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Un long chemin avec les femmes Un long chemin avec les femmes L’expérience d’un projet avec les groupements féminins de Kayes-Nord (Mali)

Un long chemin avec les femmestravail de base avec les femmes rurales de trois villages, s’est étendue sur plus de 12 ans grâce à la volonté et à la ténacité d’une femme,

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Page 1: Un long chemin avec les femmestravail de base avec les femmes rurales de trois villages, s’est étendue sur plus de 12 ans grâce à la volonté et à la ténacité d’une femme,

Un long chemin avec les femmesUn long chemin avec les femmes

L’expérience d’un projet avec les groupements féminins

de Kayes-Nord (Mali)

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Tous droits réservés. Aucune partie de cette publication ne peut être reproduite, mise enmémoire dans un système de recherche documentaire ni transmise sous quelque formeou par quelque procédé que ce soit: électronique, mécanique, par photocopie ou autre,sans autorisation préalable du détenteur des droits d’auteur. Toute demande d’autorisationdevra être adressée au Directeur de la Division de l’information, Organisation des NationsUnies pour l’alimentation et l’agriculture, Viale delle Terme di Caracalla, 00100 Rome,Italie, et comporter des indications précises relatives à l’objet et à l’étendue de lareproduction.

© FAO 1999

Les appellations employées dans cette publication et la présentation des donnéesqui y figurent n’impliquent de la part de l’Organisation des Nations Unies pourl’alimentation et l’agriculture aucune prise de position quant au statut juridiquedes pays, territoires, villes ou zones, ou de leurs autorités, ni quant au tracé deleurs frontières ou limites.

Réunion avec le comité d’animation et l’animatrice du groupement de Wologuela en présence de Mme Diarra, Directricedu projet.

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TTable des matièrable des matièr esesUN PROJET? QUN PROJET? Q UEL PROJET?UEL PROJET?..................................................................... . 2

Volet «animation féminine» ou projet avec les femmes? .......... 2Phases et évolution du projet ....................................................... 3Appui donné au projet ..................................................................... 5

UNE DÉMARCHE PUNE DÉMARCHE PARAR TICIPTICIPAATIVETIVE ............................................................ 9Association de tous les acteurs .......................................................... 9Initiatives des femmes ............................................................................. 11

les groupements féminins ..................................................................................... 11les groupes d’intérêt économique ...................................................................... 12les animatrices rurales ........................................................................................... 13les associations ......................................................................................................... 14l’Union des groupements féminins de Kayes-Nord .................................... 14

Suivi-évaluation: un regard critique .................................................... 14

VV ISION GLISION GLOBOBALE DES RÉALISAALE DES RÉALISATIONSTIONS ........................................... 16

Espace économique et social ................................................................. 16Pouvoir économique ................................................................................... . 20 Formation ....................................................................................................... 22Organisation ................................................................................................. 22 Ouverture sur l’extérieur ......................................................................... 22

LEÇONS À RETENIR LEÇONS À RETENIR .............................................................................................. 26

Bibliographie .................................................................................................. 32

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“Personne à l’époque n’intervenait dans la zone: 300 villages plus les hameaux pour environ 200 000 habitants. Compte tenudesmoyens, j’ai pris trois villages pilotes, dans lesquels j’ai concentrémesactivités. Ce n’était pas facile, les paysannesn’avaient pas confiance, elles avaient peur. Au début elles jetaient tout par terre et s’échappaient...

J’ai commencé à connaître les lieux, les habitudes, les moeurs, les tabous, le travail, grâce à tous les renseignements que jepouvaisrécolterpendant les journées que je passais avec elles (....) Causer, écouter, travailler, et en même temps les aider àenleverlesmauvaisesherbes (....)

Information qui va et vient ; moi, je les informe que je suis leur animatrice, que je suis là pour les aider à améliorer leur vie (...)J’avais des questionnaires pour recueillir des données sur les conditions de vie et de santé des femmes. Je voyais commentc’était, l’alimentation (...) Il y a des données qu’on peut récolter seulement avec l’observation de la vie dans les villages. Je devaistoujours passer par les responsables, les chefs, les conseillers pour avoir la permission de rencontrer les femmes. Et s’ils me

UN PROJET? QUN PROJET? Q UEL PROJET?UEL PROJET?Cette publication se propose de tracer l’évolution du Projet d’assistance aux groupements féminins de la zone enca-drée de Kayes-Nord, depuis son démarrage, en 1986, jusqu’à son échéance, en 1998. L’intervention, partie d’untravail de base avec les femmes rurales de trois villages, s’est étendue sur plus de 12 ans grâce à la volonté et àla ténacité d’une femme, Mme Diarra (voir encadré), et au soutien du gouvernement belge et de la FAO, arri-vant à couvrir 66 des 300 villages de la zone pastorale de Kayes-Nord. Ce projet s’inscrit dans le cadre duProgramme de coopération FAO/Gouvernements (GCP/MLI/017/BEL).

Dans ces villages et dans toute la zone, une des plus enclavées du pays, le projet est parvenu à briser l’iso-lement des femmes et à réduire leur marginalisation. La mise en marche d’activités socio-économiques a jetéles bases d’un nouveau statut et d’une nouvelle reconnaissance des femmes, ainsi que d’une participationaccrue à la vie des villages et de la société en général, sans pour autant séparer le développement des femmesde celui des hommes et de la communauté.

A cause du manque de données relatives aux différentes étapes du projet, les résultats et l’impact desactions au fil du temps n’apparaissent que partiellement en termes quantitatifs et de manière systématique. Parcontre, ces résultats sont évidents sur le terrain si l’on visite les jardins potagers et les ateliers et si l’on prend letemps d’écouter les femmes raconter les différences entre le passé et le présent: la qualité de la vie, la percep-tion de leurs rôles social et économique.

En outre, cette publication illustre la démarche adoptée pour travailler avec les femmes dans différentsdomaines tels que la mobilisation de leurs capacités d’organisation, le renforcement de leur rôle social, le déve-loppement d’initiatives économiques et la mise en relation avec les autres acteurs du développement.

