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Université Cheikh Anta Diop de Dakar Faculté des Lettres et des Sciences Humaines
MEMOIRE DE TROISIEME CYCLE EN Aménagement du territoire développement local et décentralisation
THEME : « la fiscalité locale sénégalaise : est-ce un outil de
promotion du développement local : cas de la ville de Rufisque»
Présenté par : Mouhamadou Moustapha CISSE
Encadreur : Pr Amadou DIOP
Année Académique : 2010 – 2011
2
Table des matières
Introduction générale : ........................... ...................................................................4
Chapitre 1 : cadre théorique et présentation du cadre de l’étude ................................................. 7
I. Problématique ..................................................................................................................... 7
II. Objet de la recherche .......................................................................................................... 8
III. Intérêt et pertinence du sujet ......................................................................................... 9
IV. Méthodologie .................................................................................................................. 9
1. L’analyse des concepts ...................................................................................................... 10
2. Les entretiens .................................................................................................................... 14
Chapitre 2 : présentation de la ville de Rufisque .............................................................................. 15
I. Historique .............................................................................................................................. 15
II. Situation géographique ......................................................................................................... 15
III. Présentation cadre humain, socio-économique et administratif ..................................... 16
Administration .............................................................................................................................. 16
Chapitre 1 : les ressources financières des collectivités locales ................................................... 20
I. Les ressources endogènes des collectivités locales .......................................................... 20
II. Les ressources exogènes des collectivités locales ............................................................. 22
Chapitre 2 : Analyse de la gestion financière de la ville de Rufisque .......................................... 24
I. Diagnostic des recettes de fonctionnement ..................................................................... 24
II. Diagnostic sur les recettes d’investissement .................................................................... 29
III. Diagnostic des dépenses de fonctionnement ............................................................... 30
IV. Diagnostic des dépenses d’investissement ................................................................... 32
Chapitre 2 : Problématique de la mobilisation des ressources locales dans la ville Rufisquoise .. 34
I. Les difficultés liées à la mobilisation des recettes de fonctionnement ............................ 34
1. La détermination de l’assiette un véritable casse-tête ................................................. 34
2. Les obstacles par rapport au recouvrement des recettes fiscales ................................ 36
3. Le problème lié aux ressources humaines ................................................................... 37
3
4. L’incivisme fiscal ............................................................................................................ 37
II. Les difficultés au niveau des recettes d’investissement ................................................... 38
1. Problématique des ressources exogènes ...................................................................... 38
2. Problématique de l’emprunt ......................................................................................... 38
III. La fiscalité locale favorise t- elle le développement économique local ? .................... 39
IV. Perspectives pour une dynamisation de la mobilisation des recettes locales en vue de
promouvoir le développement local ...................................................................................... 41
Conclusion : ...................................... ....................................................................... 44
Bibliographie : ................................... ...................................................................... 44
4
Introduction générale :
En Afrique la crise économique s’est accentuée au fur et à mesure que les politiques
de développement ont été mises en œuvre (nationalisation, désengagement de
l’Etat, privatisation, ajustement structurel, etc.) au point que la lutte contre la pauvreté
est devenue un objectif pour les Etats, qui il y a quarante (40) ans se disaient en voie
de développement. Il urgeait alors de comprendre et d’agir sur les raisons de cette
interminable descente aux enfers, tant ses implications sont à la fois
multidimensionnelles et désastreuses. Pour l’Etat ce combat économique pour
l’amélioration des conditions de vie de ses populations était donc une condition sine
qua non dans cette quête de légitimité. La encore, s’est opéré une redécouverte du
territoire local. Aujourd’hui, le consensus est fait sur la fonction économique du local
à la fois comme échelle pertinente de planification du développement et comme
cadre de mobilisation et de gestion des ressources et de la productivité. C’est
probablement pourquoi le législateur sénégalais a attribué aux entités infra-étatiques
décentralisées au terme de l’article 3 du code des collectivités locales, la mission de
concevoir, de programmer et de mettre en œuvre des actions de développement
économique, éducatif social et culturel d’intérêt local. Cette disposition est renforcée
par les articles 25, 88 et 196 du même code relativement aux trois ordres de
collectivités locales que sont la région, la commune et la communauté rurale dans
le développement local. C’est aussi certainement la raison pour laquelle le
gouvernement dans sa stratégie de réduction substantielle de la pauvreté compte
fondamentalement sur les CL pour la création de richesses et pour relever la quantité
et la qualité de l’offre de services et d’équipements sur l’ensemble des territoires
locaux. Ainsi, au titre de l’article 7 du CCL les collectivités locales disposent de
budgets et de ressources propres à travers les finances publiques locales. Pour faire
face aux compétences qui leur ont été transférées, les CL doivent avoir une
autonomie financière avérée. Car l’autonomie financière des institutions locales et
leurs capacités d’autofinancement est un point clef pour garantir l’accès aux services
essentiels aux populations locales. Or, il est parfois difficile pour les collectivités
déconcentrées de dégager des marges de manœuvre, de garantir le
remboursement d’un emprunt ou encore moins d’en solliciter. Les impôts locaux
sont dans ce cadre, au-delà des redistributions étatiques ou des aides
internationales dans le cadre de la coopération décentralisée, un pilier important de
5
l’échafaudage financier de ces institutions. Cependant, dans bien des cas, les
collectivités qui ont le plus besoin de ces ressources sont aussi celles qui ont le plus
de mal à récolter des impôts, particulièrement au niveau local, et à développer une
culture du contribuable. L’accès de la population aux infrastructures de base est
dans ce sens lié à la capacité des institutions locales à générer des revenus fiscaux
mais l’importance de l’évasion fiscale met un frein aux possibilités de développement
urbain et rural. Par conséquent, on ne saurait dans un tel contexte prétendre
apporter des réponses par rapport aux exigences du développement local dans son
sens le plus général intégrant l’aspect qui nous semble le plus important « la
création de richesse ». Or, la création richesse nécessite à la fois l’instauration d’un
système fiscal crédible et une bonne orientation des politiques publiques locales
dans le sens de la création d’emplois, de la mise en place d’un environnement
propice à l’investissement. Pour répondre à ces impératives importantes à tout
point de vue, la fiscalité locale doit en jouer un rôle primordial.
Cette étude sur la fiscalité locale portera sur la ville de Rufisque. Toutefois, le choix
de la commune de Rufisque est une démarche qui nous investie dans un cadre
pratique dévoilant toute une réalité au sein d’une collectivité décentralisée.
Nous allons dans une première partie à travers une analyse conceptuelle parler du
cadre théorique avant de passer à la présentation du cadre de l’étude (ville de
Rufisque).
Dans une deuxième partie nous tenterons d’étudier les ressources financières des
collectivités locales, il s’agira de faire une analyse de la gestion financière de la ville
avant de terminer par voir le lien entre la fiscalité locale et le développement local.
6
7
Chapitre 1 : cadre théorique et présentation du cadre de l’étude
I. Problématique
La politique de décentralisation que l’Etat du Sénégal a amorcé depuis les années 60
a connu sa maturation en 1996. Ainsi, le vote des textes de loi de la décentralisation
en 1996 est intervenu dans un contexte de généralisation de la pauvreté aussi bien
dans les villes qu’en milieu rural. L’Etat ayant compris que la monopolisation du
pouvoir ainsi que la gouvernance basée sur le centralisme et les attitudes jacobines
ne favorisaient guère la satisfaction des besoins des populations et à l’amélioration
de leur condition de vie.
En effet, pour mettre fin à cette situation accrue de paupérisation que l’Etat a décidé
de déléguer certaines de ses prérogatives aux collectivités locales pour assurer une
bonne gestion du développement. Par conséquent, les collectivités locales
deviennent des entités territoriales de base au niveau desquelles s’effectuent
l’orientation, la planification et l’exécution du développement. Elles deviennent dès
lors des personnes morales de droit public dotées d’une autonomie financière. C’est
ainsi que le code des collectivités locales postule que le transfert de compétences
est concomitant au transfert de ressources. Pour fonctionner les Collectivités
Locales disposent de moyens humains et matériels qui leur sont propres ou qui
émanent des services déconcentrés.
Elles disposent également des moyens financiers : le budget qui est l’aboutissement
d’un plan et d’un programme. Si aujourd’hui les collectivités locales ont la charge de
la mise en œuvre des politiques publiques locales, il leur faudrait un niveau de
ressources adapté aux compétences qu’elles ont en charge. En effet, nous
assistons aujourd’hui à une crise généralisée des finances publiques locales. Aucune
collectivité locale n’a une capacité financière satisfaisante lui permettant de répondre
aux aspirations des populations locales encore moins d’impulser le développement
local. Elles sont toujours dans une posture attentiste vis-à-vis de l’Etat par
l’attribution de subsides insignifiants à titre de fonds de dotation pour la
décentralisation (FDD) ou des fonds d’équipement des collectivités locales (FECL).
Cette crise des finances publiques locales découle :
8
� d’un faible taux de recouvrement des ressources financières des collectivités
locales ;
� de la méconnaissance de leur potentiel fiscal ;
� de la faiblesse des services publics locaux ;
� d’une absence de programme en matière de politique de recouvrement ;
� d’une mauvaise définition de l’assiette fiscale entre autres.
