat et de ladministration , la crise conomique qui frappe compter

    de 1982 amorant une dcennie de compressions budgtaires et deffectifs (p. 81) qui reprendra

    avec la nouvelle crise du dbut des annes 1990. Cest aussi une priode paradoxale en ce que le

    mouvement vers laccs lgalit ne diminue pas malgr la crise :

    Cest donc une priode contradictoire : dune part, le secteur public a mauvaise presse, le personnel politique semble gagn aux ides du Public Choice linstar du Premier ministre britannique,

    6 GOW, James Iain (1993), Les problmatiques changeantes en administration publique (1965-1992), Revue qubcoise de science politique, no 23, hiver 1993. Se basant sur un inventaire fait en 1983, il observe que trois fois plus douvrages sur ladministration publique concernent que le Qubec que toute autre province canadienne (p. 60).

  • 20

    Margaret Thatcher (voir Borins, 1988) ; dautre part, toute une srie de problmes touchant lenvironnement, la technique, la vie prive et lgalit semblent appeler toujours des solutions engageant ltat (p. 82).

    Lauteur observe que les difficults financires de ltat qubcois et dautres tats fournissent

    de nouveaux sujets dtude et un repositionnement des problmatiques en recherche :

    Les analystes politiques pluralistes maintiennent leurs approches, mais ils doivent tenir compte la fois de la demande de moins dtat venant des principaux partis politiques, ainsi que de la politisation accrue de la direction administrative. Le courant de sociologie critique, linstar du mouvement syndical, perd beaucoup de son mordant. Par contre, le Public Choice et les analystes conomiques ont une bonne coute, mme si leur vrification connat un succs mitig, du moins en ce qui concerne la bureaucratie. Le management prend de plus en plus de place, mais cest au prix dune plus grande politisation. Mme le droit innove en portant une attention accrue aux problmes juridiques de la gestion et aux aspects gestionnels du droit. (Gow, 1993, p. 86-87).

    Dans la mesure o le personnel politique et celui de ladministration publique sintressent aux

    travaux des chercheurs, ils se trouvent informer des modles trangers. Lauteur estime que les

    chercheurs universitaires ont une influence considrable par ... leurs publications, par leur

    participation aux tudes et enqutes ainsi que par leur travail peu connu de conseillers en gestion

    ... et il en trouve de nombreux exemples au Qubec ... en droit administratif, en gestion

    financire et du personnel, dans les dbats sur la privatisation et la drglementation et dans les

    questions concernant limputabilit. (Gow, 1993, p. 88)

    1.3.4 Repres situant lvolution de ladministration publique au regard des thories de lorganisation

    Tout en ayant en commun la recherche de lefficacit, les diffrents thoriciens de lorganisation

    de lpoque classique, du dbut XXe sicle la fin des annes 1970, ont abord les liens entre

    lorganisation et lindividu, les thories privilgiant lun ou lautre de ces ples, lorganisation

    ayant toutefois domine comme niveau danalyse; la reprsentation de lorganisation prend la

    forme soit de structures de dcisions, de systme social ou de structure fonctionnelle et partir

    des annes 1960, elle est de plus en plus reprsente en fonction de ses liens avec

    lenvironnement (Rouleau, 2007, p. 73-74). Les thories reposent sur une ... conception

    atomise et rductrice de lindividu ... soit vacu du discours ou dfini par une caractristique

    unique ... , telle son comportement conomique, affectif ou sa rationalit. Lorganisation est

    gnralement dfinie comme un ensemble dont les parties sont interrelies afin dassurer la

    coordination des activits des individus en vue de la ralisation dobjectifs communs (ibid., p.

    74).

  • 21

    Dans les annes 1970, un changement sopre dans les thories des organisations avec la fin

    dune illusion..., celle de la possibilit de rationaliser les organisations. Les organisations

    seront de plus en plus conceptualises comme des ensembles imparfaits sujets divers

    fonctionnements et fonds sur des diffrences. (Ibid., p. 75) Les thories de la priode 1980-

    1990, que L. Rouleau qualifie de nomodernes, portent les traces de la complexit des

    entreprises : elles sont devenues pluridisciplinaires et les reprsentations de lorganisation, de

    lindividu et de lenvironnement qui les caractrisent se sont transformes. (Ibid., p. 153) Au

    lieu de structure ou systme, lorganisation est plutt prsente comme un ensemble se

    composant de multiples relations dont le type dpend de langle disciplinaire adopt. Elles font

    une place plus importante lindividu de sorte quelles sont ... moins dterministes et

    objectives que les approches classiques.

    Dans ces approches qualifies aussi de contemporaines, la reprsentation de lenvironnement est

    plus complexe en ne considrant pas seulement les autres acteurs conomiques autour de

    lentreprise, mais aussi les ordres professionnels et ltat (ibid., p. 154). Si lorganisation y est

    plus fragmente, il sagit toujours dune organisation en quilibre et participant la

    reproduction de lordre organisationnel. Ces thories ont en commun le projet de comprendre

    comment il se fait que des individus ayant des intrts divergents arrivent cooprer. (Ibid., p.

    155). Tout en renouvelant les approches classiques, elles se situent dans leur prolongement et

    nont pas abandonn le projet de rationalisation lorigine des thories des organisations.

    (Ibid., p. 156)

    Les approches qualifies de lavant-garde (fin des annes 1990 et dbut des annes 2000) tentent

    de ... rconcilier les paradoxes et les oppositions dans les thories des organisations. Tout en

    tentant de construire des liens thoriques entre des opposs (le local le global, les individus la

    collectivit, les pratiques les institutions, lobjectif le subjectif), Mme Rouleau observe une

    promotion du pluralisme dans les thories des organisations (des ides, de la reconnaissance des

    acteurs, dans le temps et du pluralisme disciplinaire).

    Dans un contexte de tournant du sicle marqu par la fin de la guerre froide, linterconnexion de

    zones dchanges, les rles cls jous par les entreprises transnationales et mondiales, les

    scandales conomiques dans la gestion de grandes entreprises, la monte de lconomie du

    savoir et des connaissances, lmergence de nouveaux enjeux sociaux, lclatement

  • 22

    disciplinaire en thories des organisations se poursuit sur le plan thorique. De nouvelles

    thmatiques apparaissent (langage, temporalit, motions, humour, spiritualit) portes par les

    points de vue de la construction sociale, des thories critiques et du postmodernisme, en raction

    aux approches antrieures, mais fournissant de nouvelles pistes de rflexion sur les

    organisations. Elles accordent une grande importance lindividu et moins lorganisation

    reprsente comme un construit social; la dichotomie entre lorganisation et son environnement

    sefface, car elle est le reflet de tendances sociohistoriques plus larges quil faut ramener

    dans lanalyse des organisations. (Ibid., p. 218) Ces approches accentu