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W-Fenec Mag #17

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Burning Heads, Aqme, Jessica93, Stereotypical Working Class, Mudbath, Catacombe, Pryapisme, The Last Brigade, Sinkane, Soen, Girls In Hawaii, Raised Fist, Danko Jones, Frank Shinobi, Marilyn Manson, Atari Teenage Riot, Nine Millions Witches, Antigone Project, After Snowfalls, Tetema, El Royce, Puzzle, Sz, Harmonic Generator, Dry Can, Arms and Sleepers, Zenzile, Watch Your Six !, Killbody Tuning, Not Scientists...

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Les messages de «bonne année» n’auront pas fait long feu... Contrairement à deux lobotomisés qui endor-mis sur leurs gâchettes ont blessé la France comme le monde. Le dimanche, jour de la marche, Alexis Janicot, qui occupe au W-Fenec le poste de «responsable de la maquette du mag» et donc grand artisan du joli mag digital que tu lis, écrivait ceci sur sa page Facebook, un message dans lequel on se reconnaissait tous et qu’on repartage encore une fois...

Voila, ça devient lourd les #jesuischarlie / #jesuispascharlie. J’y vais, j’y vais pas.On a plus de choses à soutenir ou à condamner aujourd’hui qu’une position dont on pourra débattre à froid.Pour commencer on pourrait aller marcher contre le pire, les autistes hashtagés des réseaux sociaux qui applaudissent l’attentat et cette frange complotiste-queneliste, les bas du front qui font des selfies devant la prise d’otage ou des coucous derrière la caméra, les mange-merde de BFMTV, les hypocrites suce-boules (Poutine qui est de tout coeur avec nous... on rêve), les dindes qui sont tristes car elles ne peuvent pas faire les soldes, et j’en passe malheureusement...On ira parce que pour une fois que le Français arrive à être «ensemble» autrement que dans un stade devant 22 gus en short aussi mal coiffés que moi ça mérite d’être vu et vécu, pour le mec du RAID/GIPN/GIGN/BRI en première ligne qui avait 1 chance sur 2 de ressortir du magasin les pieds devant, pour le prof de collège/lycée qui va en chier avec certains gamins secs du cerveau, pour les victimes, et pour nous parce qu’on au fond on est un peu fainéant et un peu complice en fait et que pour une fois on pourrait se sortir les doigts même si c’est juste symbolique et que ça retombera sans doute comme un soufflet, comme d’habitude.Et ça nous fera une balade au lieu de regarder Drucker.

On le répète mais certains ont la mémoire courte et s’ils ont fait les beaux ce dimanche là, ils font peut-être désormais les beaufs à trouver un complot ou à propager on ne sait quelle connerie sur le sujet... On aurait pu, pour cet édito, digresser sur notre activité médiatique de gribouilleur passionné par les sons mais un micro-évènement est venu toucher la rédaction...

Pour son vrai boulot, celui d’iconographe, celui qui lui permet de payer le loyer et d’avoir du temps libre pour rédiger des articles, Ted est envoyé fin janvier au Maroc. Dans ses valises, il prend un peu de lecture et sans réfléchir, embarque LE Charlie Hebdo, celui que tu as galéré à trouver en kiosque... Et il se fait arrêter à la douane. Si tu ne connais pas Ted, sache que c’est certainement celui qui a le moins l’air «louche» de toute la team, si on devait le qualifier d’un oeil, ce serait «sérieux». Pas le genre à faire chier les douaniers américains avec un Calendos alors tu penses bien qu’il n’avait pas embarqué son Charlie Hebdo pour tester les policiers marocains... Non, c’était juste un banal acte citoyen que de l’acheter puis de le lire... Fouille intensive, garde à vue, confiscation de l’objet du délit, petite fiche, Ted a eu le droit à un truc qu’on ne voit que dans les films pour avoir en sa possession une arme sur laquelle était écrit «tout est pardonné», une arme sur fond vert, couleur de l’espoir... Quand on a appris ça, on était tous choqués là-encore... Les mecs n’ont rien de mieux à foutre ? Un pays qui investit autant dans le tourisme n’est pas capable de se montrer plus délicat avec ceux qui viennent aider à son développement ? Le roi n’a pas autre chose à faire que de réprimer les libertés ? Et encore, ce n’est qu’un micro-évènement, il n’y aura pas de suite mais on pense du coup à ceux qui n’ont pas la liberté de penser et s’exprimer juste à côté de chez nous, à ceux qui risquent la prison quand ils dessinent et là on se dit que monter un groupe de rock dans certains pays relèvent de l’exploit... Si tu nous lis au Marock, on te dit juste deux mots : «courage» et «continue».

OliPhoto couverture : Jérémie DALSTEIN

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SOMMAIRE04 BURNING HEADS

12 MUDBATH13 PRYAPISME

14 THE LAST BRIGADE18 SINKANE

19 SOEN20 AqME

22 ATARI TEENAGE RIOT24 GIRLS IN HAWAII

30JESSICA93 36 MARILYN MANSON

42 RAISED FIST45 DANKO JONES

46 STEREOTYPICAL WORKING CLASS48 FRANK SHINOBI

51 CAVALERA CONSPIRACY54 EN BREF

62 KDO63 MAOTFA 201466 IL Y A 10 ANS

67 NEXT68 DANS L’OMBRE

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Choose your trap qui comprend un disque punk rock et un disque « Opposite », baptisé ainsi par le groupe lui-même pour décrire son mélange reggae/dub/rock. 25 titres au total, 25 façons de vibrer au son du qua-tuor qui a changé ma vision du rock indépendant dans notre bel hexagone. Mais voilà, c’est souvent compliqué d’exprimer avec justesse et exactitude ce que je ressens quand les émotions se mélangent à l’excitation du mo-ment. J’aime les Burning Heads, c’est indéniable, tout mon entourage le sait, et toi aussi, tu as pu le deviner. Encore une fois, je ne m’en cache pas. Ce n’est que de la musique jouée par quatre passionnés qui, au fil des années (plus d’un quart de siècle), ont su partager leur amour du punk rock et de la musique syncopée aux quatre coins de l’Europe et même ailleurs.

À chaque écoute de Choose your trap, les mots défilaient dans ma tête pour exprimer mes sensations une fois que se succédait chaque chanson de cet album réussi. Et puis, au moment de rédiger ce papier, le trou noir. Plus rien ne s’enchaînait correctement. Alors voilà, plutôt que de décortiquer de manière singulière et maladroite ce disque, je vais laisser une nouvelle fois mon cœur prendre le contrôle. Le disque punk rock ne fait que renforcer l’amour que j’éprouve pour ce groupe. Même si j’ai écouté le groupe sur le tard (à partir de Be one with the flames, grâce à un titre sur une compil’ de formations françaises édi-tée en Allemagne !), j’ai plus qu’usé les différentes prod des Orléanais, et Choose your trap n’échappera pas à la règle. Comment rester insensible à la potion magique des Burning, faite de titres pêchus et ultra mélodiques (haaaa, ce « A true life » qui ouvre le disque est juste parfait, « Too many kisses », « Choose my trap »), d’uppercuts à la limite de la déflagration (« Lie to me »« What did you expect ? » qui aurait pu avoir sa place sur l’énorme Be one with the flammes, «Stick our heads up high!» avec Tony des Adolescents) et de morceaux punk hardcore à la. Burning (« Song about nothing », « Voice of the voiceless ») ? La voix de Pierre me file toujours la banane, le basse-batterie est indestructible et les gui-tares sans artifices enchaînent les riffs parfaits. Comme

Le W-Fenec est un clan de passionnés, un média du web, un truc qui ne sert à rien, une mine d’or pour ceux qui aiment découvrir plein de bonnes choses, un repaire de musiciens frustrés, une communauté d’amoureux de rock, une société secrète que le comité du bon goût n’a pas réussi à démanteler. Le W-Fenec, c’est tout ça, mais c’est surtout un fanzine. Et qui dit fanzine dit fan. On ne s’en est jamais caché, et moi le premier, on peut en faire des tonnes en chroniquant un disque, car en plus de nos grandes oreilles, c’est avec le cœur qu’on écoute la mu-sique. Qu’on se le dise (et qu’on le lise). Et pour évoquer le cas de Choose your trap, nouvelle frappe chirurgicale des Burning Heads, c’est véritablement une histoire de cœur que je vais te raconter.

Le nouvel album des Burning Heads (enregistré à Or-léans par Guillaume « Dudu » Duneau qui officie égale-ment en tant qu’ingé son live du groupe depuis un bon moment), n’est pas encore sorti dans son format cd que je le connais déjà par cœur. Je l’ai écouté un bon paquet de fois, et même si je suis assez éclectique dans mes goûts musicaux, ce groupe reste dans mon top dix tous styles confondus. Alors bien sûr, je me faisais une joie de coucher numériquement mes impressions sur

BURNING HEADSChoose your trap (Opposite Prod)

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LES DISQUES DU MOM

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dans chaque album, un OVNI est venu se glisser dans la tracklist, et pour ce coup-ci, ça sera le crossover « Pop a pill », un des rares titres de cette galette dépassant les 3 minutes, au delay maîtrisé, aux ambiances multiples et au refrain qui fait mouche. J’adore. Je suis conquis. Comme d’habitude. Mais alors que la deuxième galette pointe le bout de son nez, le plat de résistance est an-noncé, et je vais me gaver !

La partie « Opposite », composée de dix titres, m’a complètement chamboulé. J’ai pourtant l’habitude du « reggatta de blancs » des Burning, que ce soit sur disque ou sur scène. Mais les sensations procurées par des morceaux comme « All about love », « Spirit of ‘68 », « Party », mélange astucieux de reggae et de rock, sont puissantes. L’esprit des Clash hante ces morceaux aux lignes de chant savoureuses. Mais ce disque sort éga-lement des sentiers battus qu’un groupe de rock s’auto-rise à emprunter. L’instrumental « Midnight dub » en est le parfait exemple : passé la surprise des sonorités dub et de la montée en puissance, on ne peut que féliciter une telle ouverture d’esprit (qui n’est pas nouvelle chez les Burning) pour délivrer un morceau riche en couleurs et en sensations. BH maîtrise avec excellence cet exer-cice en évitant soigneusement les clichés propres au style et en bricolant toutes sortes de sons tout aussi jouissifs les uns que les autres. « Mad brains », dans la même veine, enfonce le clou. Et que dire du petit bijou qu’est « Back to square one » où la voix de Pierre s’im-pose plus qu’elle ne se pose sur les rythmes à contre temps et les guitares saturées. Ce disque est une ode à l’évasion et aux expérimentations réussies, une autre facette fascinante et passionnante du groupe. Un disque brut, sans concession, une véritable réussite.

Si tu es arrivé au bout de cette chronique, c’est que soit tu es, comme moi, fan du groupe, soit tu es curieux. Dans les deux cas, c’est déjà pas mal. Tu n’auras donc aucun mal à terminer ce paragraphe qui t’invite vivement à te procurer ce double album qui est le mix parfait de ce que les Burning savent faire depuis plus de 25 piges : des tubes, des tubes et des tubes. Les gars sont sur la route toute l’année et vont entamer une tournée avec The Rebel Assholes et Not Scientists : encore une excellente raison pour sortir de chez toi et passer un très bon mo-ment avec ce haut représentant du punk rock européen. Car j’ai beau chercher, je n’en vois pas beaucoup qui leur arrivent à la cheville. Respect.

Gui de Champi

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Avant de développer l’actualité du groupe et de parler du nouvel album, pourrais-tu, en quelques mots, dé-crire ce que sont pour toi les Burning Heads.Burning Heads est un groupe de punk rock qui joue depuis plus de 25 ans et qui mélange le punk et le reg-gae, ou plutôt du « raggata blanc » comme l’appelait The Police (du reggae fait par des blancs, du reggae rock, et pas du reggae roots ou du rocksteady). Je pense que c’est un reggae un peu particulier quand même, et c’est surtout qu’on garde nos instruments avec les lesquels ont fait du punk rock pour faire du reggae.

Le nouvel album a pour thématique le chiffre 25 et on prend conscience du parcours hors norme du groupe avec 25 disques sortis (LP, EP, compil’), 250 morceaux enregistrés, 2 500 concerts. Pour un groupe qui n’a jamais fait de pause dans sa carrière, n’éprouvez-vous pas une certaine lassitude au bout de tout ce temps, ou est-ce que vous êtes toujours motivés comme au pre-mier jour ?Alors, déjà, pour remettre les choses à leur place, les 25 albums, les 250 morceaux, c’était juste pour que ça

rime avec 25 ! Il n’y a jamais eu de calcul d’effectué pour comptabiliser tout ça. Pour tout ce qui a été enregistré, on peut calculer, c’est fait et on peut retrouver, mais on a jamais calculé ni pris de notes sur le nombre de concerts que nous avons fait pendant la vie du groupe. De même, on ne sait également pas exactement le nombre de mor-ceaux qui ont été enregistrés, on ne peut pas trop savoir combien on en a fait exactement. Voilà, ces chiffres sont déclinés autour de 25 mais c’est plus pour le fun qu’autre chose. Ça doit certainement s’en rapprocher, c’est très crédible mais ce n’est pas la vérité ! Mainte-nant, non, de toute façon, il y a toujours cette énergie pour jouer, toujours cette envie de faire des concerts, toujours cette envie de faire des morceaux : c’est clair que ça ne nous lasse pas. On n’a peut être pas la même motivation qu’au début car il n’y a plus l’excitation de la toute nouveauté, bien qu’elle se retrouve quand même dans le fait que quand on crée de nouveaux morceaux, c’est quand même quelque chose qui sort de l’inconnu, qui naît, il y a quand même une nouveauté. Même si ce n’est pas la nouveauté du débutant, c’est...

Burning Heads est pour moi synonyme de respect. Respect pour ce groupe officiant depuis (plus) de 25 ans, contre vents et marées et sans jamais renier ses amours pour le punk rock américain et le reggae rock influencé par The Police et The Clash. Respect également pour une formation qui n’a jamais rien lâché et qui a influencé toute une génération de rock indé en France. Alors que le groupe vient de sortir un double album et s’apprête à entamer une tournée avec Not Scientists et The Rebel Assholes, Jyb (basse) nous a accordé un entretien passionnant duquel il ressort qu’après toutes ses années sur la route et en studio, la passion et l’amour de la musique sont toujours au rendez-vous. Respect.

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INTERVIEW

Stimulant ?Oui, tout à fait. De toute façon, c’est ce qui nous tient aussi de faire des nouveaux morceaux pour continuer à avancer et continuer à proposer de nouvelles choses sur les concerts même si on garde quand même d’anciens morceaux dans nos sets, ça motive d’avoir de nouvelles choses à proposer.

Quelle signification donnerais-tu à Choose your trap ? Pour ceux qui ne maîtrisent pas à la perfection la langue de Shakespeare, de quoi parle Choose your trap ? Waouh les textes ! Ils sont généralement écrits par Pierre, certains par Thomas, et sont des tranches de vie ou des coups de gueule sur l’actualité. Ils traitent aussi de ressentis ou des rapports humains. « Choose my trap » fait partie de ceux-là, mais il n’a pas été écrit par nous. Il traite, je pense, du fait que ta façon de faire influe sur la vie que tu as. Que les décisions que tu prends influencent forcément le cours de ta vie et qu’en étant conscient de cela tu peux t’attendre un peu au sort qu’elle te réserve, en modifier les conséquences... ou pas . «I choose my trap» c’est je choisis mon piège. Je choisis de m’enfer-mer et de subir ma vie ou de m’ouvrir et de trouver une direction, un sens. On a choisi d’appeler l’album Choose your trap (choisis ton piège), car on trouvait que ce titre pouvait coller avec le dessin : le squelette d’un homme, mort de faim, après avoir épuisé en les vendant toutes les ressources de la Terre et n’ayant plus rien d’autre a manger que l’argent qu’il avait pu amasser. Ce titre per-mettait aussi de faire un lien entre la pochette et l’album (Choose your trap / « Choose my trap »), car à l’origine ce dessin est l’œuvre d’un artiste Mexicain dénommé Mazalt (justseeds.org) qui illustre, pour ceux qui ne maî-trisent pas à la perfection la langue de Sancho Panza, le proverbe Indien : «Quand le dernier arbre sera abattu, la dernière rivière asséchée, le dernier poisson péché, l’homme va s’apercevoir que l’argent n’est pas comes-tible» (que l’on retrouve à l’intérieur du livret).

Ce nouvel album comprend. 25 morceaux (tiens, tiens) répartis plus ou moins équitablement entre des mor-ceaux punk rock et des morceaux reggae (et pas seu-lement)... La répartition est quasi égale en fonction du temps en tout cas (30 minutes / 30 minutes pratiquement)

Tu m’arrêtes si je me trompe, mais même si j’aime beaucoup les morceaux punk qui portent bien votre marque de fabrique (que ce soit dans le punk plus léger ou les morceaux hardcore joués à cent à l’heure), j’ai été sublimé par les morceaux reggae qui sont complets

et riches en couleurs. Pourquoi un double album et pas deux disques scindés à sortir à un an d’intervalle, par exemple ? Car d’une part ils ont été enregistrés ensemble sur la même cession de studio. Car d’autre part ça fait très longtemps qu’on a cette envie de sortir un double album, même si à l’origine on ne pensait pas forcément sortir un disque « opposite » et un disque plutôt rock, et ça s’est fait comme ça : petit à petit, on a vu que l’évolu-tion faisait qu’on pouvait avoir de la matière pour faire les deux, et ça nous a motivé pour continuer dans cette voie-là et ça nous a plu de pouvoir sortir un double al-bum, dont un album « opposite ». On trouvait que c’était plutôt une bonne chose, et puis ça permet aussi à la per-sonne qui va acheter l’album de se retrouver aussi avec un « opposite » dans les mains et ça montre les deux facettes du groupe dans un seul package. On a quand même voulu le différencier et le sortir en deux disques dans le même album, faire un disque punk et un disque « opposite » pour que ce soit vraiment séparé, mais c’est vraiment un choix de l’avoir sorti en double album, c’est clairement volontaire.

Ce disque sort chez Opposite Prod, votre label depuis une bonne dizaine d’années. Avec le temps, le fait de tout contrôler était-il nécessaire ou évident ? Pour ce qui est d’Opposite, on a créé l’asso au moment de notre deal avec Yelen. Et quand Yelen s’est arrêté, on a pu voler de nos propres ailes et se servir de cette asso pour créer notre propre label. On est très contents de ça, même si, petit à petit, on s’est entourés de personnes pour nous aider à gérer tout ça car tout seuls, on part dans tous les sens, et j’ai l’impression qu’on a besoin de quelqu’un d’extérieur au groupe pour pouvoir récolter toutes les infos et mettre tout ça ensemble pour faire avancer la chose. Le label Opposite est maintenant géré par Boris qui s’occupe aussi de PPMM, qui centralise tout ça et qui gère pas mal le label.

Après avoir goûté aux labels plus ou moins indépen-dants, l’autoproduction n’a-t-elle pas ses limites ? Le fait d’être libre l’emporte-t-il sur le fait que le manque de moyens puisse vous restreindre en terme de produc-teur ?On n’a pas trop d’exigence de producteur. Sur les der-nières prods, on a réussi à le faire nous-mêmes, soit par l’intermédiaire de Pierre à la console, soit, et c’est le cas sur ce disque, en faisant en sorte que Pierre ne soit pas au four et au moulin et ainsi le libérer de l’enregistre-ment pour voir comment ça pouvait fonctionner « autre-ment ». C’est Dudu, notre ingé son en concert, qui s’est

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mis derrière la console et qui s’est occupé cette fois-ci de l’enregistrement, nous permettant ainsi d’être « juste » musiciens. Pour ça, le fait d’être sur notre propre label ne pose pas de problème. C’est clair que pour sortir les sous et pouvoir produire les albums, c’est assez dif-ficile d’être tout seuls. On a quand même un distributeur (qui est toujours PIAS) qui nous demande un certain nombre de CD qu’on doit être en mesure de lui donner, et là, c’est un peu dur. Et c’est pour ça que l’album met-tra autant de temps à sortir car il fallait qu’on récolte assez d’argent de notre côté pour pouvoir produire les CDs. À ce niveau-là, c’est un peu plus compliqué que d’être sur un gros label ou une maison de disque, c’est clair. Mais par contre, on est beaucoup plus libres en ce qui concerne les différents modes de distribution : on peut être distribué dans un plus grand nombre de pays. Après ça dépend quand même, car par exemple avec Epitath qui avait une grosse distribution européenne, c’était vraiment cool. Quand on est passés d’Epitath à Sony, nous n’avions plus qu’une distribution française, et les labels qui voulaient nous distribuer en Europe se retrouvaient à devoir discuter avec Sony et étaient inca-pables de fournir ce que Sony leur demandait car avec le style de musique qu’on fait, les labels qui nous suivent sont plutôt des labels « indépendants » et essayer de travailler avec Sony leur demandait beaucoup d’efforts financiers pour pouvoir être à la hauteur de ce que Sony demandait. Donc du coup, le fait d’être chez Sony nous a fermé pas mal de portes à l’étranger à cette période. Et maintenant, on essaye de regagner des distributions à l’étranger et ça se fait petit à petit. De petites distrib se mettent en place en Espagne, en Allemagne, en Italie, et tout ça se fait au fur et à mesure. Mais Internet ouvre pas mal de voies au niveau de la distribution.

Que penses-tu des opérations de crowdfunding qui se développent, tant pour les groupes confirmés que pour les groupes en expansion ?On y a déjà pensé mais on n’a jamais concrétisé le truc. Il y a un gars qui nous a proposé ça pour éventuellement sortir les deux Opposite (I et II) en vinyle et procéder à un crowdfunding pour récupérer des thunes. Nous essayons toutefois de fonctionner d’abord par nous-mêmes. Après, on va voir ce que ça donne, on va tenter l’expérience pour ce projet, ça peut être cool, faut voir.

Lors des « reunion shows » de Second Rate au prin-temps dernier, Sam évoquait le fait qu’à la fin des années 90, il s’est rendu compte que ses modèles en France (dont Burning et Portobello Bones) « on a vu que ça bricolait, que ça tenait à rien toute cette scène,

et dès le début on s’est dit qu’on pouvait bricoler aussi ...». Aujourd’hui, « n’importe qui » peut, depuis chez lui, sortir un disque et monter une tournée de quelques dates. Vous qui avez vécu l’époque où Internet n’était pas développé et où les portables n’existaient pas, es-tu nostalgique de cette période ?Non, car Internet est aussi une opportunité pour nous d’avoir des contacts plus faciles dans différents endroits et de trouver des dates grâce à ça. Ça nous permet de vivre aussi et de continuer à bricoler, car ça reste du bri-colage, même si c’est sur Internet. Par contre, c’est clair qu’on est un peu plus perdu dans la masse « Internet », c’est un peu plus difficile d’émerger. Il y a tellement de visibilité, tellement de choix, tellement de groupes dif-férents sur le net que tout le monde est un peu perdu dans le flot.