A cela s’ajoute l’incivisme fiscal qui constitue en plus une entrave à la fiscalité locale
dont la mal gouvernance peut être à l’origine. Il est avéré que le budget des
collectivités locales est dérisoire car les recettes permettent de couvrir justement le
fonctionnement. Ce qui nous amène à dire que l’investissement est dérisoire voire
nul. Pire les CL comme le leur confère la loi, peuvent s’ouvrir aux marchés
financiers, nationaux comme internationaux, pour financer leurs investissements.
Mais, les conventions d’un montant supérieur à 100 millions de francs, souscrites par
les collectivités locales, sont soumises à approbation préalable du représentant de
l’Etat, conformément aux dispositions du Code des Collectivités locales en son article
336 et du décret n° 96-1119 du 27 décembre 1996. Ce qui constitue un véritable
casse-tête pour les CL à solliciter des fonds à titre d’emprunt auprès des bailleurs.
Ces difficultés d’ordre technique, institutionnel et financier que traversent les
collectivités territoriales demeurent une réelle menace pour assurer une bonne
gestion et constituent un frein pour la mise en œuvre opérationnelle des processus
de développement local ainsi que la satisfaction optimale des besoins vitaux des
populations. C’est en cela qu’un appui structurant sur la fiscalité locale doit être mené
en faveur des collectivités locales. Le renforcement institutionnel des collectivités sur
la maîtrise de la fiscalité locale serait d’une nécessité impérieuse attendu que le
développement local ne sera jamais ce qu’il doit être si des faiblesses protéiformes
se font jour dans le processus de mobilisation des ressources endogènes,
notamment celles fiscales.
II. Objet de la recherche
L’objet de la recherche est de voir avec toutes les difficultés énumérées plus haut
que confrontent les collectivités locales en général et la ville de Rufisque en
particulier si le système fiscal tel qu’il est établi répond aux exigences de la
promotion du développement local. Il sera objet dans cette étude de voir si le
système fiscal à travers la fiscalité principale (l’IMF, la TRIMF et l’impôt foncier)
9
demeure la catégorie de ressources sur laquelle la ville devra compter si l’on sait
que l’IMF est du au lieu de résidence habituelle et le niveau de recouvrement de cet
impôt va dépendre de la capacité contributive des populations assujetties à cet
impôt, alors s’agissant de la TRIMF elle est retenue à la source, les salariés sont
réputés domiciliés au lieu de l’établissement qui les emploie et les bénéficiaires de
pension et rente viagère au lieu du domicile ou de l’établissement du débiteur. Ce qui
semble dire que les collectivités qui abritent plus d’entreprises recevront plus de
recettes au détriment de celles dont l’activité économique est au ralenti ou
l’implantation d’entreprises est moins fréquente.
III. Intérêt et pertinence du sujet
Le thème est d’une importance capitale car permettant de faire une sorte de
diagnostic des finances locales de la ville de Rufisque à l’issue duquel des
propositions seront faites pour que la commune puisse avoir une base de données
de son potentiel fiscal et une autonomie financière lui permettant d’impulser le
développement local qui est une compétence générale. Les compétences
générales découlent de l’article 3 du code des collectivités locales qui stipule que : «
les Collectivités Locales ont pour mission la conception, la programmation et la mise
en œuvre des actions de développement économique, social, culturel, éducatif
d’intérêt régional, communal ou rural ».
Dans cette même lancé nous proposerons à la municipalité des outils, des procédés
techniques pour une mobilisation optimale de ses ressources fiscales à travers des
propositions opératoires détaillées et réalistes.
IV. Méthodologie
Il nous semble très important de préciser le caractère théorique que notre thème
recouvre. Toutefois, pour palier à cela nous nous efforcerons de trouver le maximum
d’informations sur la fiscalité locale de la commune en faisant les interprétations
nécessaires. Ce qui nous permettra justement d’étayer nos analyses. Sur cette base
l’analyse s’effectuera en grande partie à travers les comptes administratifs qui
retracent le budget (prévisions, recouvrements, les investissements....) sur la
période allant de 2008 à 2010.
10
Il sera question dans cette étude de s’appuyer sur la recherche documentaire et des
entretiens avec des personnes ressources qui sont au cœur des finances locales et
des conseillers municipaux de la commune de Rufisque ,des services des impôts et
domaines.
1. L’analyse des concepts
o La fiscalité :
Le terme fiscalité désigne le système d’après lequel les impôts sont perçus. Il vient
du mot fisc qui à son tour dérive du mot latin fiscus. Ce mot désignait le panier
destiné à recevoir l’argent. Le fisc désigne aujourd’hui l’ensemble des administrations
chargées de fixer l’assiette, le taux, de répartir les impôts et de les percevoir. De
façon extensive, il désigne l’Etat titulaire du droit de puissance publique, le pouvoir
de contrainte sur le contribuable.
Le vocable fiscal se dit d’une chose relative aux impôts. Le système fiscal est
l’ensemble des lois, des mesures relatives au fisc, à l’impôt ; il est synonyme de droit
fiscal qui est la branche du droit public relative à l’assiette (ce qui est imposable), à la
liquidation et au recouvrement des impôts et taxes de toute nature.
Le droit fiscal est aussi considéré comme la branche des finances publiques qui régit
cette activité particulière de l’Etat consistant à procurer aux collectivités publiques
dont lui-même des ressources financières définitives grâce à un prélèvement
autoritaire et sans contrepartie.
Le Droit fiscal local pose plusieurs problèmes, tous délicats.
D’abord, un problème d’autonomie ; ainsi, certaines questions méritent d’être
posées : la fiscalité locale doit-elle être indépendante de celle de l’Etat ? avec la
politique de décentralisation qui voudrait que le développement se fait à la base à
travers la responsabilisation des CL. Les CL doivent-elles se satisfaire de la liberté
d’affecter et d’utiliser leurs ressources fiscales ou doit-on leur accorder la liberté de
les créer elles-mêmes ; bref, doit-elle disposer d’un pouvoir fiscal local ? le constat
c’est que le système fiscal tel qu’il est établi ne semble pas donner aux CL une
autonomie dans leur gestion et encore moins impulser le développement local. Et la
logique voudrait qu’elles aient la liberté de créer leurs propres ressources fiscales si
l’on sait que chaque collectivité a ses spécificités, ses potentialités qu’elle peut
exploiter pour en tirer profit. Pour appuyer notre argumentaire nous donnons un
11
exemple banal notamment sur la TRIM et l’IMF. En effet, L’IMF est du au lieu de
résidence habituelle et le niveau de recouvrement de cet impôt va dépendre de la
capacité contributive des populations assujetties à cet impôt, alors s’agissant de la
TRIMF elle est retenue à la source, les salariés sont réputés domiciliés au lieu de
l’établissement qui les emploie et les bénéficiaires de pension et rente viagère au lieu
du domicile ou de l’établissement du débiteur. Ce qui semble dire que les collectivités
qui abritent plus d’entreprises recevront plus de recettes au détriment de celles dont
l’activité économique est au ralenti ou l’implantation d’entreprises est moins
fréquente. Cela constitue dans une certaine mesure une source de disparité entre
collectivités, qui est reprochable à une défaillance du système fiscal.
o La décentralisation
La décentralisation est une notion complexe, c’est un mode d’organisation qui
instaure une délégation d’autorité d’un niveau central vers un niveau décentralisé.
C’est un concept qui peut se transposer sur toutes structures où des décisions se
prennent et s’appliquent : l’Etat, les collectivités ou encore l’entreprise.
La décentralisation au Sénégal bien qu’elle soit un modèle en Afrique de l’ouest est
un processus ancien hérité de la colonisation et donc fortement empreint par le
système français.
L’essence des politiques de décentralisation est de consacrer les CL comme des
acteurs véritables de l’animation et de la conduite du développement des territoires
locaux.
Dans les années 90, pendant que nombre d’Etats africains proclamaient leur option
nouvelle pour la décentralisation dans leur organisation administrative, le Sénégal
décidait d’approfondir un processus initié depuis le XIXème siècle à travers une
reforme qualifiée alors de « révolution silencieuse ». C’est dire que dans cette
décennie les Etats post-coloniaux, dans un même élan, mais avec des parcours et
des schémas différents, faisaient de la décentralisation et du développement local
une politique stratégique forte.
Subséquemment, ils consacraient ou renforçaient des collectivités locales plus ou
moins autonomes, et leur confiaient des missions à prendre en charge sur leur
territoire. C’est pourquoi la réflexion sur la fiscalité locale demeure incontournable à
tout point de vue afin que les CL puissent mener à bien les missions qui leurs sont
12
assignées en se dotant de ressources financières conséquentes à travers la fiscalité
locale.
