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IV ÉTUDE SYNTAXIQUE DES CIRCONSTANTS DE TEMPS ET DE LIEU £24

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IV

ÉTUDE SYNTAXIQUE

DES CIRCONSTANTS

DE TEMPS ET DE LIEU

£24

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Étude syntaxique________________________________267

1. ÉTUDE SYNCHRONIQUE DU CIRCONSTANT

1.1 DIFFÉRENTS SYNTAGMES CONSTITUANT LE CIRCONSTANT.

1.1.1 Le syntagme nominal

En principe, le circonstant de temps et de lieu est formé sur un

syntagtne nominal constitué d'un seul élément. L'élément est un nom de temps

ou de lieu.

Exemple :

IQâlû labitnâ yawm-a-n 'aw bacd-a yawm-i-n/18/19

« Ils ont dit : nous avons séjourné un jour ou une partie de la journée. »

Syntagme. nominal

Mais d'autres éléments peuvent venir s'ajouter à l'élément premier. Le

premier élément constitue la tête du syntagme. Dans ce cas, on peut parler

d'expansion par rapport au mot de tête.

Exemple de syntagme composé d'une tête et d'un déterminant :

lai- yawm-a 'akmal-lu Ja-Jaim dm-a-kuml 3/5

Le jour j'ai parachevé votre religion

Déterminant mot de tête

Syntagme nominal.

« Aujourd'hui, j'ai parachevé votre religion. »

Le mot de tête peut être l'élément qualifié. Son qualificatif lui est postposé.

Exemple :

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Étude syntaxique_________________________________268

/fa hamalat-hu fa intabadat bihi makân-a-n qasiyy-a-nl 19/22

Mot de tête qualificatif

Alors, elle a porté il, alors elle s'est retiré avec il un lieu écarté.

« Elle l'a porté, puis s'est retiré avec lui en un lieu éloigné. »

Le mot de tête peut être le premier élément d'une annexion constituée de deux

éléments.

Exemple :

ILi-yaïymilû 'awzâr-a-hum kâmilat-a-n yawm-a l-qiyâmat-il 16/25

Mot de tête déterminant annectif

1er élément______2ime élément

Annexion

Afin de porter les charges à eux entières le jour de la résurrection

« Afin de porter leurs charges entières le jour de la résurrection. »

Le mot de tête peut être le premier élément d'une annexion constituée d'un

mot et d'une phrase.

Exemple :

/Fa rtaqib yawm-a ta 'tîs-samâ 'u bi dukân-i-n mubîn-i-nl 44/10

Attends le jour où viendra le ciel avec une fumée visible

Mot de tête phrase

« Eh bien, attends le jour où le ciel apportera une fumée visible. »

Le syntagme nominal est composé d'une série de mots regroupés autour

d'une tête, tel que l'ensemble est fonctionnellement équivalent à cette tête.

Dans les exemples mentionnés ci-dessus, le mot de tête est normalement régi à

l'accusatif, marque désinentielle du circonstant. Il arrive, cependant, que le

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Étude syntaxique 269

mot de tête ne soit plus régi à l'accusatif et ce pour la raison suivante : lorsque

le mot de tête occupe la place de deuxième élément d'une annexion, dans ce

cas, c'est le mot de tête qui est le déterminant du premier élément de

l'annexion et de ce fait il est régi au génitif par l'annexion. C'est le cas avec

des mots comme /dât/ qui signifie l'essence de quelque chose ou ce qui détient

quelque chose.

/wanuqallib-u-hum dât-a l-yamîn-i wa dât-a s-simâl-i/\8/18

« Nous les retournions dans ce qui est à la droite et ce qui est à la gauche. »

expansion mot de tête

1er élément 2e""8 élément

Annexion

C'est le cas également avec des mots comme /bacd/ = un ou une partie, /kull/

chaque, etc.

Exemple :

Ikull-a yawm-i-n huwa fi sa'n-i-nl 55/29

« Chaque jour, il est dans une affaire. »

Expansion mot de tête

1er élément 2èrae élément

Annexion

IQàlû labitnâ yawm-a-n 'aw bacd-aexpansion

1er élément

yawm-i-n/ 18/19

mot de tête

2e1"6 élément

Annexion

« Ils ont dit : nous avons séjourné un jour ou une partie d'une journée. »

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Étude syntaxique_________________________________270

C'est le cas également avec les nombres.

jwa labii-iî fî kahf-i-him talât-a mi'at-i simn-a wa zdâd-û ti$c-a-n!

18/25 expansion expansion mot de tête

1er élément 2*"" élément 3*™ élémentAnnexion

« Ils ont séjourné parmi eux trois cent ans et ont ajouté neuf [années]. »

Sans le mot de tête de nature spatiale ou temporelle, les expansions du

mot de tête, qui lui sont antéposés, perdent leur valeur circonstancielle. La

valeur circonstancielle est assurée uniquement par le nom de temps ou de lieu.

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Étude syntaxique_________________________________271

1.1.2 Le syntagme prépositionnel

Chez la majorité des grammairiens arabes anciens, le syntagme

prépositionnel est exclu de la catégorie du circonstant. Bien qu'il exprime la

circonstance de l'action du verbe, le syntagme prépositionnel de type spatial

ou temporel n'est pas considéré comme un circonstant de temps et de lieu.

Seul le syntagme nominal régi à l'accusatif par le verbe et dont la tête est un

nom de temps ou de lieu est considéré comme un circonstant.

Exemple :

linnâ 'anzalnâ-hu fl laylat-i l-qadr-il 44/3

« Certes, nous l'avons fait descendre dans la nuit du destin. »

Syntagme prépositionnel

Pourtant, certains grammairiens, comme al-MUBARRID, font exception

à la règle. Al-MUBARRID voit, malgré tout, dans le syntagme prépositionnel un

circonstant de temps ou de lieu. Dans le cas du circonstant, dit-il, l'idée de

réceptacle qui contient l'action est assurée par le nom /yawm-a/, dans /sir-tu

yawm-a l-jumucat-i/ = j'ai marché le jour du vendredi, alors qu'elle est assurée

par la préposition /fî/ dans le deuxième énoncé /sir-tu fî yawm-i l-jumucat-i/ =

j'ai marché dans le jour du vendredi.1

Hassan HAMZÉ explique que : « Dans une analyse plus abstraite, les

grammairiens arabes ramènent ces deux types à un seul modèle, la phrase

verbale étant formée d'un verbe, d'un sujet et, éventuellement, d'un

1 Al-MUBARRID, al-Muqta<jab, t. 4, p. 342.

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Étude syntaxique_________________________________272

complément (respectivement : fïcl, fâcil, maful : Opération, opérateur, opéré).

Les deux premiers éléments, à savoir le verbe et le sujet, sont, dans l'analyse

des grammairiens arabes, obligatoires sur les deux plans : sémantiques et

syntaxiques ; ils forment un énoncé complet. Le troisième est un mafûl que ce

soit un circonstant ou un complément d'objet direct, puisqu'il s'agit, dans les

deux cas, « d'un nom accusatif qui vient après la constitution d'un énoncé

complet », cela que le nom qui est au génitif est, en réalité, « dans la position

d'un nom accusatif» « Cependant, la rection de la préposition empêche

l'apparition de la voyelle /a/ de l'accusatif. ».'

Ainsi, la fonction syntaxique de zarf, bien qu'elle précise la

circonstance temporelle et spatiale de l'action du verbe, repose essentiellement

sur la rection. Il y a circonstant de temps et de lieu ($arf) lorsqu'il y a rection

du verbe. Dans le syntagme prépositionnel, le nom est le mot de tête du

syntagme. Il précise la circonstance de l'action du verbe, mais il n'est pas régi

par le verbe. Donc, ce n'est pas un zarf.

Les deux syntagmes sont sémantiquement semblables et syntaxiquement

différents. Ils se ressemblent parce qu'ils précisent tous les deux la circonstance

temporelle et spatiale de l'action du verbe. Ils sont différents parce que l'un (le

zarf) est régi directement à l'accusatif par le verbe et l'autre indirectement par

l'intermédiaire d'une préposition

1 Hassan HAMZÉ, Le circonstant dans la tradition grammaticale arabe, p. 3.

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Étude syntaxique _________________________________ 273

1 .2 LE CIRCONSTANT ET L'iNDÉCLINAISON

Parmi les noms de temps et de lieu susceptible d'occuper la fonction de

circonstant, il y a une catégorie qui est totalement déclinable du fait qu'elle

peut occuper plusieurs fonctions syntaxiques différentes. Ce sont les noms de

temps spécifiés et certains noms de temps vagues comme /waqt-a/ (temps),

/hîn-a/ (moment), les noms de lieu dérivés et les noms de mesure. Ensuite, il y

a la catégorie des noms de lieu vagues qui sont les orientations /fawq-a/

(dessus), /taht-a/ (dessous), /'amâm-a/ (devant), /warâ'-a/ (derrière), etc., puis

la catégorie de ce que les grammairiens arabes anciens appellent ceux qui sont

similaires aux orientations. Ce sont, entre autres, Ainda/ (vers), /dûna/

(dessous), etc. Ce type de nom se décline à l'accusatif lorsqu'il est régi

directement par le verbe et au génitif, lorsqu'il est régi indirectement par le

verbe au moyen d'une préposition.

Exemple :

lla-qad radiy-a llah-u cani l-mu 'minîn-a 'idyubâyfûn-a-ka taht-a s-sajarat-i .148/18 ——— ~~

verbe circonstant C. de nom

« Dieu a été satisfait des croyants, lorsqu'ils t'ont prêté allégeance sousl'arbre. »

lyawm-a yagsâ-humu l- 'adâb-u

Le jour les couvrira le châtiment

min fawq-i- him wa min taht-i 'arjul-i-huml 29/55

de dessus eux et de sous les pieds à eux

prépo c.o.i C. de nom prépo c.o.i C. de nom

synt. prépo synt.prépo

« Le jour où le châtiment les couvrira de dessus et de sous leurs pieds. »

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Ces noms de lieu ont sans aucun doute occupé dans un passé lointain,

plusieurs fonctions syntaxiques. Il semble, d'après la réponse donnée par al-

KALÎL à SIBAWAYHI, que ces noms étaient encore indéterminés chez certains

Arabes de leur époque. C'est-à-dire qu'ils ne nécessitaient pas de leur annexer

un mot pour être déterminés. SlBAWAYHT dit : « Je lui ai demandé, à propos de

/min dûn-i-n/ (du dessous), /min fawq-i-n/ (du dessus), /min taht-i-n/ (du

dessous), /min qabl-i-n/ (d'avant), /min bacd-i-n/ (d'après), /min dubur-i-n/ (de

derrière) et /min kalf-i-n/ (de l'arrière) ? Il m'a répondu : Ils (les Arabes) ont

fait comme si c'était des noms déclinables, parce qu'ils s'annexent et sont

employés dans d'autres fonctions que celle de circonstant. »1

-fCr* J ô* J 'JJ^ ù* : ^J* ù* ^ J »

' '

-' r> î- ° 'â jl>- - »

. O » ^ 0 . .s 0

« .1— S

Différemment, ces noms étaient, à l'époque de SIBAWAYHI et d'al-

KALÎL, dans la plupart des occurrences, voués à la détermination par annexion

et à la rupture du rapport d'annexion, ils ont été figés avec la voyelle /u/. À ce

propos, al-KALÎL précise : « Qu'il y a parmi les Arabes ceux qui disent /min

fawqu/ et /min tahtu/. Ils les ont comparés à /qablu/ et /bacdu/. »2

' SIBAWAYHI, Al-kitôb, t. 3, p. 289.' Idem.

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Hormis les noms d'orientations : /qablu/ et /ba°du/, les noms

d'orientation et leurs semblables ne connaissent, aujourd'hui, que la fonction

de complément verbal, la détermination par annexion et la déclinaison à

l'accusatif et au génitif.

Quant aux unités n'occupant que la fonction syntaxique de circonstant

et toujours déterminées par annexion, sans jamais rompre avec le déterminant

annectif, notamment, les unités comme /'idâ/, /ladâ/, Aalâ/, /mata/, etc, elles

sont soit interprétées comme des noms figés et indéclinables, soit des noms

déclinables. Selon notre hypothèse, ils sont déclinables à l'accusatif. Quoi qu'il

en soit, on ne peut affirmer qu'ils sont figés, car pour cela, il faut une rupture

avec le deuxième élément d'annexion.

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1.2.1 Le figement et la voyelle prothétique finale

D'après Ibn al-'ANBÂRÎ, le figement se produit, entre autres, lorsqu'une

unité, qui est toujours annexée, est séparée de sa base, car les deux éléments de

ce type d'annexion forment un seul élément. Lorsque l'annexion est brisée, la

première partie de celle-ci se retrouve réduite et figée.

Exemples :

l-a 'arma yufry-i hâdi-hi llah-u bacd-a mawt-i-hâ/. 2/259II a dit : d'où fera t-il revivre celle-ci Dieu après sa mort à elle ?

circonstant C. de nom

Annexion

« II dit : Comment veux-tu que Dieu ressuscite celle-ci après sa mort ? »

Itumma 'agraq-nâ bacdu l-bâqîn-al. 26/120

« Ensuite, nous avons noyé après [cela], le reste. »

circonstant c.o.d

1.2.2 Les différents figements et leurs différentes marques

Le principe du figement en fin de mot est, qu'à la base, il y ait une

absence de voyelle casuelle et de ce fait, aucune marque de distinction si ce

n'est que le l°l (sukuri). C'est le cas des unités comme /'id/ (quand), /lad/

(auprès), /mac/ (avec), /mud/ (auprès de) et /kam/ (combien), ceux-ci sont

maintenus tels quels, sans déclinaison. L'absence de voyelle est le principe du

figement. C'est le signe l°l qui leur est assigné. A ce propos, Ibn al-'ANBÂRÎ

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Étude syntaxique _________________________________ 277

explique que « /kam/ est figé avec le sukun, parce que c'est le principe du

fîgement et parce qu'il n'y a rien qui nécessite son figemeni avec une voyeJJe.

Il est maintenu sur le principe (...) C'est également parce qu'il n'a pas connu

une situation de déclinaison.1

J

x x^ °t x ^^ J

/ladun/ > /ladu(n)/. La voyelle /u/ ne serait pas une voyelle distinctive du

flgement, mais la voyelle syntagmatique contenue dans /ladun/.

1 Ibn al-'ANBÂRÎ, 'Asrâru l-carabiyya, p. 37.

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Étude syntaxique_________________________________278

1.3 LES RÉGISSANTS DU CIRCONSTANT.

1.3.1 Le verbe est le régissant le plus puissant.

Pour traiter la question de rection, nous nous situons dans l'analyse

adoptée par les grammairiens arabes. Ainsi, Je circonstant de temps et de lieu

n'est pas seulement régissable par le verbe. Il est également régi par des

régissants de formes nominales comme le nom d'action, le nom d'agent, le

nom de patient, le qualificatif et le superlatif Cependant, Je verbe est le

régissant, par excellence, du circonstant. Si l'on recherche la ou les raisons de

la supériorité de force de rection du verbe vis-à-vis des autres régissants on se

rend compte que les raisons sont diverses, les unes plus importantes que les

autres. Tout d'abord, on remarque que le verbe représente une classe du

discours à part et que les autres régissants sont tous des formes nominales.

Au niveau de la rection, le propre du verbe est, en principe, de régir le

nom. Le propre du nom est d'être régi par le verbe. A ce niveau, il y a déjà un

rapport de supériorité du verbe par rapport au nom. Les formes nominales

régissantes comme le nom d'action (masdar\ le nom d'agent (ism al-fâ°il), le

nom de patient (ism al-mcffiïl), le qualificatif (as-sifa\ le nom de comparaison

(ism at-tafdîl), n'ont de pouvoir que de régir d'autres noms. Ils ne peuvent

régir une autre classe du discours dont le verbe.

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Étude syntaxique_________________________________279

D'autres part, au niveau du sémantisme, la rection est plus forte entre le

verbe et Je circonstant qu'entre les autres formes nominales et Je circonstant.

La particularité du verbe est qu'il désigne à la fois un temps, une action et

implique un lieu, tandis que les formes nominales ne désignent, dans ce cas,

qu'une action. Le verbe régit le circonstant parce qu'ils ont en commun Je

temps et le lieu. Le temps et le lieu, points communs entre le verbe et le

circonstant, constituent un lien étroit entre le régissant et le régi. Le lien est

encore plus étroit entre le verbe et le circonstant de temps, car le verbe est

conjugable au temps passé et non passé et se retrouve avec un circonstant de

temps passé comme /'id/ (quand au passé), /'amsi/ (hier), et des circonstants

indiquant le nom passé comme /gadan/ (demain), /'idâ/ (quand/non passé).

Toutes ces caractéristiques sémantiques font du verbe un régissant puissant.

Exemples :

Jfû-qad na§ar-a-hu llah-u 'id 'akraja-hu lladjn-a kafarù!. 9/40

Certes, il a secouru lui Dieu lorsqu'ils ont sorti lui ceux qui ont mécru.

Verbe (au passé) circonstant (de temps passé)

« Dieu l'a certes secouru, quand ceux qui ont mécrus l'ont expulsé. »

/wa laqay-tu-ka 'ainsi yâ fatal1

Et j'ai rencontré toi hier ô jeune homme

Verbe au passé circonstant (de temps non passé)

« Je t'ai rencontré hier, ô jeune homme. »

Exemple extrait de Al-muqta<}ab, de al-MUBARRlD, t. 3. p. 173.

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Isa- yaclamûn-a gadan mani l-kaddâb-u l- 'asîr-ul. 54/26

Bientôt, Ils sauront demain qui est le menteur le pire.

Verbe circonstant(au temps non-passé) (de temps non-passé)

« Ils sauront demain qui est le pire des menteurs. »

Dans un énoncé où se côtoient éventuellement les différentes formes

régissantes du circonstant, la présence et la force du verbe s'imposent, effaçant

tout pouvoir de rection aux autres régissants (nominaux). Ce qui permet plus

d'aisance au verbe à régir de n'importe quelle position, c'est aussi le fait qu'il

n'est pas à l'instar des formes nominales, qualifié, ni déterminé. Il régit le

circonstant sans être gêné par une quelconque unité venant s'interposer entre

lui et le circonstant.

En somme, la raison principale de la force de rection du verbe, c'est

comme le fait remarquer Hassan HAMZÉ, sa liberté de rection.*

Pourtant, il faut préciser que le verbe régit tous les circonstants qui font partie

de sa phrase. Mais il ne peut régir le circonstant d'une autre phrase. Autrement

dit, lorsqu'il y a une phrase complexe dont l'un de ses éléments est une phrase

simple, il existe une barrière entre les phrases qui empêche la rection. Ce qui

fait que le verbe de la phrase complexe ne peut atteindre et de ce fait ne peut

régir le circonstant de la phrase simple et vice versa.2

Exemple :

1 Hassan HAMZÉ. les théories grammaticales d'az-Zajjâjî, p. 233.2 A ce propos, voir page : 310, du présent travail.

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lla-qad radiy-a llah-u °ani l-mu 'minîn-a 'id yubâyfûn-a-ka tafata s-sajarat-il.48/18 —————— ——

Verbe circonstent Verbe circonstjpti____________I i____T

(phrase simple)

Phrase complexe

« Dieu est satisfait des croyants, lorsqu'ils t'ont prêté allégeance sous

l'arbre. »

Dans l'exemple ci-dessus, le verbe /radiy-a/ (être satisfait) ne peut régir

le circonstant /tahta/ (sous), car tous les deux font partie de deux phrases

distinctes, /tahta/ fait partie d'une phrase formant un bloc dont les éléments se

régissent entre eux. Aucun élément extérieur ne peut les régir.

1.3.1.1 Formes nominales régissantes

À la différence du verbe, qui ne peut être régi par un autre verbe ou un

nom, il y a parmi les formes nominales, une catégorie, qui bien qu'étant

régissable, régit également d'autres noms, dont les noms de temps et de lieu à

l'accusatif. C'est le cas du nom d'agent, le nom de patient, le nom d'action et

ceux qui qualifient comme le qualificatif et le superlatif.

Cependant, à la différence du verbe, le pouvoir de rection de ces formes

nominales n'est pas absolu. S'il y a présence d'un verbe dans un énoncé

comprenant un circonstant de temps ou de lieu et une ou plusieurs formes

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Étude syntaxique_________________________________282

nominales citées ci dessus, le régissant serait le verbe, quelle que soit sa

position vis-à-vis du circonstant. Le pouvoir de rection du verbe est absolu.

Mais s'il y a absence de verbe, le régissant pourrait être l'une des formes

nominales. Cependant, s'il y a présence de plusieurs formes nominales dans le

même énoncé, quel serait Je régissant du circonstant ?

Dans la tradition grammaticale arabe, lorsque plusieurs formes

nominales régissantes sont présentes dans l'énoncé, des règles ont été établies

sur leur possibilité de régir. Ainsi, pour les grammairiens arabes, les noms

d'agent, d'action et de patient ne peuvent régir le circonstant postposé si celui-

ci est séparé par un qualificatif. Le superlatif peut régir ce qui est postposé

comme ce qui est antéposé, etc.1

Bref, si nous analysons de plus près les raisons de possibilité et

d'impossibilité de régir, nous pouvons apporter une autre approche que celles

des grammairiens arabes à ce sujet.

Cela dit, ce qui semble être pour la tradition grammaticale arabe, une

impossibilité de rection du circonstant par les noms d'agent, de patient et

d'action, parce qu'ils sont séparés du circonstant par un qualificatif, ce serait

selon notre hypothèse, une question de proximité voire de contiguïté du

régissant vis-à-vis du circonstant. Autrement dit, le qualificatif qui se trouve

entre certaines formes nominales régissantes et le circonstant, est lui-même un

1 Voir à ce propos, al-°UDAYMA, Dirâsa li 'uslubi l-Qiir'ân, t. 2, pp. 815-816.

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r

Etude syntaxique _________________________________ 283

régissant potentiel. Par ailleurs, si le qualificatif empêche d'autres formes

régissantes de régir le circonstant, c'est, tout naturellement, lui qui prend en

charge, par la proximité, la rection du circonstant. C'est comme si dans un

ordre linéaire, la forme nominale antéposée au circonstant le plus proche, est

celle qui régit le circonstant.

Exemple :

rulâ 'ika lahum cadâb-u-n ca$m-u-n yawm-a tabyaddu wujûh-u-n/ 3/105,TÔ6 ———— ————— —————inchoatif Nom d'action qualif. circonstant

Énonciatif

« Ce sont ceux pour qui un châtiment considérable, le jour où blanchiront des

visages. »

Dans l'exemple ci-dessus, c'est le nom d'action !°ap,m-u-n/ antéposé au

circonstant qui est le régissant, car le verbe Itabyaddui est un élément annexé

au circonstant /yawm-a/, autrement dit c'est son déterminant annectif.

On peut supposer, qu'entre deux régissants antéposés au circonstant, le

plus proche est celui qui régit. Puis entre deux régissants, l'un postposé, l'autre

antéposé au circonstant, l'antéposé est prioritaire sur celui qui est postposé au

circonstant. D'autre part, les grammairiens arabes, dont SlBAWAYHI, disent que

certaines formes nominales régissantes peuvent être antéposées au circonstant

et d'autres ne le peuvent pas. On dit, par exemple, que le qualificatif ne peut

être postposé au circonstant. Autrement dit, le circonstant ne peut être antéposé

au qualificatif.1 Au lieu de dire que le circonstant ne peut pas être antéposé au

SlBAWAYHI. t. 1, p. 205.

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Étude syntaxique_________________________________284

qualificatif, pourquoi ne pas dire que tout circonstant antéposé au qualificatif

suppose la présence d'un régissant potentiel, apparent ou ellipse, antéposé au

circonstant et que l'antéposé est prioritaire sur le postposé.

Quant à la règle établie par les grammairiens arabes sur la possibilité du

circonstant d'être antéposé aux régissants comme Jes noms d'actions, de

patient, d'agent et le superlatif, nous pouvons supposer que c'est probablement

en l'absence de régissant antéposé au circonstant dans l'énoncé, et sûrement

parce que l'énoncé est une phrase nominale, constituée d'un inchoatif et d'un

énonciatif.

Exemples :

/'ilâ rabb-i-ka [ ] yawma'id-i-in-i l-mustaqarr-u/. 15/12

c.o.i régissant circonstant Inchoatif(supposé)

Enonciatif

« C'est vers ton seigneur [que sera], ce jour là, le retour. »

Ikallâ 'inna-hum °an rabbi-him yawma 'idin la-mahjûbûn-al.82/15 —— ——————— —————— ——————

Inchoatif c.o.i circonstant régissant____________________(nom de patient)

énonciatif

« Au contraire, de leur seigneur, ils seront ce jour-là, séparés d'un voile. »

/hum li l-kufr-i yawma 'idin 'aqrab-u. min-hum li l- 'îmân-il.3ÏÏ62 ————— —————— ———— ————— —————Inchoatif c.o.i circonstant régissant c.o.i c.o.i

(superlatif)Enonciatit

« Ils étaient, ce jour-là, plus près de la mécréance que de la foi. »

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Étude syntaxique_________________________________285

En somme, la position d'une forme nominale régissante est primordiale

pour la rection. C'est la position vis-à-vis du circonstant qui permet à un

régissant de régir plutôt qu'un autre. Cela dit, la présence de régissants de

forme nominale en antéposition au circonstant, offre la possibilité de régir au

plus proche d'entre eux.

D'autre part, entre deux régissants dont l'un est antéposé, et l'autre postposé

au circonstant, l'antéposé est, de par sa position, le régissant potentiel du

circonstant.

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Étude syntaxique_________________________________286

1.3.1.2 Rection entre les éléments de phrases différentes

Lorsque deux phrases distinctes se trouvent dans un même énoncé, les

éléments des deux phrases ne peuvent pas se régir mutuellement. La phrase en

elle-même se définit comme : « Tout énoncé dont une partie de ses éléments

régit l'autre. »' C'est une définition qui comprend deux niveaux, l'un interne,

l'autre externe. Hassan HAMZÉ explique : « Sur le premier niveau, interne, les

éléments de la phrase entretiennent des rapports de dépendance exprimés en

termes de rection, les éléments de la phrase régissant les uns les autres.

