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PHYSIO-GÉO Géographie Physique et Environnement (ISSN 1958-573X) Collection "Ouvrages" GÉOMORPHOLOGIE ET VARIATIONS GLOBALES DU NIVEAU DE LA MER Pierre GUÉRÉMY Mai 2013

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PHYSIO-GÉO

Géographie Physique et Environnement

(ISSN 1958-573X)

Collection "Ouvrages"

GÉOMORPHOLOGIE ET VARIATIONS GLOBALES DU NIVEAU DE LA MER

Pierre GUÉRÉMY

Mai 2013

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GÉOMORPHOLOGIE

ET

VARIATIONS GLOBALES

DU NIVEAU DE LA MER

Pierre GUÉRÉMY *

* : Professeur honoraire à l’université de Reims Champagne-Ardenne, 12 boulevard des Clèches, 51420 CERNAY-LES-REIMS

Mise en ligne : mai 2013.

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AVANT-PROPOS Ce texte n'aurait pas vu le jour sans le travail d'équipe engagé sur le terrain dès 1979, en compagnie de Bernard DUMAS, Jeannine RAFFY et René LHÉNAFF, et sans l'aide financière du Laboratoire de l'Université de Val de Marne, que dirigeait Bernard DUMAS. L'auteur de ce texte n'ignore pas ce qu'il leur doit. Il doit également beaucoup à Sanda BALESCU, Jean-Claude BOUSQUET, Helmut BRÜCKNER, Filippo CAMPOLO, géomètre à Lazaro di Motta San Giovanni en Calabre, Paul HEARTY, Michel LAMOTHE et André PASCAL. La démarche géomorphologique, visant à mettre en évidence les variations du niveau de la mer, repose, ici, sur l'identification et l'évolution des anciennes formes de terrain fossiles, qui constituent la surface de transgression, sur laquelle reposent les dépôts de terrasses marines construites. Cette démarche est largement inspirée de l'enseignement reçu de Pierre BIROT. Dans cet enseignement, il était attaché beaucoup de prix à une définition géomorphologique précise des formes de terrain, qu'elles soient actuelles ou anciennes, subaériennes ou fossiles, et de celles résultant de la prise en compte de l'érosion différentielle. Sans omettre, en fin de compte l'évolution géomorphologique, qu'elles ont subie au cours des différentes phases de leur existence. Les résultats ainsi obtenus apportent la preuve d'oscillations glacio-eustatiques, qui se sont déroulées à l'échelle du millénaire. Cette démarche, et ce résultat, sont de la respon-sabilité de l'auteur de ces lignes. Ils ne sont pas tous partagés par les autres membres de l'équipe, qui a procédé à ces observations de terrain.

AVANT-PROPOS

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INTRODUCTION La géomorphologie a souvent été sollicitée afin de mettre en évidence, sur le terrain, les variations globales du niveau de la mer au cours du Quaternaire. Il est ordinairement fait appel pour cela à des formes de terrain, exposées à l'air libre, dites subaériennes, qui constituent une terrasse marine, composée d'une plate-forme et d'un talus. C'est ainsi que, dans le cas de terrasses d'abrasion, le point de jonction entre une ancienne plate-forme d'abrasion marine et une ancienne falaise, est communément pris pour un indice de l'altitude atteinte par une ancienne ligne de rivage de haut niveau, après un soulèvement (Fig. 2). Il en est de même (Fig. 3), s'agissant des terrasses construites, du point de jonction, triple, entre trois anciennes formes de terrain étroitement associées : une ancienne plate-forme subaérienne d'accumulation marine, une ancienne falaise subaérienne et l'ancienne falaise fossile correspondante. L'objectif est d'abord de localiser les anciennes lignes de rivage de haut niveau, de mesurer leur altitude et de les mettre en corrélation (Fig. 2), c'est-à-dire en rapport logique, avec des maxima figurant sur des courbes eustatiques dérivées de courbes isotopiques marines. S'y ajoute le souci d'estimer le taux de soulèvement d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau à une autre ou d'un transect à un autre au long d'une même ligne de rivage. Mais il ne faut pas omettre non plus celui d'évaluer la position du niveau de la mer à la date d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau. 1 ) Mais c'est sans compter sur plusieurs difficultés inhérentes à cette méthode Elles peuvent provenir : - Du recouvrement du point de rupture sous des matériaux épais, mis en place à l'air libre, par

le jeu des divers processus de dégradation des pentes, dont le ruissellement, de transport dans les cours d'eau, ou sous l'effet du vent (lœss et sables dunaires) ;

- De l'érosion, qui peut s'exercer, au contraire, et particulièrement dans cette position haute, sur des sédiments marins détritiques meubles, avant comme après l'arrivée de ces apports continentaux ;

- De l'aménagement éventuel de terrasses de culture, qui cumule ces deux handicaps, sous la forme d'un enlèvement ou d'un apport anthropiques ;

- De l'attribution possible, sauf démonstration contraire, de l'origine des plates-formes d'abrasion marine à des épisodes de soulèvement cosismique.

2 ) Cependant une autre approche géomorphologique est possible Elle consiste à identifier les anciennes formes de terrain fossiles, qui constituent chaque surface de transgression, sur laquelle reposent les sédiments transgressifs de chacun des

INTRODUCTION

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A - Ancienne lignes de rivage de haut niveau B - Corrélation avec une courbe eustatique dérivée d'une d'après K.R. LAJOIE (1986, figure 6.2) courbe isotopique marine d'après K.R. LAJOIE (1986, figure 6.6)

A. L'indice "approximatif" d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau se trouve sur un point de rupture d'angle de pente, qui se tient en bord interne d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine, à son point de jonction (point B) avec une ancienne falaise correspondante, dans une même topographie de terrasse, associant ces deux anciennes formes de terrain complémentaires. Toutefois ce point de jonction est masqué par un dépôt de pente provenant de la dégradation de l'ancienne falaise. Il faut donc se résoudre à une certaine approximation, en raison de la concavité du profil résultant de la mise en place d'une couverture colluviale. B. Les anciennes lignes de rivage de haut niveau, ainsi définies, sont mises en corrélation avec des pics eustatiques, déduits d'une courbe isotopique marine. Ici, la courbe eustatique est dérivée de la courbe isotopique marine V28-238. Cette dernière est empruntée à J. CHAPPELL (1983), où elle est fondée sur des datations U/Th sur coraux. Les anciennes lignes de rivage de haut niveau (point B) correspondent à des hauts niveaux marins (point Y), exprimés sur la courbe isotopique marine. Cette figure schématique a pour mérite de montrer qu'à chaque terrasse marine correspond distinctement une oscillation glacio-eustatique distincte. Toutefois il est permis de s'interroger sur la pertinence de la corrélation, telle qu'elle est ici établie entre chaque maximum eustatique, et une ancienne ligne de rivage de haut niveau. Comme si le processus d'abrasion marine s'effectuait pendant un maximum eustatique, voire "pendant les bas niveaux" ("strandlines formed during lowstands are usually destroyed by subsequent sea-level fluctuations", K.R. LAJOIE, 1986, figure 6.6). Cette question sera plus largement évoquée dans la partie de ce texte consacrée, pour une large part, au chapitre II, à la genèse des plates-formes d'abrasion marine, et à leur exhumation éventuelle.

Figure 1 - Terrasses d'abrasion, anciennes lignes de rivage de haut niveau et maxima

eustatiques, (d'après K.R. LAJOIE, 1986, figures 6.2A et 6.6). des dépôts de terrasse successifs, et qui représentent les limites stratigraphiques profondes, inférieures ou latérales, d'une unité stratigraphique distincte. Ces anciennes formes de terrain, avant leur fossilisation sous des sédiments transgressifs, résultent d'une érosion continentale ou marine, sans laquelle la mer n'aurait pas pu pénétrer dans une plaque continentale en cours de soulèvement et y déposer des sédiments, lors d'une transgression (Fig. 2) : - Les unes ont été creusées, pendant une régression, sous l'action des eaux courantes. Elles

comportent d'anciennes vallées de grandes dimensions, en largeur comme en profondeur, qui sont l'œuvre des principaux cours d'eau, jusqu'à des formes mineures de ravinement, résultant d'un ruissellement concentré.

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A - Carte des terrasses récifales du transect de Bobongara, dans la Péninsule de Huon, entre les terrasses IIIa4 et IIc (d'après J. CHAPPELL et al., 1996, figure 11). Taux de soulèvement : 3,13-3,21 m/ka (J. CHAPPELL, 2002). 150,6 m : altitude du bord interne des terrasses récifales, considérée comme étant celle des anciennes lignes de rivage de haut niveau ; IIa, IIIb, IIIa2 et IIIa3 : quatre terrasses d'origine glacio-eustatique (J. CHAPPELL et al., 1996-a et 1996-b), les autres étant attribuées à des épisodes de soulèvement cosismi-ques ; IIb et IIIa1 : deux autres terrasses d'origine glacio-eustatique (J. CHAPPEL, 2002).

B - Courbe eustatique, déduite de l'âge et de l'épaisseur Z des dépôts récifaux de crête et de plate-forme, sur les transects de Kanzarua et de Bobongara, dans la Péninsule de Huon, entre 60 et 30 ka (J. CHAPPEL, 2002, figure 4).

C - Courbe de la température antarctique, déduite de la courbe isotopique EPICA Dôme C.

D - Courbe des apports détritiques glaciaires (IRD events) entre 195 et 695 cm de profondeur du forage (# 60-30 ka) PS2644, d'après S. VAN KREFELD et al., 2000, figure 3, citée in J. CHAPPELL, 2002).

* : en nombre de grains de taille supérieure à 150 μm par gramme de sédiments secs. Figure 2 - Terrasses récifales, variations climatiques rapides, décharges sporadiques d'icebergs et oscillations glacio-eustatiques de haute fréquence au cours du stade 3

(transect de Bobongara, Péninsule de Huon, Nouvelle Guinée, d'après J. CHAPPELL, 2002).

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E - Courbe eustatique KL 11, déduite de la courbe planctonique KL11 Mer Rouge à haute résolution (M. SIDDALL et al., 2008, figure 8).

Bien que la carte des terrasses récifales du transect de Bobongara (Fig. 3-A), dans la Péninsule de Huon, présente un nombre plus élevé de plates-formes que d'oscillations figurant sur la courbe eustatique (Fig. 3-B), dressée à partir des données recueillies sur ce transect, entre 60 et 30 ka, il apparaît cependant que chaque terrasse figurant sur ce transect, pendant cet intervalle de temps (Fig. 3-A), pourrait être en rapport, au cours du stade 3, avec :

un épisode de réchauffement de la température de l'air, inscrit sur une courbe isotopique conti-nentale, telle que GISP2, NGRIP ou EPICA Dôme C (Fig. 3-C ) , ("the recent realization that the rapid climate shifts of the last glacial were also associated with significant and abrupt changes in sea-level", T.M. ESAT et Y. YOKOYAMA, 2006, page 217) ;

une décharge plus ou moins massive d'icebergs (Fig. 3-D) correspondante ("ice-rafted detritus, IRD events", évènements et "mini-évènements" de HEINRICH, enregistrée sur les "courbes d'apports en débris détritiques glaciaires" (E. BARD, 2006) ; de fait, la relation entre réchauffement climatique et décharges d'icebergs, vérifiée de nos jours, milite, elle aussi, en faveur d'une origine glacio-eustatique des terrasses ("the reefs are now believed to have grown during sea-level high stands following Heinrich events... the working hypothesis for the formation of the Huon Peninsula last-glacial terraces assumes an abrupt sea-level rise due to ice-calving", T.M. ESAT et Y. YOKOYAMA, 2006, page 219) ;

une élévation du niveau de la mer, de fréquence dite suborbitale, figurant sur la courbe eustatique déduite de la courbe isotopique 18O planctonique KL11 à haute résolution (Fig. 3-E), chaque transgression résultant du réchauffement climatique et de ses conséquences sur la fonte des glaces et les décharges d'icebergs ; de fait, le nombre de terrasses n'est pas incompatible avec celui des oscillations glacio-eustatiques figurant sur la courbe KL11, sous réserve de sa marge d'erreur de 12 m, comme il l'était au regard de courbes isotopiques marines plus anciennes, à faible résolution, servant jusqu'à présent de "modèles". De fait, la terrasse IIb est attribuée à une fluctuation glacio-eustatique en raison de "l'épaisseur Z" du dépôt récifal de crête et de plate-forme (Fig. 4-A) qu'il présente, alors que l'oscillation, à laquelle elle peut être rapportée sur la courbe eustatique KL11, est d'amplitude faible.

Figure 2 - Suite. - Les autres sont d'anciennes plates-formes d'abrasion marine, dont le façonnement s'est

accompagné du recul d'une ancienne falaise correspondante, pendant la phase initiale d'une transgression.

- Toutes ont pour niveau de base commun à ces érosions, continentale ou marine, une ancienne ligne de rivage de bas niveau. C'est alors que débute, à son point le plus bas, la mise en place des sédiments transgressifs d'un dépôt de terrasse, qui s'achève, à son point le plus haut, à la date d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau et du maximum d'amplitude de chaque transgression. La fossilisation, totale ou partielle, a pour point commun de se produire, dans les deux cas, pendant une transgression.

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A - Anciennes formes de terrain résultant d'une érosion (E) exercée par les eaux courantes pendant une régression. 1a : ancienne vallée, creusée par un cours d'eau principal ; 1b : ancien vallon, ravin ou ravineau, entaillés par des écoulements se dirigeant vers le cours d'eau principal. B - Anciennes formes de terrain résultant de l'érosion marine (E) s'exerçant pendant le début d'une transgression. 2a : ancienne plate-forme d'abrasion marine ; 2b : ancienne falaise. La mer ne peut pas pénétrer dans un continent en cours de soulèvement, depuis les bassins de bordure continûment immergés, et y déposer des sédiments, sans une érosion concomitante ou préalable, y creusant un "espace d'accueil", où vont se loger ces sédiments. Les érosions responsables de ces anciennes formes de terrain ont pour niveau de base commun un bas niveau marin de fin de régression, à la date d'une ancienne ligne de rivage de bas niveau (A). Le travail d'érosion effectué par les eaux courantes (E) se produit au cours d'une régression. Celui de l'abrasion marine (E) n'a lieu que pendant la partie d'une transgression, quand la profondeur d'eau le permet, en fonction des variations de la vitesse d'élévation du niveau de la mer. Ces anciennes formes de terrain ont été soumises à une fossilisation (F), en tout ou en partie, par des sédiments marins au cours d'une transgression et jusqu'à la date d'un haut niveau marin et d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau (B). Le point A/B est spécifique à l'abrasion marine, et il représente une ancienne ligne de rivage, de position intermédiaire entre celle de bas niveau et le maximum de vitesse et de profondeur d'eau, précédant celle de haut niveau. L'excavation d'un espace disponible pour l'accueil de sédiments est l'œuvre de ces érosions, qui engendrent des formes de terrain, aisément reconnaissables sur des affleurements. Elles constituent les surfaces de transgression, sur laquelle reposent, en discordance, les sédiments transgressifs d'un dépôt de terrasse construite, qui les fossilisent.

Les deux coupes transversales ne comportent volontairement pas d'orientation, parce qu'elles valent dans la perspective de méthodologie générale, abordée en première partie de ce texte, pour diverses positions respectives des plaques tectoniques à la surface du globe. S'agissant des terrasses marines et des dépôts des terrasses marines de Calabre méridionale, qui font l'objet de la seconde partie de ce texte, la plaque océanique subduite se trouve à l'est et au sud, sous un bassin occupé par la Mer Ionienne.

Figure 3 - Implantation des sédiments transgressifs d’un dépôt de terrasse marine construite dans une plaque continentale en cours de soulèvement.

3 ) Fréquences des variations du niveau de la mer Jusqu'à une date récente, la plupart des variations du niveau de la mer qui ont été mises en évidence sur le terrain, et corrélées avec des courbes isotopiques marines, se sont révélées de fréquences dites orbitales, en relation plus ou moins étroite avec des cycles astronomiques

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de l'ordre de 100, 40 et 20 ka. Aujourd'hui, il existe des indices forts, tant sur le terrain (J.C. PLAZIAT et al., 1998 ; Y. JEDOUI et al., 2002, 2003 ; H. BRUGGEMANN et al., 2004 ; E.K. POTTER et al., 2004 ; B. DUMAS et al., 2005 ; T.M. ESAT et Y. YOKOYAMA, 2006 ; A. CHAKROUN et al., 2009), que sur des courbes eustatiques dérivées de courbes isotopiques marines à haute résolution (M. SIDDALL et al., 2003, 2006 ; E.J. ROHLING et al., 2004, 2008 ; H.W. ARZ et al., 2007 ; A.L. THOMAS et al., 2009), que des oscillations glacio-eustatiques de plus hautes fréquences, dites suborbitales, se sont produites à l'échelle du millénaire au cours du stade 3, voire du sous stade 5.5, de la chronologie isotopique marine, et même au cours de l'Holocène (M. SIDDALL et al., 2003 ; G. SCHELLMANN et U. RADTKE, 2010). Or, bien que le niveau de la mer ait sans doute atteint à plusieurs reprises, au cours du sous stade 5.5, (MISS 5.5, "marine isotope sub stage 5.5") une position plus élevée que celle qu'elle occupe aujourd'hui, la mise en évidence sur le terrain, au cours du dernier interglaciaire, d'oscillations plus tardives, alors que la position du niveau de la mer était plus basse que de nos jours, ne peut se concevoir que dans des régions ayant été affectées par un taux de soulèvement assez élevé, pour que leur trace puisse avoir été portée hors de l'eau. Il en est de même pour celles qui se sont produites pendant l'avant dernière déglaciation (Termination II). D'où l'intérêt accordé aux littoraux soulevés de la Péninsule de Huon, de la Barbade ou de la Calabre, sans qu'il soit nécessaire d'avoir recours à des investigations sous-marines pour cela.

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PREMIERE PARTIE

LA METHODOLOGIE

PREMIÈRE PARTIE :

LA MÉTHODOLOGIE

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PARTIE I - CHAPITRE I

DE L’USAGE DES ANCIENNES FORMES DE TERRAIN SUBAÉRIENNES EN VUE DE LA MISE EN ÉVIDENCE DES VARIATIONS DU NIVEAU DE LA MER SELON LA NATURE

DU SUBSTRAT. I - LE CAS DES "TERRASSES D'ABRASION" EN ROCHES COHÉRENTES Ce cas a été évoqué, notamment, par K.R. LAJOIE (1986) et, plus récemment, par M. SAILLARD et al. (2009). Dans ces publications, les auteurs se réfèrent, pour le choix du site de mesure de l'altitude atteinte par une ancienne ligne de rivage de haut niveau, sur le point de jonction, où se dessine un angle de rupture de pente ("shoreline angle", K.R. LAJOIE, 1986 ; "real shoreline angle", M. SAILLARD et al., 2009), situé entre une ancienne plate-forme d'abrasion marine et une ancienne falaise (Fig. 1-A), c'est-à-dire au bord interne de cette plate-forme. Toutefois il est explicitement fait état de son recouvrement par un dépôt de pente, qui masque l'emplacement présumé de ce point (Fig. 1-A). Selon cette démarche, l'altitude d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau ne provient donc pas directement d'une mesure effectuée en surface, mais d'une évaluation, en fonction de l'épaisseur de cette couverture, à déduire d'une mesure de surface, de localisation souvent malaisée sur une topographie engendrée lors de la mise en place d'un dépôt de pente.

Dans ces publications, la mise en évidence des oscillations glacio-eustatiques est accompagnée d'une corrélation avec des courbes eustatiques déduites de courbes isotopiques marines (Fig. 1-B). Cette corrélation a plusieurs objectifs : - Le premier objectif est de replacer les anciennes lignes de rivage de haut niveau dans la

chronologie isotopique marine. - Une seconde finalité est de calculer leur taux de soulèvement. - Un troisième but est d'évaluer la position des hauts niveaux marins correspondants, ces deux

derniers paramètres dépendant l'un de l'autre.

Même approximatif, le choix d'un point de mesure du bord interne des terrasses ne saurait toutefois compromettre la mise en évidence des variations globales du niveau de la mer, généralement de fréquences dites orbitales, qui ont été ainsi décelées. Reste à déterminer si cette approche, dont il est fait usage pour des "terrasses d'abrasion", demeure valable s'agissant de "terrasses construites", et si elle peut aussi prétendre à détecte, sur le terrain, la signature d'éventuelles variations du niveau de la mer à l'échelle du millénaire. II - LE CAS DES CONSTRUCTIONS RÉCIFALES Dans le cas des constructions récifales, l'ancienne ligne de rivage de haut niveau se situe également au point de jonction entre deux anciennes formes de terrain subaériennes, où se

Partie I - Chapitre I

DE L'USAGE DES ANCIENNES FORMES DE TERRAIN SUBAÉRIENNES EN VUE DE LA MISE EN ÉVIDENCE

DES VARIATIONS DU NIVEAU DE LA MER SELON LA NATURE DU SUBSTRAT

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dessine un angle de rupture de pente, entre une ancienne falaise et une ancienne plate-forme, en bord interne de cette dernière. Ici, l'ancienne plate-forme n'est pas d'abrasion, mais d'accumulation marine. Elle est constituée d'un dépôt corallien. En outre, ce point de jonction est de lecture plus aisée, car il n'est pas recouvert d'un dépôt de pente, sans doute en raison de la cohérence des affleurements de dépôts récifaux. Ainsi l'ancienne ligne de rivage de haut niveau se situe sur un point triple, au bord interne de l'ancienne plate-forme d'accumulation récifale, sur son point de jonction avec une ancienne falaise subaérienne et fossile. La même position a été exprimée à nouveau par J. CHAPPELL (2002, pages 1232-1233), dans la Péninsule de Huon, à l'est de la Nouvelle Guinée, au contact de la plaque continentale d'Australie, et de la plaque océanique, subduite, du Pacifique Occidental : "sea level highstands are exprimed from catch-up terrace heights at their landward margin". Ainsi peut être établie, en fonction de l'âge des échantillons les plus proches, une corrélation directe (Fig. 2) entre le bord interne de chaque plate-forme corallienne et l'un des "pics isotopiques" d'une courbe isotopique marine, ou provenant d'un forage opéré dans une calotte glaciaire, voire avec les maxima d'une courbe eustatique à haute résolution, déduite d'une courbe isotopique marine, telle que la courbe KL11 (M. SIDDALL et al., 2003, 2008 ; E.J. ROHLING et al., 2004). Mais la marge d'erreur de 12 m, inhérente à la méthode de construction de la courbe eustatique KL11, invite à la prudence, dès lors qu'il s'agit d'oscillations d'amplitude faible, figurant sur cette courbe, notamment entre 40 et 45 ka (M. SIDDALL et al., 2008). De plus, la seule corrélation visuelle entre l'altitude du bord interne d'une terrasses corallienne, et certains des "pics" figurant sur des courbes à valeur eustatique ou climatique, ne saurait suffire à la démonstration, sans autres arguments de terrain. Tel est le sens d'une démarche entreprise par J. CHAPPELL (2002), relativement aux terrasses récifales, rapportées au stade 3, de la Péninsule de Huon. Cette démarche consiste à mesurer l'épaisseur ( Z) des dépôts récifaux de crête et de plate-forme (Fig. 4-A), considérée comme représentative de l'amplitude d'une élévation du niveau de la mer au cours d'une transgression, déduction faite de celle du soulèvement intervenue pendant le même intervalle de temps : “thicknesses of shallow-water reef crest and platform deposits reflect amplitude of relative sea level rise (J. CHAPPELL, 2002, page 1231). Cette procédure apporte donc aussi la preuve d'une transgression d'origine glacio-eustatique et permet ainsi d'écarter l'hypothèse, selon laquelle une terrasse aurait pu être engendrée par le jeu de l'abrasion marine, déclenchée par un épisode de soulèvement cosismique, intervenu pendant une régression séparant deux transgressions. Cependant cette procédure n'a permis de déceler, à coup sûr, que deux dépôts de terrasse supplémentaires (IIIa1 et IIb1), à joindre aux quatre dépôts déjà considérés antérieurement (IIIa3, IIIa2, IIIb et IIa ; J. CHAPPELL et al. 1996-a, 1996-b), comme étant d'origine glacio-eustatique certaine entre 60 et 30 ka (Fig. 2). L'auteur (J. CHAPPELL, 2002) présume toutefois que le niveau de la mer a oscillé plus fréquemment, en accord avec chaque épisode de réchauffement du climat, mais sous une amplitude si faible, qu'elle reste inférieure à celle des épisodes sporadiques auxquels est attribué le soulèvement : "the pattern of ice breakout with IRD events followed by abrupt warming occurs in all the other D-O cycles…, so sea level presumably did oscillate in each cycle,… but less than the HP detection limit of 2-3 m" (J. CHAPPELL, 2002, page 1236). C'est pour cette raison que, dans le cadre d'un soulèvement conçu comme étant saccadé, toutes les oscillations ne sauraient être détectées.

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A - Épaisseur Z" des dépôts récifaux de crête et de plate-forme, d'après J. CHAPPELL (2002, figure 2).

1. dépôts récifaux de crête et de plate-forme, mis en place sous faible profondeur d'eau (zone à Acropora palmata) ; 2. dépôts récifaux de faciès plus profond (zone à Acropora cervicornis). B - "Épaisseur caractéristique" (B. DUMAS et al., 2005) des dépôts récifaux, mis en place, pendant toute la durée d'une transgression, sur une ancienne plate-forme d'abrasion marine, à laquelle une ancienne falaise fossile est associée dans une même surface de transgression (d'après G. SCHELLMANN et U. RADTKE, 2004, figure 4-20).

A. Le dépôt récifal à Acropora palmata est compris, selon le "modèle" de K.J. MESOLLELA (1968), entre deux falaises d'accrétion ("constructed by reefal upward growth"). Pour l'auteur (J. CHAPPELL, 2002), le calcul d'épaisseur Z des dépôts récifaux de crête et de plate-forme, à laquelle il convient d'ajouter l'amplitude du soulèvement intervenu pendant la durée de la transgression, délivre une valeur approchée de l'amplitude de cette transgression, au cours de laquelle ils se sont mis en place, et donc la preuve d'une origine glacio-eustatique de la terrasse. B. Une ancienne falaise fossile (2b) a été engendrée par l'érosion marine. Elle date de la même transgression que le dépôt récifal, qui la recouvre, et que l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), sur laquelle ce dépôt repose en discordance, par l'intermédiaire d'un "conglomérat de base". L'amplitude de l'élévation du niveau de la mer au cours de cette transgression est égale à l' "épaisseur caractéristique" (Characteristic Thickness, CT) de tout le dépôt récifal, ainsi mis en place pendant toute la durée d'une transgression ("bykeep-up-rather than catch-up-growth", U. RADTKE et G. SCHELLMANN, 2005, en référence à R.C. SPEED et I. CHENG, 2004). Elle est mesurée entre les points A et B.

Figure 4 - Deux méthodes d'évaluation de l'épaisseur de dépôts récifaux mis en place au cours d'une transgression,

En fait, une autre approche pourrait se révéler plus déterminante. Il en est ainsi, par exemple, au vu d'une coupe présentée, à la Barbade, in G. SCHELLMANN et U. RADTKE (2004, figure 4-20). Sur cette coupe (Fig. 4-B), un dépôt récifal repose en discordance, par l'intermédiaire d'un lit conglomératique, sur un autre dépôt récifal, plus ancien. Toutefois le texte ne se prononce pas sur la définition géomorphologique de cette surface de discordance, alors qu'elle se présente à l'évidence comme étant une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, jalonnée par un "conglomérat de base". Cette plate-forme est comprise entre deux falaises d'érosion marine. L'une, en bordure de la mer actuelle, est une falaise vive. L'autre, en bord interne, est une ancienne falaise largement fossile. Sur cette coupe, un dépôt de pente

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masque l'emplacement d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau et le site de mesure précis de son altitude, en « bord interne » de la terrasse récifale construite. Dans ces conditions, la mesure de l'épaisseur comprise entre le point le plus bas du dépôt (point A) et son point le plus élevé (point B), aux deux extrémités de la surface de trans-gression, sur laquelle il repose, peut fournir une évaluation, par défaut, de l'amplitude de l'élévation du niveau de la mer entre ces deux points, conformément à la procédure de mesure de "l'épaisseur caractéristique" ("Characteristic Thickness", CT) des sédiments détritiques transgressifs d'un dépôt de terrasse, préconisée, en Calabre, in B. DUMAS et al. (2005). Si ce n'est que, dans le cas des constructions récifales, force est de tenir compte de la profondeur d'eau, à déterminer, sous laquelle se sont mis en place les coraux sous le niveau de la mer, en début et en fin de transgression. III - LE CAS DES "TERRASSES CONSTRUITES" DONT LE DÉPÔT EST CONSTITUÉ DE SÉDIMENTS DÉTRITIQUES MEUBLES Lorsqu'elles sont constituées de sédiments détritiques meubles, la topographie des terrasses construites se prête moins bien que celle des terrasses d'abrasion, inscrites en roches cohérentes ou que celle des constructions récifales, à la détection des anciennes lignes de rivage de haut niveau, à l'aide de la même démarche, reposant sur l'identification d'anciennes formes de terrain subaériennes. La cause en est à attribuer à l'érosion, qui peut les avoir affectées. Pourtant, comme dans le cas des terrasses récifales, la procédure de recherche du site de mesure de l'altitude d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau ("nominal paleo-shoreline elevation", E. SANTORO et al., 2009) pourrait reposer, là aussi, sur la détection d'un angle de point de rupture, entre une ancienne falaise subaérienne et fossile, et une ancienne plate-forme subaérienne d'accumulation marine, en bord interne de cette dernière. De fait, il peut effecti-vement en être ainsi dans le cas de topographies encroûtées. Toutefois, à l'inconvénient que suscite, sur les terrasses d'abrasion, la présence, reconnue, d'une couverture, généralement peu épaisse, de dépôt de pente, s'ajoute, ici, celui que peut entraîner l'érosion engendrée par les eaux courantes, dans des matériaux, qui lui sont particulièrement sensibles, sauf une éventuelle consolidation. Cette érosion peut entraîner l'accumulation d'une plus forte épaisseur de dépôts de couverture, que dans le cas, reconnu, des terrasses d'abrasion, au pied des anciens versants de vallée restés hors de l'eau après le maximum transgressif et des anciennes falaises subaériennes. L'érosion peut même intervenir avant la mise en place de dépôts continentaux sur les sédiments marins. S'y ajoute, enfin,l'aménagement, relativement aisé, de terrasses de culture, qui cumule les deux inconvénients, celui d'un retrait et celui d'un apport de matériaux, d'origine anthropique. 1 ) Les érosions affectant des sédiments détritiques meubles Les érosions qui affectent des sédiments détritiques meubles, et les accumulations de matériaux qu'elles entraînent, compromettent singulièrement la recherche des anciennes lignes

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de rivage de haut niveau dans la topographie de surface. a. Un relief de dissection comportant de larges vallées entre de longs interfluves De fait, dans un relief de dissection, qui se développe aux dépens de sédiments détritiques meubles, les fragments de terrasses, en position d'interfluve, sont fréquemment séparés les uns des autres par des vallées, souvent d'une grande largeur. Il en résulte que l'établissement de raccords, d'un interfluve à un autre, entre les différents sites de mesure de l'altitude des anciennes lignes de rivage de haut niveau, là où elles ont pu être détectées, peut être sujet à erreur. Mais il y a plus grave, car l'érosion peut supprimer, sur certains de ces interfluves, tout indice topographique d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau. b. Une érosion pouvant entraîner la suppression du point de jonction entre une ancienne plate-forme d'accumulation marine et l'ancienne falaise subaérienne correspondante. Ainsi, l'ouverture d'un col de flanc, entre deux vallées principales, a souvent pour conséquence de provoquer la disparition du point de jonction entre une ancienne plate-forme d'accumulation marine et l'ancienne falaise subaérienne, qui lui est associée, au delà de son bord interne (Fig. 5). Or c'est précisément ce point de rupture de pente qui constitue communément l'indice d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau. Cet avatar est d'autant plus fréquent que la position haute de ce bord interne l'expose particulièrement à l'érosion. Une démarche, propre à remédier à cette disparition, consiste à procéder par une reconstruction géométrique, fondée sur le profil d'anciennes formes de terrain subaériennes, entièrement conservées sur un transect proche (Fig. 6-A), ou, seulement en partie, sur un même transect (Fig. 6-B). Cependant, quel que soit le soin apporté à cette reconstitution, elle ne saurait prétendre à la même précision de mesure de l'altitude, que celle obtenue, si possible, par l'observation directe d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau, là où elle est indemne en surface ou sur un affleurement de terrain, en cas de recouvrement par un dépôt colluvial. c. Un recouvrement de ce point de jonction par un dépôt de pente En outre, ce même point de jonction peut être recouvert par un dépôt colluvial, qui compromet la recherche de l'emplacement précis d'un site de mesure de l'altitude d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau, déduite de cet indice (Fig. 7). Cette difficulté a également été envisagée (Fig. 1-A) dans le cas des terrasse d'abrasion (K.R. LAJOIE, 1986, figure 6.2A). Mais la fragilité des sédiments détritiques meubles fait que ces couvertures de dépôts continentaux sont généralement plus épaisses que dans le cas de roches cohérentes. d. Ces deux inconvénients se combinent, pour peu qu'une érosion intervienne aux dépens des sédiments marins avant la mise en place d'une couverture continentale De plus, un épisode d'érosion est parfois intervenu, à la faveur de la régression, succédant au dépôt des sédiments marins transgressifs, et précédant la mise en place de dépôts conti-nentaux, qu'il s'agisse de sables ruisselés, de coulées de gélifluxion ou de loess (Fig. 8).

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A - Carte topographique de Calabre au 1/10000, 229, I NE, A, Cantinella.

B - Carte géomorphologique, d'après E. SANTORO et al. (2009, figure 3e : Detailed morphological map).

A. Entre le Fiume Crati et le Torrente Mizzofato, dans le Nord-Est de la Sila de Calabre, des témoins de plusieurs anciennes plates-formes d'accumulation marine subsistent sur trois interfluves successifs, séparés les uns des autres par de larges vallées. Entre le Torrente Muzzolito et le Fosso Ciaffone, le point de jonction, entre le bord interne de l'une d'elles et l'ancienne falaise subaérienne correspondante, est repérable entre les cotes 130 et 111m. En revanche, à l'amont de la cote 154m, le point de jonction entre l'ancienne plate-forme d'accumulation marine et l'ancienne falaise, qui lui était associée, a disparu à cause de l'érosion résultant du travail des eaux courantes. Ces dernières ont ouvert un "col de flanc" (COL) entre la vallée principale du Torrente Muzzolito et celle du Fosso Ciaffone. Il en est de même en rive gauche du Torrente Muzzolito, où une butte, au sommet plat, culmine à l'altitude de 150 m, au lieu-dit Casa Gabelluccia, sans prolongement dans son arrière-pays. Un troisième témoin de la même plate-forme d'accumulation marine se présente au sommet d'une autre butte, qui porte les cotes 145, 154, 159 et 161m, en rive droite du Fosso Ciaffone. Ce témoin est déconnecté, lui aussi, au delà de la cote 161m, de l'ancienne falaise, à laquelle il se trouvait originellement adossé. Dans ces conditions, il est impossible de localiser avec précision l'emplacement des anciennes lignes de rivage de haut niveau, et le site de mesure de l'altitude à laquelle elles ont été portées après le soulèvement. B. Les altitudes affichées du "bord interne" des anciennes plates-formes d'accumulation des "terrasses marines" T4 et T5 (selon E. SANTORO et al., 2009, figure 3e) ne sont pas considérées sans réserves, en raison de l'ouverture des cols de flanc. Figure 5 - Érosion du point de jonction entre une ancienne plate-forme d'accumulation marine et l'ancienne falaise subaérienne qui lui est associée dans la même topographie

de terrasse, en raison de la fragilité des sédiments détritiques meubles. Calabre centrale, littoral ionien de la Sila du Nord-Est.

E. SANTORO et al. (2009, légende de la figure 3a : Marine terrace inner margins – Bords internes des terrasses marines)

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A - Sur l'interfluve de rive droite du Torrente Fiumarella, sur la côte ionienne de la Sila du Nord-Est, d'après L. CAROBENE (2003, figure 20).

A. L'interfluve de rive droite du Torrente Fiumarella, sur la côte ionienne de la Sila du Nord-Est, présente un col de flanc. Ce col se tient entre un relief plus élevé et une succession de buttes, qui sont entaillées dans un dépôt de sédiments marins détritiques meubles. L'emplacement d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau (@) est "reconstitué géométriquement", à l'aide du profil de l'ancienne plate-forme d'accumulation marine (4a), attribuée à ce même dépôt, tel qu'il se présente sur l'interfluve de rive opposé. L'ancienne ligne de rivage de haut niveau se situe vers 110 m, au point d'intersection entre ce profil, reporté en rive droite, et le relief dominant le col. Le dépôt repose alors sur la paroi d'une ancienne falaise fossile (2b), puisque recouverte par le dépôt marin, tandis que sa partie subaérienne est détruite à l'emplacement du col. Le même dépôt est supporté conjointement par une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a). Elle est inscrite dans le même substrat argileux que l'ancienne falaise fossile. Ces deux anciennes formes de terrain fossiles complémentaires appartiennent à la même surface de transgression. Figure 6-A - Reconstruction géométrique du bord interne d'une ancienne plate-forme

d'accumulation marine fossile à son point de jonction avec une ancienne falaise subaérienne et fossile. Cas de la Calabre centrale, littoral ionien de

la Sila du Nord-Est (d'après L. CAROBENE, 2003, figure 20). Une tentative pour porter remède à ce double inconvénient a été proposée (E. SANTORO et al., 2009). Elle comporte une "double correction", l'une dite de couverture ("cover correction"), l'autre dite d'érosion ("erosion correction"), à condition qu'il subsiste, pour chaque terrasse, au moins un témoin de l'emplacement d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau, permettant le calcul de la correction à reporter sur d'autres transects (Fig. 9). e. Détérioration généralisée des anciennes plates-formes d'accumulation marine sous l'effet des eaux courantes dans des sédiments détritiques meubles. L'érosion affectant les sédiments détritiques meubles, sous l'effet des eaux courantes, ne se limite pas au creusement des grandes vallées et à l'ouverture d'un seul col de flanc. Elle peut aller, aussi, jusqu'à substituer complètement à la topographie originelle de plate-forme une simple croupe d'interfluve, parfois même découpée en une succession de buttes (Fig. 10).

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B - Calabre méridionale, lieu-dit Acciarello, au sud de Villa San Giovanni.

Systems Tract, TST]. Le passage de l'un à l'autre de ces deux cortèges sédimentaires s'est effectué, au cours de la transgression, à la date de son maximum de vitesse de l'élévation du niveau de la mer, et de profondeur d'eau (SIM, surface dite "d'inondation maximale") [Maximum Flooding Surface, MFS], au cours d'une transgression. Cette surface, dite "d'inondation maximale", constitue la signature stratigraphique du maximum de vitesse. Elle est largement utilisée, en stratigraphie séquentielle, pour la mise en évidence des oscillations glacio-eustatiques successives. Une ancienne falaise subaérienne (4b ) et une ancienne plate-forme d'accumulation marine (4a), figurent jusqu'à leur point de jonction, sur la carte topographique de Calabre à 1/10 000, qui est antérieure (1958) à l'ouverture de la carrière. Figure 6-B - Reconstruction géométrique du bord interne d'une ancienne plate-forme

d'accumulation marine fossile à son point de jonction avec une ancienne falaise subaérienne et fossile. Cas de la Calabre méridionale, sur la bordure orientale du

Détroit de Messine, lieu-dit Acciarello, au sud de Villa San Giovanni.

B. La reconstruction géométrique bénéficie, ici, sur un même transect, des témoins d'une ancienne plate-forme d'accumulation marine (4a) et d'une ancienne falaise fossile (2b),malgré la disparition de leur point de jonction en raison de l'ouverture d'une carrière. Le dépôt comporte des silts poreux gorgés d'eau, de teinte sombre, et des sables filtrants. Leur terminaison supérieure, en toplap, est caractéristique de sédiments régressifs mis en place pendant le retrait de la mer, passée la date d'un maximum transgressif. Le sommet des couches présente un horizon d'altération sur une épaisseur à peu près constante au-dessous de la plate-forme d'accumulation. La partie orientale de la coupe comporte un témoin d'une ancienne falaise fossile (2a). Il est inscrit dans des couches progradantes (CgM). Elle est recouverte, en "aggradation" par des sédiments sableux transgressifs subhorizontaux ou à stratification oblique. Ces matériaux ont livré, par thermoluminescence sur feldspaths un "âge corrigé" de 64 ± 8 ka (S. BALESCU et al., 1997), suggérant une mise en place au cours de la transgression, de rang majeur, qui se situe au passage du stade 4 au stade 3. Les couches inclinées, comprenant des sédiments régressifs et une partie des sédiments transgressifs appartiennent à un "prisme de haut niveau" (PHN) [Highstand Systems Tract,HST]. Les couches subhorizontales sous-jacentes sont uniquement composées de sédiments transgressifs, qui relèvent d'un intervalle "intervalle transgressif" (IT) [Transgressive

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Carte de localisation : extrait de la carte topographique de Calabre au 1/10000

Un dépôt colluvial, massif, de la granulométrie des limons à celle des petits galets, repose sur un sable marin altéré, par l'intermédiaire d'une topographie d'érosion, que son profil irrégulier conduit à attribuer au travail des eaux courantes. Le sable marin sous-jacent contient un galet arrondi et quelques galets plats. Le dépôt sus-jacent est le résultat d'une "resédimentation", sous l'effet du ruissellement. Ces deux dépôts se situent au pied d'une ancienne falaise subaérienne, observable, ci-dessus, sur la carte topographique de Calabre à 1/10000. En fait, le dépôt marin s'achève contre une ancienne falaise fossile, prolongée vers le haut par l'ancienne falaise sub-aérienne, dont la dégradation a alimenté le dépôt colluvial.

Figure 7 - Dépôt colluvial, recouvrant un sable marin, après un épisode d'érosion

intermédiaire. Calabre méridionale, bordure orientale du Détroit de Messine,Pezzo Superiore, au nord de Villa San Giovanni.

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A - Anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles et anciennes falaises fossiles dans le Cotentin, d'après S. COUTARD et al. (2005, figure 3).

A. Une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), à laquelle est associée une ancienne falaise, largement fossile, elle aussi (2b) sont inscrites dans le granite de Barfleur. Ces deux anciennes formes de terrain fossiles composent la surface de transgression, sur laquelle reposent des sédiments marins, débutant par un "dépôt de plage à galets et à bloc", suivi de sables et de silts. L'ancienne falaise est ainsi fossilisée sur une hauteur de 5 à 6 mètres. Divers dépôts continentaux, comprenant des loess, mais aussi, sur d'autres coupes, des matériaux mis en place par un processus de gélifluxion (head), et des sables ruisselés, recouvrent des vallons ou de simples "chenaux", qui ont été engendrés par un érosion (1b) exercée par les eaux courantes, aux dépens des sédiments marins détritiques meubles, dès le début de la régression suivante. Il est donc rigoureusement impossible de déterminer l'emplacement d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau, à cause de l'érosion qui a fait disparaître la partie supérieure des sédiments marins, avant la mise en place de dépôts continentaux.

Figure 8 - Érosion complète d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, y compris de son point de jonction avec une ancienne falaise subaérienne et fossile,

avant la mise en place d'un dépôt continental sur les sédiments marins (Côte du Cotentin, d'après S. COUTARD et al., 2005).

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B - Corrélation entre les anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles et une courbe isotopique, d'après S. COUTARD et al. (2006, figure 7).

B. Une corrélation est proposée, par les auteurs, entre les anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles, numérotées de I à IV (PFI à PFIV), et la courbe isotopique SPECMAP. Le graphique représente en "écorché" les surfaces de transgression successives, une fois dépouillées de leur dépôt. Ces différentes surfaces de transgression sont mises en corrélation avec des oscillations de la courbe isotopique. Toutefois, en toute rigueur, le point de jonction (A/B), entre une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile et une ancienne falaise fossile, ne saurait être mis en corrélation avec un pic isotopique, ni avec un pic eustatique en dérivant. En effet ce point de jonction (A/B) se situe, au terme du processus d'abrasion, entre un minimum eustatique et le maximum de vitesse de la transgression (voir infra, chapitre II.3.b).

Figure 8 - Suite : corrélation avec une courbe isotopique (d'après S. COUTARD et al., 2006).

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Carte du "bord interne de la terrasse marine" ("marine terrace inner margin") T6, profil de l'ancienne topographie de surface et coupe des dépôts sous-jacents, ainsi que des anciennes topographies fossiles qui les supportent, d'après E. SANTORO et al. (2009, figure 3b).

Pour ces auteurs (E. SANTORO et al., 2009, figure 3b), une mesure d'altitude (217m) est à effectuer, en surface, sur un dépôt colluvial, qui recouvre un dépôt marin, après un épisode d'érosion. L'altitude d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau ("nominal paleo-shoreline", ibidem, 2009) est déduite d'une "double correction", en fonction des épaisseurs du dépôt colluvial et de la partie érodée du dépôt marin, sur la base d'observations portant sur l'altitude atteinte par le sommet de ce dépôt, là où il a été intégralement conservé. En fait, cette procédure se heurte à la difficulté de disposer franchement d'un angle de point de rupture sur une topographie de surface (5), provenant de l'accumulation dune couverture colluviale, alors quelle n'en comporte généralement pas, car le passage de la plate-forme d'une terrasse ainsi constituée à son talus se fait progressivement sous une pente de profil concave. L'ambiguïté provient, pour une part, de l'usage du terme "terrasse" ("the inner margin or shoreline angle between the ancient terrace and the related sea-cliff", ibidem, 2009), alors qu'une "terrasse" se compose, en toute rigueur, d'une plate-forme et d'un talus. Ici, le bord interne de la plate-forme d'accumulation colluviale ne dessine pas d'angle net avec le talus correspondant, puisque ce dernier est constitué, lui aussi, de colluvions, dérivant de la dégradation d'une ancienne falaise, dont la partie inférieure est masquée. Ainsi l'altitude de ce site de mesure varie de 180 à 23 m sur une distance de 6 km, de part et d'autre du profil de la terrasse T6 passant par Villapiana. En outre, le mode de représentation des deux surfaces de discordance D1 et D2 laisse à désirer, parce quelles ne sont pas d'origine identique. Celle (D1) qui supporte les colluvions présente bien, de fait, une topographie irrégulière. Elle résulte de l'action des eaux courantes creusant des "chenaux" en forme de gouttières (1b), qui sont colmatées par des colluvions. La surface de discordance (D2), sur laquelle repose le dépôt marin, représente, au contraire, une surface de transgression (ST), composée d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), de profil rectiligne, et d'une ancienne falaise fossile (2b), au delà du point de jonction entre ces deux anciennes formes de terrain fossiles. Ce point de jonction (A/B) présente une rupture d'angle de pente, aisément identifiable à l'affleurement. Il s'agit de l'emplacement d'une ancienne ligne de rivage, à la date où le recul de la falaise a pris fin. Le site A est le point le plus bas du dépôt marin. Il se trouve en bord externe de l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile. Le site B est le point le plus haut du même dépôt. Ces deux points ne sont pas dans leur situation originelle, mais leur position actuelle résulte d'une érosion.

Figure 9 - Topographie d'accumulation colluviale et anciennes formes de terrain fossiles sous-jacentes, sur le littoral ionien de la Calabre centrale

(d'après E. SANTORO et al., 2009).

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A - Profil de l'interfluve de rive droite du Fiume Trionto, d'après L. CAROBENE (2003, figure 2).

A et B. L'interfluve de rive droite du Fiume Trionto, sur le littoral ionien de la Sila du NE, en Calabre centrale, se présente sous la forme d'une croupe. Elle est découpée en plusieurs buttes au sommet arrondi. Ces buttes comportent, sous les points de mesure 131, 155 et 169 m d'altitude, plusieurs témoins, étagés, de sédiments marins. Ces sédiments sont attribués à un même dépôt de terrasse d'ordre (I), scindé par deux failles transversales, de direction N42°E et N41°E, passant par deux alignements de plusieurs cols de flanc. Sur la carte (Fig. 10-B), la "terrasse d'ordre (I)", portant les cotes 131 à 169m, fait figure de "terrasse majeure", comparée aux terrasses d'ordre (II) et (III), de dimensions plus petites. La datation [U/Th : 297-407 ka] provient du dépôt de la terrasse d'ordre (I), ainsi rapportée aux stades 9 ou 11. C. Pourtant, dans la même tranche d'altitude, mais à une douzaine de kilomètres plus à l'Est, à la longitude de Rossano, il est fait état de trois terrasses successives, T5, T6 et T7, dont le bord interne est indiqué, respectivement, à l'altitude de 145, 170 et 220m. Il est à noter que le bord interne de la terrasse T4, passe de 127m à 104m sur 4,5 km de distance en direction de Rossano. La datation [ESR à 135±20 ka] a été obtenue, au lieu-dit Colucci, dans une vallée située à 15 km à l'ouest de Rossano, entre Corigliano et le Fiume Crati. Elle est attribuée au dépôt de la terrasse T4, au prix d'une avancée exceptionnelle en doigt de gant de cette terrasse T4 dans la vallée. Il est fait référence à la datation conférée à ce même dépôt de terrasse par L. CUCCI (2005), à Trebisacce, au nord du Crati (Aminozone E, sous-stade 5.5). Ainsi l'absence de conservation des anciennes plates-formes d'accumulation marine d'une terrasse construite, s'exprimant par une succession de cols de flancs, ne compromet pas seulement la détection des anciennes lignes de rivage de haut niveau, mais elle peut aussi suggérer une interprétation tectonique, en arguant d'un alignement de ces cols sur un réseau de failles. Alors que l'étagement de terrasses, tel qu'il a été préservé sur un transect proche, leur impose une origine glacio-eustatique. Figure 10 - Découpage d'une croupe d'interfluve en plusieurs buttes séparées par des

failles ? Ou plusieurs dépôts de terrasse successifs ? Calabre centrale, littoral ionien de la Sila du Nord-Est (d'après L. CAROBENE, 2003, et selon E. SANTORO et al., 2009).

Pour peu que les sédiments détritiques meubles reposent sur un "conglomérat de base" encroûté ou sur une ancienne plate-forme d'abrasion marine encroûtée, elle aussi, où il est concevable que l'érosion différentielle aboutisse à dégager le sommet de ces indurations, les plates-formes qui apparaissent alors dans la topographie, en position frontale, face à la mer, ou latérale, sur des versants de vallées (Fig. 11), sont désignées, dans le vocabulaire classique

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de la géomorphologie, sous l'appellation de "surfaces structurales dérivées", quand elles correspondent au "toit" d'un dépôt cohérent, ou de "surfaces d'aplanissement exhumées", pour ce qui est des surfaces de discordance indurées.

Le versant occidental de la vallée présente un replat latéral, de direction parallèle à celle du torrent. Ce replat "structural dérivé" est le résultat d'une érosion différentielle, qui affecte un sable marin (Sm), altéré, et d'autres sédiments détritiques meubles, sus-jacents, qui représentent un apport continental (Ac) à la sédimentation marine. L'érosion différentielle se heurte au "toit" d'un "conglomérat de base" encroûté (Cg), qui repose sur une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, inscrite dans une calcarénite d'âge pléistocène (CP). Sur la rive opposée, une plate-forme d'abrasion marine fossile est entaillée dans la calcarénite, dite de Floresta (CF), d'âge miocène, encore plus cohérente, que celle du Pléistocène ancien. Cette plate-forme d'abrasion marine est quasiment dépourvue de couverture. L'escarpement faisant face au sud est dû à une faille, passant entre la calcarénite de Floresta et des argiles. Il est le résultat d'une érosion différentielle, postérieure au jeu de la faille. Il entre dans la catégorie des "formes structurales dérivées". Il est concevable que plusieurs anciennes plates-formes d'abrasion marine aient été "exhumées" par le jeu de l'érosion différentielle. Leur aménagement en terrasses de culture consiste à créer des banquettes dans les sédiments détritiques meubles, et à parfaire l'exhumation des anciennes plates-formes d'abrasion marine, inscrites dans la calcarénite sous-jacente, les outils agricoles traditionnels ne permettant pas d'excaver sérieusement ce substrat de roche cohérente. Figure 11 - Replat latéral résultant d'une érosion différentielle. Calabre méridionale, vallée franchie au km 22 de la SS 106, entre le Capo dell'Armi et la Fiumara Molaro.

f. Dégradation des anciennes falaises subaériennes L'érosion qui affecte les anciennes plates-formes d'accumulation marine peut s'accom-pagner, également, de la dégradation des anciennes falaises subaériennes sous l'effet d'un ruissellement. Il en résulte que leur profil est estompé, la valeur de la pente étant diminuée, dans sa partie haute, sous l'effet de cette érosion, et, dans sa partie basse, en raison de l'accu-mulation consécutive de matériaux provenant de la partie haute ou de ravins qui interrompent son tracé. De ce lissage, voire de cet effacement, il résulte que ce talus ne se distingue pas forcément, et de toute évidence, par une différence de valeur de pente appréciable, des deux

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plates-formes, qu'il sépare, n'était l'interposition d'une ancienne falaise fossile. De la présence d'une couverture colluviale, résulte la genèse d'un plan incliné ou d'un profil concave, raccor-dant l'ancienne falaise subaérienne à l'ancienne plate-forme subaérienne de remblaiement, sur lesquelles reposent ces colluvions. Ce profil interdit d'évoquer l'existence assurée de tout "angle de rupture de pente" ("shoreline angle") en surface (voir Fig. 10). À cette érosion sous l'effet des eaux courantes, et à ces accumulations colluviales, s'ajoutent les retraits et les apports de matériaux entraînés par l'aménagement de terrasses de culture, dans des sédiments faciles à remuer, même avec des instruments traditionnels. 2 ) L'aménagement de terrasses de culture L'aménagement de terrasses de culture (Fig. 12) représente une autre source de difficultés. Il a pour objectif de réduire la pente originelle des anciennes plates-formes d'accumulation et, plus particulièrement, des anciennes falaises subaériennes, afin de faciliter les façons culturales et d'assurer un bon écoulement des eaux, facteur d'érosion, sans compromettre pour autant l'alimentation en eau des plantes. Cet aménagement consiste, en général, sur un interfluve, à retirer des matériaux en amont pour les reporter à l'aval. Ce schéma peut être perturbé, sur le haut des versants d'un interfluve, par des rejets provenant de l'intérieur. À l'expérience, il apparaît que les terrasses de culture sont souvent de largeur inégale sur le même transect. Les plus courtes découpent les anciennes falaises subaériennes en marches d'escaliers, tandis que des plus larges peuvent se tenir sur des anciennes plates-formes d'accumulation marine intermédiaires, dont la pente, déjà relativement faible, n'appelle pas de gros travaux de terrassement. Inversement, l'aménagement portant sur d'anciennes falaises subaériennes, précédemment dégradées par l'érosion, a souvent pour résultat d'en améliorer la lecture, parce que la combinaison d'un déblai à leur base, et d'un apport anthropique à leur sommet, en a accru la dénivellation et accentué la pente. Pourtant ces observations de surface ne peuvent avoir qu'une valeur indicative, à titre d'alerte, à charge de rechercher des preuves décisives par un affleurement de terrain, révélant la présence d'une ancienne falaise fossile, située dans le prolongement vers le bas d'une ancienne falaise subaérienne, ainsi présumée. Il reste que la dégradation d'origine anthropique des formes de terrain subaériennes peut en être arrivée à un point tel, qu'elle peut gravement compromettre la validité d'une analyse géomorphologique de surface, sans qu'il soit systématiquement tenu compte des anciennes formes de terrain fossiles. L'enlèvement et l'apport de matériaux, qu'ils soient naturels ou anthropiques, modifient donc singulièrement les topographies originelles. Ainsi peut se trouver compromise toute recherche des anciennes lignes de rivage de haut niveau, reposant sur les anciennes formes de terrain subaériennes. Il reste à s'en remettre à un autre aspect de l'analyse géomorphologique, qui porte sur l'examen des anciennes formes de terrain fossiles. Ces dernières constituent, en effet, les surfaces de transgression, qui supportent, sur un "continent", l'ensemble des sédiments transgressifs d'une "séquence de dépôt", surmonté de ceux des sédiments régressifs, qui ne se sont pas déversés dans le "bassin". Ces anciennes formes de terrain fossiles, qui constituent les limites stratigraphiques profondes de chaque dépôt de terrasse construite, et la surface de transgression sur laquelle ils reposent, ont enregistré des variations du niveau de la mer, au cours de leur évolution géomorphologique, et de l'histoire complexe des oscillations du niveau de la mer, dont elles dépendent, et elles apportent la preuve.

