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Compte-rendu du jeudi 20 octobre 2011 Valoriser les cimetières, lieux de sociabilité ouverts sur la ville Les cimetières : ambassadeurs de la biodiversité en milieu urbain 02 Quand les cimetières deviennent des lieux de visite pour les amateurs d’oiseaux 03 Déclinaison du plan biodiversité dans les cimetières 04 Cimetière d’Angers : vers le zérophyto à pas mesurés ! 06 Étude SIFUREP/APUR : une cartographie en faveur des cimetières de la région parisienne 07 Paysage et patrimoine : une histoire funéraire… 09 Les cimetières comme lieux de rassemblements socioculturels dans la cité 11 Intégrer la route européenne des cimetières… 11 SIFUREP : Une centrale d’achat pour répondre aux besoins des collectivités adhérentes en matière de funéraire 12 SOMMAIRE La quatrième édition de notre colloque est le résultat d’un partenariat initié avec la Ville de Paris. Je tiens à remercier M me Fabienne Giboudeaux, Maire-adjointe chargée des espaces verts à la Ville de Paris pour cette collaboration qui constitue, comme elle l’a elle-même souligné, « une petite pierre à la construction de la politique métropole ». Les cimetières se trouvent désormais au cœur des projets urbains et méritent toute notre attention. Ce sont avant tout des lieux de recueillement et de rassemblement. Reflet de notre communauté, renfermant un héritage patrimonial, artistique et social, ils accueillent de nombreuses familles et visiteurs lors des obsèques ou des fêtes de la Toussaint. De nouveaux usages s’y développent (promenade, visites à thèmes, lieux touristiques) et de nouveaux équipements sont créés pour répondre aux évolutions de la société et aux demandes nouvelles de nos concitoyens (espaces de cérémonie, jardins du souvenir, columbariums…). De nouveaux modes de gestion y sont également mis en place pour favoriser la biodiversité. Ces espaces sont souvent dotés d’une flore d’une richesse inhabituelle en ville et d’une faune qui vient y trouver refuge, face à la pression urbaine. Nombreux ont été les exemples donnés lors du colloque pour aider les communes adhérentes du SIFUREP à gérer ces cohabitations nouvelles en garantissant un service public de qualité. Le colloque a permis l’échange sur ces pratiques. Je remercie, à cet égard, MM. Philippe Jacob, responsable du plan biodiversité à la Ville de Paris, Pascal-Hervé Daniel, responsable du service des cimetières de la capitale, Marc Houdon, responsable des activités funéraires de la Ville d’Angers, Bernard Cavalié, paysagiste à l’Atelier de l’Île, ainsi que Patrick Suiro, membre du CORIF, d’avoir alimenté nos réflexions. Je remercie également M. Frédéric Bertrand, architecte et urbaniste, de l’Atelier Parisien d’Urbanisme (APUR), qui nous a permis de regarder différemment nos territoires. La centrale d’achat que met en place le SIFUREP sera un outil précieux pour les communes qui souhaitent passer à l’action. Je remercie enfin M me Danielle Tartakowsky et M. Régis Bertrand qui ont mis en lumière la fonction historique et sociale des cimetières. Comme l’a montré ce colloque, toutes les dimensions que revêtent nos établissements en font des lieux précieux pour notre patrimoine culturel et environnemental que le SIFUREP entend continuer à défendre à vos côtés. ÉDITO Carinne Juste, Présidente du SIFUREP et Maire de Villetaneuse

Valoriserlescimetières, lieux de sociabilité ouverts sur ... · cimetière du Père Lachaise qui avec ses 44 hectares, est le plus grand espace vert parisien intra-muros. Au même

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Compte-rendu du jeudi 20 octobre 2011

Valoriser les cimetières,lieux de sociabilité ouverts sur la ville

Les cimetières : ambassadeursde la biodiversité en milieu urbain 02

Quand les cimetières deviennent des lieuxde visite pour les amateurs d’oiseaux 03

Déclinaison du plan biodiversitédans les cimetières 04

Cimetière d’Angers :vers le zérophyto à pas mesurés ! 06

Étude SIFUREP/APUR :une cartographie en faveur descimetières de la région parisienne 07

Paysage et patrimoine :une histoire funéraire… 09

Les cimetières comme lieuxde rassemblementssocioculturels dans la cité 11

Intégrer la route européennedes cimetières… 11

SIFUREP : Une centrale d’achat pourrépondre aux besoins des collectivitésadhérentes en matière de funéraire 12