La décentralisation apparait de nos jours comme un paradigme, une refonte
démocratique visant entre autres objectifs, une démocratie locale plus poussée avec
l’émergence d’une bonne gouvernance et une gestion autonome à l’égard des
collectivités locales. La décentralisation procède à la revalorisation des acteurs à la
base et réinvente la problématique de l’approche participative que les promoteurs du
développement conçoivent comme étant « un mode d’intervention nouveau
répondant aux préoccupations réelles des populations et capable de promouvoir le
développement local ».la politique de décentralisation bien qu’elle soie encrée dans
l’architecture administrative territoriale et politique du pays, Il apparait clair que sa
mise en œuvre se heurte à un faible niveau d’instruction des élus locaux, un faible
montant des ressources propres mobilisées, et à des fonds de concours de l’Etat
dérisoires. Des mesures ont été prises ces dernières années par l’Etat pour
accompagner la décentralisation, mais elles restent insuffisantes et la volonté
politique reste à confirmer. Toutefois, réussir le pari de la décentralisation est un
objectif vital pour notre pays engagé dans ce processus. Or, réussir la
décentralisation c’est d’abord, et avant tout mettre en place des collectivités locales
modernes et efficaces, des CL capables d’initier et de produire une action publique
locale légitime, précisément à travers le plein exercice des compétences qui leur ont
été confiées.
o Le développement local
Le développement local est devenu de nos jours un concept à la mode. Non pas
qu’il soit nouveau, au contraire, il recouvre des phénomènes identifiés depuis déjà
fort longtemps selon les analystes. En effet, bon nombre d’experts ont tenté de
donner une définition par rapport à ce concept qu’on a longtemps vécu sans qu’on
n’en fasse attention jusqu’à aujourd’hui où il est au centre des débats et des
rencontres internationales.
Le développement local peut être défini comme étant « un processus de
diversification et d’enrichissement des activités économiques et sociales sur un
territoire à partir de la mobilisation, de la coordination de ses ressources et de ses
énergies. Il sera donc le produit des efforts de sa population. Il mettra en cause
13
l’existence d’un projet de développement intégrant ses composantes économiques,
sociales et culturelles. Il sera un espace de contiguïté et un espace de solidarité. »1
Bon nombre d’auteurs ont tenté de définir ce concept « développement local » mais
il est admis que des idées partagées ont été émises sur le sujet. (Greffe 1984)
(Gouttebel, 2001) (Pecqueur, 1989) (Tremblay, 1994) (Vachon, 1993)
Ce qu’on peut retenir dans leur tentative de définition c’est qu’ils ont des points
communs qui peuvent être énumérés ci-dessous :
Il n’y a pas de modèle unique de développement local;
le développement local comporte une dimension territoriale;
le développement local s’appuie sur une force endogène;
le développement local fait appel à une volonté de concertation et la mise en
place de mécanismes de partenariat et de réseaux ;
il intègre des dimensions sociales aussi bien qu’économiques
l’approche du développement local implique aussi une stratégie participative
et une responsabilisation des citoyens envers la collectivité.
Il nous semble très important d’insister sur la dimension territoriale qui constitue un
aspect très important car l’espace local offre la possibilité d’inventer et de mettre en
application de nouveaux modes de gestion participative et légitime des affaires
publiques nécessaires tout simplement au développement. L’échelle locale est
également le niveau idéal pour d’une part la création de richesse endogène et
l’amélioration des conditions de vie des populations, et d’autre part la prévention et la
régulation des conflits inhérents à toutes les sociétés en mutation.
o La gouvernance locale
La notion de gouvernance recouvre de nombreuses significations, comme en
témoigne la diversité des termes auxquels elle se trouve associée : on parle de
gouvernance locale, urbaine, régionale, européenne.
De plus, la notion n’est pas l’apanage des scientifiques puisqu’elle est l’objet de
discours d’experts, mais aussi de discours politiques (la « bonne gouvernance »).
La gouvernance, c’est l’art d’une société d’inventer et de mettre en œuvre la manière
de se gérer, pour assurer cohésion et bien être en son sein, sécurité à l’extérieur et
équilibre entre elle et son environnement.2
1 Xavier Greffe
14
En effet, au travers de cette définition proposée par l’Alliance pour refonder la
gouvernance en Afrique on peut affirmer que le débat sur la Gouvernance locale
s’articule aujourd’hui sur les rapports entre les pouvoirs locaux et la société civile et
notamment la participation des citoyens à l’action publique, par l’intermédiaire de la
consultation ou de la concertation dans un contexte de profondes mutations et l’éveil
certain des populations.
Sous un autre vocable de la « gouvernance légitime » qui voudrait dire que nos pays
doivent collectivement concevoir et mettre en place une gouvernance dans laquelle
les différents acteurs se reconnaissent et qui répond à leurs aspirations. Elle postule
donc l’adhésion de tous à un système de gouvernance qui permet, par ailleurs, la
satisfaction des besoins matériels et immatériels des populations.
Cette vision novatrice propose une rupture avec la tendance actuelle des réflexions
et des pratiques relatives à la gestion des affaires publiques. Ainsi, la légitimité ne se
confond pas à la démocratie, et la vision de la gouvernance à construire dépasse la
simple question de l’Etat, de la légalité et des ressources. Elle appelle des valeurs
communes et un projet collectif spécifique qui permet la réalisation des aspirations
diverses de tous et de chacun.
En somme, il s’agit de construire « une gouvernance légitime qui est l’art de gérer
les affaires publiques en les articulant à toutes les échelles de territoire, et d’exercer
les pouvoirs au service du Bien Commun, avec l’adhésion et sous le contrôle de ceux
sur qui s’exercent ces pouvoirs »3.
2. Les entretiens
Dans le souci d’affiner notre analyse nous avons senti la nécessité d’aller rencontrer
des personnes ressources qui sont au cœur des finances locales de la commune de
Rufisque. Des conseillers municipaux ont été interviewés et leurs propos ont été pris
en compte dans l’analyse.
2« L’Alliance pour refonder la gouvernance en Afrique » est une organisation qui relie des acteurs africains et
non-africains engagés dans l’action et la réflexion, soucieux de promouvoir à la fois au niveau des citoyens
africains et du monde, un dialogue sur la gestion des affaires publiques en Afrique.
3 Falilou Mbacké Cissé
15
Chapitre 2 : présentation de la ville de Rufisque
I. Historique
L’histoire de la ville remonte au XVI éme siècle lorsque fut fondé le village de
pêcheurs nommé Teung-Guedj. De fait, en wolof, la ville porte le nom de Tëngéej.
Comptoir portugais, la localité devient Rufisco, mais l'étymologie de ce toponyme
reste controversée. Il pourrait s'agir de rio fresco (rivière fraîche), refresco (havre de
fraîcheur) ou encore de rio fusco (rivière noire). En juin 1880, comme Dakar, Gorée
et Saint-Louis, la ville est érigée en commune de plein exercice par la France, alors
que le Sénégal est une colonie française. Ses habitants ont alors la nationalité
française (statut des quatre communes).
II. Situation géographique
La ville de Rufisque se situe à 25 km au Sud-est de Dakar la capitale du Sénégal.
Cette localité constitue la porte Sud de Dakar le passage obligé pour entrer ou en
sortir coté sud. En effet, la presqu'île de Dakar abreuve la Petite-Côte via une ville
16
chargée d'histoire celle de Rufisque. La ville de Rufisque appartient à un grand
ensemble formé par la presqu'île du Cap-Vert. Cet espace étroit de 550km 2, limité à
l'Est par la «falaise de Thiès», à l'Ouest par l'océan atlantique, ne représente que
0,28% de la superficie totale du pays. Rufisque est une ville côtière qui se trouve
dans la baie de hann. Elle est le chef lieu du département le plus étendu de la région
de Dakar du fait de son arrière pays. Sa particularité est qu'elle est le seul
département à comprendre une zone urbaine et rurale.
Pour Halima Laaroubi4 , Rufisque est une ville côtière située au Sud--est de Dakar
dans une demi cuvette avec une dépression ondulée .Elle est dominée sur l'arrière
pays par un plateau calcaire et marno-calcaire dont l'altitude moyenne avoisine 35m.
Le Nord est couvert de sols « dior » de texture sableuse. A l'Est elle est ouverte sur
le plateau de Bargny et vers le Sud sur la mer avec une faible altitude (< à 5m
IGN).Ce qui entre autre explique l'avancé de la mer .Sa pente faible (6,29m par km)
favorise l'atterrissement. Rufisque a été érigée en commune de plein exercice depuis
le 12 juin 1880 avec à sa tète un maire et un conseil municipal élu au suffrage
universel.
III. Présentation cadre humain, socio-économique et administratif
Administration
Avec le nouveau découpage administratif intervenu récemment, le département de
Rufisque est composé des communes de Rufisque, Bargny, Sébikotane, Diamniadio
et Sangalkam nouvellement créée , et de quatre (4) communautés rurales : que sont
Bambilor, Tivaouane Peulh et Yenne.
Cadre humain
La commune de Rufisque s'étend sur 42 km² et compte environ 179 797 habitants
(recensement 2002) répartis dans 92 quartiers. La population tourne aujourd’hui
autour de 260 000 habitants. Elle est inégalement répartie dans l’espace. Les plus
fortes concentrations humaines se retrouvent dans le noyau central (Keury Souf,
Keury Kao), autour des quartiers centraux (Dangou) et dans certains quartiers non
4 Laaroubi, Halima. Etude hydrologique des bassins versants urbains de Rufisque. Thèse de doctorat de
troisième cycle. UCAD (2006-2007).