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A - Trois terrasses de culture, étagées, (1), (2) et (3), dont les talus sont de dénivellation métrique.

A. Le "paysage" est découpé par des terrasses de culture traditionnelles, dont les talus sont de dénivellation métrique. Cet aménagement anthropique peut compromettre gravement la lecture de la topographie actuelle, visant à y déceler des indices d'anciennes lignes de rivage de haut niveau.

B - Deux anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles, faiblement étagées, chacune supportant un "conglomérat de base" (Cb1) et (Cb2), sous les trois terrasses de culture.

B. Sous cet escalier de trois terrasses de culture, ne sont à distinguer que deux surfaces de discordance étagées, tranchant des couches progradantes (CgM), inclinées d'une vingtaine de degrés en direction de la mer. Chacune d'entre elles supporte un "conglomérat de base" (Cb1) et (Cb2), surmonté de sable altéré (Sm). La plus basse apparaît à l'altitude de 56,3 m, où se tient le point le plus bas du dépôt (point A). Il s'agit alors d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), affleurant sur son bord externe, où elle est recouverte par un lit de galets (Cb2 : coarse transgressive lag deposit), recouvert de sable altéré (Sm), sur une épaisseur totale de 3,30 m. Cette plate-forme (2a) s'étend régulièrement sur une cinquantaine de mètres de largeur. Sa pente se relève en amont, passant de 3-4° à une dizaine de degrés, environ, sur son bord interne, de telle sorte que du sable transgressif, altéré (Sm), finit par la recouvrir directement, en onlap. La plus haute de ces deux surfaces de discordance supporte, elle aussi, un "conglomérat de base" (Cb1). Il est plus épais (80 cm), et de granulométrie plus grossière, que celui (Cb2) qui recouvre la plate-forme inférieure (2a). Il est surmonté, lui aussi, d'un sable altéré (Sm). Il s'agit, là encore, d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a). Elle s'interrompt brusquement sur son bord externe, où affleure le point le plus bas de ce dépôt (point A). Figure 12 - Terrasses de culture et anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles étagées, en Calabre méridionale, sur bordure orientale du Détroit de Messine, en rive

droite de la Fiumara di Gallico.

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C - Deux surfaces de transgression (ST1) et (ST2), sous deux des trois terrasses de culture, l'ancienne falaise fossile (2b) de ST2 recoupant, sur son bord externe, l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a) de ST1.

C. À y regarder de plus près, un amas de galets (Rs) s'intercale entre le sable (Sm) et l'ancienne plate-forme d'abrasion marine (2a). Ces galets ont vraisemblablement été empruntés au "conglomérat de base" (Cb1), d'âge antérieur, qui affleure à l'est de la coupe, sur le bord interne de l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), appartenant à ST1. Ces matériaux, ainsi resédimentés, bien que provenant du dépôt (I), font donc intégralement partie du dépôt (II). Il est donc assuré que l'ancienne plate-forme d'abrasion marine inférieure (2a) vient buter abruptement contre une ancienne falaise fossile (2b), si courte soit-elle, qui est inscrite dans le dépôt (I) et est recouverte par le dépôt (II), dont font partie les galets resédimentés (Rs), provenant de la paroi de cette falaise en cours de fossilisation.

Figure 12 - Suite 1.

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D - Une ancienne falaise fossile (2b) de dénivellation modeste, s'inscrivant sous une terrasse de culture, dans le "conglomérat de base" sus-jacent (Cb1) sur un segment inférieur manifeste S1, et dont la suite du profil vers le haut est illisible, sur un segment supérieur S2, faute de contrastes de structure de texture entre des sables altérés, faisant suite au "conglomérat de base" Cb1 et Cb2.

D. Le profil de l'ancienne falaise fossile est bien visible, pour des raisons de lithologie, entre le "conglomérat de base" (Cb1) in situ, d'un coté (à l'est), et les galets resédimentés (Rs), qui lui ont été vraisemblablement empruntés, de même qu'entre le conglomérat (Cb1) et le sable altéré (Sm), de l'autre côté (à l'ouest), sur une dénivellation, qui n'est que de l'ordre de 30 cm (segment inférieur S1). Au delà de l'affleurement du "conglomérat de base" (Cb1), la trace de cette ancienne falaise fossile se perd vers le haut, pour des raisons lithologiques également, parce que le "conglomérat de base" est recouvert par un sable altéré (Sm), identique à celui (Sm), qui appartient au dépôt (II) (segment supérieur S2).

E - Deux mises en œuvre successives du processus d'abrasion marine, au cours de deux oscillations glacio-eustatiques distinctes, sans expression topographique à cause de l'aménagement de terrasses de culture.

E. L'identification d'une ancienne falaise fossile (2b), en bord interne d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), dénote un arrêt du processus d'abrasion marine, qui intervient en cours de transgression, entre un minimum eustatique et son maximum de vitesse, alors que la fossilisation de la falaise reste à venir. Le déroulement de ce processus d'abrasion fait suite à celui qui a engendré l'ancienne plate-forme d'abrasion marine (2a), dont le bord externe est sectionné par l'ancienne falaise (2b).

Figure 12 - Suite 2.

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Partie I - Chapitre II

L'ORIGINE GÉOMORPHOLOGIQUE PROFONDE DES SURFACES DE TRANSGRESSION SUPPORTANT LES DÉPOTS DÉTRITIQUES DE TERRASSE MARINE CONSTRUITE, ET SA CONTRIBUTION À LA MISE EN

ÉVIDENCE DES VARIATIONS DU NIVEAU DE LA MER

Devant les difficultés rencontrées en vue de déterminer ou de reconstituer, avec toute la précision exigible, le site de mesure d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau, en s'appuyant sur la géomorphologie de surface, dans le cas des terrasses marines construites de sédiments détritiques meubles, soumises à érosion, une autre démarche visant à mettre en évidence les variations du niveau de la mer successives, notamment celles, les moins bien connues, de fréquences dites suborbitales, est possible. Elle consiste à individualiser, une à une, les surfaces de transgression, sur lesquelles reposent les sédiments de chaque dépôt de terrasse, en se fondant sur la détection des anciennes formes de terrain fossiles, qui constituent les limites stratigraphiques profondes de chacun d'entre eux.

Ainsi la reconnaissance de ces anciennes formes de terrain fossiles peut être une procédure de mise en évidence des variations du niveau de la mer et en délivrer une preuve. En outre, elle autorise, grâce à la mesure de l'"épaisseur caractéristique" des sédiments trans-gressifs des terrasses marines construites, une évaluation de l'amplitude des transgressions, tandis que le mode d'agencement des surfaces de transgressions entre elles fournit une approche de la position relative des hauts et des bas niveaux marins successifs. Elle permet aussi de prendre conscience de la fréquence des oscillations du niveau de la mer, et, donc, de la variabilité eustatique, grâce au dénombrement des surfaces de transgressions successives

I - D'ANCIENNES FORMES DE TERRAIN FOSSILES, LIMITES STRATIGRAPHIQUES PROFONDES D'UN DÉPÔT DE TERRASSE MARINE CONSTRUITE

En effet, dans une plaque continentale en cours de soulèvement, là où s'implantent les dépôts des terrasses marines construites, la mer ne saurait pénétrer, à la faveur d'une trans-gression et y déposer des sédiments, sans une érosion concomitante ou préalable à ce dépôt (Fig. 13). Cette érosion, d'origine continentale ou marine, engendre des formes de terrain. Chaque unité stratigraphique, constituant un dépôt de terrasse ou ce qu'il en reste après érosion de toute une partie supérieure, est donc délimitée à sa base par une surface de discor-dance, née de cette érosion et qui représente la surface de transgression, sur laquelle elle repose. Cette surface de transgression est d'origine géomorphologique. Elle n'est pas autre chose qu'un ensemble d'anciennes formes de terrain fossiles, redevables à ces processus d'érosion. Ces dernières supportent les sédiments transgressifs appartenant à ce dépôt, qui les fossilise, en partie ou en tout. Ces anciennes formes de terrain sont caractéristiques des pro-cessus de morphogenèse qui leur ont donné naissance, et bien reconnaissables, à l'expérience,

Partie I - Chapitre II

L'ORIGINE GÉOMORPHOLOGIQUE PROFONDE DES SURFACES DE TRANSGRESSION SUPPORTANT LES DÉPOTS DÉTRITIQUES DE TERRASSE MARINE CONSTRUITE, ET SA CONTRIBUTION À LA MISE EN

ÉVIDENCE DES VARIATIONS DU NIVEAU DE LA MER

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sur des affleurements de terrain favorables. Ainsi, chaque dépôt de terrasse marine construite repose sur une surface de transgression, qui lui est propre, et qui permet de le distinguer de celui qui précède et de celui qui lui fait suite.

Sont qualifiées, en géomorphologie, de "formes fossiles", du latin fossilis, "tiré d'une fosse", les anciennes formes de terrain, qui, à l'instar des débris ou d'empreintes de plantes ou d'animaux, ont été ensevelies sous des sédiments antérieurs à la période géologique actuelle, et qui s'y sont conservés, souvent mieux que les anciennes formes de terrain de surface. Sauf en cas d'exhumation, les anciennes formes de terrain fossiles sont identifiables, à leur profil, sur un affleurement d'origine naturelle ou anthropique, souvent éphémère, en revanche. Des affleurements de même taille sont moins favorable à l'exposition des anciens versants de vallée fossiles ou des anciennes falaises fossiles, en pente forte, qu'à celle d'un segment, même court, des anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles, de pente plus faible. Le terme "fossile" a parfois été utilisé, à tort, pour désigner une forme de terrain qui n'est plus fonctionnelle, sans être recouverte de sédiments. Il vaudrait peut-être mieux la qualifier seulement, dans ce cas, d'ancienne forme de terrain ou de paléoforme, ou de forme relique ou résiduelle.

1 ) Certaines de ces anciennes formes de terrain fossiles résultent de l'action érosive des eaux courantes (Fig. 13).

De fait, l'écoulement ou le ruissellement des eaux de surface ont pour résultat de sculpter dans un bassin versant des formes de terrain de dimensions variées. Ainsi les principaux cours d'eau se sont aménagés des vallées, larges et profondes, séparant les interfluves, alors que les versants de ces vallées et de ces interfluves sont parcourus, eux aussi, par des eaux courantes, génératrices de vallons, de ravins, de ravineaux, voire de simples rigoles. À proximité du littoral, ces anciennes formes de terrain ont été engendrées, à la faveur d'un abaissement du niveau de base, pendant les régressions. Elles ont été fossilisées, en toute ou en partie, pendant, une transgression suivante.

Dans ce domaine, la terminologie de langue française ou anglo-saxonne appelle plusieurs remarques. La désignation des vallées sous l'appellation d'"incised valleys" suggère un profil d'incision en forme de V, alors que beaucoup d'entre elles séparent largement deux interfluves, en raison de la part de l'érosion latérale. Dans le même vocabulaire, le colmatage de ces vallées est qualifié d'"incised-valley fill". À une échelle plus grande, apparaît le terme "channell" et l'expression "channelized deposits". En langue française, l'usage du terme de "chenal" se heurte à son utilisation au sens étymologique de "canalis", qui a pris le sens, dans le cas des cours d'eau, de leur partie la plus profonde, la seule qui soit navigable. Le même terme est également employé à propos des cours d'eau dits "à chenaux en tresses". À une échelle plus grande que celle des vallées, la terminologie de langue française dispose des termes de "vallon" et de "ravin". Mais ces vocables ne sont pas toujours représentatifs de leur profil transversal particulier, en berceau ou en V. Ainsi, le processus de ravinement évoque la création d'une entaille. C'est aussi le sens banal du terme "channel", qui désigne dans la pratique une "rainure". Pourtant il se peut que le ruissellement concentré n'engendre pas nécessairement des sillons, mais aussi des gouttières, au profil en berceau, parfois aussi qualifiées de "poches", après leur remplissage. Ces anciennes formes de terrain de taille mineure n'ont pas toujours suscité l'attention qu'elles méritent, malgré la signification eustatique qu'elles comportent après leur fossilisation par un dépôt marin.

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A - Ancienne vallée et ancien versant de vallée découpé en ravins colmatés de sables marins. Calabre méridionale, versant de rive droite du Vallone Carbone, littoral ionien, à l'est de Locri.

Figure 13 - Anciennes formes de terrain résultant du travail des eaux courantes, pendant une régression et fossilisées sous des sédiments marins pendant une transgression

suivante. Calabre méridionale, à l'est de Locri.

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B - Ancien petit vallon colmaté. Calabre méridionale, C - "Une surface d'érosion très "irrégulière", rive droite du torrent Campanella, à l'est de Villa Tunisie, Péninsule du Cap Bon, d'après San Giovanni. A CHAKROUN et al. (2009, figure 2).

Ouest Est

A. D'anciens vallons fossiles (1b), sont aujourd'hui suspendus sur un versant d'interfluve. Ils se raccordaient au fond d'une ancienne vallée (1a). La surface de transgression, sur laquelle reposent des sables marins (Sm)du Pléistocène supérieur, est inscrite dans des calcarénites (C) du Pléistocène inférieur. Des ravins ont été creusés dans un ancien versant de vallée, à la faveur d'une régression, se conjuguant avec le soulèvement. Ils ont été intégralement colmatés par des sables marins (Sm) au cours de la transgression suivante. Le sommet de l'interfluve conserve de larges témoins d'une ancienne plate-forme subaérienne d'accumulation marine (4a). Le dépôt sableux est rapporté à MISS 5.5.

B. D'anciennes formes de terrain, de taille mineure, sont dues à un processus de ravinement, exercé par un ruissellement concentré dans des sédiments détritiques meubles. Un dépôt (Cb) à galets dominants, contenant une lentille sableuse (Sm), repose sur des sables altérés (Sm), par l'intermédiaire d'une surface de discontinuité, de profil irrégulier (1b). Cette discordance d'érosion résulte de l'action des eaux courantes, à l'échelle d'un ruissellement concentré. Il affecte le versant d'un interfluve. L'écoulement se dirigeait vers le cours d'eau principal, dont l'ancienne vallée se situait à peu près à l'emplacement de l'actuelle vallée du torrent Campanella. Le creusement de ce "chenal" s'est effectué, comme celui de l'ancienne vallée, au cours d'une régression. Il a été colmaté pendant une transgression suivante. Il en résulte un profil comportant des "poches", remplies de sédiments. Ces anciennes formes de terrain, bien que mineures, sont néanmoins aisément reconnaissables et elles n'en témoignent pas moins de variations significatives du niveau de la mer, au même titre que dans le cas d'une ancienne vallée, colmatée par des sédiments transgressifs analogues. La sédimentation se poursuit par une alternance de lits subhorizontaux de sables et de graviers (Sgm).L'émoussé des galets ne provient pas d'un remaniement du "conglomérat de Messine". De fait, le litage et le classement propre à chaque lit de ce dépôt évoquent l'influence de l'agitation des vagues. Le dépôt sous-jacent est attribué à MISS 5.5. En amont, et en dehors du cliché, le dépôt (Sgm) repose directement, enonlap, sur la topographie sous-jacente (1b), qu'il fossilise.

C. La "poche" présente une profondeur de 35 cm sur une largeur de 90 cm seulement. Elle est manifestement redevable, elle aussi, à l'action des eaux courantes (1b), dont le résultat est ainsi exposé : "…two shallowing-upward sequences separated by an erosion surface ... " ; "... une discontinuité majeure caractérisée par une surface d'érosion…" ; "… a very irregular erosion surface corresponding to an important unconformity..." ; "... an irregular erosion unconformity…". Cette surface de transgression est soulignée par un "conglomérat de base" (Cb). Elle est creusée dans un sable (Sm), tandis que le "conglomérat de base" (Cg) est surmonté par un autre sable (Sm). En fait, l'entaille est de dimension mineure, mais elle n'en est pas moins significative de la succession de deux épisodes eustatiques successifs : une régression, suivie d'une transgression, qui se partagent les rôles entre morphogenèse et fossilisation.

Figure 13 - Suite : Calabre méridionale, à l'est de Villa San Giovanni, et Péninsule du Cap Bon, en Tunisie.

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2 ) D'autres anciennes formes de terrain fossiles sont l'œuvre de l'érosion marine

La surface de transgression se compose alors communément d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, à laquelle est associée une ancienne falaise, fossile, elle aussi le façonnement de la première s'accompagnant du recul de la seconde pendant la phase initiale d'une transgression (Fig. 14).

A - Calabre méridionale, littoral ionien entre Gerace et Locri.

A/B : bord interne d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), à son point de jonction avec l'ancienne falaise fossile (2b), qui lui est associée dans la même surface de transgression (ST). Sm : sable marin (Pléistocène supérieur). C : calcarénite (Pléistocène inférieur).

A. Une surface de transgression (ST) est excavée dans des calcarénites (C) du Pléistocène inférieur, de même qu'en rive droite du Vallone Carbone (Fig. 13-A). Elle est recouverte, elle aussi, par des sables marins (Sm) du Pléistocène supérieur, comme sous l'interfluve de Scopatavole (Fig. 13-A), Mais elle se compose, ici, d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), qui vient s'adosser à une ancienne falaise fossile (2b). Le tracé de l'ancienne falaise fossile est de direction oblique à celle de l'interfluve du Monte Antichi. Elle est partiellement "exhumée" (*) au sud de la cote 177m. La pente de l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile augmente à proximité de son bord interne, sur son point de jonction avec l'ancienne falaise fossile, contre laquelle elle vient buter abruptement, en A/B. En revanche, le bord interne de l'ancienne plate-forme d'accumulation marine (4a) à son point de jonction avec une ancienne falaise subaérienne, ayant échappé à la fossilisation, n'est pas conservé, à cause de l'ouverture d'un petit col de flanc aux dépens des sables meubles. Cette disparition entraîne celle de tout indice précis d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau entre le Monte Antichi et la cote 177m.

Figure 14 - Deux anciennes formes de terrain complémentaires résultant de l'abrasion marine : une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile et l'ancienne falaise fossile,

qui lui est associée dans la même surface de transgression supportant des sédiments marins détritiques. Calabre méridionale, entre Gerace et Locri.

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Figure 14 - Suite 1 : Calabre méridionale : travaux autoroutiers entre les sorties de Villa San Giovanni et de Campo Calabro.

B - Calabre méridionale, en bordure du Détroit de Messine, travaux autoroutiers entre les sorties de Villa San Giovanni et de Campo Calabro.

B. Cette coupe comporte deux unités stratigraphiques distinctes (I) et (II), composées l'une et l'autre de sédiments détritiques marins. La plus récente (II) repose sur une surface de transgression (ST2) constituée d'anciennes formes de terrain fossiles, qui représentent leurs limites stratigraphiques profondes. Elle est emboîtée dans la précédente (I). La surface de transgression (ST2) sur laquelle elle repose, s'exprime à l'évidence par l'interposition, entre ces deux unités stratigraphiques, d'une ancienne falaise fossile (2b), faisant face à la mer. Cette ancienne falaise est d'autant plus facile à déceler qu'elle s'inscrit, pour partie, dans un sable (Sm), alors qu'elle est recouverte par un dépôt conglomératique (Cg). Elle comporte, à sa base, un premier segment, dont la pente est d'abord de l'ordre de 70°, puis d'environ 40°. Ce segment inférieur (S1) est d'identification patente, à cause du contraste de texture entre les sédiments détritiques affleurant de part et d'autre. Un second segment (S2) le prolonge vers le haut, entre deux dépôts conglomératiques, mais la trace de ce profil est plus difficile à déchiffrer que dans la partie inférieure. Une partie du conglomérat sus-jacent (Cg) provient apparemment, par resédimentation, de la dégradation de la falaise en cours de fossilisation. Il présente, localement, une clinostratification, suggérant qu'il aurait échappé à l'agitation des vagues, en raison d'une mise en place sous forte profondeur d'eau. À cette ancienne falaise fossile est associée une ancienne plate-forme d'abrasion marine, fossile elle aussi (2a).Celle-ci, contrairement au cas de figure le plus ordinaire, est plus difficile à détecter que l'ancienne falaise fossile, faute de contraste d'inclinaison ou de granulométrie entre l'intercalation conglomératique (Cg), dans laquelle elle s'inscrit, et le conglomérat qu'elle supporte (Cg). Dans ces conditions, il convient de rechercher s'il se présente une ancienne falaise fossile contre laquelle vient s'achever l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile. Ce qui est effectivement le cas en 2b. Sinon le dépôt conglomératique aurait pu se déposer à la faveur de l'apport temporaire de matériaux grossiers par un cours d'eau, en fonction des déplacements de son embouchure. Il en est sans doute ainsi du conglomérat (Cg). Le bord interne de l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, à son point de jonction (A/B) avec l'ancienne falaise fossile, à laquelle elle est associée dans la même surface de transgression, indique la fin du processus d'abrasion ayant entraîné le recul de la falaise et le début de sa fossilisation.

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C - Calabre méridionale, en bordure du Détroit de Messine, versant de rive gauche du Torrente San Filippo Neri, au sud-est de Villa San Giovanni.

C. Cette autre coupe contient deux surfaces de transgression (ST1 et ST2). Elles ont été engendrées, l'une et l'autre, par le jeu de l'abrasion marine. Elles indiquent la succession de deux unités stratigraphiques distinctes, (I) et (II), surmontant des couches progradantes, conglomératiques (Cg) ou sableuses (Sm), du "conglomérat de Messine" (CgM). La première (ST1) des deux surfaces de transgression ne présente, ici, qu'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a). Elle est facilement identifiable, parce qu'elle est inscrite dans des couches de structure progradante. Elle est recouverte par un dépôt, principalement conglomératique (Cg), sur cet affleurement. Elle est recoupée sur son bord externe par une surface de transgression (ST2) d'âge postérieur. Cette dernière se compose d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), à laquelle est progressivement associée, sous un profil concave, une ancienne falaise fossile (2b). Cette ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile supporte un dépôt conglomératique (Cg), surmonté d'un sable (Sm), sans équivalent dans l'unité antérieure (I), à laquelle est juxtaposée. Son bord interne (A/B), à son point de jonction avec l'ancienne falaise correspondante, ne présente pas de point de rupture d'angle de pente, comme il en est ordinairement dans le cas de roches cohérentes. La cause en est la fragilité du substrat sableux sous-jacent. Le profil de la surface de transgression (ST2) est facile à identifier, lui aussi, là où il est inscrit dans des couches progradantes, pour la totalité de l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, et dans la part inférieure de l'ancienne falaise fossile (S1). La trace de cette ancienne falaise fossile se distingue mal, au contraire, dans sa partie supérieure (S2), où elle tranche un conglomérat de structure massive (Cg). L'équivoque peut être entretenue par des injections de matériaux grossiers, provenant de la dégradation d'une falaise de conglomérats, en cours de fossilisation par le sable marin (Sm).

Figure 14 - Suite 2 : Calabre méridionale, au sud-est de Villa San Giovanni.

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a. La reconnaissance des anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles

La reconnaissance des anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles est un fait d'évidence, quand elles sont inscrites dans des roches cristallines (Fig. 15) ou dans des roches sédimentaires plus inclinées qu'elles (Fig. 16 et 17) ou bien encore, plus rarement, quand l'une de ces plates-formes est plus inclinée (Fig. 18), au contraire, que les sédiments subhori-zontaux sous-jacents. Cette inclinaison reste toutefois inférieure à celle de l'ancienne falaise fossile associée dans la même surface de transgression. Elle est généralement comprise entre 0,5 ou 1°, et 8 à 10° au maximum, en bord interne seulement. Leur identification repose donc d'abord sur cette faible pente ("the lowermost unit U1 is delimited at the base by an unconformity gently dipping seaward and cutting through the Miocene sandstone" – S. ANDREUCCI et al., 2009, page 109). De plus, le profil rectiligne, hormis la présence éventuelle d'écueils, de vasques ou l'exploitation de diaclases ou de joints de stratification, est plutôt relativement plan, et il ne présente pas les irrégularités d'une topographie aussi forte-ment différenciée que celle engendrée par les processus de ravinement (voir Fig. 13). De ce fait, l'expression "ravinement surface" (H.W. POSAMENTIER et al., 1992 ; S. ANDREUCCIet al., 2009, figure 7c), empruntée au vocabulaire de la stratigraphie séquentielle (P.R. VAILet al., 1977), telle qu'elle est appliquée au résultat d'un processus d'abrasion marine, est à éviter.

La détection des anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles est souvent facilitée par leur recouvrement sous un "dépôt de couverture transgressive grossière", qualifié commu-nément de "conglomérat de base". Il peut se faire aussi que l'érosion différentielle ait dégagé une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile des sédiments meubles qui la recouvraient (exhumation), ou seulement de ceux qui surmontait le "toit" d'un "conglomérat de base" consolidé ("surface structurale dérivée", voir Fig. 12).

Le diagnostic devient plus délicat quand une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, de profil proche de l'horizontale, s'inscrit dans des couches subhorizontales, elles aussi (Fig. 14-C). Il en est ainsi, notamment, lorsqu'elle est découpée dans les couches quasiment horizontales, en position proximale, ou sommitale (topset beds), d'un Gilbert-delta, alors que son inscription dans des couches progradantes (foreset beds) de la même structure est dénuée d'ambiguïté (Fig. 16). Une solution consiste à s'assurer qu'une ancienne plate-forme d'abra-sion marine ne se profile pas déjà dans des couches progradantes de position distale, tout en se prolongeant, sous le même "conglomérat de base", dans des couches encore subhori-zontales, en amont. Ou bien, inversement, si ce conglomérat ne s'avance pas jusqu'au point de jonction avec une ancienne falaise fossile, dont le découpage ne fait pas de doute entre des terrains de composition, d'inclinaison ou de granulométrie différente, ce qui authentifie l'ori-gine érosive et marine de toute la surface de transgression

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La même ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a) s'étend sous plusieurs terrasses de culture. Son inclinaison est plus faible en bord externe (1°) qu'en bord interne (7°), où sa pente augmente à l'approche d'une ancienne falaise fossile (2b). Elle est jalonnée par une simple ligne de galets et de blocs (Cb), surmontée d'un dépôt marin silteux altéré (St), découpé en terrasses de culture. Elle est inscrite dans les granites du socle (G) et dans un conglomérat (Cp), attribué au Pliocène. En bord externe, les silts meubles ont été amincis par le jeu de l'érosion différentielle, qui bute sur le substrat de roches cohérentes. L'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, en voie d'exhumation, revêt ainsi l'apparence d'une plate-forme d'abrasion subaérienne. La largeur de l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile dépasse singulièrement celle de la zone de déferlement, où s'exerce le processus d'abrasion, entre la limite inférieure atteinte par l'agitation des vagues (sous le point de brisants) et la limite supérieure (sous la ligne de rivage correspondante). Elle n'a pu être acquise que grâce à un déplacement progressif de cette zone, en fonction de l'élévation du niveau de la mer, tant que sa vitesse au cours du déroulement d'une transgression, et la profondeur d'eau qui en résultait, permettaient à la base des vagues d'atteindre le fond rocheux et d'y opérer son action de façonnement de la plate-forme d'abrasion, accompagné du recul d'une falaise encore vive. Ce recul s'est achevé, en même temps que le processus d'abrasion, sur le point de jonction A/B. Cette surface de transgression est antérieure à MIS 5.

Figure 15 - Ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, dont la pente se relève vers l'amont, et en voie d'exhumation en aval.

Calabre méridionale, horst de Matiniti, à l'est de Villa San Giovanni.

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A - Calabre méridionale, lieu-dit Piano Centunzi, en bordure orientale du Détroit de Messine.

A. Une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a) recoupe des couches progradantes (CgM). Elle a été façonnée, par l'agitation des vagues, alors que la profondeur d'eau reste encore faible, en phase initiale de transgression, lorsque la vitesse d'élévation du niveau de la mer, en cours d'accélération, est encore lente. Elle est recouverte par un "conglomérat de base" (Cb). Sa mise en place est en accord, elle aussi, avec la faible profondeur d'eau. De fait, les matériaux, qui ont été arrachés par la mer au substrat, et ceux provenant des apports des versants ou des cours d'eau, peuvent subir ainsi les effets de l'agitation des vagues, qui assure leur prise en charge et leur façonnement. Viennent ensuite des sables marins altérés (Sm). Ces sables meubles sont particulièrement sensibles aux effets du ruissellement superficiel, si bien que leurs affleurements actuels ne représentent pas forcément leur épaisseur originelle. Le dépôt discordant est attribué à MISS 5.1.

La coupe ne présente pas de risque de confusion avec la transition plus ou moins graduelle (en offlap) de couches subhorizontales, en position sommitale et proximale, à des couches progradantes, de position distale, au sein d'une structure en Gilbert delta (voir Fig. 22).

B - Calabre méridionale, au dessus de Boccale, au nord du littoral ionien.

B. Une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a) recoupe des couches progradantes du "conglomérat de Messine" (CgM). Elle est recouverte par un "conglomérat de base" (Cb). Les couches qui ont été recoupées en biseau par le processus d'abrasion présentent un horizon d'altération, qui diffère selon la composition, carbonatée ou silicatée, des matériaux affectés. Les sédiments riches en CaCO3 ont subi un encroûtement (en X1). Les autres sont affectés, au contraire, par une migration et une accumulation d'oxydes de fer déshydratés (en X2), qui leur confère leur teinte rougeâtre. Le dépôt discordant est attribué à MISS 5.3.

Figure 16 - Anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles, inscrites dans des couches progradantes, et recouvertes par un "conglomérat de base", surmonté

d'un sable marin altéré. Calabre méridionale.

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A - Calabre méridionale, bordure orientale du détroit de Messine, à proximité de la localité de Ravagnese, au sud de Reggi.

B - Calabre méridionale, côte ionienne, Palazzo Garibaldi, entre Saline et Mélito di Porto Salvo.

A. Un dépôt de plage à galets et à blocs (Cb) repose sur une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), qui est inscrite dans des grès du Miocène. Il est surmonté par des silts lités (St), de couleur claire, sans doute en l'absence de minéraux altérables dans le substrat gréseux. Au dépôt de couverture transgressive grossière, succède un sédiment de granulométrie plus fine, qui témoigne de la poursuite de la transgression sous une profondeur d'eau plus élevée. Le dépôt est antérieur, dans le stade 5, au gisement classique à Strombus bubonius de Ravagnese (M. GIGNOUX, 1913).

B. Une ancienne plate-forme d'abrasion marine (2a), inscrite dans des couches progradantes (CgM), supporte, elle aussi, un "conglomérat de base" (Cb) à galets et à blocs. Mais ce dépôt de couverture transgressive grossière est surmonté sur ce site par un dépôt "à caractères d'apparence continentale" (Ac), là où la sédimentation transgressive se poursuit, en position stratigraphique équivalente sur d'autres coupes (Fig. 17-A), à l'écart du débouché des cours d'eau, par un dépôt de granulométrie fine, mis en place sous forte profondeur d'eau. De fait, les caractères de ce dépôt évoquent les apports d'un cours d'eau torrentiel à chenaux en tresses : alternance de lits grossiers et de lits fins, parfois disposés en lentilles, faible émoussé des galets, mauvais classement des lits grossiers. Toutefois il ne se présente pas de trace d'érosion entre ces deux dépôts, comme il en fait état dans la littérature, entre les sédiments marins et les dépôts alluviaux ou colluviaux sus-jacents (voir texte). De plus, les couches du dépôt supérieur sont inclinées, de sorte que leur terminaison inférieure dessine un angle net avec le sommet du "conglomérat de base". Cet agencement, en downlap, évoque la discontinuité interne, séparant deux "cortèges sédimentaires" (un "intervalle transgressif", surmonté d'un "prisme de haut niveau"), qui est en rapport avec le maximum de vitesse d'élévation du niveau de la mer et de profondeur d'eau (surface dite d' "inondation" maximale). Dans ces conditions, les apports, déversés dans la mer par des cours d'eau, échappent à l'agitation des vagues et conservent des caractères hérités de leur origine torrentielle. Ce dépôt est à attribuer à MISS 5.5. Les deux sites de mesure d'altitude sont proches du point de jonction (A/B), qui se trouvait en amont, entre une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile et l'ancienne falaise fossile, qui lui était associée, avant sa destruction à cause de l'ouverture d'une carrière, à laquelle est dû le front de taille.

Figure 17 - Ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, recouverte d'un "conglomérat de base", auquel font suite en (A), un dépôt de granulométrie fine, en (B) un apport continental, issu d'un cours d'eau à chenaux en tresses. Calabre méridionale.

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À droite (à l'ouest) et à la base de la coupe, une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a) est inscrite, dans des couches progradantes (CgM). Elle supporte un dépôt conglomératique (Cg). Une autre ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), jalonnée par un "conglomérat de base" (Cb), est inscrite dans des couches subhorizontales sous-jacentes. Sa pente augmente de l'aval vers l'amont, où elle atteint 8°. C'est grâce à cette inclinaison qu'elle devient manifeste en amont. De plus, il apparaît ainsi qu'elle recoupe un lit conglomératique (Cb), qui repose lui aussi sur une autre ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), à charge de le confirmer, en amont, par une augmentation de sa pente, ou bien par l'occurrence d'une ancienne falaise fossile. La coupe comporte ainsi trois surfaces de transgressions distinctes. Elles sont ici représentées uniquement par des anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles, qui expriment, à elles seules, les relations stratigraphiques entre plusieurs dépôts successifs, dont chacun s'est mis en place au cours d'une transgression distincte. Le recoupement de ST2 par ST3 résulte de la différence d'inclinaison entre le bord externe de l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, en pente plus faible, que celle du bord interne de la suivante (8°). Ces trois surfaces de transgressions datent de MISS 5.3. Figure 18 - Anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles, superposées. Calabre méridionale, sur bordure orientale

du Détroit de Messine, lieu-dit Tratti, entre le Catona et le Gallico.

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b. L'identification des anciennes falaises fossiles Contrairement à celle des anciens versants de vallée fossiles, qui s'est imposée de longue date, l'identification des anciennes falaises fossiles n'est pas toujours aussi explicite dans la littérature (Fig. 19, 20 et 21), même s'il est reconnu que la surface de transgression se compose, pour une part d'une paroi en pente forte, qui ne peut être due qu'à l'érosion marine. Ainsi, il est fait état, globalement, d'une surface dite "de ravinement" ("ravinementsurface", H.W. POSAMENTIER et al., 1992), sans que la distinction soit faite (Fig. 19) entre un premier segment constitué d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, et d'une autre partie, complémentaire, composée d'une ancienne falaise fossile, de pente supérieure, pouvant aller jusqu'à 60° et au delà. Or, conformément à la définition proposée par A. GUILCHER (1954), la différence de pente est un élément déterminant de la définition géomorphologique de ces deux anciennes formes de terrain respectives. Une falaise est "un ressaut…de forte pente, entre 15° et la verticale ou le surplomb". Dans les faits, il est plutôt rare qu'elle atteigne véritablement la verticale et qu'elle comporte un surplomb, sauf dans le cas d'une grotte. Toutefois il peut se faire, dans un substrat sableux (voir Fig. 14-C) ou argileux (Fig. 20), que le profil de la surface de transgression, ainsi constituée, soit effectivement concave. En fait, parce qu'ils sont généralement de petit taille, il est plus rare de disposer d'un affleurement favorable permettant l'identification d'une ancienne falaise fossile, courte et pentue, que de pouvoir détecter, sur une excavation de dimension analogue, un segment de largeur significative d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, dont l'extension est plus grande et la pente proche de l'horizontale. De plus, le repérage de la trace d'une ancienne falaise fossile présente un risque de confusion avec un plan de glissement de terrain (voir Fig. 23) ou de faille (voir Fig. 33). Enfin, une autre difficulté peut provenir de l'absence de contraste évident de structure, de texture ou d'altération entre les sédiments qui recouvrent la paroi de l'ancienne falaise et ceux dans lesquels elle est inscrite. Toutefois il peut se faire que le problème soit tranché par la présence indiscutable d'une ancienne falaise subaérienne dans son prolongement vers le haut. Ou bien que le profil de cette ancienne falaise ne se décompose en deux parties (voir Fig. 12, 14-B et 14-C) : - un segment inférieur (S1), dépourvu d'ambiguïté parce qu'il sépare des terrains qu'il est

impossible de confondre entre eux ; - et un segment supérieur (S2) où sont juxtaposés des matériaux de caractères peu

différenciés. De plus, il peut se produire que le dépôt qui fossilise une ancienne falaise soit "resédi-menté" et qu'il provienne de la dégradation de la paroi en cours de fossilisation (Fig. 14-B, Fig. 14-C), rendant, de ce fait, la distinction plus difficile entre les terrains encaissants et ceux qui ont été ainsi rapportés. À la différence des plates-formes d'abrasion, telles qu'elles ont été décrites par K.R. LAJOIE (1986) ou par M. SAILLARD et al. (2009), revêtues d'un dépôt de pente subaérien résultant de la dégradation de la falaise qui lui est associée, beaucoup d'anciennes falaises fossiles, qui appartiennent à une succession de terrasses marines construites, offrent cette particularité.

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A - D'après P.R. VAIL et al. (1977). CONTINENT

PHN : prisme de haut niveau. SIM : surface d'inondation maximale. IT : intervalle transgressif. ST : "surface" de transgression. A. La surface de transgression ne présente, sur ce profil schématique, et dans le cas d'une érosion marine, qu'une seule ancienne forme de terrain fossile, qualifiée de "surface de ravinement" ("ravinement surface", H.W. POSAMENTIER et al., 1992). Elle est largement concave. Elle constitue la limite inférieure de cette partie d'une séquence de dépôt qui comporte, dans l' "espace d'accueil" ("accomodation space"), ainsi excavé dans un continent, la totalité de ses sédiments transgressifs, mais une partie seulement de ses sédiments régressifs, l'autre part s'étant déversée dans le bassin. B - Autre représentation d'une surface de transgression, composée d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine et d'une ancienne falaise, l'une et l'autre fossiles.

B. Deux anciennes formes de terrain fossiles, étroitement complémentaires, et de pentes distinctes, représentent deux limites stratigraphiques profondes, l'une inférieure, et l'autre, latérale interne, d'un dépôt de terrasse, dont elles supportent les sédiments transgressifs : - une ancienne plate-forme d'abrasion marine (2a), dont l'inclinaison est comprise entre 1° et 8°;- une ancienne falaise fossile (2b), dont la pente est plus forte, supérieure à 15°, pour atteindre communément 65°. Les couches transgressives subhorizontales (dites "rétrogradantes") se terminent en onlap, sur une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, d'autant plus manifestement qu'elle est plus inclinée. Celles dites "aggradantes" s'empilent les unes au-dessus des autres contre la paroi d'une ancienne falaise, qu'elles fossilisent. Cette différence est en rapport avec la fossilisation successive, l'une après l'autre, de ces deux anciennes formes de terrain, au cours d'une transgression, en liaison avec les variations de sa vitesse. À ces anciennes formes de terrain fossiles, s'ajoutent d'anciennes formes de terrain subaériennes, qui constituent les limites stratigraphiques superficielles des dépôts de terrasse. Elles comportent une ancienne plate-forme d'accumulation (4a), intercalée entre une ancienne falaise (4b) et un ancien talus de progradation (5). Dans des sédiments détritiques meubles, ces anciennes formes de terrain de surface sont particulièrement fragiles et elles ont souvent souffert d'une érosion ultérieure. Il en est ainsi, tout particulièrement du talus de progradation (5), auquel d'autres formes de terrain plus récentes, dues à l'érosion continentale ou marine, se sont substituées. À l'extrémité inférieure de la surface de transgression (ST), le point (A) est l'indice d'un bas niveau, qui constitue le niveau de base de l'érosion marine, déclenchée en début de transgression, ainsi que le point de départ de l'accumulation des sédiments transgressifs. À son autre extrémité, le point (B) est celui d'un haut niveau, au terme de la mise en place des sédiments transgressifs et au début de celle des sédiments régressifs qui leur font suite. Le point (A/B) se situe en bord interne d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, à son point de jonction avec l'ancienne falaise fossile, qui lui est associée. Dans des roches cohérentes, ce point de jonction coïncide avec une rupture prononcée d'angle de pente. L' "intervalle transgressif" (IT) ne représente qu'une partie des sédiments transgressifs, celle qui s'est accumulée avant le maximum de vitesse d'élévation du niveau de la mer, dont résulte le maximum de profondeur d'eau et de submersion (d' "inondation") au cours du déroulement de la transgression (SIM). Le "prisme de haut niveau" (PHN) se tient de part et d'autre d'un haut niveau marin. Il se compose, pour une part, de sédiments transgressifs et, pour une autre part, d'une partie des sédiments régressifs, qui leur succèdent. Ces "modèles" n'excluent pas l'occurrence de surfaces de transgression, dont l'origine relève du travail des eaux courantes, et dont les formes de terrain correspondantes ne sont pas représentées sur ces deux schémas simplifiés.

Figure 19 - Deux "modèles" de surface de transgression engendrée par l'érosion marine.

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d'être largement fossilisées sous des sédiments marins, "aggradants", sur une hauteur qui peut atteindre quelques mètres ou même plusieurs dizaines de mètres (Fig. 14, 15, 19, 20 et 21). Leur fossilisation n'est donc pas seulement le résultat de la mise en place d'un dépôt continental, qu'il soit colluvial, alluvial ou éolien. Or la fossilisation de la paroi, en forte pente ("de 15° à la verticale"), d'une ancienne falaise d'érosion marine ne peut pas se produire, au cours d'une transgression, en même temps que s'effectue son recul. Elle ne peut avoir lieu que pendant une autre phase de la même transgression, que celle qui lui a donné le jour. Les causes de la dichotomie inévitable entre cette érosion et cette partie de la sédimentation sont à rechercher dans les variations de la vitesse d'élévation du niveau de la mer au cours du déroulement d'une même transgression. 3 ) Des escarpements de ligne de faille Des escarpements de ligne de faille complètent le catalogue des anciennes formes fossiles, qui supportent les sédiments transgressifs des terrasses marines construites. Certains d'entre eux ont connu une évolution complexe, fait de plusieurs épisodes de dégagement par l'érosion différentielle et de recouvrement par des sédiments (voir Fig. 24). Ce jeu de l'érosion différentielle peut aussi bien s'exercer au cours d'une régression, du fait de l'action des eaux courantes, que pendant la phase initiale d'une transgression, à cause de l'érosion marine. Leur fossilisation intervient pendant une transgression. L'exhumation d'un escarpement de ligne de faille par érosion différentielle peut avoir lieu au cours de plusieurs oscillations glacio-eustatiques, ayant entraîné la mise en place de plusieurs dépôts de terrasse successifs (B. DUMAS et al., 2005), sans qu'il soit nécessaire de faire appel à la néotectonique provo-quant l'étagement d'un seul et même dépôt. Si l'exhumation est provoquée par les eaux courantes, elle s'effectue pendant une régression, qui peut précéder une nouvelle fossilisation sous les sédiments d'une autre transgression. Si l'exhumation est l'œuvre de la mer, l'érosion s'opère pendant une première phase de la transgression et la fossilisation intervient pendant une phase ultérieure, en raison des variations de la vitesse d'élévation du niveau de la mer.

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A - Calabre centrale, littoral ionien de la Sila du Nord-Est, schéma explicatif, d'après L. CAROBENE (2003, figure 31).

A. Selon L. CAROBENE (2003, figure 31), chaque dépôt de terrasse repose sur une ancienne plate-forme d'abrasion marine (2a), dont l'inclinaison s'accroît de l'aval (0,5°) vers l'amont (8°). Mais l'ancienne falaise fossile (2b), qui lui fait suite, est entièrement recouverte par un dépôt de pente, à l'exclusion de tout sédiment marin (Cb + Sm). B - Calabre centrale, littoral ionien de la Sila du Nord-Est, ente le Fiume Trionto et le Torrente Fiumarella, d'après L. CAROBENE (2003, figure 14). Échelle H = L, au lieu de H = L 5

Cc : dépôt alluvial. Ags : sables et graviers marins. Si : sables inférieurs marins. Pm : pélites marines. Cb conglomérat de base. B. Pourtant, sur ce levé de terrain, une partie de l'ancienne falaise fossile (2b), de pente comprise entre 17 et 27°, est ensevelie sous un dépôt marin, sur une épaisseur d'une quinzaine de mètres. Y est adossée une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), de pente plus faible ("each platform… is backed by a relict sea cliff", L. CUCCI, 2004). Dans les argiles, le passage de l'une à l'autre est progressif et de profil concave. En roche cohérente, le profil présente un angle de rupture de pente net en bord interne de l'ancienne plate-forme d'abrasion marine ("the… platform… abuts sharply against an ancien cliff with an inner margin or shoreline angle…", L. FERRANTI et al., 2008, page 13, figure 9b ; voir infra Fig. 39).

Figure 20 - Deux représentations géomorphologiques de la limite stratigraphique profonde d'un dépôt de terrasse marine construite, avec ou sans ancienne falaise

fossilisée par le dépôt marin.

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A - Calabre septentrionale, littoral tyrrhénien, à proximité de l'embouchure du Fiume Lao, d'après F. FILO-CAMO et al. (2008, figure 4 et figure 5A).

A. Un dépôt de terrasse marine ("UNIT 4") repose sur une surface de transgression, qui comporte explicitement une ancienne plate-forme d'abrasion marine ("an abrasional platform cutting UNIT 2 and UNIT 1") (2a), ainsi qu'une ancienne falaise fossile (2b), mais implicitement, car il n'est pas fait mention de cette définition. Celle ancienne falaise est recouverte par le dépôt marin, et elle comporte un prolongement subaérien (4b), de dénivellation moindre. Le dépôt débute par un "conglomérat de base" (Cb) d'épaisseur décimétrique et de granulométrie relativement grossière. Il se poursuit par des sables (Sm). Puis vient un dépôt conglomératique de structure progradante (Cg), de granulométrie moins grossière qu'à la base du dépôt. Le dépôt présente, entre 45 et 60 m d'altitude, une "épaisseur caractéristique" de 15 m. L'ancienne plate-forme d'accumulation subaérienne (4a) est redevable à la mise en place de sédiments régressifs, plus inclinés qu'elle. Ces sédiments conglomératiques, mieux que des sables ou de silts, assurent sa préservation. Ce dépôt de terrasse construite est rapporté à MIS 13.

Figure 21 - Des surfaces de transgression, composées d'une ancienne plate-forme

d'abrasion marine fossile et d'une ancienne falaise fossile, supportant des sédiments franchement marins sur le littoral tyrrhénien de la Calabre septentrionale.

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B - Calabre septentrionale, littoral ionien, d'après E. SANTORO et al. (2009, figure 10).

Terrasse T2. La séquence de dépôt est reconstituée sur la base d'observations provenant de plusieurs sites. Au nord de Sybaris (ibidem, tableau 3) : altitude du bord interne correction portant sur la couverture continentale altitude reconstituée de l'ancienne correction portant sur l'érosion ligne de rivage de haut niveau 48 m 3 m 5 m 50 m Le dépôt est attribué, de proche en proche, au sous-stade 5.1, par rapport à un dépôt de la terrasse T4, rapporté à Trebisacce, au sous-stade 5.5, d'après le taux de racémisation des acides aminés sur Glycymeris sp. (L. CUCCI, 2004). Il contient des cardiums datés (ESR) des stades 6.5 (162±12 ka) et 5.3 (98±10 ka), qui sont donc considérés comme resédimentés. B. Un dépôt marin repose, implicitement, sur une surface de transgression, composée de deux anciennes formes de terrain fossiles : une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a) et une ancienne falaise fossile (2b), qui lui est associée. La limite inférieure du dépôt est qualifiée de "limite de séquence" ("sequence boundary"). Le dessin accidenté de son profil prête à confusion avec des formes de terrain engendrée par le travail des eaux courantes. Le dépôt de terrasse débute, là aussi, par un conglomérat de base (Cb). Il est surmonté, à l'aval de la coupe seulement, par des sédiments totalement de granulométrie fine (Sm). Vers l'amont, ces sédiments fins font passage latéralement, par interdigitations successives, à des intercalations de sables marins (Sm) et de conglomérats (Cg) à caractères fluviatiles, en apparence. Pour les auteurs, il ne fait cependant pas de doute que la quasi-totalité du dépôt s'est construit sous le niveau de la mer. Au nord de Sybaris, ce dépôt de terrasse culmine en bord interne à l'altitude de 48 m. Une estimation est proposée de l'altitude de l'ancienne ligne de rivage de haut niveau marin pour une valeur de 50 m, compte tenu de la double correction, exigée par la présence d'une couverture colluviale, et de l'érosion qui a précédé son dépôt. En fait, des matériaux délivrés par des cours d'eau ont échappé à l'agitation des vagues, soit à cause d'une profondeur d'eau trop élevée, soit par excès de charge solide. Il apparaît ainsi que la fourniture de matériaux par ces cours d'eau n'a pas cessé au cours de la transgression, malgré la densification du couvert végétal, attribuée au réchauffement du climat. Le point de jonction (A/B) entre l'ancienne falaise fossile, fossilisée sous des sédiments marins, et l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, n'est pas une ancienne ligne de rivage de haut niveau. Il représente quand même la position d'une ancienne ligne de rivage, de position intermédiaire entre celle de bas niveau et celle de haut niveau. Il s'agit de celle datant de la fin du recul de la falaise, au terme d'une phase initiale d'une transgression, précédant sa fossilisation. Figure 21 - Suite 1 : sur le littoral ionien de la Calabre septentrionale, les sédiments fossilisant l'ancienne plate-forme d'abrasion marine sont constitués par des apports

continentaux à la sédimentation marine.

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C - Exemples photographiques d'apports continentaux. 1/ Calabre septentrionale, E. SANTORO et al. 2/ Calabre méridionale, versant sud du Vallone Bovetto. (2009, figure 11c).

C. La photo de gauche (1), en noir et blanc, correspond à un apport continental (Ac), figurant en position proximale sur la coupe précédente (Fig. 21-B). Il est qualifié, en légende de cette photo, de "coastal fanglomerate alternated tocoarse sand" (conglomérat côtier alternant avec des sables grossiers) et, dans le texte, de "alternation of… sand with lens-shaped… fanglomerate" "(alternance de sables avec des lentilles conglomératiques). La photo de droite (2), en couleur, a été prise dans des sédiments analogues, en Calabre méridionale. Ce dépôt est l'équivalent de celui qui affleure, en rive droite, au-dessus de la carrière de Bovetto, sous la butte, dont le sommet porte la cote 142. Pour L. BONFIGLIO (1972, figure 2), le dépôt se compose de graviers rougeâtres, alternant avec des paléosols, et il est considéré comme étant de mise en place continentale. Le dépôt fossilise un ancien versant du Vallone Bovetto, peut-être une falaise, qui est inscrit dans les argiles attribuées au Pliocène supérieur et au Calabrien. Cette position est analogue à celle du dépôt de la figure 21-B. La teinte rougeâtre n'est pas une preuve de la mise en place des sédiments à l'air libre. Les minéraux altérables, tels que les feldspaths ou le mica noir, subissent une altération en profondeur après leur émersion.

Figure 21 - Suite 2 : dans le Vallone Bovetto, en Calabre méridionale, les sédiments fossilisant l'ancienne plate-forme d'abrasion marine sont également constitués par des

apports continentaux à la sédimentation marine.

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A - Calabre méridionale, massif du Capo Vaticano, route de Briatico B - Calabre méridionale, bordure du à Conidoni. Détroit de Messine, en rive droite du vallon de Campo Piale, à l'est de Villa San Giovanni.