SOMMAIRE

La quatrième édition de notre colloque est le résultat d’un partenariat initié avec la Ville de Paris.Je tiens à remercier Mme Fabienne Giboudeaux, Maire-adjointe chargée des espaces verts à la Ville de Parispour cette collaboration qui constitue, comme elle l’a elle-même souligné, « une petite pierre à la constructionde la politique métropole ».Les cimetières se trouvent désormais au cœur des projets urbains et méritent toute notre attention. Ce sontavant tout des lieux de recueillement et de rassemblement. Reflet de notre communauté, renfermant un héritagepatrimonial, artistique et social, ils accueillent de nombreuses familles et visiteurs lors des obsèques ou des fêtesde la Toussaint. De nouveaux usages s’y développent (promenade, visites à thèmes, lieux touristiques) et denouveaux équipements sont créés pour répondre aux évolutions de la société et aux demandes nouvelles de nosconcitoyens (espaces de cérémonie, jardins du souvenir, columbariums…). De nouveaux modes de gestion y sontégalement mis en place pour favoriser la biodiversité. Ces espaces sont souvent dotés d’une flore d’une richesseinhabituelle en ville et d’une faune qui vient y trouver refuge, face à la pression urbaine. Nombreux ont été lesexemples donnés lors du colloque pour aider les communes adhérentes du SIFUREP à gérer ces cohabitationsnouvelles en garantissant un service public de qualité.Le colloque a permis l’échange sur ces pratiques. Je remercie, à cet égard, MM. Philippe Jacob, responsable du planbiodiversité à la Ville de Paris, Pascal-Hervé Daniel, responsable du service des cimetières de la capitale,Marc Houdon, responsable des activités funéraires de la Ville d’Angers, Bernard Cavalié, paysagiste à l’Atelierde l’Île, ainsi que Patrick Suiro, membre du CORIF, d’avoir alimenté nos réflexions. Je remercie égalementM. Frédéric Bertrand, architecte et urbaniste, de l’Atelier Parisien d’Urbanisme (APUR), qui nous a permis deregarder différemment nos territoires. La centrale d’achat que met en place le SIFUREP sera un outil précieuxpour les communes qui souhaitent passer à l’action.Je remercie enfin Mme Danielle Tartakowsky et M. Régis Bertrand qui ont mis en lumière la fonction historiqueet sociale des cimetières.Comme l’a montré ce colloque, toutes les dimensions que revêtent nos établissements en font des lieux précieuxpour notre patrimoine culturel et environnemental que le SIFUREP entend continuer à défendre à vos côtés.

ÉDITO

Carinne Juste,Présidente du SIFUREPet Maire de Villetaneuse

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Les cimetières :ambassadeursde la biodiversitéen milieu urbainMême en ville, la nature rend d’inesti-mables services à l’Homme. Rassemblantprès de 20 % de l’ensemble des arbres dela capitale, les cimetières constituent unélément incontournable en faveur de labiodiversité.Comme le rappelle Philippe Jacob, responsabledu Plan Biodiversité à la Ville de Paris, « les espacesverts répondent aux besoins de la population enatténuant la température – une particularité bienappréciable en période de canicule – et en assimilant,grâce à la présence des végétaux, une partie de lapollution, inhérente aux métropoles ». Parmi lesespaces verts, il faut englober les cimetières qui sontégalement des lieux de promenade pour la populationurbaine.

Avec un peu plus de 30 000 arbres, les cimetièresparisiens, intra et extra-muros, représentent environ20 % de l’ensemble des arbres de Paris (hors bois),une proportion comparable à celle des parcs et jardinsde la capitale…

La nature en ville contribue, en outre, à la promotion dela biodiversité. C’est lors de la conférence des NationsUnies sur l’environnement et le développement, plusconnue sous le nom de Sommet de Rio1, qu’a étédéfinie la diversité biologique. Il s’agit de la variabilitédes organismes vivantsqui constituent la vie surTerre, depuis le niveaudes gènes (diversité gé-nétique) et des espèces(diversité spécifique),jusqu’à celui des éco-systèmes (diversité éco-logique). « Une naturevivante doit prendre encompte ces différentesnotions qui donnentnaissance au tissu denotre planète, quelques mètres au-dessous et au-dessus de la terre », souligne Philippe Jacob. Or,la biodiversité est aujourd’hui menacée par troisfacteurs principaux.

1 Le sommet de Rio s’est tenu à Rio de Janeiro du 3 au 14 juin1992 sous l’égide de l’Organisation des Nations Unies.Le sommet de la Terre s’est conclu par la signature de laDéclaration de Rio.

02

Philippe Jacob,Responsable du Plan Biodiversité

à la Ville de Paris

Co-organisé avec la Ville de Paris, ce colloque entend apporter sa pierre à la construction de la politiquemétropolitaine. En effet, les cimetières doivent y contribuer largement car ils occupent une place importante dansnos villes et ils sont de plus en plus nombreux à être situés au cœur des projets urbains. La Ville de Paris metdéjà en place ces politiques métropolitaines à travers ces nombreux cimetières extra-muros.

Paris Métropole nous incite à poser un nouveau regard sur les cimetières et à nous interroger sur la mise enplace de ces opérations d’aménagement afin de mieux répondre aux attentes et aux demandes de la population.Face à la densification urbaine autour de Paris, de quelle manière les transports publics vont-ils, par exemple,s’insérer dans ce tissu ?

On reconnaît aujourd’hui les services « écologiques » rendus par les cimetières aussi bien sur des questionsclimatiques, au travers des îlots de fraîcheur qu’ils représentent, que sur des questions de biodiversité, de parleur patrimoine arboré très riche. Les Parisiens sont d’ailleurs sensibles à cette richesse. Les nouveaux usagesdes cimetières en tant que lieu de promenade nous interrogent également sur la place sociétale qu’ilsoccupent aujourd’hui. Nous avons besoin de l’éclairage des sociologues pour nous accompagner dans cesnouvelles politiques. Les cimetières ne doivent pas être des espaces publics oubliés.

J’espère que cette matinée aura contribué à créer de nouveaux projets, de concert avec les acteurs duSIFUREP, et qu’elle va nous permettre d’accomplir un travail en commun intéressant du point de vue sociétalet environnemental.

