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VINS DEBORDEAUX

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ALERTER

Notre analyse de 38 grandscrus de Bordeaux etde deux vins non classesmontre que la plupartsont contaminés pardes résidus de pesticides.Toutefois, la situations'améliore: leurconcentration est, enmoyenne, trois fois moinsélevée que lors des testsmenés il y a quatre ans.

GRANDS CRUSDE BORDEAUX

IP ROY'AURIMAGES/AFP

Leo, peatiddedtou/ouna ta, mota

MORGAN BOURVEN AVEC ËRIC BONNEFF

En médecine, on dit que les antibiotiquesne sont pas automatiques; cest pareildans la vigne: les produits phytosani-taires ne sont plus systématiques», se

félicite Allan Sichel, président du Conseil inter-professionnel du vin de Bordeaux (CIVB). Aprèsdes décennies d'utilisation intensive dans les vignes,

les produits chimiques reculenten viticulture. Pour le vérifier,nous avons recherche, dans38 grands crus de Bordeaux'11

(des millésimes 2014) et deuxvins non classes (un 2014 et un

2015), 177 molécules issues de pesticides, fongi-cides, herbicides ou insecticides. À 40 € la bouteille,en moyenne, pour les grands crus, on s'attend à

Dea oéaultata quimontnent tea efôonta

ftounnia pan la

ce que ces derniers soient irréprochables. Mais,surprise, la plupart des bouteilles que nousavons analysées sont contaminées et contiennentde une à six molécules. Au total, ll composéschimiques de synthèse différents ont été détectés.Seulement trois bouteilles sont épargnées (Châ-teau Durfort-Vivens, Château Pontet-Canet,Château Clerc Milon) et d'autres ne contiennentque des traces trop faibles pour être quantifiées(Château Beychevelle, Alter Ego de Palmer,Château Malescot Saint-Exupéry).

Une amélioration notableTrois bouteilles sans résidus sur quarante testées : cesrésultats peuvent sembler inquiétants. Ils sont plutôtrévélateurs d'efforts accomplis dans ce domaine. Ily a quatre ans, notre test portant sur 92 bouteillesen provenance de toute la France (QC n° 518,

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PESTICIDES DANS LES BORDEAUX

aitalif led de 4038 bordeaux classes et deux vins «pirates» non classes ont été analyses. Les bouteilles ont étéachetées anonymement dans le commerce. Leurs prix vont de 10 à 142 €.

PESTICIDES

40 VINSDE BORDEAUXDONT 38 CLASSES Indication

Chateau Durfort-VIvens MargauxChàteau Pontet-Canet Pauillac

Chateau Clerc Mllon Pauillac

Château Beychevelle Saint Julien

Alter Ego de Palmer Margaux

Chateau Malescot Saint-Exupéry Margaux

Cosd'EstournelSamt Estephe

Les Pagodes de Cos Saint Estephe

Château Haut-Caries Fronsac

Château Clscours Margaux

Château Tour du Haut-Moulin Haut Medoc

Château Dauzac Margaux

Château Rauzan-Ségla Margaux

Chateau Brane-Cantenac Margaux

Château Maquis de Mons Margaux

Château Patache d'Aux Medoc

Château Fourcas Hosten Listrac

Château Roquetalllade-le-Bernet Graves111

Château Montrose Saint Estephe

Château Rauzan-Cassies MargauxChâteau Cantenac-Brown Margaux

Château du Glana Saint Julien

Château Pédesclaux Pauillac

Chateau Lagrange Saint Julien

Château leuville Poyferré Saint Julien

Château Duhart-Mllon Pauillac

Château Calon-Ségur Saint EstepheLa Cravette de Certan Pomerol

Chateau Crolzet-Bages PauillacChateau Rollan de By Medoc

Château Creysac Bordeaux

Château du Tertre Margaux

Château Haut-Marbuzet Saint Estephe

Chateau La Tour Carnet Haut Médoc

Château Talbot Saint Julien

Château Maucalllou Moulis en Médoc

Château Gloria Saint JulienChâteau Prieuré-Lichlne Margaux

L'Héritage de Chasse-Spleen

Mouton Cadet Bordeaux '"

