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CARI 08 Vers la création d’une ontologie des processus de gestion TI : le cas de l’implantation des ERP dans la petite et moyenne entreprise. Hamid Nach Ph. D. Candidate Albert Lejeune, Ph.D. Professor Information Technology Management & Technology Department InnoV Research Group InnoV Research Group Université de Québec à Montréal Université de Québec à Montréal [email protected] [email protected] RÉSUMÉ. De plus en plus, les petites et moyennes entreprises sont appelées à introduire des progiciels de gestion de type ERP accessibles par le Web, c’est le nouveau marché des grands éditeurs de progiciels intégrés. Dans les PME, les projets ERP sont pourtant particulièrement difficiles à réussir. Les PME, souvent en mal de ressources humaines et financières, sont moins préparées que les grandes entreprises. Leurs chances de survivre ou de se ressaisir suite à un échec d’implantation d’ERP sont moindres que pour les grandes firmes. De plus, lorsqu’ils se lancent dans des projets d’implantation d’ERP, les gestionnaires des PME n’assurent leurs rôles que dans la limite de leurs compétences et de leurs connaissances. La littérature est, cependant, bien explicite sur les pratiques de gestion saines qui peuvent mener à bien un projet ERP. La présente recherche est une première étape pour surmonter ce déficit. En adoptant une approche holiste, elle vise à consolider et à formaliser sous forme d’ontologie, à partir d’une revue de littéraire extensive, les processus et les compétences clés pour mener à bien l’introduction d’un ERP dans une PME. La recherche a permis de recenser et de formaliser 395 termes, chacun avec sa propre définition. La structure hiérarchique des classes formalisées est présentée sous forme d’ontologie et est exploitée avec le logiciel Protégé. Grâce à cet outil, son interopérabilité et son support pour le web sémantique, l’exploitation de cette ontologie pourrait prendre des formes multiples et variées telles que la création d’un dispositif d’apprentissage, une plateforme de collaboration en ligne ou un outil cartographique de processus de gestion de projet au service du succès des ERP dans les PME.

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De plus en plus, les petites et moyennes entreprises sont appelées à introduire des progiciels de gestion de type ERP accessibles par le Web, c’est le nouveau marché des grands éditeurs de progiciels intégrés. Dans les PME, les projets ERP sont pourtant particulièrement difficiles à réussir. Les PME, souvent en mal de ressources humaines et financières, sont moins préparées que les grandes entreprises. Leurs chances de survivre ou de se ressaisir suite à un échec d’implantation d’ERP sont moindres que pour les grandes firmes. De plus, lorsqu’ils se lancent dans des projets d’implantation d’ERP, les gestionnaires des PME n’assurent leurs rôles que dans la limite de leurs compétences et de leurs connaissances. La littérature est, cependant, bien explicite sur les pratiques de gestion saines qui peuvent mener à bien un projet ERP. La présente recherche est une première étape pour surmonter ce déficit. En adoptant une approche holiste, elle vise à consolider et à formaliser sous forme d’ontologie, à partir d’une revue de littéraire extensive, les processus et les compétences clés pour mener à bien l’introduction d’un ERP dans une PME. La recherche a permis de recenser et de formaliser 395 termes, chacun avec sa propre définition. La structure hiérarchique des classes formalisées est présentée sous forme d’ontologie et est exploitée avec le logiciel Protégé. Grâce à cet outil, son interopérabilité et son support pour le web sémantique, l’exploitation de cette ontologie pourrait prendre des formes multiples et variées telles que la création d’un dispositif d’apprentissage, une plateforme de collaboration en ligne ou un outil cartographique de processus de gestion de projet au service du succès des ERP dans les PME.

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Vers la création d’une ontologie des processus de gestion TI : le cas de l’implantation des ERP

dans la petite et moyenne entreprise.

Hamid Nach Ph. D. Candidate Albert Lejeune, Ph.D. ProfessorInformation Technology Management & Technology

DepartmentInnoV Research Group InnoV Research GroupUniversité de Québec à Montréal Université de Québec à Montré[email protected] [email protected]

RÉSUMÉ. De plus en plus, les petites et moyennes entreprises sont appelées à introduire des progiciels de gestion de type ERP accessibles par le Web, c’est le nouveau marché des grands éditeurs de progiciels intégrés. Dans les PME, les projets ERP sont pourtant particulièrement difficiles à réussir. Les PME, souvent en mal de ressources humaines et financières, sont moins préparées que les grandes entreprises. Leurs chances de survivre ou de se ressaisir suite à un échec d’implantation d’ERP sont moindres que pour les grandes firmes. De plus, lorsqu’ils se lancent dans des projets d’implantation d’ERP, les gestionnaires des PME n’assurent leurs rôles que dans la limite de leurs compétences et de leurs connaissances. La littérature est, cependant, bien explicite sur les pratiques de gestion saines qui peuvent mener à bien un projet ERP. La présente recherche est une première étape pour surmonter ce déficit. En adoptant une approche holiste, elle vise à consolider et à formaliser sous forme d’ontologie, à partir d’une revue de littéraire extensive, les processus et les compétences clés pour mener à bien l’introduction d’un ERP dans une PME. La recherche a permis de recenser et de formaliser 395 termes, chacun avec sa propre définition. La structure hiérarchique des classes formalisées est présentée sous forme d’ontologie et est exploitée avec le logiciel Protégé. Grâce à cet outil, son interopérabilité et son support pour le web sémantique, l’exploitation de cette ontologie pourrait prendre des formes multiples et variées telles que la création d’un dispositif d’apprentissage, une plateforme de collaboration en ligne ou un outil cartographique de processus de gestion de projet au service du succès des ERP dans les PME.

ABSTRACT. The purpose of this research project is to consolidate and formalize as ontology, on the basis of an extensive literature review, the key processes and skills required for successful implementation of ERP in an SME. Using the Protégé software program, the research identified and formalized 395 terms, each of which has its own definition. Exploitation of this ontology could take multiple and varied forms, including creation of a learning system, an on-line cooperation platform, or a project management process mapping tool contributing to successful use of ERP in SMEs.

MOTS-CLÉS : ERP, PME, technologies de l’information, ontologie, cartographie, Gestion TI.