Fabienne Giboudeaux,Maire-adjointe, chargée desespaces verts à la Ville de Paris

« Les espacesverts répondentaux besoins dela populationen atténuant latempérature eten assimilant,grâce àla présencedes végétaux,une partie dela pollution,inhérente auxmétropoles »Philippe Jacob

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« D’abord, les habitats naturels et semi-naturelss’amenuisent. Ensuite, la fragmentation de l’espaceentraîne un morcellement des milieux et donc unebaisse du nombre d’espèces et un affaiblissementgénétique des populations. Enfin la pression del’homme laisse peu de chances aux espèces fragilestandis que les espèces généralistes pullulent ». AprèsRio, un plan stratégique décennal a été adopté enoctobre 2010 à Nagoya au Japon, suivi, deux moisplus tard, de la Convention des Nations Unies pour ladiversité biologique. Lors de ce sommet, les étatsdu monde entier ont souligné l’importance majeurede la biodiversité en ville. « Ils ont acté une plateformeintergouvernementale qui mobilise tous lesscientifiques en faveur de la biodiversité. » En France,cette démarche s’est traduite par la stratégie pourla diversité, votée pour les dix prochaines années,en mai 2011. Selon Philippe Jacob, dans ce cadre,les établissements funéraires offrent trois avantagesbien spécifiques pour mener une politique fructueuse.« Ces espaces de pleine terre sont gérés par lescommunes et sont donc inaliénables. Ce sont ausside véritables milieux de vie, assez proches de ceuxd’une forêt comme Fontainebleau. Enfin, on peuty trouver des espèces relativement rares. Ainsi, leszones boisées, les pelouses, les massifs, les alléeset les tombes abritent quelque 310 espèces animaleset végétales autochtones ou naturalisées – c’est-à-dire d’origine exotique qui se sont adaptées –répertoriées par la Direction des Espaces verts etde l’Environnement et le Muséum National d’HistoireNaturelle. Parmi elles, figurent deux espècesrégionales végétales protégées, l’orpin de Bologne(une plante de la famille des sedums sexangulare) etla renoncule à petites fleurs ». En ce qui concerne lafaune, le Centre Ornithologique d’Île-de-France, leCORIF, a recensé 25 espèces d’oiseaux nicheurs aucimetière du Père Lachaise qui avec ses 44 hectares,est le plus grand espace vert parisien intra-muros.Au même endroit, pas moins de 264 espèces decoléoptères ont aussi été répertoriées.

Le développement de la biodiversité peut attirer desanimaux responsables, parfois, de dégâts dans lescimetières. À Pantin, une fouine ayant la malheureusehabitude de détruire, durant la nuit, les plantations desjardiniers, a été attrapée puis déportée à l’extérieurde l’établissement. Cependant la présence des fouinesn’est pas toujours indésirable. Dans d’autrescimetières, comme au Père-Lachaise, où les fouinessont très nombreuses, des détériorations semblablesn’ont pas été constatées.

Une cohabitation harmonieuseavec… les renardsFace à la pression urbaine, les animaux viennenttrouver refuge dans les cimetières. C’est le cas à Thiaisoù la réorganisation des friches environnantes aconduit cinq renards à s’y installer… Une informationa alors été délivrée aux familles et notamment à lacommunauté asiatique, très présente sur le territoirequi, traditionnellement, dépose des offrandes alimen-taires sur les tombes à l’occasion de la fête des âmeserrantes. L’arrivée des renards y a été très bienaccueillie par tous et plus particulièrement par cettecommunauté pour qui les renards symbolisent laprotection de l’âme des femmes défuntes…

03Compte-rendu du colloque du jeudi 20 octobre 2011

Quand les cimetières deviennentdes lieux de visite pour les amateursd’oiseaux

Une fois par mois, entre cinq et dix personness’arment de jumelles pour admirer, dans laplus grande discrétion, les nombreuses espècesd’oiseaux qui ont élu domicile au cimetièredu Père-Lachaise. Ces visites sont organiséessous la houlette du Centre Ornithologiqued’Île-de-France, le CORIF (1). Patrick Suiro,membre de l’association, expliquequ’« en avril, on peut découvrir 25 espècesd’oiseaux, jusqu’à 35 en décembre, qui ontréinvesti le milieu grâce à la présence nouvelledes herbes sauvages… ». Le CORIF sensibiliseles Franciliens à la richesse naturaliste d’autrescimetières, comme ceux de Bagneux, de Thiaisou de Pantin. Une initiative que l’associationest tout à fait disposée à reproduire dansd’autres établissements funéraires, si leursgestionnaires en expriment le souhait.

(1) Centre Ornithologique Île-de-France,Maison de l’Oiseau, Parc Forestierde la Poudrerie,Allée Eugène-Burlot 93410 VAUJOURSTéléphone : 01 48 60 13 00e-mail : [email protected]

« Les zonesboisées,

les pelouses,les massifs,

les allées et lestombes abritent

quelque 310espèces animales

et végétalesautochtones ou

naturaliséesPhilippe Jacob

»

RENARD AU CIMETIÈRE DE THIAIS

« Ces espacesde pleine terresont gérés parles communeset sont doncinaliénables.Ce sont ausside véritablesmilieux de vie

Philippe Jacob

»

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Déclinaison duplan biodiversitédans les cimetièresLe cimetière occupe une place de choixdans le plan pour la préservation et lerenforcement de la biodiversité à Paris.Fruit d’une démarche participative, ceplan a été voté en novembre dernier auConseil municipal.

Pour la préparation de son plan, initié en 2010, àl’occasion de l’année internationale de la biodiversité,la Ville de Paris a décidé de consulter citoyens,associations, scientifiques, élus et entreprises.« La municipalité a estimé qu’il fallait mettre de lasynergie dans toutes ses actions, d’où cette dyna-mique participative. » rappelle Philippe Jacob,responsable du plan biodiversité à la Ville de Paris.

Dans ce cadre, des ateliers de terrain ont été misen place. « Dès le début, la ville a voulu soulignerle rôle majeur des cimetières » en retenant, parmiquatre sites pilotes, un établissement funéraire. Outreles canaux et alentour (19e arrondissement), le boisde Vincennes/Bercy-Charenton (12e arrondissement),les berges de la Seine dans le bois de Boulogne(16e arrondissement), le cimetière du Père-Lachaiseet alentour (11e et 20e arrondissements) ont ainsi faitl’objet d’une étude particulière lors de ces ateliers. Auterme de cette étape, a été rédigé un Livre blanc danslequel quatre-vingt-quinze actions ont été proposées.De ces suggestions, trente actions ont été retenues etrépondent aux trois objectifs majeurs du plan.