A. La surface de transgression se compose d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), proche de l'horizontale, et d'une ancienne falaise fossile (2b), dont la pente varie de 20° à 65° de bas en haut. Ces anciennes formes de terrain fossiles sont inscrites dans les grès calcaires du Miocène. Le dépôt qu'elles supportent comprend des sables altérés (Sm), reposant directement sur l'ancienne plate-forme d'abrasion marine, où ils sont précédés seulement de quelques galets (Cb), à l'approche de l'ancienne falaise fossile. La paroi de cette ancienne falaise est recouverte par un dépôt hétérométrique (Ac), massif, composé de fragments et de blocs anguleux. Il contient, toutefois, une intercalation sableuse (Sm). Une première interprétation consiste à considérer ce dépôt comme ayant été mis en place à l'air libre, après le retrait de la mer, au delà d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau, située à l'amont d'un dépôt de plage à galets, reposant sur le point de jonction (152m) entre la plate-forme d'une ancienne "terrasse d'abrasion" et l'ancienne falaise correspondante. Une autre explication consiste à considérer que le dépôt hétérométrique occupe la position stratigraphique ordinaire des silts ou des sables marins, dans une succession de granulométrie décroissante vers le haut. Les matériaux proviennent alors de la dégradation de la paroi encore émergée de l'ancienne falaise, en voie de submersion ("falaise plongeante"), puis de fossilisation, au cours de la transgression, lors de l'élévation à vitesse rapide du niveau de la mer, et sous une forte profondeur d'eau, les plaçant hors de portée de l'agitation des vagues, en mesure de leur conférer une empreinte marine spécifique. Dans ce cas, le point de jonction A/B a été acquis au cours de la transgression, quand le processus d'abrasion marine pris fin, au terme du recul d'une falaise vive, et au début de sa fossilisation. B. L'angle de pente (34°) d'un lit incliné de matériaux grossiers évoque une mise en place par un processus de gravité. L'inclinaison de ce dépôt clinostratifié est sensiblement la même que celle des couches progradantes, sous-jacentes, de position distale dans une structure en Gilbert delta. La mise en place de ces dernières provient, elle aussi, d'un processus de gravité. Il s'exerce alors sur un talus de progradation, au fur et à mesure qu'elles progressent vers un bassin, où elles finissent par se déverser en fin de régression. En position proximale, au contraire, le même processus de gravité ne peut qu'en rapport avec la dégradation de l'ancienne falaise, en cours de submersion, puis de fossilisation pendant une partie de la transgression. Ces matériaux ont pu se mettre en place à la faveur d'une forte profondeur d'eau, l'élévation du niveau de la mer progressant à vitesse rapide, de sorte qu'ils ont échappé à l'action des vagues, qui n'aurait pas manqué de les étaler en strates subhorizontales, si la limite inférieure de l'agitation des vagues avait encore pu atteindre le fond de la mer, comme pendant la phase initiale de cette transgression. L'émoussé des galets provient du remaniement de ceux d'un dépôt plus ancien, qui affleure en amont de l'ancienne falaise fossile.

Figure 22 - Surface de transgression, composée d'une ancienne plate-forme d'abrasion

marine fossile et d'une ancienne falaise fossile, recouvertes par un dépôt comprenant un "conglomérat de base", suivi d'un apport continental provenant de la dégradation d'une falaise en cours de fossilisation. Calabre méridionale : A. massif du Capo Vaticano, route

de Briatico à Conidoni ; B. bordure du Détroit de Messine, en rive droite du vallon de Campo Piale, à l'est de Villa San Giovanni.

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A - Interprétation de N. AMPEN (2001) : un glissement de terrain, affectant un Gilbert delta.

Figure 23 - Glissement de terrain ou ancienne falaise fossile ? Gilbert delta

et dépôt de terrasses marine construite. Calabre méridionale : versant de rive droite du Vallone Cratica, au nord du Capo d'ell'Armi.

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B - Autre interprétation : deux Gilbert-deltas, séparés par une ancienne falaise fossile, et recoupés par une ancienne plate-forme d'abrasion marine :

Une autre interprétation consiste à considérer qu'une ancienne falaise fossile (2b) est inscrite dans les couches progradantes d'un Gilbert delta (I). Elle supporte les couches subhorizontales, aggradantes en position proximale, d'un second Gilbert delta (II), qui s'emboîte ainsi dans le premier. Ces couches subhorizontales s'infléchissent assez brusquement en couches progradantes lors de leur passage en position distale. Un dépôt de terrasse marine (III), repose sur une ancienne plate-forme d'abrasion marine (2a). Il débute par un "conglomérat de base" encroûté (Cbx). La plate-forme d'abrasion est inscrite à l'évidence dans les couches progradantes, en position distale du premier (I) des deux Gilbert deltas, puis dans les couches subhorizontales, en position proximale, du plus récent (II) des deux. À l'est, le sommet des couches tronquées est manifestement encroûté (x). Il est possible que l'érosion différentielle ait fait disparaître des sédiments meubles, surmontant le "conglomérat de base", et son substrat, l'un et l'autre encroûtés. À la question plus générale de connaître quels sont les rapports entre un Gilbert delta et un dépôt de terrasse marine, la réponse peut donc être double. En fait, tout dépôt de terrasse marine présente, avant érosion, une structure interne analogue à celle d'un Gilbert delta, qui comporte des couches subhorizontales, à l'amont et à son sommet, et des couches progradantes, en position distale. Dans cette position, les couches progradantes d'un dépôt de terrasse, lorsqu'il est peu épais, ont rarement été préservées de l'érosion. Toutefois, comme sur cette coupe, une relation complexe peut consister en une superposition d'un autre dépôt de terrasse, reposant en discordance sur une surface de transgression, inscrite dans les foreset beds, ou dans des couches subhori-zontales, d'un ou de plusieurs Gilbert delta (s) antérieur(s).

Figure 23 - Suite : Calabre méridionale : versant de rive droite du Vallone Catrica, au nord du Capo dell'Armi.

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A - Cliché panoramique.

A. Un escarpement de faille, inscrit dans le socle gneissique, a été recouvert une première fois par des argiles, attribuées au Pléistocène inférieur et moyen, puis exhumé de ces dernières par l'érosion différentielle, puis enseveli, à nouveau, sous des attribuées au "conglomérat de Messine" (CgM). En position proximale, ces couches subhorizontales (H), sableuses et graveleuses, "aggradantes", s'appuient sur l'escarpement de ligne de faille, en se chargeant de brèches (br), à l'approche du socle. Vers l'amont, les couches s'infléchissent pour se disposer en progradation, dans leur position distale au sein d'une structure en Gilbert delta. Elles sont recouvertes en discordance par un dépôt de terrasse coiffant la butte cotée 153m. La surface de discordance (1b) présente un "chenal". L'enlèvement des argiles s'est opéré, avant la mise en place du "conglomérat de Messine", en partie sous l'action des eaux courantes, pendant une régression, alors qu'une vallée se creusait dans les gneiss du socle en amont de la faille, à l'emplacement de l'actuelle vallée du torrent San Biaggio, avant d'être fossilisée, elle aussi, sous le "conglomérat de Messine", au cours d'une transgression suivante. Ce dégagement de sédiments meubles résulte également, pour une autre part, de l'action de la mer en début de cette transgression.

Figure 24 - Un ancien escarpement de ligne de faille, fossilisé et exhumé. Calabre méridionale : faille N20°E de Reggio de Calabre, entre

la Madonna della Neve et le cimetière de Gallico.

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B - Coupes transversales.

(A) : argiles (Pléistocène inférieur et moyen).

B. L'escarpement de la faille a d'abord été fossilisé sous les argiles (A) du Pléistocène inférieur et moyen, puis exhumé, une première fois, aux dépens de ces dernières. Cet escarpement de ligne de faille a de nouveau été fossilisé sous le "conglomérat de Messine" (CgM), qui comporte des brèches dans sa partie proximale, où les couches sont subhorizontales, avant de s'infléchir en foreset beds dans sa partie distale. Cet escarpement de ligne de faille apparaît largement exhumé, de nos jours, à cause du jeu de l'érosion diffé-rentielle, s'exerçant entre les gneiss et le "conglomérat de Messine", relativement meuble. Cette exhumation s'est effectuée en plusieurs temps, au rythme des variations du niveau de la mer, qui ont laissé ici des traces d'abrasion et de dépôt, sur l'escarpement (site de mesure à 162,1m), et de creusement par des eaux courantes (1b) et de dépôt marin (Cb), sous la butte cotée 153m, dans le "conglomérat de Messine". C - Évolution géomorphologique.

Figure 24 - Suite. II - LA SIGNIFICATION EUSTATIQUE DES ANCIENNES FORMES DE TERRAIN FOSSILISÉES PAR DES SÉDIMENTS MARINS : LA PREUVE D'UNE OSCILLATION EUSTATIQUE COMPLÈTE La signification eustatique des anciennes formes de terrain fossiles, qui supportent les sédiments transgressifs des terrasses marines construites, varie selon l'origine, continentale ou marine, de l'érosion qui les a engendrées. Elle est plus immédiatement apparente dans le cas de l'érosion résultant du travail des eaux courantes que dans celui de l'abrasion marine.

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De fait, le creusement des anciennes vallées fossiles et des formes de terrain mineures, résultant du travail des cours d'eau ou du ruissellement est intervenu à la faveur d'un abaissement du niveau de base de cette érosion, qui s'est produit au cours d'une régression, dont elles témoignent. Leur fossilisation sous des sédiments marins implique, au contraire, une transgression ultérieure, sans laquelle le colmatage n'aurait pas eu lieu. La preuve d'une oscillation glacio-eustatique complète est délivrée en deux temps, qui correspondent ainsi à chacune de deux phases de cette oscillation. La notion de "niveau de base" de l'érosion a été historiquement conçue à propos des cours d'eau et par rapport à un niveau de mer réputé stable (Fig. 25). Une adaptation de ce concept est donc nécessaire, dès lors que sont à prendre en considération les variations globales du niveau de la mer, en relation avec le climat, par l'intermédiaire du glacio-eustatisme. De fait, d'après l'article qui lui est consacré dans le Dictionnaire LAROUSSE en dix volumes (1960-1964), la notion de "niveau de base" est due à un hydraulicien français (Benjamin DAUSSE, ingénieur des Ponts et Chaussées à Grenoble). Elle date de 1872. Elle s'est donc appliquée, en raison de cette origine, à l'action des cours d'eau. Dans cette perspective, le "niveau de base" est constitué par "le niveau général des mers" à une date où les satellites n'avaient pas encore démontré ses variations dans l'espace. Mais, à cette époque, et pendant longtemps encore, la notion de niveau de base s'est appliquée à un niveau de la mer stable, à partir duquel s'effectue un creusement, par le jeu d'une "érosion régressive" (du latin "regressio", recul), qui procède à "l'entaille d'un lit fluviatile progressant vers l'amont". Or la prise en compte des variations du niveau de la mer au cours du Quaternaire amène à modifier singulièrement ce schéma, puisque le niveau de la mer n'est pas stable. Aujourd'hui, il est ainsi communément admis que le creusement des vallées par les cours d'eau, ou de chenaux, de taille plus petite, par leurs tributaires ou par le ruissellement superficiel, s'opère, à proximité des littoraux pendant toute la durée d'un abaissement du niveau de la mer. Quand le niveau de la mer s'abaisse, il arrive à atteindre, sur son site le plus bas, un point final, qui constitue le niveau de base terminal de cette érosion. Ce niveau de base final est un bas niveau marin (une ancienne ligne de rivage de bas niveau). Dans ces conditions, le niveau de la mer, en fin de régression, fait donc fonction de niveau de base terminal de cette érosion. Il ne constitue donc pas le point de départ de cette érosion, comme dans l'esprit de B. DAUSSE, mais il en est le point final. Il représente, en revanche, le point de départ (le niveau de base initial) de la sédimen-tation marine, qui se produit pendant la transgression suivante et qui fossilise ainsi, après coup, les anciens versants de vallée et les anciens chenaux précédemment créés pendant la régression. C'est alors, initialement, le point le plus bas du dépôt. Avant que le recoupement des versants ou le recul d'une falaise ultérieure ne le reporte plus en amont, au point A, le plus bas de l'"épaisseur caractéristique" des sédiments transgressifs qui subsistent de ce dépôt. Il n'en est pas de même pour l'abrasion marine, car elle se déclenche, au contraire, à la fin d'une régression, alors que débute la transgression suivante. De fait, le découpage d'une plate-forme d'abrasion marine ne se produit pas à la date ou à l'approche d'un haut niveau marin ("awave-cut platform is carved into crystalline and sedimentary rocks…by a rising sea approaching a global highstand" – G. VALENSISE et D. PANTOSTI, 1992, figure 8), mais dès le début de la transgression. Ici, le point de départ de l'érosion marine est un bas niveau marin (une ancienne ligne de rivage), qui est à considérer, pour le coup, comme étant le niveau de base initial, en fonction duquel s'effectue le creusement d'un "espace d'accueil", où

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A - La notion historique de "niveau de base" (B. DAUSSE, 1872), dans le cadre d'un niveau de la mer stable.

A. Le niveau de base est celui de "l'érosion régressive", opérée par un cours d'eau, à partir d'un niveau de la mer jugé stable. B - La notion de "niveau de base" dans le cadre de variations du niveau de la mer.

B. Le niveau de la mer est constamment instable. Il s'abaisse et se relève, périodiquement, le long de l'escarpement d'une faille ou d'un faisceau de failles, séparant le bassin du continent. Sur d'autres transects, l'opposition entre un continent et un bassin est en rapport avec la tectonique des plaques, la plaque océanique, où se situe le bassin, passant par subduction sous la plaque continentale (voir Fig. 1). À proximité du littoral, le creusement opéré par les cours d'eau s'effectue pendant toute la durée d'une régression, avec un bas niveau marin pour niveau de base final. Le processus d'abrasion marine se déclenche, avec pour niveau de base initial, la même ancienne ligne de rivage de bas niveau, dès le début de la transgression suivante. Mais il ne peut s'exercer que pendant la phase initiale de la transgression (T1), qui comporte le façonnement de la plate-forme d'abrasion, sa fossilisation et le recul progressif d'une falaise vive de T1.1 à T1.3, jusqu'au point de jonction (A/B), qui se situe entre la plate-forme d'abrasion marine, déjà recouverte des premiers sédiments transgressifs, et la falaise dont la fossilisation reste à venir. La cause de cette dichotomie est à rechercher dans une variation de la vitesse d'élévation du niveau de la mer pendant la transgression, et dans les conséquences qu'elle implique sur la morphogenèse en fonction de la profondeur d'eau, dont dépend la position de la limite inférieure de l'agitation des vagues.

Figure 25 - De la notion de niveau de base, appliquée à des cours d'eau et à un niveau de la mer stable, à celle de niveau de base d'une érosion exercée par des eaux courantes ou

par la mer, en rapport avec un niveau de la mer instable.

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s'opère l'implantation ultérieure de sédiments marins. Cette excavation consiste alors dans le façonnement d'une plate-forme d'abrasion marine, "progressant vers l'amont", et dans le recul de la falaise qui l'accompagne. La sédimentation transgressive a le même point de départ que l'abrasion. Mais les rapports entre érosion et fossilisation sont plus complexes que dans le cas des anciennes vallées fossiles, où ces deux processus se produisent aussi, le premier au cours d'une régression, et le second pendant une transgression ultérieure. Dans le cas de l'abrasion marine, érosion et sédimentation s'effectuent pendant la même transgression, mais pas forcé-ment toujours pendant la même phase de celle-ci. III - LA SIGNIFICATION EUSTATIQUE DES ANCIENNES FORMES DE TERRAIN FOSSILES D'ORIGINE MARINE : CHANGEMENT DE LA VITESSE D'ÉLÉVATION DU NIVEAU MARIN AU COURS D'UNE TRANSGRESSION Dans le cas d'anciennes formes de terrain fossiles, résultant de l'abrasion marine, érosion et fossilisation se produisent pendant une même transgression. Toutefois les variations de la vitesse d'élévation du niveau de la mer, au cours du déroulement de cette transgression, ne manquent pas d'agir sur la profondeur d'eau, dont dépendent l'exercice du processus d'abrasion, la granulométrie des sédiments et les possibilités de remaniement, sous l'effet de l'agitation des vagues, des apports continentaux en provenance des cours d'eau ou de la dégra-dation des pentes. 1 ) La vitesse d'élévation du niveau de la mer de nos jours et dans le passé a. Une vitesse d'élévation du niveau de la mer relativement lente, de nos jours De nos jours, le réchauffement climatique entraîne une élévation du niveau de la mer, dont la vitesse est encore relativement lente. Entre 2003 et 2008 (Fig. 26-A), cette élévation se serait opérée à une vitesse moyenne est de 2,5 m/ka, (A. CAZENAVE et al., 2008, figure 1 et tableau 1), dont 82 % en provenance de la fonte des glaciers de montagne et de celle des calottes glaciaires du Groenland et de l'Antarctique. Y contribuent largement des décharges d'icebergs, issus des langues glaciaires, dont la vitesse serait accélérée par la circulation d'eau de fonte à leur base et par la désintégration de plates-formes de glace, telles que celles de Ross, de Ronne-Filchner ou d'Amery, qui leur servaient de butoir. La part de la dilatation thermique ne représente alors que 12 à 15 % de ce total. Plus récemment, des valeurs plus élevées (Fig. 26-B et Fig. 26-C) ont été avancées (L. FENOGLIO-MARC et E. TEL, 2010 : 2,9±0,5 m/ka, entre 1993 et 2008 ; A. CAZENAVE et E. BERTHIER, 2011 : 3,4±0,4 m/ka, entre 1993 et 2010). À cette vitesse lente, la profondeur d'eau reste faible et les processus de morphogenèse et de sédimentation diffèrent de ceux qui sont intervenus dans le passé à chaque fois que la vitesse d'élévation du niveau de la mer était plus rapide qu'aujourd'hui.

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A - Vitesse d'élévation récente du niveau de la mer, entre 1993 et 2008, selon les données des satellites altimétriques Topex/Poseidon (entre 1994 et 2003), Topex/Poseidon plus Jason 1 (entre 2002 et 2005), Jason 1 (depuis 2005), d'après A. CAZENAVE et al., 2008, figure 1.

GRACE : Gravity Recovery and Climate Experiment (à partir de deux satellites). Argo : selon les balises Argos (A. CAZENAVE et al., 2008, tableau 1).

B - Vitesse d'élévation récente du niveau de la mer, entre 1993 et 2008, selon les données provenant de stations de jaugeage et des satellites altimétriques Topex/Poseidon, Jason 1 et Envisat (L. FENOGLIO-MARC et E. TEL, 2010, figure 4).

C - Élévation récente du niveau de la mer, entre 1993 et 2010 (A. CAZENAVE et E. BERTHIER, 2011, figure 2), d'après les données des satellites altimétriques Topex/Poseidon, Jason-1 et Jason-2). Selon ces données, l'augmentation du niveau moyen global de la mer entre ces deux dates est d'environ 3,4±0,4 m/ka.

A, B et C. La vitesse moyenne d'élévation du niveau de la mer est calculée depuis 1993 à l'aide de satellites altimétriques. La courbe la plus récente (A. CAZENAVE et E. BERTHIER, 2011) affiche une valeur de 3,4±0,4 m/ka pour l'intervalle de temps compris entre 1993 et 2010.

Figure 26 - Élévation du niveau de la mer de nos jours et dans le passé.

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D - Vitesse d'élévation du niveau de la mer (m/ka E - Élévation du niveau de la mer pendant la (m/ka) entre 22 et 10 ka (d'après T. HANEBUTH et al. dernière déglaciation (d'après E. BARD et al., 2010, (2000, figure 1). in A. CAZENAVE et E. BERTHIER (2011, p. 78).

D. Une vitesse moyenne d'élévation du niveau de la mer de 53 m/ka a été atteinte entre 14,6 et 14,3 ka au cours de la dernière déglaciation. À cette vitesse de transgression, la profondeur d'eau, et les processus de morphogenèse qui en dépendent, ne sont pas les mêmes qu'à vitesse lente et sous faible profondeur d'eau, comme il en est de nos jours et pendant la phase initiale d'une transgression, où peut se produire le façonnement d'une plate-forme d'abrasion marine et le recul d'une falaise correspondante. E. La courbe eustatique, fondée sur les datations de coraux, présente des accélérations de la vitesse de fonte des glaces, qui se traduisent par des augmentations et des ralentissements de la vitesse d'élévation du niveau de la mer. Toutefois la recharge des calottes glaciaires au Dryas récent, qui s'est traduite par des avancées de moraines glaciaires, n'a apparemment pas donné lieu à un prélèvement significatif d'eau de mer et à une régression intermédiaire. Au delà de 7 ka, la vitesse d'élévation du niveau de la mer est uniformément lente. F - Variations de vitesse d'élévation du niveau de la mer au cours d'une transgression pendant le sous-stade 5.5 (d'après E.J. ROHLING et al., 2008, figure 2c). Profondeur de forage (cm)

F. Au début du dernier interglaciaire, la transgression culminante, qui fait suite à la première de celles, dont la position a dépassé celle du niveau de la mer actuelle, se décompose, sur la courbe eustatique déduite de la courbe isotopique marine à haute résolution KL11, en trois phases, de vitesse inégale. Durant la phase initiale (T1), la vitesse moyenne n'a pas excédé une valeur de 8 m/ka. Elle est alors très inférieure à celle de 20 m/ka, qui caractérise, au contraire, sa phase intermédiaire (T2), de même durée. La phase finale (T3), plus courte, se traduit par un retour à une vitesse lente, de 6 m/ka, en moyenne. Ces modifications de la vitesse, qui commandent les variations de la profondeur d'eau, ne sont pas sans conséquences sur les possibilités d'intervention du processus d'abrasion, qui engendre une plate-forme d'abrasion, et qui provoque le recul, concomitant, d'une falaise, ni sur la granulométrie, le façonnement, le classement et la stratification des matériaux qui les recouvrent, l'une après l'autre. La vitesse lente enregistrée de nos jours est analogue à celle de la phase initiale ou terminale d'une transgression. L'application du principe de l'actualisme ne permet pas d'inférer ce qui s'est produit dans le passé pendant sa phase intermédiaire, à vitesse rapide

Figure 26 - Suite.

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b. Des vitesses d'élévation du niveau de la mer beaucoup plus rapides qu'aujourd'hui, entre la phase initiale et la phase finale de chaque transgression, dans le passé 1/ Dans le passé, la vitesse d'élévation du niveau de la mer a périodiquement dépassé cette valeur (Fig. 26-D et Fig. 26-E). C'est ainsi que, lors d'une pulsation massive d'eaux de fonte des glaces (MWP-1A, Meltwater pulse – 1A), qui s'est produite au cours de la dernière déglaciation (Termination I), des valeurs allant jusqu'à 45 m/ka (P. BLANCHON et J. SHAW, 1995), 40 à 50 m/ka (E. BARD et al., 1996), voire 53 m/ka, plus précisément entre 14,6 et 14,3 ka (T. HANEBUTH et al., 2000, figures 1 et 2), contre 40 m/ka entre 14,31 et 14,65 ka (P. DESCHAMPS et al., 2012). 2/ En outre, la courbe eustatique récente à haute résolution, déduite de la courbe isotopique marine KL11, a donné lieu à une évaluation des variations de la vitesse de trans-gression (Fig. 26-F) au cours d'une petite partie du sous-stade 5.5 (E.J. ROHLING et al., 2008, figure 2c) et du stade 3 (S.J.A. JUNG et D. KROON, 2011, figure 2). Ainsi, sur cette courbe, la durée de la transgression culminante du sous-stade 5.5 (peak MISS 5.5 sea level), bien que n'excédant pas 1,1 ka, se divise en trois phases de vitesse inégale (Fig. 26-F), dont les deux extrêmes présentent une valeur moyenne de 6 à 8 m/ka, tandis que la phase intermédiaire, d'une durée de 450 ans environ, se distingue par une vitesse moyenne de 20 m/ka, bien supérieure à celle des deux phases extrêmes. De la même courbe, sont déduits des maxima de vitesse pouvant atteindre 30 m/ka pendant le stade 3, en milieu de transgression, lors des maxima de décharges d'icebergs. Avec une vitesse aussi rapide, dont résulte une augmentation de la profondeur d'eau, les processus de morphogenèse et de sédimentation ne sont pas les mêmes que de nos jours et qu'en début de transgression, à vitesse lente et sous une faible profondeur d'eau. 2 ) De la phase initiale d'une transgression à sa phase intermédiaire : l'enregistrement géomorphologique d'un changement de vitesse de l'élévation du niveau de la mer au cours de l'histoire d'une transgression et la preuve de son occurrence 1/ Dans le cas des anciennes formes de terrain fossiles résultant de l'abrasion marine, la preuve de chaque variation du niveau de la mer successive repose sur la détection du bord interne d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, à son point de jonction avecl'ancienne falaise fossile, qui lui est associée dans la même surface de transgression ainsi engendrée (Fig. 27 et Fig. 28-B).

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A - Zonation d'une plage actuelle : niveau de la mer et niveau inférieur atteint par l'agitation des vagues ; ligne des brisants, ligne de rivage et limite supérieure du jet de rive.

A. De nos jours, sur une côte basse d'accumulation sableuse, des sédiments se déposent en bas de plage dans la zone de déferlement, comprise entre la ligne des brisants et la ligne de rivage, ainsi que dans la zone du jet de rive, jusqu'à la limite supérieure de ce dernier. Ils sont d'abord soumis à l'agitation des vagues, qui sont en mesure de prendre en charge, outre des sables, des matériaux de granulométrie grossière de la taille des blocs, des galets et des graviers, de les trier, de leur conférer un façonnement et une stratification, caractéristiques de ces milieu de sédimentation. Cet effet s'exerce entre le niveau le plus bas qui peut être atteint par l'agitation des vagues (still water level) et le niveau de la mer, jusqu'à la ligne de rivage. Il exige une faible profondeur d'eau, en rapport avec la vitesse actuellement lente de l'élévation du niveau de la mer. Ceux qui se déposent en offshore, en dehors de cette partie du littoral, échappent à ces actions. Entre le point de brisants et la limite supérieure du jet de rive, la topographie de plage, affectée par cette traversée de l'eau de mer (run-up), subit un lissage sous l'effet mécanique de l'agitation des vagues, puis du mouvement de "va-et-vient" propre au jet de rive. Il en résulte la création d'une surface plane, de profil légèrement oblique par rapport au niveau de la mer, conformément au sens étymologique du terme "plage" (du grec plagios, oblique). Le haut de plage se distingue, au contraire, par l'édification d'un cordon, dû aux projections de sables et de galets, qui se produisent lors des vagues de tempête. S'y ajoutent des sables éoliens, qui sont à l'origine de l'édification des dunes.

Figure 27 - Plage, et côte rocheuse à falaise, sur un littoral actuel.

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B - Ligne des brisants et ligne de rivage, sur une côte actuelle d'érosion rocheuse à falaise.

Point de brisants : à la verticale de la ligne des brisants, là où la base des vagues se heurte pour la première fois au fond de la mer, donc au contact entre la zone offshore et la zone de déferlement.

B. Actuellement, sur une côte rocheuse à falaise, le processus d'abrasion marine s'exerce sous l'effet de l'agitation des vagues. Elle s'exerce jusqu'au niveau de l'eau, qui se trouve hors d'atteinte de cette agitation (still water level). Au delà de cette limite, ce processus d'érosion ne joue plus. Il intervient donc sur toute la largeur de la zone de déferlement ("surf-rock interface", A.S. TRENHAILE, 2002), depuis la ligne des brisants jusqu'à la ligne de rivage correspondante. De nos jours, l'agitation des vagues ne peut atteindre le fond rocheux qu'entre ces deux lignes, pour y effectuer son action d'abrasion. Ce mécanisme exige une faible profondeur d'eau, autorisée par la vitesse encore lente de l'élévation actuelle du niveau de la mer. L'abrasion atteint son maximum d'énergie aux dépens des matériaux sous-jacents, à la profondeur des brisants (hb), à la verticale et au-dessus du point de brisants. La profondeur des brisants (hb) est proportionnelle à la hauteur des brisants (Hb) : Hb=0,78 ou 0,83 hb. L'abrasion opère à la base des vagues jusqu'à la ligne de rivage, qui se tient au niveau de la mer, où l'érosion verticale devient nulle, de même qu'elle est inopérante au large de la ligne des brisants, en offshore, où la profondeur d'eau est trop forte, pour que l'agitation des vagues atteigne le fond rocheux.

Figure 27 - Suite. 2/ Ce point de jonction se situe communément, en profondeur, dans des roches cohé-rentes, sur un angle de point de rupture, brutal, entre ces deux anciennes formes de terrain fossiles, sous une épaisseur significative de sédiments marins ("the upper platform abuts sharply against an ancient cliff, with an inner margin or shoreline angle at an elevation of…", L. FERRANTI et al., 2008, page 13 et figure 9b). Cet angle permet aisément le choix d'un site de mesure de son altitude. Font cependant exception les roches argileuses, où le passage de l'une à l'autre de ces deux anciennes formes de terrain fossiles complémentaires est ordinai-rement de profil concave (voir Fig. 20). 3/ Le point de jonction profond (deep-seated) ainsi identifié se tient sur une ancienne ligne de rivage (shoreline) de position intermédiaire entre celle de bas niveau marin et l'ancienne ligne de rivage de haut niveau datant du maximum d'amplitude de la transgression. Elle date, pour sa part, de la fin du recul de la falaise vive et du début de sa submersion en "falaise plongeante", suivie de sa fossilisation. Celle-ci ne peut pas se concevoir, en revanche, avant que le recul de la falaise ait pris fin. La paroi de la falaise vive, en forte pente, ne saurait se recouvrir largement de sédiments tout en poursuivant son retrait. Elle ne peut intervenir qu'après un arrêt du processus d'abrasion.

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A - Du début à la fin du processus d'abrasion marine.

A. Le processus d'abrasion marine se déclenche à la suite d'un abaissement du niveau de la mer, entraînant celui du niveau de base de l'érosion marine. Le processus débute sur l'escarpement de la faille séparant le continent calabrais de la Mer Tyrrhénienne. Le processus d'abrasion se déplace vers l'intérieur des terres, au fur et à mesure de l'élévation du niveau de la mer à vitesse encore lente, pendant la phase initiale d'une transgression. La largeur d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (Fig. 30) peut ainsi dépasser largement celle de la zone de déferlement, où le processus d'abrasion s'exerce jusqu'à la limite inférieure de l'agitation des vagues, entre le point de brisants et la ligne de rivage correspondante. La profondeur maximum des brisants (hb) dépend de la hauteur des vagues à la côte (Hb). La profondeur des brisants (hb=Hb/0,78) est acquise alors que le niveau de la mer n'est pas stable, mais qu'il a déjà commencé à subir une élévation à vitesse lente.

Figure 28 - Évolution géomorphologique : du déclenchement du processus d'abrasion, suite à un abaissement du niveau de la mer, jusqu'à la fin du recul d'une falaise vive ; et

depuis sa fossilisation jusqu'à son exhumation actuelle.

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B - De la fin du processus d'abrasion marine à la fin de la mise en place des sédiments marins dans leur "espace d'accueil" (accommodation space).

B. Ce croquis vise à exprimer le rôle stratigraphique et géomorphologique des variations de la vitesse de l'élévation du niveau de la mer au cours d'une transgression. Sur cette coupe, la SIM (Surface dite d'Inondation Maximale) constitue un enregistrement stratigraphique du maximum de vitesse et de profondeur d'eau, qui se situe vers le milieu de chaque transgression. Le bord interne (A/B) d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, à son point de jonction avec une ancienne falaise fossile, appartenant à la même surface de transgression, représente, pour sa part, un enregistrement géomorphologique d'un changement de vitesse déterminant, qui est la cause de la fin du processus d'abrasion et de celle du recul de la falaise, alors que débute sa submersion, suivie de sa fossilisation (voir texte). Ce bord interne peut être assorti d'une encoche. Il indique quelle était la position de la ligne de rivage à la fin du processus d'abrasion, entre un minimum eustatique et le maximum de vitesse de la transgression. Ce rôle d'un changement de vitesse est la signature d'un mouvement oscillatoire et donc la preuve de l'origine glacio-eustatique du dépôt de terrasse, à l'encontre de l'attribution du déclenchement de l'abrasion, et de la fin de la sédimentation transgressive à un épisode de soulèvement cosismique, survenant dans le courant d'une montée des océans de vitesse lente et uniforme.

Figure 28 - Suite 1.

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Figure 28 - Suite 2.

C - Érosion aux dépens des sédiments marins détritiques meubles, avant la mise en place d'un dépôt continental succédant au retrait de la mer.

D - Poursuite de l'érosion différentielle jusqu'à nos jours : large exhumation de l'ancienne falaise et de l'ancienne plate-forme d'abrasion marine, à l'exception d'une couverture sableuse mince (de l'ordre de 20 cm).

C et D. L'interprétation des coupes actuelles se doit de tenir compte des érosions ultérieures, qui ont affecté des sédiments marins détritiques meubles, avant comme après la mise en place de dépôts continentaux sus-jacents. Y figure le rôle éventuel de l'érosion différentielle ayant mis à jour, par exhumation, des pans entiers des anciennes falaises fossiles et des surfaces étendues d'anciennes plates-formes d'abrasion marine. La reconstitution de cette évolution géomorphologique repose ici sur des données de terrain, dont des datations C14 sur mollusques ("calibrated 14 C ages " de 4,8 à 3,5 ka BP), qui ont été publiées sur le littoral de Scilla, en Calabre méridionale (L. FERRANTI et al., 2008, figures 9a, 9b et 9e). Toutefois l'interprétation proposée diffère de celle présentée par ces auteurs, pour qui le rôle des épisodes de soulèvement cosismique est démontré et qui n'envisagent pas de rôle d'une érosion différentielle.

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E - De la nécessité de mouvements oscillatoires pour mettre un terme au processus d'abrasion au cours d'une transgression.

E. Le déclenchement du processus d'abrasion, et la fin de la mise en place de sédiments transgressifs, sont attribués à des épisodes de soulèvement cosismique, au vu de courbes eustatiques (Fig. 28-E-1), qui présentent une élévation continue du niveau de la mer au cours de l'Holocène ("comparison with global and local curves of sea level rise demonstrates that the present elevation of the… coastline… arises from uplift", L. FERRANTI et al., 2008, page 16, au sujet de la péninsule de Huon, Tahiti, la Nouvelle Zélande et la Barbade, d'après LAMBECK et al., 2004, figure 5b ; voir aussi la figure 26-E du présent ouvrage). Toutefois cette courbe est en contradiction avec la courbe eustatique à haute résolution, dérivée de la courbe isotopique marine KL11 (M. SIDDALL et al., 2003), qui présente plusieurs régressions entre 10 et 0 ka (Fig. 28-E-2). Elle est également en désaccord avec des données de terrain recueillies sur le littoral atlantique de la Patagonie (G. SCHELLMANN et U. RADTKE, 2010), où deux régressions ont été identifiées, une entre 6,6 et 6,4 cal. ka BP, l'autre entre 2,3 et 2,05 cal. ka BP (Fig. 28-E-3). Le début du processus d'abrasion marine coïncide avec celui de la sédimentation transgressive au commencement d'une transgression d'origine glacio-eustatique. Mais l'arrêt du processus d'abrasion intervient bien avant le terme de cette transgression et la fin de la sédimentation transgressive.

Figure 28 - Suite 3.

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4/ Un tel point de jonction, clairement identifiable sur un affleurement de terrain, a pour cause un changement décisif de la vitesse d'élévation du niveau de la mer, qui se produit au cours de chaque transgression, entre son commencement et son maximum de vitesse. Cette augmentation de la vitesse d'élévation du niveau de la mer a pour conséquence un accroissement de la profondeur d'eau, au delà de laquelle la limite inférieure de l'agitation des vagues ("still water level", H.F. STOCKDON et al., 2006, cité en référence in J.M. CARIOLET, 2011) s'écarte du fond rocheux ou des sédiments détritiques d'un dépôt de terrasse antérieur, là où s'exerçait auparavant le processus d'abrasion. De fait, le jeu de l'abrasion exige une faible profondeur d'eau, permettant à la base des vagues de forte énergie d'atteindre (voir Fig. 40) le fond de la mer ("shallow-water, high-wave-energy environment", "shallow-water, high-energy setting", M. O'LEARY et al., 2008, pages 598 et 599) et d'y développer son action de façonnement d'une plate-forme d'abrasion marine, accompagné du recul concomitant d'une falaise vive. Aujourd'hui, dans l'espace, au delà du point de brisants, en direction du large, en offshore, le niveau de l'eau affecté par l'agitation des vagues n'est pas au contact avec le fond de la mer, parce que la profondeur d'eau est trop élevée, si bien que le processus d'abrasion ne joue pas. Il en a été de même autrefois, dans le temps, quand la vitesse d'élévation du niveau de la mer est devenue trop rapide au cours d'une transgression pour que la profondeur d'eau soit encore assez faible pour autoriser l'exercice du processus d'abrasion. L'extension de la plate-forme d'abrasion marine vers l'intérieur des terres suppose un déplacement de la zone de déferlement ("surf-rock interface", A.S. TENHAILE, 2002) vers l'intérieur des terres dans les premiers temps de l'élévation du niveau de la mer (Fig. 28-A), tant que le niveau de l'eau affecté par l'agitation des vagues ne s'est pas détaché du fond marin. La hauteur et la profondeur des brisants sont acquises progressivement pendant le début de cette élévation, depuis le point d'impact du niveau de la mer contre le continent à la date d'une ancienne ligne de rivage de bas niveau. En amont, le point de jonction peut être assorti d'une encoche (L. FERRANTI et al., 2008, figure 9b). Cette encoche n'est donc pas forcément l'indice d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau, mais elle peut être la dernière de celles qui se sont sculptées au fur et à mesure du retrait d'une falaise vive, jusqu'à ce que ce recul se soit achevé, alors que sa fossilisation reste à venir (Fig. 28-A, 28-B et 28-C). 5/ Ce changement de la vitesse d'élévation du niveau de la mer est un épisode unique au cours de l'histoire d'une transgression et de l'évolution des anciennes formes de terrain fossiles qui en dépend. Le franchissement de ce seuil de vitesse ne se produit qu'une seule fois au cours de chaque transgression, dont il apporte ainsi la preuve. Le point de jonction, entre une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile et une ancienne falaise fossile représente un enregistrement géomorphologique de cette augmentation décisive de la vitesse, alors que le maximum de vitesse ne délivre qu'une signature stratigraphique, largement utilisée en strati-graphie séquentielle, afin d'individualiser et de dénombrer les "séquences de dépôt" et donc les variations du niveau de la mer dont témoigne leur mise en place. Il est donc totalement hors de question que plusieurs anciennes plates-formes étagées, séparées les unes des autres par une ancienne falaise, aient été engendrées et fossilisées sous une épaisseur significative de sédiments au cours de la même transgression. En effet, chaque surface de transgression ainsi composée relève d'une transgression distincte de celle qui la précède et de celle qui lui fait suite. Cette transgression se déroule en deux temps, de vitesses inégales, consacrés chacun à une tâche distincte. Le premier porte sur la création d'une plate-forme d'abrasion marine, sa fossilisation et le recul d'une falaise vive. La fossilisation de cette dernière intervient pendant le second temps, alors que son recul a pris fin.

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Les variations de la vitesse des oscillations eustatiques sont une réalité largement admises de nos jours. Toutefois leurs conséquences ont été envisagées le plus souvent sous leur aspect granulométrique, au passage de la phase initiale à la phase intermédiaire d'une transgression, sans considération de leurs effets géomorphogénique sur le processus d'abrasion et géomor-phologique sur l'évolution des falaises qui en dépend. De fait, il est difficile de concevoir ces conséquences géomorphologiques ou sédimentologiques en se fondant sur le principe de l'actualisme, appliqué aux littoraux d'aujourd'hui, puisque la vitesse d'élévation du niveau de la mer n'a jamais atteint, de nos jours, des valeurs aussi élevées que celles qui ont régné au cours de la phase intermédiaire d'une transgression dans le passé. 6/ En fait, l'agitation des vagues au-dessus du niveau inférieur de cette agitation permet, tant qu'elle est possible, à vitesse lente et sous faible profondeur d'eau, en phase initiale de transgression, non seulement de prendre en charge des matériaux de granulométrie grossière, mais aussi d'en assurer le tri et de leur conférer un émoussé caractéristique (voir Fig. 16 et 17) d'un milieu marin dominé par l'action des vagues ("deposition in a wave-dominated environ-ment; wave-induced shape-sorting processes, wave action allowing shape sorting processes and lateral sediment transport, A. BREDA et al., 2007, page 25), tout en leur assurant un litage subhorizontal. Cette action se porte aussi bien sur les matériaux délivrés par l'abrasion, que sur les apports continentaux, en provenance de la dégradation des versants de vallée ou des falaises vives, car ils contribuent largement à l'alimentation de la sédimentation marine, tout en acquérant à cette date une empreinte marine caractéristique indifférenciée. Aujour-d'hui, personne ne met en doute que la mise en place d'un "conglomérat de base" se produit pendant le début d'une élévation du niveau de la mer, dans les mêmes conditions de profondeur d'eau faible que le processus d'abrasion ("unconformity T1 is interpreted as a transgressive surface, on top of it, during sea level rise, a thin basal transgressive lag deposit developped", S. ANDREUCCI et al., 2009, page 110). La fossilisation de la plate-forme d'abrasion marine s'opère en aval, alors que son façonnement se poursuit en amont. En revanche, l'absence d'agitation des vagues, de tout temps en offshore seulement, ou plus généralement pendant la phase intermédiaire d'une transgression, à cause de l'augmen-tation de la vitesse d'élévation du niveau de la mer et de la profondeur d'eau qui en résulte, ne permet généralement pas la prise en charge de matériaux de granulométrie grossière. Leur succèdent, communément, des matériaux de la taille des sables ou des silts, prélevés sur les plages et véhiculés par des courants marins, de compétence faible. Font exception les débouchés des cours d'eau, qui possèdent l'énergie nécessaire pour évacuer des matériaux conglomératiques jusque dans la mer ("fluvial-dominated system", A. BREDA et al., 2007, page 25), où ils alternent avec des lentilles ("conglomerates and sandstones are arranged into lenticular units", ibidem, 2007) de limons (silts), les uns provenant originellement d'un charriage sur le fond, les autres d'un transport en suspension. Toutefois, sans l'agitation des vagues, au-dessous de son niveau inférieur, les matériaux provenant des cours d'eau et ceux délivrés par les anciens versants de vallée ou par les falaises en cours de fossilisation restent peu émoussés ("poorly sorted, with sub-angular to sub-rounded pebbles and cobbles", ibidem, 2007), voire franchement anguleux (voir Fig. 22-A), sauf si le sédiment d'origine est constitué de galets (voir Fig. 22-B). S'y ajoute l'hétérométrie des bancs conglomératiques ("conglomerates form chaotic meter beds", ibidem, 2007). Ceux des apports continentaux, qui sont issus de la dégradation des pentes, peuvent même échapper, hors d'atteinte de l'agitation des vagues, à leur étalement en lits subhorizontaux et présenter une clinostratification (voir Fig. 22-B), analogue à celle d'éboulis de gravité mis en place à l'air libre. Ainsi ces apports continentaux, parvenus jusque dans la mer, mais ayant échappé à tout remaniement, c'est-à-dire à un remodelage sous l'action des vagues, conservent-ils des caractères hérités de leur

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origine continentale première, jusqu'à leur passage latéral, sous le niveau de la mer et vers le large, à des sédiments sableux ou silteux, parfois fossilifères (voir Fig. 21-B), dont la mise en place sous le niveau de la mer ne fait alors pas de doute. En outre, l'absence de remaniement sous l'action des vagues peut aussi provenir d'un excès de charge solide par rapport à la quantité d'eau disponible, en phase initiale comme en phase finale de transgression. De fait, dans les régions montagneuses, la fourniture de maté-riaux par les versants ne cesse pas complètement au cours d'une transgression, même si "dans les régions tempérées, y compris méditerranéennes", les "périodes froides", influant sur le couvert végétal, sont plus favorables à "l'érosion des versants" et à "l'apport de sédiments" qui en résultent (D. BRIDGLAND et al., 2009). 7/ Il a été parfois évoqué, pour expliquer l'excavation d'un "espace d'accueil", composé d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine et d'une ancienne falaise lui étant associée, l'effet d'épisodes périodiques de soulèvements cosismiques, intervenant sur une masse continentale instable, soit pendant une régression comprise entre deux transgressions glacio-eustatiques (d'une fréquence de 6 à 7 ka, au stade 3, J. CHAPPELL et al., 1996-b, soit pendant une transgression glacio-eustatique continue (à l'Holocène, pendant toute la durée de la dernière déglaciation, L. FERRANTI et al., 2008). Cette explication ne tient pas lorsqu'elle est confrontée au point de jonction entre une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile et l'ancienne falaise fossile qui lui est associée. En effet, la succession amorcée par une abrasion, entraînant le recul d'une falaise vive, puis sa fossilisation sous des sédiments marins d'une épaisseur significative, implique non seulement l'occurrence d'une transgression, mais aussi qu'elle comporte un changement de vitesse, au lieu et place d'une montée du niveau de la mer à vitesse constante (Fig. 28-E), et donc une oscillation, définie comme "le mouvement d'un corps qui repasse par la même position avec la même vitesse", celle qui provoque précisément, à chaque passage, la fin de l'abrasion. 3 ) La phase terminale et le maximum eustatique d'une transgression : une efficacité érosive à débattre. a. La phase finale d'une transgression Lors de la phase finale d'une transgression, la réduction de la profondeur d'eau est favorable, comme dans la phase initiale de cette transgression, à la prise en charge et à la mise en place de sédiments de granulométrie grossière, à galets et à blocs, souvent cimentés en milieu carbonaté, à cause d'émersions momentanées au cours de leur dépôt. Il en est de même pendant le début de la régression, qui se déroule, elle aussi, à vitesse lente et sous faible profondeur d'eau. S'y ajoutent des dépôts lagunaires, qui peuvent éventuellement comporter des faunes d'eau douce, introduites par les cours d'eau qui s'y déversent. En phase terminale de transgression, la question peut se poser d'un retour en force du processus d'abrasion, en raison de la faible profondeur d'eau, résultant du ralentissement de la vitesse. Ce pourrait être une origine possible d'une partie des anciennes plates-formes d'abrasion marine. De fait, la cartographie des terrasses d'abrasion et celle des terrasses construites qui leur sont juxtaposés (F. FILOCAMO et al., 2008, figure 11) peut suggérer que la plate-forme d'abrasion des unes et la plate-forme d'accumulation des autres se profilent, dans le prolongement l'une de l'autre (Fig. 29), sur une même unité topographique, de même âge dans la chronologie isotopique marine. Toutefois les anciennes plates-formes d'abrasion

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marine fini-transgressives diffèrent de celles qui ont été engendrées, pour la même raison, en phase initiale de transgression, parce qu'elles ne comportent qu'un dépôt de couverture trans-gressive grossière peu épais, au lieu d'une colonne complète de sédiments transgressifs, mis en place depuis la phase initiale jusqu'à la phase finale de la transgression. De plus, il est permis de se demander si le processus d'abrasion est en mesure de fonctionner une seconde fois au cours de la même transgression, sachant que son déclenchement aux dépens d'un substrat rocheux exige un abaissement du niveau de la mer, qui ne peut être le fait que d'une régression glacio-eustatique ou d'un épisode de soulèvement cosismique. Enfin, une intervention de l'érosion différentielle aux dépens de sédiments détritiques meubles d'un dépôt de terrasse construite n'est pas à exclure. Elle peut conduire à l'exhumation d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, sur la limite stratigraphique inférieure de ce dépôt (Fig. 28-C et 28-D). D'où un risque de confusion entre terrasse d'abrasion et ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, exhumée, de même qu'entre une ancienne falaise subaérienne et une ancienne falaise fossile, exhumée elle aussi. b. Le début de la régression suivante Quand la mer se retire, dès le début de la régression suivante, un espace se dégage entre la paroi de la falaise, dans sa partie restée hors de l'eau, et les limites successives des sédiments régressifs, se déposant en toplap. Cet espace peut être désormais parcouru et lissé par le jet de rive (swash). C'est alors que la traversée de l'eau (run-up) vers la limite supé-rieure d'un bas de plage est la plus large. Cet espace, compris entre le niveau de la mer et une ancienne falaise subaérienne, peut également accueillir, sur un haut de plage (backshore), les projections de sables ou de galets d'un cordon littoral, et les apports éoliens constituant les dunes (Fig. 27-A). c. Le maximum eustatique n'est pas responsable du processus d'abrasion Au point de renversement de la courbe eustatique, entre une transgression et la régres-sion, qui lui fait suite, le maximum eustatique d'une transgression est à coup sûr digne d'attention. Toutefois la détermination de son rôle géomorphologique a subi, plus ou moins consciemment, l'influence de sa comparaison avec l'état et la dynamique des littoraux actuels, ainsi que de la priorité accordée au dépistage des anciennes lignes de rivage de haut niveau, en vue de dénombrer les variations du niveau de la mer, en les raccordant à des pics eusta-tiques, au détriment de la prise en compte de tout le déroulement, tout aussi déterminant, de chaque transgression. De nombreux auteurs ont attribué le façonnement d'une plate-forme d'abrasion marine, et le recul concomitant d'une falaise, avec un maximum eustatique ("A wave-cut platform is carved into crystalline and sedimentary rocks forming the Aspromonte by a rising sea approaching a global highstand", G. VALENSISE et D. PANTOSTI, 1992 ; "… a sustained highstand level is needed to erode the ›100 m width of the terrace lanward of subunit rh4... our best estimate of the duration of the last interglacial highstand is 127 to 120 ka", R.C. SPEED et I. CHENG, 2004; “ In an uplifting region, an abrasional terrace or wave-cut platform will form during an interglacial highstand", L. CUCCI, 2004 ; "A WCP [wave-cut platform] is formed by wave and spindrift erosion during a sea level highstand", M. SAILLARD et al., 2009).

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Terrasses d'abrasion marine et terrasses marines construites, dans le Vallone Carpini, au nord de Scalea, sur le littoral tyrrhénien de la Calabre du Nord, Vallone Carpini, au nord de Scalea. A - Carte géomorphologique (d'après F. FILOCAMO et al. (2008, figure 10).

A. Une large plate-forme d'accumulation marine (TC = terrasse construite), dont le bord interne est indiqué à l'altitude de 90-80 m, se trouve en continuité topographique apparente avec une plate-forme d'abrasion marine (terrasse d'abrasion = TA), plus étroite, qui est inscrite dans des roches carbonatées de l'unité de Verbicaro, au sud-est de ce vallon. B - Coupe géologique (d'après F. FILOCAMO et al., 2008, figure 15).

1 : substratum rocheux (roches carbonatées). 2 : dépôt conglomératique et sableux. 3 : ancienne plate-forme subaérienne d'accumulation marine (terrasse marine construite, TC) et ancienne plate-forme subaérienne d'abrasion marine (TA). T90-80 : altitude du bord interne de la terrasse marine.

B. La plate-forme d'accumulation marine (TC), dont le bord interne se tient entre 80 et 90 m d'altitude, se trouve au sommet d'un dépôt, qui repose apparemment sur une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), où il débute par un conglomérat, auquel succède un sable, beaucoup plus épais, qui s'appuie, selon toute vraisemblance contre la paroi d'une ancienne falaise fossile (2b). Le point de jonction A/B entre ces deux anciennes forme de terrain, fossiles et complémentaires (2a+2b = surface de transgression,) est la signature de la fin du processus d'abrasion, qui leur a donné naissance. La reprise d'érosion, exprimée par l'inscription dans les roches carbonatées d'une autre plate-forme d'abrasion marine (TA) à une altitude proche, ne peut être intervenue au cours de la même transgression, parce qu'elle nécessite un abaissement du niveau de base, qui ne peut être dû qu'à une régression antérieure. La coïncidence des altitudes porte, en réalité, sur deux anciennes plates-formes d'abrasion marine successives, dont la plus récente est fossile, tandis que la plus ancienne est exhumée de sa couverture détritique meuble.

