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Une médecine sauvage

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Les peuples autochtones, qui possèdentune connaissance intime des écosystèmesdans lesquels ils vivent, font confiance à lanature pour couvrir nombre de leursbesoins quotidiens, notamment en matièrede remèdes. La médecine occidentale leurdoit beaucoup plus qu’elle ne le reconnaîtgénéralement.

Cela fait longtemps, par exemple, que lespopulations amazoniennes du Brésil et duPérou utilisent les racines deChondrodendron pour soigner la fièvre etles morsures de serpent, ainsi que commearme. Les chasseurs trempent la pointe deleurs flèches dans un liquide extrait desracines de cette vigne, et une foistouchée, leur proie s’effondre et meurt enquelques secondes. Les scientifiques ontadapté cette drogue, le curare, pourfabriquer des anesthésiants modernes, etsoigner la sclérose en plaques et lamaladie de Parkinson.

Des traitements traditionnelsDe même, les peuples autochtones duBrésil connaissent depuis longtemps lesvertus médicinales du jaborandi, qu’ils ontbaptisé « plante à baver », car il provoqueune production rapide de salive et desueur. Aujourd’hui, la médecine occidentaleutilise cette plante pour soulager lasécheresse de la bouche et de la gorgeprovoquée par la radiothérapie dans letraitement des cancers. Elle est égalementbénéfique aux patients souffrant dusyndrome de Sjögren, qui les empêche deproduire suffisamment de salive. Comme laplante aide à détendre les muscles desyeux, on s’en sert aussi en chirurgieophtalmique et dans le traitement des maladies oculaires.

De l’autre côté du monde, la réserpine – substance tirée du Rauwolfia serpentinaqui pousse dans les forêts indiennes – estutilisée depuis des millénaires poursoulager les maladies mentales etdésordres nerveux. Les scientifiquesoccidentaux ont adopté ce remèdetraditionnel dans les années quarante.

Des cultures médicinalesLes plantes médicinales peuvent êtrecultivées ou cueillies à l’état sauvage. Denombreuses tribus de la forêt équatorialecultivent les espèces les plus importantespour eux, et en Afrique du Sud, lespopulations plantent le Warburgia salutariset le gingembre africain pour leurs vertusmédicinales. Par contre, les Indonésiensn’ont pas besoin de cultiver l’ylang-ylang(utilisé dans le traitement de l’hépatite) carcette variété d’herbe est un des couvre sols les plus courants du pays.

Un quart environ de la pharmacopéeoccidentale actuelle vient des plantes, etnombreuses sont celles qui sont endéveloppement pour l’avenir. Lesscientifiques sont par exemple convaincusque le crapaud Epipedobates tricolor, dontles Equatoriens se servent pourempoisonner leurs flèches, pourraitpermettre de trouver une alternative à lamorphine dans la lutte contre la douleur.

Des remèdes régionauxQuatre-vingts pour cent environ deshumains se soignent grâce aux plantesmédicinales connues de leur propreculture. Ils sont nombreux à ne pas avoirles moyens d’acheter des médicamentsmodernes, mais souvent, les remèdestraditionnels sont d’une efficacité égalevoire supérieure. Une étude réalisée àMadagascar a montré que les planteslocales comme le gingembre utilisé contrele mal des transports et le Burasaia sp.contre la fièvre étaient plus efficaces queles alternatives chimiques.

La riche biodiversité des régions les plussauvages de notre planète pourrait bienfournir à la médecine moderne bonnombre des traitements futurs, tout encontinuant à répondre aux besoins despopulations locales qui connaissent mieuxque quiconque leurs plantes médicinales.

On dit que dans les années 1600, l’épouse du vice-roi

espagnol du Pérou contracta la malaria et qu’un

guérisseur indien la soigna avec l’écorce du

quinquina. Que cette anecdote soit véridique ou non,

le fait est que les Européens adoptèrent ce

médicament sous le nom de « quinine ». Et depuis ce

temps-là, c’est ainsi que l’on soigne la malaria.

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Aujourd’hui, elle est la représentanteélue des 150 000 Inuits du monde, quivivent dans l’Arctique, au Canada, auGroenland et dans le Chukotka, enRussie. Avec le PNUE, elle s’estfortement impliquée dans la campagnequi demandait aux gouvernements dumonde entier que soit éliminée ladouzaine de polluants persistantsorganiques qui contaminaient sonpeuple. Elle se bat également contre leréchauffement mondial. Voici un passagequi résume le discours qu’elle a tenu auCongrès américain en septembre 2004.