« Le premier objectif consiste à renforcer lescontinuités écologiques », souligne Philippe Jacob.Il s’agit de fluidifier les liaisons entre les zones vitalespour la biodiversité (les bois), les zones tampons oude développement et les corridors écologiques(la petite ceinture et, bien sûr, les cimetières)pour que les espèces animales et végétalescirculent, s’alimentent et se reproduisent plusfacilement. On parle aussi de trames vertes et bleues,outil d’aménagement défendu par le Grenelle del’Environnement pour reconstituer un réseauécologique cohérent à l’échelle du territoire national.« Les grands cimetières intra et extra-muros, commele Père-Lachaise, mais aussi ceux de Bagneux, Ivry,La Chapelle, Pantin, Saint-Ouen et Thiais, doivent êtreconsidérés comme un élément majeur de la trameverte », insiste Philippe Jacob. Pour cela, la premièreaction du plan consiste à participer à l’élaborationdu Schéma Régional de Cohérence Écologiqued’Île-de-France1, élaboré conjointement par l’État et laRégion d’ici fin 2012 et qui vise, notamment, àidentifier les trames vertes et bleues à l’échellerégionale.

Pour atteindre ce premier objectif, plusieursexpérimentations sont en cours dans les cimetièresparisiens. Ainsi, à Pantin, les cheminements entreles sépultures ont été végétalisés « en conciliantles impératifs de sécurité et de confort des usagers etles objectifs de continuité écologique ». Le SIFUREPva, en outre, lancer une étude sur les emprises mêmesdes sépultures et leur gestion : matériaux, techniquesde végétalisation, entretien, alternative au granit poli.

« Les grandscimetièresparisiens intraet extra-murosdoivent êtreconsidéréscommedes élémentsmajeurs dela trame verte »Philippe Jacob

04

ÉPINAY-SUR-SEINE

CRÉTEIL

« Entre 1998et 2011,l’utilisationdes produitsphytosanitairesa déjà étéréduite de 87 %dansles cimetièresparisiens »Philippe Jacob

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Le deuxième enjeu du plan vise à mieux intégrer labiodiversité dans le développement durable de Paris.« Les cimetières parisiens représentent un potentielde végétalisation important, avec leurs 421 hectaresde superficie globale. Des aménagements doivent êtremis en place pour gérer ces espaces en fonction dela biodiversité. » Ainsi, le plan vise à réintroduiredes espèces régionales dans la gamme des végétauxplantés, à ménager des espaces refuges surl’ensemble du territoire parisien et aussi à adapterl’éclairage urbain à la biodiversité. De manièregénérale, les améliorations qui peuvent être apportéesne nécessitent pas de moyens considérables. « Lesespaces offrent un énorme potentiel, insistePhilippe Jacob. Il suffit d’installer quelques haies ouquelques massifs pour accroître la biodiversité… »

Là encore, des expérimentations sont menées dansles cimetières parisiens. À titre d’exemple, desespaces refuges d’évolution naturelle (nichoirs àoiseaux, gîtes à abeilles et guêpes solitaires, abrisà hérissons…) ont été créés au cimetière du Père-Lachaise puis ont essaimé dans plusieurs cimetières.D’autres initiatives sont au programme commela limitation et le contrôle de la circulation automobile,la poursuite de la perméabilisation des sols, ladiversification des haies végétales ou encore dela diminution de l’emploi des désherbants… Entre 1998et 2011, l’utilisation des produits phytosanitaires(désherbants, mais aussi anti-germinatifs, engrais…)a déjà été réduite de 87 % dans les cimetièresparisiens, notamment grâce à l’implication despersonnels formés aux nouvelles techniquesd’entretien.

Enfin, le troisième enjeu du plan consiste à développeret à fédérer la connaissance et à porter ensuiteles messages auprès du public. « Toutes cesdémarches doivent être accompagnées d’actions desensibilisation et de participation à un certain nombrede protocoles. » Un observatoire de la biodiversitéa été mis en place. Un inventaire des chauves-souris,habituées des cimetières, a par exemple été réaliséavec le concours du Muséum National d’HistoireNaturelle. Dans ce domaine encore, les personnelssont appelés à jouer un rôle majeur d’informationauprès des visiteurs.

1 Schéma Régional de Cohérence Écologique (SRCE) : nouveauschéma d’aménagement du territoire et de protection decertaines ressources naturelles (biodiversité, réseau écologique,habitats naturels). Le SRCE est prévu dans les Lois Grenelle Iet II.

Penser à communiquer« Il n’y a eu aucune réaction négative du public.Quand vous avez du vert sur l’ensemble des carrés,la transformation est toutà fait acceptée… » Parcontre Marc Houdon,Responsable des activitésfunéraires de la Villed’Angers, insiste sur lanécessité d’accompa-gner de telles politiquesde communication vis-à-vis des usagers. « Il fautexpliquer que les herbesspontanées ne sont pasun défaut d’entretienmais le symbole de sols sains sans produit toxique ».

Pascal-Hervé Daniel, Responsable du service descimetières de la Ville de Paris, note qu’il faudrait aussiexpliquer aux usagers comment entretenir leurssépultures sans utiliser de produits toxiques.

