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TOPONYMES .CRÉTO-MYCÉNIENS DANS UNE LISTE D‘AMÉNOPHIS III

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  • PAUL FAURE

    TOPONYMES RETO-MYCENIENSDANS UNE LISTE D'AMNOPHIS III

    (environ 1380 ayant J. C.)Au printemps de 1964, les fcmilleurs de Tlnstitut suisse de

    recherches architecturales et d'^tudes de l'antiquito, diriges par leprofesseur Ricke, dogageaient la grande cour du temple funeraired'Amenophis III a Km el Heitan, dans l'ancienneThebes d'Egypte.Sur les socles de 5 statues colossales du pharaon, situees entre lescolonnes, dans la partie Nord-Ouest de la cour, se lisaient originaire-ment environ 130 noms de pays ou de peuples connus des Egyptienset, en principe, envotos par la toute puissance de leur souverain.Parmi les 76 noms en tout ou en partie conservos, les plus remar-quables sont ceux du socle le plus septentrional: ils sont cens6sreprosenter, comme le dit rinscription qui court au-dessus de leurscartouches, tous les pays plats difficilement accessibles de Fex-tremite Nord de TAsie . n lit en outre: Tous les peuples des Fnhw(les Charpentiers du Liban, c. d. les habitants des ctes d'AsieMineure) et du pays au Sud du Hn-nfr (le Monde en ordre , ou leBon Ordre , c'est--dire les Nubiens) sont aux pieds de ce dieubon . Et pour qu'on n'ignore pas les protentions du pharaon ladomination universelle, on lit eiifin sur le long coto gauche: Les[princes] de tous les pays etrangers du Sud et du Nord qui, depuisle temps [de Dieu] (c'est--dire depuis Tantiquito) n'avaient pascoutume (ou n'osaient pas) venir en Egypte, y viennent a genoux,comme un seul homme, pour recevoir le souffle de vie en [apportant]leur tribut.

    Sous chacun des deux noms du pharaon figure un prisonnierenchaine. A droite sont dessins deux cartouches; a gauche, .douzeautres et le fragment d'un treizieme. Le Dr. K. A. Kitchen, pro-fesseur d'ogyptologie a TUniversito de Liverpool, a fait connaitre lepremier, en 1965, dans les Orientalia1 neuf cartouches.complets

    1 K. A. Kitchen, Theban Topographical Lists, Old and New, Orientalia NS 34,

    1965, 56 et pl. II (4), IX (11). Lectures reprises et commentoes par MichaelC. Astour, Aegean Place-Names in an Egyptian Inscription, AJA 70,1966, 313317

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  • Toponymes Cr6to-Myc6niens dans une liste d'Amonophis 139i i

    du long c t6 gauche. Puis, tanciis qu'il s'employait avec le professeurAlbright a identifier les toponymes2, M. Elmar Edel proposait a uncongres tenu . Athenes en octobre 1965 une Interpretation cr6to-myconienne de Tensemble du socle inscrit, et en proparait la publica-tion d6taill6e, Celle-ci a par dans les Bonner Biblische Beitr gesous le titre Die Ortsnamenlisten aus dem Totentempel AmenophisIII., Bonn en 1966, p. 3360, suivie (Tun long commentaire surle Systeme de voca sation employo dans les inscriptions du sanctu-aire. Pour r&pondre au voeu du regretto Ernst Grumach, nous nousproposons ici de suivre la meine num6rotation des cartouches et desugg&rer des lectures nouvelles3. Nous tenons a remercier parti-culierement nos collegues Robert P. Charles, Jean Leclant, PaulBarguet et Serge Sa neron qui, de Paris, de Lyon et de Karnak,nous ont aid6 de leurs lurnieres et de leurs conseils.

    Si nous laissons momentanoment de c to les cartouches n l(le pays K-f-tj^w) et n 2 (Tj-nl -jj-w), isoles a droite et quis'oclairent apparemment par la nomenclature suivante, nous lisons,face au prisonnier de gauche:

    1. ^^^&^ A-m-ni-s-l. Ce nom, qui semble avoir 6t6 gravsur un autre eff ac*, est la transcription du nom d'un des deux portsde Knosos, $; en lineaire B A-mi^ni-so (e. g., KN Gg 705, 1).On notera Temploi d'une chuintante pour rendre la sifflante.

