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Volume 34 Octobre 2005 Numéro 3 Un programme unique en son genre au Canada La formation d’interprètes de conférence à l’Université d’Ottawa Par Jean Delisle, directeur École de traduction et d’interprétation Université d’Ottawa Suite à la page 3 Spécial interprétation de conférence Spécial interprétation de conférence L’interprétation de conférence est un membre très en vue de la famille des professions langagières, à la fois admirée et incomprise. Elle a joué un rôle clé dans la vie de l’ATIO depuis l’entrée de premiers membres interprètes en 1956. Aujourd’hui, les 129 membres et candidats interprètes de conférence de l’Association travaillent en 17 langues, dans des situations allant des sommets de chefs d’État aux négociations commerciales, en passant par les réunions de vente classiques et les Webdiffusions à la pointe du progrès. Ce numéro d’InformATIO rend hommage aux interprètes de conférence et à leur contribution. Ce bulletin est réalisé en collaboration avec l’Association internationale des interprètes de conférence (AIIC), région Canada et distribué à ses membres. Nous remercions par ailleurs la société AVW- TelAv d’avoir accepté de diffuser ce numéro d’InformATIO aux abonnés à son bulletin d’entreprise dans le secteur des conférences et congrès. Kenneth Larose, président Dorothy Charbonneau, directrice, Interprètes de conférence La Maîtrise en interprétation de conférence, offerte par l’École de traduction et d’interprétation (ETI) de l’Université d’Ottawa, est une maîtrise essentiellement pratique (elle ne comporte aucun cours théorique) et son régime de formation est très intensif. Les principes reconnus de la profession sont inculqués aux apprentis interprètes par des interprètes professionnels chevronnés. Une enquête de l’AIIC a classé ce programme parmi les cinq ou six meilleurs au monde. Jusqu’ici les employeurs se sont dits très satisfaits du rendement de nos diplômés, qui passent rapidement au niveau de travail (TR-2) après une période de « rodage ». Ce programme de deuxième cycle vise à former des interprètes principalement, mais non exclusivement, pour le marché canadien. En vertu d’une entente conclue avec le Bureau de la traduction du gouvernement fédéral, l’ETI a la chance de pouvoir compter sur un interprète en résidence à temps plein, Jacques Audet, interprète de conférence agréé. Ce pédagogue- né coordonne le programme et assume une part importante de l’enseignement. Le Bureau détache également un autre interprète à temps partiel (deux cours) pour la langue anglaise. Les cours sont répartis sur un an et s’adressent principalement aux étudiants à temps plein qui doivent satisfaire à une exigence de résidence de trois sessions consécutives. La scolarité est de 33 crédits. Le stage consiste en un minimum de dix jours complets de travail (ou un nombre d’heures équivalent) comme interprète dans des conférences approuvées par le responsable des stages. La sélection des candidats est très stricte à l’entrée, les places étant limitées. L’École forme de quatre à six interprètes par année, mais aimerait porter ce nombre à huit ou dix en raison de la forte demande du marché et des besoins pressants du Bureau de la traduction.

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Volume 34

Octobre 2005 Numéro 3

Un programme unique en son genre au CanadaLa formation d’interprètes de conférence à l’Université d’OttawaPar Jean Delisle, directeurÉcole de traduction et d’interprétationUniversité d’Ottawa

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Spécial interprétation de conférence • Spécial interprétation de conférence

L’interprétation de conférence est un membre très en vuede la famille des professions langagières, à la fois admiréeet incomprise. Elle a joué un rôle clé dans la vie de l’ATIOdepuis l’entrée de premiers membres interprètes en 1956.Aujourd’hui, les 129 membres et candidats interprètes deconférence de l’Association travaillent en 17 langues,dans des situations allant des sommets de chefs d’État auxnégociations commerciales, en passant par les réunionsde vente classiques et les Webdiffusions à la pointe duprogrès. Ce numéro d’InformATIO rend hommage auxinterprètes de conférence et à leur contribution.

Ce bulletin est réalisé en collaboration avecl’Association internationale des interprètes deconférence (AIIC), région Canada et distribué à sesmembres. Nous remercions par ailleurs la société AVW-TelAv d’avoir accepté de diffuser ce numérod’InformATIO aux abonnés à son bulletin d’entreprisedans le secteur des conférences et congrès.

Kenneth Larose, présidentDorothy Charbonneau, directrice, Interprètes deconférence

La Maîtrise en interprétation de conférence,offerte par l’École de traduction etd’interprétation (ETI) de l’Universitéd’Ottawa, est une maîtrise essentiellementpratique (elle ne comporte aucun coursthéorique) et son régime de formation est trèsintensif. Les principes reconnus de laprofession sont inculqués aux apprentisinterprètes par des interprètes professionnelschevronnés. Une enquête de l’AIIC a classéce programme parmi les cinq ou six meilleursau monde. Jusqu’ici les employeurs se sont dits très satisfaits durendement de nos diplômés, qui passent rapidement au niveau detravail (TR-2) après une période de « rodage ».

Ce programme de deuxième cycle vise à former des interprètesprincipalement, mais non exclusivement, pour le marchécanadien. En vertu d’une entente conclue avec le Bureau de latraduction du gouvernement fédéral, l’ETI a la chance depouvoir compter sur un interprète en résidence à temps plein,Jacques Audet, interprète de conférence agréé. Ce pédagogue-

né coordonne le programme et assumeune part importante de l’enseignement.Le Bureau détache également un autreinterprète à temps partiel (deux cours)pour la langue anglaise.

Les cours sont répartis sur un an ets’adressent principalement aux étudiantsà temps plein qui doivent satisfaire à uneexigence de résidence de trois sessionsconsécutives. La scolarité est de

33 crédits. Le stage consiste en un minimum de dix jourscomplets de travail (ou un nombre d’heures équivalent) commeinterprète dans des conférences approuvées par le responsabledes stages.

La sélection des candidats est très stricte à l’entrée, les placesétant limitées. L’École forme de quatre à six interprètes parannée, mais aimerait porter ce nombre à huit ou dix en raisonde la forte demande du marché et des besoins pressants duBureau de la traduction.

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Spécial interprétation de conférence • Spécial interprétation de conférence

Les cours se donnent en français et en anglais et comportentobligatoirement l’interprétation dans les sens anglais/français etfrançais/anglais. Le niveau de compétence requis diffèrelégèrement selon le sens de l’interprétation. Ces cours sedonnent tous dans un laboratoire comptant une douzaine decabines. Situé au 5e étage du pavillon Simard, ce laboratoire estactuellement modernisé : les cabines sont entièrement refaiteset mieux insonorisées, et la technologie numérique remplacel’ancien système analogique datant des années 1980.

