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Mddecine et Maladies Infectieuses -- 1989 - - Spdcial Avril - 262 h 263 VIH ET CHIRURGIE* par J.P. CHIGOT'" RESUME 50 malades connus pour ~tre porteurs de VIH ont 6t6 op6rrs, 12 d'entre eux prrsentaient un SIDA. Aucun isolement systrmatique en chambre seule n'a 6t6 rralis6 ; un isolement du malade n'a 6t6 drcid6 qu'en fonction de la gravit6 de la situation clinique Le risque le plus important en chirurgie est le risque transfusionnel : de ce fait les indications de transfusion doivent ~tre limitres et les techniques d'auto-transfusion doivent ~tre drveloppres. Le drpistage systrmatique en chirurgie est inutile. Les mesures de prrvention au bloc comme en salle doivent ~tre parfaitement respectdes. Mots-cl~s : Chirurgie - VIH - Prrvention - Transfusion - Drpistage. Le nombre de patients porteurs du VIH est en augmentation constante notamment dans les services de chirurgie. Or c'est en chirurgie que les "contacts" du personnel soignant avec le sang sont peut-~tre les plus frrquents. Toutes les sprcialitrs chirurgicales sont concernres mais ce sont sans doute les services de chirurgie grn6rale qui le sont le plus. Ainsi dans notre service, a l'Hrpital de la Pitir, 50 malades VIH+ ont 6t6 oprrrs en 1987 : -- 5 malades prrsentaient une pathologie tumorale, 2 une perforation intestinale, 5 des abc~s. Dans tousles cas il s'agissait de SIDA reconnus. -- 10 malades VIH+ ont subi une splrnectomie pour purpura thromboprnique, 23 une biopsie, 5 la pose d'un bokier pour chimiothrrapie. D'autres malades, porteurs mrconnus du virus, ont certainement 6t6 oprrrs pendant la m~me p6riode ce qui fait que la frrquence des patients VIH+ en chirurgie est loin d'etre nrgligeable. QUELLE ATTITUDE ADOPTER POUR LES MALADES VIH+ ? En ce qui nous concerne, il n'y a aucun marquage apparent au niveau des pancartes des portes. L'information qu'il s'agit de VIH+ est donn6e au personnel soignant par le chirurgien responsable. Nous n'avons pas recours a * Communication prrsent6e aux HI~rnes Journres d'Hygi~ne Hospitali~re, tenues h l'H6pital de Bic~tre les 8 et 9septembre 1988 sous le titre: "VIH et Hygiene Hospitali~re". ** Groupe Hospitalier Piti6 - Salp&ri~re, 47-83 Bld de l'H6pital, F-75651 Paris cedex 13. 'Tisolement" en chambre seule des malades sauf dans certains cas pour des raisons psychologiques lires au terrain, parce qu'il s'agit d'un stade tr~s avanc6 de la maladie ou parce qu'il existe des complications infectieuses. En rralit6 notre attitude est identique a celle adoptre vis-a-vis des autres malades. La protection des malades vis-'h-vis du VIH Elle drcoule des prrcautions prises vis-a-vis des malades VIH+. De toute faqon aucune contamination d'un malade a un autre n'a jamais 6t6 rapportre. En rralit6 le seul et unique probl~me est celui de la transmission possible par les transfusions. Ce risque est actuellement tr~s faible ce qui n'6tait pas le cas auparavant (nous savons que 3 de nos oprrrs avant 1985 ont contract6 le SIDA). Toutefois, il ne peut ~tre totalement 61iminr. C'est pourquoi les indications de la transfusion doivent ~tre mfirement rrflrchies, racte chirurgical le plus atraumatique possible. Lorsqu'un saignement per-oprratoire est prrvisible il faut sfirement faire appel aux techniques d'autotransfusion. Reste le probl~me des greffes actuellement non rrsolu. La protection du personnel soignant I1 importe de souligner que le risque de contamination par le VIH est extr~mement faible (quelques dizaines de cas dans le monde dont 2 chirurgiens), largement infrrieur a celui de contamination par les virus de l'hrpatite. Toutefois, il existe et impose le respect de certaines prrcautions : -- Au bloc opgratoire tout malade VIH+, bien que l'intrr~t de cette mesure ne soit pas d6montrre (sauf s'il s'agit de patients surinfectrs) est oprr6 en fin de programme. Du linge a usage unique est utilisr. L'rquipe 262

VIH et chirurgie

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Page 1: VIH et chirurgie

Mddec ine e t M a l a d i e s In fec t ieuses - - 1989 - - Spdcia l Avr i l - 262 h 263

VIH ET CHIRURGIE*

p a r J . P . C H I G O T ' "

R E S U M E 50 malades connus pour ~tre porteurs de VIH ont 6t6 op6rrs, 12 d'entre eux prrsentaient un SIDA. Aucun isolement systrmatique en chambre seule n'a 6t6

rralis6 ; un isolement du malade n'a 6t6 drcid6 qu'en fonction de la gravit6 de la situation clinique Le risque le plus important en chirurgie est le risque transfusionnel : de ce fait les indications de transfusion doivent ~tre limitres et les techniques d'auto-transfusion doivent ~tre drveloppres. Le drpistage systrmatique en chirurgie est inutile. Les mesures de prrvention au bloc comme en salle doivent ~tre parfaitement respectdes.

Mots-cl~s : Chirurgie - VIH - Prrvention - Transfusion - Drpistage.

