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Les naufragés de l’art Exploration. Entrez dans la matrice fictionnelle que devient l’exposition « Intense proximité ». Laissez vous guider... sentez-vous l’esprit des lieux grâce à Nina Canell? poussez les portes du jardin secret d’Adéagbo... peut-être croiserez vous par là les journalistes de New State Information? Il est toujours possible de monter à bord des véhicules de Maljkovic pour faire un petit tour dans le Palais de Tokyo... Pause. Suspension du temps, des jugements et des a priori. Fiction en cours d’activation. Notre tête est placardée au mur comme dans la sphère d’Adéagbo. Play. Attention, une sensation de perte de repères spatio-temporels risque de s’emparer de vous, une certaine apesanteur, de vous transporter. Peut-être flotterez-vous tel le petit caillou de Nina Canell ? Stop. Notice : exploration réservée aux petits comme aux grands sans limitation de temps ni de quantité (pour vérifier, compter les graines de pastèque à côté du palmier électrique). Play. Vous serez durant quelques moments des nau- fragés de l’art, en quête d’œuvres intemporelles. En sautant de bulle en bulle, en voyageant du passé au futur pour revenir au présent, la collision des temps ne formera plus qu’un monde. Un peu sous pression, certes, si l’on en croit les planisphères de Batoul S’Himi. Apesantez-vous ! Dès votre entrée, respirez à plein poumons vous rendra capable d’assimiler plus vite. Avec 5% d’oxygène en plus, vous pourrez aller en- core plus loin... Texte écrit par A. Castelas Visite-fiction réalisée par les étudiants du parcours Arts et culture de l’Université Paris 13 - Nord parcours-fiction - partenariat pédagogique éducalab

Les naufragés de l’art

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Exploration. Entrez dans la matrice fictionnelle que devient l’exposition « Intense proximité ».Laissez vous guider... sentez-vous l’esprit des lieux grâce à Nina Canell? poussez les portes du jardin secret d’Adéagbo... peut-être croiserez vous par là les journalistes de New State Information? Il est toujours possible de monter à bord des véhicules de Maljkovic pour faire un petit tour dans le Palais de Tokyo...

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Page 1: Les naufragés de l’art

Les naufragés de l’art

Exploration. Entrez dans la matrice fictionnelle que devient l’exposition « Intense proximité ».Laissez vous guider... sentez-vous l’esprit des lieux grâce à Nina Canell? poussez les portes du jardin secret d’Adéagbo... peut-être croiserez vous par là les journalistes de New State Information? Il est toujours possible de monter à bord des véhicules de Maljkovic pour faire un petit tour dans le Palais de Tokyo...

Pause. Suspension du temps, des jugements et des a priori. Fiction en cours d’activation. Notre tête est placardée au mur comme dans la sphère d’Adéagbo.

Play. Attention, une sensation de perte de repères spatio-temporels risque de s’emparer de vous, une certaine apesanteur, de vous transporter. Peut-être flotterez-vous tel le petit caillou de Nina Canell ?

Stop. Notice : exploration réservée aux petits comme aux grands sans limitation de temps ni de quantité (pour vérifier, compter les graines de pastèque à côté du palmier électrique).

Play. Vous serez durant quelques moments des nau-fragés de l’art, en quête d’œuvres intemporelles. En sautant de bulle en bulle, en voyageant du passé au futur pour revenir au présent, la collision des temps ne formera plus qu’un monde. Un peu sous pression, certes, si l’on en croit les planisphères de Batoul S’Himi.

Apesantez-vous ! Dès votre entrée, respirez à plein poumons vous rendra capable d’assimiler plus vite. Avec 5% d’oxygène en plus, vous pourrez aller en-core plus loin...

Texte écrit par A. Castelas

Visite-fiction réalisée par les étudiants du parcours Arts et culture de l’Université Paris 13 - Nord

parcours-fiction - partenariat pédagogique éducalab

Page 2: Les naufragés de l’art

Nina Canell, Oxygen Room, 2012

Selon Borges, il existe un point dans l’univers dans lequel il y aurait inclus l’univers lui-même. Ce point Borges l’appelle « L’Aleph ». Il paraît que dans la plu-ralité et la diversité d’un lieu appelé Palais de Tokyo, il existe aussi un point précis qui permettrait au public d’accéder à toutes les œuvres par le biais d’un seul réseau. Ce point a pour particularité de diluer la ma-tière et l’absorber ; pour le trouver il faut tout d’abord être attentif à tout ce qui entoure l’entrée de ce Palais, regardez à gauche et à droite... et surtout marchez tout doucement en regardant les bas des murs, puis atten-tion à l’escalier !