Elle cherche aussi à relever les forces et les faiblesses de l’intervention, au regard des conditions structurel-les de la zone qui ont représenté un défi constant - aléas climatiques, enclavement extrême, famines, exoderural, troubles politiques, manque de perspectives économiques. Enfin, l’un des objectifs de cette publicationest de mettre en lumière toute la richesse et le caractère novateur de cette expérience afin qu’elle puisse servirde référence pour de nouvelles actions avec les femmes rurales.

Volet «animation féminine» ou projet avec les femmes?Le Projet d’assistance aux groupements féminins de la zone encadrée de Kayes-Nord trouve son origine dans le Projetde développement de l’élevage au Sahel Occidental (PRODESO) qui, au lendemain de la grande sécheresse desannées 70, visait la re-dynamisation de l’agriculture et le développement de l’élevage dans trois aires d’inter-vention: “Kayes-Nord“/Région de Kayes, “Nara-Est“/Sokolo/Région de Ségou et “Dilly“/Région deKoulikoro.

Le projet PRODESO avait été conçu avant tout pour une population d’éleveurs transhumants, mais uneétude plus approfondie fit rapidement apparaître la nécessité de tenir également compte de la populationagricole importante vivant dans la zone. De plus, la dégradation des conditions climatiques, de l’environne-ment et du marché du bétail avaient accéléré une évolution des modes de vie et de production vers la séden-

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tarisation et l’intensification des activitésagricoles. Ces facteurs, conjugués à l’exoderural des hommes, mirent en relief l’impor-tance croissante du rôle des femmes dans lavie productive et économique.

Suite à cette constatation, le projet dedéveloppement de l’élevage décida alors decréer un «Volet animation féminine», sousla direction d’une animatrice, dans chacunedes trois zones pastorales. Cette interven-tion encouragea la création de groupementsféminins et renforça les tons villageois(organisations traditionnelles) et les comitésd’éleveurs.

Vu les résultats satisfaisants obtenus parles activités d’animation féminine dans lazone de Kayes-nord durant la période 1981-1985, le volet a été érigé en projet - sous latutelle du PRODESO - et mis en oeuvredans le cadre du programme de relèvementde l’agriculture en Afrique (PRAA).

Phases et évolution du projetLa première phase (1986-1988) du projet “Assistance aux groupements féminins de la zone encadrée de Kayes-Nord“, signée parle Gouvernement malien et la FAO en janvier 1986, a été financée par la Belgique. Elle visait notamment à introduire et àintensifier les cultures maraîchères et vivrières dans les villages en se basant sur les acquis du Volet «animation féminine»du projet d’élevage (PRODESO). L’équipe du projet était composée d’une coordinatrice, chargée de la gestion et del’animation, et des encadreurs du projet d’élevage, responsables du suivi technique des activités des groupes dans lesvillages-base (villages pilotes).

Au départ, de grosses difficultés ont été rencontrées pour gagner la confiance des femmes et des hommes; aussi lespremières années du projet ont-elles été consacrées en bonne partie à jeter les bases d’une organisation qui incite d’abordles femmes et ensuite l’ensemble de la population villageoise, à s’impliquer dans l’analyse des problèmes et l’identifica-tion d’actions concrètes. La mission d’évaluation tripartite (décembre 1988) a recommandé la poursuite du projet dans ledomaine de la formation, de l’appui technique aux groupements, ainsi que de l’approvisionnement en équipements et ensemences.

Une seconde phase (1989-1993) a donc été signée en juin 1989, une nouvelle fois sous financement de la Belgique, la FAOétant l’organisme d’exécution. Les objectifs de cette phase étaient similaires: animation féminine, amélioration des condi-tions de vie des femmes et des familles rurales en intensifiant la production agricole (maraîchage et arboriculture fruitière),

laissaient me réunir avec les femmes, les hommes étaient là. Je suis patiente, il faut de la patience. On parlait de beaucoup de choses.LePRODESOm’avait donné le mandat de travailler dans le domaine de l’élevage. Les femmes ont dit: “nous, on a d’autres problèmes; nos

besoins réels sont la santé, la nutrition, les semences, les maladies (le ver de Guinée, la rougeole, les mauvais accouchements), etc.”La première activité fut de trouver les semences pour les parcelles individuelles des femmes... J’étais seule, je n’avais aucune idée, j’ai

demandé conseil au projet d’élevage et on a envoyé quelqu’un pour m’apprendre à semer. Tomates, niébé, gombo, choux, salades... les gensse déplaçaient pour voir l’abondance. La deuxième année, on a reçu la demande de dix autres villages pour travailler avec eux: ça fait tached’huile. J’ai fait des séances d’animation et de sensibilisation sur l’alimentation et la santé et les autres aspects de la vie. Il fallait que lesgens apprennent à faire le traitement des puits contre le ver de Guinée, j’ai donné des séances d’information sur l’eau et l’hygiène...”

(TémoignagedeMmeDiarrarecueilli en 1998 sur les premières années du volet «animation féminine» et donnant une idée de la situation d’isolement desfemmes à l’époque)

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UNE DIRECTION DE PROJET TRÈS PRÉSENTE POUR UN LONG TRAVAIL DE PATIENCE

Mme Djéneba Diallo Diarra a été indubitablement une personneclé dans le développement du projet et de ses activités et cela, toutau long des douze années du projet. Ex-Directrice régionale des affaires sociales, elle a d’abord étéchargée par le gouvernement du Volet «animation féminine» dansla zone du projet PRODESO de Kayes-Nord, pour la période 1982-1985. Elle commença ainsi à travailler “en brousse” à Bambela,Bokediambi et Gori Gopela, 3 villages à la frontière mauritanienne.Lorsque le volet est converti en projet, elle est nomméeCoordinatrice du Projet d’assistance aux groupements fémininsdans la zone encadrée de Kayes-Nord, jusqu’à sa clôture, en 1998.Chargée de la gestion et de l’animation du projet, sa volonté et saténacité expliquent certainement l’ampleur des succès obtenus. Deplus, le fait d’avoir travaillé sur le projet depuis le tout début, dèsla mise en place du Volet «animation féminine» du projet PRODE-SO, fait d’elle la détentrice de la mémoire du projet.Ses activités n’ont pas pris fin au terme du projet. Aujourd’huiencore, elle occupe notamment le poste de Présidente, élue parl’assemblée des déléguées, de l’Union des groupements fémininsde Kayes-Nord.