Sur le deuxième niveau, externe, la phrase est définie comme étant un

ensemble. Ses éléments régissent les uns les autres, mais ils ne sont pas régis

par un élément extérieur à l'ensemble. La phrase tout en étant la somme de ses

constituants sur le niveau interne, est une unité sur le niveau externe. Elle n'est

pas très éloignée de notre "unité syntaxique maximale". Une fois constituée,

aucun de ses éléments ne peut être régi par un élément qui ne fait pas partie de

l'ensemble, c'est la phrase toute entière, en tant qu'unité, qui peut entretenir

une relation avec un élément qui ne lui appartient pas. C'est pour cette raison,

une phrase, lorsqu'elle est reprise, conserve les voyelles casuelles de ses

éléments. »2

SIBAWAYHI. Al-kitâb, t. 1, p. 23 et az-ZAJJÂJÎ, Al-Jumal, p. 39.2 Hassan HAMZÉ, Les théories grammaticales d'az-Zajjâjî, pp. 528, 529.

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Étude syntaxique________________________________287

Dans le cas d'une phrase complexe dont l'un de ses éléments est une

phrase simple, les éléments de la phrase complexe ne peuvent régir ceux de )a

phrase simple qui constitue un seul de ses éléments et vice-versa, c'est-à-dire

que si la phrase simple, elle-même, comporte un circonstant, celui-ci ne peut

être régi que par un élément interne à la phrase simple, mais jamais par un

élément extérieur.

Exemple :

Jqâl-al rabbî 'annâ yaktin-it lî walad-n-n wa lam yamsas-nî basar-u-nl. 3/47

circonstant verbe sujet Verbe sujet4__;jPhrase simple Phrase simple coordonnée

Phrase complexe

«. Elle dit . Mon seigneur ! D'où me viendra un enfant, alors qu'aucun homme

ne m'a touché. »

Dans la théorisation des grammairiens arabes anciens, un énoncé peut

être constitué de deux phrases simples, dont la deuxième serait introduite par

une particule. Ces particules sont /'in/ (si), /'an/ (que), /fa/ (alors). Ces

particules sont pour André ROMAN des translatifs permettant de translater une

phrase quelconque de son statut de phrase, segment syntaxique maximal et

donc indépendant, en un segment dont le statut syntaxique est celui d'une voix

ou d'une extension. Elle translate la phrase comme un sous-ensemble

syntaxiquement figé.1

André ROMAN, Grammaire de l'arabe, p. 114.

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Étude syntaxique_________________________________288

Ainsi, pour André ROMAN, la phrase translatée est une phrase simple,

constituant d'une phrase complexe. Bref, que ce soit chez les grammairiens

arabes anciens ou chez André ROMAN, la phrase introduite par les particules en

question est un élément figé. Pour les grammairiens arabes, les constituants se

régissent entre eux et ne peuvent être régis par des éléments d'autres phrases.

Dans le cas du circonstant de temps et de lieu, s'il se trouve dans un énoncé

constitué de deux phrases dont l'une est introduite par les particules /'an/, /'in/,

/fa/, etc., qu'il se trouve d'un côté ou d'un autre de la particule, il fait partie

d'un élément figé (phrase simple) et de ce fait, il ne peut être régi par un

régissant qui se situe de l'autre côté de la particule. C'est-à-dire, qu'il se trouve

dans une autre phrase. Il faut chercher le régissant dans la phrase du

circonstant.

Régissant /'in/ régissant ? circonstant régissant ?

Ces schémas montrent la particule qui constitue un obstacle à toute rection

d'un coté ou de l'autre.

régissant ? circonstant régissant ? /'in/ régissant_______î________1

Exemple :

/wa qâlû 'a- 'idâ kunnâ cizâm-a-n wa rufât-a-n

_____________circonstant_______C de nom_____

Première phrase

« Ils ont dit : Lorsque nous ne serons plus qu'ossements et poussière,

'a- 'in- nâ la-mabcutûn-a kalq-a-njadîd-a-nl. 17/49

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Étude syntaxique_________________________________289

partie Incho. entre euxou translatif_____________________________

Deuxième phrase

allons-nous certes, être ressuscites en une nouvelle création. »

Dans l'exemple ci-dessus, le verbe /qâlû/ constitue une phrase

indépendante. Cela dit, il ne peut régir le circonstant /'idâV qui est l'élément

d'une autre phrase. Quant au nom de patient /mabcûtûn-a/ qui a le pouvoir de

régir, il ne peut le faire avec /'ida/, car il fait partie lui aussi d'une autre phrase

introduite (ou translatée) par la particule /'in/ dans /'innâ/.

Autres exemples :

l'id yaqûl-uz-zâlimûn-a 'in tattabfûn-a 'illâ rajul-a-n mashûr-a-nl. 17/48circonstant C. de nom particule Verbe_____________

Première phrase Deuxième phrase

« Lorsque les injustes ont dit : Certes, vous ne suivez qu'un homme

ensorcelé. »

Dans l'exemple ci-dessus, le circonstant /'id/ ne peut être régi par le verbe

/tattabicûn-a/ (suivre), car tous les deux font partie de phrases différentes.

/yawm-a tublâ s-sarâ 'ir-ufa-mâ la-hu min quwwat-i-n wa là nâsir-i-nl 86/8-10

Circonstant particule Nom d'action Nom d'agentou translatif

Première phrase Deuxième phrase

« Le jour où les secrets seront dévoilés, alors il n'y aura alors ni force, ni

assistant. »

Dans l'exemple ci-dessus, le circonstant /yawm-a/ (jour) ne peut être

régi par le nom d'action /quwwâV (force) ou le nom d'agent /nâsir/ (assistant),

car ces deux régissants font partie d'une phrase différente de celle du

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Étude syntaxique_______________________________290

circonstant et introduite (ou translatée) par la particule /fa/. Le circonstant ne

peut pas non plus être régi par Je verbe Itublâ/, parce qu'il fait partie de son

déterminant annectif. Le déterminant constitue un élément figé.

Le régissant potentiel du circonstant /'idâY doit être recherché en amont. Il y a

pour cela deux hypothèses :

1 - Du fait que le nom de temps /yawm-a/ régi à l'accusatif, se situe en

position initiale du verset, il est permis de supposer le verbe /udkur/ (rappel,

mentionne). Dans ce cas, Je nom de temps ne sera pas anaJysé comme

circonstant, mais comme complément d'objet direct.

2 - Le régissant pourrait se trouver éventuellement dans le verset précédent,

car iJ est constitué de deux formes régissantes qui sont un nom d'action et un

qualificatif. Cependant, comme nous l'avons constaté précédemment, c'est la

forme régissante antéposée la plus proche du circonstant qui régit. C'est donc

Je qualificatif qui en est le régissant. Nous aurons ainsi :

/ 'inna-hu calâ raf-i-hi la-qâdir-u-n yawm-a tublâ s-sarâ '-ir-u fama la-hu

qualificatif airconstant C. de nom

min quwwat-in wa là nâsir-i-nl. 86/8-9

« II est, certes, capable de son retour, le jour où les secrets seront dévoilés, où

il n'y aura ni force, ni assistant. »

II est toutefois intéressant de s'arrêter sur la manière dont la question

est présentée par les grammairiens arabes contemporains, notamment par

Muhammad °Abd-al-Khâliq al-GUDAYMA. Ce dernier reprend le propos des

anciens grammairiens arabes et présente cela sous forme de règle, qui à

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Étude syntaxique _________________________________ 291

première vue, laisse entendre que la question n'est pas relative aux différences

de phrases, mais que c'est les particules qui ont un pouvoir d'empêcher Ja

rection des régissants d'éléments postposés ou antéposés. A1-CUDAYMA dit :

« Ce qui est postposé à /'in/ ne régit pas ce qui lui est antéposé, même si c'est

un circonstant et ce qui lui est antéposé ne régit pas ce qui lui est postposé. »1

^ *. I i "" \*J 2 \-fr

II ajoute : « Ce qui est postposé à la particule /fa/ et /ma/ de négation, ne

régit pas ce qui lui est antéposé. »2

- .» - „

llJ JllJ V 5l*u5i (C«

Ces règles nous semblent insuffisantes pour mieux comprendre les

raisons exactes qui ne permettent pas une interection entre les éléments de

chaque côté de la particule en question. Il serait, peut être, plus approprié de

dire : il ne peut y avoir de rection entre les éléments, de la phrase, antéposé à

telle ou telle particule et les éléments de la phrase introduite (ou translatée) par

la particule, car les éléments de chaque phrase ne se régissent qu'entre eux.

Toute forme nominale régissante ne peut régir si elle est précédée par la

particule de négation AâY. C'est là une autre règle présentée par al-cUDAYMA

qui laisse entendre que la particule de négation /là/ ôte tout pouvoir de rection

à une quelconque forme nominale régissante. En fait, la particule de négation

est considérée, par la tradition grammaticale arabe, comme une sorte

1 A1-CUDAYMA, Dirâsat li-uslûbi l-qur'ân, t. 2, pp. 815-816.2 Idem.

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Étude syntaxique_________________________________292

d'inchoatif et le mot qu'elle régit, forme avec celle-ci un ensemble. Cet

ensemble constitue l'inchoatif qui débute une phrase nominale. Ce qui signifie

que les éléments postposés à la particule est dans ce cas, une autre phrase.

Si dans la phrase nominale constituée d'un circonstant, d'un énonciatif

et d'un inchoatif et que J'inchoatif a pour constituant une forme nominale

régissante précédée par la particule, le circonstant ne sera pas régi par ce nom

qui fait partie d'un ensemble, occupant la fonction d'inchoatif. Le régissant

potentiel du circonstant doit être un énonciatif apparent ou supposé.

Exemple :

/fa là

« II n'y aura pas de

Particulede négation

'ansâb-a

liens parentaux

nom d'action(au pluriel)

bayn-a-hum

entre eux, ce

circonstantde lieu

yawma'id-i-nl 23/101

jour-là. »

circonstantde temps

Inchoatif circonstant

Dans l'exemple ci-dessus, l'énonciatif, régissant des circonstants, doit être

supposé.

Autre exemple :

lyawm-a yarawn-a l-malâ 'ikat-a là busrâ yawma'idjn li-l-mujrim-înal.25/22

circonstant C. de nom particule circonstant synt. prépo.

« Le jour où ils verront les Anges, il n'y aura pas de nouvelle, ce jour-là pour

les injustes. »

Dans l'exemple ci-dessus, le nom de temps /yawm-a/ qui débute le

verset et qui est régi à l'accusatif, pourrait être un complément d'objet direct,

dont le régissant pourrait s'agir du verbe supposé /udkur/ (rappel, mentionne).

Quant au circonstant /yawm-a'idin/ (ce jour-là), il ne peut être régi par le nom

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Étude syntaxique_________________________________293

d'action /busrâ/ (nouvelle), car /busrâ/ est régi par la particule de négation /là/

et forme avec elle un ensemble occupant la fonction d'inchoatif Le régissant

potentiel de /yawma'idin/ ne peut qu'être l'énonciatif ellipse.

1.3.1.3 Circonstant et élément étranger

On parle également dans la tradition grammaticale arabe, de disjonction

d'un énoncé par un élément étranger. Dans le cas du circonstant, al-GUDAYMA.

cite une règle établie à partir des analyses de certains grammairiens arabes

comme al-FARRÂ, Ibn PARIS, Abu HAYYÂN et al-cUKBARÎ et qui est : « La

disjonction par un élément étranger, empêche de régir le circonstant. »l

« ,<J>°jà)\ ^ J1»JI J (j^-Vl;

Autrement dit, lorsqu'un élément étranger crée une disjonction entre un

régissant et son complément, le régissant perd la faculté de régir le

complément qui lui est rapporté. Nous avons vu précédemment, qu'entre

plusieurs régissants, le verbe est le premier à régir. En l'absence de verbe, c'est

le régissant de forme nominale le plus proche qui régit le circonstant. Cela dit,

dans le cas de l'élément étranger, qui peut être une phrase simple comprenant

un verbe, si celui-ci vient s'insérer, dans la phrase, en tant qu'élément figé,

entre un verbe et un complément, c'est le verbe de l'élément étranger qui

prend le relais pour régir le complément de la phrase.

Exemple .

/ 'a-tufyadditûn-a-hum bi-mâ fataha llah-u

« Allez-vous leur parler de ce que Dieu a ouvert,

Al-^DAYMA, Dirâsat li uslubi l-qur'ân, t. 2, pp. 815-816

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Étude syntaxique_________________________________294

°alay-kum liyultâjjû- kum °ind-a rabb-i-kuml. 2/76

synt.prép verbe c.o.d circonstant

Elément étranger de disjonctionpour vous, pour qu'ils argumentent contre vous, auprès de votre seigneur. »

Ainsi, dans l'exemple ci-dessus, même si le circonstant Aind-a/ (vers)

est rapporté sémantiquement au verbe /fatah-a/ (a ouvert), c'est le verbe de

l'élément étranger /li yuhâju-kum/ qui régit le circonstant. La raison en est

qu'il se trouve antéposé au circonstant et le plus proche. On constate, encore

une fois, qu'en présence de plusieurs verbes, ce n'est pas le lien sémantique

existant entre le verbe et le circonstant qui donne la priorité, au verbe, de régir,

mais c'est plutôt la proximité du verbe par rapport au circonstant.

D'autre part, il arrive parfois que malgré la proximité du verbe constituant

l'élément étranger d'un énoncé par rapport au circonstant, il ne régit pas le

circonstant. La raison en est qu'un verbe supposé est censé se trouver entre

l'élément étranger et le circonstant.

Exemple .

Ikutiba °alay-kumu $-§iyâm-u kamâ kutib-a calâ lladîna min qabl-i-kumnom d'action

lacalla-kum tattaqûn-a [sûmû] 'ayyâm-a-n mcf dûdât-a-nl. 2/183

Elément étranger verbe supposé circonstant

« II vous est prescrit le jeûne, comme il fut prescrit à ceux qui vous ont

précédé, certainement vous connaîtriez la piété. [Jeûnez] des jours

comptés. »

Dans l'exemple ci-dessus, il est possible de supposer le verbe à

]'impératif /sûmû/ (jeûnez), positionné entre J'élément étranger et le

circonstant. De plus, ce verbe /sûmû/ (jeûnez) serait relatif à la forme

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Étude syntaxique________________________________295

régissante /as-siyyâm-u/ (le jeune) à laquelle se rapporte sémantiquement le

cjrconstant.

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r

Etude syntaxique_________________________________296

1.4 SYNTAXE INTERNE.

Le circonstant de temps et de lieu est constitué d'éléments qui

admettent, entre autre, les déterminants. La particularité de ces déterminants

est qu'ils se présentent sous des formes multiples. Cela va de l'article défini

/al/ = le, au déterminant annectif de longueur et de composition variables. Vis-

à-vis de ces déterminants, le circonstant se caractérise par deux types de

distributions. Le circonstant, selon le type de déterminant, peut se trouver à

droite ou à gauche de celui-ci. Certains déterminants annectifs sont en

distribution complémentaire en ce sens où ils ne se situent pas toujours du

même côté du circonstant. Cela dit, il sera question dans cette partie d'analyser

les différentes formes de déterminants, ce qui les caractérise et la position du

circonstant par rapport à ces déterminants.

1.4.1 Déterminants positionnés à gauche du circonstant1

1.4.1.1 Le déterminant /al/ (le, la, les) et la deixis.

Hormis les noms de temps et de lieu qui indiquent intrinsèquement un

temps ou un lieu faisant partie du contexte de renonciation, comme /gadan/

(demain), /'amsi/ (hier) pour le temps et /hunâ/ (ici), /tamma/ (là-bas) pour le

1 Selon Bernard POTTIER : « Entendre au sens large, la détermination peut englober tous leséléments qui sont incidents ou substantifs dans le syntagme nominal. [Exemple] : le troisièmepoteau rosé à partir de la grille. Le poteau que tu a placé hier ici. » Théorie et analyse enlinguistique, p. 190.

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Étude syntaxique_________________________________297

lieu vague, il existe d'autres formes de déictiques. Ce sont entre autres les

formes déictiques que l'on crée à partir d'un circonstant de temps ou de lieu,

auquel on préfixe le déterminant article /al/ (le, la, les). La préfixation est un

moyen qui permet de désigner un temps ou un lieu situé dans le contexte des

interlocuteurs.

S'agissant du temps, le locuteur peut désigner l'instant présent dans

lequel il se trouve ou une partie du temps la plus proche dans le passé ou le

futur. C'est-à-dire l'instant, le jour, la nuit, le mois, l'année la plus proche de

l'instant d'énonciation.

Exemple :

Iqàl-a 'innî tub-tu l- 'ân-al. 18/4

« II a dit : certes, je me suis repentis le moment. »

Déterminant nom de temps

Déictique temporel

« II a dit : certes, je me suis repentis maintenant. »

/ 'innîjazay-tu-humu l- yawm-a bi-mâ sabarûl. 23/111

Je les ai récompensés, le jour, pour ce qu'ils ont patienté.

Déterminant Nom de temps

Déictique

« Je les ai récompensés, aujourd'hui, pour ce qu'ils ont patienté. »

Le fait que le jour est l'unité principale du temps, des noms déictiques

ont été conçus pour indiquer le jour qui précède et celui qui suit 3'instant

d'énonciation. C'est là l'une des particularités du jour. Pour toutes les autres

parties du temps, que ce soit /al-laylat-a/ (la nuit), /as-sâcat-a/ (l'heure), /as-

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Étude syntaxique_________________________________298

sahr-a/ (le mois), /as-sanat-a/ (l'année), les plus proches de l'instant

d'énonciation, ils sont distingués par un qualificatif spécifiant le passé ou le

futur.

Exemple :

Iftakaf-tu 1- laylat-a l-bârihat-a!.

J'ai fait retraite la nuit la dernière

Déterminant____Nom de temps___Qualificatif

Déictique

« J'ai fait retraite la nuit dernière. »

D'autres part, si le nom est générique, il ne peut servir de déictique,

même s'il est accompagné du déterminant /al/ (le, la, les). Pour qu'un nom de

temps puisse servir de déictique, il faut que le nom indique une seule unité de

l'une des parties du temps.

Dans l'exemple qui suit, le terme /al-layl-a/ (la nuit) est un nom générique, il

ne peut figurer en tant que déictique.

Iqumi l- layl-a 'illâ qalîl-a-nl. 73/2

Lève-toi la nuit excepté un peu

Déterminant Nom de temps (générique)

« Consacre-toi la nuit (en général) à l'adoration, si ce n'est qu'un peu. »

Quant au lieu vague, il est intéressant de constater qu'il n'existe aucun

déictique formé à partir d'un nom de lieu vague et du déterminant article /al/.

Ainsi, la deixis au moyen du déterminant /al/, placé à gauche du circonstant,

concerne uniquement une partie des noms de temps.

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Étude syntaxique_________________________________299

1.4.1.2 Les nombres cardinaux

Le nombre cardinal est également une forme de détermination placée

généralement à gauche du circonstant. S'agissant du temps, le nombre cardinal

permet de déterminer le nombre de périodes temporelles additionnées.

Autrement dit, il permet de déterminer la durée temporelle. De ce fait, seuls les

noms spécifiés sont dénombrés.

Exemples :

/fa qâl-a tamattofûfi dâri-kum talâtat-a 'ayyâm-î-nl 11/65II a dit : profitez dans la demeure à vous trois jours.

Nombre nombre(Nom de temps)

« II a dit : profitez en dans votre demeure trois jours. »

/fa labit-a fî-him 'alf-a sanat-i-n 'illâ kamsîn-a câm-a-n/. 14/29

II demeura dans eux mille années exceptées cinquante ans

Nombre nombre deuxième partie

(Nom de temps) du déterminant

« II demeura, parmi eux, mille années exceptées cinquante ans. »

On peut constater que le nombre est annexé au nombre /'alf-a sanat-i-n/

(mille des années). D'autres parts, le procédé rhétorique est d'affirmer le

nombre mille, puis d'excepter les années en moins. Ce qui met le chiffre mille

en relief.

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Étude syntaxique_________________________________300

Quant au lieu vague, c'est uniquement le nom de mesure, c'est-à-dire la

distance, qui est dénombré.

Exemples :

/sir-tu 'arbaln-a farsak-a-n/.

« J'ai parcouru quarante parasanges. »

Nombre nom de mesure

Déterminant circonstant

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Étude syntaxique_________________________________301

1.4.2 Déterminants positionnés à droite du circonstant.

Si la syntaxe est, comme le fait remarquer M. NOAILLY : « une

réfiguration du monde, car elle figure notre figuration du monde », nous avons

dans le déterminant annectif, qui remplit la fonction de complément de nom du

circonstant, un exemple évident de cette réfîguration.1

En effet, quel que soit le nom de temps ou de lieu, celui-ci n'est pas

intrinsèquement déterminé par rapport au reste du monde qui l'entoure. Dans

l'énoncé /jâ'-a yawm-a.../ (il est venu le jour...), le nom de temps dont la

valeur temporelle est définie, n'est pas déterminé, car on ne sait pas à quel

point référentie] du monde, il est rapporté. De même que le nom de lieu vague,

si l'on dit : /istaqarr-a cind-a/ (il s'est installé vers...), le nom de lieu And-a/

(vers) n'est pas déterminé par rapport au monde des entités. Il nécessite un

autre point référentie] spatial. Cela dit, la nature du point référentiel du nom de

temps est différente de celle du lieu vague. Donc, la nature du déterminant au

niveau syntaxique sera également différente.

1.4.3 Déterminant à droite du circonstant de lieu

Dans le monde extralinguistique, le lieu vague est par nature une entité

relative. Le lieu vague n'a d'existence dans Je monde que lorsque

M. NOAILLY, Présentation, in : Cahier de praxématique, p. 3.

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Étude syntaxique 302

l'énonciataire en fait mention. D'autre part, la présence du lieu vague ne peut

être perçue sans une entité de type absolu (chose animée ou inanimée) qui sert

de point référentiel dans l'espace.

Exemples :

Jistaqarr-a

« II s'est installé

Verbe

amam-a

devantlieu vague

Entité relative

Circonstant

l-bayt-ij.

la maison. »

lieu spécifié

entité absolue (point référentiel)

déterminant

Ijalas-a« II s'est assis

Verbe

majlis-al'endroit

lieu vague

Entité relative

Circonstant

zayd-i-nl.

Zayd. »

nom de mesure

entité absolue (point référentiel)

déterminant annectif

« II s'est assis à l'endroit où Zayd est assis. »

Au niveau syntaxique de l'énoncé, le déterminant du nom de lieu vague

peut être un nom commun, un nom propre ou un pronom. Dans ce cas, il vient

toujours se positionner à droite du circonstant. Par ailleurs, on trouve parfois

des énoncés où un circonstant de lieu vague est déterminé par un autre lieu

vague. Cependant, la référence ne peut être possible ainsi. Il est nécessaire

d'ajouter une autre référence à laquelle sera rapporté le nom de lieu de

référence, et qui, au niveau syntaxique, est le déterminant du circonstant.

Exemple :

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Étude syntaxique_________________________________303

Ifa lammâ balag-a majmac-a bayn-i himâ nasiya hût-a-humâl. 18/61Lorsqu'ils eurent atteint le lieu de rencontre entre les deux, ils oublièrent lepoisson à eux deux.

Lieu vague lieu vague pronom

Circonstant déterminant déterminantdu déterminant

« Lorsqu'ils eurent atteint le lieu de rencontre entre les deux [mers], ils

oublièrent leur poisson. »

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Étude syntaxique_________________________________304

1.4.4 Déterminant à droite du circonstant de temps

Au niveau syntaxique, les types de déterminants placés à droite du

circonstant de temps sont bien plus nombreux que ceux pour le circonstant de

lieu. En effet, si le lieu vague est, au niveau sémantique, référé à des

substances, autrement dit, à des êtres ou des objets, le déterminant sera limité à

une seule unité qui est soit un nom commun, un nom propre, ou un pronom.

Quant au nom de temps, hormis le système calendaire, il est sémantiquement

référé uniquement à un événement. Pourtant, l'événement est au niveau

syntaxique, refiguré sous des structures multiples. Le point référentiel ne peut

être que de nature semblable au référé. C'est à dire que le référé, qui est un

temps, ne peut être que semblable à son point référentiel qui est également lié à

la mémoire. D. WUNDERLICH explique que : «. De toute évidence, les concepts

spatiaux sont liés à la perception (ils servent à structurer le concret simultané),

les concepts temporels à la mémoire (ils servent à structurer la successivité,

nettement plus abstraite). »1

À propos de la similitude, Ibn Abî r-RABÎc dit : « Tout cela est comparable car

le passage de la nuit et du jour est dû aux mouvements du soleil, de son lever

et son coucher. Le passage, le lever, le coucher et le mouvement sont tous des

événements. Ils sont de même type que les actions [dénotés par les masdars].

D. WUNDERLICH. Langage et espace, in DRLAV, n° 27, p. 64.

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Étude syntaxique_________________________________305

Cela te montre clairement que le temps ressemble aux actions sous deux

aspects, selon ce que j'ai dit et explicité auparavant. »!

" "* -* ^ ^ ^ ^ ^ " ' ° ' ' 8 S i ' £ j ' ' f i J I ^ ' i l ' '

i ' ' ' ' a, a , a ,• ^ ^ * o ê x*.. . ^ i ^ â - j o .b> t_~- - iP ^^- iUaxJI «u j OUJI J! dAJ j JLaâ .

• 'C - J JLâ

En résumé, le lieu vague est lié au concret simultané, comme le temps à

Ja successivité abstraite. Les points référentieJs de lieux vagues sont des entités

concrètes, tandis que les points référentiels de temps sont des entités abstraites.

D'autre part, on peut remarquer que, d'une certaine manière, le temps est

déterminé par l'événement (ou action) et que l'action est localisée par le

temps.

Bref, si tel est le cas du circonstant de temps et de ses nombreux

déterminants, nous allons, à cet effet, consacrer une analyse pour chaque type

de déterminant.

Ibn Abî r-RABÎc, Al-basît, t. 1, p. 509.