Vous l’avez trouvé ? Prenez garde, cher Visiteur, ce point peut vous tromper car sa fonction habituelle n’est pas d’absorber mais de laisser couler…

Je me suis permis d’expérimenter avant vous, cher Visiteur, cette œuvre. Mais pour la trouver il a fallu tout d’abord me libérer. Pour ce faire, je suis passé de l’autre côté. Mais ne vous inquiétez pas, il ne s’agit pas d’une pratique sombre, il vous suffit, pour vous libé-rer, de traverser et de respirer, ou de respirer, puis de traverser. Vous sentirez le changement tout de suite. Ah, vous le sentez déjà ? Les idées ne seraient-elles pas plus claires maintenant ?

Prenons ce réseau si particulier. D’abord par le toit, ensuite, par les murs. Il vous ramènera à la fin du voyage dans un autre univers : celui des idées toutes crues, 4000 idées différentes, toutes mélangées les unes aux autres, sorties directement de cette grande pastèque qu’on appelle « cerveau ».

Mais surtout, cher visiteur, respirez ! une fois de plus, les idées sont partout dans ce Palais, quelques-unes isolées du reste, à découvrir dans des recoins cachés, d’autres vous invitant à manger un morceau de cette grande pastèque imaginaire.

Oscar Ivan Munoz

Oeuvres à suivre...Haim Steinbach, Gate Valve, 2011Nina Canell, Impulse slight, 2011

David Maljkovic, Out of Projection, 2010

Siège des Automobiles Peugeot. Ah! c’est la crise! Non, pas la crise financière. L’Etat nous a bien aidé avec la prime à la casse et le bonus-malus. Le problème, ce sont nos jeunes designers… plus aucune imagination. Vite une idée, ou nos prochains modèles n’intéresse-ront plus personne...

Un ami journaliste me conseille de faire appel à un certain Maljkovic. Son diagnostic est sans appel : nos jeunes ont perdu la flamme. Sa solution : faire revenir les anciens designers. OK. Mais il faut aussi faire reve-nir certains concept-cars. La rencontre entre passé, présent et futur est censée provoquer un effet salva-teur sur mes bons à rien de djeuns. Pas mal sa théorie. Il vaut mieux que ce que sa couverture de l’Auto-Journal pouvait laisser craindre. Quand j’y repense, on ne distingue rien. L’avez-vous vue? Quoique… Où trouve-t-il son futur? les concept-cars? quelle blague! la plupart ne sont ni dans le présent, ni dans le futur: ils ne roulent pas. Moi, je suis chef d’entreprise. Je fait face à la réalité, je ne suis pas un artiste. Bon. Pour une fois, je vais me laisser convaincre. On verra si ces jeunes retrouveront la flamme, s’ils ne veulent pas trouver la porte. J’envoie ce Maljkovic au centre d’essai à Sochaux. L’un des concept-cars a fait une apparition dans le film Michel Vaillant. Fiction.

Ah, voilà le rapport du jeune homme qui arrive. Il s’agit d’une vidéo. Décidément, il ne fait rien comme tout le monde ce Maljkovic. Mais c’est quoi ces brui-tages? Et ces interviews dans la salle de banc-moteur, on n’entend rien! Et voilà, j’ai fait confiance à un fou. Voilà que j’assiste à une nouvelle séance photo. Nou-velle? Oui, car ces concepts-cars ont suffisamment été mitraillés en leur temps. Eh, des photos couleurs, ce ne serait pas du luxe aujourd’hui! Après les avoir vu en noir et blanc il y a des dizaines d’années, n’auriez-vous pas voulu les voir en couleur aujourd’hui? On a remisé ses affiches dans des coins, pour les oublier! Mais quoi… les jeunes designers se remettent au bou-lot? Je ne sais par quel miracle, la flamme semble être revenue! Ce Maljkovic y serait pour quelque chose? Sa méthode ne peut être à l’origine de ce revirement, non! Ce n’est pas possible!