Le taux de succès à l’examen de diplômation est très élevé. Plusde 90 % des étudiants inscrits ont obtenu leur diplôme. Grâceà leur travail acharné – le programme est physiquementexigeant – et au dévouement et à l’expérience de leursprofesseurs, ces étudiants sont parvenus, en un temps record, àacquérir la compétence attendue d’un interprète débutant. Ilssont, en d’autres mots, « cabinables ». Ils ont appris à gérer lestress pour pouvoir se retrouver dans la situation d’un comédienà qui personne n’aurait remis le texte avant la représentation...

Pour en savoir plus sur la méthode de formation appliquée àl’ETI, on lira avec profit l’article de Dave Roberts « TrainingInterpreters for La relève », dans L’Actualitéterminologique/Terminology Update, publié en deux parties :vol. 33, n° 1, 2000, p. 17-21; vol. 33, n° 2, 2000, p. 24-27.

Les lecteurs qui souhaitent obtenir plus d’informationconcernant ce programme (conditions d’admission, liste des cours et autres exigences) peuvent consulter le site del’École à la page suivante : http://www.etudesup.uottawa.ca/programmes/ maitrises/traduction_interpretation/index.html

InformATIOPublié par :L’Association des traducteurs et interprètes de l’Ontario1202-1, rue NicholasOttawa (Ontario) K1N 7B7Tél. : (613) 241-2846 / 1-800-234-5030Téléc. : (613) 241-4098Courriel : [email protected] Web : www.atio.on.ca

Tirage : 1700Imprimeur : Imprimerie PlantagenetGraphiste : More In TypoÉquipe rédactionnelle : Catherine Bertholet, Fabrice Cadieux,Alana Hardy, Michel Trahan

Politique éditoriale :La rédaction d’InformATIO se réserve le droit de renoncer à faireparaître, ou de modifier avec l’accord de son auteur, tout articlesoumis ou commandé aux fins de publication. Les opinionsexprimées dans les articles qui ne sont pas signés à titre officielsont celles de leurs auteurs et n’engagent pas l’Association.

Remerciements sincères à :Tony Abate, AIIC, Colin Bailey, Luc Bouchard, MichèleBradbury, Fabrice Cadieux, Louise Côté-Limbos, DorothyCharbonneau, Richard Copeland, Al Daigen, Jean Delisle,Creighton Douglas, Kenneth Larose, Monique Perrin d’Arloz,Christopher Thiery.

Suite de la page 1

À l’intérieur...Une journée dans la vie d’une interprète du gouvernement fédéral . . . . . .Page 4

Le Service de l’interprétation parlementaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Page 4

L’interprétation dans un environnement politique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Page 5

Les relations publiques à l’AIIC : stratégie individuelle et collective . . . . . .Page 6

Conseils aux orateurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Page 7

A l’attention des organisateurs de conférence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Page 8

L’interprétation à la demi-heure de l’Internet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Page 9

Point de vue du client . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Page 10

La carrière d’interprète vous tente-t-elle? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Page 11

Héros méconnus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Page 12

De Carthage à l’ONU . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Page 13

Nuremberg : procès équitable? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Page 13

AGRÉÉS PAR VOIE D’EXAMENDU CTTIC EN TRADUCTION

Allemand-AnglaisLinda HilpoldPhilipp Lienhardt

Anglais-PendjabiBalkar Singh Bajwa

Anglais-EspagnolManuel Mejía

FÉLICITATIONS!

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Spécial interprétation de conférence • Spécial interprétation de conférence

Le Service de l’interprétation parlementairePar Monique Perrin d’ArlozChef, interprétation parlementaireBureau de la traduction

Le Service de l’interprétation parlementaire (SIP) compte unecinquantaine d’interprètes permanents et recourt à une quinzained’interprètes pigistes pendant les semaines de sessionparlementaire. Il assure l’interprétation à la Chambre descommunes et au Sénat ainsi qu’à leurs comités respectifs; auCabinet et à ses comités; aux caucus des différents partis; à laBibliothèque du Parlement, à la Tribune de la presse, auxÉchanges parlementaires, etc.

À part les réunions à caractère secret (caucus, Cabinet, etc.), unetrès grande partie des débats qui doivent être interprétés sonttélévisés ou diffusés sur le web, ce qui occasionne souvent chezles interprètes une belle montée d’adrénaline (il suffit pour s’enconvaincre de songer aux interventions extrêmement rapides dela Période des questions ou aux délibérations souvent trèstechniques d’un comité comme celui des finances). À l’occasion,les interprètes doivent faire de la consécutive ou de la chuchotée,notamment lorsqu’ils accompagnent les comités en déplacement.

Cela fait maintenant 17 ans que je suis interprète au Serviced’interprétation des conférences (SIC) du Bureau de la traduction.Et je peux vous dire qu’il n’y a pas de journée typique.

Au SIC, ma journée de travail commence la veille au soir, lorsquej’appelle un répondeur téléphonique pour savoir ce qui m’attendle lendemain. En effet, même si je crois le savoir, les arrangementspris peuvent avoir été modifiés pour des raisons indépendantes dema volonté. Je vérifie ensuite mon courriel d’affaires pour voir sij’ai reçu de la documentation à préparer pour le lendemain. Lesinterprètes du SIC n’ayant pas de bureau, le répondeurtéléphonique est notre lien au travail. Nous avons la chance d’êtreappuyés par des gens extraordinaires qui sont passés maîtres dansl’art de coordonner les services d’interprétation et de nous fournirla documentation essentielle à notre travail.

Une journée dans la vie d’uneinterprète du gouvernement fédéralPar Dorothy Charbonneau, trad. a., int. conf. a. (ATIO), AIICDirectrice, Interprètes de conférence, ATIOTraduction Michèle Bradbury, trad. a.

Avec sa cinquantaine d’interprètes permanents desservant, aux côtés de nombreux pigistes, le Parlementet ses comités ainsi qu’un grand nombre de réunions et conférences, le Service de l’interprétationparlementaire du Bureau de la traduction joue un rôle clé dans l’interprétation de conférence au Canadadont il a accompagné les débuts il y a 40 ans. Pour ce numéro voué au visage humain de la profession,nous avons demandé à une interprète du Bureau de décrire une journée typique de travail.