    2. f >/ Bi-$a-ja. La lecture des 5 premiers signes(t -jj--) de ce cartouche fort endommago ne f ait guere de difficulto,sinon que le groupe bl, qui sert normalenient a transcrire bi, estparfois vocaliso ba dans le cas de mots asiatiques6. Mais la deuxiememoitio du toponyme est a peine lisible, non seulement parce que lasurface de la pierre est tres dotorior^e, mais surtout parce que les

    2 K. A. Kitchen, Aegean Place Names in a List of Amenophis III, Bulletin of the

    American Schools of Oiiental Research, n 181, . 1966, 23 24 (mention, delettres du professeur Albright des 18 et 19 juin 1965, identifiant Nauplie et Cyth&re).

    8 Nous avons d^j donno Tune d'entre elles dans , t. XIX, 1965

    (impruno en aout 1967, publi en rnars 1968) dans un article intitulo Sept nouvellesvilles de la Crdte antique, p. 230 (n 9: ? peut-etre l'Elea ou Elaea de Pline,N. H., IV, 59: baie de Kissamos).

    4 D'apres une lettre de M. Haeny, de Louxor, en date du 16. 3. 1966, citoe par

    E. Edel, o. c. 38, et la photo, on lisait d'abord A-m-ni-l-jj5 Wolf gang Helck, Die Beziehungen gyptens zu Vorderasien im 3. und 2. Jahr-

    tausend vor Chr., Wiesbaden 1962, 557 558. Cf . dans le temple fu^raire d'Ameno-phis III Thebes, sur le socle DN, le toponyme n> 11 gauche (6^-6-/V = Babilu) :E. Edel, p. 73.

    10*

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  • 140 Paul Faure

    signes en recouvrent d'autres plus anciens et mal effacos. Apr s le- on distingue un aleph substituo , un ancien w, les traces (Tuntrait vertical (sur un aleph effaco?), un roseau et, semble-t-il, quel-ques restes d'un autre roseau. II ne me paralt pas possible (Tinter-proter le trait vertical soit comme un aleph6 soit comme un t1,pour des raisons de phonotique d'une part et de gravure de l'autre.Qu'il s'agisse d'un j nouveau bu d'un l ancien ctetruit, la finale sepr sente comme celle du toponyme qui suit -\jj, et on la transcriten -ajas. Nous verrons encore aux nos 7 et 9 deux toponymes auxfinales analogues. Mais ni en Grece continentale, ni en Crete on neconnait de forme absolument identique. Tout ce qu'on peut citerde plus proche ce sont , le territoire de Pisa sur FAlphoe9,en Elide, et , port de la c te Nord de Crete, actuel $10,o a trouvo des tessons MR III. L'initiale fait difficulte a moinsque celle de , attestoe plus de 1000 ans apres notre inscription,ne resulte d'une assimilation tardive. Le nom de proposepar E. Edel me semble exclu phonotiquement et opigraphiquement.

    3. 4* ^ Ku-tu-na-ja. La finale de ce nom, qui est exacte-ment -nl-jj, pourrait aussi se transcrire -ni-ja,. si admettaitTanalogie, proposoe par E. Edel11, de la syllabe initiale du nom dela desse hittite Ninatta. On serait encore plus pres des formesku-do-ni-ja du linoaire B knosien et du grec classique.EUes dsignent Tactuel port de La Canoe, sur la c te Nord-Ouestde la Crete. Les fouilles menoes depuis 1964 sur la butte de Kastelliconfirment ce qu'on savait par les trouvailles faites antorieurementdans 4 quartiere de la ville et par la tradition littoraire: c'est qu'ils'agit d'un site minoen consid&rable, particulierement florissant

    6 Solution propos^e avec des r^serves par MM. Haeny, Arnold et Settgast, citos

    par E. Edel, p. 38. La photo prise par M. Sauneron fait apparaitre un ;7 Hypothese d'E. Edel, p? 418 P'apres les correspondances de W. F. Albright, The vocalization of the Egyp-

    tian syllabic rthography, American Oriental Series, n 5, 1934, 45, n + l est lu na-.Les 2 jj transcrivent -ia. Une lecture avec 3 roseaux aboutirait au mme rosultat;de m^me, si un roseau avait disparu entre les deux alephs proposos par M. Haeny,ci-dessus, n. 6. La gravure primitive me parait avoir 6t4 by-jj-$-w-h\-jj

    9 Pausanias, V, l, 67; VI, 21, 45. On connait aussi un mont en

    B6otie, mais ce n'est ni un peuple, ni une ville, ni un territoire.10

    P. Faure, Kp. Xp. 1965, 229; BCH 1966, 930; Rev. Arch. 1966, 55^56. Ce site,riche en m6taux, se trouve environ 25 km l'Ouest de H&rakleion. Le nom de, sur la cote Sud de Gr te, semble trop difforent de Bi-ga-ja.