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Activités principales Démarche

Phase I 1986-1988 Promotion des groupements féminins Approche village + femmesIntroduction du maraîchageVaccinations

Durée: 2 ans + 1 an Hygiène de l’eauMoulins, foyers améliorés

Phase II 1989-1993 Puits, retenues d’eau Approche village + femmesmaraîchage

Durée: 3 ans + 2 ans Marchés rurauxAppui aux Groupes d’intérêt économique (GIE)Fonds de roulement et crédits ArtisanatSanté et nutritionFoyers améliorés

Phase III 1994-1998 Poursuite des activités des 2 phases précédentes Approche femmesAppui aux groupements féminins (GF) Objectifs genre et aux Groupes d’intérêt économique (GIE)

Durée: 3 ans et 4 mois Réseau d’animatrices rurales + 18 mois Fonds de roulement et crédit pour activités

de production Formation et alphabétisationReconnaissance juridique des groupements fémininsConstitution de l’Union des groupements féminins de Kayes-Nord

en augmentant les ressources hydrauliques (barrages et puits), en allégeant les tâches (moulins, motopompes,foyers améliorés), et dans les domaines de la santé (formation d’accoucheuses traditionnelles) et de la nutrition(sensibilisation à la consommation des produits maraîchers).

L’équipe du projet fut renforcée par une animatrice adjointe devant seconder la coordinatrice de projet. Lacollaboration de l’animatrice adjointe fut toutefois discontinue. En effet, les femmes qui travaillent dans lesservices gouvernementaux ont beaucoup de mal à s’adapter aux conditions de la brousse et peuvent difficile-ment s’engager dans des missions prévoyant un éloignement du foyer.

Les évaluations externes de ces deux premières phases ayant été globalement positives, la mise en placed’une troisième phase a été décidée, avec les mêmes acteurs pour le financement et pour l’exécution.

La troisième phase (1994-1998) a mis à profit les acquis des deux phases précédentes par rapport auxfemmes et aux organisations féminines mises en place dans les villages. Elle devait initialement couvrir unepériode de trois ans (1994-1997). Néanmoins, en 1997, la revue technique tripartite a recommandé sa prolon-gation jusqu’à fin 1998.Ce n’est qu’au début de la troisième phase qu’une capitalisation de l’expérience a permis de mettre en évi-dence la stratégie du projet, avec ses objectifs globaux de développement, l’interrelation entre les objectifs àlong et à court terme et les moyens de réalisation. Il importe de souligner qu’à partir de 1992 cette stratégie aété plus résolument soutenue par les orientations du Gouvernement malien dans ses plans d’action pour ledéveloppement rural1. En effet, ces orientations placent au premier plan la contribution des femmes à la sécu-rité alimentaire et la constitution de groupements de femmes rurales en tant que moteur essentiel pour laresponsabilisation de la société civile.

LL ESES TROISTROIS PHASESPHASES DUDU PROJETPROJET

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1 Cfr: Schéma directeur développement rural par le Ministère de l’Agriculture, de l’Elevage et de l’Environnement, Mali, 1992.2 Cfr: Rapport d’évaluation finale du projet (FAO, 1999).

Appui donné au projetUn appui continu et adapté a été fourni par l’équipe du projet et par lesencadreurs qui ont assuré un suivi rapproché des activités; ils ont eux-mêmes reçu un soutien technique à travers des consultations nationales etinternationales qui ont permis de cerner les exigences du projet et les déci-sions à prendre.

L’ÉQUIPE PERMANENTE DU PROJET. Ce n’est qu’au cours de la troisièmephase que le projet a pu compter sur un personnel différencié lui étantpropre: un adjoint à la coordinatrice expert en élevage, un comptable-secrétaire informaticien, une experte associée agronome, un anima-teur, trois encadreurs et un expert national en gestion-crédit (pen-dant le dernier semestre 1998).

L’ENCADREMENT. Dès son démarrage, le projet a eu recours au dispositif d’encadrement du projet d’élevage (PRO-DESO), composé de techniciens en élevage résidant dans les villages-base (ou villages pilotes). Ces encadreursdépendaient administrativement du PRODESO, mais travaillaient aussi pour les différents projets opération-nels dans la zone: le Programme national de vulgarisation agricole (PNVA), le Projet d’appui à la mise en oeuvre duschéma directeur du développement rural (PAMOS) et le Programme national de gestion des ressources natu-relles (PGRN). En ce qui concerne le Projet d’assistance aux groupements féminins, les encadreurs - tous deshommes - ont été chargés à temps partiel des activités d’animation, de suivi et de formation/vulgarisation enfaveur des groupements féminins. Ils ont suivi des formations et des recyclages spécifiques pour répondre auxdemandes des femmes, pour maîtriser la démarche participative et pour dispenser des conseils techniques. Ilsont été en contact permanent avec les groupements et ont fait le lien entre ces derniers et l’équipe centrale.Pour faciliter leur travail, des moyens de déplacement et des indemnités leur ont été fournies par le projet.

LES CONSULTANTS NATIONAUX ET INTERNATIONAUX ont fait état de l’avancement des activités et formulé des recom-mandations spécifiques. Le projet a été évalué à l’échéance des différentes étapes et a été régulièrement suivilors de la troisième phase par la conseillère technique principale d’appui à la direction. Les différents rapportsd’évaluation mettent en avant l’ampleur de l’appui technique fourni au projet2.

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LES ACTIONS DE CETTE TROISIÈMEPHASE SE SONT ARTICULÉESAUTOUR DES DEUX AXES SUIVANTS:

▼ Réduire les discriminationssexuelles et garantir auxfemmes l’égalité deschances dans les domaines où la discrimination à leur égard est la plus évidente (par exemple, dans l’accèsà la terre et aux moyens deproduction);

▼ Affirmer la particularitéféminine et appuyer lescréneaux économiquesspécifiquementféminins (par exemple: le maraîchage, le petitcommerce et certaines activités artisanales).

