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Université Lyon II Institut d’Urbanisme de Lyon Mémoire et rapport de stage de 1 ère année de Master « Sciences des Sociétés et de leur Environnement » Mention « Urbanisme et Aménagement » Une définition ambigüe et élusive de la centralité urbaine à Romans comme échec de la revalorisation du centre ancien Stage au Service Urbanisme de la mairie de Romans-sur-Isère dans la Drôme Du 1 er Février au 16 juillet 2010 Enseignant tuteur : Philippe CHAUDOIR Marisa JULIEN Maître de stage : Aurélie RODET Promotion 2009/2010

Une définition ambigüe et élusive de la centralité urbaine ... · Une représentation de la centralité déconnectée de la réalité urbaine ... e dans de nombeux détails la

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Université Lyon II Institut d’Urbanisme de Lyon

Mémoire et rapport de stage de 1ère année de Master « Sciences des Sociétés et de leur Environnement »

Mention « Urbanisme et Aménagement »

Une définition ambigüe et élusive de la centralité

urbaine à Romans comme échec de la

revalorisation du centre ancien

Stage au Service Urbanisme de la mairie de Romans-sur-Isère dans la Drôme

Du 1er Février au 16 juillet 2010

Enseignant tuteur : Philippe CHAUDOIR Marisa JULIEN

Maître de stage : Aurélie RODET Promotion 2009/2010

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2

Remerciements

Je remercie tout particulièrement Aurélie Rodet, responsable adjointe du service

urbanisme et tutrice de mon stage de Master 1, qui a su me guider tout au long de mon

travail et qui a trouvé un certain équilibre en me laissant assez d’autonomie et en me

donnant des pistes de réflexions riches aussi bien pour ma mission que pour mon mémoire.

Je remercie toutes les personnes que j’ai sollicitées pour les entretiens réalisés et toutes

les personnes qui m’ont fait parvenir des documents qui ont alimenté ce rapport de stage et

ce mémoire.

Je remercie plus généralement toutes les personnes du service Urbanisme, avec

lesquelles j’ai eu le plaisir de travailler quotidiennement, ainsi que Martine Buon, responsable

du service Urbanisme et Christelle Mottet, directrice de l’Aménagement urbain de la ville de

Romans.

Enfin, je remercie Philippe Chaudoir qui a été disponible chaque fois que je l’ai sollicité.

3

Mots clés

Centralité, centre ancien, centre-ville, représentation de la ville, imagerie,

patrimonialisation, revalorisation

Résumé

Le centre ancien de Romans-sur-Isère a fait l’objet depuis plus de trente ans d’une

attention particulière de l’action publique, qui a développé des outils et des actions pour le

réhabiliter et le revaloriser.

Bien au-delà, de cet objectif de revalorisation, le centre ancien fait office, dans

« l’imagerie » (défini par Yves Chalas) ou l’imaginaire des décideurs politiques, de centre-

ville à part entière. Pourtant, il existe une extension du centre-ville qui s’est réalisée hors des

murs du centre ancien, avec l’émergence d’autres centres dynamiques - l’espace des

Boulevards et Marques Avenue - à la fois proches et séparés du centre ancien. Les élus

locaux focalisent leur action sur le centre historique et, pours diverses raisons, omettent

alors l’extension du centre-ville. Le centre ancien ne profite donc pas du dynamisme

important de ces autres centres romanais et est donc relégué au statut de quartier ancien

dégradé malgré une action massive sur celui-ci.

Il s’agira de comprendre les raisons de cette situation locale particulière et de rendre

compte des différents freins des décideurs politiques locaux pour penser, de manière plus

large, la centralité « réelle » de Romans. Une Réflexion plus globale sera exposée sur la

représentation du centre-ville que nous pouvons développer dans nos sociétés

européennes : c’est-à-dire qu’il existe une certaine confusion entre centralité et patrimoine.

Nous mettrons en avant et expliqueront les mécanismes qui font que le centre-ville peut

alors parfois se limiter au centre historique dans l’imagerie ou l’imaginaire des élus, des

associations, des techniciens ou encore des habitants.

4

Sommaire

Mots clés ................................................................................................................................................. 3

Résumé .................................................................................................................................................... 3

Sommaire ................................................................................................................................................ 4

Préambule ............................................................................................................................................... 5

PARTIE I : RAPPORT DE STAGE ...................................................................................................... 7

Introduction ............................................................................................................................................. 8

La ville de Romans : entre crises et mutations ........................................................................................ 9

La mairie de Romans : jeux d’acteurs, adaptation et freins de l’action ................................................ 22

Deux missions réalisées : informations et communication, synthèse de la situation et aide à la

décision sur un même territoire, le centre ancien romanais ................................................................ 38

Conclusion et perspectives .................................................................................................................... 47

PARTIE II : MEMOIRE .................................................................................................................. 50

Une définition ambigüe et élusive de la centralité urbaine à Romans comme échec de la

revalorisation du centre ancien ............................................................................................................ 50

Introduction : ......................................................................................................................................... 51

Pourquoi y a-t-il une centralité éclatée à Romans-sur-Isère ? .............................................................. 55

Une représentation de la centralité déconnectée de la réalité urbaine ............................................... 66

Un échec de la revalorisation du centre ancien : une conséquence de la définition élusive du centre-

ville ........................................................................................................................................................ 84

Conclusion : ........................................................................................................................................... 94

Sources: ................................................................................................................................................. 97

Glossaire .............................................................................................................................................. 101

Tables des illustrations ........................................................................................................................ 102

Tables des matières ............................................................................................................................. 103

Annexes ............................................................................................................................................... 106

5

Préambule

Mon parcours universitaire a toujours été animé par l’envie d’être pluridisciplinaire :

j’ai débuté par une première année dans une classe préparatoire littéraire sans avoir pour

autant l’objectif de devenir professeur. Cette première année fut l’occasion d’aborder des

matières différentes (géographie, histoire, philosophie), autant de champs des sciences

humaines que je trouvais intéressants et dans lesquels j’aurais voulu y voir un potentiel et

futur métier. Néanmoins, bien que l’analyse de théories et des idées abstraites et

scientifiques me plaisent, je me sens plus attirée par un travail concret, de terrain, tout en

abordant des champs sociaux, spatiaux, historiques et de prospectives, voire d’éthique. La

thématique urbaine répondait à cette exigence. Mon parcours universitaire s’est donc affiné

en postulant à l’Institut d’Urbanisme de Lyon (IUL) dès la troisième année de licence

« études urbaines ». Depuis cette troisième année de licence jusqu’à la fin de la première

année de Master à l’IUL, une double volonté s’est affirmée dans mon futur projet

professionnel: la pluridisciplinarité et avoir un possible débouché professionnel qui me

permettrait d’agir concrètement ou d’aider à la décision sur l’action portée sur la ville.

J’ai pu donc voir à travers différents dossiers réalisés au cours de ces deux années

passées des sujets très liés à la métropole lyonnaise. Même si les grandes problématiques

métropolitaines m’intéressent réellement, j’ai voulu pour mon stage professionnalisant,

travailler dans une ville moyenne et donc dans une plus petite structure. Ce qui me

permettait de voir la globalité du fonctionnement, avec l’espoir d’une plus ample

connaissance du terrain : que ce soit en lien avec les techniciens, les acteurs locaux et

notamment les élus, et d’aborder de manière plus approfondie leur fonctionnement et leurs

interactions.

Originaire de la région, j’ai donc postulé au service urbanisme de la mairie de

Romans, sans connaissance particulière de cette ville si ce n’est Marques Avenue et le

Musée de la Chaussure. Le stage aura été l’occasion de connaître dans de nombreux détails

la commune et plus encore la « vieille-ville » romanaise. Mon choix de la structure de stage

s’est aussi porté sur une collectivité pour comprendre l’inscription et la réalisation urbaines

de l’intérêt général défini par des élus locaux.

6

La mission proposée par le service urbanisme a éveillé ma curiosité : réaliser un

diagnostic exhaustif du centre ancien romanais dans le but de déposer un dossier de

candidature pour le Programme National de Requalification des Quartiers Anciens Dégradés

(PNRQAD) en 2011. Cette mission est à la croisée de différents thèmes (étude sociale, du

logement, commercial, patrimonial etc.) puisqu’il s’agissait d’être le plus transversal possible

et d’avoir une vision globale du territoire.

La prise de recul sur ma mission ainsi que diverses lectures de textes de chercheurs ont

peu à peu fait germer le sujet de mon mémoire. Selon ma propre expérience, le travail de

mémoire fut un travail intéressant sur la définition de moins en moins claire de la ville avec

l’avènement de la « ville émergente », et plus particulièrement de ce qui fait centre-ville

aujourd’hui. Bien que mon sujet se base sur le cas du centre ancien romanais, les nombreux

entretiens que j’ai réalisés auprès des acteurs locaux et mes différentes lectures plus

théoriques m’ont permis de comprendre de manière globale certains mécanismes dans la

représentation de ce que doit être un centre-ville aujourd’hui, parfois déconnectée de la

réalité de la ville actuelle, et sur ce que peut apporter un urbaniste ou un chercheur sur ce

sujet.

7

PARTIE I : RAPPORT DE STAGE

8

Introduction

Avant de présenter la structure dans laquelle j’ai réalisé mon stage, le service

Urbanisme de la mairie de Romans-sur-Isère, il s’agit de réaliser une brève introduction sur

la situation de la ville de Romans pour mieux cerner les problématiques qui la concernent,

la mairie romanaise étant largement imprégnée de celles-ci.

Il s’agit seulement de rappeler le contexte romanais passé et actuel et un cadrage qui

permettront de faciliter la compréhension du fonctionnement de la structure, et d’articuler

plus aisément la partie du rapport de stage avec la problématique du mémoire qui suivra.

Ensuite, il s’agira d’exposer la structure dans laquelle j’ai réalisé mon stage : ses

actions, les différents rôles des techniciens de la Direction de l’Aménagement Urbain et du

service Urbanisme, les partenaires de la ville de Romans ainsi que les différentes limites de la

structure que j’ai pu constater. Puis, j’exposerai les deux missions que j’ai du remplir et qui

avait comme support d’étude le même territoire : le centre ancien romanais. J’exposerai

aussi des critiques vis-à-vis de mon travail avec pour perspective une première vision du

métier d’urbaniste.

9

La ville de Romans : entre crises et mutations

Localisation de Romans

Romans-sur-Isère est la troisième ville de la Drôme, après Valence et Montélimar.

Cette Ville drômoise est située dans l’espace géographique qu’on appelle la Drôme des

collines et détient un certain rayonnement sur l’ensemble du Vercors, bien qu’elle soit

directement en concurrence avec la ville de Valence, pôle économique principal du

département.

Figure 1 Cartes de localisation de Romans-sur-Isère

10

Brève histoire urbaine de Romans

C’est au creux de la conque, au bord de l’eau et près du gué que, au IXe siècle Barnard

l’archevêque de Vienne, fonde son monastère (future Collégiale Saint Barnard). Cet

emplacement permettait dès l’origine le passage au gué entre le cône de déjection de la

Savasse et de l’Isère. Un « burgus » se forme très tôt autour du monastère au XIème siècle,

la première enceinte est prévue pour protéger cet ensemble bâti. Une fois close, la ville

continue de prospérer. Les différents marchés et foires, le pont, et la situation au carrefour

de grands itinéraires contribuent à la renommée de Romans.

L’urbanisation se développe au Nord et au Sud avec la création d’un faubourg de

l’autre côté du rivage de l’Isère : Bourg-de-Péage. Les activités et le commerce se

développent fortement, la population s’accroît, d’autres faubourgs se créent hors des murs.

Une seconde enceinte à la fin du XIVe siècle va englober dans la ville ses nouveaux

territoires urbains.

Jusqu’au XVIe siècle, Romans est plus peuplée et plus importante que la ville de

Grenoble. Au XVe siècle et XVIe siècle, 40 % de la population vit du travail de la terre, mais la

fabrication et le commerce des draps ainsi que des cuirs commencent à prospérer. Les

murailles sont démolies en 1832, les enceintes font place au boulevard. Les pierres des

remparts sont réutilisées pour construire les bâtiments qui viennent étendre un peu plus

Romans dans l’espace. L’avenue Gambetta est percée en 1883 en direction de Grenoble. La

construction d’une nouvelle caserne, la caserne Bon (aujourd’hui Marques Avenue) date

aussi de 1883. Des usines de chaussure s’y installent. Au XIXe siècle, on passe de l’artisanat à

l’industrie en ce qui concerne la fabrication de la chaussure. Dès 1864, l’urbanisation devient

exponentielle à Romans notamment grâce au succès des activités de la chaussure et de la

tannerie. Au XXe siècle, l’extension de la ville démarre au Nord, la vieille ville est alors

habitée majoritairement par les ouvriers, le centre ancien de Romans commence à se

paupériser. Se crée un habitat en dehors du centre ancien qui présente toutes les normes de

confort de l’époque. Souvent, les gens les plus aisés partent du centre historique, même si

certains, déjà attirés par le « cachet de l’ancien » y restent. Parallèlement, la vieille ville

continue sa paupérisation, habitée désormais par une population d’immigrés. Elle connaît

11

des problèmes de circulation en raison de l’étroitesse de son réseau de rues et son

commerce périclite.

Figure 2 Carte d'urbanisation de Romans et Bourg-de-Péage

Pour répondre à une demande toujours plus grande de logements et notamment de

logements sociaux, pour accueillir les ouvriers venant grossir les rangs de la main d’œuvre

industrielle, le quartier de la Monnaie est crée. Néanmoins, la situation se dégrade très

vite : dès la fin des années 1970 on constate des dysfonctionnements dans le quartier de la

Monnaie et, parallèlement, émerge une prise de conscience sur l’état tout aussi inquiétant

du centre ancien. Cette prise en compte particulière des problèmes de ces deux quartiers

concorde avec l’arrivée au pouvoir du Parti Socialiste à la mairie de Romans, comme nous

l’explique Jean Decauville qui travaille depuis plus de trente ans sur Romans: « Le quartier de

la Monnaie qui a l’époque n’avait à peine qu’une quinzaine d’années, était déjà confronté à

des difficultés. Même à l’époque on parlait déjà de renouvellement urbain. Ensuite, la

12

deuxième préoccupation de cette nouvelle équipe municipale était le Centre Ancien. J’étais

très surpris par l’état de dégradation du centre ancien de Romans »1.

Actuellement, on peut parler de trois enjeux d’aménagement principaux pour

Romans : la «Politique à deux têtes de Romans qui perdure depuis une trentaine d’années,

avec comme cibles prioritaires le quartier de la Monnaie et le Centre Ancien»2. Ensuite,

Romans, ville industrielle quasi monofonctionnelle en crise depuis la moitié des années

1970, détient de nombreuses friches industrielles dans son tissu urbain. Le renouvellement

urbain de ces friches se fait progressivement. Ainsi, Romans tente de retrouver une nouvelle

image, un nouveau souffle, pour ne plus être une ville sinistrée qui a subi de plein fouet la

fermeture successive d’usines du cuir et qui détient un taux de chômage record (17% en

2006 contre 9% en France).

1 Source : Entretien avec Jean Decauville, équipe d’animation de l’OPAH sur Romans et Bourg-de-Péage, le 8

avril 2010 2 Source : Entretien avec Jean Decauville, équipe d’animation de l’OPAH sur Romans et Bourg-de-Péage, le 15

avril 2010

13

Romans : une ville moyenne entre concurrence et coordination avec d’autres villes

La commune de Romans détient 33 600 habitants et est considérée comme une ville

moyenne. Depuis le début des années 1980, Romans connut une décroissance légère de sa

population, puis la ville connaît une remontée démographique depuis les années 2000.

Toutefois, Romans a une population qui augmente très faiblement par rapport aux autres

communes environnantes. Les communes rurales de la Communauté de Communes du Pays

de Romans (CCPR) sont touchées principalement par le phénomène de périurbanisation. Ce

phénomène-là reste un phénomène bien plus global à l’échelle nationale puisque « les

modalités de l’urbanisation se sont modifiées ces dernières décennies. D’une forme

traditionnellement compacte, les villes se sont progressivement diluées dans l’espace

environnant »3. Il y a donc depuis quelques années un phénomène de « desserrement de la

ville centre »4 et Romans n’échappe pas à ce mouvement. Notons que pour Romans, Il y a

deux mécanismes qui alimentent ce phénomène : la continuité des départs des ménages

vers des communes périphériques et le départ des étudiants vers des pôles universitaires et

d’activités environnants, à savoir Valence, Lyon ou Grenoble. Il existe donc une réelle fuite

des jeunes actifs, ce qui explique alors un vieillissement de la population sur Romans.

Romans réussit tout de même à se maintenir malgré un solde migratoire négatif. Il est

important de souligner « qu’aucune des villes de la taille de Romans en Rhône-Alpes n’a

enregistré de solde migratoire positif »5. La situation de Romans n’est donc pas un cas

unique dans la région. Actuellement, Romans arrive à stabiliser sa population grâce à un

solde naturel soutenu généré par une natalité de bon niveau.

A proximité de Romans, se trouve la commune de Bourg-de-Péage qui est considérée

comme la « Ville-sœur » de Romans : comme nous l’avons évoqué précédemment, Bourg-

de-Péage est un faubourg de Romans dans sa constitution. Aujourd’hui, il y a une forte

animosité entre les deux communes qui n’est pas un phénomène nouveau et s’est

constituée au fil du temps. « Il existe de gros problèmes de coordination entre Romans et

Bourg de Péage, ces problèmes remontent loin dans le passé. Par exemple, Romans et Bourg

3 Source : RERAT P., Mutations Urbaines, mutations démographiques, contribution à l’explication de la déprise

démographique des villes-centres, Revue D’Economie Régionale & Urbaine, 2006 (p.727) 4 Source : Rapport de présentation du PLU de Romans, 2006

5 Source : Rapport de présentation du PLU de Romans, 2006

14

de Péage faisaient partis de différents diocèses : Bourg-de-Péage dépendait du diocèse de

Valence alors que Romans dépendait du diocèse de Vienne. Plus récemment, Bourg-de-Péage

était de droite et Romans de gauche, ce qui a considérablement compliqué la coordination

entre ces deux communes. Dans les années 1920, un plan d’embellissement de la ville a été

crée, et n’a pas été possible de couvrir l’ensemble des deux communes »6. Aujourd’hui

encore, la Zone de Protection du Patrimoine Architectural Urbain et Paysager (ZPPAUP) n’a

été réalisée que sur Romans, alors que Bourg-de-Péage s’est constitué comme étant un

faubourg de Romans avec un bâti ancien qui aurait mérité d’être inclus dans la ZPPAUP

nouvellement crée et instaurée en 2008. Cette très nette distinction entre Romans et Bourg-

de-Péage persiste. Des animosités se cristallisent aussi au niveau des impôts : les Romanais,

payant plus d’impôts que les Péageois, ceux-ci ne comprennent pas pourquoi il y a un tel

écart sachant que les Péageois profitent de tous les avantages que peut offrir la ville de

Romans. Aujourd’hui, Romans et Bourg-de-Péage sont toutes les deux des communes de

gauche, cela a permis d’avancer sur certains points car : par exemple, cela ne fait que depuis

quelques années qu’un bus de transport en commun traverse l’Isère pour desservir les deux

communes, ce qui n’était pas le cas auparavant.

Ensuite, ces deux communes ne font pas parties des mêmes communautés de

communes (Communautés de Communes du Pays de Romans (CCPR) et Communautés de

Communes du Canton de Bourg-de-Péage (CCBP)) alors que ces deux territoires sont parties

intégrantes d’un même bassin de vie. Néanmoins, un effort tout particulier est porté sur la

coordination de l’activité économique avec la création du syndicat mixte de Romans Bourg-

de-Péage Expansion (RBE).

Néanmoins, est pensée et sera probablement crée, très prochainement

(approximativement en septembre 2011), une future Communauté d’Agglomération qui

regrouperait la nouvelle Communauté d’Agglomération de Valence qui est en cours de

construction actuellement, la CCPR et LA CCPB. Au cours de certaines réunions, j’ai pu

constater qu’il y avait un certain engouement pour cette future structure de la part des élus

locaux romanais. Cette nouvelle Communauté d’Agglomération sera t’elle un nouveau

souffle notamment pour la sphère politique ? Est-ce un projet permettant une plus grande

6 Source : Entretien avec Eric OLIVIER-DRURE, responsable du service archives de la mairie de Romans, le 18

mars 2010

15

cohérence avec le territoire valentinois ? Ce projet pourrait-il produire un nouveau

dynamisme et peut-être des nouveaux moyens financiers qui permettront de porter de plus

grands projets d’infrastructures ou d’aménagements urbains ? Autant de questions qui se

posent et alimentent un certain espoir de renouveau dans la dynamique du territoire.

Figure 3 Organisation des structures administratives et territoriales de Romans et Bourg-de-Péage

L’ensemble Romano-péageois représente le pôle urbain de la Drôme des collines : les

acteurs se forment selon cet ensemble géographique, notamment dans le secteur de

l’Habitat où les acteurs locaux se réunissent lors de certaines instances. J’ai pu assister à ce

type de réunions qui traite d’un territoire plus vaste que la simple délimitation de Romans.

Romans se situe à proximité de Valence (Valence se situe à 25 km de Romans) et

donc, par conséquent, il existe une certaine concurrence qui se met en place entre ces

deux pôles urbains. Valence est une ville deux fois plus grande en termes de population

avec 66 000 habitants et représentant de manière plus vaste une agglomération de 110 000

habitants. La ville de Valence détient une activité commerciale plus fleurissante, car cette

ville profite de sa position dans le couloir rhodanien, elle capte donc les flux économiques

qui vont de Lyon à Marseille. Romans est située plus proche du Vercors et se trouve donc

plus à l’intérieur de la Drôme des collines et est, par conséquent, plus isolée par rapport à

16

cette dynamique du couloir rhodanien. Romans et Valence sont deux villes qui profitent de

la proximité de Valence TGV (crée dans la commune d’Alixan entre Valence et Romans, en

2001). Ce nouvel équipement rend plus accessible Romans, car se situant actuellement a 35

minutes de Lyon, et à 2h10 de Paris en TGV.

17

Crise industrielle et reconversion

L’activité du cuir : prospérité et déclin

Romans a connu dès le Moyen-âge une période de prospérité dans l’activité du

textile, dans un premier temps, puis s’est peu à peu reconvertie dans l’activité du cuir avec

la création de tanneries qui se sont développées au bord de la Savasse et du canal de la

Martinette pour l’utilisation de l’eau, servant au travail du cuir. L’activité du cuir était donc

très présente dans la ville. Elle s’est poursuite et s’est industrialisé au XIXe siècle. Enfin,

l’activité du cuir trouva sa dernière spécialisation dans la fabrication de chaussures haute

gamme qui s’est développée et s’est industrialisée, jusqu’à ce qu’elle fasse la renommé de

Romans en lui donnant le statut de « capitale de la chaussure de luxe » en France.

La ville de Romans a connu une crise notable de l’industrie du cuir avec la fermeture

de différentes usines de tannerie et de fabricants de chaussure. L’industrie du cuir a connu

des difficultés dès la moitié des années 1970 (concurrence avec la mondialisation, coût de la

main d’œuvre trop chère, licenciements). Ces difficultés se sont poursuivies jusqu’à son

agonie très récente avec la fermeture des dernières unités de production de la chaussure de

luxe : la liquidation du groupe Stéphane Kélian le 22 août 20057 et la fermeture de l’usine

Jourdan le 17 décembre 2007 pour ne citer qu’elles. Une longue dégringolade de l’activité

industrielle du cuir s’est irrémédiablement réalisée malgré des efforts de reconversion dans

cette filière avec la création de la « cité cuir » (un atelier de démonstration à vocation

touristique, un atelier de fabrication artisanale ainsi qu’un projet d’entreprise) et une

stimulation de micro-entreprises de créateurs. Néanmoins, la tentative de reconversion ne

s’est faite que par l’aide à la formation et à l’emploi, comme nous pouvons le voir à travers

les mots du préfet relaté par le journal local l’Impartial : « Nous avons pu faire une

proposition de reclassement soit dans un emploi, soit au sein d’une formation

professionnalisant aux trois-quarts des licenciés de chez Kélian et Jourdan que la plate forme

accueille »8. On peut regretter que des fonds exceptionnels au niveau de grands projets

urbains n’ont pas pu être débloquer pour améliorer l’image de la ville pouvant par ce biais

attirer d’autres investisseurs sur Romans, comme l’exprime Jean-David Abel, élu à

7 Source : ROLLAND F. Quelles mesures pour les salariés et l’industrie de la chaussure ?, L’Impartial, 2005 8 Source : BIGORRE M., Mobilisation générale pour le cuir, l’Impartial, le 29 mars 2007

18

l’urbanisme : « Nous avons raté le coche dans les années 1980-90 par rapport à certaines

subventions, car Romans était une ville quasi monofonctionnelle, c’est-à-dire que tout

tournait autour du cuir (maroquinerie, chaussures, création de boites en carton pour les

chaussures, beaucoup d’entreprises ont embauché de la main d’œuvre et avaient une activité

de près ou de loin avec le cuir). On aurait pu avoir des subventions pour des projets de ville et

des projets d’aménagements urbains considérables avec cette situation. Surtout qu’on était

dans une époque où l’Etat avait de l’argent. *…+ Il aurait été vraiment intéressant d’utiliser

des fonds de reconversion industrielle car, avec ceux-ci, on aurait pu obtenir des

financements même pour un projet avec un volet urbain important *…+ La ville de Romans

avait un contrat de site qui nous a servi pour tout ce qui est formation pour la reconversion

des personnes qui se sont retrouvées au chômage. Mais nous n’avions pas de projets urbains

prêts et bien ficelés qui auraient pu être financés par ce contrat de site »9.

Pourtant, malgré cette crise industrielle violente, la ville de Romans reste dans les

esprits « la ville de la chaussure de Luxe ». Une communication volontaire est faite en ce

sens : cette image « marketing » reste prégnante dans les mémoires collectives et ne se

limitent pas qu’aux Romanais, puisque des personnes de Paris ou d’autres grandes villes

viennent encore aujourd’hui acheter des chaussures à Romans notamment parce qu’il y a

encore de grandes marques, souvent moins chères qu’ailleurs grâce au système des

magasins d’usine (comme la marque de chaussures de luxe Clergerie par exemple). Une

clientèle de connaisseurs s’est donc formée au cours des années et perdure encore

aujourd’hui.

9 Source : Entretien avec Jean-David Abel, élu à l’urbanisme, le 3 mai 2010

19

La création du Musée International de la Chaussure en 1971, installé dans l’ancien

couvent de la Visitation, inscrit à l’inventaire supplémentaire des Monuments Historiques,

n’est pas anodine. Il permet de communiquer sur la spécialisation de Romans dans la

fabrication de chaussure de luxe bien que ce Musée ait vocation à retracer, de tous lieux et à

toutes époques, l’Histoire de la chaussure.

Figure 4 Publicité du Musée de la Chaussure à Romans (source: Site Internet au Pays de Romans et Bourg-de-Péage)

Les solutions choisies de la reconversion

Cependant, après les fermetures successives des usines, beaucoup de Romanais n’ont

plus réellement foi en cette image de la chaussure comme unique ressource pour la ville.

Les élus locaux ont donc pris d’autres directions pour pouvoir faire face à cette crise

industrielle durable.

La mairie a recruté du personnel pour combler ce passage à vide dans l’activité

économique et le marché de l’emploi romanais, notamment dans les domaines culturels.

Par exemple, avec le Carnaval, remis au goût du jour par la Maison de Quartier Saint-Nicolas

dans les années 1990, « c’est en 1997 que la mairie de Romans s’est réapproprié le Carnaval

en le finançant par le biais de subventions bien plus importantes et en le

professionnalisant »10. D’autres fonds financiers ont été débloqués notamment pour les

activités théâtrales, d’autres subventions ont été mises en place pour des activités

culturelles et l’embauche de personnel. La mairie de Romans, positionnée à gauche sur

l’échiquier politique (Parti Socialiste) depuis 1977 jusqu’à aujourd’hui, a durablement misé

10

Source : Entretien avec Martial Gaffet, responsable de la vie associative romanaise, le 8 avril 2010

20

sur le domaine culturel pour faire face à la crise industrielle du cuir, même si actuellement

quelques coupures dans le budget ont été réalisées, notamment par rapport au Carnaval qui

a reçu parfois de vives critiques au niveau du budget qui lui était accrédité et qui, par

conséquent, a revu son enveloppe budgétaire à la baisse.

Plus récemment, une réponse dans le développement économique et commercial a

aussi été donnée avec la création de Marques Avenue en 1997. Il s’agit d’un centre

commercial de magasins d’usines qui est installé dans une ancienne caserne militaire

réhabilitée. C’est le premier centre de magasins d’usines situé au sud de la France, et jusqu’à

maintenant il reste le seul.

Une reconversion s’est donc réalisée dans les magasins d’usine et dans la vente de

vêtements. On peut donc dire qu’il y a un lien entretenu avec le passé même s’il reste assez

ténu: on passe de l’activité de la création de la chaussure aux magasins d’usine de

vêtements, « le maire y voit une occasion d’opérer la mutation économique de la ville qui

possède déjà une culture de magasins d’usine avec les entrepôts de fabricants locaux de

chaussures de luxe. »11

Marques Avenue reste une réussite puisque, à son ouverture, on comptait 44

boutiques sur 7 000 m² en 1999, et ces chiffres sont en constante augmentation. Des

annexes de la caserne sont donc à leur tour réhabilitées pour pouvoir accueillir de nouvelles

boutiques, signe incontestable de réussite économique. « Créée en 1998, la « cellule emploi

Marques Avenue » constitue un service d’aide au recrutement visant à mieux cerner en

amont le besoin en compétences des entreprises, et à constituer un fichier qualifié de

candidats disponibles correspondant aux profils de poste. Des profils de compétences et un

dossier de candidature ont été élaborés. La cellule emploi a sélectionné les candidatures, les

a proposées aux entreprises et a assuré le suivi post recrutement. 1 200 candidatures ont été

traitées et au final 92 Romanais recrutés. Cette mobilisation pour l’emploi a favorisé la

cohésion autour du projet et contrebalancé en partie les assauts contestataires de certains

11

Source : MALBOSC F., Du développement économique au renouvellement urbain ? à propos de l’implantation de Marques Avenue, Les cahiers du DSU, décembre 2001, page 62

21

commerçants»12. Marques Avenue est une opération économique et urbanistique qui avait

donc pour but premier que la capitale de la chaussure de luxe ne fasse plus figure de ville

sinistrée.

Malgré des difficultés dues à la crise industrielle du cuir qui toucha de plein fouet

Romans, des initiatives ont été prises par les élus locaux pour « redresser la barre » et tenter

de trouver un nouveau souffle pour la ville dans le domaine culturel et dans la spécialisation

de magasins d’usine.

Maintenant, nous allons voir comment la mairie romanaise et son activité sont

largement influencées par ce contexte particulier: une structure qui jongle entre des freins

de l’action sur la ville et une adaptation à ces difficultés qui se fait progressivement.

12

Source : MALBOSC F., Du développement économique au renouvellement urbain ? à propos de l’implantation de Marques Avenue, Les cahiers du DSU, décembre 2001, page 62

22

La mairie de Romans : jeux d’acteurs, adaptation et freins de l’action

J’ai réalisé mon stage de Master 1 au service Urbanisme de la mairie de Romans, du 1er

février au 16 juillet 2010, soit un stage d’une durée de 5 mois et demi dans une structure

publique.

Organisation de la structure

La coordination de divers services

Le service Urbanisme dans lequel j’ai réalisé mon stage fait partie intégrante d’une

direction plus large : la Direction de l’Aménagement Urbain (DAU). La DAU a avant tout le

rôle d’assurer la cohérence de l'intervention des cinq services de la direction et des deux

chargés de mission ainsi qu’assurer la continuité du suivi opérationnel des projets

structurants comme l'Opération de Renouvellement Urbain (ORU) ayant lieu dans le quartier

de la Monnaie.

La DAU regroupe différents services à savoir :

- Le service Etudes Urbaines qui a pour objectifs de concevoir des projets

d’aménagement urbain et d’études diverses, de piloter des projets (conception,

communication, réalisation, gestion de la ligne budgétaire) et de faire le suivi des

travaux.

- Le service Urbanisme qui a pour objectifs l’instruction des autorisations

d’occupation du droit des sols, d’instruire des dossiers d’emplacements réservés et le

suivi des commissions communales d’accessibilité et de sécurité, d’assurer le

relationnel avec les demandeurs, les promoteurs, et les architectes, d’élaborer et de

suivre des documents de planification (PLU) et de réglementation (ZPPAUP), de

réaliser un suivi de l’opération façades en lien avec la CCPR et RBE, d’animer et de

coordonner les actions pour le centre ancien et pour la politique de logement, d’assurer le

suivi de la RHI et de l’OPAH (comités de pilotage), de mettre en œuvre des procédures

de police des immeubles menaçant ruine et des procédures juridiques (insalubrité,

23

abandon manifeste, …), de réaliser un suivi du foncier (avec la phase amont des actes :

Déclaration d’Intention d’Aliéner (DIA), la préemption et l’expropriation), de mettre en

œuvre et de suivre le règlement de l’affichage et de la publicité, d’assurer la

coordination avec le Service Communal d’Hygiène et de Santé (SCHS) et le Centre

d’Amélioration du Logement de la Drôme (CALD) des problématiques d’insalubrité, et

enfin de suivre les contentieux de l’urbanisme.

- le service Espaces Verts qui a pour objectifs l’élaboration et la gestion du marché, de

concevoir et chiffrer les projets neufs, d’assurer le suivi des chantiers, d’assurer la

pérennité du patrimoine vert tout en y intégrant le cadre du développement durable

(Agenda 21), de mettre en œuvre le plan de gestion des espaces verts ainsi que des

stratégies spécifiques aux espaces verts (fleurissement, arbre en milieu urbain,

gestion de l’eau, produits phytosanitaires et méthodes alternatives).

- le service Voirie et Mobilité qui a pour objectifs d’assurer la maîtrise d’ouvrage des

projets urbains de la ville, de piloter et d’assurer le suivi des chantiers des grosses

réparations de voiries, de définir et de mettre en œuvre la politique communale en

matière de déplacements urbains et de stationnements, d’assurer la gestion de

l’occupation du domaine public, d’assurer la coordination de travaux avec les

partenaires, d’assurer la communication, la concertation et l’information des projets

de travaux.

- le service Eau et assainissement qui a pour objectifs d’élaborer des programmes

d’études et de travaux communaux et intercommunaux, d’assurer un suivi

administratif, technique et financier ainsi qu’un suivi de la qualité de l’eau distribuée

et de l’épuration des eaux usées.

Deux personnes sont chargées de missions distinctes : la mission Recensement qui

doit préparer et suivre le recensement partiel annuel et l’adressage, gérer le relationnel avec

l’INSEE, accueillir le public et enfin délivrer l’attestation de numérotation de voirie. Et enfin,

la mission Sécurité Routière doit coordonner les actions de prévention routière avec les

autres acteurs communaux, être l’interlocuteur en matière de sécurité routière dans la

réalisation des travaux neufs ou d’entretien de la voirie, de mettre en place un répertoire

24

« accidentologie » et une cartographie des différents types d’accidents en vue d’une

prévention adéquate, et enfin assurer des interventions auprès des établissements scolaires.

Plus simplement, la Direction de l’Aménagement Urbain est organisée comme ceci :

Figure 5 Organigramme de la Direction de l'Aménagement Urbain de la ville de Romans

Si la DAU regroupe tous ces services c’est aussi parce qu’ils ont affaire à des

thématiques communes sur certains dossiers. Il a donc été mis en place des réunions

communes et des groupes de travail plus ponctuels. Par exemple, durant la période de mon

stage, un groupe de travail sur les stations du Chemin de Croix a été mis en place. Cette

opération consiste à revaloriser et à restaurer les 21 stations du Chemin de croix du Grand

Voyage, ce groupe a donc mobiliser le service Urbanisme, le service Etudes Urbaines (ces

deux premiers services se chargeant de savoir quelle valorisation au niveau de

l’aménagement doit-on réaliser et selon quelle intégration urbaine ?) et le service Voirie

(plutôt chargé de vérifier si la chaussée bordant la station est correcte, etc.). Bien sûr ces

réunions de groupe ne se limitent pas qu’aux simples services de la DAU. Par exemple, pour

25

le groupe de Travail sur le Chemin de Croix, le service des Archives étaient aussi convié pour

rappeler quelle valeur patrimoniale a ce Monument Historique vieux de presque 500 ans.

Le service DAU réunissant les chefs de service régulièrement permet de faire partager

des avis et des conseils différents selon leurs champs d’application afin d’opter pour le

meilleur choix possible avant de le présenter aux élus, qui eux trancheront au niveau de la

décision finale.

Penchons nous plus particulièrement sur l’organisation du service Urbanisme, service

dans lequel j’ai réalisé mon stage :

Figure 6 Organigramme du service Urbanisme de la ville de Romans

Le service Urbanisme détient actuellement huit agents au total : deux personnes se

chargent de l’accueil (elles enregistrent les dossiers et accueillent les administrés, tentent de

répondre à leurs questions, répondent aux courriers après avis des instructeurs ou

distribuent le courrier aux responsables des services quand la procédure ne concerne pas le

PLU ou la ZPPAUP), trois personnes instruisent les dossiers dont une personne qui chapote

l’ensemble de l’instruction. Au cours de l’instruction, il y a vérification de la décision prise

26

par au moins deux instructeurs pour ne louper aucun détail du dossier. Une autre personne

se chargeant de l’action foncière. Enfin, les deux autres personnes sont la responsable du

service urbanisme et son adjointe (étant Aurélie Rodet, ma tutrice). Ces deux personnes ont

divers rôles à remplir et fonctionnent en binôme : elles rencontrent les personnes qui ont un

projet urbain sur la commune, font le lien entre les autres services de la mairie ou de la CCPR

selon le secteur concerné, ainsi qu’avec les « personnes-conseils » quand il y a création de

logements ou réhabilitation dans les secteurs protégés, elles expliquent le règlement du PLU

ou de la ZPPAUP s’il y a besoin aux administrés, elles ont un rôle de pédagogie à travers des

instances comme les commissions extra-municipales (par exemple sur la densité ou le

logement social) et les réunions publiques, et enfin elles réalisent un travail sur les

opportunités foncières pour l’installation de nouvelles activités, et, dans une certaine

mesure, font de l’aide à la décision politique.

