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Les Naufragés Théâtre du Vieux-Colombier En couverture : Éric Génovèse ; ci-dessous : Françoise Gillard et Alexandre Steiger. © Brigitte Enguérand

Théâtre du Vieux-Colombier...création des Naufragés de Guy Zilberstein dans la mise en scène d’Anne Kessler et d’y associer ses mécènes. À travers ce spectacle, elle contribue

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Page 1: Théâtre du Vieux-Colombier...création des Naufragés de Guy Zilberstein dans la mise en scène d’Anne Kessler et d’y associer ses mécènes. À travers ce spectacle, elle contribue

Les Naufragés

Théâtre duVieux-Colombier

En couverture : Éric Génovèse ; ci-dessous : Françoise Gillard et Alexandre Steiger. © Brigitte Enguérand

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Les Éditions L’avant-scène théâtre présententdeux nouveaux volumes de la collection Anthologie de L’avant-scène théâtre

Le théâtre françaisdu XVIIe siècledirection Christian Biet

Disponibles en librairie !

et toujoursLe théâtre français

du XIXe siècle

Le théâtre françaisdu XVIIIe siècle

direction Pierre Frantz, Sophie Marchand

www.avant-scene-theatre.com

L’essentiel du théâtre par siècleLes auteurs, les œuvres, les courants présentés et commentés

par des spécialistes reconnus et les grands metteurs en scène d’aujourd’hui

Cette fidélité envers la Comédie-Française rejoint celle de Jacques Toja qui, avant de créer en 1983 la fondation qui porte aujourd’hui son nom, fut attaché au Français pendant près de 30 ans en tant que pensionnaire, puis sociétaire et enfin administrateur général.

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Seule fondation reconnue d’utilité publique à œuvrer exclusivement en faveur de l’art dramatique, elle rassemble des entreprises prestigieuses telles que Fimalac ou la Société des Produits Marnier-Lapostolle mais aussi des particuliers passionnés.

Les Naufragés portent à 12 le nombre des spectacles de la troupe de la Comédie-Française soutenus par la Fondation Jacques Toja pour le Théâtre depuis 2003.

www.fondat ion- theatre .org

La Fondation Jacques Toja pour le Théâtre est heureuse et fière de soutenir la création des Naufragés de Guy Zilberstein dans la mise en scène d’Anne Kessler et d’y associer ses mécènes. À travers ce spectacle, elle contribue à l’émergence d’une nouvelle génération de dramaturges de langue française et accomplit ainsi pleinement sa mission.

En effet, son action s’inscrit dans la ligne artistique de son créateur : promouvoir la renaissance de pièces du répertoire, mais aussi participer activement à la découverte d’auteurs contemporains tels qu’Emmanuelle Marie, José Pliya, Yasmina Reza, Serge Kribus, Wladimir Yordanoff ou Carole Fréchette.

Au cours de ses 26 années d’existence, la Fondation Jacques Toja pour le Théâtre a ainsi aidé 128 spectacles qui ont été applaudis par plus de 4,3 millions de spectateurs.

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Les Naufragésde Guy Zilberstein

Pour la première fois à la Comédie-Française

du 24 mars au 30 avril 2010durée du spectacle : 1 h 40

Mise en scène d’Anne Kessler

ScénographieYves Bernard –LumièresArnaud Jung –Costumes JeanneLabib-Lamour –Musiqueoriginale Bruno Coulais et Alexandre Steiger – Maquillages Véronique Nguyen – Assistantemise en scène Camilla Bouchet – Assistant lumières Emmanuel Ferreira Dos Reis – Réalisationdes décors par les ateliers Un point trois et des costumes par Samir N’Khili et Samy Douib.

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avecÉric GénovèseFrançoise GillardLaurent NatrellaGrégory GadeboisMarie-Sophie FerdaneetAlexandre Steiger

Golz, galeristeClaire, amie de TomWeissehlmannLansac, commissaire-priseurLucas, barmanLéa,madame Lansac

TomWeissehlmann, journaliste àArt news

Maquillage M.A.C COSMETICSLa Comédie-Française remercie le champagne Montaudon et Baron Philippe de Rothschild SA.