Un interprète-ressource est affecté à chaque comitéparlementaire; son rôle est de suivre (et d’interpréter!) lesdélibérations du comité, d’assurer la liaison avec le greffier, deservir de personne-ressource auprès de ses collègues interprètes,etc. Lorsqu’ils ne sont pas affectés à des tâches d’interprétation,les interprètes parlementaires sont affectés à la traduction desdélibérations des comités. Ils sont donc appelés à traduire descomités qu’ils ont peut-être eu la chance d’interpréter quelquesjours plus tôt (ce qui simplifie généralement leur tâche) ou qu’ilsauront à interpréter la semaine suivante (ce qui leur permet de sedocumenter tout en traduisant).

Le programme d’affectation des interprètes est enregistré sur unrépondeur chaque soir à 19 h 30. Ce n’est donc pas avant cetteheure-là que les interprètes savent s’ils commencent leur journéede travail à 8 h, à 11 h ou à 14 h le lendemain! S’ils savent alors

Les affectations varient beaucoup, souvent d’une journée àl’autre. Il y a même des semaines où nous devons nous rendrechaque jour dans un lieu différent où il est question d’un sujetdifférent. Les conditions de travail sont conformes à la normeinternationale : trois interprètes par équipe pour une journéecomplète, lesquels se relaient toutes les demi-heures. Nouspouvons travailler dans un des immeubles du gouvernementfédéral à Ottawa ou dans un hôtel ou centre de conférences àOttawa ou n’importe où ailleurs au Canada et même parfois àl’étranger (bien que nous soyons généralement informés desaffectations hors de la ville deux semaines à l’avance). Nosclients comprennent des dignitaires internationaux, desfonctionnaires de première ligne de tout le pays et tout ce quivient entre les deux. En général, nous travaillons tous de notrelangue A à notre langue B (anglais et français) et vice-versa.

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Le cri « À l’ordre! » se répercute dans la pièce voûtée. Tous selèvent et le cortège entre dans la Chambre. Vêtus d’une toge noireet d’un tricorne, ceux qui sont chargés de veiller sur les droits etles privilèges du Parlement provincial de l’Ontario prennent leurspositions tandis que le sergent d’armes dépose la masse sur latable. Ainsi commence une autre journée pour les six interprètesemployés par l’Assemblée législative de l’Ontario.

Aussi officielle et empreinte de dignité que soit la cérémonie audébut, l’interprète sait qu’en quelques minutes, un tohu-bohupolitique éclatera et pour le restant de la journée le discoursprendra beaucoup de tournures brusques et inattendues, alors queles parlementaires débattront des questions du jour. Il y aura desinterventions houleuses et tapageuses de tous les côtés et detemps en temps, les passions s’enflammeront tellement que leprésident devra intervenir pour rétablir un semblant debienséance. Bien sûr, il y a aussi beaucoup d’heures de débat oùles questions sont banales et les discours manquent d’inspiration.Peu importe, du sublime au ridicule, l’interprète en voit de toutesles couleurs au cours de sa journée de travail. qu’il s’agisse d’ungrand drame, de questions ordinaires ou d’une vulgaire farce,l’interprète va probablement entendre tout cela au cours de sajournée de travail.

L’interprétation a été introduite à l’Assemblée en juillet 1986,conformément à la Loi sur les services en français qui avait étéadoptée la même année. Depuis près de vingt ans, les interprètesde l’Assemblée législative traduisent les discours desparlementaires en français ou en anglais. Ils contribuent de façonimportante au processus parlementaire en fournissant àl’Assemblée législative et à tous les Ontariens l’interprétationsimultanée des débats de la Chambre et de certains de sescomités.

Comme dans le cas de l’interprétation de conférence, où le tact etla diplomatie sont essentiels, les interprètes de l’Assembléesuivent des normes professionnelles strictes. Ils doivent servirtous les députés également et doivent toujours être apolitiques etimpartiaux. Dans un cadre aussi politisé, la discrétion et un bonjugement sont essentiels. De plus, l’interprétation simultanée àl’Assemblée législative constitue certainement une missionunique.

Pour vous en convaincre, il suffit de vous imaginer un colloqueavec 103 délégués qui ont tous quelque chose à dire et quisouvent le disent alors que le président ne leur a pas donné laparole. Imaginez un colloque où les sujets vont des servicesmédicaux à l’éducation, de l’énergie nucléaire à l’environnement,de l’interdiction des pitbulls à la refonte de la réglementation du

Spécial interprétation de conférence • Spécial interprétation de conférence

L’interprétation dans un environnement politiquePar Richard Copeland, directeur, Services du Journal des débats et d’interprétationTraduction Luc Bouchard, trad. a.

bâtiment. De plus, chaque minute que la Chambre siège,l’interprétation est diffusée dans toute la province à la chaîne detélévision parlementaire de l’Ontario. Enfin, pour cesinnombrables heures de débat, les interprètes législatifsn’obtiennent que rarement les documents pertinents et reçoiventgénéralement peu voire aucune information sur ce qui est sur lepoint d’être débattu.

Dans un tel climat d’incertitude, les interprètes doivent beaucoupinvestir dans la préparation pour être capables de faire face auvaste vocabulaire exigé et à l’utilisation fréquente de termestechniques. Tous les jours, ils sont aux prises avec le feu roulantdes questions orales et ils doivent fréquemment voyager avec lescomités qui tiennent des audiences dans les localités désignéespar la Loi sur les services en français.

Les interprètes législatifs travaillent généralement par roulement,avec l’aide de pigistes parmi lesquels figurent bon nombre demembres de l’ATIO, ce qui leur permet de couvrir les heuresirrégulières du Parlement. Il peut y avoir une équipe de jour quidispose de deux heures environ pour la recherche et la préparationavant de se diriger vers la cabine, et une équipe de nuit quipourrait travailler jusqu’à minuit. Par conséquent, il se peut qu’unmembre de l’équipe interprète du français vers l’anglais et del’anglais vers le français au cours du même tour de vingt minutes,avec de fréquents changements de la langue source, parfois dansles remarques du même orateur.

Peu importe qu’ils travaillent à la Chambre ou dans un comité, àl’Assemblée législative, qu’ils voyagent dans les régionséloignées de l’Ontario, ou qu’ils soient affectés aux questionsorales ou aux affaires courantes, les interprètes de l’Assembléesavent que chaque jour comportera de nouveaux défis devocabulaire, des débats qui stimulent la discussion et poussent àla réflexion et un travail qui a, en fin de compte, un effet sur lavie quotidienne de tous les Ontariens.

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L’étude réalisée par le Comité sectoriel de l’industrie de latraduction en 1999 concluait que le métier d’interprète deconférence est méconnu. C’est toujours le cas aujourd’hui.Quand je dis quel métier j’exerce, on me regarde en générald’un air médusé. J’ajoute alors : « C’est de la traductionsimultanée, comme à la Chambre des communes ». Là, jeme suis généralement fait comprendre.