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Étude syntaxique_________________________________306

1.4.4.1 Le système calendaire, déterminant du temps

Si le circonstant de temps est généralement déterminé par tout ce qui

dénote une action, le circonstant de temps fyawm-a/ (jour) ainsi que son

multiple /sahr/ (mois) font exception à la règle. Le circonstant /yawm-a/ et ses

multiples sont également déterminés par le système calendaire.

En effet, le temps extralinguistique est à l'origine le mouvement des

astres, perpétue], cyclique, régulier et linéaire. Le jour est l'unité principale du

temps. Cette unité dont la valeur temporelle est définie, constitue une

succession interminable. Des jours qui se suivent et se ressemblent. Aucun trait

particulier ne différencie un jour d'un autre. C'est à cet effet que fut établi Je

système calendaire. Ce système est structuré de façon permettant aux

interlocuteurs de localiser et dater un fait parmi d'autres sans faire appel à la

mémoire parfois défaillante.

Pour l'arabe, le système calendaire est constitué de sept noms de jours

et douze noms de mois lunaires, reportés au fur et à mesure sur de nouveaux

jours et de nouveaux mois. Ces noms calendaires qui sont considérés comme

des noms propres spécifiques, sont, au niveau linguistique et plus

particulièrement dans le cas du circonstant, des déterminants potentiels.

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Étude syntaxique________________________________307

Chaque premier jour de la semaine s'appelle : /'ahad/ (dimanche).

2ème jour .-/'itnayni/ (lundi)

3ème jour :/tulatâY (mardi)

4ème jour : /'arbi caV (mercredi)

5ème jour :/kamts/ (jeudi)

6emejour : /jumu°a/(vendredi)

7èmejour : /sabt/(samedi)

Chaque premier mois de l'année s'appelle /muharram/

Le 2^ mois •. /safar/

Le 3eme mois : /rabî0 al-'awwal/

Le 4èrae mois : /rabf al-'âkir/

Le S6"16 mois : /jumâdâ al-'aww\â/

Le 6eme mois : /jumâdâ al-'âkirâ/

Le 7èrae mois : /rajab/

Le S^6 mois -. /sacbân/

Le 9eme mois : /ramadan/

Le lO^6 mois : /sawwal/

Lellèmemois-./dûl-qicda/

Lel2èmemois:/dûl-hijja/

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Étude syntaxique_________________________________308

Exemples :

J'idânûdiy-a li s-salât-i min yawm-i l-jumucat-i

Lorsque l'on appelle à la prière du jour du vendredi,

fa scaw 'ilâ dikr-i llah-il. 62/9 nom de temps nom calendaire

rendez-vous au rappel de Dieu. (point référentiel)

« Lorsque l'on appelle à la prière du vendredi, rendez-vous au rappel de

Dieu. »

Isahr-u ramadân-a lladî'unzil-a fl-hil-qur'ân-ul. 2/85

Le mois de Ramadan lequel est descendu dans lui le Coran,

nom de temps nom calendaire

(Point référentiel)

« Le mois de Ramadan dans lequel est descendu le Coran. »

Au niveau de l'énoncé, la langue arabe offre la possibilité d'ellipser les

circonstants par souci d'allégement pour ne garder que Je déterminant qui

supplée pour la datation.

Exemples :

Jsir-tn yawm-a l-junwcat-iJ.

circonstant de temps déterminant annectif

J'ai marché le jour du vendredi.

Isir-tu l-jumucat-al

Verbe déterminant suppléant au circonstant de temps /yawm-a/ (jour).

« J'ai marché le vendredi. »

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Étude syntaxique_________________________________309

Les noms calendaires, comme tout nom spécifique à une entité et connu

des interlocuteurs, sont souvent les représentants formels de leurs

hypéronymes. C'est le cas des noms de semaines, de mois. Tous les

interlocuteurs savent que le nom calendaire /'ahad/ correspond à /yawm-a/ et

non pas à /sahr-a/. Le nom /sawwal/ correspond à /sahr-a/ et non pas à ,/yawm-

a/, etc. C'est également le cas pour les adjectifs comme /al-bârib-at-a/ que tout

le monde sait qu'il correspond à /laylat-a/ et non pas à /yawm-a/.

1.4.4.2 /'id/ (quand) détermine t-il le circonstant de temps ?

Le nom de temps /'id/ (quand/passé) s'annexe à certains noms de temps

à durée déterminée comme /yawm-a/ (jour), /Jaylat-a/ (nuit), /sahr-a/ (mois),

/sanat-a/ (année) et à certains noms de temps à durée indéterminée comme

/ljîn-a/ (moment), /waqt-a/ (instant), /zamân-a/ (temps), /sâcat-a/ (heure). Dans

son annexion à un nom de temps, fia/ sert à la fois de relatif et de

démonstratif II rappelle un temps mentionné auparavant dans un texte donné

et dénote un temps passé.

Exemple :

/yawm-a 'id-i-n yuwaffihimu llah-udîn-a-humu l-faaqq-al. 24/25

Ce jour là, leur accordera Dieu leur rétribution véritable

Circonstantrelatif et démonstratif

« Ce jour [cité auparavant] là, Dieu leur accordera leur véritable rétribution. »

D'un autre côté, /'id/, annexé à un nom de temps, forme un déictique qui

permet de désigner et d'insister sur un temps SJtué dans un contexte temporel.

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Étude syntaxique_________________________________310

/vra 'antum hîn-a 'id-i-n tanzurûn-al. 56/84« Et vous à ce moment -là, vous regardez. »

Circonstant de temps

Ainsi, le déictique ou le relatif composé annectivement de /'id/ et d'un

autre nom de temps est, d'une certaine manière, déterminé intrinsèquement et

indéterminé extrinsèquement. Du fait qu'il n'y a rien qui vient déterminer le

déictique, deuxième élément de forme annective, il prend la marque du génitif.

Exemple :- lyawm-a tashad-u calay-him.../ 24/24

« Le jour où témoigneront contre eux... »

Circonstant de temps phrase verbale

Déterminé déterminant annectif

- lyawm-a 'id-in .../.

Ce jour là

Circonstant de temps nom de temps

1er élément 2e"16 élément

Circonstant relatif

« ce jour-là »

/fa lawlâ 'idâ balagat-i l-fyulqûm-a« Si ce n'est lorsqu'elle eut atteint la gorge,

wa antum faîn-a 'id-in tan$urûn-al. 56/83

et que vous, à ce moment là, regardez... »

circonstant nom de temps

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Étude syntaxique_________________________________311

1.4.4.3 Le temps détermine le temps.

Parmi les déterminants postposés au circonstant de temps, il y a le nom

de temps spécifié. Le circonstant de temps, déterminé par le nom de temps

spécifié, dénote une partie de son déterminant. Autrement dit, le déterminant

désigne une partie du temps qui englobe celle du nom déterminé. Ainsi, dans

une annexion, il y a un rapport d'inclusion.

Exemples :

Isabâh-a l-yawm-il.

« Le matin de ce jour. »

nom de temps nom de temps

circonstant déterminant

/min 'ahl-i l-kitâb-i 'ummat-u-n qâ 'imat-u-n yatlûn-a 'ayât-i llah-i

« II est parmi les gens du livre, une communauté droite [dont les membres]

récitent les versets de Dieu,

'ânâ '-a l-layl-i wa hum yasjudû-nal. 3/113

à des heures de la nuit et sont prosternés. »

Nom de temps nom de temps

Circonstant déterminant

Le circonstant de temps peut être une extrémité d'un temps spécifié.

L'extrémité est également une inclusion dans le nom de temps qui sert de

déterminant.

Exemple :

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Étude syntaxique_________________________________312

Ara 'aqimi §-salât-a farafay-in- nahâr-i wa zulaf-a-n min l-layl-i/l 1/114

Et accomplis la prière aux deux extrémités du jour et à des heures de la nuit

Nom de partie extrême nom de temps

Circonstant déterminant

« Accomplis la prière aux deux extrémités du jour et à certaines heures de la

nuit. »

/ 'âminû bi lladj 'unzil-a calâ lladîna 'âmanû wajh-a n-nahâr-iCroyez en ce qui fut descendu sur ceux qui ont cru, la face du jour

nom de partie nom de tempsextrême spécifiécirconstant déterminant

wa kfurû 'âkir-a-hul. 3/72

et reniez sa fin.

« Croyez en ce qui fut descendu sur ceux qui ont cru, au début du jour et reniez

en fin de journée. »

Les noms de temps déterminent également les noms indiquant

l'antériorité et la postériorité teJ que /ba°d-a/ (après) et /qabJ-a/ (avant).

/wa 'inn min qaryat-i-n 'illâ nahnu muhlikû-ha qabl-a yawm-i l-qiyâmat-il.17/58Et, certes, de cité sauf que nous la faisons périr avant le jour du jugement

Circonstant déterminant

« II n'est point de cité que nous ne fassions périr avant le jour de la

résurrection. »

/wa qâlû rabbanâ 'ajjil lanâ qittanâ qabl-a yawm-i l-hisâb-i/. 38/16

Ils disent : notre Seigneur, hâte-nous notre part avant le jour des comptes.nom de temps nom de temps

circonstant Déterminant

« Ils ont dit : Seigneur, hâte-nous notre part avant le jour des comptes. »

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Étude syntaxique_________________________________313

II faut cependant remarquer, que le nom de temps spécifié qui sert de

déterminant, ne peut, en réalité, déterminer que lorsqu'il est lui-même

déterminé. Dans le cas du nom de temps /yawm-a/ (jour), ce sont les noms

d'actions /al-qiyâmat-i/ (la résurrection) et /al-hisâb-i/ (le compte) qui le

déterminent dans les exemples précédents.

1.4.4.4 L'événement et la détermination du circonstant

L'événement, tout comme le temps, fait partie de l'ordre de la

succession. Il y a une sorte d'affinité entre eux. L'un, le temps, permet de

localiser l'événement. L'autre, l'événement, permet de déterminer une partie

du temps dans un ensemble du même genre. C'est-à-dire que l'événement

permet de déterminer un jour parmi tous les autres jours ou un moment parmi

d ' autres moments.

Cela dit, au niveau syntaxique, l'événement est refïguré comme un

déterminant du circonstant. Cependant, ce type de déterminant apparaît sous de

multiples formes. Cela peut aller de la simple unité lexicale (au-dessus, nom,

etc.) à la phrase (verbale ou nominale).

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Étude syntaxique ________________________________ 3 14

1. 4. 4. 4. 1 Le nom d 'action (au-dessus)

Le au-dessus dénote une action qui peut être perçue comme un

événement historique ou un simple fait.1 Quant au masdars exprimant un

événement, ceux-ci déterminent essentiellement les circonstants de temps

spécifiés.

/laylat-a 1-qadr-i/

La nuit du destin.

lyunabbi'-u-humbimâsabar-û yawm-a l-qiyâmat-il . 58/7

II informera eux de ce qu' ils ont patienté le jour de la résurrection

nom spécifié au-dessus

(événement)

circonstant déterminant

« II les informera de leur patience le jour de la résurrection. »

Les événements appartiennent soit au passé, soit au futur, et sont

connus des interlocuteurs.

Événement du futur : /yawm-a - 1-qiyâmat-i/

- 1-hisâb-i/

Événement du passé : /yawm-a [gazwat-i] - hunayn-i/2

/yawm-a - 1-bajj-i l-'akbar-i/

1 Un fait : c'est une donnée de l'expérience. Un événement : c'est ce qui arrive2 Hunayn est le nom d'une bataille considérée comme passée. La bataille, qui est l'événementhistorique, est ellipsée et supplée par son nom propre.

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Étude syntaxique_________________________________315

Quant aux simples faits, ils n'appartiennent pas à un temps en

particulier passé ou futur. Ils sont représentés par des masdars déterminant des

noms de temps vagues. Ces derniers peuvent être des instants localisateurs

comme c'est le cas pour /Ijîn-a/ (instant, moment).

En employant un nom de temps vague comme /bin-a/, on désigne simplement

le temps de l'action, un moment déterminé. Tandis que si l'on utilise un nom

de temps spécifié comme /yawm-a/, le temps serait d'une durée bien plus

grande que l'action. Il n'y a pas besoin d'employer de nom indiquant une

valeur temporelle étendue pour une action beaucoup moins grande. De plus, on

ne veut pas non plus parler d'un temps en particulier.

Exemples :

/7dâ hadar-a 'afyad-a-kumu l-mawt-a f}în-a l-wa$iyyat-i... 75/106

Lorsque assiste l'un de vous à la mort, au moment du testament

Nom de masdar

temps vague

Circonstant déterminant

« Lorsque l'un de vous vient à mourir, au moment du testament... »

lAllah-uyattawaffâ l-'anfits -a hîn-a mawt-i-hal. 39/42

« Dieu recueille les êtres au moment de leur mort. »

nom de temps vague masdar

circonstant déterminant

Iqâl-a 'annâ yuhyî hâdi-hi llah-u btfd-a mawt-i-hal. 2/259

II a dit : d'où fera t-il vivre celle-ci Dieu après la mort à elle ?

nom de temps vague masdar

circonstant déterminant

« II a dit : Comment Dieu va t-il ressusciter celle-ci après sa mort ? »

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Étude syntaxique_________________________________316

Le circonstant /bacd-a/ désigne un temps situé après la mort. C'est comme si

on voulait dire : dans l'après mort. La traduction littérale du verset serait : II a

dit comment Dieu va t-il ressusciter celle-ci dans le temps postérieur à la

mort ? D'une certaine manière /ba°d-a/ est un temps appartenant à /mawt-i/ (la

mort) et d'une autre, /mawt-i/ est le spécificateur et déterminant de /ba°d-a/.

Autre exemples :

lyarudd-u-kum bacd-a 'îmân-i-kum kâfirîn-al. 3/100

II vous changera, après la foi à vous, en négateurs

nom de temps vague masdar

circonstant déterminant

« II fera de vous, après que ayez eu foi, des négateurs. »

/\va là tufsidûfl l- 'ard_-i bacd-a 'islâfy-i-hal. 7/85

Ne faites pas de corruption dans la terre après la réforme à elle.

nom de temps vague masdar

circonstant déterminant

« N'allez pas commettre la corruption en ce monde, après sa réforme. »

/wa sabbih bi hamd-i rabb-i-ka

« Célèbre les louanges de ton seigneur,

qabl-a $ilûc-i as-sams-i wa qabl-a gurûb-i-hal. 20/130

avant le lever du soleil et avant son coucher. »

nom de masdar nom de temps masdartemps vague vague

circonstant déterminant circonstant déterminant

Le circonstant /qabl-a/ est sémantiquement l'inverse de /bacd-a/. Il indique un

temps situé avant l'événement ,/tulûc-i/. La traduction littérale du verset, ci-

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Étude syntaxique ____________________________317

dessus, serait : Célèbre les louanges de ton seigneur dans le temps antérieur au

lever du soleiJ et dans le temps antérieur à son coucher.

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Étude syntaxique_________________________________318

1.4.4.4.2 La phrase, déterminant annectifdu circonstant

Pour définir la phrase, az-ZAJJÂJÎ reprend et complète la définition de

SffiAWAYHl en disant : « Sache que les phrases ne changent pas sous

l'influence des régissants. Est phrase tout énoncé dont une partie de ses

éléments régit l'autre. En conséquence, elle sera reprise tout en conservant les

voyelles casuelles de ses éléments. »!

Selon Hassan HAMZÉ, la citation d'az-ZAJJÂJÎ, mentionnée ci-dessus,

définit la phrase sur deux niveaux : interne et externe.

1- Au niveau interne, les éléments de la phrase entretiennent des rapports

de dépendance, exprimés en terme de rection, les éléments de la phrase

régissant les uns les autres. Mais ils ne sont pas régis par un élément extérieur

à l'ensemble.

2 - La phrase, tout en étant la somme de ses constituants sur le niveau

interne, est une unité sur le niveau externe ; elle n'est pas très éloignée de

"l'unité syntaxique minimale". Une fois constituée, aucun de ses éléments ne

peut être régi par un élément qui ne fait pas partie de l'ensemble. C'est la

phrase tout entière en tant qu'unité qui peut entretenir une relation avec un

1 Az-ZAJJÂJÎ. Al-Jumal, p. 339. Voir Hassan HAMZÉ, Les théories grammaticales d'az-Zajjâjî, p.

528.

SIBAWAYHI définit la phrase ainsi : « Tout énoncé dont une partie de ses éléments régit l'autre. »Al-kitâb, t. 1, p. 23.

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Étude syntaxique_________________________________319

élément qui ne lui appartient pas. C'est pour cette raison, une phrase,

lorsqu'elle est reprise, conserve les voyelles casuelles de ses éléments.l

Cela dit, lorsque les noms de temps sont annexés à un nom, ce dernier

est au génitif et reçoit la désinence casuelle /i/. Mais lorsqu'il s'agit d'une

phrase annexée à un nom de temps, celle-ci, au niveau externe, occupe la

fonction d'une simple unité. Ses éléments ne peuvent être régis par un élément

qui ne fait pas partie de l'ensemble. C'est la phrase toute entière qui peut

entretenir une relation avec un élément extérieur tout en conservant ses

voyelles casuelles.

Exemples :

/waastamf yawm-a yunâdî l-munâdî min makân-i-n qarîb-i-nl. 50/41

Écoute, le jour où criera le Hérault d'un lieu proche,

circonstant de temps phrase

1er élément d'annexion 2e"16 élément d'annexion

Annexion

« Écoute, le jour où le Hérault criera d'un lieu proche. »

/law ycflam-u lladjn-a kafarû fyîn-a là yakuffûn-a can wujùh-i-himu n-nâr-al.21/39 ——— ————————————————————————S'ils connaissaient, ceux qui nié, le moment où ils ne pourront protéger leursvisages du feu.

circonstant phrasede temps___________________

Annexion

« Si les mécréants connaissaient le moment où ils ne pourront empêcher le feu

d'atteindre leurs visages. »

Hassan HAMZÉ, Les théories grammaticales d'az-Zajjâjî, t. 2, pp. 588-589.

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Etude syntaxique_________________________________320

Isa yafylifûn-a bi Allah-i la-kum 'idâ anqalab-tum 'ilay-him li-tucridû can-huml 9/95 ~~ ———————————————————————Us jugeront par Dieu pour vous, lorsque vous retournerez à eux pour vousdétournez d'eux.—————————— Circonstant_________phrase

Annexion

« Ils vous feront des serments par Dieu, lorsque vous retournerez à eux pour

passer [sur leur tort]. »

l~wa 'id qîl-a li l-malâ 'ikat-i usjudû li 'âdam-a... 125/60

Lorsqu' on dit aux anges : Prosternez-vous pour Adam

circonstant phrase

Annexion

« Lorsqu'on dit aux anges : Prosternez-vous devant Adam... »

Aucune voyelle casuelle ne change dans la phrase unité, qu'elle soit

verbale ou nominale. Dans le cas de la phrase nominale qui débute par un nom,

voir ci-dessous, celui-ci ne change pas de voyelle casuelle, malgré sa

juxtaposition avec le circonstant de temps. Le circonstant possède une relation

d'annexion avec l'ensemble de la phrase nominale, non pas avec un seul de ses

éléments

Iwa 'idj l-qulâb-u ladâ l-fyanâjir-i kâçinûnl 40/18

« Lorsque les cœurs sont, près des gorges, terrifiés. »

Circonstant phrase

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Étude syntaxique _________________________________ 321

1.4.4.4.3 Spécificité de la phrase annexée aux différents circonstants de

temps.

Les circonstants de temps comme /yawm-a/ (jour) s'annexent aussi bien

à une phrase verbale que nominale. Quant à la phrase verbale, celle-ci est soit

constituée au minimum d'un verbe et de son morphème de personne, soit

d'une addition d'éléments (verbe, sujet, complément, etc.). Lorsqu'il s'agit

d'une phrase verbale constituée au minimum d'un verbe et de son morphème

de personne, c'est tout simplement parce que le verbe est intransitif.

Exemple :

Jwa s-salâm-u calay-hi yawm-a wulid-al. 1 9/1 5

« Que la paix soit sur lui le jour où il naquit. »

Circonstant de temps phrase verbaleRégissant

Annexion

En principe, comme nous l'avons vu dans le chapitre sur l'annexion, un

nom indéterminé qui entre en rapport d'annexion avec une autre unité,

exemple /yawm-a-n/, perd le noun /n/ de l'indétermination pour s'annexer au

deuxième élément d'annexion, qui lui, est en principe affecté de la marque du

génitif /i/. Ce principe concerne également le circonstant de temps annexé à

une phrase verbale, sauf que celle-ci constitue un élément figé qui ne peut être

régi par un élément de la phrase complexe, ni par le rapport d'annexion dont le

deuxième élément doit être régi au génitif.

Exemples : /yawm-a-n/ (un jour)

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Étude syntaxique_________________________________322

lyawm-a kalaq-a s-samâwât-i vra /- 'ard-al. 9/36

« Le jour où il créa les cieux et la terre. »

Circonstant phrase verbale

1er élément 2e"16 élément

Annexion

Si le verbe de la phrase annexée à un circonstant de temps est transitif,

il dépasse son sujet vers le complément directement ou indirectement au

moyen d'une préposition.

Exemples :

!\va sawfa yaclamûn-a hîn-a yarawn-a l-cadâb-a/. 25/42

Verbe circonstant verbe transitif c.o.dde tempse t

« Bientôt, ils sauront, au moment où ils verront le châtiment. »

lyawm-a ta'û s-samâ'-u bi dukân-i-n mubîn-i-nl. 10/44

Le jour où viendra le ciel avec une fumée apparente

Nom de temps Phrase

Annexion

« Le jour où le ciel paraîtra avec une fumée bien apparente. »

Les circonstants de temps qui s'annexent à une phrase verbale sont,

entre autres, /yawm-a/ (jour), /hîn-a/ (moment), /'id/ (quand/passé), /'idâ/

(quand/non passé). L'annexion de la phrase verbale à ces noms de temps est

expliquée par diverses raisons :

]- Le nom de temps /yawm-a/ annexé à une phrase, notamment à la phrase

verbale désignant un temps non passé, signifie que l'événement concerne le

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r

Etude syntaxique_________________________________323

jour (yawm) et non pas la nuit. On veut mettre l'accent sur le temps /yawm-a/

(jour). Un jour qui appartient à un événement spécifique.

2-Si le nom de temps est remplacé par /bîn-a/ (moment), il n'y aurait plus

d'accent mis sur une temporalité spécifique comme /yawm-a/ jour, /laylat-a/

nuit, /sâcat-a/ heure, etc. On obtient un temps sans aucune spécificité.

3- Si l'on remplace le circonstant de temps /yawm-a/ par le circonstant de

temps /'id/ (lorsque), il y aurait une imprécision sur le temps passé ou non

passé, /'id/ peut servir aussi bien à indiquer un temps passé dans un contexte

passé ou non passé. De plus, il n'y a pas d'accent mis sur un jour, une nuit, une

heure, un mois ou une année en particulier.

4- Si J'on remplace /yawm-a/ par /'idâV, on obtiendrait avec le temps verbaJ

non passé de la phrase annexée, une incertitude sur l'accomplissement de

l'événement. Si le temps du verbe de la phrase annexée était au temps passé,

l'accomplissement de l'événement serait plus plausible. Le circonstant de

temps auquel est annexée la phrase verbale n'est pas là par hasard. On le

choisit pour sa particularité et selon l'importance de événement en le mettant

en évidence.

Quant à la phrase nominale annexée au nom de temps, elle débute par un nom

ou un pronom sur lequel on met la lumière. D'autre part, le contexte de la

phrase fait partie du temps non passé. Les noms de temps qui s'annexent à ce

genre de phrase, peuvent se remplacer entre eux, sauf si l'on veut mettre en

évidence un temps spécifique.

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Etude syntaxique_________________________________324

Exemples :

lyawm-a hum °alâ n-nâr-i yuftamm-al. 51713

Le jour où eux sur le feu sont éprouvés

Nom de temps___pronom

Phrase

Annexion

« Le jour où ils seront éprouvés au feu. »

Ifa 'idâ hiya tucbân-u-n mubîn-u-nl. 107/7

Lorsque elle un serpent évident

circonstant_____pronom

phrase nominale

Annexion

« Lorsque celle-ci se transforma en un serpent évident. »

/ 'id hum calâ n-nâr-i yuftanûn-al. 51/13

Lorsqu'ils eux sur le feu à être éprouvés

circonstant pronom

phrase ___

Annexion

« Lorsqu'ils seront dans le feu à être éprouvés... »

Parmi les noms de lieu, seul /haytu/ (là où) s'annexe à une phrase,

notamment à la phrase verbale. L'annexion de /haytu/ à une phrase nominale

semble rare. Elle est inexistante dans le Coran. Mais cela est possible dans le

cas ou l'on veut mettre l'accent sur un nom.

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Etude syntaxique_________________________________325

/wa kulâ min-ha ragad-a-n haytu si'tumâl. 2/35

Mangez d'elle aisément de là où vous voulezcirconstant phrase verbale

Annexion

« Mangez-en aisément de là où vous le désirez. »

II est intéressant de remarquer que /haytu/ est généralement annexé à

une phrase verbale où le verbe est conjugué au passé. On parle de lieu où un

procès est opéré et rarement voire pas du tout de lieu où un procès sera opéré.

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Étude syntaxique_________________________________326

1.4.4.4.4 Déterminant et métaphore

Nous avons pu remarquer jusque là, que le circonstant de temps ne peut

être déterminé sous forme d'annexion que par une unité signifiant une entité de

même nature que le temps. Autrement dit, une entité faisant partie de l'ordre

de la successivité comme le temps. Ces entités sont les accidents qui

comprennent les faits ou les événements.

Cependant, il arrive parfois qu'un circonstant de temps puisse être

déterminé par un substantif dont le signifié est soit un être, un objet ou un fait.

Ce type de déterminant n'est possible que dans le cadre de la métaphore et

pour une catégorie spécifique de noms de temps.1

Outre la représentation spatialisée du temps comme un axe orienté vers

le futur, il existe une représentation métaphorique du temps où l'axe du temps

est immobile et sur lequel se déplacent toutes sortes d'entités comme sur un

chemin.