La responsable du service urbanisme et la directrice du Développement et de

l’Aménagement Urbain (DAU) rencontrent des investisseurs immobiliers ou porteurs de

projets. Il s’agit lors de ses réunions informelles de voir ce qui est possible de faire selon les

règles d’urbanisme, les démarches qu’il faut faire afin de le voir aboutir, si le projet peut

converger vers une certaine volonté politique. Ces personnes assument donc un rôle

d’intermédiaire avec les élus avant qu’il y est une rencontre plus officielle. J’ai aussi pu

remarquer qu’il fallait avoir des qualités de négociateur et de diplomate (avec les

promoteurs) pour faire converger le projet urbain vers plus de qualité.

Les techniciens de la CCPR sont pour la plupart des anciens agents de la ville de

Romans. Leurs relations initiales au sein de la Ville de Romans étant bonnes, cette très

bonne entente a permis de faciliter les premières années d’existence de la CCPR ainsi que la

coordination avec la ville de Romans. Tous ces acteurs se connaissent et partagent beaucoup

d’informations. L’ensemble des ces acteurs, comme j’ai pu l’évoquer précédemment,

réalisent un certain travail d’aide à la décision des élus. Cependant, un équilibre est à

trouver entre une aide réelle à la décision et un écart substantiel pour que les élus puissent

vraiment décider par eux-mêmes et exercer pleinement leurs rôles. Je me suis donc rendu

compte de l’importance qu’ont les élus dans leurs choix des questions urbaines et des

aménagements urbains, ce dont je n’avais pas idée avant ce stage. Les techniciens peuvent

alors avancer une orientation pour la décision future mais ce seront toujours les élus qui ont

27

le dernier mot, car ils restent les détenteurs de la définition de l’intérêt général durant leur

mandat.

Au niveau de l’Urbanisme, la mairie de Romans-sur-Isère détient la compétence de la

maîtrise d’ouvrage. Le service Urbanisme reçoit les Permis de Construire (PC), les Permis de

Démolir (PD), les Déclarations Préalables de travaux (DP), les Certificats d’Urbanisme (CU),

Les responsables du service Urbanisme ainsi que certaines personnes de la Direction de

l’Aménagement Urbain doivent se coordonner et répondre à la commande politique pour ce

qui est de grands projets. Une collaboration forte avec les bureaux d’études s’effectue (que

ce soit pour l’élaboration du PLU ou les opportunités foncières avec EPORA etc.).

Le service Urbanisme détient aussi un rôle d’encadrement et de réajustement des

projets par le biais de réunions successives dans le temps, processus incrémental qui

permet de gagner du temps quand un PC est déposé car cela signifie qu’un accord a été

trouvé.

Enfin rappelons que la répartition des compétences se fait comme ceci entre la ville de

Romans et la CCPR : comme dit précédemment, la commune détient la compétence de

l’Urbanisme, et délivre les Permis de Construire, les Déclarations Préalables de travaux, les

Permis de Démolir, les Certificats d’Urbanisme… la CCPR détient la compétence en matière

d’Habitat et en matière d’équipements publics.

Le contentieux de l’urbanisme : un problème constant pour le service Urbanisme

Le contentieux de l’urbanisme est important, il représente 95% des contentieux

juridiques à Romans. Une attention toute particulière est donc portée sur les procédures (un

ensemble de formations dans ce sens sont proposées aux fonctionnaires). La mairie de

Romans est souvent attaquée par des associations qui remettent en cause les PC permettant

la construction de bâtiments de logements sociaux. L’avocat de la ville réalise une vacation

tous les mois où les techniciens du service Urbanisme mais aussi les techniciens juridiques

peuvent poser des questions juridiques très pointues, afin d’agir en conséquence et éviter

des surcoûts de procédures juridiques et enfin pour éviter d’être attaquer tout azimut.

28

Pourtant, ce problème de contentieux de l’urbanisme pourrait parfois être évité. En

effet, la phase de concertation n’est pas toujours opérationnelle à Romans. L’amélioration

du projet selon la prise en compte de l’avis des habitants se fait souvent dans la

confrontation, lors de réunions publiques pour présenter le projet fini. Des associations de

personnes soucieuses de préserver « la valeur de leurs biens immobiliers » se forment et

attaquent le projet. Néanmoins, cela reste assez difficile de défendre un projet qui, on le sait

à l’avance, sera rejeté par la population car on construit des « logements sociaux »

disséminés dans la ville. Les élus locaux conscients de ce problème font aussi l’effort de

présenter les projets privés (qui n’ont pas toujours la qualité que peuvent présentés les

logements sociaux d’Habitat Pays de Romans (HPR)), ce que peu de villes moyennes font. En

parallèle, un travail de pédagogie est réalisé : des réunions publiques ou des commissions

extra-municipales sont prévues sur la densité urbaine ou les logements sociaux. Une autre

manière de faire qui s’installe progressivement dans le paysage politique local.

29

Produits et ressources de la structure

Une commande politique contrainte par des ressources économiques limitées

Les élus locaux déterminent les grandes orientations de leurs mandats et surtout les

projets à plus court terme. Il y a donc une commande politique qui est à la base du travail

qu’effectue les techniciens, d’où l’importance d’être en accord avec les principes que

semblent défendre l’équipe municipale en place (au niveau des idées politiques). La

temporalité du mandat politique est très présente, il s’agit de faire des actions qui aient

une visibilité dans le paysage urbain comme des actions urbaines lourdes (suivi de l’OPAH

même si cette procédure est pilotée actuellement par la CCPR et la CCCBP, les procédures de

Résorption de l’Habitat Insalubre (RHI) qui obtiennent de bons résultats même si les

procédures sont souvent qualifiées de « longues et couteuses » etc.).

Actuellement, des contraintes économiques sont très fortes et font arriver à des

impasses successives une action qui se voudrait massive, notamment sur le centre ancien

par exemple. C’est pourquoi il existe un besoin très important de subventions concernant

les projets urbains de manière générale sur Romans. Par exemple, l’ORU mis en place sur le

quartier de la Monnaie détient un financement public et des subventions étatiques fortes, la

marche de manœuvre est alors plus importante et permet une certaine rapidité d’exécution

selon les termes de Philippe Dresin, premier adjoint du maire : « nous avons été les premiers

de la Région en 2004 à signer un contrat avec l’ANRU, et nous sommes les premiers à avoir

fini actuellement »13.

Une nouvelle Communauté d’Agglomération : un nouveau souffle pour la ville de

Romans ?

A l’horizon se profile la création d’une nouvelle Communauté d’Agglomération

regroupant la toute nouvelle CA de Valence (composée de 11 communes) qui devrait

fusionner avait la CCPR et la CCCBP. Nous avions déjà évoqué l’espoir que pouvait susciter

cette nouvelle structure pour les élus locaux. Néanmoins, cette nouvelle structure soulève

des inquiétudes chez les fonctionnaires employés par la mairie car elle est synonyme de

13

Source : Entretien avec Philippe Dresin, premier adjoint délégué aux finances et au service public communal, président d’Habitat Pays de Romans, le 1

er juin 2010

30

polyvalence, de flexibilité, de réactivité, de changement rapide. Il y a à peine un an, un

changement d’organisation des services fut réalisé causant pour certains le changement

d’un service à un autre ou d’un poste complètement différent du précédent. Avec la création

de cette nouvelle CA, certaines compétences risquent de disparaître de la ville, une nouvelle

organisation dans une année environ, et donc une adaptation à la nouvelle place du

personnel.

La formation continue comme atout du fonctionnariat

Toutefois, rappelons que le système du fonctionnariat permet de se former tout au

long de sa carrière professionnelle, et donc de s’adapter plus amplement aux aléas des

nouvelles organisations internes. Cela peut même être une opportunité car les formations

successives permettent de se spécialiser et d’obtenir une plus grande capacité d’expertise

dans le domaine qui intéresse le fonctionnaire. Certaines formations permettent, par

exemple, d’obtenir la capacité de donner une réponse technique aux problématiques

auxquelles certains sont confrontés. Au cours de mon stage, j’ai pu assister à une

réunion/formation sur l’éco-réhabilitation organisée par la Direction Régionale des Affaires

Culturelles (DRAC). Etaient présents divers acteurs locaux de St-Etienne, de Grenoble et de

Lyon ainsi que des acteurs de structures régionales. La problématique centrale était de

savoir comment concilier la réduction de l’impact sur l’environnement, le confort de

l’habitat et la sauvegarde du patrimoine dans la réhabilitation d’un bâtiment. Ces

problématiques se posées plus concrètement en ces termes : Comment sauvegarder l’aspect

patrimonial alors que parfois l’architecture ancienne crée des déperditions de chaleur très

importantes ? Comment crée de l’isolation efficace sans dénaturer ce patrimoine ? Au cours

de cette réunion/formation il y a pu avoir un retour des expériences faites, ce qui permet

d’enrichir chacun et de pouvoir tester ces nouvelles techniques sur son territoire. La

formation continue est donc un atout considérable pour progresser dans sa carrière

professionnelle.

Cette formation continue permet aussi, pendant les sessions de formation, de soulever

des problèmes communs de différents services de villes ou d’intercommunalités, de savoir

comment les choses fonctionnent ailleurs et donc de piocher dans les bonnes idées ou de

faire part de ce qui est mis en place dans sa propre collectivité.

31

Les partenaires

Le principal partenaire de la ville de Romans est la CCPR. Cependant, une

collaboration forte se fait aussi avec la CCCBP, notamment sur l’OPAH située sur les centres

anciens romano-péageois. Les deux Communautés de Communes qui détiennent une vision

plus stratégique des territoires à une échelle supérieure, font partie du bassin de vie. La

CCPR a été crée le 22 décembre 1997, après la dissolution du Syndicat d’Aménagement du

Pays de Romans qui a avait été crée en 1988 et qui comptait 19 communes. La Communauté

de Communes compte actuellement 20 communes et un peut plus de 49 000 habitants.

Autre partenaire important : Le Conseil d’Architecture d’Urbanisme et

d’Environnement (CAUE) avec la présence d’un architecte conseil qui fait des permanences

pour soit conseiller, soit pour revenir sur des dossiers qui ne s’intègrent pas bien à

l’environnement ou sont contraires aux règles prescrites par la ZPPAUP. Une vacation

gratuite de l’architecte conseil est prévue une demi-journée par mois pour le territoire de la

ZPPAUP et une journée entière par mois pour le reste du territoire romanais. Ces vacations

servent à faciliter l’instruction du dossier que ce soit pour un permis de construire comme

pour une déclaration préalable de travaux. L’architecte conseil ainsi que la responsable du

service Urbanisme (ou son adjointe) rencontre les promoteurs, les constructeurs ou les

administrés qui ont déposé un PC ou une Déclaration Préalable de travaux lors de ces

vacations. Ce travail en amont est réalisé pour gagner du temps pendant l’instruction du

dossier tout en essayant de donner une qualité à l’ouvrage réalisé.

Enfin les autres partenaires importants qu’il faut citer sont L’Architecte des Bâtiments

de France (ABF) et les prestataires extérieurs. L’ABF donne son accord pour chaque dossier

soumis à la réglementation de la ZPPAUP.

32

Retour critique sur la structure

Les avantages d’une petite structure

J’ai pu discerner au cours de mon stage que, dans les villes moyennes ou dans les

petites structures, les techniciens au statut de cadre n’ont pas une mission assignée comme

dans le Grand Lyon. Par exemple, un technicien peut avoir comme unique mission le

développement économique du quartier de la Part-Dieu. Dans la ville de Romans, ils sont

polyvalents, s’occupent de nombreux dossiers, et peuvent avoir une vision d’ensemble des

problématiques de la commune comme de détails fins sur certains dossiers.

Le fait d’avoir réalisé son stage dans une petite structure m’a aussi permis de

rencontrer les élus, malgré leur emploi du temps chargé. Nous avons donc pu avoir diverses

rencontres lors de réunions formelles et d’entretiens plus personnels, ce qui n’aurait peut-

être pas été possible dans une plus grande structure dans une plus grande ville. La

présentation du rendu de ma mission s’est faite pendant des instances où ils étaient

présents. Au fur et à mesure du stage, j’ai pu constater que je prenais de plus en plus de

crédibilité auprès des élus, notamment avec la présentation de l’avancement de mes deux

missions, depuis le mois de mars puis jusqu’au début du mois de juillet.

Pareillement, j’ai pu m’intégrer dans l’équipe des techniciens et être considéré comme

l’une des leurs. J’ai pu constater qu’il y avait une bonne communication entre les techniciens

et les élus même s’il peut parfois y avoir des désaccords. Cette communication facilitée est

peut-être due au nombre restreint d’agents, et par le fait qu’il n’y ait pas d’intermédiaires

pouvant faire le lien (à part pour le premier adjoint et le maire). Les rapports sont donc plus

directs.

Néanmoins, j’ai pu constater différentes limites d’action de la structure lors de mon

stage.

33

Le mille-feuille administratif : un frein de l’action ?

Ce mille-feuille administratif, évoqué plus tôt, fait arriver à des impasses des

collaborations qui pourraient être intéressantes et force de proposition. On arrive parfois à

des incompréhensions ressenties par des agents de la mairie, comme le confie Eric Olivier-

Drure, responsable du service des Archives de la ville de Romans : « Aucun projet commun

n’est réalisé s’il n’y a pas la structure commune qui permet de le cadrer. Par exemple, avec la

médiathèque du centre ancien nous ne faisons plus de projets communs depuis que c’est la

CCPR qui la gère. Nous n’avons pas les mêmes leviers d’action sur le territoire (Ville de

Romans, CCPR). Puis, beaucoup de couches administratives se superposent (Ville de Romans,

CCPR, RBE), elles n’ont pas les mêmes moyens et ont parfois du mal à travailler ensemble,

alors que les questions urbaines sont transversales par nature »14.

Actuellement, il existe une mutation progressive vers une échelle administrative plus

large (la prochaine étant la future Communauté d’Agglomération regroupant les aires

urbaines de valence, Romans et Bourg-de-Péage) et cela passe par la création d’une

multitude d’instances administratives qui ont différents domaines d’intervention sur le

territoire romanais et péageois. C’est cet éparpillement des compétences qui peut causer

l’incompréhension chez les administrés mais aussi chez les techniciens qui ne voient pas

aboutir des projets à cause de la complexité administrative locale et territoriale française.

Difficultés financières de Romans

Bien que la difficulté soit déjà connue avant cette date, c’est en 2008 que la situation

d’endettement est annoncée et officialisée pour la ville de Romans. La cours des comptes

avait donc un droit de regard sur les finances de la mairie romanaise et des restrictions sont

imposées dans le budget: cette situation s’est durablement installée jusqu’à la mi-2009. La

tension était donc forte au sein de la mairie durant cette période. Différentes raisons sont à

l’origine de cette situation de surendettement : la conjoncture économique actuellement

n’est pas favorable aux collectivités territoriales, parallèlement, l’Etat se désengage

financièrement en délivrant moins de subventions aux structures territoriales, la ville-centre

que représente Romans au cœur de la CCPR assume beaucoup (trop ?) de compétences,

14

Source : Entretien avec Eric OLIVIER-DRURE, responsable du service des archives, le 18 mars 2010

34

enfin les choix politiques locaux ne se sont pas faits dans la réduction budgétaire alors qu’il y

avait de moins en moins de ressources (de nombreuses usines ont fermées et donc il y a eu

de moins en moins de taxe professionnelle pouvant être utilisée comme ressource par la

mairie). A plané pendant quelques temps, la possibilité que Romans soit mise sous tutelle

par le préfet, cette épisode a durablement marqué les esprits que ce soit pour les habitants,

les techniciens, les employés de la mairie, la direction générale et bien sûr les élus locaux.

De plus, le budget reste très complexe à comprendre, « seuls quatre personnes

comprennent le budget dans le détail, parmi les élus »15. Il y a donc eu l’intégration de

personnes qui ont des connaissances sur la fiscalité et tout ce qui est aspect financier dans la

nouvelle équipe municipale, afin de redresser la situation financière.

Freins d’action des villes moyennes

De manière plus générale, divers freins sont rencontrés par les villes moyennes : elles

sont à des étapes différentes au niveau de l’intercommunalité et à des vitesses différentes

au niveau partenarial alors que les grandes villes ont parfois une maîtrise plus approfondie

et plus aboutie de ce que veulent les élus sur leur territoire (plus de pouvoir, plus de fonds

financiers, plus de leviers d’action).

Par exemple, le service Urbanisme exerce un contrôle sur les constructions mais il n’y a

pas de vérifications strictes sur tout ce qui est réalisé (Déclaration Préalable et Permis de

Construire) à part si l’administré ou l’entreprise demande une déclaration de conformité des

travaux ou, mais c’est plutôt rare, quand les techniciens le remarquent en parcourant la ville.

Par exemple, dans le centre ancien ou sur les boulevards, des enseignes trop criardes (le

blanc et le noir sont proscrits dans la ZPPAUP) ont été remarquées par des techniciens du

service Urbanisme. Après ce constat, une prise de contact est réalisée avec les commerçants,

ils peuvent dans le meilleur des cas retravailler l’enseigne et les couleurs utilisées, et

proposer des subventions possibles par le biais de l’opération façades.

Des leviers d’action sont bien moins importants pour les villes moyennes en

comparaison avec les grandes villes concernant la qualité de la production immobilière sur

15

Source : Martine BUON, responsable du service Urbanisme de la ville de Romans, le 7 juillet 2010

35

leur territoire: les villes moyennes ont souvent affaire à de petits promoteurs immobiliers ou

à des géomètres n’ayant pas forcément une culture et une volonté de créer de la qualité au

niveau des logements (notamment par rapport aux produits immobiliers proposés dans les

lotissements). La ZPPAUP du centre ancien a permis une maîtrise accrue de ce qui est

réalisé en termes de réhabilitation du bâti. Un cadrage réglementaire strict existe donc

seulement sur les zones de ZPPAUP (il y en a quatre en tout : une dans le centre ancien, une

entre les boulevards et le quartier de la gare, une sur la cité-jardin Jules Nadi et enfin une

concernant la protection naturelle d’une partie des berges de l’Isère). Le PLU impose

seulement des gabarits et le type de fonctions des bâtiments, une réglementation stricte

n’existe pas ailleurs, hors de la ZPPAUP. Il est donc difficile d’imposer des normes

qualitatives notamment en périphérie et dans les nouvelles zones ouvertes à

l’urbanisation.

De plus, actuellement, est seulement mis en place des outils incitatifs (comme les

OPAH, les opérations façades), les outils coercitifs font « peur » car considérés comme bien

plus radicaux. Les élus craignent de se mettre à dos certaines personnes bien qu’ils ont

conscience que dans certains cas il faut agir. Un effort a été fait en ce sens récemment avec

le vote d’une Opération de Restauration Immobilière (ORI) sur la ZPPAUP. Cet outil permet

de prescrire des travaux aux propriétaires, s’ils ne sont pas effectués dans le délai imparti,

les propriétaires se voient exproprier de leurs biens. Bien sûr, des aides financières (et plus

particulièrement la défiscalisation) peuvent être mises en place pour aider les propriétaires à

effectuer les travaux. L’ORI est « un outil sans équivalent et d’une grande potentialité

opérationnelle »16 mais, l’expropriation qui peut s’en suivre, reste parfois un frein pour

certaines communes qui veulent l’utiliser. En effet, la mairie se voit la charge du bâtiment s’il

y a expropriation, et, pour le cas de Romans, il n’y a pas forcément l’argent nécessaire pour

réhabiliter le bien bâti. On peut dire alors que Romans détient un autre point pénalisant :

c’est l’absence de Société d’Economie Mixte (SEM) dans la Drôme avec une marche de

manœuvre élargie et un pouvoir financier plus important. Une SEM pourrait assumer ce

rôle, notamment pour les ORI. Par exemple, la SEM du Pays de la Loire a pu mettre en place

des ORI sur Saint-Etienne : des opérations qui jusque là on fait leurs preuves. Ce type de

16

Source : RENE-BAZIN A., Le renouvellement urbain dans les centres anciens, évolution et pratique des outils juridiques (in Les espaces du renouvellement urbain), p. 196

36

structure, ayant des leviers d’actions et des outils juridiques importants, manque donc

cruellement à Romans.

Plus généralement, des vacations de l’architecte-conseil sont mises en place toutes les

deux semaines pour permettre d’améliorer les projets immobiliers projetés sur la commune.

J’ai pu assister à certaines vacations. J’ai trouvé ces vacations très intéressantes car on peut

se rendre compte que les constructeurs qui ont pris rendez-vous avec l’architecte-conseil en

vue de voir leur projet validé par l’instruction, proposent selon leurs termes « ce que les gens

veulent ». Or, ces promoteurs ne proposent pas autre chose que des maisons ou des

immeubles standardisés présentés dans des catalogues. Si on modifie quelques choses de

la structure de la maison ou de l’immeuble, l’acheteur paiera bien plus cher, ce qui crée un

réel effet dissuasif. Le rôle de l’architecte-conseil est de tirer la qualité des nouveaux

produits immobiliers vers le haut, et donc de pousser les promoteurs à améliorer de manière

sensible le produit immobilier avant le dépôt du PC ou pendant son instruction.

Ces vacations se sont peu à peu institutionnalisées à Romans grâce notamment à la

prise de conscience générale des collectivités sur l’étalement urbain et sur le fait qu’on a

laissé se construire des quartiers entiers de lotissement qui ne proposaient que le minimum.

Enfin, dernière illustration des freins d’action des villes moyennes : le désengagement

de l’Etat. J’ai pu assister à un comité de pilotage de l’OPAH où étaient présents l’équipe

d’animation des représentants de l’Habitat de la CCPR et de la CCCBP, des techniciens du

service Urbanisme de la mairie de Romans et de Bourg-de-Péage, des élus locaux, ainsi que

deux représentants de l’Agence Nationale de l’Amélioration de l’Habitat (ANAH). Ce comité

de pilotage permet de présenter une vision synthétique des résultats depuis que l’OPAH est

opérationnelle sur Romans et Bourg-de-Péage. Durant ce comité de pilotage, Jean Julian, le

représentant de l’ANAH dans la Drôme, a annoncé qu’il y aurait des changements

concernant les subventions données par l’ANAH : la commune se verrait chargée du

logement conventionné pour tout ce qui concerne les réhabilitations de propriétaires

bailleurs, le logement intermédiaire serait le seul type de loyer pouvant obtenir des

subventions étatiques. De plus, on passerait à des conventions sans travaux, c’est-à-dire que

l’on passerait à des exonérations sur l’impôt foncier. Cela semble difficilement applicable

37

dans un parc bâti très dégradé comme dans le centre ancien de Romans et de Bourg-de-

Péage. Il y a donc, plus que le simple désengagement de l’Etat, une inadaptation aux

situations locales. Des techniciens de la CCPR tentent, au cours de ce comité de pilotage, de

faire comprendre aux représentants de l’ANAH que ce n’est pas adapté à la situation de

Romans et de Bourg-de-Péage. Malheureusement, il n’y a pas tant de possibilités de faire

remonter ces difficultés, mis à part par le biais du représentant de l’ANAH dans la Drôme.

A cela s’ajoute un changement des règlements des conventions avec l’ANAH tous les

deux ans ou tous les 18 mois. Les Communautés de Communes ou les villes ont du mal à

animer et à exercer ces nouvelles règles car les administrés ont du mal à comprendre ces

changements très rapides. Il n’y a pas de stabilité qui permet d’instaurer une procédure qui

soit pérenne, qui instaure une confiance entre les habitants et les services communaux.

38

Deux missions réalisées : informations et communication, synthèse de

la situation et aide à la décision sur un même territoire, le centre

ancien romanais

Je fus chargée de deux missions principales qui se sont faites en parallèle puisque le

travail avait pour délimitation le même territoire : le centre ancien de Romans. Ma première

mission consistait en la réalisation d’une carte synthétique des aménagements urbains en

projet ou en cours sur le centre ancien et la deuxième mission, plus longue à réaliser,

concernait la création d’un diagnostic exhaustif du centre ancien de Romans en vue de

créer un dossier de candidature pour le PNRQAD en 2011.

Réalisation d’une carte synthétique des aménagements urbains en projet ou

en cours sur le centre ancien romanais

Cette première mission relevée d’une commande politique avant tout : je devais créer

un outil cartographique demandé depuis un certain temps par l’élu à l’Urbanisme, monsieur

Jean-David Abel. Il s’agissait de créer un outil interne de cartographie et de communication

sur l’ensemble des aménagements urbains en projet ou en cours sur le centre ancien

romanais17, de le rendre efficace et réactif pour un possible dossier de subvention, et enfin

qu’il puisse servir à la prospective politique.

Cette carte interactive fut crée, dans un premier lieu, avec le logiciel Power Point et

déboucha sur une première présentation devant les élus locaux, puis les chefs de services de

la mairie. Dans un deuxième temps, cette carte fut développée sur une couche SIG du

logiciel disponible sur Romans (Editop). Cette carte finalisée a été rendue accessible par tous

les services communaux, RBE et la CCPR. Ce travail a pour but d’avoir une vision globale et

synthétique des projets en cours ou futurs sur le centre ancien. A terme, cet outil pourrait

être utilisé par les élus concernant la hiérarchisation des priorités des aménagements

urbains futurs, ainsi que pour les techniciens afin d’être le plus réactif possible si un dossier

de subventions doit être crée.

17

Source : voir capture d’écran de la carte en annexes

39

Pour créer cet outil, j’ai assisté à une formation brève mais efficace sur le logiciel SIG

de la mairie de Romans (« editop ») et de la CCPR. Grâce à mes connaissances sur Mapinfo

notamment, j’ai pu avancer rapidement sur cette mission, le logiciel intercommunal étant

encore plus simple d’utilisation.

Comment rendre l’outil facile d’utilisation, efficace, quasi intuitif ?

Chaque projet est composé de pastilles de couleurs différentes selon les thèmes

(équipements publics, voiries, stationnements, circulation motorisée, piétonisation et modes

doux, places et placettes, redynamisation commerciale, renouvellement urbain,

réhabilitation, patrimoine, projets en devenir). La localisation du projet se fait par le biais

d’un système de pastillage. Une fiche de synthèse accompagne chaque pastille et apparaît à

l’écran quand on clique sur celle-ci. Chaque fiche de synthèse est constituée des données

suivantes : le nom de l’aménagement, la date de la dernière mise à jour de la fiche de

renseignement (pour pouvoir constater si les données sont récentes ou non), l’adresse, le

descriptif du projet, le zonage de la parcelle dans la ZPPAUP et du PLU, les servitudes

particulières si celles-ci existent, le propriétaire du bâtiment ou de l’espace public, la

maîtrise d’ouvrage, la maîtrise d’œuvre, les partenaires, le stade d’avancement du projet

(projet à définir, projet en cours de réflexion, projet en cours de finalisation ou travaux en

cours), le calendrier avec la validation politique, le coût des travaux quand il est évalué, le

montage financier, une photo du site ou du projet à réaliser, un plan de masse et un extrait

cadastral. Pour récolter toutes ces informations, j’ai dû assister au groupe de travail sur le

centre ancien, où une séance était prévue pour relater tous les aménagements urbains

projetés sur le centre ancien. Après cela, j’ai dû lire des documents internes au service

Urbanisme, ou aux services Etudes Urbaines et rencontrer des techniciens pour pouvoir

remplir ces fiches de synthèse.

L’inscription de cet outil dans une couche SIG trouve son utilisation pérenne par les

services communaux et intercommunaux. Néanmoins, cet outil doit être réactualisé tous les

trois mois environ, j’ai donc dû trouver une personne du service Urbanisme qui en fasse le

suivi après mon départ, pour qu’il soit opérationnel tout au long de son existence.

Une autre petite mission de cartographie a été faite en parallèle de celle-ci et fut

fortement liée à la première : j’ai dû créer une carte de parcours dans le centre ancien pour

40

la visite du préfet18 du 4 juin 2010 concernant la politique de la ville en vue de classer le

centre ancien en ZUS (aujourd’hui classée en CUCS de niveau 2, mais pas en ZUS comme le

quartier de la Monnaie). Cette visite du préfet et son parcours dans le centre ancien avec les

élus et certains techniciens (étaient présents les responsables de la mission politique de la

ville et de la direction de l’Aménagement Urbain) avait pour but d’obtenir deux nouveaux

postes d’agents de médiation grâce au Fond Interministériel de Prévention de la

Délinquance (FIPD). J’ai donc pu assister à une réunion préalable pour préparer cette visite,

et plus particulièrement proposer le parcours qui serait effectué durant la visite. Au cours

de cette réunion, j’ai pu proposer certains points du parcours en montrant les points

nerveux ou « points durs » c’est-à-dire les Ilots en déshérence comme la « maison du

Mouton » que les différentes OPAH n’ont pas pu éradiquer, les bâtiments qui mériteraient

tout simplement une réhabilitation ou encore le nouveau local jeunes dans le centre ancien

pour encadrer la délinquance et enfin le travail à faire avec la Maison de Quartier Saint-

Nicolas en ce qui concerne l’encadrement des jeunes.

Figure 7 la Maison du Mouton, le plus vieux bâtiment du centre ancien romanais (Mars 2010, photo prise par Marisa JULIEN)

Cette mission a été une bonne introduction à la deuxième mission plus complète et

plus intéressante : la création d’un diagnostic exhaustif et transversal du centre ancien de

Romans-sur-Isère.

18

Cette cartographie est consultable dans les annexes.

41

Création d’un diagnostic exhaustif du centre ancien de Romans, en vue de

créer un dossier de candidature pour le PNRQAD en 2011.

Le centre ancien fait parti de la « Politique à deux têtes »19 de Romans (la deuxième

« tête » étant le quartier de la Monnaie). Depuis que le PS est au pouvoir à Romans (c’est-à-

dire plus précisément depuis 1977), jusqu’à aujourd’hui, le centre ancien est considéré

comme étant un espace urbain à revaloriser. L’OPAH-RU et l’Opération façades prenant fin

en 2011, le centre ancien faisant déjà l’objet d’une politique soutenue, la municipalité

souhaite poursuivre la revalorisation du centre ancien et tente de trouver un « renouveau »

à travers une nouvelle procédure, encore plus englobante qu’une simple OPAH : le

Programme National de Requalification des Quartiers Anciens Dégradés (PNRQAD).

Annonay se situant à 50 kilomètres a été l’une des 40 villes retenues pour cette procédure et

a pu obtenir de larges subventions (plus de sept millions d’euros). Cette démarche a eu de

larges échos dans la presse locale, ce qui a suscité l’envie chez l’équipe municipale de

Romans de postuler, elle aussi, pour un futur dossier de candidature pour le PNRQAD qui

aura peut-être lieu en 2011.

Romans aimerait bénéficier de ces subventions pour lancer des travaux plus

conséquents sur son centre historique. Le PNRQAD représente beaucoup plus de

subventions qu’une procédure de réhabilitation classique du parc privé : seuls 40 quartiers

ont été sélectionnés nationalement pour ne pas émietter les moyens et agir plus

profondément sur quelques quartiers. Une ambition est clairement affichée par le ministère

du logement avec le PNRQAD, puisque l’objectif chiffré étant que d’ici 2016, nous devons

compter : « la réhabilitation de 60 000 logements privés, dont au moins 20 000 à loyer conventionné,

et la production de 30 000 logements locatifs sociaux, dont 5000 places d’hébergements ou de

logements adaptés »20.

Pourtant, on peut quand même se poser la question de ce qui différencie réellement le

PNRQAD par rapport à une simple OPAH ? Le PNRQAD est « outil qui incite une vision plus

globale de ce que l’on veut faire sur le territoire »21, cet outil permet d’articuler certains

19

Source : Entretien avec Jean Decauville, membre de l’équipe d’animation de l’OPAH, le 8 avril 2010 20

Source : THOUVENOT A., Requalifier le logement des quartiers anciens, La Gazette, 30 novembre 2009, p32-34. 21

Source : Entretien avec Jean Decauville, membre de l’équipe d’animation de l’OPAH, le 15 avril 2010

42

outils ou des financements différents comme le Fond d’Intervention pours les Services et

l’Artisanat et le Commerce (FISAC), les RHI, les ORI et puis les OPAH. Il s’agirait d’un outil

plus souple puisqu’il semblerait « qu’un projet global avec des thématiques tout azimut

pourrait être monté, celui-ci s’appuierait sur un financement fort de l’Etat, un partenariat

plus important et des procédures multiples »22. Est espéré une deuxième vague de cette

procédure pour 2011, bien qu’aujourd’hui la politique nationale de rigueur ne se prête pas à

la reconduction de ce plan de relance pour les quartiers ancien dégradés.

Ce diagnostic a aussi pu réactualiser les données du centre ancien, le dernier

diagnostic étant réalisé en 1996. J’ai pu récupérées des données « FILOCOM »23 sur le Parc

Privé Potentiellement Indigne (PPPI) datant de 2005 ainsi que des données de l’INSEE datant

de 2006 et des données de la Caisse des Allocations Familiales (CAF) de 2009 puisque les

dernières données systématiquement citées commençaient à dater puisqu’elles étaient de

1999. Ce diagnostic a permis d’avoir un « regard réactualisé » et rationnel sur le centre

ancien par les chiffres et non pas par seulement des sentiments intuitifs qu’ont certains

acteurs que j’ai pu interroger. Contrairement à ce qui peut parfois être évoqué par certains

habitants de Romans, il y a une population mixte dans le centre ancien et non pas

seulement une population en grande difficulté socio-économique (même si une tranche de

la population est dans cette situation).

Au cours de cette mission, j’ai dû endosser le rôle d’une personne faisant les liens

entres les études précédentes et récentes, éparpillées dans différentes structures

publiques que ce soit au sein des services de la ville de Romans, ou bien au sein de la CCPR

et de RBE.

Les services de la mairie tendent à développer une culture de la transversalité, qui

n’existait pas auparavant en tentant d’avoir un regard plus global sur la situation et en

mettant en place de groupes de travail spécifiques et d’outils en commun. Mon rôle a été de

22

Source : Entretien avec Jean Decauville, membre de l’équipe d’animation de l’OPAH, le 15 avril 2010

23 Le système d’observation statistique des logements, dénommé FILOCOM, correspond à un traitement

automatisé de données issues des fichiers fiscaux et fonciers. Ses principales finalités sont l’aide à la définition et à la mise en œuvre des politiques locales de l’habitat, l’aide à la programmation du logement social, à l’observation et à l’évaluation des politiques publiques. Le fichier FILOCOM (Fichier des LOgements par COMmunes) est un fichier construit par la Direction Générale des Impôts (DGI) pour les besoins du Ministère de l’Equipement (actuel Ministère de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement Durable et de l’Aménagement du Territoire ou MEEDDAT).

43

faire le lien à travers ce diagnostic à la fois en participant à toutes les réunions de « groupe

de travail sur le centre ancien » (rôle de récolte d’informations, de participation voire

d’animation) qu’à d’autres groupes de travail plus ponctuels en lien avec le centre ancien

(groupe « Banque de France », groupe « Chemin de Croix », groupe « piétonisation »). J’ai eu

le droit d’assister à certaines rencontres avec des investisseurs, des propriétaires bailleurs

pour la plupart. J’ai rencontré par exemple des investisseurs privés et intéressés pour la

réhabilitation de trois logements sur la côte Jacquemart dans le centre ancien, avec les

subventions de l’ANAH dans le dispositif de l’OPAH. J’ai aussi rencontré d’autres

investisseurs souhaitant rénover de vieux bâtiments, et y installer une activité culturelle par

exemple (une ancien chapelle du centre ancien serait transformer en galerie d’art

contemporain et un petit théâtre de représentations serait crée). Ces diverses rencontres

m’ont permis d’avoir une certaine conception des projets dans le centre ancien par le biais

des investisseurs privés.

J’ai donc pu rencontrer des acteurs très différents lors des entretiens : des techniciens

de la mairie, des ingénieurs, des élus locaux et aussi des personnes du monde associatif.

Cette mission aura suscité certaines compétences, notamment la polyvalence, la capacité de

gérer en autonomie son travail, et enfin les multiples présentations sollicitaient la capacité

d’être à l’aise à l’oral. Après un rendu écrit24, j’ai réalisé trois présentations orales du bilan

de cette mission : une devant certains techniciens de la mairie de Romans, l’équipe

d’animation de l’OPAH et des agents de la CCPR et de la CCCBP, une autre devant les élus, et

enfin une dernière devant tous les responsables des directions de la ville de Romans.

Cette mission m’a grandement intéressé car elle fut très transversale et a permis

d’avoir une vision globale d’une certaine situation urbaine: j’ai pu autant aborder des

questions de patrimoine bâti et de réhabilitation, que des questions sociales et

économiques, de savoir quel bilan peut-on portait sur les outils urbanistiques (zonages du

PLU, ZPPAUP, OPAH, RHI, opérations façades, FISAC), ainsi que d’aborder les questions des

représentations de la ville et de l’espace vécu25 et perçu par les techniciens, les élus et les

habitants. Ce Diagnostic peut aussi servir à informer les acteurs locaux des problématiques

24

Diagnostic territorial du centre ancien de Romans, consultable sur le logiciel dans la rubrique « missions de stage » 25

FREMONT A., La région espace vécu, collection Champs, Flammarion, 1999, 288p.

44

du centre ancien et, après 30 ans d’actions, dresser le bilan d’où est ce que nous en sommes

aujourd’hui dans la volonté de revaloriser celui-ci.