En partenariat avec agnès b.En partenariat avec À nous Paris,Les Inrockuptibles,LeMagazine littéraire et France Culture.

Avec le soutien de la Fondation Jacques Toja pour le Théâtre.

Merci à la Maison Ampelos.

Le texte est publié à L’avant-scène théâtre dans la Collection des quatre-vents.

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Céline Samie Clotilde de Bayser Jérôme Pouly

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La troupe de laComédie-Françaiseau 1er mars 2010

SociétairesGérard Giroudon Claude Mathieu Martine Chevallier Véronique Vella

Catherine Sauval Michel Favory Thierry Hancisse Anne Kessler Isabelle Gardien Andrzej Seweryn

Cécile Brune Michel Robin Sylvia Bergé Éric Ruf Éric Génovèse

Bruno Raffaelli Christian Blanc Alain Lenglet Florence Viala Coraly Zahonero Denis Podalydès

Alexandre Pavloff Françoise Gillard

Dominique ConstanzaDoyen de la troupe

Jean-BaptisteMalartre

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Laurent Stocker

Guillaume Gallienne Laurent Natrella Michel Vuillermoz Elsa Lepoivre

Pensionnaires

Administrateurgénéral

Nicolas Lormeau

Christian Gonon

Christian Cloarec

Julie Sicard

Madeleine Marion

Bakary Sangaré

Loïc Corbery Léonie Simaga

Grégory Gadebois Serge Bagdassarian

Hervé Pierre Benjamin Jungers Stéphane Varupenne

Muriel Mayette

Les comédiens de la troupe présents dans le spectacle sont indiqués en rouge.

ShahrokhMoshkin Ghalam

ClémentHervieu-Léger

PierreLouis-Calixte

Marie-SophieFerdane

AdrienGamba-Gontard

Gilles David

Sociétaires honoraires

Gisèle Casadesus, Micheline Boudet, Paul-Émile Deiber, Jean Piat, Robert Hirsch, Michel Duchaussoy, Denise Gence,Ludmila Mikaël, Claude Winter, Michel Aumont, Geneviève Casile, Jacques Sereys, Yves Gasc, François Beaulieu, RolandBertin, Claire Vernet, Nicolas Silberg, Simon Eine, Alain Pralon, Catherine Salviat, Catherine Ferran, Catherine Samie, CatherineHiegel, Pierre Vial.

©Cosim

oMircoMagliocca,saufpourN.BoudjenahetM.M

ayette:ChristopheRaynauddeLage

Christian Hecq Suliane Brahim

La troupe

Georgia Scalliet Nâzim Boudjenah

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La Comédie-Française présente auThéâtreMarignyPartage de midiPaul Claudel – Yves Beaunesnedu 11 septembre au 3 octobre 2009

L’AvareMolière – Catherine Hiegeldu 19 septembre 2009 au 21 février 2010

Figaro divorceÖdön von Horváth – Jacques Lassalledu 26 septembre 2009 au 7 février 2010

La Grande MagieEduardo De Filippo – Dan Jemmettdu 7 octobre 2009 au 17 janvier 2010

Juste la fin du mondeJean-Luc Lagarce – Michel Raskinedu 26 octobre 2009 au 3 janvier 2010

Les Joyeuses Commères deWindsorWilliam Shakespeare – Andrés Limadu 5 décembre 2009 au 2 mai 2010