2014

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2015

2e cru classe

5e cru classe

5e cru classe

4e grand cru classé2e vm d un 3e cru classé

3e cru classe

2e cru classé

2e vm d un 2e cru classé

3e cru classé

cru bourgeois

5e grand cru classé

2e cru classé

2e cru classé

appellation contrôlée

cru bourgeois Bégadan

cru bourgeois

2e cru classé

2e cru classé

3e cru classecru bourgeois

5e cru classé

3S grand cru classé

2e grand cru classé

4e cru classé

3e cru classé

2e vm de Vieux Château Certan

5e cru classe

cru bourgeois

grand vm de Bordeaux

5e grand cru classé

4e grand cru classé

4'grand cru classecru bourgeois

cru bourgeois

4e grand cru classé

2« vm du Château Chasse-Spleen

e44,50

92,50

52,50

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85,25

42,50

142

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28

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37,50

67,50

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14

16,96

19,25

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132

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38,50

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38,50

27,40

14,93

41,70

27,90

33,50

22,92

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25,25

37,43

32,50

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Teneur en residus de SO a 100 yg/l 1̂ 1 de 100 à 200 M/1 ^H> à 200 y/1(I) Vm pirate non classe (2) Présence d iprodione un fongicide classé perturbateur endocrinien*** Très bon ** Bon * Moyen • Médiocre •• Mauvais

ANALYSE ^_

LABOJH

NOTRE MÉTHODE D'ANALYSELes analyses se basent sur laméthode QueChers methodede référence pour le dosage depesticides dans les produitsalimentaires Apres une phased extraction par solvant etcentnfugation I acétonitrile(le solvant) est concentre puisinjecté en chromatographiesgazeuse et liquide lesdeux appareils étant couplesè des spectrometresde masse ann de détecterquantifier et vérifier lesmolécules recherchées Aveccette méthode les limites dedétection et de quantificationsont respectivementde I yg/l a 10 yg/lBILAN DES ANALYSES177 molécules ont eterecherchées Parmi celles cill ont ete détectéesRappelons qu aucunedétection ne peut avoir lieuà moins de I yg/l En dessousde 10 ug/l les moléculessont détectables maîs pasquantifiables (on parlealors de traces) et au delàde 10 yg/l les moléculessont quantifiables Sur les40 bouteilles analyséesla plupart sont touchées parun à plusieurs pesticidesQuèlques vins sont épargneset d autres ne contiennentque des traces Dans lesbouteilles ou tes résidusont eté quantifiés lenombre de résidus vade I à6 par bouteilleCOMPRENDRE LESRÊSULTATS «PESTICIDES»Le tableau des resultats faitla synthèse des analyses enindiquant outre les noms desvins et leur prix le nombre detraces de pesticides trouvéespar bouteille le nombre demolécules détectées a plusde 10 yg/l et finalement lasomme des résidus (en yg/l)Les vins sont classes enfonction de ces trois criteresqui ont les pondérationssuivantes nombre de traces20% nombre de moléculesdétectées à plus de 10 ug/l40% somme des résidus 40%Les vins sont classes dumoins pollué au plus chargéTOXICITÊLes molécules détectées nesont ni CMR (cancérogènesmutagenes ou reprotoxiques)ni considérées comme desperturbateurs endocriniensà I exception de I iprodione(avis Anses avril 2016)Cette dernière molécule estheureusement présente entrès faible quantité et danspeu de produits les troisqui en contiennent ont étédéclassés (•) et reléguésen bas de tableau

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LEXIQUE

Les termes auxquels se fier,et les autresVIN CONVENTIONNEL

Vm le plus répandu Le viticulteur peut utiliser tous les outils etproduits chimiques autorises par la réglementation.