Lorsqu’elle est connue, l’interprétation de conférence esttoutefois bien perçue, nous révèle la même étude. Le déficonsiste à la faire connaître auprès des clients, des autresprofessions, du grand public et de la relève. Il faut doncmener une double action de relations publiques : versl’extérieur et vers l’intérieur.

Pour mener cette action, l’Association internationale desinterprètes de conférence (AIIC) s’est dotée de structures etde moyens. Sa Commission internationale des relationspubliques a mis au point, de 1991 à 1994, toute une série debrochures, de pochettes et de fiches-conseils à l’intention detous ceux qui gravitent autour du secteur des conférences. Ce travail effectué, la Commission a fait place à un réseauinformel de relations publiques et à une Commission descommunications chargée de donner les grandes orientationsdans ce domaine. Virage technologique oblige, l’AIIC aégalement, il y a quelques années, lancé son site Web(www.aiic.net) et son bulletin électronique Communicate!,et elle met une adresse électronique « aiic.net » à ladisposition de chacun de ses membres.

Mais la structure de l’AIIC, qui est une organisationinternationale, pose en elle-même des défis en matière derelations publiques car ses quelque 2800 membres setrouvent éparpillés aux quatre coins du monde. « Pour sefaire connaître et reconnaître, l’AIIC doit projeter uneimage cohérente et fournir aux régions une base à partir delaquelle bâtir leurs activités », précise Francesca Geddes,la coordonnatrice du Réseau international de relationspubliques. Toute la difficulté consiste à tenir égalementcompte de la réalité bien différente des marchés locaux.

Par ailleurs, il faut éviter de déborder sur un marketingpurement commercial qui ne correspondrait pas à lavocation de l’AIIC et qui est interdit par d’autres ordres

professionnels auxquels plusieurs de nos interprètes deconférence appartiennent également. Toutes lesassociations ne s’imposent pas les mêmes restrictions et onconstate chez certaines, notamment aux États-Unis, unepromotion beaucoup plus « commerciale » de leursmembres. Reste à voir si celle-ci gagnera le Canada et,éventuellement, l’AIIC.

Pour l’instant, l’action de l’aiic en matière de relationspubliques consiste à entretenir la réputation de qualité deses membres et à les faire connaître. Au Canada, cetteaction s’articule autour de plusieurs initiatives, telles que :

• envoi de notre annuaire régional à 150 organisateurs deconférences, hôtels et centres de congrès;

• octroi, chaque année, du prix de l’AIIC à un technicienet à un étudiant;

• possibilité pour tous les membres de faire imprimer unecarte de visite au logo de l’AIIC;

• participation à des entrevues (dont une, l’an dernier, surles ondes de Radio-Canada), et à des colloques et descongrès où nous présentons des exposés (dont celui del’OTTIAQ et de Protocol and Diplomacy International);

• participation de nos membres au Programmed’interprétation de l’École de traduction etd’interprétation de l’Université d’Ottawa etprésentations à des étudiants de l’Université deMontréal;

• construction du site régional de l’AIIC au Canada.

Si les actions varient selon les époques et les moyensfinanciers de l’AIIC, une constante demeure : les relationspubliques sont toujours à refaire. Et dans ce travailinlassable, aucune initiative ne saurait remplacer la fonctiond’ambassadeur de la profession que chaque interprète deconférence peut assumer individuellement, au hasard de sesrencontres avec des clients, des étudiants, des collègues nonmembres et le grand public.

Louise Côté-Limbos est membre du Conseil de l’AIIC et duRéseau international de relations publiques.

Spécial interprétation de conférence • Spécial interprétation de conférence

Les relations publiques à l’AIIC : stratégie individuelle et collective Par Louise Côté-Limbos, int. conf. a., trad. a.

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Spécial interprétation de conférence • Spécial interprétation de conférence

• Votre débit de lecture est souvent plus rapideque votre débit de parole, certains participantspourront avoir du mal à vous suivre et votremessage pourrait en être tronqué. Si cetteconférence est votre première rencontre avecl’interprétation simultanée, faites un essai avantla séance. Le BON rythme est d’environ 3 minutes par page de 40 lignes.

• Avant de parler, assurez-vousque votre microphone est bienbranché. Ne tapez pas sur le microphone, ne soufflezpas non plus pour vérifier son fonctionnement, le sonamplifié est douloureux auxoreilles de vos interprètes.Pour « tester », il vous suffitde dire « Bonjour » ou « Merci Monsieur lePrésident » dans le microphone.

• Ne parlez pas trop près du microphone et nelaissez pas vos écouteurs près du microphonelorsque vous parlez, ce sont des sourcesd’interférences et de sifflements désagréablespour tous. Le technicien du son est là pourvous conseiller.

• Si vous vous déplacez, par exemple pourcommenter diapositives ou transparents,utilisez un micro-cravate. Sans microphone, leson ne parvient pas aux interprètes, même sivous haussez la voix.

• Si vous parlez de la tribune et souhaitezrépondre à des questions posées par lesparticipants, munissez-vous d’écouteurs pourpouvoir suivre l’interprétation des questions.

Les organisateurs de cette conférence se sontassuré le concours d’une équipe d’interprètes deconférence professionnels qui seront le lien decommunication entre les délégués de différenteslangues et cultures. Les interprètes sont vosalliés, ils vous aideront à faire passer votremessage. Vous les aiderez en suivant les règlessimples que voici :

• Si vous avez préparé untexte écrit ou des notes –que vous ayez l’intentionde les suivre ou de vous eninspirer – confiez-les au

Secrétariat de la conférence qui les transmettraaux interprètes. Les interprètes ne s’attachent pasaux mots seuls, ils en communiquent le sens. Ilspourront ainsi se familiariser avec le sujet quevous traitez et votre terminologie. Vous pouvezdonc librement vous écarter de votre texte ou lecompléter lors de votre exposé. Les interprètesAIIC sont tenus au secret professionnel. N’ayezaucune crainte, ils respecteront la confidentialitéde vos notes, qui vous seront rendues si vous ledésirez.

• Si votre communication est très technique,veuillez donner aux interprètes touteterminologie et/ou documentation dont vousdisposez sur le même sujet dans différenteslangues. Vous pouvez aussi demander auSecrétariat de la conférence d’organiser uneséance d’information. Cette rencontre avec lesorateurs permettra aux interprètes de clarifiercertains points, et votre message sera transmisavec plus de précision.

