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534 Lettres à la rédaction / Revue du rhumatisme 80 (2013) 527–538 Fig. 2. Fusion des images du scanner et des séquences pondérées T1 à l’aide d’un logiciel de post-traitement (General Electric ® ) montrant la projection de l’hypertrophie synoviale inflammatoire de C1-C2 (en vert) sur les lésions osseuses érosives. goutte tophacée érosive [9]. Enfin, les cristaux d’UMS diminuent l’activité des ostéoblastes [10]. En conclusion, chez les patients ayant une goutte tophacée qui présentent des douleurs rachidiennes ou des signes neurologiques, un scanner et une IRM devraient être effectués rapidement pour détecter une atteinte tophacée vertébrale symptomatique. Déclaration d’intérêts R.C. a donné des conférences pour Ipsen et collabore comme consultant pour Savient. Les autres auteurs ne déclarent pas de conflit d’intérêt. Références [1] Duprez TP, Malghem J, Vande Berg BC, et al. Gout in the cervical spine: MR pattern mimicking discovertebral infection. AJNR Am J Neuroradiol 1996;17:151–3. [2] Clerc D, Marfeuille M, Labous E, et al. Spinal tophaceous gout. Clin Exp Rheu- matol 1998;16:621. [3] Konatalapalli RM, Demarco PJ, Jelinek JS, et al. Gout in the axial skeleton. J Rheumatol 2009;36:609–13. [4] Konatalapalli RM, Lumezanu E, Jelinek JS, et al. Correlates of axial gout: a cross- sectional study. J Rheumatol 2012;39:1445–9. [5] Fraser JF, Anand VK, Schwartz TH. Endoscopic biopsy sampling of tophaceous gout of the odontoid process. Case report and review of the literature. J Neuro- surg Spine 2007;7:61–4. [6] Kersley GD, Mandel L, Jeffrey MR. Gout: an unusual case with softening and subluxation of the first cervical vertebra and splenomegaly. Ann Rheum Dis 1950;9:282–304. [7] Tran A, Prentice D, Chan M. Tophaceous gout of the odontoid process cau- sing glossopharyngeal, vagus, and hypoglossal nerve palsies. Int J Rheum Dis 2011;14:105–8. [8] Nguyen C, Ea HK, Palazzo E, et al. Tophaceous gout: an unusual cause of multiple fractures. Scand J Rheumatol 2010;39:93–6. [9] Dalbeth N, Smith T, Nicolson B, et al. Enhanced osteoclastogenesis in patients with tophaceous gout: urate crystals promote osteoclast develop- ment through interactions with stromal cells. Arthritis Rheum 2008;58: 1854–65. [10] Chhana A, Callon KE, Pool B, et al. Monosodium urate monohydrate crystals inhibit osteoblast viability and function: implications for development of bone erosion in gout. Ann Rheum Dis 2011;70:1684–91. Audrey de Parisot a Aicha Ltaief-Boudrigua b Axel-Patrice Villani c Cédric Barrey d Roland D. Chapurlat a Cyrille B. Confavreux a,a Inserm UMR1033, service de rhumatologie, hôpital Édouard-Herriot, pavillon F, 5, place d’Arsonval, 69003 Lyon, France b Service de radiologie, hospices civils de Lyon, 69003 Lyon, France c Service de dermatologie, hospices civils de Lyon, 69003 Bron, France d Service de neurochirurgie et chirurgie du rachis, université Claude-Bernard Lyon 1, hospices civils de Lyon, 69800 Bron, France Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (C.B. Confavreux) Accepté le 18 f ´ evrier 2013 Disponible sur Internet le 31 mai 2013 http://dx.doi.org/10.1016/j.rhum.2013.04.002 Une mutation dans le gène NOTCH2 chez un patient chinois por- teur d’un syndrome de Hadju-Cheney info article Mots clés : Syndrome de Hadju-Cheney Mutation NOTCH2 Acro-ostéolyse Le syndrome de Hadju-Cheney (SHC ; MIM 102500) est une maladie osseuse autosomique rare, dominante, caractérisée par une acro-ostéolyse, une ostéoporose diffuse et un défaut d’ossification du crâne associé à une maladie parodontale. Le SHC fut décrit à l’origine par Hadju et al. [1] et ensuite par Cheney [2]. Récemment, quatre études indépendantes ont rapporté des muta- tions sur le même gène NOTCH2 (MIM 600275), chez des patients porteurs du SHC [3–6]. À ce jour, 23 mutations ont été identifiées, 11 d’entre elles sont des mutations faux sens/non sens (Tableau 1). 1. Observation Il s’agit d’une femme née en 1951. Elle avait des caractères sexuels secondaires normaux, sans antécédent de grossesse. À l’âge de 12 ans, ses doigts et orteils devinrent plus courts et plus larges. Comme elle n’avait pas de douleur, elle ne consulta pas de médecin à l’époque. Depuis une fracture tassement du rachis lombaire sur- venue en 2007, elle avait des lombalgies sévères et des difficultés à marcher. Elle vint dans notre service en décembre 2008. Elle avait une petite taille de 1 m 52, des sourcils broussailleux et sa chevelure était noire et grossière. Elle avait un visage plat, de grandes oreilles et une petite mâchoire inférieure (Fig. 1a). Ses doigts et ses orteils étaient courts et larges (Fig. 1b). Son audition était normale. À l’examen superficiel, les dents paraissaient nor- males. Son intelligence était normale mais sa mémoire se dégradait Ne pas utiliser, pour citation, la référence franc ¸ aise de cet article, mais la réfé- rence anglaise de Joint Bone Spine avec le DOI ci-dessus.