    11 O. c. 75

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  • Toponymes Crto-Myconiens dans une liste d'Amonophis III 141i 4

    aux MR III B et C1*, et dont la production c^ramique ressemble tonta fait a celle du Pdloponftese.

    4. 5. CTT=13^^1^"^0~ Dl-ql-fi-s. Le groupe des deux premiers signesse lit gonoralement di-, et c'est la transcription qu'ont tout d'abordproposee les premiers odite rs15; mais la comparaison avec untoponyme grave sur un a tre socle du meme temple funoraire16montre que la valeur de- est encore possible. La seconde syllabefait plus de difficulte : le plus souvent, dans les inscriptions de cetteepoque, eile note le son qa (= gha), mais on rencontre aussi lesvaleurs qi et qu1*; et la vocalisation normale peut etre modifiee parles 3 signes qui suivent et qui rendent probablement une diphton-gue. Si bien que Tequivalence suggeree par M. Astour, avec le mont, est tout a fait impossible, tandis que celle de M. Kitchen,avec un nom comme Tegea, peut au contraire se soutenir. En tenantcompte du -s final, on lirait soit Teyecxis, soit ; lecture d'au-

    12 Cf. en dernier Heu, Jannis G. Tzedakis, Zeugnisse der Linearschrift B aus

    Chania, Kadmos 6, 1967, 10610913

    E. Edel, o. c. 43, qui onumere divers objets ogyptiens trouv^s Mycenes, dont3 contemporains d'Amonophis III.

    14 VeUeius Paterculus, I, l, 2; Didyme, Od., XIX, 175; Eustatbe, Od., 1861;

    Dictys de Crete, VI, 2. Chez Pline, N. H., IV, 59, le nom de Myrina, apr&s Polyr-rhenum, est une mauvaise Ie9on pour Mycena. Discussion sur cette localisation parE. Kirsten, Vordorische Griechen in den Dorier-Poleis Kretas ? )B ' /s , AtMnes, ju let 1968, II, 6163.

    15 K. A. Kitchen, BASOR 1966, n 181, 24; M. C. Astour, AJA 1966, 314. Cf.

    Helck, o. c., 599, 60216

    Le socle BN, cartouche n 8, gauche: E. Edel, o. c. 1920 et 66: dt-i17 Helck, 597; E. Edel, 13, 65

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  • 142 Paul Faure

    tant plus plausible que le nom de Tge est plusieurs fois mentionnopar les Grecs au pluriel (ex. Diodore, XI, 66, 3). Or il ne s'agit pas,

    mon avis, de la cito d'Arcadie, mais plut t de la cito cr^toise deTeycc(i)que les textes antiques18 attribuent a Agamemiion, ou sonh6raut Talthybios, etrapprochent, commelaprocodente, de Kydonia.On aurait donc jusqu' pr sent une liste de 5 cit s cotifcres ou portsde lOuest de la Crete: Amnisos, Bisaia (= ?), Kydonia,Mykanai, TegeaL

    6. ^^~"*3&3 Mi-da-na. Le d ogyptien transcrit normale-ment le zam et le $ad6 somitiques, si bien que l'oquivalence laplus exacte de ce toponyme, accompagno du determinatif pays ,est le nom me-za-na du lineaire B de Pylos (P Cn 3, 1; Sh 736),dont la valeur reste d'ailleurs incertaine. L'importance des decou-vertes MR III faites a Pylos et dans les environs contraint a penserque Mi-da-na reprosente la Mess&iie, en dorien . Toutefoison ne saurait oublier que Th^rome mythique qui a donnoson nom ce pays etait une Argienne, la fille du roi d'Argos,Triopas, ou la petite-fille d'Argos, et que Mi-da-na a pu dosigner laMessenie et une partie de TArgolide. Un rapprochement avec le nomdes ports de et de parait exclu : 1) cause dudoterminatif pays ; 2) cause de la valeur du d gyptien (z, puis

    rj9 ^ u q [vvj Nu-pi-ri*ja, ou Nu-pi-li-ja. Accompagne du deter-minatif pays, ce nom dosigne la rogion de Nauplie, ou abondentles restes MR III, notamment au flanc Est du fort Palamede : 50tombes chambre y ont et fouillees entre 1878 et 191620. La forme du grec classique est peut-etre la rofection tardive d'un