1 À ce propos, Andrée BORILLO explique : « Qu'en linguistique, il y une manière de représenter letemps, qui est de le traiter comme un continuum unidimensionnel asymétrique, c'est-à-dire commeun axe linéaire orienté sur lequel sont fixés des points de référence permettant de calculer des dateset de mesurer des durées. Le temps entre donc tout naturellement dans un système dereprésentation qui, au lieu d'être tridimensionnel comme celui que nous construisons pourl'espace, n'a qu'une dimension, le point et la ligne. Ainsi, s'il est dit que nous usons demétaphores spatiales pour parler du temps, il ne peut s'agir que de métaphores faisant appel à destermes spatiaux unidimensionnels, qui n'impliquent ni des surfaces, ni des volumes.Andrée BORILLO, Le déroulement temporel et sa représentation spatiale en français, in : Cahiersde praxématique, n° 27, p. 109.

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Étude syntaxique_________________________________327

Dans le verset suivant, il est question de temps où le futur est représenté

comme une orientation spatiale (devant) et en laquelle Je procès est opéré.

Ibalyurîd-ul-'insân-u li-yajfjur-a 'atnâm-a- hu/.75/5

De plus, il voudrait l'homme se rebeller devant lui

Circonstant déterminant annectif

Annexion

« De plus, l'homme voudrait se rebeller dans le futur. »

Les noms de temps employés dans la représentation métaphorique sont

ceux qui dénotent l'antériorité et la postériorité. Ce sont /qabJ-a/ (avant) et

/ba°d-a/ (après). On peut donc comprendre que le temps qui fait partie de

l'ordre de la successivité peut dans ce cas servir à localiser ce qui fait partie de

la simultanéité.

Exemple :

///- 'alla yakûn-a li n-nâs-i calâ llah-i hujjat-a-n bacd-a r-rusul-il.4/165 * ———— ——————Afin qu'il n'y ait pas, pour les gens, sur Dieu, d'argument,

après les messagers.nom de temps nom d'êtrecirconstant déterminant annectif

«Afin qu'il n'y ait pas d'argument pour les gens, devant Dieu, après les

messagers. »

On pourrait se demander si, dans les exemples ci-dessus, les

déterminants annectif ne sont pas des déterminants d'un nom de temps supposé

être /zamân-a/ (temps, époque). Dans ce cas, nous sommes toujours dans

l'ordre de la successivité.

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Étude syntaxique_________________________________328

Ifamâdâ bacda l-haqq-i 'illâ d-dalâl-ul. 10/32

« Qu'y a t-il d'autre après la vérité, si ce n'est que l'égarement. »

Nom de temps nom d'entité abstraite

Circonstant déterminant annectif

Le circonstant de temps peut être aussi bien déterminé par un pronom

personne] qu'un pronom relatif ou démonstratif.

Isunnat-u mon qad 'arsalnâ qabl-a- ka min rusulin-âl. 17/77

circonstant pronom

Annexion

« C'est la coutume de ceux que nous avons envoyés avant toi parmi les

messagers. »

Dans ce cas, on peut supposer : /qabl-a zamân-i-ka min rusulinâ/

Avant ton époque, parmi nos envoyés.

/qâl-û yâ §âlih-u qad kunta fî-nâ marjuww-a-n qabl-a hâdâ/. 11/62

Ils ont dit : « Ô Salih, tu étais en nous celui en qui on espère avant cela.

circonstant pronomdémonstratif

« Ils ont dit : « O Salih, ru étais pour nous une source d'espoir avant cela. »

On supposera : /qabl-a zamân-i hâdâ/= Avant le temps de cela.

/wa la'in ittabac-ta 'ahwâ'-a-hum bacd-alladî jâ'-a-ka min-a l-cilm-i/. 2/120

Si tu suis les passions à eux, après ce qui es venu à toi, comme

savoir... Circonstant pronom relatif

« Si tu suis leurs passions, après ce qui t'es parvenu comme savoir... »

On supposera : /bacd-a zamân-a lladî jâ'-a-ka min-a l-cilm-i/

« Après l'époque de ce qui t'est parvenu comme savoir. »

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Étude syntaxique_________________________________329

1.5 LE CIRCONSTANT ET LE PRINCIPE D'ORDRE LINÉAIRE

1.5.1 L'ordre séquentiel

Dans la chaîne parlée et sa représentation linéaire écrite, les mots

apparaissent dans la phrase les uns après les autres. L'énoncé s'articule

linéairement en unités douées de sens remplissant des fonctions. Ces unités ou

ces éléments linguistiques s'enchaînent sur l'axe syntagmatique en une suite

ordonnée. L'enchaînement des éléments sur l'axe syntagmatique, en une suite

ordonnée, n'est pas le fruit du hasard. Bien au contraire, l'agencement des

éléments, qui est une organisation formelle de la proposition, obéit à des

contraintes relevant de la géométrie du langage et des conventions des

locuteurs. C'est ainsi que des habitudes, des usages, voire même une

convention collective qui font que tel ou tel mot se place à telle ou telle

position dans l'énoncé. D'après Ibn JlMNÎ, qui a dégagé un certain nombre de

principes généraux qu'il estime devoir être respectés dans l'ordre des termes

qui constituent la phrase : « Tout mot soumis à un régissant doit suivre ce

dernier ; que la place de l'agent ne peut être qu'après le verbe ».*

Bien entendu, ces principes, sur l'ordre séquentiel, ne sont pas, comme

l'explique Abdelkader MÉHHU, des principes rigides. Le locuteur garde,

Ibn JINNÎ, Al-Kasâ 7s, t. 2, p. 229

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Étude syntaxique_________________________________330

malgré tout, une certaine latitude lui permettant de ne pas s'enfoncer dans des

structures théoriques.l

Cela dit, dans les langues flexionnelles, à déclinaisons, notamment dans

la langue arabe, l'ordre linéaire et la place respective des mots dans une phrase

sont secondaires pour indiquer la fonction. Ceci, bien entendu, dans le cas ou

le système casuel est encore vivant comme au temps de la révélation

coranique. A cette époque, le système casuel prédominait jusqu'à ce qu'il soit

concurrencé par l'ordre des mots à une époque tardive. C'est à dire vers le

quatrième siècle de l'hégire.2

Dans une phrase verbale, le circonstant de temps et de lieu est l'un des

compléments du verbe. Le circonstant est, de ce fait, soumis au verbe son

régissant. Ce qui signifie logiquement que la place canonique du circonstant

est la position postverbale.3 Cela dit, il s'avère que la notion de rection impose

des contraintes d'ordre séquentiel. C'est, sans doute, l'un des critères qui

définissent l'agencement canonique des positions linéaires. Ainsi, le régissant

est canoniquement le premier élément et ce qui est régi est le deuxième

élément. Bien plus, la rection a ce pouvoir de définir une précédence linéaire

1 Abdelkader MÉHIRI. Les théories grammaticales d'Ibn Jinnî, p. 3842 Voir à ce propos, Hassan HAMZÉ, Les théories grammaticales d'az-Zajjâjî, p. 5203 II est intéressant de voir, que la postposition du complément au verbe n'est pas le propre de lalangue arabe. Cela concerne également d'autres langues dont le français. Lucien TESNIÈRE précise« Le complément tend à suivre le verbe. » Évidemment, les critères qui définissent cette positionpeuvent être différents selon les théories linguistiques. Eléments de syntaxe structurale, p. 125

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Étude syntaxique_________________________________331

du régissant et en conséquence, l'ordre respectif des éléments régissants et

régjs.

Exemples :

/fa mon yastamf-u l-'âna yajid la-hu sihâb-a-n rasad-a-nl 72/9

Celui qui écoute, le moment, trouvera pour lui un projectile de feux ardent.

Verbe circonstant

« Celui qui écoute, maintenant, trouve un projectile de feux ardent. »

/wa 'azlafnâ tamma l- 'âkarin-a/ 26/6

« Nous fîmes approcher, là, les autres. »

Verbe circonstant

La position canonique des différents éléments de la phrase verbale, est

que le verbe se place à l'initiale, ensuite, vient le sujet régi au nominatif et

enfin le complément régi à l'accusatif ou au génitif par l'intermédiaire d'une

préposition.

Verbe- sujet- complément.

Régissant régi régi

(au nominatif) (à l'accusatif ou au génitif)

La position initiale de la phrase appartient au régissant qui est le verbe.

Celui-ci régit son sujet au nominatif et son complément à l'accusatif. On

pourrait se demander si l'ordre entre le sujet et le complément est lié au type

de désinence casuelle. Autrement dit, est-ce que le nominatif se place avant

l'accusatif?

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Étude syntaxique _________________________________ 332

Quoi qu'il en soit, l'ordre entre le sujet et le complément n'est pas

seulement lié au système casuel. II est également expliqué par des

considérations ayant rapport à l'importance du sujet jugé relativement à la

théorie de la prédication. Il s'agit d'un sens grammatical relatif à la

prédication. Le sujet est obligatoire dans la prédication. Le complément est

facultatif. « Ainsi -dira- SlBAWAYHI le fait est que le sujet soit antéposé, cela

est du très bon arabe. C'est comme s'ils (les Arabes) avaient placé celui qui

leur paraît le plus important à exprimer avant [les autres éléments] et par

l'expression duquel ils se suffisent »l

r .x &-,„ Jiaf> ,# > r f f c * ,, .j - * •>'„> . " ^ ° f °'° &, ' .> S u o r[UJ|J.»_£Jl5 tljiiS JLpr ^y^ j-*> J LaJbL» <us Oj-^J 01 • f e à U l -b^ Jo ^ tyk3

' " ^

* ^-* J

Exemple:

/wa là yukallim-u-humu llah-u yawm-a l-qiyâmat-il 2/1 74

Et ne parlera pas à eux, Dieu, le jour de la résurrection. »Circonstant sujet circonstant

« Dieu ne leur parlera pas le jour de la résurrection. »

/fa- 'amât-a-hu llah-u mi'at-a câm-i-n tumma bacat-a-hu/2 2/259

II a fait mourir lui, Dieu, cent années ensuite il a ressuscité lui.Verbe sujet circonstant

« Dieu l'a fait mourir cent années ensuite il l'a ressuscité. »

Dans le cas de la phrase nominale, comprenant un inchoatif, un

étxoticiatif et un circonstant, l'ordre séquentiel canonique implique un ordre de

1 SlBAWAYHI, t. 1, p. 34-2 Les pronoms clitiques constituent une contrainte formelle en venant se positionner entre le verbe,le sujet et le circonstant.

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Étude syntaxique_________________________________333

précédence où l'inchoatif est ce sur quoi on informe.1 Il est donc le premier

élément de la phrase. Vient ensuite l'information (Fénonciatif) accompagné,

parfois, du circonstant précisant facultativement la notion de temps ou de lieu.

Inchoatif - énonciatif - circonstant.

Régissant régi

L'ordre des éléments peut être également expliqué par le fait que tout

énoncé comporte une dynamique communicative selon laquelle normalement

l'information va croissant, du thème vers le rhème. Le début de l'énoncé

comporte naturellement l'indication de ce sur quoi l'énoncé va rouler, le thème

= ce dont on parle :

Exemple:

Ifallah-u yahkum-u bayn-a-hum yawm-a l-qiyâmat-il 13/2

« Dieu jugera entre eux le jour de la résurrection. »inchoatif énonciatif circonstant de lieu circonstant de temps

On peut remarquer, dans l'exemple d'énoncé de structure neutre comme ci-

dessus, que le rhème est composé d'un verbe et de deux compléments dont

l'un de lieu et l'autre de temps. Les circonstants sont dans leur position

canonique pour deux raisons: la première parce que le complément est,

d'ordinaire, postposé à son régissant. La deuxième, de nature sémantique, est

liée au fait que le circonstant précise la circonstance de l'action du verbe et la

précision vient normalement après ce qui est précisé.

1 L'inchoatif est appelé, par les grammairiens, al-mubtadâ ' qui signifie : ce par quoi on commenceet ce sur quoi on informe. Ainsi, la phrase nominale débute par "ce par quoi on commence" et "cesur quoi on informe". Autrement dit, l'inchoatif.

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Étude syntaxique_________________________________334

1.5.2 Mobilité du circonstant

Malgré sa position canonique et les contraintes d'ordre, le circonstant

connaît, en général, une mobilité évidente sur l'axe syntagmatique. En effet, la

mobilité est relative aux différentes catégorie sémantiques du circonstant de

temps et de lieu (déictique, interrogatif, etc.). Ainsi, comme nous allons le

voir, certaines catégories de circonstants de temps et de lieu se déplacent

aisément de leur position canonique vers la position initiale, médiane ou finale

de l'énoncé et pouvant s'insérer entre différents éléments. D'autres se

déplacent uniquement entre les éléments postposés au verbe. D'autres se

déplacent uniquement dans la partie de l'énoncée antéposée au verbe. D'autres

par contre, ne quittent jamais la position canonique. Ces derniers ont un

placement fixe. Il est à préciser que la position canonique, qui est la

postposition au verbe, ne signifie en aucun cas qu'il existe une contrainte

d'adjacence ou de contiguïté stricte.

D'autres éléments de l'énoncé, comme les compléments verbaux, sont en

concurrence avec le circonstant dans l'ordre linéaire par rapport au verbe.

C'est là une question que nous traiterons par la suite.

En général, le circonstant est perçu comme un élément accessoire,

facultatif et mobile. Pourtant, sur l'ensemble des items circonstanciels

recueillis par dépouillement du Coran, seul un petit nombre apparaît très

mobile. Ce sont: /hunâlika/ = là bas, /bayn-a/ = entre, /haytu/ = de là ou,

/yawm-a/ = jour, /'id/ = lorsque (pour le passé), /'idâ/ = lorsque (pour le nom

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Étude syntaxique_________________________________335

passé). Parmi ces circonstants mobiles, il y a ceux qui viennent se positionner

avant le verbe avec une contiguïté stricte. Autrement dit, ils se positionnent en

voisinage immédiat au verbe. Par conséquent, aucun élément n'interfère entre

eux et le verbe. Ce sont /al-âna/ et /hunâlika/ et les interrogatifs de temps et de

lieu comme /mata/ quand ? /'ayyâna/ quand ?, /'ayna/ où ?, /'annâ/ d'où ?.

Exemple:

lyaqûl-u l- 'insân-u yawma 'id-i-n 'ayna [istaqarr-a] l-mafarr-ul.1 75/10

II dit l'homme ce jour-là, où est le lieu de fuite?

circonstant verbe régissant

« L'homme dit, ce jours là: ou se trouve le lieu de fuite? »

l\vayaqûl-ûn-a mata [yakûn-u] hadâ l-wcfd-u 'in kuntum sâdiqîn-a/2lQ/4%

Ils disent: quand ce rendez-vous si vous êtes véridiques

circonstant [verbe]

« Ils disent: quand aura lieu ce rendez-vous si vous êtes véridiques. »

Ceux qui sont antéposé avec une adjacence non stricte, sont: /bayn-a/, /haytu/,

,/yawm-a/, /'idâ/, /'id/ et /yawm-a/. Ce dernier est l'exemple type de la mobilité

du circonstant.

Exemple avec /yawm-a/:

-Postposition et contiguïté:

Isahidnâ 'an taqûl-û yawm-a l-qiyâmat-i 'innâ kunnâ can hâdâ gâfilîn-al7/172 verbe circonstant

1 On suppose que le régissant des interrogatifs de lieu n'est autre que le verbe /istaqarr-a/s'installer.2 On suppose que le régissant des interrogatifs de temps est le verbe d'existence /kân-a/ être.

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Étude syntaxique_________________________________336

« Nous avons témoigné que vous direz, le jour de la résurrection: nous étions,

pour cela, distraits. »

- Postposition et non adjacence:

/wa ma çann-a lladîna yaftarûn-a °alâ Allah-i l-kadib-a yawm-a l-qiyâmat-il

10/60 verbe circonstant

« II ne pensait pas que ceux qui profèrent le mensonge, sur Dieu, le jour de la

résurrection... »

- Antéposition et contiguïté:

lal-yawm-a akmal-tu lakum dîn-a-kuml 51/13

Le jour, j'ai parachevé, pour vous, religion à vous.

circonstant verbe

« Aujourd'hui, j'ai parachevé, pour vous, votre religion. »

Antéposition et non adjacence:

Ifal-yawm-a ïïadjna'âmanû min-a l-kuffâri yadhakûn-al 83/34

le jour, ceux qui croient, des mécroyants, ils se moquent.

circonstant verbe

« Aujourd'hui, ceux qui croient se moquent des incrédules. »

II est notoire de constater, dans le Coran, qu'une grande partie des circonstants

de temps et de lieu sont généralement postposés au verbe. Parmi ceux-ci, il y a

ceux qui connaissent une adjacence stricte. C'est le cas notamment de:

/warâ'-a/ derrière /nahâr-a-n/journée

/'asfal-a/ = plus bas /'asiyyat-a-n/ soirée

/tilqâ'-a/ = en direction Aisâ'-a-n/ soir

/kilâl-a/ = dans l'intervalle /dufr-a-n/ matinée

/tamma/ = là ou /sâcai-a-n/ heure

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Étude syntaxique 337

/'ayna/ = ou?1 /'ayâna/=d'où?

Les circonstants postposés qui n'ont pas de relation strictement contiguë avec

le verbe sont entre autres:

/'amâm-a/ = devant

/bacd-a/ = après

/taht-a/ = sous

/jânib-a/ = du côté

/hawl-a/ = autour

/kalf-a/ = derrière

/kilâf-a/ = «« *• r > e f e

/dûna/ = en deçà

/dât-a/ = partie de

/subul-a/ = chemins

/satr-a/ = en direction de

/°md-a/ = vers

/fawq-a/ = dessus

/qabl-a/ = avant

/qibal-a/ = face à

/ladâ/ auprès de

/'abad-a-n/ = à jamais.

/'asîJ-a-n/ = soir,

/'ânâ'a/ = instants,

/bukrat-a-n/ = matin,

/bayât-a-n/ = de nuit,

/târat-a-n/ = fois, moment,

/huqub-a-n/ = longtemps.

/hïn-a/ = moment,

/zulaf-a-n/ = proche.

/tarafay/ = les deux extrémités.

Aasiy-a-n/ = soirée,

/^âm-a-n/ = année.

/gad-a-n/ = demain.

V'ayna/ est généralement régi par le veibe /qâl-a/ (dire) qm est parfois sous-entendu.2 D'après Ibn al-JAWZÎ (597/1201), les commentateurs du Coran ont huit avis différents sur ladurée désignée par le circonstant /huqub-a-n/. Voir à ce propos : Zâdu l-masîrfî cilmi t-tafsîr, t. 5,

p. 165

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Étude syntaxique_________________________________338

Après avoir cité al-JURJÂNÎ1 qui défend l'hypothèse selon laquelle deux

énoncés ne sont jamais équivalents et, qu'à tout changement de forme doit

correspondre un changement de fond, Hassan HAMZÉ conclu: « S'il en est

ainsi, l'ordre des mots ne peut qu'être le signifiant d'un signifié.

L'antéposition et la postposition d'un mot interviennent pour apporter un

changement :

Soit sur le plan syntaxique : le mot voit alors sa valeur changer tout en gardant

son statut syntaxique. C'est l'exemple de Zayd-u-n dans : /katab-a Zayd-u-n/ et

dans /zayd-u-n katab-a/ Zayd a écrit.

Soit en dehors du plan syntaxique : le mot voit alors sa valeur changer tout en

gardant son statut syntaxique. C'est l'exemple de Zayd dans : /zayd-u-n kâtib-

u-n/ Zayd [est] écrivant, .et dans /kâtib-u-n zayd-u-n/ écrivant [est] Zayd,

puisqu'il est inchoatif qu'il soit antéposé ou postposé ».2

Lorsque le circonstant est en présence d'un ou plusieurs compléments

verbaux, là aussi, il y a un agencement des différents compléments. La

question qui se pose est de savoir s'il existe un ordre conventionnel et

canonique entre les compléments et les circonstants et entre les circonstants

eux-mêmes ? Existe t-il une variation d'ordre et quelles en sont les raisons et

les conséquences ?

1 Al-JURJÂNÎ. Abd al-Qâhir, grammairien et rhétoricien, mort en 471/1078, (Mcufjawâz al-majâz,p.56)2 Hassan HAMZÉ, La linéarité dans le langage, P. 9

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Étude syntaxique_________________________________339

Mais avant d'aborder cette question, il reste à dégager les raisons ou les

motivations des déplacements des circonstants mobiles, car comme l'explique

Nicole LE QUERLER, dans une étude du circonstant en général, : « La mobilité

du circonstant n'est pas sans conséquences sémantiques même minimes soient-

elJes ».l

II faut savoir que dès qu'un ordre tend à être habituel, tout changement se

présente comme une inversion pouvant avoir au niveau sémantique, une valeur

expressive. Cela dit, le déplacement du circonstant sur l'axe syntagmatique est

un procédé pouvant répondre à une intention expressive de mise en valeur.

Ainsi, qui dit variation d'ordre, dit variation de sens. En d'autres termes, la

variation de sens est corrélative à l'ordre des mots.

Nicole LE QUERLER, Le circonstant et la position initiale, in : 7007 circonstants, p. 177.

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Étude syntaxique________________________________340

1.5.2.1 Motivations et variations de sens.

1.5.2.1.1 L'emphase ou l'antéposition de l'élément important.

- Dans la phrase verbale

Si l'ordre canonique de la phrase verbale est : Verbe-sujet-complément,

le sujet est positionné avant le complément pour une question d'importance. A

ce propos, SlBAWAYHI explique : « Ainsi, le fait est que le sujet soit antéposé,

cela est du très bon arabe. C'est comme s'ils (les Arabes) avaient placé celui

qui leur paraît le plus important à exprimer avant [les autres éléments] et par

l'expression duquel ils se suffisent ».*

^ j UJLÂ* <U9 ùj>J jî JàiJJt Ju>- jlS" 1.Ju?r

C'est comme le souligne Georgine AYOUB : « Le sens purement

grammatical, évoqué par SïBAWAYffl, est relatif à la prédication. »2 L'ordre

canonique peut être modifié en antéposant le complément, notamment le

circonstant au sujet de la phrase. Ceci est permis, d'après Ibn JlNNÎ qui

dit : « L'insertion, entre le verbe et l'agent, d'un complément d'objet ou

circonstanciel ou d'un autre élément non étranger au verbe, est permise à bon

escient... ».3

SlBAWAYHI, t.l, p. 34

2 Georgine AYOUB, la forme du sens, p. 443IbnJlNNÎ, t.l, p.229

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Étude syntaxique_________________________________341

Bien entendu, lorsque l'on parle de variation de sens, il ne s'agit pas

d'un changement de fond catégorique du sens du circonstant, mais simplement

une modification de sens au niveau de l'énoncé apportant de ce fait une

information utile d'après al-JURJÂNÎ qui dit : « Si on constate, par exemple,

que l'antéposition du complément devant le verbe est destinée à [apporter] une

[information] utile qui n'est pas constatée dans sa postposition après le verbe

dans beaucoup d'énoncés, ce principe doit être valable partout ».*

jC

s ' ^ ^ « ' ' ^. JS' 4.1/7.Ê iUj ûj>J jl ( r J JLââ Ji^-ll5l o» ÔJljLà]|

~~

La postposition enclavée du circonstant a pour but rhétorique de lui donner une

importance qu'il n'a pas d'ordinaire et d'après le dictionnaire de linguistique, à

exagérer l'expression d'une idée. C'est le procédé d'emphatisation.2

Exemples :

lwa laqad sabbafa-a-hum bukrat-a-n c adâb-u-n mmtaqirr-u-nl 54/38

Et certes, il a réveillé eux, de bon matin, un châtiment persistant

verbe circonstant sujet

« Un châtiment persistant a réveillé de bon matin. »

fWakân-a warâ'a-hum malik-u-n/ 18/79

« II y a derrière eux un roi. »

verbe circonstant sujet

1 AJ-JURJÂNl, Dalâ 'il I- 'icjâz, p. 88

Traduction empruntée à Hassan HAMZÉ, la linéarité dans le langage, p. 10Dictionnaire de linguistique et des sciences du langage. P. 176

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Étude syntaxique_________________________________342

Ainsi, plus le circonstant se déplace vers la tête de l'énoncé, plus son

importance est grande. Si Je déplacement vers Fantéposition du sujet lui

confère une certaine importance, Fantéposition au verbe augmente

l'importance de l'élément déplacé. Il arrive cependant que le circonstant soit

postposé au sujet par Je fait qu'il est annexé à un pronom anaphorique qui

renvoie à quelque chose cité auparavant dans le discours. Le pronom

anaphorique permet au circonstant d'être antéposé au sujet.

Exemples :

Ijannât-i-n tajrî taftt-a- ha l-'anhâr-ul 9/100

Des jardins, courent, au dessous d'eux, des fleuves.

verbe circonstant pronom sujetanaphorique

« Des jardins sous lesquels coulent des fleuves »

Exemple où le circonstant est dans sa position canonique :

/Là yukallim-u-hum Allah-u yawm-a l-qiyâmat-il 2/174

II ne parlera pas à eux, Dieu, le jour de la résurrection

Verbe sujet circonstant

« Dieu ne leur adressera pas la parole le jour de la résurrection. »

Exemple d'antéposition du circonstant au verbe :

Jwayawm-a J-qiyâmat-j yakûn-îi calay-him sahîd-a-nJ 4/159

Le jour de la résurrection, il sera, contre eux, un témoin

circonstant verbe coi c.d'état

«il sera un témoin, contre eux, le jour de la résurrection »

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Étude syntaxique _________________________________ 343

1 .5.2. 1 .2. L'antéposition et l'exclusivité

L'exclusivité est différente de l'emphase. L'exclusivité est un autre

procédé rhétorique qui consiste à donner l'exclusivité absolue au circonstant

en Fantéposant au mot exprimant l'action opérée en lui. Autrement dit, le

verbe. A ce propos, az-ZARKASÎ1 précise que parmi les raisons de l'inversion

de Tordre des éléments, il y a: « F exclusivité et ce en antéposant le patient,

Fénonciatif, le circonstant, le régissant au génitif et tout ce qui leur est

similaire au verbe. Exemple : l'iyyâ-ka ncfbud-ul c'est toi que nous adorons.