Regards critiques sur la mission

Les deux missions que j’ai réalisé ont permis et ont été utiles dans le sens où beaucoup

d’études (sociales, de santé, de l’habitat, économiques, foncières, immobilières) ont été

réalisées sur le centre ancien mais celles-ci étaient éparpillées et ne sont donc pas

centralisées à un endroit précis où les techniciens et les élus pourraient se référer. Cet

éparpillement des études peut être considéré comme une réelle perte d’informations

pourtant intéressantes, qui ne sont pas toujours lues car faute de temps des élus et des

techniciens. Ma mission aura donc eu l’effet de centraliser ces études tout en ayant un

regard assez synthétique sur le centre ancien. Le document du diagnostic du centre ancien

dépasse la simple structure du service Urbanisme puisque j’ai pu le diffuser à l’ensemble des

services (service des Archives, Mission politique de la ville et service Etudes Urbaines) et des

partenaires (RBE, la CCPR, l’équipe d’animation de l’OPAH, l’association de la Sauvegarde du

Patrimoine).

Néanmoins, j’ai pu remarquer que les études urbaines (ou autres) sont perçues

comme synonymes de valeurs procédurales plutôt que de regard neuf sur le territoire.

C’est-à-dire que certaines études sont réalisées uniquement dans le but d’avoir des

subventions. Ce document produit pourrait faire office de synthèse complète des

problématiques du centre ancien, tout en donnant des axes d’aménagements futurs. J’ai

donc tenté de créer ce document de diagnostic du centre ancien comme étant un outil qui

peut-être opérationnel au-delà du simple dossier de candidature pour le PNRQAD. Il a fallu

proposer d’autres fonds intervenant dans différents domaines, qui rentreraient dans un

projet plus global et d’autres procédures pouvant valoriser le centre ancien (Le Fond

National de l’Aménagement Du Territoire (FNADT), le label Villes d’Art et d’Histoire, le Fond

Européen de Développement Régional (FEDER) etc.).

Dans un premier temps, ma mission a participé encore et toujours au regard unique

et par conséquent à l’action projetée sur le centre ancien, elle participe à une vision floutée

45

de ce qu’est le centre-ville aujourd’hui sur Romans26, c’est aussi pour cela que j’ai essayé d’y

insérer une réflexion plus large sur le centre-ville dans une dernière partie27 du diagnostic.

Le périmètre choisi pour le diagnostic ne s’est donc pas limité aux limites du centre

ancien stricto census28, nous avons décidé avec l’équipe des techniciens lors de la première

réunion du groupe de travail de centre ancien d’élargir le périmètre aux boulevards jusque

devant Marques Avenue (puisque le nouvel office de tourisme va être mis en place dans un

bâtiment se trouvant sur le tènement de Marques Avenue), et d’étendre le périmètre à

l’Ouest comme à l’Est pour penser les connexions du centre ancien avec les nouveaux

équipements et les nouveaux projets urbains (Cité de la Musique, le Bâtiment Jourdan

transformé probablement en hôtel de luxe etc.). Même si ce périmètre élargi était pensé

qu’en termes de projets d’équipements et d’amélioration d’accès ou d’esthétisme, ce fut

pour moi l’occasion de pousser la réflexion en proposant une partie sur le rapport à la

centralité qu’entretient le centre ancien.

26

Ceci est le cœur de mon mémoire, par conséquent je ne développerai pas cette idée ici. 27

Voir diagnostic centre ancien dans les annexes sur le logiciel dans la rubrique « missions de stage » 28

Voir carte page suivante

46

Figure 8 Périmètre d'étude choisi pour le diagnostic du centre ancien

A partir de là, une prise de recul a été effectuée sur la centralité de manière plus

élargie. Ce sujet était parfois évoqué par bribes dans certaines études, certains témoignages,

certaines réunions publiques (on insistait notamment sur le fait que les habitants

n’arrivaient pas à situer le centre-ville à Romans), mais ce sujet n’a jamais été abordé de

manière globale et plus théorique. Un sujet sur lequel je voulais m’exprimer plus largement :

le mémoire fut la meilleure occasion et le meilleur exercice pour cela. En premier lieu, je me

suis donnée comme cadre de réflexion le rapport du centre historique à la centralité

actuelle. Ensuite, j’ai alimenté ma réflexion grâce à des textes théoriques, des textes de

chercheurs pouvant créer une montée en généralité de mon sujet et ne pas faire qu’une

étude de cas purement locale.

47

Conclusion et perspectives

Bilan personnel

Concernant mon intégration dans l’équipe du service Urbanisme, elle fut facilitée

grâce à l’organisation des bureaux des pré-instructeurs et des instructeurs en « open-

space ». Cet espace de travail m’a permis de participer à des discutions et de tisser de vrais

liens avec l’ensemble du service. Au delà de cette possibilité de se sociabiliser au sein de la

structure, cette organisation m’a permis de voir comment cela se passe au bas de l’échelle,

d’aborder ce que l’on n’apprend pas en cours magistraux et qu’on a du mal à percevoir

quand on est étudiant (car n’étant pas propriétaire d’un bien immobilier, n’ayant jamais fait

de démarches pour des travaux ou d’avoir à réaliser une demande de Permis de Construire,

tout cela représentant des procédures inconnues de ma personne) c’est-à-dire : de percevoir

comment l’accueil du public se passe, de constater les réactions des administrés face à des

règles « complexes » d’urbanisme et de poser des questions sur des détails des procédures,

du PLU, de la ZPPAUP. J’ai donc du adopter le statut « d’éponge » pour pouvoir absorber le

maximum de données qualitatives et pour puiser des informations au premier échelon de la

chaîne. J’ai donc pu observer le rapport qu’ont parfois les administrés avec les normes

réglementaires, voire parfois d’assister aux conflits qui peuvent en découler car le droit tout

puissant de la propriété privée est encore très présent dans l’esprit des Français.

Au début du stage, les stagiaires disposaient de peu d’espace à la base. Un autre

bureau était initialement prévu pour les stagiaires. L’ambiance y étant plus calme, car il n’y

avait pas d’accueil du personnel. Ce bureau m’a surtout servi pour réfléchir sur la manière

dont mener mon diagnostic, pour prendre des rendez-vous avec les différents acteurs, pour

commencer à structurer ma pensée et engager l’écriture du diagnostic. Malgré l’espace

limité du service, les techniciens ont eu une bonne idée de prendre deux stagiaires : Jean-

François BLAIN et moi-même. Nous venons tous deux de la même promotion de l’IUL. Nous

avions deux missions très différentes (sa mission étant de réaliser un inventaire du

patrimoine agricole sur la commune de Romans en vue de la prochaine révision du PLU),

mais celles-ci ont permis d’élargir nos connaissances mutuellement en ayant un droit de

regard et des conseils portés sur le travail de l’un et de l’autre, sur nos missions respectives.

48

Cet autre regard critique sur mon travail m’a permis de peaufiner le rendu final de ma

mission.

Par rapport au « statut de stagiaire », j’ai eu la vive impression que les techniciens ont

pris au sérieux dès le début ma capacité à réaliser ma mission, ce qui m’a permis d’avoir une

réelle place à leurs côtés. Cette confiance assez spontanée est peut-être due à l’accueil de

bons stagiaires auparavant. Ma tutrice, Aurélie Rodet a cadré ma mission et m’a laissé une

grande autonomie dans la manière dont je pouvais la réaliser. Etant jeune et sortie de

l’Institut d’Urbanisme de Grenoble (IUG) il y a seulement deux ans, il me semble que ma

tutrice avait une grande confiance en moi et dans mon niveau universitaire qui, peut-être, se

rapprochait du sien, notamment au niveau des savoirs et des enseignements que l’on a pu

avoir toutes les deux au sein d’Instituts d’Urbanisme.

Au niveau des élus, cela a été un peu plus différent : j’ai pris de la crédibilité au fur et à

mesure et de manière rythmée par les présentations orales de mon travail. Lors de ma

mission, les exercices oraux et de communication furent très sollicités et, malgré ma timidité

naturelle, j’étais très à l’aise dans ce type d’exercice (peut-être que les différents exercices

oraux de l’IUL y sont pour quelque chose).

Regard sur le métier d’urbaniste

Enfin, bien que ma mission fut fort intéressante, j’aimerai voir plus amplement le

projet urbain, savoir comment le monter et constater quels types de problèmes sont

rencontrés. J’ai pu en voir des bribes avec les réunions concernant la Cité de la Musique,

bien que ce projet soit piloté par la CCPR. Mais, actuellement, je n’ai pas de connaissances

approfondies sur la manière dont monter un projet et j’aimerais pouvoir le suivre de sa

conception au plus petit détail final. Il est de mon avis qu’il s’agit de compléter ma formation

en ce sens, par rapport à ma volonté de coupler, dans la voie professionnelle, le diagnostic

et le projet urbain, c’est-à-dire le constat d’une situation urbaine et la meilleure réponse

que l’on peut porter à cette situation.

49

J’ai apprécié d’être la personne qui « fait le lien », qui joue le rôle de médiateur et qui

doit détenir ce que Viviane Claude appelle la «multi-pluri-inter-trans-disciplinarité»29. Cette

caractéristique est loin d’être nouvelle puisqu’elle revient en force, au milieu des années

1960, dans la définition de l’urbaniste. Néanmoins, ce premier stage professionnalisant m’a

permis de confirmer que l’urbaniste « paraît naviguer entre les disciplines scientifiques, des

savoirs et des savoir-faire »30. J’ai réellement apprécié d’avoir produit des études qui aident

à la décision politique. De manière plus large, le développement urbain ou encore les

« manageurs de projet » seraient des métiers qui m’intéressent car « développer un quartier

un territoire, c’est pouvoir être l’opérateur d’un travail collectif, c’est-à-dire prendre appui sur

des ancrages, réseaux, intérêts locaux, mais aussi nationaux, européens, voire

internationaux, jouer entre les différentes échelles territoriales, savoir coordonner les

enveloppes financières venues de sources variées, monter des dossiers. C’est aussi jouer des

positions d’interface en alliant ces divers champs de l’action publique qui sont nombreux,

diversifiés, apparemment hétérogènes entre eux qu’ils relèvent du social, de l’économie, de

la culture, de l’habitat »31, autant de paramètres qui selon moi sont stimulants pour une

future carrière professionnelle.

29

Source : CLAUDE V., Faire la ville, les métiers de l’urbanisme au XXe siècle (p.209) 30

Source : CLAUDE V., Faire la ville, les métiers de l’urbanisme au XXe siècle (p.212) 31

Source : CLAUDE V., Faire la ville, les métiers de l’urbanisme au XXe siècle (p.225)

50

PARTIE II : MEMOIRE

Une définition ambigüe et élusive de la centralité urbaine à Romans

comme échec de la revalorisation du centre ancien

51

Introduction :

Les pouvoirs publics communaux de Romans-sur-Isère ont depuis plus de trente ans

essayé de « tirer vers le haut » le centre historique romanais par le biais d’outils comme

l’OPAH, les RHI, le FISAC, le classement en ZPPAUP, une politique de la ville assez soutenue.

Pourtant, le centre ancien comprend toujours du bâti dégradé, une vacance de locaux

commerciaux importante, et encore plus, une image négative qui relègue ce centre

historique au fort potentiel patrimonial et touristique au rang de « quartier ancien

dégradé ».

Des réponses ont déjà été apportées concernant cette non-redynamisation du centre

ancien : comme l’inadaptation des outils que sont les OPAH ou l’OPAH-RU actuel portés sur

le centre ancien, ne pouvant pas apporter une « mixité vers le haut » pourtant attendue par

les élus locaux32.

A travers ce mémoire, j’essaierai d’apporter une réponse autre concernant la non-

revalorisation de ce centre ancien. L’hypothèse générale que j’aborderai portera sur le

rapport à la centralité qu’entretient le centre historique. Au cours de l’analyse, nous

aborderons la notion de centralité, et plus précisément de la « centralité endogène, liée au

système de relations que noue un centre avec sa zone d’influence »33 : définition qui est « la

plus classiquement retenue »34. Nous écarterons les réflexions largement diffusées sur les

rapports centralités/périphéries. L’idée de la centralité sera ici abordée uniquement de

manière intra-urbaine, le centre sera alors considéré comme un espace polarisant des

activités de services (avec une portée spatiale plus ou moins importante35) et qui est

reconnu comme centre-ville par les habitants ou les personnes extérieures de la ville. Nous

reprendrons aussi l’idée de Jérôme Monnet de définir la centralité comme « une qualité

attribuée à un espace et non comme l’attribut intrinsèque d’un lieu »36.

32

Source : SOULAGEON S., l’OPAH-RU, un outil pertinent pour le centre ancien de Romans-sur-Isère ? (mémoire de Master 1), IUL, 2008 33

Source : GEORGE P., VERGER F., Dictionnaire de la géographie, PUF, 2004 (p.65) 34

Source : GEORGE P., VERGER F., Dictionnaire de la géographie, PUF, 2004 (p.65) 35

Théorie des lieux centraux de Walter Christaller 36

MONNET J. Les dimensions symboliques de la centralité, Cahiers de Géographie du Québec, volume 44, n°123, décembre 2000 (p.400)

52

Mis en avant par Yves Chalas, il existe de nos jours un réel décalage dans les

représentations entre la « ville d’hier »37 et la « ville émergente »38 ou « ville

contemporaine »39, et cela se décline notamment par rapport aux centralités d’hier

(centralité historique) et aux centralités émergentes (nouveaux pôles de centralité en

périphérie). Ce décalage de représentation avec la réalité d’aujourd’hui se focalisera donc

uniquement sur la centralité en traitant l’exemple de Romans-sur-Isère. Plus concrètement,

nous noterons vite un décalage de représentation du centre-ville qui se délimite au centre

ancien et qui ne correspond pas avec la réalité de la ville aujourd’hui. A Romans, il existe

une extension du centre-ville qui s’est développée hors des enceintes de la vieille ville, et qui

n’est pas prise en compte par les décideurs politiques en tant que centralité urbaine

globale. Cette définition élusive du centre-ville « réel » nuit d’une certaine manière à la

revalorisation du centre historique, et nous tenterons de le démontrer au cours de l’analyse.

Il existe donc un certain paradoxe de ce cas empirique : le centre historique est considéré

comme le centre-ville (selon les acteurs locaux) et pourtant le centre historique n’a pas une

dynamique de centralité urbaine, c’est-à-dire qu’il n’est pas considéré, à l’heure actuelle,

comme un pôle ayant « une efficacité d’attraction »40.

Le cœur du problème se décline alors de cette manière : Pourquoi existe-il une

représentation de la centralité déconnectée de la réalité urbaine actuelle qui se focalise

uniquement sur le centre ancien? Et comment cette définition ambigüe et élusive du

centre-ville nuit-elle à la revalorisation du centre historique ?

La représentation de la centralité sera abordée selon le discours des décideurs

politiques et de l’action publique qui en découle. En complément d’autres éléments de

réponse seront abordés brièvement dans ce mémoire, comme le rôle de l’action publique

dans la création d’une dynamique de centralité (y’a-t-il une action publique suffisante pour

en faire un quartier inséré dans une dynamique de centralité?) ou les freins potentiels à une

action massive sur le centre ancien (Existe-t-il des freins (financiers, au niveau des outils) à

une action lourde sur le centre ancien ?). Mon hypothèse centrale sera celle de cette

37

Source : CHALAS Y., l’invention de la Ville, collection villes, Antropos, 2003 38

Source : CHALAS Y. L’invention de la ville, collection villes, Anthropos, 2003 39

Source : SECCHI B., (sous la direction de CHALAS Y.), L’imaginaire aménageur en mutation, (p.125) 40

Source : GEORGE P., VERGER F., Dictionnaire de la géographie, PUF, 2004 (page 65 et 66)

53

définition ambigüe et élusive de la centralité urbaine sur Romans comme échec de la

revalorisation du centre ancien.

Schématiquement, ma démonstration et le déroulement de mon argumentation

fonctionneront selon ce cadre d’analyse :

Cette argumentation sera expliquée et détaillée au cours du mémoire et sera

développée en trois temps :

Tout d’abord, il s’agit de dresser un constat actuel sur la complexité de la centralité à

Romans-sur-Isère : pourquoi existe-t-il un éclatement de la centralité, et une délimitation

imprécise du centre-ville, et comment cela se traduit-il sur le terrain ? Il s’agira aussi de

savoir comment le concept de « centralité » (pensée ici en terme « d’efficacité

Représentation de la centralité déconnectée avec

la réalité urbaine d'aujourd'hui.

Réalité: présence d'une centralité éclatée à Romans =

centre historique + autres centres porteurs de dynamisme

Définition et délimitation ambigüe et élusive du

centre-ville

centre-ville = centre historique

Focalisation de l'action publique sur le centre

ancien

Pas de dynamisme de centralité constatée sur

le centre historique.

Centre historique = quartier ancien dégradé

Parce qu’il y a Entraine

Entraine Conséquence

54

d’attraction »41 et « d’éléments d’influence »42) nous éclaire sur la différenciation de ces

centres (quelles formes de centralités abordent-ils distinctivement ?).

Malgré la diversité de ces « centres », il existe une focalisation toute particulière de

l’action publique sur le centre ancien. Cette focalisation est due à une représentation

déconnectée de la réalité urbaine d’aujourd’hui, à savoir qu’il y a une omission de

l’extension du centre-ville de Romans qui s’est pourtant réalisée hors des enceintes de la

vieille ville. Il s’agira de dégager les raisons de cette représentation qui définit et localise le

centre-ville uniquement sur le centre historique. Nous pourrons voir qu’il existe des raisons

considérées comme « classiques » (pour le dire simplement, dans « l’imagerie »43 que les

décideurs politiques ont des villes européennes, le centre-ville doit forcément intégrer ou

être localisé dans le centre historique notamment dû au phénomène de patrimonialisation

des centres historiques) et des raisons inhérentes à Romans (des freins propres qui

empêchent les élus communaux de penser le centre hors du périmètre du centre historique)

Enfin, cette représentation guide l’action publique et se focalise sur le centre ancien,

mais n’arrive pas à le faire sortir de son statut de « quartier ancien dégradé ». Et donc nous

essaierons de démontrer que cette pensée de la centralité, qui écarte les autres « centres »

relativement dynamiques de Romans, nuit à la revalorisation du centre historique romanais.

41

Source : GEORGE P., VERGER F., Dictionnaire de la géographie, PUF, 2004, p.65 42

Source : GEORGE P., VERGER F., Dictionnaire de la géographie, PUF, 2004, p.65 43

Source : CHALAS Y. L’invention de la ville, Anthropos, collection Villes, 2003

55

Pourquoi y a-t-il une centralité éclatée à Romans-sur-Isère ?

Historique de la création de la ville et déplacement de la centralité au fil du temps

Un développement particulier de la ville

Tout d’abord, la ville de Romans s’est développée sur un site particulier: le « Romans

historique » s’est installé entre le bord de l’Isère et une montée topographique, ce qui fait

que le centre ancien actuel se trouve « coincé »44 entre ces deux éléments géographiques.

Cette caractéristique est considérée parfois, dans le discours des Romanais, comme un point

faible. Ce site d’origine a fait que la ville ne s’est pas développée autour du centre historique

mais au Nord de celui-ci.

La destruction des remparts a laissé place aux boulevards. Il commence alors à y avoir

une différenciation entre un haut et bas de la ville. La ville, devant s’adapter à l’utilisation

de la voiture à l’heure du fordisme, délaisse peu à peu l’utilisation du tramway, et

transforme sa principale place d’arme (l’actuelle place Jean Jaurès) en parking pour accueillir

les voitures des Romanais ou les véhicules des personnes venant travailler à Romans. La

coupure morphologique entre le bas de la ville, étant l’amende médiévale de Romans, et le

haut de la ville, étant l’extension de l’urbanisation du XIXe siècle et du XXe siècle, s’accentue

fortement.

Le centre historique n’est plus le centre à part entière

De manière générale, le centre historique peut « se confondre avec les autres

centres, ou en être complètement coupé, cela dépend en partie de sa dimension, et de la

croissance récente de la ville : à Reims ou à Toulouse a peu près tout le centre-ville se tient

dans le centre-historique, à Montpellier relativement peu de chose. Dans les villes

européennes, le centre historique lui-même comporte souvent deux parties : la cité,

éventuelle héritière de la ville romaine et qui associait le pouvoir ecclésiastique et le pouvoir

laïque ; le bourg, ville marchande ; cathédrale et palais dans l’une, hôtel de ville et beffroi

44

Source : Entretien avec Philippe Dresin, premier adjoint aux finances et au service public communal, président d’Habitat Pays de Romans, le 1

er juin 2010

56

dans l’autre»45. Contrairement à cette définition, le pouvoir religieux et le pouvoir laïque se

trouvent tous deux dans le centre ancien. Par exemple, la mairie s’est installée sur la place

Jules Nadi, espace public nouvellement crée à la place d’un couvent. Le pouvoir politique est

donc situé dans le centre ancien. Quant au patrimoine religieux, il est peu à peu habité par

des associations ou des activités de l’ordre du culturel : l’exemple le plus frappant étant celui

du Musée de la Chaussure installé dans l’ancien Couvent de la Visitation. Malgré ces

quelques fonctions phares du centre ancien, pouvons-nous dire que la centralité se trouve

encore dans le centre ancien ? Pour répondre en partie à cette question, penchons nous

plus amplement sur la définition de centre-ville qu’en fait Pierre George et Fernand Verger

dans le Dictionnaire de la Géographie: « A la notion descriptive de centre s’associe celle du

noyau originel, historique et fonctionnel. Une série de termes homologues en langue

française et dans les langues étrangères européennes désigne la partie initiale de la ville, qui

monopolise d’une façon plus ou moins absolue les fonctions urbaines supérieures : activités

politiques et administratives (spécialement dans les capitales), activités bancaires, activité

de gestion commerciale, agences de voyage et équipement de grand tourisme, centre

culturel, commerce de détail des produits et objets de luxe, services « rares » (professions

libérales, cabinets d’affaires et de consultation juridique, cabinets médicaux de spécialistes,

etc.).*…+ Les difficultés croissantes de développement des fonctions de centres conduisent à

diverses opérations spontanées ou dirigées : démultiplication du centre, par création de

centre-relais qui attirent les fonctions centrales les plus nouvelles, décentralisation par

redistribution des fonctions « centrales » en divers points de la ville et même de

l’agglomération *…+ Souvent difficile d’accès par les moyens de circulation désormais en

usage, il (le centre historique) devient un isolat, une aire historique, une manière de musée

urbain réservé au tourisme et à un petit nombre de résidences traditionnelles »46. Certes, le

centre ancien romanais détient certains atouts « centraux » comme le fait qu’il reste encore

aujourd’hui le centre culturel, historique et politique de Romans. Néanmoins, il trouve son

inadaptation à l’évolution moderne de la société, notamment par rapport à l’utilisation de la

voiture et à la non-mise en norme du confort standard qui est demandé aujourd’hui dans les

logements. D’autres parties de la ville, et notamment l’extension du centre-ville, ont pu

accueillir ces nouvelles normes et adaptations de la ville moderne et contemporaine. 45

BRUNET R., Les mots de la géographie, dictionnaire critique, la Documentation française, Collection dynamiques du

territoire, 1992 (page 96) 46

GEORGE P., VERGER F., Dictionnaire de la géographie, PUF, 2004 (page 66)

57

Rappelons que la ville de Romans s’est développée au Nord en étendant des faubourgs

hors de ces enceintes. Ensuite, quand les murailles cerclant la vieille ville furent détruites en

1832, le principal faubourg, édifié majoritairement au XIXe siècle et situé sur une zone plane

et en hauteur par rapport au centre ancien, prit de l’importance avec l’installation de

commerces de proximité, la présence du tramway ou encore son adaptation progressive à la

voiture. Ce faubourg sera plus tard appelé par les Romanais l’espace des « Boulevards »

(voir carte page suivante), et demeure encore aujourd’hui un lieu de vie à part entière des

Romanais. Puis, l’urbanisation se développa de manière exponentielle encore et toujours au

Nord du centre ancien.

Nous pouvons alors placer ce que j’ai appelé le point « imaginaire » de la centralité sur

la place Jean Jaurès (qui fut une ancienne place d’arme et où est installé actuellement le

parking principal de la ville). Nous appelons la Place Jean Jaurès point « imaginaire » de la

centralité car cette place est plus considérée comme une coupure entre le « haut et le bas

de la ville » qu’un espace reliant ces deux centres. Toutefois, la centralité se déplaça donc

peu à peu au Nord et ne se situe définitivement plus dans le centre ancien. C’est à la fin des

années 1990, avec l’ouverture de Marques Avenue, une ancienne caserne militaire

réhabilitée et où furent installés, dans une grande opération de renouvellement urbain, de

nombreux magasins d’usine de vêtements dans ces nouveaux locaux, que la centralité se

déplaça à nouveau, toujours plus au Nord du centre ancien mais aussi plus à l’Est.

58

Figure 9 Carte illustrant de manière schématique le déplacement de la centralité au fil du temps

La redistribution des fonctions centrales, notamment commerciales, s’est effectuée à

la fois hors des enceintes de la vieille-ville et proche de celles-ci. Il ne s’agit donc pas

réellement de la création de « edge-cities », mais d’une centralité déplacée et proche tout

de même de son noyau originel.

Ce déplacement de la centralité et l’éclatement des divers centres à Romans ont pour

conséquence un véritable impact psychologique. Quand on fait l’expérience auprès des

Romanais ou même des techniciens de la mairie ou de la CCPR en leur posant la question

triviale « où est le centre ville de Romans? », des réponses très disparates apparaissent,

d’autres répondent avec franchise qu’ils ne savent pas (par exemple Jean Decauville,

responsable de l’équipe de l’animation de l’OPAH sur Romans et Bourg-de-Péage, avoue à

propos de la localisation du centre-ville de Romans que « c’est vrai qu’on a du mal à le

déterminer »47) ou qu’il n’y en a tout simplement pas.

47

Entretien avec Jean Decauville, responsable de l’équipe de l’animation de l’OPAH Romans et Bourg-de-Péage, le 8 avril 2010

59

Cependant, une division géographique entre le haut et le bas de la ville s’institue

dans les consciences. Dans de nombreux entretiens réalisés en 2009 par Céline Boudet, une

concurrence entre les commerçants du haut et ceux du bas se fait ressentir comme l’illustre

les citations suivantes de trois commerçants différents : « la mairie s’obstine avec le Romans

historique, le bas de la ville. Ils investissent beaucoup dans ce secteur, tout ce qui est du côté

de Saint Barnard, Saint Nicolas, la rue Pêcherie… » ; « Tout se passe toujours en haut de la

ville » ; « rien ne nous fait travailler tout est en bas » ; « nous sommes le boulevard des

oubliés »48. Il existe donc des animosités des commerçants du « haut de la ville » concernant

la focalisation des aides publiques sur les commerces du centre ancien (avec le Fisac

principalement) et des animosités des commerçants du « bas de la ville » concernant la

meilleure visibilité et une certaine facilité d’accès des commerces des boulevards.

Aujourd’hui, il manque une réelle lisibilité urbaine qui nous permettrait de constater

un centre-ville uni à Romans-sur-Isère. « Les Romanais n’arrivent pas clairement à identifier

le morceau de ville qui fait centre-ville. »49 avoue un technicien de la ville de Romans. Au-

delà de ce sentiment qu’il n’y a pas ou qu’on a du mal à déterminer le centre-ville romanais,

c’est le centre ancien qui pâtit encore plus de cette non-visibilité. L’agencement de la ville

fait que les touristes ont parfois du mal à s’y retrouver comme l’explique la directrice de

Marques Avenue : « il y a un haut et un bas de la ville, je l’ai ressenti quand je suis arrivée et

les clients pour ceux qui connaissent le bas de la ville, le centre historique, ça va ils ne sont

pas trop perdus. Pour les gens qui ne sont pas d’ici ils ont parfois du mal et certains ne

trouvent jamais le centre historique. C’est vrai que c’est compliqué pour y accéder, c’est en

contrebas et, avec cette artère qui traverse la ville, le bas de la ville on y va moins souvent. Il

faut rester très attentif à ces commerces car ils sont en grande difficulté *…+ ce sont des

commerces indépendants et quand ils commencent à prendre l’eau, ils sont tous seuls »50.Ce

constat est donc plutôt alarmant : les élus locaux veulent faire du centre ancien le fer de

lance de la reconversion de la ville et le mettre en avant pour changer l’image de Romans,

48

Source : propos recueillis par BOUDET C. in Etudes sur les retombées socio-économiques : le Carnaval de Romans et son inscription dans le centre-ville, (mémoire de fin d’études), 2009 49

Source : Entretien avec Eric OLIVIER-DRURE, responsable du service des archives de la ville de Romans, le 18 mars 2010 50

Source : propos recueillis par BOUDET C. in Etudes sur les retombées socio-économiques : le Carnaval de Romans et son inscription dans le centre-ville, (mémoire de fin d’études), 2009

60

mais, actuellement, il existe un certain désamour de certains Romanais pour ce centre

historique et les touristes ou les promeneurs n’arrivent pas à le trouver.

Comment le rayonnement lié au concept de centralité peut-il éclairer la complexité

morphologique des centres à Romans-sur-Isère ?

Complexité morphologique des « centres » de Romans et leur rayonnement

à des échelles différentes

« Un centre est habituellement identifié comme un lieu spécifique, caractérisé par un

ensemble de facteurs qui le distinguent d’autres lieux avec lesquels il est dans une relation

dominante suivant différentes échelles de mesure de sa « supériorité » : les surfaces y sont

plus chères parce que la concurrence pour les obtenir est plus grande, il est le siège du

pouvoir parce que les acteurs principaux de la décision s’y localisent, il concentre les usagers

parce qu’il offre différents bien et services qu’ils recherchent, et vice-versa. Ces échelles de

mesure et de valeur sont celles de centralités différenciables, que l’on peut catégoriser de

diverses manières à l’échelon intra-urbain »51. Cette définition nous permet de dissocier

« centre » et « centralité » : à Romans il y a des centres dissemblables ayant une

« centralité » différente, c’est-à-dire des fonctions centrales distinctes pour chacun des

centres.

Nous nous posons les questions suivantes pour les différents espaces centraux que

nous avons délimités, à savoir Marques Avenue, l’espace des boulevards et le centre ancien:

Quelles fonctions de centralité assument-ils ? Y’ a-t-il une bonne accessibilité, une bonne

attractivité des commerces, la présence de services, une influence territoriale ? Voici une

carte des centralités différenciés de Romans (page suivante) qui permettra d’illustrer

l’explication qui va suivre.

51

MONNET J., Les dimensions symboliques de la centralité, Cahiers de Géographie du Québec, volume 44, n°123, décembre 2000 (page 401)

61

Figure 10 Carte de la centralité à Romans: des centres différenciés?

62

Il existe donc bel et bien une centralité effective à Romans mais nous pouvons dire

qu’il y a une différenciation des pôles de centralité distincts avec un rayonnement très

différent de l’un à l’autre :

- Marques Avenue : est le pôle commercial régional. Marques Avenue est considéré

comme la « locomotive commerciale » de Romans en accueillant 1,5 millions de

visiteurs par an. Marques Avenue a permis de pérenniser une certaine clientèle qui ne

venait à Romans que pour la chaussure de luxe, cet espace a uniquement une fonction

commerciale. Néanmoins, Marques Avenue ne fait pas partie du centre-ville selon les

Romanais, mais est considéré comme tel par les non-Romanais. Et pourtant, Marques

Avenue reste le grand oublié du centre-ville, ou de ce qu’on pourrait appeler le

« projet centre-ville » qui se dessinerait dans le long terme. De manière descriptive,

Marques Avenue peut faire penser à un centre commercial périphérique notamment

avec la présence de nombreux parkings pour accueillir les personnes venant de

l’extérieur (voir photo ci-dessous), même si Marques Avenue n’est pas constitué en

tôle comme la plupart des centres commerciaux situés en entrée de ville (beaucoup de

personnes reconnaissent que Marques Avenue est un centre commercial agréable

avec une certaine qualité architecturale).

Figure 11 Marques Avenue, Avenue Gambetta à Romans

63

Rappelons tout de même qu’il était stratégique d’installer Marques Avenue vers

le centre et que « le projet semble aussi avoir confirmé le potentiel d’attractivité

attendu, non seulement en termes de fréquentation, mais aussi en termes de

redynamisation de l’activité commerciale du centre-ville »52. Ce qui semble assez

étrange c’est que la volonté stratégique de placer Marques Avenue proche du centre-

ville (c’est-à-dire en quasi continuité de l’espace des boulevards et à 800 mètres du

centre ancien) ne l’inclut pourtant pas dans le futur « Management de centre-ville ».

Les raisons de cette omission seront expliquées un plus tard au cours de l’analyse.

- Les boulevards : représentent le centre réel des Romanais avec des

commerces de proximité, des enseignes commerciales locales et nationales, mais aussi

de nombreux logements dans des bâtiments pour la plupart construit au XIXe et

jusqu’à la moitié du XXe siècle. C’est donc un espace urbain mixte puisqu’il accueille

aussi des équipements importants comme le collège et le lycée principal de la ville.

Cet espace répond d’une certaine manière à une centralité de ville moyenne avec un

rayonnement qui se limite à l’étendue de la ville. Cet espace est souvent cité comme

étant « L’espace vécu » des Romanais, même s’il ne fait pas l’unanimité lors des

entretiens ou des enquêtes précédentes, cet espace reste largement cité par les

Romanais comme étant pour eux l’espace le plus « central » de la ville.

- Le centre historique : au niveau commercial, il détient des enseignes

commerciales locales qui n’ont pas un rayonnement fort, à part pour certaines qui ont

une clientèle de «connaisseurs». Cette aire urbaine historique détient un

rayonnement touristique plutôt faible (à part pour les journées du patrimoine et pour

le Carnaval53 où le centre ancien sert de « décor urbain ») aux grands regrets des élus

locaux. C’est aussi le centre administratif et associatif de Romans. Le centre

historique a une mixité de fonctions, même si le logement a connu une forte vacance

jusqu’au début des années 2000 (19,6 % en 1999). Le centre historique connaît aussi

52

Source : MALBOSC F., Du développement économique au renouvellement urbain ? à propos de l’implantation de Marques Avenue, Les cahiers du DSU, décembre 2001, page 62 53

Les participants non-Romanais du Carnaval de Romans de l’année 2009 étaient d’origine de communes départementales voisines pour 73 % d’entre eux, 10% sont issus de la région, 17% proviennent d’un périmètre plus large (source : BOUDET C. in Etudes sur les retombées socio-économiques : le Carnaval de Romans et son inscription dans le centre-ville, (mémoire de fin d’études), 2009

64

des problèmes socio-économiques forts. Ce quartier est parfois dénigré par les

Romanais eux-mêmes, notamment à cause des problèmes de délinquance et du

sentiment d’insécurité qui en découle, comme l’exprime le responsable du service

Réglementation et Tranquillité publique : « Nous avons affaire à une délinquance

jeune qui crée un trouble dans le centre ancien. Le moindre fait dans les petites rues

du centre ancien est amplifié, notamment au niveau du bruit ou du désordre général.

Dans le centre ancien, nous ne sommes pas dans les mêmes problématiques que le

quartier de la Monnaie où il y a de grands espaces ouverts. En plus, l’obscurité tombe

plus vite dans les ruelles du centre ancien, qu’ailleurs dans la ville, car le bâti est plus

dense et les ruelles plus étroites »54. La coprésence de cette petite délinquance et des

commerces locaux que l’on veut redynamiser fait du centre ancien le quartier « le plus

problématique »55. Rappelons que « L’habitat ancien des quartiers centraux offre un

ensemble de perceptions qui concernent la matérialité de l’environnement urbain

comme ses caractéristiques sociales. En caricaturant, une rue étroite et un peu hors des

flux avec quelques commerces et des façades travaillées est l’idéale pour développer

des perceptions villageoises ou communautaires. Encore faut-il que les usagers aient

un comportement qui aille dans le même sens : s’ils sont agressifs, fermés ou

compassés, le perception risque d’être faussée »56. Ce centre historique ne

correspond pas au village idéal où la vie sociale n’est caractérisée que par la solidarité

et l’interconnaissance des résidents. Ce centre ancien est alors relégué au statut de

« quartier ancien dégradé ».

Enfin, « Force est de constater qu’à l’évidence la ville s’est étendue et contenue

de s’étendre toujours plus selon des critères et des contours qui ne sont plus de la ville

centre ancienne. Cette ville d’hier ne représente plus qu’une faible portion des

territoires urbains et surtout des pratiques urbaines habitantes »57. Pour le cas de

Romans, le centre historique n’est alors plus qu’une faible proportion du centre-ville.

54

Source : Entretien avec Franck Mallinjoud, responsable du service Règlementation et Tranquillité Publique de la ville de Romans, le 18 février 2010 55

Source : Entretien avec Franck Mallinjoud, responsable du service Réglementation et Tranquillité publique de la ville de Romans, le 18 février 2010 56

Source : BOURDIN A., Gentrification : un « concept » à déconstruire, Espaces et sociétés, n°132, 2008, (p.35) 57

Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection (p.94)

65

Que ce soit pour les boulevards ou pour le centre historique, on reproche souvent à la

ville de Romans de ne pas avoir un centre-ville vivant en soirée et la nuit comme le rappelle

Nadège Gautier, chargée de la mission commerce et artisanat de RBE : « la vie nocturne est

au point mort, cela est aussi dû au fait que Romans n’est pas une ville étudiante »58.

Enfin de compte, Ces différents centres ont certaines fonctions de centralité mais ils

restent chacun d’entre eux incomplets et ne répondent pas à tous les objectifs d’un centre-

ville « complet » et dynamique.

Malgré la présence d’autres « centres » dynamiques et à proximité du centre ancien, il

y a une action publique qui est uniquement menée sur le centre ancien, pourquoi ?

La partie suivante abordera plus amplement les « représentations » de la centralité

urbaine et pourquoi cela influe sur une définition ambigüe de celle-ci, à Romans.