    18 Velleius Paterculus, I, l, 2; Etienne de Byzance, v . En outre, les

    mythographes donnaient au horos T g6at6s 4 fils, fondate rs des villes crotoises de^Kydonia, Arkadia, Gortjrn et Katr&: Pausanias, VIII, 53, 4..

    l La lecture de la finale n'est pas assuroe: apr s le n, on ne sait s'il faut placer

    Taleph au-dessus ou au-dessous du roseau, ni si celui-ci n'est pas la graphie simpli-fi e d'un jjt faute de place. E. Edel, o. c. 39, 44, 55, 94, ocrit tantot mdnj, tant tmdn\ K. A. Kitchen, p. c., 24, s'en tient Midana et consid&re la lecture Messeniacomme trop difficile, bon droit. Astour, o. c., 314315, transcrit Mi-dja-na.

    20 Ce sont, selon toute apparence, les labyrinthes construits par les Cyclopes dont

    parle Strabon, VIII, 6, 2 et 11 (source probable: Artomidore d'Eph^se, vers 100avant J. C.). Sur les fou les de la rogion, voir 1878,183201; 1879, 411;517523; Ath. Mitt. 1880, 143163; 1892>(paru en 1895), 5254; 1916,8384; Syribpoulos, *H TTJS , Ath nes 1964. 90.

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  • Toponymes Croto-Myc&nenS dans ne liste d'Amonophis III 143l i

    mot pr hell nique saris diphtongue initiale21. De la m6me maniere,les occupants Italiens de la r^gion transformerent le nom grec enNapoli di Romania par fausse Etymologie. -

    8. V34"7c^ Ku-ti-ra. C'est le 3eme toponyme d'affitee aocompagno du doterminatif pays . II s'agit de Tue de Cythere/ , colonie crdtoise certaine pendant l premiere moitio du2eme millonaire, et colonie myc nienne au MR III B, dont le nomparait bien attesto dans Tethnique (? ) ku-te-ra-o de Pylos, lameine 6poque2?.

    9. ^"9 Wi-ra*ja, ou Wi-la-ja. L'exemple du Seme car-touche de gauche grave sur le 2eme socle du meme temple funeraireprouve que la voyelle qui suit le W initial est T^quivalent d'un aimonophtongu^ en e23. En consoquence, je crois qu'il n'y a paslieu de rapprocher ce nouveau toponyme d'un ^FiAtos hypothotiqueet encore moins de supposer la moindre allusion au royaume deTroade en Asie Mineure, comme Tont fait MM. Kitchen et Edel24.Ce qui correspondrait le mieux aux signes hioroglyphiques s'Ecriraiten grec , ou . Or Pline TAncien, dans son Histoire Na-turelle, IV, 59 (120), nous fait connaitre sur la c te Nord-Ouest dela Crete, entre Phalasarna et Kissamos, Texistence d'un port Eleaou Elaea dont on peut situer Tacropole sur la butte de Selli a 3 kmet denn lOuest de Kastelli Kissamou ; la hauteur est couverte detessons datables de Tepoque minoenne Tepoque hell^nistique : ceuxdu MR III y sont particulierement nets25.

    10. V 9 9^2S^ Ku-nu-sl. L'aleph final rend la vocalisation dela derniere syllabe incertaine Nous avons l T^quivalent du ko-no-sodes textes Berits en unfaire B et de la Kvcoaos classique. Commedans le cas des nos 1,2 et 11, on remarquera la chuintante s.

    11. ^ Sr1 '^'^ ^^^ A-m-ni-s$. C'est exactement le meme nom qtfele n l, mais sans surcharge ni tassement des signes. Le port de

    21 Le rapprochement de Nu(nau)-pi-li-ja avec a 6t6 fait par W. F.

    Albright en juin 1965, de meme que celui de Kutira avec : Katchen, o. c. 23.22

    PY Ad 390 et 67923

    E. Edel, o. c. 19 et 7024

    Kitchen, BASOR 1966, 24; Edel, o. c. 4648. J'ai, au contraire, doj pro-pos le nom d'Elea-Elaea dans XIX, 1965, 230.

    25 Sur les sondages faits en ce Heu, cf. . . . . 1938, 604606; .

    . 1942/4, . 1; BGH 1965, 58

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  • 144 Paul Faure

    Knosos, se trouve ainsi deux fois mentionno, mais, cettefois, dans un itin&raire qui va en sens inverse, dOuest en Est.