C'est-à-dire, nous te donnons l'exclusivité de l'adoration. Nous n'adorons

aucun autre que toi ».2

L'exclusivité vient du fait que si on dit: /nacbud-u-ka 'anta/ = nous

t'adorons toi, c'est une affirmation qui n'exclu pas le fait que nous adorons

d'autres choses hormis Dieu. En inversant la phrase comme ceci : /'iyyâ-ka

nacbud-u/, nous insistons sur l'exclusivité de ce qui est adoré : c'est toi [seul]

que nous adorons.

1 AZ-ZARKASÎ, Muhammad Ibn Bagâ d-Dîn Ibn Qâsim Ibn °Abd Allah Badr d-Dîn cAbû cAbdAllah, égyptien, né en 745/1344 et mort en 794/1392, traditionniste, juriste, exégète etgrammairien. (Al-Burhânfîculûmal-qur'ân, t. 1, p. l l)a

' Az-ZARKASÎ, Al-Burhânfî °ulûm-i l-qur 'an, t.3, p.277,

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Étude syntaxique_________________________________344

1.5.2.1.3 L'antéposition et l'insistance

La notion d'insistance est également produite par l'antéposition du

circonstant vis-à-vis de son verbe. En antéposant le circonstant, nous avons là

une manière d'insister sur celui-ci et de créer une opposition implicite. C'est à

dire que l'on insiste sur tel ou tel moment ou lieu et pas un autre.

Exemple :

Ihunâlika dcfâ zakariyyâ rabb-a-hul. 3/38

« C'est là où, a imploré Zakarie son seigneur. »

circonstant verbe

C'est là où, Zakarie a imploré son seigneur.

a). La phrase nominale

Dans le cas de la phrase nominale, ou le circonstant est régi, selon la

théorie grammaticale arabe, par J'énonciatif, la position canonique des

éléments est :

inchoâtif-énonciatif-circonstant.

Exemple :

Ifallah-u yaljkum-u bayn-a-hum yawm-a l-qiyâmat-i/2/113

« Dieu jugera entre eux le jour de la résurrection. »

Inchoatif énonciatif circonstant de lieu circonstant de temps

/wa l- 'ar$-u jamf-a-n qabdat-u-hu yawrn-a l-qiyâmat-il 39/67

« La terre, toute entière sera dans sa main, le jour de la résurrection. »

Inchoatif énonciatif circonstant de temps

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Étude syntaxique _________________________________ 345

Ibn HlSÂM précise : « qu'il est de règle que l'inchoatif se place avant

F énonciatif. Mais il est permis d'antéposer J 'énonciatif. Cependant, on ne peut

faire de l'antéposé un inchoatif et du postposé un énonciatif pour son apport

d'information déterminé sur ce qui est déterminé ».x

\" ^\ " r * * ° f r<-«-» j bjjrj jl >

JS S S jf S ff S s- S f

Ainsi, l'inversion de l'ordre des éléments de la phrase nominale est

chose possible. Dans le cas du circonstant qui se situe habituellement en fin

d'énoncé, il est aisément déplaçable vers une antéposition à l' énonciatif. De ce

fait, le circonstant risque de se trouver enclavé entre l'inchoatif et l' énonciatif.

Exemple •.

Iwujûh-u-n yawma'id-i-n kâsfat-u-n/ 88/2

« Les visages, ce jours là, seront humiliés. »

Inchoatif circonstant de temps énonciatif

Dans l'exemple, ci-dessus, le circonstant est une sorte de relatif qui renvoi à

quelque chose de cité précédemment. L'accent est mis d'avantage sur celui-ci

plus que sur l'énonciatif.

Ara htfwa cind-a llah-i °azîm-u-nl 24/15

II est, auprès de Dieu, très important

inchoatif circonstant de lieu énonciatif.

« II est très important auprès de Dieu. »

IbnHisÂM, Sarb qatru n-nadâ\ p. 120

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Étude syntaxique_________________________________346

Dans l'exemple ci-dessus, le circonstant est sémantiquement un déictique sur

lequel l'accent est mis plus que sur Fénonciatif.

l'inna-ka l-yawm-a laday-nâ makin-u-n amîn-u-nl 12/54

Certes toi, le jour, auprès de nous, d'une grande autorité et d'unegrande confianceIrtchoatif circonstant circonstant énonciatif

de temps de lieu

« Tu es aujourd'hui, auprès de nous, d'une grand autorité et d'une grande

confiance. »

Dans l'exemple, ci-dessus, deux circonstants de nature différentes (temps et

lieu) sont déplacés avant l'énonciatif. Ce sont deux déictiques dont celui de

temps est antéposé à celui de lieu. Il semble que l'on ait voulu mettre l'accent

un peu plus sur le temps. Nous avons pu remarquer jusque là que le déictique

est rarement en fin d'énoncé. Dans le déictique, il y a une forme d'insistance

naturelle qui le positionne avant certains autres éléments de l'énoncé. Il arrive

que l'on veuille donner plus d'importance au circonstant en le déplaçant vers

la tête de la phrase nominale. De ce fait, il est antéposé à l'inchoatif et à

l'énonciatif.

Exemples :

/wafawq-a kull-idîcilm-i-n °âlim-u-n [mustaqirr-u-n]l 12/76

« Et Au-dessus de tout savant, un savant [installé]. »

circonstant indicatif énonciatif

/wa laday-nâ mazîd-u-n [mustaqirr-u-n]I 50/35

Auprès de nous, un supplément [installé]

circonstant inchoatif énonciatif

« II y a auprès de nous un supplément. »

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Étude syntaxique_________________________________347

/wayawm-a l-qiyâmat-i hum min-a l-maqbûlm-al 28/42

Le jour de la résurrection, eux, parmi les acceptables

circonstant de temps inchoatif énonciatif

« Ils seront, le jour de la résurrection, parmi les acceptables. »

Ifal-yawm-a lladîn-a âman-û min-al-kuffâr-i yadhakûn-al 83/34

Le jour, ceux qui ont cru, des négateurs ils se moquent,

circonstant de temps inchoatif énonciatif

« Aujourd'hui, ceux qui ont cru se moquent des négateurs. »

Bien entendu, un tel déplacement, ne peut être réalisable par n'importe

quel circonstant. Ceux que l'on peut apercevoir, ce sont essentiellement Jes

déictiques. Il est clair que l'on ne verra pas un nom de durée ou de mesure en

tête de phrase nominale, car l'assignation d'une position n'a de sens que si elle

correspond à une configuration linguistique pertinente. Ainsi, l'antéposition de

certains circonstants semble impraticable dans la phrase nominale.

En conclusion, il est permis de tirer certaines règles qui ne sont ni

absolues, ni exhaustives :

1 - La position canonique du circonstant, que ce soit dans une phrase verbale

ou nominale, est la postposition à son régissant.

2 - La postposition serait, d'une certaine manière, le principe de la position du

circonstant et l'antéposition son corollaire.

3 - La position canonique du circonstant est liée à l'aspect facultatif et

accessoire de l'élément.

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Étude syntaxique_________________________________348

4 -La mobilité du circonstant entraîne une variation de sens.

5 - Le rapprochement du circonstant vers la tête d'énoncé, augmente

l'importance du circonstant.

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Etude syntaxique_________________________________353

raison est sémantique, car la relation entre le verbe régissant et le complément

est très étroite, plus étroite qu'avec Je circonstant. C'est également J'avis de

Pierre LE GOFFIC dans le cas du français. Aussi dit-il : « Ce qu'on peut

expliquer en disant que le complément direct est à priori senti comme plus

étroitement rattaché au verbe... ». '

Verbe - c.o.d. - circonstant

L'ordre de base peut être inversé lorsqu'il est motivé par des effets de

stylistique : insistance, exclusivité, et la rime.

Pierre LE GOFFIC, Grammaire de la phrase française, p. 55.

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Etude syntaxique_________________________________354

1.6.2 Le circonstant et le complément d'objet indirect.

Dans la logique des choses, on tend à croire que ce qui est régi

directement par le verbe doit être normalement ce qui est le plus proche du

verbe pourtant, le cas du complément d'objet indirect montre bien que ce n'est

pas toujours le cas. En effet, le circonstant qui est régi directement par le verbe

lorsqu'il se trouve en concurrence avec le complément d'objet indirect, il se

place en dernière position de la phrase.

Nous avons ainsi : Verbe- complément d'objet indirect-circonstant

Que dire lorsqu'un complément d'objet direct se retrouve en présence

d'un complément d'objet indirect ? Est-ce que Je complément d'objet direct est

placé en proximité immédiate du verbe parce qu'il est régi directement ? Nous

pouvons constater que la rection directe n'influe aucunement sur la position.

C'est sans doute la relation sémantique entre le verbe et le complément qui est

la cause principale de la position.

Le cas du complément d'objet indirect est semblable à celui du

complément d'objet direct lorsqu'il se trouve en présence d'un circonstant.

Dans un contexte normal, sans rime, le complément d'objet indirect est

antéposé au circonstant. La raison d'un tel ordre est que s'il y a c.o.i, c'est que

le verbe régissant est indirect et que le lien entre ce verbe et la préposition qui

lui permet de dépasser son sujet vers un complément, est très étroit. Ce lien

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Étude syntaxique_________________________________355

sémantique rapproche les éléments entre eux dans l'énoncé, puis vient le reste

(circonstant, etc.). Ce fait est attesté entre autres, par un nombre important

d'occurrences dont voici quelques exemples :

Ifa-sîh-û fi l- 'ard-i 'arbacat-a 'ashur-i-n/. 9/2

Marcher dans la terre quatre mois

Verbe c.o.i circonstant de (durée)

« Parcourez la terre durant quatre mois. »

La relation entre le verbe spatial de déplacement /sîh-û/ (marchez, parcourez)

et Je complément circonstanciel de lieu constitué d'un syntagme prépositionnel

/fi 1-'ard-i/ (dans la terre), dont la tête est la préposition de lieu /fi/ (dans), est

naturellement plus étroite qu'avec le circonstant de temps /'arbacat-a 'ashur-i-

n/ (quatre mois).

l'a-âman-tum bi-hi l-'ânal. 10/51

Avez-vous cru en lui le moment

Verbe c.o.i circonstant (déictique)

« Avez-vous cru en lui maintenant ? »

D'habitude, le déictique de temps /al-'ân-a/ (maintenant) se place en proximité

immédiate du verbe, mais lorsqu'il s'agit d'un verbe qui se combine avec une

certaine préposition comme dans l'exemple précédent ou le verbe /âman-a/ se

combine avec la préposition /bi/ (en) pour donner -. croire en...

runzurû 'M tamar-i-hi 'idâ 'atmar-al. 6/99

Regardez vers les fruits à lui lorsqu' il aura des fruits

Verbe c.o.i circonstant déterminant annectif

« Voyez ses fruits lorsqu'ils produira des fruits. »

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r

Etude syntaxique_________________________________356

C'est donc le lien entre le verbe et la préposition qui impose la position

du complément d'objet indirect par rapport au circonstant. Bjen entendu,

lorsqu'il s'agit d'un complément d'objet direct et d'un complément d'objet

indirect. Si le complément d'objet direct est en proximité immédiate du verbe,

c'est que le verbe est transitif, sinon Je complément d'objet indirect est

antéposé au complément d'objet direct.

Exemples :

/wa huzzî 'ilay-ki bi jicf-i n-na^laî-j îiisâqit calay-ki niltab-a-n janiyy-a-

w/19/25 Verbe c.o.i c.o.d

Secoue vers toi avec la branche du palmier, elle tombera, sur toi, des dattes

fraîches.

« Secoue vers toi la branche du palmier, des dattes fraîches bonne à cueillir

tomberont sur toi. »

/wa sabbify bi fyamd-i rabb-i-ka hîn-a taqûm-al. 52/48

Célèbre les louanges de ton seigneur le moment tu te lèves.

Verbe c.o.i circonstant

« Célèbre les louanges de ton seigneur au moment où tu te lèves. »

L'antéposition du circonstant au complément d'objet indirect est

rarement motivée par la rime, car Je complément d'objet indirect forme, avec

la préposition, un syntagme long et dont la fin de séquence ne se prête pas

vraiment à la rime. Ce qui motive entre autres, l'inversion, c'est le circonstant

déjctjque, comme c'est le cas pour /al-yawm-a/ (aujourd'hui).

Exemple

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Etude syntaxique_________________________________357

/ 'innî jazay-tu -humu l-yawm-a bi-mâ sabarûl. 23/111

Certes moi, J'ai récompensé eux le jour pour ce qu'ils ont patienté.

Verbe c.o.d circonstant c.o.i

« Je les ai récompensés aujourd'hui pour leur patience. »

Ce qui prouve qu'un circonstant peut être antéposé au complément

d'objet indirect par le fait qu'il soit un déictique, ce sont les exemples presque

similaires à l'exemple ci-dessus, excepté le fait que le circonstant n'est pas un

déictique. Pour cela, il est postposé au complément d'objet indirect.

Exemple :

lyunabbi'-u- hum bi-mâ sabarû yawrn-a l-qiyâmat-il. 58/7

Ils informera eux pour ce qu'ils ont patienté le jour de la résurrection

Verbe c.o.d c.o.i circonstant

« Ils les informera de leur patience le jour de la résurrection. »

Une autre motivation de l'inversion est celle du sémantisme commun

entre Je verbe et le circonstant. Ce sémantisme commun produit un lien étroit

entre les unités concernées. C'est le cas de la durée. Lorsqu'un verbe de durée

comme /labit-a/ (séjourner), régit un circonstant de durée comme /sinîn-a/ (des

années), les deux unités restent proches l'une de l'autre dans l'énoncé. De ce

fait, le circonstant est antéposé au complément d'objet indirect.

Lorsque deux compléments circonstanciels, dont l'un est un syntagme

nominal (circonstant) et l'autre est un syntagme prépositionnel, se retrouvent

avec un verbe lié au temps et à l'espace comme c'est le cas avec le verbe

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Étude syntaxique_________________________________358

/labit-a/ qui signifie rester quelque part un certain temps, c'est qu'il est d'abord

rattaché à l'espace puis au temps. Mais pour l'espace, le verbe /Jabiî-a/

nécessite la préposition /fi/. Dans ce cas, nous avons :

Verbe-c.o.i- circonstant.

Lieu temps

/fa labit-a f î s-sijn-i bif-a sinîn-a/12/42

II est resté dans la prison quelques années

Verbe prépo. nom circonstantSpatiale de lieu (spécifié) de temps

(c.o.i) Circonstanciel de lieu

« II a passé quelques années en prison. »

Ifa labit_-ta sinîn-a fi 'ahl-i madyan-al. 20/4

Alors, il est resté des années dans les gens de Madian.

Verbe de durée circonstant de durée c.o.i

« II a passé des années parmi le peuple de Madian. »

D'après les exemples ci-dessus, on peut penser que la position entre l'espace et

le temps est motivée par la longueur du complément. Nous remarquons que le

complément le plus long se place en fin de séquence. Ce fait a également été

observé dans la langue française. A ce propos, Pierre LE GOFFIC explique « Un

complément court avant un complément long (ce qu'on peut expliquer en

disant que le complément long, plus développé, est à priori plus informatif,

plus rhématique et de ce fait, tend vers une position finale ».!

1 Pierre LE GOFFIC, op. cit., p.55

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Étude syntaxique_________________________________359

Ainsi, un constituant court se place avant un constituant long. C'est une

progression par masse croissante.

Au niveau sémantique, le syntagme prépositionnel, dans l'exemple ci-dessus,

exprime une circonstance spatiale. Mais au niveau syntaxique, il y a une

différence entre Je circonstant de Jieu et un c.o.i régi par une préposition. En

somme, nous avons là, deux circonstances dont l'une est exprimée par un

circonstant et l'autre par un syntagme prépositionnel. La circonstance

temporelle exprimée par le circonstant est plus proche de celle du verbe de

durée. Tandis que la circonstance spatiale exprimée par le syntagme

prépositionnel n'a pas de point commun aussi fort que de la durée existante

dans le verbe et le circonstant de temps.

En somme, dans un contexte normal, le complément d'objet indirect est

antéposé au circonstant. L'inversion est motivée par deux choses .

1 - Lorsque le circonstant est un déictique, il est antéposé au complément

d'objet indirect. Ceci relève de la stylistique.

2 - Lorsque Je circonstant a le même sémantisme que le verbe, les unités

restent proches l'une de l'autre et de ce fait, le circonstant est antéposé au

complément d'objet indirect.

- Verbe de durée circonstant de durée c.o.i.

llabil-a sinîn-al

II est resté des années

- Verbe de localisation spatiale circonstant de lieu c.o.i.

« II resta des années »

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Étude syntaxique_________________________________360

Ijalas-a l-majlis-al

II s'est assis l'assise

Verbe de localisation spatiale circonstant de lieu

« II s'est assis dans une assise »

D'autre part, lorsque les différents compléments que nous venons

d'analyser se retrouvent ensemble dans un même énoncé, il sembJe que l'ordre

habituel serait : Verbe - c.o.i. - c.o.d. - circonstant

Exemples :

,/wû là mitf-ii fî-kum 'afyad-a-n 'abad-a-nl. 59/11

Et nous n'obéirons dans vous personne jamais

Verbe c.o.i c.o.d circonstant

« Nous n'obéirons jamais à aucun d'eux. »

lyaftarûn-a calâAllah-i l-kadib-a yawm-a l-qiyâmat-il. 10/60

Ils profèrent sur Dieu des mensonges le jour de la résurrection

Verbe c.o.i c.o.d circonstant dét. annectif

« Le jour de la résurrection, ils proféreront des mensonges sur Dieu. »

/ 'a-fa-man yattaq-i bi wajh-i-hi su '-a al-°adâb-i yawm-

Est-ce que celui qui craint avec son visage le mauvais du châtiment, le jourVerbe c.o.i c.o.d Circonstant

al-qiyâmal-iJ. 39/24

de la résurrection...déterminant

« II craint pour son visage le pire des châtiments le jour de la résurrection. »

Le fait est que s'il y a complément d'objet indirect, c'est que le verbe

est un verbe qui s'emploie avec une certaine préposition et de ce fait, reste

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Étude syntaxique_________________________________361

proche de la préposition, qui elle, ne se sépare pas de son complément.

Ensuite, vient le complément d'objet direct qui est plus étroitement lié au

verbe que le circonstant.

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Étude syntaxique_________________________________362

1.6.3 Le circonstant et le complément d'état

Définir un ordre préférentiel entre le circonstant et le complément d'état

est une opération très délicate. Les occurrences à notre disposition ne nous

permettent pas de trancher sur tel ou tel ordre préférentiel. Nous pourrions

nous contenter de la règle établie par Lucien TESNÈRE sur la position du

circonstant vis-à-vis du complément d'état dans les langues centrifuges. A ce

propos, Lucien TESNÈRE explique : « C'est ainsi que les circonstants de

manière se placent volontiers avant ceux de temps général, ceux-ci avant ceux

de lieu et enfin ceux de lieu avant ceux de temps particulier ».! II nous semble

que l'ordre donné par Lucien TESNÈRE ne s'applique pas tout à fait à l'arabe,

car on rencontre autant d'occurrences où le circonstant se place avant le

complément d'état et vice-versa. Cela dit, notre tâche sera d'analyser les

différentes occurrences et tenter de savoir ce qui motive l'une et l'autre

position. À l'issue de cela, nous essayerons de découvrir s'il existe une

position canonique entre le circonstant et le complément d'état.

L'analyse des différentes occurrences ou le circonstant est en présence

du complément d'état, révèle l'existence de deux facteurs motivant la position

du circonstant par rapport au circonstant.

1 Lucien TESNIÈRE. Elément de syntaxe structurale, p. 126-

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Étude syntaxique_________________________________363

1.6.3.1 Le critère de la rime

Dans un contexte en prose rimée, ou la rime se fait avec l'accusatif

indéterminé, lorsque la phrase comporte un circonstant et un complément

d'état, c'est souvent le complément d'état qui occupe la dernière position. La

raison en est que le circonstant, utilisé dans de tel cas, sert à localiser un procès

dans le temps ou le lieu. S'agissant du temps, le circonstant est une datation,

jamais une durée. S'agissant du lieu, le circonstant nécessite un complément de

nom pour déterminer le lieu. Le lieu ne peut être un nom de mesure (distance).

Exemples :

/wa ttakad-tumû-hu warâ'a- kum zihriyy-a-nl 11/92

Et vous avez pris lui derrière vous ouvertement

Nom de lieu vague pronom c.d'état

Circonstant complémentde nom

« Vous lui tournez ouvertement le dos. »

/wa kutt-u-hum 'âtî-hi yawm-a l-qiyâmat-i fard-a-nl 19/35

Et tous viendront à lui le jour de la résurrection individuellement

Nom de nom d'événement c.d'étattemps spécifié

Circonstant complément de nom

Datation

« Ils viendront tous individuellement à lui le jour de la résurrection. »

Quant au complément d'état, il s'agit généralement d'un nom

indéterminé à 1'accusatif. Ce dernier se prête mieux à la rime.

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Étude syntaxique_________________________________364

Ce qui prouve également que la rime est une contrainte pour l'ordre, c'est

l'exemple où le complément d'état indéterminé à l'accusatif est antéposé au

circonstant dont la fin de séquence est un complément de nom. Ce complément

de nom se prête au contexte de prose rimée, dans lequel il se trouve, où tous

les versets se terminent la voyeJJe /-a/ de l'accusatif.

Itajrîbi 'amr-i-hi rukâ'a-n haytu 'a$âb-al 38/36

Elle court par son ordre modérément là où il atteint.

C. d'état circonstant verbe(Complément de nom)

« Par son ordre, il (le vent) soufflait modérément partout où il voulait. »

1.6.3.2 Le critère de longueur

Dans un contexte où les deux compléments ne sont pas concernés par la

rime, il semble que la position est motivée par le critère de la longueur des

compléments. Le complément le plus long se place en fin de séquence.

Autrement dit, un constituant court se place avant un constituant long. Une

progression par masse croissante. Une observation qui rejoint l'explication de

Pierre LE GOFFIC pour le français : « un complément court avant un

complément long ».!

larsal-a r-riyâh-a busr-a-n bayn-a yaday-i mhmat-i-hi/25/^%

II a envoyé les vents en annonce entre les deux mains de sa miséricorde.

C. d'état circonstant C. de nom

« II a envoyé les vents en annonce précédant sa miséricorde. »

1 Pierre LE GOFFIC, op. cit., p. 55.

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Étude syntaxique________________________________365

1.6.3.3 La place préférentielle

Si avec l'analyse des occurrences coraniques, nous n'avons pas pu

déterminer la place préférentielle lorsqu'il y a présence, dans l'énoncé, d'un

circonstant et d'un complément d'état, il ne reste plus qu'à réfléchir sur la

question à savoir : un locuteur désirant employer un circonstant et un

complément d'état, par quoi doit il commencer? Quelle est la première

question qui se pose : comment ? ou : quand et où ?

Un autre critère est celui de l'ordre du verbe et du sujet. Nous savons

que le circonstant précise l'action du verbe, premier élément de la phrase et

que le complément d'état qualifie le sujet, deuxième élément de la phrase.

Ceci dit, l'ordre des compléments pourrait être relatif à l'ordre du verbe et du

sujet.

On aura ainsi :

Verbe sujet circonstant complément d'état

Ainsi, la position préférentielle serait probablement : le circonstant

avant le complément d'état. Cet ordre peut être inversé par des facteurs comme

la rime et la longueur des compléments.

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Étude syntaxique_________________________________366

1.6.4 Le circonstant, le complément absolu et le spécificateur

Toutes les occurrences coraniques présentent le même ordre entre le

circonstant et le complément absolu et entre le circonstant et le spécificateur.

Ces deux compléments sont postposés au circonstant, car la rime oblige. Le

circonstant est, dans tous les cas, déterminé soit par le déterminant /al/ (le), soit

par un nombre ou un complément de nom. De plus, le circonstant et ses

différents déterminants forment un syntagme plus long que celui des

compléments absolu et du spécificateur, qui eux ne sont pas déterminés. C'est

l'une des raisons qui pourrait être à l'origine de leur position vis-à-vis du

circonstant. Ainsi, le complément le plus long est antéposé au complément le

plus court. Il semble que le complément absolu soit une information

concernant à la fois le verbe et le circonstant. Ce qui fait qu'il vient se

positionner après le circonstant. Dans ce cas, la longueur des compléments n'a

aucun effet sur l'ordre.

Exemples :

Complément absolu :

Iqâl-â tazra°ûn-a sabc-a sinîn-a da'b-a-n/1 12/47

II dit : vous sèmerez sept années de manière consécutive

Verbe circonstant complément absolu

« II dit : vous sèmerez durant sept années consécutives. »

1 D'après al-cUKBARî, le complément /da'b-a-n/ est régi à l'accusatif en tant que complémentabsolu. At-tibyânfî 'fràbi l-qur'âni, t. 2, p. 58.

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Étude syntaxique_________________________________367

Itummala-nufydiranna- hum faawl-ajahannam-a jutiyy-a-nl.l 19/68

Ensuite, nous placerons eux autour de la géhenne, agenouillés

Verbe c.o.d circonstant c.absolu

« Ensuite, nous les placerons certainement autour de la géhenne en position

d'agenouillement. »

Dans l'exemple ci-dessus, la position du complément absolu est également

motivée par la rime.

Ainsi, l'ordre entre le circonstant et le complément absolu est relatif à

plusieurs points dont.

1 - L'information du complément absolu sur le verbe et le circonstant. Donc,

l'information vient après.

2 - Le circonstant est déterminé et le complément absolu est indéterminé. Le

déterminé est antéposé à l'indéterminé.

3 - La rime. Dans un contexte de rime, en particulier la fin de séquence à

l'accusatif indéterminé, le complément absolu se place en fin d'énoncé.

1 Le complément /jitiyy-a-n/ connaît deux lectures : /jutiyy-a-n/ et /jitiyy-a-n/. Il peut être aussibien analysé comme un masdar qu'un pluriel. At-tibyân, t. 2, p. 173.