VIN RAISONNE•••••••••̂ B

Ce concept vise à mieux prendre en compte l'environnement et àlimiter les mirants Les produits chimiques ne sont employés qu'encas de besoin (par exemple, à l'arrivée d'une maladie) et non pas demaniere systématique Une certification «agriculture raisonnee»a existé de 2002 a 2013, maîs elle a ete abrogée et remplacéepar une certification environnementale, dont le plus haut niveauest la certification HVE (Haute valeur environnementale)

VIN BIOLOGIQUE^^^^^^MBB^^B

Avant 2012, on parlait de «vm issu de laviticulture biologique», c'est-à-dire un vmproduit à partir de raisins bio Désormais,la dénomination «vm biologique»désigne un vm produit selon les principesde l'agriculture biologique (excluantnotamment la plupart des produitschimiques de synthèse), tant à la vigne(viticulture) qu'a la cave (vinification)Ces vins sont certifiés et affichent le logoBio de l'Union européenne (le logo«Agriculture biologique» est facultatif)

VIH BIODYNAMIQUE

La biodynamie est une philosophie qui considère que l'exploitationagricole est un écosystème vivant, dont il faut assurer l'équilibreen interdisant tout mirant de synthèse En France, deux labelscertifient cette pratique Demeter et Biodyvm La demarchede certification est ouverte aux producteurs déjà certifiés bio.

VIN NATURELtmmtmmmt^m

ll n'existe pas de legislation autour du vm naturel et cettedénomination n'est pas certifiée Selon l'Association des vinsnaturels (AVN), cette pratique respecte obligatoirement ladémarche de l'agriculture biologique ou biodynamique et le vmest produit sans ajout de sulfites, ni de quelque autre mtrant.

VIN SANS SOUFRE

Certainsvignerons

appliquent lesprincipes de('agriculturebiologique.

La mention «contient des sulfites» ou «contient du S02» estobligatoire au-delà d'une teneur de S02 de 10 mg/l Si elle n'apparaîtpas, c'est que le taux est inférieur a cette limite Pour autant, un vm«sans sulfites» n'existe pas, car le raisin en produit naturellementCette indication signifie seulement qu'aucun sulfite n'a été ajouté

VIN VÉGANmmmmmm^*

La philosophie vegane consiste à ne pas utiliser de produits issusde l'exploitation animale Dans la viticulture, il s'agit, par exemplepour clarifier le vm, de remplacer des agents de collage commela gélatine de porc ou le blanc d'œuf par des alternatives végétalesll existe en France deux labels v Label et Eve vegan.

octobre 2013) avait démontré une contaminationgénérale des vins. Ceux issus du Sud-Ouest n'étaientpas en reste : 33 molécules différentes avaient étédétectées, dont deux interdites en France. Troisfois plus qu'aujourd'hui. En outre, notre enquête,qui avait eu leffet d'un électrochoc sur la filière,montrait que les bouteilles contenaient enmoyenne 268 u.g/1 de résidus. Même si ce calcula peu de signification toxicologique, on ne peutque se féliciter de voir cette moyenne descendreà 91 pg/l. Allan Sichel ne crie pas victoire pourautant : « Ces résultats vont dans le bon sens, mais ilfaudra s'assurer qu'ils s'inscrivent dans une tendance. »Le millésime 2014, que nous avons sélectionnéen priorité, était une année « classique » et doncreprésentative du travail accompli par la filière.Néanmoins, le patron du CIVB prévient: «Lesrésultats devraient être encore meilleurs en 2015, qui

fut une année facile, avec un besoin moindre de pro-duits phytosanitaires. Mais ils pourraient être moinsbons en 2016, qui fut plus compliquée à gérer. »

un perturbateur endocrinien retrouvéMalgré cette réserve du président du CIVB, «cesrésultats montrent que la plupart des viticulteurs sontpassés en agriculture raisonnee, voire au-delà pourceux dont les bouteilles ne comportent aucune molécule »,commente l'ingénieur du laboratoire en chargede nos analyses. La bouteille de Mouton Cadetintégrée à notre sélection de grands crus est un bonindicateur de cette évolution, car il s'agit d'un vinde négociant, réalisé par l'assemblage de vins dedifférentes origines produits sur lensemble du vi-gnoble bordelais. Le millésime que nous avionstesté en 2013 contenait 14 molécules différentes,le plus mauvais score de notre sélection. Cetteannée, elle n'en affiche plus que trois, dont une àl'état de traces. Une baisse drastique, malheureu-