Il n’y a pas longtemps, Jérémie des Flying Donuts évo-quait dans notre zine une anecdote selon laquelle tu lui racontais que vous aviez réalisé un rêve en tour-nant avec The Adolescents (vous avez même partagé un disque, et le chanteur pousse la chansonnette sur un titre du nouvel album), et il t’a répondu que les Burning lui avaient fait le même effet. J’imagine que tu as conscience que ton groupe en a influencé plus d’un : quels sont tes « jeunes » groupes préférés en France ? Êtes-vous fiers d’être un exemple pour pas mal de groupes en devenir ? Pas trop de poids sur les épaules ?Je me rends compte depuis pas si longtemps qu’effec-tivement, on peut être une influence pour certains groupes. Est-ce que je suis fier de ça ? Oui, de toute façon. Mais je ne me pose pas la question et cette recon-naissance vient aussi du fait que l’on est là depuis plus de 25 années maintenant. Tu sais, on joue d’abord pour se faire plaisir, c’est très égoïste, mais partager sur scène avec un public des morceaux que tu as créé dans un local avec tes potes est une réelle satisfaction. C’est cool si des groupes s’inspirent des Burning, mais on ne fait pas ça pour ça. Tant mieux si on donne du plai-sir aux autres et si ça leur donne envie de jouer. L’his-toire se répète un peu : j’ai commencé à faire de la mu-sique, parce que j’ai vu des groupes qui me plaisaient, qui m’ont donné envie de faire la même chose, c’est peut être normal si ça continue à se passer comme ça. Les ‘jeunes’ groupes que je préfère en France ? La plu-part sont des groupes avec qui on partage la scène.... c’est aussi l’avantage d’être dans un groupe qui joue souvent : tu vois plein de concerts ! Mais je ne vais pas te

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parler de ‘jeunes’ groupes, juste de groupes que j’ai vus et appréciés : The Patrons, Verbal Razor, Youth Avoiders, Bunkum, Nesseria, Wank for Peace, et aussi bien sûr The Rebel Assholes, Flying Donuts, RAVI, Monde De Merde, Not Scientists, SOB, Unlogistic, High Tone, Dead Pop Club, Escape, Aaarrghhh... non ce n’est pas un groupe (encore que...) mais une torture pour moi de te citer des noms, j’en oublie 150 ! Il y a vraiment plein de groupes biens, de plus en plus j’ai l’impression, le niveau musical s’élève vraiment depuis quelques années.

Le disque est déjà sorti en vinyle et le support CD arrive incessamment sous peu, et c’est une tournée qui s’an-nonce pour défendre le skeud : mais finalement, vous êtes toute l’année sur la route : là encore, pas de lassi-tude ? Qu’est ce qui motive BH en 2015 ?S’il y avait une lassitude pour aller jouer, on arrêterait le groupe, tout simplement, et on se l’est toujours dit. Tant qu’on est là pour aller faire des répètes et monter dans le camion pour aller faire des concerts, il n’y a pas de raison qu’on arrête. On prend du plaisir à ça. À par-tir du moment où il n’y a plus de plaisir, il faut arrêter, c’est clair. Mais on prend toujours du plaisir et c’est ce qui nous motive, rien de plus. Pas de lassitude, vraiment. On sort un nouvel album, on est content de ce qu’on a fait, Dudu a vraiment bien travaillé, il y a un bon maste-ring derrière. Je suis très content de cet album, et je suis content d’aller jouer les nouveaux morceaux un peu par-tout en France et un peu partout en Europe si on peut. Pas de souci là-dessus.

Tu dois me voir un peu négatif, mais en écoutant le der-nier disque, j’ai eu un petit pincement au cœur. Je me rappelle d’un festival à Strasbourg où vous avez ouvert

en milieu d’après-midi pour un groupe comme Super-bus, et j’ai eu mal au cœur à ce moment-là. L’année der-nière, j’ai assisté à votre concert au Hellfest où vous avez envoyé à 13H30. Merde, y a un problème. Quelle est votre philosophie par rapport à votre statut de groupe « culte » que tout le monde adore mais que les professionnels de la musique ignorent ou méprisent ?Bah, on joue du punk rock (rires). Je pense que ça s’ar-rête là et qu’il ne faut pas aller chercher beaucoup plus loin. Ça n’a jamais été une musique qui passait beau-

coup à la radio et à la télé, et ce n’est pas une musique qui va toucher 50 000 per-sonnes non plus. Ça reste du punk. Mais le fait que ça soit du punk ne veut pas dire que ça doit rester confidentiel. Au Hellfest par exemple, s’enchaînaient des groupes punk toute la journée, et les Burning, avec 25 ans dans les pattes, ça joue à 13h30 alors que ça pourrait jouer à 19h...Ouais. Ouais... Après, c’est les program-mateurs de festival, il y a tellement de groupes en même temps. Franchement, je m’attendais à pire en jouant à cette heure-là. En fait, c’était blindé et j’ai trouvé ça super de jouer à cette heure-là car du coup, on pouvait voir tout ce qui se passait

devant nous. Quand tu joues la nuit, tu vois les premiers rangs mais tu ne vois pas tout le reste mais là, il y avait un super spectacle et c’était vraiment cool de jouer tôt. Bien sûr, ça aurait été super bien de jouer un peu plus tard aussi, mais je ne sais pas si il y aurait eu autant de monde plus tard... Ce n’est pas la plus mauvaise heure pour jouer un samedi au Hellfest, en tout cas.

Comme on le précisait tout à l’heure, BH n’a jamais « splitté » malgré les changements de personnel ou autre et a toujours eu une activité. Qu’est-ce que t’évoquent les reformations plus ou moins éphémères de groupes comme les Sheriff ou vos potes de Seven Hate ? Je comprends qu’ils aient envie de jouer et de recom-mencer. J’espère que cette motivation, ils vont la garder et qu’ils vont pouvoir continuer à jouer autant qu’ils ont envie, car tous ces groupes, s’ils ont arrêté, c’est qu’il y avait une raison, et j’espère qu’ils vont pouvoir passer au-dessus de cette raison pour pouvoir continuer à jouer.

Finalement, ce sont vous les derniers de cette scène dite « indépendante » des années 90 encore en acti-vité aujourd’hui ?À peu près, bon il y en a d’autres, on a croisé les Sales

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Majestés il n’y a pas très longtemps, c’est pareil, ils n’ont jamais vraiment arrêté non plus. Tu sais, un groupe, c’est comme un couple, il y a des hauts et il y a des bas. On a toujours réussi à s’entraider dans les moments bas et puis peut-être à ne pas trop s’enflammer dans les moments hauts non plus, et c’est peut-être ça qui a fait notre longévité.

Quid de la culture en France ? Tout est cyclique en France, tous les cinq ans, un nouveau genre musical revient en force (musique celtique, néo métal, musique festive) et les SMAC se multiplient. Je crois savoir que vous n’êtes pas vraiment fan de ces structures. Qu’est-ce qu’il faut faire en France pour permettre à des groupes de rock de se développer « durablement » ?C’est difficile. Il ya des lois qui sont passées et qui em-pêchent les bars de faire trop de bruit ou de pouvoir programmer des concerts à cause du voisinage. C’est dommage, car ce sont les bars qui pouvaient justement faire vivre cette culture rock. Ce sont plus les petits lieux comme les bars ou les petites salles qui ne sont pas for-cément équipés où les assos vont pouvoir organiser des concerts. Malheureusement, bien souvent les SMAC ne sont pas accessibles pour ces assos ou ces groupes et je pense qu’il faudrait revenir un peu en arrière et que les bars puissent continuer à faire des concerts et à pro-mouvoir la culture. C’est ça qui a fait beaucoup de mal au mouvement.

Le fait d’avoir un tourneur comme 3C vous ouvre un peu plus de portes, mais jouer dans les grandes salles, c’est compliqué ?Oui. C’est un peu moins compliqué pour nous car nous avons une notoriété, depuis le temps, qui est relative-ment importante et un tourneur qui a tous ces contacts-là. Pour nous, c’est donc beaucoup moins un problème que pour des groupes plus jeunes. Par contre, il faut une actualité pour pouvoir jouer dans ce type de salle, car il faut remplir un minimum ces lieux : il faut des albums, éventuellement des clips. Il faut donc quelque chose à proposer. Ça faisait un moment qu’on avait sorti un album et on avait écumé pas mal de salles de France depuis le dernier disque, on arrivait dans un creux, et il était temps qu’on sorte de nouveaux titres.

L’actualité du moment, c’est évidemment le attentats qui ont touché la France et notamment ce droit fonda-mental qu’est la liberté de la presse. Vous avez tou-jours répondu à des interviews pour toutes formes de médias. Qu’est ce que cet attentat contre Charlie et en général contre la liberté de la presse vous évoque ?

C’est grave, c’est révoltant. Même si je ne connaissais pas personnellement ces gens, ils faisaient un peu par-tie de ma vie... Plus jeune, je m’amusais des caricatures que Cabu faisait de Dorothée à la télé... J’ai souvent lu Charlie Hebdo, j’aime ce genre de presse (Charlie, Le Ca-nard) qui traite de sujets sensibles et qui place des cari-catures souvent cinglantes de l’actualité... Je ris jaune la plupart du temps car ces dessins, souvent humoris-tiques, traitent de sujets qui ne le sont pas du tout. Est-ce que c’est la Liberté de la presse qui était visée ? On le dit, mais je pense que ça va plus loin que ça... une attaque terroriste vise des symboles et cherche à dés-tabiliser. On n’a pas l’habitude de ça en France, on s’of-fense que ça puisse arriver et c’est normal. Pourtant, des luttes ont été menées pour que ces libertés existent et même si ça paraît loin, même si c’est de l’histoire et qu’on voit ça à l’école, rien n’est jamais acquis et il faut rester vigilant pour ne pas revenir en arrière. Si les ré-ponses à ces attentats ne sont que sécuritaires, on est loin de régler le problème à mon avis et pire, on risque bien de perdre certaines libertés au passage. Quand je vois qu’une municipalité, en l’occurrence Béziers, pré-fère dépenser son argent en équipant de flingues ses municipaux, je me dis que c’est vraiment pas gagné ! Pour citer un passage, parmi bien d’autres, d’un célèbre film culte... qui n’est pas un film sur le cyclisme : «Où ça nous mène la folie des Hommes, on court droit à notre perte !».

Quand tu regardes dans le rétroviseur, quelles sont tes plus grandes satisfactions durant la carrière du groupe ? Et tes regrets ?(Rires). La plus grande satisfaction, c’est de pouvoir continuer à faire de nouveaux morceaux, de continuer à faire des concerts et de pouvoir avoir pu bénéficier de ça pendant plus de 25 ans, c’est vraiment super cool. Des regrets ? (Il réfléchit) Je n’en ai pas trop, j’en vois vraiment peu (rires).

Finalement, les Burning, c’est reparti pour 25 piges ? (Rires) Je ne sais pas, mais tant qu’il y a la foi et qu’il y a du plaisir, il n’y pas de raison que ça s’arrête.

Merci à Jyb et Boris (PP&M) Dessin : DRPhotos : Jérémie DALSTEIN

Gui de Champi

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par delà ces chapelles fait surtout du très bon métal.

Même si parfois, je le trouve un poil trop extrême («Shrim alternative healing center») dans la forme, je ne peux qu’admirer le fond et cette volonté d’apporter une lourdeur maximale que ce soit par les déchaîne-ments les plus brutaux (cette introduction ultra black) ou les moments les plus posés, distendus et larsenisés comme il faut. Et ces passages les plus sombres qui peuvent me sembler «too much», je me rends compte qu’ils sont nécessaires et ô combien vital pour donner une cohérence à l’ensemble. La beauté d’un épisode post-hardcore tient souvent à la différence de tempo et de puissance au coeur même du titre, ce contraste ab-solu est ici utilisé à son paroxysme et c’est ce qui rend si excitantes les trois plages de Corrado zeller. Même la plus «cool» d’entre elles («Thus I saw the destructive voracity of an obsessive ritual») n’est pas à prendre à la légère (ou alors aussi légère que du AmenRa) et il convient de ne pas l’écouter dans le noir... Bien que cette idée ne devrait pas déplaire au combo qui est très ama-teur des salles obscures, Corrado zeller étant le nom d’un des personnages du film Le désert rouge de Miche-langelo Antonioni (qui réalisera ensuite les cultissimes Blow-ip et Zabriskie point), un Désert rouge déjà à l’hon-neur pour leur EP (Red desert orgy) où Richard Harris (Dumbledore chez Harry Potter) tient ce rôle de Corrado Zeller, homme qui évite de faire face aux situations com-pliquées qu’il croise (n’ayant pas vu le film, je m’en tiens à certains articles).

Ici, Mudbath adore se confronter à la difficulté et af-fronte avec brio un mélange de genres impossible sur le papier et si ébouriffant à écouter.Tu l’auras compris, Cor-rado zeller est une des excellentes sorties de ce début d’année !

Oli

Bain de boue, tu parles d’un nom opportun ! Plus qu’un nom bien choisi, Mudbath c’est l’envie de mélanger dif-férentes influences métal pour faire un truc «à part». Formé en 2011 par Felix (chant), Mika et Flo (guitares), Marco (basse) et un batteur (qui sera remplacé puis re-remplacé par Luke), le groupe s’offre au monde avec un premier EP en 2012 : Red desert orgy. Ils confient l’enregistrement de leur premier album Corrado zeller à Mathieu Croux (Verdun, Sofy Major...) et laissent le soin à Collin Jordan (Eyehategod, Pelican...) de le masteriser avant de le sortir le 31 janvier 2015 chez Lost Pilgrims Records en France mais aussi en Russie ou au Canada...

Si tu penses qu’il n’est pas possible de concilier le sludge, le post-hardcore et le black metal, alors tu ferais bien d’écouter ce nouvel album de Mudbath ! Le qua-tuor sudiste démontre en 3 titres et 35 minutes que la lente lourdeur du sludge peut se marier avec les ryth-miques épileptiques du black et passer de l’un à l’autre en quelques riffs dans un même titre («Salmonella») capable de se métamorphoser en lézard (qui se dore au soleil) comme en colibri (qui envoie du blast à tire d’ailes). Et si jamais il te venait à l’esprit de tronçonner ce morceau en séquences de 15-20 secondes, on pour-rait coller un paquet d’autres étiquettes au groupe qui

MUDBATHCorrado zeller (Lost Pilgrims Records)

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ne parle même pas du message à caractère important du groupe lui-même sur la sentence prononcée en fonc-tion de la critique positive ou négative du rédacteur. Je n’ai pas encore foutu le disque dans la platine que ça continue toujours de sentir l’embrouille. La chronique sera forcément positive mais encore faut-il que j’arrive à l’écrire... Je n’attendrai pas impatiemment l’effeuilleuse à ma porte après cela car la musique indescriptible et bluffante de Pryapisme vaut bien mieux que ça. Futuro-logie est un assemblage brillant et extravagant de sono-rités issues de courants musicaux modernes et clas-siques. Un patchwork regroupant, dans une liste non exhaustive, le classique fantasy et à suspens, le métal extrême avec ses blastbeats millimétrés et ses leads atypiques, l’électro subtile et tapageuse, le 8-bits, le jazz-funk 70’s, la world music traditionnelle et exotique, le tout agrémenté de drôleries sonores et samplées en tout genre (robot, chat, extraits de films...). J’ai foutu le disque dans la platine et je suis déjà embrouillé.Pryapisme sera la musique du XXIIè siècle, celle qui aura bénéficié d’assez de temps pour subir une parfaite mutation des genres. Ou du moins, celle qui en définira les grandes lignes. Car l’œuvre concernée ici est com-posée comme une pièce futuriste classique, un espèce d’opéra avant-gardiste rock avec ses rebondissements à vous rendre totalement fou. A la fois tempétueux, glaçant, drôle, bordélique et complètement culotté, Futurologie poursuit et complète à sa manière le travail et les prouesses déjà exécutées par le passé par les membres, entre autres, de Mr. Bungle, Secret Chiefs 3 ou Frank Zappa. Avec leur nouvel album, les Clermontois viennent donner un gros coup de pied dans la fourmi-lière du milieu artistique, une belle leçon pour tous ces artistes qui baissent leurs frocs ou pour ceux ont com-mencé la musique sans références musicales sérieuses et solides, et qui logiquement nous servent de la bonne souplette. Chapeau bas Messieurs !PS : Bon, Jehan, on s’arrange comment pour la strip-tea-seuse ?

Ted

Parler de Pryapisme n’est jamais une mince affaire. Mon ex-collègue Aurelio avait plutôt bien tiré son épingle du jeu, amoureux des mots qu’il est, il a bien du s’éclater. Pour ma part, c’est plus compliqué, je pourrais même reproduire son article pour aborder Futurologie. J’ai pas encore foutu le disque dans la platine que déjà ça sent l’embrouille : annoncé comme un EP, la galette présente 12 titres pour un total de 46 minutes ! Tout ça parce qu’il n’y a qu’un seul morceau de 23 minutes découpé en 11 parties avec, en guise de «bonus track», la version orchestrale genre BO de film super bien chiadée. Ce long titre intitulé (sérieusement, j’en sue d’avance) «Petit traité de futurologie sur l’homo cretinus trampolinis (et son annexe sur les nageoires caudales)» présente la ca-ractéristique de traiter des chats, de l’espace et du loyer à payer. Je n’ai pas encore foutu le disque dans la platine que ça continue de sentir l’embrouille.

Présenté dans un package promo charmant, un digipak DVD envoyé par les sympathiques et comiques gens du label Apathia Records, Futurologie risque de faire du bruit dans Landerneau. Le message de la maison de disque est clair : «Dans le but de nous assurer une bonne chronique dans votre magazine, nous embauche-rons une strip-teaseuse super bonne pour vous». Et je

PRYAPISMEFuturologie (Apathia Records)

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et ces lignes de chant au bord de la rupture. Tout y est : refrain percutant, solos tout droit sorti des meilleures gammes pentatoniques et énergie débordante. Les influences 90’s sont omniprésentes (« Dont’t touch me » punk à souhait, « Waiting for you » power pop impa-rable, « Behind the mirror » au refrain imparable et au mélange astucieux de lourdeur et de douceur) le tout joué avec rage et spontanéité. Clairement, les bases posées par Silver and gold sont consolidées avec des guitares en béton armé et un basse-batterie cimentant le tout. Le chant grave de Ritchie accompagne avec brio les compositions mûrement réfléchies et travaillées. De vrais pros.

La respiration qu’est « Liquid », instrumental au son clair, permet de mieux rebondir avec la seconde moitié du disque et le puissant punk rock qu’est « Piece of shit » envoyé pied au plancher. « Never let me go », très jolie balade, révèle une nouvelle fois le talent de composition de Ritchie, tandis que lui succède « Something about you » l’une des pièces maîtresses du disque, rageuse et mélodieuse à souhait. Et tandis que le groupe déroule « Skating rink calling » et « I like you », me voilà renforcé dans l’idée que je tiens là un disque qui me correspond parfaitement : des guitares omniprésentes (un peu trop même, la batterie étant à mon humble avis un poil en retrait dans le mix), des mélodies en veux-tu en voilà et des souvenirs de jeunesse qui défilent dans ma tête au fur et à mesure que défilent les tubes qui auraient eu bonne presse dans les belles années du rock du côté de Seattle. Point de plagiat, juste des influences parfaite-ment digérées et retranscrites avec soin et surtout avec goût.

Mis en boite dans l’excellent Cube Studio, Burn out frôle la perfection dans le fond et récolte une très bonne note du jury dans la forme. Mais pitié Ritchie, fais en sorte de ne pas laisser trop d’années entre cette perle et le pro-chain disque, je risquerais de me fâcher !

Gui de Champi

C’est fou comme le temps passe vite ! La première ga-lette de The Last Brigade date de 2008 et même si le groupe était sorti de mes radars, je n’ai pas pour autant oublié l’excellent Silver and gold qui m’avait carrément botté les fesses. Et c’est donc avec un réel plaisir que j’enfourne Burn out, deuxième album du groupe du Sud-Est. Le line-up a évolué avec le temps, et c’est un nouveau basse/batterie qui seconde Ritchie Buzz, tou-jours à la six cordes. Au vu de la photo à l’intérieur du joli digipak et des crédits, il semble d’ailleurs qu’on doive parler du groupe de Ritchie plutôt que d’un groupe avec Ritchie. Mais bon, on s’en branle un peu, car le contenu du groupe est tout simplement réjouissant. La période musicale des 90’s chère à nos cœurs est une nouvelle fois revisitée avec conviction et passion par The Last Brigade.

Dix titres composent le remuant Burn out, dix hits single en puissance, même si j’ai une large préférence pour les morceaux électriques par rapport aux deux balades incluses dans le tracklisting. Car le trio prend tout son sens quand il s’agit d’envoyer des brûlots décapants. « Why don’t you come? », ouvrant le disque, est une belle entrée en matière, avec ces riffs asphyxiant l’auditeur

THE LAST BRIGADEBurn out (Kicking Records)

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très expressive mais jamais bavarde, d’une justesse et d’une pertinence qui incite au respect. En parcourant l’album, difficile d’extirper un titre meilleur qu’un autre, la constance est clairement aussi une des marques de fabrique du groupe. Toutefois une piste comme «Eve-rything turns cold» et son chant sur le fil ou le très Pin-back «(Along all) boring pools» devrait convaincre les amateurs de rock indé qui ne se sont pas encore frotter à la musique de We Only Said. Excellent retour. Mais bon dieu, pas 6 ans d’attente pour un nouvel album, hein ?

David

We Only Said, l’album, était sorti en 2009 et avait séduit grâce à un mélange haut de gamme de songwriting et d’influences qui font mouche. 6 ans pour republier une galette, ça peut sembler long mais le très talentueux Florian Marzano n’était pas resté inactif pour autant et avait, notamment, livré l’album de Trunks, un disque magnifique nourri par de belles collaborations (avec Lae-titia Shériff notamment...), la collision de divers talents avec pour résultat un propos hybride à l’identité forte. Bref, un projet à la classe évidente de chez évidente qui alimentait notre empressement de voir We Only Said de retour aux affaires.

