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La Revue de médecine interne 34 (2013) 57–60 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Cas clinique des Printemps de la Medecine interne Un diagnostic qui aura pris du temps A retroperitoneal fibrosis in a 38-year-old Egyptian man A. Danu a , L. Chalumeau b , V. Ribrag b , S. de Botton a , S. Said Mahmmod a , F. Blot b , D. Ghez a,, N. Chalumeau c , B. Bienvenu d a Service d’hématologie, institut Gustave-Roussy, 39, rue Camille-Desmoulins, 94805 Villejuif cedex, France b Service de réanimation, institut Gustave-Roussy, 39, rue Camille-Desmoulins, 94805 Villejuif cedex, France c Service de médecine interne 2, CHU Pitié-Salpêtrière, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris cedex 13, France d Service de médecine interne, CHU de Caen, avenue de la Côte-de-Nacre, 14033 Caen cedex 9, France i n f o a r t i c l e Historique de l’article : Disponible sur Internet le 8 ecembre 2012 Mots clés : Syndrome des antiphospholipides Fibrose rétropéritonéale Keywords: Antiphospholipid syndrome Retroperitoneal fibrosis 1. Observation Un homme, âgé de 38 ans, égyptien, était adressé pour avis diag- nostique sur une fibrose rétropéritonéale. Dans ses antécédents, on notait un infarctus du myocarde en 2004, une hypertension arté- rielle et des migraines occasionnelles qui semblaient avoir disparu depuis le traitement par aspirine. Son père était décédé d’un infarc- tus à l’âge de 40 ans. Il était traité par simvastatine, aspirine et bisoprolol. En juillet 2011, il avait eu une thrombose veineuse profonde du membre inférieur gauche traitée par warfarine. Deux semaines plus tard, il présentait des douleurs du flanc droit et des nau- sées, avec fièvre associées à un amaigrissement de 9 kg. Le scanner abdominal montrait une infiltration périrénale bilatérale, descen- dant autour des gros vaisseaux, notamment de la veine iliaque gauche, évocateur de fibrose rétropéritonéale et pouvant expli- quer la thrombose récente (Fig. 1). On notait des adénopathies sus- et sous-diaphragmatiques centimétriques, hypermétaboliques au TEP-scan (SUV max entre 3,7 et 7,1). Une biopsie écho-guidée confirmait la fibrose diffuse, associée à un infiltrat lymphoplasmo- cytaire modéré. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (D. Ghez). Le patient était alors adressé en France pour suspicion d’hémopathie lymphoïde. En dehors d’une asthénie et d’une fébricule intermittente, il ne se plaignait d’aucun symptôme précis. L’examen clinique était considéré comme normal. Le bilan biologique retrouvait une anémie microcytaire inflamma- toire (CRP : 104 mg/L, hyper-2-globulinémie à 12,7 g/L, hyper- gammaglobulinémie polyclonale à 18 g/L). Le bilan hépatique et la fonction rénale étaient normaux. Les recherches d’ANCA, d’anticorps antinucléaires, d’anti-ADN natifs, d’anti-antigènes solubles (ECT), de facteur rhumatoïde étaient négatives. Il n’y avait pas de cryoglobulinémie et le complément était normal. Des clichés osseux (bassin, fémurs) ne montraient pas d’anomalie. Après le relais de la warfarine par de l’héparine non fractionnée, une nouvelle biopsie sous scanner était réalisée le 6 septembre. Le jour de la biopsie, le patient était hospitalisé pour dyspnée, douleur du flanc droit, vomissements et fièvre. L’auscultation pulmonaire retrouvait quelques crépitants des deux bases, un abdomen sen- sible à la palpation, sans contracture, sans organomégalie. On notait au niveau cutané quelques macules d’aspect fripé existant depuis plus de dix ans d’après le patient. La biologie montrait un syndrome inflammatoire (CRP : 304 mg/L). L’hémogramme était inchangé, la ferritine à 470 ng/mL, les LDH à 192 UI/L, la créati- ninémie à 120 mol/L, un syndrome néphrotique pur avec une hypo-albuminémie à 20 g/L et une protéinurie à 3,2 g/24 h. Le bilan cardiologique éliminait un syndrome coronaire aigu. Le scanner thoracique ne retrouvait pas d’élément en faveur 0248-8663/$ see front matter © 2012 Publié par Elsevier Masson SAS pour la Société nationale française de médecine interne (SNFMI). http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2012.07.002