« Nous sommes arrivés à un point clé del’histoire de notre planète. La terre est en trainde fondre et nous devons nous unir pouraborder les problèmes liés au changementclimatique. Le réchauffement mondial touchel’ensemble de la planète, mais les scientifiquess’accordent à dire que ses impacts surl’Arctique sont beaucoup plus rapidesqu’ailleurs. Nos anciens ressentent ceschangements depuis le milieu des annéessoixante-dix. Les Inuits restent très proches del’environnement et nombreux sont ceux dont lasubsistance familiale dépend de la terre et de lamer. Nos anciens et les chasseurs possèdent une

connaissance intime de la terre, de la mer et dela glace, et ils ont observé des changementsinquiétants au niveau du climat, del’environnement et de la faune sauvage del’Arctique :

1. Fonte du permafrost2. Allongement des saisons sans glace3. Apparition massive dans la région de

nouvelles espèces d’oiseaux et de poissons –effraie des clochers, rouge-gorge, canardpilet et saumon

4. Invasion de moustiques et de mouches5. Glace de mer imprévisible6. Fonte de glaciers, transformant les rivières

en torrents.

Nos observations sont confirmées par une étudescientifique officielle effectuée par plus de 300 scientifiques et de nombreux habitants del’Arctique. Cette étude conclut qu’il est fortpossible que nos liens ancestraux avec notreculture axée sur la chasse disparaissent enl’espace de deux générations.

C’est dans l’Arctique que le changementclimatique se produit en premier et le plusrapidement. Ma région est le baromètre de lasanté de notre planète.

Les impacts observés dans certains villagesinuits reculés de l’Alaska – comme Shismaref, àla pointe est, qui est pratiquement sur le pointd’être englouti par la mer – nous donnent uneidée de ce qui attend des régions aussi peupléesque la Floride, la Louisiane ou la Californie.

En ce qui concerne la pollution responsable duchangement climatique, si nous parvenons àrenverser la tendance suffisamment rapidementpour préserver l’Arctique des impacts les plusdévastateurs du réchauffement mondial, nouséviterons d’innombrables souffrances à descentaines de millions d’humains.

Le réchauffement mondial nous touche tous.Utilisons l’expérience de l’Arctique et l’histoiredes Inuits pour tisser des liens entre nous, pourcomprendre que la planète et ses populationsne font qu’un. Le chasseur inuit qui tombe àl’eau, victime d’une couche de glace toujoursplus mince et imprévisible, est tributaire denos voitures, de nos industries et du mondejetable qui est aujourd’hui le nôtre.

Le changement climatique est une question desurvie pour l’ensemble de l’humanité. C’est notreproblème mondial le plus urgent. Protégeonsl’Arctique et nous sauverons notre planète. »

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Distillation globale : comment les POPs sedéplacent1/ les produits chimiques pénètrent dans le cycle

de circulation atmosphérique à des latitudesplus basses, là où la pollution est la plus forte

2/ ces toxines restent longtemps dans lescourants de circulation avant de se dirigervers le nord

3/ les toxines finissent par quitter l’atmosphèreau niveau des calottes glaciaires

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Protégeons l�Arctique, sauvons notre planète

Sheila Watt-Cloutier a grandi dans la minuscule communauté inuit de Kuujjauq sur les côtes sud de la baiede Ungava, dans la région gelée du Nord du Canada. Jusqu’à l’âge de dix ans, elle ne connaissait pas d’autremoyen de transport que le traîneau tiré par des chiens.

Les Inuits de l’Arctique, qui vivent dans un desenvironnements les moins hospitaliers de la terre,sont un peuple plein de ressources. Ils senourrissent surtout d’espèces de faune localescomme le caribou, le bœuf musqué, l’ours polaire,le phoque, la baleine, le morse et divers poissons.Les Inuits ont besoin d’absorber des quantitésimportantes de calories pour avoir chaud et vaquerà leurs occupations, et ces denrées locales leurprocurent également des huiles essentielles etnutriments qui ne sont pas présents dans lesaliments importés du Sud. Les Inuits sont parailleurs très attachés au mode de vie traditionnelde leurs ancêtres fondé sur la chasse et la pêche.

Pourtant, les aliments qu’ils consomment lesexposent à des produits chimiques – lespolluants organiques persistants ou POP –

apportés par les vents en provenance delointains pays. Comme ces produits chimiquesdangereux mettent longtemps à se décomposer,ils s’accumulent dans la chaîne alimentaire etdans l’organisme des animaux consommés parles humains. Les POP affaiblissent le systèmeimmunitaire, perturbent les systèmes hormonauxet peuvent provoquer des cancers et autresmaladies. On s’est aperçu que les Inuitspossédaient des niveaux de POP dix à vingt foisplus élevés que ceux des populations desrégions plus tempérées. Face à cette menacecroissante pour la santé de leur communauté,les Inuits ont joué un rôle important dansl’élaboration de la Convention de Stockholm.Ce traité international facilité par le PNUEprévoit l’élimination progressive des douze POPles plus dangereux.

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