05Compte-rendu du colloque du jeudi 20 octobre 2011

Marc Houdon,Responsable des activitésfunéraires de la Ville d’Angers

« Les herbesspontanéesne sont pasun défaut

d’entretien maisle symbole de

sols sains sansproduit toxique

Marc Houdon

»

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Des zones de biodiversitédans les cimetières parisiensSans attendre l’application du plan, la Ville de Paris adécidé, dès cette année, de créer dans tous sescimetières des zones de biodiversité, c’est-à-diredes espaces où l’intervention humaine est réduite aumaximum. Ainsi, aux cimetières d’Ivry et du Père-Lachaise, une prairie est laissée à son état naturel.Au cimetière de Bagneux, ce sont les trottoirs qui sontrecouverts d’herbe.

En collaboration avec l’Agence de l’Écologie Urbaine,l’évolution de la biodiversité est étudiée dans ceszones. Déjà, des pousses naturelles de fleurs rarescomme les orchidées apparaissent, notamment aucimetière de Thiais.

Le coquelicot est de retourGrâce aux efforts de diminution des produitsphytosanitaires, le coquelicot réapparaît dans lescimetières parisiens…

Un nouveau domicilepour les moyens ducsLa présence en nombre des arbres attire naturelle-ment les oiseaux dans les cimetières. Ainsi, ce hiboumoyen duc a élu domicile à Thiais.

06

Cimetière d’Angers : vers le zérophyto à pas mesurés !

La ville d’Angers, explique Marc Houdon, s’est engagée sur l’ensemble de son territoire (parcs, jardins,trottoirs, terrains de sports mais aussi cimetières) à baisser progressivement les traitements phyto-sanitaires, nuisibles à la biodiversité. L’objectif étant à terme, de ne plus en utiliser. « À l’occasionde l’extension du cimetière, une partie paysagère a été créée où aucun traitement n’est effectué.Pour ne pas gêner le public, nous avons installé des dalles alvéolées qui rendent les lieux plus accessiblesaux fauteuils roulants et aux piétons », explique Marc Houdon. L’expérience a débuté il y a deux ans.Un nouveau chantier d’enherbage est en cours. Dans les parties anciennes du cimetière, où le recoursau phytosanitaire a diminué de moitié, les techniciens de la ville d’Angers ont installé des tapisde sedum, une petite plante vivace qui s’accommode bien des terrains secs et rocailleux et qui limitela poussée des mauvaises herbes. Sur les bords des carrés, des massifs de vivaces simples ont étéplantés, nécessitant moins d’entretien.

« La Ville de Parisa décidé, dèscette année, decréer dans tousses cimetièresdes zonesde biodiversité,c’est-à-diredes espaces oùl’interventionhumaine estréduiteau maximum »Pascal-Hervé Daniel

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07Compte-rendu du colloque du jeudi 20 octobre 2011

ÉtudeSIFUREP/APUR :une cartographieen faveur descimetières de larégion parisienneLes études menées par le SIFUREP etl’Atelier Parisien d’Urbanisme (APUR)auprès des communes du syndicatfournissent des éléments inédits surla présence de la nature dans lescimetières. Des éléments à prendre encompte dans les outils d’aménagementdu territoire et dans les politiques dedéveloppement de la biodiversité.

Grâce aux outils informatiques et cartographiques,le travail effectué par le SIFUREP et l’APUR en 2010,sur les 109 cimetières communaux ou intercom-munaux du SIFUREP, apporte des informations inéditessur la contribution des établissements funéraires àla trame verte. Frédéric Bertrand, architecte, urbaniste,Atelier Parisien d’Urbanisme, prône leur intégrationdans les documents de planification de Paris et de larégion parisienne. « Désormais, nous connaissonsles strates de végétation dans et à proximité descimetières, la nature plus ou moins perméable des sols,les écarts de température et les effets possibles surles phénomènes d’îlots de chaleur urbains, lesavantages et inconvénients des différents types declôtures.

De telles informations permettent de regarder diffé-remment nos territoires, de définir des principes d’amé-nagement favorables au développement de la natureen ville. »

À partir de ces études,des fiches thématiquesont été établies, mettanten lumière la diversitédes lieux. « Ainsi, nousvoyons que les cime-tières de Bobigny et deRomainville se trouventen situation inverse. Celuide Bobigny, très bienplanté, apporte une vraiesource de fraîcheur dansun environnement trèsminéral tandis qu’à Romainville, le cimetière représenteune enclave chaude dans une corniche boisée.Pour le cimetière du Père-Lachaise, le phénomène derafraîchissement se fait sentir à l’intérieur mais aussi à100 mètres de profondeur à l’extérieur du cimetière.La situation est contrastée entre la partie ancienne,où les arbres sont très présents, et les territoiresd’extensions, situés à l’est et à l’ouest, qui sont moinsarborés et donc moins frais en période caniculaire. »

Comment expliquer les différencesde température entre les cimetières ?Comme le montrent ces cartes de températureestivale, l’effet de fraîcheur est moins prononcéau cimetière de Montparnasse qu’au Père-Lachaise.Ce phénomène est dû au nombre important de sur-faces imperméables dans le premier établissement(59 % de la surface de l’emprise contre 40 % au Père-Lachaise) et à la plus faible part d’arbres de plus de 10mètres (40 % contre 62 %).