C’EST SUR CES DEUX AXES QUE LES DEUXGRANDS OBJECTIFS DE DÉVELOPPEMENTDU PROJET ONT ÉTÉ DÉFINIS, À SAVOIR:

▼ Améliorer les conditions de vie des femmes rurales et de leur famille (sécurité alimentaire, santé,accroissement des revenus);

▼ Susciter la participation réelle des femmes rurales au processus de développement.

La danse des femmes du groupement

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Objectifs et act

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Participationdes femmes au

processus dedéveloppement

Consolidation desacquis pour garantir la participation des

femmes aux activitésproductives

Formations ▼ formation de formateurs (alphabétisation)

▼ techniques d’animation ▼ transformation et conservation des produits

▼ formation en gestion ▼ voyages d’étude▼ journées d’échange entre groupements

Communication▼ émissions radio ▼ vidéos didactiques

▼ diapositives, photos et flannellographies ▼ films

Fonds de roulement▼ crédit pour les activités agricoles

et artisanales ▼ formation en gestion

Activités commerciales▼ banques de céréales

▼ marchés ruraux ▼ boutiques villageoises

Participation et capacités de prise de décision des femmes▼ promotion des organisations féminines ▼ soutien aux activités

rémunératrices ▼ sensibilisation des autorités villageoises ▼ responsabilisation des femmes ▼ autogestion

▼ renforcement des capacités de négociation ▼ appui en vue de la reconnaissance juridique des groupements féminins

Artisanat▼ techniques de production de savon

(traditionnel et cabacourouni) ▼ teinture (batik, bogolan, tampon)

Participationdes femmes aux

activités non agricolesgénératrices

de revenus

Participationdes femmes aux

prises de décisiondes organismes

villageoiset du monde rural

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ivités du projet

Amélioration des conditions de vie desfemmes ruraleset de leur famille

Maraîchage▼ jardins potagers ▼ introduction de nouvelles espèces ▼ formation aux nouvelles techniques ▼ parcelles de démonstration▼ semences sélectionnées ▼ fiches techniques

Ressources en eau▼ retenues d’eau ▼ puits ▼ comités mixtes de gestion ▼ formation sur l’eau et l’hygiène ▼ plans parcellaires des terres valorisées par les points d’eau

Arboriculture fruitière▼ vergers de manguiers et nouvelles espèces ▼ plants greffés ▼ formation aux techniques de greffage ▼ fiches techniques - installation de pépinières

Cultures vivrières ▼ semences hâtives ▼ banques de céréales ▼ fiches techniques

Petit élevage ▼ embouche ovine ▼ aviculture (pintades) ▼ formation

Allégement des tâches▼ moulins▼ motopompes ▼ foyers améliorés

Actions sanitaires▼ formation à l’hygiène, la nutrition ▼ pharmacies villageoises ▼ formation pouraccoucheuses traditionnelles ▼ formation d’hygiéno-secouristes ▼ causeries sur la nutrition ▼ démonstrations culinaires

Accroissement et diversification de la consommationalimentaire

Augmentationdes revenus des femmes

Elévation du niveausanitaire

Elargissement de la disponibilité en eau dans la zone du projet

Allégementdes tâches

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jet? RÉSULTATS: QUELQUES CHIFFRES

▼ 70 groupements féminins constitués (environ 25% des 285 villages de la zone). Unsuivi est assuré avec 66 villages comprenant une population totale de 105 460habitants composée d’une majorité de Sarakolés, mais aussi de Kasonkés, de Peuhls,de Bambaras et de Maures

▼ 66 comités de gestion des femmes mis en place, bénéficiant du soutien de 330responsables et de 7 842 membres

▼ 24 groupements féminins érigés en associations, officiellement reconnus

▼ Un compte d’épargne ouvert dans une banque de la place par chacun des 24 groupementsféminins érigés en associations. Le solde créditeur total s’élève à 2 369 764 F CFA

▼ 44 animatrices principales formées dans 44 groupements

▼ 20 animatrices suppléantes nommées pour 20 groupements

▼ 3 129 femmes organisées en 141 Groupes d’intérêt économique (GIE), avec un accès aucrédit, sur les ressources du fonds de roulement

▼ Quelque 105 460 personnes touchées directement par le projet et toute la populationde la zone pastorale de Kayes-nord indirectement

▼ Différents points et retenues d’eau réalisés avec la participation active des populations.

▼ Les femmes de la région sensibilisées à leur rôle moteur dans le processus dedéveloppement social et économique

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UNE DÉMARCHE PUNE DÉMARCHE PARARTICIPTICIPAATIVETIVE

Association de tous les acteurs

Dès le début, la démarche du projet, à la fois pragmatique et empirique, va dans le sens de l’approche «Femmes et développe-ment», recherchant donc une meilleure “intégration“ des femmes dans le processus du développement. Cette approche pré-voit un appui direct aux femmes et leur renforcement économique et organisationnel, sans pour autant mettre en question, auniveau des débats, les inégalités dans les relations de pouvoir et la position de subordination des femmes à l’autre sexe.

Tous les aspects mettant en évidence ces inégalités, par exemple l’accès à la terre, la participation au Conseil du village,la maîtrise de la propre vie, la question ouverte de la soumission des femmes et les possibilités d’une redistribution du pou-voir, ont été abordés transversalement, à travers la mise en place d’activités socio-économiques qui ont permis aux femmesde démontrer leurs capacités, leur force et leur détermination. Cela a déclenché un processus de prise de conscience descontraintes qu’il restait à surmonter pour parvenir à des relations plus égalitaires, qu’il s’agisse d’obstacles liés aux moyens,aux ressources, aux espaces ou aux opportunités.

Les problèmes structurels de la zone pastorale de Kayes-Nord ont orienté les actions du projet dès la première phase. Apartir d’un diagnostic participatif des contraintes et des potentialités, l’ensemble de la population a été associée à l’analysedes besoins et des priorités dans le domaine productif, socio-économique et socio-sanitaire. Des activités d’animation, deformation et de vulgarisation ont accompagné ce processus.

Les secteurs d’intervention étant étroitement liés, les effets de chaque action ne se sont pas limités au secteur propre-ment dit, mais ont concerné tous les aspects de la vie des femmes et du village. L’appui aux femmes a eu des effets bénéfi-ques pour les hommes qui sont passés d’une réticence initiale aux initiatives des femmes, voire d’une certaine hostilité, à unsoutien plus actif.