    12. TT^^ 9 Ri-kl-tj, ou Li-ky-tj. La premiere Identification avec5, ru-ki-to du lin aire B, a faite par K. A, Kitchen des 1965et ne parait devoir soulever aucune difficulto, sinon que les ruinesconsid&rables de la Lyktos archaique, classique et romaine que nousconnaissons entre les villages de Xidhas et d'Askous (Pediados),sont a 12 km de distance de la mer. Selon une tradition isoloe,relevoe par Hesykhios, Fanden nom de cette ville aurait Kccp-. Faut-il supposer qu'entre l'poque d'Amenophis III etTopoque archa'ique les habitants de la c te se sont rofugios danscette cito au nom prohell&iique ?

    13. WM 9 A] .[....] jt [. . . . .], ou [.. . .] 't [. . . .] Sinoussuivons le parcours dOuest en Est suggoro par les 5 numros -c6dents, je ne vois qu'un seul nom de port crotois de la cote Nordque puisse proposer pour comploter ce dernier c rtouche : c'est, parfois ocrit et *. On est s r par d'innombrablesdocouvertes qu'il a servi de port la valloe de Praisos depuis leMinoen Moyen jusqu' nos jours.

    Ici, la pierre est brisee et Ton ne sait combien de cartouchesmanquent. Mais en consid&rant les 13 que nous possedons, eri toutou partie, nous pouvons constater qu'ils se ropartissent en troisgroupes distincts :

    1) les cinq premiers correspondent, semble-t-il, 5 noms de portsde la cote Nord de la Crete, &mm&^s d'Est en Ouest;

    29) au centre de la liste, 3 noms de pays repr^sentent dans laGrece myconienne la Messonie, Argolide et Tue de Cythere ;

    3) les cinq derniers cartouches correspondent, semble-t-il, 5noms de villes ou ports de la cote Nord dela Crete, &mm6res^dOuest en Est, et Tun d'entre eux, Amnisos, figurait d6j dans lapremiere liste, ou il recouvrait un nom efface.

    Si Ton peut parier d'un itinoraire de navigation, ce serait unitin^raire d' aller et de retour et dont le centre reste fort imprcis.Le compilateur, au total, ne disposait que de deux sortes de noms:des noms crotois assez nombreux, des noms de territoires myconiens.

    Ces deux sources d'informationnouspermettent sahsdoute d'inter-proter les cartouches isol s de droite que nous avons roserv s. Si lepremier "^'^J^Ciig, le pays k-f-tj-w, reprosente bien, comme on

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  • Toponymes Croto-Mycniens dans une liste d'Amondphis III 145i i

    peut Tadmettre apres les tudes tres serroes de M. Jean Vercoutter26,Tue de Crete, le second; H~~'0?^/ tj-nl-jj-w, ne correspond-ilpas nocessairement aux trois rogions myconiennes, comme une tetede chapitre, un r6sum, une appellation d'ensemble ? d'autant plusqu'une fois au moins dans r^pigraphie ogyptienne il reparait ac-compagno du mot keftiou: dans le tribut apporte en l'an 42 du regnede Thoutmosis III (vers 1450 avant J. C.), on voit provenir dupays de Tj-nl-jj, un vase d'argent S () -wa-b-ti (en fait, une cruche abec court et a une seule anse) de travail keftiou, avec 4 vases decuivre (ou de fer, bjl ?) a anses d'argent ?7. Dans une liste stroo-typee de l'opoque d'Ameiiophis III trouvoe dans le temple d'Amon-Re a Karnak28, le meme toponyme est mentionne entre Ougarit etAlasia (Chypre). Aussi a-t-on proposo depuis une cinquaiitained'annees de le situer en diff&rents endroits de la Syrie, de la Pa-lestine, de Chypre ou de la cte Sud de l'Asie Mineure. E. Edel seraittento d'y voir le nom d'une grande ile, Rhodes, escale minoenneentre Chypre (Isy) et la Crete (Keftiou)29. Ce ne sont la que deshypotheses et elles expliquent assez mal l'6troite association du payskeftiou et du pays tj-nl-jj-w, qui nous est maintenant assuroe pardeux inscriptions.