17
structurés qui concentrent la pauvreté et la population de provenance rurale (Gouye
Mouride).
Le département de Rufisque concentre 12,5% soit 284 263 habitants de la
population régionale en 2002, sur une superficie de 371,7km2 (ANSD, 2004).
On note aujourd’hui une croissance rapide de l’urbanisation à Rufisque. Avec une
extension vers Rufisque Est, Rufisque Nord. Ce phénomène peu être expliqué par
une croissance rapide de la population, par la cherté des loyers à Dakar, de l’exode
rural entre autres. Le changement de comportement à l’égard des chefs de ménages
qui au temps résidaient au sein des concessions (maisons familiales), désormais le
défi c’est d’avoir son propre toit.
En effet, l’urbanisation a démarré avec les lébous pêcheurs, ethnies dominantes
autour de la zone portuaire, et s’est propagée assez lentement vers l’Est et l’Ouest,
avant de se développer vers le Nord. Ainsi, aux lébous autochtones et majoritaires se
sont ajoutés d’autres ethnies venues du Nord (Halpularen…) ; du Sud (Diola,
Mandingue, Manjack…)
Cadre socioéconomique
L’histoire économique de la ville de Rufisque comporte trois (3) phases. La première
correspondait à l’époque coloniale avec son statut de commune de plein exercice ou
les habitants étaient considérés comme des citoyens français. Pendant cette période,
l’activité économique de la ville était très dynamique avec de nombreuses activités
développées et l’implantation des unités de transformation et de conservation
comme Petersen, Bata, Sonadis entre autres. En dépit, de la construction
d’infrastructures comme du port, de la gare routière qui polarisaient la plupart des
activités économiques. A l'origine, la fonction commerciale s'est très tôt intégrée
dans ses activités majeures et avait pris une dimension importante dans l'économie
de traite.
La deuxième phase coïncidait avec le transfert du port à Dakar et la politique de
démantèlement des usines. Durant cette période le cadre socio-économique se
caractérisait par l’absence d’activités économiques significatives et donc le
dépérissement du tissu industriel, la faiblesse des revenus, un chômage grandissant,
18
de la baisse du pouvoir d’achat et surtout une pauvreté urbaine. La commune était
même citée parmi les villes ou la circulation monétaire était très faible.
La dernière phase correspond au cycle dit reprise. Avec l’implantation de nouvelles
entreprises dans les sites qui abritaient les anciennes industries. L’activité
économique commence à prendre son dynamisme d’antan. L’existence des marchés
hebdomadaires et la floraison des cantines peuvent le justifier. En somme, la
fonction commerciale est toujours présente dans la ville et constitue la principale
activité à travers laquelle Rufisque est reconnue en tant que pôle commercial
exerçant son influence sur un vaste hinterland.
La fonction commerciale apparaît comme le principal élément, favorisant le
dynamisme de l'espace urbain et constituant le vecteur de développement de la ville.
19
20
Chapitre 1 : les ressources financières des collectivités locales
L’état a transféré des compétences dans 9 domaines aux collectivités locales. Pour
assurer ces compétences, les collectivités territoriales doivent avoir les ressources
nécessaires pour répondre correctement à leurs missions. C’est en cela que le code
des collectivités locales en son article 5 stipule que tout transfert de compétence à
une collectivité doit être accompagné du transfert concomitant par l'Etat à celle-ci,
des ressources et moyens nécessaires à l'exercice normal de cette compétence.
L’objet de ce chapitre est de faire un rappel pour voir les différentes catégories de
ressources que les CL sont susceptibles de bénéficier.
I. Les ressources endogènes des collectivités locales
Les ressources propres des CL peuvent être classées en quatre(4) catégories : les
impôts locaux, les taxes droits et redevances, les dotations de l’Etat et les recettes
temporelles ou accidentelles.
⇔ Les impôts locaux : ils sont constitués par les impôts personnels, les impôts
fonciers et les impôts professionnels.
- Les impôts personnels sont constitués par l’impôt du minimum fiscal (IMF) et
la taxe représentative de l’impôt du minimum fiscal (TRIMF).
IMF (art. 201 à 206 du Code Général des Impôts – CGI) est un impôt personnel local
communément appelé l’IMF 4 éme catégorie qui est du par toute personne résidant
au Sénégal âgée d’au moins 14 ans sans distinction de sexe et ne bénéficiant pas
de sources de revenu susceptible d’être imposée à la Taxe Représentative de l’Impôt
du Minimum Fiscal (TRIMF). Les personnes assujetties sont réparties en 4
catégories (voir annexe 1) et qui tiennent compte des facultés contributives
supposées des intéressés. Toutefois, il convient de préciser que les personnes
relevant de la 4ème catégorie et résidant en dehors du territoire communal ne sont
pas passibles de l’IMF mais plutôt de la taxe rurale. Le 5ème critère auquel elles sont
assujetties est le critère par défaut.
La taxe représentative de l'impôt du minimum fiscal (TRIMF art. 207 à 214 du CGI)
est due par toute personne physique résidant au Sénégal qui perçoit des traitements,
indemnités, pensions et rentes viagères et qui n'en est pas expressément exonérée.
Elle est retenue à la source par l’employeur et reversée au trésor public au profit des
21
collectivités décentralisées. Les personnes passibles à cette taxe peuvent être
rangées en 5 catégories et certaines personnes sont exemptées de la TRIMF.
Toutefois, il urge de préciser que pour leur assujettissement à la TRIMF les salariés
sont réputés domiciliés au lieu de l’établissement qui les emploie et les bénéficiaires
de pensions et rentes viagères au lieu de domicile ou de l’établissement du débiteur.
• Les impôts fonciers : ce sont des impôts qui frappent les immeubles,
qu’ils soient nus ou bâtis. Ils doivent être acquittés par toute personne
physique ou morale détentrice de droits réels sur une propriété bâtie ou
non, à des conditions et exceptions bien précisées dans le CGI. On en
distingue la contribution foncière des propriétés bâties (CFPB) et la
propriété foncière des propriétés non bâties (CFPNB).
La CFPB s’appuie sur les maisons, fabriques, usines, manufactures et en général
sur tout immeuble construit en maçonnerie, fer et bois et fixé au sol à perpétuelle
demeure. Par extension, elle est due sur les outillages des établissements attachée
aussi au sol à perpétuelle demeure ou reposant sur des fondations spéciales faisant
corps avec les meubles. Elle s’applique aussi aux installations commerciales ou
industrielles, aux terrains employés à usage commercial ou industriel, ainsi que les
chantiers, les lieux de dépôt de marchandises…
La CFPNB s’applique sur des terrains où sont édifiées des constructions non
adhérentes au sol. Elle s’applique aussi aux carrières, aux mines, aux salins… elle
est due par le propriétaire, le possesseur ou par le simple détenteur du sol à quelque
titre que ce soit. En cas d’usufruit ou de bail emphytéotique, l’impôt prévu par
l’usufruitier est dû. Notons qu’il y a une certaine catégorie qui est exonérée de la
CFPNB.
⇔ Les impôts professionnels : Ce sont des impôts et taxes frappant une
activité ils sont perçus au profit des CL. Elle est due par toute personne,
physique ou morale, exerçant une activité de commerce, une industrie ou une
profession libérale (art. 242 à 277 du CGI). La patente et la licence en sont
des exemples. est assujetti au droit de licence toute personne ou toute société
se livrant à la vente au gros ou à détail soit à consommer sur place, soit à
emporter des boissons alcoolisées ou fermentées.
⇔ Les droits taxes et redevances
22
Ils sont constitués par les taxes sur l’eau, les taxes sur l’électricité consommée,
taxes d’abattage, droits de fourrière et droits de place perçus dans les foires et
marchés.
⇔ Les recettes temporelles ou accidentelles
Il s’agit de dons et legs, fonds d’emprunt, fonds de concours, produits des ventes
d’animaux et matériel mis en fourrière.
II. Les ressources exogènes des collectivités locales
En dehors des ressources perçues par les collectivités locales à titre d’impôts locaux,
d’autres proviennent de l’Etat et des partenaires au développement comme les
bailleurs de fonds extérieurs ou secteur privé dans le cadre de la coopération
décentralisée. Il y a une certaine catégorie de ressources que l’Etat se partage avec
les collectivités décentralisées. Ces concours financiers de L’Etat sont de trois (3)
ordres : nous avons les fonds de dotations de la décentralisation avec trois
composantes : une dotation destinée au fonctionnement des régions, la
compensation au profit des collectivités locales, des charges de transfert de
compétences et l’appui financier (8% du Fonds de Dotation) destiné aux services
déconcentrés de l’Etat opérant en faveur des collectivités locales. Le Code des
Collectivités locales a prévu ce fonds pour permettre aux C.L de prendre en charge
les compétences qui leurs sont transférées, le fonctionnement des services de la
région et l’appui aux services déconcentrés de l’Etat. Ce fonds reçoit chaque année
une dotation équivalente à un pourcentage de la taxe sur la valeur ajoutée perçue au
profit de l’Etat. Ce pourcentage est fixé chaque année par la loi de finances compte
tenu de l’évolution des transferts de compétences.