Pour augmenter la confiance dans le projet et introduire des changements dans la condition des femmes sans boulever-ser les relations sociales, il a été choisi d’appliquer une démarche qui s’est caractérisée par les principes suivants, maintenuspour toute la durée du projet:

le respect de la hiérarchie et des structures existantes;

la valorisation des leaders naturels;

l’identification d’activités concrètes pouvant stimuler les femmes à s’organiser;

la promotion de la volonté et de la solidarité pour résoudre les problèmes communset pour acquérir force et pouvoir.

La validité de la démarche retenue a été confirmée par le développement des organisations féminines dans la zone.Les aspects relatifs à la qualité de la vie, au statut des femmes et à leur autonomie économique ont été abordés d’unemanière transversale:

QUALITÉ DE LA VIE: l’animation a porté sur une multitude d’aspects, tels que la santé, l’alimentation/nutrition, l’en-vironnement, les infrastructures rurales, les conditions de travail, etc.

STATUT DES FEMMES: dans ce domaine, le projet a opéré un bouleversement résolu. Deux éléments clés ont véhi-culé le changement: les nouvelles techniques culturales et les ouvrages hydrauliques dont l’impact a été fonda-mental, au regard des carences alimentaires, agricoles et hydriques du Sahel.

AUTONOMIE ÉCONOMIQUE DES FEMMES: la production maraîchère a permis aux femmes, d’une part, de satisfaire àleurs besoins de subsistance et, de l’autre, d’entrer dans le circuit de commercialisation local. Le développe-ment de l’artisanat (savonnerie, teinture), du petit élevage et de la production céréalière a joué égalementun rôle essentiel. Cependant, il n’existait pas d’infrastructures aptes à écouler ces nouvelles productions, desorte que de nouveaux marchés ont dû être créés. L’insertion directe des femmes dans le domaine de la pro-duction s’est faite en complémentarité et en cohérence avec les activités conduites par les hommes.

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Ces différentes étapes se proposaient de susciter de nouveaux comportements et de trouver des réponsesnovatrices sans pour autant bouleverser la situation ni susciter de conflits. Par ailleurs, elles prenaient encompte les différents aspects de la promotion féminine en les intégrant à la logique globale du village.

Au cours des deux premières phases, le projet avait ciblé des groupes de femmes en s’assurant préalable-ment l’accord des instances villageoises. En dépit de ses effets bénéfiques (la diminution des migrations saison-nières, l’accroissement de la participation des femmes aux processus de prise de décision, le renforcement de lasolidarité et de l’esprit communautaire), cette démarche a en quelque sorte généré une présomption des respon-sabilités et des droits des hommes par rapport aux femmes, créant des confusions quant aux engagements prisavec le projet, aux décisions et aux responsabilités des groupements d’une part et des autorités de l’autre.

En revanche, la troisième phase a définitivement fait des femmes les bénéficiaires directes des actions etdes groupements féminins le moteur du développement des villages, dès lors qu’à travers les femmes, lesbénéfices retombent directement sur les familles et sur la communauté villageoise.

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Problèmeset solutions

Village

Suivi et analysedes résultats

Planification de nouvelles

activités

Planification

Activités

▼ le village demande l’appui du projet;

▼ l’équipe d’animation prend contact avec la chefferie du village;

▼ des réunions avec les femmes sontorganisées, notamment pour identifier des leaders;

▼ les problèmes les plus aigus sont hiérarchisés et un consensus sur les priorités est recherché;

▼ des solutions en accord avec les ressourcesdu milieu et du projet sont proposées;

▼ la planification des opérations est faite avec les différentes acteurs;

▼ les activités sont mises en oeuvre, avec l’appui des leaders;

▼ le suivi des réalisations et l’analyse desrésultats sont assurés de façon constante;

▼ des nouvelles actions sont discutées et planifiées.

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Initiatives des femmes

Les villages ont été répartis en villages-base et en villages satellites. Par base, on entend un village pilote qui, par tradi-tion et autorité, influence le développement dans les autres villages dits satellites et dont le groupement féminin doitservir d’exemple. C’est dans le village-base que réside l’encadreur PRODESO et que se concentrent les activités du projet.A la fin du projet, on comptait 16 bases, dont 14 couvertes par les agents d’encadrement et 2 suivies par l’animateur etl’équipe du projet.

Les groupements féminins

Pour les femmes, s’organiser en groupement signifie d’abord sortir de l’isolement, se rencontrer et discuter ensemble endehors de l’entourage familial et s’aider mutuellement. L’entraide a toujours existé, mais elle se limite à la famille éten-due. En effet, les femmes, intégrées dans la famille du mari et souvent dans un mariage polygame, sont des étrangèresl’une pour l’autre ; elles ne se connaissent pas et se regardent même avec méfiance. Aussi, les femmes considèrent-elles laconstitution d’un groupement comme un fait très important et, lorsqu’elles en parlent, elles mettent l’accent sur l’ententeet la solidarité, sur la confiance en soi et sur leur nouvelle indépendance.

Les groupements réunissent soit toutes les femmes d’un village, soit un certain nombre d’entre elles qui travaillentavec le projet. Le nombre des membres peut varier de 15 à 300. Les groupements sont en général composés de femmesadultes et mariées qui, surtout dans la dernière phase, ont été sensibilisées à l’importance de transmettre leurs connais-sances et savoir-faire aux filles, pour les rendre plus autonomes. Ainsi, des groupes de jeunes filles se sont formés à leurtour, s’associant parfois aux formations dispensées aux groupements féminins.

Les groupements féminins organisent des champs collectifs dont la production peut, d’une part, générer des revenusdestinés à la caisse du groupement et, de l’autre, alimenter une banque de céréales. Les décisions relatives à l’utilisationdes fonds sont prises au sein du groupement, qu’il s’agisse de la mise en oeuvre d’activités d’intérêt communautaire(puits, pharmacie, fêtes, etc.) ou de la constitution d’une garantie pour obtenir des crédits, dont l’octroi dépend de lacapacité d’épargne du groupement. La plupart des groupements féminins ont ainsi ouvert des comptes bancaires pour ydéposer leurs épargnes et ont commencé à se familiariser avec les structures financières.