Frédéric Bertrand,Architecte, urbaniste

Atelier Parisien d’Urbanisme

« De tellesinformations

permettent deregarder

différemmentnos territoires,

de définirdes principes

d’aménagementfavorables au

développementde la nature

en villeFrédéric Bertrand

»

PARIS – LE PÈRE-LACHAISE – AOÛT 2000

Thermographie d’été - Îlots de fraîcheur en degrésources : APUR, photo infrarouge LANDSAT

Paysage et biodiversité, lutte contre les îlots de chaleur urbains36 °C 25 °C 19 °C

PARIS – CIMETIÈRE MONTPARNASSE – AOÛT 2010

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Bernard Cavalié,Paysagiste, Atelier de l’Île

Ces renseignements constituent un outil précieux pourles gestionnaires des cimetières désireux d’aménagerleurs établissements pour y favoriser la biodiversitéet le développement durable. « Au XXe siècle, les grandscimetières extra-muros ont été construits sur une trametrès rationnelle de carrés… », a rappelé Pascal-HervéDaniel, responsable du service des cimetières de laVille de Paris. « À l’occasion des travaux de voirie quidoivent être menés, il va falloir proposer des plansde réaménagement qui répondront à la nouvelle utilitésociétale des cimetières. Ils permettront de gagner,en moyenne, une allée sur deux pour les piétons et delimiter ainsi l’accès aux véhicules. Dans des cimetièrescomme Bagneux et Pantin, des allées de promenadepaysagères pourront être créées sur des dizainesde kilomètres… »

Noisy-le-Grand etMagny-le-Hongre : des exemplesd’intégration du cimetière dansle tissu urbainLe cimetière de Noisy-le-Grand a fait l’objet d’exten-sion et à Magny-le-Hongre près de Marne-la-Valléec’est un nouveau cimetière qui a été construit. Dèsle démarrage, l’aménagement paysager a été prisen compte et la conception des cimetières a étéconfiée à l’Atelier de l’Île. Dans les deux cas,les terrains concernés se situaient en pente etl’espace a, pour cette raison, été organisé en terrassesbordées de haies. « Nous avons essayé de mettreen place un dispositif limitant la partie minéraledes sépultures en installant un paysage beaucoup plusvégétal », a expliqué Bernard Cavalié, paysagiste,Atelier de l’Île. À Noisy-le-Grand, l’axe qui descendvers la Marne a été « mis en scène » autour d’unesource d’eau créant ainsi une diversité paysagère etun cheminement attractif. L’idée était déjà d’en faire uncimetière qui serve de traversée dans la ville avec uncheminement piétonnier.

À Magny-le-Hongre, les sépultures sont limitées àdes dalles horizontales et le mur a été équipé de struc-tures métalliques permettant d’y faire pousser desplantes grimpantes qui masquent ainsi la clôture. Lemur a quand même été traité à l’ancienne avec desincrustations de pierres. « Ces aménagements datentd’une dizaine d’années, on ne parlait pas encorebiodiversité » fait remarquer Bernard Cavalié. Le pay-sagiste se réjouit que dans le cadre de larequalification en cours dans les quartiers nord dela ville d’Asnières, la ville ait accepté que le cimetièresoit intégré à la réflexion. Une porte devrait être percéepour ouvrir une allée piétonne qui relie deux quartiers.

En matière de haies, d’allées et de divisions,de grandes disparités existent encore entre lesréalisations qui favorisent la biodiversité et celles quiintègrent moins aisément les établissements dans leurenvironnement.

Les Fauvelles à Courbevoie :un réaménagement réussi

Des allées réduites de 4,50 m à 2,50 m pour ydévelopper les plantations d’arbres, un entretien necomportant aucun pesticide : les travaux menésau cimetière des Fauvelles à Courbevoie, le plusgrand espace vert public de la ville, constituentune réussite en matière de développement durableet de biodiversité. Une réorganisation pensée,comme l’a souligné l’architecte et urbaniste, FrédéricBertrand, dans le cadre du réaménagement généralde la commune.

« Il va falloirproposerdes plans deréaménagementqui répondrontà la nouvelleutilité sociétaledes cimetières. »Pascal-Hérvé Daniel

LEVALLOIS

PANTIN

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Paysage etpatrimoine :une histoirefunéraire…Autre aspect à l’étude dans lescimetières : le patrimoine funéraire etla qualité de ses matériaux. Unerichesse menacée aujourd’hui parl’uniformisation des sépultures.

Le cimetière, l’une des créations les plusextraordinaires de l’époque contemporaine, commel’a rappelé Régis Bertrand, professeur émérited’histoire moderne de l’université d’Aix-Marseille,a connu son âge d’or entre le Second Empire etla deuxième guerre mondiale. « Avec le Père-Lachaise,le cimetière s’ouvre au public, les jardins funéraires sedéveloppent… » La présence de la nature invite à laméditation, symbolise le passage du temps, liant ainsile minéral et le végétal. « L’artisanat funéraire y eststupéfiant, les tombes, gravées à la main, offrent unegrande variété de formes et leurs modèles, diffuséspar la gravure, franchissent l’Atlantique ». Or, cetexemple fondateur, où cohabitent harmonieusementnature et architecture, est aujourd’hui menacé. « Lesmonuments sont devenus de plus en plus uniformes »constate Régis Bertrand. « Le paysage est en traind’évoluer » renchérit de son côté Frédéric Bertrand,architecte et urbaniste à l’APUR. « On assiste àune perte de la diversité des monuments mais aussidu végétal qui participe au sens du lieu. L’offre estpréfabriquée et standardisée, avec un dispositiftechnique très logique où les caveaux sont bétonnés etles sols moins perméables. »

Pour contrecarrer cette tendance, l’architecte del’APUR préconise notamment une revalorisation dumétier de marbrier et cite le modèle allemand dans cedomaine. Il faut réfléchir sur des principes de volumesextrêmement simples qui ne sont pas ceux que l’onconnaît aujourd’hui. L’objectif consiste à préserverun héritage qui respecte à la fois le cimetière et sonenvironnement. Autre modèle de cimetière dont onpeut s’inspirer pour améliorer le paysage funéraire,celui de Zurich en Suisse. « L’organisation y est prochede nos établissements, avec des sépultures enrangées, l’offre funéraire est faite d’unité et desimplicité et préserve en même temps la doubletradition de la dimension collective et individuelle dela mort. » En ce qui concerne les matériaux utilisés enFrance, Frédéric Bertrand s’interroge sur leur origine.« D’où vient la pierre ? À part le marbre de Carrare,rien ne justifie, du point de vue environnemental,qu’elle ne vienne pas de France… Il serait tout à faitpossible de développer une économie locale enexploitant les matériaux issus des cimetièreseux-mêmes. »