Mystère bouffeDario Fo – Muriel Mayettedu 13 février au 19 juin 2010

FantasioAlfred de Musset – Denis Podalydèsdu 19 février au 31 mai 2010

L’Illusion comiquePierre Corneille – Galin Stoevdu 2 mars au 13 mai 2010

Les OiseauxAristophane – Alfredo Ariasdu 10 avril à juillet 2010

Les Trois SœursAnton Tchekhov – Alain Françondu 22 mai à juillet 2010

Ubu roiAlfred Jarry – Jean-Pierre Vincentdu 2 juin à juillet 2010

Cyrano de BergeracEdmond Rostand – Denis Podalydèsdu 17 juin au 25 juillet 2010

Le Mariage de FigaroBeaumarchais – Christophe Rauckdu 1er au 18 juillet 2010

Les spectacles de laComédie-FrançaiseSaison 2009 / 2010www.comedie-francaise.fr

Salle Richelieu

Les propositionsLectures d’acteurs12 octobre,14 décembre 2009,13 avril,7 juin 2010

Soirée de lecture Les Monstres24 novembre 2009

Soirée Albert Camus – René Char1er juin 2010

Visites-spectacles27 septembre, les 4,11,18,25 octobre 2009,les 14,21,28mars et les 18,25 avril 2010

Salle RichelieuPlace Colette – 75001 Paris0 825 10 16 80 (0,15 euro la minute)

La saison

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Quatre pièces de Feydeau(Amour et piano / Unmonsieur qui n’aime pas lesmono-logues / Fiancés en herbe / Feu la mère de Madame)Georges Feydeau – Gian Manuel Raudu 23 septembre au 25 octobre 2009

Les affaires sont les affairesOctave Mirbeau – Marc Paquiendu 18 novembre 2009 au 3 janvier 2010

Paroles, pas de rôles / vaudevilletg STAN, DE KOE,DISCORDIA

du 20 janvier au 28 février 2010

Les NaufragésGuy Zilberstein – Anne Kesslerdu 24 mars au 30 avril 2010

La seule certitude que j’ai,c’est d’être dans le doutePierre Desproges – Alain Lenglet et Marc Fayetdu 5 au 19 mai 2010

La Folie d’HéraclèsEuripide – Christophe Pertondu 28 mai au 30 juin 2010

Théâtre du Vieux-Colombier Studio-Théâtre

Studio-ThéâtreGalerie du Carrousel du Louvre99 rue de Rivoli – 75001 Paris01 44 58 98 58

Cocteau – Maraisconçu et réalisé par JeanMarais et Jean-LucTardieud’après l’œuvre de Jean Cocteaumise en scène de Jean-Luc Tardieudu 24 septembre au 8 novembre 2009

Le Loup / Les Contes du chat perchéMarcel Aymé – Véronique Velladu 26 novembre 2009 au 17 janvier 2010

Le bruit des os qui craquentSuzanne Lebeau – Anne-Laure Liégeoisdu 11 au 21 février 2010

Burn baby burnCarine Lacroix – Anne-Laure Liégeoisdu 25 février au 7 mars 2010

Le BanquetPlaton,adaptation et dramaturgiedeFrédéricVossiermise en scène de Jacques Vinceydu 25 mars au 9 mai 2010

Le Mariage forcéMolière – Pierre Pradinasdu 27 mai au 11 juillet 2010

Les propositionsPortraits d’acteurs3 octobre, 5 décembre 2009, 30 janvier 2010

Cartes blanches17 octobre, 19 décembre 2009,27 mars, 8 mai, 15 mai 2010

Portraits de métiers21 novembre 2009, 10 avril, 22 mai 2010

Intermèdes littéraires STANislavskiles 10,11,12décembre2009et les 4,5,6 février 2010

Bureau des lecteursles 1er, 2, 3 juillet 2010

Théâtre contemporain :la famille, les monstres, l’argentles 5, 6, 7 juillet 2010

Les propositionsÉcoles d’acteurs19 octobre 2009, 11 janvier, 19 avril,3 mai, 14 juin 2010

Bureau des lecteursles 9, 10, 11, 12, 13 décembre 2009

Le festival théâtrothèqueles 22, 23, 24 janvier 2010

Théâtre du Vieux-Colombier21 rue du Vieux-Colombier75006 Paris01 44 39 87 00 / 01

La saison

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Éric Génovèse et Alexandre Steiger. © Brigitte Enguérand