Un diagnostic qui aura pris du temps

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La Revue de médecine interne 34 (2013) 57–60

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

as clinique des Printemps de la Medecine interne

n diagnostic qui aura pris du temps

retroperitoneal fibrosis in a 38-year-old Egyptian man

. Danua, L. Chalumeaub, V. Ribragb, S. de Bottona, S. Said Mahmmoda, F. Blotb,

. Gheza,∗, N. Chalumeauc, B. Bienvenud

Service d’hématologie, institut Gustave-Roussy, 39, rue Camille-Desmoulins, 94805 Villejuif cedex, FranceService de réanimation, institut Gustave-Roussy, 39, rue Camille-Desmoulins, 94805 Villejuif cedex, FranceService de médecine interne 2, CHU Pitié-Salpêtrière, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris cedex 13, FranceService de médecine interne, CHU de Caen, avenue de la Côte-de-Nacre, 14033 Caen cedex 9, France

n f o a r t i c l e

istorique de l’article :isponible sur Internet le 8 decembre 2012

ots clés :

yndrome des antiphospholipidesibrose rétropéritonéale

eywords:ntiphospholipid syndrome

etroperitoneal fibrosis

. Observation

Un homme, âgé de 38 ans, égyptien, était adressé pour avis diag-ostique sur une fibrose rétropéritonéale. Dans ses antécédents, onotait un infarctus du myocarde en 2004, une hypertension arté-ielle et des migraines occasionnelles qui semblaient avoir disparuepuis le traitement par aspirine. Son père était décédé d’un infarc-us à l’âge de 40 ans. Il était traité par simvastatine, aspirine etisoprolol.

En juillet 2011, il avait eu une thrombose veineuse profondeu membre inférieur gauche traitée par warfarine. Deux semaineslus tard, il présentait des douleurs du flanc droit et des nau-ées, avec fièvre associées à un amaigrissement de 9 kg. Le scannerbdominal montrait une infiltration périrénale bilatérale, descen-ant autour des gros vaisseaux, notamment de la veine iliaqueauche, évocateur de fibrose rétropéritonéale et pouvant expli-uer la thrombose récente (Fig. 1). On notait des adénopathies sus-t sous-diaphragmatiques centimétriques, hypermétaboliques au

EP-scan (SUV max entre 3,7 et 7,1). Une biopsie écho-guidéeonfirmait la fibrose diffuse, associée à un infiltrat lymphoplasmo-ytaire modéré.

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (D. Ghez).

248-8663/$ – see front matter © 2012 Publié par Elsevier Masson SAS pour la Société nattp://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2012.07.002

Le patient était alors adressé en France pour suspiciond’hémopathie lymphoïde. En dehors d’une asthénie et d’unefébricule intermittente, il ne se plaignait d’aucun symptômeprécis. L’examen clinique était considéré comme normal. Lebilan biologique retrouvait une anémie microcytaire inflamma-toire (CRP : 104 mg/L, hyper-�2-globulinémie à 12,7 g/L, hyper-gammaglobulinémie polyclonale à 18 g/L). Le bilan hépatiqueet la fonction rénale étaient normaux. Les recherches d’ANCA,d’anticorps antinucléaires, d’anti-ADN natifs, d’anti-antigènessolubles (ECT), de facteur rhumatoïde étaient négatives. Il n’y avaitpas de cryoglobulinémie et le complément était normal. Des clichésosseux (bassin, fémurs) ne montraient pas d’anomalie.

Après le relais de la warfarine par de l’héparine non fractionnée,une nouvelle biopsie sous scanner était réalisée le 6 septembre. Lejour de la biopsie, le patient était hospitalisé pour dyspnée, douleurdu flanc droit, vomissements et fièvre. L’auscultation pulmonaireretrouvait quelques crépitants des deux bases, un abdomen sen-sible à la palpation, sans contracture, sans organomégalie. Onnotait au niveau cutané quelques macules d’aspect fripé existantdepuis plus de dix ans d’après le patient. La biologie montrait unsyndrome inflammatoire (CRP : 304 mg/L). L’hémogramme étaitinchangé, la ferritine à 470 ng/mL, les LDH à 192 UI/L, la créati-

ninémie à 120 �mol/L, un syndrome néphrotique pur avec unehypo-albuminémie à 20 g/L et une protéinurie à 3,2 g/24 h.