Figure 29. Une terrasse d'abrasion "fini-transgressive", en continuité topographique avec une terrasse construite ? Ou une ancienne plate-forme d'abrasion marine

d'abord fossile, puis exhumée ? En fait, les facteurs qui président au déclenchement, au déroulement et à l'achèvement du processus géomorphogénique d'abrasion marine ne sont pas réunis lors d'un stationnement prolongé du niveau de la mer en position de haut niveau. Mais ils se présentent successi-vement, en revanche, au cours de la phase initiale de chaque transgression. Un premier facteur nécessaire est celui qui provoque son déclenchement. Ce facteur de déclenchement consiste en un abaissement du niveau de la mer. Plusieurs auteurs (J. CHAPPELL et al., 1996-b, pour le Pléistocène ; L. FERRANTI et al., 2008, pour l'Holocène)

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ont suggéré pour cause de cet abaissement relatif du niveau de la mer, un épisode de soulèvement cosismique. Mais une origine glacio-eustatique peut également être invoquée, puisque la fin de chaque régression détermine une ancienne ligne de rivage de bas niveau, qui constitue le niveau de base de cette érosion. Un autre facteur est nécessaire à l'exercice du processus d'abrasion. Il s'agit de l'agitation des vagues s'opérant sur un fond rocheux ("surf-rock interface", A.S. TRENHAILE, 2002) dans les limites de la zone de déferlement. Or cette action n'est en mesure de produire cet effet que sous une faible profondeur d'eau, conditionnée par une vitesse encore lente de l'élévation du niveau de la mer, au cours de la transgression. De nos jours, ce processus est en œuvre, alors que la vitesse moyenne de l'élévation du niveau de la mer, entre 1993 et 2010 (A. CAZENAVE et E. BERTHIER, 2011) a été de l'ordre de 3,4 m/ka. Un troisième facteur intervient pour mettre fin au processus d'abrasion. C'est lui qui provoque la fin du recul de la falaise vive, associée à l'ancienne plate-forme d'abrasion marine encore en voie d'extension. C'est alors que débute la submersion de cette falaise, suivie de sa fossilisation. Le facteur d'arrêt du processus d'abrasion est le franchissement du seuil de changement de vitesse, au delà duquel la profondeur d'eau devient telle que l'agitation des vagues cesse d'atteindre le fond de la mer, où s'exerçait précédemment l'abrasion. Dans ces conditions, il est inconcevable que d'anciennes plates-formes d'abrasion marine aient été engendrées "pendant un maximum eustatique", voire pendant que le niveau de la mer se trouvait en position de bas niveau ("Strandlines formed during lowstands are usually destroyed by subsequent sea-level fluctuations", K.R. LAJOIE, 1986, figure 6.6). En revanche, une autre explication est à envisager sérieusement. Elle est suggérée par les coupes décrites sur le littoral du Chili (M. SAILLARD et al., 2009), où il se trouve que des sables marins, d'épaisseur centimétrique reposent sur ces anciennes plates-formes d'abrasion marine, particu-lièrement à proximité de leur point de jonction avec une ancienne falaise (voir Fig. 28-D), où ils sont parfois recouverts d'un dépôt de pente à éléments anguleux ("Each platform is an erosional wave cut surface carved into igneous rocks, which are now covered with scattered siliciclastic sediments less than 20 cm thick…several centimeters of beach deposits overlain by angular to sub-angular clasts… Some sand deposits cover the abraded bedrock particularly close to the shoreline angle near the scarp of TI", M. SAILLARD et al., 2009, page 55). À ce compte, un jeu de l'érosion différentielle, perpétré jusqu'à une large exhumation, pourrait parfaitement s'appliquer aux terrasses d'abrasion (K.R. LAJOIE, 1986), là où le bord interne d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine est masqué sous un dépôt de pente, sur son point de jonction avec une ancienne falaise. Dans ce contexte, le bord interne de l'ancienne plate-forme d'abrasion marine, à son point de jonction avec l'ancienne falaise correspondante, n'est pas à corréler avec un pic eustatique, déduit des courbes isotopiques marines. De fait, ce bord interne appartient, certes, à la même transgression que le maximum eustatique, qui se situe à la fin de la mise en place des sédiments transgressifs. Mais il s'agit, pour le coup, d'un enregistrement géomorphologique de la fin du processus d'abrasion, qui s'est déclenché au début de cette transgression et qui s'achève bien avant la fin de celle-ci. Cet épisode est à situer, sur une courbe eustatique, avant son maximum de vitesse et de profon-deur d'eau, puisqu'il survient à cause de l'augmentation de la tranche d'eau résultant de l'accroissement de la vitesse de l'élévation du niveau de la mer, au delà de laquelle le niveau de l'eau en mesure d'être atteint par l'agitation des vagues se sépare du fond rocheux. La corrélation entre le bord interne de l'ancienne plate-forme d'abrasion marine, partiellement exhumée, et le dessin d'une courbe eustatique est certes plus malaisée qu'avec un pic eusta-tique, dont la présence est évidente sur cette courbe. En effet, ce site d'enregistrement de

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terrain, à mettre en corrélation avec un point à déterminer de la courbe eustatique, se trouve sur un segment lisse du tracé de cette courbe, entre le minimum eustatique et le maximum de vitesse de transgression, sans aspérité à laquelle il soit possible de se référer (voir Fig. 28-B). Dans ce contexte, le maximum eustatique ne représente que la date de la fin de la fossilisation d'une falaise, dont la partie restée hors de l'eau constitue une ancienne falaise subaérienne vouée à subir des processus de dégradation des pentes. Arrivée au maximum d'amplitude de la transgression, la mer s'est arrêtée contre la paroi d'une ancienne falaise, sans pénétrer plus avant dans l'intérieur des terres. Devant l'obstacle d'une côte d'érosion à falaise, en fin de transgression, le jet de rive n'est pas en mesure d'intervenir, à la différence d'une côte d'accumulation, quand la mer se retire au début de la régression suivante ou qu'elle s'avance, comme de nos jours, au cours d'une transgression dont la vitesse est encore lente. IV - LA MESURE DE L'"ÉPAISSEUR CARACTÉRISTIQUE" DES SÉDIMENTS TRANGRESSIFS D'UNE TERRASSE MARINE : ORIGINE GLACIO-EUSTATIQUE ET AMPLITUDE D'UNE TRANSGRESSION La mesure de l'épaisseur des sédiments d'une terrasse marine construite est ordinairement effectuée à la verticale d'un même point. Or il existe un autre mode d'expression de l'épais-seur des dépôts, dénommé "épaisseur caractéristique" ("Characteristic Thickness, CT", B. DUMAS et al., 2005). Il porte sur les sédiments transgressifs d'un dépôt de terrasse marine construite (Fig. 30-A). 1 ) Définition et procédure de mesure de l'"épaisseur caractéristique" La définition de ce paramètre repose sur le rapport du glacio-eustatisme avec l'origine géomorphologique des surfaces de transgression, ainsi qu'avec la mise en place des dépôts qui les recouvrent. L'"épaisseur caractéristique" se définit comme étant la différence d'altitude entre un point (A) et un point (B), qui se situent respectivement aux deux extrémités de la surface de transgression sur laquelle repose chaque dépôt de terrasse marine construite. Le point (A) est à rechercher aussi bas et aussi loin en direction de la mer qu'il est possible d'observer les premiers sédiments reposant sur leur surface de transgression. Le point (B) se tient, au contraire, aussi haut qu'il est donné de pouvoir repérer les derniers sédiments de ce dépôt reposant sur un versant de vallée ou sur une falaise appartenant à la même surface de transgression. L'"épaisseur caractéristique" (EC) est égale à la différence d'altitude entre ces deux points, éloignés de plusieurs dizaines de mètres l'un de l'autre (Fig. 30-A). Dans cette procédure, le point le plus bas (point A) représente, à l'origine, un indice de la position d'une ancienne ligne de rivage de bas niveau, celle qui a fait fonction de niveau de base commun à l'érosion exercée par les eaux courantes, qui s'est effectuée pendant toute la durée d'une régression, entraînant la genèse des diverses formes de terrain dues à leur action, et à l'abrasion marine, qui s'est déclenchée au début de la transgression, entraînant le façonnement d'une plate-forme d'abrasion marine et le recul d'une falaise. Il représente aussi

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A - Principes et concepts de la mesure de l' "épaisseur caractéristique" ("Characteristic Thickness, CT ", B. DUMAS et al., 2005).

1/ L' "épaisseur caractéristique" (CT) des sédiments transgressifs d'un dépôt de terrasse marine construite se définit comme étant la différence d'altitude entre le point le plus bas (point A) et le point le plus haut (point B), où il est possible d'observer ce dépôt transgressif reposant sur chacune des deux extrémités de la surface de transgression (ST) qui le supporte. Sur ce croquis, la surface de transgression est composée d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a) et d'une ancienne falaise fossile (2b), qui lui est associée. 2/ Le but initial de cette procédure de mesure de l'épaisseur d'un dépôt est d'évaluer, au moins a minima, l'amplitude d'une transgression. 3/ À son origine, avant érosion, le point (A) représentait la position d'une ancienne ligne de rivage de bas niveau (bn), en fin de régression et au début de la transgression suivante. Sur ce schéma, il s'agit du niveau de base de l'érosion marine, qui a engendré une plate-forme d'abrasion et entraîné le recul d'une falaise. Dans le même esprit, le point (B) constituait, au contraire, originellement et avant érosion, un indice, de l'emplacement d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau (hn), à la date d'un maximum transgressif. 4/ De nos jours, en raison de la couverture végétale, et des érosions qui ont affecté ces deux extrémités de la surface de transgression, l' "épaisseur caractéristique" actuellement mesurable (CT) ne délivre généralement qu'une valeur par défaut. De fait, dans sa position distale, la surface de transgression est généralement amputée d'une partie de sa largeur, en raison du recul d'une falaise postérieure (2b) sous l'effet d'une érosion marine ou d'un recoupement des versants. À son autre extrémité, en position proximale, une partie des sédiments transgressifs meubles, recouvrant une ancienne falaise ou un ancien versant, a pu être enlevée par une érosion engendrée par des eaux courantes ("erosion correction" de E. SANTORO et al, 2009), après ou parfois même avant la mise en place de dépôts de pente (voir Fig. 8 et 9). 5/ La courbe eustatique présentée ne vise donc pas à délivrer un enregistrement complet de l'amplitude de la transgression. Elle ne peut prétendre qu'à une évaluation minimale approchée par défaut, à cause des érosions et de la couverture végétale. Elle n'est pas corrigée du soulèvement. 6/ L'épaisseur "caractéristique" est spécifique à chaque dépôt de terrasse et variable d'un dépôt de terrasse (I) à un autre (II), permettant ainsi, sous réserve des érosions ultérieures, et de différences significatives d'épaisseur, de les distinguer les uns des autres et de raccorder le même dépôt de terrasse marine d'un interfluve à l'autre.

Figure 30 - L'"épaisseur caractéristique" des sédiments transgressifs d'un dépôt de terrasse marine construite de matériaux détritiques, principes et application.

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B - Application de la mesure de l' "épaisseur caractéristique" aux dépôts détritiques des terrasses du transect de Tewai, dans la péninsule de Huon, d'après J. CHAPPELL (1983, figure 2).

Figure 30 - Suite 1.

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B. Les dépôts détritiques des terrasses de Tewai témoignent d'une mise en place entre le début et la fin de plusieurs transgressions, qui sont inscrites sur la courbe eustatique KL11 à haute résolution, et qui sont affectées par des maxima de vitesse significatifs. 1/ Appliqué aux dépôts détritiques des terrasses du transect de Tewai, dans la Péninsule de Huon, le calcul de l' "épaisseur caractéristique" ("Characteristic Thickness, CT") entre le point le plus bas et le point de le plus haut de chacun de ces dépôts confirme l'origine glacio-eustatique, qui leur était conférée dès 1983 : "CHAPPELL(1983) also considered that glacioeustatic changes are represented by terrace IIIc and by subdivisions of terrace II (IIa and IIb)" (J. CHAPPELL et al., 1996-b). Cette procédure est plus convaincante que l'usage de "l'épaisseur Z" des seuls dépôts récifaux de crête et de plate-forme (J. CHAPPELL, 2002). En témoigne la différence de résultat sur le dépôt de la terrasse IIb, la valeur obtenue étant de 8 m à Tewai et de 4 m seulement sur le transect récifal de Bobongara. 2/ Il apparaît aussi que les oscillations figurant sur la courbe eustatique KL11 entre 40 et 45 ka BP, bien que leur amplitude soit inférieure à la marge d'erreur de 12 m, sont effectivement à considérer comme des réponses à des épisodes de réchauffement climatique de courte durée ("a response to these short events between 40 and 45 ka BP.", M. SIDDALL et al., 2008). Il en est de même pour ce qui est du dépôt de la terrasse IIb, qui supporte une corrélation avec une oscillation de faible amplitude, elle aussi, enregistrée sur la courbe KL11, après 38 ka BP. 3/ Confrontée à une courbe récente des changements de la vitesse des variations du niveau de la mer (S.J.A. JUNG et D. KRONN, 2011, figure 2), les dépôts des terrasses apparaissent comme ayant été mis en place au cours de plusieurs élévations du niveau de la mer, même d'amplitude faible, dont la vitesse a pu atteindre ou dépasser 20 m/ka. À cette vitesse, la profondeur d'eau ainsi acquise ne permet pas à l'agitation des vagues d'atteindre le fond de la mer, si bien que le processus d'abrasion marine n'a plus cours. Les maxima de vitesse et de profondeur d'eau sont en accord avec les maxima de décharges d'icebergs, qui sont survenus lors d'épisodes majeurs, qualifiés d' "évènements de HEINRICH", aussi bien que lors d'épisodes mineurs, de position intermédiaire. Cette relation ne manque pas d'une certaine logique de cause à effet, que ne comporte pas le "point de vue traditionnel", selon lequel les maxima d'apports détritiques glaciaires véhiculés par les icebergs se sont opérés pendant les épisodes de refroidissement des eaux océaniques, en référence à la présence d'une microfaune planctonique froide à Globototalia pachyderma sinistra ("one puzzling aspect involved in the traditional view that the Heinrich ice-surge events occured during maximum cold conditions in the N-Atlantic", S.J.A. JUNG et D. KRONN, 2011).

Figure 30 - Suite 2. le début de la mise en place du dépôt qui recouvre les surfaces de transgression ainsi engendrées. Inversement, le point supérieur (B), qui est, à l'origine, le plus élevé de ce rem-blaiement, représente un indice de la position d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau lors du maximum d'amplitude de la transgression, avant le passage à la régression suivante, sur le point de renversement de la courbe eustatique. Cette démarche appelle plusieurs mises en garde. a. La question de la prise en compte de l'effet du jet de rive (hs) et de la profondeur des brisants (hb) La question s'est posée de la prise en compte de l'effet du jet de rive (hs), en amont, au delà du point le plus haut de l'"épaisseur caractéristique", et de la profondeur des brisants (hb), en aval, au-dessous de son point le plus bas (B. DUMAS et al., 2005). En effet, un supplément d'accumulation peut être apporté au-dessus du niveau de la mer (ligne de rivage, shoreline) sous l'action du jet de rive (swash), dont la limite supérieure (swash upper limit, coastline) occupe une position plus élevée (voir Fig. 27-A). Ce processus entre en jeu sur des plages de sable ou de galets. Il n'en a généralement pas été fait mention

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sur les côtes récifales, faute de sédiments détritiques à prendre en charge. Inversement, la prise en considération de la différence d'altitude entre le niveau de la mer et le sommet des dépôts coralliens est de règle, à cause de la profondeur d'eau sous laquelle vivent les coraux. Toutefois l'effet du jet de rive ne peut s'exercer au delà de la ligne de rivage que si cette dernière ne vient pas buter abruptement contre la paroi d'une falaise, comme il en est pendant toute la durée de sa fossilisation, y compris à la date d'un maximum transgressif et d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau. C'est seulement quand la mer se retire, au début de la régression suivante, qu'un espace se dégage, au-dessus des premiers sédiments régressifs, disposés en toplap, entre une falaise subaérienne et le niveau de la mer en cours de retrait. C'est là que le jet de rive entre en jeu. Il n'y aurait donc pas lieu de déduire la hauteur d'accumulation supplémentaire (hs) à accorder au jet de rive, sinon à titre de précaution, dans le calcul final de l'"épaisseur caractéristique". Inversement, il existe aussi une différence entre le niveau de la mer et la profondeur des brisants (hb). Or, si le niveau de la mer était stable, il serait concevable qu'un supplément d'érosion puisse s'acquérir, en dessous d'une ancienne ligne de rivage de bas niveau, par un creusement exercé par les vagues sur le point de brisants, là où l'écart avec le niveau de la mer est le plus élevé et où leur énergie est la plus forte (voir Fig. 27). Mais le niveau de la mer ne marque pas vraiment de temps d'arrêt au point de renversement de la courbe eustatique entre une régression et la transgression suivante. La profondeur des brisants est acquise au cours des premiers temps de l'élévation du niveau de la mer, jusqu'à ce que cette profondeur atteigne son maximum, qui dépend de la hauteur des vagues. Ainsi, sur le littoral de Scilla (voir Fig. 28- B), par exemple, en Calabre méridionale (L. FERRANTI et al., 2008, figure 9e), une profondeur des brisants (hb) de l'ordre de un mètre a été acquise, vers 4,7 ka, sur le bord externe d'une plate-forme d'abrasion marine, à une distance d'une quinzaine de mètres de la ligne de rivage, alors que le niveau de la mer s'était déjà élevé de cette hauteur de un mètre, environ, et qu'il était parvenu au pied d'une falaise en fin de recul, avant que ne débute sa fossilisation. Là aussi, la déduction de la profondeur des brisants, s'ajoutant à celle de la hauteur du jet de rive (hs+hb = "épaisseur critique" – "Critical Thickness, CTr", B. DUMAS et al., 2005), ne vaut sans doute pas, sauf à titre de précaution, pour le cas où l'action d'érosion des vagues aurait effectivement pénétré plus bas que la position d'une ancienne ligne de rivage de bas niveau, d'où a débuté l'abrasion, alors que le niveau de la mer commençait déjà à s'élever. b. Un résultat par défaut, à cause des érosions et des possibilités d'observation En revanche, il est incontestable que les deux extrémités actuelles de la surface de transgression ne peuvent délivrer, après érosion, qu'une mesure a minima ou, autrement dit, par défaut, eu égard à son extension d'origine. De fait, le bord externe d'une surface de transgression, tel qu'il peut être observé de nos jours (point A), a été amputé de sa partie basse, en raison du recul d'une falaise postérieure ou d'un recoupement des versants. Il peut aussi comporter une couverture végétale masquant son point le plus bas. De l'autre côté, l'érosion intervenue avant le dépôt de colluvions ou après leur mise en place, ou par enlève-ment anthropique, peut entraîner, elle aussi, une prise de mesure d'un point B par défaut. c. Un résultat plus proche du but recherché pour un âge plus récent et une pente plus faible de la surface de transgression Toutefois, la pente des plates-formes d'abrasion marine étant généralement moins élevée

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à l'aval qu'à l'amont, la disparition par érosion d'une partie de son bord externe est d'autant moins préjudiciable à cette évaluation que les surfaces de transgression sont conservées au plus près du rivage actuel. Ou qu'elles sont les plus récentes et donc plus proches de leur extrémité inférieure originelle, qui se trouvait sur la pente séparant le continent de ses bassins bordiers. d. Une amplitude du soulèvement à ajouter Inversement, le soulèvement joue dans l'autre sens, puisque le taux de soulèvement vient en déduction de la vitesse d'élévation du niveau de la mer pendant toute la durée d'une transgression. Dans ces conditions, l'amplitude du soulèvement intervenu durant la trans-gression est à ajouter, si possible, à l'"épaisseur caractéristique", afin d'en arriver à l'évalua-tion de l'amplitude de cette transgression. 2 ) Le but de la mesure de l'"épaisseur caractéristique" Le but du calcul de l'"épaisseur caractéristique" des sédiments transgressifs d'un dépôt de terrasse marine est triple. a. La preuve d'une transgression d'origine glacio-eustatique Il s'agit d'abord d'établir la réalité d'une transgression. Un tel constat permet alors d'écarter l'hypothèse selon laquelle une terrasse marine pourrait être le résultat d'un épisode de soulèvement cosismique intervenant pendant une régression intermédiaire entre deux transgressions. Cette hypothèse a été invoquée, notamment, dans le cas de plusieurs des terrasses récifales dites "régressives" de la Péninsule de Huon (J. CHAPPELL et al., 1996-b), rapportées au stade 3 (voir Fig. 3). Toutefois la Péninsule de Huon comporte également, sur le transect de Tewai, des terrasses marines dont les dépôts sont constitués de matériaux détritiques. Or plusieurs de ces terrasses (IIIc2, IIIc1 et IIb) sont considérées de longue date (J. CHAPPELL et al., 1996-b, en référence à J. CHAPPELL, 1983) comme étant d'origine glacio-eustatique. "CHAPPELL (1983) also considered that glacioeustatic changes are represented by terraces IIIc, and by subdivisions of terrace II (IIa and IIb)", alors que leurs équivalents coralliens, sur les transects proches de Kanzarua ou de Bobongara, étaient rapportés, à la même date, à des épisodes de soulèvement cosismique. Or l'origine glacio-eustatique de la mise en place des dépôts détritiques des terrasses IIIc2, IIIc1 et IIb du transect de Tewai est confirmée par le calcul de l'"épaisseur caractéristique" de ces dépôts (Fig. 30-B). De plus, comparée à la courbe eustatique KL11 (M. SIDDALL et al., 2008), cet enregistrement de terrain confirme la validité de plusieurs oscillations figurant sur cette courbe, bien que leur amplitude soit inférieure à sa marge d'erreur de 12 m, notamment entre 40 et 45 ka, en réponse à des épisodes climatiques de courte durée (interstadial DO 9 et 10). Cependant cette argumentation ne vaut pas pour l'Holocène, où des épisodes de soulè-vement cosismique sont supposés intervenir pendant une élévation continue du niveau de la mer (voir Fig. 28-E). Il faut donc alors avoir recours à une autre démonstration (Fig. 28-B),

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qui repose fondamentalement sur l'enregistrement géomorphologique d'un changement de la vitesse d'élévation du niveau de la mer au cours de chaque transgression, au point de jonction entre une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile et l'ancienne falaise fossile s'y raccordant. b. Une évaluation de l'amplitude de la transgression Une autre finalité de cette démarche est d'évaluer l'amplitude de la transgression. Or cette amplitude est éminemment variable d'une transgression à une autre, ainsi que l'"épaisseur caractéristique" peut l'être d'un dépôt de terrasse marine à un autre. c. Un moyen de raccorder chaque séquence de dépôt d'un transect à un autre De fait, la mesure de l' "épaisseur caractéristique (EC)" dépend successivement, en fin de compte, de la création, de la fossilisation, puis de la dégradation des anciennes formes de terrain (voir Fig. 28), qui constituent la surface de transgression sur laquelle reposent les sédiments transgressifs d'un dépôt de terrasse construite. Sur ce principe, la reconnaissance des limites stratigraphiques profondes de chaque unité ou "séquence de dépôt", pour sa part implantée dans le continent, permet de les distinguer plus sûrement, les unes des autres, que le décompte des anciennes lignes de rivage fondé sur le seul examen des anciennes formes de terrain de surface, qui se heurte à des difficultés diverses provenant des couvertures collu-viales ou dunaires, des érosions et de l'aménagement de terrasses de culture. Un troisième usage tient donc à la spécificité de l'"épaisseur caractéristique" de chaque dépôt de terrasse marine. De fait, l'"épaisseur caractéristique" est ainsi dénommée parce qu'elle est particulière à chaque dépôt de terrasse. Dans ces conditions, la comparaison des valeurs atteintes par son "épaisseur caractéristique" permet généralement de distinguer un dépôt de terrasse marine, de celui qui le précède ou de celui qui lui fait suite. Elle autorise aussi l'établissement d'un raccord entre chaque dépôt d'un transect à un autre. Cette possibilité repose sur l'inégale amplitude des transgressions. C'est ainsi, par exemple, que celle qui s'achève lors du premier des maxima eustatiques rapportés à MISS 5.3 présente une amplitude exceptionnelle, tant sur le terrain (avec une "épaisseur caractéristique" d'une quarantaine de mètres, en Calabre méridionale, par exemple) que sur les courbes isotopiques marines. D'autres oscillations, dont la durée et l'amplitude sont plus faibles, parce que de fréquences plus grandes, ne livrent comme enregistrement de terrain, en Calabre méridionale encore, qu'une "épaisseur caractéristique" plus petite, au contraire, au cours de MISS 6.3, ou pendant la majeure partie, sauf exception, de MISS 5.5, par exemple. V - LE MODE D'AGENCEMENT DES SURFACES DE TRANGRESSION, UNE APPROCHE DE LA POSITION RELATIVE DES HAUTS ET DES BAS NIVEAUX MARINS SUCCESSIFS L'agencement des surfaces de transgression successives, les unes par rapport aux autres, n'est pas sans rapport avec la position relative des hauts niveaux et des bas niveaux marins qui se succèdent lors des variations du niveau de la mer. Plusieurs combinaisons sont possibles, en rapport avec le dessin de la courbe eustatique (Fig. 31).

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Cette simulation vise à exposer schématiquement divers modes d'agencement des surfaces de transgression (ST) entre elles, ici composées chacune d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a) et d'une ancienne falaise fossile (2b). Chaque combinaison est en rapport avec la position relative des hauts niveaux (hn) ou des bas niveaux (bn) marins, successifs entre eux (voir texte). De ce mode d'agencement peut dépendre la conservation des anciennes lignes de rivage de haut niveau, ainsi que la lisibilité des anciennes formes de terrain fossiles, parce que leur reconnaissance repose sur celle des contrastes entre les matériaux affleurant de part et d'autre. A. Amputation. L'ancienne falaise fossile de ST1 est arasée par l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile de ST2. La position du premier des deux hauts niveaux (hn1) marins successifs est plus basse que celle du suivant (hn2). Le dépôt le plus ancien (I) a été amputé de toute sa partie supérieure, et tout indice d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau (hn1 ?) a disparu, à cause du recoupement de la falaise (2b) de ST1 par la plate-forme d'abrasion marine (2a) de ST2. B. Étagement. L'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile de ST1 est recoupée par l'ancienne falaise fossile de ST2. La position du plus ancien (hn2) des deux hauts niveaux marins est plus haute que celle du niveau qui lui succède (hn3). Ce cas est fréquent, et répétitif, à la suite d'un pic culminant de fréquence orbitale. Cette combinaison a pour inconvénient qu'une partie de l'ancienne falaise fossile de ST2 peut être inscrite, sur un segment supérieur de sa paroi, en S2, dans un dépôt identique à celui qui la recouvre, au risque de compromette son identification au-dessus d'un segment S1, tranchant des matériaux de structure et/ou de texture foncièrement différentes (voir Fig. 12 et 30-B1). C. Emboîtement. Le dépôt reposant sur ST2 est entièrement inscrit dans celui que supporte ST1. Dans ce cas, la position du second des bas niveaux marins (bn5) est plus haute que celle du niveau qui précède (bn4). L'identification de ST2 et des deux unités stratigraphiques distinctes, (IV) et (V) repose sur un contraste éventuel de structure, de texture, voire d'altération, entre ces deux dépôts, ou bien sur la pente des deux anciennes formes de terrain fossiles composant, ici, la surface de transgression par rapport à celle des couches qui les recouvrent.

Figure 31 - Divers modes d'agencement de surfaces de transgression successives entre elles ; leurs rapports avec le dessin d'une courbe eustatique ; et leurs conséquences sur

lisibilité des anciennes formes de terrain fossiles et sur la préservation des anciennes lignes de rivage de haut niveau et la lisibilité des anciennes formes de terrain fossiles.

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Dans la plupart des cas, une ancienne falaise fossile recoupe une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, d'âge antérieur, dont elle détermine le bord externe. Cette ancienne falaise fossile fait partie de la même surface de transgression que l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, à laquelle elle se raccorde en bord interne sur leur point de jonction. Elle tranche, sur un point d'intersection, le bord externe d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile appartenant à une surface de transgression antérieure. Dans un tel cas, la position du second des deux hauts niveaux marins successifs est plus basse que celle de celui qui précède. Ce recoupement d’une ancienne plate-forme d’abrasion marine fossile par une ancienne falaise fossile peut se présenter sous deux modes différents. Dans le premier de ces deux modes d’agencement, le dépôt le plus ancien est complè-tement "suspendu" au-dessus du plus récent, le substrat affleurant sur une hauteur plus ou moins forte, sur un segment inférieur d'une ancienne falaise subaérienne. Il faut pour cela que la position du second des hauts niveaux soit plus basse que celle du bas niveau, qui a fait fonction de niveau de base de l'érosion lors de l'inscription de la surface de transgression la plus ancienne. Cet agencement est favorable à l'identification de la falaise, parce que le substratum des deux dépôts vient ainsi sans équivoque à l'affleurement entre la base du dépôt le plus ancien et le sommet du plus récent. Mais il peut se faire aussi que le dépôt le plus jeune soit étagé en contrebas du plus ancien, un segment inférieur (S1) de l'ancienne falaise fossile étant inscrite dans le substrat, facilement identifiable, tandis qu'un segment supérieur (S2) est entaillé dans un dépôt plus ancien, de structure, de texture et d'altération analogues à celles du second (voir Fig. 12 et. 30-B-1). Cette seconde combinaison est plus fréquente que la première. Toutefois elle ne présente pas le même avantage, parce que l'interposition d'une ancienne falaise fossile est plus difficile à mettre en évidence, en l'absence de coupe fraîche et de contraste prononcé entre deux dépôts, de nature analogue, l'un dans lequel elle s'inscrit, l'autre qui la fossilise. S'y ajoutent, le cas échéant, des arrivages de matériaux grossiers, provenant de la dégradation de la falaise en cours de fossilisation, de sorte que l'analogie est ainsi entretenue entre les deux côtés de cette paroi. Une autre explication consisterait à considérer que les deux dépôts ont été mis en place au cours de la même transgression, le plus haut étant le plus récent des deux. Mais cette évolution est incompatible avec l'histoire d'une transgression en plusieurs phases, dont chacune a des fonctions propres en matière de morphogenèse et de sédimentation, à cause du changement de vitesse d'élévation du niveau de la mer survenant au cours de son déroulement. Cet agencement est de fait le plus fréquent de tous. Il bénéficie de la succession déclinante des hauts niveaux marins, qui suit fréquemment un pic eustatique culminant. Il pâtit d'une forte fréquence des oscillations, qui laisse peu de temps à la durée des régressions. Un quatrième type d'agencement est celui où l'un des deux dépôts de terrasse est "emboîté" dans le précédent, la surface de transgression du plus récent s'inscrivant entièrement dans le plus ancien des deux dépôts. Le dépôt qui se trouve au plus bas est le plus vieux. Leur distinction dépend de l'existence de contrastes évidents de matériaux pouvant les opposer. Cette combinaison suppose que la position du bas niveau marin, ayant fait fonction de niveau de base lors l'implantation du second dépôt, soit plus haute que celle du premier. Il peut être observé, enfin, qu'une ancienne plate-forme d'abrasion marine, appartenant à une surface de transgression plus récente, recoupe l'ancienne falaise fossile faisant partie d'une surface de transgression plus ancienne, si bien que le dépôt le plus élevé se trouve être

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le plus jeune des deux. Cet agencement a pour conséquence fondamentale que disparaît ainsi tout indice d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau, attribuable au maximum eustatique, datant de la fin de la mise en place de l'ensemble de sédiments transgressifs le plus ancien. La cause en est l'amputation complète de toute la partie supérieure du dépôt le plus ancien, lors du façonnement de la plate-forme, qui tranche l'ancienne falaise qu'il fossilise. Pour cela, il faut que de deux hauts niveaux marins successifs, la position du premier soit plus basse que celle du suivant, et que cette différence ne soit pas compensée par un soulèvement d'ampli-tude supérieure. Cette combinaison est caractéristique d'une longue montée transgressive, fréquemment interrompue par des régressions brèves, comme il s'en est produit pendant l'avant dernière déglaciation (Termination II). Il n'est pas surprenant que ces épisodes eustatiques aient longtemps échappé à l'attention, à cause de la médiocre amplitude des régressions et de l'amputation subie par leur enregistrement géomorphologique. VI - UNE VARIABILITÉ EUSTATIQUE À DÉDUIRE DU DÉNOMBREMENT DES SURFACES DE TRANSGRESSION AINSI CONSTITUÉES D'ANCIENNES FORMES DE TERRAIN FOSSILES La variabilité du niveau de la mer est un fait aujourd'hui largement acquis. Au point qu'il est permis de s'interroger sur ce que la réalisation de courbes eustatiques à haute résolution, dérivées des courbes isotopiques marines, pourrait avoir à dire à ce sujet ("as benthic oxygen isotope records of high temporal resolution become avalaible, what will this approach have to say about periods of millennial sea-level variability", M. SIDDALL, 2005). La même question peut être posée, s'agissant de ce que la géomorphologie ("what have geomorphology to say about sea-level variability ?") peut avoir à nous apprendre de cette variabilité, dès lors que cette discipline s'intéresse également aux anciennes formes de terrain fossiles. Pourtant, la notion de stabilité du niveau de la mer, sur laquelle reposait celle de niveau de base de l'érosion fluviale, a longtemps pesé sur l'interprétation des formes de terrain des littoraux actuels et, même sur les anciennes formes de terrain fossiles, héritées du passé, alors même que des variations glacio-eustatiques étaient au moins épisodiquement admises. Au delà, se dessine aujourd'hui une discussion sur la fréquence à leur attribuer. 1 ) Une stabilité intermittente du niveau de la mer ? La stabilité, parfois attribuée au niveau de la mer, à la date d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau, n'est pas à accueillir sans réserve. S'agissant de notre époque, la "sacro-sainte notion de fixité du niveau de base" a été dénoncée (J.R. VANNEY, 2001), de même que "l'uniformité du niveau des mers" et "la notion de stabilité", non sans une touche d'ironie relative à la "Belle Époque du niveau marin contemporain inchangé". Pour ce qui est d'un passé plus lointain, une stabilité prolongée ("sustained highstand") du niveau de la mer en fin de transgression a été évoquée, afin d'expliquer la largeur d'une terrasse d'abrasion, allant jusqu'à lui attribuer une durée comprise entre 127 et 120 ka, au cours d'une grande partie du sous-stade 5.5 ("a sustained highstand is needed to erode the > 100 m width of the terrace landward of rh4… Thus, our best estimate of the last interglacial highstand is 127 to 120 ka", R.C. SPEED et I. CHENG, 2004). Cette conception se heurte, de nos jours, à la prise en considération de la courbe eustatique KL11, à haute résolution, qui plaide davantage en faveur

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d'une structure complexe du sous-stade 5.5 ("a compound structure", E.J. ROHLING et al., 2008), plutôt que d'un seul maximum ("a single highstand", ibidem, 2008) au cours de ce stade. Ainsi la phase initiale de transgression, d'une durée de l'ordre de 450 ans (voir Fig. 26-F), peut suffire à engendrer une plate-forme d'abrasion marine, accompagnée de sa fossili-sation et du recul d'une falaise, dont le recouvrement est ultérieur. Dans cette conception, le façonnement de la plate-forme d'abrasion marine ne dépend pas d'une stabilité de longue durée du niveau de la mer, mais de sa lente progression vers l'intérieur des terres en début de transgression. 2 ) L'ambiguïté de la notion de "cortège sédimentaire de haut niveau" en termes de variabilité eustatique. Une autre source d'ambiguïté provient de l'utilisation de l'expression "haut niveau", afin de désigner toute une période où l'élévation puis l'abaissement du niveau de la mer se sont opérés sur une partie de la transgression, puis de la régression lui faisant suite, de part et d'autre du point de renversement de la courbe eustatique, lors du maximum d'amplitude atteint par la transgression (Fig. 32). Ainsi est-il fait usage des expressions "prisme de haut niveau" ("highstand systems tract") et "dépôts de haut niveau" ("highstand deposits", C. ZAZO et al., 2007), afin de désigner un "cortège sédimentaire", ou la partie d'un dépôt de terrasse, ainsi mis en place, alors qu'un aussi long intervalle de temps est loin de coïncider avec la seule date, véritable, mais éphémère, d'un haut niveau. Le "modèle" proposé par L. CAROBENE (2003, figure 37) se heurte à la même ambiguïté terminologique, puisqu'il considère comme le stationnement ("stazionamento") d'un haut niveau marin interglaciaire ("alto eustatico interglaciale"), la période pendant laquelle se mettent en place les sédiments attribués au cortège sédimentaire, qualifié de "prisme de haut niveau" ("highstand systems tract"). 3 ) Le cas, exemplaire, de la fréquence des variations du niveau de la mer au cours du Dernier Interglaciaire Appliquée au sous-stade 5.5, la durée de ce "stationnement" d'un "pic eustatique" serait de l'ordre de 15 ka, à s'en tenir à la dernière des quatre références citées à ce sujet par L. CAROBENE (2003), soit C.W. MURRAY WALLACE et A.P. BELPERIO (1991), pour une durée totale comprise entre 135 et 120 ka (J.H. CHEN et al., 1991 ; C.H. STIRLING et al., 1995 ; N.J. SHACKLETON, 1987 ; C.W. MURRAY WALLACE et A.P. BELPERIO, 1991). Cette conception est en contradiction avec la courbe eustatique KL11, dont un court segment à haute résolution porte sur le dernier interglaciaire (E.J. ROHLING et al., 2008). Cette courbe présente quatre maxima eustatiques successifs, dont les trois premiers ont dépassé le niveau actuel de la mer, et dont le plus ancien appartient encore à la Termination II. Ces quatre maxima eustatiques sont contenus sur seulement 15 cm de profondeur d'un forage, dont la longueur est de 92 cm pour toute la période orbitale (Fig. 33-A) comprise entre le pic eustatique culminant du MISS 5.5 ( 126 ka) et celui du MISS 5.3 ( 106 ka), ce qui suggère une variabilité glacio-eustatique à l'échelle du millénaire. Cette succession de variations du niveau de la mer aurait pu provoquer la mise en place, sur le terrain, de plusieurs dépôts de terrasse, reposant sur autant de surfaces de transgression distinctes

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A - D'après L. CAROBENE (2003, figure 37).

A. Sur cette courbe (L. CAROBENE, 2003, figure 37), la transgression commence, en A, par une période (AB) d'élévation rapide du niveau de la mer. Lui succède un ralentissement (BC), dénommé "segment transgressif" ("tratto transgressivo", T), pendant lequel débute la formation d'une plate-forme d'abrasion marine et se met en place un cortège sédimentaire, qualifié de "système transgressif". En qualifiant de "stationnement" toute une période (de C à E = "alto eustatico", AE) où le niveau de la mer s'approche, puis reste proche, de son plus haut niveau, l'auteur entretient l'ambiguïté entre un "haut niveau marin" strictosensu ("interglacial eustatic peak"), à la date, éphémère, d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau, et la période qui s'étend entre deux maxima de vitesse, où des sédiments, transgressifs, puis régressifs, sont mis en place, constituant un "prisme de haut niveau". B. Mais une autre interprétation est possible. De fait, une période d'élévation du niveau de la mer, à vitesse lente, a bien lieu au cours d'une transgression. En résulte, effectivement, le façonnement d'une plate-forme d'abrasion marine, mais cet épisode se produit en phase initiale de transgression. Cette phase initiale ne correspond qu'à une partie de "l'intervalle transgressif", qui s'étend jusqu'au maximum de vitesse, matérialisé par la surface, dite "d'inondation maximale", qui se trouve au point A de la courbe de L. CAROBENE (2003). Cette courbe (A) ne tient pas compte du segment inférieur d'une courbe eustatique ascendante, se situant entre la fin de la régression et le maximum de vitesse. De plus, il n'y a pas lieu d'introduire une période de stabilité du niveau de la mer entre les deux maxima de vitesse. Les courbes récentes à haute résolution (M. SIDDALL et al., 2003 ; H.W. ARZ et al., 2007 ; E.J. ROHLING et al., 2008) ne comportent pas de "plateau" au point de renversement de la courbe eustatique entre une transgression et la régression qui lui fait suite, justifiant ainsi l'expression de "pic eustatique", conférée à ce maximum d'amplitude d'une transgression. L'idée d'un haut niveau marin prolongé, entre 135 et 120 ka, en référence à C.W. MURRAY et A.P. BELPERIO (1991), lors du dernier interglaciaire, est en désaccord avec la courbe eustatique KL11 à haute résolution, de publication récente (E.J. ROHLING et al., 2008). Celle d'un stationnement prolongé ("R.C. SPEED et I CHENG, 2004), qui serait "nécessaire" au façonnement d'une plate-forme d'abrasion marine, se heurte à l'analyse des facteurs propres au déclenchement, au déroulement et à l'arrêt du processus géomorphogénique de l'abrasion marine, en rapport avec les variations de la profondeur d'eau, qui dépend des changements de la vitesse d'élévation du niveau de la mer au cours d'une transgression. Sont à distinguer : - les deux phases d'une oscillation glacio-eustatique (T = transgression ; R = régression) ; - les deux cortèges sédimentaires (IT = intervalle transgressif ; PHN = prisme de haut niveau), appartenant

à la partie d'une "séquence de dépôt", mis en place sur un continent au cours d'une transgression et d'une partie de la régression suivante ;

- et les trois phases de la transgression (T1 = phase initiale ; T2 = phase intermédiaire ; T3 = phase finale), au cours desquelles les changements de vitesse d'élévation du niveau de la mer et ceux de la profondeur d'eau qui en résultent, influent tant sur la durée du processus d'abrasion que sur les caractères des sédiments transgressifs.

Figure 32 - Haut niveau, prisme de haut niveau et dépôts de haut niveau.

B - Autre interprétation

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Figure 33 - Variabilité eustatique et variabilité isotopique au cours du dernier

interglaciaire et au début de la dernière glaciation.

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A. Courbes eustatiques dérivées des courbes isotopiques planctoniques 18O, à haute résolution, KL09 et KL11, d'après E.J. ROHLING et al. (2008, figure 1b). B. Courbe isotopique benthique MD95-2042, 18O, d'après N.J. SHACKLETON et al. (2003, figure 2), "on a time scale based on radiometric date for uplifted corals". Les données chronologiques sont les suivantes : - "the date of 128±1 ka given by C.H. STIRLING et al. (1998) for the oldest coral at the altitude of the MIS 5e

highstand... - The termination of the MIS 5e plateau is best dated by the work of C.H. STIRLING et al. (1998) at

Mangrove Bay which documents the regression from the MIS 5e high stand. We assign their age of 116±0.9 ka for the start of the marine regression..., the upper limit of the MIS 5e plateau...

- It is difficult to assign ages precisely to MIS 5c because the record is quite complex... - But MIS 5a appears to have clearly defined maximum that we assign the age of 82.9±0.4 ka

(R.L. EDWARDS et al., 1997)".Sur cette base, l'âge attribué au premier des pics eustatiques du sous-stade 5.3, sur la courbe isotopique benthique MD95-2042, est 105,5 ka. C. NGRIP 18O, aligné sur EDC3 (ci-dessous), d'après J. JOUZEL et al. (2007, figure 2). GIS 24 : 106,6 ka. D. EPICA Dôme C, D, EDC3, d'après F. PARRENIN et al. (2007), "the new EDC3 chronology… is based on the use of 1) a snow accumulation and mechanism flow model, and 2) a set of independent age markers along the core" (abstract). Le début du sous-stade 5.3 est compris entre deux de ces "markers" : - The Mont Berlin ash layer... (Antarctica) ... 92.5±2 kyr BP ... Ar/Ar method… - U/Th dated speleothem records… 129.3 kyr BP from Dongge cave in China (D. YUAN et al., 2004), and

130.9 kyr BP from Pekiin cave in Northern Israel (M. BAR-MATTHEWS et al, 2003). We took the average of these two ages (130.1 kyr BP) and assumed a confidence interval of 2 kyr". AIM 24 : 106,6 ka. Le pic culminant du sous-stade 5.5 se situe vers 128,6 ka.

E. Sanbao cave, spéléothèmes, 18O, SB23, Chine centrale, d'après Y. WANG et al. (2008, figure 2). A24 : 107,4 ka. Cet âge est apparemment sans rapport avec celui du maximum d'insolation d'été dans l'hémisphère Nord, figurant sur la même figure 2. Le pic culminant du sous-stade 5.5 se situe vers 126,5 ka. F. Antro del Corchia, spéléothèmes, 18O, Alpes Apuanes, Italie, d'après R.N. DRYSDALE et al. (2006, figure 2 et 2009, figure 1). Les auteurs proposent que l'âge obtenu sur CC28 pour GS 24 (C23) serve de point de contrôle pour NGRIP, EPICA Dôme C et Vostok. De fait, celui ainsi obtenu pour GIS 24 (106,8 ka) est à peu près le même (106,6 ka) que celui résultant de la chronologie EDC3, reportée sur NGRIP. En revanche, cet âge est un peu inférieur à celui obtenu en Chine dans la grotte de Sanbao (107,4 ka). Inversement, pour 5.5, l'âge du pic culminant (127,4 ka) est supérieur en Italie à celui (126,5 ka) enregistré en Chine centrale. À noter, aussi, les oscillations à l'échelle du millénaire (R.N. DRYSDALE et al., 2009) entre 127 et 114 ka (AIM25), qui ne sont pas sans analogie avec celles observables sur KL09, et plus discrètement, sur MD97-2042 et sur EPICA Dôme C.

Figure 33 - Suite. Pourtant, un travail publié sur le littoral de la Barbade (R.C. SPEED et I. CHENG, 2004) s'en tient à un seul maximum eustatique attribuable au Dernier Interglaciaire, tout en distinguant plusieurs "sous-unités" stratigraphiques lui appartenant (Fig. 34). À l'inverse des conclusions exprimées par R .C. SPEED et I. CHENG (2004) à la Barbade, une autre publication (W.G. THOMPSON et S.V. GOLDSTEIN, 2005) portant sur le même littoral conclut à la succession de plusieurs pics eustatiques à l'échelle du millénaire ("suborbital frequency sea level change") au cours du même intervalle de temps, en se fondant sur l'altitude de prélèvement des échantillons datés, sans accorder toutefois toute la considération qu'il convient au "contexte stratigraphique" où les échantillons ont été prélevés (Fig. 35).

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Figure 34 - Plusieurs "sous-unités" stratigraphiques récifales attribuées au dernier

interglaciaire et délimitées par d'anciennes formes de terrain fossiles sur la côte orientale de La Barbade (d'après R.C. SPEED et I. CHENG, 2004, figures 7 et 5).

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Au-dessus des unités stratigraphiques de Lazaretto (lz), attribuée au stade 6, et de Wanstead (Wan), assignée au stade 7, reposent cinq "sous-unités", rapportées au sous-stade 5.5 : 1/ La plus récente (rh5) recouvre la majeure partie d'une ancienne falaise fossile (2b), qui se dresse en bord externe de la terrasse de Rendezvous Hill, au-dessus de celle de Ventnor. Le dépôt rh5 est constitué de sédiments marins détritiques ("stratified coarse clastic deposit"). Les datations proviennent de fragments et de galets de coraux, dont il n'est pas rigoureusement à exclure qu'ils aient été empruntés à un dépôt antérieur. 2/ Le dépôt rh4, repose sur une ancienne falaise fossile (2b), qui est inscrite dans les dépôts attribués au stade 7. Les auteurs adoptent ainsi une conception différente de celle de K.J. MESOLELLA (1968). Pour eux, en effet, la limite profonde de ce dépôt récifal se compose d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine, qui s'est développée vers l'intérieur des terres, en s'accompagnant du recul d'une falaise. 3/ Sous la terrasse de Rendezvous-Hill, le dépôt rh3 repose apparemment, lui aussi, sur une ancienne falaise (2b), qui est inscrite dans le dépôt rh4. De plus, il débute par un conglomérat ("clastic bed A"), qui contient des galets de corail, de même âge que le dépôt sous-jacent (rh2). Ces galets pourraient donc être empruntés à ce dernier, et jalonner une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), supportant le dépôt rh3, malgré l'absence de discordance angulaire manifeste entre les dépôts rh2 et rh3. Pour R.C.C. SPEED et I. CHENG (2004,) le dépôt rh3 est séparé du dépôt rh4 par un plan de faille, dont l'origine est supposée provenir d'un déséquilibre dû à une régression ("a loss of lateral support during sea level fall"). 4/ Le dépôt rh1 repose, en discordance dans un "chenal, entaillé dans le dépôt attribué au stade 6, et dans les dépôts rh2 et rh3. Le dépôt rh1 contient à l'évidence des fragments de coraux empruntés à des terrains encaissants rapportés au stade 6. Il se pourrait donc que ceux de ces fragments qui ont délivrés un âge attribuable au sous-stade 5.5, soient empruntés, eux aussi, à des dépôts plus anciens et qu'ils proviennent des dépôts rh2 ou rh3, antérieurs, dans lesquels le dépôt rh1 est inscrit. Ce "chenal" est attribuable au travail des eaux courantes (1b), ayant engendré, à la faveur d'une régression, un vallon, se dirigeant vers une ancienne vallée principale, située plus au sud, sans qu'il soit nécessaire de faire appel à un glissement de terrain ("may have been initiated by a local sliding"). 5/ L'attribution des "sous-unités" rh2 à rh5 à plusieurs unités stratigraphiques distinctes, qui se heurtait encore, il y a peu, à une incompatibilité flagrante avec la lecture des courbes isotopiques portant sur le sous-stade 5.5, n'est pas contradictoire aujourd'hui avec une variabilité eustatique à l'échelle du millénaire, telle qu'elle s'exprime manifestement sur le segment à haute résolution de la courbe KL11, relatif au dernier interglaciaire (voir Fig. 33-A). La courbe eustatique schématique (Fig. 34-B) a pour but d'évoquer ainsi la relation entre chacune de ces "sous-unités" successives et plusieurs oscillations glacio-eustatiques distinctes.

Figure 34 - Suite.

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Cette courbe eustatique donne à lire des oscillations du niveau de la mer de fréquences suborbitales ("Open-system coral ages reveal persistent suborbital sea-level cycles", W.G. THOMPSON et S.V. GOLDSTEIN, 2005). En font partie le pic culminant du dernier interglaciaire et les deux suivants jusqu'à 115 ka. Sa construction (W.G. THOMPSON et S.V. GOLDSTEIN, 2005, figure 2) repose sur l'âge et l'altitude de plusieurs échantillons datés :

- Les âges U/Th sont obtenus en "système ouvert" (W.G. THOMPSON et S.V. GOLDSTEIN, 2005). Ces datations diffèrent sensiblement des datations antérieures (âges conventionnels), portant sur les mêmes échantillons (voir Fig. 34) et, d'environ 1,2 ka en moins, de celles, en "système ouvert", publiés plus récemment (C. WAELBROECK et al., 2008). De plus, il a été signalé que, pratiquées sur plusieurs fragments d'un même échantillon, les datations U/Th peuvent délivrer des résultats notablement différents les uns des autres (D. SCHOLZ et A. MANGINI, 2007).

- Cette courbe incorpore, dans une même oscillation glacio-eustatique de fréquence suborbitale, des échantillons datés appartenant à des unités stratigraphiques distinctes, séparées les unes des autres par des surfaces de transgression, d'origine érosive (voir Fig. 34) : rh3 et rh4, sous le pic principal, culminant à 122,6 ka (UWI 93-1) ; rh3 et rh5, sous un pic ultérieur (UWI 104, 115,0 ka). "The work of W.G. THOMPSON et S.V. GOLDSTEIN (2005, 2006) takes only limited account of the stratigraphic context withib which corals were recovered " (M. SIDDALL et al., 2008). En revanche, les courbes eustatiques (voir Fig. 34-B) tenant compte des anciennes formes de terrain fossiles qui ont été engendrées par une érosion continentale ou marine et qui supportent ces différents dépôts ("sous-unités" rh1 à rh5), donnent une autre image de ces oscillations, dont la fréquence est néanmoins plus forte que celle primitivement admise.

- Sur la figure ci-dessus, la courbe eustatique intègre des fragments (triangles) ou des galets (cercles) de coraux datés, dont il est à craindre qu'ils aient été empruntés à un dépôt plus ancien, appartenant, lui-aussi, au sous-stade 5.5. L'échantillon OC 1 (111,8 ka) cumule les deux inconvénients, puisqu'il provient du dépôt de la terrasse de Ventnor, située en contrebas de celle de Rendezvous Hill, à 30 m d'altitude, et qu'il s'agit aussi d'un fragment de corail (C.D. GALLUP et al., 2002). Figure 35 - Plusieurs "cycles d'oscillations suborbitales du niveau de la mer" pendant le sous-stade 5.5, sans prise en compte des limites géomorphologiques profondes des dépôts

datés, sur la côte orientale de La Barbade (d'après W.G. THOMPSON etS.V. GOLDSTEIN, 2005, figure 2).

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En revanche, il est établi sur d'autres sites (Fig. 36), en se fondant sur les limites géomorphologiques profondes des dépôts, que le sous-stade 5.5 présente au moins deux (J.C. PLAZIAT et al., 1998 ; Y. JEDOUI et al., 2003 ; A. CHAKROUN et al., 2009), sinon trois (H. BRUGGEMAN et al., 2004 ; G. SHELLMANN et U. RADTKE, 2004) maxima eustatiques. Dans la Péninsule de Huon, il est désormais admis que la terrasse VII, attribuée au Dernier Interglaciaire, se décompose en trois "terrasses mineures" (T.M. ESAT et Y. YOKOYAMA, 2006 : "Terrace VII correspond to the last interglacial and also has an internal structure of three sub-terrace"). Les deux derniers résultats cités en référence ont été obtenus dans des régions ayant subi un soulèvement notable : entre 0,27, et 0,45 m/ka, sur les littoraux sud et ouest de la Barbade ; entre 1,6 et 3,1-3,2 m/ka dans la Péninsule de Huon, entre le transect de Kwangam et celui de Bobongara. Dans ces deux dernières régions soulevées, les dépôts des terrasses construites sont d'origine récifale. Plus récemment (W.G. THOMPSON et al., 2011), il est fait mention que les quatre oscilla-tions figurant sur le segment à haute résolution de la courbe eustatique KL11 (E.J. ROHLING et al., 2008, figure 2) sont corroborées par quatre groupes de datations U/Th sur coraux et par la mise en évidence d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, séparant deux unités stratigraphiques distinctes (Fig. 36) : "We focus a key piece of evidence: an erosional surface… this surface is interpreted as a wave-cut bench… The Bahamian geochronology and stratigraphy indicate four resolvable units, supporting the four oscillations in sea level in Red Sea core KL11" (W.G.THOMPSON et al., 2011). Il est permis de se demander, si les dépôts détritiques des terrasses construites de Calabre, où le taux de soulèvement est de l'ordre de 1,3 m/ka à 1,4 m/ka, et où les anciennes formes de terrain fossiles, qui constituent les surfaces de transgression de ces dépôts, sont plus aisément reconnaissables que dans les dépôts coralliens, n'ont pas mieux enregistré que ceux-ci les variations du niveau de la mer, même d'amplitude faible et de hautes fréquences. L'application, en Calabre méridionale, de cette procédure d'inspiration géomorpholo-gique, reposant sur l'identification des anciennes formes de terrain fossile et visant à détecter ainsi les variations du niveau de la mer, se justifie en raison d'un grand nombre de terrasses et de dépôts de terrasse successifs, grâce à un taux de soulèvement relativement élevé (de l'ordre de 1,3 m/ka à 1,4 m/ka), qui les a amenés hors de l'eau. En Calabre, le dernier interglaciaire se prête mieux à cette procédure que le stade 3, le taux de soulèvement n'étant pas assez fort pour avoir porté à émersion toutes les terrasses marines de cet âge. Un enregistrement géomorphologique, incluant les anciennes formes de terrain fossiles, y représente un autre moyen d'évaluer la variabilité eustatique à l'échelle du millénaire, "suborbital sea level cycles" (W.G. THOMPSON et S.V. GOLDSTEIN, 2005) ; "millennial-scale sea level variability" (M. SIDDALL, 2005), qui est inscrite sur la partie, à haute résolution, de la courbe eustatique KL11 (E.J. ROHLING et al., 2008) au début de l'Eémien. L'enjeu est de taille, puisque que l'Eémien fait actuellement l'objet d'un intérêt particulier (dont le projet NEEM), en raison de son analogie avec le présent et la possibilité d'y discerner le futur.