Le spectacle

GOLZ : Je n’aime pas les artistes, Lansac. Je n’aime que l ’art.ACTE I

Àla veille d’une importante venteaux enchères, un galeriste, un

commissaire-priseur et sa femme seretrouvent dans le bar d’un hôtel de lacôte normande, bientôt rejoints par unjournaliste et son épouse. Tandis quetout le monde craint l’arrivée de l’artistequi refuse que ses œuvres soient renduespubliques, le drame d’un naufrageplane…Les personnages s’opposent, les

rancœurs se libèrent et les passions sedéchaînent. À travers la position sansmesure du galeriste,Golz, qui s’insurgecontre la volonté du peintre de détruireses propres toiles,Les Naufragés posentla question de la propriété de l’œuvre,au cœur d’un drame humain et desturpitudes du marché de l’art. L’artappartient-il à quelqu’un ? À l’artiste,au collectionneur, à tout le monde ?

Les Naufragés

Auteur dramatique, scénariste etécrivain, Guy Zilberstein a écrit

pour le théâtre Grief[s], La Musiqued’Excilar, Éclairage indirect, et adaptéMaster class de David Pownall.Ses piècesont été jouées au théâtre de L’Œuvre,au Théâtre national de Chaillot et auStudio-Théâtre de laComédie-Française.Aucinéma,il a travaillé avecNicoleGarcia,Brigitte Roüan,Dominique Deruddere,

CheikDoukouré…Sonprochain roman,What if?, paraitra chez Grasset endécembre prochain.AvecLesNaufragés,il aborde la dramaturgie du commerce del’art, la théâtralité de ses échanges brutauxoù les personnages tragiques s’affrontentavec la violence de ceux qui ont perduleurs illusions. Jusqu’où sommes-nouscapables d’aller pour posséder l’objet denotre concupiscence ?

Guy Zilberstein

Entrée à la Comédie-Françaisele 1er septembre 1989, nommée

sociétaire le 1er janvier 1994, AnneKessler y a dernièrement interprétéSuzanne dans Le Mariage de Figaro deBeaumarchais mis en scène parChristopheRauck.Elle joue notammentsous la direction de Piotr Fomenko,AlainFrançon,MurielMayette ou encoreJean-Pierre Vincent.Elle a réalisé pourle cinéma Le Trac, quelques cas cliniqueset Merci Docteur. Elle a présenté auStudio-Théâtre SergeGainsbourg :Poèmeset chansons dans le cadre des proposi-tions de la Comédie-Française en 2002,puis en 2006 Grief[s], à partir de textes

de Strindberg, Ibsen et Bergman et,en 2008, Trois hommes dans un salond’après l’interview de Brel, Brassens,Ferré par François-René Cristiani.Elle a mis en espace, avec GuyZilberstein, la soirée d’hommage àCatherine Samie, Jubilé jubilant. Àtravers sa sensibilité d’artiste et depeintre,Anne Kessler révèle l’humanitédes personnages desNaufragés en mêlantintimement réalité et fiction. Elle citeune phrase du réalisateur Nicolas Rayqui la hante dans son travail : « Toutmetteur en scène se doit de donner auxspectateurs un sentiment exacerbé dela vie. »

Anne Kessler

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Possession et pouvoir, les turpitudes dumarchés de l’artCette pièce est certainement la plus noireque j’ai écrite et la plus noire que j’écriraijamais,parceque la réalitéyestplusprésenteque l’imaginaire.Elle pose une questiontrès large : est-ce que l’art appartient àquelqu’un ? Tenter de répondre à cettequestion, c’est faire apparaître le mondede l’art, le marché,dans toute sa cruauté.J’ai connu ou croisé tous les personnagesde la pièce à des époques et dans descirconstances très différentes et je mesuis fait plus de mille fois le récit de leurdestin tragique.Pourquoi ai-je voulu lesréunir ? La réponse, si je la connaissais,contiendrait le secret du mécanismeintime qui se déclenche au moment où