KEYWORDS: ERP, SME, Information technology, ontology, concept mapping, IT management

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1. Introduction

L’ERP (Enterprise Ressource Planning) est une suite d’applications informatiques de grande envergure, hautement intégrées et reposant sur une base de données unique (Themistocleous et al., 2001). Le système est bâti selon une vision globale de l’entreprise (Shakir, 2000) et intègre l’ensemble de ses processus d’affaires (Holland et Light, 1999). Après s’être consacrés aux grandes entreprises, les fournisseurs ERP, se sont tournés vers le marché des petites et moyennes entreprises (PME) (Burgelman et Federico, 2006). Ils sont déjà mis sur le marché une nouvelle gamme de progiciels simples, à des prix abordables et pouvant être rapidement implantés grâce à des méthodes dites « accélérées » (Kirshmer, 1999). Les PME, de leur côté, sont aujourd’hui prises par d’intenses facteurs de compétition. Plus que jamais auparavant, il a été question, pour ces entreprises, de réévaluer et restructurer les processus d’affaires et de s’intégrer au village global. Déjà, en 2001, les PME se sont taillées 23.3 % du total du marché de l’ERP (Bernroider et Koch, 2001). Seulement, l’implémentation d’un ERP ne va pas sans anicroche. Bancroft et al. (Bancroft et al., 1998) , par exemple, affirment que 90% des projets d’implémentation d’ERP finissent tard ou dépassent leurs budgets. Les PME, souvent en mal de ressources humaines et financières, sont encore plus vulnérables que les grandes entreprises. Leur chance de survivre ou de se ressaisir rapidement suite à un échec d’implantation de progiciel ERP est moindre que les grandes firmes. Ravarini et al. (2000) rajoutent que, quand elles embarquent dans des projets ERP, les PME en ignorent souvent les menaces et les enjeux. Pourtant, la littérature en systèmes d’information est explicite sur les mesures organisationnelles à prendre pour en tirer le meilleur parti et d’en surmonter les écueils (Markus et Tanis, 2000; Somers et Nelson, 2001b; Raymond et al., 2003; Boutary et Monnoyer, 2003). Cette littérature est cependant fragmentée et peu formalisée et il y a besoin de considérer le processus d’adoption dans sa globalité. L’adoption d’une approche holiste pourrait aider les gestionnaires des PME à mieux saisir les enjeux des ERP. La présente recherche est une première étape pour surmonter ce déficit de connaissance en développant un outil facilitant l’apprentissage individuel et collectif. Cette recherche vise tout particulièrement à consolider et à formaliser sous forme d’ontologie, à partir d’une revue de littéraire extensive, les processus et les compétences clés pour mener à bien l’introduction d’un ERP dans une PME. Grâce au web sémantique et à des logiciels de conception d’ontologie, tels que Protégé qui jouit d’un haut niveau d’interopérabilité, l’exploitation de cette ontologie pourrait prendre des formes multiples et variées telle que la création d’un dispositif d’apprentissage, une plateforme de collaboration en ligne ou un outil cartographique de visualisation d’un processus de gestion de projet ERP pour les PME. Le document suivant est organisé en 5 sections. Dans la section suivante, nous présentons le cadre conceptuel qui servira de fil conducteur à la présente recherche. Nous présentons ensuite la revue de littérature. Plus loin, nous abordons les aspects méthodologiques. Nous discutons tout de suite après des résultats obtenus. Dans la toute dernière section de ce document, nous

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abordons les limites de la présente recherche et les pistes pour les recherches futures. Regardons tout de suite comment est présenté le cadre conceptuel.

2. Le cadre conceptuel

Une ontologie est  une organisation particulière des connaissances conceptuelles d'un domaine donné qui s'appuie sur la notion de classe, ou concept, et sur une organisation généralement taxinomique des classes (Lejeune et al., 2007). Son objectif est la formalisation et la gestion des connaissances relatives aux savoir-faire ou à des connaissances diverses. Pour construire une ontologie, il est nécessaire de décider de l’étendue des connaissances à capter. C’est pourquoi nous avons développé le cadre conceptuel présenté dans la figure 1. Le modèle est bâti sur les assises de la théorie de Kauffman et al. (Kauffman et al., 2001) et la théorie de conversion TI d’Henry Lucas (Lucas, 1999). Les sections suivantes présentent ce modèle.

2.1. Le modèle de Kauffman et al.

Kauffman et al. (2001) soutiennent que toute initiative TI (technologies de l’information) est traversée par trois axes : d’abord le flux de valeurs, ensuite, la valeur potentielle et enfin la valeur réalisée. 1) Le flux de valeurs est un ensemble de valeurs alimentées par l’environnement de l’entreprise. Ce sont généralement les valeurs observées quand une technologie particulière est proprement implémentée et utilisée. Souvent, elles sont associées à des fins d’amélioration de compétitivité et de performance ou de relation avec les fournisseurs, les partenaires ou/et les clients. 2) la valeur potentielle est une instance d’une valeur identifiée parmi le flux de valeurs. Dans un monde parfait, elles devraient être identiques. Seulement, c’est rarement le cas vu les spécificités culturelles, organisationnelles et technologiques de chaque organisation, d’un côté, et les contraintes imposées par le paysage environnemental d’un autre côté. Ces éléments font office de barrières à la valorisation. La valeur potentielle ne serait alors que le maximum de ce qu’une organisation est en mesure de réaliser en prenant en considération l’environnement dans lequel l’initiative TI est amorcée 3) La valeur réalisée est découverte plus tard notamment à la phase d’utilisation. C’est cette même valeur que l’organisation obtient comme fruit de son investissement. Les contingences de conversion TI jouent un rôle crucial pour déterminer dans quelle mesure la valeur potentielle est traduite en une valeur réalisée. S’il existe des barrières de conversion, la valeur tend à diminuer. Ces barrières relèvent des ressources, des connaissances et de l’utilisation.

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2.2. Le modèle de Henry Lucas

Lucas, H. (1999) s’est intéressé à expliquer pourquoi des initiatives TI semblables, amorcées dans une même industrie, sont bénéfiques pour certaines organisations et moins pour d’autres. Dans sa théorie, il introduit la notion de l’efficacité de conversion TI pour expliquer ce phénomène. Il s’agit de la capacité d’une organisation d’implémenter avec succès une initiative TI. L’efficacité de conversion de TI est une combinaison complexe d’habilités managériales et technologiques qui reflètent la prédisposition d’une organisation d’utiliser son capital humain et les ressources technologiques offertes pour créer des nouvelles valeurs. Le facteur de conversion est imprégné des particularités de chaque organisation. Il s’agit d’un attribut unique et difficile voire impossible à reproduire. Il est forgé, en effet, des expériences et des connaissances cumulées à travers le temps et est disséminé dans les processus et dans la culture de chaque organisation. De fait, si les ressources technologiques en matériel et en logiciel ainsi que les services TI qui y sont associés sont accessibles à toutes les entreprises, la capacité de les transformer en bénéfices, elle, diffère d’une organisation à une autre selon son efficacité de conversion de la TI. Celle-ci se reflète principalement dans les processus relatifs à la gouvernance TI, la gestion de projet, les investissements consentis en formation, en capital humain, en infrastructure technologique, en gestion de risque et en gestion du changement organisationnel.