- Le fonds d’équipement des Collectivités Locales (FECL). Crée par la loi des
finances de 1997 et alimenté par les recettes générales de l’Etat, il est destiné à
assurer à aux collectivités locales des ressources d’investissement.
- Le Fonds d’Appui à l’éclairage public. Depuis 2002 l’Etat dégage sur son budget
un fonds destiné à appuyer les communes dans la prise en charge des factures
23
d’éclairage public en partant du principe suivant : « l’éclairage public participe de la
sécurité publique laquelle relève encore de sa compétence ».
24
Chapitre 2 : Analyse de la gestion financière de la ville de Rufisque
Dans ce chapitre il sera question de faire un diagnostic sur la fiscalité locale de la
commune de Rufisque à travers les budgets sur la période 2008-2010. Il s’agira
d’étudier les recettes comme les dépenses de fonctionnement et d’investissement
en vue de voir le lien entre le système fiscal et le développement local. L’analyse
nous guidera à faire ressortir les forces et les faiblesses pour chaque catégorie de
recette. Nous allons essayer de voir dans cette étude l’évolution des recettes de
fonctionnement et dans une certaine mesure les problèmes auxquels la CL est
confrontée par rapport au recouvrement des recettes de fonctionnement sur les
périodes allant de 2008 à 2010.
I. Diagnostic des recettes de fonctionnement
Le budget des collectivités locales est voté par chapitre. En ce qui concerne les
recettes de fonctionnement, on peut citer 7 chapitres et sont énumérées à l’article
250 du CCL. Chaque chapitre regroupe une catégorie de recettes spécifique. Par
souci de clarté dans le diagnostic nous étudierons les différents chapitres constituant
les recettes de fonctionnement comme indiqués dans le CCL.
- Chapitre 70 produits d’exploitation
La détermination de l’assiette ainsi que le recouvrement des produits d’exploitation
sont assurés par les services des impôts et domaines. Le recouvrement de ces
derniers connait une baisse constante avec en 2008 un taux de recouvrement de
25% contre 13 % en 2009 (soit une baisse de 12%), et 12% en 2010. Il faut préciser
que les frais d’alignement et de bornage ont été surestimés car il semble illusoire de
fixer comme prévision 155 000 000 FCFA en 2008 alors que le taux de recouvrement
n’a été que de 4% en valeur relative et 6 500 000 FCFA en valeur absolue. Or en
2009 les prévisions ont été fixées à 955 000 000 FCFA avec toujours un taux de
recouvrement de 4%. Ce qui a causé cela c’est que les conseillers comptaient
beaucoup sur les recettes qui seraient issues des frais de bornage à travers
l’extension de la ville vers l’Est mais aussi avec la viabilisation du cite devant abriter
la cité ville neuve. Toutefois, le montant des recettes est tributaire de la
connaissance des bases de calcul. Le calcul des prévisions de recettes dépend de
leur nature.
25
Bien évidemment, l’évaluation des recettes nécessite la maitrise de certaines
méthodes notamment celles de la l’évaluation de la moyenne triennale qui permet
d’ajuster les prévisions budgétaires à la moyenne des recettes ordinaires recouvrées
au cours des trois dernières années, dont les résultats sont connus, celle de la
pénultième année qui consiste à effectuer les calculs des postes en tenant compte
des résultats de la gestion précédente. La maitrise de ces méthodes permet d’établir
le budget sur des bases claires et réalistes. Il semble nécessaire de signaler la
problématique de la maitrise de l’assiette à l’égard de la division des recettes.
Cette problématique fera l’objet d’une étude ultérieure dans la 2ème partie.
- Chapitre 71 produits domaniaux
Concernant les produits domaniaux, on peut dire que les recouvrements ont été
satisfaisants sur la période 2008-2010 avec respectivement 49%, 83% et 56%. Les
produits domaniaux sont exclusivement recouvrés par la municipalité.
- Chapitre 72 : les impôts locaux
La détermination de l’assiette est du ressort des services des impôts et domaines
sous fonds de roulement. Cette catégorie de recettes demeure la plus importante
pour la commune avec des taux de recouvrement satisfaisants si on fait un
rapprochement avec les prévisions. En fait cela ne dit pas pour autant que dans
l’ensemble le niveau des recettes issues des impôts locaux est appréciable si l’on
considère que toutes les potentialités de la commune ne sont pas exploitées.
Toutefois, il est nécessaire de signaler que la contribution des patentes reste la
catégorie de recettes sur laquelle la commune doit beaucoup compter. Les
prévisions ont été de 4 550 000 000 FCFA en 2008, 4 517 392 134 FCFA en 2009 et
3 553 651 880 FCFA en 2010 contre les recouvrements respectifs de 3 114 268 306
FCFA soit 68% en valeur relative, 3 076 944 597 FCFA soit 68% et 2 933 969 158
FCFA.
Mais le constat qu’on peut faire c’est qu’au fil des ans les recettes issues de la
contribution des patentes connaissent une baisse. On est incapable de dire ce qui
explique cette baisse. Car pour cette catégorie d’impôt c’est les services des impôts
et domaines qui sont au cœur de la fixation de l’assiette jusqu’au recouvrement. A
ce niveau c’est les services des impôts qui déterminent l’assiette et le recouvrement
est effectué par le trésor. Donc c’est en cas de recouvrement que le maire est notifié.
Toutefois, cette baisse constante des patentes peut être expliquée par un
26
ralentissement de l’activité économique dans la ville, par une contre performance
des entreprises locales ou même par l’invasion fiscale. Dans tous les cas si on n’a
pas les données nécessaires par exemples les bases d’imposition on ne saurait
s’aventurier à donner une conclusion par rapport à ce sujet.
En ce qui concerne le minimum fiscal (l’IMF et la TRIMF) la commune n’a aucune
maitrise car la détermination des rôles ainsi que le recouvrement sont du ressort des
services des impôts et domaines. La mairie ne reçoit aucune notification par rapport
aux rôles la liste des entreprises assujetties entre autres. En ce qui concerne l’IMF
en principe la fixation de l’assiette et le recouvrement sont du ressort de la commune.
Le recensement doit être effectué par les délégués de quartier avec l’appui des
agents municipaux afin d’établir les pré-rôles pour tous les quartiers. Ensuite c’est la
confection des rôles dans la commune par les services fiscaux avant de passer au
recouvrement qui se fait en général au moment du recensement. Il est regrettable de
voir que cette procédure n’est pas respectée par la municipalité. Rufisque demeure
aujourd’hui une ville en pleine expansion avec une population est estimée à
260 000 habitants et abritant des entreprises de renommé internationale. Il est
inadmissible de voir que les recettes issues du minimum fiscal connaissent une
baisse drastique avec un recouvrement de 74 239 764 FCFA en 2008 contre
7 775 637 FCFA en 2009 et 11 820 919 FCFA. Soit une baisse de 66 464 127 FCFA
entre 2008 et 2009.
Chapitre 73 les taxes municipales
Les recettes issues des taxes municipales sont déterminées et recouvrées par les
services des impôts et domaines. Cette catégorie de recettes ne pose aucun
problème de recouvrement car nous avons des taux de recouvrement assez
satisfaisants avec respectivement 77% en 2008, 203% en 2009 avant de baisser à
46% en 2010. Toutefois, il urge de signaler une évolution constante des recettes
issues des taxes municipales qui se sont portées en 28 871 235 FCFA en 2008,
71 221 802 FCFA en 2009 et 80 152 520 FCFA en 2010.
Chapitre 74 : Les produits divers
Les produits divers recouvrent les amendes correctionnelles et les recettes
éventuelles et imprévues. Cette catégorie ne pose pas de problème de recouvrement
car durant la période 2008-2009 les recouvrements ont dépassé de loin les
prévisions. Pour l’année 2008 les prévisions étaient de l’ordre de 19 000 000 FCFA
alors que le montant des recouvrements était de 26 556 368 FCFA soit un taux de
27
recouvrement de 140% en 2008, 147% en 2009 avant de connaitre une baisse en
2010 pour se porter à 58%.
Chapitre 75 : dotations de fonctionnement
Les dotations de fonctionnement concernent les fonds alloués par l’Etat aux
collectivités locales. Concernant l’utilisation du fonds de dotation de la
décentralisation, sa répartition est fixée suivants les critères indiqués dans le décret
N° 96- 1126 du 27 décembre 1996. Cependant, la fix ation de l’assiette ainsi que le
recouvrement de cette catégorie de recette relève du niveau central. La municipalité
n’est confrontée à aucune difficulté par rapport à son recouvrement car nous avons
un taux de recouvrement de 122% en 2008, 99% en 2009 et 100% en 2010. Ce
qu’on fustige c’est la modicité des fonds alloués à la collectivité qui sont dérisoires
par rapport à la couverture des dépenses de fonctionnement et d’investissement.