l’on se décide à écrire une nouvelle pièce.Il s’agit moins d’un espace de repré-sentation que d’un espace de reconsti-tution. J’ai convoqué autoritairement lespersonnages pour qu’ils exposent aupublic,en public,une situation,des faits,des actes qui ne sont troublés par aucunesubjectivité.L’auteur,l’artiste,le peintre…c’est celui « qui n’a rien pu faire ».Celuiqui a seulement observé et rendu compteavec ses mots, ses formes, ses couleurs.Voilà son drame.Picasso n’a pas arrêté laguerre d’Espagne avecGuernica et la forcedu tableau vient de cette frustration.Sabeauté résulte de l’émotion inconsoléede l’artiste. Créer, ce n’est pas agir, c’estprévenir.Prévenir,dans les deux sens duterme : alerter, désigner le danger oubien encore orienter le regard vers lebeau, mais prévenir c’est aussi bloquerla récidive,devancer le mal.Picasso,avecGuernica, a-t-il pu empêcher toutes lesguerres ? Certainement pas, mais il asigné son témoignage accablant contrela barbarie, et l’humanité dispose alorsd’une pièce capitale pour instruire leprocès de la bestialité.Voilà pourquoi Golz, le galeriste, fait lesacrifice de sa vie. Il ne peut tolérer ladestruction des toiles du peintre Sismus,même par la volonté du créateur. Il nesauve pas seulement la beauté.Il sauve lesens. Je crois que c’est à cette conclusionque je souhaitais parvenir.

Guy Zilberstein

Les Naufragés,par Guy Zilberstein et Anne Kessler

Créer un équilibre entre réalité et fictionJ’aime fairedécouvrirdesunivers singuliers.Je me suis immergée dans un universque je ne connaissais pas pour aller au plusprès de la réalité,dans un mouvement deva-et-vient incessant entre la fiction et laréalité.L’image est au centre du propos.Ou plutôt la représentation par l’image.Cette confusion des termes entre lapeinture et le théâtre situe très exac-tement l’enjeu de la pièce et le défi lancéà la mise en scène.L’univers est hostile aux artistes et, àl’extérieur, les éléments sont déchaînés.La tempête est partout : dans le ciel, surla mer et sous les crânes. La violences’insinue de toute part comme le froidquand il contrarie les calfeutrages lesplus élaborés.Le décor n’est qu’un refuge.Ici, la nature factice du théâtre sert véri-tablement le texte.La réalité des person-nages est ailleurs que dans la versionfeutrée que propose l’image.La tragédieest aussi celle des apparences.

Composer un tableau vivantLe scénographe,Yves Bernard, a trans-posé ce salon d’hôtel de la côte normandeen un espace poétique, privilégiant unedimension très vivante que je désirais.Lespectacle se déroule dans un lieu fixe,sans changement de décor, mais la viepasse par les couleurs, les matières, leslignes.À l’intérieur de cet espace, je faisnaître des micro-espaces. Je dirige pourcela les comédiens comme si nous étionssur un plateau de cinéma avec unecaméra réduisant les angles de vue,recentrant chaque scène sur un décorque je crée à l’intérieur du « grand »

décor. Vu qu’il s’agit du monde del’art, l’enjeu est de nous rapprocher depersonnages dans un tableau. C’esteffectivement très dessiné dans l’espaceafin que leur parole puisse être libreet spontanée. La mise en place desdéplacements et des positions est unefaçon d’éprouver le tableau.Je voulais absolument rendre compte dela fascination générée par le monde del’art, le décor devait donc jouer sur lefantasme qu’il suscite, le côté glamour.On est d’emblée dans un salon d’hôtelmais aussi dans un lieu de passage, unendroit neutre où une tragédie va sedérouler. Le fait que le lieu soit beau etélégant, rend d’autant plus percutantela face sordide qui se cache derrière.Comme chez Bergman où les acteurssont sublimes, l’image est magnifique,mais l’apparence dissimule des matièresnauséabondes.