    Pour connaitre ce pays myst&ieux, on peut encore recourira la vocalisation des syUabes, malgro les incertitudes auxquelleson se heurte dans ce genre de recherches. Le principe le plus surconsiste a comparer les noms propres des listes gyptiennes a leurshomologues des inscriptions asiatiques ou des textes bibliques. Ons'aide aussi des lectures assuroes dans les toponymes du memeensemble opigraphique. En combinant ces mothodes, la lecture laplus probable du nom qui nous int&resse est Ta-na-jouy dans laquellele w final parait analogique de celui de K-f-tj-w et des finales denominatifs s&nitiques, si abondants dans les listes du meme templeftu^raire. Wolfgang Helck, qui a rassemblo le plus grand nombre de-ces correspondances, propose de lire le nom en question Ta-na-jadans la liste ddj citee des tributs livros Thoutmosis III. On com-

    26 J. Vercoutter, L'Egypte et le monde 6g6en prohell^nique, Etde critique des

    sources ogyptiennes, Le Caire 1956, spcialement p. 116122, 39439527

    J. Vercoutter, o. c. 555628

    P. Johannes Simons, S. J, Handbook for the study of Egyptian topographicalLists relating to Western Asia, Leiden 1937, n XII, date cette liste de l'poqued'Haremheb (environ 1328 1^306 avant J, C.). La comparaison avec une autre listedu meme sanctuaire, contenant des noms de rois, et le style des statues obligenta remonter de 3/4 de sicle la Chronologie: cf. E. Edel, o. c. 51.

    29 E. Edel, o. c. 5455

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  • 146 Paul Faure

    parera aussi, dans notre temple thobain d'Amenophis III, les finalesdes toponymes n08 2 et 3 qui prosentent les m&nes hi&roglyphes:la gravure du n 3 (Ku-tu-na-ja) est particulierement ressem-blante30.

    Or comme, dans ce dernier cas pr6cis6ment de la nomenclature,le t ogyptien correspond un d og^en, je me demande si les formesTa-na-joii/Ta-na-ja ne masquent pas le pays bien connu des ,c'est- -dire essentiellement des habitants de l'Argolide. Cetteoquivalence aurait au moins de donner un contenu histo-rique la legende des filles de Danaos et des fils d'Egyptos, sitroitement attachoe la rogion de Nauplie et d'Argos. Les mytho-

    graphes, les poetes tragiques grecs nous ont largement racontecomment les deux freres rivaux, descendants d'Epaphos (= Apopi,Pharaon de la 2eme Periode interm^diaire, vers 1600 av. J. C.)31,s'taient disputo la possession de TEgypte et de la Libye, commentDanaos s'otait emparo de l'Argolide et l'avait irriguoe, commentses filles, les DanaMes avaient massacro les fils noirs d'Egyptos, leurscousins, Texception d'un seul, Lynkeus, sauvo par Tamourd'Hypermnestre. Ce dernier mariage aurait eu lieu vers 1440 avantJ. C.32. A Tepoque classique, 3 villes argiennes attribuaient leurfondation des Egyptiens : , ou , 60 stadesd'Argos dans le vallon de Tlnachos, cr4ation de Lyrkos, fils deLynkeus TEgyptien, et d'Hypermnestre la Danaide; ^Apyos, capi-t le successive de Danaos, de Lynkeus et d'Abas, fils, lui aussi, deLynkeus et d'Hypermnestre33; , dont Pausanias, IV, 35, 2,nous dit qu'elle avait fond^e par des Egyptiens et par Nauplios,

    30 Meme E. Edel, qui refuse, p. 37, 75 et 95, de vocaliser Tnj, ne peut s'enip^clier,

    p. 54, d'ocrire Tanaja. Si nous admettons que la finale de Ku-tu-na-ja (n 3) doitse lire plutot -ni-ja, on lira par analogie Ta-ni-ja. Je ne vois pas de correspondancerigoureuse dans le domaine crotomyc& en: les villes crotoises de Th^nai, de Tanoset d'Itanos, la ville messdnienne d'Andania me semblent phonotiquement diffo-rentes. D'autre part, le doterminatif normal de Tj-n\-jj dosigne un noin de pays oude.rgion.

    . 31

    J'accepte sur ce point les oquivalences si f6condes proposoes par Jean B6rard :Les Hyks s et la logende d'Io, CRAI1951, 445447; Recherches sur la Chronologiede l' poque myconienne, M6m. prosentos l'Acad. des Insc. et B. L. XV, l, 1960,5759.