• Si votre communication comporte la projectiond’un film, de diapositives ou de transparents,prévoyez un exemplaire du texte ou une copiedes transparents pour les interprètes. Ils sontdans des cabines souvent situées loin del’écran, avoir le texte devant les yeux leur serad’une aide précieuse.

Conseils aux orateurs

Publié avec l’aimable autorisation de l’AIICDroit d’auteur et de reproduction AIIC

http://www.aiic.net/ViewPage.cfm/article14.htm?plg=2&slg=2

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8 InformATIO

• Séance d’information : si votre conférenceest d’un haut niveau technique, il est bond’organiser une rencontre entre orateurs etinterprètes. Les interprètes auront ainsi lesréponses à leurs questions de terminologieou de procédure.

• Liaison : pour une bonne coordination, unepersonne de votre organisation pourraitassurer la liaison avec le chef de votreéquipe d’interprètes. En particulier, procéderau règlement sur place des frais de séjourdes interprètes selon leur contratd’engagement.

• Installation technique :vérifiez que votre fournisseura bien installé le nombre decabines et de canaux requispour la conférence, quel’équipement est en bon état de marche etque tous les délégués disposent bien d’unécouteur. Avant l’ouverture de la conférence,demandez à l’interprète-conseil ou au chefd’équipe des interprètes et au cheftechnicien de vérifier le bon fonctionnementde l’installation.

• Projections : s’il doit y avoir projection dediapositives, films ou transparents, assurez-vous que l’écran est bien visible des cabineset que les interprètes ont bien reçu les textesde ces projections à l’avance.

Vous avez recruté des interprètesprofessionnels. Ils accompliront pour vous untravail de grande qualité. Vous les aiderez parces simples gestes.

• Conseils aux orateurs : remettez à chacundes orateurs un exemplaire des « Conseilsaux orateurs » que votre interprète-conseil sefera un plaisir de vous transmettre.

• Documentation : les interprètes ont desconnaissances étendues mais ne peuvent pasêtre experts dans tous les domaines. Faitesleur parvenir, dès que possible et avant ladate de votre conférence, toute ladocumentation disponible dans les languesde travail utilisées. L’étude des textes leurpermettra de se familiariser de façon préciseavec le sujet particulier des séances detravail. Ils établiront leurs propres glossaireset suivront mieux les orateurs dont certainspeuvent parler trop vite ou avec des accentstrès prononcés.

• Outre l’ordre du jour et les textes desinterventions devant être lus, il serait bon deleur transmettre les rapports de réunionsprécédemment tenues sur le même sujetainsi qu’une documentation générale survotre organisation ou association et les nomsdes responsables et des orateursaccompagnés d’un bref c.v. De plus, chaqueinterprète devra recevoir toute ladocumentation envoyée aux participants.

• Remettez aux interprètes, avant chaqueséance et/ou débat, les documents qui serontrédigés et distribués aux participants. Chaquecabine recevra au moins un exemplaire de cesdocuments, si possible dans chacune deslangues de la conférence.

A l’attention des organisateurs de conférence

Spécial interprétation de conférence • Spécial interprétation de conférence

Publié avec l’aimable autorisation de l’AIICDroit d’auteur et de reproduction AIIC

http://www.aiic.net/ViewPage.cfm/article15.htm?plg=2&slg=2

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Spécial interprétation de conférence • Spécial interprétation de conférence

Tout nouveau membre du Conseil d’administration de l’ATIO,je participais vers 1993 à une séance de « remue-méninges »sur l’avenir des professions du langage. La discussion portaitsurtout sur les bouleversements que les logiciels de traductionautomatique semblaient devoir susciter dans le travail (et legagne-pain) des traducteurs. Interrogé sur les changements quiattendaient l’interprétation de conférence, j’étais tout à faitincapable d’en imaginer puisqu’il était évident qu’aucunemachine n’était près de pouvoir faire le travail de mes collègueset le mien.

Douze ans plus tard, la traduction automatique sort à peine dela science-fiction, mais le travail de beaucoup d’interprètes deconférence est en revanche en pleine mutation. Si la nature denotre prestation (restituer simultanément un message dans uneautre langue) n’a pas fondamentalement changé, lesconditions dans lesquelles nous l’exécutons, elles, évoluent deplus en plus rapidement. Pour commencer, le paradigmemême de la conférence a changé avec l’avènement desmoyens de communication modernes, téléconférence d’abordet plus récemment Webdiffusion.

Il faut à présent, surtout dans le secteur privé, une raisonimpérieuse pour rencontrer face à face des interlocuteurs aveclesquels on peut tout aussi facilement communiquer sanssortir de son bureau. D’abord considérés comme des moyensd’économiser sur les voyages, la téléconférence et Internet ontprofondément changé les habitudes de communication :désormais, on se réunit plus souvent, moins longtemps et dansun délai plus court; à présent, des interlocuteurs très disperséspeuvent recevoir une communication qu’il serait lourd etcoûteux de leur transmettre en personne.

À titre d’exemple, le président d’une grande banque peutaujourd’hui s’adresser par téléphone et sur Internet, en tempsréel, aux dizaines de milliers d’employés de son groupefinancier, et même répondre en direct à leurs questions. Unconstructeur d’automobiles peut communiquersimultanément, grâce à un réseau privé de télévision en circuitfermé, avec l’ensemble de ses concessionnaires pour leurannoncer les dernières promotions. Il est banal pour lesgrandes entreprises d’annoncer leurs résultats trimestriels partéléphone à des dizaines d’analystes financiers.

Et de plus en plus, les interprètes interviennent dans toutes cessituations et dans beaucoup d’autres encore. L’enjeu est detaille car si nous n’avions pu adapter nos méthodes à la

nouvelle donne, la communication nouveau genre aurait étéunilingue. Mais l’interprétation s’épanouit dans ces secteursnouveaux et y trouve même une utilité nouvelle. Cetteévolution s’accompagne d’une véritable réinvention de nosméthodes de travail et bouscule des préceptes encore hiersacrés : vue sur le conférencier, travail en équipe,rémunération journalière.

Comment l’interprète pourrait-il, comme jadis, exiger de voircelui dont il restitue les propos dans une téléconférence,puisque les autres auditeurs ne le voient pas non plus? Dans cecontexte nouveau de prestations courtes et intenses,l’attachement traditionnel à l’équipe cède le pas au travailindividuel, voire individualiste. Est-ce un progrès? L’habitudeenracinée de travailler et d’être payé par unité d’une journéese voit remise en question, alors que la prestationd’aujourd’hui dure une heure, une demi-heure peut-être, maisdans des conditions souvent plus difficiles et intenses que letravail en cabine traditionnel. Il est courant que les clientsdemandent des voix de femme pour interpréter les femmes etd’homme pour les hommes : s’agit-il d’une adaptation logiqueà la situation de l’auditeur ou du spectateur qui serait tropdépaysé, ou d’un abus qui assimile les interprètes auxcomédiens?