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A - Deux unités stratigraphiques distinctes pendant MISS 5.5. A1 - Le témoignage d'anciennes vallées fossiles les séparant. A2 - Celui d'anciennes formes de terrain mineures, Littoral égyptien de la Mer Rouge, d'après J.C. PLAZIAT et al., engendrées par le travail des eaux courantes. Tunisie, 1998, figure 2). Péninsule du Cap Bon, d'après Y. JEDOUI et al. (2003, figure 2).

A1. Le dépôt détritique (II) est emboîté dans le dépôt récifal (I). Il repose sur une surface de transgression, qui résulte d'une érosion continentale. Cette dernière a engendré, pendant une régression, des vallées profondes d'une dizaine de mètres (1a), qui ont été fossilisées par un dépôt détritique, lagunaire et marin (II), pendant la transgression suivante, alors que la mer occupait une "ria en bouteille". A2. Le dépôt (II) est superposé au dépôt (I) par l'intermédiaire d'une surface de transgression, imputable elle-aussi à une érosion continentale. Les deux unités stratigraphiques sont séparées par une discontinuité d'origine géomorphologique ("separated by an erosion surface", "an irregular erosion surface"), qui résulte de l'action des eaux courantes ("l'unité supérieure ravine l'unité … sous-jacente" – Y. JEDOUI et al., 2000 – ; "l'unité carbonatée montre à sa base une surface d'érosion surmontée par un conglomérat" – Y. JEDOUI et al., 2002). Mais cette action discrète relève plutôt d'un ruissellement concentré, qui engendre des formes de terrain de petite taille (1b) sur un versant, que du creusement d'une vallée. Il en résulte que la surface de transgression, a un profil irrégulier dans le détail. Cette topographie fossile, faiblement différenciée, diffère en cela des anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles, de topographie plane, comme des anciennes vallées fossiles, de taille plus grande et donc plus faciles à identifier.

Figure 36 - De deux à trois dépôts de terrasse attribués au sous-stade 5.5, chacun d'eux reposant sur une surface de transgression constituée par d'anciennes formes de terrain

fossiles engendrées par une érosion continentale ou marine.

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B - Trois unités stratigraphiques successives pendant MISS 5.5, leur distinction reposant sur l'identification d'anciennes formes de terrain fossiles, résultant d'un processus d'abrasion marine. B1 - Sur la côte érythréenne, réputée stable, de la Mer Rouge, d'après H. BRUGGEMANN et al. (2004, figure 3).

B2 - Sur la côte méridionale de la Barbade, d'après G. SCHELLMANN et U. RATKE (2004, figure 4.14).

B1. Ici, les unités stratigraphique, superposées, sont au nombre de trois (5e1, 5e2 et 5e3). À la différence des deux coupes précédentes, les surfaces de transgression sont le résultat d'une érosion marine (2a). Celle-ci a engendré des plates-formes d'abrasion marine (H. BRUGGEMANN et al., 2004). Elles ont été fossilisées par des sédiments marins, dont le faciès dépend des variations de la profondeur d'eau au cours des transgressions. Ainsi le dépôt inférieur débute-t-il par un "conglomérat de base" (Cb), qualifié de "basal gravel zone" ou de "basal lag" en phase initiale de transgression. Il se poursuit pas des sables et des silts (Sm) en phase intermédiaire de transgression, où la profondeur d'eau augmente rapidement et se termine avec l'apparition de coraux (C) en phase finale de la transgression, où la profondeur d'eau diminue. Ces anciennes plates-formes d'abrasion marine ne présentent pas de falaises associées, parce que la coupe se situe sur une butte, où les dépôts ont été amputés de leur limite latérale interne.

B2. Chacun des trois dépôts successifs repose ici, implicitement, sur une surface de transgression, composée d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile et d'une ancienne falaise, qui lui est associée. Le calcul de "l'épaisseur caractéristique" de chacun de ces dépôts autorise la construction d'une coupe eustatique schématique de valeur minimale. La courbe proposée n'est pas corrigée du soulèvement, que les auteurs (G. SCHELLMANN et U. RATKE, 2004) estime à 0,27±0,02 m/ka. Bien qu'il soit de taux relativement faible, ce soulèvement a porté hors de l'eau une terrasse marine et son dépôt, à une date (vers 120 ka) où la position du niveau de la mer était déjà inférieure d'une dizaine de mètres à celle qu'il occupe actuellement.

Figure 36 - Suite 1.

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C - Plusieurs unités stratigraphiques en rapport avec des oscillations glacio-eustatiques figurant sur le segment à haute résolution de la courbe KL11 portant sur une partie de MISS 5.5. Aux Bahamas, d'après M.A. WILSON et al., 1998, P.J. HEARTY et al., 2007 et W.G. THOMPSON et al., 2011. C1 - Cockburn Town (San Salvador Island). C2 - Hole in the Wall (Abaco Island). D'après P.J. HEARTY et al. (2007, figure 7B).

C3 - Quatre oscillations corroborées par quatre datations C4 - Trois oscillations en rapport avec trois surfaces de distinctes (âges corrigés). transgression. C. Aux Bahamas, il est indiqué (W.G. THOMPSON et al., 2011) que quatre groupes de datations radiométriques permettent de distinguer quatre unités stratigraphiques distinctes et de les "corroborer" avec les quatre pics eustatiques d'un segment à haute résolution de la courbe KL11, portant sur une partie de MISS 5.5. S'y ajoute un argument stratigraphique, d'origine géomorphologique : l'interposition d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a) ("a key piece of evidence : an erosional surface… this surface is interpreted as a wave-cut bench"). Dans cette interprétation, la plus récente de ces quatre oscillations de la courbe KL11 à haute résolution est représentée aux Bahamas, un domaine réputé stable, bien qu'elle se tienne sur cette courbe au-dessous du niveau de la mer actuelle. Il est à remarquer toutefois que d'anciennes formes de terrain fossiles, autres qu'une seule "wave-cut bench", figurent sur les coupes des Bahamas. Celle de Hole in the Wall (P.J. HEARTY et al., 2007, figure 7B) comporte deux surfaces de transgressions distinctes, ST1 et ST2, composées d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine ("an erosional unconformity on the lower reef and adjacent eolianite") et d'une ancienne falaise fossile, celle de ST1 étant recoupée par l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, celle de ST2. Cet agencement évoque une oscillation tardive de la Termination II, précédant le pic culminant de MISS 5.5.De plus, sur la coupe de Cockburn Town, le dépôt détritique ("trough cross-bedded, coarse, shelly calcarenite with coral chunks", M.A. WILSON et al., 1998, figure 3) repose manifestement en discordance sur les deux dépôts récifaux d'âge antérieur, bien que ce fait d'observation n'ait pas retenu l'attention des auteurs. Cette discordance est d'érosion. Le profil accidenté de cette troisième surface de transgression (ST3) suggère qu'elle a été engendrée par le travail des eaux courantes (1b). Un épisode d'érosion, de même nature, est survenu avant le dépôt des sables dunaires. Au total, l'identification d'anciennes formes de terrain fossiles, d'origine continentale ou marine, permet de distinguer trois unités stratigraphiques successives, en rapport avec les trois oscillations de la courbe eustatique KL11, qui se sont élevées au-dessus du niveau de la mer actuelle. La mise en évidence de variations du niveau de la mer d'âges plus récents pendant MIS 5.5 suppose que le littoral étudié a subi un soulèvement, comme il en est, par exemple, de celui de la côte sud de la Barbade (Fig. 36-B-2).

Figure 36 - Suite 2.

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PREMIERE PARTIE

LA METHODOLOGIE

DEUXIEME PARTIE :

DE L'IDENTIFICATION, EN CALABRE MÉRIDIONALE, D'ANCIENNES FORMES DE

TERRAIN FOSSILES SUPPORTANT LES DÉPÔTS DE TERRASSES MARINES, À LA MISE EN

ÉVIDENCE DES VARIATIONS DU NIVEAU DE LA MER AU COURS DES MISS 5.5 et 5.4

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La Péninsule de Calabre est notoirement connue pour comporter un grand nombre de plates-formes et de dépôts de terrasses marines, étagées depuis le niveau de la mer jusqu'à des hauts plateaux, tels les Piani d'Aspromonte, qui s'élèvent à plus de 1300 m d'altitude, en contrebas du Montalto, lequel culmine pour sa part à 1955 m. Un autre sujet de notoriété de ce territoire provient des séismes qui l'ont affecté sporadiquement et dont le plus connu est celui qui a dévasté les villes de Messine et de Reggio en 1908. Ils sont en rapport avec un soulèvement, dont le taux, de l'ordre de 1,3 à 1,4 m/ka, se situe entre celui du transect de Bobongara (3,2 à 3,4 m/ka ; J. CHAPPELL, 2002, figure 4), dans la Péninsule de Huon, et ceux enregistrés à la Barbade (0,27 m/ka au sud et 0,45 m/ka à l'ouest, selon E.K. POTTER et al.,2004, figure 4).

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Partie II - Chapitre I

I - LE RÔLE DE LA TECTONIQUE DES PLAQUES ET DE LA TECTONIQUE CASSANTE

La Calabre méridionale appartient à une plaque continentale (Fig. 37-A), sous laquelle s'enfonce, par subduction, la plaque océanique ionienne en direction de l'ouest, puis du nord à l'approche du détroit de Messine (Fig. 37-B). Elle est alors délimitée par des failles, au nord et à l'ouest (Fig. 37-B).

C'est dans ce contexte tectonique que se sont inscrits, en partant des escarpements de bordure, des "espaces d'accueil", où se sont mis en place les dépôts, distincts, de différentes terrasses marines, au cours d'oscillations glacio-eustatiques successives (voir Fig. 1).

L'attribution au glacio-eustatisme de leur excavation, et de leur remplissage en sédiments marins, peut être mise en doute, en raison des séismes, qui se sont produits le long des failles du nord et de l'ouest, dont ceux, historiques, de 1783 et de 1908. D'où le recours à des épisodes de soulèvement cosismique, en rapport avec ces failles sismiques, afin d'expliquer l'abaissement relatif du niveau de la mer ayant déclenché le processus d'abrasion marine (G. VALENSISE et D. PANTOSTI, 1992) ; voire le recours à un remblaiement ultérieur de ces "espaces d'accueil", à la faveur d'épisodes de subsidence cosismique affectant la plaque continentale de Calabre. Or cette hypothèse se heurte à plusieurs arguments contraires :

- L'"épaisseur caractéristique" (B-A) des dépôts, qui apporte la preuve d'une transgression (voir Fig. 30-A) ;

- L'identification du point de jonction (A/B), puisqu'il résulte de la fin du processus d'abra-sion, qui témoigne d'un changement de vitesse, propre à un mouvement oscillatoire (voir Fig. 28-B) ;

- La faible amplitude des déformations verticales (-0,63 0,07 m) et l'extension limitée des ondulations (20 50 km) subies lors du séisme de 1908 (E. BOSCHI et al., 1989, cité par G. VALENSISE et D. PANTOSTI, 1992, figures 2 et 3) ;

- Le rôle fondamental, au contraire, des déformations inter-sismiques de cause globale, affectant les plaques tectoniques, dont témoignent les mesures GPS récentes (J.C. BOUSQUET,communication écrite).

Partie II - Chapitre I

LE CONTEXTE TECTONIQUE ET CHRONOLOGIQUE

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Figure 37 - La Calabre méridionale dans son contexte tectonique : tectonique des plaques et tectonique cassante ; déformation intersismique globale (1,3 à 1,4 m/ka)

et failles sismiques (1783, 1908).

II - LES DONNÉES GÉOCHRONOLOGIQUES

En Calabre méridionale, des données chronologiques, recueillies de longue date (M. GIGNOUX, 1913) ou publiées plus récemment (P.J. HEARTY et al., 1986-a, 1986-b ; B. DUMAS et al., 1988 ; S. BALESCU et al., 1997-a, 1997-b), ont fourni des points d'ancrage entre ces dépôts et la chronologie isotopique marine comprise entre les stades 5 et 3, à l'échelle des "terrasses majeures".

Un étagement de "terrasses majeures" (TM) se dégage d'une première lecture des topographies. Y apparaissent, en effet, quelques talus de dénivellation supérieure à 5 m et des escarpements encore plus élevés, distants les uns des autres de plusieurs centaines de mètres (Fig. 38). Il ressort de la comparaison de plusieurs interfluves, que ces caractères se répètent

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communément d'un transect à un autre, même s'ils ne se reproduisent pas systématiquement au grand complet sur chacun d'eux.

Les "terrasses majeures" sont composées de plusieurs "terrasses mineures", de dimensions plus restreintes. D'où le risque de confusion de ces "terrasses mineures" avec des terrasses de culture, au seul vu de la topographie. Parfois, une "épaisseur caractéristique" de valeur forte s'ajoute à la topographie pour signaler la première de ces "terrasses mineures" ou "terrasse de tête", dans la mesure où il arrive qu'elle soit en rapport avec une transgression de plus forte amplitude que les suivantes. Les "terrasses majeures" ont été numérotées à partir du bas, en commençant par la plaine littorale holocène, notée TMI. La plus ancienne de celles pour lesquelles un âge peut être proposé, compte tenu des données géochronologiques disponibles sur le terrain, est TMVI (Fig. 39).

L'attribution, dans sa plus grande partie, de la "terrasse majeure" TMVI au sous-stade 5.5 de la chronologie isotopique marine appelle une discussion.

La présence de Strombus bubonius LmK, considéré comme un "fossile directeur" du "Tyrrhénien" (B. KERAUDREN et al., 2000), dans les gisements de Ravagnese (M. GIGNOUX,1913), Bovetto (L. BONFIGLIO, 1972) et Nocella (B. DUMAS et al., 1987) ne suffit pas à légitimer cette attribution, car il a été signalé deux "épisodes marins à strombes" à rapporter respectivement aux sous-stades 5.5 et 5.3, voire son apparition dès le stade 7 (J.L. GOY et al.,2003 : "as early as the ISS 7a, possibly 7c").

La référence à la géochronologie de P.J. HEARTY (1986), fondée sur le taux de racémisation des acides aminés (Tab. I), est à examiner dans le détail, même si la plupart des échantillons prélevés dans les dépôts des "terrasses majeures" TMVI et TMV relèvent de l'"aminozone E". En effet, un échantillon provenant d'un dépôt prélevé sur le site de Trombaca, emboîté dans ceux du site de Bovetto, a délivré un taux de 0,37±0,03, sensiblement inférieur aux valeurs trouvées pour ces derniers (0,46 à 0,39). Bien que ce taux de 0,37 ne suffise pas à emporter la décision, cet échantillon est attribué, sous réserve, à une "aminozone D (?)", intermédiaire entre les aminozones E et C (P.J. HEARTY et G. DAI PRA, 1992, tableau II).

Ce résultat est corroboré sur ces deux sites par ceux obtenus par thermoluminescence (Tab. I). En effet, les valeurs délivrés par cette méthode sur le site de Trombaca ("measured IR-OSL" : 77±7 ka ; "corrected TL age estimate" : 90±9 ka, S. BALESCU et al., 1997-a et 199-7b) sont nettement inférieures à celle provenant du site de Bovetto ("corrected TL age estimate" : 116±12 ka). Toutefois ces résultats sont en contradiction avec ceux obtenus selon la même méthode à Ravagnese, où le dépôt de la dernière des "terrasses mineures", attribuable à MTV, a donné un âge moins élevé ("corrected TL age estimate" : 101±12 ka) que celui d'un dépôt situé en aval et en contrebas, rapporté à la terrasse TMV ("measured IR-OSL" : 102±8 ka ; "corrected TL age estimate" : 116±13 ka).

Enfin, une autre contradiction provient de la datation à 118±13 ("corrected TL") et 97±8 ka ("IR-OSL") d'un échantillon qui a produit un taux de racémisation des acides aminés de 0,51 (aminozone F), nettement supérieur à ceux de l'aminozone E. Quoi qu'il en soit, la totalité des échantillons prélevés dans les dépôts de la "terrasse majeure" TMVI appartiennent à l'aminozone E, généralement mise en corrélation avec le sous-stade 5.5 ("supporting a stage 5 e correlation", B. DUMAS et al, 1988).

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Figure 38 - "Terrasses majeures" en Calabre méridionale, sur la bordure orientale du Détroit de Messine, entre Ravagnese et Bovetto.

La localisation est donnée sur la figure 39-b (à l'est du Piano Carrabati).

Au second plan, la topographie comporte manifestement quatre plates-formes étagées d'est en ouest, entre les points cotés 166,3m et 66,8m. Elles sont qualifiées de "terrasses majeures". Au premier plan, sur le versant de rive gauche du Vallone Menga, l'étagement se complique avec l'apparition, sous la cote 85,0m, d'une "terrasse mineure" au sein de la "terrasse majeure" TM IV, indépendamment de l'aménagement de terrasses de culture.

Plusieurs coupes permettent d'observer des dépôts de terrasse marine et le substrat sur lesquels ils reposent. Un épais dépôt de la "terrasse de tête" de la "terrasse majeure" TMV, rapportée à MISS 5.3, repose en discordance sur les grès du Miocène (gM) par l'intermédiaire d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, qui tranche ces grès à l'altitude de 77,4m. Il renferme des exemplaires de Strombus bubonius (Sb) sous l'immeuble en construction. Plus haut, deux exemplaires de Glycymeris violescens présentent un taux de racémisation des acides aminés de 0,41±0,01 (B. DUMAS et al., 1988, tableau I). Dans la coupe qui se trouve entre l'immeuble en construction et le point coté 93,2m, trois exemplaires de Glycymeris violescens ont délivré un taux de racémisation nettement inférieur, de 0,29±0,04 (B. DUMAS et al., 1988, tableau I), qui amène à rapporter à MISS 5.1 le dépôt qui les contient. La base du dépôt de terrasse, qui culmine sous le point coté 79,4m, a été mesurée à 76,10m d'altitude. Celle du dépôt situé sous le point coté 68,8m, se trouve à 57,22m d'altitude. Les points cotés sont ceux de la carte topographique de Calabre à 1/2000.

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A - Sur le littoral tyrrhénien à l'ouest de Santa Trada, et sur la B - Sur la bordure orientale du Détroit de Messine, au bordure nord-est du Détroit de Messine jusqu'à la Fiumara di sud de Reggio de Calabre, entre les sites fossilifères Bovetto. à Strombus bubonius de Ravagnese et de Gallico.

C - Sur le littoral ionien, entre la Punta di Pellaro et Nocella. D - Sur le littoral ionien, entre la Fiumara di San Vincenzo et la Fiumara Molaro.

"Terrasse majeure" Altitude (m) du bord interne des anciennes Stade (MIS) plates-formes d'accumulation marine ou sous-stade (MISS) isotopique marin TMVI 180/170 5.5 TMV 120 5.3 TMIV 90 5.1 TMIII 70 4 TMII 50 3 TMI 7-8 Holocène

Figure 39 - Carte de la distribution géographique et de l'âge attribué aux "terrasses majeures", de TMVI (sous-stade 5.5) à TMII (stade 3), de Calabre méridionale, entre

Santa Trada et le Capo dell'Armi.

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Tableau I - Géochronologie des dépôts des "terrasses majeures" (TM), de TMVI à TMII.

Le taux de soulèvement de la Calabre méridionale, calculé sur l'altitude du bord interne de la "terrasse majeure" TM VI, se tenant entre 170 et 180 m, et pour une position du niveau de la mer jugée jusqu'à peu de temps encore comme étant de +4 à +6 m, mais qui pourrait avoir été encore plus haute à la date de 126 ka (voir la discussion in R.E. KOPP et al., 2009), celle du pic culminant de MISS 5.5 (dans la chronologie de A.L. THOMAS et al., 2009, figure 1) est de l'ordre de 1,3 à 1,4 m/ka. Il apparaît ainsi bien supérieur à celui obtenu, par divers auteurs (Tab. II), sur le littoral tyrrhénien de la Calabre septentrionale (L. CAROBENEet al., 1986, page 1550 : 012 m/ka environ, pour un "niveau eutyrrhénien" passé d'une altitude originelle de 6-7 m à celle, actuelle, de 8 m ; F. FILOCAMO et al, 2008, page 18 : de l'ordre de 0,39 à 0,54 m/ka, pour un échantillon récolté à 12-14 m d'altitude et rapporté à MIS 9 ou MIS 7) et le littoral ionien de la Calabre centrale (L. CAROBENE, 2003, tableau 1 : 0,50 m/ka pour une ancienne ligne de rivage de haut niveau assignée à MISS 5.5). Il est même encore supérieur à celui, de 1 m/ka (L. CUCCI, 2004 ; E. SANTORO et al., 2009), attribué à des échantillons rapportés à MISS 5.5 sur le littoral ionien de la Calabre septentrionale et centrale.

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Tableau II - Quelques valeurs du taux de soulèvement relatives à la Calabre septentrionale et centrale, en comparaison de celui obtenu en Calabre méridionale.

La plus large de toutes ces "terrasses majeures", TMVI, attribuée au sous-stade 5.5 en raison des données chronologiques contenues dans plusieurs de ses dépôts, peut dépasser ou s'approcher d'une largeur de 1000 m (Fig. 40). La "terrasse majeure" TMVI se compose, en fait, de plusieurs dépôts de terrasse, reposant sur autant de surfaces de transgressions distinctes, qui sont constituées d'anciennes formes de terrain fossiles, aisément reconnais-sables à l'affleurement. Certaines ont été engendrées par l'érosion continentale pendant une régression, par suite de l'abaissement du niveau de base de cette érosion. D'autres résultent de l'abrasion marine exercée durant la phase initiale, qui lui est favorable, d'une transgression. Toutes ont été recouvertes de sédiments marins transgressifs au cours de toute la durée d'une transgression.

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A - Croquis de localisation.

B - Couple stéréoscopique.

Les trois interfluves A, B et C, diffèrent par leur topographie. Celui (C) qui porte le site de mesure 164,23m, à l'est, se réduit à une croupe d'interfluve. Une large plate-forme (B) se développe au centre, au contraire, sous le point de mesure 170,61m. Plus à l'ouest, l'interfluve A se décompose en trois étroits replats, qui se situent respectivement sous les sites de mesure 179,92m, 170,23m et 162,31m.

Figure 40 - Localisation des topographies d'interfluve et des sites de mesure dans le tiers supérieur de la "terrasse majeure" TMVI, attribuée au dernier interglaciaire, en

Calabre méridionale, sur le littoral ionien, au nord-est du Capo dell'Armi.

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Partie II - Chapitre II

Au nord-est du Capo dell'Armi, les versants de trois interfluves, distants de 250 m environ les uns des autres et portant respectivement (voir Fig. 40) les points de mesure 179,43 m (A), 170,61 m (B) et 164,23 m (C), permettent d'identifier quatre surfaces de transgression successives, à la lecture des affleurements observables. Chacune d'entre elles est composée d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, à laquelle est associée une ancienne falaise, fossile elle aussi. Elles sont inscrites sous le tiers supérieur de la "terrasse majeure" TMVI, qui atteint une largeur totale d'un millier de mètres sur ces trois transects et qui présente une dénivellation de l'ordre de 60 m. Ce segment supérieur de la "terrasse majeure" TMVI appartient au dernier interglaciaire (MISS 5.5 ; Eémien : 130-115 ka). Mais il ne représente qu'une petite partie de cette "terrasse majeure", qui débute sur une ancienne ligne de rivage de haut niveau, datant du maximum eustatique culminant (126 ka) du MISS5.5 ou Eémien.

I - UNE SURFACE DE TRANSGRESSION COMPORTANT UNE ANCIENNE FALAISE FOSSILE, RECOUPÉE PAR UNE ANCIENNE PLATE-FORME D'ABRASION MARINE FOSSILE D'ÂGE POSTÉRIEUR

Le versant oriental de l'interfluve (C), portant le point de mesure 164,23 m (Fig. 40), présente, à une trentaine de mètres en aval du point de mesure 151,23 m, une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, à laquelle est manifestement associée, dans une même surface de transgression, une ancienne falaise fossile, de dénivellation métrique (Fig. 41-A et 41-B). Ces deux anciennes formes de terrain fossiles, surmontées d'un dépôt détritique (I), sont aisément identifiables, grâce à l'affleurement des grès du Miocène, dans lesquels elles sont inscrites. Les deux anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles, ainsi étagées, sont recouvertes, l'une et l'autre, d'un "conglomérat de base". Celui qui affleure sur le point de mesure 151,23 m se prolonge vers le sud, au delà de l'ancienne falaise fossile, où il repose en discordance sur un sable fossilisant cette falaise. Sur cette coupe, c'est donc une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile qui recoupe, contrairement au cas le plus fréquent, une ancienne falaise fossile, d'âge antérieur. Cet agencement des deux surfaces de transgression (voir Fig. 31) est caractéristique de la succession de deux hauts niveaux marins, dont la position du premier est plus basse que celle de celui qui lui fait suite. Cette combinaison est réalisée sur d'autres coupes, aux Bahamas par exemple (Fig. 41-C1), où elle a été enregis- trée, au-dessus du niveau de la mer actuelle, à la fin de l'avant dernière déglaciation (Termination II).

Partie II - Chapitre II

QUATRE SURFACES DE TRANSGRESSION, À L'EST DU CAPO DELL'ARMI, SUR UN PREMIER TIERS DE

LA "TERRASSE MAJEURE" TMVI, ATTRIBUÉE AU DERNIER INTERGLACIAIRE

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Figure 41 - Quatre surfaces de transgression, se composant chacune d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile et d'une ancienne falaise fossile, sur les cent cinquante premiers mètres de la "terrasse majeure" TMVI, attribués au dernier interglaciaire,

en Calabre méridionale, sur le littoral ionien, au nord-est du Capo dell'Armi (sous l'interfluve (C) portant le point de mesure 164,23 m).

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Figure 41 - Suite 1.

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D - Coupe géologique et vue panoramique détaillée du versant oriental de l'interfluve C (voit Fig. 40)

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A. L'interfluve C de la figure 40, qui porte les sites de mesure 164,23m et 173,49m est réduit à une croupe d'interfluve, de sorte qu'il est impossible d'y identifier, en toute certitude, d'anciennes plates-formes d'accumulation marine, dont le bord interne pourrait constituer un indice de l'emplacement d'anciennes lignes de rivage de haut niveau. L'altitude des sites de mesure de surface a été obtenue avec un théodolite, afin de servir de référence à la mesure de l'épaisseur des dépôts sous-jacents, dont sont issus, en profondeur, les points de mesure 166,33m, 159,01m et 151,23m. B. Les affleurements de terrain que délivre son versant est permettent, en revanche, de distinguer quatre surfaces de transgressions (ST) successives, chacune étant composée, ici, d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile et d'une ancienne falaise fossile, à laquelle elle est adossée. La coupe géologique se présente, intentionnellement, comme un "écorché", sans représentation de dépôts sus-jacents, afin de mettre en valeur la succession des surfaces de transgression distinctes. Le mode d'agencement de ces surfaces de transgression entre elles présente des variations (voir Fig. 31). La plus basse (ST1) se caractérise par le recoupement d'une ancienne falaise fossile par une ancienne plate-forme d'abrasion marine, fossile elle-aussi. Plus haut, l'agencement des surfaces de transgressions ST2 et ST3 est d'un autre type, puisque le dépôt supporté par ST3 est emboîté dans celui recouvrant ST2, tandis que les deux anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles relevant de ST2 et de ST3 sont tranchées par l'ancienne falaise fossile de ST4. La courbe eustatique est construite, a minima, en se fondant sur "l'épaisseur caractéristique" (voir Fig. 30) de chacun des ensembles de sédiments transgressifs recouvrant chacune des surfaces de transgression successives.

Figure 41 - Suite 2.

E1 - Une ancienne falaise subaérienne encroûté.

E2 - Un lit de petits galets et blocs, reposant sur une ancienne plate-forme marine fossile, inscrite dans un sédiment hétérométrique et massif.

E3 - Un dépôt colluvial de sable ruisselé reposant, par l'intermédiaire d'un encroûtement lamellaire peu épais, sur des sables marins altérés.

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C1. Les deux combinaisons supérieures ne sont pas sans rappeler celles qui ont été présentées sur le transect de Tewai entre les dépôts des terrasses IIa et IIb, de même qu'entre ceux de ces deux terrasses, rapportées à MIS 3, et celui de la terrasse holocène Ia (J. CHAPPELL, 1983). De fait, une surface de transgression (ST2) apparaît inscrite dans un dépôt, qui est emboîté dans un autre dépôt, reposant sur une surface de transgression précédente (ST1), alors que ces deux surfaces de transgression sont tranchées, sur le bord externe, par une ancienne falaise fossile, appartenant à une surface de transgression (ST3), d'âge encore postérieur. Ici, toutefois, l'analogie va plus loin. Cette ancienne falaise fossile se décompose en deux segments. Le segment inférieur (S1) est indiscutable, parce qu'il est inscrit dans des sédiments (des couches progradantes à Tewai ; ici des grès du Miocène), qui diffèrent distinctement de ceux qui le recouvrent (des sédiments subhorizontaux détritiques meubles). Le segment supérieur (S2) est moins facilement identifiable, parce qu'il tranche des sédiments détritiques de structure et de texture, semblables à ceux qui le recouvrent. À noter cependant une légère différence d'altération, les sables de teinte rougeâtre affleurant au nord étant plus altérés que ceux, de couleur brune et plus profonds, exposés au sud. De plus, les deux dépôts sableux se distinguent par la nature des galets épars qu'ils contiennent : les uns de quartz, au nord (Fig. 41-E2), et les autres de roches carbonatées, réduits à l'état de fantômes (Fig. 41-E3). C2. La combinaison inférieure n'est pas sans analogie avec celle, réalisée aux Bahamas (P.J. HEARTY et al., 2007) pendant le dernier interglaciaire, alors que ce littoral n'a pas subi de soulèvement notable depuis lors. D1 et D2. Cette coupe géologique et cette vue panoramique de l'interfluve C ont pour but de délivrer une représentation, plus détaillée que les figures 41-A et 41-B, de la partie haute de ce transect, où sont situées les photographies E1, E2 et E3 (localisées sur la coupe D1). D1. Des silts blancs, lités et subhorizontaux (St), sont tranchés par un plan incliné de 25° environ, faisant face à la mer. Cette topographie a subi un encroûtement carbonaté superficiel, en lamelles superposées, sur une trentaine de centimètres d'épaisseur. Elle peut être définie comme étant une ancienne falaise subaérienne encroûtée (4bx). Son encroûtement l'a, exceptionnellement, préservé de l'érosion, malgré la fragilité des silts sous-jacents. La question se pose de l'existence d'un segment d'ancienne falaise fossile, dont elle serait le prolongement vers le haut, à l'air libre (Fig. 41-D2). D2. Un banc de galets, dont l'épaisseur est de l'ordre de 20 cm, affleure en contrebas de l'ancienne falaise subaérienne encroûtée (4bx – Fig. 41-D1). Il se prolonge vers l'amont par un lit de gros galets et de blocs jusqu'au point de mesure 166,33m. Ce banc de galets, se poursuivant par un lit de blocs, repose sur une surface de discontinuité, de profil rectiligne, dont la pente ne dépasse pas 10°, au-dessous de laquelle affleure un autre type de dépôt. Cette discontinuité relève d'un épisode d'érosion. Son profil est celui d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine (2a). Elle est inscrite dans le dépôt (II) et recouverte par un dépôt (III). Son bord interne se situe sous le point de mesure 166,33m, qui se trouve quasiment à la verticale de l'extrémité inférieure visible de l'ancienne falaise subaérienne (Fig. 41-D1). Elle s'achève ainsi au pied d'une ancienne falaise fossile, qui se trouve dans le prolongement vers le bas de l'ancienne falaise subaérienne. Le site de mesure 166,33m est au point de jonction entre ces deux anciennes formes de terrain complémentaires. Le banc de galets représente un "conglomérat de base" (Cb), ainsi que le lit de galets et de blocs qui lui fait suite en amont. Il repose sur un dépôt (II), qui s'intercale entre un autre "conglomérat de base" (Fig. 41-B) et les silts (Fig. 41-B) du dépôt (II). Ainsi encadré, son origine marine ne fait donc pas de doute, malgré des caractères pourtant d'apparence continentale : son hétérométrie, le faible émoussé des matériaux de la taille des galets et son absence de litage. Il s'agit d'un apport continental (Ac) ayant échappé à un remaniement sous l'action de l'agitation des vagues, en raison de la profondeur d'eau trop élevée là où il s'est mis en place. Au-dessus du "conglomérat de base", le dépôt (III) est composé de sables altérés (Sm), dans lesquels sont dispersés quelques galets de quartz, de forme arrondie le plus souvent. Ce dépôt hétérométrique et dépourvu de litage apparent ne peut cependant pas être considéré comme étant un dépôt de pente (voir texte), mais comme un dépôt marin altéré, aux galets de quartz moins altérés que les "fantômes" de roches carbonatées, contenu dans le dépôt (IV) affleurant sous le point de mesure 164,23m (Fig. 41-E3).

Figure 41 - Suite 3.

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II - UNE SURFACE DE TRANSGRESSION INSCRITE DANS UN SUBSTRAT DE GRÈS DU MIOCÈNE SUPÉRIEUR ET D'ARGILES DU PLIOCÈNE INFÉRIEUR

La plus élevée de ces trois surfaces de transgression apparaît, à l'évidence, sur le versant oriental de l'interfluve (C), qui porte le point de mesure 164,23 m (voir Fig. 40), sous la forme d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (Fig. 41-D). Elle est entièrement inscrite dans des grès d'âge miocène. Le dépôt (II), qui repose sur cette ancienne plate-forme d'abrasion marine qu'il fossilise, se tient à l'altitude de 159,01 m sur son bord externe. Il présente à sa base des blocs de grande taille, supérieure à 1 m. Il se poursuit, sur cette coupe, par des sédiments de granulométrie plus fine, dont des silts blancs lités (Fig. 41-E1) qui témoignent d'une augmentation de la profondeur d'eau, en rapport avec l'accroissement de la vitesse d'élévation du niveau de la mer intervenant, au cours de chaque transgression, entre son début et son maximum de vitesse. Il se termine, au contraire, sous le point de mesure 179,43 m, situé sur le versant oriental de l'interfluve (A) (Fig. 42-A1 et 42-A2), par un dépôt conglomératique encroûté et altéré (Fig. 42-B1). Ce conglomérat se tient en position sommi-tale sous une étroite plate-forme d'accumulation marine encroûtée, entre les points de mesure 179,92 et 179,43 m, ce dernier site de mesure étant en bord externe de la plate-forme de remblaiement, alors que le niveau de la mer avait déjà opéré son retrait. Ce dernier changement de granulométrie dénote un retour à une profondeur d'eau faible, en rapport avec le ralentissement de la vitesse de transgression dans sa phase finale, et avec la vitesse encore lente de la régression qui lui fait suite.

En amont du point de mesure 179,43 m, l'entaille d'un chemin permet d'observer effec-tivement les silts reposant sur une ancienne falaise fossile, qui s'inscrit dans les grès du Miocène, inclinés vers l'amont, et qui se trouve ainsi recouverte en "aggradation"(Fig. 42-A2).

Cette "terrasse construite" ne comporte pas d'ancienne falaise subaérienne dans le prolon-gement vers le haut de l'ancienne falaise fossile, au point de jonction avec l'ancienne plate-forme d'accumulation marine encroûtée. De fait, le sommet du dépôt conglomératique sommi-tal, encroûté, se tient sensiblement à la même altitude et se confond avec le "toit" d'un "conglomérat de base", encroûté lui aussi, qui appartient à un dépôt antérieur, attribuable au dernier des épisodes transgressifs rapportés à MISS 6.5 (Fig. 42-B). Ce plan stratigraphique supérieur du "conglomérat de base" a été partiellement dégagé, par l'érosion différentielle, des sédiments sableux meubles sus-jacents, sensibles au ruissellement, l'ancienne falaise subaé-rienne étant reportée plus loin vers l'amont.

De plus, au nord-ouest de l'interfluve intermédiaire (B) (voir Fig. 40), qui est emprunté par la route forestière (point de mesure 170,61 m), cette ancienne falaise fossile est exhumée par une érosion différentielle, qui s'est exercée entre les grès et les silts, à la tête d'un ravin se dirigeant vers le sud-ouest. La base de l'ancienne falaise fossile, ainsi exhumée, se tient sur le point de mesure 165,35 m, où subsistent des galets (Fig. 43-A), à une altitude proche de son point de jonction avec l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, à la date de son achèvement, qui précède la fossilisation de la falaise. Sa dénivellation est donc de l'ordre de 15 m.

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A1 - Interfluve (A) (localisation sur Fig. 40). Panorama.

A2 - Interfluve (A). Coupe géologique sommaire.

A3 - Interfluve (A). Genèse et composition de la masse déplacée (MD).

Figure 42 - Trois unités stratigraphiques distinctes sur les cent cinquante premiers mètres de la "terrasse majeure" TMVI, attribués au dernier interglaciaire, en Calabre

méridionale, sur littoral ionien, au nord-est du Capo dell'Armi (sous l'interfluve (A) portant les points de mesure 179,92 m, 179,43 m, 170,23 m et 162,31 m).

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A1. Ce panorama porte sur l'interfluve A de la figure 40, celui qui se situe le plus à l'ouest par rapport à celui (C) précédemment observé (voir Fig. 41). À la différence de l'interfluve C, le A, de plus grande largeur, présente une topographie de terrasses étagées. Elle comporte deux plates-formes, séparées par un replat, compris entre deux talus faisant face à la mer.

A2. La coupe géologique montre le rôle des encroûtements carbonatés de surface. Ici, ils n'affectent, pas seulement l'un des deux talus des terrasses, qui apparaît ainsi comme un équivalent latéral de l'ancienne falaise subaérienne encroûtée (4bx), inscrite dans les mêmes sédiments silteux (St) que sur l'interfluve C(voir Fig. 41-E1). De plus, cette ancienne falaise subaérienne encroûtée (4bx) s'intercale entre deux anciennes plates-formes d'accumulation marine (4ax et 4ax), encroûtées, elles aussi. En amont, la consolidation porte sur un conglomérat sommital (Csx), surmontant le silt (St). En aval, la cimentation de la plate-forme affecte un silt ou un sable enrobant des galets (SCx). Ces divers encroûtements présentent l'avantage d'avoir assuré la conser-vation des topographies de terrasse. L'induration des matériaux interdit d'attribuer cette topographie étagée à l'aménagement de terrasses de culture.

L'interfluve A présente, en outre, deux anciennes falaises fossiles, aisément identifiables. En amont, le long d'un chemin, est inscrite, dans le grès du Miocène (gM), une ancienne falaise fossile (2b), contre laquelle vient buter abruptement, par aggradation, le silt jaune (St). Le conglomérat sommital encroûté (Csx) affleure à peu près à la même altitude que le "toit" d'un conglomérat de base (Cbx), reposant sur une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), d'âge antérieur (MISS 6.5). Ce conglomérat (Cbx) est encroûté, lui aussi. Il a été dégagé localement, par érosion différentielle, des sables meubles (Sm) sus-jacents, en provoquant le recul d'une ancienne falaise subaérienne (4b). En aval, l'identification d'une seconde ancienne falaise fossile (2b) bénéficie de la présence d'une masse déplacée (MD, Fig. 42-B5).

A3. Ce profil est un essai de reconstitution de l'évolution géomorphologique, comportant le déplacement d'une masse de matériaux (MD), détachés de la paroi d'une falaise, et leur fossilisation. La masse déplacée (MD) provient du sapement d'une falaise. Ce sapement a dégagé un surplomb, qui était composé de sables et de graviers (Sgx), surmontés d'un conglomérat (Cbx). Tous ces matériaux sont encroûtés et ils constituent la masse déplacée (Fig. 42-B5). Cette superposition suggère un encroûtement ayant affecté les sables et les graviers (Sg), affleurant sous le silt (St). La cimentation porte sur un horizon peu profond (Sgx), situé au-dessous d'une plate-forme d'abrasion marine (2b). Celle-ci est fossilisée par un conglomérat de base, lui-même encroûté (Cbx). D'autres sédiments détritiques, d'apport continental (Ac), en provenance d'un cours d'eau et se déversant dans la mer, fossilisent la majeure partie de la masse déplacée (MD), qui fait partie intégrante de la même unité stratigraphique que le dépôt (Ac), et qui contribue, de cette façon, à la fossilisation de la falaise, dont elle provient.

Figure 42 - Suite 1.

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B3 - Une plate-forme de terrasse étagée en contrebas de celle, encroûtée, du dépôt (II).

B1 - Un dépôt de terrasse (II) emboîté dans un dépôt de terrasse (I).B2 - Dépôt encroûté de la terrasse (II).

B4 - Une masse déplacée (MD), reposant sur une ancienne falaise recoupant les sables et graviers du dépôt (I).

B-5 - Une masse déplacée (MD), fossilisée par le de dépôt de terrasse (III). Même légende que figure 42-4. Ajouter A : dépôt anthropique.

Figure 42 - Suite 2.

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B1. Un dépôt, épais d'une vingtaine de mètres, débute, sur cette coupe, par des sables et des graviers de teinte grise (Sg). Puis viennent des silts blancs (St). Ces derniers se chargent à leur base de blocs subanguleux (en Ac), constitués de concrétions sciaphiles, resédimentés, en provenance d'affleurements in situ, qui sont plaqués contre la paroi de falaises ayant été fossilisées sous les "marnes bathyales" du Pliocène inférieur et moyen (P. BARRIER, 1987), au delà et en amont du cliché. Ils ont manifestement échappé à un façonnement sous l'action des vagues, les remaniant, sans doute parce qu'ils se sont déposés, comme les silts, de granulométrie fine, sous une forte profondeur d'eau. Les silts sont surmontés en continuité, sous le site de mesure 179,43 m, par un conglomérat sommital (Cgs) de teinte rougeâtre, encroûté et altéré. Il témoigne d'une diminution de la profondeur d'eau en fin de transgression. Au delà du cliché, en remontant le chemin vers le nord, les silts (St) reposent en amont sur la paroi d'une ancienne falaise, entaillée dans les grès du Miocène, qu'ils fossilisent (Fig. 42-A2). Ces silts sont identiques à ceux, qui affleurent sous l'interfluve portant le point de mesure 173,90 m (Fig. 41-C), 400 m plus à l'est en direction du Torrente Molaro (voir Fig. 41). Ils constituent un niveau repère entre ces deux transects. Sur un transect intermédiaire (Fig. 43-B ), ils ont été dégagés localement par l'érosion différentielle, laissant apparaître la paroi, exhumée, de l'ancienne falaise qu'ils avaient fossilisée. Au sud du cliché, un dépôt fin, fortement cimenté (SCx) et contenant des galets (Fig. 42-B2 et Fig. 42-B3), affleure sous le point de mesure 170,23 m.

B2. Le dépôt qui affleure sous l'étroit replat portant le site de mesure 170,23 m, comporte des bancs sableux ou silteux fortement consolidés, contenant des galets (SCx). De ce fait, il ne peut pas être considéré comme étant le résultat de l'induration des silts (St), qui s'observent, à la même altitude, plus en amont (Fig. 42-B1). Il s'agit, au contraire, d'un dépôt (II), postérieur à celui des silts (I), dans lesquels il se trouve emboîté. Il est compris entre deux anciennes falaises identifiables à l'affleurement : celle subaérienne, encroûtée (4bx), qui tranche les silts blancs entre les sites de mesure 179,43 et 170,23 m, et celle qui est fossilisée par une masse déplacée (MD) entre ce dernier et le point de mesure 162,31 m.

B3. Un étroit replat, encroûté, se tient sous le point de mesure de mesure 170,23 m. Ce replat n'est pas imputable à une terrasse de culture, à l'aménagement de laquelle un tel encroûtement ne se prêterait pas, ni à une topographie quelconque. Il dérive d'une ancienne plate-forme d'accumulation marine encroûtée (4ax),dominant par un talus – qui, faisant face à la mer, ne peut être qu'une ancienne falaise subaérienne – une autre plate-forme (4a), où se tient le point de mesure 162,31 m, juste avant lequel se situe la masse déplacée (MD), recouvrant cette ancienne falaise.

B4. Une masse déplacée (MD), inclinée vers l'aval, repose sur la tranche des bancs subhorizontaux de sables et de graviers (Sg), qui affleurent sous le silt (St) du dépôt (I), auquel ils appartiennent également. La masse déplacée, basculée vers l'aval, recouvre une ancienne falaise, dont elle provient, et dont elle contribue à la fossilisation, avec les sédiments (Ac) qui affleurent sous le point de mesure 162,31 m (Fig. 42B-5).

B5. Une masse déplacée (MD), inclinée de 30° en direction de la mer, et indurée, est intercalée entre les points de mesure 170,23 et 162,31 m. Cette masse déplacée apporte la preuve de l'interposition d'une ancienne falaise, dont elle provient, et dont elle participe à la fossilisation. Cette falaise s'est inscrite dans des sables et des graviers (Sg), qui affleurent sous des silts (St), surmontés d'un conglomérat (Cgs), lequel culmine sous le site de mesure 179,92 m (dépôt I). Elle est recouverte, ainsi que la masse déplacée, par un dépôt d'apport continental (Ac), affleurant sous le point de mesure 162,23 m (dépôt III). La masse déplacée, entièrement consolidée, se compose d'un dépôt, qui comporte des blocs, et qui repose, tel un "conglomérat de base" (Cbx) encroûté, sur un dépôt de sables et de graviers, encroûté lui aussi (Sgx), comme il en existe sous la surface d'anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles. La déstabilisation des matériaux consolidés, qui constituent la masse déplacée, provient apparemment du recul d'une falaise vive et du sapement par la mer des terrains meubles sous-jacents, y découpant une grotte, dotée d'un surplomb, en phase initiale de transgression (Fig. 42-A3). La composition de cette masse déplacée suggère une double origine in situ des matériaux avant leur déplacement:- un encroûtement, sous une ancienne plate-forme d'abrasion marine, des sables et de graviers (Sgx), appartenant au dépôt (I) dans lequel est inscrite la falaise ; - la mise en place d'un conglomérat à blocs, fossilisant cette plate-forme d'abrasion marine et son encroûtement ; ce conglomérat (Cbx) ne peut provenir que de la base d'un dépôt intermédiaire (II) entre ceux qui affleurent, respectivement, sous les points de mesure 179,43 (I) et 162,31 m (III).

Figure 42 - Suite 3.

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A - Ancienne falaise fossile, exhumée, au-dessus du site de mesure 165,35 m (transect A).

A. Une ancienne falaise exhumée apparaît en tête d'un ravin (situé à l'ouest de l'interfluve portant le point de mesure 170,61 m sur le transect B). Cette falaise inscrite dans le grès du Miocène (gM) est fossilisé par un silt (voir transect B : St). Ici (Fig. 43-A), l'ancienne falaise a été dégagée par l'érosion différentielle des terrains meubles, constitués des silts (St) ou de sables et de graviers (Sg), qui l'avaient fossilisée antérieurement. Il subsiste des sables et des galets sur le point de mesure 165,35m, au pied de la falaise exhumée, quasiment sur le point de jonction entre l'ancienne falaise fossile, ainsi exhumée (2b'), et l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, exhumée (2a') elle aussi. Ce point de jonction est l'indice d'une ancienne ligne de rivage, datant de la fin du recul d'une falaise vive et du début de sa fossilisation. Cet épisode est intervenu lors d'un changement de vitesse de l'élévation du niveau de la mer, qui a provoqué la séparation du fond rocheux et de la limite inférieure de l'agitation des vagues, où s'exerçait précédemment le processus d'abrasion.

Figure 43 - Encroûtement, érosion différentielle et mise en évidence de deux des unités stratigraphiques du tiers supérieur de la "terrasse majeure", attribué au dernier

interglaciaire, en Calabre méridionale, sur l'interfluve (B) portant le point de mesure 170,61 m, au nord-est du Capo dell'Armi.

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B - Ancienne plate-forme d'accumulation marine encroûtée, sous le site de mesure 170,61 m (transect B).

B. L'érosion différentielle se manifeste ici, en amont, par le dégagement de sables recouvrant le "conglomérat de base", encroûté (Cbx), fossilisant une ancienne plate-forme d'abrasion marine, datant de MISS 6.5. La première des anciennes falaises fossiles (2b), attribuable à MISS 5.5, constitue la limite latérale interne au dépôt (I) de la "terrasse de tête" de la "terrasse majeure" TMVI. Elle est restée à l'état fossile sur ce transect. L'encroûtement du dépôt (II), emboîté dans le dépôt (I), a permis la conservation de l'ancienne plate-forme d'accumulation marine (4ax), qui s'est édifiée au terme de sa mise en place, en phase régressive, et dont le bord interne est proche du point de mesure 170,61 m.

Alors qu'un encroûtement (transect B) assure, exceptionnellement, la conservation de formes de terrain superficielles dans des sédiments détritiques meubles du dépôt (II), l'érosion différentielle (transect A) risque de faire disparaître largement, par exhumation des anciennes formes de terrain sous-jacentes, les sédiments transgressifs non consolidés qu'elles supportent, au risque de compromettre la mise en évidence de la première des deux unités stratigraphiques distinctes (I) et (II), représentées sur cette partie du transect B.

Figure 43 - Suite.

Sur le versant oriental de l'interfluve (C), qui porte le point de mesure 164,23 m (voir Fig. 41-D), l'ancienne falaise fossile n'est pas tranchée par une coupe aussi démonstrative que celle offerte par l'entaille d'un chemin sous le point de mesure 179,92 m. Mais elle peut être identifiée en remontant pas à pas, et abruptement, cet autre versant d'interfluve, entre le bord interne de l'ancienne plate-forme d'abrasion marine, dont le bord externe se tient sous le point de mesure 159,01 m, et son intersection avec une ancienne plate-forme d'abrasion marine, plus élevée, inscrite ici dans des argiles du Pliocène inférieur et surmontée de galets.

III - UNE SURFACE DE TRANGRESSION COMPORTANT UNE ANCIENNE FALAISE FOSSILE RECOUPANT UNE ANCIENNE PLATE-FORME D'ABRASION MARINE FOSSILE D'ÂGE ANTÉRIEUR

Une autre ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile est tout aussi manifestement inscrite, dans les grès du Miocène, à une dizaine de mètres en contrebas de celle précé-demment identifiée (voir Fig. 41-D). Le bord externe de la plus haute se tient à l'altitude de

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159,01 m, tandis que le bord interne de la plus basse est proche du point de mesure 151,23 m, sous le site de mesure 164,23 m. Les sédiments qui la recouvrent débutent par un conglomérat de 4 m d'épaisseur. Il est suivi par un empilement de 7 m de sables marins altérés, de teinte rouge, qui présentent des taches blanchâtres provenant de la décarbonatation de galets de roches carbonatées (voir Fig. 41-E3). La plate-forme inférieure ne se prolonge visiblement pas à plus de 20 m au delà du point de mesure 151,23 m, avant l'affleurement de grès du Miocène, où se tient le site de mesure 159,01 m.

Entre cet affleurement de grès et le point de mesure 151,23 m, le versant est masqué par des matériaux provenant de sa partie haute sous l'effet du ruissellement ou de la gravité. Pourtant l'interposition d'une ancienne falaise fossile entre le conglomérat et les grès est difficilement évitable, en raison de la valeur de la pente nécessaire au raccord entre des deux point de mesure (voit Fig. 41-D). Un segment inférieur de cette ancienne falaise fossile est visiblement inscrit dans les grès du Miocène, dont l'affleurement s'interrompt brusquement au delà du site de mesure 159,01 m. Plus haut que l'affleurement des grès, cette ancienne falaise fossile ne peut que se prolonger, sur un second segment, entre les sables altérés (voir Fig. 41-E3), d'un côté, et d'autres sédiments de texture et de composition différentes (voir Fig. 41-E2) et d'altération moins profonde, qui s'interposent entre le conglomérat de base et les silts appartenant au dépôt de la "terrasse de tête" de TMVI. Cette combinaison n'est pas sans analogie avec celle qui se dessine entre le dépôt de la terrasse Ia et ceux des terrasses IIa et IIb, sur le transect de Tewai (voir Fig. 41-C2). De plus, il inconcevable que les deux anciennes plates-formes d'abrasion marine, étagées, aient été engendrées au cours de la même transgression, puisque la genèse d'une plate-forme d'abrasion marine se réalise pendant la phase initiale d'une transgression, et que son recouvrement sous une épaisseur de plusieurs mètres de sédiments se poursuit pendant toute la durée de la même transgression. Cette évolution ne peut donc pas se produire deux fois de suite au cours de la même transgression, puisque chacune ne comporte qu'un seul changement de vitesse permettant l'arrêt du processus d'abrasion et du recul de la falaise, alors que débute sa submersion, suivie de sa fossilisation (voir Fig. 28-B).

Enfin, sur l'interfluve (A), qui porte les points de mesure 170,23 et 162,31 m (voir Fig. 40), la présence d'une ancienne falaise fossile entre deux dépôts de terrasse est démontrée par l'intercalation d'une masse déplacée (Fig. 42), inclinée d'une trentaine de degrés vers l'aval, longue d'une dizaine de mètres et épaisse de 3 à 4 mètres. Son inclinaison conduit à l'attribuer à un mouvement de terrain. Cette masse déplacée est indurée. Elle se compose d'un banc de conglomérat à gros blocs, de soixante centimètres d'épaisseur, fortement cimenté, surmontant des sables et des graviers, consolidés (Fig. 42-B5). Elle est insérée entre les sables et les graviers, qui affleurent à 5 m en dessous du point de mesure 170,23 m, sous les silts, appartenant au dépôt de la "terrasse de tête" de TMVI (Fig. 42-B4 et Fig. 42-B1). Elle est recouverte par un autre dépôt, résultant d'un apport continental, qui se tient sous le point de mesure 162,31 m (voir Fig. 41-D5). Il apparaît donc que la masse déplacée recouvre une ancienne falaise, qui est inscrite dans les sables et les graviers, et qui est fossilisée, ainsi que la masse déplacée, sous un autre dépôt, plus récent (Fig. 42-A et 42-B5). Ce dernier ne présente pas de caractères d'apparence franchement marine. Son aspect évoque davantage un apport continental parvenu ainsi dans la mer sous forte profondeur d'eau ou avec un excès de charge solide. Il fossilise la masse déplacée et l'ancienne falaise sous-jacente, qui se prolonge vers l'ouest. Cette ancienne forme de terrain fossile, faisant face à la mer, ne saurait être attribuée au travail d'érosion d'un cours d'eau et sa fossilisation à l'apport d'alluvions à l'air libre. Cet apport n'a pas été véhiculé par un cours d'eau s'écoulant parallèlement au littoral, mais depuis son embouchure sous l'effet des courants côtiers. Il n'a pas subi de remaniement

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notable, sans doute en raison de la profondeur d'eau acquise du fait de l'augmentation de la vitesse d'élévation du niveau de la mer au cours de la transgression, empêchant l'agitation des vagues d'atteindre les sédiments en voie de dépôt.