Chaque groupement est géré par un comité d’animation, composé des femmes les plus sages et les plus respectées.Les responsabilités sont partagées suivant un schéma assez classique: présidente, vice-présidente, secrétaire aux relationsextérieures, secrétaire, trésorière, trésorière adjointe, commissaire au compte, organisatrice. De fait, chaque membre ducomité représente un groupe de travail au sein du groupement qui s’occupe, à tour de rôle, des travaux dans le champcollectif, de l’assainissement du village, du traitement de l’eau potable, etc.

Quelque 30 groupements féminins se sont dotés d’un récépissé qui marque leur statut juridique et se sont érigés en

▼ Dans chaque village le groupement féminin (GF) est le bénéficiaire direct de l’assistance et de l’appuiofferts par le projet.

▼ Au sein de chaque groupement, un comité d’animationest responsable de la mobilisation et de l’informationdes femmes membres, ainsi que de l’organisationd’activités de formation et de vulgarisation.

▼ Au sein de ces groupements, souvent très importants,le projet favorise la constitution de groupes d’intérêtéconomique (GIE) en vue du développement d’activitésproductives et de l’auto-organisation.

▼ Chaque groupement élit une animatrice chargée des relations à l’intérieur et à l’extérieur du GF, ainsi que du transfert des formations reçues et des savoir-faire aux femmes membres.

▼ L’évolution des groupements en associationsjuridiquement reconnues est appuyée avecdétermination pour que ceux-ci puissent bénéficier desappuis et de l’assistance technique prévus pour lesorganisations paysannes et pour que soit renforcée laparticipation des organisations féminines auxdécisions relatives au développement du secteur rural.

LE SCHÉMA D’ORGANISATION PEUT ÊTRE RÉSUMÉ DE LA FAÇON SUIVANTE:

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associations. Cela a favorisé une prise de conscience du rôle du groupement dans la vie socio-économique duvillage et du niveau de représentativité atteint par les organisations des femmes.

Suivant l’exemple des villages où le projet a appuyé les groupements féminins, des noyaux d’organisationsont nés un peu partout dans la zone de Kayes-Nord, ainsi qu’au sud de la région, où les femmes ont com-mencé à s’organiser en groupes et à développer des activités soit communautaires soit individuelles. Cedynamisme est de plus en plus soutenu par les hommes et les autorités villageoises qui se sont adressés auprojet pour qu’il appuie les femmes dans leurs entreprises.

Les groupes d’intérêt économique

Alors que le groupement féminin joue le rôle d’agglutinant social et influence le développement dans levillage en stimulant la prise de conscience de la population sur les problèmes sociaux (éducation des jeu-nes filles, malnutrition, santé, assainissement/environnement, etc.), les groupes d’intérêt économique(GIE) constituent le moteur des activités économiques des femmes, dans le sens où ils permettent d’amé-liorer les revenus et de valoriser la position des femmes au sein de la famille.

La constitution des GIE se fait par affinité, famille ou activité; elle facilite la répartition des tâches,l’accroissement de la responsabilité individuelle, un meilleur contrôle de l’efficacité des activités, ainsi quela création de revenus directs et individuels pour ses membres. Les activités entreprises par ces groupesont concerné principalement le petit commerce, l’embouche ovine, la saponification, la teinturerie et lespharmacies villageoises. Par effet de multiplication, nombre de GIE se sont organisés dans les villages sansappui direct du projet. Pour le moment, grâce notamment à la présence des marchés hebdomadaires et desboutiques villageoises, cela n’a pas provoqué de phénomènes de surproduction ou de compétition entreles GIE, même s’il faut noter que ce risque existe.

Les GIE ont été les principaux bénéficiaires des crédits octroyés par le projet sur la base de la cautionsolidaire offerte par les groupements féminins, auxquels revient le contrôle sur les activités proposées parles GIE, en plus du respect des engagements. L’analphabétisme et la faiblesse des capacités de gestion ontconstitué des limitations que le projet a cherché à surmonter par des formations et des cours d’alphabétisa-tion fonctionnelle. Cependant, étant donné la multiplication des GIE et l’absence d’un professionnel en lamatière, l’expérience des GIE peut être évaluée uniquement au niveau des groupes les plus performants,qui ont su profiter régulièrement du renouvellement et de l’augmentation annuelle du crédit. Ces GIEpeuvent réellement justifier, moyennant des données techniques, les choix qu’ils ont opérés, évaluer lesbénéfices obtenus et donner de nouvelles idées en fonction de la réussite de leurs activités.

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HISTOIRE DE GOUNDO KAMISSOKO, ANIMATRICE ET PRÉSIDENTE DU GROUPEMENT DES FEMMES DE SOMANKIDI COURA

Goundo a commencé à travailler avec le GCP en 1990. Elle avait 26 ans. A l’époque, son mari l’informa qu’il y avait àKayes un projet (le GCP) qui formait les femmes sur les techniques artisanales. C’est ainsi que Goundo et une femmede Somankidi ont été formées à la teinture et à la production de savon.

«Après la formation, raconte Goundo, on a pris contact avec madame Diarra. On lui a expliqué l’organisation desfemmes de Somankidi Coura et on a demandé un prêt (185 000 FCFA) pour faire le savon et la teinture. En six mois, ona remboursé le prêt et on a obtenu un bénéfice de 195 000 FCFA pour les 12 femmes du Groupe d’intérêt économique.Avec cet argent, on a ouvert un compte pour ne pas garder l’argent à la maison et aussi pour avoir les intérêts.

Les matières premières pour l’artisanat, on les achetait avec l’argent des cotisations (3.000 FCFA/an par 12femmes) qui ont également servi à l’achat d’un moulin pour l’arachide. Les revenus du moulin ont servi à leur tour pourles semences, les médicaments, etc.»

Goundo a formé alors les femmes de Kabaté, de l’Union de coopératives agricoles de Kayes (URCAK), dont elle et sonmari sont membres depuis 1989, et du Centre de formation professionnelle de Bakel, au Sénégal. Ceci lui a permisd’avoir des revenus personnels.