Dès le premier titre de ce Boring pools, on retrouve cette couette musicale mélancolique qu’est We Only Said : la voix désenchantée et sobre sur ce travail d’orfèvre en terme de composition qui allie des mélodies ciselées et une méticulosité palpable. On pense à toute la clique des 90’s, June Of 44, Karaté, Shellac mais les We Only Said jouissent toujours d’une personnalité qui leur est bien propre. 6 minutes délectables dans lesquels on se laisse embarquer finger in ze nose. Et si les We Only Said ont soigné cet entame d’album, le reste est aussi d’une classe folle, toujours dans cette frange d’une musique

WE ONLY SAIDBoring pools (Les Disques Normal)

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l’annonce le titre d’ouverture. Rejouer avec Kyuss a en effet du laisser des traces, mais on sent aussi plus que jamais l’influence de Jimi Hendrix revendiquée par le bonhomme depuis longtemps déjà. On oscille entre des titres sympas et d’autres purement anecdotiques sans qu’aucun ne sorte vraiment du lot. L’album est relative-ment bien composé (même si on regrettera une prod plus que discutable) avec pas mal de bonnes idées qui se glissent ça et là entre deux riffs bien vus. Mais on se demande un peu où est passé le « truc » qui faisait le charme de ses grands morceaux : groove et feeling avec cette petite ambiance cool qui a presque disparu au pro-fit de cet heavy fuzzy trop entendu et parfois redondant. Brant Bjork n’a jamais été un grand technicien du solo, mais comme un Slash il arrivait jusqu’ici à tisser des petits phrasés assez mélodiques pour être accrocheurs, or ces petits moments de classes font durement défaut à Black flower power qui du coup ne décolle jamais vrai-ment. Ce qu’il manque en fait à cet album, c’est l’ori-ginalité Brant Bjork, ce « truc » justement, ce groove rock parfum pina colada qui faisait qu’il était plus qu’un simple musicien stoner parmi d’autres. Dommage.

Pour autant on reste admiratif devant l’inventivité que le bonhomme continue de montrer après toutes ces années. Prétendre que cet album est un ratage complet serait de la mauvaise foi, si il ne contient pas le tube de l’année, il faut malgré tout dire qu’il fait son travail d’album de rock en toute honnêteté et en toute modes-tie. Car après tout, c’est bien la modestie qui caractérise le personnage, contrairement à son homologue des Queens Of the Stone Age qui se fait brosser même pour ses pires albums. Alors non, Black flower power ne vous marquera pas plus que ça, mais il fera l’affaire si vous êtes déjà amateur du genre, surtout si vous vous don-nez la peine de choper les deux pistes bonus que sont «Hustler’s blues» et surtout «Where you from man» qui méritent bien plus leur place sur l’album que d’autres titres.

Elie

Plus que jamais, la carrière de Brant Bjork semble des-siner un parallèle avec l’histoire du stoner. Pendant des années Brant Bjork est resté dans l’ombre, enchaînant les bons albums les uns derrière les autres, mais ne bénéficiant, au mieux, que d’une distribution tout à fait confidentielle et d’une exposition quasi inexistante. C’était sans compter sur le phénomène des reforma-tions compulsives et dont Kyuss aura été l’un des tout derniers exemples. Brant Bjork accède alors a la lumière médiatique et goûte pour la première fois a une recon-naissance tout aussi méritée que tardive. Si la belle histoire se terminera aussi vite qu’elle avait commencé, celui que l’on appelle Mr Cool bénéficie désormais d’un peu plus d’attention de la part d’un public stoner... Plus que jamais le moment de ressortir un album solo donc !Or Bjork ne s’est pas dit une seconde que cet album, fort d’une nouvelle exposition, méritait peut-être plus de tra-vail que les précédents. Non, Brant Bjork, comme d’hab, s’en fout. On serait tenté de dire que nous avons là un al-bum de stoner plus qu’honorable et même dans le haut du panier par rapport a ce qui pullule déjà sur une scène bien saturée. On a surtout, une fois de plus, l’album d’un Brant Bjork qui se contente de continuer son petit bon-homme de chemin sans jamais rien demander. En tout cas, l’heure est carrément au heavy sabbathien comme

BRANT BJORK AND THE LOW DESERT PUNK BAND Black power flower (Napalm Records)

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rière le nom donné à la police montée (Mounties), enre-gistre Thrash rock legacy qui sort un an plus tard.

Avec une pop carrément décomplexée, le trio nous met rapidement la tête à l’envers, ça part un peu dans tous les sens avec un fourmillement d’idées, de voix, d’instru-ments aux sons plus colorés les uns que les autres, c’est un véritable feu d’artifice qui aligne les smileys dans la nuit. Bien entendu, certaines sonorités plairont moins à certains (enlève-moi le clavier de «Tokyo summer» et ça en fait mon titre préféré) mais dans l’ensemble, la grosse douzaine de titres a une capacité d’accroche as-sez phénoménale (exceptés les ovnis bidouillés «Edible cannibal» et «Late nights» plus abrupts). Ce n’est pas toujours des méga hits en puissance («Hall & oates» ?) mais le talent des loustics pour écrire des mélodies ne s’est pas dilué au contact de leurs comparses.

Si on aurait pu craindre des soucis de rythme étant don-né l’absence de batteur ou de bassiste «de formation», c’est tout l’inverse, il y a beaucoup d’énergie et les lignes de basse comme le jeu de la battante ne sont pas uni-quement là pour jouer les métronomes («Made up my mind»). Et quand les instruments organiques ne leur semblent pas suffisants, ils dopent les compositions en injectant de l’électro («The twig & the tree», «Minimum effort»).

Quand trois petits génies du rock canadien travaillent ensemble, ça donne quelque chose de pétillant, de bril-lant et même d’éclatant. L’avenir de Mounties est lié à l’emploi du temps de Hawksley Workman (le plus oc-cupé des trois) et à l’envie du trio de continuer de jouer et vivre ensemble, mieux vaut donc en profiter tout de suite...

Oli

Hawksley Workman, ça te dit quelque chose ? Depuis la fin des années 90, le canadien promène ses titres pop-rock à travers la planète et enquille les albums tout en trouvant le temps de produire d’autres artistes.Hot Hot Heat, ça te dit quelque chose ? Depuis la fin des années 90, le groupe canadien a enregistré 4 albums et a tapé dans l’oreille de pas mal de gens qui ont récupéré leurs titres pour divers projets (films, séries TV, pubs...), le chanteur claviériste à l’origine du groupe s’appelle Steve Bays.Age of Electric ou Limblifter, ça te dit quelque chose ? Moi non plus. Ce sont deux groupes canadiens qui ont comme dénomiteur commun le guitariste Ryan Dahle qui, dépuis les années 90, a vu plusieurs de ses riffs escalader les charts indés au pays de Caribou.

En 2009, lors des Juno Awards, sorte de victoires de la musique canadienne (Nickelback est alors groupe de l’année), ils se rencontrent, discutent, accrochent et en fin de soirée se disent que ce serait sympa de se retrou-ver pour composer des trucs ensemble.Leurs emplois du temps respectifs étant chargés, ce n’est qu’en janvier 2013 qu’ils sortent un premier titre («Headphones») pour prendre la température. Les voyants sont au vert alors le supertrio, qui se cache der-

MOUNTIESThrash rock legacy (Differ-ant)

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qualité l’égale. Au moins. Même si, reconnaissons-le, cette dernière galette est un peu plus «easy-listening», plus «pop» diront certains.

De par son histoire personnelle (soudanais né à Londres et vivant aux USA) et ses aventures artistiques (musi-ciens studio d’origine ayant joué avec des artistes di-vers et variés, voir sa biographie), le son de Sinkane est nourri de ses très nombreuses influences et brouille for-cément les cartes. Sa soul hybride tend la main à l’afro-beat («New names»), au funk («Yacha»), à la bossa («Moonstruck»), au reggae («Young trouble») ou bien à la country-s(l)ide («Galley boys»). Entre ballades buco-liques et musique au groove efficace, la «pop» mutante de Mean love est portée avec maîtrise par la voix douce, langoureuse et parfois un peu trop aiguisée («Mean love») d’Ahmed Ghallab. Au passage, «Hold tight» fait fortement penser à celle de Sade, un signe peut-être.

Passé grosso merdo du rock prog-psyché à la pop-soul, le bonhomme de Brooklyn semble avoir désormais trouvé sa voie à travers une expression plus satinée pour un résultat non moins mauvais mais potentielle-ment contrariant. A l’image de son titre, Mean love est un album parfait pour pimenter vos préliminaires ou à consommer après une journée harassante de travail le cul dans un bon vieux sofa.

Ted

Ahmed Abdullahi Ghallab est un multi-instrumentiste d’origine soudanaise né à Londres qui a déménagé aux Etats-Unis à l’âge de 5 ans. Avant de débuter sa car-rière en solo sous le nom Sinkane en 2007 avec l’album Sinisterals, il a travaillé en tant que batteur et percus-sionniste de studio avec Eleanor Friedberger, Caribou, Of Montreal, Helado Negro, Born Ruffians et Yesayer. Après s’être essayé au post-rock et au krautrock au début de sa carrière, Sinkane s’est fait un nom avec la pop soul afro-beat groovy de Mars en 2012 puis Mean love, son dernier album sorti en 2014.

Sinkane n’est pas un groupe inconnu du W-Fenec. Dé-couvert sans passer par la case chronique à l’époque de Mars, ce musicien résidant à Brooklyn nous lançait alors aux oreilles un disque très groovy teinté de jazz, d’électro-funk et de rythmes venus notamment de son continent d’origine, l’Afrique. Conforme aux bonnes ondes sonores découvertes sur l’album, la prestation que l’artiste a délivrée à Dour en 2013 faisait partie d’un de ces très bons souvenirs scéniques de cette édition. Sorti début septembre 2014 sur City Slang, label berli-nois ayant fait découvrir à l’Europe des groupes tels que Yo La Tengo et The Lemonheads, Mean love n’a aucun complexe à avoir auprès de son prédécesseur tant sa

SINKANEMean love (City Slang)

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multiplicité force l’admiration (passant du quasi néant de «The words» au déluge de «The other’s fall») et des guitares incisives aux distorsions parfois un peu passe-partout («Tabula rasa») qui séduisent surtout quand elles sont assagies («Pluton»).

Par différents aspects, Tellurian semble bien plus spi-rituel que terrestre, derrière quelques déflagrations on trouve beaucoup de sagesse et d’émotions. D’ailleurs s’il ne fallait retenir qu’un maître mot de cet album, ce serait celui-là : émotions. Tant Soen arrive à nous les transmettre avec délicatesse.

En attendant toujours et quand même le nouveau Tool...

Oli

Forcément toujours dans la veine prog/métal avec une voix claire, Soen revient en cherchant à se démarquer un peu plus de la référence obligatoire qu’est Tool. A commencer avec un artwork très coloré qui, malgré la présence du rhinocéros, n’a rien à voir avec celui d’Io-nesco, il s’agit juste d’une oeuvre du peintre mexicain Jose Luis Lopez Galvan, auteur de peintures à l’huile dans lesquelles les animaux prennent souvent la place des humains, une oeuvre qui forcément nous fait réflé-chir. Les textes sont eux aussi assez instrospectifs avec la relation à l’autre comme fil conducteur, Soen affirme ainsi davantage sa personnalité et existe par lui-même dans le fond comme dans la forme.

Car, si on parlait forcément de Tool lors de la sortie de Cognitive, les douces mélodies et la voix cristalline tout comme les parties en guitares non distordues appellent d’autres noms comme Porcupine Tree ou Empty Yard Experiment. Sur certains titres, on passe d’ambiances «classiques» pour ce registre à des moments bien plus rares comme la fin a capella de «Kuraman» ou le style religieux du chant de «Void». Et si le timbre de voix per-met d’identifier (et donc de différencier) Soen, le groupe met également en avant une basse qui sait se faire ronde et chaude («Koniskas»), des rythmes dont la

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Etienne qui fait office de survivant et Vincent, le petit «nouveau» répondent à nos questions sur ce nouvel opus d’AqME, le premier avec écrit avec ce nouveau line-up qui tourne quand même ensemble depuis 2012...

Revenons sur le passage de témoins entre Thomas et Vincent, vous saviez au moment de l’enregistrement d’Epithète, dominion, épitaphe qu’il partirait ensuite ?Etienne : Non, nous ne le savions pas. Quand il nous l’a annoncé, ça a été une vraie surprise, un choc, on s’y attendait pas du tout. Ca a été une période très compli-quée, notamment moralement. Mais ça me paraît bien loin tout ça maintenant !

Le choix d’embarquer Vincent a été simple ?Etienne : En quelque sorte oui. Car nous avons eu une réaction d’orgueil, à chaud nous nous sommes dit qu’on allait pas se laisser tirer vers le bas par le départ de Tho-mas. C’était tout simplement une réaction de survie ! Charlotte et Julien on pensé immédiatement à Vincent car ils le connaissaient bien et se disaient qu’il avait le niveau pour assurer. Ils ne se sont pas trompés ! De mon côté j’ai commencé à regarder des vidéos de Butcher’s Rodeo et Noswad et je me suis dit que Vincent était sans aucun doute quelqu’un de très doué, capable de nous sauver pour la tournée qui venait. De toute manière c’était lui ou rien, nous n’avions pas de plan B ! C’est parfois face à la difficulté qu’on prend certaines de nos meilleures décisions...

Vincent, comment s’est faite ton arrivée chez AqME ?

C’est un groupe que tu suivais particulièrement ?Vincent : J’ai débarqué en janvier 2012 après quelques textos échangés avec Charlotte et une bonne répète ; c’est un groupe que je ne suivais plus trop alors qu’à leurs débuts j’étais à fond, nous avons eu l’occasion, avec mon premier groupe (Noswad), d’ouvrir pour eux...

Y-a-t-il une hiérarchie dans tes projets ? AqME passe forcément avant les autres ?Vincent : Pas de hiérarchie, juste de la priorisation par charge de travail, on va dire comme ça ! Et en règle gé-néral j’essaye de faire au mieux parfois c’est pas simple du tout.

J’ai parfois l’impression que tu cherches à imiter Tho-mas alors que tu sais faire bien d’autres choses, c’est pour assurer une transition en douceur ?Vincent : Consciemment, pas du tout, par le passé, on a souvent comparé ma voix à celle de Thomas de par mes influences diverses proches des siennes, inconsciem-ment peut-être, AqME est AqME, la voix suit la musique, on ne maîtrise pas tout... Etienne : Personnellement je n’ai d’ailleurs pas du tout le sentiment d’entendre Thomas quand Vincent chante. En revanche la voix de Vincent me paraît totalement natu-relle dans le cadre d’AqME, au même titre que celle de

INTERVIEW > AqME

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INTERVIEW

Thomas en son temps. Je suppose que si tu as ce senti-ment c’est probablement parce que la musique d’AqME, l’état d’esprit et la personnalité du groupe reste toujours très forte et reconnaissable, quel que soit le chanteur.

A part toi Etienne, il ne reste rien d’AqME, est-ce que la marque AqME est plus forte que ceux qui jouent la musique ?Etienne : Il ne reste rien d’AqME à part moi ? C’est un peu fort comme phrase et je ne suis pas du tout d’accord ! Charlotte est pour moi également à l’origine du groupe et Julien est déjà dans le groupe depuis 7 ans soit 3 al-bums et 1 EP, ce qui est presque autant que notre ancien guitariste. Il me semble au contraire qu’il reste l’essen-tiel : notre musique, preuve en est avec Dévisager Dieu. Je crois donc en effet que la patte AqME est plus forte que tout.

L’album est assez puissant, ultra efficace, vous vous êtes dit, il faut que ce soit encore plus béton car on va nous tomber dessus ?Vincent : On s’est juste dit qu’il fallait faire ce qu’on kif-fait. Voilà, c’est tout.

Cet artwork est un choix aux multiples interprétations, quelle était votre demande, quelle est le message que vous vouliez passer ?Vincent : Clairement nous avons laissé carte blanche à Stéphane de Yeeeah Studio, en lui disant juste, on veut le logo original du groupe, dualité, fraternité et religion.

Les couleurs et l’ambiance sont plus claires et chaleu-reuses que pour les autres artworks, AqME est devenu moins glauque ou morose ?Vincent : Ce n’est clairement pas entendu ou suggérer, comme dis précédemment, nous avons laissé carte blanche pour le graphisme, est-ce que le renouveau d’AqME lui a inspiré les couleurs d’une renaissance ?

On sait que Thomas est très impliqué dans le gra-phisme, sa voix portait plus quand il était là quand il fallait choisir un artwork ?Etienne : C’est sûr que Thomas était très actif concer-nant l’aspect visuel du groupe, aussi bien sur le net que dans les créas d’album etc. C’est forcément plus com-pliqué mais on a la chance d’être très bien entourés et on a aussi commencé à se répartir différentes tâches ce qui nous permet de communiquer pleinement entre nous et d’être encore plus efficaces, au passage merci à Max. Concernant le visuel de l’album, et il en va de même pour notre nouveau disque dans son ensemble, on en

est tellement contents que le temps des regrets, doutes ou interrogations est bien derrière nous !

En parlant de doutes, changer le nom du groupe a-t-il été envisagé ?Etienne : Je n’en suis pas sûr mais il me semble qu’on a dû en parler autour du départ de Thomas. Mais très vite, on a su que AqME était bel et bien vivant avec Vincent... Et très vigoureux même ! Les concerts nous ont au fur et à mesure confortés dans cette idée. Nous en sommes clairement sortis encore plus soudés et forts, avec la certitude partagée par nos fans que nous étions tou-jours AqME.

Dévisager Dieu c’est penser qu’il existe... Non ?Vincent : Je pense qu’avant tout il est important de croire en quelque chose, que ce soit en Dieu, en toi, chacun sa manière d’avancer...

Pourquoi ce titre ? C’est le genre de titre qui ne plaît pas forcément aux fondamentalistes musulmans...Vincent : A aucun moment il n’y a de débats religieux , même pas une position prise, pour le titre on avait envie d’exprimer notre détermination à travers des mots, une image forte, pour nous c’est Dévisager Dieu.

Etienne qui enregistre, avantages et inconvénients ?Vincent : L’avantage c’est que c’est Etienne ... l’inconvé-nient c’est que Etienne ... (rires)

Merci à Vincent et Etienne ainsi qu’à AqME et son équipe dont bien entendu Olivier chez At(h)ome !

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moins trafiquée et très douce qui font changer la donne. Même le quasi instrumental «Erase your face» semble tapi dans l’obscurité prêt à nous sauter à la gorge (ce qu’il ne fera pas), lugubre et inquiétant, ce bricolage de voix samplées et de sons bidouillés auraient pu clore en ténébreuse beauté l’album mais le trio a préféré en remettre une couche derrière avec un titre plus dansant. C’est «We are from the internet» (qui comme d’autres genre «New Blood»), un morceau qui pousse à la ges-ticulation sauvage et que j’imagine bien propulsée dans les baffles d’une boîte futurist servant de décor à une histoire post-apocalyptique. Parce que pour l’heure, la jeunesse qui danse n’est pas encore prête à prendre de telles déflagrations sur un dance-floor...

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Cinquième album d’Atari Teenage Riot ou deuxième du Atari Teenage Riot du vingt-et-unième siècle, c’est selon si on veut jouer aux vieux baroudeurs ou pas... En tout cas, Alec Empire, Nic Endo et et Rowdy Superstar conti-nuent de bosser dans la lignée d’Is this hyperreal? paru en 2011.

Et y’a pas à dire, Alec Empire a sa signature et son style, reconnaissable entre mille, permet d’adhérer très rapi-dement à ces nouveaux brûlots. Parce que ça bastonne sévère à peu près tout le temps («Street grime», «Death machine», «Transducer»...) et il ne faut pas compter sur la voix féminine pour calmer le jeu, au contraire, on sent la rage transpirer à travers les enceintes... La hargne d’Alec qui fracasse ses guitares et ses machines est contagieuse et on se prend rapidement à hurler quelques brides de paroles scandées par le DJ-rappeur Rowdy (par exemple We live in a decade where violence breeds more violence de l’éponyme «Reset»), il faudrait tout remettre à zéro, relancer la machine plutôt que de la voir bugger de plus en plus jusqu’à un inévitable «Cra$h». Ce nouvel opus apporte bien peu d’espoir et ce ne sont pas les quelques passages plus posés où les samples apparaissent plus lumineux et la voix d’Endo

ATARI TEENAGE RIOTReset (Digital Hardcore)

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non irrévérencieux du côté de la funk (le puissant « Mil-lion miles away », « Down on the ground ») et de la... country ! (« Give me all your loving » sentant bon le Texas, toute ressemblance avec un groupe barbu n’étant que pure spéculation) ou du stoner rock (« Never break »). Pas étonnant pour un groupe qui a écumé dix états et joué 35 concerts en 2 mois au pays de l’Oncle Sam.

Tout au long des 35 minutes d’Explore, l’auditeur se trouve transporté dans le monde merveilleux de Li-vingstone, aux univers multiples et variés et même si, à la longue, ce même auditeur peut avoir l’impression que le groupe se disperse, c’est tout de même un sentiment de maîtrise des styles qui prédomine. Le chant est irré-prochable, les instruments se tirent la bourre pour servir un album énergique et passionnant, et on perçoit rapi-dement que c’est avant tout la passion qui s’exprime. Et moi, les groupes passionnés, j’adore ça !

Gui de ChampiAprès un premier EP convaincant, c’est avec plaisir (et un peu de retard, désolé les gars) que je vais te parler d’Explore, premier album de Livingstone. Le groupe a tenu parole quand il s’agissait d’enregistrer rapidement un premier LP. Grand bien lui fasse. Surtout quand le disque est classieux.

Pour les connaisseurs (et j’espère que vous êtes nom-breux), Explore est avant tout la suite logique du premier EP qui posait les bases de l’identité Livingstone. Dix titres au total et dix façons de s’évader dans l’univers riche et rafraîchissant du quatuor (devenu trio). Une nouvelle fois, ça brasse dans pas mal de styles (rock, garage, blues grass et même quelques pointes de sto-ner) avec une production léchée, le groupe s’étant don-né les moyens d’enregistrer son premier album dans de bonnes conditions. L’artwork est épuré mais le contenu est, quant à lui, riche de sons divers et variés et surtout de morceaux aboutis qui font d’Explore une nouvelle belle surprise.Les racines blues grass américaines de Livingstone (incorporant notamment du banjo, des guitares slide...) sont omniprésentes à l’écoute d’Explore (« Grey slave », « Little queen ».) le groupe se permettant des écarts

LIVINGSTONEExplore (Autoproduction)

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sement capable d’affronter toutes les tempêtes sans s’emporter.

Plus de la moitié des plages viennent des deux dernières productions : le EP Refuge qui a la tâche de montrer la voie avec «Where do your tears come from», et Everest dont une grande partie est interprétée. Elles sont certai-nement moins douloureuses à jouer que celles de Plan your escape («This farm will end up in fire» et «Couples on T.V.») ou From here to there («The Fog», «Catwalk») qui occupe également la fin de ce Hello strange («Bees & butterflies» et le dissimulé «Organeum»).