58

Source : Entretien avec Nadège Gautier, chargée de la mission commerces et artisanat de RBE, le 14 avril 2010

66

Une représentation de la centralité déconnectée de la réalité urbaine

Une conception européenne du centre-ville, intégrée dans « l’imagerie »59

des décideurs politiques

Avant de rentrer dans le détail des raisons qui font que les décideurs politiques ont

une représentation de la centralité déconnectée de la réalité urbaine, qu’entendons-nous

par imagerie ?

L’imagerie ancrée dans le discours et l’action des décideurs politiques

L’imagerie que définit Yves Chalas nous éclaire grandement sur ce qui se passe à

Romans : « L’imagerie est constituée pour l’essentiel de trois composantes majeures.

Premièrement, d’illusions tenaces et de contrevérités qui, malgré les réfutations successives

par l’épreuve des faits ou les progrès de la pensée, continuent d’animer la démarche

urbanistique et de la légitimer. Deuxièmement, de réflexions sérieuses qui ont eu leur

moment de gloire non usurpée, qui étaient de ce fait utiles à l’urbanisme, mais qui, le temps

et surtout l’évolution des données faisant leur œuvre, ne servent plus guère à grand-chose.

Ces théories passées et dépassées se mettent alors à constituer un ensemble de certitudes

qui encombre, qui n’a plus de rapport avec la réalité, et va à l’encontre même des

observations effectuées sur le terrain urbain et des pratiques effectives de l’urbanisme sur

ce même terrain. Troisièmement, de vrais problèmes, mais qui ne trouvent pas de solutions

compte tenus de la manière dont ils sont posés »60. Ici, les trois composantes de l’imagerie

s’applique à Romans et se décline de cette manière: premièrement, dans l’imaginaire des

décideurs politiques le centre ancien est le centre-ville, or cette vision ne prend pas en

compte l’extension du centre-ville qui s’est opérée dès le XIXe siècle. Deuxièmement, la

vague de patrimonialisation du cadre bâti et de réhabilitation opérante depuis la loi Malraux

et qui a connu un large engouement à cette époque, est encore à l’œuvre dans le centre

ancien romanais. Et enfin, troisièmement, s’effectue une observation sur la centralité à

Romans des différents acteurs locaux qui est soit défaillante et involontaire (c’est-à-dire que

pour certains le centre-ville ne peut être que dans le centre ancien), soit omise et volontaire

59

Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.88) 60

Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.88)

67

(certains acteurs savent qu’il y a eu une extension du centre-ville mais l’omette car une

action sur l’ensemble du centre-ville serait trop compliquée ou coûteuse à réaliser).

A l’imagerie, Yves Chalas oppose l’imagination. On pourrait définir l’imagination

comme étant la réfutation des représentations intégrées dans l’imagerie, et proposent de

nouvelles manières de penser la ville. Rappelons que «la contradiction ou plutôt le couple

systémique que forment l’imagerie et l’imagination est transversal. Il est présent chez chaque

acteur et dans chaque secteur de l’urbanisme»61. C’est-à-dire que certains acteurs politiques

se rendent bien compte, lors d’entretiens approfondis, que le centre n’est plus dans le

centre ancien : « Enfin de compte, la colonne vertébrale de Romans est située sur les

Boulevards, au-dessus du centre historique »62. Pourtant, l’imagerie reste très présente dans

leur discours en faisant du centre ancien le centre-ville à part entière. Nous détaillerons

cette représentation par divers exemples plus tard dans l’analyse, et notamment à travers

un dispositif prochainement mis en place à Romans qui est celui du Mangement de centre-

ville.

Quelles représentations en découlent? Quel décalage de représentations s’effectue ?

Yves Chalas montre aussi qu’il existe de nouvelles centralités dans la ville-territoire,

c’est-à-dire les métropoles et leurs aires urbaines, qu’il y a eu, au cours du temps, création

de nouvelles centralités, c’est ce qu’on a pu appeler les edges cities63 (ville-lisère).

« Nombreux sont aujourd’hui les chercheurs ou les praticiens qui appellent de leurs vœux

l’invention de nouvelles façons d’appréhender les réalités urbaines sans cesse plus

complexes qui se développent sous nos yeux : Yves Chalas, par exemple, dans ses recherches

sur la « ville émergente », nous propose de nous débarrasser de l’imagerie qui a jusqu’à

présent guidé notre approche de la ville pour construire de nouvelles figures représentatives

qui permettent de rendre compte du développement sans précédent de la mobilité *…+ de

l’apparition à côté des centres historiques de nouvelles formes de polarités »64. Yves Chalas

rappelle qu’il ne faut pas négliger ces nouvelles centralités dans la culture urbanistique et ne

pas se donner comme seule référence le centre historique pour seul et unique centre qui a 61

Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.89) 62

Source : Entretien avec Jean-David Abel, élu à l’urbanisme de la ville de Romans, le 3 mai 2010 63

Source : GARREAU, 1991 64

Source : NOVARINA G., (sous la direction de CHALAS Y.) L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités, l’Harmattan (p. 67)

68

de la valeur. Ces nouvelles centralités sont des cœurs de vie pour beaucoup de

« territoriants »65. Rappelons aussi que cette conception reste très européenne

contrairement, par exemple aux conceptions américaines des villes car « La ville américaine

a moins de mépris que la ville européenne pour ses vastes périphéries flottantes »66 ou

encore il y a bel et bien une opposition entre « la ville européenne et la ville américaine –

l’opposition géométrique – la ville avec un centre et la ville sans centre, ou encore la

différence spatiale - la ville dense et la ville étendue »67.

Cette analyse se cale sur l’exemple métropolitain, ce qui ne concerne pas le cas de

Romans. Néanmoins, cette analyse permet d’utiliser une grille de lecture qui est applicable

pour Romans, dans le sens où il y a une réduction du centre-ville au centre ancien dans

« l’imagerie » ou « l’imaginaire » des décideurs politiques : cela est l’une des causes des

actions menées depuis plus de trente ans sur celui-ci. Cette conception de la centralité

provient des époques précédentes, ce n’est donc pas une vision construite par les décideurs

politiques actuels, mais plus une « imagerie » héritée et qui s’est perpétuée dans

l’inconscient collectif (aussi bien au niveau de certains techniciens, des associations que des

élus locaux). Est resté l’image de la ville du XIXe siècle, alors que le centre historique est

devenu qu’une simple partie du centre-ville. Il y a donc « omission » de cette extension de

la centralité actuelle. Des mécanismes de représentations s’enclenchent : les autres centres

sont considérés comme moins importants et secondaires par rapport au centre historique.

A travers l’action portée sur le centre ancien et « en dépit de la réalité du passé, la rêverie, le

désir même du village dans la ville persistent et se manifestent »68.

Les savoirs sur la ville qui émergent ou ont émergé il y a déjà quelques années (comme

pour la ville émergente d’Yves Chalas) ne sont pas toujours intégrées aux pratiques

professionnelles comme le rappelle Viviane Claude dans son ouvrage Faire la Ville : « Des

pratiques professionnelles sont ainsi exercées à partir des savoir d’hier, parfois des savoirs

65

Terme utilisé par MUNOZ F., (sous la direction de CHALAS Y.) L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités, l’Harmattan (p.83 et 88) : « Territoriante est dès lors la population métropolitaine qui grâce aux améliorations dans les réseaux et systèmes de transport et de télécommunications, peut participer à des activités différentes dans des lieux différents du territoire de manière quotidienne. Le territoriant a une présence multiple et variée dans l’espace métropolitain lui-même multiple et varié » 66

Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.84) 67

Source : MUNOZ F., (sous la direction de CHALAS Y.) L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités, l’Harmattan (p.82) 68

Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.99)

69

d’hier sur l’urbain d’hier. Cela tient autant à l’effet d’inégale distribution des connaissances

entre les praticiens, qu’à l’effet des générations et à la plus ou moins grande efficacité des

concepts dont le praticien dispose pour envisager son action. *…+ Savoirs et pratiques ne sont

donc pas synchrones, de même que l’urbain et le savoir sur l’urbain ne sont pas

synchrones »69. Cette réflexion s’adapte très bien à la situation romanaise et expose

l’entrecroisement de plusieurs raisons à ce décalage de représentations sur la centralité :

d’une part, les savoirs sur la ville-émergente ne sont pas intégrés dans les pratiques

professionnelles locales et, d’autre part, que de nouvelles formes urbaines émergent sans

que les chercheurs n’aient eu encore le temps de les analyser et de produire des écrits sur

celles-ci. Cela a donc pour conséquence que l’action sur l’urbain peut parfois être totalement

décalée et inadaptée par rapport à la réalité de la ville actuelle.

Pourtant, il est connu et reconnu que « les résultats des analyse empiriques, au fond ne

surprennent guère, mais permettent de rogner les ailes à quelques mythes et projections

simplistes. Certes, le modèle monocentrique appartient au rayon des accessoires démodés ;

le desserrement des populations et des activités est à peu près partout évident »70. Ce

discours là reste très enfoui dans la pensée des décideurs politiques, la vieille-ville comme

centre-ville reste la représentation la plus prégnante dans l’imaginaire des élus locaux. Il

existe donc un décalage entre le désir politique et la réalité de la ville aujourd’hui. Dans les

priorités politiques les plus importantes et les plus citées pour Romans est de faire du centre

ancien un espace redynamisé beau et concourant à l’image de Romans, malgré des moyens

limités. Est affichée une certaine volonté dans le discours politique d’avoir un patrimoine

bâti et historique connu de tous et pas seulement reconnu par les professionnels et les

techniciens et d’aller à l’encontre d’un certain « désamour » des Romanais pour ce centre

ancien.

69

Source : CLAUDE V., Faire la ville, les métiers de l’urbanisme au XXe siècle (p. 235) 70

Source : COFFEY W., MANZAGOL C., SHEARMUR R., Centralités métropolitaines, Cahiers de Géographie du Québec, volume 44, n°123, décembre 2000 (p.279)

70

Le Mangement de centre-ville : un nouvel outil illustrant ce décalage de représentations

Le Mangement de centre-ville est un exemple de la constitution d’un outil et d’une

future gouvernance partagée publique/privée qui a pour objectif de redynamiser le centre-

ville. A l’origine, cette opération préalable à la création du Management de centre-ville a été

menée par RBE, comme le raconte Nadège Gautier, chargée de la mission commerce et

artisanat : « Est en cours d’étude sur Romans ce qu’on appelle « une gestion centre-ville ».

C’est une opération de Mangement de projet de centre-ville suivie par Pierre Francis,

membre de l’AMCV (Association du Mangement de centre-ville). Cette association belge

promut un partenariat public-privé favorisant la coopération de tous les acteurs du centre-

ville (que ce soit des élus, des commerçants, des personnes travaillant dans le tourisme,

l’animation culturelle etc.) et que cette coopération permettrait de créer une forme de

développement économique et social au sein de la ville. Dans l’Idéal, ce regroupement serait

transversal et neutre (partage des pouvoirs, avec souvent la maire comme président,

l’adjoint étant un commerçant) et pourrait permettre un financement qui se composerait de

50% de fonds publics et 50% de fonds privés. Mais cela, est rarement le cas, l’investissement

public est souvent bien plus important ».71 La personne membre de l’AMCV a rencontré

nombre d’acteurs, mais a surtout été cadré par l’élu romanais chargé du commerce dans le

centre ancien, et par ce biais, il s’est donc largement imprégné de la priorité politique de la

ville de Romans de faire du centre ancien un espace dynamique et central. D’où la

conclusion que « pour ce qui est de Romans, Pierre Francis pense qu’il faudrait partir d’un

périmètre de centralité restreint (c’est-à-dire, délimiter un périmètre englobant la rue

Mathieu-de-la-Drôme, la place Maurice Faure et la côte des Cordeliers) »72.

Le résultat actuel est que ce nouvel outil de gouvernance et de redynamisation du

centre-ville se focalise uniquement sur le centre ancien, et a en évincé les acteurs privés

des « autres centres » dynamiques romanais au fur et à mesure des réunions publiques.

Les commerçants des boulevards déçus de voir qu’on revenait toujours au centre ancien,

s’éclipsent dès la fin de la première réunion publique. Marques Avenue n’étant pas présent,

est exclu même des pensées. Dans ce cas, sont exclus les facteurs dynamiques des

Boulevards et de Marques Avenue, comme si « l’observation ne peut donc être basée que sur

71

Source : Entretien avec Nadège Gautier, chargée de mission commerce et artisanat à RBE, le 14 avril 2010 72

Source : Entretien avec Nadège Gautier, chargée de mission commerce et artisanat à RBE, le 14 avril 2010

71

un simple recueil de données (qualitatives ou quantitatives), car elle suppose un choix, qui est

établi en fonction d’intentions initiales qui sont construites à partir de représentations que

l’on s’est forgée au préalable »73. L’idée et la représentation que le centre-ville se délimite

au centre ancien se perpétue donc même dans les outils qui ne se veulent pas uniquement

publics mais de l’ordre du partage des pouvoirs entre le public et le privé.

Les raisons de cette focalisation sur le centre ancien

Des raisons « classiques »

J’entends par «raisons classiques» des raisons de la focalisation de l’action publique

sur les centres historiques diffusées largement en France et en Europe et pas seulement sur

Romans.

Le centre historique est considéré comme une « aubaine » pour se reconvertir après la

crise industrielle de la chaussure et du cuir à Romans. Il y a donc une patrimonialisation du

centre ancien romanais qui est, en réalité, assez classique après la crise d’une ville en quasi

mono-activité. Comme expliqué dans le rapport de stage, la reconversion de Romans se fait

par la culture ou par la valorisation du patrimoine74 .

Romans peut être désignée comme ce qu’appelle Max Rousseau une ville

perdante : « Le terme de villes perdantes vise à illustrer le fait que les bouleversements

sociaux, économiques et politique survenus depuis une trentaine d’années en Europe ont

entrainé une redistribution des cartes qui a bénéficié à certaines villes ou types de villes, mais

a également rendu certaines largement perdantes : parmi celles-ci, les villes portuaires et les

villes les plus anciennement industrialisées sont les plus touchées. Nous définirons les villes

perdantes comme possédant deux types de problèmes : l’un objectif, l’autre subjectif *…+ Les

villes se caractérisent par des taux relativement élevés de phénomènes habituellement

perçus comme problématiques : chômage, faible qualification de la population, insécurité,

part importante de la population âgée, multiculturalisme *…+ Un autre type de problème

subjectif qui découle de ce premier tout en étant distinct : elles (les villes perdantes) ont

73

Source : NOVARINA G., (sous la direction de CHALAS Y.) L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités, l’Harmattan (P ;71) 74

Source : ROUSSEAU M., « Bringing politics back in » : la gentrification comme politique de développement

urbain ? Autour des « villes perdantes », Espaces et sociétés n°132, 2008

72

mauvaise presse, une mauvaise image, bref, les représentations que l’on s’en fait, dans les

milieux dominants tout au moins, sont souvent négatives »75. Romans rentre parfaitement

dans cette description de la ville perdante. Alors, advient que « le plus important pour

l’image de la ville est la requalification du centre-ville »76 et donc le centre ancien pour

Romans. « La requalification du centre-ville passe par la mise en valeur, par les services de

l’urbanisme et de la communication, du patrimoine de la ville »77. Nous pouvons faire le

parallèle avec la ville de Roubaix qui a développé, comme à Romans, depuis la crise

industrielle, une patrimonialisation accrue de son tissu urbain78. Roubaix a réhabilité son

patrimoine industriel en créant une ZPPAUP, instauré une opération façades, obtenu le label

« Ville d’Art et d’Histoire » ainsi que mis en place des associations culturelle et artistiques

visant la revalorisation de Roubaix. Les mêmes outils ont été mis en place à Romans (sauf le

label « Ville d’Art et d’Histoire », pourtant désiré par les élus locaux), bien que ce

phénomène de patrimonialisation ne se soit pas tourné vers son patrimoine industriel mais

vers son centre historique. Nous pouvons alors dresser le constat que Romans suit un

schéma assez classique de patrimonialisation79 après une crise industrielle profonde.

La centralité est donc vue à travers le prisme du patrimoine historique et bâti, et de

ce fait déforme ce qu’est réellement le centre-ville. Globalement, « la culture urbaine

classique qui est la nôtre, en Europe notamment, associe, confond parfois, purement et

simplement, centralité et patrimoine, et de ce fait nous empêche de percevoir les centralités

nouvelles »80.

Pourtant, Romans ne détient que peu de monuments historiques, mais les élus locaux

misent plutôt sur un tissu urbain ancien, des rues étroites, un parcellaire morcelé ou encore

une typologie des habitations. En France, nous sommes assez en retard par rapport à

d’autres pays européens pour protéger ces tissus urbains anciens, comme le rappelle

Françoise Choay : « Ainsi Ruskin fut le premier à dire la valeur et à promouvoir la

75

Source : ROUSSEAU M., « Bringing politics back in » : la gentrification comme politique de développement urbain ? Autour des « villes perdantes », Espaces et sociétés n°132, 2008 (p.77) 76

ROUSSEAU M., « Bringing politics back in » : la gentrification comme politique de développement urbain ? Autour des « villes perdantes », Espaces et sociétés n°132, 2008 (p.80) 77

ROUSSEAU M., « Bringing politics back in » : la gentrification comme politique de développement urbain ? Autour des « villes perdantes », Espaces et sociétés n°132, 2008 (p.81) 78

ROUSSEAU M., « Bringing politics back in » : la gentrification comme politique de développement urbain ? Autour des « villes perdantes », Espaces et sociétés n°132, 2008 79

Patrimonialisation : reconnaissance des instances compétentes de la valeur du patrimoine présenté 80

Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.117)

73

conservation d’un héritage modeste, celui des architectures domestique et vernaculaire qui

constituent en particulier, le tissu des villes anciennes. Quant aux Italiens, dans le sillage

tracé par Giovannoni, ils furent les premiers, après la guerre de 1914, à considérer les villes

anciennes comme des monuments historiques à part entière. En France, il a fallu attendre

1964 pour voir promulguer le décret d’application de la loi du 4 août 1962 sur les secteurs

sauvegardés, dite loi Malraux 81». C’est seulement depuis les années 1970 que « les

politiques de protection du patrimoine sont devenues les instruments privilégiés de la gestion

urbaine dans les espaces bâtis ayant plus d’un siècle d’âge »82.

Une échelle de valeurs du patrimoine se dessine alors. Cette échelle de valeurs ne se

fait pas forcément selon l’ancienneté du patrimoine, mais du goût de l’époque : « à côté de

la valeur pour l’histoire de l’art que possèdent à nos yeux toutes les œuvres d’art

(monuments) anciennes, sans exception, il existe manifestement une valeur purement

artistique, indépendante de la place qu’occupe l’œuvre dans le développement de

l’histoire »83 . Et, « chaque lieu est source de représentations mentales qui incluent des

jugements de valeur par rapport à des référents culturels au sens le plus large, faisant appel

à l’esthétique, à l’histoire, au pouvoir, au prestige »84. Dans le discours des élus romanais, le

patrimoine trouve sa valeur dans sa rareté, c’est-à-dire que plus il est ancien, plus il est rare,

précieux, et donc à en prendre soin voire à revaloriser. C’est le cas du centre ancien

romanais.

Durant les entretiens, cette échelle de la valeur patrimoniale de la ville se décline sur

les différents centres romanais : ce qui est plus ancien détient une valeur supérieure car

considéré comme plus rare. Le centre ancien est classé en ZP1 dans la ZPPAUP de Romans,

des normes strictes y sont incluses et une protection accrue est mise en place sur ce centre

historique à travers cette réglementation. L’espace des boulevards est classé en ZP2, des

normes architecturales y sont incluses mais sont bien moins strictes que sur le centre ancien.

On veut donc insister sur les particularismes du centre ancien et les protéger, à savoir ce

81

Source : CHOAY F., Le patrimoine en questions, anthologie pour un combat, SEUIL, collection la couleur des idées (p.21) 82

MONNET J. Les dimensions symboliques de la centralité, Cahiers de Géographie du Québec, volume 44, n°123, décembre 2000 (p.409) 83

Source : CHOAY F. (texte fondateur de RIEGL A.), Le patrimoine en questions, anthologie pour un combat, SEUIL, collection la couleur des idées (p .165) 84

Source : BOURDEAU-LEPAGE L., A la recherche de la centralité perdue, Revue d’Economie Régionale et Urbaine, 2009 (p.6)

74

qu’on peut appeler « le non-rectiligne, le non-uniformisé, l’importance du recoin, des

bizarreries de l’histoire architecturale, des décors et des normes successives accumulés en un

même lieu. Bref, tout ce que n’ont pas, encore, les cités périphériques réhabilitées et qui fait

des vieux centres des espaces uniques, singuliers, originaux, qui développent un fort

sentiment d’attachement et rendent plus aisée l’appropriation »85. Agir sur le centre

historique c’est aussi une façon de ne pas vouloir l’uniformité, l’indifférenciation, la

banalité, la non-animation des autres morceaux de la ville, et encore plus l’urbanisme de

catalogue86 des quartiers résidentiels périphériques.

Le centre historique peut-être utilisé comme facteur identitaire pour une ville, et cela

se retrouve par exemple dans le discours de Jean-David Abel, élu à l’Urbanisme de la ville de

Romans : « le centre historique est un facteur d’identification dans le sens où quand on se

trouve dans un centre historique on peut dire, selon la morphologie, le bâti, l’architecture les

matériaux le mobilier urbain, dans quelle ville nous sommes. Car aujourd’hui, on note une

certaine homogénéisation des modes de faire de la ville (au niveau de la forme adoptée, des

matériaux utilisés) dans des quartiers récents. Ces quartiers plus récents ne participent pas à

l’identification de la ville ». Il est donc bien questions que « le centre historique de la ville

patrimoniale est un vecteur de l’identité urbaine »87. L’évolution moderne et contemporaine

de la ville a fait que « jusqu’alors, la maîtrise de la mobilité générale a été avant tout

recherchée dans le passage à des échelles supérieures suivant l’élargissement sans fin du

modèle centre-périphérie et de ses couronne, faisant disparaître la variété croissante des

centralités. Le résultat est catastrophique, il mène à la rupture de l’identité »88, ce qui doit

être évité selon les acteurs politiques locaux. On veut insister sur la rareté des biens

immobiliers du centre ancien, une façon de faire l’habitat qui n’existe plus aujourd’hui avec

par exemple les hôtels particuliers (photos page suivante).

85

Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.52) 86

Source : BOURDIN A., Gentrification : un « concept » à déconstruire, Espaces et sociétés, n°132, 2008 (p.32) 87

Source : WATREMEZ A., L’entretien itinérant : pour une construction d’un dispositif méthodologique de narration des habitants dans la ville patrimoniale, Etudes de communication, n° 31, 2008, (p 78) 88

Source : BEAUCHARD J. (sous la direction de CHALAS Y.) L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités, l’Harmattan (p. 119)

75

Figure 12 Quelques images des hôtels particuliers dans le centre ancien romanais (photos prises par Marisa JULIEN)

Ce sont des biens immobiliers qui sont très rares au niveau régional voire national, et

certaines associations et certains élus romanais essaient de communiquer sur ceci pour

refaire prendre goût aux Romanais de cette richesse patrimoniale.

Une certaine mise en scène du centre ancien se réalise à travers l’animation

culturelle. Le meilleur exemple est celui du Carnaval de Romans en février. Le tissu urbain

du centre ancien est alors exploité lors de ces festivités. Paul Claval nous explique en ces

termes les atouts de la ville ancienne : « les avantages de la concentration ne sont pas tous

économiques. La réunion de foules nombreuses permet l’éclosion de formes de sociabilité

spécifique des grands nombres. Les sensibilités sont alors exacerbées, des mouvements

d’entrainement collectif se dessinent. Cela donne aux manifestations religieuses, aux

rassemblements politiques ou aux fêtes une dimension qu’elles ne peuvent connaître

lorsqu’elles ne réunissent pas d’effectifs suffisants »89. Le centre ancien est propice à ce type

rassemblement festif. Derrière cet événement festif, il y a une volonté politique que les

Romanais se réapproprient le centre historique, et de le faire découvrir aux autres

personnes qui viennent assister au Carnaval de Romans.

89

Source : CLAVAL P., Réflexions sur la centralité, Cahiers de Géographie du Québec, volume 44, n°123, décembre 2000 (p.287)

76

Figure 13 Le carnaval de Romans, le 27 février 2010 (Photos prises par Marisa JULIEN)

Le jour du Carnaval c’est plus de 15 000 personnes qui investissent le centre-ville,

associations, spectateurs, carnavaliers, promeneurs, touristes, et ce, en plus des habitants

présents à l’année tels que les commerçants et les résidents90. C’est une stratégie des élus

locaux que d’utiliser ce charisme historique du centre ancien lors de ce jour de festivité,

comme le raconte un bénévole : « cette année le défilé est parti place Jules Nadi, on a pris le

centre ancien, jusqu’à Jean Jaurès. Comme le centre historique est resserré, il y a cet effet de

masse qui est sympathique »91.

Rappelons qu’il est parfois difficile pour les élus locaux de sortir de cette conception

européenne de la centralité urbaine, notamment pour les villes moyennes, car agir sur le

centre historique pour le revaloriser c’est aussi trouver une reconnaissance, une image

renouvelée, un certain dynamisme avec l’arrivée du tourisme, c’est aussi retrouver une

sorte d’épaisseur historique de la ville. Et c’est « après des décennies de politiques du

monument saisi hors contexte, les actions ont intégré l’alentour de l’objet revitalisé *…+ Des

centres historiques tombés dans l’oubli sont maintenant territoires de reconnaissance »92.

« Si les bâtiments sont sans intérêt particulier, leur organisation d’ensemble est celle de la

ville traditionnelle »93, et c’est sur cette option-là que les élus romanais misent leur

programme politique.

90

Source : BOUDET C., Etudes sur les retombées socio-économiques : le Carnaval de Romans et son inscription dans le centre-ville, (mémoire de fin d’études), 2009 91

Source : propos recueillis par BOUDET C. in Etudes sur les retombées socio-économiques : le Carnaval de Romans et son inscription dans le centre-ville, (mémoire de fin d’études), 2009 92

Source : COLIN-DELAVAUD A., HERSCHON J-C, ORELLANA L., Dossier: nouvelles formes d’intervention dans la gestion du territoire patrimonial urbain, l’information géographique n°2, 2006 (p.6) 93

Source : CHARMES E., Le retour à la rue comme support de la gentrification, Espaces et société, 2005 (p.127)

77

Sortir de cette conception européenne de la centralité urbaine est d’autant plus

difficile dans un contexte où la patrimonialisation est recherchée aussi pour avoir une plus-

value financière et pour faire-valoir une image qualitative et spécifique de la ville (avec

l’exemple du label Villes d’Art et d’Histoire). Enfin de compte, les élus locaux essayent

d’arriver à obtenir l’image de la ville patrimoniale à travers le centre ancien romanais : « la

ville patrimoniale est dotée d’un centre historique considéré comme un secteur présentant un

caractère historique, esthétique ou de nature à justifier la conservation, la restauration et la

mise en valeur. Son tissu urbain est hérité des villes médiévales, il est constitué de rues

étroites, d’une certaine hauteur des bâtiments, et de l’omniprésence du patrimoine. *…+ Ces

villes donnent à voir ce patrimoine, le médiatisent à travers de nombreux dispositifs, dans le

cadre d’une politique touristique forte à travers des labels (Ville et Pays d’Art et d’Histoire,

Patrimoine mondial de l’humanité. Elles voient ainsi passer dans leurs murs des milliers, voire

des millions de touristes, et, parfois la cohabitation avec les habitants ne se fait pas en toute

sérénité »94, jusqu’à arriver à une pandémie patrimoniale95 européenne et de plus en plus

mondiale.

Il s’agit alors d’obtenir des retombées économiques et une image renouvelée avec

l’avènement du tourisme culturel. « Le tourisme culturel a pour objet l’élargissement des

horizons, la recherche de connaissances et d’émotions au travers de la découverte d’un

patrimoine culturel *…+. Il est visité in situ ou à travers des lieux de conservations (musées) ou

des événements (fêtes, festivals). Le tourisme culturel n’est pas exclusivement urbain, mais

ceux qui s’y adonnent sont presque exclusivement hébergés en ville, où se trouvent la grande

majorité des lieux visités »96 .Il s’agit d’atteindre l’objectif de reproduire ce qui a pu se passer

et fonctionner pour certaines villes patrimoniales car « les villes historiques ont bénéficié

d’un traitement de faveur, indissolublement lié au développement du tourisme »97 .

On peut se demander pourquoi, à l’époque actuelle, insiste-t-on autant sur le

patrimoine, et notamment sur le patrimoine bâti ? Dans nos sociétés européennes, il existe

94

Source : WATREMEZ A., L’entretien itinérant : pour une construction d’un dispositif méthodologique de narration des habitants dans la ville patrimoniale, Etudes de communication, n° 31, 2008, (p.77 à 78) 95

Source : COLIN-DELAVAUD A., HERSCHON J-C, ORELLANA L., Dossier: nouvelles formes d’intervention dans la gestion du territoire patrimonial urbain, l’information géographique n°2, 2006 (p.6) 96

Source : MERLIN P., Le Tourisme en France : Enjeux et Aménagement, ellipses, collection Carrefours, 2006, (p. 142) 97

Source : BOURDIN A., Gentrification : un « concept » à déconstruire, Espaces et sociétés, n°132, 2008 (p.29)

78

une certaine fétichisation du patrimoine98 qui est due à « une réaction passéiste et

nostalgique et qui érige en modèles des formes et des modes d’organisation qui, porteurs

d’une valeur mémorial, n’en sont point devenus anachroniques, alors qu’ils appelleraient une

continuation avec le cours de l’histoire »99. Nous sommes arrivés à « une nouvelle époque

pour laquelle l’avenir paraît obscur, plus lourd de menaces que gros d’espérances, et dans

laquelle le présent est souvent lu en termes de pertes de substance et de disparition des

qualités du passé »100. S’exerce un retour sur le passé comme valeur sûre, par appréhension

de l’avenir, l’urbanisme et l’aménagement sont des champs de l’action imprégnés de ces

nouvelles visions sociétales.

Des raisons inhérentes à Romans

Au-delà de ces généralités sur la patrimonialisation quasi unanime des centres

historiques européens, revenons au contexte local du cas romanais en rappelant qu’il existe

une réelle attache personnelle et presque intime et affective des élus vis-à-vis de ce centre

ancien. Nous pouvons distinguer deux explications à cet attachement : une avouée avec le

rôle pédagogique de l’historicité du centre ancien qui est souvent mis en avant par les

décideurs politiques (comme l’exprime Jean-David Abel : « il est du devoir des responsables

politiques de se charger du centre ancien car il y a un patrimoine fort, une certaine épaisseur

historique de ce quartier »101 ) et une moins avouée qui est un attachement « intime » des

élus au centre ancien. Par exemple, le centre ancien représente pour eux le lieu actuel

d’habitation ou pour ceux qui n’y habitent pas, ils ont le désir d’y habiter quand il sera en

grande partie réhabilité et quand la situation se sera améliorée.

Nombre d’acteurs font porter leur voix dans le centre ancien: des associations de

commerçants ou encore l’association de la sauvegarde du patrimoine romanais et péageois

interpellent souvent la mairie quant aux problèmes du centre ancien ou sont parfois force de

proposition pour le revaloriser. Ces acteurs font largement reconnaître qu’il faut mettre en

valeur l’historicité du centre et qui manque une mise en valeur de qualité concernant ce

98

Source : CHOAY F., Le patrimoine en questions, anthologie pour un combat, SEUIL, collection la couleur des idées (p.35) 99

Source : CHOAY F., Le patrimoine en questions, anthologie pour un combat, SEUIL, collection la couleur des idées (p.35) 100

GENESTIER P. (sous la direction de CHALAS Y.) L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités, l’Harmattan (p.189) 101

Source : Entretien avec Jean-David Abel, élu à l’Urbanisme, le 3 mai 2010

79

domaine, comme le met en exergue ce président associatif : « A Romans y a beaucoup de

choses historiquement, y a une église romane la plus vieille de la région, si ce n’est de

l’Europe, il reste des bouts de remparts, y’a un beau centre historique, mais on en parle pas

beaucoup, ça manque un peu de mettre en valeur le patrimoine avec des associations, des

choses médiévales »102.

A Romans, il existe certains aménagements centraux qui ne voient pas le jour à cause

de blocages politiques successifs. Il suffirait de travailler sur les espaces publics, la

signalétique, une communication plus efficace etc. mais bien au-delà d’un problème de

représentation du centre-ville, la ville de Romans connaît ses propres limites pour penser

ces aménagements « centraux » et donc forcément considérés comme plus chers, plus

délicats à mettre en place. Comme nous l’avons pu l’expliquer plus amplement dans le

rapport de stage, il y a de réels problèmes de financement à Romans. Il plane toujours l’idée

dans les consciences de la possible mise sous tutelle de la mairie romanaise. D’autant plus,

que nous sommes actuellement dans un contexte de réductions budgétaires importantes au

niveau notamment de l’Urbanisme et des subventions données par l’Etat. A Romans, il y a

des actions publiques qui arrivent à des impasses successives car il existe « un certain

fatalisme à Romans »103 où les élus s’empêchent eux-mêmes de penser des aménagements

d’ampleur pouvant revaloriser le centre ancien ou le centre-ville, et notamment de penser la

centralité urbaine hors du centre ancien. Rappelons que, actuellement, « le spectre temporel

de nos projections politiques est limité et prudent »104. Ce constat général se trouve exact

pour Romans car c’est bien, par prudence ou par hésitation, que l’action publique se limite.

Néanmoins, bien que cette raison puisse être considérée comme inhérente à Romans,

il existe d’une manière générale ce que Philippe Genestier appelle un certain « scepticisme »

ou un « désabusement »105 quand à l’avenir qui se profile, dans notre « société

d’incertitudes »106. La société d’incertitudes « ce n’est pas seulement une société en manque

de réponses face aux problèmes qui se posent à elles. C’est une société qui en est à se

102

Source : Propos recueillis par BOUDET C. in Etudes sur les retombées socio-économiques : le Carnaval de Romans et son inscription dans le centre-ville, (mémoire de fin d’études), 2009 103

Source : Entretien Jean-David ABEL, élu à l’urbanisme, troisième adjoint 104

Source : GENESTIER P. (sous la direction de CHALAS Y.) L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités, l’Harmattan (p.166) 105

Source : GENESTIER P. (sous la direction de CHALAS Y.) L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités, l’Harmattan (p. 159) 106

Source : CHALAS Y., L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités, l’Harmattan (p.231)

80

demander ce que sont les problèmes qui la travaillent et la transforment. De même, la

société d’incertitude ce n’est pas seulement une société de l’incapacité à prévoir. C’est une

société qui en est réduite à découvrir ses potentialités néfastes notamment qu’une fois

l’événement produit *…+ La société d’incertitudes est une société qui ne sait plus ce qu’elle

gagne ou ce qu’elle perd en avançant »107. Il n’est donc pas rare de constater une certaine

prudence, voire une réticence, de nombre d’élus avant d’agir concrètement sur des

problèmes urbains identifiés, qui plus est dans une ville moyenne en proie à une crise

économique sans précédent.

Parler du futur, jugé trop incertain, limite donc l’action et crée un véritable

retournement vers le passé comme valeur sûre. De manière globale, « nous subissons ainsi

un hiatus entre une aspiration à une transformation globale et volontaire du monde *…+ et

les lectures partielles et fragmentaires du réel qui dominent actuellement et qui commandent

la conception modeste, voire résignée, de ce qui nous paraît relever de l’ordre du

possible »108. L’imprévisibilité du futur ne laisse pas intact l’aménagement et l’urbanisme, et

notamment pour certains grands projets urbains et une action massive qui seraient pourtant

essentiels pour la centralité romanaise.

Est alors mis en avant la complexité de monter un grand projet comme l’avoue

Philippe Dresin : « j’espère que ce grand projet d’aménagement (la place Majeure) verra le

jour bientôt et se déroulera, si tout se passe bien, entre 2012 et 2018 »109. Philippe Genestier

nous rappelle qu’« il existe un autre facteur majeur d’imposition du scepticisme politique

ambiant, c’est la conscience exacerbée de la complexité des problèmes et du caractère

intrinsèquement aporétique des questions actuelles »110 et Anne René-Bazin développe cette

idée en l’exprimant en ces termes « La discontinuité de l’action publique, l’incertitude du

droit, et plus encore, l’instabilité des dispositifs financiers rendent très difficile l’élaboration

de montage opérationnels : les maîtres d’ouvrage se trouvent en attente de la prochaine

réglementation, ou de la définition de la nouvelle enveloppe annoncée, se substituant en

107

Source : CHALAS Y., L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités, l’Harmattan (p.231 et 232) 108

Source : GENESTIER P. (sous la direction de CHALAS Y.) L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités, l’Harmattan (p.160) 109

Source : Entretien avec Philippe Dresin, 1er

adjoint délégué aux finances et au service public communal, président d’Habitat Pays de Romans, le 1

er juin 2010

110 Source : GENESTIER P. (sous la direction de CHALAS Y.) L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des

Humanités, l’Harmattan (p.168)

81

général à un autre financement ; effet de rupture, de discontinuité, décrédibilisation des

projets, souvent longs à monter. Il est rassurant de monter de petits projets limités dans

l’espace et le temps, afin de ne pas encourir des changements de règle du jeu »111. Les

actions publiques se limitent donc à quelques petites opérations urbaines sur le centre

ancien (RHI, opération façades), plutôt que de lancer, par exemple, le projet massif de la

place Majeure qui est dit pensé sur « le long terme »112, pour ne pas dire « pour le mandat

politique prochain ».