2.2. Le cadre conceptuel

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Le modèle théorique de Kauffman et al. (2001) s’articule sur un axe temporel et met en relief la nature des freins qui entravent la création de la valeur potentielle d’une initiative relative à un investissement TI. Selon Kauffman et al. (2001) , pour maximiser les profits, il faut faire en sorte que ces barrières soient réduites ou éliminées. Les auteurs soulignent l’importance des contingences de conversion TI mais n’explicitent pas, toutefois, leurs natures. Leur modèle relate les barrières sur lesquelles achoppent ces contingences, à savoir les barrières relevant des connaissances, des ressources et de l’utilisation, mais sans pour autant, aborder la nature même de ces contingences ainsi que leurs dépendances. Il faut identifier, outre les freins, les moteurs de la gouvernance TI. Le modèle de Lucas (1999) répond à cette préoccupation. Celui-ci met en évidence les processus qui relèvent des contingences de conversion TI et leur impact sur le succès d’un projet TI. Forts de ces éléments, nous avons jugé opportun de tirer profit de ces deux modèles. Le premier couvre le cycle de création de valeur d’un projet TI tout en identifiant les freins au processus de création de valeur et le deuxième relate les moteurs du processus et met en évidence la variable de l’efficacité de conversion TI. La résultante de cette combinaison est illustrée dans le cadre conceptuel présenté dans la figure 1. Le modèle se présente sur un axe temporel et commence à l’étape de l’analyse de flux de valeurs, puis passe par l’évaluation de la valeur potentielle d’un projet TI et finit par la création d’une valeur réalisée. Nous mettons en relief les contingences de conversion TI qui sont déterminantes pour assurer un rendement optimal d’une initiative d’investissement en TI. Ceci dit, le cadre conceptuel nous est utile sur deux volets, premièrement, pour structurer les informations dans la revue de littérature et deuxièmement, pour nous permettre de structurer les concepts et les classes principales qui nous servent à bâtir l’ontologie.

Figure 1: Modèle conceptuel

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3. Revue de littérature

3.1. Flux de valeurs

Le survol de la littérature nous a permis de déceler les raisons pour lesquelles une PME envisagerait de se lancer dans un projet ERP. Pour ce faire, nous allons positionner la PME, d’abord, dans son environnent externe en vue de déterminer les facteurs d’influence potentiels externes, puis repositionner la PME par rapport à son environnement interne afin de repérer les flux générés par les besoins internes.

3.1.1 Les flux externesSelon Banker et al. (2000), les organisations faisant face à une grande incertitude environnementale, notamment les PME, pourraient avoir intérêt à adopter un ERP afin d'intégrer davantage leurs informations et leurs processus. Les auteurs ajoutent que, habituellement, lorsque la concurrence possède une technologie qui lui procure un avantage concurrentiel tel un ERP, il y a de fortes chances qu’une organisation du même secteur d'activités adopte une technologie similaire. Les PME sont notamment sujettes à des donneurs d’ordre tels que les partenaires ou leurs fournisseurs. Ces acteurs, dont dépend la survie de la PME, peuvent lui imposer l’adoption d’un ERP en

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vue d’intégrer les processus interorganisationnels (Blili et Raymond, 1993), de réaliser des échanges de données informatisées ou de fournir des informations sur ses relations d’affaires (Mourrain, 2003). Le commerce électronique présente de nouveaux enjeux que la PME doit soulever. La PME est appelée, dans ce contexte, à devenir une entreprise «étendue» pour faire face à la concurrence mondiale (Raymond et Menvielle, 2000). La PME peut, éventuellement, s’intégrer à des plates-formes électroniques en vue de transiger sur des marchés électroniques où se rencontrent vendeurs et acheteurs d’un type particulier de biens ou de services (Raymond et Menvielle, 2000). La diffusion des technologies relatives à la gestion de la chaîne logistique et la gestion de relation clientèle peut être favorable à la PME. Ceci passe, d’abord, selon Raymond et Menvielle (2000), par l’intégration de la chaîne de valeur par le biais des progiciels de gestion de type ERP. La PME peut être appelée à faire évoluer son système d’information notamment lorsque les fournisseurs ou les clients lui propose des accès à leurs systèmes d’informations via des systèmes de commandes électroniques (Mourrain, 2003). Un ERP permet d’éviter les entrées de données multiples, la redondance des données et les inconsistances des processus. Les réseaux auxquels participent le dirigeant ou ses collaborateurs sont aussi des lieux d’échange où la gestion des ressources informationnelles est de plus en plus abordée et entraîne une prise de conscience de l’intérêt d’un ERP. Les experts et les consultants dans des domaines autres que les technologies de l’information peuvent également sensibiliser un chef d’entreprise aux bénéfices d’un progiciel de gestion intégré. Les fournisseurs d’ERP travaillent aussi d’arrache pied, par le biais de leur force de vente, à motiver l’intérêt des PME envers les ERP. D’un autre côté, les médias et les salons de conférences sont aussi des moyens de choix pour peser sur la décision de lancement d’un projet ERP auprès des dirigeants de PME. Les actionnaires, soucieux d’obtenir des informations sur l’activité de la PME, sont rassurés par la mise en place d’outils de gestion performants et peuvent influer le lancement de ce type de projet. Certaines institutions et agences de développement qui interviennent auprès des PME peuvent les inciter à s’engager par des actions collectives ou individuelles dans un projet d’intégration. De même certains organismes professionnels et de normalisation sectoriels peuvent préconiser à se doter d’un ERP pour améliorer la compétitivité.

3.1.2 Les flux internesLa PME répond aussi à certains impératifs qui relèvent de son environnement interne. Ceci crée un flux de facteurs internes susceptibles d’influencer le dirigeant dans la décision de lancement d’une démarche d’intégration. Le besoin d’améliorer les processus internes de l’entreprise est au centre des ces facteurs. Dans le cas d’une PME qui opère en mode juste à temps, il est avantageux que l’entreprise intègre ses processus de production (Raymond et al., 2003). Le cycle de production pourrait ainsi être amélioré. Les PME sont de plus en plus préoccupées par l’obtention de données en temps réel afin de prendre de meilleures décisions, ce qui exige une plus grande intégration des systèmes utilisés (Raymond et al., 2003). Une tranche considérable des PME choisit d’implanter un ERP pour des fins de standardisation et de restructuration

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de leurs systèmes d’informations (Mabert et al., 1999). Selon Sammon et Adam (2003), les PME manufacturières qui souscrivent à une philosophie de croissance par le biais d’acquisitions ressentent, a fortiori, un besoin de palier aux problèmes d’hétérogénéité des processus de production. Un ERP est en mesure de standardiser les procédés de fabrication, de réduire le cycle de production, de diminuer le nombre d’effectif et d’augmenter la productivité. D’un autre côté, les PME ayant une stratégie de gestion des coûts ou de réduction des prix seraient plus disposées à adopter un ERP (Banker et al., 2000). L’initiation d’un projet ERP peut venir aussi en réponse aux besoins de transformation des processus de la PME. Ceux ci peuvent être de différents niveaux à savoir: amélioration locale, intégration interne, reconception de processus, reconception du réseau d’affaires ou redéfinition de l’activité centrale de l’entreprise (Venkataramanan, 1994).