La mise en place de cette masse indurée, basculée vers la mer, provient de deux facteurs d'instabilité. Elle résulte, en partie, de la perte de son support inférieur, à cause de l'affouil-lement des terrains meubles, qui sont surmontés par les matériaux consolidés (Fig. 42-A3). Dans ce contexte lithologique, l'érosion marine peut créer une grotte, assortie d'un surplomb, dont l'équilibre est fragile. De plus, la perte de support latéral à l’aval, en raison du recul d'une falaise vive, est de nature à entraîner la création de surfaces de rupture. Ce mouvement de terrain tient donc, pour une part, d'un écroulement, et, pour une autre, d'un glissement de terrain sensu stricto, à ceci près que la rotation de la masse basculée s'est opérée vers l'aval, à cause du surplomb. Cette évolution géomorphologique comporte le recul d'une falaise vive, qui s'est effectué pendant la phase initiale d'une transgression ; il est suivi de sa fossilisation durant les phases intermédiaire et finale de la même transgression. Le détachement de la masse déplacée se situe soit pendant le recul de la falaise vive, en phase initiale de transgression, soit au cours de sa fossilisation durant une phase suivante.

La question se pose aussi d'établir la position stratigraphique initiale des matériaux composant la masse déplacée. Le conglomérat à blocs, encroûté, évoque un "conglomérat de base". Son substrat apparaît alors comme un horizon encroûté de sables et de graviers, sous-jacent à une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, jalonnée par ce conglomérat. Le "conglomérat de base" appartient au même dépôt que celui qui repose, sous le point de mesure 170,23 m, sur les silts appartenant au dépôt (II).

IV - UNE SURFACE DE TRANSGRESSION EMBOÎTEE DANS UN DÉPÔT SUPPORTÉ PAR LA SURFACE DE TRANGRESSION PRÉCÉDENTE

L'occurrence d'une troisième transgression, intermédiaire entre les deux précédemment signalées, est plus difficile à mettre en évidence que les deux extrêmes, parce que les sédiments transgressifs correspondants (III) sont intégralement emboîtés dans le dépôt de terrasse (II), plus ancien.

Un premier indice est constitué par la présence, sur l'interfluve (C), d'un talus induré faisant face à la mer, qui ne peut être qu'une ancienne falaise subaérienne encroûtée (voir Fig. 41-E1). Elle est inscrite dans les silts blancs, analogues à ceux situés sous le point de mesure 179,43 m (Fig. 42-B1), qui appartiennent au même dépôt, dont ils représentent un "niveau repère". Cette ancienne falaise subaérienne encroûtée ne peut être que la partie émergée d'un ensemble comportant une ancienne falaise fossile, ainsi qu'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, associées l'une à l'autre dans un même surface de transgression. Ces anciennes formes de terrain fossiles ne peuvent pas être celles qui ont été précédemment repérées (voir Fig. 41-D), puisque l'ancienne falaise subaérienne encroûtée se situe à peu près à mi-chemin entre deux anciennes falaise fossiles, à une trentaine de mètres en amont de celle qui est inscrite dans les grès du Miocène et fossilisée sous le dépôt (IV). Elle en est ainsi trop éloignée pour en constituer le prolongement subaérien. La présence de

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cette ancienne falaise subaérienne invite à rechercher une ancienne plate-forme d'abrasion marine correspondante et le conglomérat de base, corrélatif de son façonnement.

De fait, un tel dépôt conglomératique affleure sur l'interfluve (C), qui porte le point de mesure 164,23 m, à mi-chemin entre les deux anciennes falaises fossiles précédemment repérées. Il repose en contrebas de l'ancienne falaise subaérienne encroûtée (voir Fig. 41-E1). Il se compose d'un banc de petits galets émoussés suivi, en amont, d'un lit de galets et de blocs (voir Fig. 41-E2), qui s'élève jusqu'à l'altitude de 166,33 m. Il repose sur une surface de discontinuité, qui le sépare d'un dépôt très différent, d'âge antérieur. Cette discontinuité stratigraphique, de profil rectiligne et dont la pente est au maximum de 10°, peut se définir comme étant une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile. Elle est parvenue à son bord interne, avec une pente relativement forte, à une date proche de son achèvement et de la fin du recul de la falaise vive qui lui était associée. Cette ancienne falaise, après sa fossilisation, se situe dans le prolongement vers le bas de l'ancienne falaise non submergée et encroûtée (voir Fig. 41-E1).

Le banc de petits galets repose sur des matériaux mal classés (voir Fig. 41-E2), dont un bloc de gneiss, peu émoussés et dénués de litage. Pourtant ce sédiment sous-jacent s'est indiscutablement mis en place en milieu marin, car il est intercalé entre des silts sus-jacents et un "conglomérat de base". Force est donc d'attribuer sa mise en place à un épisode trans-gressif, intervenu alors que l'effet de l'agitation des vagues sur les caractères des sédiments avait cessé de jouer, en raison d'une augmentation de la profondeur d'eau, provoquée par un accroissement de la vitesse d'élévation du niveau de la mer au cours de la transgression.

Le même banc de petits galets est surmonté par un sable altéré, plus épais, contenant des galets de quartz, dispersés dans sa masse (Fig. 42-E2). Ce sédiment sus-jacent est à la fois relativement hétérométrique et dépourvu de litage, au risque de passer pour un dépôt colluvial mis en place à l'air libre après l'accumulation d'un dépôt de galets de plage inscrit dans un sédiment antérieur. Certes, ce sédiment supérieur ne présente donc pas tous les attributs attendus d'un matériau qui aurait été soumis à l'agitation des vagues. Mais il en est encore plus du sédiment inférieur, affleurant au-dessous du banc de petits galets intermédiaires (Fig. 41-E2). De fait, l'attribution à une accumulation colluviale du sable altéré à galets épars, surmontant le banc de petits galets se heurte à plusieurs objections :

- Elle est contredite par la nature silteuse du dépôt dans lequel est inscrite l'ancienne falaise subaérienne encroûtée (Fig. 41-E1), dont la dégradation ne saurait donc avoir alimenté le sédiment sableux contenant des galets.

- Elle est également infirmée par la distance d'une trentaine de mètres (voir Fig. 41-D) à l'amont de l'ancienne falaise fossile supportant le dépôt marin situé sous le point de mesure 164,23 m, si bien qu'il ne peut pas représenter le dépôt de pente recouvrant une ancienne falaise subaérienne correspondante.

- De fait, sous ce point de mesure, à 1 m de profondeur en dessous de la surface, les sables altérés présentent un encroûtement lamellaire d'épaisseur décimétrique (voir Fig. 41-E3), qui témoigne d'une émersion. Les sables sus-jacents sont colluvionnés. Ils ont été "resédi-mentés" par un ruissellement, sans doute, comme souvent après un épisode d'érosion en rapport avec la régression ayant engendré cette émersion. La présence avérée de cette couverture colluviale d'épaisseur métrique est à prendre en compte dans la mesure de l'alti-tude à laquelle a été portée une ancienne ligne de rivage de haut niveau qu'elle recouvre. Sauf à envisager aussi une érosion, s'exerçant aux dépens des sables marins altérés, et fai-sant disparaître tout indice d'un maximum eustatique, avant la mise en place des colluvions.

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Cette accumulation continentale se traduit par un profil en pente faible, passant progressi-vement à celui d'un "glacis" colluvial de raccord.

- En revanche, le sable marin altéré appartenant au dépôt (IV) repose sur un banc conglo-mératique, sans trace d'un épisode d'émersion intermédiaire, signalé par un encroûtement (voir Fig. 41-E3) ou par une figure de ravinement (voir Fig. 9). Le sable marin altéré contenant manifestement des "fantômes" de galets carbonatés (Fig. 41-E1), il ne serait donc pas surprenant qu'un sable marin faisant partie du dépôt (III) contienne des galets de quartz épars, sans être pour autant d'origine colluviale.

- Au demeurant, la dégradation des anciennes falaises subaériennes, qui ont échappé à la submersion, et dont la dénivellation est beaucoup plus faible que celle des anciennes falaises fossilisées pendant le milieu et la fin de la transgression, n'est pas en mesure de fournir un gros volume de matériaux capable de nourrir d'épaisses colluvions.

- De plus, l'interfluve (B), portant le point de mesure 170,61 m (voir Fig. 40), emprunté par la route forestière, comporte une vaste ancienne plate-forme encroûtée, observable au sommet de son bord oriental, sous ce point de mesure (Fig. 43-B), en position intermédiaire entre le bas de l'ancienne falaise subaérienne encroûtée entaillée dans les silts (Fig. 41-E1) et le sommet du dépôt (IV), qui se tient sous le point de mesure 164,23 m. L'étendue de cette plate-forme (Fig. 43-B) et son absence de concavité militent en faveur de son origine marine (une ancienne plate-forme d'accumulation marine encroûtée), plutôt que d'une origine colluviale (voir Fig. 11).

- Enfin, il existe, sous le point de mesure 170,23 m (Fig. 42-B3), un dépôt, fortement induré, de position intermédiaire entre celui qui culmine sous le point de mesure 179,43 m (Fig. 42-B1) et celui qui se tient sous le point de mesure 162,31 m (Fig. 42-B5). Ce dépôt (III) est situé plus bas que le conglomérat (179,43 m) reposant sur les silts au sommet du dépôt (II). Il est donc lui aussi emboîté dans ce dernier. De fait, il affleure, lui aussi, en contrebas d'une ancienne falaise subaérienne, inscrite dans les silts blancs, et encroûtée. Cette ancienne falaise subaérienne encroûtée est visible au-dessus du chemin à l'ouest de l'affleurement du dépôt (II). Elle est comparable à celle observée (Fig. 41) à 500 m à l'est, sur l'interfluve (C) qui porte le point de mesure 164.23 m.

Le dépôt induré (III) qui se tient sous le point de mesure 170,23 (Fig. 42-B2), présente un litage et il est constitué principalement de grains de la taille des silts ("siltites"), à l'exception de quelques galets. Il diffère ainsi de celui (dépôt IV) qui affleure, quelque 8 m plus bas, sous le point de mesure 162,31 m (Fig. 42-B5) et qui présente des caractères d'un apport conti-nental déversé dans la mer et ayant échappé à l'agitation des vagues. Il se localise à l'amont de l'ancienne falaise, qui a délivré la masse glissée et qui est fossilisée par le dépôt (IV). De plus, en s'interrogeant sur la position originelle des matériaux qui constituent la masse glissée (Fig. Fig. 42-A2 et 42-A3), avant leur déplacement, l'idée se dégage de l'existence, à sa partie supérieure, d'un "conglomérat de base" encroûté à gros blocs, surmontant une ancienne plate-forme d'abrasion marine inscrite dans les sables et graviers du dépôt (II), encroûté lui aussi, sous cette surface d'aplanissement. Ici, les encroûtements affectent sans aucun doute des topographies quelconques, mais il cachètent aussi des formes de terrain singulières, comme d'anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles, mais aussi d'anciennes falaises subaé-riennes ou d'anciennes plates-formes d'accumulation marine, dont les vestiges ont donc été exceptionnellement préservés des érosions et de l'aménagement de terrasses de culture sous les points de mesure 179,43 ou 170.23 m et, encore plus largement, sous le point de mesure 170,61 m.

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Ainsi le dépôt (III) ne peut que fossiliser lui aussi une ancienne falaise intercalée entre l'ancienne falaise subaérienne encroûtée (Fig. 41-E1) et le bord interne de l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (Fig. 41-E2), qui appartient à la même surface de transgression, Le point de mesure 166,36 m se trouve sur leur point de jonction. L'agencement des deux surfaces de transgression, supportant respectivement les dépôts (II) et (III), n'est pas sans analogie avec l'emboîtement du dépôt de la terrasse IIb dans celui de la terrasse IIa à Tewai (Fig. 41-C2).

V - TROIS CONCLUSIONS FONDAMENTALES

1 ) D'anciennes formes de terrain subaériennes et fossiles, délivrant un enregistrement des variations du niveau de la mer

Au total, la reconnaissance des anciennes formes de terrain fossiles permet d'identifier quatre unités stratigraphiques distinctes ou dépôts de terrasse successifs, dont elles constituent les limites stratigraphiques profondes. Sur ces coupes, la géomorphologie de surface contri-bue à la recherche de chaque unité stratigraphique distincte, grâce aux encroûtements carbonatés qui ont protégé d'anciennes plates-formes d'accumulation et d'anciennes falaises subaériennes des atteintes de l'érosion et des hommes. Toutefois l'analyse géomorphologique intervient plus largement sur ces coupes dans la procédure de mise en évidence des variations du niveau de la mer, grâce à la détection des anciennes plates-formes d'abrasion marine et des anciennes falaises qui constituent, ici, les surfaces de transgression supportant les sédiments marins.

2 ) D'anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles dont le façonnement ne s'est pas effectué pendant un maximum eustatique

Contrairement à une opinion souvent exprimée (L. CUCCI, 2004 ; M. SAILLARD et al.,2009 ; etc.), les anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles n'ont pas été façonnées pendant une maximum eustatique. Mais elles l'ont été, en même temps que le recul d'une falaise, au cours de la phase initiale d'une transgression. C'est alors qu'a pris fin le processus d'abrasion et le recul de la falaise, suivi de sa fossilisation partielle sous des sédiments marins transgressifs jusqu'au terme de la transgression. Le recouvrement de la falaise n'est pas systé-matiquement imputable à un dépôt continental, dérivant de sa dégradation à l'air libre. Le recours à des matériaux de projection, mis en place sur un haut de plage lors de vagues de tempête, contre la paroi d'une falaise, est problématique au delà d'un haut niveau s'y accolant.

3 ) Des variations du niveau de la mer de fréquences suborbitales

Une distance de 150 m sépare les deux extrêmes des quatre anciennes falaises fossiles successives décelées en tête de la "terrasse majeure" TMVI, principalement attribuée à MISS 5.5 (Fig. 41 et 42). Cette distance ne représente que 15 % de la largeur d'environ 1000 m, de cette "terrasse majeure" dans le secteur du Capo dell'Armi. Cette proportion est à rapprocher de celle calculée sur les 15 cm de profondeur de forage, que comporte l'intervalle compris

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entre les quatre oscillations de la courbe eustatique KL11 à haute résolution (E.J. ROHLINGet al., 2007). De fait, cet intervalle de 15 cm représente 16 % de la profondeur de 92 cm de forage, enregistrée pendant la période orbitale, de l'ordre de 20 ka, incluse entre le maximum culminant du MISS 5.5 et celui du MISS 5.3 (voir Fig. 33-A). Il est à penser que le taux de soulèvement élevé (1,3 à 1,4 m/ka) a permis la mise hors d'eau'' d'autres "terrasses mineures" ayant été enregistrées en contrebas.

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Partie II - Chapitre III

Trois surfaces de transgression successives, chacune composée d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine et d'une ancienne falaise fossile, sont identifiables en rive droite du vallon issu du hameau de Campo Piale, à l'est de Villa San Giovanni (Fig. 44), dans le tiers inférieur de la "terrasse majeure" TMVI, attribuée aux MISS 5.5 et 5.4. Ces anciennes formes de terrain fossiles, complémentaires, sur lesquelles repose chaque dépôt de terrasse, repré-sente leurs limites stratigraphiques profondes, qu'il s'agisse des limites inférieures ou des limites latérales. En revanche, les limites stratigraphiques superficielles de ces dépôts ont été trop fortement perturbées par l'aménagement de terrasses de culture pour que l'analyse géomorphologique des anciennes formes de terrain subaériennes puisse suffire à mettre en évidence des variations du niveau de la mer.

I - LE BORD EXTERNE D'UNE ANCIENNE PLATE-FORME D'ABRASION MARINE FOSSILE

La plus ancienne (ST1) apparaît seulement, en position distale, sur la coupe qui se trouve en dessous du point de mesure 133,5 m (Fig. 45), à l'altitude de 130,1 m, qui est celle du bord externe d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile. Elle est découpée dans des couches progradantes attribuées au "conglomérat de Messine" et elle est recouverte par un dépôt conglomératique, discordant.

II - UNE SURFACE DE TRANSGRESSION COMPORTANT UNE ANCIENNE FALAISE FOSSILE RECOUPANT LE BORD EXTERNE D'UNE ANCIENNE PLATE-FORME D'ABRASION MARINE PRÉCÉDENTE

Cette ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile est recoupée par une ancienne falaise fossile, à laquelle est associée une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, qui fait partie de la même surface de transgression (ST2) (Fig. 45). Cette ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile se tient, en bord interne, à l'altitude de 128,5 m. Elle se retrouve, sous le point de mesure 126,5 m, à 25 m en aval. La pente de la plate-forme d'abrasion marine est donc de 8 %, soit 4 à 5°, entre ces deux points de mesure, une valeur commune à son

Partie II - Chapitre III

TROIS SURFACES DE TRANSGRESSION, VOIRE QUATRE, DANS LE TIERS SUPÉRIEUR DE LA "TERRASE MAJEURE"

TMVI, ATTRIBUÉ À UNE PETITE PARTIE DU DERNIER INTERGLACIAIRE, EN RIVE DROITE DU VALLON DE

CAMPO PIALE, À L'EST DE VILLA SAN GIOVANNI

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A - Cliché panoramique.

A. Cliché panoramique. Entre 120 et 135 m d'altitude, le tiers inférieur de la "terrasse majeure" TMVI, attribuée aux sous-stades 5.5 et 5.4, est découpée en terrasses de culture, qui rendent quasiment impraticable l'analyse des anciennes formes de terrain originelles de surface.

Figure 44 - Plusieurs surfaces de transgression dans le tiers inférieur de la "terrasse majeure" TMVI, terrasses de culture et dépôts de terrasse, en Calabre méridionale, sur la bordure orientale du Détroit de Messine, en rive gauche

du vallon de Campo Piale, à l'est de Villa San Giovanni. 126

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B - Profil stratigraphique sommaire.

B. Profil. Les affleurements de rive droite du vallon permettent, en revanche, d'avoir recours aux anciennes formes de terrain fossiles, sur lesquelles reposent les dépôtssuccessifs. L'individualisation de trois, voire quatre, anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles (2a), étagées entre 114,4 et 130,1m d'altitude, et de plusieurs des anciennes falaises fossiles (2b) correspondantes, amènent à distinguer trois, voire quatre, unités stratigraphiques successives [(I) à (IV)], reposant sur des surfaces de transgression distinctes (ST), inscrites dans des couches progradantes du "conglomérat de Messine" (CgM), sans avoir à passer par une analyse géomorphologique de surface. de 117,5m et 130,8m, indiquées en caractères gras, ont été obtenues au théodolite. Les autres chiffres figurant en caractères gras renvoient aux figures 45 et 46 ci-après.

Figure 44 - Suite.

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Figure 45 - Une surface de transgression, composée d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile et d'une ancienne falaise fossile, recoupant une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, d'âge antérieur, et le dépôt qu'elle supporte, en Calabre

méridionale, sur la bordure orientale du Détroit de Messine, sur le versant nord du vallon de Campo Piale, à l'est de Villa San Giovanni.

A - Point de jonction, à 128,50 m, entre une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile et l'ancienne falaise fossile qui lui est associée.

B - Mesure de l'altitude de l'ancienne plate-forme d'abrasion marine sous le site de mesure 130,84 m.

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Figure 45 - Suite 1.

D. Dépôt clinostratifié, de position proximale, provenant de la dégradation de la pente d'une ancienne falaise en cours de fossilisation, sans possibilité de remaniement par l'agitation des vagues sous forte profondeur d'eau.

C. Couches subhorizontales de sables et graviers, "aggradantes" contre la paroi, inclinée de 65 à 70°, d'une ancienne falaise fossile.

Voir la légende des figures 45-A et 45-B.

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Une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), dont le bord externe se situe sur le point de mesure 130,10 m, et sur laquelle repose un dépôt conglomératique (Cg), est recoupée par une ancienne falaise fossile (2b) associée à une autre ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a). Cette association représente une surface de transgression (ST2), supportant une autre unité stratigraphique (II), constitué d'un autre dépôt conglomératique (Cg), puis de sable (Sm). Un banc de gravier (Gr), de 30 cm d'épaisseur, est intercalé dans le sable (Sm). Il s'applique distinctement (Fig. 45-D) contre un segment de l'ancienne falaise fossile, séparant ainsi deux dépôts distincts (I) et (II), l'un et l'autre, postérieurs à des couches progradantes du "conglomérat de Messine" (CgM). La dénivellation entre deux anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles (2a et 2a) est de 1,60 m, seulement, le bord interne de la seconde se trouvant sous le site de mesure 128,50m (Fig. 45-B). La surface topographique est dépourvue du prolongement subaérien de cette ancienne falaise fossile, parce que cette topographie est formée d'une terrasse de culture. La création de cette terrasse de culture a eu pour effet d'aplanir le terrain, ce qui empêche d'identifier le point de jonction, triple, entre une ancienne plate-forme d'accumulation marine, non affectée par cette anthropisation, une ancienne falaise subaérienne et une ancienne falaise fossile. L'absence de ce point de jonction interdit la détection de la position précise d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau. La pente de l'ancienne plate-forme d'abrasion marine (2a) est de 7,8 %, soit 4 à 5°, entre les points de mesure 126,50m (Fig. 45-A) et 128,50m (Fig. 45-B), distant de 25 m, sur son bord interne. La pente de l'ancienne falaise fossile (2b) est de l'ordre de 65 à 70°. Le point de jonction entre l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a) et l'ancienne falaise fossile (2b), qui font partie de la même surface de transgression (ST2), est aisément identifiable à l'affleurement, grâce à la différence brutale d'angle de pente entre ces deux anciennes formes de terrain complémentaires. Il se tient sur le site de mesure 128,50m. Ce point de mesure représente l'emplacement d'une ancienne ligne de rivage, à la date où cette plate-forme d'abrasion marine a cessé de s'étendre activement vers l'intérieur des terres, et où le recul de la falaise vive correspondante s'est achevé, alors que pouvait débuter sa fossilisation. Cette ancienne ligne de rivage occupe une position intermédiaire entre celle d'un bas niveau, où débutent l'abrasion et la sédimentation, et celle d'un haut niveau marin, où se termine l'accumulation des sédiments transgressifs. Cette interruption du processus d'abrasion se situe entre le minimum eustatique et le maximum de vitesse d'élévation du niveau de la mer au cours de la transgression. Il constitue un enregistrement géomorphologique d'un changement de vitesse, unique et décisif, au cours de l'histoire de cette transgression, celui où l'augmentation de cette vitesse et l'accroissement de la profondeur d'eau qu'elle entraîne, interdit à l'agitation des vagues d'atteindre le fond de la mer, comme précédemment. L'augmentation de la profondeur est attestée par la succession granulométrique décroissante entre un "conglomérat de base" (Cg) et des sables sus-jacents (Sm). La préservation des lits inclinés d'un dépôt de gravité, provenant de la dégradation de la falaise et lui empruntant des galets, où elle est inscrite, témoigne également d'une profondeur d'eau impliquant une absence d'agitation des vagues. De fait, au-dessus du niveau de pénétration des vagues, ces matériaux auraient été immanquablement étalés en lits proches de l'horizontale, au lieu de conserver leur clinostratification (Fig. 45-C). La valeur de l' "épaisseur caractéristique" (7 m), calculée entre les sites de mesure 126,5 m (point A) et 133,50m (point B) délivre une évaluation a minima de l'amplitude de la transgression. S'y ajoute l'amplitude du soulèvement, survenu pendant le même temps, et celle de l'érosion naturelle (au point A) et anthropique (au point B), ayant raccourci les deux extrémités de la surface de transgression. Cette amplitude est faible. Elle est plus proche de celles, de fréquences suborbitales, enregistrée pendant une partie de MISS 5.5 sur la courbe eustatique KL11 (E.J. ROHLING et al., 2008, figure 1b), que de celle attribuée à MISS 5e, dans des publications antérieures (K. LAMBECK et al., 2002, figure 2 ; K.B. CUTLER et al., 2003, figure 5).

Figure 45 - Suite 2.

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approche d'une ancienne falaise. Elle se prolonge encore au delà de ce dernier point de mesure, en direction de la mer, sans qu'il soit toutefois possible de la suivre, à cause de la végétation qui la recouvre, jusqu'à un point de recoupement avec une ancienne falaise de bord externe.

L'ancienne falaise fossile présente une très forte pente, de l'ordre de 65 à 70°. Son point de jonction, à 128,5 m d'altitude, avec l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, dont la pente est de l'ordre de 4 à 5°, sur son bord interne, dessine un angle net (shoreline angle). Elle est taillée, dans sa partie basse, sur une hauteur de 1,60 m, dans les mêmes couches progradantes du "conglomérat de Messine" que les deux anciennes plates-formes d'abrasion marine qu'elle sépare l'une de l'autre. Elle se poursuit vers le haut entre un sable comportant un banc de graviers de trente centimètres d'épaisseur et le "conglomérat de base" qui se tient sur le point de mesure 130,1 m, point d'intersection entre une ancienne falaise fossile et une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile d'âge antérieur. Ce sable et cette intercalation de graviers subhorizontale font figure de couches "aggradantes", qui se sont empilées vertica-lement contre la paroi d'une ancienne falaise en forte pente, alors que son recul avait pris fin et que se déroulait sa fossilisation.

L'ancienne plate-forme d'abrasion marine de ST2 est recouverte par un dépôt conglomé-ratique discordant, de 1 m d'épaisseur, qui comporte à sa base un lit sporadique de galets plus grossiers qu'au-dessus et un bloc de gneiss arrondi. Ce "conglomérat de base" est surmonté par des sédiments de granulométrie plus fine, non fossilifères, de la taille des sables.

Il ne fait pas de doute que le dépôt (II) est à distinguer du dépôt (I), et qu'ils constituent deux unités stratigraphiques successives. Ainsi la mise en place des dépôts (I) et (II) ne résulte pas d'une seule transgression, comme si celle du dépôt (II) avait précédé celle du dépôt (I), "débordant" au delà d'une ancienne falaise uniquement inscrite dans des couches progradantes du "conglomérat de Messine". Elle s'est produite, au contraire, au cours de deux transgres-sions successives entraînant l'accumulation de deux unités stratigraphiques distinctes. De fait, il pourrait difficilement en être autrement, puisque le façonnement d'une plate-forme d'abra-sion marine, recouverte de plusieurs mètres de sédiments, ne peut avoir eu lieu, sous faible profondeur d'eau, que pendant la seule phase initiale d'une transgression. Cela implique que chacune de ces plates-formes ne peut avoir été engendrée qu'à la faveur d'une transgression distincte de celle qui l'a précédée et de celle qui lui a fait suite.

Bien qu'il soit peu épais, le dépôt (II) n'a pas pu être mis en place par le seul jeu de processus littoraux combinant une érosion, descendant jusqu'à la profondeur des brisants, et une accumulation, se poursuivant jusqu'à la hauteur de la limite supérieure du jet de rive ou des projections de sable lors de vagues de tempête, à la date d'un maximum eustatique. En effet, le niveau de la mer s'arrête sur le point de mesure 128,5 m, en position de haut niveau marin. La fossilisation s'est effectuée pendant une élévation du niveau de la mer, qui a fait suite au changement de vitesse qui s'est produit entre le début de la transgression et son maximum de vitesse. L'augmentation de la profondeur d'eau a empêché l'agitation des vagues d'atteindre le fond marin, où s'exerce le processus d'abrasion.

L'"épaisseur caractéristique" de ce dépôt, entre son point (A) le plus bas connu (126,5 m) et son point (B) le plus haut connu, sous le point de mesure 133,5 m, est seulement de l'ordre de 7 m, compte tenu du nivellement opéré lors de l'aménagement d'une terrasse de culture. Cette "épaisseur caractéristique" représente une évaluation a minima de l'amplitude de la transgression correspondante. Le déclenchement du processus d'abrasion et la fin de la

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sédimentation ne sont donc pas dus à la succession de deux épisodes de soulèvement cosismique de dates rapprochées, mais ils représentent le début et la fin d'une transgression d'origine glacio-eustatique de haute fréquence.

Les sédiments transgressifs recouvrant l'ancienne falaise comportent un dépôt clino-stratifié (Fig. 45) au sommet du conglomérat, juste avant le passage aux sables sus-jacents. Ce dépôt se trouve en position proximale. L'angle de pente évoque une mise en place par un processus de gravité. L'inclinaison est sensiblement la même que celle des couches progra-dantes, sous-jacentes, du "conglomérat de Messine", en position distale dans une structure en Gilbert delta. La mise en place de ces dernières provient d'un processus de gravité, qui s'exerce sur un talus de progradation au fur et à mesure qu'elles progressent vers un bassin où elles finissent par se déverser en fin de régression. Ici, au contraire, le même processus de gravité est en rapport avec la dégradation de l'ancienne falaise, en cours de submersion puis de fossilisation pendant une partie de la transgression. Ces matériaux ont pu se mettre en place sous forte profondeur d'eau, l'élévation du niveau de la mer progressant à vitesse rapide, de sorte qu'ils ont échappé à l'action des vagues, qui n'aurait pas manqué de les étaler en strates subhorizontales ou entrecroisées si elles avaient encore pu atteindre le fond de la mer comme en phase initiale de transgression. Les galets émoussés proviennent du "conglomérat de base" reposant sur le point de mesure 130,1 m.

III - UNE ANCIENNE PLATE-FORME D'ABRASION MARINE FOSSILE ET UN SEGMENT SUPÉRIEUR IDENTIFIABLE D'UNE ANCIENNE FALAISE FOSSILE

Une troisième surface de transgression (ST3) est également repérable, grâce à l'identi-fication d'une partie des anciennes formes de terrain fossiles en rapport avec une érosion marine, qui supportent les sédiments transgressifs d'une troisième unité stratigraphique (dépôt III).

Ainsi la trace du profil d'une ancienne falaise fossile est reconnaissable, à proximité seulement de la surface, entre des sables de teinte brune et une alternance de sables et de silts, de couleur rougeâtre (Fig. 46). Les silts, poreux, retiennent mieux l'eau que les sables, filtrants, et leur teinte apparaît plus sombre.

De plus, les sables et les silts de couleur rougeâtre présentent des couches inclinées de 5 à 6° sous la surface topographique (Fig. 46). Cette disposition des couches en toplap à leur terminaison supérieure invite à les attribuer à un ensemble de sédiments régressifs mis en place après que la courbe eustatique soit passée par son maximum d'amplitude, à la date d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau. En revanche, la détection de celle-ci est compromise, faute de prolongement subaérien au-dessus de l'ancienne falaise fossile (voir Fig. 67), en raison du nivellement opéré lors de l'aménagement d'une terrasse de culture.

Au-dessous de ces couches faiblement inclinées, affleurent encore des sables, sous le site de mesure 128,6 m, jusqu'à l'altitude de 121,0 m, où ils cèdent la place à un conglomérat dont la base visible se situe à 119,3 m d'altitude. Le reste du dépôt est masqué par la végétation (Fig. 46). Plus en aval, au delà d'un changement de direction du cours d'eau drainant le vallon, la base de ce conglomérat repose sur une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile,

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A - Cliché panoramique entre les sites de mesure 128,60 et 130,84 m.

Figure 46 - Trace d'une ancienne falaise fossile, en Calabre méridionale, sur la bordure orientale du Détroit de Messine, sur le versant nord du vallon de Campo Piale, à l'est de Villa San Giovanni.

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A. La trace du profil d'une ancienne falaise fossile (2b) est décelable entre un dépôt (II) sableux (Sm), de teinte brun clair, et un autre dépôt (III) comportant une alternance de sables (Sm) et de silts (St) altérés de couleur rougeâtre, plus ou moins sombres selon la porosité et la teneur en eau de ces deux sédiments. Ces derniers présentent des couches inclinées de 5 à 6°, disposées en toplap, sous la surface topographique, ce qui témoigne de leur appartenance à un ensemble de sédiments régressifs. L'ancienne falaise fossile (2b) ne comporte pas, ici non plus, de prolongement subaérien, en raison de l'aménagement de terrasses de culture. Le talus de terrasse, qui se trouve à quelques mètres en amont, au-dessus du poteau, est creusé dans les sables (Sm) à sa base et il recouvert d'apports anthropiques sableux à son sommet. Le poteau indique la verticale. La base de l'ancienne falaise fossile est masquée par la végétation, de même que celle du conglomérat (Cg) à l'aval. Le sommet de ce dernier, sous les sables, se trouve à 121 m d'altitude. La base visible du conglomérat, avant d'être masquée par la végétation, est à 119,2m. Ce conglomérat se trouve donc à une altitude inférieure à celle de l'ancienne plate-forme d'abrasion marine (2a), inscrite, à 126,5m dans le "conglomérat de Messine" (CgM), 36 m en amont (Fig. 46-B). B. En l'absence d'affleurements continus entre les sites de mesure de surface 133,5m et 128,6m, il est impossible de suivre, en profondeur et en continu, l'agencement complet des anciennes formes de terrain fossiles et des dépôts qu'elles supportent. Toutefois une colonne stratigraphique (1) peut être établie sous le point de mesure 128,6m, jusqu'à l'altitude de 119,2m, sans atteindre encore cependant la base du dépôt conglomératique (Cg), visible, en aval, à 118,5 m d'altitude, à une dizaine de mètres à l'ouest de ce cliché (voir Fig. 44). Cette colonne stratigraphique peut être comparée avec le profil stratigraphique (2), plus complet, établi au-dessus des points de mesure 128,5m et 126,5m (voir Fig. 45). Il apparaît alors que les sédiments, qui se trouvent de part et d'autre de la trace, proche de la surface, d'une ancienne falaise fossile (2b), diffèrent par leur composition et par leur inclinaison. Il apparaît, aussi, que la pente nécessaire pour assurer le raccord entre les points de mesure 126,5m et 119,2m est excessive (20 %, soit 11 à 12°) pour être celle d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, alors que celle qui affleure, entre 126,5m et 128,5m d'altitude, en bord interne, là où la pente est généralement la plus forte, n'est que de 8 % (soit 4 à 5° seulement). Ces observations conduisent à attribuer cette pente à l'existence d'une ancienne falaise fossile (2b), en pente encore plus forte, se trouvant dans le prolongement vers le bas de la trace observée à proximité de la surface, jusqu'à son point de jonction avec une ancienne plate-forme d'abrasion marine, d'âge postérieure à celles affleurant en amont (2a et 2a). Pour rejeter cette conclusion, il faudrait supposer que la surface de transgression soit d'origine indéterminée, alors qu'elle est due ici à une érosion exercée par la mer au cours du premier temps d'une transgression. Au demeurant, il est stratigraphiquement inconcevable que le "conglomérat de base", qui repose sur les points de mesure 128,5m et 126,5m, et qui s'est mis en place en début de transgression, puisse faire passage latéralement, sous le point de mesure 128,6m, d'altitude analogue, à des sédiments régressifs, présentant une alternance de matériaux sableux et silteux, disposés, caractéristiquement, en toplap.

Figure 46 - Suite. 134

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inscrite elle aussi dans les couches progradantes du "conglomérat de Messine". Elle est la troisième reconnaissable sur cette coupe. Elle a été mesurée à l'altitude de 118,5 m. Ces valeurs sont très inférieures à la plus basse (126,5 m) de celles obtenues sur l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a) qui supporte le dépôt (II). La différence d'altitude résulte de l'interposition de l'ancienne falaise fossile, dont la trace est évidente à proximité de la surface topographique, mais qui se perd dans sa partie inférieure sous la végétation. Toutefois la difficulté que représente ce hiatus, dû la densité de la couverture végétale, entre la partie de 25 m de long comprise entre les points de mesure 128,5 et 126,5 m et la colonne stratigra-phique établie à 36 m de distance, en aval du point de mesure 128,60 m, peut être surmontée.

En effet, le raccord à dessiner entre les points de mesure 126,5 m (sous le site de mesure 130,84 m) et 119,2 m (point le plus bas où il est possible d'observer le dépôt conglomératique de base sous le site de mesure 128,6 m) impose une pente de 20 % (soit 11-12°). Cette pente est très supérieure à celle de la plate-forme d'abrasion marine qui se tient entre les points de mesure 128,5 et 126,5 m (8 %, soit 4 à 5°), pourtant située sur bord interne, là où elle est généralement la plus forte. En fait, la paroi de l'ancienne falaise fossile masquée par la végé-tation, se situe dans le prolongement vers le bas de sa trace visible près de la surface, entre des couches sablo-silteuses de teinte rougeâtre, plus altérées que le sable qui affleure en haut et en amont de la même coupe, car plus proches de la surface.

De plus, le "conglomérat de base", qui affleure au-dessus des points de mesure 128,5 et 126,5 m, se tient dans une tranche d'altitude semblable à celle occupée par des couches sablo-silteuses inclinées de 5°, sous le site de mesure 128,6 m, qui se trouve sur la surface topogra-phique actuelle. Or ce "conglomérat de base", suivi d'un sable subhorizontal, repose en onlap,entre les points de mesure 128,5 et 126,5 m, sur une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, de pente plus forte que celle des couches constituant sa couverture. Cette disposition des couches, à leur terminaison inférieure, est caractéristique de celle des premiers sédiments transgressifs ("Intervalle Transgressif, IT", dans la terminologie de la stratigraphie séquen-tielle). Inversement, les couches sablo-silteuses affleurant sous le site de mesure 128,6 m présentent une terminaison supérieure en toplap. Cette inclinaison (de l'ordre de 5°) à proxi-mité de la limite superficielle du dépôt est spécifique de sédiments régressifs, qui se sont mis en place alors que le niveau de la mer se déplaçait progressivement vers le large, en retrait d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau. Elle se prolonge communément vers le bas, dans le même "cortège sédimentaire", qualifié de "prisme de haut niveau", par des sédiments transgressifs, inclinés eux aussi jusqu'à l'apparition d'une surface dite "d'inondation maxi-male" (SIM = MFS, maximum flooding surface). Sur la colonne stratigraphique, établie sous le point de mesure 128,60 m, cette discontinuité stratigraphique se distingue mal. Pourtant il ne fait pas de doute que la surface de discontinuité granulométrique entre les sables et le conglomérat sous-jacent, est subhorizontale, alors que les sédiments sablo-silteux sus-jacents sont inclinés de 5° environ. La SIM passe entre les deux. Dans ces conditions, l'hypothèse d'un passage latéral entre un "conglomérat de base", en amont, et des sédiments régressifs, en aval, ne tient pas.

IV - ET PEUT-ÊTRE UNE QUATRIEME SURFACE DE TRANSGRESSION SOUS LE SITE DE MESURE 117,5 M

Au delà vers l'ouest, une autre surface de transgression (ST4 ?) est probablement encore

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inscrite en contrebas. En effet, une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile recoupe les couches progradantes du "conglomérat de Messine" à l'altitude de 114,4 m, à son bord externe (voir Fig. 44), en rive droite du vallon de Campo Piale, à l'ouest du replat portant le site de mesure 117,9 m. Elle est recouverte d'un dépôt, comprenant un conglomérat, puis des sables. Ce dépôt se poursuit vers l'amont, où une mesure a été prise au théodolite à 117,5 m d'altitude (voir Fig. 44) entre les sables et le conglomérat, dont la base est masquée sous la végétation. Ainsi, sur ce site de mesure, la base du dépôt ne peut être que plus basse que 117,5 m, compte tenu de l'épaisseur du "conglomérat de base", celle-ci étant de 1 m à la base du dépôt (II) (Fig. 45) et de 2,50 m à celle du dépôt (III) (Fig. 46). Dans ces conditions, le bord interne d'un dépôt (IV) se trouverait, sur ce site, à une altitude de l'ordre de 116,5 à 115 m, soit 2 à 3,5 m plus bas que l'ancienne plate-forme d'abrasion marine précédente (ST3), qui se tient à 118,50 m.

V - DE TROIS À QUATRE SURFACES DE TRANSGRESSION SUCCESSIVES

Trois surfaces de transgression et peut-être quatre ont donc été détectées en rive droite du vallon de Campo Piale. Elles ne représentent, sur ce transect, qu'une petite partie de la largeur, de l'ordre de 600 m, et de la dénivellation, de l'ordre de 60 m, de la "terrasse majeure" TMVI, attribuée aux sous-stades 5.5 et 5.4. De fait, entre le bord externe de la première, à 130,1 m, et celui de la dernière, à 114,4 m, la largeur est de 130 m et la dénivellation de 15,7 m. Ainsi la dénivellation moyenne entre deux anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles succes-sives, d'un bord externe à un autre, est-elle de 7,9 m (soit 13,1 % des 60 m de la terrasse), avec trois anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles, et de 5,2 m (8,7 % de 60 m), si ce nombre s'élevait réellement à quatre. Quant à la largeur moyenne de chaque ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, 65 ou 43 m respectivement, elle ne représente que 10,8 % ou 7,2% des 600 m de celle de la "terrasse majeure".

Ces valeurs moyennes évoquent une forte variabilité glacio-eustatique, à l'échelle du millénaire. De telles fréquences suborbitales sont incompatibles avec le dessin des courbes eustatiques, dérivées des anciennes courbes isotopiques marines à faible résolution, et davantage en accord avec celui des courbes récentes à haute résolution KL11 et KL09 (E.J. ROHLING et al., 2008).

De fait, calculés sur la partie du forage KL11 comprise entre le pic situé vers 127 ka (A.L. THOMAS et al., 2009, figure 1B) et celui (DO25 sur GRIP et GISP2 ; GIS25 sur NGRIP ; AIM25 sur EPICA Dôme C ; figure 27 – voir Fig. 33) précédant "MIS 5d glacial extreme" (C25, N.J. SHACKLETON et al., 2003), où la profondeur de ce forage est de 72 cm sur la courbe KL11, les quatre premiers maxima eustatiques inscrits sur cette courbe, correspondent à une profondeur de 15 cm de forage. Ils en constituent 21 %. De leur côté, les trois intervalles figurant entre les quatre maxima eustatiques enregistrés sur la courbe KL11, ne représentent chacun en moyenne que 7 % de la profondeur de cette partie du forage.

Or d'autres surfaces de transgression ont été identifiées dans le tiers médian de la "terrasse majeure" TMVI. De plus, il en a été détecté également dont la création et la fossili-sation se sont produites pendant la dernière déglaciation.

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Partie II - Chapitre IV

I - DES SURFACES DE TRANSGRESSION TRONQUÉES, DATANT DE L'AVANT-DERNIÈRE DÉGLACIATION (TERMINATION II)

1 ) Un agencement singulier des anciennes formes de terrain fossiles

Plusieurs surfaces de transgression apparaissent sur divers transects, où elles se compo-sent d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile et d'une ancienne falaise fossile, cette dernière étant recoupée par une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (Fig. 47), attribuable au sous-stade 5.5. Sur plusieurs de ces transects, ces anciennes formes de terrain sont inscrites dans des couches progradantes du "conglomérat de Messine". Ici, contrairement à une combinaison plus courante, c'est l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, appar-tenant à la surface de transgression la plus récente, qui tranche l'extrémité supérieure de l'ancienne falaise fossile, laquelle fait partie d'une surface de transgression antérieure. Dans le cas le plus fréquent, en effet, c'est, inversement, l'ancienne falaise fossile de la plus récente des deux surfaces de transgression qui recoupe l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile appartenant à la précédente (voir Fig. 45). L'ancienne falaise, recouverte par le dépôt (I), ne présente donc pas ici de prolongement subaérien, puisqu'elle est recoupée par une autre ancienne plate-forme d'abrasion marine, plus récente, qui supporte un autre dépôt (II), l'un des premiers, dont se composent ceux de la "terrasse majeure" TMVI.

2 ) Une évolution géomorphologique particulière

Cette évolution géomorphologique comporte la mise en place de deux unités stratigra-phiques successives, une unité inférieure, surmontée en discordance par une unité supérieure (Fig. 47, 48-B et 49). Cette surface de discordance est une surface de transgression, engendrée par une érosion. Elle se compose, elle aussi, d'une ancienne falaise fossile et d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, cette dernière recoupant une ancienne falaise fossile appartenant à une surface de transgression antérieure.

Cette évolution a pour résultat que toute la partie supérieure du dépôt le plus ancien a été enlevée par cette érosion, et avec elle les anciennes formes de terrain superficielles qui servent d'indice dans la recherche des anciennes lignes de rivage de haut niveau, au point de jonction entre une ancienne plate-forme subaérienne d'accumulation d'une terrasse marine construite et l'ancienne falaise, subaérienne et fossile, correspondante. Ainsi, sans le secours d'une ancienne plate-forme subaérienne d'accumulation marine et d'une ancienne falaise subaé-rienne en rapport avec ce premier dépôt (Fig. 48-B), il devient dès lors impossible de procé-der au repérage direct d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau ou à sa reconstruction géométrique. En conséquence, est inconnu le maximum d'amplitude de la transgression au

Partie II - Chapitre IV

D'AUTRES SURFACES DE TRANSGRESSION SOUS LE TIERS MÉDIAN DE TMVI

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cours de laquelle a été engendrée la surface de transgression qui supporte ce dépôt et pendant laquelle s'est effectué son recouvrement sédimentaire.

B - Une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), recoupant une ancienne falaise fossile (2b).

D -. Une seule unité stratigraphique, depuis les couches progradantes jusqu'aux alluvions torrentielles (d'après P. BARBIER et B. KÉRAUDREN, 1983).

Figure 47 - Une surface de transgression, composée d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile et d'une ancienne falaise fossile, recoupée par une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, sur le littoral ionien de la Calabre méridionale,

en rive droite du Vallone Catrica, au nord du Capo dell'Armi.

A - Deux anciennes plates-formes d'abrasion d'abrasion marine fossiles (2a et 2a).

C - Un ancien "glacis" colluvial (5) oblitérant le point de jonction entre une ancienne plate-forme d'accumulation marine (4a) et une ancienne falaise subaérienne (4b).

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A. Une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a) est inscrite dans des couches progradantes du "conglomérat de Messine" (CgM), qui présentent une intercalation silteuse (Ms) dans la masse principale de conglomérat (Mc). Cette plate-forme est recouverte par un premier "conglomérat de base" (Cb1 : "conglomérat inférieur"), surmonté par des sables parfois grésifiés et des silts (Sm) sur une épaisseur de 7 à 8 m (N. AMPEN, 2001), avant l'apparition d'un second banc de conglomérat (Cb2 : "conglomérat supérieur").

B. Une ancienne falaise fossile (2b) est entaillée, elle aussi, dans des couches progradantes du "conglomérat de Messine" (CgM). Elle est fossilisée par les sables et les silts (Sm). Le second banc conglomératique (Cb2)jalonne une seconde ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), qui recoupe l'ancienne falaise antérieure (2b). Un troisième dépôt (III) colmate une "poche", à l'emplacement d'un ancien vallon (1a).

C. L'ancienne plate-forme d'abrasion marine (2a) se prolonge vers l'amont, où elle s'inscrit dans le "conglomérat de Messine" (CgM) jusqu'à une ancienne falaise fossile (2b). À cette dernière, fait suite, vers le haut, une ancienne falaise subaérienne (4b), dont la partie haute est inscrite dans un dépôt de terrasse, antérieur, qui comporte à sa base un gros bloc de gneiss. Ce segment de la falaise, exposé à l'air libre, est lissé. Sa pente est de l'ordre de 16°. Elle se raccorde progressivement vers le bas à une ancienne plate-forme subaérienne d'accumulation marine (4a), par l'intermédiaire d'un "glacis" colluvial (5). Les colluvions reposent sur un horizon d'altération de teinte rougeâtre (z), qui témoigne d'une émersion, voire d'une érosion intermédiaire entre le dépôt marin in situ (Ac) et celui de sables ruisselés, colluvionnés (Sr). Le dépôt marin comprend un "conglomérat de base" (Cb2), suivi de sables (Sm), puis d'un apport continental (Ac), ayant quasiment échappé à l'agitation des vagues, par excès de charge solide ou en raison d'une profondeur d'eau trop élevée. Des placages conglo-mératiques (Cb2) affleurent en position latérale, à cause de la pénétration de la mer dans une ancienne vallée du Vallone Catrica.

D. Une autre interprétation : continuité stratigraphique entre le "conglomérat de Messine" (2) et les sédiments sus-jacents, d'après P. BARRIER et. B. KERAUDREN (1986, figure 1). Le banc de conglomérat (4) fait passage par inflexion progressive (offlap) à des couches progradantes, à la manière des topset beds passant à des foreset beds au sein d'un Gilbert-delta. Entre les points X et Y, l'origine de la discontinuité, dont la pente est de 17°, entre le conglomérat de Messine (2) et les sables (5), n'est pas évoquée. Les derniers sédiments, qui définissent une plate-forme d'accumulation, sont interprétés comme étant des alluvions, plutôt que des apports continentaux contribuant à la sédimentation marine.

Figure 47 - Suite.

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A -

A. En général, la partie supérieure du dépôt est préservée en position proximale (B), ainsi que les anciennes formes de terrain subaériennes, qui représentent les limites superficielles d'une séquence de dépôt, alors qu'elles ont disparu en position distale (A), plus exposée à l'érosion. Il est ainsi possible de déterminer l'emplacement d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau (@), au point de jonction, triple, entre une ancienne plate-forme subaérienne d'accumulation marine (4a) une ancienne falaise subaérienne (4b) et une ancienne falaise fossile (2b), correspondante, sous réserve d'une érosion ou d'un recouvrement, ultérieurs. Dans ce cas, le premier des deux hauts niveaux marins (hn) occupe une position plus élevée que le second (hn). Sur ce schéma, le dépôt (II) est entièrement emboîté dans le dépôt (I), qui le précède, parce que la position du bas niveau marin (bn), qui fait fonction de niveau de base à l'érosion, est plus haute que lors de la fin de la régression et du début de la transgression antérieure, au point de départ de l'abrasion. L'érosion a pénétré dans la zone A, qui correspond à la partie, en position distale, du dépôt antérieur, mais pas en position proximale (B), ni dans le substrat (C).

B -

B. Le dépôt (I) repose sur une surface de transgression (ST1), composée d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a) et d'une ancienne falaise fossile (2b). Il a été amputé de toute sa partie supérieure et des anciennes formes de terrain subaériennes, qui constituaient les limites superficielles d'une séquence de dépôt correspondant à une ancienne ligne de rivage de haut niveau. Cette amputation est due à la création d'une seconde surface de transgression (ST2), composée d'une falaise (2b) et d'une seconde plate-forme d'abrasion marine (2a), qui recoupe la falaise fossile antérieure (2b). Cet agencement résulte d'un maximum eustatique "précoce", dont la position est plus basse que celle du pic eustatique ultérieur. Dans ces conditions, le volume de sédiments à ôter en profondeur, lors de la phase initiale de la seconde transgression, est plus faible que dans le cas précédent. L'érosion peut se reporter, pour un même volume de matériaux à enlever, vers l'intérieur des terres, dans toute la partie proximale (B) du dépôt antérieur et même en débordant dans le substrat (C).

Figure 48 - Amputation de toute la partie supérieure d'un dépôt de terrasse, et disparition consécutive de tout indice d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau,

en raison de la succession de deux maxima eustatiques, dont la position du premier est plus basse que celle du second.

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A- Coupe de Hole in the Wall (Abaco Island, Bahamas), d'après P.J. HEARTY et al., 2007, figure 7B. Dernier Interglaciaire.

B - Coupe de rive droite du Vallone Catrica, en Calabre méridionale, sous le tiers médian de la plate-forme de la "terrasse majeure" TMVI.

A. Le dépôt récifal (Dr 1) inférieur ("lower reef") repose sur une surface de transgression (ST1) composée d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a) et d'une ancienne falaise fossile (2b). Cette dernière est recoupée par une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), qui supporte un dépôt récifal (Dr 2) supérieur ("upper reef"), lui-même surmonté de sables marins (Sm) jusqu'à une altitude de +4 m, où ces sédiments sableux constituent une ancienne plate-forme subaérienne d'accumulation marine (4a). Cette ancienne plate-forme est précédée d'une "surface structurale dérivée", établie là où le "toit" du dépôt récifal (Dr 2) a été dégagé, par érosion différentielle, des sables meubles sus-jacents (Sm). La surface de transgression ST2 est complétée par une ancienne falaise fossile (2b), qui comporte un prolongement subaérien (4b). La troncature du dépôt récifal le plus bas et le plus ancien empêche de déterminer l'altitude de l'ancienne ligne de rivage correspondante. Mais il est avéré que le dépôt récifal inférieur ("lower reef") s'est élevé jusqu'à une position supérieure à celle de la mer actuelle.

B. Une ancienne plate-forme d'abrasion marine (2a), supportant un "conglomérat supérieur" et appartenant à la surface de transgression ST2, recoupe une ancienne falaise fossile (2b), qui fait partie d'une surface de transgression antérieure (ST1) et qui est associée à une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), sur laquelle repose un "conglomérat inférieur" (voir Fig. 47). À la différence des Bahamas, la Calabre a été affectée par un soulèvement notoire, de l'ordre de 1,3 à 1,4 m/ka. Ainsi la surface de transgression (ST2), qui se tient ici vers 140 m d'altitude, 40 m plus bas qu'à la date du maximum eustatique du dernier interglaciaire, ne peut avoir été engendrée qu'en dessous de la position du niveau de la mer actuelle. Elle est à rapporter à une oscillation qui s'est produite pendant la Termination II, avant que le niveau de la mer ait alors atteint la position qu'elle occupe de nos jours.

Figure 49 - Deux exemples de troncature d'une ancienne falaise fossile par une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile appartenant à

une surface de transgression (ST) plus récente.