Olufémi AjayiOeuvre à suivre...David Maljkovic, Out of projection, 2012

Marie Voignier, L’Hypothèse du Mokélé-Mbembé, 2011

« Ici New State Informations, en direct de la zone à risque; celle-ci, sous surveillance des autorités scien-tifiques et policières depuis une dizaine de jours. Le Mbembé aurait encore sévi hier. La bête aurait pour la troisième fois enlevé un enfant, la jeune Dimba, âgée de trois ans. Sa mère est indemne. Elle nous apporte enfin le premier témoignage d’un rescapé. La bête prendrait l’allure d’un eunectes mystique, rapide, muni d’une corne et s’enveloppant de végétaux pour se camoufler. Depuis dix jours, les terres camerounaises vivent dans l’angoisse d’une nouvelle disparition. Le Dmembé frappe à bride abattue : le dos tourné ? Il s’empare de sa proie. Des questions persistent : pour-quoi les hommes sont épargnés ? comment Fahima a-t-elle pu apercevoir cette attaque bien qu’intensé-ment furtive ? Fahima est à mes côtés, posons-lui la question. Fahima ? Fahi.. ? Oh, mon dieu! COUPEZ ! COUPEZ!! »

« Hum. New State Information de retour au studio. Il semble qu’un incident technique soit intervenu. Mesdames, messieurs, en l’absence de témoignage, devons-nous croire à la possible existence du légen-daire Dmembé ? S’agit-il d’actes commandités par des organisations clandestines visant à déstabiliser le régime en place ? Sommes-nous vraiment confrontés à une information paranormale ? Voici avec nous Michel Ballot, explorateur français qui s’est donné pour mission de partir à la recherche de cet animal mystérieux. Racontez-nous, Michel Bal-lot, ce que vous avez pu déjà apprendre de cet animal :– La légende dit que le Dmembé serait né sur l’île Douamou, à 1000 kms de l’Angola, ce qui rend très mystérieux un déplacement aussi long. Une discus-sion avec Anca Benera, spécialiste de la faune mytho-logique, nous a indiqué que la piste du fantastique n’était pas à négliger : certes, cela paraît difficile à ima-giner, mais sur place, tous les gens que j’ai rencontrés y croient dur comme fer, et le film en témoigne... »

Manon Lecomte

Oeuvre à suivre...Anca Benera, Warsaw Wild Life, 2008

Georges Adeagbo, La porte, derrière la porte...! Qu’est-ce qu’il y a derrière la porte..?, 2012

En entrant dans la Galerie Seine, il y a une étrange pièce : une mosaïque de coupures de presse nous confronte à l’actualité. Un assemblage d’éléments qui n’ont pas de liens entre eux, cela ressemble à un moyen d’échapper à sa propre vie. Nous passons du calme avec Jean-Jacques Rousseau, auteur d’une célèbre écri-ture de soi à des affiches chocs de manifestations du Front National. On fait appel à l’imagination dans ce tourbillon d’informations, seule issue que nous laisse l’artiste. La surprise laisse alors place à l’amplification des émotions. Le calme, le désir d’être bien prennent le dessus. On oublie le reste. On entre dans cette sphère où est suspendu autour de nous un fatras d’images et d’objets. Mais le monde dehors continue de tourner, nous laissant glisser vers l’inquiétude. On se perd, on se ressaisit, on retrouve le moyen d’échapper, mais invariablement, on revient à l’angoisse. Il faut faire quelque chose pourtant. On commence alors à récol-ter, assembler : livres de poche, journaux, statuettes africaines, pho-tographies, icônes, sacs, vêtements d’enfant, cartes postales, symboles religieux, disques pop.... On bâtit nous aussi, cette sphère qui nous sert de terrain d’atterrissage à la réalité. Un jour on la quitte, pour nous livrer à l’excès, une transe de bonnes choses, de sensations agréables, jusqu’à ce que cet excès devienne la source d’un mal plus profond encore. Accourons vers la sphère, pour respirer un peu. Symboles reli-gieux, figures politiques pour retrouver espoir malgré ce sentiment d’abandon. On retourne à l’imaginaire. Mais réalité et imagination sont toutes deux baignées d’excès. Et lorsqu’on arrive à cette constatation, on se rend compte qu’on vit dans un fatras total, nocif à notre équilibre mental ! C’est alors que le sexe arrive comme une source de libération. Les peintures et les écrits sur le corps contribuent à cet assemblage d’informations. La nudi-té intervient comme un moyen de garder le contrôle de son corps face à l’esprit qui s’échappe et se perd. Dans cette partie de l’exposition, petit module isolé au milieu du tout, le désir de transgression des règles nous traverse soudain. Et notre corps et nos sens se mettent à agir sous l’influence d’un esprit désinvolte, avant de ressortir vers la lumière.

Lydia OccibrunOeuvre à suivre...Zdenek Kosek, Je suis le cerveau de l’univers, 2009