Le bilan cardiologique éliminait un syndrome coronaire aigu.Le scanner thoracique ne retrouvait pas d’élément en faveur

tionale française de médecine interne (SNFMI).

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ig. 1. A, B. Scanner abdominal coupe transverse (A), frontale (B) : infiltration périré-ale bilatérale, descendant autour des gros vaisseaux, notamment de la veine iliaqueauche, en rapport avec une fibrose rétropéritonéale.

’une embolie pulmonaire mais des plages en verre dépoli et uneajoration de la taille des adénopathies médiastinales. Le lavage

ronchoalvéolaire (LBA) était compatible avec une hémorragielvéolaire (sidérophages : 80 %, polynucléaires neutrophiles : 18 %).es prélèvements microbiologiques étaient négatifs. L’état générale dégradait en quelques jours, nécessitant un transfert en réani-ation avec intubation pour un syndrome de détresse respiratoire

iguë (SDRA) associé à une défaillance multiviscérale avec insuf-sance rénale aiguë, insuffisance surrénale, cytolyse hépatique ethrombopénie.

Un examen permettait de faire le diagnostic. Lequel ?

. Démarche diagnostique de l’expert

B. Bienvenu. Service de médecine interne, CHU de Caen.L’histoire clinique débutait lors du diagnostic d’une throm-

ose veineuse profonde alors qu’il avait déjà eu un infarctus duyocarde vers l’âge de 31 ans. On ne nous donnait pas de ren-

eignement sur la prise en charge de cet accident coronarien trèsrécoce ni à propos des facteurs de risque cardiovasculaires si ce’est l’existence d’une hypertension artérielle, dont la cause n’étaitas précisée, et d’un antécédent d’infarctus chez le père, décédé à

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40 ans. La consommation tabagique, éthylique, la prise de toxiquesn’étaient pas détaillées. Il ne semblait pas y avoir eu d’événementclinique marquant en dehors d’une symptomatologie migraineuseréputée améliorée par la prise d’aspirine. Les manifestations cli-niques semblaient se précipiter au décours de cette thromboseveineuse profonde du membre inférieur gauche traitée par war-farine. Outre une fibrose rétropéritonéale, on décrivait l’existenced’une insuffisance rénale modérée, a priori non obstructive, avec unsyndrome néphrotique et un syndrome inflammatoire biologique.L’état clinique se dégradait au plan respiratoire, avec un syndromeinfiltratif pulmonaire et une hémorragie intra-alvéolaire, puis avecune défaillance multiviscérale.

Les auteurs nous invitent à raisonner devant la fibrose rétropé-ritonéale découverte au scanner. Celle-ci avait des caractéristiquesassez atypiques et se présentait plus comme un infiltrat périrénal,associée à des adénopathies sus- et sous-diaphragmatiques trèshypermétaboliques au TEP-scan. En revanche, l’activité métabo-lique de la fibrose n’était pas assez détaillée pour l’intégrer dans lesyndrome inflammatoire actuel. La richesse de la symptomatologieorientait notre démarche vers la recherche de causes secondairesde fibrose rétropéritonéale [1] :

• les médicaments : les dérivés de l’ergot de seigle, le méthyser-gide, largement utilisé dans le passé dans le traitement préventifdes migraines, ne semble pas avoir été rec u par le patient, la bro-mocriptine, la méthyldopa, les analgésiques dont l’aspirine et leparacétamol et les bêtabloquants ;

• les causes tumorales, au premier rang desquelles les lymphomesmalins hodgkiniens et non hodgkiniens, les tumeurs carcinoïdes,les sarcomes, les carcinomes du côlon, de la prostate, de l’estomac.Une recherche extensive de ces causes était en cours au momentde la description du cas mais on ne dispose que des résultats d’unebiopsie à l’aiguille, sous échographie, ne montrant qu’un infil-trat lymphoplasmocytaire au sein d’un tissu fibreux, sans signede malignité donc. Les auteurs ne nous informent pas des suitesdu geste biopsique prévu le 6 septembre, deux mois après lespremiers signes cliniques ;

• les causes infectieuses, au premier rang desquelles sont repré-sentées tuberculose, histoplasmose, actinomycose. Les seulesdonnées microbiologiques à notre disposition concernent un LBAet sont négatives. Nous ne disposons pas cependant des cli-chés thoraciques qui montrent une « majoration du volume desadénopathies » et existe-t-il des anomalies parenchymateusesassociées ?