Enfin, j’ai pu évoquer le fait que la ville-centre (Romans) assume encore beaucoup de

compétences par rapport à la CCPR, notamment au niveau de l’Urbanisme. On peut dès lors

affirmer qu’il y a un problème de l’échelle décisionnelle. Actuellement, est mis en exergue

un choix qu’il faudrait très prochainement prendre entre la future Communauté

d’Agglomération qui pourrait assumer la compétence de l’Urbanisme et créer un nouveau

dynamisme et la volonté des élus romanais de ne pas détacher l’Urbanisme de la ville de

Romans, comme le dit Philippe Dresin à propos du projet de la Place Majeure: « C’est à la

commune de porter ce projet, la CCPR n’a plus les moyens que la ville de Romans » 113

Se dessine alors une appréhension de la perte totale de l’action sur le territoire par les

élus locaux romanais.

111

Source : RENE-BAZIN A., Le renouvellement urbain dans les centres anciens, évolution et pratique des outils juridiques, chapitre 3, (p.207) 112

Source : Entretien avec Philippe Dresin, 1er

adjoint délégué aux finances et au service public communal, président d’Habitat Pays de Romans, le 1

er Juin 2010

113 Source : Entretien avec Philippe Dresin, 1

er adjoint délégué aux finances et au service public communal,

président d’Habitat Pays de Romans, le 1er

Juin 2010

82

L’omission des « autres centres » de Romans dans la définition du centre

ville

L’espace des Boulevards et Marques Avenue sont des espaces qui sont pensés comme

dynamiques mais qui ne sont pas pensés comme étant le centre urbain valorisant et à

valoriser. Dans cette sous-partie, il s’agit seulement d’aborder la représentation des ces

« autres centres » des acteurs locaux, l’effet de cette omission dans la définition du centre-

ville ne sera aborder que dans la troisième partie.

L’espace des Boulevards fonctionne sans l’aide de l’action publique. Cet espace détient

une meilleure lisibilité urbaine par rapport au centre historique, et par ce biais obtient un

plus grand investissement des acteurs privés sur cet espace. L’espace des Boulevards est

donc susceptible d’avoir moins besoin d’aide publique même si cet espace connaît

certaines difficultés. Par exemple, l’espace des boulevards connaît un taux de mitage114 de

14%, alors que passé un taux de mitage de 15% relève d’un risque de déstructuration et

donc des discontinuités spatiales y sont présentes115. Or, le centre ancien cumule un taux de

mitage de 22%. Le centre ancien détient des rues en déshérence commerciale, et certaines

rues fonctionnent plutôt bien. Néanmoins, le chiffre du taux vacances des locaux

commerciaux de 22% est un constat alarmant, et c’est ce chiffre-là qui reste dans la

mémoire des élus locaux qui veulent sauvegarder cette mixité de fonctions dans le centre

ancien et cet esprit de village avec des enseignes proprement locales. L’action publique se

focalise donc sur le centre ancien alors que l’espace des Boulevards mériterait peut-être des

aides publiques concernant les unités commerciales déjà existantes ou futures.

Marques Avenue est une opération de renouvellement urbain qui a réussi et qui

fonctionne en autonomie aujourd’hui. Marques Avenue est du domaine du privé

uniquement. Traditionnellement, en France, l’action publique investit seulement dans les

espaces où il y a des problèmes soulevés et reconnus, Marque Avenue est alors écarté de

l’action publique depuis que cette opération fonctionne « toute seule », c’est-à-dire sans

l’aide de financement public. Ici, nous pouvons dire que Marques Avenue relève de ce

114

Le taux de mitage correspond au pourcentage de cellules commerciales vacantes par rapport au total des cellules commerciales 115

Source : Etude de définition d’un Schéma de Développement Commercial sur le territoire du Syndicat Mixte Romans Bourg de Péage Expansion –SM conseil PIVADIS, juin 2007

83

qu’Yves Chalas appelle de l’urbanisme apophatique116. Rappelons qu’est apophatique

« l’attitude qui consiste à se préoccuper davantage du mal que du bien, du négatif que du

positif, de l’extérieur que de l’intérieur, du superflu que de l’essentiel etc. et ce par stratégie,

de façon à laisser au bien, au positif, à l’intérieur, à l’essentiel le plus de chances, de

possibilités et de liberté d’exister »117. Il n’y a donc pas d’action fondamentale voire aucune

action du tout ni même de partenariat avec Marques Avenue pour les raisons évoquées. Et

donc en contrebalancement, on n’agit que sur ce qui ne va pas : le centre ancien.

Quelles sont les conséquences pour le centre ancien de cette définition du centre-ville

qui se focalise uniquement sur celui-ci et qui écarte les autres « centres » dynamiques de

Romans ? A priori, on pourrait penser que cet investissement massif lui soit bénéfique. Mais

cet investissement sur la longue durée ne signifie t’il pas qu’il y a de réelles difficultés à le

revaloriser, le redynamiser, le réhabiliter ? Et qu’il n’existe pas de dynamisme de centralité

sur ce centre ancien pourtant considéré comme centre-ville à part entière par la sphère

politique locale ? Comment la définition élusive du centre-ville est alors un frein majeur à sa

revalorisation ?

La partie suivante abordera les effets concrets de la définition élusive du centre-ville

sur le centre historique.

116

Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.162) 117

Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.162)

84

Un échec de la revalorisation du centre ancien : une conséquence de la

définition élusive du centre-ville

Des outils inadaptés à une logique de centralité

Ce qui faut entendre dans le terme « logique de centralité » c’est un dynamisme où

se concentre et où se crée de la richesse qu’elle soit économique, culturelle et sociale. Il

s’agit de montrer dans cette sous-partie que certains outils sont inadaptés à ce qu’on attend

d’un centre-ville revalorisé (par le biais de la gentrification notamment) mais aussi de ce

qu’on pourrait plutôt attendre d’une centralité ancienne (des projets urbains comme la

piétonisation qui correspondent plus à une centralité historique plutôt que d’accueillir la

voiture à tout prix, signe de modernité).

Des outils ne permettant pas une gentrification du centre historique, comme facteur de

revalorisation

Sur le centre ancien romanais, des outils comme les OPAH ont été utilisés depuis plus

de trente ans qui ne répondent pas à un objectif de gentrification pourtant voulue par les

acteurs locaux et qui semble être une phase quasi obligatoire de la revalorisation des

centres aujourd’hui.

Avant d’approfondir ce point là, rappelons ce qu’est la gentrification : « La

gentrification décrit le processus à travers lequel des ménages de classes moyennes avaient

peuplé d’anciens quartiers dévalorisés du centre de Londres, plutôt que d’aller résider en

banlieues résidentielles selon le modèle dominant jusqu’alors pour ces couches sociales »118.

Contrairement aux villes américaines, « les villes d’Europe continentale n’ont en effet pas

connu le même déclin économique de leur centre, ni le même primat du marché par rapport

aux politiques urbaines ou aux politiques du logement. La gentrification n’est apparue que

plus récemment comme l’objectif délibéré de politiques de régénérations urbaine »119.

Enfin, « Les premières étapes de la gentrification des centres historiques ont été soutenues

par les politiques de préservation du patrimoine mises en place dans le sillage de la loi

118

CUSIN F., La gentrification en question. Entre stratégies résidentielles des nouvelles classes moyennes et mutations socioéconomiques des villes, Espaces et sociétés, n°134, 2008 (p.168) 119

CUSIN F., La gentrification en question. Entre stratégies résidentielles des nouvelles classes moyennes et mutations socioéconomiques des villes, Espaces et sociétés, n°134, 2008 (P.169)

85

Malraux de 1962, les politiques paysagères inspirées par le retour à la rue ont favorisé

l’extension de la gentrification aux quartiers anciens peu pourvus en bâtiments de grande

valeur architecturale. Ces politiques ont d’autant plus efficaces qu’elles ont complétées par

diverses mesures, telles que les OPAH ou les PRI, visant à l’éradication de l’habitat insalubre

et à la normalisation des quartiers populaires. Elles ont également bénéficié du renfort des

acteurs du marché immobilier, attirés, par la plus-value que laissaient espérer des quartiers

sous-valorisés par rapport à leur localisation »120. Le schéma est alors simple : pour l’action

publique la gentrification permet une réhabilitation de qualité du bâti, et donc une

revalorisation du centre-ville ou du centre historique concerné. Les outils comme les OPAH

sont souvent cités pour lancer une possible gentrification. Pourtant ces outils sont

actuellement inadaptés pour la situation de Romans121 : avec les OPAH successives du centre

ancien, on mise avant tout sur le logement conventionné, et donc on répond principalement

à un marché de personnes qui sont locataires et qui ont des moyens financiers limités. Il y a

absorption de la vacance de logements mais on ne favorise pas pour autant une certaine

gentrification ou on ne la fait pas durer comme le regrette Philippe Dresin qui le raconte en

ces termes : « par exemple, des personnes se sont installées dans des logements se situant

devant la place Macel qu’on vient d’aménager, et à cause de ces faits de délinquance qui se

passent sur cette placette, ils déménagent aussitôt »122. La cohabitation des personnes en

difficulté socio-économique ou de la petite délinquance avec les nouveaux arrivants, un peu

plus riches et ayant certaines attentes quant à leur cadre de vie, se fait difficilement. Les

personnes de classes moyennes voulant vivre proche ou dans le cœur de la ville, orientent

leurs choix vers l’espace des Boulevards, plus conforme aux normes standard de confort.

Reste tout de même une population mixte dans le centre ancien romanais: la classe

supérieure y étant présente, les professions intellectuelles supérieures étant légèrement

plus nombreuses (7%) dans le centre ancien en 2006 que sur l’ensemble de la commune

romanaise (5%)123. Toutefois, une grande part de la population est paupérisée ou en voie de

paupérisation (un tiers des familles présente sur le centre ancien sont des familles

120

Source : CHARMES E., Le retour à la rue comme support de la gentrification, Espaces et société, 2005 (p.128) 121

Source : SOULAGEON S., L’OPAH-RU : un outil pertinent pour le centre ancien de Romans-sur-Isère ?, IUL 2007, 104 p. 122

Source : Entretien avec Philippe Dresin, 1er

adjoint délégué aux finances et au service public communal, président d’Habitat Pays de Romans, le 1

er Juin 2010

123 Source : Données INSEE sur le centre ancien en 2006

86

monoparentales en 2006, 7% allocataires du RMI en 2007 alors que la moyenne de la Drôme

était de 3,3%, 20% de personnes vivent dans le centre historique avec de très bas

revenus).124

Sur le centre ancien, une population ouvrière était présente après la guerre (malgré le

fait que déjà des personnes soient attirées par le cachet de l’ancien), à partir de là, on

commence déjà à assister à un « processus de densification et de paupérisation » puis le

centre ancien « devient un lieu d’accueil de l’immigration »125 autre et moins important que

celui du quartier de la Monnaie à Romans. « Les catégories moyennes qui ont émergé avec

les Trente glorieuses se sont heurtées à des difficultés pour trouver un espace urbain qui leur

est propre : les quartiers populaires étaient inconfortables et les quartiers bourgeois

traditionnels trop onéreux »126. Pourtant, il y a des volontés politiques clairement affichées

puisque selon les mots du premier adjoint de la ville de Romans, Monsieur Dresin : « il s’agit

d’attirer des personnes plus aisées, et donc d’introduire des « bobos » dans le centre ancien

afin de créer une mixité vers le haut »127. Cette volonté s’inscrit dans un cadre assez global

puisque « Les changements actuellement à l’œuvre dans les contextes socio-économiques

nationaux conduisent progressivement celles-ci à mettre en œuvre des politiques visant à

transformer symboliquement le centre-ville pour l’adapter au goût des classes moyennes

dont la venue pour résider mais aussi pour consommer est attendue afin de pallier le déclin

économique »128. La revalorisation de la ville passe par la gentrification, et donc par

l’établissement de classes moyennes supérieures, de « bobos », de « gentrifieurs »129.

Se développe donc une « vision de la gentrification comme solution au déclin urbain,

comme politique de développement économique local »130. Cette gentrification est donc

parfois largement provoquée par l’action publique et ne relève pas forcément que d’un

simple mouvement spontané. La gentrification passe aussi par « le renouvellement 124

Source : Données de la CAF sur le centre ancien en 2006 125

Source : BACQUE M-H., En attendant la gentrification : discours et politiques à la Goutte d’Or (1982-2000), Les presses de Science-Po, sociétés contemporaines n°63, 2006, (p.65) 126

Source : CHARMES E., Le retour à la rue comme support de la gentrification, Espaces et société, 2005, (p.121) 127

Source : Entretien avec Philippe Dresin, premier adjoint délégué aux finances et au service public communal, président d’Habitat Pays de Romans, le 1

er juin 2010

128 Source : ROUSSEAU M., « Bringing politics back in » : la gentrification comme politique de développement

urbain ? Autour des « villes perdantes », Espaces et sociétés n°132, 2008 (p.76) 129

Source : CLERVAL A., Les anciennes cours réhabilitées des faubourgs : une forme de gentrification à Paris, Espaces et sociétés, n°132, 2008 (p.105) 130

Source : ROUSSEAU M., « Bringing politics back in » : la gentrification comme politique de développement urbain ? Autour des « villes perdantes », Espaces et sociétés n°132, 2008 (p.79)

87

progressif de propriétaires occupants »131 voir leur installation par le biais d’outils comme

les OPAH. Pour le cas de Romans, nous sommes encore loin de cette situation puisque 75%

des habitants du centre ancien sont des locataires en 2006132, il existe donc un réel

déséquilibre entre propriétaires bailleurs et propriétaires occupants. Les OPAH successives

n’ont pas arrangé la situation puisqu’elles favorisent la réhabilitation des programmes de

logements de propriétaires bailleurs, et ne fait que maintenir tout au plus les propriétaires

occupants dans le centre ancien133.

Comment provoquer la gentrification ? Souvent, « cet investissement de quartiers

anciens s’inscrit dans l’exaltation de la valeur de l’ancienneté »134. Les élus locaux désirent

attirer les classes moyennes supérieures par ce biais, le patrimoine n’est donc pas seulement

une reconversion économique et un facteur identitaire comme j’ai pu le développer dans la

deuxième partie, mais aussi un argument de vente pour attirer les gentrifieurs.

Abordons aussi le fait que « la question de l’école est centrale pour comprendre les

processus de gentrification »135. Or, c’est une question qui n’est pas ou peu abordée dans la

revalorisation du centre ancien de Romans, même si des problèmes sont détectés à l’Ecole

Saint-Just (fort turnover des élèves, stratégie d’évitement par le biais des écoles privées),

l’une des principales écoles du centre ancien romanais. Actuellement, un travail reste encore

à réaliser avec la politique de la ville. Cet état de fait place plutôt le centre ancien au même

rang des « quartiers cumulant les handicaps » comme le quartier de la Monnaie, qu’un

centre revalorisé et gentrifié.

Il existe donc une gentrification attendue, voulue, qui semble inhérente aujourd’hui à

ce qu’est une grande ou moyenne ville européenne.

Nous pouvons aussi rappeler qu’il y a une différenciation entre une gentrification qui

est en cours dans les centres historiques des métropoles et qui ne l’est pas dans les centres

historiques de certaines villes moyennes, qui se trouvent alors relégué au statut de

131

Source : CLERVAL A., Les anciennes cours réhabilitées des faubourgs : une forme de gentrification à Paris, Espaces et sociétés, n°132, 2008 (p.97) 132

Source : données INSEE sur le centre ancien en 2006 133

Source : SOULAGEON S., L’OPAH-RU : un outil pertinent pour le centre ancien romanais ?, IUL, 2007, 104 p. 134

Source : BOURDIN A., Gentrification : un « concept » à déconstruire, Espaces et sociétés, n°132, 2008 (p.23) 135

Source : CUSIN F., La gentrification en question. Entre stratégies résidentielles des nouvelles classes moyennes et mutations socioéconomiques des villes, Espaces et sociétés, n°134, 2008, (p.176)

88

« quartier ancien dégradé ». « Alors que les centres urbains de petite et de moyenne

dimension connaissent souvent des difficultés, les noyaux les plus importants bénéficient d’un

dynamisme considérable : l’époque favorise les métropoles. Elles desservent directement des

espaces plus larges. Elles attirent les activités qui ont besoin de maintenir des relations

suivies avec des centres lointains. Les entreprises choisissent volontiers d’y installer leurs

sièges sociaux ou leurs services commerciaux »136. Malgré ce constat, certains chercheurs

rappellent qu’ « au delà de ces supers centres-historiques qui n’attirent pas que des

difficultés, mais aussi des touristes et des investisseurs, les autorités des autres villes

prennent conscience de l’intérêt d’avoir elles aussi un centre, qui, pour n’être point revêtu de

la dignité de patrimoine mondial n’en est pas moins un territoire urbain reconnu

nationalement comme la partie la plus ancienne et la plus chargée d’histoire »137. Même si ce

processus de gentrification « tend à se généraliser dans l’ensemble du monde

occidentale »138, Romans est une ville moyenne qui ne capte pas la population voulue et est

en concurrence directe avec la proximité de Valence, qui bénéficie d’un centre-ville identifié,

connu et gentrifié.

Une action qui se limite à la vieille ville

Une délimitation stricte de l’action se fait de manière quasi systématique sur le

centre ancien romanais. Il existe une concentration exclusive de ces outils sur le centre

ancien notamment avec l’OPAH-RU, alors qu’il existe aussi des îlots qui ont besoin d’une

grande réhabilitation sur l’espace des boulevards. La ZPPAUP a notamment été crée plus

spécialement pour le centre ancien même si d’autres zones entourant le centre ancien ont

été classés et font l’objet de normes à respecter concernant la réhabilitation du bâti.

Actuellement, il n’y a pas de hiérarchisation des aménagements urbains. Certains se

font au grès des opportunités et des subventions comme le raconte Jean-David Abel : « Il

faut avoir un projet cohérent et bien défini pour avoir des subventions, ce qui a pu manquer

parfois à Romans *…+ Nous n’avions pas de projets urbains prêts et bien ficelés qui auraient

136

Source : CLAVAL P., Réflexions sur la centralité, Cahiers de Géographie du Québec, volume 44, n°123, décembre 2000, (p.297) 137

Source : COLIN-DELAVAUD A., HERSCHON J-C, ORELLANA L., Dossier: nouvelles formes d’intervention dans la gestion du territoire patrimonial urbain, l’information géographique n°2, 2006 (p.8) 138

Source : LEBRETON A., MOUGEL G., La gentrification comme entre articulation entre forme urbaine et globalisation : approche comparative Londres/ Berlin, Espaces et sociétés, n°132, 2008, pages 57 à 73

89

pu être financé par ce contrat de site »139. Donc, au-delà de cette concentration des outils et

des subventions sur le centre ancien, une désorganisation des priorités d’aménagements à

réaliser sème le trouble dans le processus de revalorisation. Une certaine cohérence reste à

trouver, et certains élus en sont conscients.

Enfin, seulement des aides publiques directes, comme le Fisac, sont mises en place

uniquement sur le centre ancien. Il n’existe pas une stimulation de l’investissement privé qui

serait peut-être bénéfique, car les commerces installés ne vivraient pas seulement au

crochet du financement public comme l’avoue une technicienne de RBE : « il faut avoir les

« reins solides » si on veut s’installer dans le centre ancien »140, puisque certains commerces

ne peuvent boucler leur budget sans l’apport régulier du Fisac.

Une inadaptation du centre historique à l’évolution moderne et

contemporaine

Comme nous l’avons déjà évoqué ultérieurement, le centre historique ne s’est pas

adapté à l’évolution moderne et contemporaine. D’où peut-être l’idée d’avoir un traitement

particulier du centre ancien, sans pour autant en faire « un musée à ciel ouvert », mais d’en

faire une partie intégrante du centre-ville mais pas le centre-ville à part entière, comme

l’illustre Françoise Choay : « vouloir faire pénétrer de force les formes les plus intenses de la

vie moderne dans un organisme urbain conçu selon des critères anciens revient à arriver de

façon irrémédiable le conflit de deux systèmes fondamentaux différents, et non pas à les

résoudre. Une tout autre voie doit être suivie, lorsque c’est possible. Il faut désengorger le

noyau urbain ancien, en empêchant que la nouvelle urbanisation ne vienne lui imposer une

fonction à laquelle il est totalement inadapté »141. Le tissu du centre historique romanais

est en grande partie inadapté à la voiture. Il s’agit donc ne pas « forcer le passage » comme

cela s’est fait depuis longtemps en imposant la circulation de véhicules dans des rues

inadaptées à ce type de trafic. L’accessibilité est l’une des clés pour certains à la

dynamisation du centre-ville, et donc, par transposition, du centre ancien. Pourtant il

139

Source : Entretien avec Jean-David Abel, élu à l’Urbanisme, le 3 mai 2010 140

Source : Entretien avec Nadège Gautier, chargée de mission Commerce et Artisanat, RBE, le 14 avril 2010 141

Source : CHOAY F. (texte fondateur de GIOVANNONI G.), Le patrimoine en questions, anthologie pour un combat, SEUIL, collection la couleur des idées (p.171)

90

s’agirait plutôt de miser sur une piétonisation progressive, qui permettrait une

déambulation facilitée et agréable des promeneurs et des habitants, et répondrait donc plus

à un objectif de centralité ancienne et historique. C’est une prise de conscience qui se fait

peu à peu avec quelques projets de piétonisation en cours de réflexion.

91

Une absence de projet global sur le centre-ville « réel »

Une centralité symbolique pouvant faire le lien entre les centres qui n’arrive pas à

émerger

La place Jean Jaurès qui est l’espace public qui pourrait faire le lien entre Marques

Avenue, les boulevards et le centre ancien n’est pas pensé comme tel aujourd’hui. C’est la

place centrale de la ville et en même temps c’est celle qui est le moins attirante à cause de

son envahissement de véhicules, une mauvaise signalétique, un état dégradé de la chaussée

et un mobilier urbain pauvre ou mal organisé qui ne rend pas lisible l’espace urbain

environnant. Cet espace public crée plus une coupure entre le haut et le bas de la ville, entre

Marques Avenue et le centre ancien, qu’un espace liant ces centres séparés.

Figure 14 Photos de l'actuelle Place Jean Jaurès, place centrale de la ville de Romans (Photos prises par Marisa JULIEN, 2010)

Le projet de la place Majeure est un projet urbain vieux de 20 ans, il s’agissait

d’enterrer un parking sous-terrain afin de libérer l’espace public de l’omniprésence de la

voiture. Aujourd’hui encore il s’agit du même projet mais avec quelques modifications : des

bâtiments de logements et quelques locaux commerciaux en rez-de-chaussée devraient

s’ériger à l’Est de la place, créant donc une coupure urbaine définitive avec Marques

Avenue. Le projet de la place Majeure est donc pensé comme une revalorisation de

l’espace publique plutôt que comme un espace public pouvant organiser la centralité.

Cet espace permettrait pourtant une lisibilité de l’espace accrue et rendrait d’autant

plus efficace une signalétique qui fait défaut aujourd’hui. Cela rendrait engageant l’espace

intermédiaire entre les boulevards et le centre ancien. Donc au-delà des problèmes

financiers de la ville de Romans, il existe bel et bien une délimitation du centre-ville au

92

centre ancien et une omission certaine des boulevards et de Marques Avenue comme

faisant parti du centre-ville vécu.

Ce qui est d’autant plus dommageable puisque cette place pourrait assumer le rôle de

centralité symbolique : « Une centralisation proprement symbolique intervient dès lors que

l’on symbolise un espace plus grand dans un espace plus petit, qui devient un point

représentant symboliquement une surface (l’équivalent géographique d’une synecdoque

linguistique) »142 . Cela peut être le cas d’un monument ou bien d’une place représente le

centre d’une ville et donc sa puissance bien que, paradoxalement, ce soit une centralité

« vide ». Une place centrale peut donc être « un lieu-centre qui joue son rôle référentiel

sans difficulté »143. L’aménagement urbain de cette place jouerait un certain rôle

symbolique comme l’explique Jérôme Monnet : « dans nombre de cas, il est manifeste que

l’aménagement cherche à promouvoir une symbolique de la centralité, pour instituer ou

renforcer la centralité globale de l’espace aménagé »144. Cet espace pourrait jouer le rôle de

« lien » en unifiant d’une certaine manière les centres romanais et en rendant lisible le

centre-ville aux yeux de tous.

L’inexistence de partenariats avec des acteurs privés importants

Il n’existe pas de partenariat avec des acteurs privés importants. Il y a des commerces

avec des enseignes locales avant tout dans le centre ancien, même si il y a la présence de

quelques enseignes de renommée comme Clergerie qui sont présentes. Néanmoins, il n’y a

aucun lien ni de partenariat envisagé avec Marques Avenue, alors que la ville pourrait

profiter de ce dynamisme économique privé. Est évincée l’idée de créer un lien physique ou

partenarial avec les autres centres dynamiques « romanais », alors que le centre romanais

y trouverait peut-être un dynamisme nouveau.

142

MONNET J., Les dimensions symboliques de la centralité, Cahiers de Géographie du Québec, volume 44, n°123, décembre 2000 (p.408) 143

Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (P.46) 144

MONNET J. Les dimensions symboliques de la centralité, Cahiers de Géographie du Québec, volume 44, n°123, décembre 2000 (p.414)

93

« Changer de regard » pour un projet global

Ce qu’il faut, enfin de compte, c’est aussi « changer de regard ou une ressensibilisation

du regard »145 sur ce qu’est réellement la centralité à Romans, car ce qui peut être

paradoxal ou contre-intuitif c’est que, pour redynamiser le centre ancien, il faut le penser

et agir hors de ses délimitations propres. Il serait alors possible « d’agir à nouveau de

manière créative et collective, et non pas nostalgique avec des solutions conçues au

rétroviseur, sur le terrain concret du paysage ou in situ »146.

Cette absence de projet global ne permet pas d’intégrer le centre historique à une

dynamique de centralité plus élargie : nous pouvons faire une différenciation entre un

centre historique intégré à la dynamique de centralité mais n’assumant pas tous les rôles

(économique, commercial, tertiaire), mais seulement certains (touristique et associatif) et un

centre historique relégué au statut de « quartier ancien dégradé » où l’action publique ne se

focalise que sur celui-ci et non pas sur ces connexions avec d’autres éléments urbains plus

dynamiques. Peut-être faudrait-il alors oser agir sur cette centralité élargie car « l’histoire est

pleine de contaminations et d’hybridations. Le centre de l’imaginaire urbain s’est, à

plusieurs reprises, déplacé et c’est pour cela, que nous devons persévérer, peut-être encore

pour longtemps, dans un travail, patient et désormais moins ingénu, de description des

situations territoriales les plus diverses, en les soumettant avec nos projets à des tensions,

pour apprécier leurs réactions et apprendre d’elles »147.

145

Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.129) 146

Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p. 129) 147

Source : SECCHI B., (sous la direction de CHALAS Y.) L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités, l’Harmattan (p.144-145)

94

Conclusion :

La définition du centre-ville à Romans se limite uniquement au centre ancien, et cela

est dû à diverses origines liées et concomitantes.

Premièrement, nous pouvons soulever des phénomènes assez classiques et globaux,

c’est-à-dire qu’il existe une « imagerie » assez commune sur ce que devrait être un centre-

ville selon une certaine conception européenne : à savoir que le centre ville est souvent

confondu avec le patrimoine bâti et par conséquent avec le centre historique, et que ce

phénomène s’amplifie avec une patrimonialisation forte de ce tissu urbain après une crise

industrielle dans une ville quasi-mono-fonctionnelle. Ces schémas sont jugés classiques lors

de notre analyse car elle se retrouve dans beaucoup d’autres villes partageant certaines

caractéristiques avec Romans-sur-Isère.

Deuxièmement, il existe aussi des phénomènes inhérents au contexte local de

Romans : existent des freins propres à la ville qui ne permettent pas de penser la centralité

d’une manière assez globale et d’unifier les « centres » éclatés de Romans (c’est-à-dire le

centre ancien, l’espace des boulevards et Marques Avenue) par le biais d’aménagements

centraux. Ces freins propres à la ville de Romans sont des freins financiers voire

psychologiques dans la sphère politique locale.

Ces divers éléments créent un manque de lisibilité urbaine, et ne permettent pas de

valoriser le centre ancien ayant pourtant un potentiel patrimonial fort. Il y a donc une action

qui se focalise uniquement sur le centre ancien, alors que la solution pour le redynamiser

serait peut-être de penser le centre ancien hors de ses limites, de penser ses connexions

possibles et donc de créer un projet urbain sur la centralité « réelle » de Romans.

Ce que nous apprend le cas de Romans :

Contrairement à ce que l’on peut penser aujourd’hui où l’économie de marché

contrôlerait tout, et notamment le développement de la ville, Il existe encore un poids

considérable des décideurs politiques locaux dans la formation et la définition de la ville.

L’action ou l’inaction politique sur la ville étant un choix, un choix qui peut avoir pour origine

une représentation particulière ou comme l’appelle Yves Chalas une « imagerie » faite sur la

95

ville. Le cas de Romans porte sur une représentation de la centralité se limitant au centre

ancien.

Yves Chalas, dans l’Invention de la ville, avait remarqué le décalage de représentations

et l’omission d’autres pôles de centralité hors du centre historique, alors qu’il y a, depuis

plusieurs décennies, l’avènement d’une ville polynucléaire. Sa démonstration s’attachait à

l’exemple de Grenoble et donc plus généralement à des grandes villes ou des métropoles

avec un rayonnement plus important, et donc à des centralités éclatées dans ces aires

urbaines. Le cas de Romans met en avant ce décalage mais à une échelle plus interne (à

l’intérieure même de la centralité) et dans les villes moyennes. A Romans, il existe d’autres

centralités qui se sont développées hors du noyau initial de la ville ancienne, et il n’y a pas

eu une prise en compte de cette extension du centre-ville par les décideurs politiques. Cela

est dû à une imagerie très intégrée dans la pensée et le discours des élus notamment. Il

s’agissait de faire remarquer que la centralité n’est plus dans le centre ancien mais s’y étend

au delà de ses délimitations propres. Ce constat permettrait d’envisager une nouvelle

imagination qui serait possible d’intégrer et qui aurait des répercussions sur l’action urbaine.

Néanmoins, nous pouvons encore nous poser cette question : est-ce que « l’imagerie est-

elle dépassable ? Oui parce qu’on peut appeler, à l’inverse, l’imagination vive de l’urbanisme,

faite non pas de recettes et de certitudes, mais de doutes et de réserves à l’égard justement

du prêt-à-penser inhérent à l’imagerie urbanistique.»148

Peut-être faudrait-il donc faire appel à l’urbanisme à pensée faible149 théorisé par

Yves Chalas. La pensée faible peut-être définie comme étant « le contraire d’une pensée

simple, d’une pensée pétrie de certitudes et orientée vers des perspectives d’avenir

clairement tracées. Une pensée faible est devenue une pensée plus incertaine, plus complexe,

moins systématique et par là même moins polémique, moins constituée en doctrine »150. On

pourrait la définir plus simplement comme étant une pensée pratique, une pensée qui agit

selon les réalités du terrain et propose des solutions malgré l’incertitude de l’avenir.

Il s’agit donc de laisser de côté les représentations de la centralité définie comme étant

synonyme de patrimoine, et d’intégrer dans l’imagination vive des décideurs politiques et

148

Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.88) 149

Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.152) 150

Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.152)

96

des techniciens d’autres pôles de centralité vécus comme tels par les habitants. « Une

question se pose cependant, légitime : est-ce que l’imagination vive ne deviendra pas à son

jour imagerie ? La réponse est oui, sans ambages, l’imagination vive d’aujourd’hui promeut

l’imagerie de demain. Telle est la règle »151. Pourtant, malgré l’énoncé de cette vérité brutale

mais qui ne doit pas être stérile, il faudrait sortir de cette conception du centre historique

comme étant un village à part entière et penser la centralité, pour Romans, ou les

centralités, pour les métropoles, dans leur ensemble et leur multiplicité car « la ville n’est

ville que parce qu’elle est foncièrement renégate. La ville tourne le dos à son passé, à ses

racines, à ses traditions, alors que le village s’y enfoui. La ville, la vraie ville, est toujours

mouvante et surprenante. Elle ne cesse de se faire et de se refaire. Elle semble à jamais

inachevée, toujours en chantier pour présenter inlassablement de multiples et nouveaux

visages »152.

151

Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.89) 152

Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.79)

97

Sources:

Ouvrages :

- BRUNET R., Les mots de la géographie, dictionnaire critique, la Documentation

française, Collection dynamiques du territoire, 518 p., 1992

- CHALAS Y., L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités,

l’Harmattan, 340 p., 2008

- CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes, 199 p., 2003

- CHOAY F., Le patrimoine en questions, anthologie pour un combat, SEUIL, collection

la couleur des idées, 214 p., 2009

- CLAUDE V., Faire la ville, les métiers de l’urbanisme au XXe siècle, collection

eupalinos, Parenthèses, 253 p., 2006

- CERTU, Comprendre l’espace public pour mieux programmer son aménagement,

approches sensibles, dossiers du CERTU n°182, 166 p., 2007

- FREMONT A., La région espace vécu, collection Champs, Flammarion, 1999, 288p.

- GEORGE P., VERGER F., Dictionnaire de la géographie, PUF, 462 P., 2004

- LACAZE J-P., La transformation des villes et les politiques publiques 1945-2005,

presses de l’école nationale des Ponts et Chaussées, 255 p., 2006

- MALBOSC F. Du développement économique au renouvellement urbain ? A propos de

l’implantation de Marques Avenue à Romans, Les cahiers du DSU, 2001

- MERLIN P., Le Tourisme en France : Enjeux et Aménagement, ellipses, collection

Carrefours, 155 p., 2006

Articles de revues spécialisées :

- BACQUE M-H., En attendant la gentrification : discours et politiques à la Goutte d’Or

(1982-2000), Les presses de Science-Po, sociétés contemporaines n°63, pages 63 à

83, 2006

- BOURDEAU-LEPAGE L., A la recherche de la centralité perdue, Revue d’Economie

Régionale et Urbaine, 2009

- BOURDIN A., Gentrification : un « concept » à déconstruire, Espaces et sociétés,

n°132, 2008, pages 23 à 37

98

- CHARMES E., Le retour à la rue comme support de la gentrification, Espaces et

société, 2005, pages 115 à 135

- CLAVAL P., Réflexions sur la centralité, Cahiers de Géographie du Québec, volume 44,

n°123, décembre 2000, pages 285 à 301

- CLERVAL A., Les anciennes cours réhabilitées des faubourgs : une forme de

gentrification à Paris, Espaces et sociétés, n°132, 2008, pages 91 à 106

- COFFEY W., MANZAGOL C., SHEARMUR R., Centralités métropolitaines, Cahiers de

Géographie du Québec, volume 44, n°123, décembre 2000, pages 277-281

- COLIN-DELAVAUD A., HERSCHON J-C, ORELLANA L., Dossier: nouvelles formes

d’intervention dans la gestion du territoire patrimonial urbain, l’information

géographique n°2, 2006, pages 6 à 10

- CUSIN F., La gentrification en question. Entre stratégies résidentielles des nouvelles

classes moyennes et mutations socioéconomiques des villes, Espaces et sociétés,

n°134, 2008, pages 167 à 179

- LEBRETON A., MOUGEL G., La gentrification comme entre articulation entre forme

urbaine et globalisation : approche comparative Londres/ Berlin, Espaces et sociétés,

n°132, 2008, pages 57 à 73

- MALBOSC F., Du développement économique au renouvellement urbain ? à propos de

l’implantation de Marques Avenue, Les cahiers du DSU, décembre 2001, page 62

- MONNET J. Les dimensions symboliques de la centralité, Cahiers de Géographie du

Québec, volume 44, n°123, décembre 2000, pages 399-418

- RERAT P., Mutations urbaines, mutations démographiques, contribution à

l’explication de la déprise des villes-centres, Revue d’Economie Régionale et Urbaine,

n°2005, 2006, pages 725-750

- RENE-BAZIN A., Le renouvellement urbain dans les centres anciens, évolution et

pratique des outils juridiques, chapitre 3, page 191 -207

- VOISIN C., Le centre, la mémoire, l’identité. Des usages de l’histoire dans la (re)-

construction du Nouveau marché de Dresde, Espaces et sociétés, mars 2007, page 87

à 101

- ROUSSEAU M., « Bringing politics back in » : la gentrification comme politique de

développement urbain ? Autour des « villes perdantes », Espaces et sociétés n°132,

pages 75 à 90, 2008

99

- WATREMEZ A., L’entretien itinérant : pour une construction d’un dispositif

méthodologique de narration des habitants dans la ville patrimoniale, Etudes de

communication, n° 31, 2008, pages 77 à 92

Articles de la presse locale romanaise :

- Association de la Sauvegarde du Patrimoine romanais-péageois, Histoire et

Patrimoine de Romans et Bourg-de-Péage, 20 ans de chroniques dans l’Impartial,

imprimerie Deval, 264 p., 2009

- BIGORRE M., Mobilisation générale pour le cuir, l’Impartial, le 29 mars 2007

- ROLLAND F. Quelles mesures pour les salariés et l’industrie de la chaussure ?,

L’Impartial, 14 octobre 2005

Documents internes à la ville de Romans, RBE ou la CCPR :

- Etude de définition d’un Schéma de Développement Commercial sur le territoire du

Syndicat Mixte Romans Bourg de Péage Expansion – SM conseil PIVADIS, juin 2007

- JULIEN M., Diagnostic territorial du centre ancien romanais, 2010

- Rapport de présentation du PLU de Romans, 2006

- Rapport de présentation de la ZPPAUP de Romans, 2008

Mémoires précédents sur Romans :

- BOUDET Céline, Etudes sur les retombées socio-économiques : le Carnaval de Romans

et son inscription dans le centre-ville, 2009, 58 p.

- SOULAGEON Stéphanie, L'OPAH RU: un outil pertinent pour le centre ancien de

Romans sur Isère? , IUL, 2007, 104 p.

Autre mémoire:

- SIRVAIN Alexandre, Les enjeux de la valorisation des centres anciens : l’approche

bordelaise, IUP, 2009, 53 p.