Régis Bertrand,Professeur émérited’histoire moderne

de l’université d’Aix-Marseille

« La présencede la natureinvite à la

méditation,symbolisele passage

du temps, liantainsi le minéral

et le végétalRégis Bertrand

»

09Compte-rendu du colloque du jeudi 20 octobre 2011

BONDY

PARIS – LE PÈRE-LACHAISE

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« Toute tombeest émouvantepar définitionet constitueun documentpour l’histoirede l’art »Régis Bertrand

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Répondant aux critiques émises par les intervenantsdes tables rondes sur la pauvreté de l’art funéraireactuel, Philippe Caillarec, président des établissementsRébillon, reconnaît une certaine « paresse dans lacréativité… ». Comme le souligne Michel Minard,conseiller du président des établissements OGF,« certes l’expression du souvenir doit être diverse, maisla clientèle n’a plus les moyens d’y consacrer desbudgets élevés. » Dans ce contexte, l’équilibre entrele végétal et le minéral ne doit pas, pour autant,être rompu, alerte Philippe Caillarec. « Il ne fautpas tomber dans un excès inverse, où le végétalprédominerait, ce qui poserait des problèmes d’entre-tien considérable… » Plutôt qu’un « tout végétal »,le président de Rébillon suggère une introductiongraduée de la nature dans les cimetières. « Lesgestionnaires pourraient profiter des reprises desépultures qui se font souvent de manière désordonnée,pour planter quelques arbres plutôt que de se lancerdans des opérations très importantes et très onéreuseset qui peuvent engendrer de vrais désastres en casde manque de personnel. Il ne faut pas devenir desintégristes du végétal ! »

L’équilibre du modèle funéraire français se trouveégalement menacé par « les intégristes du patrimoine »comme les nomme Régis Bertrand. Dans ce domaine,il convient de faire des choix, selon le professeurd’histoire moderne, et pour cela de bien connaîtreauparavant les œuvres qui composent le cimetière.« Les gestionnaires doivent se faire aider par desspécialistes, comme les généalogistes et les historiensde l’art. Dans une tombe « banale » peut se cacherla sépulture d’une personne connue, localementou nationalement. Les statues des sépultures peuventse révéler, par ailleurs, de simples copies… Cepen-dant, toute tombe est émouvante par définition etconstitue un document pour l’histoire de l’art. » Se posealors la question du devenir des sépultures lors de leurreprise. Comment conserver ce patrimoine funéraire ?

« Les chapelles sont onéreuses, beaucoup de famillesne peuvent plus les entretenir. », souligne Pascal-HervéDaniel, responsable du service des cimetières de laVille de Paris. Les communes sont invitées à réfléchirà la façon de conserver, à moindre coût, ce patrimoinefunéraire en l’affectant à un autre usage. Un test estmené dans ce sens au cimetière du Père-Lachaise surtrois chapelles funéraires, datant du XIXe siècle, dont laconcession est échue. Après restauration, elles vontêtre transformées et aménagées en columbariumpouvant pour chaque chapelle, accueillir huit cases.« Cette expérience répond aussi au besoin croissantd’espace pour la crémation qui est en train de se subs-tituer au mode traditionnel des funérailles, conclutPascal-Hervé Daniel, elle répond donc aux besoinsde la ville et permet, en même temps, de conserver lepatrimoine des chapelles. »

Pascal-Hervé Daniel,Responsable du servicedes cimetièresde la Ville de Paris

SAINT-DENISMAISON-ALFORT

PARIS – LE PÈRE-LACHAISE

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Les cimetièrescomme lieux derassemblementssocioculturels dansla citéLieu de recueillement et d’accom-pagnement, désormais destination depromenade familiale, le cimetière revêtégalement une fonction sociale. Il devientainsi le témoin d’un patrimoine identitaireet culturel.

Rassemblements publics, poses de plaques commémo-ratives, manifestations du souvenir : au milieu destombes familiales et individuelles, le cimetière peut créerun espace collectif. Danielle Tartakowsky, professeurd’histoire contemporaine à l’université Paris VIIIet spécialiste des mouvements de rue, s’est intéresséeà ce sujet dans un livre consacré au Cimetière duPère-Lachaise Nous irons chanter sur vos tombes. Elleprépare un article pour la revue d’histoire sociale,Le mouvement social, en collaboration avec EmmanuelBellanger, auteur du livre La mort, une affaire publique,qui retrace les grandes étapes de l’histoire du SIFUREP.

Le Père-Lachaise a été particulièrement étudié parDanielle Tartakowsky, qui s’est attachée à« comprendre comment et pourquoi, dans certainescirconstances, des associations sont amenées às’approprier le cimetière pour y célébrer deshommages, parfois politiques, pour recréer ducollectif comme tel est le cas pour le mur des Fédérésou à travers l’association pour la défense desmonuments napoléoniens du Père-Lachaise. » Lephénomène n’est pas propre à ce cimetière. D’autresétablissements funéraires ont également leurspanthéons ouvriers, leurs lieux d’hommage auxdisparus socialistes ou communistes, leursmonuments de la déportation, objets de nombreusesvisites. « Nous avons à faire à des libres penseurs,des exilés qui ont à retrouver du sens, à reconstruireune sacralité d’un autre genre. » À l’étranger, desmanifestations identiques se reproduisent, commeà Londres où est enterré Karl Marx ou à Chicagoautour des tombes des anarchistes pendus en 1886.« Il s’agit de saints laïcs, de martyrs, des héros quicréent des rassemblements pesant fortement dansl’organisation du cimetière et qui n’ont pas été prévuspar ses règlements. » Grâce à leurs épitaphes, cesmonuments deviennent de véritables sourcesd’histoire. Les cimetières ont encore beaucoup à nousapprendre. « Nous en sommes au tout début durepérage de ce phénomène de construction sociale… »

