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mardi 7 avril 2015 20 jours de grève à Radio France, nouvelle tribune de la SDJ Il y a une semaine, nous demandions à l’Etat d’intervenir. Nous demandions « la fin de ce match entre la tutelle et le PDG de Radio France », nous souhaitions « la fin de la cacophonie dans l’intérêt du service public et de ses auditeurs ». Huit jours plus tard, les réponses concrètes se font toujours attendre. Avec une promesse d’enveloppe permettant de financer les travaux de réhabilitation de la Maison de Radio France, qui pèse depuis des années sur nos activités et nos missions. Pour autant, nos antennes sont toujours muettes ou presque, et le dialogue toujours chaotique entre la direction et l’intersyndicale de Radio France, au 20è jour du mouvement. Pire, la perspective, douloureuse, d’une nouvelle semaine de « silence radio » se profile, alors que les détails du projet du PDG, Mathieu Gallet, seront (enfin !) dévoilés aux salariés demain mercredi. Comment sortir de cette situation ? 1/ Cesser l’analyse purement comptable En publiant son rapport en plein conflit, la Cour des comptes n’a rien arrangé en allant bien au delà de son rôle de contrôleur des deniers publics. Elle est même venue rajouter du trouble en proposant non pas des mesures de réforme, mais des mesures de restructuration. Comme la fusion des rédactions ! La Cour, particulièrement sévère, entame pourtant ce “réquisitoire” par un élément capital, passé assez inaperçu dans les débats des derniers jours. En matière d’audience et de qualité des programmes, les antennes de Radio France sont à la hauteur malgré des moyens en baisse et les efforts consentis depuis trois ans pour compenser le désengagement de l’État. Rappeler cette réalité, c’est ramener le débat à l’essentiel du travail de cette entreprise et de ses salariés. C’est rappeler à ceux qui paient la redevance (26 euros par an affectés à la radio publique) que Radio France ne signifie pas “gabegie” mais aussi qualité, exigence et confiance. Une confiance pas toujours de mise entre les médias et leur public. Bref, selon la Cour, Radio France donne satisfaction sur le fond mais il faut « rénover en profondeur nos activités et nos modes de gestion » et « réaliser un effort très significatif d’économies structurelles ». Nous disons aux magistrats que donner de l’argent à Radio France n’est pas je ter de l’argent par les fenêtres. Nous leur disons que l’information produite chaque jour par Radio France n’est pas gratuite. Elle a un coût, ce qui est même rassurant à une époque où internet et

Tribune SDJ Mardi 7 Avril 2015

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Tribune de la Société des Journalistes de Radio France publiée le 7 avril 2015.

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  • mardi 7 avril 2015

    20 jours de grve Radio France, nouvelle tribune de la SDJ

    Il y a une semaine, nous demandions lEtat dintervenir. Nous demandions la fin de ce match entre la tutelle et le PDG de Radio France , nous souhaitions la fin de la cacophonie dans lintrt du service public et de ses auditeurs . Huit jours plus tard, les rponses concrtes se font toujours attendre. Avec une promesse denveloppe permettant de financer les travaux de rhabilitation de la Maison de Radio France, qui pse depuis des annes sur nos activits et nos missions. Pour autant, nos antennes sont toujours muettes ou presque, et le dialogue toujours chaotique entre la direction et lintersyndicale de Radio France, au 20 jour du mouvement. Pire, la perspective, douloureuse, dune nouvelle semaine de silence radio se profile, alors que les dtails du projet du PDG, Mathieu Gallet, seront (enfin !) dvoils aux salaris demain mercredi. Comment sortir de cette situation ? 1/ Cesser lanalyse purement comptable En publiant son rapport en plein conflit, la Cour des comptes na rien arrang en allant bien au del de son rle de contrleur des deniers publics. Elle est mme venue rajouter du trouble en proposant non pas des mesures de rforme, mais des mesures de restructuration. Comme la fusion des rdactions ! La Cour, particulirement svre, entame pourtant ce rquisitoire par un lment capital, pass assez inaperu dans les dbats des derniers jours. En matire daudience et de qualit des programmes, les antennes de Radio France sont la hauteur malgr des moyens en baisse et les efforts consentis depuis trois ans pour compenser le dsengagement de ltat. Rappeler cette ralit, cest ramener le dbat lessentiel du travail de cette entreprise et de ses salaris. Cest rappeler ceux qui paient la redevance (26 euros par an affects la radio publique) que Radio France ne signifie pas gabegie mais aussi qualit, exigence et confiance. Une confiance pas toujours de mise entre les mdias et leur public. Bref, selon la Cour, Radio France donne satisfaction sur le fond mais il faut rnover en profondeur nos activits et nos modes de gestion et raliser un effort trs significatif dconomies structurelles . Nous disons aux magistrats que donner de largent Radio France nest pas jeter de largent par les fentres. Nous leur disons que linformation produite chaque jour par Radio France nest pas gratuite. Elle a un cot, ce qui est mme rassurant une poque o internet et