100

Sites Internet :

- Site Drôme des Collines :

http://www.dromedescollines.fr/drome/drome-geographie.php#

- Site au Pays Romans et Bourg-de-Péage :

http://www.romans-tourisme.com/decouvrir-pays-de-

romans/detail.asp?idoi=26AASOR100035&cat=visites-patrimoine

- Site du CERTU à propos des données FILOCOM :

http://www.observation-urbaine.certu.equipement.gouv.fr/article.php3?id_article=241

Entretiens réalisés (voir annexes) :

- Entretien avec Franck Mallinjoud- Sujet Principal : la tranquillité publique sur le centre

ancien

- Entretien Philippe Pourtier – Mission Politique de la ville

- Entretien avec Eric Olivier-Drure - Sujet principal : Le patrimoine dans le centre ancien

- Entretien Jean Decauville– OPAH sur le centre ancien (responsable de l’équipe de

l’animation de l’OPAH Romans-Bourg-de-Péage).

- Entretien avec Martial Gaffet - Sujet principal : La vie associative dans le centre ancien

- Entretien Nadège Gauthier– RBE expansion – Redynamisation commerciale centre ancien

- Entretien avec Françoise Sarraillon – directrice de l’association de sauvegarde du

patrimoine Romano-péageois

- Entretien Jean-David Abel – élu à L’urbanisme, troisième adjoint

- Entretien Cléo Delon – élue à la tranquillité publique, deuxième adjointe

- Entretien Philippe Drésin – 1er adjoint délégué aux finances et au service public communal,

président d’Habitat Pays de Romans

101

Glossaire

ANAH : Agence Nationale de l’Amélioration de l’Habitat

CA : Communauté d’Agglomération

CAF : Caisse d’Allocation Familiale

CALD : Centre d’Amélioration du Logement de la Drôme

CAUE : Conseil d’Architecture d’Urbanisme et de l’Environnement

CC : Communauté de Communes

CCPR : Communauté de Communes du Pays de Romans

CCCBP : Communauté de Communes du Canton de Bourg-de-Péage

CUCS : Contrat Urbain de Cohésion Social

DRAC : Direction Régionale des Affaires Culturelles

EPORA : Etablissement Public foncier de l’Ouest Rhône-Alpes

FEDER: Fond Européen de Développement Régional

FIPD : Fond Interministériel de Prévention de la Délinquance

FISAC : Fond d’Intervention pour les services, le commerce et l’Artisanat

HPR : Habitat Pays de Romans

OPAH : Opération Programmée de l’Amélioration de l’Habitat

OPAH-RU : Opération Programmée de l’Amélioration de l’Habitat – Renouvellement Urbain

PNRQAD : Programme National de Requalification des Quartiers Anciens Dégradés

RBE : Romans Bourg-de-Péage Expansion

RHI : Résorption de l’Habitat Insalubre

SCHS : Service Communal d’Hygiène et de Santé

SEM : Société d’Economie Mixte

ZPPAUP : Zone de Protection du Patrimoine Architectural Urbain et Paysager

ZUS : Zone Urbaine Sensible

102

Tables des illustrations

Figure 1 Cartes de localisation de Romans-sur-Isère ................................................................. 9

Figure 2 Carte d'urbanisation de Romans et Bourg-de-Péage ................................................. 11

Figure 3 Organisation des structures administratives et territoriales de Romans et Bourg-de-

Péage ........................................................................................................................................ 15

Figure 4 Publicité du Musée de la Chaussure à Romans (source: Site Internet au Pays de

Romans et Bourg-de-Péage) .................................................................................................... 19

Figure 5 Organigramme de la Direction de l'Aménagement Urbain de la ville de Romans .... 24

Figure 6 Organigramme du service Urbanisme de la ville de Romans .................................... 25

Figure 7 la Maison du Mouton, le plus vieux bâtiment du centre ancien romanais (Mars

2010, photo prise par Marisa JULIEN) ...................................................................................... 40

Figure 8 Périmètre d'étude choisi pour le diagnostic du centre ancien .................................. 46

Figure 9 Carte illustrant de manière schématique le déplacement de la centralité au fil du

temps ........................................................................................................................................ 58

Figure 10 Carte de la centralité à Romans: des centres différenciés? ..................................... 61

Figure 11 Marques Avenue, Avenue Gambetta à Romans ...................................................... 62

Figure 12 Quelques images des hôtels particuliers dans le centre ancien romanais (photos

prises par Marisa JULIEN) ......................................................................................................... 75

Figure 13 Le carnaval de Romans, le 27 février 2010 (Photos prises par Marisa JULIEN) ....... 76

Figure 14 Photos de l'actuelle Place Jean Jaurès, place centrale de la ville de Romans (Photos

prises par Marisa JULIEN, 2010) ............................................................................................... 91

103

Tables des matières Mots clés ..................................................................................................................................... 3

Résumé ........................................................................................................................................ 3

Sommaire .................................................................................................................................... 4

Préambule ................................................................................................................................... 5

PARTIE I : RAPPORT DE STAGE ...................................................................................................... 7

Introduction ................................................................................................................................. 8

La ville de Romans : entre crises et mutations ............................................................................... 9

Localisation de Romans ................................................................................................................... 9

Brève histoire urbaine de Romans ................................................................................................ 10

Romans : une ville moyenne entre concurrence et coordination avec d’autres villes ................. 13

Crise industrielle et reconversion ................................................................................................. 17

L’activité du cuir : prospérité et déclin ...................................................................................... 17

Les solutions choisies de la reconversion .................................................................................. 19

La mairie de Romans : jeux d’acteurs, adaptation et freins de l’action ......................................... 22

Organisation de la structure ..................................................................................................................... 22

La coordination de divers services ............................................................................................ 22

Le contentieux de l’urbanisme : un problème constant pour le service Urbanisme ................ 27

Produits et ressources de la structure ...................................................................................................... 29

Une commande politique contrainte par des ressources économiques limitées ..................... 29

Une nouvelle Communauté d’Agglomération : un nouveau souffle pour la ville de Romans ? 29

La formation continue comme atout du fonctionnariat ........................................................... 30

Les partenaires .......................................................................................................................................... 31

Retour critique sur la structure ................................................................................................................. 32

Les avantages d’une petite structure ............................................................................................ 32

Le mille-feuille administratif : un frein de l’action ? ..................................................................... 33

Difficultés financières de Romans ................................................................................................. 33

Freins d’action des villes moyennes .............................................................................................. 34

Deux missions réalisées : informations et communication, synthèse de la situation et aide à la

décision sur un même territoire, le centre ancien romanais ......................................................... 38

Réalisation d’une carte synthétique des aménagements urbains en projet ou en cours sur le centre

ancien romanais ........................................................................................................................................ 38

Création d’un diagnostic exhaustif du centre ancien de Romans, en vue de créer un dossier de

candidature pour le PNRQAD en 2011. ..................................................................................................... 41

104

Regards critiques sur la mission ................................................................................................................ 44

Conclusion et perspectives ......................................................................................................... 47

Bilan personnel ......................................................................................................................................... 47

Regard sur le métier d’urbaniste .............................................................................................................. 48

PARTIE II : MEMOIRE .................................................................................................................. 50

Une définition ambigüe et élusive de la centralité urbaine à Romans comme échec de la

revalorisation du centre ancien................................................................................................... 50

Introduction : ............................................................................................................................. 51

Pourquoi y a-t-il une centralité éclatée à Romans-sur-Isère ? ....................................................... 55

Historique de la création de la ville et déplacement de la centralité au fil du temps .............................. 55

Un développement particulier de la ville ...................................................................................... 55

Le centre historique n’est plus le centre à part entière ................................................................ 55

Complexité morphologique des « centres » de Romans et leur rayonnement à des échelles différentes

.................................................................................................................................................................. 60

Une représentation de la centralité déconnectée de la réalité urbaine......................................... 66

Une conception européenne du centre-ville, intégrée dans « l’imagerie » des décideurs politiques .... 66

L’imagerie ancrée dans le discours et l’action des décideurs politiques ...................................... 66

Quelles représentations en découlent? Quel décalage de représentations s’effectue ? ............. 67

Le Mangement de centre-ville : un nouvel outil illustrant ce décalage de représentations ........ 70

Les raisons de cette focalisation sur le centre ancien ............................................................................... 71

Des raisons « classiques » ............................................................................................................ 71

Des raisons inhérentes à Romans ................................................................................................ 78

L’omission des « autres centres » de Romans dans la définition du centre ville...................................... 82

Un échec de la revalorisation du centre ancien : une conséquence de la définition élusive du

centre-ville ................................................................................................................................. 84

Des outils inadaptés à une logique de centralité ...................................................................................... 84

Des outils ne permettant pas une gentrification du centre historique, comme facteur de

revalorisation ................................................................................................................................. 84

Une action qui se limite à la vieille ville ........................................................................................ 88

Une inadaptation du centre historique à l’évolution moderne et contemporaine .................................. 89

Une absence de projet global sur le centre-ville « réel » ......................................................................... 91

Une centralité symbolique pouvant faire le lien entre les centres qui n’arrive pas à émerger .... 91

L’inexistence de partenariats avec des acteurs privés importants ............................................... 92

« Changer de regard » pour un projet global ................................................................................ 93

105

Conclusion : ............................................................................................................................... 94

Sources: ..................................................................................................................................... 97

Glossaire ................................................................................................................................... 101

Tables des illustrations .............................................................................................................. 102

Tables des matières ................................................................................................................... 103

Annexes .................................................................................................................................... 106

Feuille d’évaluation du stage .................................................................................................................. 107

Capture d’écran de la carte des aménagements urbains en cours ou en projet sur le centre ancien, sur

le logiciel SIG Editop (première mission réalisée au sein de la ville de Romans) .................................... 108

Carte de parcours de la visite du préfet dans le centre ancien, le 4 juin 2010 (Réalisation mai 2010,

Marisa JULIEN) ........................................................................................................................................ 109

Entretien avec Franck Mallinjoud – Responsable du Service Tranquillité Publique et Réglementation -

Sujet Principal : la tranquillité publique sur le centre ancien ................................................................. 110

Entretien avec Philippe Pourtier – Responsable de la Mission Politique de la ville ............................... 114

Entretien avec Eric Olivier-Drure – Responsable du service des Archives de la ville de Romans - Sujet

principal : Le patrimoine dans le centre ancien ...................................................................................... 118

Entretien avec Jean Decauville– Responsable de l’équipe d’animation de l’OPAH Romans-Bourg-de-

Péage ....................................................................................................................................................... 122

Entretien avec Martial Gaffet – Responsable de la vie associative de la ville de Romans...................... 129

Entretien avec Nadège Gauthier– RBE – Chargée de la mission Commerces et Artisanat sur le centre

ancien romanais ...................................................................................................................................... 133

Entretien avec Françoise Sarraillon – Directrice de l’association de sauvegarde du patrimoine romano-

péageois .................................................................................................................................................. 137

Entretien avec Jean-David Abel – Elu à L’urbanisme, troisième adjoint ................................................. 140

Entretien avec Cléo Delon – Elue à la tranquillité publique, deuxième adjointe .................................... 144

Entretien avec Philippe Drésin – 1er adjoint délégué aux finances et au service public communal,

président d’Habitat Pays de Romans ...................................................................................................... 147

106

Annexes

107

Feuille d’évaluation du stage

108

Capture d’écran de la carte des aménagements urbains en cours ou en projet sur

le centre ancien, sur le logiciel SIG Editop (première mission réalisée au sein de la

ville de Romans)

109

Carte de parcours de la visite du préfet dans le centre ancien, le 4 juin 2010

(Réalisation mai 2010, Marisa JULIEN)

110

Entretien avec Franck Mallinjoud – Responsable du Service Tranquillité

Publique et Réglementation - Sujet Principal : la tranquillité publique sur le

centre ancien

Entretien réalisé le jeudi 18 février 2010, de 10h30 à 11h30, au service réglementation et

tranquillité publique de la ville de Romans, à la mairie centrale.

La situation actuelle dans le centre ancien :

- Existe-t-il des actes de délinquance dans le centre ancien ? Si oui, quels sont ces actes de

délinquance dans cette partie de la ville? Est-ce des actes inciviques ou des actes plus graves?

La situation actuelle dans le centre ancien est préoccupante. Nous avons affaire à une

délinquance jeune qui crée un certain trouble dans le centre ancien. Le moindre fait dans les petites

rues du centre ancien est amplifié, notamment au niveau du bruit ou du désordre général. Dans le

centre ancien, nous ne sommes pas dans les mêmes problématiques que le quartier de la Monnaie

où là il y a des grands espaces ouverts. En plus, l’obscurité tombe plus vite dans les ruelles du centre

ancien, qu’ailleurs dans la ville, car le bâti est plus dense et les ruelles plus étroites.

Cette petite délinquance est d’autant plus embêtante que dans le centre ancien on est dans un secteur porteur avec des commerces de qualité. Les commerçants se plaignent beaucoup de cette délinquance qui nuit à leurs affaires.

Les faits de délinquance sont essentiellement des actes d’incivilité. Cela se traduit par un rassemblement sur l’espace public avec des chahuts, de l’agressivité, et des dégradations nocturnes. Mais, il n’y a pas d’agressions physiques, ni de vols ou de braquages.

- Quelles sont les personnes responsables de ces actes ? Ce sont des petits groupes de jeunes qui forment ce qu’on appelle de « la petite délinquance »

itinérante dans la ville de Romans. Il y a eu des problèmes ailleurs, aujourd’hui, une partie du centre ancien est touchée par ce phénomène.

- Qui sont les victimes de ces actes de délinquances ? Les commerçants se plaignent souvent des actes inciviques car cela nuit à leur commerce.

Néanmoins, les riverains s’en plaignent aussi.

- Ces phénomènes se passent à quel moment de la journée ?

En soirée et La nuit principalement.

- Est-ce des actes réguliers ou ponctuels ?

Ce sont des actes plutôt réguliers commis par le même groupe de jeunes.

111

- Dans le centre ancien, y a-t-il des lieux particulièrement touchés par des actes de délinquance ? (les lieux incriminés en 1996 étant les squares Marcel CARNE, celui du monument aux morts, la galerie marchande et la médiathèque, ainsi que les ruelles et les immeubles insalubres).

Oui, nous avons localisé ces actes d’incivilité dans 6 à 7 rues dans le centre ancien. Ce sont surtout la rue du Puits du Cheval, la rue Folquet, la rue de l’Ecosserie, la rue du Fuseau et la rue Pêcherie qui sont le plus touchées.

- En 1996, le sentiment d’insécurité était bien plus fort malgré des actes de délinquance plutôt peu nombreux, est-ce la même situation aujourd’hui ?

Nous sommes un peu dans la même situation qu'auparavant apparemment car c’est bien le

sentiment d’insécurité qui prédomine, car il n’y a pas d’actes graves en soi. Mais les personnes ont parfois peur que ça dégénère, d’où le sentiment de peur.

- Le sentiment d’insécurité est-il présent dans le centre ancien ? De manière générale, est-il plus fort qu’avant ou non ?

Il est toujours présent et nuit considérablement aux commerçants. Je ne sais pas s’il est plus

fort qu’avant.

112

Comparaison avec le reste de la commune :

- Le centre ancien est-il plus touché par les actes de délinquance par rapport aux autres secteurs de la commune ?

Les autres secteurs sont beaucoup plus calmes. Le centre ancien est vraiment notre priorité car

c’est vraiment le quartier le plus problématique. C’est pour cela d’ailleurs que l’on a crée un groupe de réflexion et d’actions spécialement pour le centre ancien.

Notre but c’est de créer de la sécurité. On a alors décidé de travailler sur certains points : on intensifie les patrouilles pédestres (2 à 3 agents tous les soirs) avec un ilotage précis. Ces patrouilles servent essentiellement à dissuader l’incivilité et de prévenir la population. On exerce deux contrôles mensuels d’identité sous procureur de la République, on exerce aussi des contrôles routiers. Nous faisons une action forte sur la prévention avec les correspondants de nuit.

Il existe aussi un chantier d’insertion des jeunes. Cela concerne les 15-17 ans, ce sont souvent des personnes déscolarisées. On les incite à faire des travaux, notamment dans le centre ancien, où ils repeignent des façades ou des intérieurs. Cela leur donne une première expérience professionnelle. Nous devrions aussi travailler avec les maisons de quartiers et les associations pour trouver des solutions ensemble.

On insiste aussi sur la présence des élus qui vont au contact de cette population. Nous

intervenons donc sur l’information de la population sur l’espace public. Il y aurait bien sûr un

réaménagement urbain à penser dans le centre ancien pour lutter contre cette petite délinquance.

Pour résumer, cette commission spéciale sur le centre ancien est constitué de techniciens et d’élus. Il s’agit d’avoir une vision globale de la situation, d’adopter une position et une stratégie. Même si pour l’instant nous avons ciblé les lieux où il y a le plus d’actes d’incivilité, un périmètre reste à définir. Enfin, il faut identifier les personnes qui posent problèmes.

- La délinquance est-elle liée au fait qu’il y est un cumul de nombreux lieux insalubres dans le centre ancien (ruelles et immeubles insalubres) ou une vacance de commerces importantes?

Bien sûr, cela influe beaucoup sur la localisation de la délinquance. S’il y a moins de passages, il

y a donc plus d’insécurité, ou du moins de sentiment d’insécurité. Comme l’adage le dit « la nature a horreur du vide », du coup les jeunes qui posent problèmes s’approprient les lieux. S’il y a abandon de commerces en rez-de-chaussée, l’affichage sauvage se développe sur l’ancienne devanture, les anciens propriétaires du commerce ne nettoient plus devant leurs magasins, les détritus s’amassent. Tous ces éléments font aussi que cela ne crée pas une ambiance « rassurante ». Ce n’est pas un hasard si les rues qui sont le plus touchées par les actes d’incivilité sont les rues qui ont perdues de nombreux commerces, ce sont aussi les rues les plus sales.

113

Amélioration potentielle :

- Selon vous, comment peut-on lutter contre ces phénomènes ? En intensifiant nos actions ou en développant d’autres qui ressortiront de notre commission

spéciale sur le groupe ancien. En espérant que cela ne déplace pas le problème dans une autre partie de la ville, car cette petite délinquance est enfin de compte itinérante, elle s’adapte aux conditions qu’on lui impose.

- L’aménagement urbain a-t-il le pouvoir de participer à cette lutte (plus d’éclairage la nuit, etc.)?

L’éclairage a été jugé satisfaisant dans le centre ancien. Cela signifie qu’on est dans les

normes. Mais peut-être qu’il faudrait faire un travail plus poussé sur le centre ancien. Les commerçants et les riverains voudraient peut-être de l’éclairage plus longtemps ou plus clair. Il faut donc voir avec l’éclairage géré par la CPPR.

Autre question :

- Quel est votre rôle au sein de la structure ? Vos missions ? J’occupe le poste de directeur de la tranquillité publique et réglementation depuis août 2009.

Je dirige donc au total trois services. Tout d’abord, le service réglementation qui s’occupe des places de stationnements, des horodateurs, des abonnements de stationnements, de la circulation des taxis, de la place attribuée pour les cirques. Ensuite, nous gérons aussi le service hygiène et santé. Et enfin, la police municipale qui détient deux postes (un à la monnaie, un au centre-ville). On compte 17 agents de terrains sans compter les administratifs. Toute la direction réglementation et tranquillité publique compte 35 personnes.

Donc, mon rôle est de manager ces trois services. Je siège au pôle urbanisme et au pôle

tranquillité publique. Une commission de sécurité se réunit tous les 15 jours, elle réunit le

responsable HPR, les élus, le directeur général des services et le commissaire de police.

J’occupe un rôle important dans la coordination des actions avec le cabinet et la direction

générale. Je rencontre aussi les habitants et les riverains, je fais un compte-rendu de ce qui ressort

de cette rencontre, je sers donc d’interface entre la municipalité et le terrain.

Je fais aussi la coordination entre les services (urbanisme, voierie) avec les arrêtés pris.

J’ai aussi occupé une fonction dans la police nationale pendant 20 ans, je m’occupe donc aussi

de faire le lien entre la police nationale et la gendarmerie, j’essaye de coordonner les actions et de

faciliter les rapports.

114

Entretien avec Philippe Pourtier – Responsable de la Mission Politique

de la ville

Entretien réalisé le mercredi 3 mars 2010, de 16h à 17h à la Mairie annexe Est de la

ville de Romans.

Groupe centre ancien

- En quoi consiste le groupe de travail de la politique de la ville sur le centre ancien ? Ce groupe de travail consiste en quatre éléments : tout d’abord faire des constats (que se

passe t’il dans le centre ancien ? relever des données sociales, qualifier le quartier, soulever les points qui font débat, relever les faiblesses et les points forts du centre ancien), décrire une méthodologie (vision et action d’ensemble, hiérarchiser les priorités, valider les différents champs d’actions etc.) identifier les chantiers (insertion par l’activité professionnelle, l’éducation, la médiation et l’animation, la prévention spécialisée, la Maison du Quartier et les associations, le lien avec les commerçants et habitants, la propreté urbaine, les outils de sécurité, l’urbanisme, le peuplement, l’éclairage, la création d’un flux centre-ville, le mobilier urbain et la construction d’un discours, d’une présence), élaborer un calendrier de travail (différentes thématiques abordées dans le groupe de pilotage se réunissant à peu près une fois par mois).

L’élu référent de ce groupe de travail est Cléo DELON. - Quel est votre rôle dans ce groupe de travail ? Je suis le technicien référent de ce groupe de travail.

Politique de la ville :

- Comment la politique de la ville agit sur le centre ancien ? Quelles missions ? Quelles actions concrètes ? Quels objectifs ?

Avant le CUCS, nous avions un contrat de ville, notamment sur le centre ancien global.

Aujourd’hui, nous sommes passés au CUCS (Contrat Urbain de Cohésion Sociale), le CUCS a trois niveaux d’interventions. Le quartier de la Monnaie est en ZUS (Zone Urbaine Sensible), c’est-à-dire en zone 1 du CUCS. Le centre ancien est en zone 2 (une zone non-ZUS).

Un diagnostic sur la santé présenté par le CAREPS en juin 2009 montre certaines données

sociales sur le centre ancien plutôt préoccupantes (7,4% d’allocataires du RMI, 3,5% d’allocataires de

l’AAH, 5,1% de femmes allocataires de l’API, 26,2% de familles monoparentales et 20% de personnes

avec de très bas revenus). Ces indicateurs sociaux nous montrent très clairement que le centre

ancien présente de nombreuses difficultés, c’est pour cela qu’il serait intéressant de le classer, lui

aussi, en ZUS. Nous avons créé un argumentaire pour une extension du périmètre ZUS de la ville de

Romans pour que le secteur de la Monnaie soit élargi au Sud et pour que le centre ancien obtienne

aussi ce zonage fort de priorité de l’action de la politique de la ville. Mais pour l’instant, une réforme

de la politique de la ville est en cours, nous ne savons pas si le zonage sera toujours de mise, peut-

être que la réforme n’agira plus sur des quartiers entiers considérés comme prioritaires, mais plutôt

sur des îlots identifiés comme prioritaires. On agirait alors sur des zones beaucoup plus restreintes.

Donc, nous verrons à l’avenir si nous pourrons classer ou non le centre ancien en ZUS.

115

Données sur le centre ancien :

- Avez-vous d’autres diagnostics sur le centre ancien ? qu’est ce qui en ressort ?

Un diagnostic sur la prévention de la délinquance dans le centre ancien a été fait récemment,

je pourrais vous le communiquer plus tard. Il est vrai qu’il y a de la petite délinquance sur le centre

ancien qui perturbe fortement la situation. On note aussi quelques problèmes de trafic de drogue et

de fondamentalisme religieux, qui reste minoritaires néanmoins. Ces problèmes de sécurité font plus

que de créer un simple sentiment d’insécurité, ils commencent à se cristalliser dans la réalité. C’est-

à-dire que certaines personnes ne se réapproprient plus certains lieux (par exemple, on note

« l’enferment » des personnes se logeant dans les immeubles entourant le square René Char, les

habitants ne se réapproprient plus cette cour intérieure ouverte au public actuellement, mais qui

sera prochainement fermée la nuit pour cause de faits de délinquance récurrents).

Nous réalisons aussi un travail de repérage et de diagnostic sur les équipements sociaux. On

dénombre quelques équipements sociaux comme la Maison de Quartier Saint-Nicolas, le Centre

Médical Départemental (CMD), deux écoles (l’école Manchorelle et l’école Saint-Just).

- Avez-vous des données socio-économiques récentes sur le centre ancien? Lesquelles ?

Quelques unes, notamment sur des indicateurs sociaux sur le centre ancien qui montre une

situation préoccupante (voir précédemment).

On peut faire le constat d’une population mixte dans le centre ancien, mais qui détient une

part de population connaissant de grandes difficultés. On peut même parler de « quart monde »,

c’est-à-dire des personnes en grandes difficultés financières et parfois complètement désocialisées.

De plus, il me semble que les logements sociaux ne sont pas de si grandes qualités dans ce secteur.

Quoiqu’il faudrait faire un état des lieux avec HPR, pour constituer une cartographie avec le nombre

exact de chaque logement sur les immeubles leur appartenant. Il existe aussi de gros problèmes

énergétiques au niveau des habitations (elles ne sont plus aux normes, ces bâtisses sont parfois

impossible à chauffer).

- Au niveau de la vie associative dans le centre ancien : est-elle importante ? quelles sont le

type d’associations présentes dans le centre ancien ? quels rôles tiennent-elles dans le centre

ancien ?

La vie associative dans le centre ancien n’est pas réellement liée aux habitants du centre

ancien, il en existe très peu qui exploite le cadre du centre ancien en lui-même. Néanmoins, il en

existe certaines comme la « Boucherie chevaline », qui créent des animations culturelles.

116

CUCS :

- Pourquoi avoir choisi le centre ancien comme zone du CUCS ?

Comme dit précédemment, le centre ancien est en difficulté aujourd’hui socialement parlant.

De plus, nous avons une moindre tradition de partenariat dans ce quartier par rapport à celui de la

Monnaie. On ne s’est pas encore fait assez visible aux yeux des habitants et des associations.

- Quels sont les objectifs du CUCS sur le centre ancien?

Nos objectifs sont de mieux intégrer nos équipes d’accompagnement car aujourd’hui et de

manière générale, l’accompagnement reste très fragile dans le centre ancien.

Il faut aussi développer la médiation, que ce soit au niveau des correspondants de nuit, qu’au

niveau des écoles et des structures d’animations culturelles et sociales (par exemple, nous avons du

mal à insérer des activités de l’école Saint-Just dans la Maison de Quartier Saint-Nicolas). Il faut aussi

limiter le turnover dans l’école Mancherolle, car on atteint des sommets de taux de turnover dans

cette école (près de 50 à 60% par an). Cela est lié à la situation sociale des parents la plupart du

temps. L’école Saint-Just mériterait aussi d’être réhabilitée (locaux détériorés) car elle a un potentiel

bâti très important, mais se pose aujourd’hui la question du relogement de cette école et les moyens

publics ne sont pas assez suffisants pour s’attaquer à un chantier d’une telle ampleur.

Nous faisons aussi d’autres actions d’encadrement des jeunes, notamment avec le

conservatoire où il y a des actions de découverte culturelle (culture ou sport) en espérant que cela

débouche sur une intégration d’un club de droit commun.

Néanmoins, le partenariat reste difficile avec les écoles même si nous développons des actions

comme le « club coup de pouce clé » ou des ateliers avec les CM2. Nous ne sommes pas dans la

même logique que dans le quartier de la Monnaie, les élèves qui sont en primaire dans le centre

ancien (en zone de DRE (Dispositif de Réussite Educative)) se retrouvent au collège Triboulet par la

suite, qui lui ne se situe pas en DRE. Le suivi de ces élèves se fait alors très difficilement. Dans le

quartier de la Monnaie, la composante «insertion » et le « contact jeune » sont repérés et sont

rentrés dans les habitudes.

Dans le centre ancien, on aide aussi le public des 12-25 ans avec une prévention spécialisée par

le biais de l’aide sociale à l’enfance. Des éducateurs spécialisés prennent contact avec ces jeunes

dans la rue la plupart du temps. Il existe aussi un dispositif spécifique sur les jardins des musées qui

connaissent une occupation d’une population très mixte : des médiateurs agissent sur le terrain. Des

« habitants relais » devraient être développés prochainement, car ils sont en contact avec les

habitants et peuvent faire remonter des problèmes sur lesquels on peut agir.

Au niveau du centre ancien, la politique de la ville a deux grands points faibles : la santé et la

culture. Pour la santé, nous n’avons pas d’instances de coordination du personnel de santé avec la

politique de la ville (on constate un début de coordination avec Romans Nord, mais il n’y en a

quasiment pas sur le centre ancien). Au niveau de la culture, le centre ancien est doté d’un

patrimoine culturel et bâti très fort et très intéressant mais celui-ci est peu utilisé. On ne constate

pas de démocratisation de la culture dans le centre ancien.

117

On constate aussi de gros problèmes concernant la trame viaire et les espaces publics dans le

centre ancien, alors qu’un vrai travail y est fait avec HPR dans le quartier de la Monnaie.

118

Entretien avec Eric Olivier-Drure – Responsable du service des

Archives de la ville de Romans - Sujet principal : Le patrimoine dans le

centre ancien

Entretien réalisé le jeudi 18 mars 2010 de 9h à 11H, aux archives de Romans, 3 rue

des Clercs.

- Y’a-t-il beaucoup de tourisme à Romans ? Quels bâtiments attirent le plus les touristes ?

La collégiale Saint Barnard et le musée de la Chaussure.

- Quels sont les bâtiments historiques qui, selon vous, ne sont pas assez mis en valeur ?

Beaucoup du patrimoine est complètement inconnu ou méconnu aux yeux des Romanais, le

chemin de croix en fait partie. Le chemin de croix appartient à la ville, il existe 21 stations. La plupart

sont dans le centre historique, deux sont sur l’avenue Berthelot et une (la XXIème) se situe dans le

Calvaire des Récollets. Une restauration spécifique a été lancée en 2004, et est toujours en cours

aujourd’hui. Cette restauration est importante car en 2015, nous fêterons le 500ème anniversaire du

chemin de croix, une mise en valeur est donc très importante pour ce monument classé. Néanmoins,

ces stations sont loin d’être immuables, certaines ont bougées, d’autres ont disparues (sauf celle qui

se situe au calvaire des récollets, celle-ci n’a pas bougé), mais cela fait aussi en quelque sorte partie

de ce patrimoine immatériel de la ville de Romans. Au début, 14 stations en tout ont été crées par

deux franciscains revenant de Palestine en 1515. Ces 14 stations retracent la « Voie douloureuse »

aboutissant à un Calvaire (d’où le nom de Calvaire des Récollets). Les stations ont été détruites selon

plusieurs vagues (protestantisme, révolution) puis laissées à l’abandon. Actuellement, ces stations

du « grand voyage » sont accolées à des bâtiments privés ou se situent sur la voirie publique. Il faut

donc penser la restauration dans son ensemble, un travail doit être fait sur l’environnement de la

station, c’est-à-dire sur les façades et la voirie. Il faut donc faire un travail transversal pour restaurer

correctement le chemin de croix d’où la nécessité de croiser le travail des différents services de la

collectivité car des problématiques patrimoniales devraient intervenir dans tout ce qui concerne les

aménagements urbains, les espaces verts, la voirie etc.

L’avenue Berthelot a un aspect peu esthétique, mais nous avons fait un travail sur la

circulation, la ville a pu la mettre en sens unique pour les voitures (sens de la montée), seuls les bus

peuvent l’utiliser dans les deux sens. La CCPR a des compétences en éclairage par exemple, il faudrait

donc aussi travailler avec la Communauté de Communes pour savoir comment l’éclairage peut

mettre en valeur les stations du chemin de croix. Toutes les actions devraient être portées par la ville

et faire l’objet d’un message fort afin que les Romanais puissent connaître plus amplement le

patrimoine de leur ville.

119

- Quel constat faites-vous sur la communication qui est faite sur le patrimoine de Romans ?

De manière générale, Romans a un potentiel touristique et patrimonial fort mais qui reste très

sous-exploité. C’est pour cela que j’essaie de participer à des réunions où la logique patrimoniale a

un impact. Certains édifices ne sont pas du tout mis en valeur : les remparts du XIVe et XVe siècle de

Romans menacent de s’écrouler alors que, par exemple, à Buis les baronnies, leurs remparts sont

bien moins importants que ceux de Romans et pourtant ils ont été restaurés et sont bien connus

dans la région. Nous ne profitons pas de ce type de communication sur le patrimoine de Romans. Les

remparts de Romans sont donc à revaloriser.

Il y a des monuments historiques à Romans mais il n’y a pas que cela, il existe un patrimoine

plus récent (il y a notamment du patrimoine du XXe siècle qui est très intéressant à Romans :

logements sociaux, cité Jules Nadi, friches industrielles etc.), cela nous pousse à réfléchir sur « qu’est

ce qui fait réellement patrimoine » ? Il faut que ce qui est sauvegardé soit exemplaire, et de par sa

forme et par rapport à ce qui a aussi pu être sauvegardé dans la région (ne pas sauvegarder un

élément mineure qui est mieux représenté ailleurs). Il faudrait faire un Inventaire de tout ce qui est

susceptible d’être du patrimoine afin d’avoir une vision globale et de savoir ce qui peut être

sauvegardé ou non. Cet inventaire pourrait, dans un deuxième temps, avoir une déclinaison

pédagogique. La ZPPAUP a pu identifier des zones de sauvegarde, mais l’inventaire peut aller plus

profondément dans le détail car beaucoup d’édifices patrimoniaux ont été détruits sans qu’on le

sache réellement (par exemple : il existe des peintures murales médiévales dans certaines bâtisses,

mais les personnes ne le savant pas et ajoutent du placo par-dessus). Cependant, ce travail

d’inventaire patrimonial demanderait un travail de terrain très lourd et couteux même si l’on ne part

pas de rien aujourd’hui.

Des anciens équipements sportifs seraient intéressants aussi à réexploiter (par exemple, la

piscine à Saint-Donnat ou la piscine ouverte à Bourg-de-Péage). Cela s’est fait par exemple à Roubaix,

une ancienne piscine a été réexploitée en musée d’Art. Certains petits patrimoines devraient être mis

en avant dans le centre ancien comme les lavoirs. Il existait une forte thématique liée à l’eau dans le

centre ancien qui a peu à peu disparue (lavoirs, fontaines, le canal de la Martinette etc.). Cette

richesse serait peut-être une orientation à réexploiter pour l’aménagement global du centre-ancien.

Des subventions doivent être possibles de la région pour réhabiliter ce petit patrimoine. Néanmoins,

la ville n’était pas tournée vers l’Isère comme on peut aisément le croire, certes il existait un port à

Romans et l’Isère servait de voie de communication, mais la ville était tournée vers l’intérieure

(notamment vers la place Maurice Faure).

De plus, il faut savoir qu’ l n’existe que très peu de « places médiévales » dans le centre ancien,

en réalité, le tissu urbain était encore plus dense à l’époque qu’aujourd’hui. Nous avons crée, au fil

du temps, des places et de placettes pour aérer le tissu urbain.

Le quartier de Saint-Romain a été rasé, il existait encore dans les années 1950. Cette partie de

la ville fait donc aussi partie du centre ancien. Le cheminement piéton reste sous-exploité dans le

centre ancien et nous avons remarqué qu’un gros problème de signalétique ne rendait pas compte ni

efficace les indications sur le patrimoine romanais.

120

Enfin, il ne faut pas oublier que la commune de Romans après-guerre est encore très rurale et

était loin de l’étalement urbain que l’on peut constater aujourd’hui. La vie rurale était assez forte

avec notamment l’existence des fêtes dans les Balmes. Un patrimoine agricole serait intéressant

aussi d’examiner.

- De quel type de patrimoine le service des archives s’occupe ?

De manière générale, le service des archives ne s’occupe que des bâtiments publics

appartenant à la ville (monuments classés ou inscrits, comme la collégiale, la tour Jacquemart, le

chemin de croix, le Calvaire, le musée de la Chaussure, les remparts, le cercle militaire), alors que le

service urbanisme peut aussi gérer le patrimoine privé.

- La ZPPAUP sert-elle selon vous à sauvegarder la particularité du centre ancien ?

Oui, néanmoins, La ZPPAUP ne peut pas examiner toutes les particularités patrimoniales du

centre ancien. L’Opération façades accompagne aussi fortement la redynamisation touristique du

centre historique. Le fait de classer un bâtiment « monument historique » permet aussi d’utiliser un

levier pour sauvegarder ce patrimoine.

Nous n’avons pas intégré la collégiale Saint-Barnard dans la ZPPAUP, pour la laisser dans la

réglementation spécifique aux Monument Historiques, c’est-à-dire que dans un rayon de 500 m du

monument une zone de protection des abords permet de réglementer son environnement. Ce

périmètre se répercute alors aussi sur la rive de Bourg-de-Péage, puis que cette commune ne fait pas

partie de la ZPPAUP.

Il existe aussi de véritables questions de normes à respecter dans le centre ancien avec la

réglementation de la ZPPAUP ainsi qu’avec les nouvelles normes environnementales et de sécurité.

Comment faire la part des choses ? Car pour exemple, les fenêtres doivent avoir des menuiseries

spécifiques, des volets en bois, et ne pas avoir du PVC ou de double vitrage standardisé. L’isolation

n’est donc pas aux normes actuelles. Il y a donc un réel travail à faire avec les prestataires de services

pour respecter toutes ces normes sans dénaturer le bâti du centre ancien.

- Comment redynamiser le centre ancien de Romans ?

Il existe une contradiction entre le fait d’étendre des activités économiques aux entrées de

villes (à chaque rond-point) et de vouloir redynamiser le centre ancien. Il faut qu’il y ait une vision

d’ensemble pour prioriser certains enjeux dans la commune de Romans.

Il existe aussi un problème d’identité et d’identification du centre à Romans (centre ancien,

marques avenue ?), il n’y a pas un centre mais des centres à Romans. Les Romanais n’arrivent pas

clairement identifier le morceau de ville qui fait centre-ville.