    32 Sur les Danaides (gonoalogie et caractere de succession matrilinoaire), v. E. A.

    S. Butterworth, Some traces of the Pre-Olympian world in Qreek litterature andmyth, Berlin 1966, 2742. Les Anciens comptaient quatre gon ratioris* d'Epaphos

    Lynkeus et Hypeirmnestre.83

    ApoUodore, BibL, II, 2, 1; Pausanias, II, 16, 2'; X, 35, 1; Schol. Eur., Or.,965; Servius, En., III, 286

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  • Toponytnes Crdto-Mycoiiieiis dans une liste d'Amdnophis III 147i i

    fils de la Danai'de Amym ne. Or Na plie se trouve dans notre listed'Amenophis III. Si ajoute que la fille ou la petite-fille du roid'Argos Phorbas, Messene, porte le m&ne nom que le eme topo-nyme de notre liste ogyptienne et qu'un ogyptologue aussi soigneuxqu'Elmar Edel a vu le nom de Mycenes d'Argolide so s le 4emetoponyme, Mu-ka-nw, on peut etre terit6, pour retrouver une s&iecontinue, de chercher un autre nom argivo-danaen sous le 5emetoponyme : D>-ijrjy-s, avec soii etrange s final34, serait-il la trans-ciiption maladroite de , la dentale sonore d'Egypte d ren-dant un l interdental bien connu en polasgique35 ? On suivrait ainsiun admirable itinoraire rectiligne : Mycenes (n 4), Lynkeus ouLynkeia(s) (n 5), Messene = Argos (n 6), Na plie (n 7), tout entieren Argolide. L'hypothese Tnj = en sortirait renforcoe. Seu-lement, ce que nous avons dit des villes crotoises d'une part, de lavocalisation probable du n 5 ensuite^ de la prosence enfin du doter-minatif pays sous les nos 6, 7 et 8, tout cela nous retiendra d'allerau-del de ce que nous pouvons lire.

    Nous nous interdirons d'aj outer une lettre au dobut du cartouchetj-nl-jj-w sous pretexte qu' 9 fournirait ainsi une trans-cription meilleure que et ouvrirait d'admirables hoiizons :il n'est pas mentionno de ville attique dans notre liste.

    Et pourtant, c'est Tabsence de cet A initial qui a fait croire pen-dant longtemps que les Dene/Danuna/Danunim des textes g5tiensou semitiques representaient les 36. On sait maintenant par lagrande inscription bilingue de Karatepe qu'il s'agissait non pas desGrecs, mais des habitants d'Adana de Cilicie, en hittite Adanua37.Puisque nous sommes libres de ce c to, nous choisirons, pourtranscrire le cartouche qui sert de tete de chapitre a c t6 de celuides Keftiou, la forme la plus courte, . notre avis, eiledesigne, comme une part importante de la liste, de simples -ponnesiens.

    34 K. A. Ritchen en 1965 avait cru lire non pas nn s, mais une voyelle, qu'on

    transcrit tantot a, tantot w (cL liste BN, n 13, m r fy wf dans le meme templefun^raire d'Amenophis III): Edel, o. c. 39.

    36 C'est le cas de *Za-tt-ri-to-Aa upivOos, U7i#0s-*O5uaaeus, Sila-FiSa, laurus-

    ( en Crete).36

    A. H. Gardiner, Ancient Egyptian Onomastica, Londres 1947, I, 124127;doutes dans Vercoutter, o. c. 144

    37 Isidore Lovy, Les insciip ons de Karatepe, La Nouvelle Clio II, 1950 (3),

    117; E. Laroche, Etudes sur les hioroglyphes hittites, Adana et les Danouniens,Syria 35,1958, 263275; G. A* Wainwright, Some Sea-peoples, Journal of EgyptianArchaeology 47, 1961, 81

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  • 148 P&ul Faure

    Mais quelle que soit la part d'incertitude des lecttires, surtoutpour les toponymes n08 2 (Bisaia ?), 5 (Xegeas, u Lynkeias?) et 9(Feleia ?), les cons^quences qui docoulent du groupement des nomset de la date laquelle ils apparaissent sont considorables. Leurpr^sence non seulemeiit eonfirme en partie ce que la traditionlitt&raire nous apprend des Danaides et de leurs rapports avec lesEgyptiens dans la rgion d'Argos, mais eile nous pruve que lesdiff rents Etats, crtois d'une part, p&oponn&iens de Tautre, taientconsidoros par la politique gyptienne eorame florissants au d6butdu XI Ve siecle avant J. C. Knosos, qu'Evans (P. o. M., IV, 748,944) croyait ddtruite et ruinoe a la f in du XVe siecle, ^tait encoreavec l'un de ses ports, deux fois nomm6, une cito bien vivante, uneg&iration plus tard; Kydonia, ou les fouilles de 1966 viennent demettre au jour un scaraboe d'arge au nom d'Amenophis IIP8,otait a cette opoque un port de commerce actif panni une dizained'autres en Crete. Les historiens et les chronologistes antiques quifaisaient de Minos la fin du XVe siecle le f ondateur de Kydonian'ont donc pas tout fait menti, m&rie si nous ne savons pas quitait Minos39.