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Étude syntaxique_________________________________368

Le spécificateur

Exemples :

Ifa-lâ nuqîm-u la-hum yawm-a l-qiyâmat-i wazn-a-n/1 18/105

Nous ne ferons à eux le jour de la résurrection aucune pesée

Verbe c. entre eux circonstant

spécificateur

« Nous ne leur ferons aucune pesée le jour de la résurrection. »

Iwasâ'-a la-hum yawm-a l-qiyâmat-i himl-a-n/2.20/101

Et mauvais, pour eux, le jour de la résurrection, un fardeau.

Verbe c.entre eux circonstant spécificateur

« Quel mauvais fardeau, ils auront le jour de la résurrection. »

En somme, si la rime motive la position du complément absolu et du

spécificateur, l'hypothèse d'un ordre de base inverse, motivé par la longueur

du circonstant n'est pas à écarter. Le cas du complément absolu et du

spécificateur vis-à-vis du circonstant serait comparable à celui du complément

d'état vis-à-vis du circonstant.

Ordre :

Verbe - complément absolu - circonstant - spécificateur

1 D'après al-UKBARÎ, le complément /wazn-a-n/ est analysé soit comme un spécificateur soitcomme un complément d'état. At-Tibyânfî 'icrâbi l-qur'ân, t. 2, p. 162.2 D'après az-ZAJJÂJ, le complément est régi à l'accusatif en tant que spécificateur. mcfanî l-qur 'an\va 'frâb-u-hu, t. 3, p. 376.

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Étude syntaxique_________________________________369

On peut remarquer que dans le Coran, le circonstant de temps est

toujours une date, jamais une durée. Pour qu'il y ait sens à l'énoncé, il faut que

le circonstant de temps ou de lieu soit une localisation. Pour le temps, ce sera

une date et pour le lieu ce sera un point dans l'espace. Ce ne peut être une

durée ou une mesure de distance.

Le spécificateur informe sur le verbe uniquement. Il semble que Fantéposition

du circonstant n'est pas une place canonique, car l'inversion est

sémantiquement possible. L'antéposition du circonstant est d'après les

exemples ci-dessus, liée à la rime.

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Étude syntaxique_________________________________370

1.6.5 L'ordre entre plusieurs circonstants

II est vrai que comme le précise Lucien TESNIÈRE : « Le nombre de

circonstants n'est pas défini comme celui des actants. Il peut y en avoir aucun,

tout comme il peut y en avoir un nombre illimité».1 Lorsqu'un énoncé

contient plusieurs circonstants, ceux-ci sont soit coordonnés, soit ils ne le sont

pas. Dans le cas de la coordination, les circonstants sont de même genre, c'est-

à-dire que les circonstants coordonnés sont soit tous temporels avec des temps

différents, soit tous spatials avec des lieux différends.

Quant aux circonstants de temps coordonnés, ce sont des noms

spécifiques à une partie du temps, telles les parties du jour et de la nuit. Cela

peut être également des noms vagues déterminés par des formes verbales

impliquant un moment du jour ou de la nuit.

Exemples :

Isabbifa -hu bukrat-a-n wa casiyya-nl. 19/62

Glorifie lui matin et soir

Verbe c.o.d circonstant coordonnant circonstant de temps

« Glorifie-le matin et soir. »

Ifa-subljân-a Allah-i hîn-a tumsûn-a wa hîn-aGloire à Dieu au moment où vous êtes au soir et au moment

Nom d'action Circonstant .Circonstant

tusbifaûn-a/.30/11

où vous êtes au matin.

1 Lucien TESNIÈRE, op.cit., p. 125

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Étude syntaxique_________________________________371

« Gloire à Dieu soir et matin. »

L'ordre des circonstants dans les exemples ci-dessus est un ordre

chronologique. Ce sont des exemples figurant dans un contexte en prose rimée,

où la terminaison des versets est une nounation à l'accusatif. L'ordre n'est pas

dans ce cas, motivé par la rime, car les deux circonstants se terminent par une

nounation de l'accusatif. Dans ce cas, la motivation de l'ordre est sémantique

(chronologie). Il arrive que deux circonstants n'aient pas la même terminaison.

Si l'énoncé qu'ils constituent se trouve dans un contexte en prose rimée,

l'ordre sera motivé par la rime, malgré l'ordre chronologique qui peut être

inversé.

Exemple :

Iwa la-hu l-hamd-u fi as-samâwât-i wa l-ard-i wa

À lui, la gloire dans les cieux et sur terre,

,'asiyy-a-n wa hîn-a tuzharûn-al. 30/18

le soir et au moment où vous êtes à la mi-journée.

circonstant . Circonstant complément de nomde temps de temps

Annexion

« Gloire à lui dans les cieux et sur terre, le soir et au milieu de la journée. »

Quant aux circonstants de lieu, leur ordre peut être motivé par la rime,

comme dans l'exemple ci-dessous.

Ila-hu ma fi as-samâwât-i wa ma fi l- 'ard-i wa maÀ lui ce qu 'ily a dans les cieux et sur terre, et ce qu'il y a

bayn-a- huma wa ma taht-a /-tara/. 20/6

entre les deux et ce qu'il y a sous le sol

Circonstant Circonstant déterminant

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Étude syntaxique_________________________________372

de lieu de lieu

« II lui appartient ce qu'il y a dans les cieux et sur terre, ce qui se trouve entre

les deux et sous le sol. »

Cela dit, en l'absence de rime, l'ordre peut également être motivé par la

longueur du syntagme ou par la sémantique. En effet, un circonstant annexé à

un pronom personnel relatif serait antéposé à un circonstant qui ne serait pas

annexé à un pronom personnel relatif. Cela aurait pu être le cas pour l'exemple

ci-dessus s'iJ ne figurait pas dans un contexte de prose rimée, comme dans

l'exemple suivant :

Iwajcfal-û bayna- hu wa bayn~a l-jannat-i nasab-a-n/. 37/158

Et ils ont mis entre lui et entre les djinns un lien de parenté

circonstant C.de nom Circonstant C.de nom.

Annexion Annexion

(Syntagme court) (Syntagme long)

« Ils ont établi entre lui et entre les djinns une parenté. »

La situation des circonstants vis-à-vis des autres compléments de même

énoncé peut être de deux sortes : les circonstants sont soit coordonnés, soit ils

ne sont pas coordonnés aux autres compléments verbaux. Dans le cas où ils ne

sont pas coordonnés à un autre complément verbal, c'est qu'ils ne sont pas

sémantiquement du même type.

Exemples :

/fa hiya tumlâ calay-hi bukrat-a-n wa ' asiyy-a-nt'. 25/5

Elles sont dictées sur lui matin et soir.

Verbe syntagme prépo. Circonstant coord. .Circonstantde temps de temps

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Étude syntaxique_________________________________373

« Elles lui sont dictées matin et soir. »

Jwajcfalû bayn-a-hu wa bayn-a J-jcmnat-i nasab-a-nl. 37/158

Et ils ont mis entre lui et entre les djinns un lien de parenté

circonstant . C.de nom Circonstant. C.de nom

« Ils ont établi entre lui et entre les djinns une parenté. »

En cas de coordination de circonstants avec un autre complément, cela

signifie qu'il existe un. lien sémantique avec le circonstant. L'autre

complément pourrait s'agir d'un syntagme prépositionnel constitué d'un nom

de lieu spécifié, coordonné à un circonstant de temps ou de lieu. Le lien

sémantique serait la localisation signifiée par les différents compléments.

Exemples :

Iwa la-hu l-hamd-u ft s-samâwât-i wa l- 'ard-i

à lui la gloire dans les cieux et la terre

Complément (Synt. Prépositionnel)

wa casiyy-a-n wa hîn-a tuzhirûn-al. 18/30

et le soir et au moment où vous êtes au matin.

Circonstant Circonstant complément de nom.

« Gloire à Dieu soir et matin. »

Par ailleurs, la position des circonstants coordonnés diffère selon le type

de complément qui leur est juxtaposé. Il semble que les compléments directs et

indirects sont antéposés aux circonstants coordonnés, tandis que le

spécifîcateur est postposé. C'est peut-être là le signe d'un ordre préférentiel.

Exemples :

/sabbi/j- hu bukrat-a-n wa casiyy-a-nl. 19/62

Loue lui matin et soir

Verbe c.o.d circonstant circonstant

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Étude syntaxique 374

« Glorifie-le matin et soir. »

/wa 'aqim s-salât-a tarafay-a n-nahâr-i wa zulaf-a-n

Et accomplie la prière aux deux extrémités du jour et à des heures

Verbe c.o.d circonstant c.de nom circonstant

de min al-layl-il. 11/114

la nuit.

« Accompli la prière aux deux extrémités du jour et à des heures de la nuit. »

Ifa hiya tumlâ calay-hi bukrat-a-n wa casiyyat-a-nl 25/5

Elles sont dictées sur lui matin et soir

Verbe c.déictique circonstant . circonstant

« Elles lui sont dictées matin et soir. »

l~wajacalû bayn-a- hu wa bayn-a l-jannat-i nasab-a-n/.31/15?>

Et ils ont mis entre lui et entre les djinns un lien de parenté

circonstant c.de nom.. Circonstant c.de nom. Spécificateur(ou c.d'état)

« Ils ont mis, entre eux et entre les djinns, une parenté. »

II est intéressant de remarquer que la longueur n'est pas nécessairement

un critère déterminant. Le spécificateur qui est bien plus court que le groupe

circonstanciel est placé en fin d'énoncé. Ce n'est pas non plus la terminaison

du complément, car l'énoncé ne figure pas dans un contexte de prose rimée.

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Étude syntaxique_________________________________375

1.6.5.1 Plusieurs circonstants non coordonnés

Lorsque deux circonstants localisent une seule et même action, ce ne

peut être qu'un circonstant de temps et un circonstant de lieu. L'énonciataire

désire localiser l'action dans le temps et l'espace. Ce sont deux compléments

comme tant d'autres, où l'ordre est assez varié à en juger par les exemples ci-

dessous, mais pas indifférent.

Lorsqu'il s'agit d'un circonstant de temps et de lieu, le circonstant de

lieu est antéposé au circonstant de temps, sauf dans le cas où le circonstant de

temps est employé comme un déictique. Celui-ci est antéposé au circonstant de

lieu. C'est là un fait stylistique très fréquent. L'exemple du circonstant /yawm-

a/ (jour) peut être employé aussi bien comme déictique avec le déterminant /al/

(le), /al-yawm-a/ (ce jour ou aujourd'hui), que comme un simple circonstant

(date, durée). Lorsqu'il est employé comme déictique, il est antéposé à tout

autre circonstant.

Exemples :

/ 'inna-ka l-yawm-a laday- nâ makîn-u-n 'amîn-u-nl. 12/54

Certes, toi, le jour auprès de nous, plein d'autorité et de confiance.Indicatif circonstant circonstant c.denom énonciatif

de temps de lieu

« Tu es aujourd'hui, auprès de nous, plein d'autorité et de confiance. »

Lorsqu'il s'agit de deux circonstants déictiques, l'un de temps et l'autre

de lieu, c'est le circonstant de temps qui est antéposé au circonstant de lieu.

Exemple :

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Étude syntaxique_________________________________376

/fa lays-a la-hu l-yawm-a hâhunâ hamîm-u-nl. 69/35

Un'y a pas pour lui, le jour, ici, de protecteur

Verbe synt.prépo. Circonstant circonstant sujetde temps de lieu(Déïctique) (Déïctique)

« Aujourd'hui, ici, il n'a pas de protecteur. »

Voici des exemples où le circonstant de temps /yawm-a/ (jour) n'est pas

employé comme déictique.

/ 'inna Allah-a yafsil-u bayn-a- hum yawm-a l-qiyâmat-il. 22/17

Certes, Dieu tranchera entre eux le jour de la résurrection

Circonstant . Circonstantde lieu de temps

« Dieu tranchera entre eux le jour de la résurrection. »

/wa lladjna attaqaw fawq-a- hum yawm-a l-qiyâmat-il. 2/212

Ceux qui craignent au-dessus d'eux le jour de la résurrection

Circonstant Circonstantde lieu de temps

« Ceux qui craignent seront au-dessus d'eux le jour de la résurrection. »

La longueur du syntagme ne motive pas la position des circonstants.

Voici un exemple où le premier groupe circonstanciel est bien plus long que le

deuxième circonstant de temps.

Isahâdat-u bayn-i-kumL'attestation d'entre vous,

'idâ hadar-a 'ahad-a-kumu l-mawt-a hîn-a l-wasiyyat-il. 5/106

lorsque l'un de vous est en présence de la mort au moment du testament

circonstant complément de nom. Circonstant c. de nom.de temps_____________________ de temps________

groupe circonstanciel groupe circonstanciel

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r

Etude syntaxique_________________________________377

« L'attestation d'entre vous, lorsque l'un de vous est en présence de la mort au

moment du testament. »

En conclusion, lorsqu'un énoncé comprend deux circonstants, l'un de

temps et l'autre de lieu, c'est le circonstant de lieu qui est antéposé, excepté le

cas où le circonstant de temps est un déictique. Dans ce cas, il est antéposé au

circonstant de lieu.

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Étude syntaxique________________________________378

1.6.5.2 Plusieurs circonstants et niveaux différents

Parmi les circonstants, il existe une catégorie dont la particularité est de

s'annexer à une phrase qui lui sert de complément de nom. Autrement dit, ce

type de circonstant a pour complément de nom une phrase. Ces circonstants

sont pour la plupart des noms de temps : /yawm-a/ (jour), /hîna/ (moment) ; de

lieu : /haytu/ (là où), /'id/ (quand/passé), /'idâ/ (quand/non passé).

La phrase annexée au circonstant peut être elle-même constituée d'un

circonstant et forme un élément figé (un déterminant) dans une phrase

majeure. Les éléments de la phrase annexée se régissent entre eux et ne

peuvent être régis par un élément extérieur.

lla-qad radiy-a llah-u cani l-mu 'min-în-a 'idyubâyfûn-a-ka taht-a

s-sajamt-i/.40/18

Verbe circonstant verbe circonstanti________J _____tPhrase mineure

Anexion

Phrase majeure

« Allah est satisfait des croyants, lorsqu'ils ont prêté allégeance sous l'arbre. »

Nous avons ainsi deux phrases distinctes. Une phrase majeure qui est

constituée d'un circonstant et d'un verbe qui le régit. Puis nous avons la phrase

annexée au circonstant qui forme un noyau figé dont les éléments se régissent

entre eux et dans laquelle il pourrait y avoir un circonstant. Nous pourrions

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Étude syntaxique_________________________________379

avoir deux circonstants mais à deux niveaux différents. L'un serait constituant

de la phrase majeure, l'autre de la phrase mineure. Dans ce cas, les régissants

sont différents.

Exemple :

l\va 'andir-hum yawm-a l- 'âsifat-i 'idi

Verbe circonstant c. de nom circonstantEt avertis eux du jour qui approche, lorsque

l-qulûb-u ladâ l-fyanâjir-i kâziminl. 40/18

les cœurs seront près du gosier, angoissésc.de nom circonstant

Phrase mineure

« Avertis les du jour qui approche, lorsque les cœurs seront près du gosier,

angoissés.

Dans l'exemple ci-dessus, la localisation des deux circonstants est tout

à fait différente. Le circonstant de la phrase majeure /'id/ dénote le temps et

localise l'action du verbe /'andir/ (met en garde) tandis que le circonstant de la

phrase mineure /ladâ/ dénote le lieu et localise l'action de l'énonciatif

/kâzimîn-a/ (angoissés).

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Étude syntaxique_________________________________380

2. ÉTUDE HISTORIQUE DU CIRCONSTANT

2.1 GENÈSE DU CIRCONSTANT

Selon toute hypothèse, le nom de temps et de lieu exprimant la

circonstance et régi directement à l'accusatif par le verbe, serait né par

extension. C'est-à-dire, que la circonstance de temps et de lieu d'une action

était, à l'origine, exprimée uniquement par un syntagme prépositionnel

constitué d'une préposition en l'occurrence /fi/ (dans) et d'un nom de temps ou

de lieu. Cela signifie que lorsqu'un nom de temps ou de lieu était régi

directement par un verbe, ce n'était pas pour exprimer une circonstance

temporelle ou spatiale. Le nom de lieu ou de temps régi, directement par le

verbe, n'était autre qu'un complément d'objet direct, comme dans l'exemple

suivant :

Iwa ttaqû yawm-a-n lâtajzînafs-u-ncannafs-i-nsay'-a-n/.2/48verbe cod

« Craignez le jour où aucune personne ne sera récompensée pour une autre. »

Ci-dessus, la relation entre le verbe et son complément (nom de temps

ou de lieu) n'était pas une relation verbo-circonstancielle, c'est-à-dire une

relation d'une action opérée dans un réceptacle, mais une relation d'une action

opérée avec un objet. La préposition devait probablement être perçue comme

ce qui marquait la relation sémantique entre le verbe et le complément. La

préposition Ifil devait marquer, seule, l'idée de contenance, jusqu'à ce que la

notion de contenance impliquée par les noms de temps et de lieu apparaisse de

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Étude syntaxique_________________________________381

plus en plus saillante. Le sémantisme de la préposition était finalement perçu

comme redondant. La préposition a fini par s'effacer et laisser place à une

relation sémantique directe entre le verbe et le nom de temps ou de lieu. Ainsi,

le circonstant (zarf) de temps et de lieu serait né après suppression de la

préposition Ifll. Une naissance selon un procédé dérivationnel qui, selon toute

logique, s'est déroulé sur une longue période.

Exemples :

-/awtahwî bihi ar-rîh-u fî makân-i-n sahîq-i-n/ 22/31

Ou que précipite avec lui le vent dans un abîme très profond.

Syntagme prépositionnel

« Ou bien que le vent le précipite dans un abîme très profond. »

-/warafacnâ- hu makân-a-n caliyy-a-n/ 19/57

Et nous avons élevé lui un Heu haut.Syntagme nominal

« Nous l'avons élevé [en] un lieu très haut. »

Le circonstant régi directement à l'accusatif a dû connaître une

apparition timide et discrète qui au fil du temps s'est imposée dans le parler

des Arabes. La question qui se pose est : a-t-il vu le jour simultanément dans

toutes les régions occupées par les Arabes ou a-t-il vu le jour dans l'une des

tribus arabes avant de s'imposer à toutes les tribus ? Ceci reste pour le moment

invérifiable, mais on peut émettre l'hypothèse d'une naissance en un endroit

donné avant de se répandre dans toute la communauté linguistique arabe.

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F

Etude syntaxique________________________________382

La naissance du circonstant de temps et de lieu constitué d'un syntagme

nominal représente, à elle seule, une importante variation dans l'histoire

immémoriale de la langue arabe. Cette variation constitue un fait de langue qui

peut être expliqué par différentes théories linguistiques.

2.1.1. Théorie d'ïbn Abî r-Rabf (599/688 h.)

Pour le grammairien arabe Ibn Abî r-RABÎ0, la suppression de la

préposition Iflf devant le nom de temps et de lieu est un fait réel dont l'origine

s'explique par une analogie successive entre différents concepts

grammaticaux.

2.1.1.1 Suppression de la préposition Ifil devant un nom de temps

Pour Ibn Abî r-RABΰ, c'est d'abord le nom de temps qui, le premier, a

connu la suppression de la préposition Ifil. Aussi dit-il : « Sache que le verbe

dépasse vers le temps au moyen de la préposition [...] mais les Arabes ont

supprimé la préposition, lorsqu'il est apparent. »'

» OIS" iil A!

Ibn Abî r-RABic, Al-bayt, t. 1, p. 477.

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Étude syntaxique _________________________________ 383

D'après Ibn Abî r-RABÎc, la suppression de la préposition Ifll est due à

l'assimilation du nom de temps au nom d'action (masdar), car le temps et

l'action sont deux notions impliquées par le verbe. Ibn Abî r-RABÎc justifie

l'accusatif de /yawm-a/ GourX dans l'énoncé /jalas-tu yawm-a al-kamîs-i/ en

disant que dans l'exemple suivant : « le nom /yawm-a 1-kamîs-i/ (le jour du

jeudi) est régi à l'accusatif parce qu'il a été assimilé au masdar : /jalas-tu

yawm-a 1-kamis-i/ (je me suis assis le jour du jeudi). La préposition fut

supprimée, le verbe a atteint le nom de temps, comme il a atteint le masdar du

fait qu'il l'implique.. »1

î ,.*». fié. -• î -o ,- * o ",, ^ . .o ^ . s °. ta s s f * AJlj 4-->< 4J i( t -«^AkJ'irJI /» «J iJl- --!•»- t cLJU «* .-S **AS»cJ) «J i_--/»î LaJl/» «J iJl- --!•»- t cLJU «* .-S ^**AS»cJ) ^ «J i_--/»î LaJl «

Ainsi, pour Ibn Abî r-RABÎc, le masdar exprime l'action et le nom de

temps exprime une temporalité. Ce sont des notions impliquées par le verbe.

Les noms d'action sont divisés en ce qui est vague et en ce qui est spécifié et

d'après le grammairien, seule le nom d'action vague était, à l'origine, régi

directement. : Aussi dit-il : « En principe, seul le nom d'action vague peut être

régi à l'accusatif. »

il. ^ y ù\r j

À l'origine, le nom d'action vague est le nom d'action dont le

sémantisme est identique à celui de l'action exprimée par le verbe. Exemple, le

Ibn Abî r-RABic, Al-Basit, p. 1, p. 478.

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Étude syntaxique _________________________________ 384

nom d'action /qiyâm/ exprime l'action d'entreprendre, que l'on retrouve dans

le verbe /qâm-a/ = entreprendre ou se lever. Cependant- dira Ibn Abî r-RABÎ0-

les Arabes ont procédé par extension en faisant dépasser le verbe vers ce qui

est spécifié, incluant celui-ci (l'action spécifiée) sous le vague. l

s oJt . s ot fl:~" r-ljJb

Le nom d'action n'est plus considéré comme vague lorsqu'il est

simplement déterminé annectivement par un nom ou si le sémantisme lexical

est différent de celui de l'action du verbe.

Verbe : /qâm-a/ Entreprendre ou se lever.

Nom d'action vague : /qiyâm/ Entreprise.

Spécifié: /qiyâm al-layl-i/ Entreprise de la nuit.

- /qâm-a qiyâm-a-nl II entreprend une entreprise.

- 1 qâm-a [préposition] qiyâm- [génitif] al-layl-il > I qâm-a qiyâm-a l-layl-il

II a entrepris [dans] l'entreprise de la nuit. > II a entrepris l'entreprise de la

nuit.

1 Op. cit. D'après al-GALAYÎNÎ, le nom d'action vague est celui qui équivaut sémantiquement à sonverbe, ni plus, ni moins. Le nom d'action spécifié est celui dont le sens est augmenté par rapport àson verbe, tant au niveau du genre que du nombre.Masdar vague : /qum-tu qiyâm-a-n/ (je me suis levé d'une levée).Masdar spécifié :/sir-tu sayr-a l-°uqalâ'-i/ (j'ai marché d'une marche de gens raisonnables)/darab-tu 1-liss-a darbat-a-y-n-i/ (j'ai frappé le voleur de deux frappes)Al-GALAYÎNÎ, Jamfu d-durûsi l-carabiyya , t. 3, p. 32.

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Étude syntaxique_________________________________385

Le nom de temps est comparable au nom d'action. Il existe le nom de

temps vague et le nom de temps spécifié. A l'origine, les temps vagues et

spécifiés étaient régis au génitif par une préposition. Dans un premier temps,

les Arabes ont comparé le temps vague au nom d'action vague, car tous les

deux sont impliqués par le verbe. Le temps vague, à l'instar du nom d'action

vague, finit par être régi directement par le verbe.

Exemple :

Avec préposition /fî/ : /gulib-at ar-rûm fî 'adnâ l-'ard-i/30/2-3

Les Romains ont été vaincus dans le plus proche de la

terre

Sans préposition/fî/:/fa kân-a qâb-a qawsayn-i 'aw 'adnâ/53/9

II était deux portées d'arc ou plus près.

Voici l'ordre des étapes de rection directe :

Ie"6 étape : nom d'action vague

Verbe (rection directe) 1... —————^ 2eme étape : nom d'action spécifié

3eaK étape : nom de temps vague

Ensuite, les Arabes ne se sont pas limités à cette analogie. Ils ont fini

par généraliser tous les noms de temps, comme ils ont agi avec les noms

d'action. Tous les noms de temps sont régis directement par le verbe.

Exemple :

Avec /fî/ : /tumma yacruj-u fî yawm-î-n kân-a miqdâr-u-hu 'alf-a sanat-i-n/

32/5 Ensuite, il monte dans un jour dont la durée est de mille années...

Sans /fî/: /qâl-a labit-tu yawm-a-n... / 2/259

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Étude syntaxique 386

Je suis resté un jour.

Verbe (rection directe)

Nom d'action vague

Nom d'action spécifique

Nom de temps vague

Nom de temps spécifié

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Étude syntaxique_________________________________387

2.1.1.2 Suppression de la préposition Ifîl devant un nom de lieu

Aux côtés des deux notions abstraites que sont l'action et le temps, il y

a la notion d'espace. Celle-ci est également impliquée par le verbe. Les noms

de lieu vague étaient à l'origine régis indirectement par le verbe et ont été

assimilés au nom de temps, qui lui, a été assimilé au nom d'action. Il y a là une

sorte d'analogie successive de trois notions abstraites qui sont, soit impliquées

formellement par le verbe, comme c'est le cas pour le nom d'action et le

temps, soit impliquées théoriquement comme pour le lieu vague.

Pour Ibn Abî r-RABÎc, les Arabes auraient supprimé la préposition (fî)

dans le cas des noms de lieu spécifiés, par extension, sans qu'il en connaisse la

raison exacte. Selon lui, il convient de se limiter là où ils se sont arrêtés. Il

ajoute que la suppression est attestée uniquement pour le nom de lieu vague,

les noms de mesures spatiales et les noms de lieu dérivés, selon les conditions

précitées. On ne peut aller au-delà, ni appliquer l'analogie.1

Dans une des réponses qu'il donne à la question suivante : « Pourquoi les

Arabes ont particularisé ces types de noms de lieu (vague, mesure et dérivé)

dans la comparaison aux noms de temps et y ont supprimé la préposition ? »,

Ibn Abî r-RABÎ0 explique que : «[...] Lorsque l'on vient au circonstant de lieu

et que l'on veut l'assimiler au circonstant de temps, le verbe ne cherche à

1 Ibn Abî r-RABf, t. 2, p. 493.

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Étude syntaxique ________________________________ 388

dépasser son sujet que vers ce qui est vague ou dérivé, et Ton ne peut aller au

delà ».