sement entachée par laprésence d'iprodione, unfongicide classé commeperturbateur endocri-nien. Dans notre ta-bleau, nous avons dé-

classé les trois bouteilles qui en contiennent, les troisdernières. «Cela dit, la concentration d'iprodionedans la bouteille de Mouton Cadet est I DOO fois in-férieure à la limite autorisée», rassure l'ingénieur.Pour l'ensemble des vins analyses, nous n'avonsd'ailleurs relevé aucun dépassement des limitesmaximales de résidus autorisées.Parmi les ll molécules détectées dans les bou-teilles de notre sélection, 10 sont des fongicides,dont on se sert en particulier pour lutter contre lapourriture grise (botrytis). S'ils se retrouvent plussouvent dans les bouteilles, c'est parce que les fon-gicides (qui représentent 80% des pesticidesemployés dans la vigne) peuvent être épandus

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ci DES PUlVtwsfcS,•POSÉS,

.,,e MENACÉE!

CONTROLE DES RESIDUS

Manifestationanti pesticidesà Bordeaux, enfévrier 2016,suite à ladiffusion d'unreportagesur France 2.

peu avant la récolte. La onzième molécule, dé-couverte dans une seule de nos bouteilles (Châ-teau Lagrange), est un insecticide. «Saprésence neveut pas dire que la dose utilisée était très forte, celadépend du moment où elle a été appliquée », précisenotre ingénieur.

Une prise de conscience sanitaire«// ne faut pas charger les vignerons, qui ont étépousses pendant des années à recourir aux pesticidespar les chambres d'agriculture: on leur parlait coùts,RTT, repos dominical», souligne Pascal Collette,vigneron en biodynamie au Château Jean Faux.À son arrivée dans les vignes, la chimie a été ra-pidement vue comme une réponse simple etunique à de multiples problèmes. Et puisque cessubstances étaient légales, pourquoi s'en méfier?Le changement de perception est arrivé aprèsles premiers décès et les premières limitationsd'usages. Dans les domaines viticoles, les vigne-rons évoquent des proches et des collègues, en-terrés a 60 ans après un cancer, ou atteints de ma-ladies neurodégenératives. «Puis, quand des moléculesont été interdites et que les vignerons ont réalisé qu'ilsles utilisaient depuis 20 ans, ils ont commencé à seméfier de toutes les autres », résume Allan Sichel.«Je bois mon vin, je ne veux pas m'empoisonner»,affirme Philippe Roux, directeur technique duChâteau Dauzac, qui se passe d'insecticides de-puis 1999 et de fongicides depuis 10 ans. «Cetteévolution est un ensemble: elle vise à protéger la san-té des salariés, à préserver les sols et à veiller à lasanté des consommateurs», ajoute-t-il.

Objectif: moins de chimieLe 5 mai 2014, 23 élèves et leur institutrice deVilleneuve-de-Blaye (Gironde) sont intoxiquéssuite à l'épandage de pesticides sur des vignes si-tuées à proximité, appartenant à deux châteaux.C'est la goutte de pesticide qui fait déborder levase pour les associations de riverains, qui s'orga-nisent pour dénoncer les effets toxiques des her-bicides et fongicides de synthèse sur la santé etlenvironnement. En avril 2016, alors que la viti-culture est sous pression avec la diffusion d'unreportage de l'émission de France 2 Cash Inves-tigation sur les pesticides, Bernard Farges, alors