Certains soupçonnent que c’est peine perdue de vouloirassurer un service de la même qualité dans des conditionsdéfavorables, voire impossibles. Récemment, une commissiondu Parlement européen chargée d’étudier la possibilité dutravail à distance (qui éviterait de déplacer une partie del’énorme effectif d’interprètes exigé par les multiples languesde l’UE) rendait un avis dans l’ensemble négatif, constatantque l’éloignement physique et la transmission du son àdistance entraînaient des effets néfastes pour la qualité dutravail et même la santé des interprètes.

Et que dire de la qualité du son, donnée de base du travail del’interprète? Le son transmis par une ligne téléphonique ou surInternet est souvent inférieur à l’idéal de pureté et de clartéqu’un bon technicien peut atteindre dans une salle de réunion,et parfois carrément détestable. Mais les participantsn’entendent pas mieux non plus... C’est dire que l’avenir del’interprétation de conférence se joue en ce moment. Gageonsque notre profession saura suivre l’évolution des techniquesde communication tout en préservant la qualité et la rigueurqui ont jusqu’ici conforté notre rôle.

L’interprétation à la demi-heure de l’InternetPar Fabrice Cadieux, int. conf. a., trad. a.

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Spécial interprétation de conférence • Spécial interprétation de conférence

Les lecteurs fidèles d’InformATIO n’ont pas oublié que leConseil des ministres de l’Éducation (Canada) [CMEC] fut en1993 le premier organisme en Ontario à adopter une politiquede recours prioritaire aux membres de l’ATIO (dont le titrevenait de recevoir la reconnaissance légale par la Loi de 1989sur l’ATIO) pour ses services d’interprétation de conférence.M. Colin Bailey, directeur adjoint des communications duCMEC, est responsable des nombreuses rencontres organiséespar ce secrétariat interprovincial. Il a bien voulu rencontrer lecorrespondant d’InformATIO pour commenter la politique duCMEC.

InformATIO : M. Bailey, l’interprétation représente-t-elle unservice important pour le CMEC?

Colin Bailey : L’interprétation constitue une fonction vitalepour notre organisation puisqu’elle nous permet d’appliquernotre politique de bilinguisme dans les rencontres que nousorganisons, qui vont des réunions de ministres jusqu’auxséances de groupes de travail.

I : Les services d’interprétation ont-ils beaucoup changé auCMEC depuis 1993?

CB : Énormément. Alors que notre salle de conférencesdésemplissait rarement il y a dix ou quinze ans, aujourd’huil’essentiel des concertations se fait par téléconférence. Cemoyen de communication nous permet de réaliserd’importantes économies et aussi de gagner beaucoup desouplesse. Nous sommes particulièrement fiers d’avoir mis aupoint un service d’interprétation spécialement adapté aux

téléconférences, qui suscite des observations élogieuses mêmede ministres et de hauts fonctionnaires. Par ailleurs, nousavons procédé au fil des années à des sondages systématiquesauprès des utilisateurs de nos services d’interprétation et nousavons fait analyser les résultats de ces enquêtes par unconsultant externe, ancien chef d’un grand serviced’interprétation gouvernemental. Nos interprètes ont obtenudes cotes de satisfaction de l’ordre de 90 %.

I : À quoi attribuez-vous ces niveaux de satisfactionimpressionnants?

CB : En premier lieu, à notre politique de recrutement quiconsiste à miser sur la qualité professionnelle. Avec desinterprètes de conférence agréés, recrutés par un interprète-conseil expérimenté, nous sommes certains de pouvoir offrirun service de grande qualité. Mais ce n’est pas tout, noussavons que le client a un rôle clé à jouer. C’est pourquoi nousveillons soigneusement à fournir une installation techniqueimpeccable et à réunir, à l’intention des interprètes, unedocumentation bilingue complète à l’avance de chaqueprestation.

I : Prévoyez-vous que le CMEC continuera de recruter desinterprètes de conférence agréés?

CB : Vos membres ont su s’adapter à l’évolution de nosméthodes de travail et nous ont fourni, au fil des années, desservices fiables et de qualité. Nous comptons sur eux pour nousfaciliter le travail (dans les deux langues) dans l’avenir!

Point de vue du client

Les heures de travail varient elles aussi : de 9 h à 17 h la plupart dutemps, parfois de 8 h à 18 h ou de 10 h à 16 h, sans mentionner lessoirées et week-ends occasionnels.

Outre les compétences linguistiques obligatoires, les qualités essentiellesde l’interprète de conférence sont une curiosité insatiable, une extrêmesouplesse, la capacité de dormir n’importe où, de manger n’importe quoiou de fonctionner à l’eau ou au café infect pendant des heures, ainsiqu’une patience à toute épreuve pour les affectations où il fautconstamment « se dépêcher et attendre ». Au fil des ans, l’interprète deconférence touche à tout même si trop souvent il ne peut approfondir.

Les interprètes de conférence qui travaillent pour le Bureau de latraduction du gouvernement fédéral, qu’ils soient employés ou pigistes,sont des professionnels aussi compétents que dévoués qui ont pourmission de jeter un pont sur notre fossé linguistique. Je peux dire en toutehonnêteté que j’adore la profession que j’ai choisie et que je me réjouisà la perspective d’apprendre quelque chose de nouveau chaque jour.

à quelle heure ils commencent, ils n’ont qu’une vagueidée de l’heure à laquelle se terminera le comité auquelils sont affectés!

Pendant les périodes d’ajournement parlementaire, lesinterprètes sont détachés au Service d’interprétation desconférences.

Actuellement, le plus gros souci des gestionnaires est « la relève ». Beaucoup de mesures ont été prises afind’encourager la formation et le recrutement d’interprètesqualifiés, mesures qui, à elles seules, justifieraient unarticle dans InformATIO!

Le Service de l’interprétation parlementaireSuite de la page 4

Une journée dans la vie d’une interprète du gouvernement fédéralSuite de la page 4

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Spécial interprétation de conférence • Spécial interprétation de conférence

En premier lieu, il faut dire que numériquement laprofession est minuscule. L’Association internationale desinterprètes de conférence (AIIC) compte moins de 2800membres dans le monde entier. Le nombre total depersonnes qui exercent la profession est certainement plusélevé, mais reste très modeste. Une école [comme l’ÉTI àOttawa] délivre chaque année un très petit nombre dediplômes, toutes langues confondues.