3.2 Barrière à la valorisation

3.2.1 Les barrières organisationnelles

3.2.1.1 Manque de ressources

Pour une PME, le manque de ressources peut rendre délicate, voire périlleuse, la mise en place d’un projet TI de grande envergure. La survie de l’entreprise peut en souffrir. Les projets TI de taille importante tels les ERP requièrent des ressources en abondance dans les PME et sont généralement hors d’atteinte pour ce type d’entreprises (Raymond et Menvielle, 2000). Le potentiel humain interne dédié à la gouvernance des systèmes d’information est souvent quasi-inexistant et la marge de manœuvre financière se fait très serrée (Raymond et Menvielle, 2000). La contrainte des ressources financières fait en sorte que la PME se prive les services d’une expertise externe de qualité tels que les consultants et les formations avancées des fournisseurs (Cragg et King, 1993).

3.2.1.2 Sous-utilisation des systèmes d’information

Alors que dans le contexte des grandes organisations, l’on considère désormais que les TI ont largement dépassé leur rôle de support aux activités administratives pour jouer un rôle de choix dans les stratégies organisationnelles (Keen, 1991), la situation dans les PME est très différente. L’état d’avancement de ces entreprises en matière des systèmes d’information (SI) est très inégal (Vidal et Leszczynska, 2003). Les SI dans le cas des PME sont généralement peu organisés et sont automatisés par des solutions fonctionnelles en silo, basées, souvent, sur des développements spécifiques (Mourrain, 2003). Venkatraman (1995) ajoute que les entreprises de taille modeste connaissent, en général, une faible appropriation et une sous-utilisation des technologies d’information.

3.2.1.3 Planification stratégique informelle

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Les PME font souvent très peu de planification stratégique à long terme et sont le plus engagées dans des processus de planification opérationnelle à court terme (Robinson et al., 1986). Elles ont peu l’habitude à travailler en mode projet (Torres, 1999). Les gestionnaires, eux, ont tendance à être réactifs plutôt que proactifs (Raymond et Blili, 2000). En outre, ils bâtissent leurs processus décisionnels sur des flux physiques plutôt que sur des flux informationnels. En d’autres termes, en tenant compte de la difficulté d’accès à du conseil professionnel externe, les dirigeants des PME se fient à leur entourage professionnel et personnel pour obtenir les informations utiles à la gestion de leurs entreprises dans des conditions économiques intéressantes (Raymond et al., 1998). Seulement, les informations recueillies, selon Raymond et al. (1998) sont, souvent, trop explicites et ne portent que sur la nature des outils et leurs potentialités techniques. Elles oublient, presque toujours, la nécessaire adéquation aux stratégies de l’entreprise (Raymond et al., 1998).

3.2.1.4 Dominance de la personnalité du dirigeant

L’influence de la personnalité du dirigeant sur les choix stratégiques de la PME est largement commentée dans la littérature (Roux, 1991). La PME est souvent considérée comme l’extension de la personnalité du dirigeant. Celui-ci dispose généralement d’une forte sensibilité à l’aspect investissement interne induit par la mise en place d’un système d’information qu’il verra avant tout comme un centre de coûts pour sa société sans attendre d’amélioration de la productivité directe (Mourrain, 2003). Le dirigeant, par son degré de proactivité et son attitude vis-à-vis des innovations technologiques, influence directement les politiques d’intégration, d’appropriation et d’utilisation des technologies de l’information.

3.2.1.5 Structure de l’entreprise

Les PME diffèrent des entreprises de taille plus importante de façon parfois significative. D’abord, il existe moins de paliers hiérarchiques dans une PME que dans une grande entreprise. Leurs structures sont organiques et reposent sur trois niveaux principaux à savoir, le dirigeant, l’encadrant et l’employé (Mourrain, 2003). Certaines de ces différences se reflètent, également, par la fréquente concentration de plusieurs activités dans les mains d’une seule personne (Lang et Calentone, 1997). La PME se distingue, en outre, par une faible différentiation de ses services. Les gestionnaires, eux, occupent souvent différentes fonctions dans l’organisation et s’appuient sur une gestion fortement marquée par la proximité. Dans ce contexte, les fonctions stratégiques et opérationnelles sont intimement liées.

3.2.2 Les barrières environnementales

3.2.2.1 Environnement instable

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La PME, selon Raymond et Menvielle (2000), vit au rythme de la mondialisation des marchés et de la déréglementation. Elle se meut dans un environnement marqué par une compétitivité fondée sur le savoir et le capital intellectuel. Ses relations avec ses fournisseurs, sa clientèle et ses partenaires se font de plus en plus complexes.

3.2.2.2 La concurrence

Les entreprises concurrentes constituent l’un des éléments externes les plus importants qu’une PME considère quand il s’agit d’amorcer une initiative TI (Turban et al., 2002). Si une entreprise du même secteur d’activité a réalisé des avantages suite à l’adoption d’un projet TI, une PME considérera indubitablement d’emboîter le pas pour demeurer compétitive (Samiaji et Zairi, 2003). Si aucun avantage n’est enregistré, la PME aurait tendance à ne pas se lancer dans l’aventure.

3.3 Les contingences de conversion TI

3.3.1 Les gestionnaires

3.3.1.1 La présence d’un champion

Le succès d’une initiative TI, dont l’ERP, est souvent tributaire de la présence d’un champion (1991). Celui ci est habituellement placé dans un rang supérieur dans la hiérarchie organisationnelle (Mckersie et Walton, 1991) et joue le rôle de facilitateur auprès des utilisateurs et des dirigeants.

3.3.1.2 L’équipe du projet

L’équipe du projet est un élément critique pour le succès d’un projet ERP (Clemons, 1998). L’équipe doit disposer de connaissances et d’expertise assez équilibrées entre affaires et technologies (Davenport, 2000). Bingi et al. (1999) ajoutent que les employés les plus qualifiés, eux, doivent être dédiés au projet à temps plein. Le choix du chef de projet est aussi critique pour le succès du projet (Bancroft et al., 1998). Ses traits de personnalité, son expérience, sa formation, sa connaissance de l’entreprise et des technologies sont déterminants pour assurer pleinement son rôle (Davenport, 2000; Shanks et al., 2000). Le chef de projet influence les décisions et les interactions du projet et joue, en sus, des rôles divers : Il est, en effet, un champion de l’innovation, un communicateur de la vision et des objectifs du projet, un ambassadeur auprès de la direction, l’arbitre et le négociateur dans la résolution des conflits (Shanks et al., 2000).