«J’ai fait un recyclage en teinture à Bamako. J’était avec Salama Bathily, l’animatrice de Mogoyafara. C’était la premièrefois que je m’absentais mais cela n’a pas posé des problèmes avec mon mari. Pour la teinture, je donne des cours auxfemmes des villages encadrés et à d’autres. Le revenu varie: il peut être de 15.000 FCFA/jour, pour 7-10 jours de formation.

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En effet, c’est au niveau de ces groupes d’intérêt économique que le projet a assuré un processus d’apprentissagequi a permis de définir des critères plus stricts pour l’octroi des crédits, de fournir un suivi plus précis et une meilleu-re planification des activités, de parvenir à un partage plus efficace des responsabilités entre les femmes.

Les animatrices ruralesDans le schéma organisationnel du groupe cible, le rôle des animatrices rurales élues au niveau de chaque groupe-ment féminin est fondamental. Reconnues par les villages et cooptées par le projet à cause de l’expérience et de la con-fiance dont elles bénéficient de la part des femmes et de la population, elles assurent une fonction de liaison, d’anima-tion et d’information entre le projet, les groupements et le village. De plus, elles représentent une garantie de durabi-lité du dynamisme et des actions développées au sein des groupements.

Le choix de l’animatrice parmi les membres du groupement s’explique par le fait que le travail de celle-ci, entière-ment bénévole, doit bénéficier du consensus du groupement et ne pas dépendre de l’existence du projet. S’agissantd’un travail à titre gratuit, les groupements féminins ont été encouragés à récompenser l’apport de l’animatricemoyennant, par exemple, un pourcentage de la production collective, une prime annuelle ou de la main-d’oeuvre sursa parcelle ou dans son ménage. Pour mieux garantir la continuité de l’animation, les groupements ont été poussés àchoisir une animatrice suppléante et déjà deux tiers d’entre eux ont deux animatrices.

Le projet a accordé aux animatrices une attention particulière; elles ont ainsi constitué la cible des formationsdispensées, des échanges et des voyages d’études effectués. Un certain nombre d’animatrices est déjà en mesured’assurer les formations en teinture et savonnerie et en certaines techniques de maraîchage.

Les animatrices les plus dynamiques sont désormais capables de chercher les appuis dont elles ou leur groupe-ment ont besoin. La continuité de leur rôle dépend de la prise en compte, à la fin du projet, du réseau des animatricespar les services techniques, ainsi que de l’évolution de l’Union des groupements féminins de Kayes-Nord, dont lesanimatrices sont les principales promotrices.

A travers le récit d’une des animatrices les plus actives, Goundo Kamissoko, 35 ans, mariée et mère de 5 enfants,présidente et animatrice du groupement féminin de Somankidi Coura (16 membres), nous pouvons saisir un parcoursd’apprentissage et d’émancipation.

Le cas de Goundo n’est pas représentatif de toutes les animatrices du projet, puisque beaucoup de facteurs influentsur la possibilité, pour une animatrice, de profiter des opportunités offertes par le travail avec le projet : le fait d’êtrealphabétisée, de parler français, la condition sociale, l’accessibilité et les relations de son village, l’esprit d’ouverturedu mari, l’âge, etc. Pourtant, il reflète un élément primordial : l’investissement dans la formation des femmes peutdonner des résultats vraiment extraordinaires.

En1995, en Côte d’Ivoire, j’ai reçu, avec d’autres animatrices, la formation en “cabakourouni”, une technique améliorée de fabrication desavon. Le stage était organisé par le projet. Depuis, je suis appelée un peu partout (Kenieba, Bafoulabé, Walia, Kayes-Nord...). La techniquecabakourouni est très demandée parce que le savon est très apprécié sur le marché».

«Grãce au projet, j’ai fait des voyages d’étude au Mali et à l’extérieur. J’ai connu des expériences et des réalités différentes. Ensuite, leprojet nous a aidé pour l’embouche ovine avec un crédit et une assistancetechnique. Les résultats ont été tellement bons qu’en 1998, legroupement féminin a demandé un crédit pour l’embouche bovine qui était jusque là réservée aux hommes. Pour la teinture et le savon, legroupement féminin de Somankidi (16 femmes) est déjà autonome puisqu’il dispose d’un fonds de roulement. A l’occasion des fêtes et audébut de la saison des cultures, l’argent de la caisse est partagé. Tous les membres reçoivent la même somme et le partage est enregistrédans le cahier du groupement» (aujourd’hui Goundo veut ouvrir un compte personnel à la banque, à Kayes, pour y verser ses épargnes).

En1997, les femmes de Somankidi ont été alphabétisées en soninké. Goundo est devenue la Présidente du Comité d'organisation del’Association Madi Kaama Musundo, qui regroupe 60 villages de Kayes.Celle-ci promeut le soninké, grâce à un concours nationalthématique, où les meilleurs textes sont édités en soninké et en français. Le prix «Madi Kaama» a encouragé les femmes de SomankidiCoura à participer. Deux femmes de Koussane et de Kirane, encadrées par le Projet, ont gagné le deuxième prix en 1997.

Goundo est reconnaissante au projet qui leur a permis à elle et aux femmes de Somankidi d’évoluer: alphabétisation, formations,animation... les femmes ont pu se faire une place dans le village et dans l’URCAK où, au début, il n’y avait que des hommes. Maintenant, il y aune commission chargée spécifiquement de la promotion féminine.

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Les associations

Afin d’augmenter la représentativité des femmes, le projet a promu la constitution des groupements fémininsen associations. Il s’agit d’organisations juridiquement reconnues par l’administration et qui disposent d’unstatut et d’un règlement intérieurs. Pendant la troisième phase, 8 associations inter-groupements se sont consti-tuées et 30 groupements féminins sont devenus des associations officielles avec récépissé. Elles deviennentainsi un interlocuteur obligatoire et sont parties prenantes dans les programmes d’assistance et de formationque les différents services techniques d’appui au monde rural se proposent de mettre en place dans la région.