Ce n’est pas une raison de vous décourager. Les bonséléments sont toujours les bienvenus, et ce n’est pas uneprofession en voie de disparition - quoi que l’on dise surl’usage de plus en plus répandu de l’anglais.

Alors que faut-il pour devenir interprète de conférence?Faut-il être un génie, un virtuose des langues? Non, biensûr. Il faut cependant un ensemble d’aptitudes, qui, pourêtre relativement courantes, ne sont pas très souvent réunieschez le même individu. Il faut bien entendu desconnaissances linguistiques au-dessus de la moyenne, maisil s’agit là d’une condition nécessaire et non suffisante. Ilfaut aussi une bonne capacité d’analyse et de synthèse, et lafaculté de s’exprimer avec précision et d’une façonagréable. L’ennui, c’est qu’il est difficile de juger à l’avancesi quelqu’un a de bonnes chances de réussir dans cette voie.Les bonnes écoles d’interprètes font de gros efforts desélection, pour éviter qu’un candidat ne s’engage dans uncursus difficile alors que de toute évidence les lacunes àcombler sont telles qu’il serait plus « rentable » pour lui deconsacrer ses énergies à autre chose. Personne, cependant,n’a encore trouvé le moyen miraculeux de garantir le succèsà coup sûr.

Lorsque je dirigeais la section interprétation de l’Écolesupérieure d’interprètes et de traducteurs (ESIT) à Paris, onme demandait souvent quelles étaient les qualités requisespour l’apprentissage de ce métier, et la seule réponse que jetrouvais consistait à dire que je n’en savais rien, mais quej’avais noté que la principale cause d’échec était uneinaptitude à exprimer sa pensée avec précision, y comprisdans sa langue maternelle.

J’ai dit que ce métier était passionnant. Il l’est pour diversesraisons, certaines évidentes, d’autres moins. On a souventl’occasion de voyager, c’est vrai. Servir d’intermédiaire, de« truchement », donne souvent de grandes satisfactions -mais aussi parfois une certaine frustration, quand on a le

sentiment que ceux pour qui on fait bien un travail difficilefont mal le leur. En revanche, l’intérêt que présente uneimmersion dans des milieux différents, avec des gensdifférents parlant de choses différentes, ne se dément jamais- pour peu que l’on maintienne délibérément sa curiosité enéveil.

Et enfin l’acte d’interprétation lui-même est un exerciceintellectuel qui apporte de grandes satisfactions, commetout exercice difficile quand on le réussit. Sans compter quele maniement précis d’un outil aussi subtil et performantque la langue est une joie en soi.

C’est aussi un métier exigeant. Pour commencer, l’acted’interprétation, je l’ai dit, est difficile. Il demandebeaucoup de concentration, que ce soit en consécutive(quand l’interprète prend des notes et refait le discours aprèscoup) ou en simultanée (en cabine, avec écouteurs etmicro). De surcroît, chaque fois c’est comme si on passaitun examen, et cela donne le trac!

L’interprétation de conférence présente une particularité :l’interprète, même dans une équipe de simultanée, travailletoujours seul, « sans filet ». Sa prestation ne peut êtrefiltrée, ou corrigée par un supérieur, un réviseur.

Les conditions d’exercice de la profession sont dansl’ensemble relativement souples. Un pigiste est libred’accepter ou de refuser un engagement; un permanentn’est pas normalement astreint aux horaires administratifs.En revanche, il existe dans tous les cas une obligation derésultat, et donc une exigence de rigueur. Rigueur, bien sûr,dans la transmission du message, mais aussi dans lapratique professionnelle quotidienne : par exemple, uninterprète de conférence n’est jamais en retard pour uneréunion, même si les délégués le sont. Et surtout, rigueurabsolue en matière de secret professionnel. Rien, aucuneinformation, même banale, ne doit passer par l’interprète,jamais, même longtemps après (nous nous interdisonsd’écrire nos mémoires).

C’est par l’application rigoureuse de cette déontologie queles interprètes ont su gagner la confiance des utilisateurs etfaire de l’interprétation de conférence la professionrespectée qu’elle est aujourd’hui.

La carrière d’interprète vous tente-t-elle?Par Christopher Thiery, membre associé, AIIC

Publié avec l’aimable autorisation de Christopher Thiery

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Spécial interprétation de conférence • Spécial interprétation de conférence

TA : Parfois, c’est un peu difficile, car certains groupes exigentun suivi constant, lorsque les participants n’allument oun’éteignent pas leur micro, ce qui oblige le technicien à le fairepour eux. On sait que sans un micro branché, ou s’il y a trop demicros branchés en même temps, les interprètes n’entendent pasce qui se dit.

I : Et que font-ils alors? Ils tambourinent avec aigreur sur la glacede la cabine?

TA : Ils me le font savoir. Parfois, on me demande s’il est difficilede s’entendre avec les interprètes. Je ne trouve pas. C’est commepartout, si on aborde la situation avec l’esprit ouvert et qu’on faitbien son travail, on peut collaborer avec tout le monde. Ças’applique aussi au personnel des hôtels et même aux clients!

I : Et que dire de l’aspect technique du travail? Je suppose quevotre principal défi consiste à obtenir un son de qualité avec unmatériel portatif.

TA : En fait, il est très possible d’obtenir un bon son du momentque le système est correctement installé. Mon plus grand défi esten fait celui de l’espace. Souvent, je dois trouver des façonsingénieuses de faire tenir une cabine d’interprétation dans unesalle qui est en réalité trop petite pour la recevoir, ou encore dehisser des caisses de matériel dans des escaliers de service

Suite à la page 14

Héros méconnus Si les interprètes travaillent dans les coulisses, leurs partenairesindispensables – les techniciens qui assurent le service techniquedes réunions – demeurent souvent eux aussi dans l’ombre.InformATIO s’est entretenu avec Tony Abbate, représentanttechnique chevronné et respecté de la société AVW TELAV AudioVisual Solutions de Toronto, sur les hauts et les bas de sontravail.

InformATIO : Beaucoup de gens, y compris certains qui vouscôtoient tous les jours, ne mesurent pas l’étendue et l’importancede votre rôle. Qu’est-ce qui étonne le plus vos interlocuteursquand ils en apprennent davantage sur ce que vous faites?

Tony Abbate : Ils sont sans doute les plus surpris d’apprendredepuis combien de temps nous sommes sur place lorsqu’uneréunion commence. Quand les participants et les interprètescommencent à arriver tranquillement, nous sommes généralementsur les lieux depuis trois ou quatre heures, occupés à installer lesmicros, la cabine et tout le reste du matériel. L’un des membresde l’équipe technique reste toute la journée pour faire fonctionnerle système. Si la réunion ne dure qu’une journée, nous devonsalors tout démonter, parfois précipitamment si la salle estréservée pour un autre événement peu après.