Ce côté relaxant combiné au timbre de voix et à la mul-tiplicité des instruments font que je placerais ce travail des Girls in Hawaii quelque part entre la pop folk de Co-coon et l’électro-pop d’Aaron, bref, aux côtés de ce qu’il se fait de mieux dans ce genre-là.

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Après avoir réussi à escalader leur insurmontable Everest (refaire de la musique), les Girls in Hawaii reviennent avec un live acoustique enregistré les 20 et 21 octobre 2014 à La Ferme du Biéreau (Louvain-la-Neuve). 14 titres extraits de leur discographie sont donc revisités avec de nombreux nouveaux arrangements et sonorités parce que le groupe ne s’est pas contenté de jouer ses morceaux à la guitare acoustique en allumant quelques bougies, non, il a travaillé avec un harmonium, une contrebasse, un vibraphone, des percussions, des synthétiseurs (pas très acoustiques mais qui créent une atmosphère élec-tro-délicate) ou un harmonica dont la chaleur est un vrai bonheur.

Des sons frais, clairs, doux et agréables pour des compositions qui, à la base, sont déjà des pépites mélodieuses, alors plus ou moins dépouillées et centrées sur leurs forces, ces créations se voient magnifiées dans cette intimité. Certes, je n’étais pas là ces soirs-là mais à l’écoute, c’est tout comme, les applaudissements laissent imaginer une ambiance feu-trée où si tristesse et mélancolie sont de la partie du fait de la tonalité des morceaux, c’est du bien-être qui émane des enceintes, une sorte de zénitude, un apai-

GIRLS IN HAWAIIHello strange (62 TV Records)

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donc davantage à la déconnade, même si l’ensemble tourne quand même grave Néanmoins les titres éveillent davantage la curiosité quand ils s’écartent un peu de l’ensemble et deviennent plus malsains et (rela-tivement) épurés, comme c’est notamment le cas sur « The walking fed », très bien chanté, progressif et hanté (sic). D’autres ont également l’allure de tubes immé-diats (« Ego fandango », « Lazy boy »), propulsés par des parties de synthé assez monstrueuses - pour filer la métaphore, et des choeurs féminins improbables. Mais il faut cependant bien accepter le postulat de départ : le quintet ne tient absolument pas en place, et passe du coq à l’âne sans états d’âmes, quitte à étirer certaines chansons en longueur (9 morceaux, 55 minutes tout de même). Le tout forme un concept-album baroque dont la trame n’est pas forcément évidente à suivre sans les paroles sous les yeux et qui se termine par un morceau épique de 10 minutes.

En résumé on a affaire à un LP très bien produit (le groupe pourrait tout aussi bien venir de Los Angeles), jamais confus dans l’interprétation, mais s’adressant fatalement à un public assez restreint, les fans de métal eux-mêmes n’étant parfois pas très ouverts à ce type de crossover radical. Pour les curieux, les déjà convertis aux délires du genre, ou juste les kids de la génération 90 pétris à la fusion de tout bord : jetez-vous dessus, c’est tout ce que vous aimez. Et puis les autres, écoutez aussi, ça ne peut pas vous faire de mal.

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Quelques minutes d’écoute attentive du nouvel album de 6:33 suffisent à déclencher une petite série d’inter-rogations : ai-je en main la nouvelle folie de Mike Patton ? Un sideproject de Ron Thal ? Une réédition d’un groupe américain de la fin des 90’s ? Un coup d’oeil à la pochette nous renseigne un peu : les musiciens (parisiens en fait) sont bel et bien influencés par Patton et consorts, et ne s’en cachent pas ; son nom est même inclus dans la bio (assez marrante) entre Tim Burton et les Tortues Nin-jas. Bon, l’ambiance est posée. Alors oui, clairement, le troisième album de 6:33 est très référencé, on peut le déplorer, le considérer comme une série d’hommages, ou juste se dire que ces musiciens-là n’avaient qu’une idée en tête : se faire plaisir et jouer ce qu’ils aiment (et là plus personne ne l’ouvre).

On trouve donc pêle-mêle du Mr Bungle, du Faith No More, du Bumblefoot, du Queen, du métal (neo, trash) souvent, des sonorités plus électroniques parfois, le tout dans l’esprit théâtral des BO de Danny Elfman, et remplis à ras bord d’arrangements barrés, dont il faut saluer le travail titanesque. On trouve aussi quelques clins d’oeil anecdotiques, tel le «- Hi kids ! Do you like violence? - Yeah, yeah, yeah» en référence au « My name is » d’Eminem sur la neuvième piste. L’esprit est

6:33Deadly scenes (Kaotoxin records)

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que Loomis Dean (photographe pour LIFE) n’a pas shooté que des midinettes... Son lourd, riffs lancinants ultra distordus, chant qui passe en clair avec des éti-rements vocaux, le titre introductif «Temple of sin» ressemble beaucoup (trop ?) à du Alice In Chains ! Par la suite, ce sentiment va quasiment disparaître (seuls quelques passages sonnent dans ce style) et même dans ce premier morceau, les growls et les accélérations nous éloignent du grunge. Pour éviter un tel raccourci, peut-être aurait-il fallu noyer cette plage dans le coeur de l’opus parce que là, notre radar aux Layne Staleyries est branché ! Mais donc, on le répète, ce n’est qu’une influence parmi tant d’autres, c’est juste la première qui saute aux oreilles... D’ailleurs, le groupe est plus métal que grunge ou stoner (quand bien même «Meti-culous crime against ourselves» est un petit bijou dans le genre). Au rayon «détail qui tue», on peut balancer les harmoniques artificielles (celles de «Far» ou «In fall we trust» par exemple) qui font clignoter la référence Machine Head, certaines parties chantées et quelques solos témoignent encore de l’attirance du combo pour Robert Flynn. A noter que ces deux titres (avec «We’re dying by our hands») sont de très vieux morceaux, déjà présents sur la démo sortie en 2007, ils ne sont plus tout à fait représentatifs des dernières créations du groupe. Côté poids du riffing et tabassage en règle («Black age», «Antihero», «I can’t live second life»...), c’est un autre nom culte qui vient en tête : Pantera. Il te reste à mélanger tout ça avec des intermèdes dépouil-lées entre pop et blues («Eternity» ou «Used») pour essayer d’imaginer à quoi ressemblent ces Songs from the ashes.

Marqué au fer rouge par les années 90 et plutôt des groupes qui apprécient un son lourd et les ambiances pas très saines, Supertanker ravira les trentenaires nostalgiques et peut botter quelques fesses pas encore poilues !

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Un supergroupe Supertanker ? En tout cas, on trouve en son sein quelques gars expérimentés qui, en 2007, décident d’unir leurs forces pour donner vie à un pro-jet métallique qui sent la rouille et la sueur. Les Pari-siens Ced (chant) et Fab (guitare) jouaient ensemble (d’après Spirit of Metal, je n’ai pas retrouvé l’info ail-leurs) dans Ubik (tout comme Denis qui fera un temps parti de l’aventure), Ced (encore lui) avait également participé à Pitbulls in the Nursery d’où il ramène Jerry (batterie) et Mat (guitare), seul Cédric à la basse n’avaient pas croisé ses potes bien qu’ayant joué dans pas mal de groupes (Apostasia, Gerbe of Life, Olc Sinn-sir, Wargasm). Une belle brochette de zicos qui bossent ensemble, sortent une démo 3 titres (In fall we trust en 2009, enchaînent les concerts et disparaissent quelque peu pour revenir en 2014 avec un premier al-bum Songs from the ashes qui charme la Klonosphère.

Songs from the ashes, des chansons sorties des cendres... Et de cendres nucléaires s’il vous plaît ! Lan-cer la lecture du skeud, c’est se mettre à la place des mannequins qui jouaient les testeurs de bombes dans les années 50 au coeur du Nevada. Ce (très bon) choix de pochette (réussie donc) est l’occasion de montrer

SUPERTANKERSongs from the ashes (Klonosphère)

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eyed» qui débute tambours battants avant que la clarté du chant de Jason Butler (Letlive.) ne vienne calmer tout le monde et finalement donner beaucoup de relief et d’intérêt à un morceau qui n’aurait pu être qu’un bour-rinage en règle...

Avec un savant amalgame de titres rapides («Move me»), lourds («My endnote») et mélodieux («Blank pages»), une qualité sonore exceptionnelle (ça c’est du bon grain ma petite dame), Dear youth asseoit la place de The Ghost Inside au panthéon des meilleurs groupes de HardCore, ceux qui ont su prendre le virage de la mo-dernité sans vendre leur âme ou perdre leurs racines. Incontestablement un des meilleurs albums de métal du moment.

OliQue les choses soient bien claires, tu as deux sortes de groupes de HardCore... T’as le groupe de HardCore qui se pointe sur scène et qui balance des gros riffs, des par-paings sur les fûts et qui gueule, ça, c’est le bon groupe de HardCore. Et t’as le groupe de HardCore qui monte sur scène et qui envoie des gros riffs, des grands coups sur les fûts et qui gueule, ça, c’est le mauvais groupe de HardCore.

The Ghost Inside fait partie de la première catégorie, celle des bons groupes de HxC. Ca se sent immédiate-ment, le son est puissant (on retrouve Andrew Wade assisté de Jeremy McKinnon (A Day to Remember) à la prod), ça tabasse, c’est ultra efficace, tout est au milli-mètre et tant pis pour les puristes si de temps à autre le groupe réfléchit à ses constructions et place des subti-lités ou des samples. Et ce qui était clair jusque «Phoe-nix flame» (le sixième titre) devient une évidence, The Ghost Inside est plus qu’un bon groupe de HardCore, les discrètes insertions des machines comme des mélodies se font plus qu’évidentes sur un titre qui fera s’évanouir les tough guys en quelques secondes avec ses tonnes de délicatesse et de raffinement ! Un véritable ovni sur un album tout de même bien plus hard que mélodique... Au rang des (bonnes) surprises, on trouve aussi «Wide

THE GHOST INSIDEDear youth (Epitaph)

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PUBS 3 à placer > ici > Impetus

+ Betizfest + Unswabbed

a voir en fonction des itws

(place a la fin des BH ?) sinon, intercalage entre 2 articles par deux fois

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qui passerait même pour de la dark pop avec d’excel-lents morceaux (tubes ?) comme «Asylum» (avec sa délicieuse basse qui ronfle) et «Inertia», sorte de wes-tern mélancolique hypnotique 100% addictif. On sent que Geoff maîtrise de mieux en mieux sa formule qui pourrait être considérée, tel que beaucoup l’ont souli-gné, comme un savoureux mélange entre le côté très sombre de The Cure, les rythmes industriels et froids de Godflesh et l’attitude inconvenante de Nirvana, dont est fan l’intéressé. Rise établit l’abonnissement du chant de Jessica93 que l’on arrive à mieux discerner qu’aupara-vant, et laisse échapper un soupçon de lumière («Kar-mic debt»), comme si son auteur avait voulu éviter de rendre une nouvelle fois son œuvre trop dense. A l’in-verse, «Surmatants» et «Uranus» aurait pu se ranger facilement dans le tracklisting de Who cares. Toujours est-il que l’homme-orchestre garde avec Rise l’âme de son bébé intacte : une sombre hypocondrie contagieuse et introspective.

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Une véritable révélation auprès du public (avec des concerts «sold out») et un engouement de la presse musicale (une couverture inattendue dans un magazine papier assez renommé en France), à tort ou à raison, Jessica93 ne pouvait pas rêver mieux après l’arrivée presque prématurée de son troisième album, Rise. En effet, un peu plus d’an après Who cares, vendu à plus de 2500 exemplaires, le petit nouveau était déjà prêt à être diffusé, le temps d’être recontacté par les copains de Teenage Menopause Records et Music Fear Satan pour le sortir et le tour est joué. Et le moins que l’on puisse dire c’est que le disque ne passe pas inaperçu avec sa pochette qui, sans doute, concourra dans la catégorie de la pire de l’année 2014. On y voit le séquanodionysien poser façon «photo de vacances» devant sa Citroën Visa jaune avec son pote Nafi de Noir Boy George (mais également de Scorpion Violente, The Dreams et Le Chô-mage), alors qu’ils sont en pleine tournée commune. Un peu d’humour ne fait pas de mal de temps en temps, surtout que le bonhomme n’en manque jamais (vérifiez donc le nom de ses autres groupes dans la biographie).

Rise reprend les choses là où Who cares les avait lais-sées. Jessica93 continue en effet de propager à tra-vers les enceintes sa poisseuse et glaciale cold wave

JESSICA93Rise (Music Fear Satan, Teenage Menopause Records)

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est apporté avec Who cares, les textes à la fois français et anglais étant dissimulés dans des effets de réverb et noyés dans le magma sonore sombre et froid. Même si on arrive par moment à déceler quelques phrases (notamment sur «French to the bones» : «Avec déta-chement, je regarde les trains. Je me sens si bien là que passer dessous me dirait bien. C’est pas la honte fran-chement de s’entendre dire ça.»), la justesse n’est pas toujours au rendez-vous et est, en quelque sorte, sauvée par les effets. Rien d’anormal cependant, car l’ensemble reste cohérent : la musique d’une noirceur axiomatique, limite dépressive (jetez une oreille sur «Sweet dreams» et ses 9 minutes d’une lenteur quasi insoutenable), s’accorde parfaitement avec les quelques imperfections subjectives.

Mélange improbable de grunge et de new-wave (selon les dires de l’intéressé), Jessica93 tape très fort avec ce deuxième album et réussit, en nous l’appropriant, à donner autant l’effet d’une montée immédiate qu’une descente pénible sous crack. Tiens donc, au fait, qu’est-ce qu’on voit légèrement flouté sur la pochette ?

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Vers la fin de l’année 2013, par là, alors que retentit pour la première fois dans mes oreilles l’air accrocheur et le pilonnage rythmique d’»Away», titre inaugural de Who cares dépassant les 8 minutes, je me dis soudainement que je tiens entre les mains quelque chose. Une chose qu’on pourrait communément appelé une claque. Et ça va se confirmer sur la durée. Un album qui entame de la plus belle des manières mon affinité artistique jusqu’à présent inaltérée avec un bonhomme répondant au nom de Jessica93. Un blaze de compte Twitter (ou ce que vous voulez) sous lequel se cache un homme-or-chestre (et non une femme) de Drancy (d’où le 93), muni d’une boite à rythme statique et d’une loop avec quelques effets pour sa basse et sa guitare qui, à tour de rôle, l’enveloppe. Pratiquant avec une touche singulière une cold wave possédée, hypnotique, et shoegaze pour le coup, le bonhomme en est à son deuxième disque au compteur, après un premier LP 4 titres de 37 minutes sorti un an auparavant. Vous l’aurez compris, Geoffroy Laporte aime développer ses idées sur la longueur et jouer en même temps sur l’aspect cyclique du rythme et des instruments pour laisser aux guitares et à la voix une liberté de jeu et de nuances de tons.

En parlant de voix, on ne sait pas vraiment quel message

JESSICA93Who cares (Music Fear Satan, Et Mon Cul C’est Du Tofu ?, T. M. R.)

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Pas facile de les avoir ces artistes quand ils sont en déplacement professionnel, une tournée à travers l’Europe en l’occurrence pour Jessica93... Mais on arrive quand même parfois à se démerder par e-mail pour avoir des réponses au dernier moment. Là, on a un peu fait comme eux : questions rapides qui nous passent par la tête pour réponses rapides qui leur passent par la tête. Réussi ou pas ? A vous de juger !

Geoffrey ou Jessica ?Jessica dans les back rooms, Geoffroy à la caisse d’allo-cation familial, Geoffrey dans les rayons frais des supe-rettes (parce que ça rime) et Geoff dans les bars.

Seul ou en groupe ?Les deux, mais les chansons de Jessica93, je ne les vois jouées que tout seul. Ca me gênerait de devoir dire à quelqu’un de faire exactement telle ou telle partie de basse ou de guitare.

Guitare ou basse ?Les deux aussi. J’aime bien le coté foutoir et agressif qu’on peut donner aux guitares et j’aime bien l’assise et le gros son que peuvent donner les basses.

Fender ou Gibson ?Fender, mais ça c’est ma scoliose qui le dit !

MAO ou machines ?Hum... Mao a tué pas mal de monde, mais Skynet beau-coup plus, donc Skynet. C’est mon coté Slayer.

Who cares ou Rise ?Arf, faut pas dire à ses enfants qu’il y en a un que tu préfères à l’autre. Après, ça fait de la matière pour des «Faites Entrer L’accusé».

Studio ou tournée ?Studio à petite dose parce que c’est marrant mais ça devient vite chiant, et tournée oui à donf, c’est pour ça que c’est cool la musique.

Concert intimiste ou grande salle ?Arf c’est dur... je dirais encore les deux. J’adore le gros son qu’on peut avoir dans les grandes salles, mais je kiffe l’ambiance des concerts dans les apparts ou les pe-

INTERVIEW > JESSICA93

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INTERVIEW

tits bars, l’énergie y est très différente, si tant est qu’on puisse dire qu’il existe une énergie dans les grandes salles de nos jours.

Première partie ou tête d’affiche ?Ca dépend, première partie, tu finis plus vite bourré.

Kurt Cobain ou Robert Smith ?Dans cette ordre là, oui

Joey Starr ou Kool Shen ?Pour tout te dire, je les trouve nul tous les deux, je dirais Booba.

Scène internationale ou française ?J’adore les groupes français ultra underground, la scène d’Amiens par exemple, ou la triple alliance de l’Est. J’adore ce microcosme dans lequel évolue des cen-taines de projets complètement inattendus, des mixes d’influences improbables, et surtout cette énergie qui s’auto-émule, il n’y a qu’en France qu’on trouve cela. Mais je kiffe jouer à l’étranger, j’adore partir à l’étranger découvrir des villes et des scènes.

Magazine papier ou webzines ?Papier, pour ma mère, elle galère sur Internet.

Blonde ou roulée, les cigarettes ?Blonde les jours de fêtes mais, malheureusement, en-core roulée le reste de l’année.

Brunes ou blondes ?J’aime les mecs.

Hoodie ou Djellaba ?Ben, ça dépend à quelle heure !

Lève tôt ou couche tard ?Couche tard oui, et en Djellaba !

PSG ou OM ?Super Nintendo

Charlie ou pas ?LOL

Rêves ou cauchemars ?Les cauchemars ça craint du boudin, après t’es tout moite.

Nouvel album : 2015 ou 2016 ?Pas avant 2016, je pense oui...

Enormes mercis à François de Teenage Menopause et à Geoff évidemment.

Photos: Alexis JANICOT

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l’expression. Pas spécialement adepte du maquillage goth, ledit empereur a déclaré que «Dieu n’existe pas», ce qui lui vaut cette mise en lumière aujourd’hui... A no-ter encore qu’il est le père de Constantin qui deviendra lui empereur après sa victoire du Pont Milvius acquise «grâce à Dieu» et récompensera les Chrétiens avec l’édit de Milan en 313, édit qui laisse la liberté de culte et va permettre au christianisme de se développer rapide-ment dans tout l’Empire. Une histoire un peu faiblarde, d’autant plus que l’artwork ne suit pas, pour le coup, j’aurais apprécié un total look à la Ghost plutôt qu’une image à moitié flou et un livret si peu inspiré. Ou alors que Marilyn Manson joue à fond la carte «Faust» et son pacte avec le Diable puisque c’est encore un des thèmes que Brian Warner amène sur la table...

Et la réponse alors ? Renouveau plutôt qu’enterrement puisqu’un nouveau visage de Marilyn Manson fait sur-face, un visage bien pâle à côté de ses prédécesseurs étant donné qu’il faut oublier tout ce qui est riffs sai-gnants, rythmiques indus destructrices et hargne métal, bienvenue au Manson posé qui célèbre le blues, cherche à bosser les petites ambiances sonores (Tyler Bates se serait-il cru dans un film ?), dépouille ses mélo-dies pour plaire à ta mamie. Certes, le mercantilisme de Eat me, drink me a disparu et on ne peut lui reprocher d’avoir calmé le jeu pour toucher encore plus de monde car artistiquement, on n’est pas dans la mièvrerie non plus (The high end of low) mais je dois être trop jeune pour entrer dans ce nouvel opus qui semble surtout être ennuyeux. Peut-être que les dingues de son et de traficotage y entendront de bonnes trouvailles mais la tonalité d’ensemble ne colle pas avec le Marilyn Manson que j’aime quand il est brut(e) (Portrait of an american family, Antichrist superstar) ou quand il est classe (Me-chanical animals), mais pas cette fois-là où ses rares attaques ne sont pas assez convaincantes pour contre-balancer les promenades bucoliques en mode ego-trip.

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The God of Fuck, Antichrist superstar, Omega, Révé-rend, Villain et maintenant Empereur ! La galerie de personnages liée à Charles Monroe ou plutôt à Marilyn Manson s’étoffe toujours un peu plus quand un nouvel album paraît et qu’il faut faire un peu de buzz autour de Brian Warner. En 2012, on ne savait pas trop s’il fallait l’enterrer ou espérer un vrai renouveau, en 2015, on a certainement une réponse... Et tant pis si elle est «mau-vaise». Comme Marilyn Manson s’est acoquiné avec pas mal de monde et s’est intéressé aux séries TV, il a fait quelques brillantes apparitions dans Californication (puis encore plus brillantes dans Sons of Anarchy), c’est lors du tournage de ladite série qu’il croise Tyler Bates, le responsable de la musique du show est aussi guita-riste, producteur et enchaîne les musiques de jeux ou de films (ils sont plusieurs à lui faire une confiance totale et notamment Zack Snyder pour 300, Watchmen, Sucker Punch...). Les deux compères vont bosser ensemble sur les titres de ce The pale emperor, un nom qui là encore mérite une digression... C’est le surnom que les anglo-phones donnent à Constance Ier, empereur romain du-rant à peine plus d’un an qui est connu pour ses velléi-tés contre les Pictes (les Ecossais donc) et pour avoir eu un teint assez blafard, d’où son surnom de «Constance Chlore» ou «Constance le Pâle» si on cherche à traduire

MARILYN MANSON The pale emperor (Cooking Vinyl)

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tion évidente de sa musique. Parfois apocalyptique, les ambiances de The very idea sont malmenées par des beats froids dont certaines frappes chirurgicales rap-pellent par moments celles de DJ Hidden («Blind») ou nous mènent carrément aux confins du post-hardcore d’Amenra voire de Neurosis avec un «Radial» dont les riffs de guitares lourds et lents tiennent tête à un clavier qui, par ses sonorités et à sa façon, appelle au secours.