3.3.2 Les utilisateurs

Dans une PME, l’incertitude entourant l’implantation des TI est élevée, notamment lorsque ces initiatives sont imposées par des clients ou des fournisseurs de poids plus

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importants (Raymond et Blili, 2000). Ceci a un impact sur le degré d’adoption et d’acceptation d’un SI de la part des employés. Seule une sensibilisation des utilisateurs au rôle de ces technologies est en mesure de surmonter cette difficulté. La responsabilisation d’un ou plusieurs super-utilisateurs peut s’avérer très utile. Il faut garder à l’esprit, toutefois, que le risque de dépendance envers ces utilisateurs clés est de taille. Pour contrer cette difficulté, la PME peut envisager de mettre en place une série de mesures de motivation et de rétention matérielles ou morales à l’égard de ces utilisateurs.

3.3.3 Les consultants

3.3.3.1 Gestion des consultants

Un autre facteur est déterminant pour le succès d’un projet ERP consiste dans le choix des consultants les plus qualifiés (Bingi et al., 1999). Un consultant en ERP doit disposer de qualifications aussi variées que complexes. En sus d’une bonne habileté dans les relations interpersonnelles, le consultant doit faire preuve d’une haute expertise eu égard aux aspects fonctionnels et techniques du progiciel à implanter (2001). Dans le cas d’ERP, les chances de succès sont bien meilleures si l’intégrateur en charge de l’implantation compte déjà une série de projets réussis auprès de PME. Les consultants doivent se donner comme mission d’initier des pratiques d’apprentissage organisationnel auprès de la direction et des employés. Ceci dans le but de surmonter les difficultés relatives au manque d’expertise TI (Fichman, 2000).

3.3.3.2 Le partenariat Vendeur – Client

Le partenariat Vendeur–Client doit être de nature stratégique et doit servir de levier pour l’amélioration de l’efficacité et de la compétitivité de l’entreprise (Somers et Nelson, 2001a). Ce partenariat peut également persister même après la clôture du projet. L’entreprise peut ainsi bénéficier des mises à jour et d’un support technique continu de la part du fournisseur.

3.3.4 La portée de projet

L’un des éléments clés de succès d’un projet ERP est de bien définir sa portée et ses objectifs (Somers et Nelson, 2001a). En absence d’un plan directeur, le projet risque de déborder et de dépasser ses échéanciers et son budget (Sweat, 1999). Davenport (2000), préconise de mettre au point un plan d’affaire rigoureux qui considère notamment la valeur attendue du projet ERP et ses implications organisationnelles. Dans le cas d’une grande envergure, le découpage en phases, en attaquant un nombre limité de fonctions revêt une importance cruciale (Bernard et al., 2002). Ceci permettrait de mieux contrôler les échéanciers et les budgets d’une part, et d’introduire un effet d’apprentissage, d’une autre part, puisque les nouvelles implantations pourront

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profiter des expériences passées. D’autre part, à cause des contraintes budgétaires, il est toujours utile de dresser une liste des fonctionnalités prioritaires qu’il incombe d’installer en premier (Samiaji et Zairi, 2003). Les fonctionnalités facultatives peuvent être mises en place ultérieurement selon le budget.

3.3.5. La gestion de risque

La gestion de risque joue un rôle clé dans un projet d’implantation de TI. Il importe alors d’identifier les principaux éléments de risque afin de permettre aux dirigeants de PME de dresser les bases d’une réflexion sur les mécanismes d’atténuation et de mitigation. Les principaux facteurs de risque identifiés dans la littérature sont les suivants : mauvaise qualité du progiciel; dépassement du budget; dépassement de l’échéancier (Bernard et al., 2002); taille relative du projet (Barki et al., 1993); diversité de l’équipe de projet (Ewusi-Mensah, 1997); processus d’implantation trop poussé par les consultants (Antony, 2000); nombre d’unités d’affaires impliquées dans le projet (Bingi et al., 1999; Schmidt et al., 2001); manque d’expertise en implantation d’ERP (Patry et al., 2001); manque d’expertise avec les processus (Schmidt et al., 2001; Sumner, 2000); manque d’expertise en support aux utilisateurs (Kliem, 2000); manque d’expertise en technologies de l’information (Al-Mashari et Zairi, 2000); dépendance envers les utilisateurs clés (Markus et al., 2000); insuffisance des ressources (Lynch, 1985); manque de clarté dans la définition des rôles (Gross et Ginzberg, 1984); manque d’engagement de l’équipe de projet (Chang et Gable, 2001; Gilbert, 1996); niveau de maturité organisationnelle (Bancroft et al., 1998); ampleur des changements apportés par le système (Pinnsonneaut et Barki, 2002); complexité des processus à supporter (Willcocks et Griffiths, 1994); manque de flexibilité du progiciel (Bancroft et al., 1998).

3.3.6 Stratégie TI

3.3.6.1 Stratégie d’implantation

Il existe trois approches pour implanter un progiciel ERP, l 1), l’approche incrémentale, et 2) l’approche radicale et 3) l’approche  Vanille, celle-ci  est la moins complexe et consiste à implanter l’ERP dans un site unique, souvent, de moins de 100 utilisateurs. Cette approche, plus appropriée aux PME (Brown et Vessey, 1999), permet notamment, de réduire les risques techniques et processuels du projet et de familiariser graduellement les usagers au nouveau système.

3.3.6.2 Découpage en phases

Selon Parr et Shanks, (2000b), il est crucial de définir clairement les différentes phases du projet d’implantation d’ERP en vue de définir les facteurs de succès qui le définissent. Ceci dit, quoiqu’il n’existe pas un consensus sur le découpage en phases d’un projet d’implantation d’ERP (Parr et Shanks, 2000a), nous retrouvons

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habituellement un ensemble d’activités génériques dans chacune des approches d’implantation abordée dans la littérature. Ces activités sont l'étude préliminaire, le diagnostic de l’existant, l’acquisition du progiciel, la conception des nouveaux processus d’affaires, le paramétrage du progiciel et enfin la mise en place, l’exploitation et l’évaluation du progiciel (Gregoire et al., 2002).