À l'étranger, une opacité totale«On nous porte beaucoup despesticides, maîs nous sommesdes enfants en matière detraitements par rapport auxfins étrangers», soupire unvigneron français lorsqu'onl'interroge sur le sujetUne remarque difficilea vérifier Dans l'Unioneuropéenne, la situation estsous contrôle En juin,l'Association des chimistescantonaux de Suisse a publiéles résultats d'analyses portantsur 255 vins helvétiques,allemands, autrichiens, français,italiens et portugais si seuls20 échantillons (8%) se sontavères exempts de tousresidus, 249 répondaient auxexigences légales Maîs horsde l'Union, non seulement leslimites maximales de residus(LMR) n'existent pas forcément,

maîs surtout les tests pourles vérifier sont rares AuCanada, la LCBO (Regie desalcools de l'Ontario), qui testeun échantillon de chaque vmvendu dans la province, affirmeque 99,8% d'entre eux necontiennent «pas ete tracesdétectables de résidus depesticides» Une affirmationhautement improbable,sauf à ne vendre que du vinbiologique Aux États-Unis,l'Agence de la fiscalité et ducommerce de l'alcool et dutabac (TTB) teste chaque année150 vins au hasarda larecherche de residus, maîs nepublie pas ses resultats Quandle journal New York Times, enjanvier 2014, a décidé d'alertersur cette problématique,il s'est basé sur l'enquête deQue Choisir menée en 2013

AUX États-Unis(Ici, des vignesen Californie),les servicescharges descontrôles nepublient pasles résultats deleurs analysesdes vins.

président du CIVB, prononce un discours histo-rique : « Oui, les vins dè Bordeaux ont pour objectif ladiminutionforte, voire la sortie de l'usage de pesticides. »Un objectif très ambitieux, alors que la France estle second plus gros consommateur européen depesticides derrière l'Espagne et que la Girondeest le plus grand departement viticole de France.Depuis, le CIVB a incité les viticulteurs à éviterl'utilisation dans la vignede 70 produits contenantsdes agents cancérogènes,mutagènes ou reprotoxiques(les CMR). «Le CIVB n'apas vocation à interdire cesproduits, car il n'en a pas le droit, mais il doit jouerun rôle d'entraînement vertueux de la filière», ex-plique Allan Sichel. Son prédécesseur, BernardFarges, ajoute : «Hy a quatre ans, 20% des vigne-rons avaient la problématique des CMR en tête;désormais, ils l'ont tous »

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Le domaine ChâteauLePuy,àSaint-Cibar(33),

pratique la biodynamie.

Xe mouvementa'ennocineDe plus en plus de domaines

viticoles se lancent dans

la biodynamie. Cetteméthode de culture consisteà prendre soin des équilibres dela terre et de la vigne, avec desexigences allant au-delà du bio.«Honnêtement, on ne comprendpas comment fonctionne fabiotiynamie, mais on ne peut pasnier que les raisins qui en sontissus ont quelque chose cle plus. »

L'étonnement de cet œnologued'une prestigieuse maisonde négoce se conçoit, tant lesprincipes de la biodynamiesemblent farfelus. «La biodynamie,c'est un peu l'homéopathie de lavigne», résume François Miglio,œnologue et viticulteur enCôtes-de-Provence (Château

Casqui). « ll s'agit cle considérer laterre comme un être vivant, et dèréfléchir à l'interaction entre cetteterre et son environnement»,ajoute-t-il. Regrettant que «laplupart des vins, mêmes bio, sortentde sols morts», gavés de pesticides,il insiste sur l'importance dessaisons, des cycles planétaires,du calendrier lunaire et sur

l'urgence d'abandonner produitschimiques et levures, en faisant

confiance à la nature.

De plus en plusde convertisCe mouvement, né il y a un siècle,est aujourd'hui en plein essor.Les domaines viticoles sontnombreux à se convertir - il y ena 600 déjà certifiés en France.Les vins de qualité arrivent

(cf notre test comparatifd'avril 2016, OC n° 546) et lesconsommateurs répondentprésents. «La biodynamie sedéveloppe de plus en pluset se professionnalise», s'est réjoui