Cet album qui évolue dans un univers clairement hos-tile est assez monolithique dans son ensemble et il est plutôt difficile d’en définir son climax, d’y trouver LE morceau culminant et représentatif tant ses titres sont de mèche pour plonger l’auditeur dans un traumatisme auditif. La seule exception vient de la somptueuse et orchestrale «More than half» qui s’ouvre faussement à la quiétude et dont la jolie noirceur s’exprime via des notes de piano dérangeantes dans un brouillard sonore qui n’est pas là par hasard. Tout l’honneur revient donc à Detritus qui, hormis son «songwriting» raffiné et sa production aiguisée impeccable (on reste quand même dans le home studio recording), fait passer son mes-sage avec brio tout en se donnant la peine d’y laisser inconsciemment une petite trace dans les annales de la musique électronique crispante.

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David Dando-Moore a.k.a Detritus est un artiste électro-nique gallois qui sévit depuis le début des années 2000. Il compte six albums à son actif ayant le point commun d’être à la croisée des genres, puisant lui-même ses so-norités dans l’IDM, l’industriel, le breakbeat, le downtem-po, le dubstep, la D&B, le trip-hop et sûrement d’autres, si vos oreilles sont bien affûtées. The very idea, son der-nier opus sorti en avril 2014 sur le très recommandable label berlinois Ad Noiseam (DJ Hidden, Ruby My Dear, Monolog) ne déroge pas à la règle.

The very idea offre une collection de onze morceaux instrumentaux dont le dénominateur commun est une electronica plutôt down qu’uptempo, sombre et cinéma-tique, qui s’efforce de jouer avec des humeurs frôlant la frontière entre tristesse mélancolique et dramatisme anxiogène. Passant d’une ombre à une autre en gardant une indiscutable cohérence, cet album se démarque par son envie irrépressible de forcer le trait par la répétition rythmique crue et par l’émotion profonde. En effet, c’est grâce à l’aide de détails plus ou moins prononcés comme ces notes de piano et nappes de claviers tortueuses parsemant l’œuvre que Detritus marque le propos. Des samples de voix en retrait s’invitent d’ailleurs régulière-ment sur les plages pour contrecarrer la déshumanisa-

DETRITUSThe very idea (Ad Noiseam)

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toutes les recettes propres au genre avec une grande classe car si c’est toujours facile sur le papier, avec les instruments dans les mains, tout le monde n’est pas Mogwai, Explosions in the Sky ou Mono !

Et si Catacombe maîtrise et use des codes de ses mo-dèles, le groupe n’apparaît pas comme un clone, appor-tant un courant d’air frais malgré le poids de certains riffs. Ce traitement un poil métallique de sa distorsion donne du relief à ses compositions qui prennent une autre dimension que si elles étaient restées simplement rock. A ce titre «Shroud» est certainement le morceau le plus réussi de Quidam. La plupart des plages s’étendent sur un peu moins de six minutes, ce qui tranche avec certains qui aiment diluer leurs idées à l’infini, ce temps relativement court permet d’éviter les redites et l’instal-lation d’un éventuel ennui tout comme il force les Por-tugais à ne garder que le meilleur dans leur processus créatif. On est donc gagnant à tous les niveaux.

Très bel artwork, son impeccable, compositions ciselées, Catacombe a tout pour s’imposer comme un nouveau groupe inévitable quand on parle de post-rock, ce n’est pas pour rien que des labels comme Slow Burn Records en Russie (Drawers, EndName...) ou Wolves And Vibran-cy Records en Allemagne (Bolt, Rorcal...) se l’arrachent.

Oli

En 2007, le guitariste Pedro Sobast, basé à Vale de Cambra à une cinquantaine de kilomètres de Porto, enregistre un EP intitulé Memoirs. Recevant un accueil chaleureux, on lui réclame de le jouer live, il trouve alors des potes pour ouvrir pour Nadja. Ce groupe enregistre ensuite un premier album (Kinetic en 2010) avant de changer totalement son line-up en 2011, Pedro s’entou-rant de Filipe Ferreira (guitare), Gil Cerqueira (basse) et Pedro Melo Alves (batterie). C’est cette formation qui livre au printemps 2014 (pour les Portugais, le reste du monde attendra un peu) Quidam, enregistré au Por-tugal et masterisé par Roland Wiegner (Omega Massif) en Allemagne. Depuis ses débuts, le combo ne fait que grandir et qu’allonger la liste des groupes qu’il croise sur sa route (Tides From Nebula, A Storm of Light, My Own Private Alaska, Russian Circles, Deafheaven, Year of No Light...) histoire de peu à peu sortir davantage de son caveau sous-terrestre...

Sous ce sombre nom de Catacombe se terre un groupe à la musique assez lumineuse, Quidam est en effet un re-cueil de six titres post rock qui puisent dans l’obscurité la force d’éclairer l’atmosphère. Alternant avec justesse passages aux tempos calmes et sons clairs et moments plus forts, intensément distordus, l’album enquille

CATACOMBE Quidam (Raging Planet)

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apparaîtront sur le bilan de l’année de Pitchfork mais bref. La suite ? A vrai dire, pas grand chose à signaler si ce n’est que le groupe fait preuve d’une constance certaine dans le songwriting, quitte à paraître un brin monomaniaque et diminuer nettement son impact («Year 500») voir même carrément donner envie de zapper lorsqu’il prolonge les débats et le (dé)plaisir. Et c’est quand ils s’écartent nettement des habitudes pour aller tâter la musique ambiante avec le classieux «Moot-toripyörän matka» et ses 8 minutes de lente digression «Warpienne» que Song for the golden hour rechope l’at-tention de l’auditeur en douceur. Cet album reste néan-moins une bien belle découverte.

David

King Champion Sounds est le projet d’Ajay Saggar, né sur les cendres de son ancien groupe The Bent Moustache, un groupe inconnu de nos services jusqu’alors. Après un premier album en 2013, il publie avec Songs for the gol-den hour la deuxième fournée de KGS. Même s’il est ac-compagné d’une pelletée de musiciens, on ne te cache pas que la participation de G.W. Sok, l’un des chanteurs emblématiques des fantastiques The Ex et baroudeur musical de l’extrême, a grandement attisé notre curio-sité. D’autant plus que la confrontation des univers, a priori aux antipodes musicalement, est une excellente surprise pour les amateurs de musique singulière.

Dès le premier titre, c’est à un The Fall qui aurait été bercé par l’afrobeat auquel on pense : le propos est hyp-notique en diable, dansant et entêtant, les cuivres sont chaleureux et énergiques tandis que la voix de G.W. Sok ajoute un supplément de venin (post)punk et de hargne à ce melting-pot exotique qui allie à la fois soleil tropical propice aux coups de soleil et crachin british propice à la prise d’antidépresseur. Oui, c’est antinomique mais la chimie prend parfaitement. Et commencer un album avec un tube, ce n’est pas négligeable et «Ghetto of eden» en est manifestement un. Enfin, pas de ceux qui

KING CHAMPION SOUNDS Songs for the golden hour (Louder Than War Records)

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d’illustres artistes. Les Toulousains ont fait exactement le contraire, ils ont compris qu’on pouvait assimiler ses influences, nombreuses qui plus est, pour se forger une patte artistique et rendre une œuvre équilibrée, dense et agréablement séduisante : chaque note de guitare, qu’elle soit saturée ou limpide, est écrite sur papier et adéquatement posée ; chaque frappe rythmique, qu’elle soit électronique ou acoustique, est étudiée pour servir les morceaux de manière optimale ; aucune voix ne fait défaut tant le chant harmonieux et sensuel est maîtrisé de bout en bout. Bref, du pain béni pour tout chroniqueur.

Comme souligné avant, Alcaline est un album dont la préoccupation principale de ses géniteurs fut l’équilibre : celui des genres, des tempi, des sons, des nuances, des contrastes. Pour preuve, l’introductive «The roaming souls» débute sur une ambiance rock bluesy farouche qu’on ne retrouvera nulle autre part sur le disque. «Fall by the way side», somptueuse ballade pop qui, là aus-si, n’est aucunement représentative de l’ensemble du disque, même si les compositions voluptueuses sont nombreuses à l’image de «Distance» dont le début fait très Radiohead et qui démontre toute la finesse du jeu de Nicolas à la batterie. La langueur assumée de «Blind», marquée de commotion à chaque coup de caisse-claire, nous hypnotise, les effets du trip-hop dans toute sa splendeur. Idem sur «Invincible» qui troque cette fois-ci l’électronique contre le rock. En résumé, écouter Alcaline revient à recevoir un excellent condensé d’influences vu sous l’angle d’un groupe qui les a mijotées façon grand-mère dans un plat bien présenté et succulent.

Ted

Budapest n’est pas un groupe hongrois mais français, de Toulouse plus précisément. Formé en 2010 et com-posé par des membres du collectif N.Ö.H Prod, à savoir Hervé Bezamat (guitare, basse), Gaelle Minali-Bella et Olivier Bouton (chant, percussions), Irwin Gomez (cla-viers) et Nicolas Billi (batterie), le groupe débute sa discographie par un EP nommé Grenade sorti fin 2011. Il revendique ses influences venues, entres autres, du trip-hop de Bristol (Massive Attack, Portishead) et de la nouvelle scène rock New-Yorkaise (TV On The Radio, Grizzly Bear). En ce début d’année, la formation pré-sente fièrement son premier album, Alcaline, neuf titres captivant estampillés électro pop-rock au sein desquels le chant se partage à deux, l’un féminin, l’autre mascu-lin. L’accord parfait.

Recommandé puis gentiment offert par Cédric d’Under-gang (lui-même auteur de la pochette) lors d’une inter-view, le premier LP de Budapest est ce qu’on appelle simplement et honnêtement un album réussi. Je le précise d’autant plus que trop de formations françaises se brûlent les ailes en voulant faire les choses trop vite, ne travaillant ni leurs instruments, ni leurs identités sonores et devenant malheureusement de pales copies

BUDAPEST Alcaline (La Baleine)

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moins acérés (même quand ils traitent du «Chaos»), le quintet ne fait pas dans la pop ou le melo-punk, si tu veux les comparer à Avril Lavigne, il faut imaginer la canadienne en train de se prendre un ... Raised Fist sans vaseline. C’est dit. From the north est donc plutôt cool (on s’ennuie même presque sur «Man & Earth») au regard des vieilles productions du combo qui n’a pas totalement oublié ses vieilles habitudes et sait encore enquiller du riff et de la frappe («In circles», «Depres-sion», «Unsinkable»), certes, il y a des breaks et une panoplie de passages qui leur permettent de reprendre leur souffle mais ça bastonne comme il faut. Les nostal-giques auraient certainement aimé des titres plus bruts de décoffrage qui balancent du début à la fin non stop dans les enceintes mais il faut se faire une raison, ce n’est plus ce genre de constructions qui sont au menu des Nordiques...

Furieusement punk-rock plutôt que solidement HxC, les Raised Fist n’ont pas baissé les bras et se contrefichent de ce que l’on pense tant qu’on hoche la tête et que ça mouline, moins vite certes, mais ça mouline encore et pour pouvoir intensifier l’ensemble dans les concerts, il faut avoir un peu de réserve...

Oli

Depuis 2009 et Veil of ignorance, les Raised Fist ont clairement baissé le rythme (et pas seulement celui des sorties) pour adoucir leur HardCore à grands renforts de mélodies percutantes et de sons plus clairs, ils se sont largement ouverts et si tu n’écoutes que «Ready to defy», tu comprendras qu’ils ont conservé cette orientation. Mais ce n’est pas pour autant qu’on peut remettre en cause leur intégrité et leur envie de plaire à un plus grand nombre, non, car un groupe qui aurait eu envie de séduire les radios et un plus grand public au-rait certainement bien davantage soigné la production. Parce que pour le coup, ça sonne roots de chez roots, les Suédois ont fait confiance à leur compatriote Roberto Laghi (Transport League, In Flames, Entombed A.D....) et lui ont réclamé un son punk-garage des familles. Ayant passé la vingtaine d’années d’existence, le combo fait confiance à ses titres et sait que ses fans viendront prendre leur raclée en live sans se formaliser sur la pro-preté technique d’écoute dans leur salon. Je ne partage pas forcément cet avis, mais on fait avec...

Plus vieux, plus sages, les Raised Fist ne sont pas pour autant devenus grabataires et sous des allures de rock cool (dés «Flow»), ils ont conservé la rage et l’enga-gement qui les caractérisent. Les riffs ont beau être

RAISED FISTFrom the north (Epitaph)

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tionnaire et penseur libertain, mais également légende du banditisme français avec son ancien complice Jacques Mesrine. Certains de ses écrits issus de son livre «Fractures d’une vie» sont d’ailleurs utilisés dans le titre «Charlie». Nicolas Lafforgue crache l’anti-sou-mission avec une haine palpable et partage son micro par moment avec Milka (Psykup, Agora Fidelio, My Own Private Alaska...) sur «Il suffirait de fermer les yeux» et avec Matthieu P. de Face-B sur «Dans l’ombre». C’est non sans rappeler un petit côté Diabologum (formation de Toulouse également) que le flow scandé quasi théâ-tralisé de Nico s’adapte à merveille à ce rock brut tantôt rageur («Sans jamais vous suivre»), tantôt intimiste («Ma haine, ma colère et ma rage #1»). Chaque ins-trument tient parfaitement son rôle, un équilibre dans lequel la rythmique se veut parfois noisy («La mélanco-lie») tandis que les notes de claviers de Sandra peuvent être capables de tempérer l’atmosphère («Soixante et onze jours») ou au contraire d’accompagner les pertur-bations. Soulignons que la basse profonde et aiguisée de Sylvain, dont les très bonnes lignes font souvent penser à Tool («Le produit de mes erreurs»), est saisis-sante dans ce socle sonore.J’ai toujours eu, en général, un tantinet du mal quand le message et les opinions politiques d’un groupe, qu’ils soient poétiques ou non, prennent le dessus sur l’aspect musical. On a tendance a en oublier le travail fourni par les musiciens et c’est bien dommage car Bruit Qui Court maîtrise très bien son art. Un style pas vraiment com-mun en plus même si, sans vouloir le comparer à La Canaille ou à Zone Libre, le sillon du combat artistique (avec démagogie pour certains) demeure encore bien présent et vivace en France. Bruit Qui Court a rejoint depuis un bail la grande tradition des groupes toulou-sains qui l’ouvrent pour réveiller à leurs manières les consciences (Fabulous Trabadors, Zebda, Sidilarsen), et à l’écoute de son nouvel opus, il n’est pas prêt de rendre les armes.

Ted

Les membres du quintet toulousain de slam-rock Bruit Qui Court ont tous en commun cet esprit de débrouil-lardise si chère aux keupons (Berurier Noir en tête) et autres teufeurs avides d’indépendance totale. Et cette dernière est naturellement accompagnée d’un militan-tisme, d’un engagement, d’un combat que le groupe re-vendique plus que tout au monde. Ce bruit de colère, un peu anar-coco sur les bords, s’est répandu à travers plus d’une centaine de concerts depuis la création du groupe il y a une dizaine d’années, avec de belles rencontres à la clé telles que MAP, UMFM, Les Beautés Vulgaires ou Face-B, avec qui la formation garde encore de très bons contacts. A l’origine du collectif «L’utopie sinon rien», un espace de discussion militant sur les lieux de concerts, les Toulousains ont délivré le 13 octobre 2014 leur nou-veau disque éponyme.

Bruit qui court est le disque de la renaissance du quin-tet. Peu avant sa sortie, ce dernier exigeait de son public d’oublier leur musique pour découvrir leurs nouveaux morceaux. C’est donc avec un line-up remodelé au sein duquel le clavier/samples a repris le rôle qu’avaient les guitares auparavant que Bruit Qui Court met à l’honneur ses textes subversifs. Ces derniers tournent autour des idées de radicalité politique de feu Charlie Bauer, révolu-

BRUIT QUI COURTBruit qui court (Autoproduction)

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rythmiques du math-rock et les plages faussement apai-sées du post-rock.

Que dire de plus si ce n’est que Coastline Truckers est une excellente découverte qui mérite que tu investisses quelques deniers durement gagnés durant ton quoti-dien de moudijk.

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A priori, le nom du groupe et la pochette en mode pois-caille et bateau old-school n’est pas engageante et on songe vite tomber sur un énième groupe de stoner/hard-rock. Puis on se rend compte qu’il s’agit d’une sor-tie Honest House, label belge qui a le nez fin en matière d’indie-rock. Puis en lisant la biographie, on s’aperçoit que ce groupe est constitué de membres d’El Dinah, Taï-fun et Frank Shinobi, soit une somme de musiciens qui ont déjà fait leurs preuves. Ouf, ça va mieux.

Et dès le premier titre, ça va d’autant mieux que Coast-line Truckers envoie un morceau intitulé «Miners» qui synthèse un peu toutes les marottes (Motorpsycho, Modest Mouse, Karaté...) du groupe tout en ajoutant un beau supplément de personnalité grâce notamment à la relation entre les deux basses et la batterie. Et comme le groupe se dote d’une voix immédiatement identifiable (celle des chouettes Taïfun...) et d’un songwriting assez fin, on s’embarque dans la croisière Coastline Truckers sans trop de réticence. D’ailleurs la suite va s’avérer tout aussi plaisante avec un enchaînement de titres («Sai-lors», «Cavalcade») où le groupe développe un net pen-chant pour les ambiances ambivalentes, le propos peut-être à la fois doucereux et très percutant sur un même morceau, et un indie rock à cheval entre les cavalcades

COASTLINE TRUCKERSCoastline truckers (Honest House)

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expérimentations vocales déjà bien entamées sur le précédent disque, et une telle puissance de frappe so-nore conjuguée à cet excès de mélodies vocales laisse toutefois un (très) léger goût amer. Exigeant ? Peut-être. Et alors ? Le constat se renouvelle sur le puissant «The twinsting knife» et c’est vraiment avec «Gonna be a fight tonight» que le disque prend véritablement son envol, avec ses guitares dévastatrices et sa rage dans la voix. Punk rock. Ni plus ni moins. «Body bags» et son mur du son fait également son petit effet, tandis que «Live forever», titre punk psyché (cette basse !) fait office de respiration dans un disque relativement court (36 minutes). «Do you wanna rock» est quant à lui difficile à appréhender, avec ses cloches, son flow de paroles et son refrain efficace mais complètement hors contexte dans ce morceau. Le problème avec ce genre de groupes, c’est qu’on a du mal à suivre leurs tentatives d’ «innovations» tant ils nous ont habitué à aller «tout droit» pour notre plus grand bonheur. Et tandis que le mid tempo «Gettin into drugs» résonne comme du Danko Jones pur jus, le rythme s’accélère avec le puis-sant «Watch you slide» qui n’aurait pas déplu à Lemmy et sa bande. Et alors que la fin du disque approche, je m’aperçois qu’il manque de cette plâtrée de hits dévas-tateurs, francs du collier, te pétant à la gueule dès les premiers accords. Heureusement, après un «I will break your heart» AC/DCien, voilà «Piranha» où Danko crache son venin sur fond de guitares bétons. Nous y voilà !!! Et voilà que Fire music se clôture (déjà) avec le trop clas-sique «She ain’t coming home» et ses quelques sono-rités électro (oui, tu as bien lu !). Hum, pourquoi pas... Fire music n’est pas le meilleur disque de la prolifique carrière de Danko Jones. Loin de là. Mais il reste tout de même un album plaisant, riche en expérimenta-tions (le gars ne fait pas encore de créole ou de jazz, n’exagérons rien), mais peut-être trop diversifié pour être apprécié à sa juste valeur. Car le rock ‘n’ roll, ce n’est finalement que «one, two, one two three four».

Gui de Champi

Putain, qu’est ce que j’aime recevoir des disques d’ar-tistes comme l’ami Danko Jones ! Un mec droit dans ses baskets, en place et passionnant. Et même si Rock and roll is black and blue avait pu en surprendre plus d’un, le Danko de cette décennie demeure un acteur majeur de la scène rock, et un des derniers authentiques bas-tions de la musique du diable. Et l’écoute de Fire music ne me fera pas changer d’avis ! Septième album du trio canadien, la sortie de Fire music (dont la pochette s’ins-pire étrangement de l’avant-dernier Foo Fighters, entre autres) coïncide avec la présentation d’un nouveau bat-teur en la personne de Rich Knox en remplacement de l’excellent Atom Willard (parti rejoindre Against Me!). Mais ce n’est pas pour ça que le groupe a levé le pied. La formule est connue et reconnue : du punk rock ‘n’ roll dans la lignée de ses ainés Motörhead, Kiss, AC/DC et bien d’autres. Et répéter une nouvelle fois que Danko Jones connaît la recette magique pour balancer des hits puissants et ravageurs ne serait que redondant. N’em-pêche qu’il va bien falloir que je vous explique ce qu’il a dans le ventre, ce putain de disque !Comme dans ses précédents opus, l’ouverture est réus-sie, avec une montée en puissance majestueuse dans «Wild woman» et cette succession de riffs prenant à la gorge. Le charismatique leader n’en a pas fini avec ses

DANKO JONES Fire music (Verycords)

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Depuis leurs débuts, même si à l’époque, on n’était moins unanimes, les Stereotypical Working Class ont eu nos faveurs, aujourd’hui, ils font figure de «vétérans de la scène lyonnaise» ou plutôt de «survivants» du début des années 2000. Alors qu’ils nous offrent un nouvel album jouant toujours sur la corde (vocale) sensible, retour avec eux sur ce qui les a amené jusque-là et bien entendu le présent...

Quand vous aviez monté le groupe il y a 15 ans, vous pensiez aller aussi loin ?Franchement, quand le groupe s’est monté, on avait au-cune idée de combien de temps ça durerait et de ce que ça donnerait. On aimait le même style de musique et on se marrait beaucoup tous ensemble, on ne voyait pas vraiment plus loin ! On a eu la chance de pouvoir faire pas mal de choses avec SWC, on est très heureux et fier de notre parcours et on a toujours la flamme !!!

Vous aviez grandi très vite à l’époque, vous pensez que c’est encore possible pour un jeune groupe de se faire une place rapidement ?Le rapport aux médias est différent, mais je pense que d’autres manières, c’est possible de prendre de la noto-riété rapidement, voire même plus vite qu’avant. Avec le net, tout va très vite, regarde Royal Blood qui est devenu énorme en très peu de temps... c’est bien classe d’ail-

leurs ! Après, le «rock’n’roll» dans son ensemble n’est pas vraiment le genre le plus exposé et diffusé dans notre contrée.