11Compte-rendu du colloque du jeudi 20 octobre 2011

Intégrer la route européenne des cimetières…

Une route européenne des cimetières voit le jour. L’idée émane de l’ASCE (Association of SignificantCemeteries in Europe) créée en 2001. Cette association, qui compte aujourd’hui 118membresreprésentant 22 pays et 98 villes, œuvre pour le développement de la coopération enmatièrede conservation et demise en valeur du patrimoine funéraire, encore tropméconnu. Conçu sur lemodèle des différentes routes culturelles, comme celle de la soie ou encore les Chemins de Compostelle,ce projet a été accueilli très favorablement par les institutions culturelles car le thème est, à la fois,universel et fédérateur, dans le respect des diverses traditions enmatière funéraire. Au 15 septembredernier, 18 pays, 44 villes et 54 cimetières ont adhéré au projet destiné à valoriser l’héritage culturel,historique et social des cimetières. Paris est la première ville française engagée dans ce projet. Strasbourget Sète vont très bientôt lui emboîter le pas. Le SIFUREP pourrait intégrer l’association pour aider àlamise en valeur des cimetières des villes adhérentes qui le souhaitent.

Danielle Tartakowsky,Professeur d’histoire

contemporaineuniversité Paris VIII

CHAMPIGNY-SUR-MARNE

« Des associationssont amenéesà s’approprierle cimetière

pour y célébrerdes hommages

Danielle Tartakowsky

»

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« L’essentiel…– Les espaces verts présents dans les cimetières

atténuent la température en assimilant grâce auxvégétaux, une partie de la pollution ;

– les cimetières sont de véritables milieux de vieparticipant au développement de la biodiversité.Ils regorgent d’espèces faunistiques et floristiquesrares ou protégées. Ils participent donc àla reconstruction d’un réseau écologique cohérentsur le territoire national ;

– des expérimentations sont menées dans plusieurscimetières intra et extra-muros afin de renforcerdavantage les trames vertes et bleues : réintroductiond’espèces végétales régionales rares ou protégées(coquelicot, orchidées, renoncule à petites fleurs…)création d’espaces refuges d’évolution naturellepour animaux (oiseaux comme le hibou « moyenducs », chauves-souris, renards…) ;

– toutes les démarches favorisant le développementde la biodiversité doivent être accompagnéesd’actions de sensibilisation et d’information auprèsdes visiteurs ;

– le cimetière occupe également une fonction socialeet historique. En plus d’être un lieu de promenadeil devient le témoin d’un patrimoine identitairearchitectural et culturel à travers, notamment,les cérémonies commémoratives.

…en chiffres » :– Avec plus de 30 000 arbres, les cimetières parisiens,

intra et extra-muros, représentent environ 20 %de l’ensemble des arbres de Paris (hors bois) ;

– les zones boisées, les pelouses, les massifs, lesallées et les tombes abritent quelques 310 espècesanimales et végétales autochtones ou naturalisées ;

– entre 1998 et 2011, l’utilisation des produitsphytosanitaires a déjà été réduite de 87 % dansles cimetières parisiens ;

– les cimetières parisiens représentent un potentielde végétalisation important : plus de 421 hectaresde superficie globale et 25 km de murs de clôture,100 km de voiries et de trottoirs et plusde 150 bâtiments de tous ordres.

Directrice de publication : Carinne Juste - Comité de rédaction : Catherine Dumas, Dominique Bursztejn, Émilie Derouen, Anne Rogé.Conception et réalisation : www.tempsreel.info – Crédits photos : APUR - Jean-Luc Vallet - Didier Fournet.Impression : IBL Imprimeurs, certifié Print Environnement et Imprim’Vert 2008, garantit la gestion des déchets dangereux en filières agréées.Imprimé sur papier issu de forêts certifiées PEFC à pâte ECF.

SIFUREP : Une centrale d’achatpour répondre aux besoinsdes collectivités adhérentesLe SIFUREP créé une centrale d’achat à destination descommunes adhérentes afin de les aider à aménageret entretenir leurs cimetières. Cette centrale assurera lapassation et la signature des marchés de services, fournitureset travaux pour le compte des collectivités membres.

Les marchés concernent :1. Les besoins :

- en équipements mobiliers, et notammenten équipements funéraires ;- en fourniture de plantes, d’arbres et d’arbusteset prestations associées.

2. L’entretien des cimetières :- prestations d’entretien des espaces verts.

3. La gestion des cimetières :- prestations et travaux de reprise de concession ;- logiciels de gestion de cimetière ;- acquisition de cercueils et de reliquaires.

4. La centrale d’achat organisera également des voyagesd’études sur les questions funéraires et l’aménagementdes cimetières. Par ailleurs, à travers cette centrale,le SIFUREP peut également intervenir sur demandesspécifiques de certains adhérents, en matière d’aména-gement de cimetières au titre des prestations suivantes :- assistance à maîtrise d’ouvrage ;- maîtrise d’œuvre, contrôle technique, de SPS ettout autre marché de prestations intellectuelles liéesaux travaux ;- travaux.

Pour tous renseignements concernant la centrale d’achatdu SIFUREP, vous pouvez contacter :Mathieu LEGRAND, responsable du développement([email protected] - 06.17.81.80.56)