I : Votre journée est donc très longue. Vous arrive-t-il de peinerpour suivre?

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De Carthage à l’ONUPar Fabrice Cadieux, trad. a., int. conf. a.

La période moderne est elle aussi traitée abondamment,retraçant l’essor de l’interprétation et de la traduction dansles relations entre pays et au sein des organisationsinternationales depuis que d’autres langues decommunication se sont ajoutées au français. On trouve iciaussi quantité de détails sur les méthodes de travail desconférences internationales avant l’interprétationsimultanée ou sur la création des grandes écoles detraduction dans le monde.

Malgré l’originalité et l’intérêt certain de toute cettedocumentation, l’ouvrage décevra le lecteur qui ychercherait une analyse sérieuse du rôle des professionnelsdu langage dans la diplomatie. Anecdotique jusqu’à l’excès,il survole sans approfondir et les documents et témoignagesinédits y semblent parfois prodigués dans un esprit dedivertissement plutôt que de synthèse.

Roland, Ruth A., Interpreters as Diplomats, A DiplomaticHistory of the Role of Interpreters in World PoliticsPresses de l’Université d’Ottawa, 1999, 209 pages,ISBN 0-7766-0501-1, 28 $Commander à [email protected]

C’est aux procès des criminels de guerrenazis, en 1945-1946, que l’interprétationsimultanée fut pour la première foisessayée à grande échelle. Les audiencesdurèrent dix mois et se tinrent en quatrelangues (français, anglais, russe etallemand), et le déroulement de ces procèsfut véritablement rendu possible par

l’invention de techniques nouvelles d’interprétation,soutenues par des moyens techniques nouveaux. Nombreuxfurent ceux (entre autres, beaucoup de grands interprètes del’entre-deux-guerres) qui s’opposèrent à l’introduction del’interprétation simultanée, en particulier dans un procèsdont on craignait que la crédibilité et l’exemplarité ne fussentcompromises par ce système audacieux et controversé.

Dans son ouvrage The Origins of SimultaneousInterpretation (Presses de l’Université d’Ottawa, enanglais), Francesca Gaiba, interprète de conférence,

« C’était à Mégara, faubourg de Carthage,dans les jardins d’Hamilcar... » Qui ne sesouvient des premières scènes terrifiantesde « Salammbô », de Gustave Flaubert,qui dépeignent la révolte des mercenairescarthaginois? Mais sait-on que la longuerébellion, finalement étouffée dans des

circonstances sanglantes, aurait été causée par desproblèmes d’interprétation entre les généraux de la citépunique et leur armée polyglotte?

L’ouvrage de Ruth A. Roland, Interpreters as Diplomats,publié aux Presses de l’Université d’Ottawa, abonde endétails curieux comme celui-ci sur les interprètes et lestraducteurs en diplomatie et en politique, surtout à desépoques ou dans des régions mal connues du lecteuroccidental moderne : comment Alexandre le Grand ou lesCroisés se débrouillaient-ils dans leurs expéditions? Quelrôle les professionnels du langage ont-ils joué dansl’ouverture de la Chine, du Japon à l’Occident?

Nuremberg : procès équitable?Par Fabrice Cadieux, trad. a., int. conf. a.

rassemble de nombreux documents jusqu’ici inédits,notamment des témoignages d’interprètes présents auxprocès, pour répondre aux interrogations fondamentalessoulevées par l’événement qui inaugura l’interprétation deconférence moderne : quel fut l’impact de l’interprétationsur les interrogatoires et contre-interrogatoires? Quel effetles problèmes de langue eurent-ils sur l’ensemble desdébats? Le recours à l’interprétation simultanée remet-il enquestion l’équité des procès? Les questions évoquées dansce récit passionnant trouvent un écho dans nos sociétésd’aujourd’hui, où les obstacles linguistiques (dans lestribunaux et ailleurs) représentent un défi constant.

Gaiba, Francesca, The Origins of SimultaneousInterpretation - The Nuremberg TrialsPresses de l’Université d’Ottawa, 1998, 191 pages,ISBN 0-7766-0457-0, 26 $Commander à [email protected]

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minuscules. Depuis peu, un nouveau problème se présente :l’interférence causée par les appareils Blackberry des clients. Il yen a qui refusent carrément de les éteindre!

I : Comment devient-on technicien? Et quel est le profil decarrière typique?

TA : Beaucoup de techniciens commencent au début de lavingtaine, après une formation d’ingénieur du son. Mais lesantécédents sont très variés. Pour ma part, j’ai d’abord étudié lacomptabilité et travaillé dans la publicité. Je fais ce métier depuis15 ans et j’ai vu bien des choses étonnantes et beaucoup dechangements aussi.

I : Quels ont été les grands moments jusqu’ici?

TA : Hé bien, grâce à ce travail, j’ai pu visiter le Canada, bien desendroits – le nord de l’Ontario, les Prairies, par exemple – où jene passerais normalement pas mes vacances! J’ai aussi fait desvoyages à l’étranger. Par exemple, je me suis rendu en Australieplusieurs fois lorsque ma compagnie a eu le contrat des Jeuxolympiques de Sydney.

I : Qu’est-ce que l’avenir vous réserve?

TA : Les techniciens qui décident de poursuivre leur carrièrepeuvent accéder à des postes de gestion ou de vente, ou encoreêtre mutés à la section de l’audiovisuel. Beaucoup de compagnies

de matériels d’interprétation fournissent également des servicesd’audiovisuel, et c’est un secteur en pleine croissance. D’ailleurs,alors que l’interprétation simultanée était autrefois la section deprestige dans une compagnie d’audiovisuel, elle perd de sonimportance et ce sont les énormes événements informatisés quisont les prestations les plus recherchées. Mais je me dis que lesgens voudront toujours se rencontrer, et qu’il faudra toujours desprofessionnels pour surmonter l’obstacle des langues!

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✓ NOVEMBRE 20052-5 novembre 2005 : Conférenceannuelle de l’American LiteraryTranslators AssociationHôtel Omni Mont-RoyalMontréal (Québec)Renseignements :http://www.literarytranslators.org/conference.html

9-12 novembre 2005 : Congrès annuel de l’AmericanTranslators AssociationSeattle (Washington)Renseignements : www.atanet.org

Calendrier des activités

Spécial interprétation de conférence • Spécial interprétation de conférence

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