Une mutation dans le gène NOTCH2 chez un patient chinois porteur d’un syndrome de Hadju-Cheney

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534 Lettres à la rédaction / Revue du rhu

Fig. 2. Fusion des images du scanner et des séquences pondérées T1 à l’aided’un logiciel de post-traitement (General Electric®) montrant la projection del’hypertrophie synoviale inflammatoire de C1-C2 (en vert) sur les lésions osseusesé

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doigts et ses orteils étaient courts et larges (Fig. 1b). Son auditionétait normale. À l’examen superficiel, les dents paraissaient nor-males. Son intelligence était normale mais sa mémoire se dégradait

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outte tophacée érosive [9]. Enfin, les cristaux d’UMS diminuent’activité des ostéoblastes [10].

En conclusion, chez les patients ayant une goutte tophacée quirésentent des douleurs rachidiennes ou des signes neurologiques,n scanner et une IRM devraient être effectués rapidement pourétecter une atteinte tophacée vertébrale symptomatique.

éclaration d’intérêts

R.C. a donné des conférences pour Ipsen et collabore commeonsultant pour Savient. Les autres auteurs ne déclarent pas deonflit d’intérêt.

éférences

[1] Duprez TP, Malghem J, Vande Berg BC, et al. Gout in the cervical spine:MR pattern mimicking discovertebral infection. AJNR Am J Neuroradiol1996;17:151–3.

[2] Clerc D, Marfeuille M, Labous E, et al. Spinal tophaceous gout. Clin Exp Rheu-matol 1998;16:621.

[3] Konatalapalli RM, Demarco PJ, Jelinek JS, et al. Gout in the axial skeleton. JRheumatol 2009;36:609–13.

[4] Konatalapalli RM, Lumezanu E, Jelinek JS, et al. Correlates of axial gout: a cross-sectional study. J Rheumatol 2012;39:1445–9.

[5] Fraser JF, Anand VK, Schwartz TH. Endoscopic biopsy sampling of tophaceousgout of the odontoid process. Case report and review of the literature. J Neuro-surg Spine 2007;7:61–4.

[6] Kersley GD, Mandel L, Jeffrey MR. Gout: an unusual case with softening andsubluxation of the first cervical vertebra and splenomegaly. Ann Rheum Dis1950;9:282–304.

[7] Tran A, Prentice D, Chan M. Tophaceous gout of the odontoid process cau-sing glossopharyngeal, vagus, and hypoglossal nerve palsies. Int J Rheum Dis2011;14:105–8.

[8] Nguyen C, Ea HK, Palazzo E, et al. Tophaceous gout: an unusual cause of multiplefractures. Scand J Rheumatol 2010;39:93–6.

[9] Dalbeth N, Smith T, Nicolson B, et al. Enhanced osteoclastogenesis inpatients with tophaceous gout: urate crystals promote osteoclast develop-ment through interactions with stromal cells. Arthritis Rheum 2008;58:

1854–65.