Rappelons que l’article 253 du CCL stipule que les fonds de concours de l'Etat dont
il n'aura pas été fait emploi par les collectivités locales bénéficiaires, soit dans
l'année qui suit celle pour laquelle ils ont été accordés, soit dans les délais prévus
par la décision d'attribution qui ne saurait être inférieure à une année, sont annulés et
reversés à l'Etat.
Il ne pourra être dérogé à ces prescriptions que pour les fonds de concours alloués
pour exécution d'un programme de travaux susceptibles de s'étendre sur plusieurs
années
Chapitre 76 : Remboursement
Pour cette catégorie de recettes sur la période 2008-2010, les taux de recouvrement
ont été satisfaisants avec des taux de recouvrement qui sont respectivement de 57%
en 2008, 58% en 2009 et 100% en 2010.
En somme, le graphique ci-dessous nous montre l’évolution du recouvrement des
recettes de fonctionnement sur la période 2008-2010 :
28
De manière générale on peut constater au travers du graphique que le recouvrement
des impôts locaux connait une tendance haussière sur les trois (3) années avec
66% en 2008, 71% en 2009, et 76% en 2010 soit en moyenne une augmentation de
5% par an. Toutefois, il faut préciser que la part des contributions des licences
demeure la principale source de revenu pour la collectivité. Avec justement des taux
de recouvrement par rapport aux prévisions allant de 68% à 82% entre 2008 et
2010. Bien que les recouvrements par rapport aux prévisions soient satisfaisants il
n’en demeure pas moins qu’elle connaisse une tendance à la baisse sur la même
période. Par rapport aux dotations de fonctionnement les objectifs sont atteints car la
totalité des prévisions est recouvrée. Concernant les produits d’exploitation les
recouvrements sont assez faibles avec en 2008 un taux de 25% avant de chuter
pour se porter à 13 % sur les ans 2009 et 2010. Cette faiblesse du recouvrement
peut être expliquée par la surestimation des prévisions, si on prend l’année 2008 on
a une prévision de 155 000 000 FCFA contre un recouvrement de 6 500 000 soit un
taux de recouvrement de 4%. Ce qui parait bizarre, c’est qu’on assiste à une hausse
de la prévision pour l’année suivante qui se porte à 950 000 000 FCFA et le
recouvrement n’a été que de 36 550 846 FCFA soit toujours un taux de
recouvrement de 4%. Dans le souci de rééquilibrer le budget les conseillers doivent
s’atteler à fixer des prévisions raisonnables.
29
En somme, le recouvrement des impôts et taxes propres à la collectivité a jusqu'ici
un rendement peu convainquant. Ceci s'explique par la complexité dans la définition
de l'assiette et des modes d'évaluation des impôts, la difficulté de mettre en place au
niveau local une instrumentation adaptée pour connaître le potentiel fiscal et assurer
l'émission des rôles et le recouvrement, et la quasi exclusion des collectivités locales
de la chaîne fiscale.
II. Diagnostic sur les recettes d’investissement
Les recettes d’investissement sont généralement constituées du fonds de concours
du FECL des dons et legs entre autres. Aujourd’hui, force est de reconnaitre la
faiblesse des fonds alloués par l’Etat aux collectivités à titre de FECL avec des
montant ne dépassant pas la barre des 100 000 000 FCFA. Les recettes
d’investissement sont essentiellement couvertes par les excédents de
fonctionnement capitalisés. Ce qui traduit la faiblesse des ressources
d’investissement par rapport aux dépenses d’investissement. Cela permet d’affirmer
encore une fois qu’il existe de réelles difficultés pour la mise en œuvre des
infrastructures de base dans la commune. Rappelons que les excédents de
fonctionnement capitalisés sont des excédents des recettes de fonctionnement virés
aux recettes d’investissement pour avoir l’équilibre. A propos du FECL, il a été
initié depuis 1977 pour favoriser les investissements publics locaux, il constitue un
vieil instrument d’appui au développement économique, culturel et social des
territoires. La problématique du FECL tourne donc essentiellement autour de son
adaptation au contexte actuel de la gouvernance local. Il doit certainement évoluer
dans le sens d’un meilleur phasage avec les objectifs et les dynamiques réelles des
politiques publiques locales en cours.
Le graphique ci-dessous nous montre les difficultés liées au recouvrement des
recettes d’investissement par rapport aux prévisions et par ailleurs la part des
excédents de fonctionnement capitalisés dans les recettes d’investissement
(valeurs encadrées en rouge) :
30
III. Diagnostic des dépenses de fonctionnement
Les dépenses de fonctionnement sont obligatoires ou facultatives. Les dépenses
obligatoires sont énumérées à l’article 258 du code des collectivités locales. Elles
doivent nécessairement figurer au budget et faire l’objet d’ouverture de crédits jugés
suffisantes par le représentant de l’état avant toute inscription de dépenses
facultatives de la collectivité locale.
Le graphe ci-dessous nous montre le niveau des réalisations par rapport aux
prévisions des dépenses de fonctionnement :
31
Le commentaire que nous apportons à ce point c’est que les prévisions ont connu
une sensible baisse entre 2008 et 2010. Les réalisations ont évolué en dent de
scie. Cette situation traduit aussi l’insuffisance des recettes de fonctionnement
devant couvrir les dépenses de fonctionnement.
Nonobstant, dans ces dépenses de fonctionnement on peut noter des services
budgétivores qui au fil des ans représentent des parts très importantes dans le
budget.
Le graphique ci-dessous nous en dit un peu plus :
32
Comme nous pouvons le voir sur ce graphe les services des dépenses ordinaires
diverses connaissent une évolution constante sur les trois années. Avec
respectivement des réalisations de 638 185 707 FCFA en 2008, 773 521 487 FCFA
en 2009 avant d’atteindre le pic en 2010 avec 869 738 873 FCFA. Soit une hausse
de 231 553 166 FCFA entre 2008 et 2010. Nous avons aussi le service éducation-
jeunesse culture qui en l’espace d’une année (entre 2008-2009) a connu une
hausse de 383 129 318 FCFA soit 84% en valeur relative. Idem, le service cabinet du
maire engendre la hausse des dépenses de fonctionnement sans oublier le service
fêtes et cérémonie qui représente une part non négligeable dans les dépenses de
fonctionnement.
IV. Diagnostic des dépenses d’investissement
Les dépenses d’investissement s’appliquent essentiellement à des opérations à
caractère irrégulier et exceptionnel. Dans notre cas le financement des dépenses
d’investissement est assuré en grande partie par des excédents de fonctionnement
33
de fonctionnement capitalisés c'est-à-dire des recettes de fonctionnement qu’on
reconvertit en recettes d’investissement dans le but d’équilibrer la section
investissement. D’ailleurs c’est ce qui explique souvent la modicité des
investissements en termes de réalisation d’infrastructures, d’équipements etc.
Le graphe ci-dessous nous montre le niveau des réalisations des dépenses en
investissement par rapport aux prévisions qui ont été fixées :
Au travers de ce graphique il est visible que les dépenses d’investissement ont une
tendance à la hausse sur l’intervalle 2008-2009. Par contre on assiste à des niveaux
de réalisation très bas par rapport aux dépenses. Cela traduit dans une certaine
mesure la non réalisation des investissements prévus dans les budgets. Surtout en
2009 ou le niveau des réalisations n’a été que de 17 165 895 FCFA sur une
prévision de 805 968 854 FCFA. Il apparait clair dans le compte administratif de 2009
que 867 863 681 FCFA ont été annulés pour faute d’emploi. Il révèle de ce qui
précède qu’il y a un réel problème de gestion et un manque de sérieux dans la mise
en œuvre de la politique publique locale. Car il est inadmissible de voir une ville
comme Rufisque annulée une telle somme pour faute d’utilisation.
34
Chapitre 2 : Problématique de la mobilisation des ressources locales dans la
ville Rufisquoise
I. Les difficultés liées à la mobilisation des recettes de fonctionnement
Le diagnostic des finances publiques locales de la ville de Rufisque montre un peu
la difficulté dans le recouvrement et la mobilisation des recettes locales. Les recettes
de fonctionnement sont constituées notamment de recettes fiscales, des produits
d’exploitation des produits domaniaux et des produits divers. Elles ont un caractère
permanent et permettent à la collectivité de faire face à ces charges obligatoires
courantes. Les difficultés constatées dans le recouvrement sont de caractères
multiformes et feront l’objet d’analyse détaillée de suite.