3.3.7 Processus de gestion

3.3.7.1 La sélection du progiciel approprié

Le choix de l’ERP qui s’aligne le plus sur les besoins organisationnels de l’entreprise revêt une importance cruciale. Selon les auteurs, le choix judicieux du progiciel permet non seulement de garantir des modifications minimales du progiciel mais d’assurer le succès du projet. (Janson et Subramanian, 1996) 3.3.7.2 La communication

Une bonne communication est vitale pour le succès d’un projet ERP (1999). Elle est particulièrement importante pour créer une compréhension et une approbation du projet auprès des intervenants. La communication devrait commencer tôt, être consistante et continue (2000). Elle doit véhiculer les directives relatives à la portée du projet ERP, à ses objectifs et aux tâches nécessaires à son implantation ainsi qu’à son utilisation (Summer, 1999). Une bonne communication est en mesure, également, d’encourager un retour continu d’informations de la part des employés(1998).

3.3.7.3 La formation

Le but de la formation est non seulement d’apprendre à manipuler le nouveau système (Maaloul et Mezghani, 2003), mais également de disposer d’une image claire des processus de travail , de la façon dont ils sont intégrés dans le système et de leur impact sur l’organisation (Bingi et al., 1999). Welti (1999) préconise que les premiers modules de la formation soient destinés aux gestionnaires, ensuite, à l’équipe chargée de l’implantation de l’ERP et enfin aux utilisateurs finaux. Les formations prennent différentes formes en fonction du champ d’action de chaque intervenant. Les gestionnaires, eux, doivent être éclairés sur les enjeux et défia du projet dans son ensemble. L’équipe de projet, notamment le chef de projet et les responsables de domaines, doivent avoir une compréhension approfondie des fonctionnalités du système. Les utilisateurs finaux, quant à eux, doivent être formés sur les fonctionnalités du système qui relèvent de leur travail.

3.3.8 Changement organisationnel

3.3.8.1 La gestion du changement

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Il est reconnu que l’introduction l’ERP doit être impérativement accompagnée d’un ensemble de changements organisationnels tant au niveau de la culture, de la structure que des procédés d’affaires (2000). La gestion de changement revêt une importance cruciale pour le succès du projet (Shanks et al., 2000). De fait, les utilisateurs, comme les managers, doivent être ouverts aux changements introduits par le système.

3.3.8.2. Redéfinition des processus d’affaires

L’introduction du système ERP doit être accompagnée d’un alignement des processus organisationnels de l’entreprise au mode de fonctionnement du progiciel. Il s’agit de transformer les procédés organisationnels en adoptant les processus intégrés au sein du progiciel en vue d'obtenir des améliorations majeures en termes de qualité, de performance et de productivité (Rivard et al., 1996). Ceci dit, même s’il existe un différent sur la place de l’activité de la réingénierie par rapport à l’implantation du progiciel dans le calendrier du projet, plusieurs chercheurs préconisent de mener la réingénierie à fur et à mesure de l’implantation du progiciel pour que la réingénierie suive la livraison des fonctionnalités du système (Bancroft et al., 1998).

3.3.8.3. Personnalisation minimale du progiciel

La personnalisation du progiciel est admise dans une certaine mesure (Appleton, 1997), mais lorsqu’elle est excessive, elle est synonyme d’augmentation des coûts et de dépassement des délais (Janson et Subramanian, 1996). Elle prive, de plus, l’entreprise de la maintenance et des mises à jour futures du fournisseur (Somers et Nelson, 2001a).

3.3.9 Infrastructure TI

3.3.9.1 L’architecture technologique

Bien qu’un projet ERP soit piloté sur une base d’affaires, il n’en reste pas moins que l’architecture technologique soit vitale pour le projet (Somers et Nelson, 2001a). L’intégration de l’ERP dans les applications existantes ainsi que son niveau de centralisation ou de décentralisation doit, impérativement, être prise en compte (1999).

3.3.9.2 L’analyse et la conversion des données

La consistance des données introduites dans le système ERP est cruciale pour une bonne utilisation du système (Markus et al., 2000). Le défi est de trouver les données pertinentes à charger dans le système et de convertir les structures des données hétérogènes en un format unique et consistant (Somers et Nelson, 2001a).

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3. La démarche de construction d’ontologie

Après cette revue de littérature qui représente le domaine que l’on veut modéliser, regardons à présent la démarche que nous allons adopter pour construire l’ontologie. Trois méthodes sont généralement possibles pour construire une ontologie : la méthode manuelle, la méthode automatique et la méthode mixte (Posea et Harzallah, 2004). La méthode manuelle permet aux experts de définir, d’une manière consensuelle, les concepts et les liens qui les relient selon leur conception du domaine. La technique est particulièrement utile pour créer une nouvelle ontologie ou étendre une ontologie existante. Par la méthode automatique, l’ontologie est construite par des techniques informatisées d’extraction des connaissances. Les concepts et les relations d’un domaine particulier sont extraits et vérifiés par des inférences assistées par ordinateur. L’approche mixte combine les deux premières méthodes de telle sorte que les ontologies construites selon ce mode soient d’abord développées par des techniques d’inférence automatique puis vérifiées et étendues manuellement. L’approche que nous avons retenue est l’approche manuelle. Nous allons recourir à une démarche que nous appelons la démarche ontologisante (voir figure 2) (Lejeune et al., 2005). Celle-ci est une méthode manuelle et progressive qui comprend sept étapes principales.  Le processus peut évoluer en pratique de manière itérative. Les cartes conceptuelles produites facilitent le passage à un environnement numérique de conception d’ontologie tel que Protégé1. Regardons à présent les activités de ce processus

.Figure 2 : La démarche ontologisante

1 http://protege.stanford.edu/

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(1) Recueil des données. Cette étape consiste à s’approprier le domaine en se référant à une revue spécialisée. Le but est de recueillir les concepts et les construits qui décrivent le sujet. Dans le cadre de cette recherche, nous avons puisé dans la littérature reliée à l’introduction des ERP dans les PME. La cadre conceptuel présenté dans la figure nous a particulièrement servi pour délimiter le domaine que l’on veut modéliser 2) Mise en liste des termes : Cette étape consiste à énumérer dans une liste ordonnée alphabétiquement, les construits issus de l’étape précédente. Le but de cette liste est de faciliter le repérage et le dénombrement des concepts mais aussi de détecter les construits redondants. (3) Organisation des concepts en grappe. Cette activité consiste à manipuler et regrouper les termes issus de la liste. C’est ici que les premiers rapports et liens entre ces termes sont établis. À ce niveau du processus, l'accent est mis sur deux types de relations : les relations méronymiques – de type A fait partie de B - et les relations hyponymiques qui expriment des relations d’inclusion ou d’héritage entre deux objets (A est un B). Il existe principalement trois approches possibles pour développer une hiérarchie de concepts (Uschold et Gruninger, 1996): premièrement, un procédé de développement de haut en bas qui commence par une définition des concepts les plus généraux du domaine et se poursuit par la spécialisation des concepts, deuxièmement, un procédé de développement de bas en haut qui commence par la définition des concepts les plus spécifiques et se poursuit avec leur regroupement en concepts plus généraux et troisièmement, un procédé combiné de ces deux approches. Nous avons retenu, pour cette étude une approche combinée. Celle ci consiste à bâtir l’hiérarchie des concepts selon un procédé de haut en bas et de bas en haut. Au tout début, les concepts les plus importants sont définis, notamment ceux issus du cadre conceptuel de la recherche et ensuite, ils sont généralisés ou spécialisés, suivant le cas. 4) Reproduction de la grappe en un graphe : Cette activité consiste à transcrire dans un outil informatique de modélisation de connaissances la structure hiérarchisée issue de l’étape précédente. L’utilisation de l’outil graphique facilite la manipulation des