    On a pu soutenir que les rapports des Egyptiens et des Crotoisavaient cesso apres 1400 et que le nom du Pays keftiou avit faitplace Texpression beacop plus vague des lies qui sont aumilieu de la Grande Verte, parce qu'lors les Egyptiens ne con-naissaient plus que des souverains mycoiens40: en roalito, nousposs^dons maintenant 3 textes opigraphiques d'Amenpphis IIIdont ce dernier si impoftant, pour nommer les Keftiou ind^pen-damment de leurs voisins. Tout donne doiic a penser que Tune desbelies poques de la civilisatio crtoise fut le MR III A l et. 2,nn setdement Knosos, mais dans File tout entiere. H est pro-

    88 Je remercie M. lannis Tzedakis de m'avoir communiquo une reproduction

    fid^le de ce scaraboe qu'il a docouvert dans un sol bouleverso du KastelK chaniote,sans datation stratigrapMque ovidente* La gravure, qui se lit Nb\ M^'t-R* mry-'R*'(Nebmaatre aim6 de Re), off re des dofonnations si Stranges du signe neb, de Yankh,du corps du Maat, et des deux derniers signes que j'y veixais volontiers une Imitationgjrptisante due la glyptique crotoise. Parmi les bijoux docouverts Sellopoulopres de Knosos en 1968 par l'Ecole anglaise et exposos au Musoe de H^rakleiongute un autre scaraboe au cartouche d'Amenophis III.

    39 Marmor Parium, F. Gr. Hist., n 239, 11 ; Piodore, V, 78, 2 ; Strabn, X,

    476 (cf. Saint Jerome, Chronique 49 b, . Helm). On sait en outre, qu'un port'nommo Minoa se trouvait prs 4 Kydonia, dans la baie de l Sude.*

    40 J. Vercoutter, o. c. 125157 ; 416. Sur le probl&me de Menous (toponyme ?),

    ibid. 159182 ; sur les deux autres mentions des Keftiou ?iu temps d^Amenophis III,ibid. 78 82 . r ' . . - .

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  • A f r a t aJ H e l l i n o s p i l i o

    Nokhia

    Stavros'G uverneto

    Hag, Trias

    Skaphi

    Epano Paleokastro(Polyrrhinia) Kares

    Zimbragos

    Varypetroo ePer ivol iaMegala Khorap( = A p t a r a )

    ...larathll ( - .Minoa)i{Vi A^VjiKoinoKhorio

    Therisso N e a R o u m a t a

    Khosti

    Platyvola* Y Si Drakona Samonas

    PemoniaMel idon i

    Georgioupolis( sAmphimal l a ) ^

    Asprosyki

    10 15 20 25 K I L O M E T R E S

    (sHydramos) .* tPrassis

    Argyroupolis(s Uppa) O n i t h e

    ( s P h a l a n n a )

    Melidoni

    ^^^x^^Prinos 0

    >nx\^-~^-T$tavromeno$ Khoumeri M;akrigianniKhamalevri (sPantomatrion?)

    Pankalokhori

    Axos

    Crfete

    Tawj

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  • 1OO KILOMETRES

    Itinoraire des envoyos d'AmdnophcT en Cr&te et au PoloponnfeseBrought to you by | Brown University Rockefeller Library (Brown University Rockefeller Library)Authenticated | 172.16.1.226

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  • Toponymes Cr6to-Myc6niens dans une liste d'Amonophis III 149

    bable enfin qu'il faudra reviser Tidoe qu'on se fait encore de lathalassocratie crotoise et que tant d'objets ogyptiens trouvos dansles tombes royales ou princieres de Mycenes et de Knoss devronts'expliquer par d'autres risons que le simple behnge commercial.Amenophis III, comme ses prod^cesseurs immodiats, affichait sespr6tentions a une certaine hogomonie sur la Moditerranoe Orientale.Pourquoi n'aurient-ils pas exerco un contrdle, ou au moins unecertaine influence politique et diplomatique sur une partie de laCrete et du P61oponnese, comme, un mill^naire plus tard, quelques-uns des plus illustres Ptol&nees ? .

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