* "

. s O f "

4 9. 0 &• O ? ,. i x O ^ î o f ^ ^ û J t î ^ J l ^ ^ / f f x . x - * . .

9 x- J ^ J . Ji^Jl J» .« g .oU j* J Ajjaj U |»

Ibn Abî r-RABÎ0 fait référence à l'usage des Arabes et dans le cas du lieu

spécifié, il n'y a pas de place pour l'analogie.

Ainsi, il apparaît, dans la théorie d'Ibn Abî r-RABΰ que la suppression

de la préposition Ifll n'est pas liée à l'idée de contenance ou de réceptacle. La

suppression est plutôt liée à l'idée d'implication du nom de temps et de lieu

(complément) par le verbe. D'après lui, la suppression de la préposition entre

le verbe et son complément se fait avec tous les noms qui désignent une notion

impliquée par le verbe. Ce phénomène linguistique aurait, selon le

grammairien, commencé avec le nom d'action dont l'action est impliquée par

le verbe, puis cela s'est étendu au nom d'action dont l'action est quelque peu

différente de celle impliquée par le verbe (nom d'action spécifié). Le

phénomène s'est ensuite étendu à une autre notion impliquée par le verbe et

qui est le temps. Cela a commencé par le temps imprécis (vague) qui est le

plus proche du temps impliqué par le verbe, puis au temps précis (spécifié) qui

est un peu moins proche du temps impliqué par le verbe.

Le phénomène s'est enfin étendu à la dernière notion impliquée moins

fortement par le verbe. C'est la notion de lieu. Cela a commencé par le lieu

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r

Etude syntaxique________________________________389

imprécis (vague) et cela a atteint, en partie, le lieu précis (spécifié). Cependant,

seul le lieu vague est concerné par la suppression de la préposition //?/, alors

que seuls certains noms de lieu spécifié sont concernés. Va t-on voir, un jour,

une généralisation pour les lieux (vagues et spécifiés), comme pour le nom

d'action et le nom de temps ?

Ainsi, le phénomène de suppression de la préposition (/z) est une

extension d'une notion à une autre par analogie. L'action spécifiée est

comparée à l'action vague. Le temps vague est comparé à l'action spécifiée.

Le lieu vague est comparé au temps vague et le lieu spécifié est comparé au

nom de temps spécifié.

2.1.2 THÉORIE MODERNE D'ANDRÉ ROMAN.

Parmi les théories modernes sur le fait précis de l'arabe, il y a celle

d'André ROMAN. Même si sa théorie est différente et particulière, elle permet,

néanmoins, de démontrer que le circonstant de temps et de lieu était à l'origine

constitué d'un syntagme prépositionnel. En effet, d'après André ROMAN, les

noms de temps et de lieu qui sont des res spécifiant la circonstance, ils ne

peuvent qu'être des extensions complétives, car dit-il : « La relation entre une

base et son extension complétive est une relation à un objet ou à une

circonstance. En conséquence, l'extension d'identité, l'extension d'annexion et

l'extension complétive doivent être signifiées par des formes dénotant des

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Étude syntaxique_________________________________390

ras».1 Seuls les modus peuvent signifier une extension modale ou

d'identification.2

L'extension complétive, quand elle porte sur une circonstance de sa

base, la circonstance est signifiée par des fonctionnels spécifiés et non pas par

le fonctionnel non spécifié : l'accusatif /a/.3 André ROMAN explique : « La

diversité des circonstants réalisables par une extension complétive n'est autre

que la diversité des fonctionnels qui la rapportent à sa base. »4

Ainsi, le circonstant de temps et de lieu est en principe une extension

complétive introduite par le fonctionnel spécifié /fi/ (dans) qui dénote un plan

sécant de l'espace ou un point du temps.

1 André ROMAN, L'expression binaire des circonstants, in : Autour du circonstant, p. 180.Les res sont des entités du monde imaginées par l'homme, hors du temps, comme étrangères autemps, dont le temps n'est pas une composante.2 Les modus sont des entités du monde, imaginées par l'homme, dans le temps comme s'inscrivantdans un déroulement apparent3 Les fonctionnels, moyens de subordination, sont en arabe, des unités amorphes qui sontspécifiées ou non spécifiées sémantiquement. Les fonctionnels non spécifiés sémantiquement sontla voyelle /a/ de l'accusatif ; l'identité des voyelles désinentielles de l'expansion et de sa base. Lesfonctionnels spécifiés sémantiquement s'emploient comme des prépositions. L'expansion, qu'ilsintroduisent, reçoit, en raison de la contrainte du système syllabique, une voyelle désinentielle quiest /i/. Voir André ROMAN, Grammaire de l'arabe, pp.98-99.4 André ROMAN, L'expression binaire des circonstants, p. 185.

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Étude syntaxique_________________________________391

2.1.2.1 Circonstants réalisés par une extension modale

Nous avons pu voir que les noms de temps et de lieu sont des res et que

les res occupent les fonctions d'extension d'identité, d'annexion et complétive.

Que les fonctions d'extensions modales et d'identification sont occupées

uniquement par des modus. Pourtant, des noms de temps et de lieu ont été

employés, au cours du temps, sans être introduit par un fonctionnel spécifié.

Les noms de temps et de lieu ont constitué une extension particulière, comme

une extension modale. Pour André ROMAN, les noms de temps (res-a) sont

rares. Si André Roman semble constater une rareté à ce niveau, c'est qu'il a

tout simplement classé la plupart des noms de lieu, que la tradition

grammaticale arabe qualifie de lieu vague, dans la catégorie des fonctionnels

spécifiés, autrement dit, dans la catégorie des prépositions.

Pour André ROMAN, seuls les noms de lieu topographiques que la tradition

grammaticale arabe appelle "noms spécifiés", sont traités comme des

compléments d'objet direct, particulièrement après quelques verbes dénotant

une ingression.1 Ces compléments ne sont, semble t-il, pas rapportés

directement à leur base, mais comme toute autre extension, par le truchement

d'un fonctionnel spécifié qui serait autre que le fonctionnel /fi/ ellipse.

Bref, quoi qu'il en soit, que le nom de lieu soit traité comme des

compléments d'objets, l'évolution dans la perspective :

André ROMAN, L'expression binaire des circonstants, pp. 185-186

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Étude syntaxique_________________________________392

Verbe + Préposition + Nom (-i) (temps/lieu) P Verbe + Nom (-a), est

une réalité linguistique. Cette évolution a pu être observée par différents

grammairiens et linguistes et selon des théories différentes. Quoi qu'il en soit,

dans la théorie grammaticale arabe, cette évolution est le passage d'un

syntagme prépositionnel vers un syntagme nominal. Autrement dit, un passage

d'un complément circonstanciel formé d'une préposition et d'un nom de temps

ou de lieu et où le verbe régit tout le syntagme qui forme une seule unité ou un

noyau vers un complément circonstanciel constitué d'un nom de temps ou de

lieu régi directement par le verbe.

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r

Etude syntaxique_________________________________393

2.3 Autres théories modernes

La raison de la suppression de prépositions introduisant les circonstants

de temps et de lieu, peut être expliquée par la théorie de la familiarité des lieux

et des formes de discours. C'est en tout cas le résultat de l'étude faite sur de

nombreuses langues par Jeanne Marie BARBERJS.

Jeanne Marie BARBERIS explique que : « L'indication d'une localisation par

le nom d'une rue (d'une place, d'un boulevard, etc.) relève des pratiques

quotidiennes profondément réglées par des routines. L'indication de la

localisation fait volontiers l'économie du relateur, dans un contexte de

communication familière, et dans un environnement aux structures pré-

organisées, comme c'est le cas de la ville, pour son habitant. Dans un contexte

suffisamment connu, de nombreuses langues se contentent d'énoncés sans

relateurs du type : j'irai brousse, il marchait montagne. »*

L'effacement de la préposition devant un nom de temps ou de lieu est

un phénomène linguistique qui touche également la langue arabe. Ce qui est

spécifique à la langue arabe, c'est la suppression de la préposition /fi/ devant

les noms de temps et de lieux vagues, puis devant certains noms de lieux

spécifiés. Il y a également la suppression de certaines prépositions comme

/'ilâ/ (vers) devant certains noms de lieux spécifiés. Dans son commentaire du

kitâb de SffiAWAYffl, as-SlRÂFÎ explique que dans le cas de l'énoncé : «dahab-

Jeanne Marie BARBERIS. La grammémisation à l'œuvre dans la parole ; pp.170-171

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Étude syntaxique_________________________________394

tu s-Sâm-a», la préposition a été supprimée et ne pouvait être que /'ilâV (vers)

ou /fi/ (dans).1 La suppression de la préposition n'est pas irrémédiable, celle-ci

peut être employée ou non.

D'après Dany LAUR, il arrive que la combinatoire d'un verbe de

déplacement et une préposition de déplacement, engendre une certaine

redondance, on dit qu'il y a congruence entre le verbe et la préposition. Ce qui

peut entraîner la suppression de la préposition. Cependant, dira t-elle : « Du

point de vue de l'information véhiculée, l'association vdp/prépl est plus

précise qu'un vdp isolé. »2

L'étude de Claude BOISSON rejoint, quelque part, La théorie de Dany LAURE.

En effet, Claude BOISSON traite, à travers un nombre significatif de langues, la

question des adverbiaux sans préposition (circonstants), plus particulièrement

les adverbiaux de temps. Supposant définis, les adverbiaux, il s'attache à

discerner dans un nombre de données les critères de choix entre adverbial sans

préposition et adverbial avec préposition (facteurs sémantiques, fréquences

différentes, faits de saillance, notamment dans les micro-systèmes des termes

de saisons, facteurs stylistiques et dialectaux). Il conclut que l'explication

simple par l'économie s'avère suffisante. L'économie, toutefois, est

susceptible de jouer sous des contraintes de type différent : l'ellipse familière

1 Voir as-SœÂFÎ, Sari} kitâb Sibawayhi, T: 2, p:291.2 Dany LAUR, La relation entre le verbe et la préposition dans la sémantique du déplacement in :Language, 110, pp. 53, 54.

Vdp = veibe de déplacementPrépl. = préposition de déplacement

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r

Etude syntaxique________________________________395

ou de fréquence, l'ellipse de récupérabilité. Et il avance Pétymologie des

adverbes « simples » d'utilisation fréquente, dont l'usure même serait un fait

d'économie, montre qu'ils dérivent à l'occasion de syntagmes

prépositionnels. *

Nous pourrions supposer qu'à l'origine, la circonstance de temps et de

lieu était exprimée par un syntagme prépositionnel. La raison de la suppression

de la préposition /fi/ serait la même que pour d'autres prépositions spatiales

telles que /'ilâ/ (vers). La raison est à la fois, la familiarité des lieux et des

formes de discours et une redondance de sens entre les différents constituants

de l'énoncé. Il y a également la relation des notions générales comme l'action,

le temps et le lieu contenues dans le verbe et les compléments. Autrement dit,

si un complément verbal désigne l'une des trois notions générales que l'on

retrouve également impliquée dans le verbe, cette notion rapproche

sémantiquement le verbe avec le complément.

Cela dit, lorsque l'on parle d'espace, cela exclut le nom spécifié qui

n'est pas abstrait mais concret. Il est classé parmi les entités concrètes,

corporelles à l'instar des individus et des objets qui possèdent tous des traits

spécifiques. Le lieu spécifié est étranger aux notions abstraites, notamment à la

notion de l'espace. Il n'est donc pas proche du verbe, comme le sont l'action,

le temps et le lieu vague (localisation dans l'espace abstrait).

1 Voir le résumé fait par Sylvianne Rémi Giraud sur l'article de Claude BOISSON, Les adverbiauxsans préposition, in : Autour du circonstant, p.215

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r

Etude syntaxique_________________________________396

La suppression exceptionnelle de la préposition, lorsqu'il s'agit de

noms spécifiés se fait avec les verbes de déplacement d'un lieu vers un autre.1

C'est le cas du verbe /dakal-a/ (entrer), /dahab-a/ (aller vers), /habat-a/

(descendre vers) et /sakan-a/ (se retirer vers), qui à l'origine sont accompagnés

de prépositions de direction comme /'ilâ/ (vers) et /rnin/ (de). Ce genre de

verbe implique, en quelques sortes, la localisation interne (dans) et les noms

spécifiés, malgré leur aspect concret, impliquent également la localisation

interne (dans).

Quant au verbe /dakal-a/, il est employé dans le Coran sans préposition

lorsqu'il s'agit de lieu spécifié, car la localisation interne est évidente. Mais

lorsqu'il s'agit d'entités abstraites autres que spatiales, il est employé avec la

préposition de localisation interne /fi/ (dans) et ce, peut être, pour mieux

marquer la localisation interne de l'entité abstraite.

- Exemples où /dakal-a/ est employé avec un nom de lieu concret (spécifié) :

Iwa dakal-a jannat-a-hu wa hnwa zâlim-u-n H nafs-i-hil. 18/35Et il entra le jardin à lui, et lui est injuste pour sa personne.

Verbe Nom de lieu spécifié (c.o.d)« II entra dans son jardin, tout en se faisant du tort. »

1 Voir à ce propos as-SffiÂFÎ, Sari} kitâb Sibawayhi, t. 2, p. 295. as-SlRÂFÎ dit : « L'entrée enquelque chose, c'est le déplacement d'un lieu vers un autre [...] et le verbe de déplacement nedépasse [son sujet] qu'au moyen d'une préposition. »

« .^!>°J~ Sfl && Si JÛthll j [...] 4 £>

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Étude syntaxique_________________________________397

Iqâl-a udkul-û misr-a 'in sâ'-a Allah-u 'âminîn-al. 12/99

II dit : Entrez l'Egypte, si Dieu le veut, sans inquiétude.

Verbe Nom de lieu spécifié (c.o.d)« II dit : Entrez en Egypte, si Dieu le veut, sans inquiétude. »

lyâqawm-i udkulû l-'ard-a l-muqaddasat-al. 5/21Ô peuple, entrez la terre la sainte

Verbe Nom de lieu (cod)A

« O peuple, entrez en terre sainte. »

- Exemples où /dakal-a/ est employé avec des noms d'entités abstraites :

/wa 'adkilnâ fi rahmat-i-kaFais nous entrer dans la miséricorde à toi

Verbe prépo. .entité abstraiteSyntagme prépositionnel

wa 'anta 'arliatn-u r-mfaimîn-a/7/151

et toi le plus miséricordieux des miséricordieux.

« Fais nous entrer dans ta miséricorde toi qui es le plus miséricordieux des

miséricordieux. »

Ira 'ay-ta n-nâs-a yadkulûn-a f i dîn-i Allah-i 'qfwâj-a-nf. 110/2

Tu vois les gens ils entrent dans la religion de Dieu en groupe

Verbe prépo entité____déterminantSynt prépo.

« Tu vois les gens entrer dans la religion de Dieu en groupe. »

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Étude syntaxique_________________________________398

Quant au verbe /dahab-a/ (aller vers), il est à l'origine accompagné,

généralement, de la préposition /'ilâ/ qui, dans certains cas, est supprimée. Une

suppression qui, d'après SffiAWAYHl serait exceptionnelle.1

- Exemples où /dahab-a/ est employé avec /'ilâ/ (vers) :

Itumma dahab-a 'ilâ 'ahl-i- hi yatamatt-âl. 75/33

Ensuite, il alla vers sa famille, s'enorgueillissant

Verbe synt prépo.

« Ensuite, il se rendit chez sa famille, s'enorgueillissant. »

l'idhab 'ilâfifawn-a 'inna-hu tagâl. 20/23Va vers Pharaon, certes, lui, a commis l'injustice

Verbe Synt prépo.

« Va à Pharaon, il a, certes, commis l'injustice. »

- Exemple où /dahab-a/ est employé sans préposition :

Idahab-tu s-sâm-al2

Je suis allé Sâm.

Verbe cod

« Je me suis rendu en pays de Sâm. »

On remarque que la préposition /'iîâ/ (vers) est effacée en présence d'un

verbe de déplacement et d'un nom de lieu. C'est le nom de lieu qui est, dans ce

cas, la raison de l'effacement de la préposition, car avec le même verbe de

déplacement et un complément dont la catégorie lexicale désigne autre chose

qu'un lieu, la préposition subsiste.

1 SlBAWAYHI, t. 1, p. 37.2 Exemple emprunté au Kitûb de SIBAWAYHI, t. 1, p. 35.

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Étude syntaxique_________________________________399

Quant au verbe /habat-a/ (descendre vers, se rendre en), il est employé

avec la préposition /'ilâ/ (vers) et /min/ (de). Il exprime le déplacement d'un

lieu à un autre.

Exemple :

rihbit-û misr-a-n, fa- 'inna la-kum ma sa 'al-tuml. 2/61Descendez Egypte, il y a, certes, pour vous ce que vous avez demandé.

Verbe Nom de lieu spécifié

« Descendez en Egypte, il y a pour vous ce que vous avez demandé. »

- Exemple avec /min/ (de) :

Iqâl-a fa-ihbit-û min-ha 1.7/13

II dit : Descendez d'elle

Verbe (impératif) préposition de provenance

« II dit : Descendez-en (du paradis) ! »

Cependant, dans le Coran, lorsqu'il s'agit du verbe /habat-a/ (se rendre), la

préposition /'ilâ/ n'est pas employée et lorsque le verbe /habat-a/ est utilisé

pour la provenance d'un lieu, la préposition /min/ est exprimée.

Quant au verbe /sakan-a/ il se combine aussi bien avec la préposition

/'ilâ/ (vers) et /fi/ (dans), que sans préposition.

- Exemple avec et sans /'ilâ/ :

/wajacal-a min-hâ zawj-a-ha li-yaskun-a 'ilay-hal. 7/189

Et il a fait d'elle son époux, pour demeurer vers elle

Verbe préposition

« C'est d'elle qu'il créa l'autre partie du couple, pour demeurer auprès elle. »

Là aussi, la préposition est exprimée en l'absence de complément de lieu et

elle est effacée en présence de complément de lieu. Le sémantisme lexical du

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Étude syntaxique________________________________400

verbe /sakan-a/ (habiter) et du nom de lieu désignant un lieu d'habitation sont

si proche qu'ils se passent de toute préposition.

- Exemples de noms de lieu avec ou sans /fî/ :Ifa-askan-nâ-hu fi l-'ard-il. 23/18Nous avons fait habiter lui dans la terre

Verbe prépo nom de lieu spécifié

« Nous l'avons retiré dans la terre »

luskun-û l-'ar4-al, 17/104

Habiter la terre

Verbe (impératif) nom de lieu régi directement par le verbe /sakan-a/

« Retirez-vous sur terre. »

/waqul-nâyâ 'âdam-u uskun anta wa zawj-u-ka l-jannat-al. 2/35

Verbe Nom de lieu spécifié^« Nous avons dit : O Adam, habite toi et ton épouse le paradis. »

Lorsqu'il s'agit des noms de temps et de lieu vague, on remarque que

seule la préposition spatiale /fî/ (dans) a fait l'objet de suppression, alors

qu'avec les noms de lieu spécifié comme dans les exemples ci-dessus, c'est les

prépositions /fî/ et /'ilâ/ (vers) qui sont supprimées. Ce qui signifie que

l'économie de préposition ne se limite pas qu'à la localisation interne, mais

également à la localisation de déplacement.

Ce sont les usages familiaux et fréquents qui sont, semble t-il, à l'origine de

l'économie de prépositions spatiales. Quoiqu'il en soit, la ressemblance, au

niveau syntaxique, des énoncés formés de circonstants de temps et de lieu

vague, puis de noms de lieu spécifié régis à l'accusatif par une forme verbale,

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Étude syntaxique________________________________401

ne signifie pas nécessairement qu'il y a ressemblance au niveau sémantique ou

que la préposition était la même à l'origine, en l'occurrence /fi/ (dans).

Bref, le concept de circonstant de temps et de lieu, complément verbal

régi directement à l'accusatif, est un concept secondaire, obtenu à partir d'une

forme première, constituée d'une préposition, puis qui a fini par être

supprimée. C'est là un produit de l'évolution de la langue arabe en particulier.

De plus, sur le plan lexical, le circonstant de temps et de lieu constitue, sans

aucun doute, une catégorie ouverte, laissant, d'un côté, s'échapper certaines

unités nominales vers la grammémisation et d'un autre côté recevoir des unités

qui sont des noms d'entités concrètes comme la terre, les villes comme as-Sâm

etc. l

Exemples :

l'aw itrafyû-hu 'ard-a-n yakl-u la-kumwajh-u'abî-kum/2 9/12

Ou bien, jetez lui la terre, libérant pour vous la face de votre père.

Verbe Nom de lieu spécifié(impératif)

« Ou bien, jetez-le loin dans la terre, libérant ainsi la face de votre père. »

1 « Voir supra » la partie sur la position du circonstant et la subduction, p. 3902 D'après al-'AKFÂs : « Le nom /'ard-a-n/ n'est pas ici un circonstant, bien que la préposition /fî/ait été supprimée et que le verbe. Macânî l-qur'ân, t. 2, p. 364.

D'après KAZIMIRSKI, le verbe /tarafc-a/ signifie Jeter ou rejeter loin de soi et avec force ouabandonner. Dictionnaire Arabe/français, t. 2, p. 67, 1. Voir également Zâdu l-masîrfi çilmi t-tafsîr, t. 4, p. 184, de Ibn al-JAWZÎ.

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Étude syntaxique________________________________402

Signalons que de nos jours, le retour à la structure primitive du

complément circonstanciel de temps et de lieu semble se confirmer de plus en

plus. En effet, après avoir produit le circonstant régi directement par le verbe à

l'accusatif (zarf) à partir d'un syntagme prépositionnel, la tendance est au

retour à ce syntagme prépositionnel formé de la préposition /fî/ et d'un nom de

temps ou de lieu.

Si le circonstant de temps et de lieu sous forme de syntagme nominal est né par

un usage très fréquent et familial, on pourrait expliquer le retour au syntagme

prépositionnel par l'inverse ; c'est-à-dire que le monde arabo-musulman n'a

plus la même approche de la langue arabe. Il existe, selon toute vraisemblance,

une défamiliarisation sensible avec l'usage de la langue arabe classique. C'est

aussi, sans doute, dans la langue de la presse et dans certains parlers comme

celui des pays du Maghreb, que le phénomène semble se ressentir le plus. Un

retour qui, semble t-il, est dû à une structure des énoncés calqués sur le modèle

des langues européennes.

Quoi qu'il en soit, le circonstant formé d'un syntagme nominal, ne sera peut-

être pas détrôné, mais concurrencé, à grande échelle, par le circonstant à

syntagme prépositionnel.

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Étude syntaxique________________________________403

2-2 CAUSE DE VARIATION : LA SUBDUCTION

L'étude du circonstant, révèle l'existence d'un processus de mutation

de certains circonstants sur une diachronie lointaine, entraînant des

transformations au niveau syntaxique, morphologique et sémantique. Le

processus de transformation est connu des linguistes en général et observable

dans plusieurs langues. Il est appelé par l'école guillaumienne : la subduction.

A ce propos, Bernard POTIER explique « qu'au cours de l'histoire d'une

langue, de nombreux mots se grammaticalisent par subduction ou perte de

sèmes spécifiques ».1

Bien qu'il soit connu des linguistes modernes sous une dénomination

d'origine guillaumienne, le phénomène de subduction n'est pas chose ignorée

par les grammairiens arabes anciens. C'est, semble t-il, dans la grammaire

arabe, une constatation très ancienne, mais qui n'avait pas jusque là été érigée

en méthode.2 En effet, cela avait été signalé et décrit partiellement par le

grammairien du 6eme siècle de l'hégire, du nom de as-SUHAYLÎ (m.581 h).3 Ce

grammairien expose le sujet à partir de l'exemple de /'idan/ (alors). Aussi dit

il : « cette particule ('idan) n'est pour moi que /'idàV (lorsque) qui était un

1 Bernard POTTIER, Sémantique générale, p.362 C'est là une preuve que le travail des grammairiens arabes n'est pas définitivement achevé, fl estloin de l'être du fait que beaucoup de constatations, d'ordre linguistique, n'ont pas été érigées enméthode ni soumises à une étude particulière.3 Nous ne possédons pas d'autres références antérieures à as-Suhaylî sur ce sujet. Nous ne savonspas s'il est le premier à en parler.

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Étude syntaxique ________________________________ 404

circonstant destiné au futur [...]. Elle était dénuée de son sens nominal, tout

comme /'id/ (lorsque), le pronom /kaf/ de la deuxième personne du singulier,

ainsi que les pronoms libres dans le chapitre de la séparation. Elles furent

dépourvues du sens du nom et sont devenues des particules n'ayant pas de

place pour les désinences casuelles »l

,"t- 1bi UP • < ~ 3 - 'L* ^ J

*

La description faite par les linguistes modernes et le grammairien as-

SUHAYLÎ semblent s'accorder sur le fait qu'une unité lexicale (lexème) perd de

ce qui fait d'elle un nom pour ne devenir qu'une unité grammaticale

(grammème). Ceci se résume dans l'explication donnée par Michel

CAMPRUBI : « Mais il semble que pour aboutir à une nouvelle unité de fonction

(= préposition) à partir d'un substantif, il faut que celui-ci ait perdu, en partie

au moins, ce qui fait précisément qu'il est un nom ».2

Selon as-SUHAYLÎ, le circonstant de temps et de lieu (zarft /'idâV est concerné

par le phénomène de la subduction. Mais, est-ce l'ensemble des circonstants

qui est exposé au phénomène ou certains d'entre eux ? A quel niveau

1 As-SUHAYLÎ, Natâ'ij l-fikrfin-nafywu, p. 134,2 Michel CAMPRUBI, Les locutions prépositives dans une approche contrastive, p. 189,,

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Étude syntaxique________________________________405

grammatical le phénomène a lieu ? Qu'est ce qui fait que le circonstant est

concerné par la subduction et quelles sont les conséquences réelles d'un tel fait

linguistique ? Ce sont autant de questions auxquelles, nous allons tenter, autant

se faire que peut, d'y répondre.