Dans la vie de «groupe de rock», qu’est-ce qui vous plaît le moins ? Les galères pour trouver des dates ? Les plans foireux ? Les promesses qui n’aboutissent pas ? Le manque de médiatisation ? Les discussions avec les labels ?Etre dans un camion quand tout le monde a mangé mexicain... (rires) Pour le reste, c’est clair que rien n’est facile. Il y a de très bons moments et d’autres plus diffi-ciles, mais en même temps ça fait parti de l’histoire. Tu sais que le chemin d’un groupe de musique n’est pas fait de pétales de rose sur le sol et de dollars qui tombent du ciel. L’adversité, ça construit et ça force à s’organiser !

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Après, on a eu la chance d’avoir pas mal de gens pour nous aider et faire avancer le projet aussi bien artistique-ment que dans la diffusion de notre musique.

Le nouvel album est chez Klonosphère, pourquoi avoir choisi cette structure ?Klonosphère a travaillé sur les sorties d’albums de Lodz et Sna-Fu qui sont deux groupes qu’on connaît et ils ont fait du bon boulot. A ce propos, RIP Sna-Fu, c’était un groupe énorme en live avec des gars adorables... Bref, ils étaient partant pour bosser avec nous donc ça c’est fait comme ça.

Mettre l’album en écoute sur le web, c’est une évidence ou une obligation ?C’est une des manières d’attirer un peu l’attention. Rendre l’album accessible à ceux qui ne vont pas for-cément aller le chercher. Le rapport à la musique et à la consommation a bien évolué, du fait de la «surinforma-tion» et surexposition permanente, on a peut-être moins tendance à aller chercher les choses, qu’à prendre ce qu’on nous propose ; ce qui est plus facilement à portée.

Vous préférez vivre avec plus de fans ou plus de fric ?Nous on fait ça pour les dollars !!! (Rires) Franchement, plus les gens écoutent notre musique et plus on est content ! Pour faire fortune je crois qu’il y a des créneaux plus porteurs que le rock’n’roll...

Cette pochette est très belle mais elle mérite quelques explications, alors qui en est l’auteur, quelle est l’idée ?C’est Frédéric Chiodelli alias Dref Lasse, qui avait déjà bossé avec nous sur Day after day, qui en est l’auteur. On voulait quelque chose de très aérien et d’assez «ouvert» car c’était pour nous un des aspects impor-tants de l’album. Une notion de paysage à la fois beau, mais rude, avec un personnage qui lui fait face. Un peu comme à la fin de la série «Hulk» ! L’image illustre l’idée d’un monde qui contient de belles choses comme de moins jolies, mais dont il faut savoir accepter l’ensemble car on n’a pas vraiment le choix. Ça développe le prin-cipe du titre de l’album Every cloud has a silver lining où «à quelque chose malheur est bon».

Je suis fan de Pink Floyd et je lui trouve une certaine similitude à A momentary lapse of reason, faut-il que je consulte ? Non, sauf si tes pieds sentent le zizi ou inversement ! (rires) Pour être honnête on n’y a pas pensé du tout, mais c’est vrai qu’il y a quelque chose et Pink Floyd,

au niveau de certaines ambiances, est une vraie réfé-rence aussi pour nous.

C’est la première fois que vous composiez à quatre, ça a changé quoi ?Peut-être une certaine volonté d’aller plus à l’essentiel et de réduire les «fioritures», ça laisse une place plus importante à chacun et on a aussi plus travaillé la com-plémentarité des sons que par le passé. Après, on com-pose toujours de la même manière, à partir d’idées que l’un où l’autre ramène et qu’on développe ensemble.

Sur votre site, il est indiqué «No upcoming dates», y’a quand même des concerts qui arrivent ou c’est vrai-ment dur de démarcher des salles ?Non on arrête les concerts c’est ringard !!! (Rires) Il y a des dates qui arrivent mais on n’a pas prévenu notre we-bmaster ! C’est vrai que c’est plus compliqué de trouver des dates et puis que nous n’avons plus les mêmes dis-ponibilités qu’il y a 15 ans. Mais il y a des choses dans les tuyaux et on annoncera ça bientôt.

On voit de plus en plus de groupes français partir «en vacances» et jouer à l’étranger, que ce soit le Japon, Cuba ou les Etats-Unis comme vous l’avez fait, dans quel pays voudriez-vous renouveler l’aventure ?C’est devenu plus facile maintenant d’aller jouer à l’étranger et il faut reconnaître que la culture rock et alternative est plus présente dans d’autres pays, donc ça facilite bien les choses, ça reste dommage car il y a un vrai public en France mais pas tant de concerts que ça malgré les assos et les motivés qui continuent de se bouger les fesses... comme vous d’ailleurs !!! Les US c’était vraiment quelque chose de génial et ce n’est pas impossible qu’on y retourne qui plus est maintenant qu’on a des amis là-bas !!!

Merci aux Stereotypical Working Class et à Guillaume et Klonosphère.

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Comme tu peux l’observer, l’artwork est vraiment chouette. Et ça, tu ne pourras le voir que si tu te procures Semantics mais le digipak en carton est vraiment un bel objet Semantics est donc un album qui cumule bien des atouts et si tu étais passé à coté du précédent, c’est définitivement la bonne occasion de faire connaissance avec Frank et les autres groupes (It It Anita, Coastline Truckers, Volt Voice...) de ce label (Honest House) qui propose des disques enthousiasmants.

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Frank Shinobi est de retour avec son bataillon de musi-ciens/ninjas prêts à en découdre et des influences (31Knots, At The Drive-In, Fugazi...) qui nous parlent hautement. Le résultat ? Un Semantics où le groupe continue sa marge de pro-gression : le précédent était vraiment chouette, cette nouvelle sortie (via les inénarrables Honest House) est vraiment classe.

Dès le premier titre, c’est une leçon de syncrétisme et de songwriting de haute tenue qui nous est délivrée avec «Moudjahidin de l’amour» (aucun lien avec votre serviteur). Après quelques écoutes, on est vite scotché par ces riffs tricotés, par les ascenseurs rythmiques et cette voix sobre mais efficace. La suite est également de très haut niveau avec notamment un «La ligue des bar-bus» (aucun lien avec votre serviteur non plus) assez dantesque et ses vocalises à l’unisson qui provoquent son effet sur l’épiderme. Semantics se termine sur deux pistes canons dans leur genre : la très courte «Ninja A Ninja B» efficace et cinglante puis «La yourte du pan-da» qui révèle tout le talent du groupe quand il s’agit de composer des morceaux jouissifs.

FRANK SHINOBI Semantics (Honest House)

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bousse l’auditeur que je suis. Des chansons sans pré-tention mais écrites, arrangées et jouées avec amour. On ressent les influences de Jarnac (Headcases, BGS, Glastnost.) et de Seattle, les deux villes étant musica-lement jumelées depuis de nombreuses années (mais chut, c’est un secret. de polichinelle certes, mais un secret tout de même !). La ligne de conduite de MSL JAX ? Assurément se faire plaisir, faire passer les émotions et l’insouciance à travers des chansons authentiques et parfois même naïves mais toujours touchantes. Les gui-tares affûtées et les riffs percutants croisent le fer avec des rythmiques plus pop lorgnant du côté de l’Angle-terre (la voix de Miss Shapenfingers faisant irrésistible-ment penser à ces chanteurs britanniques de la scène pop rock des 90’s, Blur et The Libertines en tête).

MSL JAX en impose car le groupe est difficilement clas-sifiable dans une catégorie précise. Et c’est bien ça qui est bon : MSL JAX est un groupe de rock, tout simple-ment. Un groupe aux multiples facettes, mélangeant les couleurs musicales à la manière d’un arc-en-ciel, mais toujours avec ce talent et cette candeur qui font qu’il est impossible de rester insensible à l’écoute de treize titres compilant les dernières productions de Jérôme et ses amis. À la manière d’un Dionysos encore l(o)f(i)oque, MSL JAX est une vraie bouffée d’air frais dans un pay-sage musical où il faut entrer dans une norme précise pour être apprécié. Du grand art, disponible (bien sûr) chez Kicking Records, le label des gens bien.

Gui de Champi

Je ne vous ai jamais présenté Miss Shapenfingers et, j’en conviens, c’est une erreur. Artiste atypique de la West Coast, membre de Glasnost, bassiste live des dif-férentes moutures de Billy Gaz Station et habitué du festival Jarnac Sound, le petit bonhomme est un com-positeur de talent dans un esprit quelque peu torturé. Avec son groupe MSL JAX (ou Miss Shapenfingers and the Lumberjacks) qui a, lui aussi, connu de nombreux line-up, le bonhomme a déjà à son actif deux albums et de nombreux EP. Pour son troisième album, et comme Jérôme (son vrai prénom, et oui, c’est un garçon, bande de pervers) l’explique clairement dans le livret accom-pagnant la galette, le groupe a souhaité réunir les der-niers morceaux enregistrés sur ses derniers EP avec les derniers bassistes et batteurs s’étant succédés dans le groupe. Vous suivez ? Maintenant que le décor est plan-té, place au son, bon Dieu !

Enregistré « à la maison », le son de ce disque pat-chwork intitulé Several ends of worlds s’en ressent assu-rément, et une fois le décor planté et abstraction faite de la production « légère », les compositions du groupe ré-solument lo-fi rock prennent tout leur sens. Car le talent d’arrangement et d’écriture de Miss Shapenfingers écla-

MSL JAxSeveral ends of worlds (Kicking Records)

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SIxx : A.M. Modern vintage (Eleven Seven Music)

glam rock, juste du rock métallifié et calibré pour plaire aux minettes et aux amateurs de gros sons. Nikki risque de voir encore des paires de seins pendant les concerts du groupe, c’est certain...Onze titres composent le tracklisting de cet album impeccablement produit et efficacement arrangé. De ce point de vue, on a affaire à des pros, pas de discus-sion là-dessus. L’ensemble est parfaitement exécuté, au millimètre avec, pour la première fois, un vrai bat-teur, le groupe ayant délaissé la boîte à rythmes (je t’en foutrais moi !). Évidemment, ça rock et ça roll (un petit peu), ça balance des vocalises léchées (beaucoup), et même si c’est fait pour fonctionner en radio à la manière d’un Linkin Park, ça semble quand même plus authen-tique que ce groupe de parvenus. « Stars », ouvrant le disque, est (déjà) le hit parfait pour le kid amateur de sensations fortes (mais pas trop quand même). Ce qui est intéressant dans ce disque (car mine de rien, il y a des choses intéressantes), c’est que Sixx : A.M. ne se cantonne pas à un seul style, diversifiant ses flèches pour atteindre le centre de la cible (« Gotta get it right » ambiance gospel métoool, « Relief » dans un esprit indus mais light, « Get ya some » ambiance ballade andalouse, le pachydermique « Let’s go », sorte de Mötley Crüe des temps modernes, « Drive » façon quart d’heure américain, mon chouchou « Give me a love » le plus rock’n’roll du disque, « High on the music » façon stadium rock, le country fanfare rock « Before it’s over »...). Ce qui fait de Modern vintage un disque plaisant, à défaut d’être innovant. Les sonorités électroniques ne font pas le poids devant les guitares inspirées de DJ Ashba (le type joue drôle-ment bien mais il ne sera jamais Slash, qu’on se le dise), et les vocalises James Michael sont quasi parfaites (sauf quand le gars se prend pour Prince et Georges Michael sur l’extravagant « Miracle »). Un disque formaté et gavé de tubes en puissance, en-voyé par des vieux de la vieille. Bon boulot, les gars. Vous me permettrez toutefois d’aller me purifier les oreilles avec Too fast for love, hein ?

Gui de Champi

Je suis d’un naturel musicalement curieux. Et quand je déballe du cellophane un compact disc de Sixx : A.M., side (mais plus vraiment) project de Nikki Sixx (bassiste de Mötley Crüe pour les ignorants), DJ Ashba (business-man et guitariste émérite officiant dans la mouture commerciale de Guns ‘N’ Roses) et du producteur et chanteur James Michael, je me lèche les babines, m’at-tendant à un truc énorme. Malheureusement, on est loin du compte. Mais une fois la déception de la première écoute passée, je me dis que finalement, « c’est pas pire » (expression vosgienne chère à mon pote Greg. Ah, on s’en fout ? Pardon.) et même que c’est pas si mal que ça. Explications.Projet datant de 2007 et originalement monté pour être la bande son de l’autobiographie de Nikki Sixx puis d’un livre de photographies, Sixx : A.M., à l’aube d’une retraite commerciale de Mötley Crüe et de l’inactivité pour les quinze prochaines années de G’N’R (date à laquelle paraîtra le successeur de Chinese democracy), se révèle aujourd’hui un groupe à part entière. C’est ainsi qu’est présenté Modern vintage, titre antinomique mais prenant tout son sens à l’écoute d’un disque aux influences rétro et au son moderne. À moins que ce soit le contraire, me diras-tu ? Non, pas vraiment. Point de

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CAVALERA CONSPIRACY Pandemonium (Napalm Records)

En rouge et noir pour Inflikted, en noir et blanc pour Blunt force trauma, on pouvait penser que Max déclinerait à l’infini les couleurs de sa palette avec son sympatoche logo pour la suite des aventures de Cavalera Conspira-cy... C’est bien mal connaître le leader de Soulfly qui a maintes fois montré son mauvais goût et qui nous offre ici un artwork immonde (signé Stephan Doitschnoff qui fait pourtant de très beaux trucs sur les murs de Sao Paulo) pour une pochette assez peu lisible en plus... Car si «Babylonian pandemonium» s’affiche autour de ce char d’assaut, le titre de l’opus se résume à Pandemo-nium, le côté «Babylonian» restant en tête de track-list. Idem pour «Deus ex machina» qu’on lit en haut de la cover et en bas de la liste des titres. On te laisse dissé-quer le bouzin lors d’une prochaine soirée arrosée, on passe à ce qu’on retiendra : une nouvelle bonne fournée de morceaux thrashy !

Nouvel album, nouveau bassiste, après notre fierté na-tionale Joe Gojira Duplantier et Johny Chow, place (en-core) à un poids lourd en la personne de Nate Newton (bassiste chez Converge mais aussi guitariste/chanteur chez Old Man Gloom ou Doomriders) histoire de passer du bon temps en studio parce que sur scène, c’est Tony Campos (Asesino, Static-X, Soulfly mais aussi pigiste

chez Ministry ou Prong !) qui gère le matraquage des grosses cordes. Et quand il s’agit de faire mal (ou mâle), la fratrie Cavalera répond toujours présent ! Si tu as aimé les deux précédents épisodes, tu peux te jeter sur celui-ci : ce sont les mêmes recettes pour la même efficacité. Alors certes, rien de nouveau sous le soleil do Brazil avec un goût prononcé pour les enchaînements de riffs à haute vitesse («Banzai kamakazi», «I, Barbarian»), beaucoup de gras saturé («Scum»), des solos plus ou moins speed («Insurrection», «Deus ex machina»), des ornements venus d’ailleurs (d’Orient pour «Not losing the edge» ou du flamenco pour le péché mignon de Marc Rizzo et un son clair assez classe sur «Porra»). Pas de surprise mais toujours autant de plaisir à headbanger et beugler des trucs en yaourt («Cramunhao») avec Max ou même avec Nate qui chante sur «The crucible» (en plus d’y faire sacrément swinguer sa basse).

Grande récréation défouloir sans prétention (enfin, on espère), Cavalera Conspiracy continue d’être un beau terrain de jeux pour Igor, Max et leurs potes qui, s’ils ne révolutionnent plus rien depuis longtemps sont ici bien moins ennuyeux qu’avec Soulfly..

Oli

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titres agrémentés de leurs atouts personnels. Comme cette clarté cristalline qui se dégage du «Your woman» de White Town repris par Gym, forcément en fonction de ta sensibilité aux tubes choisis, tu auras plus ou moins d’émotion... Le coup d’éclat selon moi, c’est ainsi celui porté par Grifon (side project de We Are Enfant Terrible) qui revisite «In bloom» dans le style de ce qu’avaient fait les Foo Fighters sur le «Down in the park» (de Tubeway Army) pour une compil liée à X-Files. Et malgré toute la douceur déployée par la demoiselle qui chante, toute la force mélodique de Kurt et Nirvana sont bien présentes, c’est à écouter ! Tout comme ces versions revisités de «Life on Mars?» (David Bowie par ORCO) ou de «Let’s go to bed» (The Cure par Weekend Affair), là, c’est le travail sur la musique et la musicalité qui prend le pas sur le chant qui respecte les maîtres... Ce que tous n’ont pas forcément fait, en témoigne le «Colossal youth» (Young Marble Giants) en version chorale enjouée de Peru Peru ou leur «To you» (I Am Kloot). Même refrain pour les Vi-lain qui reprennent «Oh Anna» de The Microphones avec leur légèreté et leurs sonorités.

Ajoutent encore à la track-list Franky Fingers, The Jesus & Mary Chain, Jacno ou Robert Wyatt et tu auras fait le tour de Play it loudly#1_covers. Une bonne idée pour découvrir le travail de combos qui n’ont pas hésité à métamorphoser des morceaux qu’ils apprécient pour le défi que ça représentait davantage que pour attirer la lumière sur leur personne.

Oli

Monté par We Are Enfant Terrible en 2009, le micro-label Play it Loudly Records a fait depuis son petit bonhomme de chemin en aidant au développement d’autres artistes dans la veine électro-pop-rock. Ils sont aujourd’hui regroupés sur une compilation de 11 titres qui fait hon-neur non seulement à ces groupes mais aussi à leurs influences ou plutôt à d’autres groupes qu’ils apprécient parce que dire que Sepultura a influencé We Are Enfant Terrible pourrait être sujet à débat...

Car oui, si l’ensemble sonne bien entendu électro-pop avec de grands renforts de bidouillages et de sons ex-traits de vieilles consoles de jeux, les pensionnaires de Play it Loudly Records ont joué le jeu de la reprise à fond en allant chercher des hits dans tous les registres. Et donc pourquoi pas revisiter le «Refuse resist» du plus célèbre combo métal du Brésil ? Les Lillois ont gardé la dynamique du morceau mais le chantent à leur manière et ont remplacé quelques riffs assassins par des petits sons électroniques de la fin des années 80’, alors forcé-ment ça chamboule mais l’art de la reprise n’est-il pas celui de s’approprier le titre ? Dans ce cas-là, c’est une grande réussite et c’est le même constat pour l’inté-gralité de la compil’ tant les artistes ont réussi à triturer suffisamment les originaux pour en faire de nouveaux

PLAY IT LOUDLY#1_COVERS Compilation (Play it loudly)

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LES DISQUES DU MOM

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presque cathartique. C’est l’anti-dancefloor par excel-lence, en somme. Le dialogue entre les deux artistes est tentaculaire par le télescopage sonore entre d’un côté, des rythmes nourris aux stéroïdes (comme sur l’excel-lente «Thousand yard stare») et de l’autre, des instrus qui tantôt mêlent glitch torturé («All that glitters») et electronica contemplative («The land of grey»). Un voyage auditif en quête du son parfait qui se développe et progresse naturellement avec ses atmosphères ten-dues et orageuses qui deviennent dans l’instant d’après doucereuse (la suite «Folded» - «The land of grey»). Et pour jouer entre les deux, Underhill fait même appel sur le titre éponyme à un spécialiste du dark-ambient, en l’occurrence le bulgare Mytrip, concitoyen d’Ivan.

Œuvre électronique magistrale avec des moments de toute beauté, Prologue est saisissant en tout point et bénéficie d’une production à la mécanique bien huilée (voir le CV de ses membres) quand il s’agit de mar-quer les esprits par le son. On connaissait le potentiel incroyable de la scène berlinoise et du travail de défri-chage du label Ad Noiseam qui abrite une pléthore d’ar-tistes electro chaudement recommandables (Oyaarss, Ben Lukas Boysen, DJ Hidden), mais là, force est de constater que l’on atteint les sommets.Encore faut-il le vouloir pour le croire.

Ted

Petite piqûre de rappel pour celles et ceux qui ont dû en-tendre parler d’Underhill sans en connaître les tenants et les aboutissants : ce «supergroupe» cosmopolite comprend dans ses membres probablement ce qui se fait de mieux à l’heure actuelle en matière de musique électronique hybride et relativement expérimentale et recherchée, soit Dean Rodell (qui sévit aussi dans Ma-chine Code, mais pas que, lorsqu’il n’est pas en solo), Ivan Shopov (le type qui est derrière Cooh et Balkansky) et Tim Elliot a.k.a Current Value, qui joue également dans Machine Code. A l’inverse de Silent siren, premier disque sensoriel sorti en 2012 et salué par la critique, dans le-quel se sont engouffrés les voix de Martina Astner et MC Coppa, Prologue est exclusivement un duo, une commu-nication instrumentale entre Dean et Ivan. Un challenge pour ces deux artistes habitués à faire sauter les foules avec leur dubstep et leur drum & bass survitaminés.

L’intimisme est le premier mot qui traverse l’esprit après avoir avalé consciencieusement chaque note et onde de la première écoute du disque. On pourra se le passer et se le repasser mille fois de suite, il règne un esprit très introverti dans la musique d’Underhill, qui évoque même l’occulte par moments. C’est un disque qu’on ne partage qu’avec soi-même et qui dévoile son penchant

UNDERHILL Prologue (Ad Noiseam)

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BOW LOWHappy hunting undergrounds (TFT Label)

En deux albums et un EP, Bow Low a patiemment creusé son sillon, du punk-rock à la new wave, des petites scènes ornaises aux grands festi-vals (Beauregard, TransMusicales, Printemps de Bourges). Après plus de sept ans d’existence et quelques inévitables changements de membres, les cinq musiciens ont choisi de conti-nuer d’évoluer, sans pression. Aidés par la production très reconnaissable de Nicolas Brusq, déjà à l’origine d’évolutions sonores assez marquées chez certaines formations caennaises (Kim Novak en tête), les aiglons offrent, en quatre titres et quatorze minutes, une déambulation libre et assumée. Empreint de sons reverbés, de clavier 60’s et de percussions, le disque rap-pelle instantanément une poignée de groupes (Arcade Fire, The Blood Arm, The Doors) mais sans toutefois s’atta-cher à un genre bien défini ; en ce sens il est en droite ligne des précédentes sorties du groupe. Le résultat aboutit au final à un EP cohérent, tribal et hors du temps - dont on peut cependant reprocher par moment le petit manque d’impact, qui les place désormais clairement dans un registre moins rock que leurs dernières productions.