  • certains modles conomiques laissent imaginer que le travail journalistique ne ncessite pas dinvestissements. Au contraire, nous encourageons tous les patrons de presse miser sur lintelligence. Les rformes doivent avoir lieu mais sans enlever la radio publique ce triptyque synonyme dexigence et de qualit : informer, duquer et distraire. 2/ Un projet, pas une thrapie de choc Quand on ne rforme pas pendant des annes, il est trop tard et cela ne sert rien de le faire au bout du chemin, radicalement et en pleine crise. Il faut dabord apaiser la situation et rassembler. Il faut intgrer lensemble des personnels de la maison la rflexion. Il faut trouver avec eux sur chaque antenne et dans chaque service des propositions de compromis, acceptables par tous. Un plan de dparts volontaires lev 380 salaris est de nature dsorganiser lentreprise pendant longtemps et coter ltat prs de 30 millions d'euros. Faut-il rappeler que lambiance nest pas au beau fixe ? Ce plan altrera la qualit dune production, fruit du travail des artisans de la radio, de tous ces mtiers indispensables, de ces heures passes produire chaque minute des missions diffuses 24h/24, 365 jours par an par nos 7 chanes. La rforme se fera avec la dfinition dun projet qui ne sadresse pas des consommateurs mais des publics. Nos antennes ne sont pas des marques. Nous prenons au mot la ministre de la culture, Fleur Pellerin, qui invite notre PDG, Mathieu Gallet, conforter les valeurs du service public pour que sa spcificit ne soit ni banalise, ni aseptise . Cela passe par un vrai projet, ambitieux. Nous ne pouvons galement quapprouver la ministre quand elle invoque le souci de justice sociale : la rduction de la prcarit et la modration des plus hauts salaires . Des mots. A quand les actes ? Lexemple doit venir den haut. Nous sommes conscients des contraintes conomiques. Pour augmenter les ressources du groupe, la ministre accepte la rvision du cahier des charges afin que de nouvelles catgories dannonceurs puissent apparatre sur nos ondes, sans augmentation du nombre de minutes de publicit. Nous serons trs vigilants Nous demandons aussi la ministre de crer, dans ce nouveau cahier des charges, un cadre pour rguler la publicit sur nos sites internet, qui forment un tout ditorial avec nos antennes. 3/ Renforcer la mission de la radio publique Il y a presque trois mois, la France tait Charlie, et au lendemain du 11 janvier les responsables politiques, en premier lieu au sommet de ltat, appelaient dfendre la libert dexpression, et favoriser le dialogue entre toutes les composantes du pays. Deux ambitions que Radio France et ses rdactions tentent depuis des annes de faire siennes. A lheure o le vivre ensemble est la peine, o le besoin dexplication, dexpression, dducation, est plus fort que jamais, la mission de la radio publique est cruciale. La priver de moyens serait une grave erreur.

  • Rcemment, Franois Hollande et Manuel Valls ont point du doigt le nouveau temps mdiatique et les dangers de limmdiatet, rclamant plus de patience, danalyse, de vrification, plus de pdagogie dans le traitement de lactualit. Chiche ! Qui dautre que Radio France pour mieux remplir ce rle et rpondre ces proccupations ? Parce que nos auditeurs mritent une information srieuse, rigoureuse et vrifie, aujourdhui plus que jamais, Radio France doit avoir des moyens, mais surtout des ambitions ! Dis, Radio France, quand reviendras-tu ? Publi par La Socit des journalistes de Radio France 13:18 http://societedesjournalistesderadiofrance.blogspot.fr/