• les causes postradiques et postchirurgicales semblent écartées.Elles concernent les irradiations abdominales pour des sémi-nomes testiculaires, des tumeurs du côlon, du pancréas. Les acteschirurgicaux à l’origine de fibrose sont quant à eux plutôt descurages ganglionnaires, colectomie ou les chirurgies d’anévrismeaortique ;

• enfin des causes plus rares comprennent l’amylose AA, mais lepatient ne semblait pas avoir d’affection inflammatoire chro-nique, la recherche de dépôt n’était pas précisée. On rapporte toutaussi rarement des traumatismes, des suites de lavement baryté,les affections fibro-sclérosantes associées aux IgG4, différentesformes d’histiocytoses en particulier la maladie d’Erdheim-Chester. Dans le cas présent, alors que l’aspect de la fibrose semblechevelu, très évocateur de ce dernier diagnostic qui est écarté pardes clichés de bassin et fémurs qui sont normaux.

Au terme du balayage de ces grands cadres nosologiques, ilest donc important d’intégrer d’autres éléments de la présenta-

tion clinico-biologique pour poursuivre notre raisonnement. Laprésence d’un syndrome néphrotique est le premier point de dis-cussion. Son caractère « pur » est d’ailleurs discutable compte tenude l’insuffisance rénale d’apparition récente. Il ne semble pas

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A. Danu et al. / La Revue de m

’associer à une connectivite ou une vascularite, les anticorps anti-ucléaires, ANCA, facteurs rhumatoïdes, la cryoglobulinémie et leosage du complément sont en effet normaux ou négatifs. La glo-érulonéphrite extramembraneuse représente la néphropathie la

lus fréquente en cas de syndrome néphrotique, certes le plus sou-ent primitive, mais pouvant être paranéoplasique, associée à unenfection chronique ou médicamenteuse [2]. Parmi les infections,n cite la tuberculose, la syphilis, les infections virales VIH, HBV,CV. En prenant le parti de lister les fibroses rétropéritonéales asso-iées à des néphropathies, on note plus fréquemment des néphritesnterstitielles comme dans les affections associées aux IgG4 [3]. Larésence d’adénopathies profondes, l’hyper-gammaglobulinémie,ont compatibles avec ce diagnostic. Seule l’existence d’une hémor-agie intra-alvéolaire n’a jamais été décrite mais a pu être favoriséear le traitement anticoagulant ; en revanche l’absence d’atteinteancréatique ne nous aide pas à être uniciste. Dans cette obser-ation, les causes médicamenteuses ne peuvent probablement pastre retenues car le traitement comprenant une statine, un bêtablo-uant et de l’aspirine semble bien antérieur à la symptomatologieiguë.

L’hémorragie intra-alvéolaire fait discuter l’association à uneathologie infiltrative parenchymateuse. Celle-ci n’a peut-êtreas eu le temps d’être documentée et la formule du LBA esteu informative, sans élément pathogène, cellules lymphoïdesu suspectes. Il est peu vraisemblable qu’un syndrome de Good-asture soit à l’origine de cette complication car il s’agit quasi’une atteinte pneumorénale isolée. Le syndrome néphrotiquearaît peu compatible avec un diagnostic de micropolyangéitevec granulomatose (anciennement maladie de Wegener). Cetteascularite systémique peut cependant s’associer à une fibroseétropéritonéale.

Le titre « un diagnostic qui a pris du temps » peut se réfé-er à l’évolution d’une affection chronique s’étant « acutisée » enuillet 2011. Les éléments « les plus anciens » de cette observa-ion sont des lésions dermatologiques fripées, connues depuis pluse dix ans. Une recherche à partir de ce qualificatif nous faitvoquer une anétodermie. Il s’agit d’une perte localisée du tissulastique. Elle peut être primitive, en l’absence de lésions der-atologiques antérieures, comme dans le lupus systémique, le

yndrome des antiphospholipides (SAPL), l’infection par le VIHu les endocrinopathies. Le diagnostic de lésions secondairesepose sur l’histoire de lésions et de biopsies antérieures : mas-ocytose, infections (syphilis, lèpre, maladie de Lyme, tuberculose)4,5].

