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Les emplois illocutoires de pouvoir : approche synchronique et diachronique La tradition française (cf. Sueur 1979, 1983) distingue fondamentalement deux types d’emplois pour le verbe modal pouvoir : d’une part les emplois « radicaux »qui relèvent de la modalité du faire (cf. Kronning 1996, 2001) et que l’on subdivise en permission, capacité et possibilité matérielle et d’autre part l’emploi épistémique d’« éventualité » qui relève de la modalité de l’être, ce qui donne le tableau suivant, inspiré de Sueur (1979) et de Kronning (1996, 2001) : I. Emplois radicaux (Modalité du faire) a. permission b. capacité c. possibilité matérielle II. Emploi épistémique (Modalité de l’être) a. éventualité Selon le contexte dans lequel il est employé, un énoncé comme Marco, tu peux gagner l’étape peut avoir les quatre effets de sens mentionnés ci-dessus. Le but de cette communication n’est pas de commenter ou de modifier cette classification, nous l’avons fait à d’autres occasions (pour respecter l’anonymat des résumés nous ne donnons pas les références). Nous nous intéresserons ici à d’autres emplois, qui s’intègrent mal dans ce schéma. En effet, Le Querler (2001) signale tout une série d’emplois que l’on ne peut pas réduire au schéma ci-dessus sans perdre une partie de leur spécificité, parmi lesquels les suivants (nous avons ajouté l’« impératif poli » absent de l’analyse de Le Querler) : Concession : Elle peut pleurer, en tout cas, je n’irai pas la voir. Délibération : Je me demande où j’ai pu lire ça. Intensification Ce qu’il peut être agaçant ! Suggestion de faire Vous pouvez venir demain soir, si ça vous dit « Impératif poli » Pouvez-vous fermer la fenêtre s’il vous plaît ?

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Les emplois illocutoires de pouvoir : approche synchronique et diachronique

Les emplois illocutoires de pouvoir: approche synchronique et diachroniqueLa tradition franaise (cf. Sueur 1979, 1983) distingue fondamentalement deux types demplois pour le verbe modalpouvoir: dune part les emplois radicauxqui relvent de la modalit du faire (cf. Kronning 1996, 2001) et que lon subdivise en permission, capacit et possibilit matrielle et dautre part lemploi pistmique dventualit qui relve de la modalit de ltre, ce qui donne le tableau suivant, inspir de Sueur (1979) et de Kronning (1996, 2001):

I. Emplois radicaux (Modalit du faire)

a. permission

b. capacit

c. possibilit matrielle

II. Emploi pistmique (Modalit de ltre)a. ventualitSelon le contexte dans lequel il est employ, un nonc comme Marco, tu peux gagner ltape peut avoir les quatre effets de sens mentionns ci-dessus.

Le but de cette communication nest pas de commenter ou de modifier cette classification, nous lavons fait dautres occasions (pour respecter lanonymat des rsums nous ne donnons pas les rfrences). Nous nous intresserons ici dautres emplois, qui sintgrent mal dans ce schma. En effet, Le Querler (2001) signale tout une srie demplois que lon ne peut pas rduire au schma ci-dessus sans perdre une partie de leur spcificit, parmi lesquels les suivants (nous avons ajout limpratif poliabsent de lanalyse de Le Querler):Concession:

Elle peut pleurer, en tout cas, je nirai pas la voir.Dlibration:

Je me demande o jai pu lire a.

Intensification

Ce quil peut tre agaant!

Suggestion de faireVous pouvez venir demain soir, si a vous ditImpratif poli

Pouvez-vous fermer la fentre sil vous plat?Ces emplois, qui ont tous un rapport avec la force illocutoire de lnonc, semblent tre du type que Van der Auwera & Plungian (1998) appellent emplois postmodaux. Leur approche typologique suggre que de faon universelle lvolution diachronique que subissent les expressions modales est:

Modalit du faire ( modalit de ltre ( Valeurs postmodales (ou illocutoires)Nous avons eu loccasion de tester cette hypothse sur des corpus diachroniques franais. Les premiers rsultats de cette tude que nous souhaitons prsenter au 6e Colloque Chronos confirment, pour le franais au moins, le bien-fond des hypothses de Van der Auwera & Plungian. En ancien et en moyen franais, les emplois radicaux sont prdominants, alors que la valeur pistmique, bien quelle existe, est plutt rare. Les valeurs postmodales apparaissent mis part quelques occurrences isoles plus anciennes au XVIIe sicle et deviennent vraiment courantes au XVIIIe sicle. RfrencesKronning H. (1996). Modalit, cognition et polysmie: smantique du verbe modal devoir, Uppsala; Stockholm: Acta Universitatis Upsaliensis; Almqvist & Wiksell International.

Kronning, H. (2001). Pour une tripartition des emplois du modal devoir, Cahiers Chronos 8: 67-84.

Le Querler, N. (1996). Typologie des modalits, Caen: Presses Universitaires de Caen.

Le Querler, N. (2001). La place du verbe modal pouvoir dans une typologie des modalits, Sueur, J.-P. (1979). Une analyse smantique des verbes devoir et pouvoir, Le franais moderne 47.2: 97-120.

Sueur, J.-P. (1983). Les verbes modaux sont-ils ambigus?, in: J. David; G. Kleiber, (ds), La notion smantico-logique de modalit, Paris, Klincksieck, Collection Recherches Linguistiques, vol. 8, 165-182.

Van der Auwera, J.; Plungian, V. (1998). Modalitys semantic map, Linguistic Typology 2: 79-124.