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3 ) Des rapports spécifiques avec l'eustatisme

Une telle évolution s'explique par la position relative des maxima eustatiques (Fig. 48). Dans l'histoire des variations du niveau de la mer, cette évolution est caractéristique d'une succession particulière de deux hauts niveaux marins successifs, dont le premier est en position plus basse que le second, sans que le soulèvement, survenu entre-temps, ait été en mesure de compenser la différence de position du niveau de la mer entre ces deux maxima. Dans ces conditions, en effet, le potentiel d'érosion marine consacrée, pendant la phase initiale d'une transgression, à l'enlèvement en profondeur d'un volume de sédiments appartenant à une unité inférieure mise en place au cours de la transgression antérieure, peut se reporter pour le même volume, en largeur, vers l'intérieur des terres, au lieu d'avoir à s'enfoncer dans l'épais-seur de ce dépôt. Il en résulte une suppression de tous les témoins de la limite supérieure de ce dépôt inférieur et de son expression topographique en géomorphologie de surface. Ne demeu-rent, comme témoignage d'une transgression distincte, que les anciennes formes de terrain fossiles, engendrées ici par une érosion marine. Restent aussi des sédiments transgressifs incomplets. Cette évolution est singulièrement plus complexe que dans l'interprétation selon laquelle le "conglomérat de Messine" et les sédiments qui le surmontent ne constituent qu'une seule unité stratigraphique (Fig. 47-D) datant du Dernier Interglaciaire.

4 ) Chronologie relative

Cette évolution a pu se produire pendant le déroulement de l'avant-dernière déglaciation ("Termination II"), où il été signalé (M. SIDDALL et al., 2006) un maximum transgressif"précoce", de position inférieure à celle du premier des maxima, attribuables au sous-stade 5.5, où le niveau de la mer (Fig. 50-A) a dépassé son altitude actuelle, vers 126 ka (C. WAELBROECK et al., 2008) ou 127 ka (A.L. THOMAS et al., 2009). Ce maximum "précoce", suivi d'une régression (M. SIDDALL et al., 2006), a été mentionné de longue date par divers auteurs dans la Péninsule de Huon (T.M. ESAT et al., 1999) et à la Barbade (C.D. GALLUP et al., 2002 ; W.G. THOMPSON et S.V. GOLDSTEIN, 2005). Il figure également sur la courbe eustatique déduite de la courbe isotopique récente à haute résolution KL11 (M. SIDDALL et al., 2006 ; A.L. THOMAS et al., 2009). Dans la Péninsule de Huon, la régression intermédiaire a été signalée à -70/-80 m d'après les échantillons de coraux, datés de 130±2 ka de la grotte d'Aladin. Une position plus élevée (-25±3 m) a été obtenue à la Barbade sur des fragments de coraux datés de 129,1 ka (C.D. GALLUP et al., 2002 ) ou 127 ka (W.G. THOMPSON et S.V. GOLDSTEIN, 2005). Deux courbes envisagent même deux "maxima précoces", le second se fondant sur la datation obtenue sur un galet corallien (NU-1473) ou sur les fragments de coraux (UWI-101). Les mêmes échantillons (UWI-101) servent à dater la régression intermédiaire (C.D. GALLUP et al., 2002 ; W.G. THOMPSON et S.V. GOLDSTEIN,2005) et le second. maximum "précoce" (C. WAELBROECK et al., 2008).

L'occurrence d'un "pic" eustatique dans le courant de la "Termination II" peut se prévaloir de l'âge et de l'altitude de prélèvement de l'échantillon NU-1471 (Siderastrea, un corail de faciès relativement profond). Mais, compte tenu du scénario (Fig. 48-B) qui se produit, lorsqu'un "pic" eustatique est suivi par un autre "pic", plus élevé, la recherche d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau est compromise, et donc l'évaluation de la position précise du niveau de la mer atteint à cette date. En effet, cette ancienne ligne de rivage n'a pas survécu à l'érosion continentale ou marine causée par l'abaissement du niveau de base qui s'est produit pendant la régression intermédiaire. À la Barbade, le dépôt rh2 (voir Fig. 34) serait tronqué par la surface de transgression, sur laquelle repose le dépôt rh3. L'agencement des dépôts

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serait analogue à celui décrit sur la coupe de rive droite du Vallone Catrica (Fig. 47 et 49-B). Cette interprétation se heurtait jusqu'à présent à l'absence d'oscillations eustatiques figurant sur les courbes eustatiques de publication antérieure à celle, récente, du segment à haute réso-lution de la courbe KL La coupe de rive droite du Vallone Catrica en apporte, au contraire, une confirmation. Celle du Serro di Giunta (Fig. 50-B) et celle de Bovetto (Fig. 50-C) donnent à penser que la "Termination II" pourrait même comporter plusieurs de ces oscil-lations

Ainsi, plus haut sur le front de taille de la carrière de Bovetto (L. BONFIGLIO, 1972 ; P.J. HEARTY, 1986 ; E. BELLOMO, 1998), deux autres niveaux conglomératiques peuvent être mis en relation avec deux oscillations glacio-eustatiques ultérieures, en rapport avec une régression faisant suite à un maximum eustatique "précoce" qui a précédé la culmination de la fin de la dernière déglaciation (Termination II). Ils se tiennent aujourd'hui respectivement à des altitudes un peu inférieure et un peu supérieure à 100 m. (Fig. 50-C). Une autre surface de transgression, privée de sa partie haute, a été signalée sur la coupe du versant oriental de l'interfluve qui porte le point de mesure 164,23 m, à l'est du Capo dell'Armi (voir Fig. 41), où l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile lui appartenant se tient vers 147 m d'altitude. Une autre de ces anciennes plates-formes, composant une autre surface de transgression, amputée elle-aussi de sa partie supérieure, se situe vers 133 m d'altitude en rive droite du Vallone Catrica (Fig. 47 et 49-B). Ces deux oscillations "précoces" ne figurent pas avec une amplitude aussi prononcée sur la courbe KL11 (Fig. 50-A).

Dans ces conditions, faute d'anciennes lignes de rivage de haut niveau, c'est l'altitude des anciennes lignes de rivage de bas niveau qui peut se prêter le mieux à une analyse des variations du niveau de la mer, car elles représentent le niveau de base des érosions qui ont engendré la surface de transgression, après déduction de l'amplitude du soulèvement. Ainsi la base des "sables à Pinna" (L. BONFIGLIO, 1972), qui se trouve de nos jours vers 70 m d'altitude après soulèvement (à un taux de 1,3 à 1,4 m/ka), correspond à un bas niveau marin de début de transgression, qui était à -120 m environ vers 142 ka, date du commencement de l'avant-dernière déglaciation (A.L. THOMAS et al., 2009, figure 1B, d'après R. BINTANJAet al., 2005).

En Calabre, comme dans la Péninsule de Huon ou à la Barbade, c'est le soulèvement qui permet d'identifier des unités stratigraphiques "précoces", datant de la Termination II, ennombre supérieur à celui enregistré aux Bahamas, où seule la dernière d'entre elles y figurent ("lower reef", "reef I", voir Fig. 36-C), juste avant le pic eustatique culminant du MISS 5.5.

Il peut sembler surprenant que des épisodes datant de la Termination II ne soient évoqués qu'à partir du tiers médian, attribué au MISS 5.5, de la "terrasse majeure" TMVI. La raison en est qu'il faut attendre que les bas niveaux marins soient redescendus assez bas, après le maximum eustatique du dernier interglaciaire, pour qu'une reprise d'érosion, déclenchée par cet abaissement du niveau de base, puisse atteindre et décapiter l'une des unités stratigraphiques profondes, rapportées à la Termination II. C'est ainsi, par exemple, que, sur la coupe de Bovetto (voir Fig. 50-C), le dépôt (III), relevant de la Termination II, celui débutantpar le conglomérat P, n'a pu être affecté par l'entaille d'une plate-forme d'abrasion, qu'à la faveur de la régression, précédant la mise en place du dépôt (IV), assigné au début du déclin de l'Eémien, vers 120 ka. À la date du début de cette régression, en effet, le niveau de la mer était redescendu en position de bas niveau, au-dessous de -10 m (voir Fig. 33-A, courbe eustatique KL09), autorisant la troncature de l'une des unités stratigraphiques profondes, mises en place entre 133 et 127 ka, alors que le niveau de la mer se tenait encore bien au-dessous du niveau de la mer actuelle (voir Fig. 50-A).

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A - Diverses courbes eustatiques portant sur le dernier interglaciaire et la Termination II.

A. Selon des données en provenance de la Péninsule de Huon, de La Barbade et de la courbe KL11, l'avant dernière déglaciation (Termination II) comporte un maximum eustatique "précoce", suivi d'une régression, précédant la date où le niveau de la mer a atteint et même dépassé sa position actuelle, au cours du Dernier Interglaciaire (MISS 5.5, Éémien). Toutefois la courbe isotopique benthique MD95-2042 suggère une structure encore plus complexe de l'avant-dernière déglaciation.

Figure 50 - Plusieurs surfaces de transgression au cours de l'avant dernière déglaciation (Termination II). 144

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B - Coupe du Serro di Giunta, Calabre méridionale, littoral ionien, au sud de la Punta di Pellaro.

B. Chaque unité stratigraphique débute par un conglomérat de base (Cb) reposant sur une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a). Deux anciennes falaises fossiles (2b) sont inscrites en "échelon refusé" dans des foreset beds du "conglo mérat de Messine" (CgM). Elles sont fossilisées par des sédiments marins, principalement sableux (Sm). La première (ST1) des surfaces de transgression est recoupée par la suivante (ST2). Elle ne présente donc pas d'indice d'ancienne ligne de rivage de haut niveau.

Figure 50 - Suite 1. 145

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B - Représentation schématique de la coupe du Serro di Giunta (Calabre méridionale, littoral ionien, au sud de la Punta di Pellaro).

Figure 50 - Suite 2. 146

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C - Coupe de la carrière de Bovetto (Calabre méridionale, bordure orientale du Détroit de Messine).

Figure 50 - Suite 3.

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C - Coupe de la carrière de Bovetto – suite.

C. La dernière des anciennes falaises fossiles, sur lesquelles reposent les dépôts (I), (II) et (III), est recoupée par la surface de transgression (ST4), sur laquelle repose le dépôt (IV). Il a été suggéré (P.J. HEARTY et al., 1986) que le conglomérat (Cb1), qui se tient entre 94 et 100 d'altitude, pouvait être indicatif du début d'une transgression. Il est l'équivalent de celui noté 6b (L. BONFIGLIO, 1972) et (I) (E. BELLOMO, 1998). Vient ensuite un autre conglomérat (Cb2), noté respectivement, 7b et (P). Plusieurs conglomérats jalonnent ainsi d'anciennes surfaces de transgression (ST), taillées dans des sédiments subhorizontaux, sans pénétrer largement dans l'intérieur des terres, chacune comportant sans doute une ancienne falaise (2b) distincte, "en échelon refusé". Plusieurs surfaces de transgression se sont inscrites au cours de l'avant dernière déglaciation, mais sans signature géomorphologique de surface. En revanche, le dépôt (IV), qui affleure sous la butte cotée 142 m, présente un témoin d'une ancienne plate-forme subaérienne d'accumulation (4a), tandis qu'une ancienne falaise fossile (2b) est observable en rive gauche du Vallone Bovetto. Ce dépôt (IV) se situe vers le milieu (120 ka ?) de ceux dont se compose la "terrasse majeure" TMVI, attribuée à MISS 5.5 et 5.4.

Figure 50 - Suite 4. 148

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II - DES SURFACES DE TRANSGRESSION SUPPORTANT DES DÉPÔTS D'ÉPAISSEUR MINEURE

À l'est de Villa San Giovanni, les coupes du versant de rive droite du Torrente Campa-nella (Fig. 51), qui résultent de l'exploitation en cours d'une carrière, comportent trois surfaces de transgression distinctes entre 155 et 140 m d'altitude environ, dans le tiers médian de la "terrasse majeure" TMVI attribuée aux sous-stades 5.5 et 5.4. Les deux extrêmes sont dus à l'érosion marine. S'y ajoute, en position intermédiaire, une autre surface de transgression, qui résulte du travail des eaux courantes opérant sur un ancien versant de vallée du Torrente Campanella.

1 ) Le bord externe d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile

De la plus ancienne (ST1) de ces trois surfaces de transgression, les coupes de rive droite du Torrente Campanella ne donnent à voir que l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, de profil rectiligne et de faible pente (de 1°, en aval, à 4° en amont). Elle est jalonnée par un lit de galets de 10 cm d'épaisseur (Fig. 52-A), suivi d'un banc de sables de 40 cm d'épaisseur, puis d'un conglomérat, qui comporte une lentille sableuse et dont l'épaisseur atteint 5 à 6 m en amont. Son bord externe se situe actuellement vers 147 m d'altitude, où il est recoupé par une autre surface de transgression, plus récente (Fig. 52-B).

Cette ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile est inscrite dans les couches progra-dantes du "conglomérat de Messine". Le "conglomérat de Messine" fossilise une ancienne vallée du Torrente Campanella, qui a été entaillée dans les granites du socle à la faveur d'une régression. Des sédiments qui ont colmaté cette ancienne vallée, depuis le début de la transgression suivante, il ne reste que ces couches progradantes. Ainsi l'érosion est-elle descendue jusqu'à recouper des foreset beds d'un Gilbert-delta, après l'avoir amputé de ses topset beds et de sa limite supérieure, constituée d'une plate-forme subaérienne d'accumu-lation marine, nous privant en conséquence de toute possibilité de détection d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau.

À la base et à l'entrée d'une autre carrière, située plus en amont de la vallée actuelle du Torrente Campanella, à la confluence de deux ravins, s'observe un passage progressif ("offlap") des couches progradantes des foreset beds à des couches subhorizontales, repré-sentant les topset beds. Dans une ancienne coupe de cette carrière, il était possible d'observer également un banc de conglomérat, contenant de gros galets et des blocs. Ce banc se trouve à l'altitude de 154,5 m, laquelle peut être interprétée comme étant celle du bord externe d'une autre ancienne plate-forme d'abrasion marine, différente de celle observée dans la carrière de rive droite, à l'altitude de 146,96 m, en bord externe également. Comme sur la coupe de rive droite du Vallone Catrica (Fig. 47 et 49-B) ou celles du Serro di Giunta (Fig. 50-B) ou de Bovetto (Fig. 50-C), la question se pose de la date de mise en place de ce dépôt, amputé de sa partie haute. Son attribution à un épisode transgressif intervenu pendant l'avant-dernière déglaciation n'est pas à exclure, pour les mêmes raisons que celles exprimées à propos de ces autres coupes.

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A - Panorama.

A. La topographie originelle est fortement perturbée par l'aménagement de terrasses de culture sur le versant et sur une partie des interfluves. Se distinguent cependant une plate-forme sommitale étendue, au lieu-dit Commenda, entre les cotes 150,0 et 162,2m, inscrites en italique, de la carte topographique au 1/2000. Celles reportées en caractères gras correspondent à des points de mesure obtenus à l'aide d'un théodolite. Cette vaste topographie de plate-forme appartient à la "terrasse majeure" TMVI, qui se tient entre 180 et 120 m d'altitude et qui est attribuée aux sous-stades 5.5 et 5.4. À y regarder de plus près, elle paraît comporter plusieurs replats ("terrasses mineures"), situés respectivement sous les cotes 150,0m, au premier plan, 155,5 et 162,2m, au deuxième et troisième plan. En raison de la faible dénivellation qui les sépare, de valeur métrique, et de l'interférence avec les terrasses de culture, un diagnostic reposant uniquement sur ces anciennes formes de terrain subaériennes ne saurait être décisif à lui seul.

Figure 51 - "Terrasse majeure" (TMVI), "terrasses mineures", terrasses de culture et dépôts de terrasse, en Calabre méridionale, sur la bordure orientale du Détroit de Messine, sur le versant nord de la vallée du Torrente Campanella, à l'est de Villa San Giovanni.

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B - Coupe géologique schématique.

B. En revanche, l'ouverture récente de carrières en rive droite de la vallée du Torrente Campanella, au premier plan, et leur extension permettent de disposer d'affleurements présentant, de profil, des anciennes formes de terrain fossiles, constituant les différentes surfaces de transgression, sur lesquelles reposent trois dépôts de terrasse successifs (I), (II) et (III). La photo panoramique (Fig. 51-A), qui date d'octobre 2000, ne présente qu'une partie des coupes disponibles. Se lit, à l'est, soulignée par des différences d'humidité, la succession d'un dépôt (I), au-dessus du "conglomérat de Messine" (CgM), et d'un dépôt (II), qui présente des lits inclinés en position proximale. D'autres coupes sont apparues ultérieurement (voir Fig. 52-B et Fig. 53), en raison de la pénétration et de l'élargissement du front de taille. Il en est tenu compte sur le croquis (Fig. 51-B).

Figure 51 - Suite.

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A. Au profil subhorizontal et rectiligne de l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), jalonnée par un lit de galets (Cb), s'oppose celui irrégulier de la surface de transgression, qui s'inscrit dans la suite du dépôt (I) et qui résulte de l'action des eaux courantes (1b) sur un ancien versant de vallée du Torrente Campanella. Un horizon de teinte rougeâtre (z) apparaît localement sous cette surface de transgression, qui supporte le dépôt (II). Il en est de même, plus continûment, sous la surface de discordance résultant du façonnement d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine (2a) dans les couches progradantes du "conglomérat de Messine" (CgM) et de sa fossilisation sous une couverture transgressive grossière (Cb) par laquelle débute le dépôt (I). Cet horizon, qui résulte de la migration de particules argileuses teintées d'oxydes de fer déshydraté, est l'équivalent? dans des sédiments silico-clastiques, de certains encroûtements observés dans les mêmes conditions d'émersion en milieu carbonté. B. La surface de transgression qui supporte le dépôt (I), ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a) proche de l'horizontale en bord externe, est recoupée par celle, de profil irrégulier (1b), sur laquelle repose le dépôt (II), et qui résulte du travail des eaux courantes sur un ancien versant de vallée. Le point de recoupement entre ces deux surfaces de transgression se situe à 147 m d'altitude. Il représente actuellement le bord externe de l'ancienne plate-forme d'abrasion marine (2a) supportant le dépôt (I). La seconde a commencé par s'inscrire, comme la première, dans des couches progradantes du "conglomérat de Messine" (CgM), avant de s'implanter dans celles du dépôt (I). Le dépôt (II) débute par un dépôt conglomératique (Cg), mal classé et non stratifié, qui est recouvert en aval par des lits subhorizontaux (H) alternés de sables (Sm) et de conglomérat (voir Fig. 24b), disposés en onlap par rapport à la pente de la surface de transgression recouverte du conglomérat (Cg). Le bord externe de cette dernière se tient de nos jours vers 145 m d'altitude, ce qui représente une "épaisseur caractéristique" (CT) d'une dizaine de mètres.

Figure 52 - Surface de transgression de profil irrégulier (1b), engendrée par les eaux courantes, surmontant puis recoupant une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), en Calabre méridionale, sur la bordure orientale du Détroit de Messine, sur le versant nord

du Torrente Campanella, à l'est de Villa San Giovanni.

A - Une surface de transgression (érosion continentale), inscrite dans un dépôt reposant sur une surface de transgression de type 2 (érosion marine). B - Une surface de transgression de type 1 (processus de ravinement), recoupant une surface de transgression de type 2 (processus d'abrasion marine).

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2 ) Une ST de type 1 (érosion continentale) recoupant la précédente de type 2 (érosion marine)

C'est précisément à l'altitude de 146,96 m, 2,40 m en dessous du site de mesure 149,36 m, que cette ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile est tranchée (Fig. 52-B) par une seconde surface de transgression (ST2), de profil différent et d'origine autre. Cette dernière, en effet, est de profil irrégulier (Fig. 52-A et 52-B). Elle comporte des changements de pente, en valeur (de 6 à 13-15°) et même en sens d'inclinaison, au point que les matériaux qui les recouvrent apparaissent parfois implantés dans des poches qu'ils colmatent (voir Fig. 13). Le profil est souligné, là aussi, par un mince cordon de sédiments altérés, de teinte rouge au sommet du dépôt érodé (Fig. 52-B). Cette topographie "différenciée" résulte, avant sa fossi-lisation, de l'action des eaux courantes s'exerçant à la faveur d'une régression sur un ancien versant de vallée du Torrente Campanella, que son versant actuel de rive droite recoupe en oblique. Elle s'inscrit à la fois dans le dépôt précédemment décrit, sous-jacent, et dans les couches progradantes du "conglomérat de Messine, au delà du point de mesure de 146,96 m.

En amont, elle se raccorde à une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, qui s'inscrit dans un interfluve. Cet agencement résulte de la combinaison d'anciennes vallées, engendrées pendant les régressions, et d'anciennes plates-formes d'abrasion marine, façonnées dans les interfluves intermédiaires pendant la phase initiale de la transgression suivante. Cette juxtaposition apporte une complication supplémentaire à la lecture et à la compréhension des anciennes formes de terrain fossiles qui supportent les sédiments transgressifs des dépôts de terrasse (voir Fig. 1). À cette ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile devrait être asso-ciée une ancienne falaise fossile. Cette dernière ne se voit pas sur la coupe, mais l'inclussion d'un dépôt clinostratifié, d'une pente de 18 °, mis en place sous forte profondeur d'eau, en suggère la proximité (Fig. 51, en amont).

Bien qu'elle ait été engendrée par les eaux courantes, l'origine marine des sédiments recouvrant cette surface de transgression ne fait guère de doute. En témoigne, à l'aval (Fig. 52-B), au-dessus d'un dépôt massif comprenant sans classement des galets et des sables, une alternance régulière de strates subhorizontales, les unes contenant des galets émoussés, les autres principalement des sables. En outre, ces bancs se terminent en biseau vers le bas ("onlap") en direction de l'amont. L'atteste également la présence de sables au sommet du dépôt (Fig. 52-A), sous une topographie dominée par l'aménagement de terrasses de culture.

Dans ce cas particulier d'une topographie fossile différenciée, issue du travail des eaux courantes, le niveau de base de l'érosion est un bas niveau marin de fin de régression. La même ligne de rivage de bas niveau constitue le point de départ de l'accumulation des sédiments (dépôt II) au cours de l'oscillation suivante, qui comporte une transgression suivie d'une régression.

3 ) L'ancienne falaise fossile d'une ST de type 2, recoupant une ST de type 1 sur son bord externe

La troisième surface de transgression (ST3) se compose d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile et d'une ancienne falaise fossile (Fig. 53). La plateforme se tient à une altitude de 140,5 m, à une trentaine mètres de la falaise qui lui est associée et dont elle est séparée par deux petits gradins de dénivellation métrique. L'angle d'inflexion entre ces deux

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anciennes formes de terrain fossiles, complémentaires, représente une ancienne ligne de rivage, à la date de la fin de l'extension de la plate-forme et du recul de la falaise vers l'intérieur des terres, au terme de la phase initiale d'une transgression. Le profil de l'ancienne falaise fossile est visible sur 2 m de hauteur, avant d'être oblitéré par des apports anthropiques d'une terrasse de culture aménagée sur le versant, face au sud. Le bord externe de la surface de transgression précédente est observable 3 m plus haut. Les sables qui se sont déposés à proximité de cette paroi présentent un lit incliné d'une dizaine de degrés en direction de la mer. En outre, le dépôt s'enrichit de galets à l'approche de la falaise, témoignant ainsi du remaniement de galets provenant du dépôt (II) antérieur, au cours de sa fossilisation.

Les deux surfaces de transgression, (ST2) et ST3) ont été engendrées, la première, d'origine continentale, pendant une régression, la seconde, d'origine marine, pendant la phase initiale d'une transgression. Comme le bord externe de la première est plus élevé que le bord interne de la seconde, la transgression ne peut être intervenue qu'au cours d'une oscillation ultérieure. Les dépôts marins (II) et (III) qu'elles supportent, n'ont pas été mis en place pendant la même transgression, mais au cours de deux oscillations distinctes.

À l'aval, sous la butte cotée 150 m sur la carte topographique à 1/2000, le dépôt présente des couches progradantes, dont la terminaison supérieure se présente en biseau ("toplap") sous la plate-forme d'accumulation qui porte un pylône d'une ligne à haute tension, au sommet de la butte. Cette disposition est caractéristique de sédiments régressifs mis en place après le maximum d'amplitude d'une transgression et le passage éphémère du littoral par une ancienne ligne de rivage de haut niveau. Cette dernière est impossible à détecter avec toute la précision désirée, car elle se situe actuellement sur un col. Elle peut être évaluée en la plaçant, par reconstruction, à l'intersection entre l'ancienne falaise fossile inscrite dans le "conglomérat de Messine" et l'ancienne plate-forme d'accumulation marine, dont un témoin est conservé au sommet de la butte cotée 150 m. Ces couches progradantes représentent une structure en Gilbert-delta à une échelle de temps "suborbitale".

4 ) Au total, trois oscillations postérieures au pic eustatique culminant de MISS 5.5, sans être les dernières de la période orbitale propre à MT VI

Ces trois surfaces de transgression successives, supportant trois dépôts de terrasse distincts, ne représentent qu'une petite partie, dans sa portion médiane, de la largeur (1000 m environ sur ce transect) ainsi que de la dénivellation (60 m) que présente la "terrasse majeure" MTVI, rapportée aux sous-stades 5.5 et 5.4. Ainsi, entre les deux points de mesure, compris entre le bord externe de la surface de transgression, qui se tient à 149,96 m d'altitude en rive droite du Torrente Campanella, et celui qui a été mesuré à l'altitude de 131,81 m, la distance est de l'ordre de 80 m et la dénivellation de 9,2 m. Entre deux surfaces de transgression suc-cessives, la dénivellation n'est donc en moyenne que 4,6 m, soit une petite partie seulement (7,7 %) des 60 m séparant les deux extrémités de la "terrasse majeure" MTVI. S'y ajoutent, au sein de la même "terrasse majeure", la dénivellation représentée, à des altitudes inférieures, sur les coupes de rive droite du vallon de Campo Piale, situées à 400 m plus au sud.

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La surface de transgression se compose d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a) et d'une ancienne falaise fossile (2b), qui lui est associée. Le dépôt (III) qui les recouvre comporte un lit manifestement incliné d'une dizaine de degrés à l'approche de l'ancienne falaise fossile, où il se charge de galets (Cg) analogues à ceux (Cg) de la partie inférieure du dépôt (II), dont la base reste suspendue à plusieurs mètres au dessus du bord interne de l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a) qui se tient en contrebas. Les deux surfaces de transgression (1b et 2a+2b) sont inscrites dans des couches progradantes du "conglomérat de Messine" (CgM). Le prolongement vers le haut de l'ancienne falaise (2b), au delà de l'affleurement des couches progradantes, est masqué par des apports anthropiques (A) provoqués par l'aménagement d'une terrasse de culture sur le versant de la vallée. L'ancienne topographie de ravinement (1b), engendrée pendant une régression, ne peut qu'avoir été sectionnée sur son bord externe par le recul d'une ancienne falaise (2b) associée au façonnement d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine (2a), lors d'une transgression ultérieure. Cette coupe diffère du cas précédent (voir Fig. 52-B), où la topographie fossile irrégulière (1b) engendrée par les eaux courantes recoupe en oblique une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), de profil rectiligne et d'âge antérieur.

Figure 53 - Une ancienne falaise fossile (2b), associée à une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), et recoupant une ancienne topographie fossile, engendrée par l'action des eaux courantes (1b), en Calabre méridionale, sur la bordure orientale

du Détroit de Messine, sur le versant nord du Torrente Campanella.

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III - UNE SURFACE DE TRANSGRESSION, D'ORIGINE CONTINENTALE ET MARINE, SUPPORTANT UN DÉPÔT MARIN D'UNE ÉPAISSEUR EXCEPTIONNELLE, DANS LE TIERS MÉDIAN DE LA "TERRASSE MAJEURE" TMVI

Les coupes des versants de rive droite (Fig. 54) et de rive gauche (Fig. 55) du Vallone Catrica, au nord du Capo dell'Armi, permettent une analyse détaillée des anciennes formes de terrain fossiles constituant la surface de transgression sur laquelle repose un dépôt marin dont l'"épaisseur caractéristique", de l'ordre de 20 à 25 m, est l'une des plus élevées pour les dépôts attribués aux sous-stades 5.5 ou 5.4. Cette surface de transgression se situe, entre 145 et 120 m d'altitude, dans le tiers médian de la "terrasse majeure" TMVI, rapportée à ces deux sous-stades. En outre, elle se compose, pour une part, d'anciennes formes de terrain engen-drées par le travail des eaux courantes qui drainaient un ancien bassin du Vallone Catrica, et, pour une autre part, d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile associée à une ancienne falaise fossile.

1 ) Deux anciens versants de vallée fossiles

Paradoxalement, ce sont les empreintes discrètes d'abrasion marine, sur des parois abruptes d'anciens versants de vallée du Vallone Catrica, qui révèlent au mieux l'occurrence d'une ancienne vallée creusée par un cours d'eau pendant une régression, puis envahie par la mer. Ces témoignages prennent la forme d'étroites banquettes d'abrasion, qui accidentent ces versants sur moins d'un mètre de largeur, sans pénétrer plus avant dans l'intérieur des inter-fluves (Fig. 55 et 56). Ces petits replats latéraux sont encroûtés. Cet encroûtement superficiel accompagne des émersions qui se produisent au cours du façonnement des plates-formes d'abrasion marine. Il en existe des exemples, plus étendus, sur les anciennes plates-formes d'abrasion marine de développement frontal, en avant des anciennes falaises faisant face à la mer. La consolidation affecte aussi bien le substrat tronqué que le dépôt de couverture trans-gressive grossier qui le surmonte (voir Fig. 47). Les anciens trottoirs d'abrasion latéraux, inscrits dans les anciens versants de vallée entaillant les couches progradantes du "conglo-mérat de Messine", présentent des vasques et des surplombs (Fig. 56-B et 56-C), et même une ancienne grotte en rive droite (Fig. 57). L'hypothèse d'un encroûtement en rapport avec une nappe phréatique, suivi d'une érosion différentielle aux dépens des matériaux non indurés, est discutée (Fig. 58). Ces témoins d'une abrasion prennent place, vers 131 m d'altitude, après le dépôt d'un conglomérat marin fortement consolidé, qui recouvre un ancien versant entre 125 et 131 m (Fig. 55). Ils relèvent probablement de l'achèvement de la phase initiale de transgres-sion, avant le passage à sa phase intermédiaire où le processus d'abrasion prend fin, en raison de l'augmentation de la profondeur d'eau. À cette profondeur, le remplissage de l'ancienne vallée revêt d'autres caractères, ceux de sédiments d'apparence continentale, analogues à ceux qui se trouvent au sommet des dépôts (I) et (II) (Fig. 55). Dans la vallée, où ils ont été victimes d'une l'érosion différentielle, il n'en reste que peu de témoins (Fig. 56-C).

D'autres témoignages de ce creusement existent sous la forme de vallons suspendus en rive droite (Fig. 57-B). Ces vallons se dirigeaient autrefois vers le fond de l'ancienne vallée du Vallone Catrica. Ils ont été ultérieurement colmatés par les sédiments supérieurs, d'aspect continental apparent, appartenant au dépôt (III), le plus récent.

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Figure 54 - La "terrasse majeure" TMVI dans son tiers médian – un dépôt de terrasse "précoce", tronqué, et un épais dépôt de terrasse "tardif" – sur le littoral ionien de la Calabre méridionale, sur l'interfluve de rive droite du Vallone Catrica, au nord du Capo dell'Armi.

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Entre 180 et 135 m d'altitude, cet interfluve ne semble se composer, à première vue (Fig. 54-C), que d'une seule unité topographique, constituant une "terrasse majeure". Celle-ci est en rapport avec une unité stratigraphique qui présente une structure en Gilbert-delta et comporterait des foreset beds surmontés par des topset beds. (P. BARBIER et B. KERAUDREN (1983, figure 1 – voir Fig. 47-D). La succession apparente de plusieurs replats, numérotés de (1) à (7), constituant autant de "terrasses mineures", se heurte au risque de confusion avec des terrasses de culture. Mais cette multiplicité de terrasses est en désaccord avec le petit nombre d'oscillations glacio-eustatiques survenues au cours du sous-stade 5.5, telles qu'elles figurent sur les courbes eustatiques déduites des courbes isotopiques marines de publication ancienne. Toutefois, en substituant à la topographie de surface un examen détaillé des anciennes formes de terrain fossiles, sur lesquelles repose chaque ensemble de sédiments transgressifs, la géomorphologie conduit à une autre vision, plus complexe, des variations du niveau de la mer au cours du dernier interglaciaire (voir Fig. 33) et de l'avant-dernière déglaciation (voir Fig. 50). Ces anciennes formes de terrain fossiles se combinent en trois surfaces de transgression. Les deux plus anciennes (ST1 et ST2) sont composées d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a) et d'une ancienne falaise fossile (2b). L'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), appartenant à ST2, recoupe l'ancienne falaise fossile (2b), relevant de ST1. La troisième surface de transgression (ST3) est plus complexe. Elle comporte une large plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), encroûtée, en position frontale. Son prolongement vers l'amont est conditionné par la présence d'une ancienne vallée, dans laquelle la mer a pénétré. Il en résulte, dans l'exact prolongement de cette plate-forme d'abrasion, l'entaille dune banquette d'abrasion latérale et l'excavation d'une grotte (Fig. 54-C, 57-C et 57-D), dont le surplomb (*) est constitué de matériaux antérieurs encroûtés. Il en résulte également que la mer a submergé un ancien versant de vallée (1a), le recouvrant d'un dépôt distinct de celui dans lequel il est inscrit (voir Fig. 54-A et 57-C).

Figure 54 - Suite.

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A - Panorama.

B - Coupe géologique schématique. C - Courbe eustatique schématique *.

En comparaison de sa rive droite (Fig. 47, Fig. 49-B, Fig. 54), la rive gauche du Vallone Catrica comporte des équivalents latéraux des unités stratigraphiques (II) et (III), alors que l'unité (I) y fait défaut. Elle présente alors aussi un équivalent de l'ancienne plate-forme d'abrasion marine (2a), observée en rive droite (voir Fig. 47 et 54). Mais à cette ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a) de profil rectiligne, recoupant des couches progradantes du "conglomérat de Messine" (CgM) et supportant un "conglomérat de base" (Cb)à blocs arrondis, à l'est du cliché, s'oppose la surface de transgression (ST2), de composition autrement plus complexe, inscrite en contrebas vers l'ouest.

Cette dernière comporte une ancienne falaise fossile (2b) faisant face à la mer. Elle recoupe à l'évidence l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile d'âge antérieur (2a). Sa trace est manifeste dans un segment inférieur (S1), où elle est inscrite dans le "conglomérat de Messine". Elle se suit malaisément vers le haut, dès lors que s'opposent, de part et d'autre, des sédiments détritiques de faciès analogue (en S2). Dans ces matériaux meubles, son prolongement subaérien (4b) manque de vigueur, alors qu'une ancienne plate-forme d'accumulation marine (4a) se réduit à un étroit replat.

En avant de cette ancienne falaise fossile, et sous un replat de teinte jaunâtre qui s'avance en direction du fond du Vallone Catrica, se dessine, entre les points de mesure 131,0 et 125,0m, un ancien versant de vallée fossile (1a), faisant face au fond de la vallée et colmaté par un conglomérat consolidé (Cgx).

Figure 55 - Une ancienne falaise fossile constituée d'anciennes formes de terrain d'origine continentale et marine, appartenant à une surface de transgression (ST) et

recoupant une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, sur le littoral ionien de la Calabre méridionale, en rive gauche du Vallone Catrica, au nord du Capo dell'Armi.

C - Courbe eustatique schématique *.

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Les dépôts conglomératiques (Cb) et (Cgx) sont surmontés par des apports continentaux (Ac et Ac), de granulométrie grossière ("fanglomerate"), à l'exception de lentilles silteuses ou sableuses. La disposition lenticulaire et le mauvais classement des matériaux, ainsi que le faible émoussé des galets, confèrent à ce dépôt une apparence continentale, alors que son accumulation contre une paroi faisant face à la mer plaide en faveur de sa mise en place en milieu marin. Ces apports continentaux (Ac) conservent, en héritage, des caractères, acquis lors du transport dans un cours d'eau à chenaux en tresses. Ils n'ont pas été remaniés lors de leur mise en place contre une falaise plongeant sous la mer, à cause d'une trop forte profondeur d'eau, en phase intermédiaire de transgression, de sorte qu'ils se sont sédimentés hors du domaine atteint par l'agitation des vagues.

À cette ancienne falaise fossile (2b) est également associée, en position frontale, une seconde ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a). Elle est recouverte par un conglomérat (Cgx) fortement consolidé, qui est surmonté par le dépôt meuble, à caractères d'apparence continentale (Ac). Dans ces conditions, la surface topographique, de teinte jaunâtre, résulte de l'exhumation, par érosion différentielle, du toit de ce conglomérat, constituant ce qu'il est convenu d'appeler, en géomorphologie, une "surface structurale dérivée".

Cette ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, en position frontale, se prolonge à l'intérieur du Vallone Catrica par un étroit trottoir latéral d'abrasion (2c), parfois interrompu au passage de ravins plus récents, qui se dessine sur le versant du Vallone Catrica, où la mer a pénétré (voir aussi Fig. 56).

La courbe eustatique schématique (Fig. 55-C), non corrigée du soulèvement, est fondée sur l' "épaisseur caractéristique" des sédiments transgressifs des dépôts (I) et (II) Elle vise à représenter les deux oscillations successives du niveau de la mer, qui sont à l'origine de ces anciennes formes de terrain et de leur fossilisation par les sédiments qu'elles supportent.

Cette vue de profil est à compléter par un panorama vu de face (voir Fig. 56) et par les données recueillies sur l'autre rive du Vallon Catrica (voir Fig. 54 et 57).

Figure 55 - Suite.

D'anciens versants de vallée fossiles apparaissent de chaque côté du Vallone Catrica. Au sud, c'est celui qui est recouvert, entre 125 et 131 m d'altitude, par un conglomérat consolidé à forte empreinte marine (Fig. 55 et 56-A). Au nord, les bancs de conglomérat et celui de grès, de couleur grise, s'interrompent brusquement le long d'une surface de discontinuité, inclinée, au delà de laquelle affleurent des sédiments, à caractères d'apparence continentale, de teinte rougeâtre (Fig. 57-A), les mêmes que ceux qui remplissent les deux vallons suspendus à l'amont. Ces sédiments s'engagent dans l'ancienne vallée du Vallone Catrica. Ils culminent sous la forme d'un replat latéral. Cette étroite plate-forme subaérienne d'accumulation, en position latérale, à l'image des terrasses alluviales, est un équivalent des grands replats frontaux, qui s'étendent plus largement sur les interfluves, pour peu qu'ils aient été préservés d'une érosion ultérieure. Le talus qui domine ce replat latéral sur le versant méridional de l'interfluve d'Altibano (Fig. 57-A) et qui voit affleurer des sédiments de teinte claire d'un dépôt précédent, est un ancien versant de vallée, dont la partie inférieure est fossilisée par des sédiments marins. Cette ancienne forme de terrain, ayant vécu une histoire double, conti-nentale et marine, a parfois été qualifiée de "fausse falaise". Elle se raccorde vers le bas à une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, qui s'étend largement vers l'aval, où une altitude de 123,12 m a été mesurée au sommet du "conglomérat de base" en bord externe (Fig. 54). Ainsi, calculée entre ce point (A) et le replat latéral (point B), l'"épaisseur caractéristique" (CT) de ce dépôt est de l'ordre de 25 m. Cette valeur est plus forte que celle des dépôts antérieurs appartenant à la "terrasse majeure" TMVI. Elle ne peut que corres-pondre à une transgression tardive, mais d'amplitude forte.

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A - Panorama, vu de l'aval.

B - Panorama du versant de rive gauche du Vallone Catrica.

C - Détail de la coupe B.

Figure 56 - Géomorphologie de surface et anciennes formes de terrain fossiles sur le littoral ionien de la Calabre méridionale, en rive gauche du Vallone Catrica,

au nord du Capo dell'Armi (vues de front et de profil).

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A. La topographie, vue de front, se décompose en trois plans étagés aux largeurs inégales :

1) Le vaste plan supérieur est une ancienne plate-forme subaérienne d'accumulation marine (4a), clôturant le dépôt (II).

2) Lui succède, au delà d'une brève ancienne falaise subaérienne (4b), un étroit replat frontal, qui n'est qu'un témoin approchant de l'ancienne plate-forme subaérienne d'accumulation marine (4a), clôturant, à son tour, le dépôt (III).

3) Le plan inférieur est l'œuvre de l'érosion différentielle, qui a dégagé, à l'est, le toit du conglomérat de base, fortement consolidé (Cbx), reposant sur une ancienne plate-forme d'abrasion marine (2a). Le travail de l'érosion différentielle a été favorisé par le recul de l'escarpement de la faille de direction N130°E, qui passe au pied de l'affleurement des calcarénites de Floresta, d'âge miocène. Ce recul a eu lieu jusqu'à sa position actuelle, qui est découpé en terrasses de culture. L'étroit replat latéral encroûté (2c), qui s'engage dans la vallée, y prolonge cette action de l'abrasion. Il est interrompu par des ravins, se dirigeant vers le fond de cette vallée. Un ancien versant de la vallée (1a) est fossilisé, entre 131,0 et 125,0 m, par un dépôt conglomératique induré (Cgx), plus épais que le "conglomérat de base" (Cbx), qui jalonne l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), en avant de son ancienne falaise, en partie fossile, elle aussi. Le toit du conglomérat (Cgx) a été dégagé, lui aussi, dans le prolongement de celui du conglomérat (Cbx), par le jeu de l'érosion différentielle, constituant une "surface structurale dérivée".

B. Au-dessous de l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), qui pénètre largement de front dans cet interfluve, et qui supporte un dépôt (II), débutant par un "conglomérat de base" à galets et à blocs (Cb), apparaît au contraire, une dizaine de mètres plus bas, un étroit trottoir latéral d'abrasion (2c), encroûté. Il est entaillé dans la paroi abrupte d'un ancien versant du Vallone Catrica, creusé dans des couches progradantes du "conglomérat de Messine" (CgM). Une autre encoche (2c) se distingue à mi-hauteur, témoignant d'une transgression inter-médiaire.

C. Le replat latéral d'abrasion (2c), encroûté, comporte des Vasques de dissolution et un Surplomb. Il subsiste un témoin d'un dépôt (Ac), analogue à celui qui surmonte le "conglomérat de base" du dépôt (III) en position frontale (Fig. 55 et Fig. 56-A). Il a échappé à l'érosion différentielle qui s'est exercée plus encore dans la vallée que de front, aux dépens de ces matériaux meubles.

Figure 56 - Suite.

De fait, ici se combinent, au long d'une même surface de transgression, d'anciennes formes de terrain d'origine continentale et marine. Elles ont pour niveau de base commun un ancien bas niveau marin de fin de régression (voir Fig. 1). Les premières sont l'œuvre des cours d'eau qui ont engendré les anciennes vallées, et des écoulements sur leurs versants. Elles datent donc de cette régression. Les secondes se sont développées, pendant la phase initiale de la transgression suivante, sur les interfluves entre ces anciennes vallées. Les profils, de pente inégale, se rejoignent pour constituer une même surface de transgression, qui supporte un même ensemble de sédiments mis en place au cours de toute la transgression.

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Figure 57 - Anciennes formes de terrain fossiles d'origine marine et fluviatile sur le littoral ionien de la Calabre méridionale, sur le versant de rive droite

du Vallone Catrica, au nord du Capo dell'Armi.

A - Un ancien versant de vallée (1a).

B - D'anciens vallons adjacents (1b).

C - Grotte et trottoir latéral d'abrasion marine encroûté (2c).

A et C : clichés de Jeannine RAFFY

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A. Un ancien versant de vallée fossile (1a) recoupe en oblique deux anciennes plates-formes d'abrasion marine (2a) et (2a), plus anciennes, qui supportent les dépôts (I) et (II). Il s'exprime : 1/ par l'interruption brutale des affleurements de grès ou de conglomérats (Cb1) appartenant au dépôt (I) ; 2/ par le contraste entre les dépôts de couleur rougeâtre des sédiments (Ac) du dépôt (III) et ceux de teinte grisâtres (I), dans lesquels ils sont emboîtés. A l'aval, le dépôt (III) repose apparemment sur une ancienne plate-forme d'abrasion marine encroûtée (2a), qui est inscrite dans des couches progradantes du "conglomérat de Messine" (CgM). Elle se développe largement vers la mer en dehors de ce cliché (voir Fig. 54-C). S'y raccorde, en amont, le plancher, encroûté, d'une grotte (voir Fig. 57-C et 57-D), résultant d'une entaille latérale d'abrasion marine (2c), dans ce versant de l'ancienne vallée du Vallone Catrica. À son sommet, le dépôt (III) présente une ancienne plate-forme subaérienne d'accumulation marine en position latérale (4a). Elle est dominée par un talus de direction à peu près parallèle à celle, actuelle, du Vallone Catrica. Imputable, à son origine, à l'érosion exercée par un cours d'eau, ce talus est le prolongement subaérien vers le haut (3b) de l'ancien versant de vallée fossile (1a), recouvert de sédiments marins. Il sépare, en surface, deux anciennes plates-formes subaériennes d'accumulation marine (4a) et (4a).

B. À une autre échelle, deux vallons suspendus, et colmatés, apparaissent aussi en rive droite du Vallone Catrica. Ces deux vallons ont été creusés par les eaux courantes (1b) dans un ancien versant de vallée du Vallone Catrica à la faveur d'une régression. Ils ont été colmatés au cours d'une transgression suivante, en phase terminale de cette dernière. Le creusement s'est exercé aux dépens des dépôts (I) et (II), laissant subsister, entre ces deux vallons, un pinacle coiffé d'un conglomérat (Cb1). Le dépôt de remplissage (III)présente des caractères d'apparence continentale (Ac), à l'image de ceux de la majeure partie du dépôt (II) et (III), sur l'autre rive du Vallone Catrica (voir Fig. 55 et 56), et pour les mêmes raisons que ces derniers. Le dépôt (II) repose sur une ancienne plate-forme d'abrasion marine (2a), entaillée dans le dépôt (I) et jalonnée d'un conglomérat de base (Cb1), surmonté de sables marins (Sm) comportant un banc de grès (Gr). Elle est recoupée par le creusement (1b) des deux vallons. Le dépôt (I) surmonte lui aussi une ancienne plate-forme d'abrasion marine (2a), entaillée dans le "conglomérat de Messine" (CgM) et recouverte d'un conglomérat de base (Cb2). Le sommet du dépôt (III) présente une ancienne plate-forme subaérienne d'accumulation marine (4a), en position latérale (voir Fig. 57-A).

C et D. Une ancienne grotte, résultant de l'abrasion marine, accidente la paroi d'un ancien versant de rive droite du Vallone Catrica. La grotte est creusée aux dépens d'une intercalation silteuse (CgMs), au sein de couches progradantes du "conglomérat de Messine" (CgM), qui se composent principalement de conglomérats. Le toit de la grotte est constitué de ce substrat encroûté (x), sous une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), qui supporte un "conglomérat de base" (Cb1), sporadiquement encroûté lui aussi, puis des sables (Sm) et des grès (Gr), disposés en onlap. Son plancher est un trottoir latéral d'abrasion (2c), qui a été entaillé par la mer dans le versant abrupt d'une ancienne vallée du Vallone Catrica, quand elle a été envahie par les eaux marines (voir Fig. 58). Il se raccorde avec l'ancienne plate-forme d'abrasion marine (2a), encroûtée, qui se développe en position frontale sous l'interfluve d'Altibano (voir Fig. 54-C, 57-A et 57-C). Il a été encroûté pendant les brèves périodes d'émersion qui se produisent au cours de son façonnement. Une étroite encoche sous-jacente, peu profonde, a été engendrée par temps calme, entre les périodes de vagues de tempête. L'abrasion est intervenue à la fin de la phase initiale de transgression, juste avant que la profondeur d'eau ne devienne trop élevée pour que la base des vagues puisse exercer leur effet d'abrasion sur le substrat. Le plancher supporte des blocs résultant d'un écroulement du plafond.

Figure 57 - Suite.

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A -Hypothèse A : dégagement par érosion différentielle d'un encroûtement de nappe. B - Hypothèse B : encroûtement superficiel d'un étroit trottoir latéral d'abrasion.

B. Selon une autre hypothèse, plus complexe, il est vrai, un encroûtement superficiel affecte le sommet d'une étroite banquette d'abrasion latérale (2c), inscrite dans la paroi d'un ancien versant de vallée. L'évolution débute donc (image 1), au contraire, par le creusement d'une vallée (1a) pendant la durée d'une régression. Vient ensuite une transgression, au cours de laquelle la mer commence à y déposer des sédiments (Cg, Sm). Le processus d'abrasion s'applique latéralement sur les versants de l'ancienne vallée, jusqu'au terme de la phase initiale de transgression (image 2). À son maximum de vitesse, et de profondeur d'eau, la transgression amène l'ancienne vallée à se transformer en ria (image 3). L'accumulation de sédiments (image 4), jusqu'à la fin de la transgression et pendant le début de la régression suivante, aboutit à l'édification d'une plate-forme subaérienne d'accumulation (4a), qui constitue la limite supérieure du dépôt de terrasse. Une partie des dépôts (Ac), délivrés à la mer par les processus de transport dans le cours d'eau, conservent des caractères d'apparence continentale, faute de remaniement décisif sous l'agitation des vagues. Le creusement ultérieur de la vallée (image 5) fait disparaître la majeure partie des sédiments meubles, qui s'y trouvaient implantés. Restent les trottoirs d'abrasion latérale, protégés par leur encroûtement.

Figure 58 - Deux hypothèses sur l'origine des encroûtements inscrits sur les versants du Vallone Catrica, sur le littoral ionien de la Calabre méridionale, au nord du Capo dell'Armi.

A. Une première hypothèse consiste à attribuer cet encroûtement à une accumulation de carbonate de calcium en rapport avec l'établissement, dans le "conglomérat de Messine", d'une nappe phréatique (1), alimentée par la percolation des eaux jusqu'à sa base, en relation avec la position du niveau de la mer. Le creusement d'une vallée (2) aurait interrompu la continuité de cet encroûtement. Puis l'érosion différentielle aurait affiné cette évolution, en dégageant les matériaux encroûtés de ceux du même "conglomérat de Messine" qui affleurent au-dessus en lits inclinés (voir Fig. 56-C), parfois indurés (Fig. 56-C), à supposer que la sélection puisse être franche. Les surplombs ne pourraient s'expliquer, à défaut de gélifraction différentielle, que par un effet de sapement exercé par un cours d'eau. Toutefois un tel encroûtement de nappe devrait se traduire par un entablement, assorti d'une corniche, sur les flancs

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2 ) Une ancienne falaise fossile, recoupant une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile

Sur l'interfluve de rive gauche du Vallone Catrica, en position frontale, face à la mer, deux surfaces de transgression se succèdent selon une combinaison plus courante, où l'an-cienne plate-forme d'abrasion marine fossile, relevant de la première, est recoupée par une ancienne falaise fossile, qui fait partie de la seconde (Fig. 55).

L'ancienne falaise se divise ici en trois segments. Le plus bas, d'une dizaine de mètres de hauteur, est inscrit à l'évidence dans les couches progradantes du "conglomérat de Messine" et dans le "conglomérat de base" à galets émoussés et à blocs (Fig. 55 et 56), qui surmonte une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, ainsi interrompue sur son bord externe, vers 140 m d'altitude. Il descend jusqu'au bord interne de l'ancienne plate-forme d'abrasion marine suivante, qui se tient à l'altitude de 131,0 m. Le plus haut de ces trois segments, de dénivel-lation plus faible, est le prolongement subaérien de cette ancienne falaise (Fig. 55 et 56-A). Entre ces deux segments, il en existe un troisième, intermédiaire, masqué par la végétation. Il sépare la partie supérieure et principale des dépôts (I) et (II), de faciès proches, qui présentent des "caractères d'apparence continentale". Bien que l'ancienne falaise se situe, sur ce segment, entre des sédiments analogues, il ne fait pourtant pas de doute que ces dépôts n'ont pas été mis en place lors de la même transgression.

De tels dépôts à "caractères d'apparence continentale" ont été signalés sur la côte ionienne de la Calabre du Nord (E. SANTORO et al., 2009, figures 5 et 10) où des lentilles de conglo-mérats d'aspect continental ("lens-shaped alluvial conglomerate", "fanglomerate") alternent avec des sables marins ("beach sands"), auxquels ils font passage latéralement vers le large sous le niveau de la mer (voir Fig. 21-B). Un tel passage latéral peut être observé à l'aval du Vallone Catrica et en rive gauche, au sein d'un dépôt plus récent qui se situe sous la butte cotée 103 m, à l'est du lieu-dit Case Sgro.

3 ) Un rôle notable de l'érosion différentielle

L'évolution du relief implique, sur cette coupe de rive gauche (Fig. 54), une distinction entre les anciennes formes de terrain "originelles" et celles qui résultent, après coup, du jeu de l'érosion différentielle. L'ancienne plate-forme subaérienne d'accumulation, "originelle", édifiée au sommet du dépôt (II), occupe peu de place, comparée à la largeur d'une autre plate-forme qui se développe en contrebas. Celle-ci correspond au dégagement par l'érosion diffé-rentielle du toit des conglomérats fortement consolidés qui revêtent la surface de transgres-sion composée d'un ancien versant de vallée fossile du Vallone Catrica et de l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile développée sur son interfluve de rive gauche. Une ancienne forme de terrain ainsi engendrée est qualifiée de "surface structurale dérivée". En fait, seule la consolidation du "conglomérat de base" empêche l'exhumation de l'ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile qu'il recouvre. En l'absence de cimentation, une ancienne plate-forme d'abrasion marine exhumée pourrait se substituer, dans la topographie, à une ancienne plate-forme subaérienne d'accumulation, après la destruction de cette dernière. Une "terrasse d'abrasion" prendrait ainsi la place d'une "terrasse construite". Ici, il s'en faut de peu, n'était l'étroit témoin de "terrasse construite" encore accolé au pied d'une ancienne falaise subaé-rienne. Il est vrai que l'érosion différentielle a bénéficié de l'appel au vide provoqué par la proximité d'un escarpement de ligne de faille exhumé (Fig. 55-A).