Anne Kesslerpropos recueillis

par Chantal Hurault communicationet Laurent Codair attaché de presse

au Théâtre du Vieux-Colombier

Le spectacle

Marie-Sophie Ferdane et Grégory Gadebois. © Brigitte Enguérand

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Alexandre Steiger, Françoise Gillard, Marie-Sophie Ferdane et Laurent Natrella. © Brigitte Enguérand

« On n’achète pas les tableaux parcequ’on les aime ; on les aime parce qu’onlesachète»,lanceCamaretàAngèle,époused’un peintre dansChampignol malgré lui(ACTE I, scène 12) de Georges Feydeau.Cette vérité souvent plus nuancée surl’appropriation d’un objet d’art résonnedifféremment dans les murs de laComédie-Française décorés d’œuvresachetées et offertes. Sa collection deportraits peints et sculptés constituéepar les comédiens surtout à partir duXVIIIe siècle et majoritairement compo-sée d’œuvres du XIXe siècle pour décorerleur salle d’assemblée, est née des donsd’artistes qui délaissèrent les écus pourtroquer, non sans marchandage, leurmarbre contre des moments de plaisirrenouvelés.

Pour un marbre de Caffieri ou deHoudon, l’estimation s’élève à trois millelivres, soit le prix d’une entrée à vie auThéâtre-Français…Plutôt qu’un paie-ment sonnant et trébuchant, Caffieridemande aux comédiens cet abonnementhors-norme en échange d’un buste enmarbre de Piron,premier portrait sculptéà inaugurer en 1773 la série de sculpturessise dans l’actuel foyer Pierre Dux. Lesstatues qui, dans l’enceinte des théâtresantiques, remerciaient les bienfaiteursde lacité,revêtent iciunevaleurmarchande.Caffieri se révèle dès le début âpre enaffaires : « Le buste que je propose à laComédie n’est pas un ouvrage fait : jene m’engage même à ne le donner que

dans trois ans […].Cependant je desire-rois avoir mes entrées dès à présent […].Si […] je venois à mourir sans que lebuste fût entièrement fini, j’aurois faittoute cette avance enpureperte,et n’auroisretiré aucun fruit de mes dépenses et demon travail. » Bientôt, pour devancerson concurrent Houdon qui réalise leportrait de Voltaire,Caffieri envoie auxcomédiens celui qu’a exécuté son maîtreJean-Baptiste Le Moyne puis le coiffe aupoteau en immortalisant notammentRotrou et Corneille.

Bien profitable à laComédie-Françaisefut cette émulation fondée sur son esti-mable notoriété ! Au vu de cette sérieconstituée jusqu’en 1792 de seize bustes,dont neuf deCaffieri, le bibliothécaire dela Comédie-Française Georges Monval1regrette cependant que les comédiensn’aient eu plus tôt l’idée de monnayerleur art théâtral contre quelques piècesmuséales alors que certains peintrescomme David ou Delacroix, dont leFrançais possède des tableaux,n’auraient,selon lui,pas dédaigné remercier de leurvivant l’hospitalité du théâtre par unetoile, comme le fit Ingres en 1858.

L’œuvre d’art, en plus de sa valeurmonétaire,représente en effet unhonneuraussi précieux, tant pour l’artiste portrai-turé que pour l’auteur de l’œuvre exposéeaprès délibération au Comité.En 1778,est par exemple discutée l’offre parCaffieri d’un buste de Voltaire, au seuilde son immortalité : « [La Comédie] va

faire une délibération qui attestera l’ex-ception que mérite M.de Voltaire et quifait, à son égard seulement, renoncer laComédie à l’usage de n’y admettre queles morts. » (Lettre de Des Essarts àCaffieri, 1778).

Unique, seule la relique investie parson propriétaire d’une valeur sentimen-tale et historique inestimable échappe àtoute évaluation,artistique ou financière.

Les Comédiens-Français ont la leur,doyenne de leurs collections, le mobilierde scène du Malade imaginaire joué en1673, ainsi répertorié dans l’Inventairede 1815 : « Un fauteuil de Molière, àcrémaillère et couvert de peau noire.Pour mémoire, il n’a pas de prix. »

Florence Thomasarchiviste-documentaliste à la Comédie-Française

Les Comédiens-Français et leur collection d’art

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1. Les Collections de la Comédie-Française : catalogue historique et raisonné, 1897 (p. 7).