10] Chhana A, Callon KE, Pool B, et al. Monosodium urate monohydrate crystalsinhibit osteoblast viability and function: implications for development of boneerosion in gout. Ann Rheum Dis 2011;70:1684–91.

matisme 80 (2013) 527–538

Audrey de Parisot a

Aicha Ltaief-Boudrigua b

Axel-Patrice Villani c

Cédric Barrey d

Roland D. Chapurlat a

Cyrille B. Confavreux a,∗a Inserm UMR1033, service de rhumatologie, hôpital

Édouard-Herriot, pavillon F, 5, place d’Arsonval,69003 Lyon, France

b Service de radiologie, hospices civils de Lyon, 69003Lyon, France

c Service de dermatologie, hospices civils de Lyon,69003 Bron, France

d Service de neurochirurgie et chirurgie du rachis,université Claude-Bernard Lyon 1, hospices civils de

Lyon, 69800 Bron, France

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected]

(C.B. Confavreux)

Accepté le 18 fevrier 2013

Disponible sur Internet le 31 mai 2013http://dx.doi.org/10.1016/j.rhum.2013.04.002

Une mutation dans le gène NOTCH2 chez un patient chinois por-teur d’un syndrome de Hadju-Cheney�

i n f o a r t i c l e

Mots clés :Syndrome de Hadju-CheneyMutation NOTCH2Acro-ostéolyse

Le syndrome de Hadju-Cheney (SHC ; MIM 102500) estune maladie osseuse autosomique rare, dominante, caractériséepar une acro-ostéolyse, une ostéoporose diffuse et un défautd’ossification du crâne associé à une maladie parodontale. Le SHCfut décrit à l’origine par Hadju et al. [1] et ensuite par Cheney [2].Récemment, quatre études indépendantes ont rapporté des muta-tions sur le même gène NOTCH2 (MIM 600275), chez des patientsporteurs du SHC [3–6]. À ce jour, 23 mutations ont été identifiées,11 d’entre elles sont des mutations faux sens/non sens (Tableau 1).

1. Observation

Il s’agit d’une femme née en 1951. Elle avait des caractèressexuels secondaires normaux, sans antécédent de grossesse. À l’âgede 12 ans, ses doigts et orteils devinrent plus courts et plus larges.Comme elle n’avait pas de douleur, elle ne consulta pas de médecinà l’époque. Depuis une fracture tassement du rachis lombaire sur-venue en 2007, elle avait des lombalgies sévères et des difficultés àmarcher. Elle vint dans notre service en décembre 2008.

Elle avait une petite taille de 1 m 52, des sourcils broussailleuxet sa chevelure était noire et grossière. Elle avait un visage plat,de grandes oreilles et une petite mâchoire inférieure (Fig. 1a). Ses

� Ne pas utiliser, pour citation, la référence francaise de cet article, mais la réfé-rence anglaise de Joint Bone Spine avec le DOI ci-dessus.

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Lettres à la rédaction / Revue du rhumatisme 80 (2013) 527–538 535

Tableau 1Mutations du NOTCH2 chez des individus porteurs du syndrome de Hadju-Cheney [3–5].

Pédigrée Affecté Mutation du nucléotide Alteration de protéine Exon Hérédité

Simpson et al., 2011 [4] 1-1 3 c.6272delT p.Phe2091SerfsX4 34 Transmise1-2 1 c.7249-7250delCC p.Pro2417IlefsX6 34 De novo1-3 1 c.7198C>T p.Arg2400X 34 De novo1-4 1 c.6387delT p.Ser2129ArgfsX7 34 De novo1-5 2 c.6208-6209delAGinsTCAACAC p.Pro2071ThrfsX8 34 Transmise1-6 1 c.6418C>T p.Gln2140X 34 De novo1-7 1 c.6424-6427delTCTG p.Ser2142ArgfsX4 34 De novo1-8 3 c.6460delT p.Val2151 LeufsX4 34 Transmise1-9 3 c.6622C>T p.Gln2208X 34 Transmise1-10 1 c.6450delT p.Pro2149Profs5X 34 De novo1-11 1 c.6986G>T p.Glu2298X 34 N/A1-12 1 c.6973C>T p.Gln2324X 34 De novo1-13 1 c.6449-6450delCT p.Pro2149ArgfsX 34 De novo1-14 2 c.6622C>T p.Gln2208X 34 Transmise

Isidor et al., 2011 [3] 2-1 1 c.6427 6428insT p.Glu2143X 342-2 1 c.6853C>T p.Gln2285X 342-3 1 c.6449 6450delCT p.Pro2150ArgfsX2 342-4 4 c.7119T>G p.Tyr2373X 342-5 2 c.6949C>T p.Gln2317X 34

Majewski et al., 2011 [5] 3-1 1 c.7078C>T p.Gln2360X 343-2 1 c.6655 6840delinsG p.Pro2219Glyfsa10 343-3 5 c.6622C>T p.Gln2208X 343-4 1 c.6457delT p.Ser2153ProfsX2 343-5 4 c.6622C>T p.Gln2208X 343-6 1 c.6403 6404delCT p.Leu2135Glufsa2 34