- Y a-t-il un travail de coordination qui est fait avec Bourg-de-Péage ?

Un réel travail devrait être fait avec Bourg de Péage car ce patrimoine profite aussi à cette

commune (des rives péageoises, on peut profiter d’une des meilleures vues sur le centre ancien et la

Collégiale Saint-Barnard). Mais, il existe de gros problèmes de coordination entre Romans et Bourg

de Péage, ces problèmes remontent loin dans le passé. Par exemple, Romans et Bourg de Péage

faisaient partis de différents diocèses : Bourg-de-Péage dépendait du diocèse de Valence alors que

121

Romans dépendait du diocèse de Vienne. Plus récemment, Bourg-de-Péage était de droite et Romans

de gauche, ce qui a considérablement compliqué la coordination entre ces deux communes. Dans les

années 1920, un plan d’embellissement de la ville a été crée, et n’a pas été possible de couvrir

l’ensemble des deux communes. Aujourd’hui encore, la ZPPAUP n’a été réalisée que sur Romans,

alors que Bourg-de-Péage s’est constitué comme étant un faubourg de Romans avec un bâti ancien

qui aurait mérité d’être inclus dans cette ZPPAUP. Cette très nette distinction entre Romans et

Bourg-de-Péage persiste. Des animosités se cristallisent aussi au niveau des impôts : Les Romanais

payant plus d’impôts que les Péageois et ils ne comprennent pas pourquoi il y a un tel écart sachant

que les Péageois profitent de tous les avantages que peut offrir la ville de Romans. Aujourd’hui,

Romans et Bourg-de-Péage sont toutes les deux des communes de gauche, cela a permis d’avancer

sur certains points car, par exemple, cela ne fait que depuis quelques années qu’un bus de transport

en commun traversent l’Isère pour desservir les deux communes, ce qui n’était pas le cas

auparavant.

Quelle sensibilisation au patrimoine à l’échelle du territoire ?

Un travail de sensibilisation au patrimoine de Romans est réalisé sur l’ensemble de la ville. La

sensibilisation vise certains publics : les plus jeunes dans les écoles, les bibliothèques etc., mais aussi

les personnes qui sont à la retraite (ce qui concerne 30% de la population de la commune, ce qui

n’est pas à négliger). Beaucoup de choses disparaissent, la sensibilisation permettrait d’associer la

population a fin de créer un débat sur ce qu’il faut ou non conserver. Il s’agit de faire « lire sa ville »

aux habitants. Mais, il faut aussi faire un travail interne de sensibilisation des différents services de la

ville de Romans afin que ceux-ci prennent en compte le patrimoine dans les différents projets.

La sensibilisation au patrimoine riche de Romans devrait se faire à l’échelle de la Communauté

de Commune, car les autres communes profitent aussi du rayonnement patrimonial de Romans. Par

exemple, la Collégiale devrait être portée par un territoire plus vaste que celui de la commune de

Romans car l’ensemble du territoire en profite. Il y a peu de temps le service des archives n’avaient

aucun lien avec l’Office du tourisme, ce qui peut sembler impensable de nos jours. Aucun projet

commun n’est réalisé s’il n’y a pas la structure commune qui permet de le cadrer. Par exemple, avec

la médiathèque du centre ancien nous ne faisons plus de projets communs depuis que c’est la CCPR

qui la gère. Nous n’avons pas les mêmes leviers d’action sur le territoire (Romans, CCPR). Puis,

beaucoup de couches administratives se superposent (Ville de Romans, CCPR, RBE), elles n’ont pas

les mêmes moyens et ont parfois du mal à travailler ensemble, alors que les questions urbaines sont

transversales par nature.

122

Entretien avec Jean Decauville– Responsable de l’équipe d’animation

de l’OPAH Romans-Bourg-de-Péage

Entretien réalisé le jeudi 8 Avril de 9H à 10h15, service Urbanisme de la mairie

centrale de Romans.

Historique de l’action publique menée sur le centre ancien de Romans

Cela fait une trentaine d’années que j’ai commencé à travailler sur Romans. J’ai travaillé sur la

première OPAH mise en place et qui débuta en 1979, j’étais salarié au CALD. A cette époque, la

municipalité, nouvellement de gauche, se trouvait confrontait à deux gros problèmes : le quartier de

la Monnaie qui a l’époque n’avait à peine qu’une quinzaine d’années, était déjà confronté à des

difficultés. Même à l’époque on parlait déjà de renouvellement urbain. Ensuite, la deuxième

préoccupation de cette nouvelle équipe municipale était le Centre Ancien. J’étais très surpris par

l’état de dégradation du centre ancien de Romans. Je suis originaire de Normandie et avec les

bombardements de la seconde guerre mondiale, des quartiers anciens ont complètement été

détruits et reconstruits par la suite. On avait en quelque sorte des « quartiers neufs » dans les villes

importantes de Normandie. Ma surprise a donc était d’autant plus grande quand j’ai constaté l’état

dans lequel se trouvait le centre ancien de Romans. Il y avait d’énormes rats dans les rues et dans les

cages d’escalier du quartier Pêcherie. On était en présence d’une population en grande difficulté ou

en voie de grande précarisation. Beaucoup de personnes originaires du Maghreb étaient installées

dans certains quartiers (rue Pêcherie). Une autre population dite « à part » s’installait déjà parce

qu’elles appréciaient les vieux logements et leurs particularités architecturales, surtout qu’ils

n’étaient pas chers à l’époque. Mais la majorité de la population du centre ancien était ouvrière.

Nous avons donc décidé de « mettre le paquet » sur certains quartiers : la rue Pêcherie et la

rue Saint-Nicolas. On avait comme objectif de réhabiliter de l’habitat, on avait l’aide de l’intervention

publique qui, à l’époque, était extrêmement forte par le biais d’organismes publics (HLM Romans) et

de subventions très importantes (on pouvait aller jusqu’à 60 à 70% de subventions pour les

propriétaires bailleurs.

Le constat que l’on peut tirer au niveau des politiques publiques sur le centre ancien c’est que

celles-ci n’ont pas changé depuis une trentaine d’années. Les OPAH visent surtout la réhabilitation

des Propriétaires Bailleurs. Ces outils sont parfois mal adaptés aux situations de terrain, comme par

exemple sur le centre ancien de Romans. Bien évidemment, c’est l’Etat qui crée ces outils là.

En 5 ans, le temps de la première OPAH, le quartier Pêcherie a pris un aspect physique

complètement neuf. Mais, on s’est rendu compte que des bâtiments qu’on avait réhabilités il y a de

cela une trentaine ou une vingtaine d’années et qui aujourd’hui tombent en désuétude. Alors peut-

être qu’ils ont été mal-réhabilités car il n’y avait pas toutes les normes de confort ou d’isolation que

l’on détient aujourd’hui. Peut-être aussi que l’on était moins sensible à la qualité des logements et la

condition de l’habitat, notamment en ce qui concerne l’ensoleillement des logements, de leurs tailles

etc. La première OPAH a été créée dans un contexte politique particulier car une institution a été

créée entre Valence et Romans (car même bord politique à l’époque) nommée l’AEUVR (Agence

Etudes Urbaines Valence Romans). L’AEUVR a crée l’opération « îlot 10 ». Cette opération avait pour

123

objectif de réaliser un curetage complet dans le quartier Pêcherie avec des créations d’ouverture, de

percements etc. Pourtant, aucun percement n’a été crée. Il a manqué un vrai travail global.

Pour les OPAH intermédiaires (OPAH « pêcherie » de 1985 à 1987, OPAH « Romans plateau »

de 1990 à 1993), je n’étais pas sur les projets, mais je pense qu’on a fait comme auparavant, c’est-à-

dire « réhabiliter les yeux fermés ». Il devait y avoir des objectifs que l’on a rempli, certes, au niveau

quantitatif mais pas forcément au niveau qualitatif.

Or, tout n’est pas réhabilitable et cela a été une réelle prise de conscience en 1995. Car il y a

des erreurs qui ont aussi été commises : on a parfois réhabilité des immeubles qui auraient dû être

détruits. Le quartier Pêcherie est encore aujourd’hui le quartier le plus difficile, on fait encore trop de

social dans ce quartier, il faudrait peut-être mettre des immeubles en copropriété, ce qui est possible

de faire aujourd’hui. Ce qu’il faudrait sur le centre ancien c’est de la réhabilitation de qualité et une

intervention bien plus lourde sur certains quartiers et sur l’espace public.

A partir de 1995, s’est posé la question d’agir plus lourdement sur les quartiers du centre

ancien par le biais de RHI (procédures de Résorption de l’Habitat Insalubre). Une étude sur ces

possibles RHI, qui s’est étalée sur deux ans, a été réalisée avec Yves Potier. Nous avons essayé de

déterminer quels secteurs pouvaient être démolis. On a cerné des espaces dans le quartier Saint-

Nicolas où il existait de réelles situations mal-vivables. Ces RHI permettent de détruire des

immeubles complètement insalubres, de réfléchir sur l’aménagement de petites places publiques

voire de reconstruire d’autres logements.

Néanmoins, les RHI sont aussi des outils avec une « entrée sociale ». On lance des enquêtes

sociales et des enquêtes sur l’insalubrité gérées par la DDASS, on dresse des constats sur les

conditions d’habitat des habitants. Avec ce type d’outil on a une vision sanitaire des choses.

Les études préalables ont donné un résultat de « RHI multi-sites » qui touchent le quartier

Pêcherie, le quartier Jacquemart, la rue Saint-Nicolas. Ces sites sont dispatchés dans le centre ancien.

Le bâti n’étant pas réhabilitable, des espaces publics sont pensés, comme ce qui a été réalisé depuis

peu sur la rue des Vieilles Ecoles (création d’une placette).

Les RHI permettent d’avoir des aides extrêmement importantes (financent 70% du déficit de

l’opération). On détient aussi des outils juridiques, par exemple, on peut exproprier beaucoup plus

facilement. Néanmoins, ce sont des opérations qui mettent du temps à être réalisées avec une RHI.

Pendant cette période, la commune a largement investi dans le centre ancien en termes de

places et de parkings.

Enfin, une troisième période de l’action publique marque le regain d’intérêt du patrimoine

bâti sur le centre ancien notamment de la part des élus. On a décidé d’arrêter de banaliser le

patrimoine (en mettant des faux plafonds en détruisant des cheminées datant du XVIe siècle etc.).

Avec les TIA (Travaux d’Intérêt Architectural), on a pu mobiliser des aides que l’on n’avait jamais

utilisées auparavant avec les OPAH. Pourtant c’est un outil très utile pour mettre en valeur le

patrimoine extérieur et intérieur des logements dans le centre ancien.

124

J’ajouterai que c’est parfois difficile de faire changer les mentalités et de convaincre les élus

d’agir autrement sur le centre ancien. Néanmoins, j’ai moi-même était élu et c’est un rôle qui n’est

pas facile du tout, car la temporalité des mandats, c’est-à-dire 6 ans, s’écoule très vite et il est parfois

aussi difficile de convaincre ses propres collègues sur le bienfait de prendre des risques qui

permettent de changer une situation de manière bien plus radicale.

Patrimoine et réhabilitation :

- Etait- ce plus facile de réhabiliter avant quand il n’y avait pas de normes strictes découlant

de la ZPPAUP ?

La ZPPAUP est un règlement mais surtout une reconnaissance des élus de la nécessité de

sauvegarder ce patrimoine qui peut réellement faire office de valeur ajoutée.

La réhabilitation permet d’imposer des normes de qualité et de respect du patrimoine. Nous

ne sommes plus dans la négociation constante avec les propriétaires (bailleurs et occupants) puisque

la ZPPAUP fait office de loi réglementaire. Les subventions ne sont délivrées qu’à condition que ces

règles soient respectées. Cela permet aussi une meilleure coordination avec le service urbanismes et

avec l’ABF.

De plus, Romans détient ce que certains appellent un « maximum de patrimoine intéressant »

dans la Drôme et celui-ci reste complètement sous-exploité. Le centre-ancien de Romans détient de

véritables joyaux qui ne sont pas mis en valeurs comme les cours intérieures des hôtels particuliers.

On peut les voir seulement pendant les journées du patrimoine. Alors que, par exemple, dans le

quartier de Saint-Jean à Lyon, ces cours intérieures détiennent une grille de qualité qui permet de

créer une transparence sur la qualité de ces cours intérieures.

Centralité à Romans et logique urbaine:

- Pourquoi n’y a-t-il pas une réflexion plus large sur la centralité à Romans ?

Je sais qu’il existait des projets qui n’ont jamais aboutis comme la création d’un parking sous

terrain sous la place Majeure. Je ne pense pas que ce soit la priorité aujourd’hui.

- Quel est le centre de Romans exactement ? centre ancien (certains Romanais ne

connaissent même pas le centre ancien)? Marques Avenue ? Boulevard ? Quartier au Sud de la

Gare ?

C’est une bonne question. C’est vrai qu’on du mal à le déterminer.

- Y a t’il des éléments extérieurs qui freinent la redynamisation du centre ancien tant en

terme d’occupation de logement qu’en terme commercial ?

Bien sûr, par exemple, dans le quartier Duchesne, qui est situé relativement proche du centre

ancien, il y avait des friches industrielles importantes. On a reconstruit des grands programmes de

logements où les gens ont accès à des appartements aux normes d’isolation d’aujourd’hui et avec

des garages intégrés aux pieds des immeubles. C’est dommage en un sens car on a construit

uniquement du logement, on aurait pu faire des quartiers plus mixtes avec l’intégration d’activités

tertiaires avec des bureaux etc. Du coup ces logements aux normes standards concurrencent

125

fortement les logements du centre ancien où le « charme de l’ancien » n’est pas suffisant pour attirer

une population non-avertie.

Le problème du stationnement se pose durablement dans le centre ancien : comment

répondre aux exigences des personnes qui désirent avoir leur voiture tout proche de leur logement

alors que le charme du centre ancien peut se traduire aussi par sa piétonisation ?

Enfin, étendre de grandes zones commerciales en entrées de villes et tenter de redynamiser

les centres des villes sont deux objectifs complètement contradictoires. Cela n’est pas forcément le

cas à Romans, mais on peut retrouver ce phénomène dans des communes voisines. Il faut donc faire

attention à ce type de phénomène et faire des choix stratégiques concernant la redynamisation des

centres-villes.

Entretien le 15 Avril de 9h00 à 9h40 au service Urbanisme de la mairie centrale de

Romans.

- Quelle est la différence entre le périmètre OPAH et l’OPAH RU soutenue (au niveau des

subventions)?

Entre l’OPAH et l’OPAH-RU il n’y a pas énormément de différence. Une OPAH simple dure 3

ans et une OPAH-RU dure 5 ans.

Théoriquement, l’OPAH-RU est imprégné du système de l’ANRU (comme on peut le retrouver

dans le Renouvellement Urbain dans le quartier de la Monnaie): il pourrait donc être prévu des

démolitions (RHI) et avec un programme de reconstruction, ainsi qu’un travail important sur les

espaces publics. Néanmoins, cela ne s’est pas passé comme cela sur Romans. Sous l’équipe

municipale précédente, il y a eu un moment de flottement vis-à-vis de ce que l’on voulait faire sur le

centre ancien. Avec le Contournement Nord Ouest de Romans (CNOR), de très lourds

investissements ont été injectés dans ce projet qui est en cours de réalisation aujourd’hui. Du même

coup, l’arbitrage financier ne s’est pas fait en notre faveur pour un projet d’ensemble sur le centre

ancien. D’ailleurs, la ville de Romans avait fait un dossier de candidature pour l’ANRU sur le centre

ancien mais qui n’a pas abouti. On retrouve encore « la politique à deux têtes » de Romans qui

perdure depuis une trentaine d’années, avec comme cibles prioritaires le quartier de la Monnaie et

le Centre Ancien.

Au dernier Comité de Pilotage de l’OPAH, Jean Julian, le représentant de l’ANAH dans la

Drôme, nous a annoncé qu’il y aurait un changement des règles de subventions : on ne financerait

plus les travaux de Propriétaires Occupants, il y aurait seulement des facilités financières pour les

Propriétaires Bailleurs. Or, cela fragiliserait encore plus la situation du Centre ancien. Néanmoins, il

reste encore jusqu’à fin 2011 pour la convention l’OPAH-RU, je pense qu’il y aura des adaptations

locales et que l’on sauvegardera nos règles initiales de la convention de l’OPAH-RU jusqu’à sa fin.

126

- Première OPAH sur Romans et Bourg de Péage ?

C’est la deuxième OPAH qui a lieu à la fois sur Romans et Bourg-de-Péage. Pour la précédente

OPAH, c’était la CCPR qui avait l’étude préalable en ciblant des immeubles que la DDASS et le SCHS

suivaient de près.

- Comment fonctionne le processus de l’OPAH ? Est-ce le comité de pilotage qui propose

directement à des publics cibles du centre-ancien son aide ou est-ce le contraire ?

Nous réalisons des permanences d’accueil certains jours et avons produits de simples

communications dans la presse. On a voulu éviter « le tout-venant », car on a des objectifs précis, on

préfère faire une action massive sur un immeuble plutôt que réhabiliter une toute petite pièce dans

un appartement. Nous travaillons avec les services techniques municipaux. En fait, le service

Urbanisme fait un premier tri des personnes qui veulent réaliser des travaux intérieurs dans leurs

logements sur le Centre Ancien. Puis, le service Urbanisme recueille les coordonnées des personnes,

nous les donnent, et nous les rappelons dans les plus brefs délais afin de convenir à une première

rencontre pour savoir quel est leur projet et quelle est la hauteur des subventions dont ils ont droit.

- Quelle est la différence une OPAH et un PNRQAD ?

Le PNRQAD est un outil qui incite une vision plus globale de ce que l’on veut faire sur le

territoire. Je pense que c’est un outil qui emprunte un peu aux outils financés par l’ANRU. Il y a la

possibilité de réaliser des acquisitions publiques. Avec le PNRQAD, il semblerait qu’un projet global

avec des thématiques tout azimut pourrait être monté, celui-ci s’appuierait sur un financement fort

de l’Etat, un partenariat plus important et des procédures multiples.

Il serait intéressant que la ville puisse acquérir des bâtiments, les réhabiliter ou les rénover et

les revendre seulement à des propriétaires occupants.

En 2009, 20 villes ont été sélectionnées (dont Annonay) pour le PNRQAD, nous attendons les

retours officiels sur les premiers résultats de cette procédure pour en savoir plus. Nous attendons

aussi la seconde sélection pour savoir combien d’autres villes peuvent profiter de la procédure du

PNRQAD.

127

Logements

- Y’a-t-il Beaucoup de demandes de commerces de rez-de-chaussée qui veut se transformer

en logements ?

Il y en a assez peu. On ne l’autorise que très rarement car un logement seul au rez-de-chaussée

cumule de nombreuses nuisances (passage de personnes ou de voitures, bruits, odeurs). Le centre

ancien n’a pas la bonne configuration pour ce type de changement de destination. C’est d’ailleurs

pour cela qu’on a voulu intégrer dans le PLU des rues dans le Centre Ancien ou le changement des

commerces en logement est impossible. L’avis du service d’hygiène permet aussi de légitimer ce

choix.

- Comment faire pour créer de la mixité sociale ? Quelles procédures ? Quelles règles avec

L’OPAH ?

Pour la réhabilitation d’un immeuble de Propriétaires Bailleurs il doit y avoir : un tiers de

logements conventionnés, un tiers de logements intermédiaires, et le dernier tiers doit être des

logements libres. Je trouve que c’est une très bonne règle que l’on est tenu de respecter ! Cette

règle est inscrite dans la convention pour ce qui est de la mixité à l’immeuble.

La convention parle aussi de mixité à l’îlot (quand on réhabilite moins de trois logements par

exemple). Or, dans la convention, il n’est pas défini ce qu’on appelle « îlot ». De plus, quand on a

autorisé un logement conventionné à une personne et qu’au niveau de l’îlot on a atteint le tiers des

logements conventionnés, et que l’on refuse à une autre personne la création d’un logement

conventionné, il peut y avoir un recours devant la justice. Et sachant que nous n’avons pas de règle

très stricte à ce sujet, la justice peut donner raison à la personne à qui nous n’avons pas donné notre

accord.

Il faut aussi savoir que l’on arrive à 60% d’aides pour la création d’un logement conventionné,

ce qui suscite une volonté forte des Propriétaires Bailleurs à vouloir en créer.

- Un relogement est-il prévu pour les habitants vivant dans des logements insalubres (le

temps des travaux) ?

Nous essayons, durant le temps des travaux d’une réhabilitation d’immeuble, de faire du

relogement dans le même immeuble (c’est-à-dire que la personne habite dans un autre logement du

même immeuble durant le temps de travaux).

A vrai dire, on trouve toujours des solutions. Le relogement peut se faire à l’extérieur de

l’immeuble initial, ou les Offices HLM proposent aussi des logements le temps des travaux.

- Les nouveaux programmes doivent-ils respecter l’architecture usitée dans le centre

ancien ? voir la reproduire ?

Il est déjà arrivé après une RHI de reconstruire à l’identique. Les ABF ont assez de pouvoir dans

le centre ancien de Romans. Leur avis est bien respecté ce qui n’est pas le cas dans toutes les

communes voisines.

128

Or, je trouve cela dommage qu’il n’y est pas de place pour l’architecture contemporaine dans

le Centre Ancien. C’est d’autant plus dommage qu’avec l’architecture contemporaine on pourrait

faire des logements avec une haute performance énergétique, ce qui est bien plus dur avec un bâti

ancien. On est encore trop frileux en France pour mélanger l’ancien et le moderne, comme cela peut

se faire en Espagne ou ailleurs.

129

Entretien avec Martial Gaffet – Responsable de la vie associative de la

ville de Romans

Entretien réalisé le jeudi 8 avril 2010 de 11h à 12h, service Urbanisme de la ville de

Romans.

- Comment se porte la vie associative dans le centre ancien? Y a-t-il beaucoup

d’associations? Si oui, quels types d’associations ? Quels publics ?

Il y a beaucoup d’associations dans le centre ancien. Celles-ci sont diverses et variées.

La plus active est celle de la Maison de Quartier Saint-Nicolas. Cette Maison de Quartier

héberge une dizaine d’associations en « réseaux solidaires ». Il existe un lieu dans la Maison de

Quartier qu’on appelle « le Petit Nicolas » prévu pour les 0 à 6 ans. Cet un espace d’accueil a été

crée pour les parents et les enfants, un psychologue est à leur disposition pour parler de tous les

problèmes qu’ils peuvent rencontrer. Il y a aussi des ateliers d’éveil. Tout cela est anonyme et gratuit.

Cette structure a son importance dans le centre ancien.

Cette Maison de Quartier a 20 ans, elle a déménagé il y a 10 ans vers l’école Saint Just pour

plus de proximité avec les habitants. Elle détient un rôle d’ « Education populaire », c’est-à-dire

qu’on accueille les habitants qui veulent créer un projet ou juste participer à des activités, la Maison

de Quartier propose son aide pour les réaliser. Cela peut se faire sur le long terme ou en fonction

d’activités plus ponctuelles. Les Maisons de Quartiers ne fonctionnent donc pas comme les MJC, elles

n’ont pas un catalogue préétabli d’activités mais elles se mettent au service des envies des gens.

La Maison de Quartier abrite l’association « contrecoup » qui lutte contre les violences

conjugales. Ce sont surtout des femmes qui interpellent ce collectif, il peut y avoir des débats et une

écoute attentive vis-à-vis de ce public, voire des aides pour un relogement quand la personne se

trouve dans une situation d’urgence.

Des projets plus ponctuels sont organisés autour des jeunes. Nous le faisons en partenariat

avec le Lycée et le Collège Triboulet.

Les « soirées du lavoir » animent aussi le centre ancien. Ces soirées se passent au mois de juin

et au mois de juillet, le vendredi soir. Les habitants participent et profitent de cette petite festivité

avec parfois des animations musicales, des barbecues… cela dépend des envies des habitants. Cela

fait 5 ans à peu près que cela existe et ces petites festivités marchent plutôt bien.

Des sorties en car pendant les vacances sont prévues (Annecy, aller voir la mer etc.) pour un

prix très modeste afin que certaines personnes puissent avoir un semblant de vacances ; car ce sont

des personnes qui ne pourraient pas partir en temps normal.

La Maison de Quartier a aussi mis en place un centre de loisirs participatif « nature et

enfants ». Nous louons un gîte dans le Vercors pendant quelques jours durant les vacances scolaires.

On essaye d’intégrer les parents dans le projet (repas, animation etc.). C’est en quelque sorte une

« porte d’entrée pour la famille », et cela permet aussi de sortir les enfants de leur quartier. La

Maison de Quartier Saint-Nicolas se veut être un groupement d’associations de proximité. Une Fête

130

de la Saint-Nicolas (6 décembre) est animée par la Maison de quartier : un défilé se fait dans le

centre-ville.

Il existe d’autres associations (hors Maison de Quartier) dans le centre ancien. Par exemple, le

collectif « Hameçon » se situe rue Pêcherie (où se trouvent de nombreux artisans); ce collectif

permet d’encadrer un parcours artistique et de faire quelques expositions ponctuelles sur la place

Folquet et le long de la rue Pêcherie. Se met en place un projet d’ « expression artistique » sur les

vitrines non-occupées. C’est une association qui essaye de stimuler l’activité économique des

artisans, même si à la base, il n’y a pas de but lucratif derrière ces activités.

La Boucherie Chevaline existe depuis 10 ans environ. C’est un café associatif qui est ouvert à

certaines horaires. Il permet de créer du lien social. La Boucherie Chevaline a un rayonnement sur

l’ensemble de la commune. Un calendrier de l’avant a été mis en place au mois de décembre : les

participants créent de l’animation dans la rue, chez l’habitant, dans les commerces. Des vides-grenier

sont aussi parfois organiser/animer par la Boucherie Chevaline. Néanmoins, certaines personnes ont

du mal à y aller car il y a une transmission de valeurs politiques (écologie) envers les participants et

cela crée parfois un certain amalgame.

Trois associations de commerçants sont présentes dans le centre ancien. L’association

commerciale du centre historique (placée rue Mathieu-de-la-Drôme s’occupe de la braderie, créent

parfois des défilés de modes dans la rue Mathieu-de-la-Drôme), et participent ensemble à la

décoration de noël. L’association de la Côte jacquemart fait participer les commerçants à la

décoration de Noël et puis sur d’autres activités plus ponctuelles (par exemple, un concours de

dessin des enfants qui ont été affichés dans une vitrine de commerce vacant). Enfin, une dernière

association de commerçants existe c’est celle de l’association des deux places, Perrot de Verdun et

celle du joueur de Flûte. Cette dernière association est en sommeil actuellement.

L’association Accès Université populaire se trouve au-dessus de l’école Saint-Just. Cette

association a pour but de transmettre le savoir et les savoir-faire (formation sur le long terme au

niveau de l’apprentissage des langues, du savoir culinaire, des cycles philo sont aussi mis en place).

Cette association a un certain rayonnement sur l’ensemble de la ville mais elle reste peu fréquentée

par les habitants du centre ancien.

Au niveau des écoles : l’association des parents d’élèves de Saint-Just participe à la Kermesse

de l’Ecole, animent des vides-grenier et créent des festivités ponctuelles. L’école maternelle

Manchorelle qui est composée de 3 ou 4 classes, détient un centre de loisirs pour les enfants. Ce

centre de loisirs a une bonne réputation, mais son dynamisme est un peu mis en vieille aujourd’hui.

La Maison des syndicats est une structure qui a un rayonnement très important sur

l’ensemble de la ville.

L’association des amis de la vigne Saint-Nicolas est animée par un groupe d’anciens qui fait du

vin une fois par an.

L’association de sauvegarde du patrimoine Romanais Péageois basée rue des Clercs anime

des visites du centre ancien et est gérée par des personnes qui ont une grande connaissance de

l’histoire de Romans (rôle d’informations et de sensibilisation).

131

L’association des anciens combattants est basée dans le quartier Saint-Nicolas.

L’association « Romans International » a un rôle de coopération avec les cinq villes jumelées

avec Romans Varèse (Italie) en 1957, Coalville (Royaume-Uni) en 1962, Zlin (République Tchèque) en

1967, Straubing (Allemagne) en 1970 et Zadar (Croatie) en 1985. Trois objectifs : Permettre la

connaissance la culture de l’autre, développer l’apprentissage interculturel et sensibiliser à la

citoyenneté européenne.

Au niveau des associations dites « artistiques », on dispose du théâtre de la courte échelle

avec dans les mêmes locaux, au premier étage, l’association Empi et Riaume qui concourt à la

conservation des danses folkloriques locales avec une manifestation nommée « Folklore » au mois de

juillet dans Romans. Au deuxième étage, se trouve l’association le Fil à la Patte qui est une

association de danse contemporaine. Cette compagnie de dans partage ses locaux avec l’association

« le petit monde artistique » qui est une association de danse basée sur le mode des comédies

musicale (pour les 6 à 20 ans).

Au niveau environnemental, il existe la Maison de la Nature, elle se situe vers les berges de

l’Isère. Elle regroupe plus d’une quinzaine d’associations concernant la nature et l’environnement. La

Maison de la Nature rayonne sur la ville et même au-delà. De plus, elle profite d’un nouveau parc

restauré (dont pourrait bénéficier le centre ancien) et d’un « hôtel pour les insectes » (insectes qui

nichent ici car la ville a dénaturé leur lieu de vie).

Enfin, il existe une Association syndicale des locataires, ce type d’associations sont très peu

nombreuses dans le centre ancien. Cette association se situe dans l’Immeuble St George, en face de

la future Cité de la Musique. L’association détient un local pour se réunir et permet aux locataires de

partager des moments de convivialité.

- Les Associations ou la Maison de Quartier du centre ancien sont-elles mobilisées pour le

Carnaval ? et la population du centre ancien ?

C’est une question assez délicate. Car, en fait, c’est la Maison de Quartier Saint-Nicolas qui a

remis au goût du jour le Carnaval de Romans en faisant participer des personnes du centre ancien. Et

c’est en 1997 que la mairie de Romans s’est réapproprié le carnaval en le finançant par le biais de

subventions bien plus importantes, et en le professionnalisant. La Maison de Quartier Saint-Nicolas

s’est donc en quelque sorte « fâchée » avec la mairie, même si certaines années elle a participé au

carnaval (et d’autres années non).

Pour les commerçants, la situation aussi est délicate. Certains commerçants dans l’alimentaire

font un très bon chiffre d’affaires le jour du Carnaval. D’autres commerçants (hors alimentaire) ont

un chiffre d’affaires moins importants le jour du Carnaval, notamment ceux qui sont basés « en haut

de la ville », sur les boulevards. Alors que pour la fête de la musique, les commerçants se mobilisent

bien mieux.

- Quelle vision avez –vous du centre ancien de manière générale ? Comment le décririez-

vous en quelques mots ?

Même si la tissu associatif est assez étalé sur la commune, le centre ancien détient un atout

que d’autres quartiers de Romans n’ont pas : le centre ancien détient un nombre considérable de

132

salles culturelles (Les Cordeliers, la salle Jean Villard, l’Ecole Saint Just etc.) qui participent vivement à

l’aspect vivant du tissu associatif. Ces salles culturelles ne sont pas seulement utilisées par des

associations du centre ancien mais par d’autres associations de Romans.

Ensuite, ce qui porte parfois à quelques tensions dans le centre ancien, c’est la cohabitation

des personnes qui viennent pour les commerces et les habitants du centre ancien.

Malgré tout, je trouve que le centre ancien est plutôt vivant et que c’est un joli quartier. Il est

d’ailleurs mis en valeur par le marché du vendredi matin et encore plus avec celui du dimanche

matin. Le marché du dimanche est un rendez-vous hebdomadaire pour beaucoup de gens. Il connaît

un gros succès car des gens de Valence et de Tain viennent faire leurs courses ici.

Néanmoins, c’est vrai que la vie nocturne dans Romans s’arrête très tôt. Peut-être que cela est

dû au sentiment d’insécurité qui pèse sur le centre ancien (bien que moi-même je ne le ressens pas)

et notamment du côté de la place Macel et du Square René Char.

- Votre rôle dans la structure ?

Je suis le directeur de la vie associative et des quartiers. Je suis en charge de la coordination

des quatre mairies annexes, de la cohésion des équipes qui travaillent sur la vie associative, je suis

chef de ce service, je travaille aussi sur les événements festifs, je fais un peu le lien avec toutes les

associations. Je conseille aussi les nouvelles associations arrivant sur Romans concernant leurs

activités, je les conseille notamment sur leur budget. Je peux donc aider à « monter » une

association, et la mettre en lien avec d’autres associations. Je fais surtout le lien avec les maisons de

quartier. Le service peut aussi proposer des objectifs clairement définis pour certaines associations

subventionnées. Enfin je fais aussi le lien entre les élus municipaux et les élus du monde associatif.

133

Entretien avec Nadège Gauthier– RBE – Chargée de la mission

Commerces et Artisanat sur le centre ancien romanais

Entretien le mercredi 14 avril de 9h30 à 10h30, au service Urbanisme de la mairie de

Romans

- Sur quel territoire travaillez-vous ?

Le Territoire de Romans-Bourg-de-Péage Expansion (RBE) regroupe 35 communes. L’action de

RBE se concentre avant tout sur Romans même si nous agissons sur quelques communes rurales.

RBE est un syndicat économique qui a été crée en 2006. Après la « crise de la chaussure », nous

devions regrouper les deux communautés de communes sous la forme d’un syndicat. La création de

ce regroupement a été impulsée par le sous-préfet. RBE devait s’occuper du volet économique et

cela s’est accompagné par un Contrat de Site.

Avant la création de RBE, La communauté de Commune de Romans (CCPR) avait déjà mis en

place un soutien au commerce et à l’artisanat. Parallèlement, Bourg-de-Péage avait fait la même

chose concernant son territoire, ce qui a facilité le regroupement du volet économique sous RBE.

RBE détient trois types d’opérations, dont une que l’on a paramétré sous le nom

d’ « agglomération centre ». Une quinzaine d’actions sont regroupées sous cette opération qui vont

des études économiques, à la « gestion centre-ville », du lien avec Valence, du marché à Romans, du

volet d’accompagnement du commerce etc.

Nous sommes en lien avec les associations de commerçants (association des commerçants du

centre historique, de la Côte Jacquemart, et de Fanal). Nous sommes entrain de mettre en place un

périmètre plus large sur Romans et Bourg de Péage appelé « duo de villes » qui regrouperait le

maximum de commerçants afin qu’ils créent des animations communes. En 2008, on avait essayé de

réaliser cette démarche, mais cela avait été très complexe au niveau de la distribution des

subventions.

- Comment ces actions sont-elles financées ?

C’est le Fond d’Intervention pour les Services, l’Artisanat et le Commerce (Fisac) et des fonds

propres de RBE qui donnent des subventions aux commerçants. Par exemple, pour la plupart des

subventions données aux commerces et à l’artisanat, elles représentent 20% du projet (10%

provenant du Fisac, 10% de RBE), pour les études préalables (50% sont financés par le Fisac, 50%

sont financés par RBE), pour ce qui est des animations commerciales et artisanales c’est en grande

partie le Fisac qui les financent. Des partenariats sont réalisés aussi : par exemple, avec la ville de

Romans nous avons travaillé ensemble sur l’acquisition du 37 et 39 Côte Jacquemart (Commerces et

logements à réhabiliter).

134

- Quelles procédures pour redynamiser les commerces ? Comment cela se passe

concrètement ?

La porte d’entrée de toutes nos actions : c’est le commerce. Le commerce n’a pas qu’une

fonction purement économique, il participe grandement au cadre de vie, il permet d’autres fonctions

comme la promenade, la vie d’un quartier, les rencontres et le contact social.

Au niveau de nos actions, nous n’avons pas de périmètres très précis, notamment au niveau

des rues. Nous aidons pour le rafraichissement des façades, la modernisation des locaux, nous

proposons une aide pour l’installation dans les locaux commerciaux.

Se pose aussi la question de l’échelle de décision : la commune peut être une échelle plus

adaptée sur les secteurs prioritaires (rues commerciales) qu’elle veut redynamiser ? A mon sens, elle

peut être un bon niveau de décision si elle gère tout ce qui est de l’ordre de l’opérationnel. A voir

aussi s’il y a un regroupement des deux communautés de communes de Romans et de Bourg de

Péage, cette probable alliance aura plus de compétences et pourra aussi être une échelle adaptée

concernant la redynamisation commerciale.

- Pourquoi ne pas miser sur une redynamisation plus globale sur « les centres de Romans »

(hauts et bas de la ville) ainsi que de penser une redynamisation commerciale en lien avec

Marques avenue ?

Est en cours d’étude sur Romans ce qu’on appelle une « gestion centre-ville ». C’est une

opération de Mangement de projet de centre-ville suivie par Pierre Francis, membre de l’AMCV

(Association du Management du Centre-ville). Cette association belge promut un partenariat public-

privé favorisant la coopération de tous les acteurs du centre-ville (que ce soit des élus, des

commerçants, des personnes travaillant dans le tourisme, l’animation culturelle etc.) et que cette

coopération permettrait de créer une forme de développement économique et social au sein de la

ville.

Dans l’Idéal, ce regroupement serait transversal et neutre (partage des pouvoirs, avec souvent

le maire comme président, l’adjoint étant un commerçant) et pourrait permettre un financement qui

se composerait de 50% de fonds publics et de 50% de fonds privés. Mais, cela est rarement le cas,

l’investissent public est souvent bien plus important. Néanmoins, Saint-Etienne, Neuville-sur-Rhône,

Nouméa, des communes dans l’Ain ont réalisé cette « gestion centre-ville » et cela fonctionne bien.

C’est une réussite notamment au niveau de la collaboration des élus et des commerçants.

Pour ce qui est de Romans, Pierre Francis pense qu’il faudrait partir d’un périmètre de

centralité restreint (c’est-à-dire, délimiter un périmètre englobant la rue Mathieu-de-la-Drôme, la

place Maurice Faure, et la côte des Cordeliers). Ensuite, quand les premiers effets bénéfiques se font

ressentir, il faudrait étendre cette action sur un périmètre élargi.