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termes notamment quand leur nombre devient de plus en plus important. Cette phase devient aussi l’occasion de délimiter davantage le domaine étudié, de raffiner les relations et chercher les informations manquantes. Dans notre cas, nous avons recours à l’utilitaire TouchGraph2. 5) Conception des cartes concentriques: la structure du graphe est reproduite sous forme de cartes concentriques. Une carte concentrique est constituée d'un centre et de plusieurs anneaux (Harvey et Lemire, 2001). Le cercle qui délimite le centre est appelé noyau; il renferme le terme de base qui sert à identifier le domaine ou le monde dont il est question. Sur cet anneau, viennent se greffer les autres concepts en anneaux multiples. Chaque anneau présente les sous-concepts relevant du concept principal. Les cartes concentriques, dont la lecture se fait dans le sens des aiguilles d’une montre à partir de midi, présentent l’avantage d’apporter une vision synthétique et de délimiter la connaissance tout en présentant implicitement la structure hiérarchique des concepts. Ces représentations permettent aussi d'organiser une quantité importante d’informations en un tout cohérent et facilement accessible. La conception des cartes concentriques requiert généralement des outils d’édition graphique. La plupart des logiciels de production graphique permettent, l’exportation vers des pages destinées à la publication sur le web en vue d’une possible navigation hypertextuelle entre les concepts. 6) Développement du glossaire : Le glossaire devient le fonds documentaire du domaine. Il a comme fonction principale de rendre uniformes la compréhension et les significations des termes utilisés Chaque entrée du glossaire contient, le construit, sa définition et les descripteurs. 7) Développement de l’index. L’index favorise le repérage des éléments lexicaux. Cette activité consiste à mettre les concepts dans une table alphabétique qui renvoient aux pages et aux ressources utilisées comme il en est usage dans les livres. Le travail de codage et de structuration des termes est réalisé conjointement, selon une approche itérative, par les deux chercheurs. La technologie Wiki a été utilisée pour supporter les diverses activités de la démarche.

4. Résultats

4.2 Vers l’ontologie du domaine

La démarche ontologisante a permis de recenser et de formaliser 395 concepts relevant du domaine d’adoption d’ERP dans une PME. Chaque concept dispose de sa propre définition. Les concepts sont présentés dans 46 cartes concentriques faisant une moyenne d’environ 8 concepts par carte. Les concepts recensés prennent trois formes distinctes (Lejeune et al., 2007), d’abord : « les acteurs » c'est-à-dire les entités individuelles qui peuvent agir ou mener une action (par exemple, super-utilisateur, consultant, chef de projet), ensuite « les objets », qui peuvent être des entités abstraites (par exemple, alignement, risque, soutien) ou concrètes (par exemple, plateforme technologique, poste de travail) et enfin « les actions » que les acteurs

2 http://www.touchgraph.com

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peuvent entretenir dans le cadre du projet (par exemple, classer les besoins, exiger des démonstrations, débloquer les ressources). La profondeur de la taxonomie est de 8 de niveaux. Le graphe présentant toute la taxonomie du domaine est réalisé par l’utilitaire TouchGraph (voir figure 3). C’est un outil écrit en Java qui permet de concevoir et de visualiser une structure hiérarchique d’un ensemble de concepts. Il met en évidence les nœuds et les arcs les reliant. L’usager est en mesure d’examiner un nœud tout en gardant une vue sur l’ensemble de la structure. Il est également en mesure de faire un zoom ou changer l’angle de vue d’une partie ou de l’ensemble de la structure.

Figure 3 : Aperçu de la taxonomie du domaine moyennant l’utilitaire TouchGraph

Comme nous en avons discuté, les cartes concentriques constituent une étape importante dans la démarche ontologisante. Ces représentations favorisent un regard de synthèse sur un nombre considérable de concepts hiérarchisés. La figure 4 présente la carte concentrique du premier niveau. On y trouve notamment les  superclasses, 1) « flux de valeurs » avec ses classes associées « flux externe » et « flux interne », puis 2) la superclasse « barrières à la valorisation » avec ses deux sous-classes « barrières environnementales » et « barrières organisationnelles » et enfin 3) la superclasse « projet d’implantation ». Sous cette classe on trouve notamment, les processus de gestion TI et les facteurs clés de succès associés aux phases i) d’« évaluation » ii) de «sélection » iii) et d’« implantation ». La classe « risques » est également présentée dans cette carte. Les descripteurs de ces classes sont présentés dans le tableau 1. Pour illustrer les classes de niveaux inférieurs, les sous-classes associées à « flux externe» sont présentées à la figure 5, on y trouve les trois principaux agents qui pèsent sur l’action d’adopter un ERP à savoir les « donneurs d’ordre »,  les « agents d’influence » et les « agents de normalisation ».

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Figure 4: Carte du premier niveau Figure 5: Carte « flux externe »

Tableau 1: Descripteurs de la carte de premier niveau

Introduction d’ERP dans une PMENiveau 1 Niveau 2 Descripteur

Flux de valeursEnsemble des conducteurs qui militent en faveur de l’adoption d’un progiciel de gestion intégré.

Flux interneLe flux interne constitue l’ensemble des besoins propres l’environnement interne de l’entreprise.

Flux externeLe flux externe naît de l’interaction de l’entreprise avec son environnement. Cette interaction peut faire que l’entreprise adopte un ER

Barrières à la valorisation

Il s’agit de l’ensemble des contraintes internes et externes à l’entreprise qui fait que la valeur potentielle d’un projet d’adoption d’ERP soit diminuée.

Barrières environnementales

Ensemble des contraintes imposées par le paysage environnemental de l’entreprise.