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4 ) Un âge plus tardif que celui d'autres dépôts sous-jacents à MTIV

L'altitude du bord interne de la plus basse des deux anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles (131,0 m) est nettement inférieure à celle (151,23 m ; voir Fig. 41), proche du bord interne de la plus basse des plates-formes qui s'étagent sur les coupes observées à l'est du Capo dell'Armi. Par comparaison, cette valeur de 131,0 m invite à lui assigner un âge plus tardif, sauf différence de taux de soulèvement entre ces deux transects, distants de 2 km seulement (voir Fig. 39-D).

Inversement, sur l'interfluve d'Altibano, l'ancienne plate-forme d'abrasion marine supportant le dépôt de terrasse qui s'élève jusqu'au point de mesure 159,78 m (voir Fig. 47-C, Fig. 54A) et qui est l'équivalent du dépôt (I) de rive gauche (Fig. 55), est précédée vers l'amont de deux autres surfaces de transgression, composées d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile et d'une ancienne falaise. Ainsi, au-dessus du point de mesure 169,7 m obtenu en surface (Fig. 54-A), l'ancienne falaise est inscrite dans les marnes bathyales de couleur blanche, rapportées au Pléistocène inférieur et moyen (P. BARRIER,1987). Au delà, sur le site de mesure 181,9 m (Fig. 54-A), une ancienne falaise subaérienne et fossile est entaillée dans les gneiss du socle ; il vient s'y achever un dépôt, qui s'engage plus à l'ouest dans une ancienne vallée du Vallone Giammassaro, pour s'aligner ensuite, en position frontale, au pied d'un escarpement de gneiss, jusqu'au lieu-dit Santa Maria, au-dessus de la vallée de la Fiumara San Vincenzo (voir Fig. 39-D). Ce dépôt est attribué à la terrasse de tête de la "terrasse majeure" TMVI, rapportée au sous-stade 5.5.

Les dépôts (II) et (III) de rive droite (Fig. 54) sont les équivalents des dépôts (I) et (II) de rive gauche (Fig. 55), distants de 500 m. Le dépôt (I) de rive droite (Fig. 54) n'est pas conser-vé en rive gauche.

IV - EN CONCLUSION : UN AGENCEMENT COMPLEXE DES SURFACES DE TRANSGRESSION SOUS LE TIERS MÉDIAN DE LA TERRASSE MAJEURE TMVI (Fig. 59)

Ainsi, à une conception qui n'envisage sur ces coupes que la présence d'un seul dépôt marin (voir Fig. 47-D), d'âge tyrrhénien, culminant vers 130 m et recouvert par un dépôt torrentiel constituant une "terrasse continentale" (P. BARRIER et B. KERAUDREN, 1983), s'oppose, à l'examen détaillé des anciennes formes de terrain fossiles qui les supportent, un agencement de plusieurs ensembles de sédiments transgressifs distincts. Cette procédure confirme l'inscription sur les courbes eustatiques KL11 ou KL09, pendant le sous-stade 5.5, de :- une ou plusieurs oscillations "précoces", relevant de l'avant-dernière déglaciation (Termi-nation II), mais dénuée d'expression géomorphologique en surface, en raison de la position respective des maxima eustatiques pendant cet intervalle de temps ; - plusieurs oscillations d'amplitude mineure, dont témoignent des dépôts de terrasse relative-ment peu épais ; - et d'une oscillation "tardive", d'amplitude notable, ayant engendré un dépôt de "terrasse mineure", situé vers le milieu de la "terrasse majeure" TMVI et présentant une "épaisseur caractéristique" (CT) de l'ordre de 25 m, supérieure aux précédents dépôts lui appartenant. Paradoxalement, cette transgression a donc donné lieu à l'accumulation de sédiments trans-gressifs plus épais que ceux du dépôt de la "terrasse de tête".

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Une vision en trois dimensions a pour avantage d'exprimer à l'évidence la différence entre des "terrasses latérales" (TL), qui accidentent le versant d'une vallée, dont le tracé est approximativement perpendiculaire au littoral, et des "terrasses frontales" (TF), faisant face à la mer.

1/ La plate-forme la plus étendue se trouve en position frontale (TF). Elle pourrait être due à l'exhumation d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, encroûtée, n'était l'interposition d'un dépôt de couverture transgressive grossière, encroûté, lui aussi (Cbx), qui se trouve à la base du dépôt (III). Le dégagement, par érosion différentielle, du plan stratigraphique supérieur de ce dépôt encroûté, donne lieu à l'apparition d'une "surface structurale dérivée".

2/ Elle est précédée, vers l'amont, d'une très étroite plate-forme, en position frontale également (TF), qui n'est autre qu'un témoin résiduel d'une ancienne plate-forme subaérienne d'accumulation marine (4a), correspondant à la fin de la mise en place du dépôt (III), désormais constitué de sédiments meubles (Ac), et soumis à une érosion différentielle.

3) S'exerçant sur les versants d'une ancienne vallée, envahie par la mer, le processus d'abrasion a engendré d'étroites banquettes latérales d'érosion marine (TL, 2c), encroûtées.

4/ Les sédiments marins qui se sont déposés dans cette ancienne vallée ont engendré une ancienne plate-forme subaérienne d'accumulation marine (4a), en position de terrasse latérale (TL), dont la position latérale et l'étroitesse n'est pas sans évoquer celle des terrasses fluviales.

5/ La part de l'action des eaux courantes dans la genèse des surfaces de transgression s'exprime manifestement par d'anciens versants de vallée fossiles (1a). Le profil de ceux qui sont restés émergés en fin de transgression (3b) a, sans doute, été influencé par l'action de la mer, qui a procédé à la fossilisation de leur partie basse. Aujourd'hui, des ravins (1b) sillonnent le versant. Il a dû en être de même lors des régressions, avant qu'ils ne soient colmatés lors d'une transgression suivante.

Figure 59 - Essai de reconstitution en trois dimensions de l'agencement des anciennes formes de terrain subaériennes ou fossiles et des dépôts de terrasse sur les deux versants

du Vallone Catrica, s²ur le littoral ionien de la Calabre méridionale, au nord du Capo dell'Armi.

(TF) : "Terrasses marines frontales". (TL) : "terrasses marines latérales".

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Paradoxalement, cette transgression a donc donné lieu à l'accumulation de sédiments trans-gressifs plus épais que ceux du dépôt de la "terrasse de tête".

L'explication découle de l'intercalation de maxima secondaires au cours de la "Termi-nation II", qui fragmente la montée transgressive globale. Située plus tardivement que les quatre oscillations inscrites sur la courbe KL11 à haute résolution, la transgression "tardive", d'amplitude singulière, pourrait correspondre à celle qui se dessine amplement sur la courbe à haute résolution KL09 (Fig. 60-D), vers 119/120 ka, avant son "déclin", entre les pics culmi-nants des sous-stades 5.5 et 5.3.

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Figure 60 - Des épisodes de réchauffement climatiques à l'enregistrement géomorphologique consécutif aux variations

du niveau de la mer en Calabre méridionale, au cours des sous-stades (MISS) 5.5 et 5.4.

D - Courbes eustatiques KL11 et KL09 (d'après E.J. ROHLING et al. (2008) et A.L. THOMAS et al. (2009).

C - Courbe des apports détritiques glaciaires (d'après G. BOND et al. (2001, fig. 4).

B - Courbe isotopique de spéléothèmes (d'après R.N. DRYSDALE et al. (2007 et 2009).

A - Courbe de la température antarctique, dérivée de la courbe isotopique δD EPICA Dôme C

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Figure 60 - Suite 1.

E - Courbes eustatiques KL11 et KL09, comparée à la succession des surfaces de transgression (ST) supportant les dépôts de la "terrasse majeure" MTVI, attribuée à MISS 5.5 et 5.4, en Calabre méridionale.

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Le littoral de la Calabre méridionale présente une "terrasse majeure", TMVI, dont les dépôts se sont mis en place au cours des sous-stades (MISS) 5.5 et 5.4. La succession (Fig 60-E) des surfaces de transgression (ST) détectées sous la topographie de la "terrasse majeure" TMVI, n'y est apparemment pas sans rapport avec d'autres "évènements" qui se sont produits pendant ce même intervalle de temps :

- En première place, figurent des épisodes de réchauffement du climat, qui ont été enregistrés sur les courbes isotopiques provenant de forages opérés dans les calottes glaciaires (Fig 60-A) ou d'échantillons prélevés dans des stalagmites (Fig 60-B).

- Ces changements climatiques ont provoqué une fonte des glaces et des décharges d'icebergs à l'origine d' "apports détritiques glaciaires" (Fig 60-C), qui ont été détectés dans des forages de sédiments. Il en est de même de nos jours, où le réchauffement climatique comporte des conséquences semblables aux dépens des calottes glaciaires. Dans le passé, les "apports détritiques glaciaires" (IRD events, "évènements de HEINRICH" et "mini-évènements de HEINRICH ") ont été mis en rapport avec des épisodes de refroidissement du climat, en raison de la présence, dans ces matériaux, de faunes froides (Neogloboquadrina pachyderma s.), séjournant dans les eaux océaniques de surface. Ils ont été mis en relation, récemment (S.J.A. JUNG et D. KROON, 2011), avec les maxima de vitesse des transgressions glacio-eustatiques figurant sur la courbe KL11 à haute résolution au cours du stade 3.

- La fréquence des oscillations du niveau de la mer figurant, à l'échelle du millénaire, sur la courbe à haute résolution KL11 (Fig 60-D) portant sur une partie du sous-stade (MISS) 5.5, n'est apparemment pas sans relation avec les multiples épisodes de genèse des anciennes formes de terrain fossiles constituant les surfaces de transgression successives qui se sont inscrites dans le continent calabrais. Les anciennes formes de terrain fossiles sont représentées, "en écorché", sans les dépôts qu'elles supportent. Leur étagement n'est pas sans rappeler celui des "terrasses d'abrasion", tel qu'il est représenté par K.R. LAJOIE (1986), notamment. Mais il ne s'agit pas d'anciennes formes de terrain subaériennes, même si l'érosion différentielle provoquant leur exhumation peut parfois faire illusion. Ces anciennes formes de terrain fossiles, étagées, peuvent apporter la preuve, à cause de leur origine érosive et de l' " épaisseur caractéristique" des dépôts qu'elles supportent, des variations du niveau de la mer en rapport avec le glacio-eustatisme et ses changements de vitesse. Le plus souvent, créées pendant la phase initiale d'une transgression, elles sont composées d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a) à laquelle est associée une ancienne falaise fossile (2b). Plus rarement, elles ont été engendrées par les eaux courantes, qui ont sculpté d'anciennes vallées (1a) ou d'anciens vallons, ravins ou ravines (1b) pendant une régression. Les différents modes d'agencement des surfaces de transgression (ST), les unes par rapport aux autres, sont désignés par les lettres (a) à (f).

Figure 60 - Suite 2.

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CONCLUSION GÉNÉRALE

Quatre conclusions principales se dégagent :

1 ) Les dépôts constitutifs des terrasses marines construites reposent sur une surface de transgression, qui est constituée par d'anciennes formes de terrain fossiles d'origine continen-tale ou marine, dont la genèse et la fossilisation sont en rapport avec des variations du niveau de la mer. De fait, elles ont été engendrées par une érosion exercée par les eaux courantes, au cours d'une régression, ou par la mer, pendant la phase initiale d'une transgression, leur fossilisation intervenant de toute façon pendant la durée de cette transgression.

2 ) La genèse de ces surfaces de transgression et leur fossilisation ne se sont pas produites à la date d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau, mais elles se sont opérées au fil du déroulement des oscillations glacio-eustatiques.

Des régressions, relève le creusement d'anciennes vallées par les principaux cours d'eau. S'y ajoute celui de vallons, de ravins et de ravineaux affluents, y compris sur les versants des interfluves comportant des dépôts de terrasse plus anciens.

Le façonnement d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine, comme le recul conco-mitant d'une ancienne falaise, se limitent, au contraire, à la phase initiale d'une transgression, à vitesse lente et faible profondeur d'eau.

La fossilisation de ces anciennes formes de terrain s'effectue, quant à elle, pendant toute la durée d'une transgression. Les sédiments qui assurent leur recouvrement comportent des variations de granulométrie, en rapport avec la profondeur d'eau, laquelle dépend des varia-tions de la vitesse de transgression. De la profondeur d'eau dépend également la possibilité d'un remaniement des apports continentaux en provenance des cours d'eau, des anciens versants de vallée ou des anciennes falaises, en cours de submersion puis de fossilisation. Ce remaniement leur confère une empreinte marine avérée. Il s'opère sous l'effet de l'agitation des vagues, qui prend fin quand la profondeur d'eau devient telle que celles-ci n'atteignent plus le fond de la mer, là où se déposent les matériaux alimentant la sédimentation trans-gressive. De leur côté, les anciennes plates-formes d'abrasion marine et les anciennes falaises, dont la genèse a pu bénéficier de la faible profondeur d'eau pendant la phase terminale d'une transgression, échappent à la fossilisation, qui ne peut affecter, sur une épaisseur significative, que celles qui ont été engendrées en phase initiale.

3 ) L'agencement des anciennes formes de terrain fossiles, les unes par rapport aux autres, délivre des indications significatives sur les variations du niveau de la mer, qui ont présidé à leur genèse et à leur fossilisation (voir Fig. 31).

Certaines d'entre elles sont complémentaires les unes des autres. Il en est ainsi d'une ancienne falaise (2b), qui a été engendrée dans le même temps qu'une ancienne plate-forme

CONCLUSION GÉNÉRALE

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d'abrasion marine (2a), au cours de la même phase initiale de transgression (voir Fig. 1.B).Toutefois la fossilisation de la plate-forme d'abrasion marine, dont la pente est généralement comprise entre 0,5 et 8°, s'opère progressivement au cours de son développement vers l'amont et du recul corrélatif de cette falaise, sous faible profondeur d'eau. Mais il n'en est pas de même de la fossilisation de la paroi, proche de la verticale, de l'ancienne falaise, qui ne peut intervenir qu'après que son recul a pris fin. Il s'ensuit que son revêtement peut incorporer des matériaux mis en place sous forte profondeur d'eau. Ces deux anciennes formes de terrain fossiles, génétiquement associées, constituent le type le plus fréquemment observé de surface de transgression (ST). Un autre type est représenté par d'anciennes formes de terrain engen-drées, à diverses échelles, depuis la vallée d'un cours d'eau principal jusqu'à celle d'un simple ravin, par le travail de creusement propre aux eaux courantes (voir Fig. 1-A).

En fait, il arrive le plus souvent qu'une surface de transgression en recoupe une autre. Le cas de recoupement le plus fréquent (mode 1) est celui du sectionnement d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a) par une ancienne falaise elle aussi fossile (2b) (voir Fig. 8, 12, 41 et 45). Il dénote la succession de deux phases initiales de transgressions successives. À l'inverse, il est plus rare qu'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile tranche une ancienne falaise fossile. Ce cas (mode 2) révèle la succession de deux hauts niveaux marins, dont la position du plus ancien des deux est plus basse que celle de celui qui lui fait suite. Il peut se présenter au cours d'une déglaciation. Il en est ainsi pendant la Termination II, en aval du transect (C) au nord-est du Capo dell'Armi (Fig. 41-A et 41-B), en rive droite du Vallone Catrica (Fig. 47-B et 49), ainsi qu'à deux reprises sur celle du Serro di Giunta (Fig. 50-B) et même trois fois sur celle de Bovetto (Fig. 50-C).

Plus rarement encore, apparaît (mode 3) le recoupement d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine, qui date de la phase initiale d'une transgression, par d'anciennes formes de terrain, fossiles elles aussi, qui ont été engendrées par le travail des eaux courantes au cours d'une régression suivante (voir Fig. 52-B, 57-A et 57-B) ; ou encore (mode 4) celui de ces dernières par une ancienne falaise fossile (voir Fig. 53). Plus complexe est la combinaison d'anciennes formes de terrain fossiles, qui ont été creusées sous l'action des eaux courantes pendant une régression, avec celles qui ont été engendrées par l'abrasion marine pendant la phase initiale de la transgression suivante (mode 5). Les premières sont d'anciennes vallées datant d'une régression, tandis que des plates formes d'abrasion marines se sont développées sur les interfluves à la faveur de la transgression suivante (voir Fig. 52-A). L'emboîtement complet (mode 6) d'une surface de transgression dans un dépôt de terrasse reposant sur une surface de transgression précédente (voir Fig. 41, dépôt III) témoigne, lui aussi, de deux oscillations successives.

4 ) C'est ainsi qu'en Calabre méridionale, la "terrasse majeure" TMVI, attribuée aux sous-stades 5.5 et 5.4, peut être tenue pour composée de plusieurs dépôts de terrasse successifs, reposant sur plusieurs surfaces de transgression (ST) distinctes (voir Fig. 60-E). Ces dépôts s'y succèdent en plus grand nombre que d'autres dépôts observés par ailleurs :

- les trois dépôts (voir Fig. 36-B) principalement détritiques (5e1, 5e2 et 5e3) signalés sur la côte érythréenne de la Mer Rouge (H. BRUGGEMANN et al., 2004).

- les trois terrasses récifales (T-5b, T-5a, T-4) rapportées au sous-stade 5.5 (voir Fig. 36-C) à la Barbade (G. SCHELLMANN et U. RADTKE, 2004) ;

- les trois "terrasses mineures" (VIIa, VIIb et VIIc) dont se compose la terrasse récifale VII, de même âge, dans la Péninsule de Huon (T.M. ESAT et Y. YOKOYAMA, 2006) ;

- et les quatre unités stratigraphiques distinctes, d'âges compris entre 123 et 114 ka (voir Fig. 36-C3) aux Bahamas (W.G. THOMPSON et al., 2011).

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De fait, au nord-est du Capo dell'Armi (voir Fig. 41), le tiers supérieur de la "terrasse majeure" TMVI présente trois dépôts de terrasse successifs. Le bord interne de la première des anciennes plates-formes d'abrasion marine fossile qui les supportent, se trouve actuelle-ment à une altitude de 165,35 m et celui de la dernière des trois à 151,2 m.

À l'est de Villa San Giovanni, la "terrasse majeure" TMVI comporte, dans son tiers inférieur, trois dépôts de terrasse distincts en rive droite du vallon de Campo Piale (voir Fig. 44), entre l'altitude du bord externe de la première des anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles (130,1 m) et celle (118,5 m), proche de son bord interne, d'une troisième ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, qu'il est donné d'y observer.

Dans son tiers médian, la même "terrasse majeure" TMVI en dévoile trois (voir Fig. 51), dont celui du milieu présente l'épaisseur la plus forte, dévoilant ainsi une oscillation d'une amplitude singulièrement plus grande au sein d'un lot de magnitude faible (voir Fig. 57-A).

5 ) Ce résultat confirme donc l'occurrence sur le terrain d'au moins trois des quatre oscil-lations glacio-eustatiques enregistrées sur la courbe à haute résolution KL11, qui ne repré-sente qu'une petite partie (15 %) de la période dite orbitale comprise entre 127 et 107 ka (voir Fig. 33-A et 60-D). De plus, il apporte un complément significatif à cette courbe, à des dates plus récentes que celles des quatre oscillations y figurant. Cette succession est d'ailleurs suggérée par la variabilité eustatique, de fréquences suborbitales et d'amplitude faible, qui est inscrite sur la courbe à haute résolution KL09 pendant cette même période orbitale (voir Fig. 60-D). Il se trouve aussi que sur la courbe KL09 à haute résolution, se détache un pic d'amplitude plus forte que les précédents, entre 127 ka et GIS25 (voir Fig. 33-A et 60-D). Il se confond avec celui qui figure, dans la même position, sur la courbe KL11, au delà de sa partie bénéficiant d'un enregistrement à haute résolution. Il n'est peut-être pas sans rapport avec le pic isotopique figurant vers 119,7 ka sur la courbe des spéléothèmes de l'Antro del Cochia (voir Fig. 33-F et 60-B). Viennent ensuite d'autres oscillations d'amplitude faible. De la même façon, l'"épaisseur caractéristique" (EC) exceptionnelle du dépôt de terrasse affleurant sur les deux versants du Vallone Catrica, en position médiane au sein de la "terrasse majeure" TMVI, suggère l'intercalation d'un épisode singulier au cours de la succession de ses dépôts.

6 ) De plus, il a été proposé une corrélation chiffrée entre les variations de la température de l'air et celles du niveau de la mer (S. RAHMSTORF, 2007). Ainsi, entre 14 et 9 ka, la valeur avancée est d'environ 50 m pour 3°C (E. BARD et al., 2010). Or plusieurs des fluctuations thermiques figurant sur la courbe EPICA Dôme C (J. JOUZEL et al., 2007) au cours du dernier interglaciaire (voir Fig. 60-A), présentent une augmentation de température comprise entre 0,3 et 1,4°C, équivalente, sur cette base, à une élévation du niveau de la mer de l'ordre de 2,5 à 22 m. Parmi toutes les fluctuations, celles qui atteignent ces valeurs sont au nombre de neuf, depuis la toute première, qui a connu l'augmentation maximale, jusqu'à celle ayant précédé le long déclin vers le minimum thermique du sous-stade 5.4. Ces variations rapides de tempéra-ture ne sont sans doute pas sans rapport avec les décharges répétées d'icebergs (voir Fig. 60-C), qui alimentent largement l'élévation du niveau de la mer et qui délivrent des eaux froides et peu salées, autrefois attribuées aux épisodes de refroidissement des eaux océaniques en rapport avec ceux du climat.

7 ) En comparaison, la relation est établie, pour le stade 3, entre la succession des dépôts détritiques des terrasses IIIb, IIIc2 et IIIc1, IIa et IIb du transect de Tewai dans la Péninsule de Huon (J. CHAPPELL, 1983) et les oscillations de la courbe eustatique à haute résolution KL11 (M. SIDDALL et al. 2008), même de faible amplitude, qui résultent des épisodes, parfois de

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courte durée, de réchauffement climatique et donc de la fonte des glaciers ou des décharges d'icebergs qu'ils entraînent (voir Fig. 3 et 30-B). Pour MISS 5.5, la Calabre méridionale comporte un témoignage géomorphologique de variations rapides du niveau de la mer plus complet que celui invoqué récemment à la Barbade (W.G. THOMPSON et al., 2011), en vue de corroborer celles inscrites sur la courbe KL11 à haute résolution. Il est délivré par l'identi-fication des anciennes formes de terrain fossiles, qui supportent les sédiments transgressifs des dépôts de terrasse construite. Cette lecture géomorphologique des limites stratigraphiques profondes des dépôts de terrasse impose, pendant toute la durée de MISS 5.5 et de MISS 5.4, une succession de variations du niveau de la mer, dont la plupart sont ici aussi d'amplitude faible et qui se déroulent également à l'échelle du millénaire.

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TABLE DES MATIÈRES

Figure 1 - Terrasses d'abrasion, anciennes lignes de rivage de haut niveau etmaxima eustatiques, (d'après K.R. LAJOIE, 1986, figures 6.2A et 6.6). ……………..

Figure 2 - Terrasses récifales, variations climatiques rapides, décharges sporadiques d'icebergs et oscillations glacio-eustatiques de haute fréquence au cours du stade 3 (transect de Bobongara, Péninsule de Huon, Nouvelle Guinée, d'après J. CHAPPELL,2002). ………………………………………………………………………….………

Figure 2 - Suite. ………………………………………………………………………

Figure 3 - Implantation des sédiments transgressifs d’un dépôt de terrasse marine construite dans une plaque continentale en cours de soulèvement. ………………..…

Figure 4 - Deux méthodes d'évaluation de l'épaisseur des dépôts récifaux mis en place au cours d'une transgression. …………………………………………..………

Figure 5 - Érosion du point de jonction entre une ancienne plate-forme d'accumulation marine et l'ancienne falaise subaérienne qui lui est associée dans la même topographie de terrasse, en raison de la fragilité des sédiments détritiques meubles. Calabre centrale, littoral ionien de la Sila du Nord-Est. ……………………

Figure 6-A - Reconstruction géométrique du bord interne d'une ancienne plate-forme d'accumulation marine fossile à son point de jonction avec une ancienne falaise subaérienne et fossile. Cas de la Calabre centrale, littoral ionien de la Sila du Nord-Est (d'après L. CAROBENE, 2003, figure 20). ………………………..…………

Figure 6-B - Reconstruction géométrique du bord interne d'une ancienne plate-forme d'accumulation marine fossile à son point de jonction avec une ancienne falaise subaérienne et fossile. Cas de la Calabre méridionale, sur la bordure orientale du Détroit de Messine, lieu-dit Acciarello, au sud de Villa San Giovanni. ……………..

Figure 7 - Dépôt colluvial, recouvrant un sable marin, après un épisode d'érosion intermédiaire. Calabre méridionale, bordure orientale du Détroit de Messine, Pezzo Superiore, au nord de Villa San Giovanni. ………………………………….…

Figure 8 - Érosion complète d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, y compris de son point de jonction avec une ancienne falaise subaérienne et fossile, avant la mise en place d'un dépôt continental sur les sédiments marins (Côte du Cotentin, d'après S. COUTARD et al., 2005). ……………………………….

Figure 9 - Topographie d'accumulation colluviale et anciennes formes de terrain fossiles sous-jacentes, sur le littoral ionien de la Calabre centrale (d'après E. SANTORO et al., 2009). ……………………………………………………………

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TABLE DES FIGURES

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Figure 10 - Découpage d'une croupe d'interfluve en plusieurs buttes séparées par des failles ? Ou plusieurs dépôts de terrasse successifs ? Calabre centrale, littoral ionien de la Sila du Nord-Est (d'après L. CAROBENE, 2003, et selon E. SANTORO et al., 2009). ……………………………………………..……………………………

Figure 11 - Replat latéral résultant d'une érosion différentielle. Calabre méridionale, vallée franchie au km 22 de la SS 106, entre le Capo dell'Armi et la Fiumara Molaro . ………………………………………………..………………………………

Figure 12 - Terrasses de culture et anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles étagées, en Calabre méridionale, sur bordure orientale du Détroit de Messine, en rive droite de la Fiumara di Gallico. ………………………………………………………

Figure 13 - Anciennes formes de terrain résultant du travail des eaux courantes, pendant une régression et fossilisées sous des sédiments marins pendant une transgression suivante. Calabre méridionale, à l'est de Locri. …………..……………

Figure 13 - Suite : Calabre méridionale, à l'est de Villa San Giovanni, et Péninsule du Cap Bon, en Tunisie. …………….……………………………………………………………

Figure 14 - Deux anciennes formes de terrain complémentaires résultant de l'abrasion marine : une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile et l'ancienne falaise fossile, qui lui est associée dans la même surface de transgression supportant des sédiments marins détritiques. Calabre méridionale, entre Gerace et Locri. ……..

Figure 14 - Suite 1 : Calabre méridionale : travaux autoroutiers entre les sorties de Villa San Giovanni et de Campo Calabro. ……………………………………………

Figure 14 - Suite 2 : Calabre méridionale, au sud-est de Villa San Giovanni. ………

Figure 15 - Ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, dont la pente se relève vers l'amont, et en voie d'exhumation en aval. Calabre méridionale, horst de Matiniti, à l'est de Villa San Giovanni. ……………………………………..…….

Figure 16 - Anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles, inscrites dans des couches progradantes, et recouvertes par un "conglomérat de base", surmonté d'un sable marin altéré. Calabre méridionale. ………………...……………………………

Figure 17 - Ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, recouverte d'un "conglomérat de base", auquel font suite en (A), un dépôt de granulométrie fine, en (B) un apport continental, issu d'un cours d'eau à chenaux en tresses. Calabre méridionale. ……………………………………………………………………………

Figure 18 - Anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles, superposées. Calabre méridionale, sur bordure orientale du Détroit de Messine, lieu-dit Tratti, entre le Catona et le Gallico. …………………..………………………………………………

Figure 19 - Deux "modèles" de surface de transgression engendrée par l'érosion marine. ……………………………………………………………………………….

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Figure 20 - Deux représentations géomorphologiques de la limite stratigraphique profonde d'un dépôt de terrasse marine construite, avec ou sans ancienne falaise fossilisée par le dépôt marin. …………………………………………………………

Figure 21 - Des surfaces de transgression, composées d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile et d'une ancienne falaise fossile, supportant des sédiments franchement marins sur le littoral tyrrhénien de la Calabre septentrionale. ……..……

Figure 21 - Suite 1 : sur le littoral ionien de la Calabre septentrionale, les sédiments fossilisant l'ancienne plate-forme d'abrasion marine sont constitués par des apports continentaux à la sédimentation marine. ……………..………………………………

Figure 21 - Suite 2 : dans le Vallone Bovetto, en Calabre méridionale, les sédiments fossilisant l'ancienne plate-forme d'abrasion marine sont également constitués par desapports continentaux à la sédimentation marine. ……………..………………………

Figure 22 - Surface de transgression, composée d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile et d'une ancienne falaise fossile, recouvertes par un dépôt comprenant un "conglomérat de base", suivi d'un apport continental provenant de la dégradation d'une falaise en cours de fossilisation. Calabre méridionale : A. massif du Capo Vaticano, route de Briatico à Conidoni ; B. bordure du Détroit de Messine,en rive droite du vallon de Campo Piale, à l'est de Villa San Giovanni. ………….…

Figure 22 - Surface de transgression, composée d'une ancienne plate-forme d'abrasionmarine fossile et d'une ancienne falaise fossile, recouvertes par un dépôt comprenant un "conglomérat de base", suivi d'un apport continental provenant de la dégradationd'une falaise en cours de fossilisation. Calabre méridionale : A. massif du Capo Vaticano, route de Briatico à Conidoni ; B. bordure du Détroit de Messine, en rive droite du vallon de Campo Piale, à l'est de Villa San Giovanni. ………………….…

Figure 23 - Suite : Calabre méridionale : versant de rive droite du Vallone Catrica,au nord du Capo dell'Armi. ……………………………………………………………

Figure 24 - Un ancien escarpement de ligne de faille, fossilisé et exhumé. Calabre méridionale : faille N20°E de Reggio de Calabre, entre la Madonna della Neve et le cimetière de Gallico. …………………………………………………………………

Figure 24 - Suite. ……………………………………………………………………..

Figure 25 - De la notion de niveau de base, appliquée à des cours d'eau et à un niveau de la mer stable, à celle de niveau de base d'une érosion exercée par des eaux courantes ou par la mer, en rapport avec un niveau de la mer instable. …..………….

Figure 26 - Élévation du niveau de la mer de nos jours et dans le passé. ……………

Figure 26 - Suite. ………………………………………………………………………

Figure 27 - Plage, et côte rocheuse à falaise, sur un littoral actuel. ……..……………

Figure 27 - Suite. ………………………………………………………………………

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Figure 28 - Évolution géomorphologique : du déclenchement du processus d'abrasionsuite à un abaissement du niveau de la mer, jusqu'à la fin du recul d'une falaise vive ; depuis sa fossilisation jusqu'à son exhumation actuelle. ………………………………

Figure 28 - Suite 1.

Figure 28 - Suite 2. ……………………………………………………………………

Figure 28 - Suite 3. ……………………………………………………………………

Figure 29. Une terrasse d'abrasion "fini-transgressive", en continuité topographique avec une terrasse construite ? Ou une ancienne plate-forme d'abrasion marine d'abordfossile, puis exhumée ? ………………………………………………………………

Figure 30 - L'"épaisseur caractéristique" des sédiments transgressifs d'un dépôt de terrasse marine construite de matériaux détritiques, principes et application. ……….

Figure 30 - Suite 1. ……………………………………………………………………

Figure 30 - Suite 2. ……………………………………………………………………

Figure 31 - Divers modes d'agencement de surfaces de transgression successives entre elles ; leurs rapports avec le dessin d'une courbe eustatique ; et leurs conséquences sur lisibilité des anciennes formes de terrain fossiles et sur la préservation des anciennes lignes de rivage de haut niveau et la lisibilité des anciennes formes de terrain fossiles. …………………………………………………

Figure 32 - Haut niveau, prisme de haut niveau et dépôts de haut niveau. ……………

Figure 33 - Variabilité eustatique et variabilité isotopique au cours du dernierinterglaciaire et au début de la dernière glaciation. ……………………………………

Figure 33 - Suite. ………………………………………………………………………

Figure 34 - Plusieurs "sous-unités" stratigraphiques récifales attribuées au dernier interglaciaire et délimitées par d'anciennes formes de terrain fossiles sur la côte orientale de La Barbade (d'après R.C. SPEED et I. CHENG, 2004, figures 7 et 5). ……

Figure 34 - Suite. ………………………………………………………………………

Figure 35 - Plusieurs "cycles d'oscillations suborbitales du niveau de la mer" pendant sous-stade 5.5, sans prise en compte des limites géomorphologiques profondes des dépôts datés, sur la côte orientale de La Barbade (d'après W.G. THOMPSON et S.V. GOLDSTEIN, 2005, figure 2). …………………………………………………………

Figure 36 - De deux à trois dépôts de terrasse attribués au sous-stade 5.5, chacun d'eureposant sur une surface de transgression constituée par d'anciennes formes de terrainfossiles engendrées par une érosion continentale ou marine. …………………………

Figure 36 - Suite 1. ……………………………………………………………………

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Figure 36 - Suite 2. ……………………………………………………………………

Figure 37 - La Calabre méridionale dans son contexte tectonique : tectonique des plaques et tectonique cassante ; déformation intersismique globale (1,3 à 1,4 m/ka) et failles sismiques (1783, 1908). …………………………………………………….

Figure 38 - "Terrasses majeures" en Calabre méridionale, sur la bordure orientale du Détroit de Messine, entre Ravagnese et Bovetto. ……………………………………

Figure 39 - Carte de la distribution géographique et de l'âge attribué aux "terrasses majeures", de TMVI (sous-stade 5.5) à TMII (stade 3), de Calabre méridionale, entre Santa Trada et le Capo dell'Armi. ……………………………………………………

Figure 40 - Localisation des topographies d'interfluve et des sites de mesure dans le tiers supérieur de la "terrasse majeure" TMVI, attribuée au dernier interglaciaire, en Calabre méridionale, sur le littoral ionien, au nord-est du Capo dell'Armi. …………

Figure 41 - Quatre surfaces de transgression, se composant chacune d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile et d'une ancienne falaise fossile, sur les cent cinquante premiers mètres de la "terrasse majeure" TMVI, attribués au dernier interglaciaire, en Calabre méridionale, sur le littoral ionien, au nord-est du Capo dell'Armi (sous l'interfluve (C) portant le point de mesure 164,23 m). ………………

Figure 41 - Suite 1. ……………………………………………………………………

Figure 41 - Suite 2. ……………………………………………………………………

Figure 41 - Suite 3. ……………………………………………………………………

Figure 42 - Trois unités stratigraphiques distinctes sur les cent cinquante premiers mètres de la "terrasse majeure" TMVI, attribués au dernier interglaciaire, en Calabre méridionale, sur littoral ionien, au nord-est du Capo dell'Armi (sous l'interfluve (A) portant les points de mesure 179,92 m, 179,43 m, 170,23 m et 162,31 m). …………

Figure 42 - Suite 1. ……………………………………………………………………

Figure 42 - Suite 2. ……………………………………………………………………

Figure 42 - Suite 3. ……………………………………………………………………

Figure 43 - Encroûtement, érosion différentielle et mise en évidence de deux des unités stratigraphiques du tiers supérieur de la "terrasse majeure", attribué au dernier interglaciaire, en Calabre méridionale, sur l'interfluve (B) portant le point de mesure 170,61 m, au nord-est du Capo dell'Armi. ……………………………………………

Figure 43 – Suite. ………………………………………………………………………

Figure 44 - Plusieurs surfaces de transgression dans le tiers inférieur de la "terrasse majeure" TMVI, terrasses de culture et dépôts de terrasse, en Calabre méridionale, sur la bordure orientale du Détroit de Messine, en rive gauchedu vallon de Campo Piale, à l'est de Villa San Giovanni. ………………………………………………….

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Figure 44 - Suite. ………………………………………………………………………

Figure 45 - Une surface de transgression, composée d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile et d'une ancienne falaisefossile, recoupant une ancienneplate-forme d'abrasion marine fossile, d'âge antérieur, et le dépôt qu'elle supporte, en Calabre méridionale, sur la bordure orientale du Détroit de Messine, sur leversant nord du vallon de Campo Piale, à l'est de Villa San Giovanni. ………………

Figure 45 - Suite 1. ……………………………………………………………………

Figure 45 - Suite 2. ……………………………………………………………………

Figure 46 - Trace d'une ancienne falaise fossile, en Calabre méridionale, sur la bordure orientale du Détroit de Messine, sur le versant nord du vallon de Campo Piale, à l'est de Villa San Giovanni. …………………………………………………

Figure 46 - Suite. ………………………………………………………………………

Figure 47 - Une surface de transgression, composée d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile et d'une ancienne falaise fossile, recoupée par une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, sur le littoral ionien de la Calabre méridionale, en rive droite du Vallone Catrica, au nord du Capo dell'Armi. ………………………

Figure 47 - Suite. ………………………………………………………………………

Figure 48 - Amputation de toute la partie supérieure d'un dépôt de terrasse, et disparition consécutive de tout indice d'une ancienne ligne de rivage de haut niveau, en raison de la succession de deux maxima eustatiques, dont la position du premier est plus basse que celle du second. ……………………………………………………

Figure 49 - Deux exemples de troncature d'une ancienne falaise fossile par uneancienne plate-forme d'abrasion marine fossile appartenant à une surface de transgression (ST) plus récente. ………………………………………………………

Figure 50 - Plusieurs surfaces de transgression au cours de l'avant dernière déglaciation (Termination II). …………………………………………………………

Figure 50 - Suite 1. ……………………………………………………………………

Figure 50 - Suite 2. ……………………………………………………………………

Figure 50 - Suite 3. ……………………………………………………………………

Figure 50 - Suite 4. ……………………………………………………………………

Figure 51 - "Terrasse majeure" (TMVI), "terrasses mineures", terrasses de culture et dépôts de terrasse, en Calabre méridionale, sur la bordure orientale du Détroit de Messine, sur le versant nord de la vallée du Torrente Campanella, à l'est de Villa San Giovanni. …………………………………………………………………………

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Figure 51 - Suite. ………………………………………………………………………

Figure 52 - Surface de transgression de profil irrégulier (1b), engendrée par les eaux courantes, surmontant puis recoupant une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), en Calabre méridionale, sur la bordure orientale du Détroit de Messine,sur le versant nord du Torrente Campanella, à l'est de Villa San Giovanni. …………

Figure 53 - Une ancienne falaise fossile (2b), associée à une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile (2a), et recoupant une ancienne topographie fossile, engendrée par l'action des eaux courantes (1b), en Calabre méridionale, sur la bordure orientale du Détroit de Messine, sur le versant nord du TorrenteCampanella. ……………………………………………………………………………

Figure 54 - La "terrasse majeure" TMVI dans son tiers médian – un dépôt de terrasse "précoce", tronqué, et un épais dépôt de terrasse "tardif" – sur le littoral ionien de la Calabre méridionale, sur l'interfluve de rive droite du Vallone Catrica, au nord duCapo dell'Armi. ………………………………………………………………………

Figure 54 - Suite. ………………………………………………………………………

Figure 55 - Une ancienne falaise fossile constituée d'anciennes formes de terrain d'origine continentale et marine, appartenant à une surface de transgression (ST) et recoupant une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile, sur le littoral ionien de la Calabre méridionale, en rive gauche du Vallone Catrica, au nord du Capo dell'Armi. ………………………………………………………………………………

Figure 55 - Suite. ………………………………………………………………………

Figure 56 - Géomorphologie de surface et anciennes formes de terrain fossiles sur le littoral ionien de la Calabre méridionale, en rive gauche du Vallone Catrica, au norddu Capo dell'Armi (vues de front et de profil). ………………………………………

Figure 56 - Suite. ………………………………………………………………………

Figure 57 - Anciennes formes de terrain fossiles d'origine marine et fluviatile sur le littoral ionien de la Calabre méridionale, sur le versant de rive droite du Vallone Catrica, au nord du Capo dell'Armi. ………………………………………………….

Figure 57 - Suite. ………………………………………………………………………

Figure 58 - Deux hypothèses sur l'origine des encroûtements inscrits sur les versantsdu Vallone Catrica, sur le littoral ionien de la Calabre méridionale, au nord du Capo dell'Armi. ………………………………………………………………………………

Figure 59 - Essai de reconstitution en trois dimensions de l'agencement des anciennes formes de terrain subaériennes ou fossiles et des dépôts de terrasse sur les deux versants du Vallone Catrica, s²ur le littoral ionien de la Calabre méridionale, au nord du Capo dell'Armi. ……………………………………………………………

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Figure 60 - Des épisodes de réchauffement climatiques à l'enregistrement géomorphologique consécutif aux variations du niveau de la mer en Calabre méridionale, au cours des sous-stades (MISS) 5.5 et 5.4. ……………………………

Figure 60 - Suite 1. ……………………………………………………………………

Figure 60 - Suite 2. ……………………………………………………………………

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TABLE DES MATIÈRES

AVANT-PROPOS …………………………………………………………….…..…… p. 3

INTRODUCTION ….…………………………………………….…………….……… 5

PREMIÈRE PARTIE : LA MÉTHODOLOGIE ……………………………….…… 11

Chapitre I - DE L'USAGE DES ANCIENNES FORMES DE TERRAIN SUBAÉRIENNES EN VUE DE LA MISE EN ÉVIDENCE DES VARIATIONS DU NIVEAU DE LA MER SELON LA NATURE DU SUBSTRAT …….…….… 13

I - LE CAS DES "TERRASSES D'ABRASION" EN ROCHES COHÉRENTES ……………………………………………………….….………. 13

II - LE CAS DES CONSTRUCTIONS RÉCIFALES …………………….……… 13

III - LE CAS DES TERRASSES CONSTRUITES DONT LE DÉPÔT EST CONSTITUÉ DE SÉDIMENTS DÉTRITIQUES MEUBLES …………….….. 16 1 ) Les érosions affectant des sédiments détritiques meubles ……….….…….. 16 a. Un relief d'érosion comportant de larges vallées entre de longs interfluves … 16 b. Une érosion pouvant entraîner la suppression du point de jonction entre une ancienne plate-forme d'accumulation marine et l'ancienne falaise subaérienne orrespondante ………………………………………….………. 17 c. Un recouvrement de ce point de jonction par un dépôt de pente ………..….. 17 d. Ces deux inconvénients se combinent, pour peu qu'une érosion intervienne aux dépens des sédiments marins avant la mise en place d'une couverture continentale ………………………………………………………………….. 17 e. Détérioration généralisée des anciennes plates-formes d'accumulation marine sous l'effet des eaux courantes dans des sédiments détritiques meubles ……………………………………………………………………… 19 f. Dégradation des anciennes falaises subaériennes …………………………... 26 2 ) L'aménagement de terrasses de culture ………………………………….… 27

Chapitre II- L'ORIGINE GÉOMORPHOLOGIQUE PROFONDE DES SURFACES DE TRANSGRESSION SUPPORTANT LES DÉPOTS DÉTRITIQUES DE TERRASSE MARINE CONSTRUITE, ET SA CONTRIBUTION À LA MISE EN ÉVIDENCE DES VARIATIONS DU NIVEAU DE LA MER …………………………………………………….……….... 31

I - D'ANCIENNES FORMES DE TERRAIN FOSSILES, LIMITES STRATIGRAPHIQUES PROFONDES D'UN DÉPÔT DE TERRASSE MARINE CONSTRUITE ……………………………………………………..…. 31 1 ) Certaines de ces anciennes formes de terrain fossiles résultent de l'action érosive des eaux courantes (Fig. 13) ……………………………………….…. 32 2 ) D'autres anciennes formes de terrain fossiles sont l'œuvre de l'érosion marine ………………………………………………………………………….. 35 a. La reconnaissance des anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles … 38 b. L'identification des anciennes falaises fossiles …………………………..…. 43 3 ) Des escarpements de ligne de faille …………………………………………. 45

TABLE DES MATIÈRES

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II - LA SIGNIFICATION EUSTATIQUE DES ANCIENNES FORMES DE TERRAIN FOSSILISÉES PAR DES SÉDIMENTS MARINS : LA PREUVE D'UNE OSCILLATION EUSTATIQUE COMPLÈTE ……………………….. 54

III - LA SIGNIFICATION EUSTATIQUE DES ANCIENNES FORMES DE TERRAIN FOSSILES D'ORIGINE MARINE : CHANGEMENT DE LA VITESSE D'ÉLÉVATION DU NIVEAU MARIN AU COURS D'UNE TRANSGRESSION ……………………………………………….……………… 57 1 ) La vitesse d'élévation du niveau de la mer de nos jours et dans le passé 57 a. Une vitesse d'élévation du niveau de la mer relativement lente, de nos jours 57 b. Des vitesses d'élévation du niveau de la mer beaucoup plus rapides qu'aujourd'hui entre la phase initiale et la phase finale de chaque transgression, dans le passé …………………………………………………. 60 2 ) De la phase initiale d'une transgression à sa phase intermédiaire : l'enregistrement géomorphologique d'un changement de vitesse de l'élévation du niveau de la mer au cours de l'histoire d'une transgression et la preuve de son occurrence ………………………………………………… 60 3 ) La phase terminale et le maximum eustatique d'une transgression : une efficacité érosive à débattre …………………………………………………… 69 a. La phase finale d'une transgression …………………………………………. 69 b. Le début de la régression suivante …………………………………………… 70 c. Le maximum eustatique n'est pas responsable du processus d'abrasion ……. 70

IV - LA MESURE DE L'"ÉPAISSEUR CARACTÉRISTIQUE" DES SÉDIMENTS TRANGRESSIFS D'UNE TERRASSE MARINE : ORIGINE GLACIO-EUSTATIQUE ET AMPLITUDE D'UNE TRANSGRESSION …… 73 1 ) Définition et procédure de mesure de l'"épaisseur caractéristique" ….…. 73 a. La question de la prise en compte de l'effet du jet de rive (hs) et de la profondeur des brisants (hb) ………………………………………………… 76 b. Un résultat par défaut, à cause des érosions et des possibilités d'observation 77 c. Un résultat plus proche du but recherché pour un âge plus récent et une pente plus faible de la surface de transgression ……………………………… 77 d. Une amplitude du soulèvement à ajouter …………………………………… 78 2 ) Le but de la mesure de l'"épaisseur caractéristique" ……………………… 78 a. La preuve d'une transgression d'origine glacio-eustatique …………………… 78 b. Une évaluation de l'amplitude de la transgression …………………………… 79 c. Un moyen de raccorder chaque séquence de dépôt d'un transect à un autre .. 79

V - LE MODE D'AGENCEMENT DES SURFACES DE TRANGRESSION, UNE APPROCHE DE LA POSITION RELATIVE DES HAUTS ET DES BAS NIVEAUX MARINS SUCCESSIFS ………………………………………… 79

VI - UNE VARIABILITÉ EUSTATIQUE À DÉDUIRE DU DÉNOMBREMENT DES SURFACES DE TRANSGRESSION AINSI CONSTITUÉES D'ANCIENNES FORMES DE TERRAIN FOSSILES …….. 82 1 ) Une stabilité intermittente du niveau de la mer ?............................................. 82 2 ) L'ambiguïté de la notion de "cortège sédimentaire de haut niveau" en termes de variabilité eustatique ……………………………………………..... 83 3 ) Le cas, exemplaire, de la fréquence des variations du niveau de la mer au cours du Dernier Interglaciaire …………………………………………… 83

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DEUXIEME PARTIE : DE L'IDENTIFICATION, EN CALABRE MÉRIDIONALE, D'ANCIENNES FORMES DE TERRAIN FOSSILES SUPPORTANT LES DÉPÔTS DES TERRASSES MARINES, À LA MISE EN ÉVIDENCE DES VARIATIONS DU NIVEAU DE LA MER AU COURS DES MISS 5.5 ET .4 …………………………………………………………………. 95

Chapitre I - LE CONTEXTE TECTONIQUE ET CHRONOLOGIQUE ……….… 99

I - LE RÔLE DE LA TECTONIQUE DES PLAQUES ET DE LA TECTONIQUE CASSANTE …………………………………………………….. 99

II - LES DONNÉES GÉOCHRONOLOGIQUES ………………………………… 100

Chapitre II - QUATRE SURFACES DE TRANSGRESSION, À L'EST DU CAPO DELL'ARMI, SUR UN PREMIER TIERS DE LA "TERRASSE MAJEURE" TMVI, ATTRIBUÉE AU DERNIER INTERGLACIAIRE …………107

I - UNE SURFACE DE TRANSGRESSION COMPORTANT UNE ANCIENNE FALAISE FOSSILE, RECOUPÉE PAR UNE ANCIENNE PLATE-FORME D'ABRASION MARINE FOSSILE D'ÂGE POSTÉRIEUR ……………………107

II - UNE SURFACE DE TRANSGRESSION INSCRITE DANS UN SUBSTRAT DE GRÈS DU MIOCÈNE SUPÉRIEUR ET D'ARGILES DU PLIOCÈNE INFÉRIEUR ………………………………………………………… 112

III - UNE SURFACE DE TRANGRESSION COMPORTANT UNE ANCIENNE FALAISE FOSSILE RECOUPANT UNE ANCIENNE PLATE- FORME D'ABRASION MARINE FOSSILE D'ÂGE ANTÉRIEUR ………… 118

IV - UNE SURFACE DE TRANSGRESSION EMBOÎTEE DANS UN DÉPÔT SUPPORTÉ PAR LA SURFACE DE TRANGRESSION PRÉCÉDENTE ……120

V - TROIS CONCLUSIONS FONDAMENTALES ……………………………… 123 1 ) D'anciennes formes de terrain subaériennes et fossiles, délivrant un enregistrement des variations du niveau de la mer …………………………. 123 2 ) D'anciennes plates-formes d'abrasion marine fossiles dont le façonnement ne s'est pas effectué pendant un maximum eustatique ……………………… 123 3 ) Des variations du niveau de la mer de fréquences suborbitales ……………123

Chapitre III - TROIS SURFACES DE TRANSGRESSION, VOIRE QUATRE, DANS LE TIERS SUPÉRIEUR DE LA "TERRASE MAJEURE" TMVI, ATTRIBUÉ À UNE PETITE PARTIE DU DERNIER INTERGLACIAIRE, EN RIVE DROITE DU VALLON DE CAMPO PIALE, À L'EST DE VILLA SAN GIOVANNI ………………………………………………………………………125

I - LE BORD EXTERNE D'UNE ANCIENNE PLATE-FORME D'ABRASION MARINE FOSSILE …………………………………….………………………… 125

II - UNE SURFACE DE TRANSGRESSION COMPORTANT UNE ANCIENNE FALAISE FOSSILE RECOUPANT LE BORD EXTERNE D'UNE ANCIENNE PLATE-FORME D'ABRASION MARINE PRÉCÉDENTE …………………………………………………………………… 125

III - UNE ANCIENNE PLATE-FORME D'ABRASION MARINE FOSSILE ET UN SEGMENT SUPÉRIEUR IDENTIFIABLE D'UNE ANCIENNE FALAISE FOSSILE …………………………………………………………….... 132

IV - ET PEUT-ÊTRE UNE QUATRIEME SURFACE DE TRANSGRESSION SOUS LE SITE DE MESURE 117,5 M …………………………………………. 135

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V - DE TROIS À QUATRE SURFACES DE TRANSGRESSION SUCCESSIVES …………………………………………………………………… 136

Chapitre IV - D'AUTRES SURFACES DE TRANSGRESSION SOUS LE TIERS MÉDIAN DE TMVI …………………………………………………………………. 137

I - DES SURFACES DE TRANSGRESSION TRONQUÉES, DATANT DE L'AVANT-DERNIÈRE DÉGLACIATION (TERMINATION II) ………… 137 1 ) Un agencement singulier des anciennes formes de terrain fossiles …………137 2 ) Une évolution géomorphologique particulière ………………………………137 3 ) Des rapports spécifiques avec l'eustatisme …………………………………. 142 4 ) Chronologie relative …………………………………………………………. 142

II - DES SURFACES DE TRANSGRESSION SUPPORTANT DES DEPÔTS D'ÉPAISSEUR MINEURE ………………………………………………………. 149 1 ) Le bord externe d'une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile …. 149 2 ) Une ST de type 1 (érosion continentale) recoupant la précédente de type 2 (érosion marine) ………………………………………………………... 153 3 ) L'ancienne falaise fossile d'une ST de type 2, recoupant une ST de type 1 sur son bord externe …………………………………………………… 153 4 ) Au total, trois oscillations postérieures au pic eustatique culminant de MISS 5.5, sans être les dernières de la période orbitale propre à MT VI .… 154

III - UNE SURFACE DE TRANSGRESSION, D'ORIGINE CONTINENTALE ET MARINE, SUPPORTANT UN DÉPÔT MARIN D'UNE ÉPAISSEUR EXCEPTIONNELLE, DANS LE TIERS MÉDIAN DE LA "TERRASSE MAJEURE" TMVI ……………………………………………………………….. 156 1 ) Deux anciens versants de vallée fossiles ……………………………………. 156 2 ) Une ancienne falaise fossile, recoupant une ancienne plate-forme d'abrasion marine fossile ……………………………………………………… 166 3 ) Un rôle notable de l'érosion différentielle ……………………………………166 4 ) Un âge plus tardif que celui d'autres dépôts sous-jacents à MTIV ….…… 167

IV - EN CONCLUSION : UN AGENCEMENT COMPLEXE DES SURFACES DE TRANSGRESSION SOUS LE TIERS MÉDIAN DE LA TERRASSE MAJEURE TMVI (Fig. 59) ……………………………………………………………. 167

CONCLUSION GÉNÉRALE ……………....…………………………………………. 173

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES ………………………………………………177

TABLE DES FIGURES …………………………………………………………………187

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Auteur : Pierre GUÉREMY.

Édition : Claude MARTIN (Physio-Géo).

Citation : GUÉREMY P. (2013) - Géomorphologie et variations globales du niveau de la mer.Physio-Géo (www.physio-geo.fr), collection "Ouvrages", 199 p.

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