Bien sûr, Marques Avenue devrait être un partenaire essentiel de cette redynamisation du

centre-ville. Pourtant, on ne l’inclurait pas forcément dans ce périmètre élargi (le périmètre élargi

étant le centre ancien, les boulevards et le quartier en dessus de ces boulevards).

135

Il est vrai qu’il existe une sorte de coupure du linéaire commercial avec sur les boulevards et

la rue Jacquemart la présence des commerces de proximité (notamment avec les commerces

alimentaires) et des services alors que sur la côte de Cordeliers et la rue Mathieu de la Drôme nous

avons plus affaire à des boutiques de prêt-à-porter et de haute gamme.

Un travail sur la signalétique est en cours. On ne peut pas affirmer que cette nouvelle

signalétique ramènera des personnes dans les commerces, mais elle favorisera peut-être les

déplacements des personnes jusque dans le Centre ancien.

L’office de Tourisme qui est en cours d’installation dans Marques Avenue est une aubaine

pour redynamiser le centre ancien, on pourrait peut-être drainer le flux des visiteurs qui viennent à

Marques Avenue jusque dans le centre-ancien.

- Quelles rues sont les plus dynamiques dans le centre ancien ? et pourquoi certaines le sont

et d’autres non ?

La rue Mathieu-de-la-Drôme a longtemps été en situation de déprise. Aujourd’hui c’est celle

qui a le plus de cachet. Néanmoins, sa redynamisation est due à une initiative privée. De plus, se

pose la question de la piétonisation ou non sur cette rue.

La côte des Cordeliers est dynamique, la place Maurice Faure l’est un peu moins car les

personnes traversant la rue Mathieu-de-la-Drôme ne continuent pas sur la place Maurice Faure

(problèmes d’enseigne). Alors que la vacance des commerces reste assez stable sur les boulevards, la

première moitié de la rue Jacquemart, la côte des Cordeliers, on note une certaine déprise sur la

place Maurice Faure.

- Faites- vous une sélection des commerces installés : commerces de proximité ou

commerces de haut de gamme ? Quels sentiments animent les commerçants vis-à-vis du centre

ancien ?

Non, nous ne faisons pas de sélection, cela se fait assez naturellement, car les locaux dans le

centre ancien sont souvent très chers. Il faut donc avoir « les reins solides » si on veut s’installer dans

le centre ancien.

Certains commerçants cherchent le passage avant tout, donc ils veulent s’installer sur les

boulevards. Pourtant, quand des locaux intéressants se libèrent dans le centre ancien, cela ne gène

pas les commerçants de s’installer ici.

Néanmoins, d’autres personnes propriétaires des commerces de proximité (par exemple une

pharmacie placée Maurice Maure) du centre ancien ferment boutique car ils rencontrent des

difficultés au quotidien : des faits de délinquance récurrents, une trop grande concentration de

population en grande difficulté socio-économique comme principaux clients etc.

La « mixité vers le haut » ne se fait pas, j’ai l’impression que la population se paupérise de plus

en plus dans le centre ancien, alors que la mixité doit se réaliser de manière extrêmement fine. Je

suis en contact avec des agences immobilières qui refusent de diffuser des annonces de logements

ou de locaux de commerces dans certains secteurs du centre historique. C’est dommage car le centre

ancien détient une réelle plus-value touristique et commerciale qui s’ignore totalement. Il faudrait en

136

effet miser sur un marketing urbain plus prononcé, mais ce sont des opérations qui coûtent souvent

très chères et qui doivent être réalisées sur le long terme.

Ensuite, la vie nocturne à Romans est au point mort, cela est aussi dû au fait que Romans n’est

pas une ville étudiante. C’est difficile de revenir à des habitudes perdues. Je trouve que ce serait déjà

bien si les commerces du centre ancien soient ouverts entre midi et deux au moins le vendredi et le

samedi.

Enfin, les abords du centre ancien ne sont pas suffisamment traités. Le quartier de la Presle et,

notamment son parking dégradé, renvoient une image négative et ne donnent pas envie de

s’aventurer dans le centre ancien. Même si le problème du stationnement est récurent dans le

centre ancien, il faudrait au moins qu’il y est un meilleur entretien des places de stationnements qui

existent déjà à Romans

- Quel rôle dans votre structure ?

Je suis chargée de la mission commerces et artisanat. Les personnes qui ont le même type de

mission que moi sont appelés « animateurs Fisac ». Mais je n’aime pas tellement cette catégorisation

car les fonds financiers comme le Fisac peuvent être diminués voir disparaître avec la conjoncture

actuelle. Or, il faut bien que notre structure perdure même si nos financements diminuent. C’est

pour cela que nos actions ne portent pas le nom « Fisac » mais « politique d’intervention

commerce », ce qui est aussi une appellation bien plus parlante.

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Entretien avec Françoise Sarraillon – Directrice de l’association de

sauvegarde du patrimoine romano-péageois

Entretien réalisé le mercredi 21 avril 2010 de 9h30 à 10h45, dans les bureaux de

l’association de la Sauvegarde du patrimoine Romano-péageois, rue des clercs.

- Quelles actions et quels objectifs votre association de sauvegarde du patrimoine s’est-elle

fixée ?

Tout d’abord, notre association a un rôle d’informations sur la richesse patrimoniale du centre

ancien romanais. Il existe une vraie méconnaissance des gens mais aussi des élus et des directeurs de

service de la mairie concernant le patrimoine romanais, même si nous discernons bien que, parmi

eux, certains ont la volonté de le connaître. On constate que de nombreux Romanais ne

s’approprient pas le patrimoine de leur ville.

Pourtant, il est de l’intérêt de la ville de miser sur son patrimoine en le valorisant, cela

permettrait de dégager peut-être des fonds pour enfin débloquer certaines situations.

Notre association est composée d’une vingtaine de personnes et nous faisons des groupes de

travail qui diffèrent selon la thématique que l’on souhaite étudier. Par exemple, on a voulu travailler

sur le canal de la Martinette à Romans, et ce travail a aboutit à une visite pendant les journées du

patrimoine, beaucoup de personnes ont été intéressées et ne connaissaient pas du tout ce canal

alors qu’il faisait partie intégrante de la vie quotidienne des Romanais auparavant. Nous faisons aussi

un grand travail d’animation pendant les journées du patrimoine qui attirent beaucoup de gens. Je

fais visiter le centre ancien aux personnes qui le souhaitent mais aussi aux personnes travaillant à la

mairie pour les sensibiliser à la richesse patrimoniale du centre historique. Nous avons de très beaux

hôtels particuliers avec des cours intérieures mais qui ne sont pas mis en valeur. C’est réellement

dommage, il faudrait trouvait un système pour ouvrir sur l’extérieur ces bâtiments pour que cela

profite à tous.

- Quelles difficultés votre association rencontre t’elle ?

Les financements de la DRAC pour tout ce qui concerne le moyen et le petit patrimoine ne

sont plus réellement à l’ordre du jour. Le service des archives rencontrent de très grandes difficultés

pour obtenir des fonds afin de restaurer le patrimoine qui menace de s’écrouler. Par exemple, sur les

remparts restants, vers le musée de la Chaussure, un arbre pousse dessus et ses racines abiment

considérablement celui-ci. Il me semble qu’il ne faudrait pas tant de moyens humains et financiers

pour pouvoir résoudre ce problème, mais rien n’est fait pourtant il s’agit bien d’une situation

d’urgence.

De plus, l’office de Tourisme qui s’est transformé récemment en EPIC (regroupant RBE, La

CCPR, la communauté de Communes du Canton de Bourg de Péage), est géré d’une manière

politique. Ce ne sont plus les associations qui portent actuellement les animations, la programmation

des offices de tourisme. Et avec tout ce mille-feuilles administratif, on a l’impression que les moyens

138

se dispersent aussi vers les autres communes et que le centre historique de Romans n’est plus

prioritaire, qu’il est laissé pour compte.

On remarque bien aussi que beaucoup de projets n’avancent pas dans le centre ancien ; Par

exemple sur la place Folquet, cela fait déjà un petit moment que l’on se rend compte qu’il y a un

problème important concernant la propreté des espaces publics. Les élus s’en sont bien rendu

compte, et un projet devait être réalisé dans ce sens ; et pourtant rien a encore été fait.

Pour tous ces problèmes, on essaye d’interpeller les élus, mais ils ne sont pas souvent

disponibles.

Parfois, on participe à des présentations faites par la mairie. Par exemple, nous avons participé

à « la commission consultative patrimoine – urbanisme » où le personnel de la mairie nous a

présenté les projets en cours, comme par exemple, la Cité de la Musique ou les logements bientôt

construits sur le tènement Citroën. Nous étions assez déçus de ce type de présentation car nous

pensions qu’il aurait été plus judicieux de discuter des projets avant qu’ils se réalisent, de créer un

dialogue entre la population et la mairie de Romans plutôt que de réaliser une simple présentation

sans échange.

- Selon vous, qu’est ce qui serait à améliorer dans le centre ancien de Romans ? Au niveau

patrimonial ? au niveau de sa gestion ?

La signalétique devrait être changée. Nous savons qu’un travail fait par RBE est fait dans ce

sens. Nous trouvons encore dommage que notre association ne soit pas consultée concernant ce

projet. Il me semble qu’il serait judicieux de placer quelques plans du centre ancien où serait

représenté tout le patrimoine intéressant du centre ancien. Ces plans pourraient être positionnés à

certains endroits stratégiques par exemple : sur la place Maurice Faure, sur la place du Pont Neuf ou

vers la Cité de la Musique. Il faut aussi faire attention à l’affichage sauvage car les restaurants

placardent parfois sur les murs du centre ancien leurs enseignes avec une flèche pour les situer. Si ce

phénomène continue une pollution visuelle va se propager rapidement dans le centre historique.

Un réel cheminement dans la ville devrait être pensé. Cela fait déjà un petit moment que l’on

attend que la rue Mathieu-de-la-Drôme, la place Maurice Faure ainsi que la rue Saint-Nicolas

deviennent piétonnes. Encore faut-il penser à des parkings de report pour que cela puisse se

réaliser. Je pense en plus que cela peut être vraiment bénéfique pour la Place Maurice Faure si on

supprime le stationnement. Car les personnes qui font du shopping dans la rue Mathieu-de-la-Drôme

ne vont pas jusqu’à la place Maurice Faure pensant que c’est un simple parking. Cela nuit

considérablement aux commerçants qui sont situés sur cette place.

Je me demande aussi pourquoi placer l’office de Tourisme dans Marques Avenue ? A mon

sens, il faudrait aussi penser aux Romanais et aux personnes qui vont directement sur le centre

ancien en plaçant une antenne de l’office de Tourisme sur la place Maurice Faure, avec une

personne qui serait au moins embauché l’été pour l’animer.

Au niveau du personnel municipal, il manque un « Monsieur ou une Madame centre ancien »

qui permettrait de faire remonter tout ce qui ne va pas aux services techniques et aux élus.

139

Au niveau de la propreté, un travail important doit être fait car certaines personnes font

preuve d’incivilité en ne ramassant par les déjections de leurs chiens notamment. Cela nuit

considérablement à l’image du centre historique.

Il faudrait aussi valoriser certains bâtiments et certains lieux de Romans. Le Calvaire des

Récollets en est le parfait exemple car il détient une richesse considérable et a résisté au temps

malgré ses destructions successives (Réforme, Révolution française etc.). Une renaissance de ce

Calvaire s’est effectuée au XIXe siècle et témoigne de l’investissement de la nouvelle bourgeoisie

romanaise dans « l’art funéraire ». Beaucoup de chapelles funéraires ont été crées à cette époque,

on retrouve différents styles : le style néo-gothique, le style néo-classique et le style néo-romantique.

Malheureusement, ce Calvaire est aujourd’hui complètement dégradé, des infiltrations d’eau et des

faits de vandalisation l’ont durablement abîmé. Ce Calvaire est aussi méconnu des gens de manière

générale car il est fermé au public et qu’il n’y a pas de communication faite sur celui-ci.

Dans la Rue Pêcherie, se trouve « la Vierge qui s’évanouit », elle aussi mériterait d’être

réhabilitée, mais une action sur l’ensemble du bâtiment sur laquelle la Vierge s’adosse devrait être

faite.

Comme je l’ai dit précédemment, il faudrait qu’il y ait un travail fait sur les hôtels particuliers

et leurs cours intérieures, ainsi que sur les anciennes maisons des tanneurs, des drapiers etc. Il

faudrait aussi penser à exploiter la thématique de l’eau qui était omniprésente à l’époque et qui

tend à disparaître de plus en plus. Une personne membre de notre association a la volonté d’investir

dans l’ancienne chapelle sur l’actuel parc Saint-Romain et de la transformer en galerie d’art

contemporain. Nous sommes entrain de réfléchir sur la manière d’interpeller les élus et la population

sur ce projet afin de mobiliser le maximum de personnes.

Enfin, il s’agirait de communiquer un peu plus sur le chemin de croix. Le jour du vendredi

saint, environ 800 personnes de religion chrétienne et même des personnes non pratiquantes

réalisent le chemin de croix. Cette manifestation est tout de même encadrée par des religieux, cela

se fait de manière assez recueillie et sereine. Nous avons déjà eu quelques reportages sur le chemin

de croix du Grand Voyage sur France 3, mais il faudrait peut-être relancer cette communication

chaque année pour le faire connaître plus amplement.

140

Entretien avec Jean-David Abel – Elu à L’urbanisme, troisième adjoint

Entretien réalisé le lundi 3 mai de 14h45 à 16h, dans e bureau de Monsieur Abel de

la mairie de Romans.

- Quelle est votre position d’élu vis-vis du centre ancien ? Quelles espérances vis-à-vis de ce

quartier ? Quels buts de l’action politique menée ? Quels obstacles (au niveau de la marche de

manœuvre)?

A mon sens, le centre historique des villes fait la différence entre les villes elles-mêmes. Il

produit une ambiance bien particulière et crée une spécificité et un caractère propre à la ville. Le

centre historique est un facteur d’identification dans le sens où quand on se trouve dans un centre

historique on peut dire, selon la morphologie, le bâti, l’architecture, les matériaux, le mobilier urbain,

dans quelle ville nous sommes. Car aujourd’hui, on note une certaine homogénéisation des modes

de faire de la ville (au niveau de la forme adoptée, des matériaux utilisés) dans des quartiers plus

récents. Ces quartiers plus récents ne participent à l’identification de la ville.

Il faut s’attacher à une réhabilitation pour la qualité de vie aussi bien pour les habitants que

pour les personnes qui sont de passage dans Romans. Le centre ancien est un axe majeur et évident

de la politique locale. Il est du devoir des responsables politiques de se charger du centre ancien car

il y a un patrimoine fort, une certaine épaisseur historique de ce quartier avec une utilisation

spécifique de matériaux à préserver. Le centre historique peut assumer un rôle d’éducation et de

pédagogie envers les jeunes sur le passé de la ville.

Cependant, nous avons une marche de manœuvre relativement faible pour deux raisons :

nous avons un frein au niveau financier et un frein au niveau juridique.

Tout d’abord, la commune n’a pas assez de moyens financiers, nous sommes dans un contexte

tendu, et de manière générale l’argent se fait rare même au niveau des subventions de la Région et

de l’Etat. De plus, il faut avoir un projet cohérent et bien défini pour avoir des subventions, ce qui a

pu manquer parfois à Romans. Nous avons aussi raté le coche dans les années 1980-90 par rapport à

certaines subventions, car Romans était une ville quasi monofonctionnelle, c’est-à-dire que tout

tournait autour du cuir (maroquinerie, chaussures, création de boites en carton pour les chaussures,

beaucoup d’entreprises ont embauché de la main d’œuvre et avaient une activité de près ou de loin

avec le cuir). On aurait pu avoir des subventions pour des projets de ville et des projets

d’aménagements urbains considérables avec cette situation. Surtout qu’on était dans une époque où

l’Etat avait de l’argent. Enfin de compte, le centre ancien a obtenu seulement des subventions dites

« normales ». Alors, qu’il aurait été vraiment intéressant d’utiliser des fonds de reconversion

industrielle car, avec ceux-ci, on aurait pu obtenir des financements même pour un projet avec un

volet urbain important. Des bourgs du Vercors d’à peine deux mille habitants ont eu ce type de

subventions. Ces bourgs avaient une industrie liée à l’eau qui s’est peu à peu éteinte, ils ont pu

réaliser une reconversion touristique et créer des aménagements urbains avec ces fonds financiers.

La ville de Romans n’a pas eu la chance d’obtenir ce type de subventions.

La ville de Romans avait un contrat de site qui nous a servi pour tout ce qui est formation pour

la reconversion des personnes qui se sont retrouvées au chômage. Mais nous n’avions pas de projets

urbains prêts et bien ficelés qui auraient pu être financé par ce contrat de site.

141

Il serait aussi intéressant d’utiliser le FNADT (Fond National pour l’Aménagement et le

Développement du Territoire). Dans les années 1990, le FNADT avait beaucoup de fonds auparavant,

il y en a beaucoup moins aujourd’hui mais c’est une source financière qui existe toujours et qu’on

pourrait solliciter pour l’aménagement des espaces publics. Le FNADT pourrait être une solution pour

les aménagements urbains que l’on veut créer, mais c’est un outil qui doit être porté par tout le

monde.

Nous sommes dans une période de « fric rare », c’est pour cela qu’il est essentiel d’avoir une

vision de projet d’ensemble et de ne pas être seulement que dans la réparation et la compensation. Il

faut vraiment avoir un projet d’aménagement qui marque un changement durable sur l’image du

quartier. La commune devrait créer des aménagements notamment sur l’espace public afin d’attirer

des investisseurs privés dans le centre ancien. Aujourd’hui, cette initiative privée est embryonnaire,

c’est à nous de la stimuler.

Au niveau des moyens juridiques : cela fait trente ans qu’on utilise les OPAH. Puis, au fil du

temps nous avons multiplié les opérations et la réglementation sur le centre ancien (PLU, ZPPAUP,

OPAH, OPAH-RU, RHI, procédure de péril et bientôt ORI). Mais, nous avons parfois affaire à des

procédures longues qui n’ont pas toujours été coercitives vis-à-vis des propriétaires qui ne veulent

pas réhabiliter leurs biens immobiliers.

- Qu’attendez-vous de mon diagnostic ? quelles réponses espérez-vous vis-à-vis de celui-ci ?

Je pense que le travail de diagnostic des aménagements urbains et de la création de la

cartographie de ceux-ci sur le centre-ancien est un boulot nécessaire. Ce travail permettra d’avoir

une vision d’ensemble. Et à partir de là, pourra se dessiner une hiérarchie dans ces aménagements

urbains : nous déterminerons lesquels sont prioritaires, lesquels sont secondaires, et puis déterminer

quels aménagements urbains sont intéressants mais qui ne sont pas pressants. Et puis, nous

dresserons, par ce biais, toutes les choses qui sont à faire sur le centre ancien.

C’est aussi une manière de dire aux acteurs économiques, commerciaux, politiques et aux

habitants qu’il y a une volonté de réhabilitation globale sur le centre ancien. On donne un sens à ce

qui veut être fait. C’est aussi une façon de contrecarrer le marché qui augmente les prix immobiliers

malgré une mauvaise image du centre ancien. Il n’y a pas d’intérêt général défendu par les agences

immobilières. Il faut arriver à relancer les investissements et arriver à une valorisation aussi réussie

que dans d’autres centres historiques d’autres villes.

Concernant la mission du diagnostic pour le projet de candidature du PNRQAD, il faut insister

sur plusieurs points :

- Tout d’abord, le centre historique de Romans a un très fort potentiel.

- Que tout n’est pas dégradé, seuls quelques îlots le sont.

- Cela fait trente ans que les politiques communales tentent de réhabiliter le centre ancien. Il y

a une volonté politique très forte concernant le centre historique, car c’est un enjeu économique et

urbain pour tout le bassin. Se décline une volonté de créer un cœur d’attractivité.

- Il existe une paupérisation d’une part de la population dans le centre ancien, avec un

manque d’entretien du patrimoine de certains propriétaires.

142

- Une amélioration des espaces publics est à réaliser pour attirer des particuliers et des

promoteurs sur le centre ancien.

- Pour mettre en œuvre des aménagements urbains, il y a trop d’étapes administratives. Du

même coup, il n’y a pas d’effet de changement fort sur l’image du centre ancien. Peut-être qu’avec le

PNRQAD, nous pourrions créer ce changement d’image en concentrant les efforts et créant le déclic

de la redynamisation.

- Pourquoi ne pas créer un projet de centralité avec l’effet d’aubaine que pourrait provoquer

Marques Avenue ? Pourquoi le projet de la Place Majeure prend autant de temps à sortir de terre,

alors qu’à mon sens c’est un projet qui participerai grandement à la redynamisation de Romans sur

le long terme et changerai durablement son image ?

Le centre historique, c’est en quelque sorte le centre avant le centre de la ville moderne. Enfin

de compte, la colonne vertébrale de Romans est située sur les boulevards, au dessus du centre

historique.

Il existe en effet un frein financier par rapport au projet de la Place Majeure. Cela fait déjà un

moment qu’avait été voulu d’enterrer un parking, et de créer ce qu’on appelle « une place Majeure »

(déclinaison de ce qui est fait en Italie avec les places « majore »). On a chiffré à 10 millions d’euros

ce projet. Il me semble que c’est vraiment élevé comme chiffrage d’opération alors que l’on pourrait

créer une place grande et sobre, qui serait efficace comme point central de la ville.

- Depuis combien de temps y a t’il un élu délégué au centre ancien ?

Le centre ancien est une préoccupation politique depuis trente ans. De manière générale,

c’est surtout le délégué à l’urbanisme qui s’est occupé des thématiques du centre ancien, même s’il y

a d’autres élus qui s’en chargent en fonction de leur champ d’action. Pierre Brillaud, élu au centre

historique, s’occupe enfin de compte plus du commerce et de la relation avec les commerçants du

centre historique.

Concernant la carte des Aménagements Urbains du Centra ancien :

- Qu’est ce qui est prévu Place Macel ?

La place Macel a été crée il y a peu et est plutôt bien réussie. Mais, il este un carré se situant

devant la place Macel où un grand mur se dresse, derrière se trouve une cour intérieure squattée.

Devant ce mur se trouvent des voitures qui ne rendent pas lisible le cheminement jusqu’au marché

situé place Maurice Faure. Il s’agit de prévoir et de créer un petit mur et un square (jardins sud), et

de restituer une partie de la cour intérieure aux propriétaires.

- Comment est la qualité et l’état de marche des Fontaines et des bassins dans le centre

ancien?

Un travail important devrait être réalisé sur les éléments d’eau du centre ancien. La place

fontaine couverte a déjà un aspect esthétique intéressant mais la fontaine présente ne marche plus

actuellement (ne marche plus du tout l’hiver), c’est dommage car cela crée une ambiance sympa et

c’est agréable de se trouver en ville et d’entendre le bruit de l’eau qui coule. Une réflexion plus large

143

devrait être faite au niveau de l’envahissement de la voiture sur la place Perrot de Verdun qui nuit à

la lisibilité urbaine (aux enseignes commerciales et au mobilier urbain).

Il y a un bassin rue du puits du cheval qui n’est pas en état de marche, la population dégrade

celui-ci en jetant des détritus. Pourtant, nous avons un budget pour son entretien, mais la lenteur

administrative bloque de simples processus comme celui-ci.

- Au niveau de la piétonisation du centre ancien?

Il faut miser sur une piétonisation ou sur des zones de ralentissement dans le centre ancien.

On peut laisser la côte des cordeliers utilisable par la voiture, mais pour le reste il faut miser sur la

piétonisation de la Rue Mathieu-de-la-Drôme, de la place Perrot de Verdun, de la rue Saint Nicolas et

créer une zone où la circulation est ralentie sur la rue de l’Armillerie.

- Au niveau de la rue Mathieu-de-la-Drôme ?

J’aurais voulu que soit réalisé un aménagement urbain particulier sur cette rue, car elle c’est

surement l’une des plus dynamiques dans le centre ancien. On pourrait y installer des arcs et un

couvert végétal (matériaux : aluminium, plexiglas). Un travail sur l’éclairage public serait à combiner

pour créer une ambiance tout à fait particulière. C’est avec ce type d’aménagement qu’on peut faire

la différence (voir ce type d’aménagement nulle part ailleurs), qui améliore le cadre de vie des

habitants et qui peut marquer l’esprit des gens qui viennent faire du shopping dans le centre ancien

(Romanais et personnes venant visiter Romans). Néanmoins, ce type d’aménagement d’agrément

est compliqué à réaliser, et puis il faut voir si c’est techniquement possible.

On pourrait peut-être mobiliser d’autres manières de financer ce type d’aménagement urbain.

L’Epargne locale pourrait être l’un de ces outils. Il s’agit de demander aux personnes qui ont les

moyens financiers et qui laissent leur « argent dormir à la banque », s’ils veulent participer à

l’amélioration de l’image de la ville. Cet investissement serait sur le court terme, c’est-à-dire que les

personnes investissent leur argent sur 3 à 5 ans par le biais d’une SEM. Cette démarche est vraiment

intéressante car les habitants qui ont de l’argent peuvent devenir les acteurs de leur ville. Cette

manière de faire resterait exploratoire, mais si celle-ci fonctionne, cela peut être très enrichissant

pour la ville, l’action publique et les habitants. Malheureusement, aujourd’hui les élus se limitent

trop eux-mêmes. Il y a une sorte de fatalisme à Romans couplée à une logique trop administrative

qui freinent les démarches, surtout si celles-ci sont nouvelles ou innovantes.

144

Entretien avec Cléo Delon – Elue à la tranquillité publique, deuxième

adjointe

Entretien réalisé le mardi 4 mai de 12h15 à 12h45, au bureau de Mme Delon, à la

mairie de Romans.

- Quelle position d’élue adoptez-vous vis-vis du centre ancien ? Quelles espérances avez-

vous vis-à-vis de ce quartier ? Quels buts de l’action politique menée ? Quels obstacles (au niveau

de la marche de manœuvre)?

En tant qu’élue, j’adopte l’optique de la politique de la ville avant tout. Ma mission est celle de

faire revenir la tranquillité publique dans les quartiers où elle fait défaut. Sur le centre ancien, nous

rencontrons plusieurs difficultés : il existe des actes d’incivilités et une inadaptation des

comportements des jeunes avec les habitants et les commerçants. Un fort mécontentement se fait

ressentir, les gens sont excédés par cette multiplication de faits de délinquance.

Il existe donc des faits de dégradation diverse et variée, qui touchent la plupart du temps les

commerces. A côté de cela, il existe aussi du trafic de stupéfiants (héroïne) et de cannabis qui n’est

pas forcément visible aux yeux des habitants et des commerçants. L’association du trafic de cannabis

et des jeunes se fait parfois et crée une très mauvaise ambiance.

Comment agissons nous sur cette délinquance ? Il y a d’abord une mise en place d’une action

directe sur les incivilités en faisant passer une police pédestre dans les rues qui sont le plus sujettes à

ces faits de délinquance.

Puis, nous avons mis en place un travail de médiation avec les dispositifs des correspondants

de nuit avec une augmentation des effectifs et une ouverture d’un local pour les jeunes (qui s’est fait

le 3 mai 2010). Certains jeunes jouent au football jusqu’à très tard dans la nuit ou chahutent, cela

crée des nuisances sonores pour les riverains. Ce local pour les jeunes permettrait de canaliser ces

jeunes et de leurs proposer des activités sur le parc saint-Romain par exemple. Nous avons aussi la

volonté de créer un bureau de correspondants de nuits où les jeunes et les habitants peuvent se

référer.

Nous travaillons en lien avec la police nationale sur l’activité délinquante avec une focalisation

sur le centre ancien (multiplication des contrôles).

- Au niveau de la Tranquillité publique sur le centre ancien, quelle position adoptez-vous ?

Est-ce selon vous une situation alarmante ? Avons-nous affaire à une délinquance qui se limite

qu’à quelques rues du centre ancien ?

Il y a une focalisation sur deux espaces à Romans au niveau de l’action menée pour la

tranquillité publique : le quartier de la Monnaie et le centre ancien. Comme on peut le voir, il y a un

lien fort avec la politique de la ville. Le centre ancien voit ses indicateurs sociaux dégringoler et cela

empire depuis quelques années. On peut donner plusieurs explications par rapport à cela : d’abord il

y a une population qui habitait sur la Monnaie qui s’est installée sur le centre ancien. Une partie du

trafic de cannabis s’est aussi transféré de la Monnaie au centre ancien. Mais il faut relativiser ce fait,

car il y avait aussi ce type de faits sur le centre historique.

145

Ce territoire est aussi moins connu de manière générale par les forces de police. Et puis, il y a

moins de choses de faites sur le centre ancien que sur le quartier de la Monnaie. N’oublions pas que

le centre ancien n’est pas classé en ZUS alors que le quartier de la Monnaie l’est. Du coup, nous

n’avons pas les mêmes dispositifs d’action. Sur le quartier de la Monnaie, les personnes qui sont en

chargent d’encadrer les jeunes connaissent la population, le travail de partenariat est bien plus fort.

Sur le centre ancien, nous n’avons pas cette logique partenariale de la politique de la ville avec le

tissu associatif. On note tout de même une difficulté des associations du centre historique à

encadrer cette jeunesse qui cause des soucis au niveau de la tranquillité publique. Il n’y a pas par

exemple d’éducateurs sur le terrain, nous rencontrons une réelle difficulté à ce niveau-là.

Auparavant, c’était le quartier Saint-Nicolas qui était beaucoup plus touché par la délinquance.

Maintenant, ce sont les quartiers ouest qui sont le plus touchés et qui connaissent une récurrence au

niveau des faits de dégradation (rue de l’Armillerie, rue du Fuseau, Rue Puits du cheval, square René

Char). Parfois, il y a eu un débordement des faits de dégradation sur la côte Jacquemart et la rue

Mathieu-de-la-Drôme.

Nous rencontrons aussi un problème général d’incivilité dans le centre ancien, avec un dépôt

d’ordures et d’encombrants des habitants dans les rues. Ce sont souvent des personnes en difficulté

sociale qui posent ces encombrants dans la rue (vieux meubles etc.), car ce sont bien souvent des

personnes qui n’ont pas de voitures et qui ne peuvent déposer ces encombrants dans une

déchèterie. Les jeunes délinquants s’amusent à mettre le feu à ces encombrants, ce qui crée un réel

problème de sécurité dans le centre ancien. Il est difficile d’agir sur ce problème au niveau des

moyens d’actions de la tranquillité publique. Je pense qu’il faut surtout maintenir la mixité sociale

voir la réintroduire dans certains quartiers. Il faudrait aussi agir de manière plus globale sur le centre

ancien, car des rues sont vraiment peu esthétiques, voire complètement dégradées. Il faut forcer

certains propriétaires à restaurer leur immeuble.

Sur le long terme, il serait bien de travailler sur la création d’un lien bien plus profond avec

l’Education nationale, car il y a des écoles sur le territoire du centre ancien. Et c’est en encadrant les

personnes dès le plus jeune âge qu’on est le plus efficace dans la prévention de la délinquance.

Enfin, au niveau de notre fonctionnement et des moyens financiers qui nous sont donnés,

nous rencontrons de nombreux freins. Premièrement, il va y avoir une refonte de la géographie

prioritaire qui va prendre forme à la fin de l’année 2010. Nous sommes dans un contexte où il y a une

réduction de nombre de ZUS. C’est pour cela que nous ne sommes pas forcément très optimistes

quant au classement du centre ancien en ZUS, même si nous essayons de sensibiliser le préfet sur ces

questions là. Le FIPD (Fond Interministériel de la Prévention de la Délinquance) a eu une

restructuration financière. Par exemple, pour la Drôme est prévu 340 000 euros pour la

vidéosurveillance et seulement 18 000 euros pour la médiation. Alors qu’il y a trois ans, nous avions

un budget de 88 000 euros pour la médiation. On subit les choix étatiques au niveau local. A Romans,

c’était surtout le travail de médiation que l’on voulait développer et qui me semble le plus adapté à

la situation. De plus, même si on investit dans la vidéosurveillance, la commune doit investir 50 % des

frais car l’entretien coûte cher et puis, pour certains cas, il y a une masse salariale à gérer par la suite

(qui se traduit par une surveillance derrière les caméras, même si on peut basculer cette surveillance

sur le commissariat la nuit et les week-ends).

146

De manière générale, on assiste à une restriction budgétaire qui ne va pas dans le bon sens et

qui complique, enfin de compte, de plus en plus la situation.

147

Entretien avec Philippe Drésin – 1er adjoint délégué aux finances et au

service public communal, président d’Habitat Pays de Romans

Entretien réalisé le mardi 1er juin, de 10H30 à 11h, dans le bureau de Monsieur

Dresin, à la mairie de Romans.

- Quelle est votre position d’élu vis-vis du centre ancien ? Quelles espérances vis-à-vis de ce

quartier ? Quels buts de l’action politique menée ? Quels obstacles (au niveau de la marche de

manœuvre)? Qu’est ce qui est possible de faire et de ne pas faire ?

Nous avons plusieurs espoirs vis-à-vis du centre ancien, nous voulons le réhabiliter

massivement et nous souhaiterions qu’il devienne le quartier le plus vivant de la ville. Les

problématiques du centre ancien sont assez transversales et touchent tous les domaines que ce soit

l’urbanisme, le cadre de vie ou le dynamisme commercial.

Mais nous rencontrons de nombreuses difficultés. Dans un premier temps, il est difficile de

mettre en place une maîtrise globale et transversale de tout cela. Ensuite, il faut engager un

partenariat public et privé dans le centre ancien, ce qui est plus difficile à mettre en place. Par

exemple, cela a été bien plus facile d’agir sur le quartier de la Monnaie où tout était public.

Puis, nous connaissons des problèmes de finances sur les projets qui permettraient

d’améliorer l’ensemble du centre ancien. Enfin, le centre ancien détient une situation géographique

compliquée puisqu’il se trouve « coincé » entre une rivière et une montée topographique. On peut

remarquer que le centre ancien a une topographie qui se trouve, enfin de compte, assez proche de la

situation du vieux Lyon.

Je pense qu’il faut mener plusieurs actions dans le temps : sur le court, le moyen et le long

terme.

Pour ce qui est des actions à mener sur le court terme : Nous devons résoudre de grands

problèmes de sécurisation. Vous le savez sûrement, le centre ancien est très touché par des faits de

délinquance et cela irrite beaucoup les habitants du centre historique. Par exemple, des personnes

se sont installées dans des logements se situant devant la place Macel qu’on vient d’aménager, et à

cause de des faits de délinquance qui se passent sur cette placette, ils déménagent aussitôt. Nous

pouvons aussi agir sur le peuplement du centre ancien. En effet, nous avons un atout considérable :

HPR est un bon interlocuteur dans le centre ancien, et nous travaillons ensemble concernant

l’intervention i par le biais du peuplement. Notre but est d’essayer de ne pas fragiliser encore plus la

situation. Il s’agit aussi d’attirer des personnes plus aisées, et donc d’introduire des bobos dans le

centre ancien afin de créer une mixité vers le haut.

A moyen terme, il s’agit de travailler sur la piétonisation, la circulation, et la réappropriation de

l’espace public dans le centre ancien. Je pense qu’il faut créer des parkings de report pour les

personnes qui n’habitent pas dans le centre ancien et créer des zones de stationnement de proximité

qui seraient des garages publics groupés.

Sur le long terme, il faudrait agir de manière massive sur le bâti très dégradé, et créer un réel

travail sur les boulevards et la place Jean Jaurès.

148

Enfin, il faudrait créer une gouvernance unique et partagée pour tous ces projets (et

notamment celui de l’espace public de la place jean Jaurès) avec un chef de projet politique et un

chef de projet technicien.

- N’y a t’il pas un lien à créer avec le management de centre-ville ?

Le management de centre-ville a plutôt une visée commerciale. Nous préférerions avoir un

chargé de mission plus global du centre ancien, qui ferait le lien entre tous, et qui serait LA personne

identifiée aux yeux de tous et à laquelle il faut se référer. Il est vrai qu’émerge depuis quelques

temps, l’idée qu’il n’y a pas de centre-ville à Romans, la place majeure pourrait faire le lien entre le

haut et le bas de la ville, car c’est bel et bien une « rupture » entre un haut et un bas de la ville qui

est ressentie par les commerçants. J’espère que ce grand projet d’aménagement verra le jour bientôt

et se déroulera, si tout se passe bien, entre 2012 et 2018. En 2011, nous voulons lancer un concours

d’architectes pour cette place. En 2012, les Romanais pourront faire un choix selon trois scénarios

possibles pour cette place et enfin, en 2013, les travaux pourront débuter.

Actuellement, nous voulons afficher une volonté politique qui se veut forte alors

qu’auparavant celle-ci n’était pas assez importante pour porter le projet.

- Le projet pourrait peut-être porté par la CCPR ?

Non, c’est à la commune de porter ce projet, la CCPR n’a pas plus de moyens que la ville de

Romans. Je pense que le problème financier doit être aussi résolu avec l’apport de moyens étatiques

(notamment avec le PNRQAD). De plus, nous avons déjà de bons contacts avec l’ANRU, puisqu’avec

l’Opération de Rénovation Urbaine (ORU) sur la Monnaie, nous avons été réalistes et efficaces. On

s’est engagé pour ce qu’on était capable de faire. D’ailleurs, nous avons été les premiers de la

Région en 2004 à signer un contrat avec l’ANRU, et nous sommes les premiers à avoir fini

actuellement.

- Qu’attendez-vous de mon diagnostic ? quelles réponses espérez-vous vis-à-vis de celui-ci ?

Ce diagnostic serait intéressant s’il nous permet de candidater pour le PNRQAD. Avec cela, il

serait possible que la commune porte le projet de la place Jean Jaurès, à condition bien sûr qu’il y ait

des financements étatiques qui soient conséquents.