1. La détermination de l’assiette un véritable casse-tête
35
On entend par assiette fiscale le montant qui sert de base de calcul de l’impôt ou
d’une taxe. En d’autres termes elle désigne le montant auquel s’applique un taux
d’imposition ou de taxation. La commune éprouve d’énormes difficultés pour la
détermination de l’assiette. Bien que cette tache incombe pour la plupart aux
services des impôts et domaines il n’en demeure pas moins qu’elle profiterait
grandement à la collectivité décentralisée. Ne serait ce que pour bâtir des prévisions
budgétaires reposant sur des bases concrètes et solides. Les difficultés résident
dans le fait que la municipalité n’a aucune idée sur ses potentialités fiscales. Elle
ignore le nombre d’entreprises implantées dans son enceinte encore moins les
bases d’imposition pour certaines catégories de recettes comme par exemple les
impôts locaux (la TRIMF) ou la taxe sur l’électricité, la taxes sur l’eau les chiffres
d’affaires des personnes menant des activités commerciales ou industrielles pour ne
citer que ceux la. Même en ce qui concerne la détermination des personnes
assujetties à l’IMF la commune demeure incapable d’avancer des chiffres. Ainsi,
les rôles sont établis exclusivement par les services des impôts et domaines. Cette
démarche ne fait qu’exacerber les difficultés liées à la détermination de l’assiette. Les
services même des impôts et domaines n’ont pas un effectif leur permettant
d’assurer convenablement leur tache par rapport au recensement des contribuables,
à la détermination des bases d’imposition (chiffre d’affaires, valeur locative ...) pour
une certaine catégorie de taxe.
La collectivité n’attend que la notification du service des impôts et domaines pour
procéder au recouvrement de l’impôt du minimum fiscal par exemple qui semble être
loin de la réalité vu les potentialités de la ville. Il est avéré que Rufisque connait
depuis un certain temps un dynamisme dans le commerce et l’industrie avec
l’implantation des sociétés de renom et qui emploient des milliers de personnes. Il
est inconcevable par exemple de voir que les recettes issues du minimum fiscal
(l’IMF et la TRIMF) ne puissent dépasser 80 millions par an. Cette faiblesse dans le
recouvrement de certaines recettes est inhérente à une défaillance de la
détermination de l’assiette. Par exemple le graphique ci-dessous nous montre le
niveau des prévisions et des recouvrements du minimum fiscal au cours des trois (3)
dernières années :
36
En analysant ce graphique on se demande sur quelle base se font les prévisions
dans le cadre de l’élaboration du budget. On a comme l’impression qu’elle se fait par
tâtonnement. D’où l’intérêt aujourd’hui de se doter d’une base de données pour une
meilleure fixation de l’assiette et alors une bonne détermination du niveau des
recettes locales. Entre autres difficultés liées à la détermination de l’assiette fiscale
on peut noter le manque grave d’informations sur l’identification des personnes
redevables aux impôts et taxes.
2. Les obstacles par rapport au recouvrement des recettes fiscales
Le recouvrement de l’impôt consiste en l’encaissement des contributions
préalablement fixées par le service des impôts et domaines ou du niveau central.
Cependant, la commune rencontre des difficultés dans le recouvrement des recettes
locales surtout les recettes recouvrées par voie de rôle. La commune se trouve
parfaitement dans une posture attentiste à l’égard des recouvrements qui se font
auprès du receveur municipal. Il faut signaler que le trésor est l’organe financier de
l’Etat et des collectivités décentralisées chargé de percevoir les impôts et d’exécuter
les dépenses figurant dans leur budget. Il y a toute une procédure à respecter pour
que l’argent soit décaissé. Il existe une nomenclature budgétaire détaillée que le
budget local doit respecter en recettes comme en dépenses. Les dépenses et les
crédits correspondant sont par conséquent votés par chapitre et article, et de ce fait
spécialisés.
37
Concernant les fonds provenant de l’Etat on rencontre souvent des retards et des
lourdeurs dans le transfert des ressources par le niveau central vers la collectivité
décentralisée.
Les collecteurs municipaux d’après l’avis du chef de service de la division recette,
constituent un réel handicap dans le recouvrement. Car la corruption commence à
gagner du terrain ou bien même ces derniers n’ont pas de souci à se faire sur les
recouvrements. Ils se considèrent comme de simples agents municipaux chargé de
recouvrer les recettes locales. Et le maire ne peut exercer une tutelle sur eux.
3. Le problème lié aux ressources humaines
Les ressources humaines constituent dans une certaine mesure une problématique.
Au niveau de la municipalité il y a l’existence du service de la division recettes
chargé des questions fiscales. Toutefois, le nombre d’agents dans ce service
demeure très insuffisant et ne peut en aucun cas faire un travail visible si l’on voit le
développement fulgurant de la ville. Il ya lieu d’ajouter le manque de qualification du
personnel sur la fiscalité locale. L’Etat a tenté de pallier ces insuffisances par la
création des agences régionales de développement à travers le PNDL en vue de
servir de bras technique aux CL, mais en fait ces structures ne peuvent à leur tour
satisfaire toutes les collectivités locales car son personnel bien étant qualifié, et sont
confrontées à des problèmes d’effectifs. En outre notons le manque de moyen
matériel au personnel pour mener à bien leur travail.
4. L’incivisme fiscal
Dans le paiement des impôts et taxes on enregistre un certain laxisme à l’égard des
contribuables. Les raisons qui sont avancées par rapport à l’incivisme fiscal sont de
plusieurs ordres. Pour certains contribuables, c’est le problème de la mal
gouvernance qui est pointé du doigt. Ils estiment qu’il ne sert à rien de contribuer s’il
n y a pas une répercussion sur les contribuables. En d’autre terme il n’y a pas de
visibilité dans l’action de la mairie. D’aucuns fustigent le niveau élevé des impôts et
taxes. C’est comme si cette expression « non rimbé in bis » qui veut dire on ne peut
pas taxer une chose pour deux (2) fois ne fait pas partie du vocabulaire des services
en charge. En outre, il mérite de signaler aussi les retards dans l’envoi des avis
38
d’imposition et les oublis. In fine, on ne saurait négliger le fait que plus les habitants
verront les réalisations concrètes de la collectivité, plus ils seront enclins à payer
l’impôt, car ils en percevront l’intérêt. A l’inverse, des luttes d’influence ou des
désaccords entre divers groupes sociaux internes ou externes à la municipalité
pourront conduire à des grèves d’impôt.
II. Les difficultés au niveau des recettes d’investissement
1. Problématique des ressources exogènes
Les ressources externes des collectivités proviennent de l’Etat et des partenaires au
développement, comme les bailleurs de fonds extérieurs ou secteur privé, dans le
cadre de la coopération décentralisée. « Les transferts financiers qui se présentent
en général sous la forme de dotations ou de subventions sont très souvent soit
ineffectifs, soit insuffisants ou aléatoires (…), leur modicité et leur irrégularité
handicapent les collectivités locales dans l’exercice de leurs compétences »5. On
peut citer la taxe sur l’eau et sur l’électricité. Ainsi, pour cette catégorie un
pourcentage sur la consommation est prélevé par les sociétés concessionnaires
(SENELEC, SDE) au profit de la municipalité.
Donc le recouvrement incombe à ces derniers. Le constat qu’on peut faire c’est que
le produit de ces taxes n’est pas souvent maitrisé par la commune. Les sommes
ainsi recouvrées échappent au contrôle de la collectivité et le revenu de ces taxes
n’est pas toujours versé par les sociétés concessionnaires dans les caisses du
receveur de la collectivité selon une périodicité régulière et à date échue.
2. Problématique de l’emprunt
La loi confère aux collectives locales le droit de s’ouvrir aux marchés financiers
nationaux comme internationaux en vue de financer leur investissement. Toutefois,
les conventions d’un montant supérieur à 100 millions de francs, souscrites par les
collectivités locales, sont soumises à l’approbation préalable du représentant de
l’Etat, conformément aux dispositions du Code des Collectivités locales en son article
336 et du décret n° 96-1119 du 27 décembre 1996. La collectivité déconcentrée est
5 Hountondji M.M., Fournier C., Pour une gestion et un développement durable des collectivités locales : le SAFIC, un instrument d’aide à la décision, FENU, 2006.
39
contrainte à solliciter des crédits pour équilibrer son budget car les procédures
demeurent contraignantes et elle peine à trouver des bailleurs ou des partenaires au
développement faute de moyens financiers nécessaires pour la couverture de frais
de voyages entre autres.
Le manque d’expertise constitue un aspect non négligeable par rapport à cette
problématique. Sur les trois années sur lesquelles l’étude a porté aucun emprunt n’a
été enregistré au niveau de la municipalité.
III. La fiscalité locale favorise t- elle le développement économique local ?
En principe le transfert de compétences doit être concomitant au transfert de
ressources nécessaires pour assurer ces dernières. A ce titre la fiscalité locale
constitue un outil de mobilisation de ressources financières aux CL pour assurer
leur développement. Comme nous l’avons vu dans le diagnostic la collectivité
éprouve d’énormes difficultés pour la mobilisation des ressources locales et ces
dernières sont de différents ordres.
En effet, c’est à partir de la capacité de mobilisation de ressources locales et de
l’orientation du budget de la collectivité qu’on pourra apprécier le lien qui existe
entre la fiscalité locale et le développement économique local de la ville de
Rufisque.
Le développement économique local peut se définir comme un effort continu de
création, d’exploitation, d’accumulation et de distribution de richesses sur un
territoire pour le bien être des populations. Dans cette définition qui nous semble
très large il faut retenir que le développement économique local regroupe des points
aussi importants les uns les autres que les CL doivent autant que faire se peut les
intégrer dans leur politique budgétaire.