3.1 Les circonstants exposés à la subduction

Pour être exposé au processus de désémantisation vers une

grammémisation, seul le circonstant impliqué dans une relation d'annexion, en

tant que premier élément de l'annexion, est concerné.

Exemple :

/wa kân-a warâ'-a- hum malik-tm.../lB/79Et il y avait derrière eux un roi. »

verbe circonstant C. de nom sujet1er élément 2*"* élément

Annexion

« II y avait un roi derrière eux. »

Ainsi, la subduction est un changement voire un bouleversement au

niveau syntaxique qui est à l'origine des changements au niveau

morphologique et sémantique. Ce que nous allons tenter de démontrer dans la

présente partie.

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Étude syntaxique________________________________406

3.2 Les causes de la subduction

La subduction touche l'ensemble des circonstants qui, au niveau de la

structure de la phrase, présentent des ressemblances avec la particule

prépositionnelle.1 Parmi ces ressemblances, il y a la position. En effet, le

syntagme prépositionnel est, en quelque sorte, le complément du verbe. Le

syntagme est constitué d'une tête qui est la préposition et d'un nom régi par

celle-ci. Quant au circonstant, il existe une catégorie qui nécessite un

complément de nom. Le circonstant et le complément de nom forment une

annexion dont le circonstant est le premier élément Autrement dit, l'annexion

se présente sous forme de syntagme nominal dont la tête est le circonstant.

Dans le cas, où le syntagme nominal et le syntagme prépositionnel sont

postposés au verbe, le circonstant occupe une place comparable à celle de la

préposition.

Verbe circonstant complément de nom (nom)

Tête

Syntagme nominal

Verbe préposition complément d'objet indirect (nom)

Tête

Syntagme prépositionnel

1 La dissemblance fondamentale entre les parties du discours n'exclut pas des ressemblances quipermettent à un élément d'une catégorie donnée d'avoir dans un emploi donné le comportementdes éléments d'une autre catégorie.Hassan HAMZÉ, Les parties du discours dans la tradition grammaticale arabe, p. 103,

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Étude syntaxique________________________________407

Exemple :

- Circonstant :

llâyakâf-u laday - ya al-mursalûn-a/27/10/II n'ont pas peur auprès de moi les messagers,

circonstant complément de nomSyntagme nominal

« Les messagers n'ont pas peur auprès de moi. »

- Préposition :

/wa ma yugnî can- hu mâl-u-hul 91/11Ne sera pas utile à lui sa richesse.

préposition COI4L______I

Syntagme prépositionnel

« Sa richesse ne lui sera pas utile. »

La ressemblance, dans la construction de phrase, est frappante. La seule

différence est que la tête des deux syntagmes est pour le premier un nom et

pour le deuxième une préposition. La ressemblance est bien plus frappante

lorsque le circonstant est un nom court et figé. C'est là l'une des

caractéristiques fondamentales de la particule en général et la préposition en

particulier.1

Exemple :

1 Hassan HAMZÉ explique que pour les grammairiens arabes : « le changement de la voyelle finalesous l'influence des régissants est le propre d'une partie du discours : le nom.Ainsi, toute unité appartenant à la classe des noms et dont la voyelle finale ne change pas sousl'influence des régissants doit recevoir une justification : c'est sa similarité aux particules »Hassan HAMZÉ, Les parties du discours dans la tradition grammaticale arabe, p. 102 *

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Étude syntaxique________________________________408

/ma ra 'ay-tu- hu mud yawm-i l- 'awwal-il.l

Je n'ai pas revue lui depuis le jour premier

Circonstant complément de nom

Syntagme nominal

« Je ne l'ai pas revue depuis le premier jour »

l'innâ 'anzaln-â- hu fi laylat-i l-gadr-il .91 II~fi~t

Certes, nous avons descendu lui dans la nuit du destin

c.o.d préposition complément d'objet indirect

Syntagme prépositionnel

« Nous l'avons descendu durant la nuit du destin »

II existe une autre ressemblance entre le syntagme nominal sous forme

d'annexion dont la tête est un circonstant et le syntagme prépositionnel. C'est

la rection au génitif du deuxième élément de l'annexion.2 Dans un syntagme

prépositionnel, la préposition, tête du syntagme, régit, au génitif, le nom qui lui

est postposé.

Syntagme nominal :

Annexion

1er élément 2e"16 élément

régi au génitif

1 Exemple emprunté auLisanu l-carab de IbnMANZÛR, 1.13, p. 1922 Selon les analyses grammaticales, le régissant du deuxième élément est soit l'annexion elle-même, soit une préposition ellipsée. Exemple : /laylat-u 1-qadr-i/ = /laylat-u [min] al-qadr-i].

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Étude syntaxique________________________________409

Syntagme prépositionnel :

Préposition nom

Régissant régi au génitif

C'est à partir de ces traits de ressemblance que le processus de

désémantisation va se produire sur un certain nombre d'étapes. D'autre part, il

faut savoir que la subduction du circonstant est précédée d'un certains nombre

de changement au niveau de l'énoncé. En effet, comme le fait remarquer

Jeanne-Marie BARBERIS, dans son étude de linguistique générale sur le

circonstant de lieu, «Le signe formel de ce bouleversement des relations

syntaxiques est la disparition à la fois de la préposition spatiale et de

l'article »! C'est le cas notamment du circonstant de temps et de lieu (^arf)

issue d'un syntagme prépositionnel dont la tête est la préposition /fi/.2 Pour

parvenir au concept de zarf, il a fallu supprimer la préposition (fî). Pour

certains circonstants, le déterminant numéral /al/ n'a plus lieu d'être, du fait

qu'ils sont désormais déterminés annectivement.

Après le passage, d'un syntagme prépositionnel vers un syntagme nominal,

régi directement à l'accusatif par le verbe, il y a la tendance, à un autre

1 Jeanne-Marie BARBERIS, La grammémisation à l'œuvre dans la parole, p. 170-1712 Voir la partie sur l'origine du circonstant, p. 400.D'après Jeanne-Marie BARBERIS, il a été observé qu'un circonstant à sens intrinsèquementlocatif offre la possibilité à son entourage syntaxique de s'alléger de certaines informationslocatives. Cet allégement peut être de deux ordres : soit suppression de la préposition etredistribution des équilibres sémantico-syntaxiques dans le groupe annectif, soit l'emploi d'unepréposition particulièrement pauvre en spécification sémantique de type locatif. P. 165.

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Étude syntaxique________________________________410

passage, de nouveau vers un syntagme prépositionnel ou toutes les données

risquent de changer.

En effet, certains circonstants accompagnés d'un complément de nom risquent

de se voir transformer en relateur. Autrement dit en préposition. Jeanne-Marie

BARBERIS explique : « Dans un contexte suffisamment connu de nombreuses

langues se contentent d'énoncés sans relateurs du type: j'irais brousse; il

marchait montagne. Dans un contexte de familiarité, l'expression est soumise à

un changement dans les équilibres interne du groupe. Le déterminé "la rue

originellement centre du groupe "la rue x" devient thématique par sa

disponibilité et son évidence. Son sens s'allège et devient plus générique.

L'attention se déplace sur le déterminant [annectifj qui apporte l'information

nouvelle. L'élément x se rhématise. »1

Voici l'évolution supposée sur le plan chronologique :

- Point de départ et origine :

Du syntagme prépositionnel temporel et spatial, on passe au syntagme

nominal de temps et de lieu et ce par suppression de la préposition /fi/.

Exemple :

- Syntagme prépositionnel :

l'awtahwî bi-hi r-rfy-u fi makân-i-n saftîq-i-n/22/31

Ou elle souffle avec lui le vent dans un lieu retiré.

Préposition nom de lieu

« Ou que le vent le précipite dans un abîme profond. »

Jeanne-Marie BARBERIS, op. cit., p.170-171.

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Étude syntaxique ________________________________ 41 1

- Syntagme nominal :

rafcfnâ-hu makân-a-n caliyy-a-nl 57/19

Nous avons élevé lui un lieu haut

verbe circonstant épithète

« Nous l'avons élevé en un haut lieu. »

A l'origine, la phrase devait être constitué comme dans l'exemple ci-dessous:

*/vra rafa°nâ-hu fî makân-i-n caliyy-i-nlNous avons élevé lui dans un lieu haut

Verbe préposition nom de lieu épithète

« Nous l'avons élevé dans un haut lieu. »

Aujourd'hui, bien que la structure de la phrase circonstancielle ait été

modifiée en passant du circonstant formé d'un syntagme prépositionnel à un

syntagme nominal, face à un syntagme nominal on suppose le syntagme

prépositionnel constitué de la préposition de localité interne /fî/ (dans).

En principe, pour risquer de passer à l'étape suivante, c'est-à-dire celle

du syntagme nominal, il faut que le nom ait connu le figement total ou partiel.

Ce qui n'est pas encore, tout à fait, le cas pour le nom /makân-a-n/ ni pour un

certain nombre d'autres noms de temps et de lieu.

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r

Etude syntaxique________________________________412

Le figement total signifie que le nom devient absolument indéclinable comme

c'est le cas pour /mundu/ (depuis), /maca/ (avec), etc.1

Le figement partiel signifie que le nom se décline dans certains cas, par

exemple à l'accusatif et au génitif avec une seule préposition /min/ (de). C'est

le cas des noms d'orientations spatiales comme : /bayn-a/ (entre), /fawq-a/

(dessus), /tafrt-a/ (dessous), /'amâm-a/ (devant), /warâ'-a/ (derrière), /hawl-a/

(autour), /"ind-a/(vers), /dûn-a/ (sous).

Lorsque les orientations, en général, et certains noms de lieu

(déictiques, interrogatifs) sont régis à l'accusatif par un verbe, ils font figure de

réceptacle de l'action. En dehors de l'accusatif, les orientations sont régi par la

préposition spatiale dénotant la provenance /min/ (de). Dans ce cas, ces noms

de lieu font figure de point de provenance ou d'origine d'une action.

1 II existe pourtant des circonstants très ressemblant avec la particule, mais qui ne risquent pas lasubduction. Ce sont les circonstants annexés à une phrase notamment à la phrase verbale. C'est lecas de /haytu/ (là où), /'idâ/ (lorsque), /'id/ (lorsque), etc. Le fait est que le principe de lapréposition est de régir un nom, jamais un verbe. Le fait qu'ils s'annexent à un verbe, les préservede la subduction, car l'attention qui se déplace, elle se déplace vers une seule unité simplenominale, non pas vers une phrase (verbale). D'après Hassan HAMZÉ : « un verbe avec sonmorphème de personne qui lui est conjoint, constitue un énoncé complet, une phrase minimale ». Ilajoute : « tout verbe est une phrase » Hassan HAMZÉ La linéarité dans le langage, pp.4 - 5En déplaçant l'attention, le circonstant se grammémise pour devenir une préposition, parce que lecomplément de nom, qui est un nom, lui permet de le régir au génitif.

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Etude syntaxique 413

C'est le cas de :

/fawq-a/ — au-dessus

/warâ'-a/ =derrière

/taht-a/ = dessous

/kalf-a/ = derrière

/°ind-a/ = vers

/dûn-a/ = sous

Aalâ/ = sur

/hunâ/ = ici

/min fawq-i/ de dessus

/min warâ'-i/ de derrière

/min taht-i/ de dessous

/min kalf-i/ de derrière

min cind-i/ de vers

/min dûn-i/ de sous

/min calâ/ de sur

/min hunâ/ d'ici ou de là

/'ayna/ = ou ?

/qabl-a/ = avant

/bacd-a/ = après

Exemples :

Au génitif :

/wa lammâjâ '-a-hum rasûl-u-n

/min 'ayna/ d'où ?

/min qabl-i/ d'avant

/min ba°d-i/ d'après

min cind-i llah-i...l 2/101

vers AllahEt lorsque est venu à eux un messager dePrépo. de lieu nom de lieu(Dénote une origine) (Origine)

« Lorsqu'un messager leur est venu d'auprès de Dieu. »

À l'accusatif :

lia yastaw-ûn-a cind-a Allah-il

Ils ne sont pas égaux vers Allah

Circonstant de lieu(Réceptacle)

« Ils ne sont pas égaux yeux de Allah. »

9/19

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Étude syntaxique_______________________________414

Après une recherche de notre part, dans le Coran, les traditions

prophétiques et la poésie pré-islamique, nous n'avons pu trouver la trace

d'aucune des orientations spatiales introduites par une préposition spatiale

autre que /min/, nous nous sommes posé la question à savoir pourquoi les

orientations et certains autres noms de lieu sont régis au génitif uniquement par

la préposition dénotant une origine ou une provenance /min/ et non pas par une

préposition dénotant l'inverse de /min/ ?

Selon notre hypothèse, ces noms de lieux impliquent, d'une manière ou d'une

autre, la destination. Ce qui fait qu'ils n'ont nul besoin d'être accompagnés par

une préposition de destination ou de direction comme /'ilâ/ (vers). Lorsqu'ils

sont régis à l'accusatif, ils font figure de réceptacle tout en impliquant une

destination. L'emploi d'une préposition de destination serait de trop. Cela

créerait une certaine redondance de sens.

Nom de lieu

(Orientation, déictiques, interrogatif)

Avec /min/ sans préposition

provenance réceptacle - destination

Dans le syntagme nominal, notamment dans une annexion, l'élément

annexé (deuxième élément) se rhématise. C'est-à-dire qu'il devient une

information nouvelle pour le thème. La tendance, explique Jeanne-Marie

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rEtude syntaxique_________________________________415

BARBÉRISSE, est donc à l'inversion des polarités.1 Autrement dit, le premier

élément d'annexion (circonstant) perd son statut au profit du deuxième

élément.

Quant au circonstant, il tend à se rattacher à la valence du verbe en

concurrence avec la liste des prépositions locatives. L'équivalence

paradigmatique : valence prépositionnelle/circonstant, amorce une

identification du praxème dépraxémisé à une unité grammaticale.2

Exemple :

/wajacal-a bayn-a l-bahrayn-i fyâjiz-a-n/ 27/61

circonstant dét. annectif

1er élément 2e"16 élément

Annexion

« II a mis entre les deux mers une séparation. »

Dans l'exemple, ci-dessus, l'attention qui est porté sur le circonstant

/bayn-a/ risque de se déplacer sur le déterminant annectif /al-bahrayn-i/. La

raison en est que le nom de lieu /bayn-a/ essuie la perte d'un ou de plusieurs de

ses sèmes spécifiques dont la circonstance spatiale récupérée par le

complément de nom. Dans le cas de /bayn-a/, les sèmes sont : l'espace,

l'intervalle, la localisation, la circonstance, etc. En se grammémisant, il devient

une préposition qui ne dénote pas de signifié en soi, mais rapporte un signifié à

un autre mot. De plus, la préposition est cette particule qui ne peut pas être une

1 Jeanne-Marie BÂRBÉRIS, op. cit., p. 171,2 Le praxème se définit comme une unité pratique de production de sens dans le lexique. Voir :Jeanne Marie BÂRBÉRIS, op. cit.

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Étude syntaxique________________________________416

information.1 Qu'est-ce qui entraîne la perte de sèmes ? L'explication de

Michel CAMPRUBI sur la mutation d'un substantif en une préposition peut être

la réponse. Aussi dit-il : « Intégré dans une unité supérieure (au sens

structurel), il perd forcément de son identité, le nom a subi une

grammaticaiisation (il fait partie d'une forme purement grammaticale) ».2 La

perte de sèmes spécifiques du lexème, autrement dit la désémantisation du

lexème pour aboutir à une grammémisation en grammème, ajouté aux traits de

ressemblance morphosyntaxiques de la préposition, ne font qu'augmenter la

possibilité de subduction.

Ainsi, on peut comprendre que la préposition est sémantiquement

pauvre par rapport à un nom. Dans l'énoncé, elle apparaît, de ce fait,

sémantiquement, moins saillante. Ce qui signifie que les noms sont

sémantiquement plus saillants.3 Dans le cas où /bayn-a/ a subi la subduction on

/wa jcfal-a bayn-a l-bajtrayn-i }}âjiz-a-nl 27/61

II a mis entre les deux mers une séparation

Verbe circonstant nom au génitif

Syntagme prépositionnel« II a mis une séparation entre les deux mers. »

1 Voir Ibn SARRÂJ, Usûl an-naljwu, t.l, p.36.2 Michel CAMPRUBI, Les locutions prépositives dans une approche contrastive, p. 1893 Quoi qu'il en soit, la primauté sur le plan de la nomination et de la communication revient aunom. Voir à ce propos : Hassan HAMZÉ, Les parties du discours dans la tradition grammaticale,

p. 101»

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Étude syntaxique_________________________________417

Mais qu'en est il donc de /bayn-a/ et de ses congénères ? Pour les

grammairiens arabes anciens, /bayn-a/, ainsi que les noms d'orientations, ce

sont des circonstants à part entière. Autrement dit, ce sont encore des lexèmes.

Par contre, pour certains linguistes et philologues, ces circonstants sont

considérés comme des prépositions.1 Il nous semble pourtant que ces

circonstants sont plus ou moins engagés dans le continuum :

lexème > grammème

ou nom > préposition

II est clair que l'évolution d'une unité engagée dans le continuum

lexème > grammème, n'évolue que très lentement. C'est sur une diachronie,

très lointaine, que l'on peut observer une timide progression. Cela dit, la

grammémisation peut construire des phénomènes locaux et instables, tout

autant qu'aboutir à des ruptures et des changements décisifs, comme c'est le

cas pour Aalâ/ (sur), /mundu/ (depuis), /maca/ (avec), etc. La dépraxémisation

d'un mot peut se faire partiellement.2 On peut rester dans Fentre-deux, dans la

dynamique lexique-grammaire. C'est le cas pour les orientations spatiales.

1 Voir André ROMAN, Grammaire de l'arabe, p. 99 et Henri FLEISCH, Traité de philologie, 1.1,p.465.2 La dépraxémisation repose sur un allégement des spécifications concrètes reliant le praxème à larichesse de l'expérience vécue. Cela non pas au profit de la disparition des traits expérientiels,mais au profit d'un sens référé à des traits stabilisés de l'expérience. Voir : Jeanne-MarieBARBÉRIS, La grammémisation à l'œuvre dans la parole, p. 172 /

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Etude syntaxique____________________________________ 418

3.3 Conséquences de la subduction

Lorsqu'un eirconstant est concerné par la subduction, il entraîne une

mutation dans l'énoncé qui affecte l'ensemble des niveaux grammaticaux. Au

niveau syntaxique, la grammérnisation du eirconstant, tête d'un syntagme

nominal, permet de passer d'un syntagme nominal à un syntagme

prépositionnel.

Dans le cas de /maca/, celui-ci est considéré par un grand nombre de

grammairiens, notamment les anciens, comme un eirconstant de lieu et il est

considéré par d'autres, notamment par les grammairiens modernes comme une

préposition. Aujourd'hui, la majorité des grammairiens l'identifie comme une

préposition. De là, nous constatons que /maca/ est devenu une préposition

après avoir été un eirconstant, donc un nom de lieu. Sur le pîan syntaxique, la

différence est évidente. Sur le plan sémantique, la signification est, à première

vue, identique, car il y a là deux circonstances. Pourtant, dans le cas de /rnaca/

en tant que eirconstant, on insiste sur la notion d'accompagnement et en tant

que préposition, on se tourne vers le nom régi par celle-ci. Ce nom apporte une

information et la préposition seule n'informe sur rien.

Exemples :

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Etude syntaxique__________________________________ 419

- Avant la subduction :

/wa rkcfî maca r-râkfîn-al 3/43

Et incline-toi avec ceux qui s'inclinent

verbe circonstant complément de nomSyntagme nominal

- Après la subduction :

hva rkcfî maca r-râkfîn-al

« Et incline-toi avec ceux qui s'inclinent. »

verbe préposition nom régi au génitif

Syntagme prépositionnel

On passe d'une rection directe de la part du verbe sur son complément à

une rection indirect d'un nouveau complément par le biais de la préposition.

Au niveau sémantique, on passe de la circonstance de temps ou de lieu

exprimant l'intériorité vers une autre circonstance de temps ou de lieu

exprimant différentes notions selon la nouvelle préposition spatiale :

intériorité, déplacement, élévation, extériorité, etc. et temporalité : début, fin,

antériorité, postériorité, etc. L'unité circonstancielle de temps et de lieu

devenue une préposition, gardera des sèmes liés au temps ou à l'espace. Ce

sera une préposition spatiale ou temporelle. La nouvelle préposition exprime le

type de relation existant entre le verbe et le complément d'objet indirect.

Ainsi, le syntagme, dont la tête est une préposition issue de la

subduction d'un circonstant de temps ou de lieu, sera un syntagme

prépositionnel précisant une circonstance temporelle ou spatiale.

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Etude syntaxique 420

Exemples :

-Avant la subduction

/ma ra 'ay-tu-ka

Je ne t'ai pas vu

Verbe

mundu yawm-i l-jumucat-ill

depuis le j our du vendredi

circonstant complément de nom

Circonstant de temps

« Je ne t'ai pas vu depuis du vendredi. »

Après la subduction :

/ma ra 'ay-tu-ka

Verbe

mundu yawm-i l-jumucat-i/préposition temporelle nom de temps

Complément circonstanciel de temps

II est intéressant de remarquer qu'un complément de nom dans un

syntagme nominal circonstanciel de lieu peut désigner toutes les sortes

d'entités possibles : personne, objet, temps, lieu, etc.

Exemple :

Ifawq-a ra's-i- hil 44/48

Dessus de la tête à lui

Tête

« Dessus de sa tête. »

Itaht-a s-sajarat-i! 18/48

« Dessous l'arbre. »Arbre

1 Exemple emprunté du Jâmf d-durûs l-carabiyya, Mustapha al-GALAYiNi, t.3, p. 187»

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Etude syntaxique__________________________________ 421

Lorsque le syntagrne nominal circonstanciel de lieu se transforme, par

subduction en syntagme prépositionnel, le nom régi par la préposition sera de

nature sémantique différente.

Exemple :

/ 'idyubâyicûn-a-ka taht-a s-sajarat-ilLorsqu'ils ont prêté allégeance à toi dessous l'arbre.

Circonstant complément de nom

Syntagme nominal

« Lorsqu'ils t'ont prêté allégeance sous l'arbre. »

/ 'id yubâyiûn-a-ka tafat-a s-sajarat-ilpréposition Complément d'objet indirect

Syntagme prépositionnel

Ce qui n'est pas le cas pour un cireonstant de temps qui, à chaque fois, est un

complément de nom lié au temps. Ce peut être un nom de temps, un fait ou

d'événement.

Exemple :

IQifâ nabk-îmin dikrâ habîb-i-n wa cirfân-i

wa rabc-i-n °afat âtâr-u-hu mundu 'azmân-i/2

préposition nom de temps

complément de temps

« Arrêtons-nous et pleurons au souvenir de l'aimée

et du campement dont les traces se sont effacées depuis des temps. »

• Umru 1-QAYS (m. 540), Sarlf al-Mucallaqât as-sabc, p.4.

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Etude syntaxique__________________________________ 422

Après subduction, le syntagme prépositionnel est composé d'une

préposition temporelle et d'un nom de temps. Tout le syntagme est lié au

temps.

Au niveau morphologique, après subduction, on passe d'un nom de temps ou

de lieu à une préposition temporelle ou spatiale. Autrement dit, c'est le passage

d'une classe du discours à une autre classe du discours. On passe du nom à la

particule. Morphosyntaxiquement, il peut y avoir un changement au niveau de

la déclinaison. Cela concerne les unités qui sont partiellement déclinables soit

à l'accusatif soit au génitif par la préposition /min/ et qui risquent la

subduction. En passant dans la classe des particules, le figement devient

complet et définitif, car l'unité concernée n'est plus introduite par une

préposition. Nous avons le cas de certaines unités considérées, aujourd'hui,

comme des prépositions à part entière, alors que dans un passé lointain, elles

étaient des noms introduits par une préposition spatiale. C'est le cas

notamment de AalâV (sur).

Exemple :

Igada-t min calay-hi bcfd-amâtammazim'-u-hâl*Elle se présenta de sur lui après que sa soif soit terminée

prépo.____Nom de lieu

Syntagme prépositionnel

« Elle se présenta de sur lui après que sa soif soit terminée. »

3Cet hémistiche, emprunté au Lisan al-carab, est de Yazîd bn at-TATARiYA, Lisan al-carab, t. 9,p.381.

Page 154: IVtheses.univ-lyon2.fr/documents/lyon2/2005/moussaoui_m/pdfAmont/... · Étude syntaxique_____268 /fa hamalat-hu fa intabadat bihi makân-a-n qasiyy-a-nl 19/22 Mot de tête qualificatif

Etude syntaxique__________________________________ 423

Au cours du temps, /°alâ/ a fini par ne plus être introduite par une

préposition, c'est là un signe précurseur de la subduction et du passage de la

classe du nom à celle de la préposition.

/alâ/ a la faculté d'être introduite par différentes prépositions de lieu. C'est le

cas de la préposition de provenance /min/ et celle qui a disparue bien avant

/min/, la préposition d'intériorité /fi/ (dans). La disparition de la préposition

d'intériorité /fi/ a contribué à la fin d'un syntagme prépositionnel pour donner

naissance à un syntagme nominal circonstanciel et la disparition d'autres

prépositions comme celle de provenance a contribué à la fin d'un syntagme

nominal circonstanciel et la naissance d'un syntagme prépositionnel constitué

d'une nouvelle préposition.

Bref, la subduction permet de rendre compte de l'instabilité de la

langue, notamment au niveau du complément verbal. En effet, le cas du

circonstant permet de constater que sur une diaehronie lointaine, la structure

du complément circonstanciel de temps et de lieu est passée du syntagme

prépositionnel vers un syntagme nominal qui est le circonstant régi

directement par le verbe à l'accusatif. Ensuite, certains de ces syntagmes

nominaux se transforment en syntagme prépositionnel. Une transformation

entraînée par la mutation du circonstant en préposition. Bien entendu, le

phénomène n'a touché qu'un petit nombre de circonstants. Dans un avenir plus

ou moins proche, d'autres circonstants rejoindront la liste des mutants.