Barrières organisationnelles

Ensemble des spécificités culturelles, organisationnelles et technologiques qui font office de barrières à la réalisation de la valeur potentielle d’un projet ERP auprès de la PME.

Projet d’implantation Projet d’adoption d’un progiciel de gestion intégré par une petite et moyenne entrepriseÉvaluation C’est la phase dans laquelle on procède à l’évaluation du projet d’adoption d’ERP

SélectionLa phase de sélection comprend les activités de sélection du progiciel qui correspond le mieux aux besoins de l’entreprise.

ImplantationLa phase d’implantation comprend les activités de mise en place du progiciel au sein de l’entreprise.

RisquesCe sont l’ensemble des éléments susceptibles de compromettre le succès du projet d’adoption d’ERP.

Comme nous avons discuté,  les concepts recensés prennent trois formes distinctes, « les acteurs », « les objets » et « les actions ». À partir des cartes définis, il a été possible de déterminer des cartes scénarios. Les scénarios sont des trames d’histoires

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composées d’une suite d’actions entretenues par des acteurs sur des objets particuliers pour des fins particulières (Lejeune et al., 2007). L’utilité des cartes scénarios réside dans leur capacité de définir les rôles que doivent jouer les différents acteurs et les éléments à prendre en considération dans un projet d’implantation d’ERP (voir l’exemple présenté dans la figure 7). Ces scénarios peuvent également être instanciés dans des cas organisationnels particuliers.

Figure 7: exemple de carte scénarios

4.2 L’ontologie : utilisation de Protégé

Afin de mieux exploiter la taxonomie développée, nous avons jugé nécessaire de passer à un environnement numérique adéquat pour le développement et l’exploitation d’une ontologie. Le choix s’est arrêté sur le logiciel Protégé. Celui-ci est un éditeur qui permet de construire une ontologie pour un domaine donné, de définir des formulaires d’entrée et d’acquérir des données à l’aide de ces formulaires sous forme d’instances. Protégé comporte une librairie Java qui peut être utilisée pour créer de véritables applications à bases de connaissances. L’outil, est aussi extensible grâce à ses «plugins» qui viennent enrichir ses fonctionnalités. Protégé propose, par ailleurs, un ensemble d’outils de visualisation et de création, d’interrogation et d’analyse de bases de connaissances. Cela dit, la taxonomie développée fut ainsi reproduite dans Protégé. Chaque classe s’est accompagnée de son descripteur. Dans la figure suivante (figure 6), nous

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présentons un aperçu de l’ontologie moyennant le plugin « Jambalaya ». Grâce à son haut degré d’interopérabilité, Protégé peut ainsi être interfacé avec toute application indépendante dont le modèle interne repose sur la taxonomie développée.

Figure 6: Visualisation de l’ontologie dans Protégé- 2000 moyennant le plugin « Jambalaya »

5. Discussion et conclusion

Les PME attendent de plus en plus des progiciels de gestion intégrés la rationalisation de leurs processus. Mais souvent, lorsqu’ils embarquent dans un projet ERP, les gestionnaires PME n’assurent leurs rôles que dans la limite de leurs compétences et de leurs connaissances. La littérature est, cependant, bien explicite sur les pratiques de gestion saines qui peuvent mener à bien un projet ERP. L’adoption d’une approche holiste, la capitalisation et la formalisation, sous forme d’ontologie, des compétences et des processus clés qui sont déterminants pour le succès d’un projet ERP peut constituer une première étape pour surmonter ce déficit. L’ontologie développée dans le cadre de cette recherche pourrait agir comme un pré-requis pour implémenter un dispositif d’apprentissage, une plateforme de collaboration en ligne ou un outil cartographique de processus de gestion de projet au service du succès des ERP dans les PME. Il faut aussi reconnaître les limites de cette recherche car, même en adoptant une approche holiste, nous ne prétendons pas couvrir tout le phénomène d’adoption et d’implantation d’ERP dans la PME. Nous croyons cependant que nous avons capturé les concepts les plus importants reliés aux compétences et aux processus de gestion TI pour mener à bien un projet ERP.

Il a été démontré, par ailleurs, que les ontologies sont des outils au service des formations et que leur usage contribue à une gestion plus efficiente des connaissances (Maliappis et Sideridis, 2004). Les ontologies de domaine peuvent faciliter la prise de décision et de fait entretiennent des liens de plus en plus étroits avec le développement

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de capacités stratégiques (Lejeune et al., 2007). Seulement, même parfaitement modélisée, une ontologie ne serait d’aucune utilité sans un dispositif de formation ou d’aide à la décision qui l’exploite. Il serait particulièrement utile, dans le cadre des projets de recherches futurs de développer un prototype d’une plateforme d’apprentissage en ligne relatives aux processus de gestion de projet ERP dans une PME. La présente recherche s’inscrit dans cette perspective, elle fait partie d’un projet de recherche beaucoup plus large qui vise à développer un dispositif d’apprentissage au profit des gestionnaires des petites et moyennes entreprises. Comme étape fondamentale vers la création de ce dispositif, il a été nécessaire de jeter les fondements théoriques et conceptuels du domaine d’implantation d’ERP dans la PME et de capturer et de formaliser, sous forme d’ontologie, les concepts et les termes qui y sont reliés. À ce stade, la présente recherche apporte une contribution pour la communauté des chercheurs en synthétisant une revue de littérature exhaustive - mais fragmentée - du domaine de l’implantation des ERP dans la PME. Elle apporte également une formalisation et une consolidation des concepts clés reliés aux compétences et aux processus de gestion TI garant le succès d’un projet ERP dans la petite et moyenne entreprise. Les acteurs, les processus, les actions, les moteurs et les freins à la création de valeur sont bien identifiés et structurés. Dans cette même veine, nous avons pu constater qu’il existe des initiatives pour créer des ontologies des processus de gestion comme par exemple l’initiative «The Open Source Business Management Ontology » (OSBMO) (Jenz et al, 2004). En adoptant une approche holiste, de telles initiatives contribuent sans doute à une meilleure compréhension des pratiques de gestion dans les organisations et enrichissent nos connaissances sur le domaine. IL faut signaliser que L’OSBMO a une portée différente de la notre, elle se focalise sur la problématique de modélisation des processus d’affaire et de gestion de projet dans une initiative da réingénierie de processus d’affaires (BPR). Elle ne considère pas le cas particulier d’implantation d’un système d’information de type ERP dans une petite et moyenne entreprise comme le fait la présente recherche. De point de vue méthodologique, grâce à la démarche en 7 étapes que nous avons appelé «  la démarche ontologisante » et que nous avons décrite plus haut, la présente recherche pourrait servir de modèle pour construire un monde de connaissance, selon une approche ontologique, dans divers domaines de la vie organisationnelle.