Les associations, émanation directe des groupements devant faire face aux mêmes contraintes que lesgroupements féminins - analphabétisme, manque de formation, d’outils et de maîtrise - ont toujours besoinde suivi et d’assistance, surtout au niveau du renforcement des capacités de gestion, de la formation techni-que et de la capacité à trouver de façon autonome des partenaires techniques et financiers pour la promotionde micro-projets.

L’Union des groupements féminins de Kayes-Nord

A été fondée par les animatrices rurales et par les femmes les plus dynamiques d’une trentaine de groupementsféminins, ainsi que par la coordinatrice du projet. Elle est née dans le but d’assister les groupements de la zoneet d’assurer le lien entre les groupements féminins et les autres instances de développement présentes dans larégion. A l’Union adhèrent aussi les groupements érigés en associations.

Pour éviter que la participation soit formelle, l’adhésion est individuelle même si chaque femme représenteeffectivement son groupement d’appartenance. La cotisation des membres s’élève à 2 500 FCFA par mois,somme versée sur le compte bancaire de l’Union. Un Bureau de coordination a été mis en place avec les per-sonnes les plus actives. La présidente de l’Union, élue par l’assemblée des déléguées, est Mme. Diarra, la coor-dinatrice du projet GCP.

L’Union étant née lorsque le projet arrivait à son échéance, l’organisation de cette structure n’a pas pu rece-voir tout l’appui nécessaire à son renforcement, surtout en ce qui concerne la gestion et la formation des mem-bres du Bureau de coordination. Cependant, la naissance de l’Union est un fait très important pour garantir ladurabilité des acquis, le développement des organisations féminines de la région, leur visibilité ainsi que lesoutien aux activités productives et socio-économiques des femmes rurales.

Un appui direct à l’Union, après la fin du projet, constituerait une garantie de continuité et de soutien pourl’ensemble des groupements féminins actifs dans la zone de Kayes-Nord et en même temps pour ceux qui sonten train de s’organiser dans la région.

Suivi-évaluation: un regard critiqueDans les deux premières phases du projet, le suivi a été purement empirique. En effet, il n’y a pas eu de collec-te et d’organisation systématiques des données sur la situation socio-économique des villages. Le “cahier debord“ de la coordinatrice, ses notes et sa mémoire ont constitué la source de la plupart des informations. Par

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▼ l’acquisition des matières premières et des intrants pour les activités d’agriculture et d’artisanat;

▼ l’alphabétisation et la formation technique;

▼ l’assistance des services techniques;

▼ la recherche de partenaires techniques et financiers pour la promotion de micro-projets;

▼ la promotion et la participation des femmesrurales à tous les niveaux de la vie sociale.

L’UNION SE PROPOSE D’AIDER LES GROUPEMENTS FÉMININS À TROUVER DES SOLUTIONSAUX PROBLÈMES CONCERNANT:

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ailleurs, les instances de tutellene semblent pas avoir exigé unerestitution régulière des informa-tions et des résultats concernantce projet.

L’impact du projet pendantcette période a donc été évalué àpartir des résultats visibles sur leterrain et des rapports périodi-ques élaborés par la coordinatricedu projet. La mission d’évalua-tion de la deuxième phase en1993 a insisté sur la nécessitéd’un suivi régulier des activités,ainsi que d’une programmationfondée sur la concertation entrebénéficiaires, villages, adminis-tration et projet. Les appuis nécessaires pour assurer le suivi et l’évaluation ont été par conséquent précisés. C’est seule-ment lors de la troisième phase qu’un système de suivi a été mis en place. Son application a toutefois rencontré plusieursobstacles, notamment: le démarrage tardif des monographies, les blocages de la collecte de données par les Agents de vul-garisation de base suite à l’introduction du PNVA.

La création d’une base de données informatisées, collectées à partir des monographies et des fiches de suivi des acti-vités, était prévue dès le début de la troisième phase, mais ce n’est qu’en 1997 que la collecte des données et le suivi sontdevenus plus réguliers en ce qui concerne les crédits, les activités agricoles, l’alphabétisation et les formations.

L’informatisation des données a été discontinue à cause aussi des coupures continues de courant, de sorte qu’il a étédifficile d’apprécier la qualité des données collectées et du travail effectué par les enquêteurs. Il aurait fallu tenir comptedes contraintes structurelles pour la mise en place d’un suivi de cette ampleur et mieux adapter le système aux capacitésréelles de gestion de l’équipe et de l’encadrement. Si tous ces moyens avaient été investis dans une formation/ alphabéti-sation approfondie et appropriée des animatrices et d’un groupe restreint de femmes qui assurent le suivi dans leurs villa-ges respectifs, on aurait renforcé les capacités d’auto-évaluation et garanti davantage l’autonomie du système.

Enfin, il faut signaler que les défaillances de l’équipement informatique n’ont jamais été compensées par un travaild’enregistrement systématique des différentes activités réalisées avec les groupements et les villages. Certains outils decollecte d’informations et de documentation proposés, tels que le “dossier village“, le cahier de visite et la carte des réali-sations, ont été adoptés seulement à la fin de la troisième phase. S’ils avaient été utilisés à temps, ils auraient pu pourtantconstituer un outil pratique de suivi.

EN CE QUI CONCERNE LA PROGRAMMATION DES ACTIVITÉS,LES ÉTAPES SUIVANTES ONT ÉTÉ RESPECTÉES:

▼ écoute, dialogue et négociation avec les villages, les groupements et les femmes de la zone d’intervention;

▼ retour d’information vers le projet par le biais de l’équipe et des encadreurs;

▼ synthèse des données, besoins et demandes des bénéficiaires et organisation du travail avec les ressources à mobiliser pour l’exercice à venir;

▼ planification des activités.

EN CE QUI CONCERNE LA PROGRAMMATION, LE SUIVIET L’EVALUATION, LES OUTILS SUIVANTS ONT ÉTÉ CONÇUS:

▼ monographies des villages-base;

▼ rapport mensuel des encadreurs;

▼ fiches de collecte de données sur les différentes activités à partir des indicateurs retenus;

▼ dossier village pour regrouper toutes les informations;

▼ carte des réalisations du projet.

Le chef du village de Diadoumbéra montre les produits du maraîchage des femmes. Là où jadis on ne voyait jamais une salade ou une tomate fraîche,

onconsommeaujourd’hui des légumes très variés.

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