Antonin

HAUT&COURTTroffea (Basement Apes)

Un peu plus de deux ans après La vie, son premier EP, Haut&Court s’est remis en selle avec un premier album de 12 titres pour 23 minutes. Oui, tu as bien lu, 23 minutes, donc la durée d’un EP, on est d’accord ? Rien de bien surpre-nant pour ceux qui connaissent déjà ce phénomène de la scène grindcore (pas que, mais quand même) française. Chaque membre du quatuor strasbour-geois a sorti son couteau (et sa bite), l’a aiguisé et mis entre les dents (pas la bite. quoique !) pour te servir la bande son parfaite de ton propre cauchemar. Enfin, ceux de tes voisins surtout, parce que les mecs ne lésinent pas dans la sauvagerie sonore. Ca ne tergiverse pas : quand les riffs et les rythmiques sont pour la plupart cataclysmiques, entre crust et grind, c’est du côté du post-hardcore lent et oppressant que le combo t’achève («Swing» en est un bel exemple). Ah oui, j’oubliais, l’album parle notamment de l’épidémie dan-sante qui s’est produite à Strasbourg en 1518, où de nombreuses personnes se sont mises à danser sans se reposer pendant un mois et ont logiquement fini par mourir. Bon, à l’époque il y avait pas de grindcore, c’était donc moins fatiguant. Sinon vous, vous tenez com-bien de temps en dansant sur Troffea ?

Ted

PUZZLELast EP (Vox Project)

Trois premières pièces sur une démo, trois autres sur un EP, une autre intitu-lée pourtant «Piece 0» sur un split et déjà un Last EP pour présenter «VII» et compléter l’image créée par Puzzle qui pour ce baroud d’honneur puise dans ses deniers pour offrir un vinyle de grande classe. Comment fait-on tenir un morceau sur deux faces ? En le décou-pant, ici, ce «VII» composé de 4 parties aurait d’ailleurs très bien pu se scinder en autant de plages, histoire d’arrondir à 10 pièces. On embarque pour vingt minutes de post rock plutôt contempla-tif d’abord, plus agressif ensuite quand la distorsion fait monter la tension, plus lumineux à l’entame de la face B (avec un son très derniers Pink Floyd). Si on ne devait garder qu’un adjectif, ce serait «beau» tant cette musique est belle. Des riffs chiadés, une dyna-mique épurée qui a le pouvoir de nous ensorceler, si tu aimes les premiers élans de Mogwai (oui, c’est la sempi-ternelle référence absolue, et alors ?) ou que tu as suivi l’élaboration de ce Puzzle depuis quelques années, tu ne pourras qu’être ravi. Alors une dernière fois, fais-toi plaisir et fais-leur ce plaisir, procure-toi ce Last (but not least) EP.

Oli

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ARMS & SLEEPERSSwim team (Fake Chapter Records)

Après 2 grosses années de pause, le duo ambient Arms and Sleepers revient aux affaires avec un album de musique lounge lumineux et coloré. Bande-son d’une soirée où des jeunes ultra-civili-sés sirotent des cocktails sur une ter-rasse en hyper centre en discutant art et cul-ture, l’opus est aussi ouvert que divers. On y découvre des atmosphères agréables où la nervosité colle à l’image des pépites soniques du Chapelier Fou («Swim team»), des mouvements trip hop («Mingus Mapps»), une épaisseur rondouillarde mais trippante («Tetro» et une dynamique qui me rappelle Kavinsky même si je manque claire-ment de références dans ce domaine) comme une légèreté instrumentale («Unbound») et d’autres plus répul-sives comme ce «Hummingbird» aux traficotages redondants ou le chance-lant «Better living thru chemistry». Du-rant ses vacances, Arms and Sleepers a du gribouiller plein d’idées et a cer-tainement eu du mal à en écarter cer-taines, préférant livrer une compilation de leurs envies sonores plus qu’un al-bum construit autour d’une idée direc-trice, reste à savoir si c’est une bonne ou une mauvaise chose... A toi de voir.

Oli

ANTIGONE PROJECTAntigone project (Dooweet Records)

Alors que la vague revival 80’s n’en finit plus d’inonder les productions musicales depuis quelques années, Antigone Project ne fera pas mentir les statistiques. Clairement actuel (donc rétro), le quatuor fondé en 2005 a pris son temps pour proposer son premier EP, certaines compositions datant d’il y a près de 4 ans. Malgré les 129 influences répertoriées sur leur Facebook (véridique), les sonorités électro-rock du projet parisien sont à rapprocher des tauliers du genre, à savoir Depeche Mode («Alphabot»), New Order, voire les récentes produc-tions de Muse («Lux machinae») ou de M83 («The voyager»). L’ensemble n’est pas foncièrement ridicule (la production est bonne, les mélodies se retiennent), même si on peut demeu-rer perplexe face à un «Egolist» chanté en français, à la frontière du kitsch tout de même, bien que sans une once de second degré. L’EP de 4 titres reste également un peu trop pompeux et convenu pour être touchant. À réserver en priorité aux puristes du genre.

Antonin

ZENZILEBerlin (Yotanka)

Retour à l’exercice du ciné-concert pour Zenzile qui, 4 ans après Le cabi-net du docteur Caligari, renoue avec le cinéma allemand des années 20 à travers «Berlin, die sinfonie der Großs-tadt» de Walther Ruttmann datant de 1927. Première «oeuvre d’art total» de l’histoire du cinéma, ce film montre par mouvements les rythmes effrénés de la vie berlinoise jusqu’à son retour au calme la nuit tombante. A l’instar de We Insist ! il y a quelques années, les Angevins ont reproduit sur disque cette fois, d’une manière personnelle et complètement surprenante la bande son de ce film muet. Berlin a forcé le quintet à se (re)dévoiler au point de déconcerter les fans les plus endurcis de ce fer de lance de la scène dub fran-çaise (style dont le groupe ne fait plus beaucoup usage d’ailleurs). Au sein de ce 11 titres, Zenzile n’a jamais autant sonné rock en allant jusqu’à invoquer les fantômes du rock progressif 70’s, voire même du krautrock, avec une liberté instrumentale débordante (solo de guitare, clavier et sax à l’appui). Pas forcément l’album le plus évident à digérer de sa discographie, avec des phases de lassitude admissibles, Ber-lin peut à l’heure actuelle être considé-ré comme la meilleure «bande-démo» que Zenzile pouvait offrir à son public.

Ted

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KILLBODY TUNINGHello ! Welcome, so far...(Hummus Records)

J’aurais presque envie de m’excuser bêtement de chroniquer un groupe, pas mauvais du tout soit dit en passant, qui pratique un style qui, avec le temps, m’a usé puis véritablement ennuyé faute de véritables révolutions ou de nouvelles inspirations. Mais vraiment. J’ai découvert puis aimé le post-rock fut un temps, quand c’était à la mode on va dire. En gros vers la fin des années 90, quand Mogwai défrayait la chro-nique avec ses premiers albums, Slint n’existait déjà plus depuis longtemps. Et puis, sont arrivés progressivement pendant une bonne décennie une ri-bambelle de formations qui ont reprise à bon ou mauvais escient tout ou partie des codes et gimmicks du sacro-saint post-rock. Killbody Tuning sort en oc-tobre 2014 Hello ! Welcome, so far..., les Suisses n’ont pas bouleversé la formule depuis tout ce temps, ça reste très cinégénique et la recherche esthé-tique est indéniable, atteignant parfois le sublime («Italian football legend»). Malheureusement, l’effet sensationnel qui s’en dégage ne fonctionne plus sur moi mais risque de ravir les personnes gravitant (encore) autour de ce genre de rock instrumental où les guitares dessinent les traits de son caractère profondément mélancolique et aérien.

Ted

NINE MILLIONS WITCHES9MW (Dirty Motel Records)

Derrière ce que l’on peut considérer comme une invasion de sorcières se cachent deux frères passionnés de rock. Ludovic (à la batterie) et Damien (au chant et à la guitare) gèrent tout avec quelques amis, y compris le label créé pour l’occasion, et se présentent avec un 5 titres plus acronyme qu’épo-nyme : 9MW. Les Normands envoient des riffs rock avec une certaine faci-lité et jouent avec les effets pour salir leur son et trafiquer une voix certai-nement trop pop pour accompagner les distorsions. Si les gars ont l’air jeunes, propres et pros, leurs titres sonnent old school et crades et je les imagine bien bosser encore et encore pour obtenir cette crasse rock qui sied tant à nos oreilles. Parce que le duo est efficace, chacun des morceaux possède sa petite touche et à chaque fois, ça fonctionne, les mélodies sont agréables, les riffs et les rythmiques bien pesés, on sent que Nine Million Witches a beaucoup travaillé pour sor-tir cet EP et si on a rapidement l’im-pression de déjà connaître ces titres, c’est autant parce que le groupe ne révolutionne pas le petit monde du rock que parce qu’il s’y fait son trou.

Oli

EL ROYCERise again (Black Desert Records)

Deuxième album des Nantais de El Royce (dans la place depuis 2002), Rise again ne fait pas dans la demie-mesure. Les amateurs de heavy rock teinté de punk et de métal seront ravis de faire connaissance (ou de retrouver) le quatuor auteur d’un album à la pro-duction puissante et soignée. Même si les guitares flirtent avec les gimmicks métôl, que les riffs se veulent lourds et ravageurs et que les voix rappellent parfois Ozzy Osbourne («Rise again») ou Alice In Chains (et même Saxon sur «Kings with no crown» !), c’est bien de rock ‘n’ roll dont on parle ici, un rock à classer entre Velvet Revolver et Black Label Society. Bon ok, on est pas loin de la frontière rock/métal quand les mélo-dies imparables (l’excellent «The end of the world», «Grave digger») et les rythmes soutenus («Circus», «Ano-ther day») succèdent aux titres plus lourds et diaboliques («Z town», «Of men and wolves»). Et puis merde, ras le bol des étiquettes ! Les influences brassant des années 80 à notre époque contemporaine sont parfaite-ment digérées, et la mixture servie par les excellents musiciens d’El Royce est un délice. N’est-ce pas là le principal ?

Gui de Champi

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ILYDAENMaze(Dunk!records)

Depuis 2011, les Liégeois d’Ilydaen sortent un CD par an, en 2014, c’est avec Maze qu’on découvre ce trio post-quelque chose entre rock et métal signé chez dunk!records (Kokomo, Sky Architects, Terraformer ... et le festival du même nom). Si musicalement, le combo est très intéressant, il va fal-loir qu’il fasse confiance à un produc-teur pour franchir un cap parce que le son de la disto est vraiment léger... et tranche avec la qualité du son clair qui nous emmène sur les traces d’Agora Fidelio en de (trop) rares occasions. Quoi qu’il en soit, on se laisse aisé-ment embarquer dans leur monde et on apprécie de se perdre dans leur labyrinthe entre pistes et fausses pistes. Les constructions ne sont pas linéaires, il est difficile d’anticiper les directions et on se retrouve parfois chahuté et pris dans une course folle qui n’est pas forcément la nôtre. Et si Ilydaen nous laisse récupérer durant de courts interludes, c’est pour repar-tir de plus belle, presque droit devant, médiator au vent, tels les Explosions in the Sky, Russian Circles ou autres ama-teurs de rock instrumental saturé...

Oli

AFTER SNOWFALLSFading away (Le Bruit Blanc/change Productions)

Initié au milieu des années 2000 par Louis Arlette, multi-instrumentiste, chanteur, producteur et ingénieur du son, After Snowfalls (désormais groupe à 5 têtes) nous livre ici un nouvel EP, fai-sant suite à un premier album, Change, sorti en 2013. D’entrée le disque res-pire l’expérience, tant au niveau de la production que de la composition, et offre 3 titres assez irrésistibles, clas-sieux, actuels et maîtrisés, qui font vite oublier les deux derniers, plus imper-sonnels. L’ensemble sonne clairement pop et comme toute la pop actuelle, on y trouve des influences très variées : la désormais traditionnelle touche électro (dans l’esprit de Air), un fond de folk, des sonorités rock à la Interpol («Fa-ding away»)... Le tout est à rapprocher un peu de ce que peut proposer Mono-grenade de l’autre côté de l’Atlantique («Memories of yesterday»). L’EP reste cependant entre deux eaux, ne bas-culant ni totalement dans la noirceur ni dans une musique franchement joyeuse. C’est à la rigueur le seul petit défaut qu’on pourrait lui trouver. En tous les cas le projet mérite clairement qu’on s’y penche, et qu’on y revienne.

Antonin

LAETITIA SADIERSomething shines(Drag City, Modulor)

Complètement vierge de toute écoute relative à la carrière solo de la chan-teuse de l’influent groupe de post-pop lounge anglais Stereolab, j’attaque son oeuvre par le biais de son troisième ef-fort intitulé Something shines. 4 ans de retard donc, mais dès que résonnent les notes de «Quantum soup» confir-mées par la succession des dix titres du disque, c’est toute ma mémoire Stereolabienne qui revient à la surface. Ca y ressemble assez fort, les mêmes codes d’écriture, la même pop lounge psychée progressive, le même chant si particulier, immédiatement reconnais-sable entre mille. Bref, me voilà mitigé pensant naïvement que Miss Sadier al-lait nous proposer «autre chose». C’est raté sur ce point, mais tout n’est pas perdu, au contraire. Laetitia Sadier porte toujours avec elle, à travers son son-gwriting, ce quelque chose d’angélique et d’admirablement beau, subtil et raffi-né. Une petite fée dont les textes parlés et chantés sur la galette reprennent les idées de Guy Debord et de son illustre essai anti-capitaliste «La société du spectacle» publié en 1967. Je vous l’avais bien dit, Laetitia Sadier n’a pas vraiment changé. A tort ou à raison ?

Ted

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DRY CANMeanwhile (Autoproduction)

La douzaine de titres de Meanwhile signe le retour aux affaires de Dry Can et son duo de voix qui, multiplié à leurs variations de tonalités, nous offre un groupe qui a gardé ses nombreux vi-sages. La voix masculine tire toujours dans la direction du grunge avec une prédilection pour des passages cha-leureux très (trop ?) proches de Pearl Jam («Sort of», «Away»...) tandis que la voix féminine carbure au rock alternatif avec guitares pointues (donc rien à voir avec le Sometimes de Dolly contrairement à ce que l’artwork pour-rait laisser entendre). Dans l’ensemble, le quatuor est moins musclé que sur Something like that (paru en 2006, une éternité) même s’il s’autorise encore quelques agressions (un «Nu start» expédif mais aussi des «Tease» et «Part time job» sacrément distordus). L’ambiance est plus détendue même si le principal défaut de cet opus, qui est aussi sa grande qualité, c’est la somme d’ambiances différentes que Dry Can propose, on a ainsi du mal à se plonger profondément dans ce Meanwhile dont l’hétérogénéité séduit autant qu’elle limite l’acclimation à un univers où on ne sait jamais sur quel pied danser...

Oli

ALGORYTHMIK Savannah (JFX Lab)

Pour son nouvel EP, Algorythmik a choi-si de faire honneur à la savane, à com-mencer par cette très belle illustration d’un ami grec du groupe nommé Kanel-los. Représentant un éléphant - dont on peut entendre le cri sur la très pachy-dermique «Elephants’ rush» - coiffé d’un arbre un peu spécial, celle-ci est à l’image d’un disque au curieux et char-mant méli-mélo sonore. La mise en scène se veut grandiloquente en terme de rythme, Algorythmik porte bien son nom et a mis la sauce : une dubstep / bass music résolument funky qui nous attrape par le colbac pour nous pous-ser sur la piste de danse. Algo n’a pas perdu de son groove mais l’a un peu durci avec le temps et renoue avec sa petite touche en intégrant des élé-ments qu’on ne retrouve pas toujours dans l’électronique comme l’harmo-nica sur «Lion’s disapproval» et les percussions africaines sur «The rebel-lion of gnus and meerkats». Savannah reste néanmoins un EP (trop) propre sur lui qui passera forcément bien en soirée car dansant, des compositions comme il s’en fait de plus en plus dans ce monde où le divertissement doit garder une place importante en ces temps moroses. Merci à eux, donc.

Ted

HARMONIC GENERATOR Heart(Sonic Revolution)

Revenus d’Australie avec un album sous le bras (When the sun goes down), les Marseillais d’Harmonic Generator enchaînent avec un EP de 4 titres enre-gistré chez eux et mixé puis masterisé par Logan Mader (Cavalera Conspiracy, Gojira, Dwail...) et, pour le coup, doté d’un très bel artwork. Côté musique, le ton est moins virulent, le groupe est moins hard et stoner et se rapproche plus d’un rock bien membré sur un tem-po marqué mais loin d’être frénétique. Et si avec la chaleur des sonorités de disto de «Partners in crime», on pense aux grands classiques du rock écrits par Led Zeppelin, le reste du temps, Harmonic Generator continue de tracer sa propre route. Quand ils sortent l’har-monica («I feel fine»), on les imagine bien au fond d’une salle de billards ba-lançant la sauce pendant que les red-necks boivent des bières en matant le cul de la serveuse. Le quintet prévoit de sortir 3 autres EPs qui, au final, doivent former un ensemble cohérent, s’ils ont la même qualité d’écriture que celui-ci, ce sera un plaisir d’entendre le résultat final et de revenir sur ce Heart.

Oli

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EN BREF

LA RUPTURE Dealing with open wounds (Slow Death, Can I Say Records)

La nouvelle scène punk rock française est attrayante. Vraiment. Après The Early Grave, Slice of Life, Buried Option, j’ai le plaisir de te présenter La Rupture from Angers, la terre des braves. Les labels Slow Death et Can I Say Records ont eu la bonne idée de sortir l’automne dernier un 7 pouces du quatuor regrou-pant quatre nouvelles compositions. Mis en boîte chez Fab le Flamboyant au Chipolata Framboise Studio (The Decline, Justin(e)), Dealing with open wounds comprend quatre titres de grande qualité. D’entrée, « Reminder » sent bon les influences américaines complètement assumées. Le tout joué sans complexe et avec une inso-lente maturité. Émotion, puissance et mélodie sont au rendez-vous de cet EP qui mélange morceaux pêchus et entrainants (« Laid down the road », « Reminder ») et titre plus propice à la mélancolie (« A thousand nights out »). Les chants sont au poil (même si l’accent anglais n’est pas complè-tement maîtrisé) et complètent de fort belle manière des guitares omni-présentes et un basse-batterie bien en place. De quoi passer un très bon moment avec un nouvel espoir d’une scène de plus en plus intéressante.

Gui de Champi

STREETS OF LAREDOVolume I & II(Dine Alone Records)

La famille Gibson et quelques potes partagés entre Brooklyn et la Nouvelle-Zélande forment un groupe signé sur un label canadien (Dine Alone Records, demeure de Brendan Benson, Eagulls, The Dodos...) qui donnent dans l’in-die-folk fier de ses racines. Oui, parce qu’avant d’être leur patronyme, Streets of Laredo est un célèbre morceau de country que chantaient les cow-boys au coin du feu. Ce premier album, Vo-lume I & II, rassemble leurs titres parus sur 2 EPs, des titres qui fleurent bon le soleil couchant, le cuir et la saucisse carbonisée. En terres Americana, une fois qu’on a enlevé la poussière, on parle de fille, des potes, de la vie, d’un chez soi qui manque... et si tu pen-sais trouver un groupe «comme les autres», tu te plantes car Streets of Laredo se démarque avec un couple de chanteurs et donc une voix féminine qui apporte temporairement («Ho-meless», «Dear Leron») beaucoup de douceur et évite les clichés machos, le combo propose également des am-biances très modernes par moments («Hey Rose») et s’éloigne donc des modèles du passé sans pour autant les renier («Laredo», «I’m living»). Voilà donc comment a débuté l’his-toire des Streets of Laredo, voyons maintenant où le vent les porte...

Oli

LOUIS JUCKERThe black lake (Hummus Records)

Musicien suisse plutôt issu des milieux extrêmes voire bruitistes, à en juger par ses différentes collaborations (Kunz, Coilguns, The Ocean, The Fawn), Louis Jucker a commencé à publier depuis 2012 ses enregistrements solo (trois EP et deux albums) sur Hummus Records. Le dernier LP en date, The black lake, arrive pile un an après son prédécesseur, Eight orphan songs. Al-ternant chant chuchoté, parlé ou haut perché, le disque renferme quelques pépites assez hypnotiques («Story-tellers», «Six deers on our way home», «Don’t make up monsters») qui brillent d’autant plus par leur économie de moyens. Un univers différent s’ouvre avec chaque titre, tant du point de vue de la production que du choix des instru-ments (guitare, percussions, mélodica notamment). Autre fait intéressant à noter : peu d’artistes viennent en tête à l’écoute de ces huit titres très épurés.Un disque lo-fi et intimiste dont les mélodies torturées résonneront quelque temps dans un coin de votre tête, à condition d’accepter de se plonger quelques minutes (à peine vingt au total) dans les compositions de ce jeune musicien talentueux.

Antonin

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EN B

REF

ZINNSCHAUERHunger. Stille (Kapitän Platte)

Pas franchement évident de chroniquer le nouvel EP de Zinnschauer quand on n’est ni porté sur la langue de Nietzsche ni sur le metalcore mélodique. Car oui, même si l’intégralité de ce disque se veut acoustique, les morceaux ne sonnent pas franchement folk ou pop pour autant, c’est autant leur point fort que leur problème. Fondé à Hambourg en 2012, Zinnschauer a déjà deux EP à son actif (Kalter blick, scharfer zahn sorti en 2012 et Ich bin deine wachsen-den arme en 2013). Sur ce nouveau 8 titres, divisé en deux parties (« V. Hunger » et « V. Stille »), on ne trouve qu’une guitare oscillant entre arpèges mélodiques et power chord énervés, une voix parfois emo et des choeurs hurlés. Une recette ressassée depuis belle lurette en électrique, mais assez inédite dans cette formule. Malheureu-sement, à part sur quelques titres, on a souvent l’impression d’avoir à faire à des morceaux du genre assez classique simplement « débranchés » et non ré-arrangés, qui, sans le contrepoids d’une rythmique lourde, finissent par sonner creux et indigestes sur la longueur.

Antonin

CHINESE ROBOTSHalo future (Mind Riot Music)

Le quintet parisien formé sous l’impul-sion de Pierre-H en 2011 délivre ici son troisième EP, quatre titres masterisés pour la chaleur d’une platine vinyle his-toire de contrebalancer leurs quelques influences cold wave. De manière gé-nérale, le groupe est toujours sur le fil et tel l’équilibriste, il cherche à ne pas trop pencher dans un sens ou dans l’autre, tantôt électro tantôt charnel, soit rock soit pop, tendant vers le calme ou laissant la tension monter, carré-ment noisy ou d’une clarté limpide. Les références comme les ambiances s’entrechoquent et se disloquent dans la marmite Chinese Robots qui peut plaire à pas mal de monde puisque derrière cette profusion de genres malaxés, on a des compositions bien construites, bien ficelées, à la fois riches et pertinentes. A l’inverse, tout ne passera pas forcément dans cet Halo future, pour moi, c’est le morceau éponyme qui est le moins comestible. Enchaînant les sorties et les idées fraîches, Chinese Robots est une belle locomotive pour le micro label Mind Riot Music (Moslyve, Love Supreme Dissi-dents...), il va falloir désormais franchir un cap et sortir un album complet...