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ce jour, 23 mutations pertinentes ont été identifiées et 11 d’entre elles sont des m

rogressivement depuis cinq ans. Les radiographies montraient unestéoporose des mains, une acro-ostéolyse et un gonflement desarties molles de l’extrémité proximale des phalanges distales desoigts (Fig. 1c) et des orteils. Il existait une ostéoporose du rachisvec des fractures tassements de T4, T5, T7, T11 et L1. Nous avonsiagnostiqué un SHC en nous basant sur les signes cliniques, lesadiographies et une densité minérale osseuse basse. Le cas fut rap-orté dans un journal chinois en 2010 sans analyse de mutation [7].uis, en 2011, nous avons reconnu que la patiente avait une varianteétérozygote non sens sur l’exon 34 du gène NOTCH2, p.Gln2208 Xtop codon allèle c.6622C>T.

. Discussion

Les signes cliniques du SHC comportent une petite stature, desoigts courts avec un pseudo-hippocratisme digital, une cyphose,ne hyper-laxité ligamentaire, une surdité de transmission et desroubles de la parole. La dysmorphie faciale typique du SHC estaractérisée par des bosses frontales, un nez épaté avec des narinesilatées, un menton fuyant, des sourcils broussailleux, une cheve-

ure épaisse et grossière, une implantation basse des oreilles avec

e grands lobules. Seuls quatre cas chinois ont été rapportés dans la

ittérature médicale chinoise de 1984 à 2010 [7–10]. Notre patientvait la plupart de ces caractéristiques et signes cliniques (Fig. 1).otre patient est la première patiente d’origine asiatique porteuse

ig. 1. Caractéristiques physiques : sa chevelure était noire et grossière et elle avaites traits de visage d’une personne âgée, un nez épaté, des sourcils broussailleux, unisage plat, de grandes oreilles et une petite mâchoire (a) ; les doigts étaient courts etarges (b). Signes radiographiques : ostéoporose des mains, ostéolyse et gonflementses parties molles de la partie proximale des phalanges distales de la main (c).

p.Gln2223a 34

ns faux sens/non sens.

d’un SHC ayant une mutation génétique rapportée. Trois études ontidentifié des mutations tronquantes dans le gène NOTCH2 parmiles SHC (Tableau 1) [3–5]. La mutation (p.Gln2208 X) que portaitnotre patiente fut identifiée initialement chez quatre patients dedeux familles non apparentées [4] et fut par la suite identifiée dansdeux familles dans la recherche de Majewski [5]. Ainsi, cette muta-tion Gln2208X est la plus fréquente des mutations identifiées etil s’agit d’un point chaud de mutation. Nos résultats reproduisentceux d’études récentes publiées du SHC et apportent une preuvesupplémentaire que le NOTCH2 est le gène causal de cette maladie.

Cette étude a été financée par la Fondation Nationale de ScienceNaturelle de Chine (NSFC) (N◦81200646,81070692, 81170803 et81270946) STCSM10DZ1950100 ; le Fonds de développement deScience et Technologie de Shanghai (projet N◦ 06411963100 et11ZR 1427300) ; et le Programme Étoile Montante de Shanghai,le Plan d’Excellence pour les dirigeants universitaires et le PlanShanghai pour les Meilleurs Talents.

Déclaration d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en rela-tion avec cet article.

Références

[1] Hajdu N, Kauntze R. Cranio-skeletal dysplasia. Br J Radiol 1948;21:42–8.[2] Cheney WD. Acro-osteolysis. Am J Roentgenol Radium Ther Nucl Med

1965;94:595–607.[3] Isidor B, Lindenbaum P, Pichon O, et al. Truncating mutations in the last

exon of NOTCH2 cause a rare skeletal disorder with osteoporosis. Nat Genet2011;43:306–8.

[4] Simpson MA, Irving MD, Asilmaz E, et al. Mutations in NOTCH2 cause Hajdu-Cheney syndrome, a disorder of severe and progressive bone loss. Nat Genet2011;43:303–5.

[5] Majewski J, Schwartzentruber JA, Caqueret A, et al. Mutations in NOTCH2 infamilies with Hajdu-Cheney syndrome. Hum Mutat 2011;10:1114–7.

[6] Ioannis PS, George T, Kalliopi LA, et al. Severe osteoporosis and mutationin NOTCH2 gene in a woman with Hajdu–Cheney syndrome. Bone 2012,http://dx.doi.org/10.1016/j.bone.2012.10.027, pii: S8756-3282(12)01335-X.

[7] Gu JM, Zhang ZL. A case of Hajdu-Cheney syndrome and review of the literature.Chin J Intern Med 2010;12:1055–7.