Le diagnostic le plus vraisemblable est un SAPL, catastrophiquen l’occurrence. Il pourrait expliquer l’infarctus myocardiqueeune, l’hémorragie intra-alvéolaire, l’anétodermie, la néphropa-hie, mais l’association à une fibrose rétropéritonéale n’a étéapportée que dans deux cas cliniques dans la littérature [6]. Est-lle liée à l’existence d’une nécrose extensive des surrénales, lesdénopathies sont-elles réactionnelles ? La détection d’anticorpsntiphospholipides correspondrait à l’examen unique demandé pares auteurs et posant le diagnostic. Mais ces auto-anticorps sontugmentés dans de nombreuses autres circonstances : tuberculose,ésions endothéliales disséminées. Une tuberculose reste donc uniagnostic à écarter impérativement.

. Démarche diagnostique des auteurs

Le tableau initial est donc celui d’une fibrose rétropérito-éale avec fièvre et syndrome inflammatoire. L’hypothèse d’un

ymphome a été la première évoquée mais la petite taille desdénopathies était peu en faveur et éliminée par deux biop-ies successives. La topographie périrénale de la fibrose évoquaitne maladie d’Erdheim-Chester. Cependant, il n’existait aucune

ne interne 34 (2013) 57–60 59

autre atteinte classiquement associée à cette maladie, notammentosseuse ou hypophysaire et les biopsies n’étaient pas en faveur.Les maladies systémiques et vascularites ont été rapidement écar-tées par la négativité du bilan auto-immun et l’absence initialed’atteinte systémique. Il n’y avait pas d’éléments en faveur d’unetuberculose (absence de granulome sur la biopsie, Quantiféron®

négatif, absence de BAAR à l’examen direct de l’aspiration bron-chique et de la biopsie abdominale). Une bilharziose avait aussi étééliminée par la négativité de la sérologie et de l’imagerie (absencede calcifications des voies urinaires, pas de sténose urétérale).Les bêtabloquants peuvent être responsables de fibrose mais laprésence d’un syndrome inflammatoire n’était pas en faveur. Enl’absence d’étiologie retrouvée, le diagnostic initialement retenua donc été celui de fibrose rétropéritonéale idiopathique. Dansun second temps apparaissaient des atteintes viscérales multiplesavec hémorragie intra-alvéolaire, syndrome néphrotique, ischémiemyocardique, insuffisance surrénale aiguë et présence de quelquesschizocytes. Les anticorps antiphospholipides étaient alors positifsavec des anticardiolipines à 1100 UGPL et anti-�2GP1 à 365 U/mL.Le diagnostic retenu était celui de syndrome catastrophiquedes antiphospholipides. Le traitement a comporté des bolus deméthylprednisolone 1 g/j × 3 j, immunoglobulines intraveineuses(IgIV), aspirine et anticoagulation efficace avec une évolutiontrès rapidement favorable permettant une sortie du serviceréanimation [7].

4. Discussion

L’élément particulièrement trompeur de ce cas est la pré-sentation initiale par une fibrose rétropéritonéale apparemmentisolée. En effet, le SAPL n’est pas une étiologie classique defibrose rétropéritonéale puisque un seul cas de SAPL associé à unepéri-aortite chronique a été rapporté dans la littérature médicale[6–10]. Comment expliquer la fibrose dans ce contexte ? Unehypothèse serait que la fibrose pouvait être liée à des saignementschroniques surrénaliens par l’atteinte vasculaire des SAPL. Larelecture des différents scanners retrouvait, a posteriori, un trèsprobable hématome de la surrénale droite. Enfin, la relecturede la deuxième biopsie de la masse rétropéritonéale retrouvaitd’importants dépôts d’hémosidérine.

L’anamnèse retrouvait des éléments permettant de dire que leSAPL avait débuté dix ans auparavant. La disparition des migrainesaprès mise en route d’un traitement par aspirine était évocatrice.Surtout, les lésions cutanées que présentait le patient depuis dixans correspondaient à une anétodermie, lésion rare classiquementassociée aux SAPL [11].

Déclaration d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en rela-tion avec cet article.

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