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Yves Bernard, scénographie –Directeur technique de Patrice Chéreau de 1967 à 1984,Yves Bernard réalise des décors de théâtre pour Bruno Boëglin, Gérard Desarthe, GaoXingjian, Alain Pralon, Christian Gangneron, Anne Kessler (Trois hommes dans un salond’après l’interview de Brel,Brassens,Ferré par François-René Cristiani). Il travaille avec PatriceChéreau, Robert Wilson, Matthias Langhoff, Raoul Ruiz et crée récemment les décorset lumières de Paranoïa de Spregelburd monté par Marcial Di Fonzo Bo. Parmi ses colla-borations à la Comédie-Française, il vient de réaliser le décor de Mystère bouffe et fabulagesde Dario Fo,mis en scène par Muriel Mayette, actuellement présenté Salle Richelieu.

Arnaud Jung, lumières –Créateur-lumière pour l’opéra et le théâtre,Arnaud Jung travailleavec Irina Brook,Bruno Gantillon,Hélène Vincent, Jean-Claude Gallotta et dernièrementLoïc Corbery ouVéroniqueVella.Il est parallèlement très actif dans le collectif Le Comité desfêtes.Il collabore avec Dan Jemmett depuis 2000,avec récemmentBéatrice et Bénédict d’HectorBerlioz à l’Opéra-Comique etLaGrandeMagie d’EduardoDeFilippo à laComédie-Française.

Jeanne Labib-Lamour, costumes –Née en 1982,Jeanne Labib-Lamour manifeste tôt ungrand intérêt pour le monde de la mode et du costume.Elle intègre en 2001 la prestigieuseSaint Martins School,obtenant un diplôme en stylisme avec félicitations du jury.En 2006,ellerejoint l’équipe créative de Balenciaga comme responsable des cahiers d’inspiration et desimprimés ; sa passion pour la peinture, la photographie, l’histoire de l’art et du costume y estparticulièrement mise à profit.En 2009, après deux ans chez Giambattista Valli, elle se met àson compte etmultiplie les projets de stylisme,de création d’imprimés et de costumes de théâtre.

Bruno Coulais, musique originale – Bruno Coulais s’oriente vers le cinéma suite à unesérie de rencontres,François Reichenbach lui confiant en 1977 la musique du documentaireMexico Magico. Après Qui trop embrasse de Jacques Davila, il est remarqué pour son travailavec Christine Pascal et Agnès Merlet.Le grand tournant a lieu avecMicrocosmos (César dela meilleure musique de film etVictoire de la musique). Il alterne grosses productions et filmsd’auteur.En 2005, il dirige dans la cathédrale de Saint-Denis son StabatMater avec RobertWyatt et Guillaume Depardieu. Il vient de recevoir un Annie Awards pourCoraline d’HenrySelick. Il a composé la musique des Oiseaux d’Aristophane,mis en scène par Alfredo Arias,Salle Richelieu du 10 avril au 18 juillet 2010.

Alexandre Steiger, musique originale – Issu du Conservatoire national supérieur d’Artdramatique,Alexandre Steiger compose,parallèlement à son travail de comédien, la musiquede Léonce et Léna qu’il met en scène en 2007 et deGrief[s], créé par Anne Kessler au Studio-Théâtre de la Comédie-Française en 2006.

L’équipe artistique

Administrateur général Muriel Mayette Directeur délégué Anne Pollock Coordination éditoriale PatrickBelaubre, Pascale Pont-Amblard, Chantal Hurault Photographies de répétition Brigitte EnguérandConception graphique Herbe Tendre Media © Comédie-Française Réalisation du programme L’avant-scène théâtre Impression Imprimerie des Deux-Ponts - Eybens, mars 2010

Licence n° 1-1001069 / Licence n° 2-1001070 / Licence n° 3-1001071