Le nombre de patients porteurs du VIH est en augmentation constante notamment dans les services de chirurgie. Or c'est en chirurgie que les "contacts" du personnel soignant avec le sang sont peut-~tre les plus frrquents. Toutes les sprcialitrs chirurgicales sont concernres mais ce sont sans doute les services de chirurgie grn6rale qui le sont le plus. Ainsi dans notre service, a l'Hrpital de la Pitir, 50 malades VIH+ ont 6t6 oprrrs en 1987 : - - 5 malades prrsentaient une pathologie tumorale, 2 une perforation intestinale, 5 des abc~s. Dans tousles cas il s'agissait de SIDA reconnus. - - 10 malades VIH+ ont subi une splrnectomie pour purpura thromboprnique, 23 une biopsie, 5 la pose d'un bokier pour chimiothrrapie.

D'autres malades, porteurs mrconnus du virus, ont certainement 6t6 oprrrs pendant la m~me p6riode ce qui fait que la frrquence des patients VIH+ en chirurgie est loin d'etre nrgligeable.

Q U E L L E A T T I T U D E ADOPTER POUR LES M A L A D E S VIH+ ?

En ce qui nous concerne, il n'y a aucun m a r q u a g e apparent au niveau des pancartes des portes. L'information qu'il s'agit de VIH+ est donn6e au personnel soignant par le chirurgien responsable. Nous n'avons pas recours a

* Communication prrsent6e aux HI ~rnes Journres d'Hygi~ne Hospitali~re, tenues h l'H6pital de Bic~tre les 8 et 9septembre 1988 sous le titre: "VIH et Hygiene Hospitali~re". ** Groupe Hospitalier Piti6 - Salp&ri~re, 47-83 Bld de l'H6pital, F-75651 Paris cedex 13.

'Tisolement" en chambre seule des malades sauf dans certains cas pour des raisons psychologiques lires au terrain, parce qu'il s'agit d'un stade tr~s avanc6 de la maladie ou parce qu'il existe des complications infectieuses. En rralit6 notre attitude est identique a celle adoptre vis-a-vis des autres malades.

La protection des malades vis-'h-vis du VIH

Elle drcoule des prrcautions prises vis-a-vis des malades VIH+. De toute faqon aucune contamination d'un malade a un autre n'a jamais 6t6 rapportre. En rralit6 le seul et unique probl~me est celui de la transmission possible par les t r a n s f u s i o n s . Ce risque est actuellement tr~s faible ce qui n'6tait pas le cas auparavant (nous savons que 3 de nos oprrrs avant 1985 ont contract6 le SIDA). Toutefois, il ne peut ~tre totalement 61iminr. C'est pourquoi les indications de la transfusion doivent ~tre mfirement rrflrchies, racte chirurgical le plus atraumatique possible. Lorsqu'un saignement per-oprratoire est prrvisible il faut sfirement faire appel aux techniques d'autotransfusion.

Reste le probl~me des greffes actuellement non rrsolu.

La protection du personnel soignant

I1 importe de souligner que le risque de contamination par le VIH est extr~mement faible (quelques dizaines de cas dans le monde dont 2 chirurgiens), largement infrrieur a celui de contamination par les virus de l'hrpatite. Toutefois, il existe et impose le respect de certaines prrcautions : - - A u b l o c o p g r a t o i r e tout malade VIH+, bien que l'intrr~t de cette mesure ne soit pas d6montrre (sauf s'il s'agit de patients surinfectrs) est oprr6 en fin de programme. Du linge a usage unique est utilisr. L'rquipe

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chirurgicale doit porter une double paire de gants (h changer r6gulibrement si l'intervention est longue), des lunettes h protection lat6rale.

L'instrumentation est bien stir la m6me puisqu'elle est de toute faqon st6rilis6e ~ haute temp6rature. En ce qui concerne le mat6riel anesth6sique, bien que la conta- mination par l'air semble impossible, le circuit externe des respirateurs est ~ usage unique, les masques ne sont pas r6utilis6s avant st6rilisafion.

En cas de piqfires ou de plaie, il est proc6d6 ~ une d6sinfection par de l'alcool iod6.

En salle d'hospitalisation outre les pr6cautions prises lors des pr61~vements (pas de recapuchonnage) il importe d'adopter pour les soins certaines mesures : lavage des mains (ni trop fr6quent, ni trop intensif), port de gants, blouses jetables, utilisation de mat6riel h usage unique.

C O N C L U S I O N

Malgr6 la fr6quence des VIH+ (reconnus ou non) en chirurgie le risque de contamination est minime, sfirement largement inf6rieur h celui de l'h6patite. Certaines mesures nous semblent inutiles comme risolement des malades, le d6pistage syst6matique.

Ce qui importe c'est qu'une bonne information soit faite, ni trop alarmiste, ni trop optimiste et qu'~ l'occasion du SIDA on revienne aux mesures d'asepsie et de protection qui devraient 61re la r~gle et ne sont malheureusement pas toujours respect6es, loin s'en faut. Ni par les chirurgiens, ni par le personnel infirmier. Outre leur int6r6t pour limiter la diffusion de la maladie (quoique les mesures d'ordre g6n6ral dans la population soient certainement plus importantes) ces mesures devraient contribuer ~ une meilleure pr6vention de l'h6patite et des infections hospitali~res.

S U M M A R Y : HIV AND SURGERY

50patients known to be HIV infected, have been operated, 12 of them had AIDS. No systematic isolation in a single bedroom has been done ; the isolation was only decided regarding the severity of the patient's clinical state. The most important risk in surgery is transfusion ; there by, transfusions must be limited and the technique for self-transfusion be developped. It is useless to do systematic detection in surgery. The prevention measures in the surgery unit as well as in the operating theatre must be perfectly respected.

Key-words : Surgery - HIV - Prevention - Transfusion.

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