Oli

TETEMAGeocidal (Ipecac)

Sorti chez Ipecac, Geocidal doit proba-blement être l’un des derniers projets auquel Mike Patton ait participé avant le grand retour discographique de Faith No More, le groupe qui l’a grandement aidé à être sous les feux de la rampe. Bruits de bouche, susurrements, cris, onomatopées et autre chant monas-tique tordu, on sent que c’est la récréa-tion pour Patton, qui s’éclate comme à l’accoutumée à travers ses divers pro-jets extravagants dont le plus représen-tatif est Fantômas. A la différence que Tetema est moins métal qu’orchestral, et est quasiment l’œuvre que d’un seul homme (saluons l’aide du batteur Will Guthrie) qui, avouons-le, s’est quand même bien pris la tête pour rendre son œuvre protéiforme. On ose émettre l’idée d’un manque de jugeote de Pate-ras d’avoir invité un Patton qui prend pas mal de place dans son projet et qui, étonnement, ne met pas complètement en valeur l’ensemble de son travail de composition et d’arrangements instru-mentaux. Geocidal reste néanmoins un album intéressant à écouter que l’on consomme malheureusement trop vite. La faute à des sauvageries Patto-nesque qu’on aimerait davantage re-trouver sur le nouveau Fantômas qu’ici.

Ted

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EN BREF

ANATHEME Fùjon (Autoproduction)

Gonflée par une prod claire et puis-sante, la musique d’Anatheme al-terne entre petites pluies et grosses tempêtes afin de ne jamais laisser l’auditeur s’endormir, d’autant que le groupe a avec lui l’atout de la conci-sion et parvient à faire progresser ses ambiances sans pour autant prendre des plombes. Chose assez rare pour être signalée puisque les quelques 20 minutes de cet EP passe relativement vite, trop vite, et on est bien tenté d’ap-puyer sur replay à peine l’écoute finie.Hypnotique et parfois addictive, la musique d’Anatheme marche sur le fil du rasoir entre caresses langoureuses et grosses mandales et ce de manière souvent imprévisible et pourtant tou-jours pertinente. Le tout grâce notam-ment a une section rythmique parfois bien nerveuse qui permet aux guitares de décoller sans soucis et de dessi-ner des paysages tout aussi lumineux qu’aériens et venteux. Une recette vieille comme Mogwai certes mais que le groupe sait parfaitement cuisiner. Une cuisine classique mais agrémen-tée de petites épices sympas qui font voyager l’esprit, que ce soit ces titres tirés de langues exotiques ou cette po-chette plutôt bien travaillée, sans pré-tention et qui amène tout de suite dans l’univers d’un Hokusai, d’un Myiazaki.

Elie

SZGloria, 1959 (Autoproduction)

Depuis la relecture de la musique des films Baby boy Frankie entre 2008 et 2010 et Soy Cuba en 2011, Sz a quelque peu disparu de nos écrans ra-dars pourtant affutés quand il s’agit de ce duo. L’étiquette post-rock peut être remplacée par «rock azimuté» tant les ambiances varient tout au long de cet album où l’on trouve des voix autant que de l’électronique, et pourquoi pas sur le même titre, ce «Gloria» divisé entre un chaleureux blues folk grâce au chant de Sammy (Ultra Orange) et des passages tout en bidouillage de petits sons dans la veine du travail du Chapelier Fou. On trouve aussi un chant parlé accompagné de mélodies mélan-coliques et lyriques («Pray ahead»), des chevauchées de guitares qui ne contiennent pas une hargne vocale («Six is sex»), des ambiances électro-pop-jazzy aux charmes tout féminins (avec Virginie de Thallium), des titres où l’expérimentation est poussée à son maximum histoire d’explorer toutes les possibilités («Cheval tripé», «United fruit»)... Si elle peut sembler complexe à appréhender et exigeante en terme d’écoute, la musique présente sur Glo-ria, 1959 est immédiatement sédui-sante et c’est là tout le talent des deux frères Litzler, nous faire succomber avec un travail riche et abouti.

Oli

WATCH YOUR SIx ! Bit by a dead bee (Autoproduction)

Après un Green fairy remarqué, les Watch Your Six ! reviennent avec Bit by a dead bee (un très bon titre qui est aussi celui d’un épisode de l’excel-lente série Breaking Bad). Trop court (3 titres pour un gros quart d’heure de musique), cet EP fait encore hon-neur au Hargne Core mêlant passages rock débridés, envolées screamo san-glantes et sombres riffs post-HxC ultra puissants. Aussi à l’aise dans l’inten-sité (le brutal «Green magic» de 136 secondes) que quand ils diluent les atmosphères (plus de sept minutes entre calme et tempête pour «Death of a whisper»), les Lillois touchent à tout et ne s’imposent aucune règle, seul le résultat compte et à ce niveau-là, on est assez bien servis. Composi-tions en béton armé, ambiances qui s’enchaînent facilement alors que le groupe se déchaîne, superbe artwork, son bien granuleux (signé Romtom-cat (Guerilla Poubelle, Over The Stars, Lopsided))... Watch Your Six ! ne laisse rien au hasard et n’a pas besoin de surveiller ses arrières tant il peut fon-cer droit devant sans se soucier du reste et donc de ce qu’il reste de nos oreilles après avoir écouté en boucle Bit by a dead bee. To be followed...

Oli

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CONC

OURS

CONCOURS IMPETUSDu 15 au 19 avril inclus, l’Est de la France va vivre au rythme de l’Impetus Festival qui cette année envoie encore et toujours du lourd avec Dalek, Moodie Black, Satyricon, The Black Zom-bie Procession et d’autres au Moloco à Audin-court mais encore la grosse soirée d’ouverture à La Poudriere de Belfort le 15 avec Godflesh, Blockheads et Horshk ! C’est pour cette soirée qu’on t’offre deux places ! Pour celle-là et pour celle qui emmènera le festival hors de nos fron-tières (en Suisse) le 18 au SAS de Delemont, là aussi, ça promet car tu y verras Jessica93, Ufo-mammut, Scalper et Oregon Trail !

Alors bonne chance... Tu as jusqu’aux dernières de mars pour participer au concours en ligne ici : http://www.w-fenec.org/concours/index,242.htmlToutes les infos sur http://www.impetusfestival.com

CONCOURS NOT SCIENTISTS Après deux premiers EP, c’est déjà l’heure du pre-mier album de Not Scientists. Le moins que l’on puisse dire, c’est que le groupe n’a pas chômé depuis fin 2013, période à partir de laquelle le quatuor, issu notamment des cendres encore incandescentes de Uncommonmenfrommars, a démarré ses activités. Et pour l’occasion, Delete Your Favorite Records et le W-Fenec t’offrent la possibilité de gagner l’un des deux exemplaires cd mis en jeu. On te conseille de tenter ta chance, car l’album est vraiment bon. Chronique dans le prochain numéro de ton mag préféré, mais il se-rait dommage d’attendre pour te faire un avis sur la question, n’est ce pas ?

http://www.w-fenec.org/concours/index,243.html

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MAOTFA 2014

La rédaction de nos MAOTFA fait en géné-ral l’objet d’une course à la connerie, cette année, la tragédie Charlie a quelque peu calmé nos ardeurs et même en laissant du temps, on n’est pas certain d’être aussi marrant que les années précé-dentes (et les vannes sur Daesh ont été écrites ‘avant’)... On te laisse seul juge. L’intégralité de ces conneries est dispo sur le web, là, tu n’as qu’une partie (la meilleure ?)

MAOTFA 2014 pour quelques très bons albums sortis cette année :

Architects - Lost forever, lost togetherBerline0.33 - The abyss will gaze back

Empty Yard Experiment - KallistiEz3kiel - Lux

Jack and The Bearded Fishermen - Minor noiseJessica93 - Rise

Pord - Wild

MAOTFA 2014 des concerts de l’année : Duchess Says au Nouveau Casino (Paris)

Second Rate (printemps 2014, toute la tournée !)

Alice in Chains au Main Square Festival

Total Victory à La Malterie (Lille)Cult of Luna au Forum (Londres)...

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MAO

TFA

MAOTFA 2014 du plus beau split : Death Grips qui n’avait certainement pas envie de tourner avec Soundgarden et Nine Inch Nails !

MAOTFA 2014 du split qui fait le plus mal au Sna-Cul : Sna-Fu

MAOTFA 2014 de l’album qu’on a préféré attendre qu’entendre : Sonic highways des Foo Fighters.

MAOTFA 2014 de la série qui t(r)ue : True Detective.

MAOTFA 2014 du groupe qui ne connaît que deux couleurs, et encore, pas super bien : Conger! Conger!

MAOTFA 2014 du truc qu’on n’a pas fait exprès mais c’est marrant quand même que l’article sur Hateful Monday soit en ligne le lendemain que celui sur Kill Me This Monday (et c’était même pas un lundi).

MAOTFA 2014 du mec qui confond une lettre avec un chiffre romain : le gars qui se fout à poil lors du Sequed’In Rock x

MAOTFA 2014 du groupe qui va botter des fesses en février 2015 mais que les plus jeunes devront goo-gler pour comprendre le nom : Atari Teenage Riot

MAOTFA 2014 du groupe qui a fait les poubelles avant de bosser : Boogers

MAOTFA 2014 du combo qui a le plus divisé la rédac : It it Anita, alors silicone ou pas ?

MAOTFA 2014 du clip qui tue ta mère pour un morceau qui tue ta mère également : «I’m swimming home» de Pord

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MAOTFA

MAOTFA 2014 du mec qui monte un groupe comme ça pour passer le temps : Chino Moreno pour Crosses.

MAOTFA 2014 de la très moche pochette : Mogwai et son Rave tapes.MAOTFA 2014 de la très moche pochette (bis) : Jessica93 - Rise.

MAOTFA d’or pour l’ensemble de sa carrière en terme de pochette immonde et donc hors-concours pour 2014 : Max Cavalera encore auteur d’un magnifique choix pour Pandemonium. Respect. A noter que depuis son dernier album avec Sepultura (Roots en 96), il n’a commis que des horreurs (l’exception qui

confirme la règle est Dark ages en 2005).

MAOTFA 2014 de la pochette qui n’a pas fait bander François Ier : Sex church de UltracoïtMAOTFA 2014 de la pochette qui a fait bander Gustave Courbet : Sex church de Ultracoït

MAOTFA 2014 du membre de la team qui nous a quitté pour enregistrer son propre album : Aurelio et son Landini.

MAOTFA 2014 du groupe qui fait genre «je débute par un EP autoproduit» : Unswabbed

MAOTFA 2014 du groupe qui cherche un peu les embrouilles avec Daesh : Zoë et son Raise the veil

MAOTFA 2014 du truc improbable il y a 5 ans : voir un nouveau Star Wars avant d’écouter un nouveau Tool. Alors qui gagnera la course ?

MAOTFA 2014 du groupe qui bégaye :

Ez3kiel qui sort une version Deluxe de Lux

MAOTFA 2014 du mec qui pourrit le Noël de sa famille : Joe Cocker

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un refrain entraînant, deux voix complémentaires et des couplets énergiques sont indiscutablement les ingré-dients d’un tube interplanétaire qui deviendra l’hymne du groupe. Et la suite se passe de commentaires : l’ex-cellent «Lost in Geneva», les rapides et efficaces «Fuck me up», Bring me down», les morceaux punk gratinés de pop «Fade away» ou «Kill me before I try» et ces morceaux qui vous tireront quelques larmes comme «Still waiting» (à l’intro très Second Ratienne !) ou «The devil, the unknown...». Savant passer de l’énergie punk à la pop mélodique, Sons Of Buddha rend hommage à des groupes qu’il a écouté lors de ses méditations rock ‘n’ rolliennes. Ils jouent à l’ancienne, pas de production étincelante, pas de milliers de guitares mises en boite, juste trois disciple du rock qui en découdent avec la mu-sique de Satan dans le plus simple appareil : la classe. Ed et Forest assurent des lead vocaux comme s’ils chan-taient ensemble depuis qu’ils sont mômes (hé hé !), les zicos assurent leurs parties comme il se doit, et ça forme un disque sans prétention envoyé par une bande de copains s’échappant de leur paroisses respectives pour faire un disque dans l’urgence, pour rigoler, loin des contraintes en tout genre. Alors évidemment, on ne va pas crier au génie, les Sons Of Buddha n’ont pas inventé le fil à couper le beurre. Et alors ? ce n’est pas ce qu’ils revendiquent. Eux, leur truc, c’est : pas de pression, juste l’envie de se marrer, mettre sur bande des chansons écrites avec humour et passion, et monter dans un van sans rien calculer, juste brancher des instruments pour s’éclater. Le rock quoi ! De la simplicité à l’état brut. Finalement, le groupe aura (sur)vécu dix ans, nous offrant lors de leurs multiples tournées du plaisir, beaucoup de plaisir. Mais ça se trouve, mon informa-teur m’aura encore raconté n’importe quoi, et malgré leurs divers orchestres amplifiés (ou pas), les trois SOB reviendront bientôt aux affaires. Je crois les doigts et il sera temps de crier haut et fort « Alléluia », euh, pardon, Sons Of Buddha !!!

Gui de Champi

A l’heure où tu liras ces lignes, Sons Of Buddha viendra de terminer il y a quelques jours une tournée européenne et même si l’information n’est pas officielle, le groupe aura (définitivement) raccroché. Et pourtant, quand The devil, the unknown... est sorti il y a dix ans, on ne don-nait pas cher de ce side project aux allures de « all star band ». Une bonne occasion de ressortir les vieilleries et de se rendre compte que ce premier n’a pas pris une ride. Au contraire, il est toujours aussi rafraîchissant ! Ed (UMFM), Pat (ISP) et Forest (The Pookies) ont, en dix piges, enchaîné les groupes (Annita Babyface and the Tasty Poneys, Not Scientists, Cannibal Mosquitos, Forest Pooky, Ta Gueule...) faisant revivre épisodique-ment Sons Of Buddha, qui avait pour but de se défouler et de pratiquer une passion commune : le rock à guitare, le punk productif, la musique plaisante, bref, le bonheur. Quelques répètes irrégulières dans le temps et une poi-gnée d’apparitions surprises dans des fêtes plus tard, le répertoire bouclé, le groupe balançait sans complexe un The devil, the unknown... impeccable. Les valeurs de ce disque sont claires et franches : fun, rock, simplicité, efficacité. Treize titres (tiens tiens, et pourquoi pas 666 ?) et tout autant de tubes. La preuve ? Prenez le premier titre de cet album sobrement intitulé «Sons of Buddha» et vous aurez la preuve vivante qu’une intro impeccable,

IL Y A 10 ANS : SOBThe devil, the unknown... (Dirty Witch Records)

IL Y

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NExT

NExT> MARS RED SKY

KLONE BABY CHAOS

BOTIBOLULAN BATOR

HOLDING SAND CANCER BATS

COWARDS UFOMAMMUT NOT SCIENTISTS POND JOSEPH D’ANVERS ...

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DANS

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Si tu as été lecteur de rock sound, de punk rawk, de fanzine indé ou si tu écoutes des groupes de punk rock formés dans les années 2000, le nom de Franck Freijnik ne t’est pas inconnu. Discret mais efficace, rencontre avec un activiste pur et dur...

Quelle est ta formation ? Il y a longtemps de cela, j’ai obtenu un BEP Comptabi-lité, puis un BAC Pro Vente-représentation, mais aucun de ces diplômes ne m’a servi par la suite. En revanche, lors de mon service civil... j’ai opté pour l’objection de conscience à l’époque où le service militaire existait encore, j’ai découvert la Publication Assistée par Ordina-teur, ce qui a confirmé et développé mon attirance pour la mise en page, la création d’images, les magazines, la presse. J’ai donc suivi une formation P.A.O., ce qui m’a amené au journalisme !

Quel est ton métier ? Durant dix ans, j’ai travaillé dans la presse musicale où j’ai porté plusieurs casquettes : journaliste et se-crétaire de rédaction chez Groove (mensuel hip hop) ; journaliste et secrétaire de rédaction chez Rock Sound (mensuel de rock) et Hard ‘n’ Heavy (mensuel de metal) ; rédacteur en chef de Punk Rawk (trimestriel punk). Ensuite, journaliste-pigiste-maquettiste free-lance pour ces mêmes magazines et quelques autres de la même sphère culturelle. Puis, j’ai été éditeur dé-légué aux Éditions A.O.S.P. (Rock Sound, Hard ‘n’ Heavy et Punk Rawk again) ; rédacteur en chef et maquet-tiste pour Addictif (un gratuit édité par Le Goéland).

Aujourd’hui, je n’ai plus de métier, je chôme.

Quelles sont tes activités dans le monde de la musique ? J’ai arrêté de gratter pour la presse musicale, mais je continue d’œuvrer, souvent dans l’ombre et de manière anonyme, dans le monde de la musique. Depuis 10 ans, je m’occupe d’un (micro) label, Slow Death, qui a sorti une quarantaine de disques parmi lesquels certains de Dead Pop Club, Les Thugs, Time To Burn, Maladroit, The Helltons, Adolescents, Jack And The Bearded Fishermen, Red Gloves, Greedy Guts, Protex Blue, Crippled Old Farts, Slice Of Life... La liste complète est sur le site de Slow Death.Slow Death, c’est aussi le nom d’un fanzine à parution très aléatoire dans lequel je cause de ma vie trépidante d’amateur de rock underground. J’ai pas sorti de nu-méro solo depuis longtemps, mais un split zine à trois (Mickson de Shot Down, Thierry de Rotten Eggs Smell Terrible) vient de paraître. Toujours sous le nom de Slow Death, j’organise parfois des concerts à Paris (Teenage Bottlerocket, Stupids, Napoleon Solo par exemples), et je donne, plus fréquemment, des coups de main à des associations comme Horca et Guerilla Asso. Je gère éga-lement Panic At The Distro, un bazar composé de distros

DANS L’OMBRE>FRANK FREJNIK

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DANS L’OMBRE

et labels DIY qui se tient généralement en parallèle de festoches organisés par Guerilla Asso. Graphiquement parlant, je prête main forte à des groupes et des labels pour leur pochette de disque (Dead Pop Club, Maladroit, Helltons, Les Shériff, Guerilla Poubelle, Napoleon Solo...), leur affiche, leur flyer, des motifs de t-shirts ou de stickers. Il m’arrive de créer des goodies comme des figurines papier pour Dead Pop Club, l’album Panini de la compilation Emo Glam 666, et récemment une église en papier à monter et à brûler pour Guérilla Poubelle. J’accompagne aussi des groupes en tournée (Dead Pop Club, Maladroit, Guerilla Poubelle) en tant que roadie / chauffeur / merch guy.Tout récemment, j’ai monté Nineteen Something en com-pagnie d’Eric Sourice (Les Thugs), «label indépendant et distributeur numérique de rock souterrain», dont le but est de rendre disponible, en digital mais pas que, les enregistrements de groupes français disparus avant l’arrivée internet. Des formations des décennies 80 et 90 comme Dirty Hands, Scuba Drivers, Shaking Dolls, Thompson Rollets, Parkinson Square, Drive Blind, Real Cool Killers, Les Rats, etc... (la liste est interminable). On trouvait dommage que ces groupes, qui ont consti-tué une part importante de la scène rock indépendante hexagonale, soient absents du web, en tout cas sur les sites légaux de streaming ou de téléchargement. Ce ne sont peut-être pas des groupes très connus ou qui étaient fortement médiatisés à leur époque, ils n’étaient probablement pas de gros vendeurs ou des référents du rock en France, mais pour moi, ils constituent indénia-blement un pan de l’histoire du (punk) rock français et à ce titre, ils méritent d’être accessible à tous.On vient de rééditer en vinyle deux albums des Thugs (IABF et Still hungry). On a sorti les albums des Thugs en numérique. Prochainement ce sera le tour, en numé-rique également, de Casbah Club, Dirty Hands et Thomp-son Rollets. Suivront probablement des groupes comme Scuba Drivers, Sixpack, Garlic Frog Diet.

Ça rapporte ? Ça eut payé, comme disait Fernand Reynaud. Notam-ment lorsque j’étais salarié dans la presse profes-sionnelle. Mais aujourd’hui, je fais pratiquement tout à titre bénévole (ou en cassant les prix lorsqu’il y a rétribution).

Comment es-tu entré dans le monde du rock ? Vers 12/13 ans, Iron Maiden et le heavy metal m’ont fait découvrir un autre rock que celui que mes parents écoutaient. Avec lui, je suis devenu un consommateur actif plus qu’un auditeur. Quelques années plus tard,

j’ai découvert le punk rock. C’est avec lui que je suis passé de consommateur à acteur. De 1990 à 1995, j’ai publié un fanzine, Violence, qui a non seulement occupé une partie de ma folle jeunesse mais aussi préfiguré ce que je ferais, professionnellement parlant, un peu plus tard. En éditant un zine, tu apprends plein de choses : écrire des chroniques, traiter de l’information, conduire des interviews, concevoir une mise en page, entretenir des relations «professionnelles», etc. Et ce, sous cou-vert de débrouillardise et d’auto-gestion totales. C’est justement ce que cherchaient les Éditions Freeway, à l’époque éditeur de Rock Sound et Groove, qui m’ont embauché après ma formation de metteur en page, fin 1996.

Une anecdote sympa à nous raconter ? Dans le numéro de décembre 1998 de Hard ‘n’ Hea-vy, j’ai mis le EP autoproduit de Pleymo en «Démo du Mois» ! Sympa, non ?

Ton coup de coeur musical du moment ? Allez, trois pour le prix d’un ! Run, Forever (Pittsburgh, USA) : Découvert live dans un rade à Orlando, Floride. Pour moi, la plus grande découverte depuis Jawbreaker. California X (Amherst, USA) : Leur second album vient de paraître, mais je conseille le premier (self titled), le meilleur revival grunge de ces dernières années. Cam-paign (Atlanta, USA) : Groupe quasi inconnu. Pourtant son punk rock est d’une efficacité redoutable.

Es-tu accro au web ? Pas vraiment. Je m’en sers uniquement pour des choses précises. Jamais de vagabondage de site en site. Je dois même avouer que lorsque je me retrouve, l’âme en peine, devant la page Google, je ne sais pas quoi taper dans l’espace de recherche. Du coup, je ferme le naviga-teur et je vais regarder ce qui se passe dans la vraie vie.

A part le rock, tu as d’autres passions ? Probablement. Mais rien d’aussi prenant que la musique. C’est dommage, oui. Mais c’est comme ça.

Tu t’imagines dans 15 ans ? Probablement, pareil qu’aujourd’hui. Ou éventuellement mort si je continue de me déplacer en vélo à Paris.

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