En regardant même l’ossature du budget on s’aperçoit que le niveau même des
dépenses de fonctionnement dépasse de loin celui des dépenses d’investissement
comme en témoigne le tableau ci-dessous :
40
2008 2009 2010
Dépenses de
fonctionnement
effectuées
4 023 475 519 4 110 137 541 4 079 776 257
Dépenses
d’investissement
effectuées
198 052 173 17 165 895 359 993 176
Différence entre
Dépenses de
fonctionnement et
d’investissement
3 825 423 346 4 092 971 646 3 719 783 081
En analysant ce tableau on peut affirmer que le niveau des dépenses de
fonctionnement dépasse largement celui des dépenses en investissement. En
d’autres termes le budget de la ville de Rufisque est orienté vers le fonctionnement.
Si on parle de développement économique local c’est par rapport à la capacité des
CL à créer des ressources afin de répondre aux attentes des populations, mais
aussi et surtout à leur capacité à redistribuer des revenus aux populations locales.
Dans notre diagnostic il apparait clair que les dépenses qui engendrent plus de
ressources, en réalité ne vont pas directement aux populations. Nous avons le
cabinet du maire qui représente une part très importante dans le budget idem les
dépenses ordinaires diverses, les services contribution et participation (voir annexe
tableau dépenses de fonctionnement). Le niveau des dépenses en cérémonie et
fêtes atteignent aussi des proportions importantes. Le service éducation jeunesse
culture et sport qui connait une tendance haussière sur la période avec en 2008 un
montant de 638 185 707 FCFA, en 2009 un montant de 773 521 487 FCFA avant
d’atteindre 869 738 873 CFA en 2009. Il nous semble inopportun d’engager de
telles dépenses dans la culture jeunesse sport éducation. Car en ce qui concerne
l’éducation l’Etat est entrain de faire un travail essentiel en y consacrant 40% de son
budget. A cet effet, il est inconcevable de suivre l’Etat dans cette logique. Pour la
jeunesse, le sport et la culture bien qu’ils soient des facteurs de développement, il
faudrait réorienter ces dépenses vers le financement de projets au profit des jeunes
41
et des femmes qui demeurent une couche vulnérable. Ce qui favorisera la création
de richesses dans le territoire local qui sera synonyme de condition de vie
améliorée. En somme, le budget est totalement orienté au fonctionnement. C’est
dire que la mission d’impulsion du développement économique de la collectivité n’est
pas assurée. Pourtant c’est une compétence générale donnée par la loi au conseil
pour qu’il prenne toutes les mesures nécessaires pour assurer le bien être des
populations et pour améliorer leur cadre de vie. Mais la modicité des finances
locales reste une contrainte majeure à l’atteinte même des objectifs fixés dans le
cadre des politiques publiques locales. L’orientation budgétaire constitue aussi une
réelle problématique. Toutefois, il appartient à la CL de prendre sa responsabilité
car il est temps qu’on cesse de marcher avec certaine pratique qui consiste à
consacrer les ressources locales essentiellement au fonctionnement de la
municipalité. Cet état de fait peut se comprendre car dans le budget il y a des
dépenses obligatoires que les CL doivent impérativement assurer au risque
d’annulation du budget par le représentant de l’Etat. Or la logique voudrait que les
ressources locales soient orientées dans les politiques définies par le conseil pour
promouvoir le développement local. Le défi aujourd’hui c’est d’aller au-delà du
simple fait d’assurer les dépenses de fonctionnement, mais en initiant des politiques
qui vont dans le sens de la création et de la distribution de richesses qui est garant
du développement local.
Si les ressources locales ne lui permettent qu’à effectuer des dépenses de
fonctionnement il vaudrait mieux qu’elle se désengage des compétences qui lui ont
été transférées. Et à ce titre la fiscalité locale ne saurait être un outil crédible pour la
promotion du développement économique local.
IV. Perspectives pour une dynamisation de la mobilisation des recettes
locales en vue de promouvoir le développement local
Une constante des finances locales est certainement la faible mobilisation des
ressources au niveau local. Nous l’avons vu à travers le diagnostic des finances
locales étudié plus haut. Il est avéré que la fiscalité locale a un faible rendement et
engendre de graves déséquilibres dans la situation financière de la collectivité. C’est
à ce titre que nous allons faire des propositions en vue de dynamiser le
recouvrement des ressources locales. Il nous semble intéressant de souligner dans
42
une certaine mesure l’inefficacité du système fiscal local, tout de même nous
tenterons de donner quelques consignes pour son amélioration. Les propositions
vont tourner autour des points suivants :
⇔ Création d’une base de données pour la maitrise du potentiel fiscal de la ville.
Car il y a une certaine méconnaissance à ce sujet. Il s’agira ici de procéder
au ciblage exhaustif des différentes potentialités fiscales en s’échafaudant sur
les grappes de convergences, les sites stratégiques, et les secteurs d’activités
socioéconomiques.
Dans cette base de données nous aurons l’ensemble des contribuables
assujettis aux impôts et taxes (journaliers, mensuels, annuels...). Elle doit
intégrer des données foncières concernant la fiscalité foncière locale
(registre foncier numérique) sans oublier les données des secteurs
d’activités économiques, commerciales et industrielles (patente).
⇔ Une meilleure implication de la municipalité en ce qui concerne la
détermination de l’assiette fiscale. Dans bien des cas, la municipalité n’est pas
impliquée dans le processus de fixation de l’assiette pour certaines catégories
de recettes. La collectivité a la charge d’initier des projets et de les mettre en
œuvre à ce titre elle doit être au cœur du processus.
Il y a lieu de noter le caractère intrinsèque entre la fiscalité et la gouvernance locale.
Dans une large mesure des comportements inciviques liés au fisc emportent avec
véhémence les contribuables locaux. Ce comportement non souhaitable trouve son
fondement des attitudes des gouvernants dans la gestion des affaires locales. Pour
donner un contenu cohérent à cette dimension, il est nécessaire de faire d’
⇔ Initier des concertations périodiques avec les populations avant la
délibération sur le montant et les procédures de recouvrement d’une taxe ou
impôt local ;
⇔ Expliquer sur le processus d’établissement d’un budget participatif local
impliquant davantage les acteurs dans la comptabilité publique ;
⇔ De faire des propositions sur les démarches particulières de gouvernance
légitime, les procédés astucieux que la municipalité doit adopter afin de
regagner la confiance durable des contribuables locaux ...
43
⇔ L’Etat doit appuyer les services des impôts en moyens humains, matériels et
logistiques pour d’une part, un recensement régulier des contribuables
assujettis et une mise à jour des fichiers et d’autre part, l’organisation correcte
des tournées de CGU ;
⇔ Renforcer les moyens humains, matériels et logistiques de la recette
perception pour un recouvrement optimal des rôles et l’organisation efficiente
des tournées de CGU par la commission composée de représentants du
service des impôts et de la perception, de la collectivité locale et des forces
de l’ordre.
⇔ Veiller à ce que les entreprises versent à la collectivité la TRIMF retenue sur le
salaire des employés exerçant dans la collectivité locale concernée au lieu de
centraliser tous les versements dans la collectivité du siège social ou de la
direction.
⇔ Orienter les politiques publiques locales vers la création de richesses.
⇔ Création d’un environnement propice à l’investissement à travers la réalisation
d’infrastructures de base (routes, hôpitaux, bonne politique d’aménagement
du territoire...)
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Conclusion :
La situation financière de la collectivité demeure problématique. Car c’est avec des
contraintes de la faiblesse des budgets de la commune et de son orientation vers le
fonctionnement que la commune doit faire face à des compétences de plus en plus
nombreux. Par ailleurs le système fiscal tel qu’il est établi accumule des lacunes et
mérite d’être revu pour une amélioration des conditions de vie des populations locale
et d’impulser le développement local. Face à cette situation ou nous en sommes
avec les difficultés dans le recouvrement des ressources inhérentes à la défaillance
du système fiscal, on ne saurait prétendre le développement économique local.
Toutefois, la décentralisation devrait assurer aux CL une certaine autonomie
financière à travers la fiscalité locale pour répondre à leurs exigences. En réalité, on
a comme l’impression qu’elle tarde à jouer son rôle et freine à juste titre
développement local.
Pour que la décentralisation et les politiques de développement local tiennent
véritablement leurs promesses, il est essentiel que soit fondamentalement améliorée
la situation des finances locales, et globalement celles des ressources dont doivent
disposer les CL pour accomplir leurs missions. En tant que défi, l’assumassions des
missions dévolues aux collectivités implique avant tout une grande conscience de
leur ampleur et de leur intérêt, mais aussi une connaissance parfaite des moyens de
tous ordres nécessaires à leur exécution.
Bibliographie :
- Xavier Greffe « 2002 » : le développement local édition de l’aube
- Diop Amadou 2008 : enjeux urbain et développement territorial en Afrique
contemporaine Cartala 176 pages
- Fabienne Le loup, Bernard pecquert : 4ème journée de la proximité à Marseille
- Précis de fiscalité Maurice cozian et Martial Chadefaux edition Litec
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