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étiologie | actualités 7 OptionBio | Lundi 25 janvier 2010 | n° 429 Une douleur thoracique, révélateur d’une pathologie myéloproliférative U ne femme âgée de 63 ans est admise dans un hôpital britannique pour une dou- leur thoracique évoluant depuis 24 heures, irradiant dans le cou. Une semaine avant l’admission, elle a présenté plusieurs épisodes d’op- pression au niveau thoracique mais n’a aucun autre antécédent médical particulier. L’examen clinique est normal. Un infarctus confirmé Les examens biologiques montrent une troponine élevée à 1,22 μg/L pour une normale inférieure à 0,01 μg/L et un cholestérol légè- rement supérieur à la normale, à 5,3 mmol/L pour une normale inférieure à 5 mmol/L. Il existe une hyperleucocytose à 14,5x10 9 /L avec des neutrophiles augmentés et une thrombocytose à 614x10 9 /L. Le taux d’hémoglobine est normal. L’angiocoronarographie montre un thrombus au niveau de l’artère coronaire droite, ce qui confirme le diagnostic d’infarctus. Un traitement médical adéquat est donc instauré, ce qui permet la disparition du thrombus dans les 72 heures. Une forte carence martiale L’examen du frottis sanguin révèle la présence d’une microcytose, une hypochromie, une anisopoïkilocy- tose et une elliptocytose. En ce qui concerne les plaquettes, on observe une anisocytose plaquettaire et des plaquettes géantes. La concentration en ferritine est légèrement diminuée, à 12 μg/L pour une normale entre 13 et 150 μg/L, ce qui confirme la déficience en fer. Paradoxalement, il existe une érythrocytose avec un taux d’hématies à 5,96 x 10 12 /L pour une normale entre 3,8 et 4,8 x 10 12 /L. Une pathologie myéloproliférative La suspicion d’un déficit en fer liée à une pathologie myéloproliféra- tive est alors confirmée par la pré- sence d’une mutation hétérozygote (V617F) du gène JAK2, détecté dans 90 à 95 % des cas de polycytémie myéloproliférative. Un traitement par hydroxycarbamide est donc institué, ce qui permet une normalisation du taux de plaquettes. Ce type de pathologie myéloproli- férative est associé à des compli- cations thromboemboliques avec une prédominance d’événements artériels. La mise en évidence de la mutation somatique permet d’établir le diagnostic et d’éviter de faire un myélogramme qui représente un geste plus invasif. | O.M. Source Tauro S, Hutcheon S. Chest pain and small red cells: size does matter. Lancet. 2009 ; 374 : 426.

Une douleur thoracique, révélateur d’une pathologie myéloproliférative

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7OptionBio | Lundi 25 janvier 2010 | n° 429

Une douleur thoracique, révélateur d’une pathologie myéloproliférative

Une femme âgée de 63 ans est admise dans un hôpital britannique pour une dou-

leur thoracique évoluant depuis 24 heures, irradiant dans le cou. Une semaine avant l’admission, elle a présenté plusieurs épisodes d’op-pression au niveau thoracique mais n’a aucun autre antécédent médical particulier. L’examen clinique est normal.

Un infarctus confirméLes examens biologiques montrent une troponine élevée à 1,22 μg/L pour une normale inférieure à 0,01 μg/L et un cholestérol légè-rement supérieur à la normale, à 5,3 mmol/L pour une normale

inférieure à 5 mmol/L. Il existe une hyperleucocytose à 14,5x109/L avec des neutrophiles augmentés et une thrombocytose à 614x109/L. Le taux d’hémoglobine est normal.L’angiocoronarographie montre un thrombus au niveau de l’artère coronaire droite, ce qui confirme le diagnostic d’infarctus. Un traitement médical adéquat est donc instauré, ce qui permet la disparition du thrombus dans les 72 heures.

Une forte carence martialeL’examen du frottis sanguin révèle la présence d’une microcytose, une hypochromie, une anisopoïkilocy-tose et une elliptocytose. En ce qui concerne les plaquettes, on observe

une anisocytose plaquettaire et des plaquettes géantes. La concentration en ferritine est légèrement diminuée, à 12 μg/L pour une normale entre 13 et 150 μg/L, ce qui confirme la déficience en fer. Paradoxalement, il existe une érythrocytose avec un taux d’hématies à 5,96 x 1012/L pour une normale entre 3,8 et 4,8 x 1012/L.

Une pathologie myéloproliférativeLa suspicion d’un déficit en fer liée à une pathologie myéloproliféra-tive est alors confirmée par la pré-sence d’une mutation hétérozygote (V617F) du gène JAK2, détecté dans 90 à 95 % des cas de polycytémie

myéloproliférative. Un traitement par hydroxycarbamide est donc institué, ce qui permet une normalisation du taux de plaquettes.Ce type de pathologie myéloproli-férative est associé à des compli-cations thromboemboliques avec une prédominance d’événements artériels. La mise en évidence de la mutation somatique permet d’établir le diagnostic et d’éviter de faire un myélogramme qui représente un geste plus invasif. |

O.M.

SourceTauro S, Hutcheon S. Chest pain and small red cells: size does matter. Lancet. 2009 ; 374 : 426.