Olivier Humbrecht, présidentdu Syndicat internationaldes vignerons en culture

biodynamique (SIVCBD), enouverture du salon Biodyvin, quis'est tenu en novembre 2017à Paris. Le SIVCBD, l'un des deuxseuls avec l'organisme Demeterà délivrer une certification,reçoit désormais une trentainede candidatures par an et en

accrédite la moitié. Tous sontcertifiés bio, préalable obligatoire

pour passer en biodynamie. Cettetendance touche toutes lesrégions, et particulièrement laLoire, le Rhône et la Bourgogne,mais les vignobles du Bordelaisrestent assez peu représentés.Son climat difficile inquiète lesviticulteurs, qui craignent d'êtreà la merci des maladies s'ilsabandonnent les produitschimiques. Sur les 30 domainescertifiés Biodyvin depuis 2016,seuls deux sont bordelais(Château Ferrière et ChâteauFonplégade). Le mouvement anéanmoins gagné en visibilité,surtout depuis que plusieursgrands crus s'y sont mis, comme

Château Latour ou Pontet Caneten Médoc, ou Château Fonroqueà Saintemilion.

La patience paieAlors que les consommateurs sontde plus en plus à la recherche devins bio ou biodynamiques, lalenteur du vignoble à se convertirpourrait poser problème.

«Les domaines QUI utilisent leterme "biodynamie" sans êtrecertifiés sont rares, car ils risquentun gros retour de manivelle, maisl'allégation cle "vin nature" poseplus problème car elle ne garantitrien (aucune certification officielle,ndlr)», met en garde OlivierHumbrecht. Si le mouvement

biodynamique est bien engagé,sa montée en puissance vaprendre du temps; la faute à unprocessus de certificationdrastique. «Un domaine qui selance dans le bio en 2018 pourradéposer sa candidature en 2020et sera certifié Biodyvin en 2023»,prévient Olivier Humbrecht. Car«on n'efface pas le passif en un an,

certaines parcelles ont mêmebesoin de plus de sept ans» pouréliminer les produits chimiquesqu'elles ont accumulés. Mais lapatience, assure-t-il, paye:après une conversion réussie,«/e taux de matière organiquedans les sols est deux à trois foisplus important en biodynamie^.

viticulteursmanquent cie données

àun. Cuûaçe dea intnantd

(I) A Bordeaux, le terme «grandcru» désigne un domaine (chàteau)présent dans le "Classement de1855», établi pour mettre enaidant les (lins ae Bordeaux lors del'Exposition uniuerselle de Paris,en 1855. Ce classement (du I" au5' cru), oui compte aujourd'huiSS chàteaux {6l rouges et27 blancs), est critique mais taitencore office de référence

Responsable du Syndicat viticole des bordeaux etbordeaux supérieur, qui couvre la moitié du vi-gnoble, ce dernier insiste sur la rapidité des ac-tions engagées: «En quatre mois seulement, notre

assemblée générale, qui réunit 4000viticulteurs, a pris la décision d'in-tégrer dans le carlier des charges desmesures environnementales. » Etmi-octobre, sept organismes dedéfense et de gestion (CDG ; des

regroupements de viticulteurs qui défendent uneorigine ou une qualité) représentant 80% du vi-gnoble, ont annonce le déploiement du Systèmede management environnemental du vin de Bor-deaux (SMB) et l'ajout de mesures agroenviron-nementales contraignantes dans leurs cahiers descharges. Les appellations de Saint-Emilion, desCôtes, des Graves et de l'Entre-deux-mers sontconcernées. «Et dans le sauternes, nous avons interdit

l'usage de fongicides^, ajoute Nicolas Heeter-Tari,gérant du Château Nairac. Mais concrètement,quel est le pourcentage de baisse de l'usage despesticides dans les vignes ? Impossible de le savoir.fil nous manque ces données: nous n'avons pas dequantification globale des produits utilisés sur le vi-gnoble girondin», regrette Bernard Farges, qui enappelle à l'Etat pour obtenir des données précises.Reste l'impression générale, partagée par len-semble des vignerons, que «le virage est pris». Etles professionnels voient déjà plus loin : «Nous me-nons des recherches sur les cépages résistants, avec deuxaxes : répondre au réchauffement climatique et résisteraux maladies», détaille Allan Sichel. Certains testsen cours montrent qu'il est possible d'atteindre unebaisse de 90% des besoins en produits phytosa-nitaires. «L'enjeu, maintenant, est de trouver descépages résistants qui permettent en même temps de pré-server l'expression du terroir de Bordeaux. » *